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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 019 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 29 septembre 2016

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    J'espère que les autres arriveront bientôt.
    Nous accueillons aujourd'hui la lieutenante-générale Christine Whitecross et la contre-amirale Jennifer Bennett qui vont nous faire le point sur la question de l'inconduite sexuelle au sein des Forces armées canadiennes. Merci beaucoup de vous être déplacées à si court préavis pour témoigner devant notre comité.
    Je crois savoir qu'il y a eu deux ou trois mises à jour depuis la publication du rapport Deschamps, en 2015, la plus récente remontant au mois d'août.
    Avant de vous céder la parole, générale Whitecross, je tiens à indiquer au comité que nous réserverons 10 minutes à la fin de cette séance pour parler de nos travaux. Nous allons donc entendre le témoignage, nous passerons aux questions et ensuite aux travaux du comité.
    Générale Whitecross, vous avez la parole.

[Français]

     Monsieur le président, membres du Comité, je vous remercie de cette invitation à comparaître devant le Comité permanent de la défense nationale pour vous mettre à jour concernant la réponse des Forces armées canadiennes au problème des comportements sexuels nocifs et inappropriés.

[Traduction]

    Je suis accompagnée du contre-amirale Jennifer Bennett, qui dirige l'équipe d'intervention stratégique des Forces armées canadiennes sur l'inconduite sexuelle.
    Je me suis adressée pour la première fois à votre comité sur le même sujet, le 25 mai 2015, moins d'un mois après la réception des recommandations et du rapport importants de la juge Deschamps. À ce moment-là, j'avais présenté les mesures initiales que prenaient les Forces armées canadiennes — ou qu'elles avaient l'intention de prendre rapidement — pour régler ce problème insidieux ainsi que notre intention de concentrer nos efforts sur quatre aspects précis en élaborant une solution : comprendre le problème, réagir au problème, appuyer les personnes touchées par le problème, et prévenir le problème.
    Je suis ravie de signaler que nous avons fait des progrès importants depuis ce moment-là et que, à la fin août, nous avons publié notre deuxième état d'avancement qui décrit les efforts entrepris au cours des six mois précédents, ainsi que les défis à relever et les stratégies d'atténuation à venir.
    Monsieur le président, comme vous le savez, le général Vance a fait de cette question l'une de ses priorités clés et a lancé l'opération Honour — l'initiative globale ayant pour objet d'éliminer les comportements sexuels nuisibles et inappropriés dans notre institution. Cette opération vise essentiellement à mettre en oeuvre les 10 recommandations du rapport Deschamps, mais nos efforts iront bien au-delà.
    L'objectif est clair : éliminer les comportements sexuels nuisibles et inappropriés, afin de nous assurer que les hommes et les femmes dévoués des Forces armées canadiennes sont traités avec respect et dignité dans un milieu de travail exempt de harcèlement et de discrimination. L'offre d'un meilleur service de soutien aux victimes demeure l'objectif premier de opération Honour.
    En septembre dernier, le Centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle a été mis sur pied — en dehors de la chaîne de commandement militaire — dans le but d'offrir aux membres des Forces armées canadiennes touchés par l'inconduite sexuelle une option de soutien confidentielle et unique supplémentaire. L'une des caractéristiques du Centre qui le rend différent est qu'il permet aux victimes de s'entretenir avec des conseillers pour les aider à déterminer s'il y a lieu de déposer une plainte officielle.
(1105)

[Français]

    Nous savons que la peur des effets indésirables et le manque de connaissance ou de confiance à l'égard du système sont des obstacles à la déclaration de la victime, et nous continuons à faire tomber ces obstacles. Au cours des six premiers mois de cette année, il y a eu une augmentation de 22 % des incidents signalés à la police militaire.

[Traduction]

    Environ la moitié de ces incidents ont été signalés avant l’opération Honour. Cela démontre que certaines des victimes croient, peut-être pour la première fois, que nous allons les écouter et agir. Des améliorations importantes sont en cours au sein de la Branche de la police militaire et de l'organisation du Juge-avocat général afin d'améliorer l'appui aux victimes ainsi que les enquêtes et les poursuites.
    Mardi, nous avons annoncé et inauguré nos nouvelles équipes d'intervention en cas d'infraction sexuelle, lesquelles sont formées d'enquêteurs ayant reçu une formation spéciale et étant répartis à travers le Canada. Chaque rapport d'infraction à caractère sexuel, qu'elle soit nouvelle ou ait eu lieu dans le passé, fera l'objet d'une enquête par ces équipes dédiées au sein du Service national des enquêtes des Forces canadiennes. Indépendamment de l’opération Honour, nous sommes en train de réviser et d'évaluer les processus de la justice militaire, en nous concentrant sur l'appui aux victimes comme point central de cet effort.
    La mesure des progrès est capitale pour évaluer les effets de l'opération Honour et des efforts déployés. Certes, le nombre d'incidents déclarés, d'enquêtes et de mises en accusation constituera un important critère de mesure, mais l'ampleur du succès de l'initiative et l'envergure du changement culturel qui s'opérera dans l'organisation dépendront en définitive des membres des Forces armées canadiennes.
    Au printemps dernier, à notre demande, Statistique Canada a mené une enquête auprès de tous les membres de la Force régulière et de la Première réserve, enquête qui a porté expressément sur les comportements sexuels dommageables et inappropriés. Plus de 40 000 de nos militaires ont rempli le sondage, et les résultats seront diffusés à la fin novembre.

[Français]

     Nous prévoyons que ces résultats seront très révélateurs, et qu'ils nous fourniront les précieuses informations qu'il nous faut pour mieux comprendre la portée et la nature de l'inconduite sexuelle dans le contexte militaire. Nous pensons aussi en apprendre davantage sur les zones à cibler pour réussir le changement de culture et comprendre les défis auxquels les membres des Forces font face.

[Traduction]

    La responsabilité de chaque militaire — d'être à la hauteur des valeurs que sont le respect et l'honneur, valeurs défendues par les Forces armées canadiennes — constitue la pierre angulaire du changement de culture que doit produire l'opération Honour. II s'agit d'une initiative qui s'inscrit dans le long terme et qui constitue l'un des défis les plus difficiles en matière de leadership que peut relever une organisation.
    Nous savons que nous ne sommes qu'au tout début d'un parcours long et complexe; toutefois, nous voyons des preuves de changement à tous les niveaux de l'institution. Nous avons pris notre élan; notre défi maintenant est de le poursuivre.
    Les Forces armées canadiennes doivent protéger leurs membres et veiller à leur bien-être. Nous devons être un employeur de choix malgré la réalité que constitue le fait d'envoyer des gens dans des zones dangereuses. Nous devons être respectés non seulement pour ce que nous réalisons, mais aussi pour ce que sont et ce que représentent les Forces armées canadiennes. Cela n'est possible que si l'institution travaille avec diligence pour assurer un environnement professionnel où règnent la dignité, le respect et l'élimination de l'inconduite sexuelle.
    Le chef d'état-major et les autres dirigeants de l'institution sont encouragés par les progrès réalisés à ce jour, mais pas complètement satisfaits. II reste encore beaucoup de travail, et malgré les progrès et les changements initiaux réalisés au sein de notre institution, des incidents de comportements sexuels nuisibles et des infractions sexuelles continuent de se produire. C'est la raison pour laquelle l'opération Honour demeure une priorité absolue à l'échelle des Forces armées canadiennes.
    L'institution sera jugée non pas sur des promesses et des plans, mais sur sa capacité éprouvée d'opérer le changement de culture visé par l'opération Honour.

[Français]

    Voilà pourquoi nous demeurons profondément engagés à assurer un environnement digne, respectueux et professionnel à tous les Canadiens et Canadiennes qui choisissent de servir leur pays. De plus, c'est pourquoi, aux yeux de tous les membres des Forces armées canadiennes, aucun échec de l'opération HONOUR n'est permis.
(1110)

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup, générale Whitecross.
    Avant de passer à la première question, je tiens à vous féliciter pour votre récente nomination au collège de l'OTAN à Rome. Nous sommes tous très fiers de vous.
    Merci.
    Merci beaucoup, c'est effectivement emballant.
    Notre première question sera posée par M. Spengemann qui a sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, générale Whitecross et amirale Bennett. Merci à vous deux pour vos états de service, pour votre leadership, pour votre présence parmi nous et, plus important encore, pour nous parler de ce sujet très important.
    J'entends vous parler du fait que les enquêtes, la discipline et le soutien aux victimes sont des éléments très importants de tout ce projet, mais ce ne sont que ce que l'on pourrait appeler des éléments intervenant en aval, après que quelque chose de grave s'est produit.
    Vous avez parlé de changement de culture. Il y a une heure environ, j'ai eu l'occasion de déposer mon projet de loi d'intérêt privé à la Chambre des communes. Il s'agit d'une loi qui vise à créer la semaine de l'égalité des sexes au Canada. J'espère obtenir les réactions et, à terme, l'appui des Forces armées canadiennes pour ce projet de loi.
    Pourriez-vous, pour nous, adopter cette optique de l'égalité des sexes, qui est peut être relativement diffuse, mais qui intervient en amont de l'inconduite sexuelle et de la violence sexuelle. Je vous demanderai aussi d'éclairer le Comité et le Canada sur la culture qui existe actuellement au sein des Forces armées canadiennes et qu'il faut changer. Parlez-nous des éléments subtils qui laissent la place à l'inconduite et à la violence sexuelles, ainsi qu'à tout sur quoi nous voulons faire rapport et que nous voulons corriger.
    Monsieur le président, je vais répondre en partie à ces questions, et je donnerai ensuite la parole à Jennifer Bennett qui travaille sur ces questions-là au quotidien.
    Tout d'abord, le fait de désigner une semaine, comme vous l'avez indiqué, recevrait l'appui des Forces armées canadiennes. Le général Vance en a fait une de ses priorités, en marge de l'opération Honour, puisqu'il veut augmenter la diversité au sein des Forces et que c'est également un de mes objectifs.
    Cela étant, il est question de changement de culture qui nécessitera une génération, voire plus, comme vous le comprenez fort bien. En plus de tout cela, nous essayons, comme vous l'avez mentionné, d'instiller un changement de comportement dans le court terme. Ce changement de comportement à court terme débouchera sur un changement culturel à long terme. Notre institution doit instituer un climat où le changement de culture ou encore le changement de comportement sera durable et solide.
    Cela nous ramène aux questions de politique, de formation, de sensibilisation et de changement marqué dans la façon dont nous traitons le personnel dans la dimension hommes-femmes, et également les personnes d'orientations sexuelles différentes, de cultures différentes, si l'on peut aller jusque-là.
    Notre institution, qui est très axée sur les processus et qui est résolue à instaurer ce genre de climat, travaille en permanence à cet égard. L'amirale Bennett pourra vous en dire davantage.
    Je tiens également à vous parler des analyses de la relation hommes-femmes, ou sexospécifiques, qui feront partie intégrante de nos processus à partir de maintenant. Le général Vance a désigné la major-générale Tammy Harris comme championne des analyses sexospécifiques au sein des Forces armées. Nous avons pris les devants et avons commencé à examiner nos politiques pour nous assurer qu'elles ne défavoriseront aucun des sexes, et nous le faisons de façon très structurée et très pragmatique.
    Compte tenu de tout cela, nous sommes convaincus que nous parviendrons à instaurer un changement culturel durable, et nous avons déjà commencé, en grande partie.
    Générale, avant de passer à l'amirale Bennett, pourrait-on affirmer qu'à l'exception des politiques — qui, à la façon dont je vois les choses, semblent aller dans le bon sens — pour le moment, la notion d'égalité des sexes appliquée à l'ensemble des fonctions au sein des Forces armées canadiennes, n'est pas vraiment envisagée par les hommes et par les femmes en uniforme? Culturellement, cette perception n'est pas encore établie ou estimez-vous que mon affirmation est trop générale?
    Oui. Personnellement, j'estime être traitée comme tous les autres gradés de mon niveau, en fonction de mon expérience et de mon bagage. J'aime croire que c'est le cas pour tout le monde, mais je ne suis pas assez naïve pour en être convaincue et c'est pour cela que nous avons du travail à faire.
    Amirale Bennett, pourriez-vous réagir également?
    Je commencerai par répondre à votre dernière question. Il y a une différence entre l'égalité des sexes et l'équité des genres et, même si nous n'avons pas la même répartition hommes-femmes au sein des Forces armées canadiennes, tout le monde ne s'engage pas dans les Forces armées pour les mêmes raisons. Il y a une propension, chez ceux qui appartiennent à des métiers traditionnellement dominés par des hommes, à vouloir s'engager.
    J'ajouterai que nous offrons la parité salariale. Nous administrons un certain nombre de programmes qui sont exactement les mêmes pour les hommes et les femmes, ce qui n'est pas le cas pour toutes les professions. Il est difficile de répondre à votre question sur l'égalité des sexes si vous abordez la chose uniquement sous l'angle statistique.
    Il est certain que nos programmes et la façon dont nous traitons les personnes sont non sexistes. Nous avons modifié nos normes de conditionnement physique qui s'appliquent désormais à toutes et à tous, pour qu'il n'y ait aucun doute quant à l'aptitude de nos militaires à aller en opération. Il n'y a pas de normes différentes entre hommes et femmes.
    Pour parler du changement culturel en tenant compte de ce que vous avez dit au sujet de la notion de genre, il faut savoir que l'opération Honour touche à un certain nombre d'autres grands projets dans l'ensemble du ministère. La générale Whitecross vous a parlé de la diversité. Nous continuons de travailler sur les questions d'éthique et d'éthos, sur nos programmes de leadership et sur les aspects sexospécifiques dans le cadre de nos opérations, qu'il s'agisse de celles découlant de la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU ou de celles liées au travail de l'OTAN.
    Nous menons un certain nombre d'initiatives portant sur les différences hommes-femmes et je suis, moi aussi, ravie à l'idée de pouvoir célébrer la semaine de l'égalité des sexes et de jouer un rôle à cet égard.
(1115)
    Examinons les deux étapes qui constituent le processus d'intégration des Forces canadiennes et de service au sein des Forces. Quel genre de message relativement à l'égalité des sexes faites-vous passer à l'étape du recrutement et dans les collèges militaires?
    Je sais qu'il ne vous reste pas beaucoup de temps, mais pourriez-vous être brève et nous pourrons peut-être y revenir ensuite.
    Il y a deux parties à cette question. Premièrement, nous essayons d'augmenter nos statistiques en matière de diversité. C'est là un de nos objectifs ultimes des prochaines années, et le chef d'état-major a indiqué que le nombre de femmes augmenterait annuellement de 1 % au cours des 25 prochaines années, pour atteindre le quota de 25 % qui nous a été imposé par Ressources Canada.
    Pour ce faire, nous sommes en train de créer les conditions nécessaires dans les centres de recrutement, soit avant même que les recrues n'entrent aux collèges militaires ou à l'école des recrues de Saint-Jean. Nous essayons d'attirer plus de femmes, surtout des femmes, mais aussi des membres de minorités visibles et des Autochtones. Nous essayons de les attirer en plus grand nombre, de leur présenter les avantages qu'il y a de servir au sein des Forces armées canadiennes, et nous voulons aussi aller plus loin parce que nos recherches d'opinion publique nous ont appris que les femmes ne comprennent généralement pas ce que signifie le fait d'être militaire. Enfin, nous faisons plus de sensibilisation à la base.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Paul-Hus, vous avez la parole.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Madame la lieutenante-générale Whitecross et madame la contre-amirale Bennett, on parle de comportement, d'environnement, mais qu'en est-il des causes premières des cas actuels de harcèlement ou d'agression?
    J'ai fait partie des Forces canadiennes pendant plus de 20 ans et j'ai été commandant d'unité. Donc, j'ai eu à gérer des problèmes de ce genre à l'époque. J'ai commencé à servir à la fin des années 1980, au moment de la transition. La Charte canadienne des droits et libertés a été mise en place plus activement et il y a eu une intégration des femmes dans les zones de combat. À l'époque, c'était un monde d'hommes, et ceux-ci ont alors dû composer avec la présence de femmes dans l'infanterie, dans l'artillerie et dans les zones de combat. Cela a créé un changement de culture.
    De nos jours, y a-t-il une augmentation des cas d'agression? Si oui, cette augmentation a-t-elle un lien avec le comportement et la culture des jeunes ou des gens d'aujourd'hui, qui vivent dans une société civile plus permissive qu'à l'époque?
    J'aimerais savoir également si l'imposition de la discipline au sein des Forces canadiennes a changé. À une certaine époque, les militaires ne pouvaient poser aucun geste sans se voir imposer des mesures de disciplinaires très fortes. Est-ce que la discipline a changé? Les sous-officiers sont-ils aujourd'hui moins sévères envers les militaires, ce qui pourrait mener à des écarts de conduite?
(1120)

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur. Vous avez posé beaucoup de questions à la fois et je vais y répondre une par une.
    Pour ce qui est du climat de sexualisation, en réalité les Forces armées canadiennes ne sont pas la seule organisation à souffrir de ce genre de comportement auquel nous essayons de nous attaquer. Dans la société civile, dans les universités et les collèges à l'échelle du pays, sans parler des autres ministères fédéraux et de nos alliés, on retrouve le même problème. C'est un problème grave auquel sont également confrontés nos alliés et nous examinons, autant que faire se peut, les pratiques exemplaires d'autres pays et d'organismes canadiens.
    En réalité, nous attirons chez nous les jeunes qui font partie de la société et nous devons leur inculquer ce que signifie le fait d'être militaire, le plus tôt possible après leur arrivée. Cela commence dans les centres de recrutement. Là, la question est ouvertement abordée avec tout aspirant à la vie militaire. Chacun doit signer un formulaire dans lequel il déclare être d'accord avec le fait de ne jamais adopter de comportement répréhensible.
    Ce climat de sexualisation existe donc et j'affirmerai, bien humblement, que notre travail vise à faire en sorte d'amener les membres des Forces armées canadiennes à se rendre compte qu'ils doivent appliquer les normes les plus élevées. Comme vous le savez, c'est une question de conviction dans la philosophie du métier des armes et nous devons veiller à la faire passer avant tout. Je passe maintenant à votre troisième question qui concernait notamment la discipline.
    Je suis d'avis que de nombreuses chaînes de commandement cherchent à faire ce qu'il faut, et on le voit bien aujourd'hui. On le voit aujourd'hui plus que par le passé parce que ceux qui affichent ce genre de comportement répréhensible se retrouvent sous les feux d'un énorme projecteur. Je dois admettre que, dans les assemblées publiques que j'ai tenues un peu partout au pays, ça n'a pas toujours été le cas. Ça n'a pas été le cas dans certaines régions, mais pas partout... en fait, certains ont détourné le regard, ce à quoi il nous faut nous attaquer, bien sûr. À la faveur du changement de culture dans les Forces armées canadiennes, cela fait longtemps que nous parlons de ces choses. Nous disons qu'il va falloir longtemps. C'est l'un des plus importants défis pour nous débarrasser de ce comportement pernicieux. Il faut essentiellement changer la conception qu'ont les gens d'un comportement approprié.
    Malheureusement, nous ne recueillons pas de statistiques depuis très longtemps. Nous recevons des données de diverses sources : du CIIS, le Centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle, ainsi que de la police militaire et du groupe des services de santé. Nous en entendons parler, de façon anecdotique, par nos aumôniers. Même chose du côté de l'ombudsman. À la faveur d'un changement de commandement, nous en entendons aussi parler. Les sources sont donc très nombreuses. Nous nous efforçons, aujourd'hui, de regrouper toute cette information pour nous faire une meilleure idée de la situation.
    L'enquête de Statistique Canada, que nous avions demandée pour plus tôt cette année, nous permettra de nous faire une idée de la situation actuelle et de ce qu'elle était il y a quelques mois, mais nous ne saurons pas véritablement ce qu'elle était il y a 5, 10, 15 ou 20 ans. Nous déployons actuellement de gros efforts à cet égard parce que nous devons apporter une preuve tangible de l'amélioration de la situation.
    Jennifer, vous vouliez dire quelque chose à ce sujet?
    Simplement, pour préciser que notre démarche a considérablement évolué depuis les années 1980. La générale Whitecross et moi-même appartenions déjà aux Forces armées canadiennes.
    À l'époque, on s'attaquait à ce genre de problème d'une seule façon : la formation. On se disait que, si l'on parvenait à former les gens sur la différence entre les bonnes et les mauvaises attitudes, le problème se réglerait de soi. De nos jours, nous appliquons une démarche beaucoup plus exhaustive qui comporte notamment le recours à des mesures disciplinaires et à des mesures administratives, de même que la responsabilisation des chefs. Tandis qu'il a décidé de faire en sorte que ce comportement donne lieu à une opération, le général Vance a donné des ordres aux Forces armées canadiennes et il a bien précisé, à tous les échelons, ce à quoi il s'attendait.
    Désormais, les chefs sont tenus pour responsables du manque d'action dans leurs unités et à leur échelon. Nous suivons cela et nous faisons rapport à ce sujet. Certains ont été retirés des postes de commandement ou de fonctions de superviseur. Des accusations ont été portées. Nous avons obtenu huit condamnations entre janvier et juin pour des infractions de nature sexuelle. Nous avons également appliqué des mesures administratives qui comprennent non seulement des mesures correctives, mais aussi le renvoi des Forces armées canadiennes ou des réorientations de carrière. La démarche est beaucoup plus exhaustive et sérieuse à tous les échelons. Les chefs sont tenus pour responsables.
    Monsieur le président, puis-je ajouter une petite chose?
    Oui, je vous en prie.
    Quand nous parlons d'inconduite sexuelle extrême, il s'agit d'agression sexuelle, de violence très intime commise, dans la plupart des cas, entre deux personnes — des hommes, des femmes, cela n'a pas d'importance. Le problème dans ce cas est d'avoir fait confiance au système, qui est censé prendre soin de vous quand c'est votre parole contre celle de la personne que vous accusez. Alors d'encourager les gens à signaler les incidents... Vous parlez du système disciplinaire. Le fait d'encourager les gens à signaler les incidents et de leur garantir que la chaîne de commandement fera ce qu'il faut est une autre difficulté à laquelle nous nous heurtons. Nous encourageons les gens à signaler autant que possible les incidents.
(1125)
    Monsieur Garrison, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à souhaiter la plus chaleureuse bienvenue à la contre-amirale Bennett et à la lieutenante-générale Whitecross.
    Je félicite aussi la lieutenante-générale Whitecross pour sa nomination. Je m'efforcerai de ne pas la considérer comme une perte pour nous, mais comme un gain pour le Canada sur la scène internationale.
    Tout d'abord, je tiens à souligner la gravité de ce problème. J'ai assisté cette semaine à une réception de l'Association des Parlementaires de l'OTAN où l'un des participants, venant d'un pays allié, a ouvert son discours par une « farce sur le viol ». Cela illustre bien la culture de sexualisation à laquelle vous faites face et les montagnes que vous aurez à franchir.
    Les questions que je vais vous poser sont très sérieuses, mais je tiens avant cela à souligner qu'à mon avis, bien des choses se déroulent très bien et sont très louables. Je félicite le commandement d'aborder cette question avec un grand sérieux. Nous avons beaucoup progressé depuis le temps où les gens prétendaient suivre une politique de tolérance zéro, parce que la tolérance zéro est une aspiration, et non une politique. Il est certain que, comme la contre-amirale Bennett vient de le dire, on met l'accent maintenant sur des mesures plus vastes. Vous n'avez cependant pas mentionné le soutien aux victimes qui, je crois, n'existait pas auparavant. Je suis vraiment heureux de constater ce changement.
    Il n'est pas facile du tout de changer une culture. Je comprends que vous concentriez vos efforts sur les militaires actifs, mais je voudrais que vous me parliez des préoccupations qui y sont liées. Je voudrais vous demander ce que vous ferez pour les cadets, pour les familles qui vivent sur les bases, pour les employés civils et, si nous avons assez de temps, pour les réservistes.
    Commençons par les cadets. Nous avons plus de 50 000 cadets partout au pays. C'est excellent, et j'espère que nous pourrons étendre ce programme, mais il me préoccupe aussi un peu. Ayant entendu parler de ces incidents, plusieurs parents m'ont confié qu'ils hésitaient à envoyer leurs enfants aux cadets.
    A-t-on intégré les problèmes de harcèlement et d'agression sexuelle dans l'orientation et dans l'entraînement des cadets? A-t-on établi des programmes pour les cadets qui pourraient avoir eux-mêmes subi du harcèlement ou de l'agression? Nous savons que ces choses ont lieu dans tous les secteurs de la société. Les cadets ne sont pas si différents des autres jeunes; ces choses risquent d'arriver parmi eux aussi.
    Merci, monsieur le président.
    Nous sommes très honorés d'avoir l'amirale Bennett dans notre groupe parce que, comme vous le savez, elle a aidé à diriger le programme des réservistes et des cadets. Je lui demanderai d'ajouter les détails à ma réponse.
    Permettez-moi d'ajouter que le programme des cadets, que dirigent les Forces armées canadiennes, est encore tenu de servir et de respecter autrui. Nous considérons que tous les cadets, chefs et bénévoles, poursuivront les objectifs de l'opération Honour et qu'il en sera de même pour les hommes et les femmes qui travaillent sur les bases et dans les escadrons situés partout au pays ainsi que pour nos collègues réservistes.
    Bien que je ne sois pas responsable de ce portefeuille, je connais bien les deux programmes pour les jeunes, les Rangers juniors canadiens et les cadets. Ces programmes sont très particuliers à cause du milieu et des collectivités d'où viennent les participants. Dans le cas des cadets et des Rangers juniors, même s'ils ne sont pas membres des Forces armées canadiennes, nous sommes responsables de leur bien-être; c'est une responsabilité qui nous tient à coeur et que nous prenons très au sérieux. Ces familles nous confient leurs enfants.
    Dès le départ, nous sélectionnons très consciencieusement les bénévoles, les adultes qui travaillent pour le programme, qu'ils soient membres des Forces armées canadiennes ou qu'ils soient bénévoles civils. Nous avons aussi préparé un entraînement spécialisé. Au cours de ces deux dernières années, nous avons créé un programme de relations sociales que tous les cadets et leurs chefs adultes doivent suivre. Cette formation a été conçue de manière à renforcer la sensibilité et la compréhension, à encourager les participants à agir et à signaler les incidents et à faciliter la formation sur le harcèlement donnée dans les deux programmes.
    Le programme des Rangers juniors canadiens dispose d'un réseau de soutien différent à cause des services fournis par la police et par les organismes communautaires. Ils ont des programmes communautaires spéciaux pour prévenir les incidents. Les cadets et les Rangers juniors canadiens suivent un entraînement de sensibilisation non seulement pendant l'année, mais avant et pendant les camps d'été.
    Comme la majorité des cadets sont jeunes et mineurs, nos programmes et l'information qui s'y rapporte sont confidentiels. Les cadets sont protégés, et nous prenons toutes les mesures possibles pour veiller à ce que les soins soient adéquats non seulement pour les cadets, mais pour les autres membres du corps et de l'escadron et pour leurs familles. Nous avons une grande variété de programmes de formation, de sensibilisation et de soutien.
(1130)
    Merci beaucoup.
    Je tiens à souligner le travail très créatif accompli pour accommoder les cadets transgenres. Ce travail est en chef de file sur la scène mondiale.
    Ma seconde question a trait aux familles qui vivent sur les bases, particulièrement à celles qui élèvent leurs enfants sur la base. Au cours des années, il a toujours été difficile de trancher à qui revient la compétence dans les cas de harcèlement et d'agression de membres des familles non militaires qui vivent sur la base, surtout lorsqu'il s'agit d'enfants mineurs. Qui en est responsable : la police civile, ou la police militaire?
    La police militaire avait un dossier d'intervention peu reluisant dans les cas de violence familiale et d'agression sexuelle infligées aux enfants. À mon avis, cela provenait principalement de cette confusion au sujet de la compétence. Qui est responsable de protéger les enfants qui vivent sur les bases? Offre-t-on aux familles un centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle?
    Le centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle prend les appels de tout le monde, comme vous l'avez vu dans son rapport d'étape. Il prend les appels de militaires, de membres civils, de fonctionnaires, de membres des familles et des cadets. À l'heure actuelle, l'opération Honour traite en priorité les membres militaires, mais le centre prend les appels des gens et les aide à trouver le soutien dont ils ont besoin. Les responsables du centre ne se contenteraient jamais de prendre simplement leur numéro de téléphone; ils s'efforcent d'aider les gens autant que possible.
    Quant à la compétence, notre police militaire sur les bases et dans les escadrons partout au pays a établi des liens avec les forces de police civile, ou fédérale suivant la région. Lorsque la police militaire est la seule dans une région éloignée — disons que les membres sont en déploiement ou autre —, alors évidemment elle prend charge de l'incident. Cependant, lorsque l'incident implique des membres non militaires, la police militaire s'efforce de remettre le dossier à la police civile de la région et sert ensuite de consultante pour répondre à tous les besoins de la situation. Dans la majorité des cas, partout au pays, ces causes sont confiées à la police civile.
    Et votre temps est écoulé.
    J'espère que j'aurai une autre ronde. J'ai beaucoup d'autres questions à poser. Merci beaucoup.
    Monsieur Gerretsen, à vous la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie beaucoup la générale et l'amirale pour le travail qu'elles accomplissent sur cette question. Il est évident que ce sujet est difficile à aborder, mais j'admire le désir et la passion qui vous inspirent.
    Je représente la circonscription de Kingston et les Îles où se trouve la base de Kingston. Je suis né et j'ai vécu à Kingston. J'ai eu beaucoup d'amis dont les parents étaient militaires; j'ai donc été très exposé à la culture des Forces armées.
    Je connais l'esprit de subordination et de hiérarchie de cette culture. J'ai bien souvent entendu parler — de façon anecdotique, en observant ce qui se passait dans cette communauté — d'incidents survenus hors de la base dont la structure militaire s'occupait en infligeant les sanctions méritées, même si les individus s'étaient trouvés dans la collectivité civile au moment de l'incident. Je comprends et j'admire le profond sens de discipline qui est ancré dans la culture militaire.
    Je reconnais comme vous le fait qu'il faudra beaucoup de temps pour modifier cette culture; il faudra des générations pour y parvenir. Comment réussir à encourager les gens à dénoncer ces incidents, à exprimer leurs préoccupations, à déposer une plainte tout en respectant la discipline entre les différents échelons de commandement?
    Comment adapter cette culture de manière à respecter cette discipline tout en veillant à ce que les victimes soient traitées avec le respect et le sérieux que l'incident mérite, surtout au sein d'une culture où l'on a l'habitude de se faire répondre que les commandants se chargeront de tout régler?
    Dans ma circonscription, j'ai dû m'occuper de problèmes causés par le système de rémunération Phénix. Ma circonscription comprend beaucoup de personnel des Forces armées et des Services correctionnels du Canada. Ceux qui viennent frapper à la porte de mon bureau sont les employés des Services correctionnels, parce qu'ils savent qu'en faisant cela, ils obtiendront des résultats. Les militaires respectent la discipline et s'adressent à leurs supérieurs. Pourriez-vous nous dire quel est votre point de vue à ce sujet?
(1135)
    Je vous dirais que l'on trouve plus d'une culture dans les Forces armées canadiennes. Il y a une culture différente dans chacune des professions. La culture est différente dans l'armée de l'air, dans l'armée de terre et dans la marine. Elle est encore différente dans les forces spéciales. La culture diffère aussi chez les officiers et chez les militaires du rang.
    Des deux caractères que vous décrivez, un a trait à la culture de la hiérarchie, et c'est ce que nous sommes. Nous savons quelle est notre place dans le totem, et nos rôles et responsabilités dépendent de notre position et de notre rang.
    Les responsabilités des superviseurs sont au centre du rapport de Mme Deschamps — je parlerai de la culture de sexualisation dans un instant. À la base de son rapport, elle souligne que les gens de la chaîne de commandement — pas dans tous les cas, mais dans ceux qu'elle a pu étudier — n'ont pas agi comme ils l'auraient dû.
    En ce sens, la culture de la hiérarchie, qui constitue le fondement même de toutes les cultures militaires du monde, s'est brisée parce que les superviseurs n'ont pas tenu compte de ce que leurs subordonnés faisaient ou, après avoir entendu les dénonciations, n'ont pas agi comme ils l'auraient dû. Je le répète, cela ne se produit pas dans tous les cas. Je ne veux absolument pas impliquer des superviseurs qui ont agi correctement.
    Lorsqu'il a décidé qu'il devait donner des ordres aux Forces armées canadiennes, soit l'opération Honour, le général Vance savait que les militaires — et je crois que plusieurs d'entre vous l'ont été — comprendraient ces ordres, qui exigeaient que la chaîne de commandement prenne soin de ses gens.
    Maintenant, certains pourraient soutenir que cette situation ne devrait pas constituer un ordre parce qu'elle va de soi. Mais dans ce cas, au sein d'une culture de sexualisation, il faut que l'on donne un ordre, il faut que les gens sachent ce dont il s'agit et que l'on va prendre les mesures qui conviennent au sein de la chaîne de commandement.
    J'en suis très heureux. Merci.
    Je voudrais aborder un autre sujet avant que mon temps ne soit écoulé.
    Dans le cadre de l'opération Honour, particulièrement dans le cas de l'inconduite sexuelle, on parle beaucoup des femmes et de la façon dont elles sont traitées, parfois de manière peu convenable. Je crois que c'est tout à fait juste.
    Je représente aussi le Collège militaire royal, et pendant la première année, j'ai eu le grand plaisir de siéger au conseil municipal de Kingston avec l'une des premières cadettes. J'ai entendu les horreurs qui se passent entre les hommes et les femmes.
    Je crois que nous devons aussi reconnaître que l'inconduite sexuelle se manifeste entre hommes parfois. Pourriez-vous nous dire ce que fera l'opération Honour pour protéger aussi les victimes masculines?
    Nous avons affirmé clairement, non seulement à l'occasion des assemblées locales, mais aux réunions de l'opération Honour, que tous les membres des Forces armées canadiennes, hommes ou femmes, quelle que soit leur orientation sexuelle, seront traités avec la dignité et le respect qu'on leur doit. Dans son rapport, Mme Deschamps parle surtout des femmes, mais elle mentionne aussi le viol d'homme à homme et quelques autres faits liés à la communauté des homosexuels et des LGBTQ.
    Nous affirmons que toutes les personnes doivent recevoir le même traitement. C'est une norme. Alors nous retournons examiner les analyses comparatives hommes-femmes, les conclusions impartiales que les gens tirent sur l'apparence d'autrui et autre, et nous veillons à ce que nos politiques, notre formation et tout le reste reflètent vraiment cela.
    C'est là que j'en arrivais. Est-ce que la formation — pas nécessairement les politiques, parce qu'elles supervisent le tout — traitera aussi, peut-être, de l'agression d'homme à homme?
    Oui, tout à fait.
    Merci. Merci, monsieur le président.
(1140)
    Pour vous rassurer, permettez-moi d'ajouter que nous consultons des groupes de soutien par les pairs et des défenseurs des causes, ainsi que des groupes de soutien aux hommes et aux survivants. Nous avons aussi réuni beaucoup de ressources pour la formation afin de traiter d'un vaste éventail de sujets, et cela se retrouve dans les témoignages des victimes et dans les jeux de rôles que nous utilisons pour la formation.
    C'est excellent.
    Nous passons maintenant à des questions de cinq minutes. Madame Alleslev, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, et merci d'être venues aujourd'hui. C'est un honneur de vous avoir avec nous.
    Je ne peux m'empêcher d'observer que la direction de cette initiative, ce qui comprend l'analyse des comparaisons hommes-femmes, ou sexospécifique, que vous avez mentionnée, est entièrement assurée par des femmes. Serait-il possible qu'on interprète cela comme étant un problème de femmes que seules des femmes pourront résoudre? Pourquoi des officiers, que l'on trouve en si grand nombre dans les Forces armées canadiennes, ne s'occuperaient-ils pas de ce problème?
    Vous avez tout à fait raison, et j'ajouterais que j'y ai réfléchi quand on m'a placée à la tête de cette initiative. Peut-être qu'aux yeux du grand public, j'étais la porte-parole de ce que j'appellerais un comportement insidieux.
    En y repensant, je me suis rendu compte — et je parlerai d'abord de moi-même, puis de mes collègues —, que je désire passionnément changer cette situation. Alors je me dis que j'ai été bien choisie, et que Jennifer a été bien choisie pour lancer les phases initiales de cette initiative.
    J'ai deux choses à ajouter. Le général Vance a décrit clairement sa priorité. Il est le porte-parole. Ce problème lui appartient, et il en dirige la résolution pour les Forces armées canadiennes. Par conséquent, tous ceux qui relèvent directement de lui... donc mes collègues du rang de lieutenant-général doivent aussi en porter la responsabilité, dans tous leurs rangs. Du point de vue hiérarchique, l'amirale Bennett et moi prenons soin de l'institution, de la formation, de l'éducation et des politiques. Quant aux questions de direction et de commandement et de contrôle, chacun de mes collègues et de mes pairs s'en charge, jusqu'aux hommes et aux femmes qui sont tout au bas de l'échelle de commandement.
    Merci. Je vous prie de ne pas vous y méprendre, cette question ne visait en aucun cas à...
    Non, je comprends.
    ...vos capacités ou le travail que vous accomplissez, qui est extraordinaire. Cependant, certains risquent peut-être de ne pas comprendre que même si le général Vance prend cette initiative très au sérieux, il est aussi chef d'état-major de la Défense et il a bien d'autres responsabilités à assumer.
    Je sais que vous vous êtes concentrée sur le problème, que vous êtes intervenue dans les cas d'incidents et puis, bien sûr, que vous avez donné du soutien aux victimes et effectué de la prévention. Vous nous avez dit que vous faites de grands progrès, mais je voudrais comprendre quels sont les indicateurs clés de chacune des catégories par lesquelles vous définissez ces progrès.
    J'étais officier dans les Forces armées canadiennes. J'étais au Collègue militaire royal de Kingston. En 1998, j'ai reçu la formation du programme SHARP, qui à l'époque était un programme important qui traitait du harcèlement et du racisme ainsi que de l'équité des sexes. Il n'y a pas longtemps, j'étais aux 25e retrouvailles des anciens et je parlais à quelques cadets, et il est difficile de savoir quels progrès ont été accomplis.
    Monsieur le président, si vous me le permettez, je voudrais demander à l'amirale Bennett de répondre à cette question. Elle s'occupe justement des indicateurs, et elle pourra vous donner plus de détails.
    Vous soulevez là l'une de nos plus grandes difficultés. Nous reconnaissons qu'il est facile de démontrer l'intention et l'action, mais qu'il faut surtout présenter les résultats. Nous ne faisons qu'entamer cette étape, alors une bonne partie de nos mesures sont anecdotiques quand nous examinons les effets de notre initiative.
    La première ligne, celle de la compréhension dont vous venez de parler, est continuelle. Nous incitons notre institution à mieux comprendre la portée et l'essence du problème, mais nous découvrons que les conversations changent au niveau de la base et de l'escadron. Les gens discutent plus ouvertement de ces questions. Nous recevons plus de questions et de demandes de renseignements par l'intermédiaire de mon équipe et du centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle. Les gens posent des questions et demandent des ressources afin de mieux comprendre.
(1145)
    Alors je suppose que nous verrons les indicateurs et les résultats réels à mesure que l'initiative évoluera.
    L'enquête de Statistique Canada nous fournira une base de référence sur la prévalence du problème ainsi que sur la sensibilisation du phénomène et la compréhension qu'en ont les gens. Nous avons également modifié et mis au point des paramètres précis expressément destinés aux recrues et aux cadets de nos deux collèges militaires. Nous menons nos propres enquêtes sur le climat qui règne dans les unités. Nous travaillons à l'amélioration de certaines de nos stratégies actuelles d'évaluation et tenons des discussions sur le sujet. Par la suite, nous nous pencherons sur le maintien en poste, le recrutement et d'autres facteurs, mais nous ne faisons que commencer
    Votre temps est écoulé, Leona.
    Merci.
    Je donne maintenant la parole à M. Bezan.
    Générale Whitecross et amirale Bennett, je suis très heureux de vous revoir. Je tiens à vous remercier pour vos états de service et pour ce que vous faites en ce moment même pour les membres des Forces armées canadiennes. Vous jouez un rôle très important. Même si l'opération Honour a été mise en place à l'initiative et sous la direction du CEMD, il reste que c'est vous qui en assurez la mise en oeuvre et qui veillez au respect de ses règlements.
    Je vais revenir sur un commentaire formulé précédemment à propos des mesures disciplinaires qui ont été prises. Certains d'entre nous aimeraient savoir quels types de mesures disciplinaires ont été prises pour sanctionner les auteurs d'inconduites et d'agressions sexuelles. Vous pourriez nous en donner quelques exemples. J'aimerais aussi savoir quelles mesures ont été prises contre ceux et celles qui faisaient partie de la chaîne de commandement, ceux qui n'ont aucunement tenu compte des victimes ou qui ont détourné le regard, pour reprendre vos paroles, sur ce comportement insidieux.
    Monsieur le président, je vais, une fois de plus, demander à Jennifer de répondre à cette question. Nous avons effectivement des informations à vous donner, et plus tard, nous pourrions vous transmettre une copie papier des mises à jour.
    Comme je l'ai mentionné plus tôt, une série de procès sommaires et de cours martiales ont été tenus. Les résultats des cours martiales sont accessibles au public. Le grand prévôt et le JAG, le juge-avocat-général, rédigent tous deux des rapports annuels dans lesquels ils font le compte rendu de leurs enquêtes et de leurs conclusions relativement aux accusations portées et à notre système judiciaire. Un commandant a été relevé de son commandement. Un SMR a été déchargé de ses fonctions et 15 militaires ont été relevés de leurs fonctions de supervision ou d'instruction, entre les mois d'avril et de septembre. À part les accusations portées et les condamnations prononcées dans le cadre des procès sommaires et des cours martiales, il reste encore des cas d'infractions à caractère sexuel en instance de procès devant les cours martiales.
    Pour ce qui est des amendes et des sanctions imposées, elles vont de l'emprisonnement et de la destitution des Forces armées canadiennes aux sanctions pécuniaires, selon l'échelle des peines. Ces inculpations ne portent pas toutes sur des agressions sexuelles; certaines visent l'inconduite sexuelle et le comportement inapproprié.
    Quant aux sanctions administratives, elles vont des avertissements écrits et de fiches versées au dossier aux mesures touchant la carrière. Il s'agit d'un processus progressif. Il y a des cas où, comme je l'ai dit, les mesures ont consisté à relever de leurs fonctions les personnes qui occupaient un poste de supervision. Dans d'autres cas, nous avons porté des accusations pour infraction ou versé au dossier des fiches qui auront une incidence sur la progression professionnelle de ces personnes ou sur leurs possibilités de faire partie de planification de la relève. Il y a également eu des cas de destitution des Forces armées canadiennes.
    Quand nous nous sommes engagés sur cette voie, sur celle de l'opération Honour en particulier, j'étais préoccupé par la capacité de la haute direction à comprendre ce qui devait être fait et à le mettre en oeuvre, surtout à la suite de la directive ferme du CEMD. J'étais inquiet de ce qui allait se passer avec les cadres moyens. Les maîtres, les adjudants, les sergents-majors et les caporaux-chefs comprenaient-ils le message? Pensez-vous que les mesures disciplinaires qui ont été prises envoient le message que la culture sexuelle existante au sein de certains segments des Forces armées canadiennes est en train d'être endiguée?
    Je peux vous dire que les cadres moyens, et certainement les adjudants, font passer le message aux rangs inférieurs de la chaîne de commandement. L'adjudant-chef West et un certain nombre d'adjudants de mon organisation de niveau 1 et d'autres cadres moyens de l'armée en parlent aux sous-officiers supérieurs lors des séances de formation que tous les sous-officiers supérieurs sont tenus de suivre avant d'être promus, et ils le font régulièrement, tous les mois. Ils se rendent au Collège royal militaire de Saint-Jean, là où les cours sont offerts, et abordent ce sujet très ouvertement.
    Quand le projet a commencé, il y a un peu plus d'un an, ils entendaient une foule de commentaires démontrant à quel point les gens étaient incrédules, ils n'y croyaient tout simplement pas. Aujourd'hui, c'est tout à fait le contraire. Les gens écoutent et rapportent des anecdotes qui illustrent les faits présentés. Ils demandent conseil sur ce qu'ils doivent faire s'ils se trouvaient dans telle ou telle situation. Donc, la conversation elle-même a changé de direction. Il a fallu plusieurs mois, je vous le concède, mais je pense qu'il s'agit d'un bon moyen non scientifique de voir où nous en sommes.
(1150)
    Générale Whitecross, avant l'ouverture du Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle, vous avez visité un certain nombre de pays alliés pour voir comment on compose, ailleurs, avec l'inconduite sexuelle. Avez-vous l'impression d'avoir la bonne combinaison d'outils pour offrir le soutien nécessaire aux victimes? Sentez-vous que vous avez la capacité d'enquêter sur les allégations portées à votre attention?
    Amirale Bennett, pensez-vous que votre bureau dispose des ressources nécessaires pour s'acquitter de la tâche qui lui a été assignée?
    Nos visites dans des pays alliés nous ont clairement indiqué que les victimes doivent constituer notre grande priorité, et c'est ce que nous avons retenu de plus important. On nous a également recommandé de prendre le temps qu'il faut pour faire les choses correctement. J'irais jusqu'à dire, comme un député l'a mentionné il y a un instant au sujet du programme SHARP, que celui-ci était peut-être une bonne chose à l'époque, mais la situation d'ensemble était différente. SHARP n'était pas véritablement ni résolument axé sur le comportement indélicat ou inapproprié dont on parle. On nous a dit de nous assurer que ce que nous accomplissons aujourd'hui sera là demain et pour des années à venir. Nous prenons cela très au sérieux.
    Pour ce qui est des commentaires de nos alliés sur l'aide aux victimes, nous en faisons une priorité fondamentale. On nous a clairement signalé l'importance de créer un centre pour les victimes. Pour le moment, le centre lui-même, le Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle, n'a pas atteint sa pleine capacité opérationnelle. Si on se fonde sur les appels reçus, on se rend compte qu'il reste beaucoup de travail d'analyse et de recherche à faire. Faudrait-il augmenter le nombre d'heures d'ouverture? Avoir davantage de conseillers? Devrait-on créer des unités satellites dans d'autres régions du pays? Nous travaillons encore sur ces questions. Par le passé, jamais les services dispensés par le Centre n'ont été disponibles auprès du gouvernement du Canada, encore moins auprès des Forces armées canadiennes. Le Centre a une très grande utilité. Il y a maintenant des personnes qui, outre les services reçus, tirent parti des résultats d'enquêtes qui à mon humble avis n'auraient jamais été menées n'eut été du Centre. Nous avons encore du pain sur la planche, mais c'est un bon début.
    Pour répondre à votre question, je reçois un énorme soutien des Forces armées. Parallèlement, une des initiatives qui nous ont valu des éloges est celle qui nous a amenés à solliciter l'aide de spécialistes externes dans le domaine. Nous nous sommes tournés vers d'autres forces armées et d'autres institutions, parce que nous ne sommes pas les seuls à faire face à ce problème. Nous puisons dans les ressources et recourons à des services de spécialistes, que ce soit sous forme de programmes de formation offerts sur le marché ou par l'entremise de ressources éprouvées. Nous sommes en train de former un conseil consultatif externe pour enrichir nos connaissances. Nous sommes constamment à la recherche de personnes qui possèdent le savoir qui nous fait défaut.
    Merci pour ces précisions.
    La parole est à M. Rioux.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Mesdames, je souligne votre travail, parce que vous avez une mission difficile, qui est de changer une culture. Je suis content d'entendre que la circonscription de Saint-Jean participe à la solution.
    J'aimerais parler du rapport que publié le 1er février 2016, à la suite des recommandations de l'ancienne juge Mme Deschamps. Dans ce rapport, on constate qu'on réalise « de bons progrès dans l'exécution d'Opération HONOUR, nonobstant le côté rébarbatif d'un changement de culture de l'institution [...]».
    Pouvez-vous me donner des exemples de ce « côté rébarbatif », et me dire pourquoi?

[Traduction]

    Vous parlez de facteurs négatifs associés à un changement de culture? Tout ce que je peux dire, monsieur, c'est qu'en ce qui concerne ce comportement, un changement de culture ne peut aboutir qu'à des facteurs et à des résultats positifs.
    Si des gens — hommes ou femmes — ne se respectent pas, ce que nous définissons comme étant le principe même de l'honnêteté, du respect et de la dignité à l'égard de tous, je dirai qu'ils ne sont pas dignes de porter l'uniforme qui représente notre pays. Ce n'était qu'un commentaire.
    Avec la juge Deschamps, nous avons discuté de nombreux défis. Le changement de culture en est un. C'est un défi tellement grand que rien que le fait d'amener les gens à dénoncer crée, en soi, un second problème. Nous essayons de créer un environnement où règne un climat de confiance, je sais qu'en ce moment le mot « confiance » est un très grand mot, de sorte que chacun d'entre nous, militaires et civils — principalement les militaires hommes et femmes faisant partie de la chaîne de commandement des auteurs de ces comportements — sachent qu'en prenant la décision de dénoncer, ils font ce qui est juste de faire.
    La dynamique fait aussi problème. Pour l'instant, nous sommes sur notre lancée et il va nous falloir la maintenir dans les années à venir.
(1155)

[Français]

    Quand on dit que les gens sont rébarbatifs, se peut-il que ce soit parce qu'ils ont de la difficulté à définir ce qu'est une inconduite sexuelle?

[Traduction]

    Excusez-moi, monsieur, mais je n'ai pas saisi la première partie de la question.

[Français]

    On a parlé du côté rébarbatif. On a dit que les gens ont de la difficulté à comprendre ce qu'est une inconduite sexuelle. Le problème est-il que la définition pas claire pour eux?

[Traduction]

    C'est une bonne question, monsieur. En fait, la juge Deschamps a notamment recommandé que nous revoyions nos définitions, que nous les rendions plus faciles à comprendre et que nous les intégrions dans une politique ou du moins que nous les unifiions pour que les gens n'aient pas à chercher à différents endroits, dans différentes politiques, et qu'ils n'aient pas affaire à différentes définitions.
    Comme je suis militaire, ma définition du harcèlement sexuel, par exemple, est différente de celle en usage à la fonction publique. Ma définition de harcèlement sexuel s'applique à toute forme de harcèlement, où qu'il se produise, que ce soit sur un terrain de sport, dans une épicerie, au travail, en déploiement, tandis que le harcèlement sexuel à la fonction publique se limite à ce qui se produit dans l'espace de travail. Nous devons veiller à ce que la nuance que nous apportons pour les militaires soit parlante et qu'elle soit bien comprise par toutes les femmes et par tous les hommes en uniforme.
    La notion de compréhension est une dimension importante de notre plan d'action... Les gens comprennent ce qu'inconduite sexuelle veut dire. Ils comprennent la différence entre le bien et le mal, mais que pouvons-nous faire à ce sujet? Quelles sont les pratiques exemplaires en vigueur dans le monde ou au Canada? Quelles installations, ou, comme Jennifer Bennett l'a dit, quelles autres organisations ou centres d'intervention en cas de viol, par exemple, pourraient nous aider à déterminer ce qu'il convient de faire à l'avenir afin de combattre ce besoin insidieux? Nous devons regrouper tout ce qu'il y a de bien pour l'inscrire dans votre plan d'action afin de ne pas tout recommencer à zéro. Nous devons bien comprendre comment parvenir à faire table rase de ce genre de comportement, plutôt que de simplement nous attaquer à son élimination.
    Puis-je ajouter une chose? Il n'a pas simplement été question de définir les différents types de comportements, mais de cerner l'ampleur et la portée du phénomène. Il fallait nous assurer que les gens comprendraient que tout cela ne se limite pas aux actes justiciables, mais englobe les remarques formulées en milieu de travail ou, comme le député l'a dit, les blagues déplacées et les observations désinvoltes. Depuis le début, l'un de nos défis consiste à décrire la portée et l'envergure des comportements et des actions à décrire.
    Et puis, la terminologie de la société canadienne change et nous nous heurtons à des problèmes occasionnés par l'emploi de mots comme « observateur » ou « spectateur ». Nous donnons, certes, une formation pour favoriser l'intervention des observateurs, mais ce mot laisse entendre que la personne est passive et on constate, dans la société en général, tout un débat sur la façon d'outiller les gens pour qu'ils agissent.
    Le gouvernement du Canada va appliquer une stratégie de lutte contre la violence en milieu de travail qui va comprendre toute une gamme d'activités mentionnées dans l'opération Honour. Le vocabulaire évolue également dans la société et nous suivons cela de très près.
    Merci pour votre réponse.
    Monsieur Miller, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Amirale Bennett et générale Whitecross, merci beaucoup de vous être déplacées et merci pour vos états de service pour le Canada.
    Félicitations pour votre nomination, générale. Je trouve cela fantastique.
    Votre rapport semble indiquer que le nombre d'incidents signalés est en hausse, mais il faut attribuer une bonne partie de cette augmentation au fait que les plaignants se sont enfin rendu compte que l'armée a l'intention de vraiment se débarrasser de ce fléau, d'où le plus grand nombre de plaintes. Pourriez-vous nous communiquer la ventilation de ces cas? Constate-t-on une augmentation du nombre d'incidents ou s'agit-il de vieilles affaires qui remontent à la surface?
(1200)
    En fait, nous ne disposons pas de statistiques sur les années précédentes. L'enquête de Statistique Canada, qui sera disponible en novembre, va nous servir de point de départ.
    Nous nous attendions à ce que, à la faveur d'un nouveau climat favorisant les signalements, nous constaterions une augmentation du nombre de déclarations, et nos alliés nous avaient d'ailleurs prévenus. Ils avaient dit: « attention, vous allez voir augmenter le nombre de signalements dans les premières années, parce que les gens vont tester le système. Ils voudront s'assurer que vous faites effectivement ce que vous avez annoncé. »
    Nous en sommes là pour le moment, avec des gens qui portent plainte, et j'irais jusqu'à dire que nous n'avons pas encore tout vu. Nous avons encore beaucoup d'obstacles à surmonter pour convaincre les gens qu'ils doivent faire des déclarations. L'un des avantages du centre est qu'il exonère les plaignants d'ouvrir un dossier. Il n'est pas nécessaire de tenir une enquête. Les plaignants peuvent juste se prévaloir de l'aide dont ils ont besoin pour surmonter ce qu'il leur est arrivé ou, du moins, pour confronter ce qu'ils ont subi.
    Dans certains cas, et Dieu merci, les personnes concernées ont suffisamment confiance en elles et envers le système pour faire ouvrir le dossier et lancer une enquête, ce qui nous permet de nous en prendre aux auteurs ou aux présumés coupables, ce qui est excellent. La réalité est que nous ne disposons pas de statistiques pour les années passées.
    Certaines personnes qui portent plainte le font relativement à des affaires passées. Dès le début, lors de nos assemblées publiques, nous avons compris que les gens voulaient nous parler de ce qu'il leur était arrivé il y a 5, 10, 15, 20, 25, voire 30 ans, parce qu'ils ne s'étaient pas remis encore. Nous essayons, par ailleurs, de leur faciliter une aide.
    Le fait qu'ils ne s'en soient pas remis montre que les gens sont terrorisés à vie par la suite. Cependant, comme ils ont suffisamment confiance pour en parler maintenant, cela me conforte dans mon impression que l'armée est véritablement en train de chercher à régler le problème et le crédit vous en revient.
    À la lecture de votre rapport, j'ai constaté que le nombre de cas chez les cadets ou les nouvelles recrues semble être supérieur, puisqu'il était, je crois, de 27 ou de 28 %. Si la culture est en train de changer, et nous espérons que c'est le cas, ces proportions vous préoccupent-elles ou les expliquez-vous pour une raison particulière? Expliquez-vous que ces chiffres soient si élevés? Pouvez-vous réagir à cela?
    Encore une fois, nous n'avons pas de statistiques antérieures pour faire des comparaisons, mais il y a une augmentation. J'aurai deux ou trois choses à dire.
    Les cadets et les officiers cadets sont deux groupes radicalement différents. Je veux m'assurer que nous nous comprenons bien. Le programme des cadets est un programme qui s'adresse aux jeunes de 18 ans et moins, tandis que les officiers cadets sont de jeunes officiers accueillis dans les collèges militaires. Nous sommes en train de créer un climat, je crois, qui... Maintenant, nous commençons dès les centres de recrutement. Nous parlons des problèmes et expliquons que ce genre de comportement ne saurait être toléré.
    À l'ELRFC, l'École de leadership et de recrues des Forces canadiennes, de Saint-Jean, les instructeurs, y compris ceux du collège militaire du Canada, ont tout récemment reçu une formation spéciale. Nous en parlons donc et veillons à ce que toutes les recrues sachent que ce comportement ne peut être toléré. Cela a sans doute beaucoup à faire avec le fait qu'il y a des plaintes.
    C'est ce que nous aimons à penser et j'espère que l'humeur ou la façon de voir l'inconduite et le harcèlement sexuel est en train de changer comme c'est le cas dans le civil. Est-ce, ce que vous constatez chez vos jeunes cadets, chez les recrues en général?
    C'est ce que je dirais, monsieur. À l'école des recrues, le mois dernier, une recrue qui se sentait mal à l'aise à cause du comportement d'un membre du personnel a fait une déclaration. La réaction a été immédiate et la recrue est encore avec nous. C'est anecdotique, évidemment, parce que nous n'avons pas de statistiques antérieures, et que nous ne savons pas si des recrues sont déjà parties à cause d'un comportement déplacé, mais comme les cadets constatent que la direction de l'école de Saint-Jean agit sans tarder, ils ne quittent pas l'école et obtiennent tout l'appui dont ils ont besoin. La sensibilisation a beaucoup à faire dans tout cela.
    Je commencerai par dire que nous ne sommes pas encore là où nous devrions être. Nous avons encore beaucoup de travail à faire, mais je suis sûre que nous réalisons des avancées.
(1205)
    Continuez le bon travail et je suis sûr que vous allez dans la bonne direction.
    Merci, monsieur.
    Puis-je ajouter une chose en réponse à votre première question, monsieur? Depuis un an que le CIIS est ouvert, nous avons ouvert 29 enquêtes à la suite d'appels de militaires, des personnes qui ont été mutées, ce qui n'aurait pas été possible avant. Tout semble par ailleurs indiquer que les gens sont rassurés par le fait qu'ils peuvent d'abord s'adresser à un conseiller, puis à la police militaire.
    Pour en revenir à votre dernière question, tout comme dans le civil, nous avons des problèmes. Tout à l'heure, un député a expliqué que les gens n'ont pas tous les mêmes valeurs et n'appliquent pas tous les mêmes normes, mais il est important que nous établissions, d'entrée de jeu, ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas. Nous traitons avec des jeunes qui cherchent encore leur voie et qui n'ont pas tous les mêmes valeurs.
    Merci, amirale.
    Monsieur Fisher, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    À l'instar de mes collègues, je tiens à vous dire que c'est un honneur de vous recevoir ici aujourd'hui. Merci beaucoup d'être venus.
    J'aimerais parler de la réintégration des victimes qui ont déposé une plainte. Pouvez-vous nous donner des exemples de réintégration réussie? Ces personnes sont-elles mises au ban? Ont-elles le sentiment d'avoir toujours leur place? Ou diriez-vous que la réintégration pose quelques problèmes?
    Désolée, monsieur, parlez-vous du suspect ou de la victime?
    De la réintégration de la victime après le dépôt de sa plainte.
    La réalité est la suivante, et Mme Deschamps l'a bien décrite. Les hommes et les femmes qui ont été harcelés sont ostracisés lorsqu'ils portent plainte, pour une foule de mauvaises raisons, à mon humble avis. Nous essayons de changer la donne. Cela ne veut pas dire que nous devons ostraciser les suspects, mais nous devons nous rallier autour de la victime.
    Le général Vance a été très clair à cet égard. Je sais que mes collègues — les commandants de l'Armée, de l'Aviation et de la Marine — sont fondamentalement d'accord pour dire qu'il est nécessaire d'offrir un soutien émotionnel, intellectuel et mental, que la chaîne de commandement est digne de confiance et qu'il est primordial de bien accompagner la victime. C'est ce que nous essayons de faire, mais les victimes ont de la difficulté à s'imaginer retourner dans leur milieu de travail. Tout dépend du traitement que nous avons réservé au suspect, sachant que nous devons exercer une diligence raisonnable à son égard également. Nous devons changer notre façon de faire, ce qui n'a pas toujours été le cas dans le passé. Nous y travaillons.
    Avez-vous des exemples de réussite à nous donner? Avez-vous l'impression que ça fonctionne?
    Nous intégrons notre soutien aux victimes dans l'ensemble du processus. Nous ne nous contentons pas d'encourager les victimes à porter plainte. Par exemple, nous avons créé un point de contact unique à la police militaire affectée au CIIS, de sorte que les victimes n'ont pas à répéter leur histoire à plusieurs personnes, tout dépendant du moment où elles se présentent. Cette procédure s'appliquera à l'ensemble du système de justice militaire, ce qui permettra au directeur des poursuites militaires d'accorder la priorité aux infractions de nature sexuelle et de rendre justice plus rapidement. Le cas est entre les mains d'un seul procureur; cela permet d'aider la victime à comprendre le processus et de traiter son cas de manière cohérente.
    Nos services de soutien ont multiplié les activités de sensibilisation et d'éducation à l'intention de leurs employés afin qu'ils comprennent les répercussions du traumatisme. Nous allons étendre ces activités au niveau des unités déployées dans les collectivités, comme nous l'avons fait pour les initiatives de santé mentale. Cela nous permet de mieux comprendre ce que vit la personne et de savoir quel genre de soutien lui offrir.
    Notre plus grand défi, ce sont les petites unités, par exemple, à bord d'un navire ou dans le cadre une opération faisant intervenir un petit groupe fermé. Nous épluchons notre système judiciaire dans l'espoir d'y trouver de la documentation sur les répercussions sur la communauté, pas seulement sur les victimes, pour comprendre si les répercussions rejaillissaient aussi sur la communauté. Nous nous inspirons de nos autres initiatives — en particulier dans le domaine de la santé mentale — pour savoir comment réintégrer et aider les membres qui ont subi des traumatismes de cette nature.
    Je vous félicite pour cet effort. L'avenir nous dira si c'est un succès ou une solution gagnante.
    Générale, vous avez parlé des équipes d'intervention en cas d'infraction sexuelle qui ont été créées mardi. Vous avez également dit que chaque rapport sur une infraction de nature sexuelle, qu'elle soit nouvelle ou ait eu lieu dans le passé, fera l'objet d'une enquête indépendante dans le cadre de l'Opération Honour; vous avez enfin parlé des mécanismes de la justice militaire.
    Y a-t-il une séparation entre les processus de justice militaire et l'Opération Honour? Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste cette séparation? S'agit-il de deux initiatives parallèles? Sont-elles menées en collaboration? Existe-t-il une collaboration entre ces différents processus?
(1210)
    Le système judiciaire et le système de police militaire ne font pas partie de la chaîne de commandement, pour des raisons évidentes, comme vous pouvez le comprendre. Ils sont en grande partie fondés sur les recommandations de la juge Deschamps ainsi que sur le mandat et les objectifs de l'Opération Honour. Nous essayons de voir comment ces organisations peuvent nous soutenir et travailler de concert avec nous. L'équipe d'intervention en cas d'infraction sexuelle, ou EIIS, est le fruit de cette collaboration. Ici, les membres de la police militaire, qui fait partie du service national d'enquête, ont reçu une formation plus poussée sur les infractions de nature sexuelle. Comme ils sont beaucoup mieux formés pour la conduite d'enquête et le traitement des victimes, ils sont donc les seuls intervenants dans ce genre de cas. Ils sont hautement compétents. Cela permet à l'enquêteur du service national d'enquête de se consacrer à d'autres dossiers.
    Cela nous permettra de mener des enquêtes rapidement, et c'est justement là l'une des recommandations de Mme Deschamps. Nous aurons également la possibilité de former des spécialistes dans ce domaine, ce qui est indispensable si nous voulons aider les victimes.
    C'est la même chose pour le directeur des poursuites militaires dans le cadre du système de justice militaire. Comme l'a dit l'amirale Bennet, nous essayons de trouver des moyens d'aider les victimes tout au long du processus afin que celles-ci ne soient pas obligées de répéter leur histoire devant plusieurs intervenants. En fait, le directeur des poursuites militaires doit déterminer, de concert avec l'enquêteur, s'il y a lieu de porter ou non des accusations. Dans le passé, tous deux avaient le pouvoir de dire oui ou non à la police militaire, l'enquêteur ou le directeur des poursuites criminelles. Maintenant, il n'y aura plus qu'un seul point de contact.
    Nous avons lancé une foule d'initiatives, entre autres, l'examen de la cour martiale. Nous travaillons en collaboration.
    Votre temps de parole est écoulé. Je pense que nous aurons du temps à la fin de refaire un autre tour.
    Monsieur Garrison, vous avez trois minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Dans mon intervention précédente, je parlais des familles dans les bases. Je suis ravi d'apprendre qu'il existe une collaboration renforcée entre la police militaire et les autorités civiles. J'ai pu constater, dans une affaire antérieure retentissante, que cette collaboration avait fait défaut et qu'avant aujourd'hui, la victime n'avait aucun recours en justice. Je pense que c'est une initiative très importante de votre part. Il est très important que la police militaire reçoive une formation accrue en matière d'agressions sexuelles. Je vous félicite pour cette initiative. Je me demande ce que nous pouvons faire pour réparer les injustices commises dans le passé. Il faudra en discuter sur une tribune distincte.
    Je comprends très bien, je le répète, que vous vous préoccupiez surtout des membres en service. J'ai trois petites questions à ce sujet.
    La première concerne les employés civils. Dans ma circonscription, il y a autant de civils qui travaillent pour le MDN que de militaires. Les lieux de travail sont souvent mixtes. Comment abordez-vous la question des milieux de travail mixtes?
    Ma deuxième question concerne les réservistes — ma circonscription en compte aussi un grand nombre. Le vérificateur général a exprimé des réserves au sujet de la formation des réservistes. Je me demande si cette formation porte également sur les comportements sexuels déplacés.
    Ma troisième question concerne le déploiement de Casques bleus. L'armée canadienne a certainement réduit la formation qui leur est dispensée. Croyez-vous que les militaires déployés dans le cadre des nouvelles missions de maintien de la paix reçoivent la formation requise concernant l'inconduite sexuelle à l'endroit de la population civile à l'étranger?
    Monsieur, si vous le permettez, je répondrai d'abord à votre dernière question, parce que c'est la plus facile. Désolée, je ne voulais pas dire facile, c'est une question très difficile.
    Tous ceux qui participent à ces déploiements, que ce soit dans le cadre des missions de maintien de la paix ou de l'OTAN, reçoivent une formation spéciale sur la culture, selon l'endroit où ils sont déployés. Ils reçoivent également une formation sur la problématique hommes-femmes conformément à la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies relative aux femmes, à la paix et à la sécurité. Ma réponse est donc oui, nous dispensons une formation et nous l'améliorerons avec le temps.
    Concernant les civils et les réservistes, nous travaillons de concert avec M. Kin Choi, le SMA des employés civils, pour nous assurer que nos politiques sont bien alignées. Je sais que l'amirale Bennet et qu'un membre de son personnel travaillent très fort, en notre nom, non seulement sur les dossiers de harcèlement, mais aussi sur le bien-être général du personnel du ministère — militaires, civils que civils, réservistes, entrepreneurs, tout le monde. Nous traitons non seulement les problèmes sociaux les plus difficiles, comme ceux abordés ici aujourd'hui, mais nous essayons également de réduire la pression dans les milieux de travail, par exemple, de soulager le stress, de renforcer la résilience. Nous essayons d'avoir une approche plus globale à l'égard de tous les membres de l'équipe de la défense. Je sais que l'amirale Bennett est très engagée dans le travail que nous effectuons.
    Concernant les réservistes, c'est en gros la même chose. Nous ne faisons pas de distinction entre les réservistes et les militaires réguliers. Que vous serviez dans la réserve, que vous soyez déployé en service actif ou que vous soyez membre de la force régulière, les attentes sont les mêmes.
(1215)
    Je peux apporter quelques précisions concernant la formation. Dans le cadre de la formation prédéploiement, nous insistons davantage sur la problématique hommes-femmes liés aux droits des femmes, à la paix et la sécurité lors des opérations. Nous avons déployé des conseillers en matière d'égalité entre les sexes auprès de tous les commandants opérationnels, et nous les déploierons aussi dans le cadre de nos opérations. Nous ne sommes pas les seuls à le faire. Il s'agit d'une initiative de l'OTAN et de l'ONU, et des principaux pays membres de ces deux alliances.
    Quant à la formation des réservistes, avec la participation de l'Opération Honour, elle s'adresse à tous les membres des Forces canadiennes armées. Il y a peut-être quelques différences entre la formation dispensée aux rangers canadiens, aux membres des organisations de cadets et du service d'administration ou de la première réserve, mais tous les membres des Forces armées canadiennes suivent cette formation. Elle a été conçue pour être utilisée surtout au niveau local ou au sein des unités, où les ressources sont déjà disponibles. Elle ne s'adresse pas seulement aux membres à temps plein, mais également aux membres à temps partiel.
    Merci.
    Cela met fin à la période de questions. Je sais que vous avez encore bien des questions à poser. Je vais faire un nouveau tour, tout en essayant de limiter les interventions à cinq minutes, afin que tout le monde ait un temps de parole équitable. Je commence par vous, madame Alleslev. Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup.
    Pourriez-vous nous indiquer en quoi ce programme favorise l'intégration des femmes au programme militaire, notamment en ce qui concerne les officières.
    Un changement de culture exige parfois un bon leadership et la capacité d'attirer et de retenir des candidates. Il faut aussi nommer des femmes à des postes de commandement. Quels sont les progrès accomplis quant au nombre d'officières nommées dans de tels postes, en particulier dans des fonctions opérationnelles du GPM?
    Le général Vance a clairement indiqué que le nombre de femmes augmentera annuellement de 1 % au cours des prochaines années, pour atteindre le quota de 25 % qui nous a été imposé par la Commission canadienne des droits de la personne. En toute franchise, c'est le taux que nous devons atteindre. Nous en sommes actuellement à 15 %, et cela s'applique autant aux officières qu'aux militaires du rang.
    Comme vous pouvez le constater, les pourcentages sont beaucoup plus élevés au sein de certains groupes professionnels comparativement à d'autres. Les femmes sont moins nombreuses dans les emplois non traditionnels que dans les emplois traditionnels. Il faut supprimer de notre vocabulaire les termes « non traditionnel et traditionnel » et parler plutôt d'emplois militaires, puisque c'est de ça qu'il s'agit. Ce sont des emplois accessibles autant aux hommes qu'aux femmes ou des emplois paritaires, si vous voulez.
    Une foule de mesures sont prises dans ce sens. Par exemple, les Forces armées canadiennes viennent de lancer leur stratégie de diversité dans le but de nous aider à adopter un processus plus rigoureux et plus durable. Nous collaborons étroitement avec centres de recrutement pour recruter davantage de femmes, et pour toutes sortes de bonnes raisons. Nous encourageons les hommes et les femmes des minorités visibles et les Autochtones à s'auto-identifier pour faire en sorte que leur représentation au sein des Forces armées canadiennes soit conforme à nos objectifs en matière de diversité.
    Nous déployons beaucoup d'efforts sur les plans de la formation, de l'éducation et du recrutement, mais encore plus pour retenir nos militaires. Les femmes ont tendance à quitter les Forces à des moments charnières de leur vie, pour des raisons tout à fait justifiées, que ce soit pour s'occuper de leur famille ou trouver une stabilité géographique ou pour toute autre raison.
    Nous devons créer un environnement dans lequel elles auront envie de rester dans les Forces armées canadiennes et nous répondrons à leurs besoins personnels.
    L'amirale Bennett et moi-même en sommes des exemples. La recherche sur l'opinion publique démontre que les femmes de la société canadienne ne comprennent pas ce que cela signifie de faire partie de l'armée. Seul un petit nombre d'entre elles semble avoir une idée de la vie militaire. Cela s'explique par le fait qu'elles croient que les femmes militaires ne peuvent pas fonder une famille, ni réussir dans la vie, ni occuper un emploi. Ce n'est pas vrai, nous devons leur faire savoir.
    Nous rédigeons une stratégie de marketing bien plus vaste, d'un type jusqu'ici inconnu.
(1220)
    Mesurez-vous également le pourcentage de femmes occupant des postes de commandement ou de direction?
    Oui, bien sûr. Pour la première fois dans l'histoire des Forces armées canadiennes, nous avons sept lieutenantes-générales et amirales.
    Sur combien?
    Sur une centaine. J'ai compris. Elle aussi.
    En plus de mes fonctions au sein de l'équipe d'intervention stratégique, j'ai été désignée championne des femmes au sein de la Défense. Nous travaillons très fort pour appliquer le principe « Voir, c'est croire ». Il est très important que nous puissions compter dans nos rangs de jeunes officières subalternes possédant une expérience opérationnelle parce qu'elles représentent la prochaine génération. Elles ont une façon de s'exprimer et de se représenter qui est bien différente de la nôtre, par exemple de la générale Whitecross et de moi-même, qui avons vécu cette période de transition.
    Les gens doivent se projeter dans ces emplois et ils doivent comprendre ce que nous faisons, surtout dans le cadre de cette opération. Nous avons des exemples extraordinaires de personnes qui deviennent nos porte-parole auprès de la population et qui prouvent que c'est possible.
    Merci beaucoup de m'avoir accordé le privilège de vous poser ces questions.
    C'est tout.
    Monsieur Paul-Hus, vous avez la parole.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vais revenir sur les causes premières qui entraînent une augmentation des cas de harcèlement ou d'agression.
    Les résultats de l'enquête faite au sein des Forces canadiennes seront présentés en novembre. On aura alors une meilleure idée de l'endroit où il y a le plus de problèmes, que ce soit l'armée, la marine ou l'aviation.
    Madame Whitecross, est-il déjà prévu de changer les conditions de service? On sait que, pendant les déploiements en Afghanistan à l'époque ou dans le cadre des futurs déploiements avec l'ONU, il y a des obligations par rapport aux relations sexuelles. Par exemple, un couple formé de deux militaires n'a pas le droit d'avoir des relations lors de ces missions; c'est interdit.
    Il y a des missions qui nécessitent des postes d'observation avec une section d'infanterie, par exemple. Il peut y avoir huit hommes et une femme qui sont ensemble 24 heures sur 24 dans des postes éloignés. Nous voulons que tout le monde soit égal, mais la nature étant ce qu'elle est, cela devient difficile.
    Pensez-vous que l'armée, la marine et l'aviation, en fait, les forces en général, vont repenser les façons de mener les opérations et les ordonnances royales par rapport aux relations entre hommes et femmes?

[Traduction]

    Premièrement, les résultats de l'enquête seront connus à la fin novembre. Ils nous indiqueront deux choses. Ils nous fourniront d'abord une base de référence, une idée de l'état des connaissances et de la situation, avant et après l'Opération Honour.
    Concernant nos directives sur les relations personnelles dans le cadre d'un déploiement, nous allons examiner l'ensemble de nos politiques de RH à cet égard au cours des mois et des années à venir afin d'effectuer une analyse comparative entre les sexes, ou sexospécifique, et nous assurer que nous respectons les exigences de la RCSNU 1325 sur les femmes, la paix et la sécurité.
     La nature humaine étant ce qu'elle est, je ne pense pas que les hommes et les femmes seront déployés ensemble. En tant que militaires, on s'attend à ce qu'ils obéissent aux ordres. Si cela signifie qu'ils ne doivent pas entretenir de relations personnelles pendant qu'ils sont en déploiement, ils obéiront. Nous devons nous assurer que cette discipline est respectée, parce que c'est la politique et c'est ce qui est attendu d'eux.
    Par ailleurs, je connais des couples mariés qui ont été déployés simultanément. Vous devez certainement savoir que le déploiement de couples mariés comporte toujours un risque, par exemple, quand il y a des enfants; il faut alors s'assurer que l'un des deux parents reste au Canada. Ces couples touchent leur indemnité pour voyager au même moment, si la situation opérationnelle le permet. Là encore, les règles sont claires.
    Je répète que toutes les politiques seront passées au peigne fin au cours des mois et des années à venir.
    Je vous remercie, monsieur.
(1225)

[Français]

    Vous avez reçu un certain nombre de plaintes. Êtes-vous en mesure d'évaluer s'il s'agit surtout de cas d'agression d'un subordonné par un supérieur? Avez-vous de l'information ou des chiffres là-dessus? Ces cas mettent-ils en cause des militaires de même rang? Y a-t-il beaucoup de cas d'agression d'un subordonné par un supérieur, par exemple un sergent qui agresse un caporal?

[Traduction]

    Je comprends un peu mieux la question maintenant.
    Nous avons une directive à cet égard. Elle porte sur les « relations personnelles préjudiciables ». Nous avons clairement signifié, en lançant notre plan d'action, que nous avons besoin non seulement de définir ce qu'on entend par là, mais de faire savoir clairement que la personne qui occupe un rang supérieur, qu'il s'agisse d'une relation entre un sergent et une caporale, ou entre une colonelle et un soldat — peu importe — la personne qui occupe le rang le plus élevé doit informer ses supérieurs de cette relation et elle est tenue d'en rendre compte.
    Je vous rappelle que vous pouvez partager votre temps.
    Monsieur Spengemann, vous aviez une autre question?
    Vous avez dit une chose qui a frappé le comité, et probablement les Canadiens en général, à propos du processus qui prendra beaucoup de temps. Beaucoup de gens se sont dit d'accord avec vous à cet égard, certains allant même jusqu'à dire que c'est un problème de génération. J'essaie de penser à des solutions qui permettraient d'accélérer la cadence. Dans la société en général, une foule d'initiatives ont été lancées. Je pense à la campagne HeForShe, ou Lui pour Elle, nous avons même reçu la visite d'Emma Watson ici sur la Colline hier.
    Je voudrais revenir sur deux commentaires formulés par mes collègues, le premier de Mme Alleslev, à savoir que les hommes doivent tenir debout et faire leur part, et le deuxième de mon collègue M. Besan, à savoir que les membres des Forces armées occupant des postes de gestion intermédiaire doivent jouer un rôle plus actif.
    J'inviterais donc toutes les deux à réfléchir à un ou deux multiplicateurs de forces, ou accélérateurs, qui nous permettraient de régler ce problème dans un horizon moins long qu'une génération. Si vous aviez carte blanche pour changer deux choses d'ici demain, avec les outils que vous avez déjà en main ou par d'autres moyens, que feriez-vous?
    Les Forces armées canadiennes, ou n'importe quelle force militaire, possèdent ce qu'on appelle une chaîne de commandement. Il s'agit d'un outil très puissant pour nous assurer non seulement de remplir une mission avec succès, mais aussi que les ordres soient suivis à la lettre. Je préciserais qu'une compréhension claire de la part de tous les membres de la chaîne de commandement — ce que nous essayons d'atteindre, et je crois que nous avons réalisé certains progrès à cet égard — soit de ce que cela signifie de traiter chaque individu avec dignité et respect, contribuera grandement à apporter un changement aussi rapide que possible.
    Je préciserais également que les cadres intermédiaires, les personnes qui sont à l'avant-plan auprès des hommes et des femmes en uniforme jour après jour, sont tout désignés pour pouvoir opérer un changement aussi vite que possible. Le plus rapidement qu'il est possible de leur faire reconnaître cette question et d'aller de l'avant, le plus vite possible selon la capacité de l'organisation.
    Existe-t-il un système incitatif, peut-être greffé à l'opération Honour ou parallèle, qui servirait de renforcement aux hommes qui interviennent pour se porter à la défense des femmes qui font l'objet de harcèlement ou de violence?
    Nous venons d'amorcer ce processus et je vais brièvement vous relater une anecdote. Trois officiers subalternes sont en train de flâner. Une femme arrive et l'un des officiers s'apprête à faire une blague de mauvais goût, alors l'un d'entre eux affirme que ce comportement est déplacé et quitte en compagnie de la dame. On me raconte cet incident, je le souligne à la chaîne de commandement de la personne, le remercie d'avoir fait la bonne chose et je lui fais parvenir un message personnel.
    Je sais que l'amirale Bennett s'occupe de...
    Mention honorable à l'opération Honour.
    ... Mention honorable à l'opération Honour, ce qu'il est difficile d'accorder pour un ingénieur. Cette initiative a été lancée pour identifier les personnes qui font la bonne chose, et elles sont nombreuses, et pour souligner leur excellent travail.
    C'est utile.
    Oui, c'est utile. Merci.
    Pour commencer, j'aimerais mentionner que nous n'avons pas affaire à une population homogène, ce qui nous complique la tâche. De nouvelles recrues sont continuellement embauchées et elles nous arrivent avec leur bagage de valeurs et leur expérience acquis dans le civil. Donc, nous devons vraiment faire face à un important virage générationnel et à un roulement constant de diverses personnes qui ont connu une transition et à d'autres qui viennent d'arriver. Voilà l'un de nos défis à affronter : ne pas être en mesure d'y faire face rapidement, car nous devons opérer un changement auprès de diverses générations.
    Ce qui donne des résultats, et qu'il faudrait faire plus souvent, est le fait de mieux conscientiser de façon générale la population canadienne à la gravité de cette question et de ses retombées. Parfois, je crois qu'il est difficile d'être en mesure d'en comprendre les répercussions, non seulement pour la victime, mais pour l'organisation. Nous nous en occupons en menant des discussions au sujet de son impact sur notre efficacité opérationnelle, notre esprit d'équipe et notre raison d'être.
    Tandis que la société fait face à cette situation, que nous cessons de nous concentrer sur les procès très médiatisés ainsi que sur les conséquences — pour examiner plutôt ces enjeux, plus globalement, et voir ce qu'ils signifient pour notre société, pour les responsables, pour les victimes et pour nous en tant qu'institutions et particuliers — je crois que tout cela est très important et utile pour nous, parce que les membres des Forces armées sont des citoyens canadiens qui traduisent les valeurs canadiennes. Ce que nous faisons à l'extérieur de l'armée a de lourdes conséquences pour nous.
    Et puis, il nous faut du temps. Nous accordons beaucoup d'attention à ce dossier et la pression est énorme, car nous avons beaucoup de comptes à rendre. Pour nous, les minces victoires que nous réalisons comptent pour beaucoup. Parfois, nous oublions de les souligner et, comme l'a mentionné la générale Whitecross, nous consacrons un temps énorme à envisager la façon de rectifier un mauvais comportement, plutôt que de valoriser un comportement salutaire et d'indiquer ce qui est bien. Il importe de le rappeler.
(1230)
    Merci à vous deux.
    Monsieur Bezan.
    Merci, monsieur le président
    Amirale Bennett, d'après votre expérience de travail dans les réserves, a-t-on mené une analyse pour savoir si une inconduite d'ordre sexuel se situe à un niveau différent dans la Force de réserve par rapport à la Force régulière?
    Comme l'enquête de Statistique Canada l'indiquera, nous avons demandé que les statistiques soient ventilées. Les participants à l'enquête étaient des membres de la Force régulière et de la Première réserve, ce qui nous permettra de comprendre les différences entre les réservistes à temps partiel, intégrés à une unité ou en milieu communautaire, et leurs camarades en service à temps plein dont le travail est plus étroitement lié à la Force régulière. Il s'agit de nos plus récentes données.
    Nous avons effectué des enquêtes sur le harcèlement et avons déployé certains efforts, en particulier auprès de la Réserve, pour étudier le maintien en poste, les raisons expliquant les départs de la Force de réserve. L'enquête de Statistique Canada sera certainement la première étude nous ayant permis de saisir des données précises sur le comportement sexuel nuisible et déplacé.
    Je pose cette question, car, si l'on pense à nos réservistes, ils occupent un emploi régulier à l'extérieur des réserves et ils pourraient faire carrière dans un milieu où ils n'ont pas l'occasion d'interagir avec des membres du sexe opposé ou des LGBTQ. Je me demande seulement si un préjugé ou un comportement déplacé peut exister parmi eux en raison d'autres expériences où ils n'auront pas eu ce genre d'interaction.
    Les données statistiques de la Force de réserve sont généralement plus diversifiées et en raison de l'exposition au milieu civil, parfois, leur point de vue et le niveau de tolérance sont aussi très différents.
    Ça va dans les deux sens.
    D'un autre côté, la Force de réserve présente un défi relativement aux signalements et aux compétences, parce que nous vivons dans deux mondes, un civil et l'autre militaire, et que, bien entendu, il y a les infractions commises dans le civil par rapport à celles commises sur les propriétés du MDN. Nous étudions attentivement cette question.
    Également, les données statistiques de la Force de réserve, nous indiquent qu'il y a beaucoup de jeunes, d'étudiants et de personnes qui s'enrôlent pour une très brève période. Nous étudions la possibilité d'adapter l'entraînement et nos programmes de sensibilisation à l'intention de ces groupes.
    Pour revenir sur ce que j'ai dit tout à l'heure, on peut se demander si l'équipe d'intervention stratégique que vous dirigez dispose des outils nécessaires compte tenu de l'augmentation des signalements. Beaucoup de choses s'expliquent par des raisons historiques, bon nombre de personnes se sentent plus en sécurité aujourd'hui et se manifestent, et beaucoup d'autres gens tâtent le terrain. Les ressources sont-elles suffisantes? Avez-vous besoin d'autres outils dans votre coffre pour faire votre travail, comme des règlements ou des lois, que nous, les parlementaires, pourrions mettre à votre disposition? Et puis, si le JAG et la police militaire doivent s'engager à mener un nombre croissant d'enquêtes et à porter plus d'accusations, ont-ils les outils nécessaires?
(1235)
    Oui, nous avons suffisamment de ressources et quand nous en avons besoin, la question ne se pose pas pour y avoir accès, en raison de la grande priorité que nous y accordons. Nous avons là aussi la possibilité de faire appel à l'expertise de civils. La police militaire améliore son expertise en suivant des formations auprès d'alliés, de corps policiers civils et d'agences qui ont les compétences recherchées. L'ajout de 18 nquêteurs a permis d'accroître l'effectif du service d'enquêtes national des Forces canadiennes, Donc, nous progressons. Le directeur des poursuites militaires se consacre davantage à la formation par rapport à ce qui était fait auparavant et, lorsqu'on ne dispose pas des ressources à l'interne, on a recours à l'externe.
    En ce qui concerne la défense des victimes et la parole qui leur est donnée, je crois qu'il existe une occasion pour nous, et pour vous au gouvernement, de savoir comment nous pouvons leur prêter main-forte.
    L'enquête que vous avez confiée à Statistique Canada a permis d'interroger 40 000 membres de la Première réserve et de la Force régulière. J'espère que vous avez recueilli des échantillons assez importants auprès de l'Aviation, de la Marine et de l'Armée de terre pour nous donner une idée de ce sur quoi portait l'enquête et du genre de questions qui ont été posées?
    Cette enquête a été réalisée dans le temps et l'espace. Nous voulions savoir dans quelle mesure nos militaires étaient au courant de l'opération Honour après le mois d'août 2015, quand le général Vance a produit ses ordres, s'ils savaient quel en était le sens et s'ils avaient été exposés à un type d'inconduite sexuelle au cours de cette période et avant cette période. Il s'agissait d'informations de référence relatives aux années antérieures à 2015, à août 2015, et d'autres éléments permettant de relever tout autre comportement après août 2015.
    Elle a permis de recueillir de l'information auprès des membres des armées de terre, de l'air et de mer, auprès de divers grades et un peu partout au pays. Certaines des questions étaient très précises et d'autres un peu plus vagues. Grâce à l'analyse qui sera effectuée entre maintenant et la fin de novembre, quand sera diffusée l'information, nous aurons une meilleure idée des renseignements de référence qui auront été cernés.
    En outre, certaines questions ont porté plus particulièrement sur les types de comportements et sur le suivi à donner à cet égard : avez-vous déclaré ceci? Vous sentez-vous à l'aise pour le faire? Dans la négative, pourquoi pas? Êtes-vous satisfait ou satisfaite des résultats? Donc, la gamme des questions était très étendue. Il nous fallait recueillir cette information, d'abord pour déterminer la prévalence des incidents, comme point de départ, de même que le type d'incidents rencontrés, autant d'informations qui doivent nous permettre de moduler la formation, la sensibilisation et d'adapter notre plan d'action. S'adresse-t-on au bon échelon? Est-ce l'acte de signaler l'incident qui pose problème? A-t-on peur de représailles? Quels sont les problèmes particuliers?
    Comme nous avons enregistré un taux de réponse élevé, et que nous avons eu un échantillon très représentatif, tant dans les Forces régulières que dans la Première réserve, nous pensons que ces résultats nous seront très utiles.
    Monsieur Fisher.
    Merci, monsieur le président, je serai rapide.
    Je suis intéressé par le mandat de l'opération Honour. Ai-je compris que celui-ci reprend essentiellement les 10 recommandations de Mme Deschamps? Est-il plus large que cela? Dans vos remarques, vous avez dit que le mandat ne se limitait pas au rapport Deschamps. Pourriez-vous brièvement nous parler des autres éléments de l'opération Honour qui vont au-delà des 10 recommandations en question?
    Monsieur le président, le mandat reprend les 10 recommandations de Mme Deschamps, mais il va plus loin. En fait, tandis que nous peaufinions les mécanismes institutionnels... qu'il s'agisse de politiques, de formation, de sensibilisation, de sondages ou de mesures du rendement, entre autres, nous avons adapté l'opération Honour à nos nouveaux champs d'intervention. Nous parlons de FRAGO, soit des ordres simplifiés qui précisent davantage ce que nous devons faire. Une grande partie de tout cela concerne les signalements d'incidents. Tout le monde est concerné: l'Armée, l'Aviation, la Marine et les opérations spéciales, ainsi que moi...
    Ce que vous entendez.
    ... nous disons aux gens ce qu'il en est. Il nous faut partir de cette information, en plus des données qui nous parviennent du Centre de coordination, pour améliorer encore plus le travail que nous faisons, si bien que notre action est globale.
(1240)
    C'est très utile, merci.
    Une autre question brève.
    Contre-amirale, je pense que c'est vous qui avez parlé du niveau de condition physique actuellement en vigueur, des normes, qui sont les mêmes pour les hommes et pour les femmes. Avez-vous été saisie de plaintes parce que ces normes ne seraient pas vraiment appliquées ou, au contraire, certaines personnes se plaignent-elles qu'elles le soient?
    C'est difficile, je vous le concède.
    C'est une de mes responsabilités. Je vous répondrai par la négative. Cela se fait en application de la décision prise par le haut commandement et je crois que ça en dit long sur notre capacité à traiter tout le monde de la même façon. Il ne s'agit pas uniquement des hommes et des femmes, il y a aussi une question d'âge parce que tout le monde est sur un pied d'égalité. J'ai fêté mon anniversaire hier et je viens de franchir le cap de la cinquantaine. Avec mes 5,2 pieds, même les jours où tout va bien, le test est très difficile. Mais je conviens avec vous que c'est ainsi qu'il faut procéder.
    Au début, nous étions inquiets et j'ai décidé de sauter sur l'occasion — dans mon rôle de championne des femmes — pour montrer ce test à mes camarades d'armes, afin qu'elles aient la possibilité de savoir ce dont il s'agissait. Nous sommes très bien préparés pour passer ce test. Nous avons des programmes d'entraînement qui ont été conçus pour les personnes de tous les âges, toutes les formes, toutes les tailles et des deux sexes. Au début, je dirais que la crainte a été notre principal défi à surmonter, parce que les gens se demandaient si nous y arriverions.
    L'un des avantages d'une norme commune est que tout le monde comprend ce dont il retourne si bien qu'en cours de déploiement, dans le cadre d'une opération, il n'est pas nécessaire de séparer les gens en fonction du poids qu'ils peuvent soulever ou de leurs éventuelles limitations. On sait que tout le monde respecte la même norme.
    Nous serions heureuses de vous donner la possibilité de vous essayer à ce test.
    Des voix: Oh, oh!
    Il y a un exemple que je prends souvent, et je vous dis cela en aparté: j'invite les jeunes garçons qui jouent au hockey à pratiquer ce sport comme les femmes. Il est en effet très difficile de se hisser au niveau de jeu des hockeyeuses de l'équipe olympique et de tout ce qu'elles sont capables d'accomplir, ou encore de l'équipe canadienne de soccer féminin.
    C'est intéressant et j'apprécie cette remarque. Merci.
    Voilà, je crois que nous en avons terminé avec les questions.
    Je tiens à vous remercier toutes les deux de vous être déplacées. Vous êtes investies d'une tâche difficile, mais ô combien nécessaire, et il ressort de vos témoignages d'aujourd'hui que le chef d'état-major a choisi les bonnes personnes pour faire le travail. Merci beaucoup.
    Nous allons suspendre la séance pendant cinq ou six minutes afin de pouvoir nous dire au revoir.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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