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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 026 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 28 octobre 2010

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Français]

    Bienvenue à la 26eséance du Comité permanent du patrimoine canadien en ce jeudi 28 octobre 2010. Nous sommes réunis conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, en ce qui concerne l'étude des médias numériques et émergents: possibilités et défis.

[Traduction]

    Nous accueillons aujourd'hui deux groupes de témoins. Le premier comprend la Canadian Independent Music Association, représentée par M. McKie, son président-directeur général, et l'Association des auteurs-compositeurs canadiens, représentée par M. Quarles, son directeur général. Bienvenue devant le comité, messieurs.
    Sans plus attendre, je donne la parole à M. McKie pour sa déclaration liminaire.
    C'est un grand plaisir pour moi de m'adresser à votre comité et je vous remercie de nous avoir invités.

[Français]

    D'abord, je m'excuse de parler seulement en anglais. Toutefois, si vous avez des questions en français, j'essayerai de vous répondre.
    Une voix: Faites un petit effort.
    M. Duncan McKie: D'accord, je vais faire un petit effort. Ma femme est originaire de Val-d'Or. Il est donc obligatoire de parler français.

[Traduction]

    Merci encore.
    La Canadian Independent Music Association, qui était autrefois la CIRPA, représente depuis 30 ans les sociétés canadiennes de production musicale de langue anglaise. Aujourd'hui, la CIMA regroupe plus de 170 sociétés membres, dont des maisons de disques, des éditeurs de musique, des agents d'artistes et d'autres professionnels de la musique de tout le pays.
    La CIMA s'intéresse essentiellement à la production et à la commercialisation de musique canadienne de langue anglaise, son rôle consistant à appuyer les entreprises et les créateurs qui font que la production musicale canadienne est unique au monde.
    Le Canada produit chaque année 2 000 nouveaux titres, c'est-à-dire des albums en anglais. Cette productivité est constante depuis plusieurs années, malgré les grosses difficultés auxquelles le secteur est confronté par l'avènement du partage de fichiers à grande échelle. Le Canada s'est doté d'un régime de réglementation du contenu canadien pour la radio, conjugué à des mesures de soutien financier de Patrimoine canadien et d'autres organismes mandatés par le CRTC.
    D'autres pays qui n'ont pas eu la sagesse et la volonté politique d'adopter des régimes similaires admirent le régime canadien et, bien souvent, l'envient. La majeure partie de la production musicale actuelle du Canada ainsi que du catalogue récent d'oeuvres musicales a été numérisée, et les producteurs sont conscients de la nécessité de diffuser leurs oeuvres dans le monde entier sous forme numérique, dans les formats adéquats et avec des méta-données permettant de suivre l'évolution des ventes et de la diffusion, et ils répondent à ce besoin. Cet effort dure depuis un certain temps et commence à porter fruit, comme le montrent les ventes internationales des sociétés canadiennes.
    Cela dit, l'ère du numérique apporte avec elle un nouveau moyen de production et un large éventail d'outils pour stimuler les ventes par un marketing créatif. Elle permet d'avoir accès à de nouveaux marchés et rend possible la distribution mondiale des oeuvres à un coût largement inférieur à celui du monde physique. Les médias sociaux et d'autres outils permettent à nos créateurs d'entrer en contact de manière nouvelle et différente avec un marché beaucoup plus vaste et de faire connaître ainsi la créativité canadienne à un nouveau public.
    Le secteur canadien de la musique a été l'un des premiers secteurs culturels à embrasser cette nouvelle réalité et à en tirer un avantage concurrentiel mondial. Il a été l'un des plus innovateurs dans l'élaboration d'un système mondial de marketing et de distribution par lequel il est possible de vendre du contenu canadien en ligne sur les marchés émergents les plus nouveaux et les plus vastes, comme la Chine, l'Inde et les économies croissantes du Brésil, de la Russie et de la Corée, ainsi que sur les marchés traditionnels comme les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Union européenne, où les ventes de musique enregistrée sont plus fermes et, dans bien des cas, s'améliorent.
    Malgré ce progrès, nous sommes encore en butte au piratage numérique généralisé, à la fois de la part de consommateurs individuels et, de manière plus organisée, de sites P2P — poste à poste — opérant sans restriction. Cela s'est traduit par une chute brutale et bien documentée des ventes intérieures de disques, phénomène qui empêche les producteurs canadiens de gagner suffisamment d'argent pour payer leurs dettes et réinvestir dans de nouvelles oeuvres, surtout d'artistes et de musiciens canadiens.
    D'aucuns affirment que ce problème ne touche que les plus grands acteurs de l'industrie mondiale de la musique, idée fallacieuse qui détourne l'attention de la situation canadienne où les petits acteurs nationaux sont plus gravement exposés que les grandes multinationales oeuvrant au Canada.
    Les ventes canadiennes de contenu musical numérique sont à peu près la moitié de ce qu'elles sont aux États-Unis et, alors que la Grande-Bretagne et l'Allemagne abritent respectivement plus de 50 et 40 services nationaux légaux de téléchargement, l'équivalent au Canada est moitié moins élevé, et beaucoup des sites ne sont que des copies génériques d'autres sites. En outre, alors que des appareils mobiles comme ceux de Nokia viennent avec de la musique, et que beaucoup d'autres prolifèrent en dehors du Canada, le marché canadien a été remarquablement stagnant en ce qui concerne les nouveaux services mobiles de musique. Nous croyons que l'absence d'innovation dans ce secteur est un obstacle majeur à l'expansion des ventes de nos producteurs nationaux.
    En réponse à ces défis, les sociétés sous propriété canadienne se sont efforcées d'être moins tributaires de la musique enregistrée comme source de revenus et ont créé d'autres canaux de vente. Ce nouveau modèle, appelé parfois modèle commercial 360 ou modèle holistique, consiste à développer le potentiel de recettes de l'artiste par la vente d'enregistrements sous forme physique et numérique et par les recettes issues des droits d'édition, des droits de télévision et de cinéma, des concerts et de la vente de produits dérivés. Une bonne partie de ce commerce se fait par Internet sans exiger d'interaction face à face. Toutefois, cela n'est au mieux qu'une stratégie de transition prometteuse, et une stratégie qui met en danger l'industrie de la musique enregistrée et impose à l'artiste un lourd fardeau de tournées.
    Il est clair que cette solution a ses limites et que, sans revenus des enregistrements, les carrières des artistes seront écourtées, et le déclin prévisible de l'enregistrement nuira certainement à la réputation du Canada et réduira sa production culturelle.
(1535)
    Les industries créatives du Canada doivent faire concurrence et réussir sur un marché mondial, ce qui n'est pas nouveau mais, plus que jamais, le succès à l'étranger sera crucial pour la réussite à long terme des artistes canadiens, à cause du déclin de leur marché intérieur. Or, les pays où nous essayons de prendre pied et de réussir sont en même temps beaucoup plus actifs et utilisent les mêmes outils virtuels que les Canadiens pour vendre leurs propres productions en Amérique du Nord.
    Les artistes européens créent leurs oeuvres et se produisent largement en anglais. Il existe aujourd'hui sur MySpace des millions de pages d'artistes musicaux étrangers. Étant donné ce niveau élevé de concurrence, enregistrer un disque et le mettre en vente sur MySpace ou YouTube n'est tout simplement plus suffisant. Alors qu'un artiste canadien indépendant et solide pouvait s'attendre à vendre 50 000 copies au Canada il y a 10 ans, une vente de 5 000 est aujourd'hui jugée exceptionnelle. Les artistes primés ne vendront au mieux que 20 000 copies de leurs albums les plus récents.
    Cela ne permet pas de vivre. Face à ce succès limité, les artistes canadiens utilisent l'aide publique et leurs propres ressources pour faire des tournées à l'étranger, afin d'élargir leur public et de créer un marché pour leurs oeuvres. Par exemple, le nombre d'artistes canadiens faisant des tournées en Australie peut atteindre jusqu'à 350 en une année, et on peut en trouver jusqu'à 140 au festival de musique South by Southwest qui se tient pendant trois jours à Austin en mars.
    Cette activité est cruciale pour notre industrie. Bien qu'il puisse sembler contradictoire que les Canadiens doivent se produire à l'étranger pour préserver une industrie culturelle au Canada, nous pensons que c'est la seule manière de continuer à obtenir suffisamment de revenus commerciaux pour continuer notre travail. Si l'on en croit les exemples de succès récents sur les marchés européens et britanniques, plus un artiste est prometteur, meilleures sont les perspectives pour la musique populaire canadienne.
    Si nous voulons continuer à créer et à commercialiser notre musique populaire, il faut que les gouvernements, à tous les paliers, continuent d'investir dans les sociétés et artistes canadiens, surtout en ce qui concerne l'accès aux marchés étrangers. La CIMA, qui est l'organisation la plus active dans le développement des possibilités d'exportation de musique canadienne, a organisé des missions canadiennes dans le monde entier, notamment au Royaume-Uni et en Europe, jusqu'en Bulgarie, ainsi qu'au Japon, en Chine, à Singapour, en Australie, en Amérique du Sud — surtout en Argentine et au Brésil — et aux États-Unis, qui reste notre plus important marché d'exportation de musique.
    Avec l'aide du gouvernement ontarien, nous avons recruté des représentants à temps partiel à Londres, à Los Angeles et à Singapour pour aider nos sociétés et nos artistes désirant faire des tournées et vendre dans ces régions. Nous offrons un moyen efficient et efficace d'avoir accès à ces marchés et d'appuyer la marque musicale canadienne dans les deux langues.
    Nous tenons à remercier Patrimoine canadien de l'aide continue qu'il dispense par le Fonds de la musique du Canada, et nous pouvons vous assurer que cette aide est utilisée de manière responsable et productive. Toutefois, nous avons besoin d'une aide supplémentaire si nous voulons atteindre notre objectif d'accroissement de la part canadienne du marché mondial de la musique. Dans ce contexte, les retombées financières de choses telles que les droits d'auteur et le régime de la copie à usage privé seront cruciales pour nos succès futurs, et on ne devrait donc pas les réduire ou les laisser s'atrophier.
    En fin de compte, nous devons jamais oublier que le succès des sociétés canadiennes de production musicale et de leurs artistes bénéficient à chacun d'entre nous. Les Canadiens en sont conscients et ont toujours entériné l'aide du secteur public à leurs industries créatives. Chaque Canadien est très fier du succès international d'artistes tels que Michael Bublé, Leslie Feist, Arcade Fire, Metric et Bruce Cockburn. Avec votre aide, nous continuerons ce bon travail.
    Merci.
(1540)
    Merci, monsieur McKie.
     Monsieur Quarles, vous avez la parole.
    Merci beaucoup. Je vous remercie de nous avoir invités aujourd'hui.
    Je m'appelle Don Quarles et je suis le directeur générale de l'Association des auteurs-compositeurs canadiens. Je veux parler en anglais. J'espère que ça ne vous dérange pas. Mon français est limité. Merci beaucoup de nous avoir invités à témoigner.
    Brièvement, l'AACC est une organisation nationale à but non lucratif du secteur des arts. Nous existons depuis un peu plus de 27 ans. Dans l'ensemble, nous sommes les porte-parole des auteurs-compositeurs canadiens mais nous sommes surtout connus pour le travail d'éducation que nous menons auprès des aspirants auteurs-compositeurs du pays. Nous avons eu la grande chance de bénéficier de certains crédits de Patrimoine canadien, par le truchement du Fonds pour la musique du Canada, et de la Fondation SOCAN. Nous sommes ravis d'avoir pu organiser littéralement des centaines d'événements au cours des années où ce financement a existé.
    Le partage de fichiers musicaux est sans doute le problème le plus grave que connaît aujourd'hui le secteur de la musique, mais c'est en même temps un atout potentiellement énorme pour les créateurs, offrant une opportunité rare. Je sais que cette affirmation est un peu controversée mais nous y croyons vraiment. Nous croyons que le partage de fichiers musicaux, une fois qu'il est monnayé, devient sa propre solution, comme ce fut plus ou moins le cas de la radiodiffusion, qui était considérée comme un problème dans les années 1920.
    Netflix, iPad, Kindle et d'autres appareils et modèles sont devenus des canaux de diffusion légaux importants pour le film et le livre. Les autres industries culturelles essayent de s'adapter au numérique, dans lequel il n'existe pas de solution passe-partout.
    Dans le cas de la musique, une décennie après l'avènement de Napster, des services légaux comme iTunes représentent moins de 10 p. 100 de la musique acquise au moyen des réseaux câblés et sans fil. La grande majorité des artistes et des auteurs-compositeurs ne gagnera jamais sa vie grâce aux concerts, aux produits dérivés et à d'autres sources.
    On entend souvent dire aujourd'hui, et c'est un mythe: pourquoi ne pas prendre la route et faire une tournée? Donnez 300 concerts par an, dormez par terre et conduisez une camionnette Ford Econoline de 12 ans. Vous terminerez quand même l'année sans un sou en poche. C'est généralement ce qui se passe, sans parler du fait que vous n'aurez pas encore payé les auteurs-compositeurs qui ne font pas partie de l'orchestre, ni le producteur, ni le studio d'enregistrement, ni personne d'autre. Pourtant, des millions de iPods, iPhones et autres MP3 se vendent chaque année, et des dizaines de milliards de chansons s'échangent par Internet.
    L'AACC défend vigoureusement le droit d'auteur. Nous avons examiné plusieurs modèles différents et avons consulté tous ceux qui pourraient nous aider à trouver une solution, y compris d'autres organisations de créateurs, des producteurs indépendants, de grandes maisons de disques, des futuristes et des experts internationaux du droit d'auteur. En fin de compte, l'AACC a fait ce que font tous les grands auteurs-compositeurs: elle a pris les meilleures idées pour en faire une synthèse.
    L'idée et la solution sont le fruit de deux méthodes solides et éprouvées de monnayage des oeuvres protégées par le droit d'auteur. La première est l'administration collective des droits d'interprétation, et la deuxième, la télévision par câble. La méthode des droits d'interprétation existe depuis 160 ans ou plus et a fait ses preuves. Les recettes — en tout cas au Canada — ont augmenté de 40 p. 100 pendant les 10 années où les maisons de disques ont subi une baisse de près de 50 p. 100.
    Comme pour les droits d'interprétation, nous proposons la perception d'un droit de licence pour le partage de fichiers, pas d'une taxe. L'utilisateur final aurait une licence dont les recettes seraient versées dans un fonds commun et distribuées au prorata — sur la base d'une collecte de données non intrusive — aux auteurs-compositeurs, aux interprètes, aux maisons de disques et aux éditeurs. Les consommateurs continueraient d'utiliser la technologie qu'ils préfèrent, comme BitTorrent, Gnutella et les réseaux sociaux.
    Dans le deuxième modèle, celui de la télévision par câble, les FSI et les fournisseurs d'appareils mobiles deviendraient des partenaires commerciaux. Essentiellement, nous pourrions tous avoir accès à un choix de contenu pré-programmé. On nous rétorquera peut-être que l'accès et le contenu ont déjà été monnayés. Notre réponse est que nous espérons rendre cela aux créateurs.
(1545)
    Vous me demanderez peut-être ce qu'on pourrait faire payer pour quelque chose comme ça. Ça pourrait être 1 $ ou 5 $ par mois. Pour vous donner une idée des chiffres, si c'était 3 $ par mois au Canada pour une licence familiale, cela produirait plus de 360 millions par an. À titre de comparaison, SOCAN, notre organisation de gestion des droits d'interprétation, tire actuellement 250 millions de dollars des droits d'interprétation. Pour les États-Unis, on peut probablement multiplier ces chiffres par 10.
    Un tel modèle offrirait d'autres avantages, ceci dit au cas où vous ne seriez pas préoccupés que par l'argent. Les technologies de partage de fichiers musicaux offrent aux créateurs un système mondial de distribution rémunérée, quel que soit leur niveau d'accomplissement et leur genre musical. Pour les créateurs établis, ce modèle offre un outil sans précédent de marketing mondial et de distribution. Pour les aspirants créateurs, pour ceux qui oeuvrent dans des genres très spécialisés, ainsi que pour les créateurs ethniques et autochtones, ce serait l'occasion d'attirer un public mondial. En règle générale, les maisons de disques ne s'intéressent pas à ces gens-là, et ils auraient donc un moyen pour trouver un public et gagner suffisamment d'argent pour s'épanouir.
    En ce qui concerne les maisons de disques et les éditeurs de musique, le partage de fichiers offre de nouvelles sources importantes de revenus secondaires. Leur expertise en développement des artistes, en marketing et en promotion sera cruciale pour développer la carrière des interprètes et auteurs-compositeurs émergents.
    L'objectif de la plupart des artistes et des auteurs-compositeurs est de sortir de la masse. Cela a toujours été et restera leur problème, et personne mieux que les maisons de disques ne peut les y aider.
    En ce qui concerne les FSI, ils pourront réduire leurs coûts de bande large, développer de nouvelles synergies et différencier leurs services. Ils pourront entreposer les chansons populaires sur leurs propres serveurs protégés, créer leurs propres portails, vendre des services à valeur ajoutée, etc.
    En bout de ligne, le public, les fans ou ceux d'entre nous qui… On nous qualifie parfois d'utilisateurs, de consommateurs ou de pirates. À la différence de nos collègues des maisons de disques et des éditeurs de musique, les auteurs-compositeurs et les artistes ont une relation directe avec leur public parce que celui-ci apprécie ce qu'ils font. L'objectif essentiel est de lui donner accès à ce que nous faisons et d'être rémunérés pour cela. Ça semble être un résultat gagnant-gagnant.
    En contrepartie d'un paiement mensuel raisonnable, les gens continueront de faire ce qu'ils font, ils n'auront pas à changer leurs habitudes, et les mesures de lutte contre la violation du droit d'auteur auront finalement un sens. Selon une étude de 2008 de l'université du Hertfordshire, 80 p. 100 de ceux qui partagent des fichiers seraient prêts à payer pour pouvoir le faire légalement.
    Si vous ne pouviez pas acheter de pain, vous devriez le voler. Il est absurde de s'attaquer aux gens qui partagent illégalement des fichiers tant qu'on ne leur propose pas d'option légale. Si 80 p. 100 d'entre eux sont prêts à payer, et si les autres services, comme iTunes, en représentent 10 p. 100 d'autres, il ne reste un problème de partage illégal que pour 10 p. 100 du public total, et non pas 95 p. 100 comme aujourd'hui.
    Comme les clubs de Paris au XIXe siècle et les radiodiffuseurs au XXe siècle, la violation du droit d'auteur a précédé le système de licences. L'instauration d'un droit de licence a débouché sur l'innovation, la croissance et de la belle musique.
    En règle générale, ce sont les détenteurs du droit d'auteur qui pourchassent les utilisateurs, pas le contraire. Croire qu'un système de licence étouffera l'innovation va tout simplement à l'encontre de l'histoire. Les gens ont toujours partagé de la musique et en partageront toujours. Partager de la musique a toujours fait partie de notre culture. Tous ceux d'entre nous qui font de la musique sont une partie essentielle de cette culture.
    Ceux qui travaillent avec nous pour la monnayer ont devant eux un bel avenir et, à notre avis, un avenir profitable. L'Association des auteurs-compositeurs du Canada, de concert avec d'autres groupes de créateurs, des groupes de consommateurs, des collectifs et des détenteurs de droits, s'efforce de mettre sur pied un projet pilote interentreprises pour mettre ses idées à l'essai dans un avenir proche. Nous invitons nos collègues et toutes les parties concernées à creuser ces nouvelles idées avec nous, et nous demandons au comité permanent d'appuyer cette initiative afin d'assurer un avenir aux créateurs canadiens de musique.
    Je vous remercie de votre attention.
    Merci, monsieur Quarles.
    Nous avons une quarantaine de minutes pour la période des questions, qui commence avec M. Simms.
(1550)
    Merci, monsieur le président. Merci aux invités.
    Je vais partager mon temps de parole avec un collègue pour ce premier tour.
    Très brièvement, nous avons recueilli tellement de témoignages sur ces questions ces dernières années au sujet de ce concept nébuleux de nouveaux modèles d'affaires qu'il est très agréable de voir aujourd'hui quelqu'un nous donner des exemples concrets. Si je comprends bien votre idée, vous penchez vers une solution de paiement collectif plutôt que de paiement individuel par l'utilisateur, étant bien entendu que l'utilisateur illégal s'exposerait alors à des poursuites.
    Nous sommes horrifiés de voir que certaines personnes traînent des enfants devant les tribunaux pour ce genre d'infraction. J'essaye cependant de comprendre comment les revenus seront perçus, dans ce système collectif, puis répartis également. Pourriez-vous me donner une brève explication de ce que vous envisagez? Beaucoup de gens ne comprennent pas le concept de paiement collectif et de droit de licence. Pourriez-vous nous expliquer les deux très brièvement, après quoi je céderai la parole à M. Trudeau?
    Absolument.
    Le collectif fonctionnerait probablement de manière assez semblable aux autres systèmes collectifs qui existent, comme celui de la SOCAN, qui ne fait que distribuer les recettes aux artistes, aux auteurs-compositeurs et aux éditeurs. Ceux de la copie privée auraient aussi une distribution.
    Voici les détails du processus. Notre concept est d'instaurer un droit de licence qui serait payé au point d'accès au réseau. Dans mon cas, je paierais Rogers. L'argent que j'aurais payé serait versé dans un fonds commun et serait distribué de manière transparente.
    Il y a aujourd'hui un certain nombre de firmes qui mesurent cette utilisation. Nous avons travaillé avec l'une d'entre elles pour obtenir des données. Il s'agit de BigChampagne, en Californie. Elle mesure essentiellement le trafic de BitTorrent, c'est-à-dire les fichiers partagés. En fait, elle fait cela pour les grandes maisons de disques afin de leur dire combien d'argent elles perdent, ce qui peut paraître paradoxal.
    Quoi qu'il en soit, l'argent irait dans un fonds commun et nous proposons qu'il soit distribué au prorata. Voici un exemple. Disons que 10 000 fichiers de Bryan Adams sont partagés cette semaine, et deux des miens. Je recevrai ma part de ce gâteau. C'est comme ça que le collectif distribuerait l'argent.
    M. Scott Simms: Pas parce que vous avez moins de talent, bien sûr.
    M. Don Quarles: Évidemment.
    Vous parlez de 3 $ par famille pour les fournisseurs de service Internet. Personnellement, je pense que c'est une idée vraiment intéressante. Je l'avais déjà entendue auparavant. Je suis heureux de remplacer un membre du comité le jour où vous comparaissez car j'aimerais vous poser quelques questions sur le mécanisme.
    Quel est le coût mensuel moyen de l'accès à Internet pour une famille? Évidemment, je sais qu'il y a des niveaux différents mais c'est de quel ordre, au Canada?
    Je ne sais pas. Je peux simplement parler de mon cas personnel et de ceux que je connais. Typiquement, je pense que les gens payent entre 25 $ et plus de 100 $ par mois, selon le service qu'ils obtiennent.
    Combien y a-t-il de fournisseurs différents de service Internet au Canada? Ce n'est pas comme pour la télévision par câble, où le nombre est limité. J'ai l'impression qu'il y a beaucoup de petits fournisseurs. Comment réagissent ceux à qui vous avez présenté cette idée d'ajouter éventuellement un droit supplémentaire à leur tarif?
    En ce moment, je crois qu'ils résistent à tout parce que la Cour suprême a déclaré qu'ils ne sont pas responsables de ce qui passe dans leurs tuyaux. Cela dit, nous avons eu des discussions privées avec certains d'entre eux qui sont intrigués par l'idée, parce que nous leur avons expliqué que nous voulons être leurs partenaires, pas leurs adversaires.
    Je crois que c'est une solution élégante car l'utilisateur n'aurait pas à payer individuellement pour les chansons qu'il télécharge, et diverses analyses et enquêtes sur le trafic Internet montrent que tous les Canadiens font du téléchargement.
    L'une des questions que je me pose vient du fait que nous parlons actuellement de Napster ou Gnutella et du téléchargement de musique, en général, mais on utilise de plus en plus BitTorrent et d'autres systèmes pour télécharger de gros fichiers, par exemple, des films d'Hollywood, et je suppose que cela tomberait en dehors des 3 $ destinés aux musiciens. Pensez-vous que ce droit de licence devrait être limité à la musique? Ne craignez-vous pas que votre solution soit la porte ouverte à l'avalanche et que tout le monde se mette à télécharger des films aussi?
(1555)
    Merci, monsieurTrudeau.
    Répondez, monsieur McKie et monsieur Quarles, après quoi nous passerons à M. Pomerleau.
    Je vais vous répondre en mentionnant d'autres études sur le même sujet.
    Vous êtes probablement au courant de la loi française des trois avertissements, qui est maintenant en vigueur. Les études fondant cette loi ont été faites par un économiste de l'université de Paris, une personne très compétente. Il a calculé que la valeur de la musique pour un fournisseur de service Internet, pour de nouveaux clients disons, est d'environ 20 euros par mois. Même si vous fixez ça à 3, notre objection est que ce n'est pas suffisant car notre système a perdu plus de 600 millions de dollars de ventes de disques depuis 2000. Évidemment, une grande proportion de cette somme a été perdue par nos maisons de disques. Et nous sommes les créateurs. Nous ne sommes par les auteurs-compositeurs mais nous sommes les créateurs de produits vendus sous licence, et nous possédons les droits d'auteur…
    Êtes-vous contre cette idée?
    Je ne suis pas contre, mais je pense qu'il y a des problèmes et qu'il est important de comprendre les faits.
    Merci beaucoup.
    Voulez-vous ajouter quelque chose, monsieur Quarles, avant que je donne la parole à M. Pomerleau?
    Évidemment, notre objectif est de veiller à ce que le montant… Nous serions ravis que ce soit 20 $ par mois, comme vous pouvez probablement l'imaginer, mais la réalité est que nous savons qu'il s'agit là d'une branche de l'industrie qui est brisée et qu'on ne peut pas réparer. Très franchement, si vous essayez de tout bloquer, ça réapparaîtra ailleurs à la puissance 10.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Pomerleau, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous deux de la présentation à la fois claire et intéressante que vous avez faite.
    Monsieur McKie, vous êtes dans le domaine de la création. On s'entend donc parfaitement sur le fait que les créateurs doivent être protégés. Dans le domaine du numérique, c'est le créateur qui, au départ, assure le bénéfice de l'organisation qui va évoluer par la suite. S'il n'y a pas de créateur, il n'y a pas de création; s'il n'y a pas de création, il n'y a pas de distribution; s'il n'y a pas de distribution, il n'y a pas de marché; s'il n'y a pas de marché, il n'y a pas de profit. C'est le créateur qui est le plus important dans ce processus. Jusqu'à un certain point, il est la poule aux oeufs d'or.
     Nous voyons — et tous les autres groupes qui ont comparu avant vous nous l'ont dit — que plus il y a une concentration du marché du numérique à l'échelle internationale, moins les créateurs font d'argent. On s'est rendu compte au départ que les nouveaux supports numériques comme, les MP3, ne faisaient pas l'objet d'une surveillance et que les gens s'en servaient pour faire des copies sans avoir à payer quoi que ce soit. C'est pourquoi Mme Lavallée, ma collègue qui est ici d'habitude, a présenté d'abord au comité, puis à la Chambre, une proposition voulant que les supports audio comme les MP3 englobent ceux qui ont une mémoire interne et qu'une redevance soit payée à l'achat de ces appareils. On a soumis cette proposition à la Chambre et celle-ci a fait l'objet d'un débat.
    Monsieur McKie, que pensez-vous de cette option, qui permettrait d'obtenir les fonds qui manquent à nos créateurs?

[Traduction]

    La loi d'origine, qui s'appliquait essentiellement aux magnétophones... La redevance de copie à usage privé ne s'appliquait pas seulement aux magnétophones. Si vous lisez la loi, vous verrez qu'elle est neutre sur le plan technologique. On y dit essentiellement qu'il devrait y avoir une redevance sur tout appareil capable de recevoir un enregistrement sonore. On devrait imposer une redevance sur ces appareils.
    Le juge de la Cour supérieure qui a récemment décidé que les appareils numériques d'enregistrement sonore ne devraient pas être assujettis à la redevance a fait une erreur, selon nous. Il arrive que les juges fassent des erreurs. Nous pensons que c'est le cas ici. Malheureusement, nous n'avions pas les ressources nécessaires pour contester cette décision devant la Cour suprême du Canada.
    Il existe une solution législative mais je sais qu'elle ne serait pas facile à faire accepter, évidemment. Les gens n'aiment pas accroître le coût des biens de consommation mais, franchement, je pense qu'une erreur a été faite au niveau de la loi. La redevance de copie à usage privé devrait s'appliquer à tout appareil capable d'enregistrer de la musique. Telle est notre position officielle, depuis le début. Toutefois, nous ne pensons pas que ce soit une licence pour télécharger illégalement. Il s'agit de deux questions différentes qu'il faut bien se garder de confondre.
(1600)

[Français]

    Quant à vous, monsieur Quarles, vous avez dit dans votre présentation vous être mis à la recherche d'idées et avoir retenu les meilleures. Votre solution, qui consiste en quelque sorte à exiger une somme mensuelle de ceux qui ont les moyens de télécharger ces produits, diffère un peu de la proposition que ma collègue a soumise à la Chambre.
    Comment êtes-vous arrivé à la conclusion qu'il s'agissait des meilleures idées? Qui, dans le marché, appuie votre choix, surtout au Québec? Quelles associations appuient ce type de proposition?

[Traduction]

    La réponse la plus facile est que nous avons fait faire des études économiques. Il y a eu une étude sur le droit d'auteur international, afin de savoir si cela serait conforme aux restrictions de l'OMPI, et aussi une étude technologique. Selon l'étude technologique, le partage de fichiers ne peut pas être bloqué. Souvenez-vous que nous parlons ici de partage de fichiers, pas de copie. La redevance de copie à usage privé règle efficacement le problème de la copie, mais nous parlons ici de partage de fichiers. La différence, si je peux la décrire ainsi, c'est que le partage de fichiers va de l'un vers la multitude.
    Depuis trois ans et demi que nous parlons de cette proposition, nous en avons parlé à toutes les parties concernées possibles, notamment à l'Association de l'industrie canadienne de l'enregistrement, qui a immédiatement dit non, c'est complètement fou. Cela dit, nous avons intégré des modifications au modèle, au cours des années, pour tenir compte des intérêts des groupes de consommateurs. Aujourd'hui, le PIAC, le Centre pour la défense de l'intérêt public, est très favorable à notre proposition, tout comme l'Union des consommateurs et la CIPPIC de l'Université d'Ottawa. Nous avons aussi parlé à des producteurs de disques indépendants et à des éditeurs de musique. Même si leurs associations ont du mal à appuyer cette idée, certains de leurs membres sont intéressés.
    En fin de compte, le fait est que nous parlons ici d'une partie brisée de l'industrie. Elle est brisée depuis un certain temps et il faut faire quelque chose. Comment pouvons-nous réagir? Allons-nous continuer à essayer de tout bloquer?
    Permettez-moi aussi de préciser que nous ne parlons pas des sites Web qui sont des entreprises commerciales gagnant de l'argent avec la musique des autres. Ces gens-là devraient être poursuivis en invoquant les lois existantes. Pour notre part, nous parlons de partage individuel de fichiers. C'est de cela qu'il s'agit.
    Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.
    Merci, monsieur Quarles.
    Merci, monsieur Pomerleau.
     Monsieur Angus.
    Cette discussion est fascinante.
    Monsieur Quarles, vous aviez une camionnette Econoline vieille de 12 ans. La nôtre était vieille de 15 ans quand nous faisions des tournées. Il est intéressant de dire que le piratage a détruit le marché. Quand nous avions 18 ans et que nous étions sur la route, nous pouvions jouer six soirs par semaine. Nous n'avions pas beaucoup d'autres solutions. Ce n'est pas que nous étions un groupe extraordinaire mais, quand nous arrivions à Waterloo, les gens n'étaient pas en train de jouer avec la Wii ou de faire 10 millions d'autres choses.
    Le marché a beaucoup changé, pour de nombreuses raisons. Les gens buvaient beaucoup plus dans les bars, à l'époque, ce qui n'est pas un facteur négligeable. On n'engageait pas un orchestre pour avoir de la musique mais pour vendre de l'alcool. Il y a toutes sortes de facteurs en jeu, comme le changement démographique. Aujourd'hui, comme vous dites, le modèle est brisé. Le vieux modèle ne reviendra pas. Il va falloir trouver autre chose.
    Votre exemple m'intéresse beaucoup parce que nous avons connu les mêmes menaces technologiques dans le passé. Dans les années 1920, les musiciens ont eu peur de l'industrie du disque. Si vous enregistrez notre musique, disaient-ils, les gens n'engageront plus de musiciens. Une fois que l'industrie du disque s'est bien implantée, les maisons de disques ont eu peur de la radio en disant que plus personne n'achèterait de disques. Je suis allé aux réunions de la Future of Music Coalition, à Washington, où T Bone Burnett a présenté une statistique fascinante. Il a dit que les ventes de disques avaient chuté de 80 p. 100 à la fin des années 1920, et de 91 p. 100 au début des années 1930. Je suis sûr que la Dépression y était pour beaucoup.
    A-t-on interdit la radio? L'a-t-on mise sous clé? On a monnayé la production. Une fois que la production a été monnayée, on avait trouvé un nouveau modèle.
    Avec votre option, M. Quarles, il y a eu des tentatives pour faire ça: la SOCAN contre l'association des FSI canadiens. Un jugement a été rendu contre la SOCAN parce que la cour a dit que les tuyaux eux-mêmes n'ont strictement rien à voir avec ce qu'il y a dedans, et qu'on ne peut pas les tenir responsables à moins de les avoir informés d'une infraction au droit d'auteur.
    Étant donné que les FSI vendent maintenant leur propre contenu — ce sont des distributeurs de contenu —, ils font aussi la mesure approfondie des paquets et ont donc une très bonne idée de ce qui passe dans leurs tuyaux. Puisque des mécanismes de mesure comme BigChampagne peuvent mesurer le trafic de BitTorrent, ne pourrait-on pas envisager, en dehors du modèle interentreprises, qu'ils acceptent volontairement le système, mais que le jugement originel de la SOCAN contre les FSI canadiens puisse être cassé parce qu'ils ne peuvent plus vraiment dire qu'ils ne savent pas ce qui passe dans leurs tuyaux?
(1605)
    Nous n'avons pas beaucoup d'espoir que le jugement soit renversé. Cela dit, nous espérons certainement trouver une solution interentreprises, une solution qui n'exige pas de changement législatif et, pour être tout à fait franc avec vous, qui n'exige pas beaucoup d'efforts de la part du gouvernement. Nous cherchons vraiment une solution provenant des entreprises et nous voulons que les FSI en fassent partie. Qu'il s'agisse des fournisseurs de service mobile ou de service Internet, ce sont eux qui fourniront le service à l'avenir.
    Il se peut que la musique soit diffusée par la technologie en nuage. Quelle que soit la solution ultime, nous espérons qu'elle ne dépendra pas d'une technologie particulière car nous savons que ceci n'existera probablement pas. Nous écouterons de la musique ou y auront accès avec quelque chose d'autre.
    Monsieur McKie, vous avez dit qu'on avait calculé que le coût pour un FSI serait de l'ordre de 20 euros. Je ne connais personne ici qui puisse défendre politiquement l'idée d'imposer un droit de 20 euros aux FSI. Cette solution n'a aucune chance d'être acceptée.
    L'autre solution serait celle des trois avertissements. Je sais qu'elle plaît à certaines personnes mais j'imagine mal l'un de mes collègues proposant l'idée de couper le service Internet à une famille après trois avertissements. Ça me semble problématique. Nous avons vu la solution de la RIAA, avec plus de 35 000 poursuites judiciaires. Certaines ont eu des résultats spectaculairement catastrophiques. Il n'y a rien de plus efficace que ces poursuites pour amener les gens à haïr les maisons de disques.
    En fin de compte, la solution est de trouver une source de revenus et ce que vous proposez me semble être la bonne méthode. Il y a des petites sources de revenus ici, et peut-être ailleurs. Ce qui m'intéresse, c'est la redevance de copie à usage privé. Je sais que la CRIA était contre car elle pensait que cela entérinerait le téléchargement illégal. Ce n'est pas notre opinion. Nous pensons que c'est une source de revenus terriblement nécessaire puisque les autres semblent s'être asséchées.
    Vous êtes favorable à la redevance de copie à usage privé. Avez-vous parlé à la CRIA pour essayer de l'amener à appuyer ce concept?
    Nous l'avons amenée en partie à l'accepter. Elle est prête — je crois qu'elle a témoigné devant votre comité — à appuyer la redevance dans la mesure où cela ne devient pas un refuge pour le partage de fichiers. C'est sa position depuis le début, je pense, bien qu'elle ne vienne de l'exprimer que récemment.
    C'est aussi la nôtre, très franchement. Comme je l'ai dit, nous pensons que le jugement était erroné. Nous pensons que la copie privée est une nécessité. Elle devrait s'appliquer aux ABN. Certains pays, comme la France, appliquent des régimes très rigoureux de protection du droit d'auteur et de perception d'une redevance auprès des ABN pour copie à usage privé, et les systèmes semblent bien coexister.
    Comme je l'ai dit, je pense que la CRIA a fait un pas vers une position reconnaissant au moins la nécessité de cette source de revenus au Canada, mais elle veut en limiter l'application de façon à ce qu'on ne puisse pas en conclure que la violation du droit d'auteur est justifiée sous ce régime. C'est comme ça que j'interprète sa position.
(1610)
    Merci beaucoup, monsieur Angus.
    C'est maintenant au tour de M. Armstrong.
    J'ai hâte de rentrer chez moi pour aller télécharger les chansons de Charlie Angus.
    M. Charlie Angus:Nous sommes sur iTunes. C'est Charlie Angus and the Grievous Angels. Je l'épelle: G-R-I-E-V-O-U-S.
    M. Scott Armstrong: Vous pourrez me payer plus tard pour cette publicité gratuite.
    Tout d'abord, merci à vous deux de vos témoignages, qui nous sont très utiles.
    Ce que vous avez dit de l'innovation me semble intéressant. Que peut faire le gouvernement fédéral pour stimuler l'innovation dans notre industrie et aider à exploiter l'industrie nationale et l'industrie étrangère?
    Le gouvernement fédéral fait déjà beaucoup et je dois admettre que nous recevons beaucoup d'appui de Patrimoine canadien. Cette année, il y a eu le renouvellement du Fonds pour la musique du Canada, mais il y a eu aussi certaines coupures budgétaires dans des domaines qui me semblaient vraiment constructifs. En particulier, je ne pense pas que les Canadiens estiment qu'envoyer leurs artistes à l'étranger soit un gaspillage d'argent ou une sorte de partie de plaisir. Je crois que c'est une illusion entretenue par les médias. Je crois que nous devons envoyer nos artistes à l'étranger.
    Quand Avril Lavigne a chanté aux cérémonies de clôture des Jeux olympiques d'hiver, n'avez-vous pas tous eu un grand sentiment de fierté? Nous avons besoin de ce genre de moment dans notre vie culturelle, lorsque des Canadiens sont célébrés à l'étranger et gagnent de l'argent à l'étranger. Si Michael Bublé n'avait pas pu se produire aux États-Unis, il ne serait jamais devenu la grande vedette qu'il est aujourd'hui. Même chose pour Céline Dion, Nickelback ou d'autres grands artistes canadiens. Le marché du Canada n'est tout simplement pas assez vaste pour produire un revenu appuyant des artistes de ce niveau et leur permettant de réinvestir dans d'autres artistes du Canada, comme l'étiquette d'Avril, Nettwerk, l'un de nos membres, le fait depuis des années.
    Nous avons vraiment besoin de ces appuis pour encourager nos artistes à exploiter les marchés étrangers et s'y développer. Ils peuvent rester au Canada et y résider mais gagner leur argent à l'étranger et le réinvestir ici dans d'autres artistes. Évidemment, en faisant cela, ils créeront des oeuvres musicales dont tous les Canadiens pourront bénéficier.
    Notre but est d'accroître le marketing à l'exportation et de soutenir les appuis intérieurs qui existent actuellement. Il faut les conserver et, idéalement, les renforcer. Vous savez, c'est une industrie à forte intensité de capital. Ça coûte cher de faire concurrence à tous les autres artistes. Les Chinois apprennent à chanter en anglais, les gars. Voilà la grande vague de concurrence à laquelle devront résister les artistes du monde entier. Nous devons donc continuer à investir pour les nôtres.
    Merci.
    Monsieur Quarles, vous avez dit que le partage de fichiers musicaux doit évoluer pour passer d'un réseau illégal à une sorte de mécanisme de distribution avec licence. Vous avez dit aussi que 80 p. 100 des Canadiens affirment qu'ils seraient prêts à payer pour être légaux et se légaliser.
    Au plan national, cette idée a un certain mérite mais, internationalement, on nous accusera de voler de la musique ou de légaliser le vol de musique. Que direz-vous à nos partenaires commerciaux si nous appliquons votre stratégie et votre solution et qu'on nous accuse de cela?
    Permettez-moi de préciser ma pensée. L'étude dont j'ai parlé a été réalisée à l'université du Hertfordshire, au Royaume-Uni. C'est une étude britannique. Notre espoir est qu'on fera une étude similaire au Canada à un certain moment mais, quand on parle de 80 p. 100 de ceux qui partagent des fichiers, c'est vraiment important comme indication du fait que les gens aimeraient payer s'ils le pouvaient.
    Cela me dit que, s'ils savaient qu'une partie de ce qu'ils payent va aller dans la poche des créateurs de musique, la plupart des gens diraient que c'est une très bonne idée, tout comme, j'en suis sûr, la plupart d'entre vous.
(1615)
    Pour que ce soit clair, voulez-vous parler d'une redevance que devrait payer chaque famille au Canada, ou plutôt chaque personne téléchargeant de la musique? Quelqu'un comme mon grand-père ou mon père, quelqu'un de 70 ou 80 ans, ne possède même pas un iPod, ne télécharge pas de musique et n'en a jamais téléchargé. Allez-vous lui demander de payer cette redevance, ou est-ce que ce sera limité aux gens qui utilisent ce système?
    Quand nous avons commencé à parler de cette idée à certains groupes de consommateurs, ils ont tout de suite eu cette réaction. C'est aussi l'une de mes préoccupations. Écoutez, ma mère dit qu'elle ne télécharge pas de musique, même si Charlie semble penser qu'elle le fait. Il était donc important pour nous de prévoir une option de renonciation. Donc, nous proposons d'offrir aux gens la possibilité de ne pas participer au système afin de ne pas avoir à payer.
    Évidemment, cela aide à harmoniser la solution avec les traités de l'OMPI, mais cela aide aussi les groupes de consommateurs en rendant la solution beaucoup plus acceptable à leurs yeux.
    Une dernière question.
    Vous êtes venu nous proposer cette solution et vous représentez un groupe particulier de ce secteur. Qu'en pensent l'industrie du disque et les autres groupes de ce secteur? Que pensent-ils de cette solution?
    Nous l'avons présentée à l'Association de l'industrie canadienne de l'enregistrement il y a probablement trois ans, quand nous avons commencé à y réfléchir. À l'époque, elle était convaincue que les CD reviendraient. C'est ce qu'elle nous avait dit.
    Veuillez m'excuser, Justin, vouliez-vous transmettre un message?
    M. Justin Trudeau: Non, j'ai simplement eu un accès de toux.
    M. Don Quarles: Mais certaines des grandes étiquettes rejoignent notre camp. Les choses bougent. Warner Music a essayé d'instaurer un système similaire de droits de licence, si vous voulez, avec quelque chose qui est maintenant disparu. Elle avait essayé de créer un portail, je crois.
    Nous avons tous vu des sites Web apparaître pour tenter de monnayer la musique puis disparaître. Par exemple, sur iTunes, il y a peut-être 3 à 5 millions de chansons. Or, il y en a probablement 100 millions dans la nature. Nous essayons vraiment de capturer quelque chose que nous ne pouvons absolument pas maîtriser.
    Merci beaucoup, messieurs Quarles et Armstrong.
    Monsieur Trudeau.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Cette idée m'intéresse vraiment beaucoup. Je pense qu'elle a beaucoup de mérite, à la fois parce qu'elle est simple — elle ne demande pas grand-chose au gouvernement — et parce qu'elle offre aux industries la possibilité de collaborer à une solution équitable.
    Quel sera d'après vous l'impact sur des sociétés comme iTunes, par exemple, si vous légitimez d'un seul coup des choses comme Acquisition ou LimeWire, en faisant payer 3 $ par mois pour télécharger de la musique alors que Apple, dans une sorte de modèle d'exclusivité, fait payer 1 $ par chanson? Y a-t-il beaucoup de résistance de ce côté-là?
    Quand nous avons commencé à en parler, c'était une grande préoccupation. L'idée inquiétait beaucoup les services de téléchargement légitimes.
    Que va-t-il arriver à iTunes? La réalité est que BitTorrent et les fichiers partagés sont d'un niveau et d'une qualité musicale différents. iTunes offre une valeur ajoutée, tout comme le feront les autres sociétés appliquant notre solution. Il y aura de l'innovation dans ce secteur parce que certaines sociétés s'adapteront à ce que nous voulons et désirons.
    Je crois que ça concorde avec le mouvement que nous voyons aujourd'hui vers le Net aux dépens du Web. Les gens choisissent les applications, pour avoir accès à du contenu, même s'ils doivent payer quelques dollars alors que ce serait gratuit sur Internet, mais ce serait aussi difficile à trouver et à évaluer.
    Un autre problème est que je peux déjà entendre les critiques dire que vous proposez de créer une taxe Internet, comme la redevance iPod a été transformée en taxe iPod. Si je comprends bien ce qu'est une taxe, elle est perçue par le gouvernement et elle est versée dans les coffres du gouvernement. Les 3 $ par mois, si c'est le montant retenu, seraient versés à une organisation séparée, à l'intention des artistes. Autrement dit, on ne pourra absolument pas dire que c'est une taxe, n'est-ce pas?
(1620)
    Absolument. En fait, plus le système sera transparent, mieux ça vaudra pour tout le monde, surtout le consommateur, celui qui partage de la musique. Nous voudrons savoir que l'argent s'en va à la bonne place.
    Le collectif devra évidemment être composé d'auteurs-compositeurs, d'artistes, de maisons de disques, d'éditeurs de musique et, probablement, de FSI. Autrement dit, c'est le collectif qui recueillera l'argent, dans un fonds commun, et il le distribuera ensuite au prorata.
    En ce qui concerne l'option de renonciation, ne craignez-vous pas que, si quelqu'un dit ne pas télécharger de musique et choisit de renoncer au système, il faudra instaurer un système de contrôle? Les FSI devront-ils exercer une surveillance pour vérifier que la personne qui a téléchargé une chanson pendant le mois a vraiment acquitté ses 3 $, ou pensez-vous que les gens seront de bonne foi et vous diront: « Tenez, voici vos 3 $ et ne m'embêtez plus », et que ça suffira pour faire marcher le système?
    Je ne suis pas avocat mais on m'a dit que, si quelqu'un renonce et décide ensuite d'enfreindre cette renonciation, c'est une loi différente qui s'applique. Il s'agira d'appliquer une loi différente qui existe déjà.
    Puis-je ajouter un mot?
    Avec l'ADISQ, du Québec, nous représentons la quasi-totalité de la production canadienne de disques au Canada et nous détenons donc tous les droits d'auteur des choses qui seront échangées sur ces réseaux. Je ne veux pas débattre avec Don des mérites du système mais j'ai été chercheur pendant 25 ans, et les dernières recherches que j'ai faites, avant d'entrer dans cette association, portaient sur ce phénomène. La moitié des Canadiens n'a jamais acheté de CD en 2005. La moitié de nos concitoyens n'a jamais acheté de musique. En outre, la première tranche d'acheteurs, les premiers 20 p. 100, en ont acheté entre 15 et 20 par an.
    Donc, le marché de la musique au Canada a toujours été fortement déséquilibré. Les jeunes hommes de 18 à 34 ans achètent beaucoup de choses, continuellement. Quand vous parlez d'option de renonciation, le problème que cela pose, si l'on se fonde sur les données historiques, c'est que la moitié des gens renonceront, ce qui réduira immédiatement les recettes de moitié. C'est un problème, à notre avis.
    Ce n'est pas que nous n'apprécions pas la détermination de l'AACC à nous payer. Ça nous plaît beaucoup, c'est très bien, et je pense que c'est une idée intéressante à examiner, mais nos sociétés, comme j'ai tenté de l'indiquer dans ce document, partent d'une hypothèse différente, c'est-à-dire que ceci ne marchera pas et qu'elles devront créer de nouveaux modèles commerciaux dans lesquels les flux de recettes viendront d'autres secteurs pour appuyer leurs artistes. C'est dans cette voie que nous avançons aujourd'hui. Je parle ici des « Canadian cool kids », comme Arts & Crafts, qui ont Broken Social Scene et des sociétés comme ça. Ils ne partent pas du principe que c'est de cette manière qu'ils seront payés.
    Merci, monsieur McKie.
    Merci, monsieur Trudeau.
    Monsieur Pomerleau.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Quarles, vous avez dit que l'Union des consommateurs appuyait largement votre idée. Le type d'appui que vous avez obtenu est-il à caractère théorique, c'est-à-dire fondé sur le principe, ou avez-vous discuté avec ces gens d'éventuels montants mensuels?

[Traduction]

    Nous n'avons pas vraiment calculé de chiffre mensuel précis. Ils avaient notre recherche initiale, qui comprenait une fourchette de 1 $ à 5 $ par mois. Ils savaient que c'était notre fourchette. Nous n'avons pas d'idée préconçue sur le montant ultime. Si c'était là quelque chose qui exige l'appui du gouvernement, je suppose qu'un organisme comme la Commission du droit d'auteur ferait le calcul après avoir consulté les consommateurs et l'industrie. La réalité est que nous sommes moins préoccupés par le montant réel que par la mise en place du système. C'est assez urgent.

[Français]

    Vous n'êtes pas le seul à l'avoir dit.
    Monsieur McKie, vous avez parlé d'une « stratégie 360 ». Je n'ai pas bien saisi ce que c'était. De quoi s'agit-il?

[Traduction]

    Si vous pensez au vieux modèle, une maison de disques produisait un disque, elle en vendait entre 50 000 et 100 000 exemplaires, quelqu'un d'autre vendait les droits d'édition, quelqu'un d'autre était l'agent du groupe et quelqu'un d'autre encore vendait les produits dérivés. Il pouvait avoir cinq ou six sociétés différentes dans la chaîne.
    Aujourd'hui, on voit apparaître de nouvelles sociétés — je parlais il y a une minute de Arts & Crafts de Toronto, qui avait Leslie Feist et d'autres excellents nouveaux artistes dans son écurie — qui s'occupent de tous les éléments de la chaîne. On trouve ainsi sous le même toit l'éditeur, l'agent, les produits dérivés et la production de disques. L'artiste devient ainsi une marque commerciale en soi et toutes ces possibilités de recettes reviennent à cette société.
    Dans leur cas, l'un des artistes est d'ailleurs un partenaire, ce qui est unique dans ce secteur. Lorsque l'artiste devient partenaire de la société, tous ces flux de recettes sont axés sur l'artiste lui-même, qui devient une marque commerciale en soi. Pour eux, par exemple, Broken Social Scene est une marque commerciale, Leslie Feist est une marque commerciale pour le Canada, et ils ont toutes ces marques différentes...
(1625)

[Français]

    Ça fait partie des nouvelles stratégies que vous pensez mettre en oeuvre.

[Traduction]

    Oui, et c'est une stratégie fondée sur le développement de l'entreprise. Nous apprécions toute notre révérence. Nous n'allons rien rendre. En revanche, nous pensons avoir besoin d'un modèle commercial positif permettant de tirer parti des occasions sur la base de nouvelles approches dans la structuration de l'entreprise.
    Les Canadiens sont très forts là-dessus parce que, dans les années 1970, il y avait des types qui faisaient déjà ça. Mon président, Bernie Finkelstein me dit toujours qu'il avait créé la première société 360 et qu'elle n'a pas changé depuis. C'est une chose qui est tout à fait particulière au Canada et qui est bien adaptée à la manière dont nous développons…
    Irving, au Nouveau-Brunswick, est un peu comme ça.
    Et Donald K Donald, à Montréal. Donald Tarleton est aussi un exemple.
    Merci.
    Monsieur Richards.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais revenir un peu sur cette solution, que nous appellerons une taxe. Je sais bien qu'ils ne veulent pas employer ce mot-là, en face. Évidemment, chacun sait que ce sont des experts dans l'imposition de nouvelles taxes aux Canadiens. De notre côté, nous ne croyons pas à cette manière de faire.
    Au lieu de discuter d'une redevance ou d'une taxe — appelez ça comme vous voulez — imposée aux Canadiens pour prendre de l'argent dans leur poche, si je vous disais que ce n'est pas une méthode que j'approuve, quelles autres méthodes pourriez-vous proposer pour faire en sorte qu'on reconnaisse la valeur de ce qui est fourni par le travail de nos artistes, mais pas de manière injuste en punissant des Canadiens qui n'apprécient pas nécessairement l'idée de voir encore plus d'argent sortir de leur poche par la facture mensuelle de câble ou d'Internet?
    Je vous invite à réfléchir à cela et, si vous avez d'autres propositions à faire, je suis tout ouïe.
    Permettez-moi de préciser d'abord que nous ne parlons pas ici de taxe ou de redevance mais de licence.
    Je pense qu'il est important d'indiquer qu'il y a beaucoup d'auteurs-compositeurs qui n'ont pas le luxe de bénéficier des tournées ou de la vente de CD, de T-shirts ou de billets de concerts. Il est donc important pour nous de trouver une solution satisfaisante pour l'auteur-compositeur autant que pour l'artiste auteur-compositeur, car c'est quelqu'un qui doit aussi mettre du pain sur la table.
    Si vous aviez un consommateur d'un côté de la table, et un artiste auteur-compositeur de l'autre côté, et que le consommateur disait: « Je ne veux pas payer pour la musique », car c'est en fait de cela qu'il s'agit, l'artiste auteur-compositeur répondrait: « Eh bien, je n'aurai rien à manger cette semaine ». Je pense que c'est une manière très logique et très simple d'illustrer cette proposition.
    Il ne s'agit là que d'une partie de l'industrie. Il y en a d'autres. C'est comme si mon copain faisait une chute dans la rue et se brisait la jambe. Vais-je lui coller un pansement sur l'épaule ou vais-je m'occuper de sa jambe qui est brisée?
    Nous devons nous concentrer sur la plus grosse partie, qui est vraiment brisée. Ça dure depuis 10 ans. Je pense qu'il est temps de s'en occuper.
(1630)
    Merci beaucoup, monsieur Quarles.
    Nous allons conclure cette partie de la séance avec M. McKie. Allez-y, monsieur McKie.
    Monsieur Richards, j'aimerais essayer de vous répondre.
    Si vous examinez les revenus annuels des sociétés de musique du monde entier, vous verrez que certaines ont de bons résultats. Il y a là une leçon pour le Canada. Lesquelles et pourquoi? Il y a la Suède, ainsi que le Royaume-Uni, l'Australie et la Corée. Il n'y a pas que de mauvaises nouvelles.
    L'une des choses que possèdent ces pays, c'est un développement infrastructurel très vigoureux dans le secteur de la mobilité et le secteur des FSI. C'est quelque chose que nous n'avons pas ici, sérieusement. C'est un vrai problème pour le Canada. Il y a 10 ans, nous étions l'un des pays les plus avancés au monde en termes de connectivité, mais nous avons pris beaucoup de retard depuis. Dans le classement de l'OCDE, nous sommes au 27e ou 28e rang, aussi bien en coût par personne qu'en vitesse de réseau. Il n'y a pas de quoi être fier.
    Ce qu'envisage le gouvernement de l'Ontario — je sais que vous n'aimez pas prendre de leçons de M. McGuinty, « le premier papa » —, c'est de mettre sur pied des choses comme des fonds de capital-risque pour financer le développement de l'infrastructure. Les gouvernements obtiennent un rendement de ce genre d'investissement, en bout de ligne, et ce ne sont pas simplement des subventions ou des prêts. Dans le cas de l'Ontario, les montants ne sont pas négligeables: 100 millions de dollars, 150 millions, auxquels auraient accès nos sociétés et d'autres pour développer l'infrastructure de distribution du Canada.
    Quand on réalise que nous n'avons que 20 sites de téléchargement alors que les Allemands en ont 50, il ne faut pas se demander pourquoi leurs ventes de musique numérique augmentent. Ils ont tout simplement un meilleur système de distribution, ce que nous n'avons pas. En fait, nos FSI ont été vraiment paresseux, avec tous ces monopoles, bien sûr, et ils n'ont pas fait l'effort de développer l'infrastructure de distribution.
    Il faut donc tenir compte de tout cela. Je suis d'accord avec Don, il n'y a pas qu'un seul problème. Il y a tous les autres éléments à prendre en compte, mais il y a aussi en ce moment un élément critique qui est d'agir pour relancer les ventes.
    Merci beaucoup, M. McKie.
    Merci, M. Quarles.
    Nous allons suspendre la séance pendant cinq minutes pour le changement de témoins.
(1230)

(1235)
(1635)
    Je souhaite maintenant la bienvenue au témoin suivant devant le comité du patrimoine canadien.
    Je vous souhaite la bienvenue, monsieur McGarry, président de Jumpwire Media.
    Vous avez la parole pour votre déclaration liminaire.
    Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner. J'ai lu la plupart des rapports que vous avez publiés, le dernier remontant au mois d'avril, je crois.
    Je vais d'abord vous dire qui je suis. Je suis Canadien et fier de l'être, mais je vis et travaille aux États-Unis. J'ai quitté le Canada en 2004 pour aller travailler au Royaume-Uni parce que je voulais comprendre le secteur du mobile et qu'il ne s'y faisait rien en Amérique du Nord. J'avais une société de production télévisée et une société de publicité que j'avais tenté de fusionner, ce qui était peut-être une erreur. Je pensais qu'il y avait là une occasion à saisir mais ça n'a pas marché comme je l'espérais. Je suis parti parce que les problèmes de financement d'émissions télévisées étaient tellement difficiles à résoudre et prenaient tellement de temps qu'il m'a semblé préférable d'aller voir ailleurs.
    J'ai un passeport européen et je suis allé en Europe. Je me suis retrouvé chez Endemol, l'une des plus grandes sociétés au monde de production télévisée. Elle produit des choses comme Deal or No Deal, Big Brother et beaucoup d'autres émissions célèbres dans le monde entier, notamment de télé-réalité.
    Je me suis donc retrouvé là, heureusement, et Endemol appartenait alors à Telefónica, un conglomérat espagnol géant qui possédait également O2, le plus grand exploitant de téléphonie mobile du Royaume-Uni. C'était très intéressant de voir ce qui se passait chez un exploitant de téléphonie mobile car ça m'a permis de réaliser que rien n'allait se faire avant cinq ou sept ans, tellement c'était archaïque. C'était très difficile de faire quoi que ce soit, nous traitions avec des producteurs internes du contenu, ce qui n'arrangeait pas les choses.
     Chez Endemol, j'ai vu en 2005 qu'il y avait une possibilité de créer un service de développement d'une plate-forme multimédias. Ils m'ont donné un peu d'argent, je l'ai créée, et tout a bien marché pendant environ un an. Je suis revenu quelque mois au Canada puis je suis parti à New York travailler pour une société qui s'appelle Joost. C'était probablement l'une des toutes premières sociétés au monde de vidéo par Internet, et elle a englouti 100 millions de dollars en deux ans. C'était le chef de file mondial. Incroyable.
    Je dois dire que ce fut une expérience extraordinaire, qui m'a beaucoup appris. Elle appartenait aux types de Skype, les types qui ont créé Skype et Kazaa. C'était un réseau de partage de fichiers poste à poste.
    Je ne suis arrivé ici qu'à 16 heures et je vous ai entendu parler de BitTorrent et de choses comme ça.
    A New York, j'ai quitté Joost — je voyais bien que ça craquait — et j'ai créé Jumpwire, essentiellement parce que les gens me demandaient constamment une stratégie. Avec mes antécédents, comme personne n'avait la même expérience que moi, je suis devenu l'un des chefs de file mondiaux dans ce que je faisais. J'ai donc travaillé avec Discovery, des sociétés indiennes, l'Australie, la Russie. Nous avons aidé Hulu à s'établir en Russie. C'était vraiment excitant. Nous n'existions que depuis un an et demi et c'était extraordinaire.
    Nous venons tout juste d'ouvrir un bureau à Toronto parce que je suis canadien et que j'en suis fier. Ce qui se passe en ce moment est vraiment intéressant. J'ai lu votre rapport et les questions que vous posez. Malheureusement, il y en a beaucoup auxquelles je ne pense pas pouvoir répondre car je ne suis pas au Canada depuis assez longtemps. Par contre, je peux vous dire que, lorsque je suis revenu, j'ai fait partie d'un jury, très récemment, pour le FMC, parce que je voulais comprendre où était allé l'argent pendant les cinq dernières années. J'ai donc fait partie du jury expérimental qui a récemment donné tout un paquet d'argent. Ce fut une belle expérience car je pense que c'est vraiment l'avenir de ce que doit être le financement au Canada. Ce fut vraiment un soulagement de revenir et de travailler du côté du financement et de voir: « Voici une merveilleuse idée. Nous avons trouvé quelques idées innovatrices et, vous savez quoi, nous allons prendre une participation là-dedans ».
    Le capital-risque est un gros problème. Je rencontre constamment des sociétés de capital-risque. Je cherche actuellement un investissement. C'est un cauchemar. Voir le gouvernement s'occuper de capital-risque peut paraître contestable mais, depuis que j'ai participé au processus, je suis vraiment encouragé parce que les émissions, les idées innovantes qui sont sorties du flux expérimental, n'avaient rien à voir avec le Canada. C'était simplement de bonnes idées.
    C'est là-dessus que j'aimerais terminer mon exposé. Je pense vraiment que l'avenir, ce dont nous parlons avec nos clients, c'est que, si vous travaillez sur un plan de cinq ans, il y a probablement quelque chose qui ne va pas dans votre tête. Nous ne planifions strictement rien pour nos clients du monde entier à plus de 18 mois d'échéance. Pourquoi? Parce que les choses changent tellement vite que c'est absolument impossible. Et vous, qui allez essayer de rédiger un texte de loi à ce sujet…
    J'ai eu une discussion intéressante hier sur le rôle du gouvernement dans ce qui se passe en ce moment. Est-ce que vous êtes des chefs de file? Est-ce que nous voulons être en tête du peloton mondial ou seulement rester au milieu, comme tout le monde le dit?
(1640)
    Ce que je veux dire, c'est que le Canada a toujours été un chef de file. Quand je suis parti au Royaume-Uni, en 2004, nous avions un taux de pénétration de la haute vitesse de 75 p. 100, alors que c'était 50 p. 100 au Royaume-Uni. La moitié des Anglais en étaient encore à l'accès par ligne téléphonique.
    Quand j'allais à des réunions, c'était comme si je représentais l'avenir. Je dois dire que nous avons essayé ça en 1998. Ça n'a pas marché à ce moment-là et ça ne marchera probablement pas maintenant. Nous avons 10 méga-octets de vitesse et nous avons ça depuis cinq à sept ans.
    Nous avons été le chef de file et nous le sommes encore maintenant avec le plus de vidéo en ligne par habitant, de vidéo par le Web. Les Canadiens sont absolument à un niveau tellement plus élevé que tout le reste du monde mais nous n'en profitons pas. Nous perdons encore notre temps à essayer de voir comment nous pourrions relier ça aux radiodiffuseurs.
    Chez Jumpwire, en revenant au Canada dans les derniers… J'ai renoncé. Nous travaillons beaucoup avec les radiodiffuseurs mais le principal problème dont j'entends parler aujourd'hui vient des sociétés de production qui me disent que les radiodiffuseurs veulent tous les droits. Ils veulent les droits mais ils ne sont pas prêts à payer pour ça.
    Nous avons donc élaboré une stratégie, que je vous communiquerai avec plaisir. Il s'agit d'aller acquérir les droits pour les services mobiles, les services en ligne, les produits dérivés, avant d'aller voir les radiodiffuseurs et de les forcer à demander combien ils pensent que ça vaut. C'est difficile, j'ai été du côté des radiodiffuseurs. Combien valent ces choses-là? Mais il y a des gens qui gagnent beaucoup d'argent là-dedans et je pense que c'est important à reconnaître.
    En ce qui concerne notre société, à New York, j'utilise les trois territoires dans lesquels je passe beaucoup de temps.
    Le créatif vient du Royaume-Uni. C'est probablement la production la plus créative que j'ai jamais vue au monde. Ils ont eu Shakespeare. Ils ont été à la bonne école. Vous savez, ils utilisent 40 000 mots de vocabulaire, nous en utilisons 20 000.
    Quand j'étais avec l'équipe de production chez Endemol, c'est probablement là que j'ai vu les idées les plus innovantes. Ils sont pas très forts pour la vente il faut dire, mais alors pas du tout, contrairement aux Américains, qui sont les meilleurs pour ça.
    Voici ce que nous avons commencé à faire. Quand j'ai créé le service multi-plates-formes, j'ai dit que nous allions tout tester au Canada. Pourquoi? Parce que nous sommes le pays le plus divers au monde. Si je veux faire quelque chose pour la Corée, je vais dans le quartier coréen de Toronto. Je peux faire de la publicité là-bas. Je peux tester très rapidement quelque chose sur un très petit marché d'un public très évolué. C'est comme ça que nous fonctionnons et ça marche très bien.
    Les trois choses qui sont essentielles, et c'est ce que nous disons à tous nos clients, sont les données, la vidéo par Internet et le mobile. Pour les données, j'ai deux domaines clés. Je ne sais pas si vous vous intéressez à cela. La protection de la vie privée est évidemment cruciale, mais il y a aussi l'accès. Je veux l'accès à toutes les données des FSI. Je pense que je devrais l'avoir. Pourrais-je l'obtenir avec la loi sur l'accès à l'information? Je ne le sais pas. Est-ce qu'ils finiront par me le donner? Probablement pas.
    Mais nous avons construit — nous utilisons BitTorrent — une machine de mesure de 250 000 $. Nous sommes les leaders mondiaux dans ce que nous faisons. C'est un système de filtrage. J'ai un employé qui a un doctorat qui mesure tout ce qui passe avec BitTorrent, chaque émission de télévision, chaque film, toute la musique, et nous revendons cette information aux sociétés de contenu. Je peux vous dire que c'est très difficile: « Je ne veux pas entendre parler de BitTorrent ». Mais je leur dis: « Mais c'est ce que font vos gens. Vous ne voulez pas en profiter? ».
    Nous avons encore beaucoup de chemin à faire mais il y a beaucoup de possibilités. Quand vous voyez que nous sommes les premiers au monde pour la vidéo par le Web, nous devons exploiter ça. Nous avons besoin d'un fonds spécialement pour ça.
    YouTube le sait. Nous passons beaucoup de temps avec les types de YouTube. Le Canada est le premier pays où ils ont ouvert un bureau secondaire. Facebook a ouvert son bureau secondaire au Canada. Yelp, Twitter, tout le monde est venu au Canada parce qu'ils n'en reviennent pas qu'un petit pays utilise tant l'Internet.
    Nous ne sommes pas du genre à clamer sur les toits que nous sommes numéro un. Nous nous contentons simplement d'avancer. Nous sommes absolument le laboratoire du monde entier mais je ne pense pas que nous en profitions. Si vous pouviez nous y aider, les gars, ça serait utile.
    Ma dernière remarque — nous pourrons continuer de discuter et vous pourrez me poser des questions si vous voulez — concerne le fait de savoir comment nous allons réussir à exploiter le fait que nous sommes l'un des pays les plus diversifiées au monde sur le plan culturel et les plus avancés sur le plan du numérique. C'est ça que je veux faire avec ma société et je ne sais pas vraiment comment je vais m'y prendre.
    Pour l'avenir, je ne sais pas très bien ce qu'est ma société. Les choses avancent tellement vite que c'est très difficile à saisir. Si quelqu'un vous dit qu'il le sait, je dirais qu'il vous raconte des histoires.
    Merci.
(1645)
    Merci beaucoup, monsieur McGarry.
    Nous avons maintenant 45 minutes pour la période des questions, que nous entamons avec M. Simms.
    Merci, monsieur le président.
    Merci de votre présence, monsieur McGarry. Vous allez droit au coeur du sujet. J'adore ça.
    Nous avions un peu plus tôt un témoin qui parlait d'un nouveau modèle commercial pour régler le problème des gens qui utilisent cette musique par le partage de fichiers, ce genre de chose-là, de poste à poste. Si on examine ça d'un point de vue très global, on voit qu'il y a une quantité d'argent gigantesque qui n'est pas transférée aux artistes.
    Comment voyez-vous un nouveau modèle commercial qui permettrait aux artistes individuels ou aux distributeurs de recevoir leur argent?
    Voici comment je vois les choses. Les artistes sont déjà rémunérés pour leur contenu. En fait, j'ai rencontré quelqu'un d'Ericsson, en Europe. La plupart des gens ne réalisent pas que, généralement, pour les services de blocage de PI pour BitTorrent, la plupart des gens payent 10 euros ou 10 $ pour bloquer leur PI afin de pouvoir utiliser BitTorrent. Ça dépasse largement l'argent qu'ils auraient pu gagner avec le contenu que les gens téléchargent.
    Les gens paient déjà 10 $ par mois pour le contenu.
    Vous parlez de quoi, exactement?
    D'un bloqueur de PI.
    Pouvez-vous expliquer brièvement ce que c'est?
    Vous avez une adresse de PI associée à votre ordinateur. Si vous la bloquez, les gens ne peuvent pas déterminer qui vous êtes ni où vous êtes. Beaucoup de gens utilisent cela quand ils se servent de BitTorrent ou de sites en continu.
    La clé à ce sujet, et c'est la raison pour laquelle j'ai créé ma société de cette manière, c'est que je pouvais voir il y a déjà cinq ans que tout le monde payait déjà pour le contenu. On payait pour ça avec les données. Les gens payent pour le contenu depuis longtemps. Les gens pensent que les données ne valent rien et ne peuvent pas être monnayées mais, en fait, c'est possible et on fait ça tout le temps.
    La plupart des gens ne réalisent pas que BitTorrent et un service de partage de fichiers. Chaque personne en a un petit bout dans son ordinateur mais ce qui est intéressant, c'est que les services de mesure qui mesurent tout le trafic de BitTorrent sont publics. N'importe qui peut capturer ces données, le gouvernement ou des sociétés comme la mienne. Il suffit d'avoir un très bon système de filtrage. Il se trouve que la personne qui a construit notre système de filtrage est un ami du Bram qui a construit BitTorrent. Nous avons donc le meilleur système de filtrage au monde, incontestablement.
    Nous avons aussi dans notre personnel un détenteur de doctorat qui sait comment épurer les données, parce qu'elles peuvent être très embrouillées. Si vous téléchargez un épisode de Being Erica, ou même toute une saison de Being Erica, ça viendra comme un seul gros paquet. Ce qu'il faut faire, c'est filtrer ça pour séparer les données en deux groupes: combien de gens ont téléchargé toute la saison et combien ont téléchargé un seul épisode. C'est ce que nous voulons dire quand nous parlons de filtrage.
    Pour revenir à toute cette idée que vous payez déjà avec vos données, il y a énormément de données gratuites sur le Web à l'heure actuelle. Quand vous créez une page sur Facebook, si vous êtes la personne qui la crée, vous obtenez toutes les données gratuitement. Tout est là.
    Si vous regardez une vidéo sur YouTube et que vous allez voir en arrière-plan, vous pouvez cliquer sur les flèches descendantes et vous ne verrez que des données gratuites.
    La plupart des gens disent que ce n'est pas monnayable mais ça l'est complètement. Si nous avions une connexion Internet, je pourrais vous montrer immédiatement toutes les données gratuites qu'il y a là-dedans et que nous utilisons tout le temps. Et BitTorrent, c'est la même chose.
    On dit que les gens n'ont pas payé pour le contenu. Non, ils n'ont pas payé avec de l'argent mais ils ont payé avec quelque chose qui vaut plus que de l'argent, leurs données. Je suis toujours surpris quand on me dit que ce n'est pas la même chose que de l'argent. Pour moi, si.
    Nous sommes tout le temps en contact avec beaucoup de gens du secteur de la musique, il y a beaucoup d'indépendants… Le secteur de la musique est en pleine débandade, et quiconque vient ici sera mécontent: son modèle commercial s'est effondré et il essaie de le préserver. Je ne le lui reproche pas mais il y a tous ces indépendants qui changent la manière dont se font les choses maintenant. J'en rencontre constamment. Ces jeunes types…
    Écoutez, de combien d'argent avez-vous réellement besoin, comme artiste, si vous faites ça vous-même? Si vous gagnez deux ou trois centaines de milliers de dollars par an et que vous vivez à Fergus, en Ontario...
    Une voix: La vie est belle là-bas.
    M. Gavin McGarry: La vie est belle, au Canada, avec la santé gratuite…
(1650)
    La vie est toujours belle à Fergus, de toute façon.
    C'est là que je suis né.
    Je sais.
    Vous avez vu ce que je viens de faire? J'ai redoré votre blason.
    Des voix: Oh, oh!
    La vie est toujours belle à Fergus, avec ou sans redevances.
    J'ai jeté un coup d'oeil à tous vos sites Web. Vous vous débrouillez vraiment très bien. Chacun d'entre vous sort en premier quand on fait une recherche avec Google.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Gavin McGarry: Député fédéral, c'est un beau travail.
    J'aimerais bien pouvoir monnayer mes données. Ça serait super.
    C'est très intéressant parce que l'impression que nous avons est que tout le monde semble courir dans tous les sens pour essayer de trouver ce nouveau modèle. Vous, ce que vous nous dites, c'est que le modèle est là mais qu'il est simplement sous-utilisé.
    Y a-t-il quelqu'un qui l'utilise comme vous venez de le décrire?
    Oh mon Dieu, oui, il y en a tellement! Il y a au Minnesota une toute nouvelle agence publicitaire dont personne n'a jamais entendu parler. Elle va probablement devenir l'une des plus grosses au monde. Elle s'appelle Axiom Partners. Elle ne fait qu'une seule chose: décortiquer des données. Elle analyse des données et s'en va ensuite les vendre aux grandes marques en leur disant: « Voici ce que font les gens ».
    La quantité de données gratuites en ligne est effarante. Quand je veux décrocher un client, je vais voir le PDG, j'ouvre mon ordinateur devant lui, je télécharge tout son contenu et je lui montre toutes les données gratuites auxquelles j'ai accès. Quand j'ai fini, je lui dis: « Voici votre profil démographique, votre profil psychographique. Je viens juste de vous faire économiser 1 million de dollars. Quand voulez-vous je commence? »
    C'est aussi simple que ça. Je suis surpris que tout le monde ne le fasse pas. Il y en a qui le font. Il y a tout un monde souterrain de gens — généralement des moins de 30 ans, ce qui n'est pas mon cas — qui créent toutes ces nouvelles sociétés…
    Ce n'est qu'une question de données. Ça n'est pas plus que ça. Il y a une chose qu'on appelle un casier à pubs dans lequel vous pouvez mettre toutes vos publicités. C'est encore très récent et j'essaye de trouver l'information. Veuillez m'excuser si ce n'est pas le bon nom. Voici de quoi il s'agit: vous prenez toutes les publicités que vous voulez voir, vous les mettez dans un petit casier et, à partir de n'importe où sur le Web, elles vous sont envoyées. Vous ne voyez rien d'autre. Vous voyez seulement les publicités que vous aimez.
    Je pense que c'est une idée de génie, et c'est seulement une question de données.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Je donne maintenant la parole à M. Pomerleau.
    Merci, monsieur le président.
    Honnêtement, je dois avouer que je n'ai absolument rien compris de ce que...
    Des voix: Ah, ah!
    M. Roger Pomerleau: Je vais être obligé de poser une question à nouveau, et peut-être allez-vous y répondre autrement.
    Supposons que la musique d'un producteur soit utilisée sur le Web. Comment peut-il s'assurer d'être payé pour sa musique? Vous avez parlé de data et tout cela, mais...

[Traduction]

    C'est qui, nous?
    M. Roger Pomerleau: Nous?
    M. Gavin McGarry: Comment nous assurons-nous qu'ils sont payés? C'est qui, nous?
    Le gouvernement, nous.
    C'est vraiment difficile et controversé car, très franchement…
    Le gouvernement n'a rien à voir avec ça?
    Non, non, je ne suis pas aussi républicain que ça. Je suis un éco-capitaliste.
    Il y a longtemps que les artistes sont exploités par de grandes sociétés qui — je vais peser mes mots parce que certaines sont mes clientes — placent des obstacles à l'entrée et exploitent ensuite la situation en donnant aux artistes, ou aux vedettes du sport, ou à je ne sais qui...
     S'il y a quelque part un joueur de basket qui gagne 100 millions de dollars, je vous garantis qu'il y a quelque part un propriétaire qui en gagne 1 milliard. Et ça a toujours été comme ça.
    Maintenant, les choses ont changé. Le paradigme a complètement changé. Il est perturbé. Les gens courent dans tous les sens comme des dératés, ce que je comprends parfaitement. Je vois maintenant tous ces nouveaux groupes qui créent leur propre contenu. Ils le placent sur YouTube, ils le monnayent eux-mêmes. Ils n'ont pas besoin de maison de disques. Ils n'ont pas besoin du gouvernement. Ils n'ont besoin de personne. Ils font ça eux-mêmes. Avec l'Internet et la téléphonie mobile, on est entré dans un monde d'autodidactes entrepreneurs mais, de toute façon, c'est ce que les artistes étaient déjà avant.
    Ma soeur est peintre. C'est une artiste. C'est moi qui gère l'aspect commercial de ce qu'elle fait et c'est difficile. Les artistes doivent tout faire. Il arrivera un temps où ils auront besoin de gens pour gérer leurs affaires mais, pour le moment, la plupart font ça eux-mêmes. Ils trouvent un ami qui les aide et ils gagnent beaucoup d'argent.
    Écoutez, si vous avez 16 ou 17 ans et que vous gagnez 10 000 $ par mois, nous avons un gros problème. Comment est-ce que toutes ces sociétés multinationales géantes que nous bâtissons peuvent espérer attirer un jeune de 16 ans en le payant 500 $ par semaine? Ça ne se fera pas.
    J'ai déjà ce problème maintenant. Ils me disent: « Pourquoi est-ce j'irais travailler pour vous quand je peux gagner 10 000 $ par mois sur YouTube? »
    Il y a deux jours, j'étais à l'université Ryerson. J'ai été choqué de voir combien de jeunes de 22 ou 23 ans en radio et en télévision ne gagnaient pas 1 000 $ par mois sur YouTube. Je leur ai posé la question: « Pourquoi ne gagnez-vous par 1 000 $ par mois sur YouTube? »
    J'ai un peu tourné autour du pot avec votre question parce que je ne veux pas dire de choses trop controversées mais vous pouvez bien voir où je me situe. Ma position est que nous traversons l'une des plus grandes révolutions depuis la révolution industrielle. Beaucoup de gens, généralement plus âgés, sont très troublés parce que leur modèle commercial s'est complètement effondré, et ils essayent seulement de s'en sortir jusqu'à la retraite.
    On voit ce qui se passe. Il y a huit semaines, à New York, chacune des grandes sociétés d'édition, même Condé Nast, a remplacé son PDG. La plupart avaient moins de 50 ans.
    Il faut être capable de parler les deux langues. Je parle un peu de français et un peu d'anglais. Quand je vais au Québec, je me sens comme un idiot. Mais quand je parle de numérique ou d'analogue, je suis complètement à l'aise dans les deux mondes. Je n'ai pas de problème. Je peux parler à des ingénieurs très techniques de Web sémantique et de cryptologie, et aller jusqu'aux PDG des grandes multinationales des médias. C'est mon travail. Je suis le type dans le hamac. Je suis dans le groupe d'âge qui doit faire la traduction pour les deux.
    Et c'est ça le futur. Le futur, c'est que je ne sais pas ce qui va arriver ensuite.
(1655)
    Donc, à mon âge, c'est fini?
    Non.
    Faut vous mettre sur Facebook, mon vieux. Vous vous en sortirez.
    Des voix: Oh, oh!
    Il en est encore à construire sa page sur MySpace.
    Oui, MySpace détruit tout. MySpace, c'est la pagaille.
    Voici ce que nous disons à nos clients, et je vous parle d'expérience. J'ai été recruté deux fois comme VPS de médias numériques pour aller dans des sociétés de contenu régler leurs problèmes. Il y a trois ou quatre ans, elles disaient: « Nous avons besoin de quelqu'un en médias numériques. » Une société de production télévisée a essayé de m'engager. J'y suis resté trois mois avant de partir. Ils croyaient que je construisais des sites Web.
    Le numérique, c'est tout. Ce n'est pas une partie du tout, c'est le tout. Nous disons maintenant à nos clients, et ce sont des gros clients, comme Naspers en Afrique du Sud: « Ne renvoyez pas vos cadres supérieurs, formez-les. »
    Nous avons construit une partie de notre société… et ce n'est pas quelque chose que j'avais prévu. Nous formons tous ces PDG et VPS. Nous leur apprenons ce qu'ils ont besoin de savoir.
    Dans une compagnie de télévision, la personne qui crée le contenu ou qui signe la programmation n'a pas besoin de savoir comment fonctionne un téléviseur, comment fonctionne un téléphone mobile ou comment fonctionne une caméra vidéo. Elle a simplement besoin de savoir s'en servir et de créer du contenu avec. Ne mettez donc pas à la porte tous vos cadres intermédiaires qui sont là depuis 10 ans parce que vous allez perdre toute l'expérience qu'ils ont acquise.
    Nous faisons venir des jeunes de 22 ou 23 ans qui connaissent bien tout ça. C'est en fait assez surprenant et un peu choquant de voir combien n'ont vraiment aucune idée de ce qui se passe. Nous les faisons donc venir au bas de l'échelle, nous formons les cadres supérieurs et nous les faisons travailler ensemble. C'est tout ce qu'on peut faire.
(1700)
    Merci beaucoup.
    Monsieur Angus.
    Eh bien, tout ceci est très provocant.
    Vous savez, nous avons entendu beaucoup de gens ces dernières années qui sont venus critiquer YouTube en disant: « Ah oui, YouTube, c'est des gens qui regardent des vidéos de leur chat. » Évidemment, les gens sont vraiment choqués et horrifiés de voir ce qu'a fait YouTube. Ça a tout changé. C'est la télévision. Les enfants n'ont pas de téléviseur. Ils n'envisageraient jamais d'acheter un téléviseur même si c'était la dernière chose qui restait en magasin. Ils sont sur YouTube. Mais ils sont sur YouTube pour beaucoup de choses très différentes, pas pour regarder des chats actionner des chasses d'eau. Ils sont là pour regarder du contenu parce que le contenu reste roi.
    Je m'intéresse à ce que vous avez fait avec le FMC car, finalement, quel est le rôle du gouvernement canadien? Quel est le rôle de nos institutions fédérales? Nous avons créé certains créateurs de contenu de tout premier niveau. Prenez l'Office national du film. Pour moi, ça reste encore l'un des grands laboratoires de cinéma au monde. Il y a Radio-Canada. Nous avons créé du très bon contenu.
    J'ai cependant l'impression que nous avons pensé au cours des années que nous devions créer du contenu parce que nous devions nous assurer que les Canadiens ne disparaîtraient pas. Ensuite, nous avons dû créer du contenu pour nous assurer que les radiodiffuseurs ne disparaîtraient pas. C'était comme si la culture était devenue une sorte d'assistance sociale pour grandes entreprises. Il semblait y avoir cette mentalité.
    Aujourd'hui, je me penche sur les possibilités du numérique mais, là encore, même si l'on modernise le Fonds des médias du Canada, la grande majorité est liée au fait qu'il faut être radiodiffuseur, et le radiodiffuseur va vouloir accaparer pour 12 années de droits d'auteur, et vous n'aurez même pas la certitude que ce sera diffusé. Ce sera un énorme investissement parce que vous n'allez pas réaliser une émission pilote si vous n'avez pas un gros paquet de fric à votre disposition.
    Pendant ce temps-là, il y a tout cet autre monde en effervescence où beaucoup de choses commencent à se produire. Je suis heureux que vous ayez constaté que le flux expérimental est plein de bonnes idées. Ça me semble bizarre. Il me semble qu'on dirait plutôt que le flux expérimental existe à part, que ce n'est pas là qu'on trouve les choses sérieuses, alors que je me demande finalement si ce n'est pas vraiment là que les choses sérieuses seront créées.
    Pensez-vous que nous devrions ouvrir ce Fonds des médias du Canada afin de fournir plus d'argent pour simplement créer du contenu, sans se demander pour le moment qui s'en servira, facteur secondaire, et en laissant peut-être tout ça s'en aller en ligne?
    C'est l'agnostisme des plates-formes. Être agnostique des plates-formes est crucial.
    Oui, créer une sorte de modèle de financement qui permettrait de faire cela est important, mais je ne sais pas comment vous ferez ça. L'une des raisons pour lesquelles je suis parti était le nombre d'obstacles qu'il faut franchir pour obtenir le financement, le fait qu'il faut mettre un drapeau canadien là-dedans. Je n'ai jamais cru à ça. Je pense que nous produisons le meilleur contenu au monde et je ne pense pas qu'il faille…
    Une partie est produite pour les Canadiens, et tout est produit par des Canadiens, mais il n'est pas nécessaire de hurler « Canada ». J'habite à New York et ce que la plupart des gens ne réalisent pas, c'est qu'il y a plein de Canadiens dans ceux qui dirigent les médias. La raison pour laquelle je suis à New York est que le visa O-1 que j'ai obtenu élimine quiconque... C'est tellement difficile à obtenir que seuls les meilleurs vont aux États-Unis.
    Tel est donc notre plus gros problème. Allons-nous donner des fonds pour former des gens qui partiront aux États-Unis? Les Américains recrutent des Canadiens à la pelle parce qu'ils savent que nous sommes très bien formés. Nous avons beaucoup d'expérience.
    Pour répondre à votre question, oui, je pense que nous avons besoin d'un nouveau modèle de financement. Je pense que la clé est de financer les choses qui gagnent de l'argent sur les nouvelles plates-formes: mobile, YouTube, etc.
    Une brève question.
    On se demande encore si l'Internet est le plus grand système de distribution de l'histoire ou si c'est un tsunami culturel qui va balayer nos industries, question qui ne cesse d'être débattue ici.
    Quelqu'un a suggéré plus tôt, ou a recommandé, l'application du principe du « retrait sur trois prises ».
    M. Gavin McGarry: Oh mon Dieu, non!
    M. Charlie Angus: Si nous décidons qu'il est illégal de télécharger, cela aura-t-il un effet, d'après ce que vous avez vu avec BitTorrent et le nombre de fichiers qui circulent? Est-il réaliste que nous, législateurs, voulions jouer au roi Canute en exigeant que la vague recule, parce que c'est le principe des trois prises? Est-ce même concevable?
    Non. C'est vraiment l'idée la plus folle que j'ai jamais entendue. Savez-vous ce qui se passera? Je veux dire que…
    C'est comme si personne n'apprenait son histoire. Avant qu'il y ait les médias numériques, avant qu'il y ait les médias analogues, il y avait des châteaux en Angleterre. Vous construisez des ponts-levis et les gens les contournent.
    La raison pour laquelle le Canada est le quatrième pays au monde pour les téléchargements par BitTorrent est que nous voulons regarder des émissions américaines. C'est ce que nous voulons. Le reste nous importe peu. Nous voulons regarder des émissions d'Angleterre. Nous voulons regarder des émissions du monde entier.
    Nous ne cessons de restreindre l'accès mais les gens répondent: « Je ne vais certainement pas payer 79 $ pour voir une chaîne en Hindi, je vais simplement aller voir ça gratuitement en ligne. » Ensuite, nous nous mettons en colère et leur disons: « Mais voyons, vous étiez censés payer pour ça. »
    Je pense que 99 sous pour une chanson sur iTunes, c'est beaucoup trop cher. Je serais peut-être prêt à payer un sou, ou deux sous, mais certainement par 99 sous. C'est ridicule.
(1705)
     Merci beaucoup.
    Monsieur Brown.
    Merci, monsieur le président.
    C'est une journée très intéressante, monsieur McGarry.
    Je voudrais changer un peu de sujet. Selon vous, que signifient les nouvelles tendances et les médias numériques pour la télévision locale? Je constate que, dans beaucoup de petites villes et collectivités, nous essayons d'amener les gens à adopter des petits bouts de médias numériques mais on est encore loin de ce que c'est dans le reste de la société. Que vont devoir faire les collectivités du Canada pour veiller à ne pas perdre ce contenu local? Quand ça devient international et national, la crainte est que ça entraîne la perte du local. Comment pourrons-nous toujours être informés des activités locales de bienfaisance? Comment pourrons-nous avoir un médium nous tenant au courant des activités municipales?
    Mais vous êtes tous locaux, n'est-ce pas? Vous êtes tous députés fédéraux. Comment faites-vous?
    Sérieusement.
    Avec les bulletins parlementaires.
    Une voix: Les dix-pour-cent.
    Même ce que nous faisons actuellement, l'envoi de beaucoup, beaucoup de bulletins par la poste, c'est de moins en moins efficace. Ça ne veut pas dire que nous arrêtons de le faire mais c'est un médium de moins en moins efficace pour communiquer alors que de plus en plus de gens mettent les envois à la poubelle, surtout les jeunes, bien sûr.
    J'utilise les médias sociaux pour communiquer avec les jeunes de ma circonscription. Je pense qu'il est de plus en plus difficile pour un journal local de vendre de la publicité. Je pense qu'il est de plus en plus difficile pour une station de télévision locale de survivre.
    Je crains que cette tendance ne se renforce.
    J'ai sans arrêt cette discussion. C'est difficile parce que ce n'est pas une discussion, c'est un changement. C'est inévitable. Regardez Craigslist, c'est local, hyper-local. Nous passons notre temps à discuter d'hyper-local.
    Les gens n'aiment pas le changement. Ils ne veulent pas voir disparaître leur station de télévision. Ils ont l'habitude de s'asseoir dans leur fauteuil et de regarder les nouvelles locales.
    Je ne lis même plus les journaux aujourd'hui. Je reçois mes informations par Twitter. Je suis probablement les activités de la moitié des députés fédéraux pour savoir de quoi vous parlez. Je sais qui vous êtes avant même de venir ici. Je suis allé sur LinkedIn. J'y ai trouvé toutes sortes d'informations. Que nous n'avions pas avant.
    Avec tout ce changement, oui, nous devons tenir compte des gens qui sont habitués à faire ça. Ça veut simplement dire que nous avons besoin de jeunes de 25 ans pour diriger les stations de télévision locales, parce qu'ils s'intéressent à la télévision mais qu'ils comprennent les médias sociaux et qu'ils sont capables de faire le lien avec les jeunes et avec les plus vieux
    Comment pouvez-vous réglementer ça? Que pouvez-vous faire? Ce sont les gens qui décident eux-mêmes, n'est-ce pas? Aujourd'hui, c'est l'approvisionnement par la foule qui compte. Vous décidez ce que veut la région locale et c'est ce que vous voyez sur Facebook. Les gens de Fergus, en Ontario, ne s'intéressent pas particulièrement à ce qui se passe ailleurs qu'à Fergus, en Ontario.
    Moses Znaimer est le premier à l'avoir compris. C'est tout local, local, local. CityTV en est l'exemple parfait.
    Divulgation obligatoire: il m'a engagé à ma sortie de l'université.
    Il y a 17 ans, j'avais conçu une émission de télévision à Western qui était hyper-locale mais je m'étais dit que, si je produisais une émission de télévision sur le campus, personne ne pourrait me toucher. Je fais simplement ce que fait CTV. Personne n'était autorisé à venir sur le campus pour filmer des bandes vidéo à moins d'être étudiant. J'étais étudiant. Je gagnais 26 000 $ par an. J'ai payé mes études universitaires en utilisant ce facteur d'exclusion que possèdent la plupart de nos radiodiffuseurs.
    Mais tout ça est en train de changer. Pourrais-je faire la même chose aujourd'hui? Probablement pas.
    Vous parlez des possibilités qu'offrent ces changements. Voyez-vous des possibilités de création d'emplois pour le Canada si nous nous positionnons comme il faut? Quels conseils pourriez-vous nous donner sur le plan de la main-d'oeuvre, sur la manière de tirer parti des nouveaux emplois qui seront créés dans ce secteur?
(1710)
    Beaucoup de sociétés de technologie s'établissent à Toronto maintenant.
    Pourquoi?
    Tout simplement parce qu'il y a là un système d'enseignement vraiment très bon. Je vis et j'habite en Amérique. Je peux vous dire sans hésiter que c'est choquant de voir combien ils connaissent peu le reste du monde.
    Une partie de mon travail quand… Comme je l'ai dit, je commence par dire: « Je suis canadien. Je comprends ce qui se passe dans le reste du monde. Il y a à peu près 1 milliard de gens qui parlent l'anglais sur la planète. C'est votre nouveau marché. »
    Comment attirer des gens comme vous au Canada?
    J'aime le Canada. Je suis tout le temps ici. Ma femme vit ici. Je pense que quelqu'un disait tout à l'heure que c'est une question d'échelle. Si je suis à New York, les gens veulent travailler avec moi, ceux de la vieille école. Les jeunes, ils s'en moquent. Je pourrais me trouver au Minnesota. Je pourrais me trouver à Toronto, ou à Fergus, ça n'a aucune importance.
    La plupart des gens avec qui je traite quotidiennement et qui gèrent nos ateliers Web et font tous nos trucs sont dans le monde entier. Il y en a un qui n'a même pas de maison. Il se qualifie lui-même de « paysan numérique ».
    Des voix: Oh, oh!
    M. Gavin McGarry: Ce sont les gens avec qui je travaille régulièrement.
    Ensuite, je dois travailler avec des gens de la vieille école qui gèrent les réseaux de télévision, qui ont l'habitude de venir s'asseoir dans leur bureau et de faire imprimer leurs courriels pour les lire.
    Ça ne veut pas dire qu'ils sont pires. On pense toujours que les jeunes sont la solution. Ce n'est pas vrai. L'expérience compte pour quelque chose. Je préfère de loin former quelqu'un de 50 ans qui comprend qu'il se passe quelque chose de fondamental plutôt que quelqu'un de 26 ans ou de 23 ans qui sort tout juste du collège. Ce n'est pas comparable.
    Quelle formation serait nécessaire au Canada pour mieux nous équiper?
    Je pense que nous donnons déjà une très bonne formation. Il s'agit simplement de comprendre comment ça marche et ce qu'on peut en tirer.
    Merci beaucoup, monsieur Brown et monsieur McGarry.
    Monsieur Trudeau.
    Je dois dire, monsieur McGarry, que je suis vraiment très heureux de vous voir ici aujourd'hui, comme beaucoup d'entre nous autour de cette table. Cette conversation est passionnante.
    Et, au cas ou vous vous seriez posé la question, je suis le Justin Trudeau de justin.ca.
    Une voix: Quel est votre Twitter?
    M. Justin Trudeau: C'est « justinpjtrudeau », avec 3 500 correspondants. Quelqu'un d'autre a pris « justintrudeau » et j'essaye de le récupérer.
    Vous pouvez le récupérer si vous faites vérifier.
    J'ai fait vérifier.
    Comme « justinp »?
    Comme « pj », et je vais donc changer...
    Quoi qu'il en soit, je n'ai que cinq minutes. Nous en parlerons après, si vous voulez bien.
    Tout à l'heure, des représentants de l'association des auteurs-compositeurs parlaient de droit de licence de 3 $ pour tout service l'accès à Internet à la maison, somme qui irait aux producteurs de musique. Quand vous parlez des 10 $ que quelqu'un utilise pour bloquer son adresse de PI, par exemple, est-ce relié? Pensez-vous qu'ajouter ne serait-ce que 3 $ à une facture mensuelle de 60 $ de PI ne marcherait pas, ou est-ce un vieux concept?
    Avec la prise de contrôle de CTV par Bell, la consolidation est en marche. J'ai des amis qui coupent le fil et disent qu'ils ne veulent plus de téléviseur à la maison. Ma réponse est qu'ils continuent de payer à la même caisse s'ils ont toujours l'Internet par Bell.
    Je ne suis pas contre le fait d'ajouter quelque chose à la facture de PI. Évidemment, je vis aux États-Unis pour une raison: je n'aime pas les taxes…
    Ce ne serait pas une taxe.
    Ce ne serait pas une taxe… Vous savez, cette idée de droit de licence est intéressante. Autrefois, si vous vous en souvenez, on avait ajouté une redevance aux cassettes d'enregistrement. Il serait intéressant de savoir si on a fait des recherches sur l'efficacité de cette méthode et sur ce qu'on a fait de l'argent. Les artistes l'ont-ils vraiment reçu? Certes, on dit que ce serait pour les artistes mais est-ce qu'ils reçoivent vraiment l'argent? Il y a toujours quelqu'un entre les deux quand c'est vraiment créatif.
    À mon avis, si vous voulez parler strictement de créativité, je préfère qu'on donne les outils aux artistes pour qu'ils fassent ce qu'ils veulent, comme ils veulent, en leur laissant monnayer leur production eux-mêmes. S'ils veulent avoir recours à un intermédiaire, c'est leur affaire.
    J'aimerais bien creuser un peu plus cette question de redevance ou de taxe mais je n'ai pas assez d'information pour pouvoir dire si ce serait bon ou mauvais.
    Je comprends.
    Je reviens sur une question de M. Angus. Le modèle canadien de contenu pour la musique, qui existe depuis 20 ou 30 ans, est considéré comme un assez bon succès puisqu'il nous a permis de produire des artistes de niveau mondial, malgré notre petit marché, en forçant les stations de radio à passer un tiers de musique canadienne, ce qui a donné aux musiciens canadiens la possibilité de réussir et d'acquérir des qualités mondiales.
    Évidemment, on ne peut pas appliquer la même chose au numérique mais y aurait-il moyen, selon vous, d'encourager ou de préserver l'idée de contenu canadien — vous avez parlé d'investir dans le créatif et l'éducation — sans la méthode massue des règles de contenu canadien à la radio qu'on ne peut plus envisager dans le monde moderne? Comment pouvons-nous encourager les artistes canadiens à mieux réussir sur la scène mondiale? Est-ce d'ailleurs nécessaire?
(1715)
    Je pense qu'ils le sont déjà. Si vous êtes dans une catégorie spécifique de musique…
    Nous avons une maison à Toronto et une autre à New York. Quand je suis à Toronto, l'une des villes les plus multiculturelles, je peux aller voir un artiste hip-hop jamaïcain si j'en ai envie, ce qui n'est pas le cas à New York, croyez-le ou non. Nous avons l'une des collectivités musicales les plus dynamiques au monde et les gens considèrent vraiment…
    J'ai des amis de New York qui viennent à Toronto pour voir des groupes. Tout passe par Toronto. La scène musicale y est vraiment très dynamique. Mais si vous êtes un rappeur hip-hop jamaïcain, que vous viviez au Canada, au Danemark ou en Suède n'a aucune importance.
    Je vais vous donner un exemple. Un monologuiste qui n'avait pas trop de succès en Amérique, qui ne gagnait pas d'argent, a décidé de mettre certains de ses monologues sur YouTube. En analysant les données, il a constaté qu'il y avait toutes sortes de gens qui regardaient ses vidéos en Suède et au Danemark, en Scandinavie. Il est allé là-bas, il a fait une tournée et il a eu un succès énorme, absolument massif. Je ne me souviens plus de son nom mais il y a plein d'exemples de ce genre. C'est un créneau.
    Je suis canadien et fier de l'être mais je ne veux pas regarder des choses faites par des Canadiens. Je veux regarder des choses qui m'intéressent. S'il se trouve qu'elles ont été faites par des Canadiens…
    Dans beaucoup des réunions où je vais à New York, je dis en partant « au fait, je suis canadien », et je vois alors quatre autres personnes lever la main et dire « je ne le savais même pas ».
    Pour moi, c'est une question de créneau et de passion. C'est ce que l'Internet a libéré. Le fait d'être canadien n'a aucune importance. Nous sommes déjà les premiers au monde. Nous avons un magnifique système d'éducation. Ce que peut faire notre gouvernement, c'est maintenir le mouvement, s'assurer que les Canadiens ont toutes les choses qui sont des droits humains fondamentaux, et tout ira bien.
    Merci, monsieur Trudeau et monsieur McGarry.
    Monsieur Pomerleau.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vais poser seulement une question.
    J'ai beaucoup de difficulté à entrer dans le monde dans lequel vous êtes. Je sais tout de même que vous êtes allé ailleurs pour voir ce qui se faisait dans le domaine de l'informatique de haut niveau, si je peux le dire ainsi. Vous connaissez nos forces et nos faiblesses. Alors, si vous étiez un législateur au Canada pour 10 minutes, que tenteriez-vous de mettre en place pour améliorer la situation qui prévaut ici? Allez-y par priorité.

[Traduction]

    M. Gavin McGarry: Oh là là...
    M. Roger Pomerleau: C'est une bonne question?
    Oui, vous me tuez.
    Des voix: Oh, oh!
    Je sais que je n'y comprendrai rien mais il m'expliquera ça plus tard.
    Des voix: Oh, oh!
    Je suis vraiment désolé de ne pas parler mieux le français. C'est l'une de mes priorités.
    Une voix: Je peux vous dire où vous pouvez apprendre à New York.
    M. Gavin McGarry: D'accord.
    Je suis très gêné, comme Canadien. Je vais en France tous les six mois, à Cannes, et je baragouine le français mais je suis vraiment très gêné de ne pas le parler mieux.
    Quoi qu'il en soit, pour revenir à votre question sur le rôle du législateur, il est très difficile d'y répondre. Je devrais vraiment y réfléchir. Si vous pouviez me donner votre adresse de courriel, je vous enverrai un message car je ne sais pas…
    Nous nous débrouillons assez bien. Le Canada se débrouille bien. Nous avons un bon système gouvernemental. Nous n'avons pas été frappés par la crise des hypothèques parce que nous n'avons pas suivi. Nous ne sommes pas allés en Irak parce que nous n'avons pas suivi. Je pense que ce que nous faisons maintenant…
    Je disais hier à des amis que je venais ici aujourd'hui et ils m'ont dit: « Tu sais quoi? C'est vraiment super qu'ils fassent ça, qu'ils veuillent savoir ce que pensent les gens. »
    Donc, je pense que nous faisons tout bien. En ce qui concerne la législation, j'ai vraiment l'idée d'investissement du FMC, de prendre l'idée de capital-risque, pour le gouvernement. Je pense que c'est nouveau, que c'est innovateur et que c'est unique. Reste à voir si ça va marcher.
    C'est difficile quand le gouvernement met son nez dans des choses comme ça mais c'est ce que nous faisons mieux. Nous sommes un pays socialiste. Nous voulons donner sa chance à tout le monde, n'est-ce pas?
(1720)
     C'est pourquoi nous réussissons, « Walter » Del Mastro.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Charlie Angus: Je tiens à ce que ce soit au procès-verbal.
    Un but à zéro.
    Je veux que ce type me pose des questions.
    Des voix: Oh, oh!
    Une voix: Il ne vient pas de Fergus.
    M. Gavin McGarry: Je trouverai d'où il vient.

[Français]

    Monsieur Pomerleau, avez-vous d'autres questions?
    Non, c'est tout.

[Traduction]

    Je regrette, monsieur Pomerleau, de ne pas avoir de meilleure réponse.
    Je vous donnerai mon adresse courriel.
    D'accord.
    Monsieur Del Mastro.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur McGarry, je dois vous dire très honnêtement — je ne veux pas vous flatter — que vous êtes l'un des meilleurs témoins que j'aie vus ici depuis mon élection en 2006. J'ai énormément apprécié votre témoignage.
    En fait, je serais très heureux — c'est une promesse — de vous inviter à souper à mes frais si vous-même et Jacob Glick êtes intéressés.
    Je connais Jacob.
    Ces conversations sont fascinantes. Vous parlez du futur, et c'est ce qui m'intéresse. Vous nous dites ce qui existe déjà, ce qui est possible et comment le modèle peut évoluer.
    Je pense que nous passons énormément de temps… Je le dis à chaque réunion et je peux aussi bien le répéter aujourd'hui. Je ne cesse de réclamer une révision de la Loi sur la radiodiffusion parce que je pense qu'il est grand temps de la reformuler non pas en fonction de ce qui existait ou de ce qui existe mais de ce qui existera. Le monnayage... Les possibilités de gagner de l'argent sont tellement plus grandes aujourd'hui dans le nouveau modèle qu'elles ne l'ont jamais été dans l'ancien, et je pense que c'est ce à quoi les gens ont du mal à s'adapter.
    Quand Jacob est venu ici, il a parlé du long terme, et je pense que c'est ce que vous dites aussi, c'est-à-dire que l'Internet crée plein de nouvelles possibilités. Vous avez demandé aux étudiants ce qu'ils font s'ils ne gagnent pas 1 000 $ par mois sur YouTube.
    Hier soir, je n'étais pas en forme, je suis rentré chez moi et j'ai regardé des vidéos de musique des années 1980 sur YouTube pendant 3 heures pour me changer les idées. Chaque artiste que j'ai regardé a reçu une redevance de YouTube. Je ne sais pas si les gens savent ça.
    Vous avez été très élogieux au sujet du Canada, ce que j'apprécie mais, en fin de compte, ce que nous voulons faire… J'ai souvent dit que c'est vraiment une question de contenu, à mon avis. C'est le contenu qui est important. Pour sa diffusion, il y a beaucoup de plates-formes. Nous sommes encore fascinés par les stations de radio et de télévision mais, en fait, il y a beaucoup d'autres plates-formes.
    Je pense que ce n'est pas une question de législation. Vous avez parlé aussi des droits électroniques et numériques des artistes. À l'heure actuelle, la raison pour laquelle les artistes perdent ça, à mon avis, est reliée à la manière dont le Fonds des médias du Canada est structuré et à cette relation.
    Pouvez-vous nous dire comment nous pourrions ôter les chaînes des créateurs et des artistes et faire en sorte qu'ils prennent conscience des nouvelles possibilités qui s'offrent à eux? Comment pourrions-nous faire ça?
    Si vous voulez parler de législation, comme M. Pomerleau — et j'ai comme téléchargé ça dans mon cerveau —, voici ce qu'il faut vraiment faire. Si vous voulez faire quelque chose pour moi, ce serait de libérer les données. Faire en sorte que les gens aient accès aux données. C'est ça qui est important.
    Les FSI doivent nous fournir les données. Que font les gens en ligne? On peut le voir. Je le vois tous les jours. Je sais ce que cherchent les gens. J'obtiens tout ça de Google. Mais les FSI au Canada sont des situations très fermées. Vous avez vu l'entente que Verizon et Google ont passée aux États-Unis. Nous parlons beaucoup de neutralité de l'Internet.
    Quelles données voulez-vous qu'ils vous donnent, précisément?
    Je veux tout savoir. Je veux savoir ce que font les gens. Je ne veux pas savoir qui fait quoi — je tiens à ce que la vie privée des gens soit respectée — mais je veux savoir combien de gens de Fergus, en Ontario, regardent YouTube. Combien de gens regardent Metacafe. Combien de gens font des appels téléphoniques avec Skype. Combien de gens utilisent le courriel ou la messagerie instantanée.
    Pourquoi voudraient-ils protéger ces données? Si on peut pas les associer à une personne, pourquoi ne les divulguent-ils pas, selon vous?
    Peut-être parce que personne ne les a jamais demandées. Quand je suis venu ici, j'essayais d'obtenir des données.
    Nous avons essayé de faire quelque chose à Endemol. En 2005, j'avais inventé ce que j'appelais la « carte de l'humeur ». Tout ce que je voulais, c'était savoir quelle était l'humeur des gens dans une ville donnée en voyant quels mots ils utilisaient sur Internet dans la journée. Des mots comme heureux, triste… des mots de base qu'on aurait pu trouver dans les courriels ou les messages instantanés.
    Je n'ai pas pu avoir accès à ça au Royaume-Uni à cause des lois sur la vie privée. Je ne voulais pas savoir qui faisait quoi mais simplement ce que disaient les gens dans les villes afin de savoir si telle ou telle ville était heureuse ou triste. C'était simple, non? Ensuite, on aurait essayé d'étendre ça.
    Donc, quand vous parlez de législation, ça veut dire pour moi comment nous pouvons avoir plus accès aux données. Les Canadiens utilisent tellement l'Internet mais je ne pense pas qu'il me soit possible de voir ce que les gens font réellement. Il y a Nielsen et comScore mais ils utilisent des panels. Moi, je veux voir les uns et les zéros sans enfreindre la vie privée des gens, et c'est quelque chose que vous seuls pouvez faire.
(1725)
    J'ai l'impression que ça pourrait remplacer le formulaire long du recensement, monsieur le président.
    Des voix: Oh, oh!
    J'ai lu quelque chose là-dessus.
     Merci, monsieur Del Mastro.
    Monsieur Angus, vous aviez une brève question sur BitTorrent.
    Oui.
    Vous parliez de BitTorrent et nous sommes passés à autre chose. À la fin des années 1960, la radio FM était la pointe du progrès mais, dans les années 1930, le Congrès l'avait interdite parce que c'était une menace pour RCA qui avait racheté toutes les stations de radio AM. Nous avons passé 40 ans sans entendre la FM puis, d'un seul coup, nous avons tous découvert que c'était extraordinaire.
    Revenons à BitTorrent. Nous savons que l'Internet existe et restera, et aussi que la règle des trois prises est probablement inapplicable au Canada. Cependant, tout le monde dit que BitTorrent, ce sont les méchants, c'est du piratage. Je n'ai jamais entendu personne parler positivement de BitTorrent, même si tout le monde s'en sert.
    Pensez-vous qu'il soit raisonnable que nous, législateurs, imposions des contraintes à BitTorrent? Que fait BitTorrent? Est-ce une force négative ou potentiellement positive?
    Si vous allez sur notre site Web, Jumpwire Media, vous y verrez des « Torrent Tracker Reports » qui vous montreront exactement ce que nous faisons avec BitTorrent. Vous verrez aussi une bande vidéo sur mon blog. J'ai fait une communication d'une heure et demie environ à Cannes et vous pourrez la voir aussi.
    Je connais très bien le PDG de BitTorrent, Eric. Il a fait une communication au festival mondial de la télévision de Banff. C'est là que nous nous sommes rencontrés et que j'ai eu l'idée d'essayer d'obtenir les données de BitTorrent. Je l'ai appelé pour lui dire que je voulais ses données et il m'a répondu: « Je ne garde aucune donnée parce qu'on nous fait un procès toutes les semaines. »
    Les gens commencent à réaliser que la raison pour laquelle les gens partagent du contenu sur BitTorrent — et c'est pourquoi BitTorrent est si intéressant — est d'abord qui n'ont pas à payer pour ça. Vous pouvez obtenir le contenu que vous voulez. C'est le laboratoire ultime. Et il y a à peu près 100 millions de personnes sur la planète qui s'en servent.
    Deuxièmement, nous avons fait des recherches. Nous avons commencé à tout mesurer depuis juin 2008, quand Hulu a été créé. Nous avons mesuré tout le contenu de Fox avant et après et nous avons constaté une baisse d'utilisation de BitTorrent une fois que Hulu est devenu disponible. On voit beaucoup ça.
    J'étais à une table ronde à Ottawa et c'était la même chose. Les gens disaient qu'ils allaient tout le temps sur des sites Web pour voir des vidéos. Ils vont voir MTV. On commence à voir cette évolution.
    Le problème est que les radiodiffuseurs ne s'adaptent pas assez vite. Ça coûte cher de diffuser des vidéos. Ils veulent faire ça en continu. J'ai discuté avec des radiodiffuseurs il y a trois ou quatre ans et je leur ai demandé pourquoi ils n'utilisaient pas BitTorrent.
    BitTorrent est la méthode la plus facile et la plus efficiente pour partager des fichiers, pas du contenu illégal, par Internet. Plus les gens en partagent, plus c'est facile. C'est pourquoi Napster avait décollé. Pour comprendre comment fonctionne BitTorrent, si vous avez un petit bout de fichier sur votre ordinateur, et que trois autres personnes en ont un autre petit bout, ça prendra longtemps à télécharger mais, si vous avez 3 millions de personnes dans le réseau, c'est dispersé.
    Pourquoi aucun pays — c'est peut-être une idée pour le Canada — ne passe-t-il pas un accord avec BitTorrent en disant qu'il va essayer de trouver le moyen de légiférer et de monnayer ça, auquel cas BitTorrent sera autorisé au Canada, mais il faudra payer d'une manière ou d'une autre, et cet exercice...
    Mais je dois préfacer cela en disant… car vous parliez tout à l'heure de comment…
(1730)
    Non, vous avez parfaitement raison. Continuez, n'arrêtez pas maintenant.
    M. Armstrong a fait une excellente remarque tout à l'heure. Il a demandé comment dire à nos partenaires commerciaux, quand le Canada… nous avons changé notre réglementation de la vidéo, nous étions le pirate numéro un de vidéo et de films, car les gens faisaient des vidéos. Anik E a été piraté par un Canadien pour prendre tout l'animé japonais.
    Et, oui, c'est l'équilibre à trouver… mais ça, c'est votre boulot.
    Merci beaucoup.
    En qualité de personne originaire de Fergus, en Ontario, permettez-moi de dire aux membres du comité que jamais Fergus, en Ontario, n'a suscité autant d'intérêt depuis sa fondation par Adam Ferguson en 1834.
    Des voix: Oh, oh!
    Le président: Merci beaucoup d'être venu témoigner.
    La séance est levée.
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