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AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 014 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 4 mai 2010

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Français]

    Bonjour à tous. Nous entamons maintenant la 14e rencontre du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.
    Conformément à l'ordre du jour, nous nous penchons aujourd'hui sur le cas de la Fondation autochtone de guérison.

[Traduction]

    Nous accueillons cet après-midi quatre témoins, qui représentent en fait quatre organismes, dans le cadre de notre étude de la Fondation autochtone de guérison. Je vois que l'un de nos témoins n'est pas encore arrivé. Cela ne nous empêche pas de commencer la séance.
    Je suis persuadée que certaines d'entre vous ont déjà témoigné devant un comité. Pour celles dont c'est la première fois, sachez que nous accordons essentiellement une dizaine de minutes par exposé, et, comme vous le verrez, les membres du comité disposent d'un temps limité pour poser des questions. Après chacun des quatre exposés de dix minutes, les députés poseront une série de questions selon l'ordre prescrit. On a prévu sept minutes pour les questions et les réponses, et nous vous donnerons davantage de précisions à cet égard au fur et à mesure.
    Je souhaiterais accueillir Mme Elizabeth Ford, directrice du département de la Santé et de l'Environnement d'Inuit Tapiriit Kanatami. Elle est accompagnée de M. Jim Cincotta, conseiller principal de direction au département de la Santé et de l'Environnement.
    Nous commencerons par vous, madame Ford, puis les autres témoins poursuivront à tour de rôle.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de m'exprimer devant le comité aujourd'hui.
    Lorsque la Fondation autochtone de guérison a été mise sur pied en 1998, elle avait pour principal objectif de briser le cycle de la violence physique et sexuelle associée à l'expérience des pensionnats indiens au Canada et...
    Madame Ford, si vous prévoyez lire votre déclaration, je vous demanderais de le faire un peu plus lentement qu'à l'habitude pour que l'interprète puisse en faire la traduction simultanée.
    D'accord.
    Lorsque la Fondation autochtone de guérison a été mise sur pied en 1998, elle avait pour principal objectif de briser le cycle de la violence physique et sexuelle associée à l'expérience des pensionnats indiens au Canada et d'améliorer le bien-être des Autochtones. J'aborderai aujourd'hui plus particulièrement la question des Inuits.
    Les programmes de la FADG ont été conçus pour appuyer un processus de guérison holistique et communautaire à l'intention des survivants et de leur famille et pour répondre aux besoins particuliers des Inuits. Le travail était axé sur la collectivité. Les projets financés par la FADG ont été élaborés par des collectivités inuites. Le financement reposait sur la préparation communautaire, et, comme une telle préparation prend du temps, certains programmes commençaient tout juste à démarrer lorsque le financement de la FADG a pris fin le 31 mars.
    La FADG a financé plus d'une trentaine de programmes communautaires dans les quatre régions inuites visées par des revendications territoriales, à savoir la région désignée des Inuvialuits, dans les Territoires du Nord-Ouest; le Nunavut; la région du Nunavik, dans le Nord du Québec; et la région de Nunatsiavut, dans le Nord du Labrador.
    J'aimerais vous parler d'un de ces programmes appelé « Guérir ensemble grâce à nos valeurs et nos cérémonies traditionnelles ». Ce programme fournissait des ressources à 14 collectivités du Nunavut et était géré par la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavut. Ce programme a donné des résultats énormes. Comme il est mentionné dans le rapport d'évaluation de 2009 de la FADG, il a permis d'aider des parents et des enfants à mieux se comprendre les uns les autres. On explique d'ailleurs dans le rapport que nombre de survivants tentaient de trouver des réponses et des solutions aux traumatismes, à la détresse et au dysfonctionnement. Les ateliers organisés dans le cadre du programme leur ont permis d'acquérir les outils nécessaires pour composer avec ces problèmes.
    Ces ateliers offraient un endroit sûr où les jeunes et les aînés pouvaient échanger et raconter leurs expériences, bien souvent pour la première fois. Il y avait des aînés qui n'avaient jamais raconté leurs expériences à des jeunes ou à qui que ce soit d'autre. Les programmes financés par la FADG offraient un milieu sûr, une occasion de parler de ses expériences et d'amorcer un processus de guérison.
    Les Inuits qui ont participé à ces ateliers affirment qu'ils ont une vie plus saine et plus heureuse, mais nombre d'entre eux craignent que l'interruption du financement de la FADG entraîne une augmentation de la consommation de drogue et du taux de suicide chez les survivants. Si vous avez déjà voyagé dans l'Arctique, alors vous savez qu'il n'existe pas vraiment d'autres ressources en santé mentale. Le budget de 2010 du gouvernement fédéral a alloué environ 199 millions de dollars aux survivants des pensionnats indiens, et une partie de cet argent allait à Santé Canada pour qu'il renforce le Programme de soutien en santé pour la résolution des questions des pensionnats indiens, communément appelé le PSS.
    Le PSS offre un soutien à la santé mentale et au mieux-être aux anciens élèves des pensionnats indiens et à leur famille, quel que soit leur statut ou lieu de résidence, mais seulement s'ils sont admissibles au Paiement d'expérience commune et qu'ils ont présenté une demande de règlement. Certains anciens élèves ne sont pas admissibles au Paiement d'expérience commune, notamment les Inuits vivant au Nunatsiavut. Cela signifie que le Nunatsiavut ne sera pas doté de l'infrastructure du PSS qui lui aurait permis d'aider les survivants dans le cadre de la Commission de vérité et de réconciliation.
    Le PSS complémente les programmes offerts par la FADG et fournit des services à nombre d'Inuits voulant obtenir un soutien. Toutefois, les programmes gérés par la FADG étaient différents à quelques égards. D'abord, ils étaient axés sur la communauté, tandis que le PSS s'adresse à des personnes. Le financement de la FADG contribuait à mettre en place des ressources de guérison au sein des collectivités, tandis que le PSS fait appel à des conseillers qui viennent du sud. Lorsqu'ils veulent se prévaloir des services associés au PSS, les Inuits doivent composer un numéro 1-800 où les services sont uniquement en français et en anglais, ce qui limite considérablement l'accès pour les survivants dont la langue maternelle est l'inuktitut.
    Comme le souligne le directeur exécutif du centre Tukisigiarvik d'Iqualuit, les Inuits qui souhaitent obtenir les services associés au PSS doivent téléphoner au coordonnateur régional du Nunavut, qui se trouve à Whitehorse, à trois fuseaux horaires de distance. Si on compare les deux modèles, on constate que la FADG offrait aux Autochtones des programmes qui complémentaient le PSS de Santé Canada.
    Je crois qu'il y a de la place pour les deux modèles de prestation de services aux Inuits. Les résultats de l'évaluation du FADG révèlent que l'utilisation conjointe des deux ensembles de programmes permettait d'obtenir d'excellents résultats.
    Au Nunavut, la FADG a financé des programmes à Pangnirtung, Clyde River et Iqaluit. Ces trois collectivités ont utilisé les fonds alloués par la FADG pour renforcer et intégrer les programmes de guérison au sein des centres de santé mentale. Ce réseau intégré de services de soutien à la guérison donnait aux Inuits l'occasion de se retrouver dans un milieu où ils pouvaient acquérir des outils pour faire face à leurs problèmes de dépendance et aux traumatismes.

  (1535)  

    Des aînés passaient prendre un café et s'entretenaient souvent avec les Inuits qui attendaient de recevoir des services. Au cours de ces conversations amicales, les aînés contribuaient grandement au processus de guérison d'autres Inuits. Ces endroits — gérés par des Inuits et où le personnel parlait l'inuktitut — créaient un sentiment d'appartenance, de fierté, d'indépendance et d'autodétermination. Ils favorisaient l'établissement de liens de confiance entre le personnel de la FADG et les groupes communautaires administrant les programmes de la FADG.
    La FADG était progressiste et permettait aux Inuits de prendre en main leur guérison et leur vie. Son financement était essentiel à la santé et au mieux-être des Inuits. Mais certains des programmes qui venaient tout juste d'être mis en place ont subitement pris fin, et, pour nombre de survivants, le processus de guérison qui venait tout juste de s'amorcer a été brusquement interrompu. C'est vraiment désolant.
    Le message que je souhaite vous transmettre aujourd'hui, c'est que, si nous voulons véritablement répondre aux besoins en santé mentale des Inuits, nous devons absolument fournir un financement durable aux programmes de mieux-être communautaire.
    Merci.
    Merci, madame Ford. Nous reviendrons à vous pour les questions lorsque les exposés seront terminés.
    C'est maintenant au tour de Mme Yvonne Rigsby-Jones, qui représente la Société Tsow-Tun Le Lum. Mme Rigsby-Jones est directrice exécutive de cet organisme.
    Allez-y, madame Rigsby-Jones; vous avez 10 minutes.
    Chers membres du comité, je vous remercie de me donner le privilège de témoigner ici aujourd'hui en appui à la Fondation autochtone de guérison.
    J'exprime ma gratitude aux Algonquins de la région pour m'avoir permise d'être ici aujourd'hui.
    Comme le président l'a mentionné, je m'appelle Yvonne Rigsby-Jones. Je suis membre de la première nation Snuneymuxw et je me voue au processus de guérison de nombre de nos membres qui bénéficient des conseils de nos aînés et d'une approche réunissant des méthodes de traitement traditionnelles et occidentales.
    Je suis directrice exécutive du centre de traitement Tsow-Tun Le Lum, situé sur l'île de Vancouver, en Colombie-Britannique. Au cours des 20 dernières années, nous avons fait œuvre de pionnier au chapitre de la guérison des anciens élèves des pensionnats indiens.
    Toutefois, aujourd'hui, je témoigne non seulement en ma qualité d'administratrice, mais également en tant qu'épouse d'un survivant, mère d'enfants qui ont subi les répercussions intergénérationnelles des traumatismes et grand-mère. Je suis tout à fait déterminée à créer un milieu exempt de violence pour nos enfants, qui le méritent pleinement.
    Mon époux, John, est un ancien élève du pensionnat indien de Port Alberni. Au début des années 1990, il a participé à l'une des premières poursuites intentées contre un surveillant de dortoir au pensionnat de Port Alberni.
    En vérité, personne ne comprend bien la situation. Le gouvernement actuel remplit les obligations prévues dans le règlement hors cour, et je le reconnais, mais je constate également qu'il faut continuer d'offrir des programmes communautaires et culturellement adaptés. Nombre de nos anciens résidents et de nos résidents actuels sont tout à fait incroyables. Ils font preuve de résilience et de force jour après jour pour faire face à la vie.
    Nous constatons les effets positifs des programmes financés par la FADG, qui ont été soulignés dans la récente évaluation de la Fondation par le ministère des Affaires indiennes. L'expérience du passé nous a appris que l'absence de programmes semblables expose de nouveau les collectivités aux méfaits, ce qui crée une réaction en chaîne où il y a une hausse des méfaits, des sommes dépensées en services d'intervention — comme l'hospitalisation et la protection de l'enfance — et du nombre de cas de violence conjugale.
    En raison du travail de la Commission de vérité et de réconciliation et du nombre d'audiences qui doivent encore avoir lieu, les souvenirs des anciens élèves remonteront à la surface. Ils revivront certaines situations qui leur causeront beaucoup d'anxiété et, tout comme les membres de leur famille, ils réagiront à de nombreux éléments déclencheurs.
    Les activités de recherche de Bessel van der Kolk, psychologue de renommée internationale, ont fait ressortir que les retours dans le passé ne s'apparentent pas seulement à des mauvais rêves; ils amènent la victime à revivre entièrement l'expérience traumatisante du passé et à ressentir de nouveau les sentiments qu'il avait alors éprouvés. La violence physique et sexuelle compte pour une grande part des séquelles des pensionnats indiens et faisait partie intégrante des problèmes visés par les programmes de la FADG.
    Comme le but de ma présence aujourd'hui est d'aborder la question du manque de financement pour la FADG, j'ai recueilli de l'information tirée de quelques projets de recherche pour démontrer qu'il est rentable de continuer à financer les programmes communautaires autochtones. Je tiens également à souligner que, pour nombre de survivants des pensionnats indiens, il est difficile de faire confiance à des non Autochtones, vu les nombreuses expériences négatives qu'ils ont vécues, et cette méfiance est une caractéristique qu'ils ont transmise à leurs enfants. Par conséquent, l'existence de programmes communautaires, les services offerts par Santé Canada et la présence de thérapeutes permet de construire des ponts qui améliorent les relations des Autochtones avec les non Autochtones.
    Santé Canada offre différents services. Il s'agit de services rémunérés à l'acte, et ils ne sont pas toujours adaptés aux Autochtones ou facilement accessibles. Le personnel du Programme de soutien en santé peut offrir une aide initiale et un aiguillage, mais il n'est pas censé répondre aux besoins psychologiques à long terme.
    J'ai appris très tôt dans ma formation qu'une personne ayant été victime d'agression sexuelle dans l'enfance a besoin de suivre une thérapie de façon soutenue pendant au moins trois ans pour se rétablir. Si on ajoute les traumatismes liés à l'expérience dans un pensionnat indien et la perte d'identité, on constate que les problèmes auxquels font face les survivants et leur famille sont extrêmement complexes.
    L'affectation de ressources limitées et le fait de continuer à financer les services de placement d'enfants en familles d'accueil, l'incarcération et les initiatives relatives à l'itinérance ne constituent pas les meilleures façons d'employer l'argent des contribuables canadiens.

  (1540)  

    Les chercheurs du Cedar Project, en Colombie-Britannique, affirment qu'ils mènent des activités de recherche dans un but précis. Leurs travaux sont publiés dans le milieu universitaire, et leur crédibilité comme chercheurs est reconnue. Dans l'une de leurs récentes études, ils déclarent que les traumatismes sexuels continueront d'avoir une incidence sur la victime, sa famille et sa collectivité jusqu'à ce qu'elle soit traitée de façon efficace au moyen de programmes axés sur le client et adaptés à sa culture.
    Les antécédents d'agression sexuelle sont liés à de nombreux problèmes de santé, y compris au chapitre de la santé mentale, de la sexualité et de la dépendance aux drogues. J'ai également travaillé dans le cadre de l'entente conclue avec le Service correctionnel du Canada, qui avait organisé de nombreuses réunions portant sur ce travail.
    Les données récentes concernant les jeunes en détention révèlent que, actuellement, plus de 50 p. 100 des jeunes détenus en Colombie-Britannique sont autochtones. D'ailleurs, dans une évaluation récente, le Service correctionnel du Canada fait état de la surreprésentation des Autochtones dans les établissements correctionnels fédéraux.
    Permettez-moi de citer le Dr Stephen Duckett, président-directeur général des Services de santé de l'Alberta, qui, en 2009, a déclaré ceci:
La science de l'économie est perçue de toutes sortes de façons. Parfois, on la réduit à une compression irréaliste des coûts, mais je ne crois pas que les personnes ici présentes retiendraient une telle définition. Comme vous le savez tous, l'économie consiste à savoir comment affecter des ressources limitées...
    En continuant de financer la FADG, on peut résoudre de bien d'autres façons de nombreux problèmes de coûts qui touchent le réseau des soins de santé. Il y a beaucoup de personnes, environ 1 700 jusqu'à maintenant, qui ont suivi avec succès le traitement offert dans notre centre. Nous ne représentons qu'une des nombreuses initiatives ayant contribué à la guérison communautaire rendue possible par la FADG.
    Au centre Tsow-Tun Le Lum, nous faisons ce travail depuis tant d'années que nous avons vu trois générations d'une même famille participer aux programmes de guérison. J'ai personnellement travaillé auprès de personnes incarcérées. L'un de nos anciens résidents n'a jamais regardé en arrière. Il est maintenant à l'âge adulte et travaille pour un organisme fédéral, après être passé par le système correctionnel pour jeunes au système provincial, puis au système fédéral. Il n'a eu aucun démêlé avec la justice depuis le début des années 1990. Et c'est un exemple parmi tant d'autres.
    Comme les pensionnats ont existé pendant plus de 100 ans, il semble désespérément inadéquat de financer les programmes de guérison pendant une si courte période. Cela prend des générations avant de briser le cycle de la violence. J'ai une petite-fille de six ans, et je suis la seule de ses grands-parents qui n'a pas fréquenté un pensionnat. Nous avons un employé de 40 ans qui a fréquenté un pensionnat. Les conséquences intergénérationnelles ne sont pas chose du passé: elles sont encore bien présentes aujourd'hui.
    Les programmes de la FADG ne sont pas une solution universelle. Ils reflètent clairement la détermination des membres de nos collectivités à se prendre en main et à travailler ensemble pour apporter des changements qui favoriseront le mieux-être et la paix dans toute la collectivité. Pour nombre de survivants et de membres de leur famille, il est difficile de ne plus toucher à la drogue ou de rester sobre tant qu'ils ne se sont pas rétablis du traumatisme qu'ils ont vécu.
    Pour nombre de personnes chargées d'allouer des fonds, les statistiques ne sont que des chiffres; pour les membres de nos collectivités, ces chiffres représentent nos soeurs, nos frères, nos parents ou nos enfants.
    La FADG a une mine de travaux de recherche documentant les approches efficaces. Pour nous, il est très important d'être en mesure de continuer de guérir nos collectivités dans un milieu sûr et adapté à notre culture. Si moins d'enfants sont placés dans des familles d'accueil, si moins de personnes sont incarcérées et si moins d'enfants grandissent entourés de violence familiale, il en résultera des économies de coûts importantes pour le gouvernement dans d'autres domaines.
    Pendant que je préparais mon exposé, j'ai perdu deux ou trois paragraphes de statistiques. Ils doivent être en train de flotter dans le cyberespace ou quelque part dans mon ordinateur. Mais, à la lumière du projet que nous avons réalisé...

  (1545)  

    Est-ce que mon temps est écoulé?
    On change le canal de l'interprétation. Veuillez seulement attendre un instant.

[Français]

    Ça va? Merci beaucoup.

[Traduction]

    D'accord. Vous pouvez terminer votre déclaration, madame Rigsby-Jones.
    J'ai examiné le modeste projet de recherche que la Société Tsow Tun Le Lun a réalisé il y a quelques années. Nous avions évalué des personnes qui suivaient le traitement depuis de nombreuses années et qui n'étaient pas toutes rendues au même point dans le processus de rétablissement. Nous avions constaté que la hausse du nombre d'années d'études postsecondaires était associée à une baisse marquée du taux d'hospitalisation. En outre, le taux d'incarcération est passé de 56 p. 100 à 13 p. 100 dans l'échantillon que nous avons examiné. Je crois que vous savez tous ce qu'il en coûte d'incarcérer des personnes et de les placer en famille d'accueil. Nous disposons également de statistiques sur le nombre de personnes qui ont retrouvé la garde de leurs enfants. Tous ces éléments font vraiment ressortir toute la nécessité de poursuivre ce travail dans nos collectivités.
    Je vous remercie beaucoup de m'avoir écoutée.
    Merci beaucoup, madame Rigsby-Jones.
    Nous accueillons maintenant Nakuset, directrice exécutive du Foyer pour femmes autochtones de Montréal. Elle est accompagnée de Mme Carrie Martin, coordonnatrice des évaluations. Je vois que nous accueillons aussi un troisième représentant de cet organisme. C'est merveilleux que votre bébé soit avec nous. Nous en sommes ravis.
    Vous pouvez y aller, Nakuset. Vous disposez de dix minutes pour faire votre exposé. Il y aura un autre exposé de 10 minutes après cela. Ensuite, les membres pourront poser des questions. Nous vous le ferons savoir lorsqu'il restera quelques minutes.

  (1550)  

    J'aimerais tout d'abord remercier le comité permanent de m'avoir invitée à témoigner au nom du Foyer pour femmes autochtones de Montréal. Ma collègue et moi-même sommes très heureuses d'être ici.
    Je m'appelle Nakuset, et je suis directrice exécutive du Foyer pour femmes autochtones de Montréal. Notre mission consiste à offrir un milieu sûr et positif où les femmes autochtones et leurs enfants peuvent renforcer leur identité culturelle, leur estime de soi et leur indépendance.
    Selon l'ouvrage intitulé Shingwauk's Vision, les Jésuites ont commencé à expérimenter l'enseignement à de jeunes Indiens dans les pensionnats après 1636. Le Foyer pour femmes autochtones a mis sur pied le projet « Préparons la septième génération » et a reçu du financement de la FADG en octobre 1999. Comme le foyer était au courant des agressions horribles qui ont eu lieu dans les pensionnats, notre projet visait à offrir un soutien à la guérison aux personnes touchées par les effets dévastateurs des traumatismes intergénérationnels découlant de l'expérience dans les pensionnats.
    Les agressions qui ont été commises étaient de nature sexuelle, spirituelle, physique, émotionnelle et psychologique. Ces agressions sont lourdes de conséquences: éclatement des familles; abandon de la culture, de la langue, des traditions et des cérémonies; sentiments intériorisés de honte et de colère; problèmes de dépendance chronique; manque d'autonomie; honte de ses croyances et de sa culture; méfiance à l'égard de l'autorité; et, enfin, agression physique contre les enfants et d'autres personnes vulnérables. Et ce ne sont là que des exemples.
    La connaissance de ce sombre chapitre de l'histoire, qui hante encore notre peuple aujourd'hui, nous a amenés à concevoir un programme complet de guérison qui vise à régler la majorité des problèmes que je viens tout juste de mentionner.
    Nos programmes s'inspiraient fortement des enseignements de...
    Nakuset, veuillez ne pas vous en offusquer, mais pourriez-vous vous éloigner un peu du micro. Il est très sensible et capte bien votre voix. On procède à la traduction simultanée de votre exposé, alors vous pouvez parler à une vitesse normale. Vous prendrez les dix minutes qui vous sont accordées, et tout ira bien.
    D'accord.
    Nos programmes s'inspiraient fortement des enseignements de la roue de la médecine qui sont axés sur la guérison physique, mentale, spirituelle et émotionnelle. Dans le cadre du projet « Préparons la septième génération », nous avons créé des postes en tenant compte des besoins des survivants, pour contrer les effets de l'expérience dans les pensionnats et de la rupture avec la culture, les enseignements et le processus de guérison.
    Les survivants des pensionnats n'ont acquis aucune compétence interpersonnelle et familiale, et l'absence de soutien émotif et d'accompagnement spirituel a eu des effets dévastateurs sur leur rôle parental. Pour citer J.R. Miller: « On a souvent déclaré que le manque de compétences parentales était un problème majeur touchant encore aujourd'hui les familles et les communautés autochtones. L'éclatement des familles — qui entraîne de la violence conjugale et de la violence à l'endroit des enfants, l'abandon du foyer, l'alcoolisme et la toxicomanie — continue de faire des ravages dans les communautés autochtones. »
    Par conséquent, au foyer, nous avions mis en place différents postes. Il y avait d'abord l'intervenante auprès des familles. Sa fonction principale était d'aider les mères à acquérir les diverses compétences parentales — par exemple, l'hygiène, la nutrition, la surveillance des enfants, la création d'un milieu sain, les liens affectifs, etc. — au moyen d'ateliers hebdomadaires, de séances de thérapie individuelle et familiale et de services d'aiguillage. L'intervenante se chargeait également d'organiser des activités pour les enfants et pour les familles, d'offrir du counselling et des ateliers éducatifs et de planifier des sorties et les repas.
    Quelle était l'incidence du programme? Il permettait d'enseigner aux clients les compétences parentales de base qui se sont perdues en raison des pensionnats. Il renforçait la cellule familiale, encourageait les mères à être autonomes et amenait les participants à prendre des décisions éclairées au sujet de la nutrition et de l'hygiène et à éprouver un sentiment d'identité et d'appartenance au sein d'une famille.
    Notre équipe comptait également une coordonnatrice de programmes qui préparait le calendrier mensuel des activités, qui distribuait, recueillait et analysait les formulaires d'évaluation concernant toutes ces activités, qui organisait les activités de mieux-être, les cérémonies et les retraites dans les sueries, qui planifiait les séances de thérapie et de guérison traditionnelle, et qui organisait les cercles de la parole et les cercles de guérison, les ateliers d'enseignements et d'artisanat traditionnels, les pow-wow, les ateliers éducatifs, les fêtes traditionnelles et les séances de tambour. Elle s'occupait également de rédiger le bulletin mensuel et de tenir des réunions bimestrielles avec les résidents. De cette façon, elle obtenait les commentaires des clients et faisait en sorte qu'ils soient satisfaits des programmes.
    Nos programmes permettaient aux clients de recourir à des méthodes de guérison traditionnelles pour composer avec les séquelles des pensionnats indiens et pour renouer avec leur culture et leurs traditions. Ils étaient initiés aux enseignements culturels, par exemple, les rites de passage et les rôles traditionnels des hommes et des femmes, et pouvaient tenter de régler des problèmes comme les dépendances chroniques, le sentiment de honte et les dysfonctionnements.
    Nos clients pouvaient également compter sur les services d'une coordonnatrice des retraites dans les sueries. Cette employée ne travaillait que l'été, et elle organisait les retraites à l'extérieur du foyer, à Saint-Adolphe-d'Howard. Il s'agissait de retraites dans les sueries. Les participants assistaient à des cérémonies, des ateliers d'artisanat traditionnel et des cours d'autodéfense et faisaient de la randonnée. Il y avait aussi des activités pour les enfants et les familles. Les participants pouvaient alors renouer avec la nature et leur spiritualité, obtenir un soutien social et retrouver l'équilibre intérieur et l'harmonie.
    Nous avions également une conseillère en violence sexuelle. Elle s'occupait de l'intervention en cas de crise, de l'écoute bienveillante, de l'aiguillage ainsi que des ateliers d'information et d'éducation. Les clients pouvaient s'affranchir des effets de la violence sexuelle intergénérationnelle, briser le cycle de la violence sexuelle, promouvoir la justice et la guérison et se libérer de la honte et des dysfonctionnements.
    Nous comptions également dans nos rangs une superviseuse clinique. Elle se chargeait d'organiser des ateliers à l'intention de tout le personnel du foyer, de superviser le traitement des dossiers des clients et de fournir des directives à tous les conseillers. Cela a donné lieu à la mise en œuvre d'un modèle de guérison holistique qui était appliqué aux plans de guérison de l'ensemble des clients.
    Nous avions également une coordonnatrice des conférences. Elle organisait une conférence annuelle portant sur tous les aspects de la guérison des traumatismes vécus dans les pensionnats et informait la communauté autochtone urbaine des activités qu'offrait le foyer au chapitre de la guérison. Il en résultait une sensibilisation accrue à l'égard des problèmes liés aux pensionnats indiens, et cela permettait à la collectivité d'être mieux outillée pour aider les survivants à se libérer de la honte et des dysfonctionnements.

  (1555)  

    Les ateliers durent généralement trois jours. Ils sont très courus. Des aînés venant de partout y participaient.
    Le dernier poste, coordonnatrice des évaluations, est celui qu'occupe maintenant Mme Carrie Martin. Elle a été chargée d'évaluer le projet « Préparons la septième génération » et de superviser la clôture de tous les rapports et dossiers.
    Notre travail nous a permis d'avoir une meilleure compréhension de la nécessité d'offrir à long terme des programmes et des techniques de guérison traditionnelle. Faute de ces programmes essentiels, les clients n'auront plus accès à des méthodes de guérison traditionnelle et culturelle. L'abandon de ces programmes a eu des répercussions partout au Québec. Les collectivités éloignées avaient l'habitude d'orienter les clients vers nos services. Or, nous ne pouvons plus leur offrir ces programmes de guérison.
    Les pensionnats sont apparus il y a près de 350 ans. Nous croyons fermement que dix années de travail sur le plan de la guérison nous ont à peine permis de commencer à nous attaquer aux multiples problèmes découlant de l'expérience vécue dans les pensionnats. Par conséquent, nous vous exhortons à rétablir le financement de la FADG.
    Dans l'esprit de la guérison, nous vous remercions.
    Merci, Nakuset.
    Je tiens également à souligner l'écoute attentive de notre jeune témoin ici présent. Il est un bon exemple à suivre pour tous les députés.
    Nous allons maintenant entendre Mme Madeleine Dion Stout. Mme Dion Stout est membre du conseil d'administration de la Commission de la santé mentale du Canada.

  (1600)  

[Français]

    Madame, vous disposez de dix minutes pour faire votre présentation.

[Traduction]

[Français]

    J'aimerais souhaiter un bon après-midi à tout le monde,

[Traduction]

à vous, chers membres du comité permanent, et bonjour aux autres témoins.
    Je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui pour vous parler brièvement du travail de la Commission de la santé mentale du Canada et de la façon dont les organismes autochtones, y compris la FDAG, contribuent aux efforts de la commission.
    D'abord, je vais faire une petite mise en contexte. La Commission de la santé mentale du Canada est un joueur relativement nouveau sur la scène nationale. Elle a été créée en 2007 par le gouvernement fédéral, dans la foulée de l'étude la plus importante jamais réalisée au pays sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie au Canada.
    La commission a pour mandat d'attirer l'attention de la population nationale sur les problèmes de santé mentale et de travailler à améliorer la santé et les conditions sociales des personnes atteintes de maladies mentales. Fait important, contrairement à la FADG, la Commission de la santé mentale du Canada n'assure pas la prestation de services et de programmes, mais agit comme catalyseur du changement.
    La commission a, entre autres, pour objectif d'élaborer une stratégie en santé mentale pour le Canada. Vous vous demandez peut-être si nous en avons vraiment besoin d'une. Je vous répondrais que, bien qu'il y ait des milliers de personnes qui tentent d'améliorer la qualité des soins en santé mentale au Canada, la dure réalité est qu'on ne répond pas de façon adéquate à nombre des besoins pressants des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale.
    Un des autres aspects qui a une incidence sur l'élaboration d'une stratégie en santé mentale pour le Canada est le fait que le pays compte une population très diversifiée. Il est important que ce travail ne mène pas seulement à un beau document qui se retrouve sur une tablette. Il doit s'agir d'une initiative concrète, qui est significative pour tous les Canadiens, à toutes les étapes de leur vie, d'un océan à l'autre, pour les enfants et les jeunes, les aînés, les anglophones, les francophones et les immigrants, et, évidemment, pour les premières nations, les Inuits et les Métis du Canada. Une stratégie universelle n'aurait aucun sens; je suis persuadée que vous seriez tous d'accord avec moi.
    En 2009, après de vastes consultations publiques, nous avons publié un document intitulé Vers le rétablissement et le bien-être. Ce document fournit le cadre de ce qui deviendra la toute première stratégie en santé mentale du Canada.
    Je tiens à souligner que ce document est le fruit d'une collaboration entre la Commission de la santé mentale et le Comité consultatif des Premières nations, des Inuits et des Métis, l'un des comités consultatifs qui s'appliquent à orienter les efforts de la commission. Préalablement, nous avons consulté des organismes autochtones nationaux, et des personnes et des intervenants autochtones de tout le pays, y compris du Nord, ont eu l'occasion de donner leur avis dans le cadre d'un processus de consultation en ligne. À l'évidence, ce ne sont pas seulement des gens du Nord qui ont participé aux consultations: le processus était ouvert à tous. Tous les Canadiens pouvaient transmettre leurs opinions. L'information obtenue auprès de la FADG et de ses divers intervenants a également enrichi ce document.
    Le cadre, ayant résulté de tout ce travail de consultation, présente une vision à l'égard du rétablissement et du bien-être de tous les Canadiens qui est holistique, est axée sur l'environnement, l'autodétermination, l'identité culturelle, la guérison, l'espoir, le mieux-être et le développement communautaire et accorde de l'importance au savoir traditionnel et coutumier. Ce que j'aime dire au sujet de la Commission de la santé mentale, c'est que, pour nous, la tradition est plus moderne que ce qui est moderne aujourd'hui, et c'est comme ça que les choses doivent être dans une économie en récession.
    Je vous explique tout cela parce que j'espère vous montrer à quel point la participation des premières nations, des Inuits et des Métis est importante pour le travail de la Commission de la santé mentale.
    J'ai déjà mentionné le travail du Comité consultatif des Premières nations, des Inuits et des Métis. Ce comité veille à ce que la composante culturelle fasse partie intégrante des soins en santé mentale au Canada. Ils s'appliquent également à élaborer un code de déontologie prévoyant la façon dont on doit fournir des soins de santé de première ligne, particulièrement dans le domaine de la santé mentale et des problèmes de dépendance, où certains des Autochtones les plus vulnérables ont besoin d'aide.

  (1605)  

    En outre, la Commission de la santé mentale du Canada réalise actuellement un projet de recherche sur l'itinérance dans cinq villes du pays: Moncton, Montréal, Toronto, Winnipeg et Vancouver. On estime qu'il y a entre 150 000 et 300 000 itinérants au Canada, dont la moitié serait également atteint d'une maladie mentale.
    Dans chacune de ces villes, on cible un groupe précis pour comprendre comment mieux aider les itinérants également aux prises avec des problèmes de santé mentale. À Winnipeg, le projet mise sur une approche holistique pour contrer le phénomène de l'itinérance et des problèmes de santé mentale chez les Autochtones urbains. Ce modèle propre à Winnipeg comprend des services s'inspirant des enseignements autochtones traditionnels.
    Je voudrais maintenant faire quelques commentaires sur le travail de la FADG, à la lumière de mon expérience et de mes connaissances personnelles. À bien des égards, je suis le visage et la voix des marginaux que la Commission de la santé mentale tente vaillamment de mettre au cœur de son travail, car, en tant que survivante d'un pensionnat, je vis moi aussi avec les séquelles de cette expérience.
    Lorsque notre premier ministre, Stephen Harper, a prononcé des excuses historiques au sujet des torts infligés aux membres des premières nations, des Inuits et des Métis, à leur famille et aux collectivités par suite des traumatismes vécus dans les pensionnats, la population du Canada a observé un moment de silence en hommage aux victimes, tandis que les premières nations, les Inuits et les Métis se sont tenus debout fièrement, confiants et le regard tourné vers l'avenir, dans les endroits où nous jouons, travaillons et prions, partout au pays.
    Les aînés nous apprennent qu'il faut confier à l'univers uniquement les choses dont nous voulons être redevables et uniquement celles que nous voulons voir se réaliser. Les excuses du premier ministre ont été l'un des plus beaux moments de l'histoire du Canada. Mais ses mots et ses actions louables — si je peux me permettre d'utiliser ce terme — seraient restés lettre morte si la FADG n'avait pas au préalable encouragé, entretenu et encadré la sensibilisation au sujet des séquelles et des répercussions de l'expérience des pensionnats grâce à ses activités de recherche et de financement.
    Le degré de participation élevé des premières nations, des Inuits et des Métis aux projets de la FADG montre également à quel point les Autochtones sont déterminés à instaurer des changements qui permettront de renforcer l'identité personnelle, familiale et nationale.
    Nous pouvons continuer sur cette lancée en renouvelant le financement de la FADG.
    D'abord, la FADG doit avoir la possibilité d'examiner et de concevoir des indicateurs de guérison comme les taux de violence physique et sexuelle, le nombre d'enfants placés dans des familles d'accueil, le nombre de personnes incarcérées et le taux de suicide. La FADG n'a pas été en mesure de compiler ces données parce qu'elle devait fonctionner sur un horizon de financement très court.
    La FADG et la Commission de la santé mentale peuvent collaborer à la tenue d'un nouveau dialogue sur la santé mentale et le mieux-être, car elles partagent des croyances comme la suivante: « Nous sommes maintenant guéris parce que nous savons ce que sont l'espoir, le rétablissement, le sentiment d'appartenance et d'utilité et la confiance. »
    Deuxièmement, nous pouvons sentir nos cœurs battre, ce qui nous rappelle que nous sommes tous les mêmes.
    Troisièmement, nous rayonnons parce que nous croyons que la vie vaut la peine d'être vécue et qu'il vaut la peine d'investir dans la vie et que nous avons tous la capacité de le faire.
    Quatrièmement, nous profitons du moment présent. Nous sommes conscients que, lorsque le présent s'évanouit, nous pouvons encore embrasser l'avenir. Il n'est pas derrière nous.

  (1610)  

    La Fondation autochtone de guérison a fait le travail sur lequel s'appuiera la Commission de la santé mentale du Canada, c'est-à-dire protéger nos identités culturelle et ethnique, renforcer la cohésion sociale, non seulement entre nous, les membres des premières nations, les Inuits et les Métis, mais aussi avec les autres Canadiens — et je crois que nous avons réussi, en partie, à tisser de meilleures relations avec eux —, et faire la promotion de la santé mentale et de la prévention des maladies mentales auprès des premières nations, des Inuits et des Métis.
    La Fondation autochtone de guérison, en permettant à des survivants comme moi de s'exprimer, en valorisant notre optimisme, notre pragmatisme, notre capacité d'agir et notre résilience, nous a beaucoup encouragés à regarder vers l'avenir et à faire partie des stratégies d'action, dont certaines, et non les moindres, sont exécutées en ce moment même par la Commission de la santé mentale du Canada.
    Parce que la Fondation autochtone de guérison est passée par là, nous ne sommes plus autant des étrangers sur nos terres. Nous voulons récupérer nos enfances perdues et faire face à nos problèmes de santé mentale. Nous envisageons le monde d'un point de vue autochtone, entre autres parce que la Fondation autochtone de guérison nous a permis de le faire.
    Merci beaucoup.
    Je vais m'arrêter là. Je n'avais plus que des commentaires généraux à faire à partir de maintenant.

[Français]

    Merci beaucoup à tout le monde.
    Merci, madame Dion Stout.
    Nous allons maintenant passer aux questions des députés.
    Monsieur Russell, vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Bonjour, monsieur le président, et merci.
    Certains de mes collègues affirment que, si j'adopte mon rythme très rapide, vous essayerez probablement de trouver une autre fréquence sur le fil de traduction pour parvenir à véritablement comprendre ce que je dis.
    Je veux simplement souhaiter la bienvenue à chacun d'entre vous et vous remercier de vos interventions et des mesures vigoureuses que vous prenez pour défendre le travail de la Fondation autochtone de guérison. Vos témoignages soulignent à quel point ce travail est capital pour de nombreux membres de nos collectivités et, certainement, pour les collectivités en tant que telles.
    Je veux aussi certainement souhaiter la bienvenue à cette jeune témoin, qui — d'après ce que j'ai compris, en tout cas — s'oppose sûrement elle aussi à la décision du gouvernement conservateur de mettre fin au financement de la Fondation autochtone de guérison. À tout le moins, c'est ce que je comprends.
    J'aimerais poser quelques questions, et j'aimerais que l'on s'attarde plus particulièrement à la question des Inuits.
    Bon nombre de ces collectivités sont isolées. Évidemment, je viens du Labrador. Nous avons le Nunatsiavut, qui veut dire « notre beau pays ». Vous avez fait un commentaire intéressant: vous avez dit que, au cours des dernières années, nous avions, au Nunatsiavut, un programme de la Fondation autochtone de guérison, mais il n'y avait aucun paiement d'expérience commune parce qu'il y a encore des procédures en cours, il y a des négociations et des pourparlers en cours pour déterminer s'ils seront, au bout du compte, visés par la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens. Une partie de la guérison aura donc eu lieu puisque les collectivités se sont préparées et ont assumé cette partie — leur responsabilité. Maintenant, vous dites que, si nous abolissons la Fondation autochtone de guérison et si nous décidons, même, d'adopter le programme de soutien en santé en établissement, ils n'auront alors accès à aucune guérison, ce qui signifie qu'il y aura là un écart important puisque le programme est offert seulement à ceux qui recevront des paiements d'expérience commune ou qui seront visés par la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens. C'est donc une répercussion.
    L'autre répercussion, d'après ce que je vous ai entendu dire, c'est qu'il y a très peu de ressources, voire aucune, mis à part ce qui a été mis sur pied au cours des dernières années dans bon nombre de collectivités et de hameaux inuits du Nunavut, et que l'assemblée législative du Nunavut a adopté à l'unanimité une résolution selon laquelle il faudrait conserver la Fondation autochtone de guérison.
    Je veux donc simplement vous donner des exemples concrets de ce qui se passe dans certaines de ces collectivités autochtones. Que se passera-t-il si la fondation n'existe plus? Est-ce qu'une personne devra prendre le téléphone et composer un numéro sans frais pour que son appel soit réacheminé à quelqu'un, quelque part au Canada, qui ne parle pas sa langue et qui ne sait pas qui elle est? La personne à l'autre bout de la ligne lui dira: « Allez voir un conseiller ». Si vous êtes à Gjoa Haven ou à Pangnirtung, ça peut être difficile à trouver.
    Pouvez-vous donc simplement nous donner un exemple concret de ce qui est différent quand les programmes de la Fondation autochtone de guérison sont offerts et quand ils ne le sont pas.

  (1615)  

    D'abord et avant tout, il n'y a habituellement pas beaucoup de services dans les collectivités. Ce que la Fondation autochtone de guérison a offert, comme l'ont dit d'autres témoins, ce sont des services aux Inuits dans leur propre langue, services offerts par des gens de leur peuple. Des programmes sont élaborés pour les collectivités en fonction de leurs besoins particuliers. Les collectivités étaient et sont rendues à diverses étapes. Les programmes offrent ce dont chaque collectivité a besoin.
    Sans ces services, les gens devraient se déplacer. En ce qui concerne le PSS, c'est ce que vous faites. Vous composez un numéro sans frais. Les personnes qui viennent d'une petite collectivité et qui tentent d'obtenir un service — je n'aurais jamais même appelé à un numéro sans frais, je pense, même si je connais l'anglais — n'ont pas accès à des conseillers qui tiennent compte des différences culturelles et qui comprennent les enjeux auxquels elles font face et le milieu où elles vivent.
    Si les gens se rendent dans le Sud, ils doivent quitter leur collectivité, leur famille et leur réseau de soutien pour voir un conseiller. Ils ne parlent pas toujours la langue de l'endroit. Ils doivent partir et se rendre en ville, ce qui n'est pas facile; ils ressentent un certain malaise.
    Voulez-vous parler, en particulier...
    Cela entraîne aussi un nouveau traumatisme. Avec les pensionnats, les gens étaient amenés à l'extérieur de leur collectivité et placés ailleurs. La Fondation autochtone de guérison offrait des services de guérison dans les collectivités. Avec les programmes de Santé Canada, vous devez quitter la collectivité, ce qui vient renforcer le fait que vous devez, encore une fois, être arraché à votre collectivité. Cela n'aide pas votre santé; vous risquez de connaître un nouveau traumatisme, et c'est ce que nous essayons d'éviter.
    Au Nunavut, à tout le moins dans la région de l'île de Baffin, l'argent de la Fondation autochtone de guérison a été utilisé de façon très intelligente par certains centres de guérison plus petits, qui ont mis sur pied un guichet unique où pouvaient se rendre les membres de la collectivité. À Iqualuit, par exemple, plus de 4 000 personnes s'y sont présentées. C'est beaucoup de personnes pour Iqualuit. Environ 500 personnes y ont reçu des conseils dans une langue inuite, dispensés par un aîné, comme cela se fait traditionnellement, ou par d'autres méthodes traditionnelles de guérison que les gens connaissaient très bien.
    L'argent a permis de construire un centre où les gens de la collectivité peuvent se réunir. C'est comme ça que l'argent a été utilisé à très bon escient.
    Si vous prenez le programme de Santé Canada, qui venait s'ajouter à ces types de services, vous constatez qu'il s'agit d'un programme uniformisé plutôt axé sur ce qui se fait dans le Sud. Il est rigide, et il se situe à l'extérieur de la collectivité. Il faut composer un numéro sans frais, et bien des gens ne le font pas. Il arrive que les lignes téléphoniques ne fonctionnent pas. Il y a beaucoup de restrictions techniques dans les collectivités rurales, éloignées et isolées de l'Arctique. Si vous devez faire voyager des conseillers par avion dans les collectivités du Nord, cela retarde la guérison, même si celle-ci a plus de chance de se réaliser dans la collectivité.
    Merci, madame Ford et messieurs Cincotta et Russell.

[Français]

    J'invite maintenant M. Lemay à prendre la parole.
    Le programme relatif à la Fondation autochtone de guérison totalisait 350 millions de dollars pour une période de 11 ans. Il a été établi en 1998. Donc, tout le monde devait savoir qu'il allait se terminer en 2009.
    Est-ce que l'une ou l'autre de vos organisations a été avisée du fait que les fonds ne seraient plus disponibles à compter de 2010?

  (1620)  

[Traduction]

    Les gens savaient que la Fondation autochtone de guérison devait exister seulement un certain temps, mais il n'y a pas d'autre financement qui permette de répondre aux besoins des régions. Par exemple, les responsables du centre dont Jim a parlé ont cherché d'autres sources de financement, mais le financement versé pour la Fondation autochtone de guérison était un financement pluriannuel. Quand vous venez d'une petite collectivité et que vous essayer de passer votre temps à chercher du financement, quand vous devez chercher les formulaires de demande, rédiger des propositions puis faire tout le travail, vous avez moins le temps d'aider les gens à guérir. Trouver du financement de remplacement n'est pas une tâche facile.
    Je crois que le centre situé à Iqualuit a perdu 80 p. 100 de son financement habituel. Ces responsables essaient de le maintenir en fonction et cherchent d'autre argent. Ils pensent que le centre pourra probablement demeurer en fonction jusqu'au mois d'octobre de la présente année. Ils vont essayer de trouver du financement pour l'an prochain, mais ils pensent qu'ils n'ont pas de chance de survivre parce qu'il est difficile de trouver ce financement.

[Français]

    D'accord.
    Et qu'en est-il des autres?

[Traduction]

    Je collabore à un projet qui est financé jusqu'en 2012. Nous savons depuis le début que c'est censé être un programme temporaire. Cependant, avec l'arrivée des enjeux liés à la Commission de témoignage et de réconciliation, les répercussions de l'expérience commune et les conventions de règlement dans les collectivités, il ressort de plus en plus clairement que nous avons encore beaucoup de travail à faire.

[Français]

    Il reste beaucoup de travail à faire.
    J'aimerais savoir combien de personnes par année viennent au Foyer pour femmes autochtones de Montréal.

[Traduction]

    Il y a jusqu'à 200 femmes qui visitent notre foyer. Nous avons aussi un programme de sensibilisation, qui touche peut-être de 60 à 100 femmes de plus, et 60 enfants.

[Français]

    Ces personnes viennent-elles de partout au Québec ou seulement de la région de Montréal?
    Elles viennent de partout. Comme je l'ai dit plus tôt, des personnes venant de communautés comme celle de Povungnituk nous sont référées. Nous offrons beaucoup de programmes qui ne sont pas offerts dans leur communauté. Quand on a reçu des fonds de la Fondation autochtone de guérison...

[Traduction]

    Je vais devoir prendre le bébé.

[Français]

    Pendant ce temps, madame Dion Stout...

[Traduction]

    Je le savais, à titre de membre autochtone de la collectivité, mais aucun exposé officiel n'a été présenté à la Commission de la santé mentale.

[Français]

    Madame Martin, êtes-vous en mesure de compléter ce que Nakuset n'a malheureusement pas pu terminer? Savez-vous s'il est possible de fournir des services autrement que par l'entremise de ce programme?

[Traduction]

    Vous voulez savoir s'il est possible d'offrir les services sans le financement. À l'heure actuelle, nous essayons de continuer à le faire. Nous nous appuyons beaucoup sur les aînés et les guérisseurs traditionnels qui viennent de façon bénévole, mais il est à peu près impossible d'obtenir un financement équivalent à celui de la FADG. Chaque fois que nous essayons d'obtenir du financement, tous les bailleurs de fonds exigent que le mandat du foyer corresponde exactement à ce pourquoi nous demandons du financement. Nous ne pouvons pas modifier notre mandat, ce qui fait que nous avons de la difficulté à obtenir du financement pour récupérer ce qui a été perdu en raison de la diminution du financement de la Fondation autochtone de guérison.

  (1625)  

[Français]

    Si bébé vous le permet, vous allez terminer votre réponse?

[Traduction]

    Nous recevons du financement depuis 1999, alors nous avons toujours été confrontés à une date limite. Cependant, cette date revenait tous les deux ou trois ans, et notre financement était toujours renouvelé. Je suis en congé de maternité, mais j'ai parlé avec un membre de la FADG et je lui ai demandé quelles étaient les perspectives d'avenir en matière de financement. J'ai cru comprendre, d'après sa réponse, qu'une décision serait prise quand le gouvernement reviendrait à la suite de la prorogation — il était possible que notre financement soit renouvelé, ou que celui de la FADG soit renouvelé. Il m'a aussi dit qu'il était impressionné par nos programmes, à tel point qu'il se servirait de notre foyer comme exemple pour tous les autres programmes.
    C'est tout ce que j'ai à dire à ce sujet.

[Français]

    Si je comprends bien, votre foyer à Montréal a été mis sur pied en grande partie pour offrir les services de la Fondation autochtone de guérison.

[Traduction]

    Qu'est-ce qu'il a dit? Écoutiez-vous?

[Français]

    Pourriez-vous répéter votre question?
    D'accord.
    Le Foyer pour femmes autochtones de Montréal a été mis sur pied en grande partie pour offrir les services de la Fondation autochtone de guérison, si je comprends bien. Est-ce précisément pour aider les femmes aux prises avec ce problème ou pour autre chose?

[Traduction]

    Il a été mis sur pied pour autre chose. Nous avons ouvert nos portes en 1987, mais quand nous avons été mis au courant du financement, les programmes offerts au foyer ont entièrement changé. Nous sommes reconnus pour nos programmes, et c'est pourquoi il y a tant de gens qui nous consultent. Actuellement, nous sommes un peu en état de choc parce que nous devons dire aux clientes qu'elles ne peuvent plus venir consulter notre psychothérapeute et notre art-thérapeute puisque c'est grâce à la Fondation autochtone de guérison que nous étions capables d'embaucher ces personnes. Nous n'avons plus, non plus, d'intervenants en matière d'agressions sexuelles. Nous n'avons que le strict minimum.

[Français]

    Merci, monsieur Lemay.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à Mme Crowder, pour sept minutes. Allez-y, madame Crowder.
    Merci, monsieur le président. Je veux aussi remercier les témoins d'être venus aujourd'hui.
    Voici quelques sujets que j'aimerais aborder.
    D'abord et avant tout, j'aimerais souligner que je pense que chacun d'entre vous a, d'une façon ou d'une autre, parlé des réussites de ses programmes. En fait, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a fait faire une évaluation qui traitait de la réussite de vos programmes. Je voulais simplement le souligner aux fins du compte rendu.
    Dans la deuxième partie, et je me reporte à Mme Dion Stout... Le document De l'ombre à la lumière comporte de fait quelques sections très intéressantes sur l'accès aux programmes. Il y est mentionné qu'il y avait des problèmes en ce qui concerne l'équité d'accès aux programmes du gouvernement fédéral, et pourtant, il a été proposé que les programmes de la Fondation autochtone de guérison soient remplacés par des services offerts par Santé Canada, qui, comme nous le savons déjà, forment un ensemble disparate et sont souvent inaccessibles.
    La deuxième chose que je voulais dire à propos du rapport De l'ombre à la lumière, c'est qu'on y recommande fortement la reconduction de la Fondation autochtone de guérison. Mme Rigsby-Jones a abordé les aspects économiques de ce que nous mesurons. Dans ce rapport — on parle de 2004 — on dit clairement que, chaque fois que les gouvernements provinciaux et fédéral versent 2 $ au programme communautaire des cercles de guérison à Hollow Water, un des endroits cités, ils économisent de 6 $ à 16 $ en frais d'incarcération. Cela signifie que pour chaque tranche de 2 $ investie dans des programmes communautaires de guérison, les gouvernements économisent de 6 $ à 16 $, en dollars de 2004.
    Je vais commencer par Mme Rigsby-Jones, et les autres pourront ajouter quelque chose. Vous avez dit clairement que l'un des avantages des programmes de la Fondation autochtone de guérison, c'est qu'ils sont axés sur la collectivité. Tous les programmes de Santé Canada que nous avons examinés sont axés sur les personnes. Ils supposent des processus complexes, des plans de traitement. La personne peut devoir fournir toutes sortes de choses. Je me demandais donc si vous pouviez nous dire ce qui se passera, à votre avis, avec les personnes qui ont actuellement recours aux programmes communautaires si elles n 'ont plus accès qu'aux programmes de Santé Canada.

  (1630)  

    Je crois que certaines des personnes avec lesquelles j'ai travaillé par le passé ne seront pas capables de se résoudre à accéder à des services psychologiques offerts par des fournisseurs non autochtones. Pour en arriver à cette conclusion, je m'appuie sur les événements traumatisants que de nombreuses personnes ont vécus par le passé et qui font qu'elles sont encore bouleversées et qu'elles ont encore peur d'entrer dans un bureau.
    Avant de venir, hier matin, j'étais dans mon bureau et j'ai composé le numéro 1-877 de Santé Canada. Le service s'est beaucoup amélioré depuis la dernière fois que j'ai appelé, avant Noël. Je suis restée en attente pendant 20 minutes, et j'ai fini par parler à quelqu'un. Quand j'avais appelé avant Noël, ça n'avait pas été le cas. C'était comme une boucle sans fin. Le service s'est donc amélioré.
    Comme le mentionnait Elizabeth précédemment, quand on fait ce type d'appel et qu'on se retrouve en attente et qu'on est là, assis, à attendre, sans même savoir ce qu'il faut demander... Quand j'ai parlé, plus tôt dans mon exposé, du fait que la Fondation autochtone de guérison constitue un pont, je parlais de ce que j'ai constaté au fil des ans, c'est-à-dire que les gens viennent nous voir et se sentent à l'aise, puis ils entreprennent une partie de leur traitement parce que c'est une guérison à long terme. Ils viennent nous voir pendant cinq semaines et constatent des changements importants. Nous avons reçu de nombreux témoignages à cet effet. Ce qu'ils constatent aussi, et vous le mentionnez souvent, c'est tout le travail qu'ils doivent faire pour les aider à établir des ponts et à trouver un endroit où aller; c'est la même chose pour les travailleurs en santé communautaire — ils doivent établir des ponts. Sans programme communautaire, tout cela ne sera plus possible.
    Comme l'a aussi mentionné Elizabeth, le problème ne touche pas seulement notre région. Sur l'île de Vancouver, il y a de nombreuses réserves éloignées accessibles seulement par hydravion ou par bateau-taxi. Sortir de ces réserves ou y entrer coûte très cher, ce qui fait qu'une personne qui veut consulter un thérapeute occidental fait face à de nombreux obstacles.
    Madame Ford, avez-vous un commentaire?
    J'allais dire, d'abord et avant tout, que ce n'est pas nous qui offrons réellement les programmes. Nous sommes un organisme national, mais de nombreuses personnes nous ont fait part de leurs préoccupations, et nous avons reçu beaucoup d'appels téléphoniques provenant de nos collectivités et de nos régions concernant la disparition du programme Fondation autochtone de guérison. Je crois qu'il faut souligner, comme nous l'avons dit précédemment dans l'exposé, que les deux peuvent se compléter l'un et l'autre.
    L'avantage de la Fondation autochtone de guérison, à mon avis, c'est, comme nous l'avons dit, que les collectivités se trouvent à divers endroits et que les gens se trouvent à divers endroits. Je crois que le fait qu'ils aient accès à des programmes communautaires et qu'ils puissent rencontrer quelqu'un et parler leur propre langue... Ils peuvent accéder à un programme sans penser qu'ils ont besoin de counselling. Ils peuvent être à la recherche d'autre chose.
    Si je prends l'exemple que nous avons mentionné, les aînés qui décident de se rendre dans un centre communautaire et qui parlent aux jeunes et discutent de leurs expériences, peut-être pour la première fois, ils n'auraient probablement jamais pensé à prendre le téléphone et à appeler un numéro sans frais, ni même à appeler un conseiller, un psychologue ou qui que ce soit d'autre dans la collectivité. Mais s'ils se rendent dans un centre communautaire et se retrouvent à discuter, à bavarder avec les jeunes, ils en viennent à aborder certains problèmes, ce qui contribue aussi à les aider à se rendre compte qu'il y a des problèmes.
    Je trouve cette remarque très intéressante. Je crois que tout le monde — les témoins que nous avons entendus — s'entend pour dire que les programmes peuvent bel et bien être complémentaires, mais que, ce que l'on offre actuellement, c'est le maintien des services de Santé Canada uniquement et la suppression des autres programmes.
    Nakuset.
    Le type de programmes que nous offrons sont autant de nature holistique traditionnelle et de nature occidentale, mais je ne crois pas que Santé Canada pourrait nous offrir la même chose. Je ne pense pas que vous pouvez demander au ministère de vous fournir une ordonnance pour une suerie. C'est ce genre de choses que nous avons perdues avec les pensionnats, et nous essayons de leur prouver que ces méthodes de guérison fonctionnent pour la détresse ou la douleur, quel que soit le nom qu'on lui donne.
    C'est la même chose pour nos guérisseurs traditionnels. Vous savez, nous sommes très contents que Mike Standup vienne encore nous voir, mais il ne reçoit pas de chèque de paie, et, un jour ou l'autre, il ne sera plus en mesure de venir nous voir.
    L'autre jour, j'ai appelé Santé Canada parce que j'avais besoin d'une nouvelle paire de verres de contact. J'ai dû téléphoner aux responsables, puis appeler l'optométriste, puis les rappeler, et toutes ces personnes n'acceptaient pas de se parler l'une l'autre. Je suis directrice exécutive, et j'ai pu y arriver, mais une personne qui aurait une faible estime d'elle-même aurait sûrement raccroché et laissé tomber. Et je ne parle même pas de la barrière linguistique.
    D'accord. Merci, madame Crowder.
    Nous passons maintenant à M. Duncan. Ce sera la dernière question de la première série, et il semble que nous pourrons probablement effectuer un tour de table complet pendant la prochaine série de questions de cinq minutes.
    Allez-y, monsieur Duncan.

  (1635)  

    Merci beaucoup d'être venus, chacun d'entre vous.
    J'aimerais seulement mentionner que je sais que vous avez tous un travail difficile à faire et que vous devez respecter des modalités que vous aimeriez probablement modifier de temps à autre, et que un financement adéquat à tous points de vue serait apprécié.
    J'ai pris connaissance d'un article très récent, publié le 26 avril, sur le groupe Aboriginal Survivors for Healing de Charlottetown. Il avait perdu son financement dans le cadre de la FADG et avait présenté une demande de financement par l'entremise de Santé Canada, demande qui a été acceptée. D'après ce que j'ai lu, le groupe continue essentiellement à organiser des cercles de guérison et à fonctionner comme il le faisait par le passé dans le cadre de la stratégie autochtone de guérison.
    Donc, quand je lis dans quel type de contexte se situe le Programme de soutien en santé, je ne lis pas la même information que celle dont vous m'avez fait part, puisque ce contexte semble essentiellement communautaire. Il est question d'offrir du soutien culturel et affectif, d'aînés et d'organismes autochtones locaux qui offrent des services professionnels de counselling, et de guérisseurs traditionnels qui sont disponibles. Certains services dépendent des besoins des personnes, et peuvent prendre la forme de dialogues, de cérémonies, de prières ou de techniques traditionnelles de guérison. Des organismes autochtones locaux offrent aussi des services de soutien affectif.
    Je suis donc un peu perdu. Par exemple, madame Rigsby-Jones, vous parlez d'offrir des traitements à des personnes de partout — de l'île de Vancouver, essentiellement, d'où je viens aussi, en passant. Est-ce que cela ne signifie pas que ce sont des traitements individuels? Je veux dire, vous avez affaire à des personnes et non à des collectivités, puisque ce sont des personnes qui se présentent chez vous pour un traitement, n'est-ce pas?
    De façon générale, c'est vrai. Nous sommes, à Tsow-Tun Le Lum, une collectivité autochtone, et c'est pourquoi nous disons que nous offrons des programmes communautaires.
    Là où je travaille, nous avons de multiples contrats de financement, y compris un contrat dans le cadre du Programme de soutien en santé. Nous avons une équipe de soutien culturel qui offre des services. Cependant, d'après ce que je comprends de notre contrat, les services sont offerts aux personnes pendant le processus de demande d'indemnisation. Une fois que le processus de vérité et de réconciliation sera entrepris, ce qui se fera très bientôt, ce sera à nous d'offrir ces services.
    À ce jour, nous n'avons jamais eu le budget requis pour pouvoir offrir un soutien thérapeutique constant, même si notre personnel a les compétences requises. Nos employés dépassent très certainement les paramètres que nous nous sommes fixés et offrent de l'aide pour fournir des références. Bien honnêtement, nous faisons preuve de créativité pour trouver des façons de mettre en contact les personnes qui ont besoin d'une cérémonie et un aîné, et nous collaborons avec eux. Jusqu'à présent, nous avons réussi à satisfaire à la plupart des demandes.
    C'est très difficile parce que notre budget de déplacement fond très rapidement quand nous envoyons une personne en avion ou en bateau-taxi. Il faut donc trouver un juste équilibre à tout ça.
    Je vais vous poser une question qui me met un peu mal à l'aise parce que vous avez parlé de briser le cycle de la violence. Je connais une femme qui a reçu un traitement. Elle a été victime de violence sexuelle, et l'agresseur était très bien connu par les gens de l'établissement. C'était une personne importante dans la collectivité. La personne professionnelle ou autochtone responsable du centre de traitement venait de la même collectivité et, plutôt que de briser le cycle de la violence, elle a décidé de protéger l'agresseur.
    J'ai été très touché à l'époque, et je me demande seulement quelles sont les règles dans un cas pareil, parce que je ne savais pas trop quoi faire à l'époque.

  (1640)  

    Merci. J'apprécie votre franchise.
    Dans mes commentaires, j'ai parlé des répercussions intergénérationnelles et, à ce sujet, je sais bien que les projets ne peuvent pas être plus sains que le sont les personnes qui s'en occupent. Chaque personne fait l'objet d'un processus intensif de sélection avant d'être embauchée, et si on découvre qu'une personne a vécu des problèmes par le passé, on l'incite fortement à entreprendre un traitement pour faire face à ces enjeux, parce qu'elle doit être solide et avoir les deux pieds sur terre quand ils font surface et qu'ils ne...
    Ce que vous venez de mentionner, c'est un problème vraiment... j'essaie de faire preuve de tact. Je sais que des situations comme celles que vous avez décrites existent, et l'une de mes préoccupations et de mes craintes concernant la Commission de vérité et de réconciliation qui s'en vient, c'est le fait que des histoires vont être racontées et que les collectivités auront besoin de soutien, et qu'il faudra offrir de la formation, de l'aide et des traitements adéquats. Sinon, ce que vous venez de décrire risque de se produire de nouveau. C'est très triste.
    D'accord.
    Est-ce que j'ai encore du temps?
    Malheureusement, nous devons vous interrompre maintenant.
    Merci, monsieur Duncan et madame Rigsby-Jones.
    Nous passons maintenant à notre deuxième série de questions, et nous commençons avec M. Bagnell. Le temps accordé est de cinq minutes pour les questions et les réponses.
    Allez-y, monsieur Bagnell.
    Merci à tous d'être venus.
    Madame Rigsby-Jones, vous avez mentionné que vous aviez égaré quelques paragraphes de votre mémoire. Si vous les trouvez et que vous les envoyez au greffier dès votre retour, il nous les remettra à tous.
    Monsieur Cincotta, merci d'avoir fait cette remarque à propos du téléphone. C'est bien vrai. Qui, ici, voudrait appeler à un numéro sans frais pour parler de sa vie sexuelle et de ses problèmes à ce sujet? Comme vous le savez, dans bien des collectivités autochtones, il y a un téléphone pour plusieurs familles, et parfois, il n'y pas de téléphone, comme vous l'avez dit, ce qui fait que les gens de ces collectivités auraient à se rendre chez quelqu'un d'autre pour parler de leurs problèmes.
    J'ai une question pour Mme Ford. Comme l'a mentionné mon collègue, le Parlement du Nunavut a adopté à l'unanimité une résolution visant à reconduire le financement de la Fondation autochtone de guérison. La personne qui serait probablement la plus susceptible de faire quelque chose à ce sujet est la ministre de la Santé, qui représente cette circonscription. Vous êtes-vous adressé à la ministre de la Santé pour lui demander de s'occuper de cette question? Elle siège au cabinet.
    ITK ne l'a pas fait. À quel ministre de la Santé devrions-nous nous adresser?

  (1645)  

    Leona.
    Nous avons rencontré le ministre Strahl et la ministre Aglukkaq à propos de la disparition de la Fondation autochtone de guérison. Le conseil d'administration d'ITK a adopté, en juin dernier, une résolution, parce qu'il s'inquiétait du fait que la date de disparition de la Fondation autochtone de guérison approchait. Nous avons discuté avec les deux ministres et discuté du fait que si la Fondation autochtone de guérison devait disparaître, cela constituerait une grande perte pour les collectivités.
    ITK collabore avec Santé Canada et continuera à le faire pour essayer de s'assurer que le Programme de soutien en santé, le PSS, permet d'atteindre les objectifs escomptés dans les collectivités inuites. J'aimerais toutefois revenir à la dernière question puisqu'elle a un lien avec tout cela.
    Ils seront peut-être en mesure d'offrir certains de ces services — pas au Nunatsiavut, mais dans les autres régions —, mais nous n'offrons pas les programmes. La différence qui nous a été mentionnée par certaines collectivités, c'est que le PSS est un programme qui présente des critères, et les gens doivent essayer de satisfaire à ces critères, mais ils n'y arrivent pas toujours.
    La Fondation autochtone de guérison est communautaire, ce qui fait qu'elle offre un environnement différent. C'est un programme autochtone, offert par la collectivité, et qui tient compte des besoins de cette collectivité. Maintenant, les gens doivent tenter de trouver une façon d'offrir des services dans le cadre du processus utilisé par Santé Canada, qui est différent. D'après ce que je comprends, c'est un processus annuel plutôt qu'un processus de trois ans, comme dans le cas de la Fondation autochtone de guérison.
    À peu près tous les témoins ont affirmé que les services offerts par Santé Canada sont complémentaires aux divers services offerts dans le cadre des projets de la Fondation autochtone de guérison, ce qui est un aspect positif. Santé Canada reçoit un financement qui correspond à seulement 40 p. 100 du financement versé à la Fondation de guérison, ce qui fait qu'il ne peut pas offrir plus que 40 p. 100 des services, de toute façon. Mais ce qu'il fait est différent.
    J'ai une dernière question pour tous les témoins. Santé Canada l'a fait pendant tout ce temps, mais pouvez-vous décrire ce que vos projets viennent offrir — ou des projets dont vous avez entendu parler, puisque vous représentez d'autres projets — que Santé Canada n'offre pas?
    S'il vous plaît, soyez bref.
    Nakuset.
    Santé Canada exclut les personnes qui n'ont pas le statut d'Indien. C'est un enjeu important puisque beaucoup des Autochtones qui nous consultent sont des Métis. Il y a aussi une collectivité innue qui n'est même pas reconnue à titre de collectivité autochtone. Toutes ces personnes n'ont pas le statut d'Indien et ne peuvent donc pas avoir accès à ces services.
    Il y a aussi tout ce qui concerne les méthodes traditionnelles de guérison, les cérémonies, l'intervention des aînés, et tout le volet culturel.
    D'accord.
    Mme Ford ou Mme Rigsby-Jones.
    Nous avons participé récemment à un projet de recherche intitulé « Making the Intangible Manifest ». Je crois que certains des éléments mentionnés dans le rapport de recherche concernaient les enjeux liés aux sentiments dont Elizabeth parlait — le fait que les gens se sentent à l'aise de s'adresser à un organisme autochtone. S'il y a bien une chose qui est ressortie, au fil des ans, des évaluations auxquelles nous avons participé, c'est le fait que les gens se sentent à l'aise d'être entourés en grande partie d'Autochtones. Certains de nos employés ne sont pas autochtones.
    D'accord, nous allons devoir nous arrêter là parce que nous manquons de temps.
    Si vous voulez répondre à la question de M. Bagnell, vous aurez peut-être l'occasion de le faire plus tard, quand vous formulerez un autre commentaire.
    Passons maintenant à M. Dreeshen, pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Et merci à vous, mesdames et messieurs, d'être ici aujourd'hui.
    J'ai, de fait, eu l'occasion, la fin de semaine dernière, de participer à la remise des prix Esquao à Edmonton. Il y avait là 21 dirigeantes formidables — des mères, des grands-mères et des filles. Elles faisaient preuve d'un grand engagement et d'un grand leadership au sein de leur collectivité, et je reconnais aussi le travail que vous faites pour vos propres collectivités. Je voulais simplement commencer par le souligner.
    Il y a quelques questions qui ont été mentionnées pendant notre discussion. Par exemple, les services accessibles grâce aux numéros sans frais sont offerts en français et en anglais seulement, et ne sont pas offerts dans les langues autochtones. Avez-vous des idées de façons d'améliorer ce processus en particulier? Est-ce que quelqu'un a envisagé des solutions qui permettraient de faire participer des gens de votre propre collectivité qui possèdent les compétences requises?
    Y a-t-il des façons d'améliorer la situation? Je dirais que la meilleure façon serait d'offrir les programmes dans les collectivités.
    En ce qui concerne la ligne téléphonique, d'après ce que je comprends et ce que je sais, le Nunavut doit appeler à Whitehorse. Je crois que le Nunatsiavut doit appeler dans la région de l'Atlantique. Je ne sais pas s'il s'agit toujours de communications téléphoniques. Ce n'est pas, non plus, une bonne solution, à mon avis.
    Si une personne obtient des services par l'entremise de ce programme, s'il s'agit de services professionnels de counselling, il y a toujours un problème, surtout si elle doit se rendre dans le Sud pour obtenir ces services. Si quelqu'un doit venir dans notre collectivité pour fournir le service, eh bien, c'est, encore une fois, quelqu'un qui vient dans votre collectivité. Ce n'est pas une personne de la collectivité, et ce n'est pas une personne qui connaît la région ou le mode de vie. La situation est la même pour un service offert par téléphone, pour un numéro sans frais. Je ne sais pas comment ça pourrait fonctionner si le service était offert dans la collectivité.

  (1650)  

    Je ne sais pas comment dire cela, mais la simple idée de rester en attente pendant 20 minutes, et tout le reste, est simplement inacceptable.
    De fait, Nakuset, vous avez mentionné avoir fait un appel pour quelque chose comme des verres de contact et d'autres choses — je ne suis pas sûr qu'il s'agit du numéro. Quand vous avez raconté cette histoire, vous ne parliez pas du numéro en question, n'est-ce pas?
    Oui.
    C'était ce numéro?
    Je ne veux pas limiter l'importance des verres de contact et de ce genre de choses, mais comment pouvons-nous nous assurer, alors, que les requêtes qui sont faites concernent le type de choses dont parlait Mme Ford?
    Vous savez, c'est presque une question de formation psychosociale, parce que je ne pense pas que... Dans le cas de cet appel en particulier que j'avais à faire, quand mon interlocuteur a entendu: « J'ai mon statut d'Indien et je suis couverte », il a dit: « Oh, votre statut d'Indien ». Pour eux, c'est un peu comme si je recevais de l'aide sociale, comme si... C'est un droit en vertu d'un traité. Ce n'est pas de l'aide sociale. Dès le départ, on nous regarde de haut et on ne veut pas faire l'effort de parler avec Santé Canada. Et ensuite, Santé Canada nous dit: « Eh bien, non. Nous avons nos droits, et... ». Il devrait donc y avoir une certaine formation psychosociale à Santé Canada, et les représentants de Santé Canada devraient faire plus d'efforts. Je suis patiente et je sais ce dont j'ai besoin, alors je vais le faire, mais je ne crois pas que ce soit le cas de beaucoup d'autres personnes.
    D'accord, très bien. Merci.
    Le Comité des survivants des pensionnats indiens joue le rôle de conseil consultatif pour la Commission de vérité et de réconciliation. Je me demandais seulement si les commissaires de cette commission, ou tout autre membre de celle-ci, ou si un représentant du Comité des survivants avaient donné à vos organismes des directives pour faire face à la disparition du programme de guérison.
    Est-ce que quelqu'un de la Fondation autochtone de guérison s'est véritablement assis avec vous et vous a dit: « Nous savons qu'il y a une disposition de temporarisation de la Fondation, et voici comment vous devriez vous y prendre pour y faire face »?
    Oui, la Fondation autochtone de guérison l'a fait. Nous savions depuis le début qu'il s'agissait d'un programme qui prendrait fin un jour, et chaque fois qu'on renouvelait le financement, il fallait toujours prévoir un processus de réduction progressive des opérations.
    Madame Ford, allez-y.
    J'allais dire qu'ils ont donné des pistes.
    Mais pour revenir à la question de savoir si les gens étaient préparés, je dirais que les gens avaient encore de l'espoir parce que nous avons plaidé en faveur de programmes destinés précisément aux Inuits, qui se dérouleraient dans notre langue et qui seraient offerts par des Inuits. Et, évidemment, comme de tels programmes ont bien fonctionné, on a toujours espéré qu'ils se poursuivent et qu'ils soient reconnus à titre de programmes utiles venant en aide aux collectivités de bien des façons. Comme l'a dit Yvonne un peu plus tôt, nous avons examiné la rentabilité des mesures de guérison pour les collectivités et les familles.
    Un dernier commentaire de la part de Mme Rigsby-Jones. Allez-y.
    Merci.
    Une bonne partie des mesures que nous avons prises pour produire des rapports consistaient à discuter de la question de savoir comment nous allions poursuivre nos activités. Nous recevrons du financement pendant encore quelques années, alors ce n'est pas une grande surprise pour nous. Mais comment allons-nous trouver l'argent? Je suis d'accord avec ce qu'a dit Elizabeth à propos de l'espoir qui existe toujours. Ce serait bien si le financement se poursuivait au moins jusqu'à la fin du processus de la Commission de vérité et de réconciliation.
    Très bien.
    Merci, monsieur Dreeshen.

[Français]

    C'est maintenant au tour de M. Lévesque. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci de vous être déplacés pour nous faire connaître les problèmes que vous vivez actuellement.
    Comme vous le savez, je représente le comté d'Abitibi—Baie-James—Nunavik—Eeyou, et je me demande sérieusement comment vous avez réussi à trouver des personnes ressources au Nunavik. C'est une partie du Québec qui est en manque de personnes ressources compétentes.
    Je suis parti de la Vallée de la Matapédia, où il y avait des Micmacs. On regardait des films de cow-boys et d'Indiens, ces méchants Indiens qui enlevaient leurs cheveux aux blancs — j'ai réussi à préserver ce qui reste des miens. Quand je suis arrivé en Abitibi, à l'automne, on allait mener des enfants dans un orphelinat à Saint-Marc-de-Figuery, près d'Amos, où mon collègue est né. Quand on retournait les chercher au printemps, ils ne comprenaient plus leurs parents ni leurs grands-parents qui leur parlaient anishinabe. Bien souvent, les grands-parents ne parlaient ni français ni anglais. J'ai personnellement vécu cette expérience dans les orphelinats, puisque j'y ai fait mes études. J'ai réalisé plus tard qu'un enfant n'en vit pas les conséquences immédiatement. Il n'en est pas conscient. Il retourne avec ses parents et il est heureux. C'est plus tard qu'il en souffre, quand il atteint l'âge de 18 ou 20 ans. Il réalise alors à quel point sa famille, sa culture et sa langue lui ont manqué.
    Dans l'exercice de mon travail, j'ai pris conscience d'un autre problème au sein des collectivités: on donne un peu d'argent aux communautés, puis on leur dit de se taire. Aucun développement économique ne s'y fait. Je pense que la guérison serait plus facile si les Premières nations et les Inuits pouvaient s'intégrer.
    Je me demande aussi — je vous pose toutes ces questions — si vous seriez capables de nous dire aujourd'hui quelles économies il serait possible de réaliser quant aux frais d'incarcération, qui sont énormes. De plus, ça dépend de ce qui est arrivé antérieurement. Qu'est-ce qu'on pourrait épargner si on pouvait intégrer ces personnes et assurer leur suivi en collectivité?
    Je vous laisse la parole.

  (1655)  

[Traduction]

    Puis-je faire seulement deux commentaires à ce sujet?
    Comme l'a souligné Elizabeth, les régions et les collectivités inuites ne sont pas toutes rendues à la même étape en ce qui concerne, par exemple, leur développement. C'est pour cette raison que, au Nunavik, plutôt que d'imposer le fardeau aux 14 collectivités, la Régie régionale de la Santé et des Services sociaux du Nunavik s'est acquittée elle-même de la tâche et a présenté une demande de financement à la Fondation autochtone de guérison parce qu'elle dispose de l'infrastructure et du soutien requis pour le faire. La Régie a collaboré avec les collectivités pour déterminer de quelle façon elles souhaitaient mettre sur pied le programme. C'est comme ça que les choses ont fonctionné au Nunavik.
    En ce qui concerne le partage des ressources dans la région désignée des Inuvialuits dans les Territoires du Nord-Ouest et à Inuvik, les Inuits et les gens d'Inuvik ont collaboré avec la collectivité gwich'in sur place pour partager certains des programmes. L'un des représentants de l'Inuvialuit Regional Corporation avec lesquels j'ai discuté aujourd'hui collabore avec les Gwich'ins et les Inuits. Il y a donc un partage des ressources.
    Merci.
    L'une des données qui a disparu de notre rapport était une statistique provenant du rapport de 2001 de la Commission du droit du Canada sur le coût de la violence sexuelle envers les enfants. Mon rapport contenait une mention des coûts judiciaires associés à ce problème. Les chiffres provenaient des données de Statistique Canada pour 1998-1999 et atteignaient, au total, plus de 544 millions de dollars. C'était le total des coûts associés à la violence sexuelle envers les enfants, et il s'agissait, en grande partie, des coûts associés à l'emprisonnement, aux tribunaux et au maintien de l'ordre. Ils seraient beaucoup plus élevés maintenant, 12 ans plus tard.
    Mon expérience personnelle me permet de savoir, parmi les personnes qui ont visité notre centre, combien ne sont jamais retournées en établissement.
    De plus, quand nous faisions, par le passé, du travail d'intervention auprès des délinquants sexuels, nous n'avons jamais fait affaire avec une personne qui n'était pas aussi une victime. Dieu merci, ce ne sont pas toutes les victimes qui deviennent des délinquants.
    D'accord.

  (1700)  

[Français]

    Merci, monsieur Lévesque. Malheureusement, votre temps est écoulé.

[Traduction]

    J'ai une question, maintenant. Je vais prendre la place d'un membre du gouvernement.
    J'aimerais seulement revenir à cette idée abordée, de fait, par M. Duncan, qui a donné l'exemple de l'organisme de Charlottetown, il me semble, qui avait réussi à obtenir du financement continu pour ses programmes communautaires.
    Je suppose que la question s'adresserait davantage à Mme Rigsby-Jones, à Nakuset ou à Mme Martin. Savez-vous si certains types de programmes de Santé Canada qui existent pourraient permettre de continuer à soutenir les programmes communautaires, ou avez-vous fait des recherches à ce sujet?
    Pendant les deux derniers mois, je ne suis presque pas allée au travail, mais avant mon congé, je n'arrivais pas à obtenir les paramètres concernant la façon d'obtenir cet argent de Santé Canada ni de savoir ce qui pouvait être financé et ce qui ne pouvait pas l'être. Je ne sais pas si les paramètres ont été fournis, à la suite de mon retour. Je sais que le montant d'argent a été annoncé. Je ne me souviens pas du tout du montant pour l'instant, mais on ne précisait pas à quoi servirait véritablement cet argent ni ce pourquoi nous pouvions présenter une demande.
    Madame Martin.
    Quand le financement versé par la Fondation autochtone de guérison a pris fin, nous avons aussi perdu trois postes. Un autre projet a pris fin à la même époque, ce qui fait que quatre postes ont disparu. Nous n'avons pas eu beaucoup de temps pour regarder ce qui est offert par Santé Canada.
    L'une de nos employés, qui n'a pas pu venir aujourd'hui, a dit qu'elle avait commencé à examiner certains des programmes. Comme je l'ai dit plus tôt, comme notre mandat n'est pas directement lié aux services offerts par Santé Canada, nous n'étions pas admissibles à certains programmes. Je ne sais pas s'il y a eu d'autres recherches effectuées au sujet des programmes offerts par Santé Canada.
    D'accord, je vous remercie.
    J'ai maintenant une question pour Mme Stout. La commission établit, de fait, des liens entre les gouvernements fédéral et provinciaux en ce qui concerne les problèmes de santé mentale et entretient elle-même des liens avec ces gouvernements. Vous collaborez aussi avec divers organismes pour améliorer les soins de santé mentale à l'échelle de la collectivité et la façon dont ils sont gérés. Pourriez-vous nous en dire un peu plus, compte tenu de ces changements qui touchent la Fondation autochtone de guérison, à propos de discussions que vous avez eues au sujet des mesures qui pourraient être prises dans l'avenir pour continuer à faire avancer les soins en santé mentale dans ces nouvelles conditions auxquelles sont confrontés les fournisseurs de soins de santé à l'échelle des collectivités?
    C'est une question très complexe puisque tous ces enjeux deviennent très complexes et mouvants.
    Pour commencer, je vais réagir, peut-être, à certains des commentaires qui ont été faits plus tôt. Mme Crowder a mentionné le rapport De l'ombre à la lumière. Nous n'avons pas dit ce que nous en ferions à la Commission de la santé mentale, mis à part que nous allions l'utiliser comme guide. Cela ne signifie pas que nous ne nous occupons pas, dans le cadre de notre travail, des Autochtones, des membres des premières nations, des Inuits ou des Métis.
    Notre mandat consiste à mettre fin à la stigmatisation envers les maladies mentales et à la stigmatisation dont sont victimes les personnes atteintes de maladie mentale et de problèmes de santé mentale. Notre autre mandat consiste, évidemment, à offrir un centre d'échange du savoir. Ce ne sera pas nécessairement des connaissances générales au sens où nous l'entendons, ni des connaissances spécialisées, qui seront échangées à cet endroit, mais bien des connaissances maison. Il y a, chaque jour, des tribunes sur la santé et sur la guérison qui se déroulent dans nos collectivités et qui ne sont pas bien exploitées, pas bien définies ou pas bien comprises. Par exemple, beaucoup de personnes, dans nos collectivités, marchent pour maintenir leur santé mentale. Il s'agit là d'une façon peu coûteuse et toute simple de gérer ces problèmes de santé mentale.
    Évidemment, la troisième initiative à laquelle nous travaillons vaillamment, c'est la stratégie en santé mentale pour les Canadiens, dont j'ai déjà parlé. Jusqu'à présent, nous avons tenté de faire ressortir ce qui doit changer au sein du système. Nous ne disposons pas d'un système de santé mentale en tant que tel, mais je vais tout de même utiliser cette expression pour aller plus vite. Évidemment...

  (1705)  

    Nous n'avons plus le temps, malheureusement.
    D'accord, mais puis-je mentionner nos deux dernières principales initiatives?
    La première est le projet de démonstration sur l'itinérance, qui essaie d'aller au cœur des raisons qui font qu'il y a tant de sans-abri et d'expliquer pourquoi, par exemple, il y a des liens de comorbidité entre la toxicomanie et la santé mentale.
    Évidemment, la dernière initiative est celle dans le cadre de laquelle nous essayons d'établir un partenariat entre tous les Canadiens pour que nous nous appropriions la mission d'améliorer la santé mentale au Canada.
    Je ne sais pas si cela répond à votre question, mais j'essaie en même temps de placer un mot.
    Merci beaucoup, madame Stout.
    Nous passons maintenant à Mme Crowder.
    Mesdames et messieurs les membres du comité, il n'y a pas d'autres intervenants sur la liste. Si vous voulez tout de même poser une question, veuillez le faire savoir au greffier.
    Allez-y, madame Crowder.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adressera probablement à Mme Rigsby-Jones ou à Mme Martin.
    Dans le document que la Bibliothèque du Parlement a préparé pour nous, il est mentionné qu'il y a des critères d'admissibilité pour les services offerts dans le cadre du Programme de soutien en santé pour la résolution des questions des pensionnats indiens de Santé Canada, mais que les personnes qui se voient refuser des services peuvent en appeler de cette décision. Il y a trois niveaux d'appel, et c'est toujours la personne dont la demande de service est refusée qui doit faire appel.
    Avez-vous déjà eu affaire à des personnes dont la demande de service avait été refusée par Santé Canada?
    Oui, et je me souviens en partie des circonstances. L'un des problèmes dans la région de la Colombie-Britannique — quoique je ne sache pas comment ça a fonctionné ailleurs au pays —, c'est qu'il y avait constamment de la confusion entre les services non assurés et le soutien en santé offert aux anciens élèves des pensionnats. Cela a entraîné beaucoup de difficultés.
    Ce que j'ai constaté, personnellement, au sujet de ce programme, c'est que la décision dépend en fait bien souvent de l'interprétation que fait la personne de Santé Canada à qui vous posez la question, à l'autre bout de la ligne. J'ai fait face à ce problème par le passé et j'ai demandé qu'on m'envoie les politiques, mais je ne les ai pas reçues. C'est un peu comme si la personne venait interpréter les critères ou y ajouter des éléments que je n'ai jamais vus dans la documentation. Donc, il y a eu des difficultés.
    Ensuite, comme ça a été dit précédemment, il y a toujours un problème selon que le demandeur a le statut d'Indien ou non. Je ne sais pas trop s'ils offrent aussi le programme aux Métis, puisque les Métis ont aussi fréquenté les pensionnats. Je ne peux donc pas répondre à cette partie de la question.
    Les critères sont plutôt clairs. Les voici:
Qui sont admissibles à recevoir ou qui reçoivent le paiement d'expérience commune; qui font appel au processus d'évaluation indépendante, au mode alternatif de règlement des conflits ou au processus judiciaire pour résoudre leur revendication; qui participent à des événements de la vérité et de réconciliation ou commémoration.
    C'est comme ça qu'on a décrit les critères d'admissibilité.
    Mais j'ai rencontré des employés de Santé Canada qui voulait réduire leur portée.
    Je sais, madame Ford, que vous voulez dire quelque chose à ce sujet.
    Si je pose cette question, c'est parce qu'il semble y avoir un autre niveau de complexité pour les personnes dont la langue maternelle n'est ni l'anglais, ni le français, pour celles qui n'ont peut-être pas un niveau d'instruction qui leur permet d'être à l'aise avec l'idée de remplir des formulaires et pour toutes ces choses.
    Madame Ford, aviez-vous un commentaire à ce sujet?
    C'était simplement un commentaire général. Je pense que c'est l'une des autres préoccupations pour les collectivités et les projets — le fait que ce n'est pas toujours clair. La Fondation autochtone de guérison a fourni du financement aux collectivités inuites pour qu'elles soient en mesure de faire tout cela. On ne sait pas toujours clairement qui a droit aux services, quels sont les services offerts et qui il faut appeler, par exemple. Les programmes de la Fondation autochtone de guérison étaient des programmes inuits. Vous n'aviez pas besoin d'essayer de découvrir quelle était votre place dans tout ça, de découvrir comment obtenir les services, comment présenter une demande pour pouvoir offrir les services, et toutes ces choses.
    Nakuset, aviez-vous quelque chose à dire?
    Comme je l'ai dit, il y avait une cliente au foyer qui était une Innue de la région du Labrador. Je ne me souviens pas exactement du nom de sa collectivité, mais elle n'avait pas de certificat de statut d'Indien parce que, pour quelque raison que ce soit, sa collectivité n'est pas reconnue par le gouvernement. C'est un problème fréquent. Au foyer, si nous voulons inciter les clientes à avoir recours aux services de Santé Canada, nous devons nous assurer qu'elles ont le statut d'Indien.
    Ce que nous essayons de faire, c'est de faire venir des psychologues au foyer et d'avoir recours aux services de santé non assurés pour obtenir des services. Cependant, si vous n'avez pas de certificat de statut d'Indien, si celui-ci est échu ou que votre statut n'est pas reconnu, nous ne pouvons pas vous aider. C'est très difficile parce que, quand il y avait la Fondation autochtone de guérison, tout le monde avait accès aux services. Les clientes n'avaient pas à composer les numéros de téléphone, elles n'avaient pas à avoir avec elles leur certificat de statut d'Indien, et nous n'avions pas tout ce problème avec les certificats échus et à renouveler. Quand vous êtes en situation de crise, vous avez besoin d'aide immédiatement et non au moment où votre certificat est renouvelé.
    Pour nous, il y a certainement des problèmes à ce sujet, c'est vrai.

  (1710)  

    Est-ce qu'il me reste du temps?
    Il vous reste 45 secondes.
    Rapidement, madame Dion Stout, vous avez parlé des cinq projets qui mettent l'accent sur l'itinérance. Savez-vous si l'un ou l'autre de ces projets se penche sur les effets des pensionnats sur l'itinérance?
    Non, ils ne se penchent pas sur cette question en particulier parce que les pensionnats ne font pas partie de notre mandat.
    Savez-vous si quelqu'un s'intéresse à cet aspect, c'est-à-dire au nombre de personnes qui sont peut-être sans abri à cause d'un traumatisme intergénérationnel ou parce qu'il est un survivant d'un pensionnat?
    Pas directement; du moins, pas que je sache. Je sais qu'on m'a fait des commentaires à propos de survivants qui vivent maintenant dans la rue et qui ont des problèmes de toxicomanie, mais nous ne savons pas combien ils sont. Ce sont des cas isolés.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Lemay, vous disposez de cinq minutes.
    J'ai été un peu abasourdi d'entendre Nakuset dire qu'il fallait attendre le renouvellement de sa carte pour obtenir des services. Ça m'inquiète beaucoup.
     J'aimerais savoir si vous partagez la vision exprimée dans le texte suivant:
À un moment donné, j’ai cru ce mythe que si nos gens devenaient sobres, nos problèmes seraient résolus. Maintenant, je sais que tout ce que (cela) fait, c’est comme d’enlever une pelure à un oignon. On est confronté à bon nombre de problèmes différents … liés à l’expérience que nos gens ont vécue depuis les 80-90 dernières années. Je crois que toute la question des pensionnats [et de leurs séquelles] est une problématique qui prendra au minimum 20 ans à [assumer].
    Cela a été dit en 1993, puis colligé dans le rapport final de la Fondation autochtone de guérison.
    Ma question est bien simple: partagez-vous cette opinion émise par Mme Maggie Hodgson, une survivante des pensionnats?

[Traduction]

    Je partage tout à fait cette opinion. Je peux aussi vous faire part de mon expérience personnelle, qui est tout à fait liée au travail que nous faisons.
    Nous sommes une famille reconstituée, et mon mari avait des enfants avant que nous nous rencontrions. Notre fille a été grandement touchée par les premières années, avant qu'il ne soit rétabli. Le premier enfant de notre fille a aussi été touché, mais sa plus jeune fille a grandi dans un monde entièrement différent. Nous faisons donc tout ce qui est en notre possible pour aider l'aînée de nos petits-enfants à rompre ces cycles.
    Pour John, mon mari, la guérison a commencé il y a environ 25 ans. Il s'est montré très déterminé à trouver de l'aide pour lui-même et, comme nous avions tous les deux un emploi, nous pouvions obtenir des services avant l'arrivée de la FADG.
    Donc, seulement dans notre petite famille, vous savez, à partir du début du traitement de John, jusqu'au processus de guérison de Lillian et à celui de l'aînée de nos petites-filles, Tory, qui a 17 ans, nous ressentons encore les répercussions intergénérationnelles au sein même de notre propre famille.
    Est-ce que cela répond à votre question?

  (1715)  

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Autre chose?
    Mme Martin, qui sera suivie de Mme Stout.
    Allez-y, madame Martin.
    Je voulais simplement ajouter quelque chose à ce sujet.
    Nous commençons, pour la première fois, à voir des enfants ou des petits-enfants de survivants venir au foyer. S'il faut au moins 20 ans pour qu'une personne guérisse, comme vous l'avez dit, on se retrouve maintenant avec des personnes de nouvelles générations qui viennent, pour la première fois, demander des services. Cela pourrait vouloir dire qu'on aura besoin de 20 autres années pour cette génération.
    Comme elle le disait, à propos des répercussions intergénérationnelles, il est impossible de prévoir combien de temps cela prendra pour qu'une famille ou une collectivité guérisse des séquelles des pensionnats.
    Merci, monsieur le président.
    À titre de survivante, j'aimerais simplement souligner ce qu'ont dit les autres participants, mais aussi que je crois que, à force de peler cet oignon, on atteindra le cœur, et cela signifie qu'il faudra faire face à nos problèmes psychosociaux. Cela me convainc aussi très fermement qu'il n'y a pas que moi qui fais face au problème de l'héritage laissé par les pensionnats, mais que c'est aussi le cas de nos collectivités. Il faut donc envisager sérieusement des changements structurels.
    Les personnes qui se trouvent au sommet de la pyramide, celles qui sont ici présentes à titre de parlementaires, doivent participer aux changements structurels. Mais des organismes catalyseurs, comme la Commission de la santé mentale du Canada doivent aussi y participer, de même que les gens du peuple qui sont sur le terrain. Quand je vois des approches sur le terrain axées sur la collectivité et le peuple, je conclus toujours qu'il y a d'autres niveaux qui participent.
    Je voulais simplement répondre à une question que vous m'avez posée un peu plus tôt, monsieur le président, au sujet de ce qui se fait entre les divers ordres de gouvernement pour garantir la durabilité des changements. C'est cela, à mon avis, des changements structurels.
    Certains d'entre vous connaissent sûrement un peu l'initiative de la Colombie-Britannique, l'entente tripartite, dans le cadre de laquelle le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les premières nations collaborent dans le secteur de la santé. Ils effectuent une véritable réforme de la santé de façon à ce que, au bout du compte, les premières nations possèdent et administrent leurs propres programmes de santé. Ça me semble très prometteur. Cela n'a jamais été fait ailleurs auparavant, et je crois que ça mérite qu'on s'y intéresse.
    Très bien. Merci, madame Stout.

[Français]

    La dernière intervention revient à M. Bagnell, pour sept minutes.

[Traduction]

    Merci.
    J'ai seulement une question. Je veux savoir s'il y a encore un besoin continu, et j'aimerais connaître l'importance de ce besoin. Vous savez, si une maison est en feu, vous n'arrêtez pas d'arroser tant que l'incendie n'est pas éteint. Je veux donc savoir si la guérison est terminée.
    Ensuite, j'aimerais savoir si, au cours des dernières années, les besoins ont augmenté. Je sais que le gouvernement reconnaît qu'il y a encore des survivants qui se manifestent. De fait, plus de 100 millions de dollars ont été réservés dans ce budget seulement pour les paiements, ce qui signifie qu'il y a beaucoup plus de survivants qui se manifestent et qui auront besoin de traitement. Mais j'aimerais tout de même savoir, selon l'expérience que vous avez des projets offerts, si vous avez l'impression que la guérison est terminée ou que les besoins augmentent? Et y-a-t-il encore de la guérison à faire?
    Merci de poser la question.
    En ce qui concerne le projet auquel je travaille, les paiements d'expérience commune, nos listes d'attente étaient auparavant de trois à quatre mois et elles dépassent maintenant six mois. Cela signifie qu'il y a plus de gens qui souhaitent obtenir des services. La personne qui s'occupe de l'accueil des clients est arrivée en pleurs dans mon bureau parce que des personnes sont mortes avant d'avoir pu se rendre dans le haut de la liste d'attente. C'est arrivé à quelques occasions l'an dernier, et c'est une situation vraiment très très difficile à vivre.
    C'est très éloquent.
    Pour répondre à votre question, je crois que les besoins en matière de guérison sont beaucoup plus importants. Ils reviennent d'une génération à une autre. Il y a aussi beaucoup de déni au sein de nos populations, et bien des gens pensent qu'ils ne sont pas touchés par ce problème. De plus, il y a tant de types de répercussions.
    Je ne parle pas ma langue parce que ma mère a fréquenté un pensionnat; je ne pense pas que Santé Canada pourra m'aider beaucoup à ce sujet. J'ai été adoptée parce que ma mère était allée au pensionnat. Je peux parler l'hébreu, mais je connais très peu de choses à propos de ma propre culture.
    Il s'agit seulement de mon cas, mais toutes les femmes qui ont visité notre foyer ont été touchées par les pensionnats, que ce soit parce que leurs parents ou leurs grands-parents les ont fréquentés. C'est simplement que le problème est si vaste. C'est pour cette raison que c'est si difficile pour le foyer de ne plus offrir ces services: les gens viennent à nous parce qu'ils en ont besoin.
    Nous offrons ces programmes depuis 11 ans. Nous pouvions aider 400 personnes par année — faites le calcul — et, subitement, c'est terminé. Les gens se retrouvent à errer avec leurs blessures et à tenter de savoir s'il sont admissibles ou pas aux services de Santé Canada. C'est une vraie honte.

  (1720)  

    D'accord.
    Madame Ford.
    Je suis d'accord pour dire que le besoin est toujours là, et qu'il y aura toujours de nouveaux clients. L'une des choses mentionnées par le centre à Iqaluit, c'est que, en 2008-2009, le centre a accueilli plus de 4 000 clients qui se sont présentés sans rendez-vous et que, en 2009-2010, il y a eu une importante augmentation du nombre de femmes et de personnes à la recherche de counselling. Encore une fois, les choses ont commencé plus tard dans les collectivités inuites. Je crois que cela reflète que les programmes ont tranquillement gagné la confiance des gens. Les gens ne pouvaient peut-être pas se présenter pour dire qu'ils avaient besoin de counselling compte tenu des programmes qui étaient offerts, mais ils souhaitaient tout de même obtenir des services de guérison, et ils ont pu en obtenir sous une forme qui leur convient.
    Je pense que, à mesure que les programmes ont évolué et que la confiance des gens a grandi, de plus en plus de gens ont voulu accéder aux programmes, y compris d'autres tranches de la population, comme les aînés, les jeunes et les hommes.
    Merci, monsieur Bagnell.
    Madame Crowder, vous aviez une brève question?
    Oui, elle est très brève.
    Quand nous avons demandé aux représentants de Santé Canada, quand ils sont venus nous rencontrer, combien de temps duraient les services de soutien en santé pour les personnes qui ont vécu de mauvaises expériences dans les pensionnats, ils nous ont donné une réponse vague. Est-ce que Santé Canada vous a dit pendant combien de temps les programmes seraient offerts?
    J'ai entendu dire que tous les services destinés aux survivants des pensionnats indiens prendraient fin en 2012. Cela inclut le personnel du Programme de soutien en santé et les services de counselling. C'est ce qu'on m'a dit récemment.
    C'est Santé Canada qui vous a dit ça?
    Une personne de Santé Canada.
    Est-ce que quelqu'un d'autre a entendu quelque chose à ce sujet?
    En ce qui concerne les activités nationales de vérité et de réconciliation, ils n'auront pas le choix d'offrir des services de soutien jusqu'à ce que les sept activités aient eu lieu. Par la suite, c'est-à-dire en 2014, il y aura au moins ce niveau de service... mais je ne sais pas ce qui se passera à l'échelle communautaire.
    D'accord. Merci madame Crowder.
    Mesdames et messieurs, avant de suspendre les travaux, j'aimerais attirer votre attention sur deux choses. D'abord, jeudi, nous terminerons l'étude, ou du moins, l'audition des témoins. Nous accueillerons un dernier témoin, un représentant de l'APN, pendant environ 45 minutes, pendant la première partie de la réunion de jeudi. Par la suite, nous entendrons la vérificatrice générale, qui sera parmi nous, puis nous reprendrons notre étude du développement économique des territoires du Nord. Nous avons aussi prévu 30 minutes à la fin de la réunion de jeudi pour donner des directives à notre analyste en ce qui concerne le rapport sur l'étude de la Fondation autochtone de guérison. C'est ce qui est prévu pour jeudi.
    Ensuite, je vous mentionne que nous vous avons remis, cet après-midi, un calendrier qui couvre toutes nos activités jusqu'à la fin de la session du printemps. J'aimerais que vous l'examiniez.

[Français]

    Par contre, il y a un changement à l'horaire.

[Traduction]

    L'examen du projet de rapport sur la Fondation autochtone de guérison se fera à la suite du Budget principal des dépenses prévu pour le 27. C'est le seul changement que je veux signaler.

[Français]

    Monsieur Lévesque, vous avez une question?
    Oui, monsieur le président. Quelque chose m'a échappé. On a bien une autre réunion cette semaine?

  (1725)  

    Oui, bien sûr.
    On sert un dîner léger aux membres des comités qui siègent aux mêmes heures que nous, soit de 15 h 30 à 17 h 30. Je trouve que c'est très bien. Je ne demande pas nécessairement qu'on nous en serve un les mardis, mais au moins les jeudis. En effet, après la séance, nous retournons presque tous chez nous et nous n'avons pas le temps de manger avant de partir. Nous devons alors le faire vers 23 heures. Cet arrangement serait très utile. Comme le greffier est un ami des gens de la cuisine...

[Traduction]

    Est-ce que ça vous va? La dernière chose que nous souhaiterions, ce serait de vous envoyer sur la route sans que vous ayez mangé.
    Monsieur Bagnell.
    Juste pour être certain que le compte rendu est à jour, je veux confirmer que l'attachée de recherche attend toujours une carte de Santé Canada sur laquelle figurent le lieu et le nombre d'électeurs, de même qu'une carte de la Fondation de guérison sur laquelle on pourrait voir tous les projets et une estimation du nombre de clients.
    D'après ce que je comprends — et je m'en remettrai à Tonina s'il y a des changements — nous n'avons pas été en mesure d'obtenir une telle carte de la Fondation de guérison. Nous nous sommes adressés au ministère pour savoir s'il était possible d'obtenir cette information et que celle-ci soit présentée sous la forme d'une carte.
    Est-ce exact, d'après ce que vous en savez?
    Sur le site Web de Santé Canada, il y a une liste des bureaux régionaux qui peuvent offrir le programme, mais il n'y a pas de carte. J'ai demandé à Graeme de communiquer avec Santé Canada pour que le ministère nous fournisse une carte et nous dise s'il y a d'autres bureaux régionaux qui ne figurent pas sur le site Web et qui offrent le programme en santé pour les victimes des pensionnats indiens.
    La Fondation autochtone de guérison a dit qu'elle vous fournirait une carte des 134 projets et des 12 établissements partout au Canada et du nombre approximatif des personnes qui ont participé à chacun de ces projets. On ne l'a pas encore fait, je suppose.
    Je vais laisser Graeme répondre à cette question.
    Nous ne l'avons pas reçu.
    Nous avons encore un peu de temps. Nous donnerons des directives à l'analyste jeudi, puis nous reprendrons certainement les travaux.
    Monsieur Russell.
    J'aimerais demander à nos analystes s'il est possible d'obtenir quelques scénarios de Santé Canada. Quand une personne de Pangnirtung demande de l'aide, que se passe-t-il — ou encore, que se passe-t-il si une personne appelle d'une autre collectivité? Si nous avions une liste de trois ou quatre collectivités, de façon à ce que, si vous êtes dans une collectivité en particulier... Pouvez-vous obtenir cela?
    Vous voulez parler d'un scénario?
    Disons qu'une personne a un problème et qu'elle compose le numéro sans frais. Que se passe-t-il? Nous pouvons évidemment utiliser l'exemple de véritables collectivités; elles n'ont pas à être fictives. Donnez-nous un aperçu de ce que Santé Canada offre aux gens.
    Monsieur Rickford.
    C'est une bonne question. Nous aimerions savoir ce qui se passe dans les 450 collectivités et plus qui n'ont pas les programmes de la Fondation autochtone de guérison.
    Nous pouvons probablement demander à Santé Canada ce qui se passe dans le cas des 450 collectivités qui ne sont pas couvertes par la FADG.
    Avant de conclure, j'aimerais remercier grandement nos intervenants d'aujourd'hui de leurs exposés et de leurs réponses. Cela nous aidera certainement dans notre étude.
    Merci, mesdames et messieurs, et soyez prudents en rentrant.

[Français]

    La séance est levée.
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