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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 028 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 27 octobre 2016

[Enregistrement électronique]

  (1300)  

[Traduction]

     Bon après-midi à tous
    Avant de commencer notre étude sur les yézidis et d’autres minorités religieuses et ethniques en Irak, il y a quelques points à aborder avant mardi.
    Nous souhaitons donner avis de notre session d’urgence et envoyer un communiqué de presse. Nous avons besoin du soutien théorique de tous les membres ici présents afin qu’ils donnent leur accord à ces mesures. Ces communications seront préparées puis distribuées à tous. Sommes-nous d’accord que c’est ce que nous souhaitons faire?
     Monsieur le président, la date de mercredi que nous...
    La session d’urgence aura lieu à la réunion du mardi du Comité.
    Mme Hardcastle.
     Je pensais que nous allions faire cela un mercredi.
    Nous en avions parlé et ce qui est arrivé avec notre calendrier, c’est que...
     Ce n’est pas la réunion sur Alep, ça, c’est mercredi.
    Oui celle sur le Tibet est le mercredi. Je pense que nous sommes parvenus à un accord.
    Je souhaite vous présenter nos deux témoins des Affaires étrangères, Mme Emmanuelle Lamoureux, directrice, Direction des relations avec les pays du Golfe pour Affaires mondiales Canada; et Mme Giuliana Natale, directrice de l’Inclusion et de la liberté de religion. Bienvenue.
    Nous vous remercions d’être ici aujourd’hui avec nous au tout début de ce qui est, à mon avis, comme nous l’avons constaté cette semaine au Parlement, quelque chose qui nous bouleverse, tous autant que nous sommes. Cette étude sera certainement un important élément d’information sur cette région.
    Vous êtes les deux premiers témoins. Si vous pouviez prendre une dizaine de minutes, ce serait fantastique.
    Mme Lamoureux.
    Je vais donner la première partie de ma présentation en français et la deuxième partie en anglais. Il s’agit en effet d’un sujet très important qui est aussi d’actualité.

[Français]

     On m'a demandé aujourd'hui de m'adresser à vous sur la question des droits de la personne des yézidis, des chrétiens et d'autres minorités religieuses et ethniques en Syrie et en Irak.
    Votre sous-comité a récemment été chargé d'étudier la situation des yézidis, qui a fait l'objet d'un débat la semaine dernière à la Chambre des communes.

  (1305)  

[Traduction]

     Je suis désolé nous avions un problème avec la traduction.
    C’est réglé. Veuillez poursuivre.

[Français]

     D'accord, merci.
    Je voudrais d'abord passer en revue certains événements qui se sont produits récemment en Irak et en Syrie pour vous donner un aperçu de l'état actuel des droits des minorités religieuses dans la région. Par la suite, je vais décrire les mesures qui ont été prises par le Canada et par la communauté internationale pour intervenir devant cette situation.
    L'Irak et la Syrie comptent depuis longtemps de nombreux groupes ethniques et religieux. Les Arabes et les Kurdes chiites et sunnites ont vécu aux côtés de plus petites collectivités représentant environ 10 % de la population irakienne. Un bon nombre de ces collectivités vivent en Irak depuis plus de mille ans et ont même joui d'un certain degré de protection par le passé.
    Cependant, au courant des dernières années, comme on l'a vu, plusieurs groupes minoritaires ont été victimes de persécutions et de déplacements forcés. Plusieurs de ces groupes vivaient dans des régions où des milices émergentes se livraient à des luttes de pouvoir. Sur le plan géographique, je pense qu'il est important de mentionner que la région de Mossoul, dans le Nord de l'Irak, est une des régions qui comptent la plus grande diversité ethnique et religieuse. C'est l'endroit où la campagne militaire est en cours et qui est encore en partie occupée par Daech.
    Après des années de violence et de déplacements, les données les plus récentes semblent indiquer que ces groupes représentent maintenant moins de 3 % de la population irakienne. Je mets un bémol ici, il y a très peu de données fiables à cause du grand délai qui s'est écoulé depuis le dernier recensement.
    Ainsi, selon les estimations officielles, le nombre de chrétiens est passé d'environ 500 000 personnes, en 2003, à 80 000. Ce chiffre est même considéré élevé par certains chefs religieux.
    On se rappelle que le Canada a accueilli, au courant des dernières années, environ 23 000 réfugiés irakiens. Évidemment, il y a aussi l'opération qui vise à accueillir des réfugiés syriens qui est en cours. Certaines de ces minorités sont représentées parmi les groupes qui ont été accueillis.
    L'Irak n'a pas encore mis en oeuvre un modèle de gouvernement qui permette de bien équilibrer le pouvoir entre Bagdad, les gouvernorats irakiens et les autres autorités en place. Le pays compte environ 31 principaux partis politiques, ce qui montre l'importance des divisions internes entre les groupes sectaires et tribaux. Les tensions entre ces différentes factions risquent de nuire à l'unité politique très fragile en Irak. Le problème n'ira qu'en s'accentuant lorsque la campagne qui vise à libérer Mossoul prendra fin et que les communautés ne devront plus coopérer entre elles. La colle qui les tient actuellement ensemble — Daech — va se dissoudre tranquillement et la situation risque de s'aggraver.
    La diversité ethnique et religieuse en Syrie est aussi établie depuis longtemps. De 70 à 75 % de la population est sunnite, mais elle est aussi composée de 13 % de musulmans non sunnites ainsi que de groupes chrétiens et druzes. Il y a aussi un nombre beaucoup plus limité de yézidis qu'on trouve principalement en Irak.
    La guerre civile actuelle est aussi en train de perturber la situation démographique en Syrie.
    Malgré le fait que de nombreux groupes minoritaires ainsi que des Arabes et des Kurdes sunnites et chiites fassent depuis longtemps face à des discriminations, la situation s'est évidemment aggravée ces dernières années avec l'arrivée de Daech. Un des principaux facteurs qui touchent les collectivités irakiennes et syriennes est l'absence de liberté de religion et de croyance dans les territoires contrôlés par Daech.
    Évidemment, au-delà de la liberté de religion il y a les problèmes de persécution. Nous en sommes bien conscients. Les minorités religieuses sont donc forcées de s'acquitter d'une taxe ou de se convertir. Certains membres des communautés chiites ou sunnites, sont jugés apostats, ou « kuffar », et sont donc susceptibles d'être victimes d'actes de violence perpétrés par Daech.
    Personne n'est réellement à l'abri. Les crimes qui ont été commis contre les yézidis et les autres minorités incluent les assassinats, l'esclavage sexuel, la torture, les transferts forcés, les conversions forcées. Des enfants yézidis ont été séparés de leur famille. Il y a aussi la prise en otage de certains chrétiens syriens pendant de longues périodes. Des combattants ont marié de force des femmes sunnites dans des villages qu'ils contrôlent. Ces groupes étaient déjà minoritaires et très vulnérables avant 2014. Ils le sont encore plus maintenant.

  (1310)  

     Les répercussions du règne de terreur de Daech se font sentir maintenant, mais se feront sentir encore au cours des prochaines années.

[Traduction]

     Il est important d’insister ici sur le fait que nous parlons de hauts degrés d’horreur. Aucun groupe n’a été épargné.

[Français]

    Je vais maintenant vous donner un bref aperçu des mesures que prennent le Canada et la communauté internationale pour améliorer la situation de ces groupes.
    Dans l'immédiat, la priorité est de fournir aux survivants de ces graves violations et abus l'aide dont ils ont besoin, en particulier les femmes et les enfants victimes de violence sexuelle et d'esclavage, qui ont besoin d'une aide psychosociale et médicale d'urgence. Depuis 2014, le Canada appuie des partenaires humanitaires en Irak, y compris le Fonds des Nations unies pour la population et d'autres organisations non gouvernementales, afin d'offrir cette aide aux survivantes de violence sexuelle et sexiste.
    Nos partenaires ont mis en place des centres dans des camps, des communautés d'accueil, partout en Irak, pour offrir aux femmes et aux filles cette aide, des soins spécialisés de santé, des services juridiques et d'autres services. Le soutien qui est fourni aux femmes et aux filles qui sont touchées par cette violence va rester un élément central de notre aide humanitaire en Irak dans les années à venir.

[Traduction]

    Dans le cadre du programme des opérations de stabilisation et de maintien de la paix, le Canada soutient également le Center for Justice and Accountability, le CJA, dans ses efforts pour préparer la procédure pénale contre Daech pour violations du droit international humanitaire et pénal.
    Vous avez probablement entendu parler de ce programme. Nous le considérons comme très important. Le CJA a monté des dossiers juridiques axés sur les actes criminels commis par Daech en Syrie et en Irak, notamment des cas d’esclavage sexuel. En Irak, le CJA a renforcé la capacité d’enquête du groupe des enquêtes et des poursuites sur les crimes de guerre du gouvernement régional du Kurdistan. Certains tribunaux dans la région du Kurdistan en Irak ont également commencé à entendre des cas liés à ces crimes en vertu des lois antiterroristes d’Irak.
    En même temps, nous cherchons des moyens de fournir de l’aide pour le renforcement des capacités afin de soutenir divers éléments du secteur de la justice irakienne, car nous savons que certains criminels de Daech seront jugés par des tribunaux locaux. Pour l’instant, le ministre des Affaires étrangères irakien a indiqué que l’Irak a besoin d’aide pour renforcer sa capacité de recueillir et de conserver des éléments de preuve, plus particulièrement d’outils d’investigation informatique et d’outils utilisés en justice pénale. C’est une demande que nous examinons.
    Le gouvernement canadien a également pris acte des conclusions internationales qui indiquent que Daech continue de perpétrer des actes de génocide contre les yézidis. Ce sont des faits que vous connaissez déjà compte tenu des débats récents.
    En juin, le ministre des Affaires étrangères a admis qu’un rapport de l’ONU préparé par la Commission d’enquête internationale indépendante des Nations unies sur la République arabe syrienne qui a reconnu les actes dirigés spécifiquement contre les yézidis et le fait que ces crimes représentaient un génocide.
    Le ministre avait écrit deux fois au Conseil de sécurité à New York, soit en mai et en juin de cette année, pour demander que celui-ci prenne des mesures dans la question des crimes commis par Daech. Il a demandé qu’un mécanisme soit établi pour faire enquête sur les rapports de violations des lois internationales par les membres irakiens et syriens de Daech, afin d’identifier les auteurs de telles violations et de les en tenir responsables.
    En septembre à New York, le ministre a également participé à un événement à l’Assemblée générale des Nations unies, UNGA, sur le sujet de l’imputabilité de Daech. Cet événement a contribué à sensibiliser davantage les intervenants de la communauté internationale sur la nécessité de tenir Daech responsable de ses crimes. Un grand nombre d’autres ministres des Affaires étrangères et des hauts fonctionnaires de l’ONU ont également participé.
    Comme vous le savez, mardi, le gouvernement a aussi donné son appui à une motion à la Chambre des communes qui reconnaît le génocide commis par Daech contre les yézidis, et reconnaît qu’un grand nombre de femmes et de filles yézidies sont encore détenues en captivité comme esclaves sexuelles. La motion demandait également la mise en oeuvre des recommandations formulées dans le rapport de l’ONU que j’ai mentionnées et de plus, il s’engage à fournir un plan pour offrir l’asile aux femmes et aux filles yézidies dans les 120 jours.
    Le gouvernement canadien n’est pas le seul gouvernement à insister sur le besoin urgent de prendre des mesures. Le Royaume-Uni, plus particulièrement, insiste pour que des mesures soient prises dans le cadre de l’ONU. Ses représentants ont demandé la création d’un poste de Représentant spécial de l’ONU dans le cadre d’un mandat fourni par le Conseil de sécurité afin de mener une campagne en appui aux efforts nationaux et internationaux, visant à habiliter les survivants.

  (1315)  

     Au cours des prochains mois, nous allons continuer à travailler en étroite collaboration avec le Royaume-Uni et d’autres intervenants afin de créer un groupe actif principal d’acteurs et de faire la coordination entre les gouvernements et les autres organismes pertinents.
    Je veux également signaler que la participation de l’Irak à ces efforts est essentielle et que c’est pour cette raison que le Canada soutient les efforts du gouvernement irakien visant à améliorer la gouvernance dans ce pays, à renforcer les institutions, et à atténuer les tensions ethniques et religieuses.
    Daech a ciblé toutes les communautés ethniques et religieuses d’Irak et de Syrie, ce qui inclut les yézidis, les chrétiens, les Turkmènes, les membres de la communauté sabéenne mandéenne et d’autres groupes. Il a fait subir des horreurs à ces groupes, y compris l’utilisation dans certains cas d’armes chimiques. Les yézidis ont subi des pertes terribles et particulières qui exigent une attention spéciale. En même temps, la communauté internationale doit continuer à aider les communautés irakiennes et syriennes qui sont visées par Daech pour qu’elles puissent surmonter leurs pertes et reconstruire une économie et une société viable, ce qui exigera de plus importants engagements envers la justice et la réconciliation.
    Merci. Je peux maintenant répondre aux questions.
    Je vous remercie de votre témoignage. Votre présentation est certainement une bonne manière de démarrer la séance. Dans cet esprit, je vais passer la parole au député Sweet qui va poser la première question.
    Madame Lamoureux, je vous remercie de votre témoignage. Ce fut fort apprécié.
    Je voudrais associer deux des éléments que vous avez mentionnés dans vos observations préliminaires et vous poser une question à cet égard. Vous avez mentionné dans votre conclusion que la participation de l’Irak est essentielle, et je suis d’accord avec vous. Plus tôt cependant dans vos observations, vous avez mentionné qu’il y a déjà des dossiers qui sont traités par le gouvernement régional du Kurdistan — pas seulement traités, mais qui font l’objet d’une poursuite — relativement à ces crimes. Faudrait-il s’inquiéter du fait qu’ils commencent déjà les poursuites, et ce, en l’absence de la communauté internationale, en ce sens que certains de ces crimes vont certainement avoir été perpétrés par des personnes qui ont joué un rôle déterminant dans la mort, la torture, l’incarcération et l’esclavage d’un si grand nombre? À mon avis, dans une affaire pénale de cette ampleur, il devrait y avoir un mécanisme de responsabilisation au plan international.
    Oui il y a en effet divers mécanismes de responsabilisation à notre disposition pour engager des poursuites contre Daech et les crimes commis. En collaboration avec d’autres membres de la communauté internationale, dont l’Irak, nous examinons les divers mécanismes à notre disposition. L’un de ces mécanismes est la Cour pénale internationale. Il existe d’autres mécanismes, notamment des tribunaux hybrides, qui sont des tribunaux internationaux qui seront constitués précisément dans le contexte de la situation en Irak et en Syrie. Il y a également des tribunaux locaux.
    Il y a des pour et des contre pour chacune de ces options. La Cour pénale internationale possède une certaine légitimité et le recours à cette cour ferait passer ces affaires au premier rang des priorités internationales. Un élément que nous souhaitons prendre en compte, quand nous réfléchissons à un recours possible à la Cour pénale internationale, c’est le fait qu’ainsi, nous ne pourrions poursuivre que des petits groupes de personnes de haut niveau très visibles qui sont responsables de ces crimes. C’est pourquoi nous voulons analyser toutes nos options, y compris les tribunaux locaux. Les tribunaux locaux sont importants dans la mesure où le pays en soi a beaucoup souffert. Il y a en effet une certaine valeur dans le fait que ces criminels pourraient être traduits devant la justice en Irak, mais le système judiciaire irakien a besoin de beaucoup de soutien. Ces institutions sont plutôt nouvelles, comme vous les savez. L’Irak a connu plusieurs guerres successives, et a eu peu d’occasions pour bâtir ses institutions. Cela aussi fait partie du programme envisagé relativement à la gouvernance et au soutien du système judiciaire.

  (1320)  

    Avons-nous des partenaires internationaux qui assistent actuellement à ces activités et aux procès qui se déroulent? Le gouvernement régional du Kurdistan collabore-t-il, et permet-il à des professionnels du droit du Canada, du Royaume-Uni et d’autres partenaires d’y assister?
     Je devrai vous revenir sur cette question. Je peux cependant affirmer que je n’ai aucune information à savoir que des professionnels canadiens assistent à ces procédures. L’une des raisons est que nous avions, jusqu’à tout récemment, une présence très limitée en Irak, nous augmentons actuellement notre présence, et aurons notamment un Canadien qui sera établi à Erbil. Dans quelle mesure sera-t-il possible grâce à cette nouvelle présence de surveiller de plus près ces procédures, je ne le sais pas, mais je pense que cela aidera certainement.
     En ce qui concerne l’accès aux tribunaux, je ne suis pas en mesure de répondre. Nous pourrions revenir plus tard avec une réponse plus complète.
    Je vous en serais reconnaissant
    Monsieur le président, ces faits sont extrêmement troublants, et je crois que nous devrions continuer à surveiller cette situation. Ils sont également extrêmement importants, particulièrement s’il y a une personne haut placée qui orchestre ces crimes.
    De toute évidence, il y a un certain nombre de ministères qui participent à cette action, du ministère de la Défense à celui de l’Immigration, ainsi que vous-mêmes. Maintenant que nous avons passé en revue ce conflit, nous savons qu’il y a d’innombrables victimes, soit des Turkmènes, en passant par les yézidis et les chrétiens, ainsi que différentes communautés de chrétiens, et aussi différentes communautés de musulmans, et de Somaliens. Quels efforts pouvons-nous déployer pour réévaluer les moyens pour livrer l’aide, et aussi la manière dont nous ciblons les réfugiés, les demandeurs d’asile et la définition que nous donnons au statut de réfugié, relativement à ces groupes pour lesquels le risque de devenir victime d’un crime est encore plus grand? Je sais que cela n’a pas été le cas dans le passé, mais je crois que nous avons ici une démonstration claire que parfois, lorsque des combattants mal intentionnés commencent à cibler les gens, ils feront plus de victimes dans certains groupes que d’autres. Est-il possible que le ministère entreprenne maintenant des actions afin de prendre en considération cet état de fait?
    Je ne pourrais évidemment pas parler de réinstallation, car cette responsabilité relève de la compétence du Comité international de la Croix-Rouge.
    En ce qui concerne notre aide, je vais commencer, et peut-être demander à Giuliana de compléter ma réponse, si elle le souhaite.
    Il y a plusieurs volets à notre aide. L’aide humanitaire est la première partie. L’aide humanitaire est fournie dans le but de joindre les personnes les plus vulnérables, sans considération à l’ethnie ou à la religion, mais comme elle est axée sur les plus vulnérables, nous savons que plusieurs membres des communautés minoritaires reçoivent ce type d’aide. Je donnais l’exemple de l’aide psychosociale qui est fournie aux femmes et aux filles qui ont été agressées par des membres de Daech. Nous savons que plusieurs de ces femmes sont des yézidies, mais...
    Mon temps est compté, donc, pour orienter un peu la réponse, je veux bien me faire comprendre sur ce point. L’ennui est que dans ce cas, un grand nombre de personnes parmi les plus vulnérables ne sont pas allées dans les camps, où elles auraient été encore de plus grandes victimes encore. C’est pourquoi je demandais une réévaluation de notre façon de faire, fondée sur ce type de variables, du fait que les personnes deviennent des victimes à différents degrés selon qui est leur ennemi.
    L’aide humanitaire est non seulement axée sur les personnes qui se trouvent dans les camps de personnes déplacées ou de réfugiés, elle vise également les communautés hôtes où, nous le savons, certaines minorités se sont réfugiées. Voilà ce qui en est pour l’aide humanitaire.
    L’autre volet de notre aide est l’aide au développement, c’est-à-dire développement, sécurité et aide à la stabilité, c’est en fait ce que font mes collègues. Dans ce cas, nous sommes aptes à cibler un peu plus précisément notre aide. C’est dans cette catégorie que se classe le projet CIJA dont je parlais un peu plus tôt.

  (1325)  

    Je ne suis pas sûre de pouvoir ajouter d’autres informations à ce qu’a dit ma collègue, à savoir si les travaux sont évalués au sein d’Affaires mondiales, mais je peux cependant affirmer que du point de vue du Bureau des droits de la personne, des libertés et de l’inclusion et plus spécifiquement du point de vue de l’inclusion et de la liberté religieuse, la division a été en contact étroit avec des groupes religieux ici au Canada qui sont eux en communication avec des groupes en Irak et en Syrie. Nous sommes en train de recueillir de l’information pour déterminer à quoi exactement se rapporte la question, c’est-à-dire en quoi consiste les violations, quelle est leur gravité et qu’est-il possible de faire. Nous travaillons avec des groupes religieux et nous parlons à des groupes religieux pour nous renseigner sur les défis auxquels ils doivent faire face.
     Merci beaucoup.
    Madame Khalid.
    Je vous remercie sincèrement d’être venues nous parler à propos de ce sujet important.
     Quand j’étudiais le droit à l’université, j’avais un bon ami iranien qui était de confession juive, une très petite minorité en Iran. C’était un bon ami, et il continue de l’être; il me racontait des histoires de discrimination et de persécution dont lui et sa famille ont fait l’objet en Iran avant de déménager à l’ouest.
     Je peux comprendre l’aspect critique de la situation, et elle est désastreuse. J’ai été quelque peu troublée, madame Lamoureux, quand vous avez mentionné qu’une fois que la situation avec Daech serait réglée, les problèmes de discrimination ne seraient pas terminés. Je me demande quel rôle peut jouer le Canada, pas seulement en ce qui concerne une solution politique visant à instaurer un mode de gouvernance plus humain dans la région, mais aussi dans la mise en place de mesures afin de réduire ces incidents.
    Merci de votre question. Je dirais que cette question est au centre de notre travail quotidien.
     Je pense qu’une chose que nous devons comprendre est que ces problèmes n’ont pas commencé avec Daech. Ils se sont certainement aggravés sous Daech, mais la persécution des minorités a toujours été une réalité et elle l’est en Irak depuis des années, notamment sous le régime de Saddam Hussein. Donc, je pense que nous devons être réalistes dans nos attentes, ce qui ne veut pas dire immobiles. La stratégie triennale qui a été adoptée pour la région est une étape positive du fait qu’elle est pluriannuelle. Nous devons reconnaître qu’une victoire sur Daech n’est pas la fin des discriminations. C’est le début d’une autre étape qui sera tout aussi complexe et difficile que celle que nous traversons actuellement. Nous en sommes à la première étape.
    Nous avons des outils à notre disposition comme les programmes de développement et nos programmes de stabilisation et de sécurité. Il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire dans le secteur de la gouvernance, pour aider l’Irak. Le Canada a un modèle intéressant à offrir, car nous sommes un pays fédéral, et notre manière d’aborder la diversité est souvent perçue comme intéressante. Plus particulièrement, lorsqu’il y a dans les communautés un historique de violence et de discrimination, la décentralisation peut parfois aider. Nous avons certainement déjà un programme dans ce secteur par l’intermédiaire de notre aide financière au développement, et nous cherchons à élargir ce programme dans le contexte de la stratégie triennale que j’ai mentionnée.
    Je souhaiterais poursuivre sur un aspect que mon honorable collègue a abordé au sujet de la responsabilisation.
    Nous avons demandé au Conseil de sécurité de l’ONU de traduire Daech en justice. J’ai aussi suggéré récemment que la Cour pénale internationale, ou CPI, devrait jouer un rôle. Pouvez-vous expliquer pourquoi le Conseil de sécurité de l’ONU n’a pas encore saisi la CPI de la situation en Syrie?

  (1330)  

    Pour que le Conseil de sécurité saisisse la CPI de la situation en Syrie, il faut qu’il y aille un accord en ce sens au sein du Conseil de sécurité. Ce serait dans ce cas-là la première étape. L’Irak et la Syrie ne sont pas partie au Statut de Rome. Ils ont dit qu’ils auraient la possibilité de saisir la CPI de leur situation dans leur pays, mais ils n’ont pas encore décidé de le faire.
    Je ne sais pas si ça relève de votre compétence, mais pouvez-vous décrire ce que font les autres pays comme la Russie et les États-Unis afin de faire cesser la discrimination contre les minorités dans cette région?
    La Russie?
    Oui, et les États-Unis.
     Sur le sujet précis de la Russie, je devrai vous revenir. Je ne suis pas au courant si la Russie a mené des efforts sur cette question particulière.
     Pour ce qui est des États-Unis, c’est assurément l’un des pays avec lesquels nous collaborons. Je me reporte à la participation du ministre Dion à un événement connexe à l’UNGA visant à obliger Daech à rendre des comptes. Les États-Unis y étaient aussi présents. Ils font partie d’un réseau de pays qui examinent activement ces options.
    Il y a une chose que je souhaite dire sur la responsabilisation, c’est que l’Irak doit en faire partie. Je ne parle évidemment pas de la Syrie, c’est une tout autre histoire. La solution doit être menée par des Irakiens. Nous travaillons avec tous ces pays afin d’établir, nous l’espérons, un mécanisme de responsabilité qui fonctionnera. Comme je l’ai dit, jusqu’à maintenant les efforts proviennent du gouvernement irakien. Ils ont, en fait, demandé de l’aide pour recueillir les éléments de preuve.
    Le risque demeure qu’avec ce type d’éléments de preuve, si vous ne les recueillez pas rapidement, ils n’existeront plus quand le tribunal sera en place pour juger ces crimes. C’est sur ces aspects que nous nous sommes concentrés jusqu’à maintenant, mais il y a beaucoup de travail qui se fait dans la communauté internationale afin de tenir ces discussions sur les mécanismes de responsabilité.
    Est-ce qu’il me reste du temps?
    Vous avez 30 secondes supplémentaires.
    Je vais donc juste commenter à savoir que, souvent, je ne crois pas qu’il s’agisse d’une religion précise qui est visée ou qui fait figure d’oppresseur. Je crois que ce sont toujours les groupes vulnérables qui souffrent, comme les femmes et les enfants. Je veux vous remercier pour vos efforts dans cet important dossier.
    Merci.
    Merci beaucoup. Passons maintenant à la députée Hardcastle.
    Merci, monsieur le président. Je vous remercie de votre présentation. Elle a le mérite d’énoncer clairement le problème auquel nous faisons face aujourd’hui. Je suis très intéressée par tout ce dont vous avez parlé. Je souhaiterais vous entendre sur le sujet de notre soutien ou du rôle que nous jouons pour aider le gouvernement irakien dans sa réponse, plus particulièrement avec son système juridique. Pouvez-vous nous désigner des secteurs où le Canada pourrait jouer davantage un rôle de soutien?
    Je vais vous poser quelques questions, ensuite vous n’aurez qu’à répondre jusqu’à ce que mon temps soit écoulé. Je crois que c’est l’une des meilleures utilisations de notre temps dans ce format.
    L’autre question que je veux poser concerne la possibilité de déployer notre aide et nos efforts humanitaires pendant que des campagnes militaires sont en cours. Quels sont les défis associés à une telle possibilité?
    Je commencerais par votre dernière question, et je répondrai ensuite à la première. Au sujet des défis associés au déploiement de notre aide humanitaire, oui, vous avez raison. Particulièrement en Syrie, où nous constatons tous les problèmes que nous avons à joindre les personnes les plus vulnérables et les personnes qui ont le plus besoin d’aide. C’est indéniablement tout un défi. Cela dit, une partie de l’aide va également aux communautés hôtes et aux camps de réfugiés qui sont à l’extérieur de la Syrie. En Irak, la situation est également difficile, mais de manière différente, car nous n’avons pas la même multiplicité d’acteurs que nous voyons en Syrie. Pour l’instant, les efforts sont plutôt regroupés dans la campagne de Mossoul, en raison du nombre de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays, PDIP, qui sont attendues dans le cadre de cette campagne. Les derniers chiffres que j’ai vus dépassent les 10 000 PDIP, mais nous prévoyons qu’il y en aura beaucoup plus, donc nos partenaires travaillent d’arrache-pied pour fournir à ces personnes vulnérables les services de base afin de combler leurs besoins fondamentaux. L’un des défis que nous devons relever, c’est aussi l’accès, car Daech utilise des civils comme bouclier humain, ce qui évidemment complique les choses. Néanmoins, certains civils ont été capables de s’échapper et les partenaires font de leur mieux pour combler leurs besoins.
    Je pense que j’ai des chiffres pour vous. Si vous m’accordez un instant, je peux vous décrire exactement les montants d’aide qui ont été fournis. En Irak, nous avons promis 150 millions de dollars à la Conférence pour les annonces de contributions qui a eu lieu à Washington en juillet, et sur ce montant, 63 millions de dollars ont été versés jusqu’à maintenant. Pour la Syrie, jusqu’à maintenant, on parle de 65,35 millions de dollars en 2016. Le montant total d’aide humanitaire engagé pour la région est de 840 millions de dollars, soit pour l’Irak, la Syrie, le Liban et la Jordanie. Ce montant est pour plus de trois ans. Cela vous donne une idée des proportions.
    En ce qui concerne notre collaboration avec le gouvernement irakien pour les aider dans leurs activités de gouvernance, je pense que vous avez précisé le système judiciaire, ce sont définitivement des secteurs qui sont envisagés dans le contexte du programme triennal; un montant a d’ailleurs été réservé spécifiquement pour le programme de développement. Je ne suis pas au courant s’il y a un programme qui cible essentiellement le système judiciaire, mais je crois que ce secteur fait partie de la planification en cours. Je pourrais vous revenir à ce sujet, après avoir parlé à mes collègues du développement. Je n’ai pas maintenant la réponse, mais je sais que cet aspect est pris en compte, cela je le sais.

  (1335)  

    Vous avez encore un peu de temps.
    Alors, je n’ai qu’une autre question connexe. Tout programme que nous pourrions mettre en œuvre relativement au système judiciaire serait-il sous la gouverne du CIJA, ou avons-nous nos propres initiatives distinctes qui ont également une incidence sur la mise en place de leur système judiciaire?
    Ce programme ne serait pas obligatoirement sous la gouverne du CIJA. Le travail que fait le CIJA, avec notre aide, est très ciblé. Il s’agit essentiellement de la collecte d’éléments de preuve. Ce sont des avocats ou des experts juridiques formés et qualifiés qui sont en train de monter ces dossiers, dans l’espoir qu’ils seront utilisés dans des procès futurs. Il n’y a rien, cependant, qui nous oblige à travailler exclusivement avec le CIJA dans un programme éventuel qui servirait essentiellement à renforcer le système judiciaire d’Irak. Il y a également d’autres partenaires avec lesquels nous pouvons collaborer.
    Merci.
    Nous allons poursuivre sans délai. Pour le deuxième tour de questions, pour cinq minutes, passons au député Miller.

[Français]

     Je vous remercie tous les deux pour votre témoignage.
    Nous venons d'entamer une vaste étude qui pourrait l'être encore davantage. Malheureusement, dans une situation humanitaire, c'est le droit à la vie qui est le droit fondamental en cause.
    J'aimerais focaliser la discussion sur le droit à la pratique du culte et le droit à la religion. Les groupes, comme les yézidis, sont affectés plus spécifiquement par le discours génocidaire de Daech.
    Dans quelle mesure ce discours va-t-il influer sur ce qui va se passer par la suite, après l'élimination de Daech? La situation va-t-elle s'aggraver en raison de la religion et de la distinction basée sur la pratique du culte ou du fait que les gens se sont simplement unis contre Daech?
    Je sais que la réponse à cette question pourrait prendre une demi-heure. Peut-être pouvez-vous répondre de façon concise en focalisant plus particulièrement sur le droit à la religion.

  (1340)  

    Merci beaucoup pour votre question.
    Je vais commencer par mentionner qu'aujourd'hui, le 27 octobre, c'est la Journée internationale de la liberté de religion. C'est un jour très symbolique et pertinent pour les discussion d'aujourd'hui.
    Oui, effectivement, on peut s'attendre à ce qu'il y ait des séquelles ou que les communautés religieuses soient en danger.

[Traduction]

    Je vais maintenant passer à l’anglais pour répondre de manière plus succincte
    Dans cet esprit, le Bureau des droits de la personne, des libertés et de l’inclusion examine les possibilités qui s’ouvrent d’appuyer nos partenaires qui sont sur place et qui participent à des projets inclusifs qui tentent de réunir des groupes religieux, des leaders religieux, et d’autres membres, des jeunes par exemple, pour discuter et travailler ensemble afin de régler les problèmes auxquels les communautés religieuses devront faire face sur le terrain.
    Dans cette région en particulier, les groupes religieux doivent composer avec diverses questions existentielles; donc, le Canada cherche des occasions de soutenir des programmes et des projets qui vont contribuer à réunir ces communautés dans un dialogue inclusif.

[Français]

     J'aimerais ajouter une chose.
     Une des raisons pour lesquelles nous mentionnions cela est que certains rapports font état du fait que certains membres, notamment des communautés sunnites, par conviction ou parce qu'ils étaient menacés, ont été parfois complices de certains abus perpétrés par Daech. On sait très bien que des membres des communautés sunnites ont été victimes des abus perpétrés par Daech.
    J'ai parlé d'aggravation. Le risque est de mettre tous les membres d'une même communauté dans le même panier. Il en va de même pour des milices chiites. On sait que des milices chiites ont commis certains abus et qu'il y a eu des rapports en ce sens. Le risque est de faire un amalgame et que tous les membres d'une même communauté portent le chapeau pour certains abus particuliers.

  (1345)  

[Traduction]

     [Note de la rédaction: difficultés techniques]
    Voilà, nous sommes de retour.
    Monsieur le député Genuis, nous sommes de retour à vous.
    Je vais parler très vite parce que j’ai beaucoup de choses à dire.
    J’aimerais commencer en parlant de la question de la djizîa. Cela peut sembler être un point technique, mais je pense que c’est très important. On dit parfois que l’État islamique impose la djizîa à certaines minorités religieuses. Je pense qu’il est vraiment important de ne pas faire référence à cette tradition, car la djizîa a une signification historique et théologique concrète pour l’Islam. La djizîa suppose que la pratique religieuse est autorisée pour les minorités religieuses et qu’une protection est accordée en échange d’un impôt fixe. Ce n’est pas ce que fait Daech. Daech utilise la tradition de la djizîa pour extorquer les minorités religieuses, mais cette extorsion ne prend pas la forme d’un impôt fixe. Il s’agit d’une extorsion permanente qui ne s’accompagne d’aucune protection de la pratique religieuse. Ce n’est en fait qu’une façon d’obtenir des ressources en guise de prélude à des plans d’extermination ultérieurs. Donc, à mon avis, il est important que nous ne donnions pas involontairement à Daech la possibilité d’utiliser cette tradition au profit de sa propagande.
    Je suis curieux d’entendre vos commentaires à ce sujet, si vous avez des idées à formuler.
    Merci. Je pense que cet éclaircissement est utile.
    Voici ce que je trouve important de souligner: on ne peut pas dire que ce sont des impôts; ce sont plutôt des sommes d’argent extorquées qui ont été une source de revenus très importante pour Daech, surtout récemment, du fait que la coalition a bombardé plusieurs champs de pétrole sur lesquels l’organisation comptait pour se procurer des ressources. Daech mise donc beaucoup sur ces impôts. Étant donné ses territoires perdus, l’organisation ne compte maintenant que sur des ressources fortement réduites.
    Merci. C’est un excellent argument.
    Ces impôts ont un effet important sur les ressources de l’organisation. Toutefois, nous avons ici, encore une fois, une indication intéressante des efforts que déploie Daech pour se draper dans la légitimité des traditions islamiques historiques, alors que l’organisation viole manifestement un grand nombre des principes fondamentaux de l’islam.
    J’aimerais que vous nous parliez du traitement des minorités religieuses par les milices soutenues par l’Iran et de la mesure dans laquelle les forces occidentales collaborent avec des milices soutenues par l’Iran qui sont également impliquées dans des violations des droits de la personne contre les minorités.
    Oui, des violations commises par certaines des milices actives en Irak ont été signalées. La plupart de ces milices sont sous l’égide de forces de mobilisation populaire, mais il existe aussi des milices indépendantes qui fonctionnent séparément de ces groupes. Ces signalements nous sont notamment parvenus dans le contexte de la libération de la province d’Al-Anbar, qui est majoritairement sunnite. Bien sûr, la communauté internationale, y compris le Canada, a suivi de très près et a condamné ces violations, et elle a exprimé des opinions très fermes quant à la nécessité de ne pas répéter les mêmes erreurs dans le cadre de la campagne de Mossoul. Je ne sais pas si vous avez entendu les récentes déclarations du premier ministre al-Abadi. Il a déclaré très clairement que la protection des civils sera extrêmement importante dans le cadre de la campagne de Mossoul.
    Malheureusement, nous constatons qu’il y a beaucoup de victimes civiles aux mains de Daech. Faire en sorte que les forces de sécurité irakiennes prêtent au moins attention à cette question serait certainement un objectif important pour nous. Vous savez probablement qu’une conférence pour la stabilisation et la gouvernance de Mossoul s’est tenue à Paris il y a deux semaines. Il s’agit là d’un point important qui a été soulevé par tous les participants, y compris les Irakiens.
    Votre autre question ne portait-elle pas sur la mesure dans laquelle la coalition ou nous-mêmes collaborerons ou travaillerons avec ces milices?

  (1350)  

    Oui.
    La réponse est très simple: nous ne collaborons pas avec elles. Nous collaborons avec le gouvernement irakien.
    Excellent.
    Il me reste environ 30 secondes, et j’aimerais en profiter pour dire un mot sur la définition de génocide. Je sais qu’il y a eu des débats et des questions à ce sujet à la Chambre.
    Le ministère a-t-il sa propre définition objective de génocide, que vous pouvez ensuite utiliser pour conseiller le ministre et lui dire qu’en se basant sur les faits une situation est ou n’est pas un génocide? Ou la décision d’appeler une situation un génocide ne relève-t-elle pas finalement de la politique?
    Non, la Convention pour la prévention et la répression du crime du génocide a une définition claire, qui est celle que nous utilisons.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer au député Tabbara.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie tous deux d’être ici aujourd’hui.
    Ma première question est la suivante. Le Canada participe-t-il aux négociations visant à préparer la période post-Daech? Regardez qui se passe dans un pays voisin à l’ouest, le Liban. Ce pays possède un système gouvernemental où le président est un chrétien maronite, le premier ministre est un musulman sunnite et le président de la Chambre des députés est un musulman chiite.
    Voici ce que j’essaie de dire: si nous venons à bout de Daech, le Canada contribuera-t-il à l’établissement d’un gouvernement stable dans la région? Un gouvernement stable est à la tête du Liban en ce moment, mais il est très fragile.
    Ma question est la suivante: si nous venons à bout de Daech, le Canada s’engagera-t-il auprès de la communauté internationale en contribuant à l’établissement d’un gouvernement central stable en Irak?
    Le mandat du gouvernement irakien actuel a commencé un peu avant que Daech commence à envahir certains territoires situés au nord du pays au printemps 2014. Le gouvernement irakien ne peut pas être qualifié de stable, mais il ne demeure pas moins remarquablement résilient compte tenu de la situation à laquelle il doit faire face: crise financière, crise sécuritaire majeure, comme nous le savons, insurrection et difficultés dues aux tensions sectaires. Le mandat du gouvernement actuel devrait normalement se prolonger jusqu’en 2018. Des élections devraient avoir lieu à peu près à ce moment-là.
    En ce qui a trait aux efforts axés sur l’établissement d’un gouvernement plus stable, je pense que nous envisagerons certainement un programme de gouvernance. J’ai déjà un peu expliqué ce que nous étions déjà en train de réaliser en matière de soutien à une décentralisation.
    Vous faites une comparaison avec le Liban, et je pense qu’il est important de dire que le système est un peu semblable en Irak, où le président est traditionnellement kurde, le premier ministre est traditionnellement chiite et le président de la Chambre est traditionnellement sunnite. Or, un tel système n’est pas nécessairement gage de stabilité.

  (1355)  

    Oui, et c’est ce que j’essaie de dire. Pouvons-nous nous éloigner de telles distinctions?
    La réponse ne dépend pas nécessairement de nous. Il devra y avoir une réconciliation politique au sein de la communauté, de sorte que tous les politiciens, en particulier ceux aux rangs les plus élevés, représentent les intérêts de l’ensemble du pays et pas uniquement ceux de leurs propres communautés.
    Je ne dirais pas qu’en ce moment, les dirigeants de ces pays ne sont sensibles qu’aux intérêts des électeurs de leurs circonscriptions, mais ils sont certainement vulnérables aux pressions exercées par ceux-ci. Que peut faire le Canada? Le Canada peut apporter un soutien grâce à ses programmes, mais, à terme, la solution est politique, et elle devra être trouvée par les Irakiens.
    En attendant, le Canada contribue-t-il à l’établissement de zones sécurisées pour les minorités ethniques?
    Pas pour le moment, mais nous sommes conscients des déclarations qui ont été faites en ce sens par la chancelière Merkel.
    La notion de zones sécurisées peut être définie de diverses façons. Je pense que, dans le contexte irakien, nous pouvons dire qu’une zone sécurisée serait un territoire où la sécurité serait assurée par un groupe donné. Cela soulève certainement plusieurs questions, y compris celles liées aux droits à payer. De plus, les zones sécurisées seraient plus vulnérables aux attaques de gens qui voudraient cibler des communautés en particulier.
    Par l’intermédiaire de notre ambassade à Berlin, nous avons tendu la main à l’Allemagne afin de mieux connaître son point de vue et de savoir si elle avait établi des plans précis. Or, jusqu’à présent, nous sommes restés sans nouvelles.
    Nous terminons juste à temps. Nous sommes arrivés à la fin du temps alloué pour cet après-midi. Encore une fois, je tiens à remercier Mme Lamoureux et Mme Natale d’être venues et d’avoir vraiment réussi à faire avancer les discussions importantes et fructueuses qui se poursuivront au cours des prochaines semaines. Merci à vous deux.
    Merci.
    La séance est levée.
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