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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le président, d'entrée de jeu, je voudrais vous remercier de l'accueil chaleureux qui m'est réservé depuis que je suis au Canada, ainsi qu'à toute ma délégation. J'apprécie particulièrement d'être reçu par votre auguste comité. Je ferai une très brève intervention pour vous permettre de poser les questions et de faire les commentaires que vous souhaitez. Puis, naturellement, la délégation qui m'accompagne, et moi-même, serons à votre disposition pour vous donner les réponses que nous pensons pouvoir détenir.
Monsieur le président, je suis ici à l'invitation du ministre des Affaires étrangères, , pour venir discuter avec les autorités canadiennes afin de voir dans quelle mesure nous pourrions renforcer les relations bilatérales efficaces qui existent entre nous.
Je suis arrivé le 25 et, depuis le 26 jusqu'à maintenant, j'ai eu beaucoup de rencontres aussi bien avec le ministre Cannon qu'avec des parlementaires et les Burkinabés qui sont au Canada. Je dois dire que, jusqu'à présent, les choses se sont très bien passées.
Monsieur le président, les relations entre le Canada et le Burkina datent des lendemains de nos indépendances, et elles se sont renforcées d'année en année. Jusqu'en 2005, nous étions sur la liste privilégiée des pays africains avec lesquels le Canada avait des relations bilatérales. Nous avons un accord de coopération — 2001-2011 — qui permet au Canada d'intervenir au Burkina Faso grâce à l'aide publique au développement dont le montant est de 90 millions de dollars durant la période mentionnée, un montant qui a été augmenté depuis de quelque 50 millions de dollars.
Monsieur le président, parmi les atouts qu'a le Burkina Faso aujourd'hui, il y a une gouvernance jugée comme bonne par l'opinion publique internationale et, naturellement, par les agents de la société civile au Burkina Faso. Nous avons des institutions qui sont stables: nous avons un gouvernement, un Parlement à chambre unique où sont représentés 10 partis, une justice indépendante, une presse libre et une société civile très critique envers le gouvernement. Je suis sûr que vous recevez les échos de cette société civile ainsi que de la presse.
Nous avons également une bonne présence du secteur privé canadien qui est le premier investisseur privé au Burkina, notamment dans le domaine minier. Cette présence privée est très bien appréciée par les Burkinabés; les compagnies respectent les lois et règlements du Burkina Faso.
Nous avons également fait d'importants progrès dans les secteurs sociaux comme l'éducation et la santé, mais, évidemment, comme nous sommes un pays jeune qui n'a pas beaucoup de ressources, nous sommes conscients qu'il y a encore beaucoup de choses à faire, et nous nous attelons à améliorer autant que nous pouvons, chaque année, l'ensemble des partenaires des secteurs sociaux pour qu'ils puissent également intervenir.
Comme vous le savez, nous sommes très engagés dans la gestion de la paix et de la sécurité dans la sous-région. Et, notre chef d'État, le président Compaoré, est très engagé dans la paix et la sécurité dans la sous-région et même dans la région, que ce soit au Togo, en Côte d'Ivoire, en Guinée, au Niger dans les années 1995 et 1996, dans la bande sahelo-saharienne ou au Soudan.
Au passage, je voudrais remercier le gouvernement canadien de l'aide qu'il nous a apportée dans le cadre du déploiement de notre bataillon au Soudan.
Il me semble que — et je terminerai ici, monsieur le président — le Canada et le Burkina Faso ont intérêt à développer leurs relations bilatérales. Pourquoi?
C'est parce que le Burkina Faso est un pays ouvert qui s'est engagé résolument dans la démocratie et qui travaille chaque jour à améliorer son système.
C'est également un pays dans lequel le secteur privé canadien, comme je vous le disais tout à l'heure, a de gros intérêts. Nous avons à peu près 800 millions de dollars d'investissements par le privé canadien dans le domaine des mines. Nous avons depuis de nombreuses années des relations bilatérales avec le gouvernement canadien que nous estimons fortes, mais que nous pouvons améliorer, notamment dans les consultations pour les instances internationales, dans le domaine de la paix et de la sécurité, et pour nous aider également à développer davantage nos secteurs sociaux.
Monsieur le président, mes attentes en venant ici sont de voir notre pays, le Burkina Faso, et votre pays, le Canada, se rapprocher davantage dans la sérénité, avec de l'engagement et de l'amitié franche, c'est-à-dire que vous nous présentiez les problèmes que vous estimez être importants à résoudre et, qu'en revanche, nous vous posions également les questions que nous supposons intéressantes pour vous et pour nous, dans l'intérêt de nos deux pays.
Encore une fois, je vous remercie de nous avoir reçus si aimablement et, naturellement, je demeure à votre disposition pour les questions éventuelles.
Merci, monsieur le président.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci, monsieur le ministre, d'être présent ici ce matin. Vous savez, j'ai visité votre pays en 2004, lors du Sommet de la Francophonie. J'ai eu le plaisir d'y aller et j'en suis très fier.
Vous nous avez dit tout au début, dans vos remarques, que vous étiez très satisfait des compagnies minières, surtout d'une compagnie montréalaise — pour ne pas la nommer — dans le domaine de l'aurifère, qui travaille très bien avec le gouvernement.
J'aimerais vous poser une question concernant le rôle de la Chine sur le continent africain. Je voudrais savoir en quoi la démarche de la Chine, à l'égard des relations bilatérales et multilatérales avec les pays africains, diffère-t-elle de celle adoptée par le Canada?
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Dois-je répondre directement?
D'accord.
Je voudrais vous remercier de votre question, et surtout de l'amitié que vous avez toujours eue envers le Burkina Faso.
Comme je vous l'ai dit, les sociétés privées canadiennes sont très dynamiques au Burkina Faso. Je reconnais également que depuis ces dernières années, la Chine continentale a fait une percée importante dans le domaine économique. Nous avons avec cette Chine continentale des relations commerciales, mais nous n'avons pas de relations diplomatiques. Le pays avec lequel nous avons des relations diplomatiques est la République de Chine (Taïwan). Cependant, nous entretenons avec la Chine continentale des relations normales et commerciales. D'ailleurs nous étions voisins lorsque nous étions au Conseil de sécurité, il nous arrivait de discuter de questions et d'autres sans que cela ne pose un problème particulier.
Si la Chine continentale effectue une si grande percée en Afrique de façon générale, il me semble que c'est à cause d'une démarche pragmatique, parce qu'elle fait des investissements de tous ordres, notamment dans le domaine des infrastructures et dans le domaine social, et essaie également de faciliter les échanges commerciaux entre l'Afrique et la Chine. Bien évidemment, les manières de faire varient d'un pays à l'autre, mais, globalement, c'est ce que je peux vous dire sur la question.
Je pense que de grands pays comme le Canada, les États-Unis et l'Europe ont, à mon avis, intérêt aujourd'hui à montrer plus de présence pour occuper le rang qui est le leur parce que, vous le savez bien, l'Afrique a beaucoup de potentialité, elle se réveille. Et je pense que, dans les années à venir, elle sera amenée à jouer un rôle important. Naturellement, les pays qui entretiennent des relations avec l'Afrique depuis longtemps pourraient en tirer des bénéfices réciproques.
Merci.
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En fait, ce ne sont pas les gens de l'ACDI qui nous l'avaient dit. Je crois que c'est le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international qui avait, pour des raisons diverses, réduit le nombre de pays de concentration de 25 à 20, me semble-t-il. Pour ce qui est de la liste actuelle des pays de concentration, je crois que c'est 7 pays africains qui s'y trouvent.
Évidemment, compte tenu des relations fructueuses et de longue date que le Burkina Faso entretient avec le Canada, nous considérions que ce n'était pas de bon augure, puisque selon nous, l'excellence de nos relations devait se manifester par notre présence sur cette liste, et ce, pour trois raisons.
Comme je vous l'ai indiqué, la première raison est que le secteur privé est très dynamique; les investissements privés augmentent d'année en année. Cela, à mon avis, devrait être un atout nous permettant de nous retrouver sur la liste. Ainsi, nous pourrions recevoir le soutien nécessaire du secteur public pour que le secteur privé puisse bien jouer son rôle.
La deuxième raison est que nous tenons régulièrement des consultations à l'échelle internationale qui nous permettent de nous soutenir mutuellement. Or nous pensons que nous sommes en mesure de soutenir le Canada dans certaines de ses prochaines visées. Vous me comprenez très bien.
Puis, comme je l'ai dit, le Burkina Faso agit quand même beaucoup dans le maintien de la sécurité et de la paix dans la sous-région. Or, pour le bien des entreprises privées et la bonne continuité des relations bilatérales, il faut bien qu'il y ait la paix et la sécurité. Nous sommes même intervenus, malgré nos moyens limités, pour éviter que la sécurité de certains de nos partenaires ne soit menacée, ou, lorsque cette sécurité était menacée, pour aider à libérer les personnes prises en otage.
Nous avons donc établi une bonne gouvernance. Justement, vous savez que nous avons été soumis au MAEP. Vous avez entendu parler du MAEP. C'est un groupe de 28 pays qui ont décidé de s'autoévaluer, de se soumettre à une évaluation par les pairs. Nous avons été le huitième pays à se faire évaluer, et l'évaluation a été très positive.
Je vous ai également parlé de l'ordre qui règne dans notre société civile et de notre presse libre. Nous avions donc assez de raisons de croire que nous continuerions à figurer sur la liste.
Cela étant dit, je dois reconnaître que dans certains secteurs sociaux, comme l'éducation et la santé, le Canada a fourni des ressources supplémentaires. Ainsi, on est passé de 10 millions de dollars à 17 millions de dollars, ce qui est quand même important. Toutefois, sur le plan psychologique, ne pas être sur la liste nous pose problème.
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Merci, madame la députée.
En effet, j'ai représenté l'ensemble du groupe africain ici, en mai dernier, pour faire part de nos inquiétudes et surtout de notre souhait de voir notre partenariat et notre coopération avec le Canada se renouveler et se renforcer par un certain nombre de mesures que nous avions énoncées. En ce qui concerne particulièrement le cas de mon pays, le Burkina Faso, depuis que je suis au Canada, à deux reprises, il y a eu des menaces sérieuses de fermeture. Une première fois, à mon arrivée ici, avec les amis du Burkina et avec l'appui de certains partenaires, j'ai pu prendre contact avec les autorités politiques d'alors pour expliquer les efforts que mon pays faisait pour se positionner aujourd'hui positivement en Afrique, tant sur les plans de la démocratie et de la promotion de la gouvernance que des efforts pour la transparence et la promotion d'un développement économique soutenu et équitable. À partir de ces éléments, l'ambassade a été maintenue.
Lorsque le gouvernement a changé, les mêmes éléments relatifs à la fermeture sont intervenus. J'ai recommencé encore à faire le tour et j'ai eu le privilège, à l'époque, de rencontrer l'ex-ministre Maxime Bernier. J'ai exposé la situation de mon pays, notamment en insistant sur le fait que le Burkina Faso est aujourd'hui le principal pôle de stabilité en Afrique de l'Ouest. Malgré la modicité de ses moyens, comme le ministre vous l'a dit, le Burkina Faso fait des efforts énormes pour la paix dans la sous-région, et nous pensons que le signal donné par le Canada doit encourager les pays qui font des efforts, dans l'espoir que ceux qui en font moins vont se mettre au diapason de ceux qui en font le maximum.
Nous n'avons pas compris pourquoi le Burkina avait été mis de côté, surtout que sur le plan de l'indice du développement humain, on ne peut pas dire que nous soyons particulièrement bien placés. Nous avions compris que c'était cet indicateur et la lutte contre la pauvreté qui guidaient l'établissement des relations de partenariat. J'avais été comprise, l'ambassade a été maintenue.
Je remercie M. Bernier et le gouvernement canadien, mais nous voudrions être rassurés, savoir que c'est une histoire qui appartient résolument au passé et qu'on comprend qu'on ne peut pas faire des affaires à un certain niveau sans un accompagnement diplomatique conséquent.
Comme le ministre vous l'a sans doute dit, le Canada, aujourd'hui, est le premier investisseur privé étranger direct dans mon pays avec 800 millions de dollars d'investissements par an. Le Burkina Faso est le troisième partenaire minier en importance du Canada après l'Afrique du Sud et le Ghana. Nous pensons que l'importance de nos relations sur le plan commercial et les efforts faits par le gouvernement et le peuple du Burkina Faso pour sortir du sous-développement méritent une représentation à un niveau acceptable. Du reste, sur les principes qui guident en général la diplomatie, la fermeture d'une ambassade intervient généralement en conséquence d'une dégradation de relations ou d'un événement politique ou diplomatique assez fort qui fait que le pays qui décide de fermer son ambassade veut donner un signal à l'autre pays que les choses devraient se passer autrement. C'est pour cette raison que nous considérons ces décisions comme très graves, car elles peuvent donner de mauvais signaux.
Vous savez, le ministre vous l'a dit, que le Canada et les pays de l'Europe du Nord en général sont considérés comme les gardiens du temple en matière de bonne gouvernance, de respect de l'environnement et des droits humains. Donc, nous ne voulons pas que ce signal puisse induire des contre-messages nuisibles à notre pays. Merci.
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Madame l'ambassadrice, un grand merci pour votre visite d'aujourd'hui.
Pour la gouverne du comité, je dois dire que le ministre a très gentiment accepté de venir me rencontrer à mon bureau hier après-midi, ce qui m'a permis de discuter avec lui. Je le remercie pour cette discussion d'une demi-heure qui a été selon moi très productive et fructueuse.
Nous avons alors parlé de cette question des pays de concentration aux fins de l'aide bilatérale, ce qui demeure une affaire de choix, bien évidemment, car le gouvernement qui nous a précédé avait des relations de financement avec, croyez-le ou non, pas moins de 111 pays. Nous avons convenu que nous pourrions faire un travail beaucoup plus utile si nous concentrions notre aide sur 20 pays seulement. Nous ciblons également des secteurs prioritaires comme la sécurité alimentaire, les enfants et la croissance économique durable.
J'ai donc eu l'occasion d'expliquer notre démarche au ministre, tout comme je l'avais fait précédemment auprès de Son Excellence, Mme l'ambassadrice, à l'occasion d'une autre rencontre. Il va de soi que je comprends les réactions que cette décision peut susciter — et nous avons discuté de cela également. Comme le signalait le ministre Yoda, l'aide canadienne au Burkina Faso a en fait augmenté, passant de 10 millions de dollars à 17 millions de dollars. Il ne faut donc pas se fier aux apparences. C'est simplement que le gouvernement canadien gère différemment son soutien financier, en renonçant notamment à l'aide conditionnelle.
Je pense qu'il serait utile, monsieur le ministre, que vous puissiez nous donner un peu une idée... L'ACDI est très active dans le secteur de l'éducation au Burkina Faso. Je crois personnellement que l'éducation est l'une des clés les plus importantes de la prospérité future des pays en développement, comme ce fut le cas pour les pays développés.
Pourriez-vous nous indiquer quels genres de programmes peuvent être offerts grâce aux fonds de l'ACDI — grâce à l'aide canadienne — pour l'éducation au Burkina Faso?
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Merci, monsieur le secrétaire parlementaire.
J'ai dit, d'entrée de jeu, lorsque la première question m'avait été posée, qu'en vérité ce n'était pas une baisse des activités de l'ACDI. Lorsque la première question m'avait été posée par le député, j'avais dit que, au contraire, dans certains secteurs particuliers prioritaires comme l'éducation, il y avait même eu une augmentation importante de l'aide du Canada.
En effet, le gouvernement burkinabé a trois priorités qui concernent les secteurs sociaux: l'éducation, la santé et les questions de gouvernance et du genre. Dans ces trois secteurs, notamment l'éducation, l'ACDI a fait une contribution importante ces dernières années. D'ailleurs, l'augmentation de l'apport dont j'ai parlé était due au fait de l'intervention dans le secteur de l'éducation, qui est un secteur prioritaire. Naturellement, j'ai été ministre de la Santé pendant six ans et demi, et je sais que le Canada, soit directement soit par ses apports au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, a fait des interventions qui ont permis de financer ce secteur de la santé.
Dans le secteur de la bonne gouvernance également, le gouvernement canadien — je l'ai dit ici — nous a soutenus, notamment lors des élections présidentielles de 2005. Ce que j'ai dit, monsieur le secrétaire parlementaire — et vous avez été assez aimable de le rappeler lorsqu'on s'est rencontrés —, c'est qu'il y a certainement un problème de communication. Il va falloir régler ce problème parce que, ainsi que nous l'avions compris, nous avions estimé que ce n'était pas un bon signal. Un pays qui fait des efforts afin d'atteindre les objectifs du millénaire, un pays qui a des relations fructueuses sur le plan de l'investissement privé, un pays qui, de surcroît, est ami du Canada, et qui intervient à même ses propres ressources pour, dans certains cas, assurer la sécurité de ses ressortissants ou veiller à ce que ses ressortissants retrouvent la sécurité, bref, un tel pays mérite de ne pas avoir l'impression que ses relations se sont dégradées du fait de ne pas figurer sur la liste.
Vous m'aviez donné des explications et vous m'aviez dit, d'ailleurs, que ce n'était pas une décision fermée. Je pense être satisfait des réponses que vous m'avez données. Quant aux informations que j'ai sur l'intervention de l'ACDI dans le domaine de l'éducation, c'est celle que je viens de vous donner.
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Merci beaucoup, madame la députée.
Évidemment, je ne peux pas... Nous ne vendons pas notre voix, cela va de soi. Je pense que nous avons des relations d'amitié, des relations fortes, qui datent depuis les lendemains des indépendances. Nous avons écrit au gouvernement canadien pour dire — je pense que je peux le dire dans cette salle sans que ce soit public — que nous soutiendrions la candidature du Canada pour être membre du Conseil de sécurité, en tant que membre non permanent.
Cela dit, je ne suis pas venu pour vendre cette information, je suis venu pour expliquer au gouvernement canadien que les relations que nous avions depuis longtemps, qui sont fructueuses et qui sont renforcées ces dernières années par une présence forte du secteur privé, gagneraient à être renforcées davantage. Cela permettrait au Burkina Faso, d'une part, de pouvoir avoir des chances de réaliser ses objectifs du millénaire pour le développement, de mieux lutter contre la pauvreté, de continuer à faire des progrès dans les domaines de la gouvernance et de l'équilibre des genres. Cela permettrait, d'autre part, de dire au Canada qu'il a tout intérêt à ce que cela se produise, car cela lui permettrait de faire de meilleures affaires. Cela permettrait aussi, par exemple, le maintien des efforts que nous faisons dans la sous-région pour qu'il y ait la paix et la stabilité, qui sont utiles pour le développement des activités économiques de façon générale et des échanges en particulier.
Nous avons été bien reçus, je vous l'ai dit. J'ai eu l'occasion de rencontrer l'Association d'amitié, de coopération et de solidarité Canada-Afrique et c'étaient des échanges très intéressants. J'ai eu à rencontrer l'honorable Bob Rae; c'étaient des échanges très intéressants. Les deux whips également, je les ai rencontrés; c'était très intéressant. Je vois que, ici également, les questions sont très pointues et très intéressantes.
Je crois que c'est ça, les relations franches et amicales qui doivent exister entre des pays. Ces deux États qui se parlent, ce ne sont pas seulement deux gouvernements, ce sont deux États qui se parlent, c'est-à-dire qu'au-delà des gouvernements, il y a les États dont les intérêts doivent persister et permettre de renforcer les liens amicaux.
Merci, madame la députée.
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Premièrement, sur le plan politique, le gouvernement a introduit un projet de loi qui a été adopté par l'Assemblée nationale, qui exige un quota minimum que chaque parti politique doit avoir au profit des femmes.
Deuxièmement, le gouvernement a créé un certain nombre de structures de financement — il y en a sept en tout — qui permettent aux femmes de pouvoir faire des activités rémunératrices de revenu.
Troisièmement, nous avons engagé sur une large échelle ce qu'on appelle l'alphabétisation. Vous savez que, quand vous avez 30 ans et que vous n'êtes jamais allé à l'école, s'il y a des possibilités pour vous de vous alphabétiser dans la langue de votre pays avec une possibilité de lecture, cela vous permet de pouvoir être beaucoup plus productif.
Nous essayons également, dans la mesure du possible, dans l'ascension vers les postes de direction, qu'il y ait, autant que faire se peut — ce n'est pas encore la parité —, des hommes et des femmes qui accèdent à des postes de responsabilité. Cela étant, je dois dire que nous voulons aller plus loin, mais évidemment cela prendra du temps parce que, même dans les pays à économie avancée, il n'y a pas très longtemps que, dans certains pays, les femmes ont le droit de vote. Depuis longtemps, depuis notre indépendance, les femmes ont le droit de vote; cela se passe très bien.
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Madame l'ambassadrice, monsieur le ministre, mesdames et messieurs, bienvenue. Il ne fait aucun doute que nos deux pays entretiennent des relations très chaleureuses depuis 30 ou 40 ans.
J'aimerais d'abord parler de l'optimisme entourant l'exploration minière qui se caractérise par une participation assez marquée des entreprises canadiennes. Vous savez assurément qu'un projet de loi à ce sujet, le projet de loi C-300, est actuellement à l'étude devant la Chambre des communes. Cette mesure semble susciter passablement de controverses, en tout cas certes au sein de l'industrie minière. Nous avons tous reçu de nombreuses lettres de différentes sociétés minières qui affirment essentiellement que le projet de loi va nuire à la capacité concurrentielle des entreprises canadiennes sur la scène internationale, ce qui pourrait fort bien les empêcher de se livrer à ces activités d'exploration; ou encore que le projet de loi incitera fortement les sociétés minières multinationales à déménager à l'extérieur du Canada afin d'éviter une suite de complications avec les autorités canadiennes.
C'est une situation extrêmement préoccupante pour bien des Canadiens, car notre industrie minière est sans doute l'une des plus prospères au monde.
Un de mes collègues a posé tout à l'heure une question au sujet de la Chine. S'il y a effectivement des ressources à exploiter, et nous savons que c'est le cas, croyez-vous que les Chinois pourraient prendre le relais si jamais les sociétés minières canadiennes devaient se retirer de votre pays pour différentes raisons très précises découlant d'un projet de loi que nous aurions adopté au Canada? Où quel pays attend actuellement son tour pour devenir le prochain à assumer un rôle très actif dans ce secteur?
Je dois ajouter qu'il ne s'agit pas d'un projet de loi présenté par le gouvernement; c'est l'initiative d'un député de l'opposition. Nous formons ici un gouvernement minoritaire et il arrive assez régulièrement que des initiatives semblables aillent de l'avant grâce au poids du nombre qui penche bien évidemment en faveur des partis de l'opposition.
Je pense qu'il faut également s'interroger sur l'aide que le Canada apporte à votre pays. Nous devons composer avec une combinaison de facteurs et de restrictions d'ordre économique. Si les sociétés minières canadiennes devaient se retirer, la situation pourrait-elle devenir préoccupante pour vous?
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C'est une question posée par quelqu'un qui a une très grande expérience de l'Afrique, d'une part, et du monde politique, d'autre part.
Pour ce qui est des causes de l'instabilité dans la sous-région, elles varient d'un pays à l'autre. Vous savez que le Togo, par exemple, a été dirigé par un seul parti pendant une trentaine d'années. Ça donnait l'impression que le partage du pouvoir était insuffisant. Je dois dire, parce que je le pense, que la colonisation a également sa part de responsabilité. En effet, le pays est en quelque sorte considéré différemment selon qu'on est au sud ou au nord. Le Sud, qui est beaucoup plus peuplé, a estimé qu'il était temps qu'il exerce lui aussi le pouvoir, qui était très souvent détenu par le Nord. Je crois que tout est parti de là.
Évidemment, la nature des élections a aggravé le problème, et lorsque le président Eyadéma est décédé, la succession a été celle que vous savez. C'était très difficile. C'est à ce moment qu'on a demandé au président Compaoré de faire office de médiateur. C'est ce qui a permis de tenir les élections de 2005, qui se sont passées dans des conditions très difficiles. Des décès importants ont eu lieu. Heureusement, la médiation a continué et les élections qui se sont déroulées le 4 mars 2010 se sont passées vraiment sans violence. Évidemment, la perfection n'était pas à l'ordre du jour, mais globalement, les choses se sont très bien passées, dans l'ensemble. Tous les observateurs qui étaient là l'ont reconnu. Le président Faure Gnassingbé va prêter serment et prendre le pouvoir le 3 mai prochain en vue de la deuxième législature.
Cette situation est différente de celle du Niger, par exemple, où, comme vous le savez, le président Tandja a décidé de se donner les moyens pour proroger son mandat, ce qui allait à l'encontre des dispositions constitutionnelles. Il a procédé à la dissolution de l'Assemblée nationale, de la Cour suprême, de la Commission électorale nationale indépendante et a tenu un référendum pour lequel la participation a été très faible. Cela a entraîné ce que vous savez. Il y a eu un coup d'État. On ne peut pas appeler ça autrement. Je pense que les élections seront organisées dans un an au maximum, heureusement. Les raisons sont différentes de celles qui prévalaient au Togo. Manifestement, il y avait une volonté d'aller à l'encontre de la loi fondamentale, la Constitution. Il était interdit de modifier l'une de ses dispositions.
La situation est différente également en Côte d'Ivoire. Comme vous le savez, il y a toujours la question du Nord et du Sud. Il y a eu cette guerre civile et tout ce que vous savez. La situation de la Guinée est également différente. D'une manière générale, je pense que ça tient aux phénomènes suivants: le passé colonial, la gestion non concertée du pouvoir, la jeunesse de tous ces États, probablement, et la question de l'ethnicité, dans certains cas. Ce sont là les causes dont je peux vous faire part. Heureusement, mon président est très souvent invité à mettre à contribution son expérience et à inciter les parties en conflit à se parler. En effet, s'il n'y a pas de paix, on ne pourra pas lutter efficacement contre la pauvreté. S'il n'y a pas de légitimité, on ne pourra pas non plus parler de bonne gouvernance, et ainsi de suite.
En ce qui concerne la façon dont je vois l'évolution politique de la région, voire de l'Afrique, je pense que les choses sont en train de changer. Aujourd'hui, compte tenu de la vision de l'Union africaine et de la CEDEAO, tous les pouvoirs non constitutionnels sont rejetés. Dans ces conditions, je pense que chaque pays aura tendance à faire prévaloir une certaine légitimité reconnue, conformément aux dispositions constitutionnelles. De là l'importance des discussions que nous tenons. Des pays comme le Canada, qui ont de l'expérience, une vision, et qui ont mis en pratique le système pendant un certain temps, peuvent aider à lutter contre la pauvreté et à créer une bonne gouvernance. Ils peuvent aussi offrir l'aide nécessaire pour permettre une redistribution des richesses créées et une plus grande sérénité.
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Mesdames et messieurs, députés membres du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international, nous sommes une organisation parapluie pour les droits canadiens vouée à la défense des droits et à la promotion de la paix, aussi bien au Canada qu'en dehors du Canada. L'évolution de la vie démocratique du Congo vers un État de droit mobilise toutes nos énergies. Nous sommes engagés dans une lutte sans merci contre tout ce qui asservit la liberté dans la région des Grands Lacs africains et en République démocratique du Congo.
Nous sommes conscients d'être désagréables à ceux qui cherchent des compromis avec les oppresseurs et qui attendent d'eux récompenses et prébendes. Cependant, rien n'arrêtera notre combat, tant que le soleil de la liberté ne brillera pas sur le Congo — et il brillera. Les Congolais épris de paix ont besoin de l'appui sincère du Canada. En tant que Canadiens d'origine congolaise, nous avons besoin de l'appui des États libres et démocratiques comme le Canada pour que la paix soit restaurée en République démocratique du Congo dont le sous-sol est décrit comme un scandale géologique. Soutenir la restauration de la paix est le meilleur investissement que le Canada puisse faire pour le développement du Congo et pour favoriser les occasions d'affaires. Le Congo a tout, mais il lui manque deux choses: la paix et la paix, ce qui lui permettrait de devenir la locomotive du développement de toute l'Afrique centrale.
Distingués députés, nous sommes honorés d'être reçus par votre auguste comité. Nous tenons à vous remercier très sincèrement au nom des 6 millions de Congolais tués et des milliers de femmes congolaises violées par les soldats du Front patriotique rwandais de Paul Kagame, qui sèment la terreur depuis 1996 dans toute la région des Grands Lacs africains en général, et particulièrement à l'Est de la République démocratique du Congo. C'est pour ces victimes que nous sommes venus rencontrer nos élus.
Dans notre mémorandum du 11 novembre 2008 et dans la lettre de suivi du mois de mai 2009 adressés au premier ministre du Canada et dont des copies vous ont été fournies, nous faisons part d'informations précises et détaillées sur la responsabilité de Paul Kagame non seulement dans la conception, la planification et l'exécution de l'attentat du 6 avril 1994, qui a été l'élément déclencheur du génocide au Rwanda, mais aussi dans le génocide des Hutus qui a eu lieu sur le territoire de la République démocratique du Congo, et dans le génocide silencieux de 6 millions de Congolais, qui continue jusqu'à ce jour.
Il n'y aura pas de paix, ni dans la région des Grands Lac, ni en République démocratique du Congo, tant que les auteurs des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité et des violations graves des droits de la personne qui sont bien documentés, continuent à être couverts et protégés par l’impunité et les amnisties sur mesure. Un illustre Canadien d'origine congolaise qui a habité ici, à Ottawa, M. Djamba Yohé — pour ne pas le nommer — a dit ceci: « La rançon des crimes, ce n'est pas l'impunité. »
Les responsables des crimes graves commis en République démocratique du Congo depuis 1996 ne sont pas seulement au Rwanda. Ils sont aussi en République démocratique du Congo, et ils sont protégés contre les poursuites judiciaires qu'on pourrait intenter pour leurs crimes commis grâce aux lois d'amnistie sur mesure qu'ils font adopter, alors que les crimes qui leur sont reprochés sont imprescriptibles au regard du droit international.
Nous sommes venus ici demander à nos élus que vous êtes de tout mettre en oeuvre pour soulager les souffrances indicibles que Paul Kagame et ses complices infiltrés dans les rouages de l'appareil de l'État congolais infligent aux populations congolaises meurtries, et de le mettre toutes affaires cessantes hors d'état de nuire.
Les auteurs des crimes contre l'humanité se cachent aussi bien à Kigali qu'à Kinshasa. Nous sommes venus demander à nos élus de tout mettre en oeuvre pour que le Canada apporte un appui soutenu et accru aux efforts des acteurs de la société civile qui, au prix de leur vie, dénoncent, à Beni comme à Goma, à Kisangani comme à Ituri, les crimes et les massacres que les autorités actuelles cherchent à maquiller et à cacher lorsqu'ils sont commis par le Rwanda.
Nous sommes venus pour vous apporter les preuves des crimes commis par les membres du CNDP que les autorités de Kinshasa viennent d'intégrer dans les institutions nationales en guise de récompense pour les massacres qu'ils ont commis.
Un premier sujet de préoccupation pour lequel nous aimerions apporter la bonne information à votre comité touche donc les auteurs des crimes graves perpétrés en République démocratique du Congo et qui restent impunis.
Notre deuxième préoccupation concerne l'indifférence du Canada face à l'évolution de la République démocratique du Congo qui, depuis les élections de 2006, va de la dérive autoritaire, selon les termes de la FIDH, vers l'enlisement des projets démocratiques, pour reprendre les termes d'International Crisis Group que dirige notre compatriote Mme Louise Arbour. La corruption est décrite, dans les déclarations des évêques catholiques du Congo de juillet 2008 et de juillet 2009, comme le « cadre général de vie et d'action politique en République démocratique du Congo ».
Le Canada aurait-il donc dépensé l'argent des contribuables en finançant les élections en République démocratique du Congo pour faire émerger un État de droit au coeur de l'Afrique, et non pour donner un semblant de légalité à un régime qui réprime, torture et récompense les auteurs des crimes graves par des postes et des amnisties?
De quel côté se trouve le Canada? Est-ce du côté de la démocratie et des populations, ou du côté des dirigeants dont on dit que certains ont été armés par les sociétés minières canadiennes pour conquérir le pouvoir par la violence? Nous vous avons apporté aussi de la documentation en rapport avec les inquiétudes et même les gémissements que provoquent les sociétés minières canadiennes en République démocratique du Congo. C'est notre troisième préoccupation.
Distingués députés, notre organisation, Agir ensemble pour la paix au Congo, a été créée à la demande de 23 organisations communautaires et de personnalités qui, en 2006, s'étaient coalisées pour que l'autorisation de venir au Canada ne puisse pas être donnée à Paul Kagame. Aussi, Agir ensemble pour la paix au Congo, dont je suis le coordonnateur, s'est-il donné pour mandat d'oeuvrer pour la promotion de la paix dans les zones déchirées par les guerres, notamment la République démocratique du Congo. Il n'y a pas de développement sans paix.
Pour terminer, j'aurais voulu vous présenter nos recommandations pour contribuer à la restauration de la paix durable en République démocratique du Congo.
Distingués députés, nos recommandations sont les suivantes: prendre des mesures afin de mettre un terme au pillage systématique des ressources naturelles de la République démocratique du Congo auquel s'adonnent les États voisins, les groupes armés et les multinationales, dont certaines ont leurs sièges sociaux dans les pays libres et démocratiques comme le Canada, la Grande-Bretagne, les États-Unis d'Amérique, l'Australie ou la France; mettre sur pied une commission parlementaire d'enquête sur les activités des entreprises minières en République démocratique du Congo; mettre sur pied une commission parlementaire d'enquête pour élucider les liens entre le génocide rwandais et les guerres successives qui ont sévi en République démocratique du Congo; mettre sur pied une commission parlementaire pour clarifier les circonstances dans lesquelles ont été assassinés les prêtres canadiens; soutenir les efforts des acteurs de la société civile du Congo qui luttent contre la balkanisation planifiée du Congo; envisager les voies et moyens visant à donner effet aux mandats d'arrêt internationaux pour que les personnes citées puissent être déférées devant les instances judiciaires compétentes; prendre des mesures visant à donner effet aux différents accords relatifs à la restauration de la paix dans l'Est du Congo; et associer les Canadiens d'origine congolaise à toutes les activités que vous organisez sur la paix au Congo.
Je vous remercie de la meilleure attention que vous avez accordée à mon exposé.
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Monsieur Kabeya, je vous remercie de votre importante présentation. Je crois qu'il faut souligner, encore une fois, le degré extraordinaire de violence dont votre pays a souffert depuis une vingtaine d'années. Les députés reconnaissent qu'il s'agit en effet de la partie du monde la plus violente, et ce, depuis un important laps de temps. Comme pays, peu importe le parti au pouvoir, nous essayons de créer, avec les Nations Unies, des possibilités de stabilité au Congo.
J'aimerais tout d'abord exprimer une pensée. Le dilemme auquel nous faisons face, c'est qu'il y a un gouvernement souverain au Congo. C'est une réalité. Le Congo est membre des Nations Unies. Il y a un gouvernement et un président. Il y a une réalité politique au Congo et ce n'est pas possible, ni pour un pays comme le Canada ni pour les Nations Unies, de prétendre qu'un tel gouvernement n'existe pas. Il y a un gouvernement en place.
Vos recommandations me portent à croire qu'il n'y a pas de gouvernement au Congo. Oui, il y a des compagnies minières, mais il y a aussi un gouvernement qui est responsable des lois, de l'environnement et des activités des compagnies à l'intérieur des frontières. Nous sommes en train de discuter du projet de loi qui touche la question des activités des compagnies minières. Naturellement, les députés du Parti libéral croient en l'importance du principe de responsabilité sociale des grandes compagnies, des corporations canadiennes. En même temps, nous devons réfléchir un peu à la réalité. S'il y a une présence des troupes des Nations Unies au Congo, c'est avec l'appui du gouvernement du Congo. Si le gouvernement du Congo disait qu'il ne veut pas de troupes sur son territoire, il n'y en aurait pas. Ce serait très difficile pour les Nations Unies d'être là sans l'appui, sans l'invitation du gouvernement du Congo. C'est à peu près comme la situation en Afghanistan. Nous sommes en Afghanistan à l'invitation du président du pays, même si une foule de gens se posent des questions sur la nature du gouvernement de M. Karzaï.
J'aimerais obtenir un commentaire clair et net. Votre groupe et vous ne reconnaissez pas la légalité du gouvernement du président Kabila, n'est-ce pas? C'est une question importante.
Pour répondre à cette question de la légalité, il est évident qu'au Congo, il y a eu des élections, en 2006, qui ont installé de nouvelles institutions, avec un président de la République élu, un Parlement, mais je pense que les élections ne suffisent pas à légitimer le pouvoir de quelqu'un. Les élections doivent être suivies de fonctions régaliennes d'un État sur le terrain. Il faut montrer par exemple qu'on est responsable de la gestion d'un État.
Pour revenir à l'exemple des sociétés canadiennes qui exploitent les minerais au Congo, bien avant 1996, quand a eu lieu la guerre dite « de libération » par l'AFDL, les sociétés signaient déjà des contrats avec une rébellion qui n'avait pas encore gagné le pouvoir. Après, quand l'AFDL est arrivée au pouvoir, les sociétés ont signé ce que nous appelons, en tant qu'observateurs congolais, « des contrats léonins », des contrats qui n'avantagent pas du tout l'État congolais ni la nation congolaise.
Si ce problème est soumis ici au Parlement, à votre comité, c'est parce que tous les rapports confirment que ces sociétés ne respectent pas du tout les règles d'éthique canadiennes d'exploitation des minerais à l'extérieur du Canada. C'est un dilemme que vous soulevez, en effet. Il y a un gouvernement, mais un gouvernement qui est irresponsable. Oui, il existe, mais faut-il laisser un gouvernement irresponsable détruire tout un pays, toute une nation? Ce gouvernement est incapable d'assurer la sécurité des personnes et des biens.
L'Est du pays est quasiment abandonné aux Rwandais. Un gouvernement responsable ne devrait même pas intégrer les soldats de l'armée du CNDP de Laurent Nkunda qui ont combattu, qui ont tué à l'Est du pays, qui ont violé les femmes. On les a intégrés dans l'armée. Par des communiqués, on apprend maintenant que ces mêmes militaires du CNDP sont en train de violer les femmes tous les jours, de brûler les cases, les maisons des gens. Et voilà, nous sommes devant un gouvernement qui n'est pas capable du tout d'assumer ses fonctions.
Comme vous le savez, je suis le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères.
Kofi Annan, alors secrétaire général des Nations Unies, a lancé l'initiative de la région des Grands Lacs en demandant au Canada et à tous les autres pays de contribuer à mettre fin à l'instabilité régnant au Congo depuis trop longtemps.
C'est dans ce contexte que je me suis rendu là-bas. J'ai visité le Congo durant la période électorale. Je dois avouer que ce fut toute une expérience de tenir des élections avec 800 candidats. Tout s'est très bien passé. J'ai pu suivre la situation sur le terrain. Je suis allé de Kigali jusqu'à Goma. J'ai ensuite participé à la conférence de l'initiative pour la région des Grands Lacs qui s'est tenue à Nairobi. Le Canada y était donc représenté avec tous les autres pays participants.
Le Canada a joué un rôle actif; cela ne fait aucun doute. J'ai rencontré les représentants des ONG participant à l'initiative pour la région des Grands Lacs afin de voir comment nous pourrions aider à remettre le Congo sur ses rails.
Il est bien évident que cette région est aux prises avec de nombreuses difficultés. Les auteurs des massacres au Rwanda se sont déplacés vers l'est du Congo — à Goma et dans cette région. Au nord, la LRA se sert du Congo comme base. Personne ne sous-estime la gravité de problèmes comme le viol et des crimes semblables. J'ai visité des hôpitaux où on met les bouchées doubles pour venir en aide à ces femmes qui ont été agressées. Il y a beaucoup de gens et d'ONG qui travaillent extrêmement fort.
Reste quand même, et c'est là une constatation primordiale, que certains progrès ont été réalisés là-bas. Vous avez soulevé différentes questions préoccupantes et nous n'allons surtout pas nier qu'elles le sont. Mais il faut quand même avouer qu'à l'issue de l'initiative pour la région des Grands Lacs, tous les pays ont conclu une entente de non-ingérence les uns envers les autres.
L'initiative pour les Grands Lacs a maintenant ses quartiers généraux à Bujumbura et est dirigée par l'ancien ministre des Affaires étrangères de la Tanzanie.
Le travail est donc en cours au Congo. La situation n'était pas très rose avant cette initiative. La MONUC est active sur bien des plans. Nous devrions nous efforcer d'aider la société civile à se doter des capacités suffisantes et d'appuyer le gouvernement en place, plutôt que de simplement affirmer, comme vous le faites, que ce gouvernement est illégal. Enfin, après toutes ces batailles qui ont été livrées, des institutions commencent à se mettre en place au Congo.
Je concluerai donc en disant qu'au lieu de s'employer à soulever toutes ces questions — et loin de moi l'idée d'affirmer qu'elles ne se posent pas —, votre groupe devrait chercher des moyens d'aider la société civile à renforcer ses capacités de manière à remettre le Congo sur pied. On aurait tort de penser que seul le gouvernement du Canada peut le faire et que lui seul devrait agir. Vous êtes un Congolais d'origine canadienne. Vous avez une excellente occasion d'aller de l'avant. Il y a beaucoup de bonnes choses qui se passent actuellement au Congo. Concentrons-nous sur ces points positifs.
C'est tout ce que j'avais à dire. Merci.
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Distingués députés, permettez-moi de dire que le Congo est un pays à deux vitesses. Vous dites qu'il y a des choses qui fonctionnent au Congo. Par exemple, on peut faire allusion à la Constitution dont on a dit tout à l'heure qu'elle était progressiste. Par contre, les agissements du gouvernement portent à croire que rien ne fonctionne. On dénonce la corruption et le fait qu'un gouvernement, censé être souverain et, en principe, protéger son territoire, en est incapable. Bien au contraire, il vend ou cède des portions de territoire sans aucune consultation préalable à l'échelle parlementaire ou au sein de la société civile. On perçoit comme quelque chose de progressiste les règles mises en place avec la participation de la société civile, comme c'est le cas avec la Constitution. Par contre, lorsque vous regardez les actes du gouvernement, vous constatez que c'est tout qui ne va pas.
Rappelez-vous, distingués députés, que le 1er mars 2000, nous comparaissions devant le Sous-comité des droits de la personne et du développement international du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international. Nous avions soulevé exactement les mêmes problèmes. Nous avions dénoncé les violations des droits de la personne, dont la liberté d'expression. Nous avions dénoncé des actes de génocide commis auprès de la population civile, avec la participation de l'État. Ces actes avaient été commis essentiellement par des milices rwandaises. Nous avions dénoncé les pillages des richesses minières au profit du Rwanda, de l'Ouganda et des multinationales. C'était le 1er mars 2000. Aujourd'hui, rien n'a changé.
À cette époque, le président était Laurent Kabila. En 2006, c'est Joseph Kabila qui lui a succédé. Pour les élections de 2006, qui ont porté le jeune Kabila au pouvoir, nous avions requis la contribution du Canada pour la surveillance des élections, afin d'aider la société civile congolaise à mener un gouvernement responsable au pouvoir. Le Canada a donc participé aux élections de 2006 par l'entremise d'observateurs. Le Canada était aussi présent au comité d'accompagnement, lequel regroupait les ambassades des pays étrangers qui accompagnaient le processus démocratique. Après ces élections, on a beaucoup dénoncé, comme vous le savez, le fait que le gouvernement nouvellement porté au pouvoir l'avait été contre la volonté populaire.
Si un président est élu avec moins de 20 p. 100 des voix et que la majorité de la population a plutôt suivi le mot d'ordre et s'est abstenue de voter, quelle légitimité pouvez-vous accorder à un tel gouvernement, en réalité? Admettons que, par la suite, ce président élu achète tout le Parlement pour qu'il n'y en ait plus du tout, pour que le Parlement n'exerce pas son rôle, mais que cela fasse plutôt partie de sa majorité. Il s'agirait d'un gouvernement qui n'est pas élu par la majorité, mais qui, par la suite, achèterait le Parlement et nommerait toutes les institutions du pays. Quelle légitimité accorde-t-on à un pareil gouvernement? Quel fonctionnement démocratique y a-t-il?
Il y a donc, au Congo, un déficit démocratique qui rend le gouvernement illégitime.
Le pays fonctionne à deux vitesses et la société civile veut un gouvernement légitime. Elle sollicite la participation de pays amis, démocratiques, mais on attend toujours ce gouvernement légitime. Il n'arrive toujours pas parce que les pays amis ne participent pas sincèrement à l'établissement d'un régime réellement démocratique au Congo. C'est un gros problème. La souveraineté du pays en souffre, la sécurité du pays en souffre, la paix en souffre.
J'aimerais terminer en ajoutant qu'il y a absence d'armée au Congo. Après le départ de Mobutu, comme vous le savez, l'armée nationale a été complètement dispersée et depuis ce sont des milices du président actuel, qui sont formées de milices rwandaises, angolaises et de quelques groupes congolais, qui constituent son armée. Il n'y a pas d'armée nationale.
Croyez-vous qu'un pays comme le Congo, qui vit un tel déficit démocratique, avec un problème de gouvernement responsable, ne peut pas être aidé par des pays démocratiques pour asseoir un système réellement démocratique qui puisse assumer sa souveraineté?
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Merci, monsieur le président.
Merci à tous.
Je vais commencer par un élément qui pourrait faire consensus entre vous et les membres du comité. Tant dans vos réponses que dans vos observations préliminaires, vous avez laisser entendre que le Canada devrait appuyer le maintien de la paix au Congo. Je crois que c'est le cas.
Vous savez que l'on a demandé au général Leslie de diriger la mission de la MONUC et nous attendons la réponse du gouvernement à ce sujet. Je crois qu'il est assez clair que toutes les personnes ici présentes considèrent que c'est un rôle que le Canada peut assumer.
Je suis du même avis. Lors de ma visite au Congo l'an dernier, j'ai pu constater de vives inquiétudes au sein des ONG internationales et chez les gens à qui j'ai parlé dans les ambassades européennes comme dans la nôtre relativement à l'armée congolaise et à son efficacité au pays, en dehors de la région immédiate de Kinshasa. Une des questions préoccupantes était celle de la rémunération des militaires.
Certains efforts de normalisation ont été consentis au sein de l'armée congolaise pour s'assurer que les personnes qui s'y enrôlent vont effectivement être rémunérées. On m'a notamment fait valoir qu'il incombait aux hauts gradés de payer les soldats et qu'on leur remettait littéralement pour ce faire des sacs remplis d'argent. Il arrive souvent que cet argent ne se rende pas jusqu'aux soldats, ce qui incite ceux-ci à se livrer à des activités inappropriées.
Je crois qu'il convient de normaliser les modes de fonctionnement au sein de l'armée congolaise. Je pense d'ailleurs que vous en avez parlé. L'armée en a quelque sorte absorbé de nombreuses autres factions et on ne sait plus trop de quoi elle se compose exactement. Comme vous avez vous-même soulevé cette problématique, il semble bien qu'une forme d'aide pourrait être requise à ce titre.
S'il y a une cause que les Canadiens ont tout particulièrement à coeur, c'est celle des programmes visant à lutter contre la violence faite aux femmes, et contre les viols surtout, en offrant des mesures de prévention ainsi que les services de santé requis. Notre gouvernement a appuyé ces programmes, mais je ne suis pas certain qu'ils veuillent continuer de le faire. Parmi les préoccupations dont on m'a fait part l'an dernier lors de ma visite là-bas, il y a la nécessité de pouvoir compter sur du transport aérien dans l'est du pays de telle sorte que les victimes de la guerre aient accès aux cliniques pour obtenir les soins de santé dont elles ont besoin, mais il faut aussi s'employer à prendre les moyens pour prévenir les agressions sexuelles grâce à une combinaison de mesures de sécurité de la MONUC et de soutien direct aux femmes.
Enfin, on travaille actuellement aux États-Unis à mettre en oeuvre des mesures législatives visant le contrôle et le suivi des activités d'exploitation minière au Congo. Je me demande ce que vous pouvez penser de ces dispositions législatives dont on débat à Washington et si vous estimez que le Canada devrait faire quelque chose à ce sujet étant donné que nous sommes très actifs dans le secteur de l'exploration minière dans l'est du Congo.
Je dois rappeler à mes collègues que nous ne parlons pas ici des minéraux habituels. Le coltan, que l'on retrouve dans tous les BlackBerrys que nous utilisons, provient principalement du Congo. C'est l'un des minéraux qui alimentent le conflit. Récemment, il y a eu quelques inquiétudes au sujet de l'uranium; on se demandait bien évidemment où allait cet uranium et à quoi il allait servir. Il va de soi qu'il nous faut examiner la situation de plus près.
J'aimerais donc connaître vos points de vue sur le maintien de la paix, l'armée congolaise et les moyens à prendre pour composer avec cette situation, de même que sur le soutien offert aux femmes, tant au chapitre de la prévention du viol que des services de santé requis. Pourriez-vous me dire également ce que vous pensez des mesures législatives considérées à Washington et m'indiquer si vous croyez que nous devrions adopter des lois au Canada pour ce qui est des minéraux qui alimentent le conflit?
Je vous remercie.
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Merci beaucoup, monsieur le député.
Nous avons toujours dit que si on ne contrôlait pas les mouvements des groupes terroristes à l'est, le Congo ne serait pas le seul à être visé, ça traverserait les frontières. On parle de l'uranium. Il y a un rapport de la l’ASADHO à ce sujet. Or le président de cette association est en prison. Cet uranium qui sort illégalement est un danger pour le monde entier, incluant le Canada. On ne veut pas revivre Nagasaki. On ne veut pas revivre Hiroshima. Pour prévenir cela, il faut que l'uranium cesse de sortir illégalement. Je le répète: le président de cette association est en prison.
Pour ce qui est de la façon d'aider les femmes qui se font violer, il n'y qu'une seule chose à faire: mettre Kagame hors d'état de nuire. La meilleure façon d'investir, pour le Canada, ne consiste pas forcément à aider les femmes violées. Il faut plutôt arrêter les viols à la source. Ça vient de Kagame, alors s'il vous plaît, monsieur le député, aidez-nous. Aidez nos compatriotes au Congo. Six millions de morts, c'est trop! Mettre en oeuvre un programme contre le viol, c'est de l'argent perdu. Maîtriser Kagame coûtera peut-être mille fois moins cher que le programme.
En ce qui a trait au projet de loi et aux mines, je pense qu'on en a assez dit. On apprécie beaucoup les efforts déployés par le Canada à l'égard de la responsabilité morale des entreprises. Je crois que ce livre-ci ne me fait pas beaucoup honneur. Tout ce qui concerne le Congo est là-dedans, entre autres la façon dont on a armé les rebelles pour prendre le pouvoir. On sait que l'auteur a des problèmes, mais il s'agit de sources publiques qui ont été vérifiées. Les auteurs des sources citées ne font pas l'objet de poursuites.
Pour terminer, j'aimerais parler du rapport de mon collègue. C'est par rapport à la société civile. On a parlé du fait qu'il fallait appuyer la société civile, mais justement, les défenseurs des droits de la personne sont en prison. Il y a un rapport d'Amnistie Internationale. Quelles société civile aide-t-on? Des rapports des évêques catholiques du Congo démontrent que rien ne fonctionne, qu'il n'y a aucun leadership visionnaire. La lettre des évêques et les rapports sont là. Rien ne fonctionne, au Congo. Mme Arbour vient de le dire dans son rapport du 8 avril.
Monsieur le député, une solution pour l'armée congolaise serait qu'elle ne comporte pas d'étrangers. J'aime les étrangers. Le Congo accueille les étrangers. Je ne peux pas voter au Congo parce que je ne suis pas congolais. Par contre, la paix en Afghanistan et au Congo me concerne en tant que Canadien. Nous avons la Charte canadienne des droits et libertés. Nous voulons que les valeurs qui ont fait la prospérité du Canada se retrouvent ailleurs, là où nous intervenons. L'armée congolaise est composée d'étrangers, c'est connu. Distingués députés, s'il vous plaît, aidez-nous. Le CNDP n'est pas une armée congolaise: c'est une armée étrangère. Ce fait est documenté.
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Il y a un gouvernement élu au Congo. Le chemin est long. La démocratie est un processus qui est très long et, en l'espace de 4 ans, on ne peut pas bâtir une démocratie. Le Canada a plus de 150 ans de démocratie. Ce que le Canada peut faire, c'est accompagner le Congo. Nous venons ici pour vous demander de le faire.
L'instabilité dans l'Est du Congo profite aux sociétés minières. Lorsque certaines zones sont instables, les ressources sont prises dans ces zones et envoyées. Ainsi, elles ne rapportent aucun revenu au Congo. Le budget du Congo a été évalué à 6 milliards de dollars. Aujourd'hui, je peux vous dire que ce budget, si toutes les ressources étaient comptabilisées, s'élèverait à 20 ou 30 fois plus. Le gouvernement n'a pas les moyens de diriger ce pays.
Parlons de l'efficacité de la MONUC. On a vu ce qui s'est passé en Bosnie et ce qui se passe en Afghanistan. Les Nations Unies ont des mandats qui sont souvent très faibles. Très souvent, on a vu l'OTAN prendre une part pour, enfin, donner un certain sens. La MONUC à elle seule, au bout de 10 ans, continue à se chercher. L'arrivée d'un leadership canadien serait bienvenue, mais en même temps il faut changer ce mandat pour donner un mandat clair afin que les populations puissent être protégées.
Parlons de la démocratie et des partis politiques. Il y a un gouvernement en place, mais les autres partis politiques n'ont pas le droit de travailler. Prenez le cas du gouvernement canadien. Nous savons comment il fonctionne. À la fin d'une élection, certains revenus sont générés et, en fonction des droits de vote, sont donnés à tous les partis politiques. Au Congo, il n'y a que le parti majoritaire qui a ce droit. Le parti majoritaire au gouvernement prend ces revenus pour financer sa campagne. Les autres partis politiques n'ont pas ce pouvoir.
Nous venons au Canada pour vous demander un accompagnement. Il y a un gouvernement en place. Il faut que les Congolais prennent les décisions eux-mêmes. Ce sont eux qui vont faire avancer leur pays, mais nous voulons cet accompagnement du Canada dans les institutions démocratiques, par le truchement des valeurs que vous nous donnez. Nous voulons insuffler aussi ces valeurs à la République démocratique du Congo. Merci.