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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 046 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 21 février 2017

[Enregistrement électronique]

(0845)

[Traduction]

    Nous sommes tous enchantés de revenir à notre étude de la situation économique des femmes. Nous accueillons aujourd'hui plusieurs témoins.
    Au nom du Centre for Families, Work & Well-Being, de l'Université de Guelph, comparaît Donna Lero. Nous accueillons, de l'Université Queen's, Kathleen Lahey, professeure à la faculté de droit. Enfin, nous entendrons le témoignage de Laurell Ritchie, du Sous-comité sur l'assurance-emploi de la Good Jobs for All Coalition.
    Mesdames, vous êtes les bienvenues. C'est un plaisir de vous accueillir. Nous commencerons par vos déclarations liminaires. Donna d'abord.
    Vous avez sept minutes.
    Bonjour et merci de m'avoir invitée à comparaître.
    Je ne vous apprends rien en disant que l'amélioration de la sécurité économique des femmes et l'égalité de leurs chances de participer à l'économie ne sont pas une question futile. Ces objectifs sont cruciaux si nous voulons faire reculer la pauvreté chez les femmes et les enfants, permettre aux femmes d'utiliser pleinement leurs talents, leurs études et leur expérience et préserver et faire croître l'économie canadienne. En outre, ces objectifs sont indissociables de l'engagement du Canada à l'égard de l'égalité et de l'équité entre les sexes comme droits sociaux et économiques, y compris l'engagement que le Canada a contracté en signant la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.
    Bien des questions dont je vais vous entretenir vous sont bien connues. Elles sautent aux yeux dans divers rapports, dont ceux de l'Alliance féministe pour l'action internationale, du Fonds monétaire international et du Conseil économique des femmes.
    Je vais vous parler des inégalités qui découlent du travail que les femmes accomplissent comme dispensatrices de soins et de leurs rôles, dans les familles, auprès des enfants, des handicapés et des aînés qui ont besoin de soins, et expliquer comment cela nuit à leur emploi et à leur carrière, à leur santé et à leurs ressources financières.
    Les difficultés avec lesquelles les femmes sont aux prises, on peut s'y attaquer par de meilleures politiques, une souplesse accrue en milieu de travail et un meilleur accès aux services de garde et aux services à domicile.
    Ce que je vous présente aujourd'hui repose sur des recherches, dont les miennes, et des observations échelonnées sur 40 années de carrière, au cours desquelles j'ai participé à des groupes de travail, à des groupes d'experts et à des comités de planification.
    Depuis des décennies, l'offre de services de garde abordables et de qualité est insuffisante au Canada, surtout pour les bébés et les tout-petits, mais aussi pour les enfants d'âge scolaire. Même si le Canada affiche des taux relativement élevés de participation des femmes, y compris des mères de jeunes enfants, à la population active, les difficultés d'accès à ces services, leur caractère peu abordable et leur manque de qualité demeurent des problèmes graves tant pour les familles à revenu moyen que, surtout, pour les familles à faible revenu.
    Selon un rapport récent de l'OCDE, les services de garde d'enfants au Canada sont parmi les plus chers dans les 35 pays de l'OCDE. Les familles canadiennes doivent y consacrer près du quart de leur revenu, soit une proportion beaucoup plus élevée que dans d'autres régions du monde. Dans tous les pays de l'OCDE, la famille moyenne à deux revenus dépense 15 % de son revenu net pour les services de garde alors que, au Canada, la proportion atteint 22,2 %. Les parents seuls s'en tirent beaucoup moins bien, en moyenne.
    Au Canada, le coût de ces services varie beaucoup. En 2016, le coût mensuel moyen pour les bébés allait de 152 $ à Montréal, en partie ou surtout grâce à la politique du Québec, à plus de 1 600 $ à Toronto. Même les parents qui ont droit à des services subventionnés peuvent devoir débourser de bons montants à cause de la structure des subventions et des frais supplémentaires. Les familles à faible revenu qui touchent une subvention pour services de garde à Saskatoon et à Calgary doivent débourser près de 500 $ par mois.
    Outre les coûts élevés, la difficulté d'accès aux services réglementés demeure un problème grave. Les listes d'attente sont chose courante pour les garderies : dans presque toutes les grandes villes, 70 % des garderies déclarent avoir des listes d'attente.
    Depuis 1970, le coût élevé des services et les difficultés d'accès à des services abordables sont considérés comme des problèmes graves. Diverses tentatives d'élaboration d'un programme national se sont succédé et le Canada n'a toujours aucune politique nationale sur l'éducation de la petite enfance et les services de garde.
    Le manque de soins abordables de qualité peut décourager des femmes qui voudraient travailler, notamment des femmes qui ont du mal à subvenir à leurs besoins. Cela peut limiter leur accès aux études et à la formation et donner des taux élevés de travail à temps partiel ou précaire. En outre, le problème accentue la dépendance, prive les entreprises et les collectivités des talents et compétences des femmes et fait diminuer les recettes fiscales des gouvernements. Cela donne aussi une moins grande offre de programmes stimulants pour la petite enfance qui favorisent le développement des enfants. Alors que certaines femmes peuvent être empêchées d'occuper un emploi, d'autres travaillent et vont de l'avant, malgré les problèmes de conciliation travail-famille et de stress.
(0850)
    Il est faux que l'absence de programme de garde de qualité entraîne forcément de très faibles taux de participation à la population active. Nous sommes l'illustration de ce paradoxe. Il y a cependant des femmes et des familles qui ne profitent pas de l'avantage d'un réseau de services de garde de qualité.
    Cela traduit aussi un manque de réflexion et d'action quant à l'offre d'un personnel formé et bien rémunéré pour les services de garde. Diverses études, dont une du Conseil sectoriel des ressources humaines des services de garde à l’enfance, révèlent que le salaire horaire médian du personnel de garderie était de 16,50 $ en 2012 et celui des directeurs ou directrices s'élevait à 22 $. Les conditions de travail du personnel des services à la petite enfance sont aussi préoccupantes. Il n'a pas de régime de retraite, par exemple.
    Des études ont montré que le taux de roulement élevé des programmes de garde faisait problème et que le recrutement et le maintien en emploi sont des difficultés auxquelles il faut prêter attention si nous voulons élargir le réseau des services à la petite enfance. Nous devons aussi veiller à ce que les lois sur l'équité salariale s'attaquent aux problèmes évidents du personnel de ces services et d'autres groupes à prédominance féminine qui ont toujours été sous-payés.
    Il y a d'autres préoccupations, dont les congés de maternité et parentaux et les congés de soignant. C'est une question que le gouvernement s'est engagé à étudier, et il veut ménager plus de souplesse. Nous avons un système complexe de congés et d'avantages sociaux et il faut lui accorder beaucoup d'attention. Je dirai néanmoins que les recherches indiquent nettement que des congés plus longs, avec un taux de remplacement du revenu relativement faible, nuit à l'emploi des femmes et se traduisent par des taux plus faibles de participation à la population active, une augmentation de la probabilité de changer d'employeur et un écart plus grand de la rémunération pour les mères.
    Très bien. Je vous remercie.
    Passons maintenant à Kathleen Lahey.
    Merci. Je suis très heureuse d'être parmi vous et je me réjouis que cette question fasse l'objet d'une étude, car l'inégalité économique des femmes est l'un des problèmes les plus graves du Canada à l'heure actuelle.
    Je rappelle à ceux qui l'auraient oublié que, entre 1995 et 1999, le Canada était au premier rang dans le monde pour ce qui est de l'égalité entre les sexes. Il était aussi au premier rang pour le développement humain en général, et c'était grâce à l'ACDI, à Condition féminine Canada et au fait que ce comité-ci a joué un rôle de leadership historique dans le monde pour définir les moyens d'arriver à l'égalité entre les sexes dans les divers pays.
    Ces dernières années, parce qu'il y avait très peu de fonds et de soutien au niveau fédéral pour assurer l'égalité entre les sexes, j'ai comblé mon temps libre en étant consultante auprès d'ONU Femmes, de l'OCDE et d'autres organisations internationales. J'ai eu l'occasion de participer à des formations sur l'égalité des sexes en matière économique dans des pays très éloignés comme le Vietnam et le Timor-Leste, tous deux dans l'Asie-Pacifique, formations financées en grande partie par le Canada par l'entremise de l'ACDI. Le Canada a fait son possible dans ces dossiers, mais il est bon qu'il s'intéresse maintenant à sa propre population.
    Je souligne que le Canada est maintenant au 25e rang dans le monde pour l'égalité entre les sexes. Je vais carrément dénoncer deux évolutions macroéconomiques qui sont au coeur du problème au Canada. Si nous ne pouvons pas nous y attaquer, tous les efforts du monde ne permettront pas de régler le problème lié à l'insuffisance des ressources en services de garde, par exemple.
    J'ai fait une microsimulation pour voir où était allé tout cet argent. Au cours des 20 dernières années, le Canada est celui qui, parmi tous les pays très développés en vue, a réduit le plus ses recettes fiscales, ce qui est au coeur du problème de l'égalité entre les sexes.
    Si le Canada n'avait pas multiplié les diverses réductions d'impôt, ces 20 dernières années — 10 années de gouvernement libéral et 10 années de gouvernement conservateur sont presque également à blâmer à cet égard —, le Canada aurait tiré l'an dernier, en 2016, 47 milliards de dollars de plus du seul impôt sur le revenu des particuliers.
    Où est passé cet argent? D'abord, il a enrichi les Canadiens à revenu élevé, qui sont surtout des hommes. De plus, il a enrichi les hommes aux dépens des femmes selon un rapport d'environ 70 % à 30 %. C'est là un élément du problème.
    Le problème tient aussi en partie au fait que, depuis 2010, on ne recueille pas assez de statistiques pour savoir où en sont les femmes, au juste, sur le plan économique. Au bas de la page 5 de ma présentation, vous remarquerez que, en 2010 — ce sont nos dernières données, car le dernier recensement n'a pas mesuré le travail non rémunéré dont les femmes s'occupent tant —, les femmes ont continué d'accomplir 64 % de tout ce travail, dont, bien entendu, tous les soins, dont les femmes assument la charge de façon disproportionnée. Elles sont près de la parité pour les heures consacrées au travail rémunéré, mais elles ne reçoivent chaque année qu'environ le tiers des revenus bruts au Canada. C'est là une anomalie économique énorme, puisque les femmes font plus de la moitié du travail tous les ans au Canada et n'obtiennent qu'un peu plus du tiers de tous les revenus. C'est injuste.
    Au haut de la page 6 se trouve un profil des revenus des femmes par rapport à ceux des hommes. Les revenus des femmes atteignent un plateau lorsqu'elles parviennent à l'âge d'avoir des enfants, au lieu de suivre une courbe ascendante comme ceux des hommes pendant leurs années les mieux rémunérées. Pour un travail à temps plein qui dure toute l'année, les femmes ne gagnent pas autant aujourd'hui qu'en 1990, en 1995 ou en 2000, en fonction de leur niveau d'études. Les femmes s'en tirent encore moins bien si on tient compte du sexe et de la race ou de l'appartenance à un groupe ethnique ou autochtone.
(0855)
    Quels sont les problèmes structurels précis qui apparaissent lorsqu'on quitte le niveau macroéconomique?
    Depuis longtemps, le Canada considère les dépenses en infrastructures comme sa principale solution aux problèmes de croissance économique, mais l'encadré du bas de la page 7 montre que, plus le Canada axe ses programmes de développement économique sur les infrastructures, plus il creuse l'écart entre les revenus des femmes et ceux des hommes, car les femmes sont toujours incroyablement sous-représentées dans les secteurs de la construction et des métiers tout comme dans celui du génie, même si c'est là le domaine de la présidente du Comité. Elles sont sous-représentées dans l'industrie primaire. Elles sont mieux représentées dans le secteur manufacturier, qui est en déclin.
    Ces dernières années, aucune femme n'a été nommée titulaire d'une chaire spéciale en sciences, en technologie, en génie et en mathématique. Ces chaires ont été largement financées à hauteur d'environ 35 millions de dollars par année, argent versé aux universités pour soutenir le développement, l'innovation et les industries technologiques au Canada.
    Les montants destinés aux infrastructures ne sont presque jamais consacrés aux infrastructures sociales pour les services de garde, aux infrastructures matérielles des services de soins ou autres services pour les femmes.
    Je passe très rapidement à mes deux solutions principales.
    Le Canada a besoin de la parité salariale. Il a aussi besoin de dépenses massives en services de garde et d'une personnalisation de toutes les ressources en soins disponibles. Aujourd'hui, le Canada dépense 24 milliards de dollars par année pour appuyer le travail non rémunéré des femmes et seulement 1,6 milliard de dollars par année pour les ressources en services rémunérés de garde.
    Merci.
(0900)
    Très bien.
    Passons à Laurell Ritchie.
    Vous avez sept minutes.
    Merci. Et merci de votre invitation. Je vais parler surtout de l'assurance-emploi qui, avec le RPC, est l'un des deux programmes d'assurance sociale les plus importants au Canada.
    Il est important que les femmes prennent des emplois non traditionnels sur le marché du travail et jouent un rôle de chef de file dans les secteurs public et privé. Cette évolution serait favorisée si la totalité et pas seulement une partie des dépenses publiques massives en infrastructures matérielles et sociales était liée dès le départ à des contrats qui exigent l'équité en matière d'emploi.
    Cela dit, il est au moins aussi important de se soucier de la vie des millions de femmes qui restent dans l'ombre et continueront de travailler dans des commerces de détail, des cuisines de restaurant, des hôtels, des usines de montage, des services de soutien dans les secteurs de la santé et de l'éducation, par exemple. Les projections du gouvernement pour les professions à l'horizon de 2020 montrent toujours que les trois professions aux effectifs les plus importants sont celles de vendeur de commerce de détail, de caissier, de serveur et d'aide-cuisinier.
    Ces femmes ont besoin d'un meilleur appui — et elles le méritent —, qu'il s'agisse de services de garde abordables et de qualité dans leur quartier ou d'une meilleure assurance-emploi pour leurs absences temporaires du marché. Ces choses-là comptent pour la sécurité d'emploi et le bien-être de la plupart des femmes qui travaillent.
    Selon le dernier Rapport de contrôle et d'évaluation de l’assurance-emploi, celui de 2015, le régime a versé 7,729 milliards de dollars, presque 8 milliards de dollars — des milliards et non des millions — aux travailleuses cette année-là, leur donnant plus de sécurité et d'indépendance, et assurant une plus grande stabilité économique dans les milieux où elles dépensent cet argent.
    Je voudrais aborder rapidement deux aspects de notre régime d'assurance-emploi. D'abord, ces dernières décennies, nous avons formé le projet collectif, du moins est-ce ainsi que j'aime à le qualifier, de créer un solide régime de prestations parentales et spéciales qui ferait l'envie de toute femme au sud de notre frontière, aux États-Unis. Il est possible de l'améliorer, bien sûr, et c'est ce que nous disons dans la lettre adressée au ministre Duclos et au premier ministre Trudeau, qui a été distribuée et que vous avez peut-être sous les yeux.
    Des organisations communautaires et syndicales ont exhorté le gouvernement à ne pas perdre de vue la situation globale: la nécessité d'améliorer l'accès à l'assurance-emploi et à ses prestations, surtout pour ceux qui ont des emplois précaires, et le besoin de programmes publics, universels et abordables de garde d'enfants. J'ignore combien de fois il faudra le répéter.
    Nous avons aussi appuyé et préconisé l'idée de huit semaines supplémentaires de prestations, à utiliser sous peine de les perdre, pour le deuxième parent, comme dans les pays nordiques et au Québec, où il y a cinq semaines; une réduction du nombre d'heures nécessaires pour obtenir les prestations spéciales, car toute la souplesse du monde n'aide personne, si on n'y a pas accès; un taux de prestations de l'assurance-emploi plus élevé; des prestations pour soignants en cas de maladie grave et pas seulement en cas de décès imminent; le rétablissement des prestations spéciales d'avant 2012 pour tous les travailleurs étrangers temporaires qui cotisent au régime.
    Deuxièmement, les discussions sur les meilleurs moyens d'améliorer les prestations spéciales de l'assurance-emploi comportent le risque de stéréotyper les intérêts des femmes dans le régime. En fait, nous devons faciliter, pour les femmes, l'accès aux prestations régulières si nous voulons nous attaquer au coeur du problème de la sécurité économique. Les négligences à cet égard, depuis 20 ans, ont fait que, chez les chômeuses, la proportion de celles qui touchent des prestations est honteusement basse.
    D'après les dernières données de Statistique Canada, dont j'ai étudié les chiffres lorsqu'ils ont été publiés, ces derniers jours, seulement 34,4 % des chômeuses, pas même 35 %, touchaient des prestations en décembre. Et ce sont là celles qui sont officiellement au chômage. Chez les hommes, la proportion était de 48 %, ce qui est déjà bien médiocre, si on compare aux décennies antérieures.
    Parmi celles qui ne touchaient pas de prestations, certaines étaient de vraies travailleuses autonomes; elles ne cotisent pas et n'ont pas droit aux prestations. Toutefois, certaines sont contre leur gré des travailleuses autonomes ou des entrepreneures dépendantes, problème dont certaines de nos autres lois devraient tenir compte.
(0905)
    Il y a aussi beaucoup de femmes qui ont droit aux prestations, mais ne les touchent pas. Notre coalition a beaucoup insisté sur le besoin urgent d'améliorer l'accès aux prestations d'assurance-emploi. Il y a des problèmes que nous pouvons régler si nous avons la volonté politique de remodeler les prestations régulières pour mieux tenir compte de la réalité du marché du travail moderne pour les femmes. Cela aidera les hommes aussi, mais ce sont généralement les femmes, les nouveaux immigrants, les jeunes adultes, les travailleurs racialisés, les Autochtones et les travailleurs handicapés qui finissent par avoir des emplois temporaires et à temps partiel, des contrats de courte durée ou par travailler pour des agences de travail intérimaire, ce qui est maintenant caractéristique d'une grande partie du marché du travail.
    Il y a eu un pas dans la bonne direction. Le gouvernement a écouté les nombreuses plaintes et éliminé la norme d'admissibilité de 910 heures pour ceux qui entrent dans la population active ou la réintègrent, règle qui a été discriminatoire à l'encontre des femmes, des nouveaux immigrants et des jeunes adultes. Le personnel du ministère a estimé que cela pourrait aider à améliorer de 3 % l'accès aux prestations. C'est un début, un acompte sur la liste des choses à modifier dans le régime.
    Je n'ai pas le temps d'entrer dans les détails maintenant, mais il y a deux mesures qui amélioreraient considérablement l'accès pour les femmes. La première consisterait à ramener à 360 heures la norme d'admissibilité, dans tout le pays, pour les demandes très élémentaires de prestations. Cela a été maintes fois proposé. Deuxièmement, il faut revoir le système de décompte des heures pour tenir compte de la réalité des horaires des travailleurs. Les 35 heures, critère sur lequel le régime repose, ne correspondent plus à la semaine de travail normale depuis longtemps, surtout pour ceux qui ont un travail précaire.
    Je vais me limiter à énumérer quatre autres améliorations du régime qui aideraient énormément les femmes. Il faudrait d'abord relever les taux de prestation qui sont misérables, car les gagne-petit arrivent plus tôt au point de rupture. La prestation moyenne pour les femmes, selon le rapport de contrôle, était de 398 $ par semaine. Il faudrait ajouter des prestations de formation pour aider les femmes à se recycler et à se perfectionner. Il faudrait encore porter les prestations de maladie à un maximum de 26 semaines pour commencer, car ce sont les femmes qui ont le plus recours à ces prestations. Enfin, le gouvernement devrait permettre une période de prestations plus longue pour celles qui ont eu un congé de maternité après une mise à pied pour laquelle elles ont touché des prestations régulières et, à l'inverse, si elles sont mises à pied après leur retour au travail suivant un congé de maternité. Cette dernière proposition se comprend sans peine. À cause des règles actuelles, les femmes sont perdantes.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons amorcer le premier tour en commençant par les questions de mon collègue, M. Serré.

[Français]

     Merci, madame la présidente.

[Traduction]

    Merci beaucoup de vos exposés, qui ont été bien préparés et concis.
    J'ai peu de temps, mais ma première question s'adresse à Mme Lero. Vous avez parlé des congés parentaux et des congés de maternité. D'autres témoins ont évoqué la possibilité de congés parentaux plus longs pour les hommes, pourvu que cela n'enlève rien aux femmes. Dans votre exposé, vous avez dit que de longs congés de maternité nuisaient à certaines femmes sur le marché du travail.
    Seriez-vous en faveur de...? Que recommandez-vous, quel partage entre les hommes et les femmes préconisez-vous?
(0910)
    Merci de votre question.
    J'ai dit des longs congés de neuf mois ou plus avec un taux inférieur de remplacement du revenu, comme c'est le cas maintenant, qu'ils nuisent à l'emploi des femmes. C'est démontré. Au coeur des congés à prendre sous peine de les perdre ou des congés réservés au père ou au conjoint, il y a l'idée de l'égalité des sexes, l'idée qu'on encourage les hommes, dans la plupart des cas, à jouer un plus grand rôle dans le soin des enfants, car il permet aux femmes de réintégrer la population active. Il y a donc deux effets différents.
    Effectivement, je suis favorable au congé de paternité.
    Merci.
    Je suis plutôt d'accord. J'ai eu droit à seulement 10 semaines en 1993 et en 1997. Je les ai prises, mais il aurait été agréable d'en avoir plus.
    Je dirai simplement que, d'après les statistiques que nous possédons, et nous conviendrons tous qu'on pourrait les améliorer énormément, nous rendons un bien mauvais service aux hommes, car nombre d'entre eux prennent ce que j'appelle un congé de paternité invisible. Ils s'absentent du travail en prenant des vacances et même des congés de maladie, parce qu'il s'agit de journées payées et qu'on ne met pas en doute leur attachement à la population active, au lieu de prendre le congé de paternité prévu.
    C'est un changement de culture qui s'impose.
    Merci.
    Madame Lahey, vous avez parlé de travail non rémunéré. D'après l'Association médicale canadienne, la plupart des soins dispensés au foyer à des aînés sont assurés par des membres de la famille, des amis et des voisins non rémunérés. Quel est l'impact économique sur les femmes au Canada? Que recommandez-vous au sujet de ce travail non rémunéré?
    D'abord, à propos de ceux qui dispensent des soins gratuitement à des aînés, ils sont souvent eux-mêmes âgés, mais un peu moins. De vastes recherches ont montré que, au Canada spécialement, les femmes, dès le milieu de la quarantaine, risquent davantage de perdre leur travail rémunéré et donc d'être contraintes à une retraite anticipée, lorsque c'est possible, ou de faire un travail non rémunéré pour aider leurs parents. Cela nuit tellement à leur propre santé et mine tellement leur énergie qu'il devient difficile de garder alors un travail rémunéré.
    Il existe maintenant un très grave problème dans la façon dont le travail non rémunéré est encouragé, exacerbé, je dirais, par le régime de fractionnement des revenus de retraite, qui permet aux couples âgés d'obtenir des réductions d'impôt considérables, avec un avantage supplémentaire maximum de 11 000 $ par année et par couple, grâce à ce fractionnement. Pour les femmes âgées, c'est un encouragement à s'occuper des autres, et celles qui ont le plus besoin d'un revenu sont encouragées à se détourner du travail rémunéré. Ce n'est qu'un exemple d'un groupe démographique qui est exposé à un risque à cause de cette mesure fiscale.
    Dans tout le système, le travail non rémunéré est imposé aux femmes de façon cachée, dans presque toutes ses dispositions. Ainsi, vous avez entendu parler de la Prestation fiscale pour le revenu de travail offerte aux couples à faible revenu. Elle a trois imperfections. D'abord, un plafond est imposé au revenu de l'ensemble de la famille, de sorte que le plus astucieux, pour une famille à faible revenu, est d'envoyer sur le marché du travail le conjoint capable de gagner le plus d'argent. Statistiquement, c'est le mari, s'il y en a un. Deuxièmement, si une femme veut se prévaloir de cette prestation, elle sera écartée à cause du revenu de son mari. Si elle a un faible revenu et s'il a un revenu élevé, elle ne sera pas admissible. Troisièmement, si elle est celle qui peut en profiter, il n'y a aucun élément prévu pour la garde des enfants.
    Point annexe et connexe, le seul taux d'imposition à la participation du deuxième travailleur et du parent seul est extrêmement élevé au Canada. Une fois pris en compte les frais de garde, le parent seul qui doit payer les frais de garde et les impôts sur ses gains dépense en impôts et en frais de garde, 94 % de ce qu'il peut gagner, selon les dernières statistiques de l'OCDE sur le Canada. Quel parent seul peut toucher un revenu assez élevé pour pouvoir se permettre de prendre un travail rémunéré? Pour le deuxième revenu d'un ménage, ce taux, qui est appelé le taux de participation, plus les frais de garde, atteint 78 %.
    Les femmes qui ont des responsabilités de garde sont complètement bloquées par les difficultés d'accès à des services de garde abordables, et ce sont ces services qui sont sous-financés au Canada. Dans toute l'OCDE, c'est le Canada qui dépense le moins pour les services de garde, et c'est le cas depuis des dizaines d'années.
(0915)
    Merci.
    Il me reste 30 secondes et ma dernière question porte sur les universités.
    Vous avez parlé des chaires. Nous avons entendu parler du manque de femmes dans les universités et comme titulaires de chaires de recherche. La cible est de 30 % et elle n'est même pas atteinte. Avez-vous des recommandations à formuler à ce sujet? Si vous n'avez pas le temps de répondre, vous pourriez me communiquer l'information un peu plus tard.
    J'approuve sans réserve vos données sur les infrastructures. On peut espérer qu'on injectera des fonds dans le logement abordable et qu'on travaillera à cet aspect.
    Les mécanismes fédéraux qui existent pour faire appliquer les critères n'ont aucun mordant. Je n'arrive même pas à consulter les chiffres sur la parité salariale dans ma propre faculté. Je dois les obtenir du doyen. S'il refuse de me les communiquer, je ne peux pas en prendre connaissance.
    Votre temps de parole est terminé.
    Ma collègue, Mme Vecchio, a la parole.
    Madame Lahey, je voudrais confirmer une chose. Vous avez avancé le chiffre de 11 000 $. Il y a un plafonnement de 2 000 $ lorsqu'il s'agit du fractionnement des revenus de pension, n'est-ce pas?
    Non, c'est inexact. Le fractionnement des revenus de pension est intégral et va jusqu'à 50 % de ces revenus. Le seul...
    C'est-à-dire par le passé. Il faut considérer tous les niveaux, car il y a seulement un maximum qui s'applique.
    Non. Vous songez peut-être au mécanisme de fractionnement des revenus parentaux qui ne s'est appliqué que pendant peu de temps.
    Non. J'ai sous les yeux la documentation de l'ARC, et on dit qu'il y a un plafond de 2 000 $. Voilà ce que je veux confirmer.
    Le plafond de 2 000 $ visait l'autre forme de fractionnement de revenus de pension, qui est disponible à l'égard d'un crédit de pension...
    D'accord. J'ai compris.
    ... mais je veux parler du fractionnement des revenus de pension, qui peut aller jusqu'à 50 % du total des revenus...
    J'ai saisi. Alors...
    ... reçus des sources de revenus de retraite du conjoint qui gagne le plus.
    D'accord. C'est très bien.
    Kathleen, j'ai une autre question à vous poser. Merci beaucoup de l'information que vous avez fournie. Sous le thème des études, on compare les hommes et les femmes. Je veux me faire une idée juste de ce qui est présenté. Si vous comparez les études des femmes de 1995 à aujourd'hui, on peut dire que les femmes ne font pas autant d'argent qu'elles ne le faisaient autrefois avec des études moins poussées. L'évolution n'est pas ce qu'elle devrait être. Observez-vous le même rapport chez les hommes?
    Ces chiffres, ce sont tous les pourcentages des revenus des femmes comparés à ceux des hommes qui ont obtenu leur diplôme à l'issue des mêmes programmes. Ils ne dépendent pas du revenu brut; ce sont des pourcentages. Les revenus des femmes par rapport à ceux des hommes qui ont obtenu leur diplôme après avoir suivi la même formation qu'elles, que ce soit à l'école primaire...
    Je m'intéresse aux moins instruites parce que c'est le chiffre que vous nous avez donné.
    Oui. À l'heure actuelle, les femmes qui n'ont même pas terminé leurs études secondaires gagnent moins de 50 % de ce que touchent les hommes...
    Qui n'ont pas terminé leurs études secondaires, dans ce cas?
    ... qui n'ont pas terminé au même niveau d'études. Le grand drame, c'est que les femmes qui ont ce niveau d'études se tiraient bien mieux d'affaire il y a ne fût-ce que 15 ans.
    D'accord.
    Le recul est tel, pour les femmes les moins instruites au Canada, que nous établissons probablement un record pour un pays hautement développé, mais je n'ai pas fait cette vérification.
    Non, c'est parfait. Je voulais une simple confirmation.
    Donna, je m'adresse à vous. Nous entendons souvent parler des services de garde au Québec, et il y a certaines préoccupations au sujet de la qualité des services et du nombre d'enfants par éducatrice. Dans l'ensemble du Canada, si on considère tous les programmes, quel est celui qui a été efficace, parmi toutes les provinces? Pouvez-vous me dire qu'il y en a un qui a un certain mérite et dont la réussite peut servir de modèle?
    Je ne pense pas pouvoir dire qu'une province ou l'autre a satisfait à tous les critères que nous souhaitons. Il y a de bons éléments dans certaines provinces.
    L'Ontario vient d'offrir le jardin d'enfants à temps plein, ce qui, d'une part, a permis d'assurer un service de garde universel gratuit, des services de garde financés par l'État, pour les enfants de quatre et de cinq ans, mais qui, d'autre part, a déstabilisé les programmes offerts pour les enfants plus jeunes.
    Le Manitoba a toujours plafonné les frais facturés aux parents. La province subventionne les familles à faible revenu, mais elle plafonne aussi les frais depuis des décennies, ce qui a aidé à ramener les familles de la classe moyenne dans le système de garde et a apporté un réel soutien. Le Manitoba a aussi fait beaucoup pour la qualité des services, notamment par la reconnaissance des divers niveaux d'études et de compétences des éducateurs et éducatrices de la petite enfance et par la formation.
    En réalité, il s'agit d'un système complexe. Il faut en même temps se soucier des frais pour les parents ou du caractère abordable des services, de l'accès et de la qualité. Ces services demandent beaucoup de personnel. Ce n'est bon marché pour personne. En ce moment, les éducatrices de la petite enfance subventionnent les coûts des services de garde, et les systèmes, dans le monde, qui obéissent aux lois du marché ne permettent pas d'offrir l'accès universel ni d'accueillir les enfants qui ont des besoins particuliers.
(0920)
    Merci, Donna.
    J'ai eu la chance d'accompagner le Comité des ressources humaines dans ses déplacements au cours des deux dernières semaines. Nous nous sommes arrêtés à Saint John, au Nouveau-Brunswick.
    J'espère que vous m'avez entendue dire « Saint John ». C'était bon, n'est-ce pas?
    Des voix: Ah, ah!
    Mme Karen Vecchio: Merci. C'était pour mes amis du Nouveau-Brunswick.
    J'y ai trouvé d'excellents modèles. Les Néo-Brunswickois travaillent à une stratégie de réduction de la pauvreté, ce qui va de pair avec les services de garde, nous le reconnaissons, mais ils mettent l'accent sur les familles à faible revenu. À propos de services de garde d'enfants, estimez-vous qu'ils devraient être offerts à toutes les familles ou faut-il cibler les familles qui n'y ont pas accès parce qu'ils ne sont pas abordables ou parce qu'elles n'ont pas le revenu nécessaire?
    C'est un faux choix, à dire vrai.
    Mon premier emploi a été celui d'enseignante dans le projet Head Start, aux États-Unis. Ce programme visait les enfants de familles à faible revenu. Ce que nous constatons généralement, c'est que les programmes destinés aux familles et enfants pauvres tendent à s'appauvrir avec le temps; il leur manque l'approche intégrée d'un programme à la clientèle socioéconomique variée. Il n'y a aucune raison, de nos jours, de ne pas avoir des programmes universels capables de répondre aux besoins des enfants de familles à faible revenu, des enfants qui ont une langue différente ou dont les capacités sont différentes.
    Faudrait-il avoir une grille tarifaire pour la famille qui gagne 100 000 $, par opposition à celle qui touche 30 000 $, car je veux considérer la famille dans son ensemble. Pourquoi la famille dont les revenus sont à ce point supérieurs devrait-elle être subventionnée et recevoir exactement la même chose que la famille moins bien nantie? Qu'en pensez-vous?
    Proposeriez-vous une « échelle mobile » en soins de santé et en éducation publique?
    Mme Karen Vecchio: Je vois.
    Mme Donna Lero: Nous estimons qu'il s'agit d'un service public. C'est ainsi qu'on le conçoit. S'il s'agit d'un produit de consommation, on peut avoir des prix variables pour atténuer le coût, mais si c'est un programme financé par l'État qui est bénéfique pour tous les enfants et toutes les familles, on s'abstient de moduler les coûts.
    Merci beaucoup, Donna.
    Laurell, dans tout ce dont nous avons discuté et les données que nous avons vues — et je suis persuadée que le secrétaire parlementaire Terry Duguid a vu tout cela lui-même —, nous constatons qu'il n'y a pas beaucoup d'hommes qui prennent le congé parental. Étant donné que nous discutons ici de l'égalité pour les femmes et que les hommes ont la possibilité de prendre un congé parental, que pouvons-nous faire si nous constatons que moins de 2 % d'entre eux prennent ce congé? Il faut que les deux parents s'occupent de l'enfant, car j'aime à penser que c'est préférable. Ce n'est pas toujours ce qui se produit, mais comment pouvons-nous faire en sorte que les hommes soient plus nombreux à prendre le congé parental, ce qui ouvrirait des possibilités de promotion de l'égalité des femmes?
    Désolée, mais votre temps de parole est terminé. Ce sera le tour de Mme Macolmson.
    Merci aux trois témoins de leur travail. Il y a là une information extrêmement riche dont nous allons tirer parti.
    Madame Ritchie, le monde du travail change énormément, surtout pour les femmes et les jeunes, qui sont surreprésentés dans le secteur des services et dans l'emploi précaire à temps partiel. Vous avez dit un mot du changement de la semaine de travail de 35 à 30 heures. Que pourrait faire le gouvernement pour veiller à ce que l'assurance-emploi reste accessible pour les femmes contraintes de travailler à temps partiel à cause de la discrimination et des exigences de la garde des enfants et des soins aux aînés? Comment une semaine de travail de 30 heures, aux fins de l'assurance-emploi, aiderait-elle ces femmes?
    Il y a quelques semaines, nous avons assisté à une présentation parrainée par le commissaire de l'assurance-emploi pour les travailleurs. Il s'y trouvait des fonctionnaires qui s'occupent de ce régime. Ils ont signalé entre autres qu'ils observent des signes troublants à l'horizon, des chiffres récents sur ceux qui occupent des emplois faiblement rémunérés et qui font un moins grand nombre d'heures.
    Ils remarquent, ces 12 derniers mois, une brusque augmentation du nombre de prestataires qui ont épuisé leurs prestations. C'est que, même si ces prestataires sont admissibles, ils sont loin d'avoir assez de semaines de prestations. Le tableau se présente ainsi. La grille des heures de l'assurance-emploi est très compliquée, mais, essentiellement, les règles d'admissibilité et les règles sur la durée des prestations ont des paliers de 35 heures.
    Je regardais à l'instant les données de Toronto, de Montréal et de Winnipeg. Elles ont le même taux de chômage, entre 6,1 et 7 %. J'ai pris le cas de la caissière d'épicerie. Pour ce qui est des heures, les femmes qui font ce travail ont les pires normes pour les heures de travail : la moyenne est de 25 heures par semaine. En ce moment, dans ces trois villes, si une caissière est mise à pied après six mois de travail à 25 heures par semaine, elle n'a droit à aucune prestation. Sa collègue qui aurait peut-être réussi à surmonter ce premier obstacle aura beaucoup moins de semaines de prestations qu'elle n'en aurait eu grâce à des versions antérieures du régime.
    Les chiffres augmentent. Nous savions que c'était un problème et nous l'avons prédit. Le personnel du ministère dit que le problème commence à se faire sentir dans les chiffres.
(0925)
    Nous observons sans doute une tendance vers davantage de travail précaire à temps partiel, mais au fond, le problème est que notre régime ne tient pas compte de l'évolution de la nature du travail, et les femmes...
    Absolument pas.
    ... sont les plus durement touchées.
    Ce fait n'a pas été pris en considération.
    Merci de vos recommandations très précises. Nous allons certainement mettre certaines d'entre elles en avant
    Madame Lahey, pourrais-je vous parler d'un autre programme particulier? Vous avez clairement expliqué ce qui arrive lorsqu'on ne tient pas compte des femmes. Nous, les néo-démocrates, nous nous inquiétons de la réforme du Régime de pensions du Canada que le gouvernement a faite. Il s'agit certes d'un pas dans la bonne direction en général, mais nous sommes déçus qu'il n'y ait pas de dispositions de non-participation pour les femmes qui se retirent du marché du travail pour s'occuper de leurs enfants. De plus, un nouveau projet de loi ministériel, un projet de loi distinct, qui a été déposé à la fin modifie les fonds de régime de retraite et risque de faire disparaître les régimes à prestations déterminées dont les femmes dépendent de façon disproportionnée pour assurer leur sécurité financière.
    D'après vos travaux, l'élaboration d'une politique fiscale qui ne tient pas compte des femmes menace-t-elle leur sécurité économique, et surtout celle de groupes vulnérables comme celui des aînées?
    Le système est complexe, car la vie de travail des femmes définit leur admissibilité à toutes les formes de soutien à la retraite, exception faite de la Sécurité de la vieillesse, du SRG et des autres soutiens des faibles revenus. On observe une dégradation de la qualité et du niveau des revenus de retraite offerts, car les régimes à prestations et à cotisations déterminées ou les régimes hybrides disparaissent et sont remplacés par autre chose. Selon moi, le gouvernement devrait imposer une réglementation en la matière, tout comme il régit le nombre minimum d'heures de travail rémunéré permis par les normes d'emploi.
    Les gouvernements doivent intervenir plus activement pour définir les niveaux minimums d'engagement et mettre un terme à la tendance au travail précaire. Quant au chiffre relatif à la disposition de non-participation du RPC, il est minime. Je ne vois aucune raison de radiner de ce côté. Cette disposition devrait être partout présente quand on apporte des modifications au RPC, qui devient lui-même plus complexe au gré des modifications. Il est important de protéger l'intégrité de ce régime dans la mesure du possible.
    Je m'inquiète beaucoup qu'on instaure des mesures que les gens ne comprennent pas. À ce propos, lorsqu'il y a fractionnement des revenus de retraite, les femmes sont privées de leur juste part de la SV et du SRG puisqu'on estime que leur revenu est majoré par rapport à ce qu'il devrait être pour l'admissibilité à la SV. Par ailleurs, les hommes qui fractionnent leurs revenus de retraite touchent une plus grande part de la SV et du SRG que s'ils étaient imposés sur leurs revenus de retraite réels. Et les prestations de SV et de SRG de leur femme diminuent. Bien des couples mariés mettent leurs revenus en commun et tout le monde a accès au même revenu, mais cela n'est pas généralisé. De toute façon, c'est une forme de vol des hauts revenus au détriment de femmes à faible revenu et il faut que cela disparaisse. En matière de pensions, il faut tenir compte de cet élément dans le tableau d'ensemble.
(0930)
    Votre temps de parole est terminé.
    Passons maintenant à ma collègue, Mme Damoff.
    Je voudrais avoir une demi-heure pour vous poser des questions à vous toutes.
    Madame Lero, vous avez fait beaucoup de recherche sur les personnes handicapées et leurs difficultés en matière d'emploi. C'est le dernier segment de notre société qui, semblons-nous croire, peut travailler gratuitement sans que nous trouvions à redire ni que ce soit illégal. Estimez-vous que le gouvernement peut jouer un rôle à l'égard des femmes handicapées, notamment? Les subventions ne donnent rien puisque, lorsqu'elles s'arrêtent, les emplois disparaissent. Je songe à des moyens d'aider les femmes handicapées à trouver des emplois rémunérés permanents.
    La question est complexe. Je travaille actuellement à un projet qui porte sur les invalidités épisodiques, c'est-à-dire des affections comme la sclérose en plaques qui se caractérisent par des périodes de validité et de bien-être.
    Notre système a comme idéal le travailleur masculin à temps plein qui travaille toute l'année. Bien des personnes handicapées et peut-être aussi des soignants souhaitent travailler à temps partiel en touchant des avantages au prorata et en recevant un soutien de leur revenu, ce qui leur permettrait de rester dans la population active sans compromettre leur santé.
    En ce moment, nous avons des régimes de revenu pour les personnes handicapées, comme le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, qui repose sur une dichotomie nette : la personne peut travailler ou non. Bien des gens peuvent travailler et utiliser leurs compétences pour peu qu'ils puissent se rendre au travail et obtenir les aménagements nécessaires, notamment une charge de travail allégée, de façon à apporter leur contribution. Il nous faut repenser certains des systèmes de soutien du revenu, et nous devons sensibiliser les employeurs pour en arriver là.
    Selon moi, certaines des impasses sont en fait des problèmes des régimes d'assurance. Pas l'assurance-emploi en soi, mais d'autres régimes prévoyant des prestations. Il faudrait restructurer certains de ces programmes pour mieux répondre aux besoins. Mais on répugne à agir.
    Madame Ritchie, pendant l'été, j'ai discuté avec le dirigeant d'un syndicat de ma circonscription qui représente des éducatrices de la petite enfance qui travaillent dans les écoles. Vu la nature de leur travail, elles doivent demander l'assurance-emploi tous les étés. Elles sont mises à pied tous les étés et doivent faire une nouvelle demande. L'un des problèmes qu'on m'a signalés, c'est que, parce que le congé de maternité est plus long que le congé accordé aux hommes, les femmes sont touchées de façon disproportionnée, puisqu'elles ne sont pas admissibles, l'été venu.
    Avez-vous observé ce problème? Comment l'assurance-emploi, vu sa structure, a-t-elle un impact négatif sur les femmes — mais non sur les hommes, parce qu'ils ne prennent que le congé de paternité —, puisque le congé est de 34 semaines?
    Si je vous comprends bien, vous revenez sur le dernier point que j'ai abordé dans ma déclaration liminaire. C'est là un problème permanent. Si une personne prend un congé parental et a besoin de prestations régulières par la suite, dans ce cas-ci à cause de la mise à pied estivale... Mais si elle ne prend pas ce congé, elle touchera les prestations de l'assurance-emploi. Si elle a pris un congé parental pendant l'année et a épuisé ses droits, et si elle n'a pas fait assez d'heures pour redevenir admissible, elle n'aura pas les mêmes prestations qu'une collègue peut avoir en cas de mise à pied. L'inverse arrive aussi.
(0935)
    Je partage mon temps de parole avec M. Fraser. Je lui cède donc la place.
    Merci beaucoup.
    D'abord, madame Ritchie, vous avez dit un mot de l'assurance-emploi et expliqué que les prestations ne vont pas nécessairement à tous ceux qui devraient les toucher. Vous avez donné l'exemple des entrepreneurs indépendants. Je suis tout à fait d'accord, mais, sur le plan théorique, j'ai du mal à voir comment le programme devrait s'appliquer à ceux qui ne cotisent pas au régime. Il s'agit selon moi de l'argent des travailleurs qui cotisent.
    Comment faire en sorte que ces gens soient admissibles à des prestations sans puiser dans des fonds auxquels ils n'ont pas cotisé?
    Nous sommes d'accord avec vous pour dire que les prestations doivent aller à ceux qui ont cotisé au régime. C'est la base du régime. Le problème, ici, c'est qu'il faut adopter une approche large de toute une série de lois, notamment les normes de travail et le Code canadien du travail, et commencer à creuser le problème du travail autonome involontaire qui permet à certains grands employeurs de se délester de leurs responsabilités, comme les contributions à l'assurance-emploi et au RPC, et aussi le problème de certains employés qui ne cotisent pas au RPC.
    Votre réponse, donc, est-elle qu'il faut obliger ces gens à participer au programme d'assurance-emploi ou qu'il faut créer un programme distinct pour les gens qui se trouvent dans cette situation?
    Dans la situation dont je parle, il faudrait que ces travailleurs participent au programme, qu'ils soient considérés comme des entrepreneurs dépendants et participent au programme auquel cotisent employeurs et employés.
    Très bien. Merci.
    Madame Lahey, je crois qu'il me reste une minute. Sauf erreur, c'est vous qui avez dit que, sur le plan macroéconomique, gouverner en fonction de la croissance peut présenter un problème. Je n'ai rien contre le fait de gouverner pour la croissance, mais je retiens le point que vous faites valoir : il faut que la croissance bénéficie à tout le monde. Je songe à quelques exemples, dont l'investissement dans les soins à domicile ou les services de garderie, où un investissement fédéral pourrait aider à assurer un certain niveau d'égalité. Y a-t-il d'autres secteurs que nous pourrions cibler et où nous pourrions réaliser des économies systémiques ou une croissance qui favorisent la promotion de la femme?
    Pour moi, le plus important est d'assurer aux femmes la parité totale dans le travail rémunéré. En Alberta seulement, j'ai fait un petit travail sur l'équité salariale pour étudier l'impact global de cette mesure sur les revenus. L'une des diapositives que j'ai reprises dans ma présentation illustre cela. Avec la réduction des paiements de transfert aux personnes à faible revenu et l'augmentation des revenus, on constate que la promotion de l'égalité entre les sexes rapporte.
    En réponse à votre premier point, je ne suis pas d'accord avec vous pour dire que poursuivre uniquement la croissance comme le Canada l'a fait pendant si longtemps et comme d'autres pays l'ont aussi fait, est seulement une petite partie du problème. C'est l'essentiel du problème, car cela a complètement inversé les priorités de la plupart des gouvernements, qui semblent croire que leur objectif principal est de nourrir davantage les sociétés qui sont de leur ressort que les êtres humains qui sont la source de toute richesse.
    La plupart des pays de l'OCDE et des grandes organisations de réflexion, dont le FMI, ont fini par comprendre que la poursuite de la seule croissance est tout à fait mauvaise et qu'il faut en revenir aux objectifs de développement durable, à l'accord de Paris, à l'exigence de Beijing...
    Désolée, mais votre temps de parole est terminé.
    Mon collègue Bev Shipley a la parole. Cinq minutes.
    Bienvenue au Comité.
    Merci, madame la présidente. Je vais partager mon temps de parole avec Karen.
    J'ai seulement une ou deux réflexions à faire. Au préalable, une observation.
    À propos du financement des infrastructures en général, vous avez parlé de logements abordables, de ce genre de chose. Normalement, l'argent est versé aux provinces, qui voient avec les municipalités où l'utiliser.
    Je suis agriculteur. Je travaille donc en agriculture. L'autre jour, nous avons discuté de difficultés que les femmes éprouvent dans ce secteur. Je dirais que je suis plus intéressé par ce que nous pouvons faire pour encourager les femmes à s'engager dans certains secteurs de façon à parvenir à l'égalité. Qu'en pensez-vous?
    En agriculture, par exemple, nous avons besoin d'agrologues, d'ingénieurs, de vétérinaires, de chimistes, de divers spécialistes, de concepteurs de programmes, etc. L'une des difficultés, c'est non seulement d'amener des gens et plus particulièrement des femmes à opter pour ces métiers spécialisés, comme en agriculture, où il existe une demande... On suit la formation et dès qu'elle est terminée, on a un emploi. Promenez-vous près des chantiers de construction et vous verrez des femmes qui conduisent des excavatrices ou des compacteurs. Elles font du travail autrefois réservé aux hommes. Ce sont des métiers spécialisés bien rémunérés.
    De quelle manière pouvons-nous les encourager, d'après vous? Tous les autres parlent des avantages sociaux. Il faut s'en occuper, mais je voudrais que vous me disiez comment nous pouvons amener les femmes à prendre conscience du fait qu'il y a là de bons débouchés qui les aideraient à réussir leur carrière.
    Je vous invite à répondre à tour de rôle, si vous le voulez bien.
(0940)
    C'est un défi d'ordre culturel considérable. Il faudrait commencer par réglementer la publicité, qui, de plus en plus, projette des stéréotypes de femmes plus intéressées par leur manucure que par la machinerie lourde. Il y a ce facteur. Il est bien établi en recherche pédagogique, grâce à une analyse sexospécifique détaillée, que ce genre d'orientation des femmes et des hommes commence dès qu'ils entrent dans des institutions culturellement organisées.
    Lorsque les femmes atteignent l'âge de faire un choix de carrière à l'université, les facteurs institutionnels sont déjà très décourageants. Allez au département de génie de Queen's à l'automne. Vous verrez des étudiants peints en violet de la tête aux pieds et des vestes de sport sur des milles pour le bizutage. Cela ne dit rien aux femmes. Même avec une femme à la tête du département de génie de Queen's, il a été très difficile de franchir la barrière culturelle qui a été dressée et est maintenue en place.
    Ne progressons-nous pas? Il est parfois difficile...
    Non. Au contraire, nous reculons.
    J'ai entendu parler de gens qui font avancer la cause. Je ne pense pas que les gouvernements jouent un rôle dans le changement de la culture d'un programme. Vous parlez du bizutage. L'université doit prendre ces imitatives, n'est-ce pas?
    L'université fait tout ce qu'elle peut, mais la Commission canadienne des droits de la personne ne fait rien. Elle ne fait pas respecter les règles. Elle donne des décisions insultantes qui font retomber le blâme sur les femmes si elles sont dérangées par le harcèlement avec lequel elles sont généralement aux prises lorsqu'elles arrivent dans ces domaines de travail. C'est un problème juridique, culturel et économique systémique auquel il faut s'attaquer à tous les niveaux. C'est pourquoi le rôle de Condition féminine Canada doit consister, en partie, à rétablir l'approche intégrée de l'égalité des sexes pour toute politique, pratique et loi et tout programme au Canada pour en revenir là où nous en étions auparavant, pour faire de l'égalité entre hommes et femmes un principe fondamental autour duquel toute activité humaine doit s'organiser.
    Quelqu'un pourrait-il m'éclairer? Quel pourcentage de femmes, comparé à celui des hommes, obtiennent leur diplôme d'études secondaires, collégiales et universitaires?
    Il est très faible. Il y a eu un sérieux recul. Les femmes qui obtiennent leur diplôme se tournent de plus en plus vers les sciences de la terre et la biologie et non vers les milieux plus durs du génie environnemental et chimique. Elles se détournent aussi de la programmation informatique, alors qu'on croyait qu'elles y réaliseraient de grandes avancées. Les données sont disponibles et je crois même que le Comité les a dans ses dossiers depuis environ deux ans.
    Pourquoi se retirent-elles ou ne vont-elles pas jusqu'au bout?
    Je le regrette, mais votre temps de parole est terminé.
    J'en suis désolé.
    Nous n'avons plus de temps pour l'audition des témoins, que je remercie. Vos contributions ont été très précieuses. Nous vous savons gré de l'information que vous nous avez fait parvenir. Si vous pensez à quelque chose d'autre que vous voudriez faire lire au Comité, n'hésitez pas à communiquer avec la greffière.
    Nous allons maintenant suspendre la séance et siéger à huis clos pour étudier notre rapport.
     [La séance se poursuit à huis clos.]
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