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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 013 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 31 mars 2009

[Enregistrement électronique]

(0905)

[Traduction]

    Je déclare ouverte la présente séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
    Nous allons procéder à l'examen des questions relativement nombreuses qui figurent à l'ordre du jour que vous avez sous les yeux. Je ne les lirai pas, mais je tiens à souhaiter la bienvenue aux témoins de la Gendarmerie royale du Canada, de l'Agence des services frontaliers du Canada et du Service canadien du renseignement de sécurité.
    Messieurs, nous nous réjouissons à l'idée d'entreprendre la présente séance et d'entendre votre témoignage. Je ne sais plus par qui nous allons commencer, mais je vous demanderais de vous présenter et de présenter vos collègues, et peut-être également de nous indiquer le poste que vous occupez dans votre organisation respective.
    Avez-vous décidé qui parlera en premier?
    Oui. Comme j'ai perdu le tirage au sort, j'imagine que c'est à moi de commencer.
    D'accord, monsieur.
    Monsieur O'Brian, je vous prierais de commencer, si vous le voulez bien.
    Nous avons l'habitude d'accorder environ 10 minutes aux témoins. Nous allons donc commencer par entendre tous vos témoignages, puis nous passerons ensuite aux questions et aux observations, si cela vous convient.
    Allez-y, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Je m'appelle Geoffrey O'Brian. Je suis membre du SCRS. Je suis avocat de formation, mais j'occupe un poste de gestionnaire au sein du SCRS depuis les débuts de cette organisation.
    Je sais que mon témoignage d'aujourd'hui fait suite à celui de deux directeurs du SCRS, l'actuel et son prédécesseur, qui ont comparu devant le comité précurseur du vôtre en octobre 2006. C'était, je crois, environ un mois après la publication du premier rapport de la commission O'Connor, qui contenait 23 recommandations. Plus récemment, il y a tout juste trois semaines, le directeur exécutif du CSARS, le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, a comparu devant votre comité.
    Ayant pris connaissance de son témoignage et des questions qui lui ont été posées, je ne crois pas, en toute franchise, qu'il soit utile de vous répéter ce qui a été dit. Si vous me le permettez, j'aimerais plutôt profiter de l'occasion pour faire une observation d'ordre général. Cette observation est la suivante: si complexe soient-ils, les problèmes mis en lumière par les commissions d'enquête O'Connor et Iacobucci, à savoir l'échange de renseignements, les droits de la personne et la reddition de comptes, n'ont rien de nouveau pour le SCRS. De fait, le rapport de la commission McDonald, produit au début des années 1980 et rendu public en août 1981 à la suite des audiences tenues à la fin des années 1970, faisait déjà état de ces questions. Pour nous, la commission McDonald est en quelque sorte le véritable ancêtre de toutes les commissions d'enquête, et les recommandations de son rapport sont évidemment à l'origine de la création du SCRS.
    À ce sujet, le rapport contenait notamment les observations suivantes: « La liaison avec les services étrangers suscite des préoccupations importantes », dont l'une « a trait à la conclusion d'ententes qui risquent d'entrer en conflit avec la politique étrangère du Canada ».
    Une autre préoccupation concerne la nécessité d'exercer un contrôle suffisant sur les informations qui quittent le pays pour faire en sorte que les droits des Canadiens soient bien protégés. C'est en partie du fait de l'importance et de la complexité de l'échange de renseignements à l'échelle internationale que des dispositions de sauvegarde inusitées ont été insérées dans la Loi sur le SCRS de 1984. Les membres savent peut-être que, selon l'article 17 de cette loi, avant de conclure une entente avec un service étranger, nous devons obtenir l'approbation de notre ministre, le ministre de la Sécurité publique, qui doit consulter son collègue, le ministre des Affaires étrangères. Il nous est donc loisible, et nous y sommes même obligés, de songer aux répercussions qu'aurait cette entente sur le plan de la politique étrangère du Canada, du respect des droits de la personne et, bien sûr, de la responsabilité ministérielle dans la mesure où notre ministre donne son approbation dans tous les cas.

[Français]

    Le CSARS examine aussi ces ententes et regarde à la loupe les dispositions particulières ou les enjeux spécifiques qui interviennent chaque fois. Je ne crois pas me tromper en disant que chacun des rapports annuels du CSARS depuis presque 25 ans a traité de certains points des ententes et a fait des observations.

[Traduction]

Par exemple, dans son rapport annuel le plus récent, celui qu'il a déposé au Parlement le 27 janvier dernier, le CSARS a fait remarquer que le SCRS avait conclu 276 ententes avec des organismes représentant 147 pays.
    Plus particulièrement, au cours de la dernière année, le CSARS s'est penché sur les ententes avec les services étrangers faisant l'objet de restrictions « en raison des piètres antécédents des pays ou organismes concernés en matière de droits de la personne, de leur fiabilité ou de leur capacité à protéger les renseignements fournis par le SCRS. » Le CSARS a constaté que nous avions respecté les restrictions que nous nous étions nous-mêmes imposées, et que, et je cite:
Le Service avait su trouver un juste équilibre entre la nécessité de recueillir des renseignements vitaux en matière de sécurité et celles de demeurer à l'affût des problèmes que peut poser le fait de traiter avec un organisme frappé de restrictions.
(0910)

[Français]

    Le juge O'Connor s'est exprimé ainsi dans son rapport de 2006, où il écrivait que les décisions intervenant dans les rapports avec un pays indifférent aux droits de la personne peuvent être très difficiles et ne se prêtent pas à des règles simples ou normatives.

[Traduction]

    Toujours selon le juge O'Connor, ces décisions « ne se prêtent pas à des règles simples ou normatives ». Concrètement, cela met en évidence, selon moi, le fait que nous avons, au SCRS, près de 25 ans d'expérience relativement aux examens continus et aux mécanismes de reddition de comptes. Cela fait partie de notre culture organisationnelle. Même si nous ne sommes pas toujours d'accord avec le CSARS, et même si nous n'apprécions pas toujours ces façons de faire, notre directeur a admis que le système d'examen prévu par la Loi sur le SCRS a fait de nous, au fil du temps, un meilleur service.
    C'est à dessein que j'ai employé l'expression « au fil du temps », car il me semble que quiconque a réfléchi à ces questions en a conclu qu'il n'existe pas dans ce domaine de réponses simples, faciles et définitives. Dans mon esprit, cette réalité s'inscrit dans la suite logique du processus dicté par la Loi sur le SCRS, à savoir un processus continu et capable de s'adapter selon l'évolution des conditions opérationnelles, juridiques et politiques.
    Le directeur exécutif du CSARS, Susan Pollak, a fait allusion à cela lorsqu'elle a comparu devant votre comité plus tôt ce mois-ci. Elle a indiqué que, d'après son expérience, et celle du CSARS, et je cite:
Souvent, nos recommandations sont rendues publiques alors que nous avons déjà mis en place les mesures correctrices que nos examens exigeaient [...] autrement dit, grâce à ces examens, les problèmes sont désormais évidents pour les deux parties, et le Service a déjà commencé à mettre en oeuvre les mesures dont nos recommandations font état. Lorsque vient le moment de faire connaître nos recommandations, le Service a déjà, partiellement ou entièrement, fait ce que nous lui avions suggéré.
    S'agit-il de questions compliquées? Oui. L'existence même des commissions O'Connor et Iacobucci, à laquelle j'ajouterais la commission d'enquête sur l'affaire Air India, en témoigne. Mais nous avons réagi, et je pense que nous continuerons à réagir, à ces commissions et, je le dis franchement, de la même manière que nous réagissons régulièrement aux examens continus du CSARS et à ceux que l'inspecteur général du SCRS présentent à notre sous-ministre. En d'autres termes, nous prenons acte des leçons et des idées qu'ils nous présentent quant à la manière d'améliorer nos politiques et nos pratiques, notamment celles qui concernent l'échange de renseignements avec des États étrangers qui se préoccupent peu des droits de la personne.
    En bref, nous avons maintenant l'habitude de ces examens continus, qui ont pour nous le résultat d'assurer un processus continu d'ajustement et de raffinement.

[Français]

    J'espère que mes remarques vous auront permis de mieux mettre en contexte votre étude des observations, des conclusions et des recommandations des commissions O'Connor et Iacobucci.

[Traduction]

    Je vous remercie de nous avoir invités ici aujourd'hui. J'attends vos questions avec un mélange égal, assorti d'un peu d'anxiété, de hâte et d'intérêt.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à l'Agence des services frontaliers du Canada. Monsieur Leckey, s'il vous plaît.
    Je m'appelle Geoffrey Leckey. J'occupe actuellement le poste de directeur général de la Direction du renseignement de l'ASFC.

[Français]

    Merci, monsieur le président et membres du comité, et bonjour.
    Au nom de l'Agence des services frontaliers du Canada, l'ASFC, j'aimerais remercier le comité de m'avoir permis, en cette occasion, de discuter de notre rôle dans la réponse du gouvernement aux recommandations faites par le juge O'Connor et de répondre à toute question éventuelle.

[Traduction]

    J'aimerais commencer par une observation d'ordre général à propos du rôle de l'ASFC en ce qui a trait à la protection de la sécurité nationale du Canada, en espérant que cela permettra de faire la lumière sur le rôle qu'a joué notre agence dans les événements qui ont été examinés dans le cadre des commissions O'Connor et Iacobucci.
    Je vais vous expliquer comment nous travaillons, de concert avec d'autres organismes canadiens, pour mener à bien notre mission qui consiste à assurer la sécurité des frontières du Canada, à lutter contre le crime transfrontalier et à protéger l'intégrité des programmes d'immigration du Canada. J'exposerai ensuite les mesures que nous avons prises depuis la publication du rapport O'Connor pour améliorer nos politiques et nos procédures en vue de coopérer avec d'autres organismes pour parer aux menaces à la sécurité du Canada et des Canadiens et de protéger les droits de la personne d'une manière plus efficace qui répond aux attentes des Canadiens.
    Le juge O'Connor a indiqué que, dans les événements entourant M. Arar, le rôle de l'ASFC concernait principalement l'échange de renseignements, plus particulièrement les listes de surveillance que nous établissons pour le compte d'autres organismes. En gardant cela présent à l'esprit, j'aimerais fournir de l'information à propos des listes de surveillance et du contrôle frontalier, avant de vous expliquer de façon détaillée les diverses mesures que nous avons prises en vue de renforcer la gestion et l'efficacité de nos systèmes de surveillance.
(0915)

[Français]

    Les effectifs de l'ASFC, qui s'élèvent à plus de 13 000 employés, offrent des services à environ 1 200 emplacements au Canada et à 39 emplacements internationaux. Les employés de l'ASFC exécutent la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, la Loi sur les douanes et au-delà de 90 autres lois fédérales.
    Les visiteurs, les immigrants et les demandeurs d'asile sont soigneusement sélectionnés pour empêcher les personnes interdites de territoire d'entrer ou de rester au Canada. Cette sélection constitue une partie essentielle de l'engagement du gouvernement du Canada d'assurer la sûreté et la sécurité du Canada.
    L'ASFC travaille en étroite collaboration avec Citoyenneté et Immigration Canada, le Service canadien du renseignement de sécurité et les organismes canadiens d'exécution de la loi, pour empêcher les criminels et les personnes représentant un risque pour la sécurité d'entrer au Canada.

[Traduction]

    Dans le cadre de notre système de surveillance, nous établissons des avis de surveillance à l'égard de personnes, d'entreprises et de moyens de transport pouvant soulever un intérêt pour une raison ou une autre. L'information défavorable, fondée sur des indicateurs de risque ou fournie par les services de renseignements, est versée dans les systèmes utilisés par l'ASFC. Cette information est utilisée pour prévenir l'entrée au Canada de voyageurs pouvant être interdits de territoire ou de marchandises illégales. L'ASFC établit et maintient des avis de surveillance pour son propre usage. Toutefois, les renseignements fournis par nos partenaires canadiens peuvent également être versés dans notre base de données de surveillance, et nous pouvons également établir de tels avis à la demande de nos partenaires canadiens, comme la GRC, ou de nos partenaires internationaux, comme Interpol.
    L'ASFC a entrepris un examen exhaustif de ses politiques et procédures touchant l'échange de renseignements à la suite de la publication du rapport du vérificateur général sur la sécurité nationale en mars 2004. Cet examen, qui s'inspirait du travail que nous avons effectué dans le cadre de la commission d'enquête O'Connor, portait sur bon nombre des questions que le juge O'Connor a soulevées ultérieurement dans son rapport.
    Les recommandations du juge O'Connor qui revêtent une importance particulière pour l'ASFC concernent les avis de surveillance et l'échange de renseignements. Nous avons également porté une attention particulière aux recommandations relatives aux dispositions de sauvegarde visant à prévenir l'échange inapproprié de renseignements, à l'utilisation des renseignements provenant des pays qui ont des antécédents discutables en matière de droits de la personne et au profilage racial, religieux ou ethnique. Notre examen s'est soldé par l'élaboration de lignes directrices et de procédures écrites améliorées en ce qui a trait à l'utilisation des avis de surveillance et à l'échange de renseignements, y compris des procédures permettant à l'ASFC de réagir immédiatement dans les cas où ces renseignements ont été utilisés de manière inappropriée et de prévenir toute autre utilisation inappropriée.
    Ces politiques et procédures ont été mises en oeuvre. Une formation obligatoire pour les agents du renseignement portant sur l'utilisation appropriée des avis de surveillance et sur l'échange de renseignements et un cours intégré portant sur l'échange et la communication de renseignements ont été élaborés et ont commencé à être dispensés au cours de l'exercice 2007-2008.
    Un examen et une mise à jour de la politique du service de renseignements de l'ASFC en matière d'échange de renseignements ont été parachevés et mis en oeuvre en octobre 2008. Cette politique, qui prévoit la mise en place de dispositions de sauvegarde renforcées et des examens réguliers et inopinés des listes de surveillance pour en assurer l'exactitude et la validité, établit le fondement de nos pratiques en matière d'échange de renseignements. Comme c'était le cas auparavant, cette politique énonce expressément que l'ASFC doit, dans le cadre de sa procédure normale, examiner tous les renseignements reçus de sources extérieures pour en évaluer la viabilité et pour déterminer s'ils ont pu être obtenus par des moyens qui contreviennent aux droits de la personne.
    Notre politique oriente tous les agents sur le terrain dans le cadre d'enquêtes en matière de sécurité nationale et insiste sur le fait que le ciblage et l'établissement des listes de surveillance doivent être fondés sur des critères objectifs d'évaluation du risque. La politique énonce clairement que, pour l'ASFC, la race, la religion ou l'appartenance ethnique ne constituent pas des facteurs de risque pertinents au moment de procéder au ciblage ou à l'élaboration de listes de surveillance. Là encore, cela s'inscrit dans la suite logique de nos pratiques antérieures.
    Un examen et une mise à jour de la politique et des procédures de l'ASFC en matière de surveillance ont été mis en oeuvre en novembre 2008. À l'appui de la mise à jour, des changements aux systèmes ont été apportés et parachevés en janvier 2009. Un processus permettant à nos agents d'intégrité des mouvements migratoires affectés à l'étranger et aux agents des visas de Citoyenneté et Immigration Canada de demander des listes de surveillance depuis leur bureau à l'étranger a été ajouté à la politique en mars 2009.
    La politique de surveillance consolide les mécanismes de contrôle et de surveillance internes en matière d'émission, de maintien, de communication et de clôture des avis de surveillance de l'ASFC. Les mesures que je viens de mentionner, qui ont permis d'améliorer considérablement nos pratiques en matière d'échange de renseignements et de gestion des listes de surveillance, nous permettent de respecter notre engagement de mettre en oeuvre les recommandations du rapport O'Connor.
(0920)

[Français]

    Le commissaire Iacobucci s'est rapporté aux mesures de l'ASFC principalement en ce qui concerne l'affichage des avis de surveillance sur les trois personnes, à la demande des organismes partenaires, les contrôles à la frontière effectués par des agents de l'ASFC afin de soutenir l'enquête menée par le projet A-O Canada et l'échange des renseignements qui ont été communiqués par l'ASFC au projet A-O Canada sans le consentement de l'ASFC.
    Ces questions ont été soulevées dans le rapport O'Connor. Les mesures que j'ai décrites, qui ont été prises pour régler les lacunes décelées lors de l'examen de nos politiques relatives aux avis de surveillance, à l'échange de renseignements et aux contrôles à la frontière, étaient adéquates à la lumière des recommandations formulées par le juge O'Connor.

[Traduction]

    À présent, les politiques et les pratiques de l'ASFC en matière d'échange de renseignements concordent en tous points avec les constatations rendues publiques par le commissaire Iacobucci. Les mesures législatives qui régissent nos activités, plus particulièrement l'article 107 de la Loi sur les douanes, énoncent dans un contexte juridique les principes de base que l'ASFC doit respecter en matière d'échange de renseignements. Ces principes s'inscrivent dans la suite logique de la Charte et sont conformes aux attentes des Canadiens, qui veulent que leurs renseignements personnels soient protégés contre les intrusions injustifiées.
    Pour l'ASFC, la Charte canadienne des droits et libertés est la clé de voûte de notre démocratie. Nous sommes conscients du fait que les mesures de sécurité doivent établir un juste équilibre entre la protection des Canadiens, de leur mode de vie et de leurs libertés, et le respect des droits et libertés de toutes les personnes, conformément aux lois canadiennes et aux lois internationales.
    Monsieur le président, cela conclut ma déclaration préliminaire. Je vous remercie encore une fois de m'avoir invité à venir témoigner aujourd'hui devant votre comité.
    Je me ferai un plaisir de répondre aux questions des membres du comité.
    Merci beaucoup, monsieur.
    Nous allons maintenant passer à M. Michaud, de la GRC.

[Français]

    Bonjour. Je vous remercie, monsieur le président et membres du comité, de me donner cette occasion de répondre à vos questions sur ce dossier très important.

[Traduction]

    Je m'appelle Gilles Michaud. Je suis directeur général, Direction des renseignements criminels et sécurité nationale. J'occupe ce poste depuis huit mois.
    Je suis accompagné ce matin par le surintendant Bert Hoskins, qui est responsable de la Direction générale des Affaires législatives de la sécurité nationale de la GRC.

[Français]

    Tout d'abord, je tiens à souligner que la GRC accorde le plus grand sérieux aux conclusions des commissions d'enquête O'Connor et Iacobucci.
    En procédant à la mise en oeuvre intégrale des recommandations formulées à son endroit dans la première partie du rapport du juge O'Connor, la GRC a renforcé ses politiques et son corps de gouvernance en ce qui a trait aux enquêtes criminelles relatives à la sécurité nationale.
    Ces améliorations portent principalement sur les relations avec les organismes partenaires, la formation à l'égard des réalités culturelles et des droits de la personne, les échanges de renseignements et le contrôle centralisé.
(0925)

[Traduction]

    Nous avons présenté au comité un document qui explique en détail comment la GRC a donné suite à chacune des recommandations formulées à son endroit dans la première partie du rapport O'Connor. La semaine dernière, nous avons invité quelques employés et recherchistes de votre comité dans nos bureaux pour discuter des mesures que nous avons prises pour veiller à ce que les recommandations du juge O'Connor aident à orienter l'important travail que nous accomplissons pour assurer la sécurité nationale du Canada. Je crois que les mesures que nous avons prises témoignent de l'engagement de la GRC à régler les importants problèmes soulevés par les juges O'Connor et Iacobucci. De fait, les recommandations formulées dans la première partie du rapport O'Connor font à présent partie intégrante des méthodes qu'emploie la GRC pour mener ses enquêtes criminelles relatives à la sécurité nationale.
    Permettez-moi d'aborder brièvement certains des progrès les plus notables que nous avons réalisés au sein de la sécurité nationale. En élaborant le cadre de gouvernance pour accroître l'efficacité des enquêtes relatives à la sécurité nationale et la politique connexe, nous avons renforcé notre capacité de surveiller, de superviser et de diriger de manière centralisée les enquêtes criminelles relatives à la sécurité nationale. L'atteinte de ce but repose en grande partie sur une responsabilité et une obligation redditionnelle accrues à tous les niveaux, dans le cadre d’une approche de gouvernance décentralisée. Cela signifie, entre autres, que le travail de nos employés est régi par un cadre clair et concis, qui assure la surveillance et le contrôle centralisés des enquêtes criminelles relatives à la sécurité nationale. Le fait que nos employés aient accès à une formation améliorée sur les réalités culturelles et les droits de la personne vient appuyer ce cadre. Cette formation est donnée par des citoyens respectés qui représentent les diverses communautés culturelles au Canada et est régulièrement mise à jour en fonction de l'environnement actuel. De plus, les nombreuses activités de sensibilisation communautaire qui s'inscrivent dans le programme de sécurité nationale visent à établir une confiance et une compréhension réciproques entre le personnel de la GRC et les membres des collectivités les plus touchées par les activités liées à la sécurité nationale.
    En ce qui concerne les échanges de renseignements, la GRC maintiendra sa politique de communication avec les organismes partenaires compétents, pratique appuyée par le juge O'Connor dans son rapport. Pour respecter ses recommandations à cet égard, nous devons assurer la conformité de ces échanges avec les politiques établies en matière de pertinence, de fiabilité et d'exactitude. En outre, les responsables des enquêtes criminelles relatives à la sécurité nationale consultent le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international au moment d'évaluer les répercussions que peuvent avoir les échanges de renseignements avec un pays aux antécédents douteux en matière de droits de la personne.
    Comme le précise notre politique, lorsque nous effectuons une telle évaluation, nous faisons tout notre possible pour veiller à ce qu’aucun acte de torture ou autre violation des droits de la personne ne soit tolérée ou acceptée. Dans cette optique, la GRC analyse les antécédents en matière de droits de la personne de tout pays avec lequel elle entend échanger de l'information. Cette analyse se fonde sur les rapports annuels du MAECI concernant la réputation du pays à ce chapitre et peut aussi tenir compte de rapports provenant d'autres organismes voués à la défense des droits de la personne. Toutes les décisions d'interagir avec un pays ayant mauvaise réputation au plan des droits de la personne sont documentées. Nous consignons alors notamment l'importance de fournir ou de recevoir l'information en question et l'incidence de cet échange sur les obligations de la GRC en ce qui concerne les droits de la personne.
    Je tiens à préciser qu'il n'existe aucune interdiction absolue quant à l'utilisation des renseignements reçus par la GRC. Cependant, nous n'utilisons pas les renseignements dont la fiabilité, l'exactitude et la pertinence soulèvent des doutes. Toute information obtenue sciemment sous l'effet de la torture est, par définition, non fiable. Le défi au quotidien est d'évaluer chaque situation à partir des faits connus quant à la possibilité qu'une information donnée ait été obtenue sous l'effet de la torture. Notre politique se fonde sur l'évaluation de ces situations au cas par cas.

[Français]

    J'aimerais aussi souligner que la relation entre la GRC et le SCRS est aussi solide que jamais. Nous avons mis à jour le protocole d'entente entre les deux organismes pour clarifier certains aspects fondamentaux de nos activités respectives et pour établir des procédures qui favorisent la résolution de problèmes dans un esprit de collaboration. Cette démarche a beaucoup renforcé notre relation de travail, grâce à l'introduction d'activités telles que des ateliers conjoints visant à mieux définir les rôles et les responsabilités de chacun. Nous avons la ferme intention d'apporter d'autres modifications à nos enquêtes criminelles relatives à la sécurité nationale, et ce afin de nous adapter continuellement à l'évolution de l'environnement.
    En terminant, j'aimerais souligner que la confiance du public est essentielle à la capacité de la GRC de gérer les situations touchant la sécurité nationale. C'est pourquoi la GRC appuie sans réserve la surveillance accrue de ses enquêtes en la matière, car elle est consciente du rôle important des mécanismes de contrôle dans le maintien de cette confiance. Cela dit, seul le gouvernement du Canada peut mettre en oeuvre cette surveillance accrue, et toute question à cet égard devrait être adressée au ministère de la Sécurité publique.
    La GRC appuiera et appliquera la structure adoptée par le gouvernement du Canada, quelle qu'elle soit, afin d'assurer de façon continue la transparence de nos enquêtes criminelles relatives à la sécurité nationale et la reddition de comptes à leur égard.
    Merci.
(0930)

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Conformément à la pratique habituelle du comité, nous allons maintenant procéder au tour de sept minutes, en commençant par le Parti libéral.
    Monsieur Kania, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais commencer par poser une question à M. Leckey. En ce qui concerne les 23 recommandations du juge O'Connor, pouvez-vous nous dire de quelle manière le SCRS a modifié ses politiques depuis que ces recommandations ont été formulées?
    M. Geoff Leckey: Lorsque vous parlez du SCRS...
    M. Andrew Kania: Désolé. Je voulais parler de l'ASFC.
    Principalement, nous avons mis à jour, amélioré et clarifié nos politiques en matière d'échange de renseignements et celles concernant l'émission et le maintien des avis de surveillance.
    Je vais poser la même question aux représentants du SCRS. J'aimerais savoir si vous auriez tous les deux l'amabilité, à l'instar du représentant de la GRC, de présenter au comité une lettre exposant les modifications internes qui ont été apportées à vos politiques depuis la publication du rapport O'Connor.
    Certainement. Si cela vous convient, je transmettrai cette requête — je sais qu'en octobre 2006, le directeur a évoqué l'élaboration d'un document de ce genre. Pour ce qui est des 23 recommandations — qui font décidément beaucoup jaser, il me semble —, seulement six d'entre elles mentionnaient expressément le SCRS. Par exemple, je crois que la recommandation 13 énonce que le ministère des Affaires étrangères devrait nous transmettre ses rapports annuels évaluant la situation des droits de la personne. Cela a été fait.
    Je pense que, dans la lettre du ministre, qui a été présentée au comité et à propos de laquelle certaines personnes ont formulé des commentaires assez peu flatteurs... si on lit attentivement cette lettre et qu'on examine les recommandations en établissant des correspondances entre elles, franchement, on peut constater qu'il y a là beaucoup de contenu puisque, si je ne m'abuse, les recommandations 11, 14 et 15 portent toutes sur l'échange de renseignements. Par conséquent, si vous vous préoccupez des questions relatives à l'échange de renseignements, vous donnez suite à trois recommandations.
    Mais assurément, si le comité juge utile d'obtenir ce document... En toute honnêteté, il pourrait se révéler être quelque peu redondant, selon... Mais oui, si cela peut être utile au comité, je me ferai un plaisir de transmettre votre requête et d'envisager d'y répondre.
    Merci.
    La lettre que vous avez mentionnée est celle que le ministre a adressée à M. Neve le 9 mars 2009, est-ce exact?
    Il s'agit de la lettre que le comité, d'après ce que je crois comprendre... Oui, en toute honnêteté, je dois admettre que je n'étais pas concerné par cette lettre et que je ne l'ai pas vue, mais que, après qu'elle a été mentionnée, j'ai saisi l'occasion pour m'en procurer une copie et l'examiner. Et oui, je veux dire... Comme vous pouvez le remarquer, à la page 2, il énumère des exemples précis de progrès réalisés. Si vous le voulez, et si cela peut aider le comité, nous pouvons examiner un à un ces exemples et déterminer à quelle recommandation précise chacun d'eux donne suite.
    Merci.
    Je présume que les quatre témoins ont pris connaissance de la lettre datée du 9 mars 2009 que le ministre a adressée à M. Neve. Ai-je raison?
    Une voix: Oui.
    M. Andrew Kania: Je présume donc également que vous avez tous les quatre pris connaissance de la lettre datée du 18 mars 2009 que le commissaire adjoint Bob Paulson a adressée à notre président. Avez-vous tous examiné cette lettre?
(0935)
    Je ne crois pas. Excusez-moi, de quelle lettre s'agit-il?
    Il s'agit d'une lettre datée du 18 mars 2009 adressée à notre président et dans laquelle le commissaire adjoint Bob Paulson expose son point de vue quant à la manière dont la GRC s'est conformée aux recommandations du rapport O'Connor. Vous n'avez pas pris connaissance de cette lettre?
    Je ne crois pas.
    D'accord, ce n'est pas grave. M. O'Brian et M. Leckey, je vais vous demander à tous les deux de présenter au comité, au nom de votre organisation respective, votre lettre personnelle exposant la manière dont vos politiques internes ont été modifiées à la suite des recommandations du rapport O'Connor. C'est la première chose que j'ai à vous demander.
    Nous serons heureux de répondre à votre demande.
    Pour répondre à votre question initiale, l'ASFC se trouve dans la même situation que le SCRS. Sur les 23 recommandations, six concernent directement ou indirectement l'ASFC. Je peux répondre dès maintenant à votre question de façon détaillée, à moins que vous ne préfériez que je vous fournisse ma réponse par lettre.
    Je pense que je préfère cette dernière option, en raison des contraintes de temps. Si nous avions toute la journée devant nous et que l'on ne m'interrompait pas, je serais heureux d'écouter votre réponse dès maintenant. Lorsque vous nous enverrez votre lettre, auriez-vous l'amabilité d'y joindre toute documentation écrite interne dont vous disposez à l'appui de vos conclusions?
    De plus, j'aimerais que l'on vous fournisse une copie de la lettre de la GRC datée du 18 mars 2009. Je répète qu'il s'agit d'une lettre rédigée par le commissaire adjoint Bob Paulson. Auriez-vous l'amabilité de lire cette lettre et de nous envoyer une réponse écrite pour nous indiquer si vous êtes d'accord ou non avec son contenu, en précisant les motifs de votre accord ou de votre désaccord? En outre, veuillez joindre à votre réponse toute documentation interne pertinente dont vous pourriez disposer.
    Excusez-moi. Vous me demandez d'indiquer si j'ai effectivement...
    Nous vous fournirons la lettre. Il s'agit de questions non pas personnelles, mais ministérielles.
    D'accord.
    Je vais poser la même question au représentant de la GRC. Vous avez indiqué avoir déjà pris connaissance de la lettre datée du 18 mars 2009 du commissaire adjoint Paulson. Pourriez-vous la lire et nous fournir des documents à l'appui et des éléments probants? Je ne remets rien en question — je veux seulement en savoir davantage. Auriez-vous l'amabilité d'accéder en tous points à cette requête, de manière à ce que nous disposions d'éléments probants quant aux affirmations qui ont été faites à l'égard de chacune de ces recommandations?
    En ce qui concerne le SCRS, j'aimerais seulement apporter une petite précision. Nous avons des politiques dans quatre secteurs: l'administration, la sécurité, les ressources humaines et l'exploitation. Bon nombre de ces politiques sont rendues publiques. Toutefois, certaines ne le sont pas pour des raisons ayant trait à la protection de la confidentialité des renseignements intéressant la sécurité nationale que vous n'aurez pas de difficulté à comprendre. Puisqu'il arrive souvent que nous soyons dans l'incapacité de parler de cas précis, beaucoup de nos réponses seront de nature plus générale.
    S'il y a quoi que ce soit que vous ne pouvez pas nous fournir, à tout le moins dites-nous le et précisez-nous pourquoi.
    D'accord. C'est un peu comme si vous me posiez la question suivante: « Qu'est-ce que vous ignorez et que vous auriez souhaité dire si vous n'aviez pas...? »

[Français]

    J'ai lu avec beaucoup d'intérêt la longue lettre que la GRC vous a adressée sur la façon dont elle a suivi les recommandations du rapport O'Connor. Je ne veux pas porter de jugement là-dessus. D'ailleurs, je dispose de très peu de temps.
    Sommairement, je m'aperçois que c'est assez répétitif. Disons que les sujets abordés étaient aussi répétitifs: beaucoup de formation, beaucoup d'ateliers, un nombre important de personnes qui ont fini leur formation. Il s'agit maintenant de discuter d'échanges d'informations secrètes qui doivent rester secrètes ou, à tout le moins, être classifiées.
    Il nous manque ici un acteur important, avec lequel vous devez certainement avoir des relations, notamment dans l'établissement de la liste de protection des passagers, appelée couramment la no-fly list. Il s'agit du ministère des Transports, quoique je ne voie pas en quoi ce ministère a la compétence d'évaluer les dangers que représentent certains individus désireux de prendre l'avion. Je pense que cette compétence appartient à la GRC ou au Service canadien du renseignement de sécurité.
    Pourriez-vous nous dire, sommairement, si vous jouez effectivement un rôle dans l'établissement de cette liste ou si des décisions sont prises par le ministère des Transports? Si oui, sur la base de quelles informations prend-on ces décisions?
(0940)
    Au nom de la GRC, je dirai que notre rôle relativement à la no-fly list est de fournir au ministère des Transports des informations que nous pouvons détenir sur des individus qui pourraient porter atteinte à la sécurité aérienne.
    Est-ce le ministère des Transports qui prend la décision d'inscrire une personne sur la liste en fonction des informations que vous leur transmettez, ou est-ce vous qui décidez qui doit être inscrit sur cette liste?
    Je ne voudrais pas vous induire en erreur, mais je ne pense pas que ce soit la GRC qui prend la décision. Cependant, je ne suis pas assez familiarisé avec le processus pour savoir qui prend la décision définitive d'inscrire ou non une personne sur la liste. Je peux m'engager à vérifier et tenter d'obtenir plus de précisions à ce sujet et vous transmettre cette information plus tard.
    D'accord.
    J'imagine que vous avez encore beaucoup d'échanges avec les États-Unis, nos voisins. C'est probablement le pays avec lequel nous avons le plus d'échanges de toutes sortes. Pouvez-vous nous dire si les Américains ont accès aux dossiers judiciaires des Canadiens?
    Vous me demandez s'ils ont accès aux dossiers judiciaires des Canadiens?
    Oui.
    Je m'excuse, mais je ne saurais vous répondre. Peut-être Bert le peut-il.
    En fait, la GRC a un mandat diversifié et comprend différents mécanismes. Je ne suis pas assez familiarisé avec les différents secteurs qui entretiennent une telle relation avec les agences américaines pour savoir jusqu'à quel point elles peuvent avoir accès aux dossiers judiciaires. J'aimerais mieux ne pas m'avancer à répondre et risquer de vous fournir une réponse erronée.

[Traduction]

    Sur le plan spécifique de la sécurité nationale, il est évident que, si les Américains veulent obtenir des renseignements sur un particulier, ils doivent être en mesure de nous démontrer le bien-fondé de leur requête. Évidemment, si nous constatons que cette requête est légitime, et que l'intérêt porté à ce particulier est légitime, nous allons fournir les renseignements demandés.

[Français]

    Je comprends que nous devons échanger avec nos alliés pour nous protéger des dangers en matière de sécurité. Toutefois, s'il existe une liste la plus restreinte qui soit, ce sont bien les dossiers judiciaires. Je connais assez bien le système pour savoir que beaucoup de gens ont commis des crimes et peuvent être dangereux sans jamais avoir été condamnés. Si l'on peut avoir un seul document vraiment objectif, c'est celui qui fait mention des décisions juridiques établissant qu'une personne a commis des crimes. Je me demande si ce n'est pas le premier document qu'on consulte quand on veut évaluer le danger que représente un individu. On examine d'abord le dossier judiciaire et ensuite d'autres choses, non? En tout cas, vous ne le savez pas.
    Le rapport Iacobucci nous suggère, encore une fois, de présenter aux trois personnes mentionnées les mêmes excuses que celles présentées à M. Arar. La GRC a-t-elle été consultée ou a-t-elle un rôle à jouer dans la préparation de ces excuses? Si oui, cela a-t-il été fait?
(0945)
    Premièrement, j'aimerais vous informer que des litiges civils sont survenus en rapport avec ces incidents. En ce moment, il serait donc inapproprié de ma part de faire quelque commentaire que ce soit sur le rapport du juge Iacobucci.
    D'accord.
     Monsieur  O'Brien, vous me corrigerez si j'ai tort, mais je suis certain que vous avez accès aux dossiers judiciaires des Canadiens lorsque vous voulez les consulter. Échangez-vous avec les Américains à ce sujet?

[Traduction]

    Je suis désolé. J'ai un peu de difficulté à comprendre exactement quelle question vous avez posée.
    Voulez-vous simplement savoir si nous avons effectivement accès au CIPC et à la base de données sur les criminels, à l'instar de tous les policiers et d'un bon nombre d'organismes d'enquêtes du pays? Nous échangeons des renseignements à propos de particuliers avec les États-Unis s'il y a une raison qui le justifie et si cela peut nous être utile. Ces renseignements pourraient comprendre le casier judiciaire de la personne en question. J'imagine que ma réponse est en partie précise, pour ce qui est de l'aspect hypothétique de votre question, mais qu'elle est également générale. Tout échange d'information peut faire l'objet d'un examen par le CSARS. Nous avons donc des raisons de croire que, si nous échangeons trop de renseignements, ou trop peu, ou pas suffisamment, ou de manière désinvolte, le système viendra à bout de ce problème.
    Cela répond-il à votre question? Je n'en suis pas certain.

[Français]

    Non, mais mon temps est écoulé.

[Traduction]

    Je suis désolé.
    Monsieur Harris.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs, si l'on en croit ce que nous dit M. O'Brien, il n'y a aucun problème et tout cela n'aura été pour nous qu'une expérience d'apprentissage. Pourtant, nous avons sous les yeux le rapport du juge Iacobucci, par exemple, selon lequel les agents du SCRS ont répété sans cesse, durant l'enquête, qu'ils n'avaient aucune preuve du fait que les autorités syriennes avaient eu recours à la torture, et qu'ils n'estimaient donc pas que la confession de M. Elmaati avait été obtenue par la torture. En fait, le SCRS a décidé de corroborer la confession de M. Elmaati, obtenue par la torture, en envoyant à ses tortionnaires des questions supplémentaires à lui poser.
    La GRC a également obtenu cette confession. Votre rapport, que M. Ménard nous a présenté aujourd'hui, indique que la GRC consulte à présent les rapports annuels du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international pour évaluer la situation des pays ayant des antécédents douteux en matière de droits de la personne. Cela me semble aussi difficile à croire que l'affirmation selon laquelle la GRC ne savait pas que les autorités syriennes avaient recours à la torture. Êtes-vous en train de dire que, pour déterminer si la torture est pratiquée dans un pays, vous vous contentez d'examiner les rapports annuels du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international? Êtes-vous en train de laisser entendre qu'il s'agit là de votre principale, voire de votre seule source d'information?
(0950)
    Non, pas du tout. Ce que je dis, pour l'essentiel, c'est que nous nous renseignons. Nous évaluons la situation de chaque pays avec lequel nous envisageons d'échanger des renseignements. Cette évaluation est fondée en partie sur le rapport annuel du MAECI sur les antécédents du pays concerné en matière de droits de la personne. Nous consultons également le site Web et plein d'autres types de documents d'autres organisations non gouvernementales, par exemple Amnesty International. Avant d'aller de l'avant et d'échanger des renseignements avec un pays, nous procédons à un examen complet.
    S'agit-il d'une nouvelle pratique?
    Il ne s'agit pas d'une nouvelle pratique. Il s'agit d'une pratique améliorée. Nous sommes en train de la consigner par écrit, de manière à ce que nous puissions répondre de nos actes.
    Mais admettez-vous que cela n'a pas été fait dans le cas de M. Elmaati, par exemple, en 2001?
    Je ne peux faire aucun commentaire en ce qui concerne ce qui a été fait ou ce qui n'a pas été fait à ce moment-là. Je peux vous parler de ce que nous faisons à l'heure actuelle.
     Je parle des constatations de M. Iacobucci et du témoignage qui lui a été présenté selon lequel la GRC et le SCRS ignoraient que la torture était pratiquée en Syrie. Je sais que vous n'êtes en poste que depuis huit mois, et c'est peut-être pour cette raison que l'on vous a envoyé devant notre comité aujourd'hui, mais pouvez-vous nous dire de quelle manière la GRC a réagi à cette constatation? La GRC y a-t-elle adhéré, compte tenu du fait que vous avez dit que vous considériez les résultats et les constatations du rapport O'Connor et du rapport Iacobucci avec le plus grand sérieux? Cela signifie-t-il que vous y adhérez?
    Je dis que, à ce moment-ci, nous ne pouvons faire aucun commentaire sur les constatations du juge Iacobucci. À la suite des recommandations du juge O'Connor, découlant d'événements survenus à peu près à la même époque, nous avons mis en oeuvre toute une série de politiques. À présent, nous exerçons un contrôle centralisé, et nous avons renforcé notre processus touchant la conduite des enquêtes criminelles relatives à la sécurité nationale.
    Monsieur Michaud, peu de temps après la publication du rapport de l'enquête concernant Arar, le rapport de monsieur le juge O'Connor a été rendu public. Le commissaire de la GRC s'est présenté devant notre comité au moment où les tribunaux traitaient une demande présentée par M. Arar, et il a présenté publiquement ses excuses à M. Arar pour les actes posés par la GRC dans cette affaire. Pourquoi vous a-t-il été enjoint de dire à notre comité que vous n'alliez pas présenter d'excuses pour les actes dont la GRC a été tenu responsable dans les affaires Alamalki, Nureddin et Elmaati?
    Excusez-moi. Quelqu'un invoque le Règlement.
    Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le président, je ne crois pas que notre comité a la mission d'examiner ce que la GRC fera dans l'avenir. Ce qui doit nous intéresser, ce sont les mesures que la GRC a prises à la suite du rapport O'Connor et du rapport Iacobucci. Selon moi, il n'est pas pertinent d'insister auprès de ces représentants de la GRC pour les forcer à faire quelque chose qu'on ne leur a pas demandé de faire. De plus, ces questions sortent du champ d'étude de notre comité, et je ne vois pas en quoi elles contribuent à nos travaux.
    D'accord, merci.
    Je pense que tout le monde a pris acte de votre argument. Concentrons-nous sur ce que nous avons convenu de faire.
    Monsieur le président, je souligne respectueusement que l'évaluation des mesures prises par les organismes à la suite des événements qui ont eu lieu comprend la question de savoir s'ils prennent ces événements suffisamment au sérieux pour présenter aux personnes concernées leurs excuses pour les actes qu'ils ont posés. Il s'agit donc, à mes yeux, d'une question pertinente. Nous leur demandons de nous dire ce qu'ils ont fait pour changer leur façon de procéder de manière à ce que cela ne se reproduise pas. Oui, cela est très important, mais il est également important de savoir ce qu'ils font pour réparer les torts qu'ils ont causés à ces hommes et à leur famille.
    Je leur demande donc de nous indiquer pourquoi ils nous disent, à présent, qu'ils ne sont pas prêts à présenter des excuses ou à tenter de réparer les torts qu'ils ont causés, alors que le commissaire de la GRC a comparu devant nous et a présenté les excuses de la GRC pour les actes qu'elle a posés dans l'affaire Arar et pour les torts qu'elle a causés à ce dernier. Après cela, notre comité a recommandé au gouvernement de tenter d'indemniser M. Arar pour ce qui s'était produit. Je ne sais pas ce qui a changé depuis ce temps, et je respecte les propos de M. MacKenzie, mais nous tentons tout de même de savoir ce que ces organismes et le gouvernement entendent faire pour remédier aux torts qu'ils ont causés.
(0955)
    Cela ne fait pas partie des responsabilités des deux agents qui se trouvent ici. Vous leur demandez de présenter des excuses qui vous paraissent justifiées. Je ne pense pas que cela fasse partie de leur cadre de responsabilité.
    Comme vous le savez bien, une très importante poursuite au civil a été intentée contre le gouvernement du Canada. Les événements que vous mentionnez ont eu lieu il y a quelque temps, assurément à un moment où le gouvernement actuel n'était pas au pouvoir, et j'estime qu'il n'appartient pas du tout à notre comité de mettre ces agents dans une situation inextricable et de tenter, d'une manière ou d'une autre, de leur faire poser un acte qui ne relève pas de leurs responsabilités.
    En toute franchise, j'estime qu'il est inutile de se lancer dans un long débat sur cette question. Des témoins se sont présentés devant notre comité. Dans la mesure du possible, tentons de nous en tenir au présent rapport.
    Invoquez-vous également le Règlement, monsieur Holland?
    J'invoque le Règlement.
    Il était tout à fait approprié que des excuses soient présentées à la suite de la publication de chacun des deux rapports. Il était tout à fait à propos de présenter des excuses à M. Arar à la suite de la publication du rapport O'Connor, et il était tout à fait à propos de présenter des excuses aux personnes concernées à la suite de la publication du rapport Iacobucci. Si les personnes qui se présentent devant notre comité n'ont pas l'autorisation ou le pouvoir de s'exprimer sur la question et de présenter des excuses, alors notre comité doit recevoir une personne qui a cette autorité ou ce pouvoir. À mes yeux, une procédure judiciaire n'équivaut pas à des excuses. Il ne s'agissait pas d'excuses acceptables au moment de l'affaire Arar, et il ne s'agit pas d'excuses acceptables à ce moment-ci. Après ce qui s'est produit, cela ne fait aucun doute. Lisez les conclusions du juge Iacobucci: il est tout à fait pertinent de présenter des excuses, comme l'avait souligné le juge O'Connor dans le cas d'Arar. Notre comité avait donné suite aux recommandations du rapport concernant Arar — nous avons l'obligation d'agir de la même manière dans le cas présent. Et le fait que certaines personnes qui se présentent devant le comité ne puissent pas répondre à nos questions ne signifie pas que nous devons nous abstenir de les poser — cela signifie plutôt que nous devrions recevoir des personnes qui peuvent y répondre.
    J'estime qu'il s'agit là de questions sur lesquelles notre comité devra se pencher dans l'avenir. Nous en discuterons le moment venu.
    Je vous accorde 90 secondes supplémentaires, monsieur Harris.
    Merci, monsieur le président.
    Je crois comprendre que l'on vous a ordonné de ne répondre à aucune question relative à des excuses, ai-je raison?
    Non. Essentiellement, je ne suis pas en position de faire une quelconque déclaration à propos des conclusions du juge Iacobucci en raison des procédures civiles qui sont en cours et du fait que les constatations du juge Iacobucci font toujours l'objet d'un examen.
    J'ai une question à poser à M. O'Brian, du SCRS.
    On a beaucoup parlé du fait que l'utilisation d'un certain langage et de certains termes, par exemple « djihadiste » ou « extrémiste islamiste », pouvaient ouvrir la voie à un processus bancal et négligent dans le cadre duquel les gens sont déclarés coupables par association, pour reprendre l'expression utilisée par M. O'Connor. Votre organisation a-t-elle cessé d'employer des expressions de ce genre dans ses rapports et dans le contexte de ses échanges de renseignements? Avez-vous évité de désigner les gens sous de telle dénomination?
    Non, je ne pense pas. Nous tentons de décrire des personnes dans de nombreuses situations, et tout dépend de l'état d'avancement de l'enquête. Au début d'une enquête, nous pouvons être simplement à la recherche de renseignements. À une étape ultérieure, nous pouvons être en mesure de présenter une évaluation, et le cas échéant, nous le faisons.
    Je dois admettre — et je dois faire attention à ce que je vais dire — que, en ce qui concerne le SCRS, monsieur le juge O'Connor a effectivement affirmé, dans l'analyse et les recommandations énoncées à la page 151 de son rapport, qu'il était impressionné par les pratiques que le SCRS emploie généralement pour échanger des renseignements, notamment en ce qui a trait aux mises en garde, et ainsi de suite.
    Si vous me demandez si nous avons fait des erreurs, je n'aurai d'autre choix que de reconnaître que nous sommes des êtres humains et que nous commettons des erreurs, mais j'ai envie de vous répondre que nous avons mis en place un processus qui garantit que chaque échange de renseignements soit autorisé. Bien sûr, il faut d'abord que les ententes soient autorisées, puis qu'elles soient contrôlées en permanence, et nous tentons d'employer des termes appropriés chaque fois que nous décrivons une personne.
    Merci.
    Nous allons devoir conclure ce tour. Nous avons dépassé le temps prévu.
    Monsieur McColeman, s'il vous plaît.
    Tout d'abord, j'aimerais remercier tous nos témoins d'avoir pris le temps de venir se présenter devant nous. Vous vous êtes préparés avant de venir répondre à nos questions aujourd'hui, et j'estime que cela était important pour notre examen des recommandations. Je vous en sais gré.
    À titre de nouveau parlementaire, j'ai tendance à envisager nos travaux d'aujourd'hui et à examiner les recommandations énoncées dans ces deux rapports, de même que la manière dont les organisations concernées s'y adapteront et les mettront en oeuvre, dans un contexte plus général. Selon moi, le rôle de notre comité consiste à commencer par étudier tout cela de façon très générale, puis d'examiner ensuite de façon plus particulière ce qui s'est passé.
    Cela dit, mes commentaires et mes questions s'adresseront dans un premier temps à M. O'Brian. Si vous me le permettez, j'aimerais citer un extrait du document que vous nous avez présenté.
Même si nous ne sommes pas toujours d'accord avec le CSARS, et même si nous n'apprécions pas toujours ces façons de faire, notre directeur a admis que le système d'examen prévu par la Loi sur le SCRS a fait de nous, au fil du temps, un meilleur service. C'est à dessein que j'ai employé l'expression « au fil du temps », car il me semble que quiconque a réfléchi à ces questions en a conclu qu'il n'existe pas dans ce domaine de réponses simples, faciles et définitives. Dans mon esprit, cette réalité s'inscrit dans la suite logique du processus dicté par la Loi sur le SCRS, à savoir un processus continu et capable de s'adapter selon l'évolution des conditions opérationnelles, juridiques et politiques.
    Ayant fait partie d'un organisme de surveillance civile d'un service de police par le passé, il me semble qu'un tel contexte — et je vous demande de formuler des commentaires à cet égard — suppose qu'une formation et des activités continues ont lieu pendant la mise en oeuvre des recommandations. Des données du ministère nous permettent de penser que des mesures ont été prises pour régler certains problèmes.
    J'aimerais que vous nous présentiez des commentaires à ce propos. J'aimerais également vous entendre à propos du contexte entourant l'adhésion aux recommandations et les mesures qui ont été prises pour y donner suite. Enfin, pour ce qui est du SCRS, j'aimerais que vous nous parliez de la surveillance exercée par le CSARS et que vous nous indiquiez si cela a entraîné de bons résultats pour votre organisation.
(1000)
    Oui, merci.
    Pour ce qui est du contexte, j'estime qu'il est extrêmement important de comprendre que nous faisons constamment l'objet d'examens. Ce n'est pas comme si nous menions nos activités et que, tout d'un coup, on nous signalait une lacune et que nous devions nous rajuster. Nous faisons l'objet d'une surveillance constante.
    En tentant de me préparer pour la réunion d'aujourd'hui, l'une des choses que j'ai constatées et qui m'a franchement surpris est la suivante: le rapport du CSARS de cette année, qui portait sur notre politique opérationnelle et qui a été déposé à la Chambre, si je ne m'abuse, il y a deux mois, souligne qu'en 2007 et en 2008 — les années faisant l'objet du rapport —, le SCRS a révisé ou rendu publiques plus de 140 politiques. Et je pense que le rapport mentionne que 70 autres politiques étaient en cours d'élaboration ou sur le point d'être mises en oeuvre.
    Ce que je tente d'expliquer, c'est qu'il s'agit d'un processus continu. À mes yeux, il s'agit d'un aspect extrêmement important à souligner. Nous avons parfois, à juste titre selon moi, une opinion négative des événements comme la commission O'Connor, la commission Iacobucci ou la commission du juge Major puisqu'ils mettent en évidence ce qui est considéré comme les lacunes ou les failles, ou quoi que ce soit d'autre, de notre processus.
    À mon sens, il ne s'agit que d'une manière de voir les choses. L'autre manière consiste à considérer cela comme un processus positif. Je ne connais pas beaucoup de pays dans le monde qui ont un réel souci de s'adapter, de se corriger et de tenter d'améliorer leurs systèmes. Je crois que nous devrions être fiers d'appartenir à un pays qui a ce souci.
    Plutôt que de penser que les personnes qui mènent de telles commissions veulent notre peau, j'aimerais que l'on se dise que ces personnes font un travail difficile, qu'elles sont sous surveillance ministérielle et, de toute évidence, sous surveillance judiciaire en ce qui a trait aux mandats de perquisition, et qu'elles font l'objet d'un examen constant. Selon l'article 41 des mesures législatives qui régissent nos activités, toute personne qui estime que le SCRS a commis un quelconque acte préjudiciable à son endroit peut porter plainte — le libellé de l'article est très général.
    Honnêtement, je pense qu'il s'agit d'un très bon système. Des erreurs sont-elles commises? Oui. Se produit-il, de temps à autre, des événements négatifs? Oui. S'agit-il d'un bon système? Franchement, j'estime qu'il s'agit d'un bon système et que nous devrions en être fiers. Selon moi, il faut avoir une opinion positive de notre système.
(1005)
     Je vous suis reconnaissant d'avoir mis les choses en contexte, car j'ai toujours agi de cette façon très pratique et pragmatique dans les organisations publiques ou privées auxquelles j'ai appartenu. Toutes les organisations connaissent des succès et des échecs, particulièrement au moment de procéder à des changements. Il y a deux côtés à la médaille, et il faut apprendre de ses erreurs. C'est ce qu'il faut faire avec ces recommandations: en prendre acte et s'en servir pour apporter des changements opérationnels. Nous parlons de questions de détails, et j'aimerais, en ce qui me concerne à tout le moins, que l'on me dise que le contexte général dans lequel se déroulent nos activités est notre préoccupation la plus importante en matière de surveillance et de gouvernance.
    Je vais vous donner un autre exemple de cela. De nombreux témoins se sont présentés devant notre comité. Plus récemment, des parlementaires britanniques chevronnés sont venus nous dire qu'ils avaient constitué un groupe entouré du plus grand secret et d'où rien ne filtre qui n'est pas en mesure de se réunir dans un endroit public comme celui où nous nous trouvons pour discuter de certaines des questions que nous abordons en ce moment. Je dois donc dire que j'aime notre système, dans la mesure où nous n'en sommes pas arrivés à ce point où il nous aurait fallu, à la suite d'une crise, mettre en place un tel niveau de surveillance.
    J'aimerais également poser une question à M. Michaud à propos du commentaire contenu dans votre déclaration selon lequel vous avez la ferme intention d'apporter d'autres modifications à vos enquêtes criminelles relatives à la sécurité nationale afin de vous adapter continuellement à l'évolution de l'environnement. Pouvez-vous nous fournir de plus amples détails à propos de certaines des modifications dont vous avez été témoin depuis que vous occupez vos fonctions, à savoir depuis huit mois?
    Très brièvement, s'il vous plaît. Nous avons largement dépassé le temps prévu. Nous allons peut-être devoir attendre au prochain tour. Pouvez-vous résumer en une phrase ou deux ce que vous avez l'intention de nous dire?
    Essentiellement, depuis mon arrivée, il y a huit mois, à la direction de la sécurité nationale, j'ai remarqué que nous composons avec cela au jour le jour. Tous les employés de la GRC affectés aux enquêtes criminelles relatives à la sécurité nationale composent au jour le jour avec les modifications qui ont été portées à notre programme et les répercussions qui en découlent.
    Merci.
    Monsieur Oliphant, s'il vous plaît.
    Messieurs, je vous remercie de vous être présentés devant nous aujourd'hui. Je suis conscient du fait que vous êtes ici pour représenter l'organisation respective à laquelle vous appartenez, et que vous avez été délégué par votre organisation respective pour témoigner devant un comité permanent de la Chambre des communes parce que vous y occupez un rang suffisamment élevé.
    J'espère que vous êtes conscient du fait que, pour ma part, je représente mes mandants, dont l'un a été détenu et torturé, fort probablement en raison de quelques lacunes dans le fonctionnement de votre organisation respective. C'est la raison pour laquelle je me trouve ici aujourd'hui. Monsieur le juge Iacobucci a effectivement constaté des lacunes dans le fonctionnement de certains organismes, particulièrement le SCRS et la GRC, et que cette impéritie, ces lacunes et ces défaillances étaient à l'origine de la mise en détention de plusieurs hommes, et vraisemblablement de la torture qu'ils ont subie.
    Aujourd'hui, j'aimerais que vous me disiez si vous êtes d'accord avec les recommandations de monsieur le juge Iacobucci.
    Je marque un temps d'arrêt parce que, pour parler franchement, je constate qu'un certain nombre d'avocats du gouvernement, avec lesquels nous avons discuté, retiennent leur souffle...
    D'une certaine manière, je présente des excuses puisqu'il s'agit d'une situation difficile. Il n'en demeure pas moins que trois personnes ont intenté une poursuite de plusieurs centaines de millions de dollars contre le gouvernement et des organismes particuliers. Nous avons été informés du fait que tout ce que nous allons dire aujourd'hui et qui pourrait avoir la moindre incidence sur ces poursuites serait utilisé devant les tribunaux.
    En toute honnêteté, on ne s'est pas contenté de nous donner des directives minimales — on nous a donné des directives tout à fait claires et sans aucune ambiguïté: il nous est interdit de dire quoi que ce soit qui pourrait laisser entendre que le gouvernement est d'accord avec l'ensemble des constatations ou de faire des observations précises sur l'une ou l'autre des constatations. C'est la raison pour laquelle j'ai tenté de m'exprimer de façon générale dans le cadre de ma déclaration préliminaire.
    En ce qui concerne vos mandants, et en ce qui concerne tous les mandants, je souhaite que, en votre qualité de parlementaire, vous attiriez leur attention sur l'article 41 de notre loi, qui énonce que toute personne peut porter plainte contre des activités du SCRS auprès du CSARS. Je pense qu'il s'agit... En fait, il y a très peu de pays dans le monde où vous pouvez faire cela.
    Évidemment, en réalité, le plaignant ne réussira pas nécessairement à mettre la main sur les renseignements permettant d'incriminer le SCRS puisqu'il est dans la nature de notre organisation, je le répète, de protéger ce type de renseignements. Toutefois, le plaignant peut avoir l'assurance que quelqu'un de l'extérieur de l'organisation, de préférence quelqu'un de crédible, pourra examiner les actes posés par le SCRS en se voyant offrir un accès sans restriction à tous les dossiers de l'organisation. Si la plainte s'avère fondée, une décision sera prise.
(1010)
    J'aimerais entendre M. Michaud à ce sujet.
    On m'a demandé d'être bref. Pour ce qui est de la position dans laquelle je me trouve ce matin, je ne peux que reprendre à mon compte les propos tenus par mon collègue du SCRS.
    Le commissaire Zaccardelli s'est prévalu du privilège parlementaire et a présenté des excuses à notre comité quelques jours après la publication du rapport de la commission O'Connor. Y a-t-il quelqu'un parmi vous qui est disposé à se prévaloir aujourd'hui du privilège parlementaire, que nous vous octroyons, et que le gouvernement du Canada vous octroie, pour présenter des excuses?
    Je suis prêt à le faire, car franchement, cela dépasse un peu mes compétences, si je peux m'exprimer ainsi.
    Merci.
    Je ne suis pas en position de faire cela ce matin.
    D'accord.
    J'ai une question à poser à M. Leckey à propos de l'ASFC.
    Quelles modifications ont été apportées sur le plan de la formation des agents depuis la commission O'Connor et la commission Iacobucci?
    Si vous me le permettez, je vais consulter mes notes.
    En ce qui a trait à la recommandation selon laquelle l'ASFC devrait se doter de politiques écrites énonçant que les enquêtes ne doivent pas être fondées sur le profilage racial, religieux ou ethnique, nous avons mis en place un programme de formation obligatoire sur la diversité et les relations interraciales dans le cadre de notre programme de formation des recrues pour les points d'entrée. Tous les agents aux points d'entrée et tous les agents des services frontaliers suivent cette formation, qui a pour objectif de faire en sorte que tous les employés de l'ASFC offrent un service professionnel et équitable aux personnes et aux clients dans l'environnement diversifié et multiculturel au sein duquel ils évoluent.
    Nous avons élaboré une formation obligatoire sur la diversité, dispensée par voie électronique, pour tous les agents des services frontaliers. Dans bon nombre des huit régions de l'ASFC, on a organisé et tenu des activités de formation en matière de diversité adaptées aux réalités de chacune des collectivités.
    Nous participons au comité interministériel de la table ronde transculturelle sur la sécurité...
    Je suis désolé, le temps alloué à M. Oliphant est écoulé.
    Monsieur Norlock, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, messieurs, d'être venus ici ce matin. Que vous le vouliez ou non, vous vous êtes présenté devant nous, et je vous en sais gré. Je pense que tout le monde ici vous en sait gré.
    J'aimerais commencer par revenir sur quelques questions posées par M. Ménard. Pour la gouverne des Canadiens qui suivent peut-être notre débat et qui pourraient être induits en erreur par certains termes employés — non pas sciemment, mais probablement parce qu'il s'agit d'une terminologie peu commune —, je vais poser mes questions dans une langue simple.
    La première question s'adresse à M. Leckey et concerne la question posée par M. Ménard à propos du programme canadien de protection des passagers, qu'il a qualifié de liste de personnes interdites de vol. Est-il exact d'affirmer que la liste de personnes interdites de vol constitue la réglementation américaine, et que le programme de protection des passagers, qui concerne des personnes figurant sur une liste en raison des préoccupations qu'elle soulève, est son équivalent canadien?
    De façon générale, la liste de personnes interdites de vol renvoie à la liste établie par les États-Unis, qui est d'une ampleur considérable. La liste établie par le Canada, désignée sous le nom de programme de protection des passagers, est une liste complètement différente. Je souligne au passage que l'ASFC ne participe pas à l'élaboration de cette liste.
(1015)
    Quelle est l'instance chargée de l'élaboration de la liste?
    Je n'ai pas le dernier mot à ce sujet, mais d'après ce que je crois comprendre, cette responsabilité incombe à Transports Canada, qui tient compte des conseils fourni par le SCRS et la GRC.
    Est-ce que cela est exact, monsieur O'Brian et monsieur Michaud?
    Oui, c'est exact.
    Oui. Cela précise la réponse que j'ai fournie ce matin puisque le pouvoir final des décisions incombe à Transports Canada.
    Merci.
    Vous avez répondu à quelques questions concernant les vérifications sur des personnes, qui sont liées aux vérifications auprès du NCIC et du CIPC. Pour la gouverne des personnes qui suivent notre débat, le NCIC est l'équivalent américain du Centre d'information de la police canadienne, n'est-ce pas?
    Oui, c'est exact.
    Lorsque les policiers effectuent des vérifications sur des personnes, lorsqu'ils font une vérification auprès du CIPC, ils peuvent demander l'autorisation de faire une vérification auprès du NCIC. Ainsi, au même moment où une recherche est menée dans la banque de données canadienne, par le truchement d'une entente avec les États-Unis, une vérification est menée dans les banques de données américaines pour déterminer si la personne concernée a des antécédents criminels. Est-ce exact?
    Je crois que oui.
    D'accord.
    En outre, lorsqu'une vérification est effectuée parce qu'il a été sous-entendu qu'une personne avait peut-être été accusée, mais non pas déclarée coupable... Dans le système de classification du CIPC, il existe une distinction entre les personnes qui ont été accusées et celles qui ont été déclarées coupables, et la personne qui effectue la vérification est en mesure de savoir que l'individu a été accusé, mais non pas condamné. Est-ce exact?
    Je ne peux pas le confirmer.
    Eh bien moi, je le peux. Vous devriez peut-être vous renseigner à ce sujet.
    Le CIPC dresse également une liste des personnes qui présentent un certain intérêt, même si elles n'ont pas nécessairement été accusées et qu'elles n'ont pas de casier judiciaire. Est-il exact de dire que les policiers auraient accès à ces renseignements en effectuant une vérification auprès du CIPC?
    Je suppose que vous faites référence à la catégorie de personnes sous observation.
    Oui. Et il est logique de penser que la police ou les autres organismes d'enquête qui ont accès aux dossiers du CIPC doivent connaître ces renseignements pour pouvoir effectuer leur travail, qui consiste à protéger les Canadiens.
    Merci.
    Quelques parlementaires ont exprimé un certain désir de vous soutirer des excuses et des renseignements que vous n'êtes pas prêts à présenter, ou que certains d'entre vous ne sont pas disposés à présenter. Cela s'explique par le fait que les questions que nous examinons aujourd'hui ont fait l'objet de deux enquêtes judiciaires exhaustives, et qu'elles concernent des faits qui se sont produits sous un gouvernement précédent. Cependant, ai-je raison de dire — et cette question s'adresse à vous trois — qu'il importe peu de savoir quel était le gouvernement au pouvoir à ce moment-là? Jamais un gouvernement canadien n'a sciemment porté atteinte aux droits de la personne ou ordonné, en toute connaissance de cause, à l'un de ses organismes de le faire. Toutefois, il arrive que, dans le cadre de leurs activités, des organismes commettent des erreurs ou des fautes, et il est possible d'intenter une poursuite au civil. Ai-je raison d'affirmer que nous tentons non pas de nous faire du capital politique en parlant d'événements qui se sont produits sous un autre gouvernement ou même sous le gouvernement actuel, mais simplement d'aller au fond des choses et de régler les problèmes? N'est-ce pas ce que tentent de faire les organismes que vous représentez?
    Je ne sais pas pourquoi ils me regardent.
    Des voix: Oh, oh!
    Une voix: C'est vous qui avez présenté des excuses.
    M. Geoffrey O'Brian: Je vais répondre en faisant preuve d'une certaine prudence, car je ne suis pas certain d'être d'accord avec la prémisse de votre question selon laquelle il ne s'agit pas de se faire du capital politique... et bien sûr, à titre de fonctionnaire, je devrais, à ce moment-ci faire des courbettes et aller me cacher.
    Sérieusement, je ne peux pas croire qu'un quelconque membre du Parlement ou du gouvernement, ou qu'un quelconque dirigeant ou employé de quelque organisation que ce soit, puisse délibérément poser un acte en sachant qu'en raison de celui-ci, une personne subira des mauvais traitements. Pour une raison ou une autre, certaines personnes semblent croire qu'en entrant au SCRS, nos employés ont renoncé aux valeurs canadiennes. Notre organisation reflète la société canadienne. La semaine dernière je crois, notre programme d'équité en matière d'emploi a été déposé à la Chambre. À mes yeux, il s'agit d'un programme très impressionnant. Ce que je veux dire, pour l'essentiel, c'est que, hormis ces quelques réserves, je suis d'accord avec vous.
(1020)
    Madame Mourani, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, messieurs, d'être présents aujourd'hui.
    Monsieur O'Brian, j'aimerais continuer sur votre lancée. Vous dites être incapable d'imaginer que du personnel de votre agence ait délibérément mal traité un citoyen canadien. J'aimerais connaître votre opinion sur l'interrogatoire du jeune Omar Khadr, qui a été mené à Guantanamo en 2003. Les images de cet interrogatoire que l'on a vues l'été dernier sur Internet montrent des employés du SCRS et un employé des Affaires étrangères qui lui posent des questions sur la foi, donc sur l'islam, et sur les membres d'Al-Qaïda. On lui demande s'il en a rencontré. Comme il avait 16 ans, on peut supposer qu'il a fait des rencontres à l'âge de 10 ans environ. Ce jeune montrait des blessures au bas de son chandail.

[Traduction]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Notre discussion porte toujours sur ces rapports. Elle ne porte pas sur ce qui se passe aux États-Unis. Nous devons examiner le rapport O'Connor et le rapport Iacobucci. J'ignore pourquoi nous nous sommes écartés de notre sujet.
    Veuillez vous en tenir à une brève explication, madame Mourani.

[Français]

    Je continue. Ce jeune homme a dit qu'il avait perdu un oeil et ses pieds. La Cour fédérale du Canada — donc, on n'est pas aux États-Unis — a conclu que ce jeune avait été torturé par des gardiens américains. Nous, les contribuables, avons payé le salaire, les billets d'avion et les déplacements des employés du SCRS. J'aimerais savoir si, selon vous, il y avait apparence de torture. Quand ils sont arrivés sur les lieux de l'interrogatoire, ont-ils constaté que ce jeune homme, citoyen canadien...

[Traduction]

    Quel est le rapport avec notre étude? Je vous ai demandé de vous en tenir au sujet de notre étude. Pouvez-vous m'expliquer en quoi cela concerne notre étude?

[Français]

    Je parle de torture, monsieur le président. Je vais en arriver à ma question, si vous le permettez. J'ai été interrompue trois ou quatre fois. Ma question est la suivante: est-ce que le Service canadien du renseignement de sécurité utilise encore des informations obtenues sous la torture?

[Traduction]

    J'invoque le Règlement. Je crois que le membre ne comprend pas.

[Français]

    Écoutez, monsieur le président, on parle ici de torture.

[Traduction]

    Monsieur MacKenzie, veuillez terminer votre rappel au Règlement.
    Monsieur le président, notre étude porte sur ces deux enquêtes. Notre collègue évoque une question qui n' a rien à voir avec les deux rapports qui font l'objet de notre examen. Je crois que cela n'a absolument rien à voir avec ces rapports. Notre comité doit se pencher sur ces deux rapports. C'est ce que nous devrions faire. Si notre collègue cherche à tâter le terrain, elle peut bien le faire, mais elle doit s'en tenir aux questions à l'ordre du jour.
(1025)
    Madame Mourani, pouvez-vous expliquer en quoi votre question concerne le rapport O'Connor et le rapport Iacobucci?

[Français]

    Monsieur le président, on veut clarifier une chose, on veut parler de l'utilisation d'information obtenue par la torture. Cela fait partie aussi de ces rapports. Je ne comprends pas où est le problème si je prends un autre exemple pour en arriver au même point. On n'arrête pas de nous dire qu'on ne peut parler de cas bien précis.

[Traduction]

    D'accord, nous allons poursuivre, mais nous commençons véritablement à manquer de temps.

[Français]

    Je prends un autre cas parce que je ne peux pas parler de ceux qui sont actuellement devant la cour. Je prends un autre exemple d'information obtenue par la torture. Il faut savoir ce que l'on veut. On ne peut pas parler des cas en présence, alors je prends un autre exemple, et vous me dites que cela ne fonctionne pas! Ça fonctionne, on parle de la torture et on veut savoir si les agences qui s'occupent de la sécurité publique utilisent des informations obtenues par la torture. Je prends un autre exemple.

[Traduction]

    Attendez une minute. Sans vouloir offenser nos témoins, je crois qu'ils sont probablement dans l'incapacité de formuler des observations sur des cas précis...

[Français]

    Ah, monsieur le président!

[Traduction]

    Si vous voulez leur poser des questions sur d'autres cas, vous pouvez le faire, mais ce sera à eux de décider s'ils veulent y répondre.
    Monsieur Holland, vous invoquez le Règlement.
    Monsieur le président, je crois que vous ne comprenez pas ce que tente de faire valoir Mme Mourani.
    Tant dans le rapport Iacobucci que dans le rapport O'Connor, l'une des principales préoccupations soulevées était la suivante... Je vais citer un passage tiré de la page 145 du rapport du juge O'Connor. Voici un extrait de la recommandation 14: « On ne devrait jamais communiquer d'information à un pays où il y a un risque crédible qu'elle entraînerait un recours à la torture ou y contribuerait. »
    Il s'agit d'un élément essentiel du présent débat de notre comité. D'après moi, Mme Mourani tente de déterminer si cette pratique a cessé ou si elle a continué, comme nous avons pu le constater dans le cas de M. Almalki et de M. Arar, entre autres exemples. Il s'agit d'un élément essentiel.
    D'accord. monsieur Rathgeber, veuillez être bref. Nous passerons ensuite à Mme Mourani.
    Merci, monsieur le président.
    Je crois que vous avez parfaitement compris la question de Mme Mourani et, sans vouloir offenser M. Holland, ces témoins ne sont pas préparés à répondre à des questions à ce sujet. Ces actes auraient été posés par des fonctionnaires américains à Guantanamo Bay, à Cuba.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement, notre comité doit procéder à l'examen du rapport de deux commissions d'enquête, la commission Iacobucci et la commission O'Connor. Je suis d'accord avec mon ami M. MacKenzie pour affirmer que nous devrions nous en tenir à des questions portant sur ces deux rapports et sur les recommandations qui y sont énoncées.
    Monsieur Ménard, invoquez-vous le Règlement?

[Français]

    Oui. Nous sommes ici pour traiter des suites données aux rapports Iacobucci et O'Connor. On y recommandait que l'on n'utilise plus les informations obtenues par la torture. Mme Mourani a raison quand elle vous dit qu'on ne peut pas les questionner sur le cas El-Maati, par exemple, parce que c'est devant les tribunaux. Cependant, on veut non seulement savoir si les agents ont reçu de la formation ou assisté à des ateliers, etc., mais on veut voir si, en pratique, ils ont cessé d'utiliser des informations obtenues sous la torture. Elle vous en donne un exemple connu. Je veux bien respecter mon collègue M. Rathgeber quand il dit qu'ils ne sont pas préparés à répondre à cela. J'espère qu'il n'y a pas des dizaines de cas ou d'allégations de cas où on a utilisé la torture pour obtenir des informations. Il n'y en a qu'un seul connu du public; ils devaient donc en tenir compte dans leur préparation pour bien nous convaincre qu'ils ont pris les recommandations au sérieux et qu'ils n'utilisent plus, même quand cela vient des Américains, des informations obtenues sous la torture.

[Traduction]

    D'accord, merci. Je pense que nous vous avons bien compris.
    Je crois que les témoins ont entendu la discussion.
    Madame Mourani, il vous reste encore deux minutes. Allez-y.

[Français]

    J'aimerais savoir combien de temps il me reste.

[Traduction]

    Vous avez deux minutes et 20 secondes.

[Français]

    Très bien.
    Monsieur, si vous pouviez répondre, ce serait gentil. Je vous en prie, monsieur.
    Perhaps I could try. Je pourrais essayer de répondre en français, mais si je le fais, je pense qu'on va manquer des nuances. Je vais donc répondre en anglais.

[Traduction]

    Si vous me le permettez, j'aimerais dire que, selon moi, l'introduction de cette question, et la réaction qu'elle a provoquée, démontre à tout le moins qu'il s'agit d'une question complexe et épineuse. Il s'agit d'une question qui concerne les politiques et l'exploitation. Il y a un aspect moral, et il y a un aspect juridique. J'aimerais beaucoup vous donner une réponse bien tranchée et définitive. Honnêtement, le plus simple serait de vous répondre que nous n'utiliserons jamais de renseignements dont nous savons qu'ils ont été obtenus par la torture ou des mauvais traitements. Mais je ne peux vous répondre à cela, pour trois raisons.
(1030)

[Français]

    Je ne comprends pas votre réponse. Vous utilisez le temps futur. Êtes-vous en train de me dire qu'actuellement, vous n'utilisez plus d'information obtenue par la torture? Même si elle vient des États-Unis, vérifiez-vous l'information?

[Traduction]

    Non. Excusez-moi. Je suis désolé...

[Français]

    Je suis désolée, mais je n'ai pas compris.

[Traduction]

    Laissez-moi commencer... J'essaie de trouver une bonne façon de répondre et d'aborder ce sujet. Je pourrais peut-être commencer par vous rappeler la réponse fournie par Susan Pollak. Elle s'est présentée ici il y a quelques semaines. Je crois que vous lui avez posé la même question, et elle a répondu que le SCRS utilisait de tels renseignements. En toute franchise, pour répondre à la question de savoir si nous utilisons des renseignements obtenus par la torture, j'aurais envie de vous répondre simplement en n'utilisant que quatre mots, à savoir « oui, mais » ou « non, mais ». La réponse, c'est que nous utilisons de tels renseignements uniquement dans les cas où des vies sont en jeu.
    Mais il faut ajouter quelque chose à cela: premièrement, cela arrive rarement dans nos échanges de renseignements. Deuxièmement, les renseignements obtenus par des méthodes qui ne correspondent pas à celles que nous aimons voir employer pour obtenir des renseignements de personnes — qu'il s'agisse de citoyens, de citoyens ayant la double nationalité, de personnes qui n'ont pas la citoyenneté, ou que sais-je encore... Habituellement, la personne qui reçoit ces renseignements ne sait pas par quel moyen ils ont été obtenus.
    Ainsi, eu égard aux deux observations que je viens de faire, à savoir que cela arrivait rarement et que nous ne savons pas nécessairement comment les renseignements ont été obtenus, je ne peux que fournir une réponse générale et dire que nous tentons d'évaluer la fiabilité de chaque bribe d'information que nous recevons. Par ailleurs, dans le cadre de ma préparation pour le présent débat, l'une des meilleures analyses que j'ai lues à ce sujet est la fameuse — à nos yeux, à tout le moins — décision rendue en 2005 par la Chambre des lords. J'ignore si les membres du comité ont eu l'occasion de prendre connaissance de cette décision, communément appelée la décision sur la torture. Mais cette décision concernait leur processus SIAC...

[Français]

    Excusez-moi, monsieur O'Brian, je vais simplement terminer.

[Traduction]

    Je peux peut-être essayer de conclure 
    Mme Maria Mourani: Oui.
    M. Geoffrey O'Brian: ...l'importance de la décision de la Chambre des Lords réside dans le fait suivant. En common law, et depuis plusieurs siècles, les renseignements qui ont été obtenus par la torture, ou dont il y a des raisons de croire qu'ils ont été obtenus par ce moyen, ne peuvent jamais être utilisés dans le cadre d'une action en justice. C'est la loi. La question est de savoir comment s'y prendre pour s'assurer qu'il en soit ainsi.
     La deuxième question qu'il faut examiner est la suivante: le pouvoir exécutif peut-il, dans certains cas, utiliser de tels renseignements pour protéger la sécurité nationale? La Chambre des Lords s'est penchée sur cette question. Je suis désolé, je prends trop de temps, mais je tente d'établir une distinction entre l'exécution de la loi et l'utilisation par le pouvoir exécutif de ce genre de renseignement.
    Monsieur Rathbeger, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup à nos quatre témoins. Je tiens à vous remercier et à remercier les organismes que vous représentez d'assurer la sécurité de nos frontières et de notre pays.
    Je veux faire suite à quelques questions posées par mon ami M. Norlock et à quelques observations de M. O'Brian, qui a indiqué, en citant le juge O'Connor, qu'aucun organisme canadien et vraisemblablement aucun citoyen canadien ne ferait subir, en toute connaissance de cause, un outrage ou de la torture à un citoyen canadien. En citant le juge O'Connor, vous avez évoqué les relations que l'on entretient avec un pays qui a de mauvais antécédents en matière de respect des droits de la personne.
    Monsieur Michaud, dans votre document d'information, vous avez employé une formulation assez semblable. Vous avez évoqué, et je vous cite, les « décisions d'interagir avec un pays ayant mauvaise réputation au plan des droits de la personne », et ensuite vous poursuivez.
    Je suis curieux. Pouvez-vous nous dire, de façon brève et concise, en quoi consistent de « mauvais antécédents » ou une « mauvaise réputation » en matière de droits de la personne, et qui prend une décision à cet égard?
    Monsieur O'Brian, vous pourriez peut-être commencer.
(1035)
    Je pense que je vais vous répondre qu'il doit s'agir d'un processus, et que ce processus doit être continu. Même s'il est déterminé, par Amnesty International, par le département d'État des États-Unis, par notre propre ministère des Affaires étrangères ou même le service pour lequel je travaille — et nous effectuons une analyse annuelle de chacune de nos décisions à cet égard — qu'un pays se livre à des pratiques que nous n'approuvons pas, cela ne signifie pas nécessairement que les renseignements que nous recevons de ce pays ont tous été obtenus par des méthodes que nous réprouvons. C'est le premier élément essentiel.
    Ma réponse brève est la suivante. Il n'existe aucune liste définitive. En d'autres termes, je sais que nous aimerions disposer d'un système qui nous indiquerait exactement dans quels cas nous pouvons accepter les renseignements et dans quels cas nous devons les refuser. En toute franchise, ma réponse risque de vous décevoir ou de décevoir les membres du comité, mais de façon générale, la réponse que nous offrons n'est ni un feu rouge ni un feu vert, mais dans bien des cas, un feu jaune, ce qui signifie que l'on peut aller de l'avant, mais avec prudence.
    Monsieur Michaud.
    Pour l'essentiel, nous ne nous appuyons sur aucune définition précise pour déterminer si un pays a de bons ou de mauvais antécédents. Notre processus d'évaluation est conçu d'une telle façon que, s'il y a le moindre signe que des personnes sont traitées, dans un pays donné, d'une manière qui ne répond pas à nos normes, nous ferons preuve de prudence. Dans un tel cas, nous serions extrêmement prudents dans nos relations avec ce pays.
    Pour faire suite à votre analogie des feux de circulation, existe-t-il un classement dans lequel votre organisation ou vous-même classez les pays en fonction de leurs antécédents en matière de droits de la personne, avec une catégorie pour les pays qui ont des antécédents épouvantables et qui doivent être traités d'une façon particulière, et peut-être d'autres catégories pour les pays qui ont des antécédents médiocres et qui soulèvent moins de préoccupations ou à l'égard desquels la prudence est moins de mise?
    La simple vérité, c'est que je ne connais pas tous les détails à ce propos. Ce que je peux dire, c'est que nous avons conclu des ententes à trois égards: une entente relative à l'échange de renseignements de sécurité; des ententes relatives au filtrage de sécurité; puis, des ententes relatives aux échanges techniques que nous effectuons. Nous conclurons des ententes ou des accords avec les organismes qui se trouvent dans l'une ou dans l'ensemble de ces catégories. Le rapport du CSARS, dont j'ai cité un extrait au cours de ma déclaration préliminaire, indique que certains organismes avec lesquels nous faisons affaire font l'objet de certaines restrictions, et qu'il y a certains types de renseignements que nous n'échangerons pas avec elles.
    Et pour ce qui est des feux verts, des feux rouges et des feux jaunes...?
    Il n'y a aucune catégorie à proprement parler. Chaque pays est évalué au cas par cas. De plus, la situation des pays évolue avec le temps. Dans certains cas, on nous a signalé que des pays aux antécédents déplorables ou douteux en matière de respect des droits de la personne s'étaient améliorés sur ce plan au cours de la dernière année, même si certaines préoccupations demeurent. Ce n'est donc pas une question de feu vert ou de feu rouge.
(1040)
    Merci, monsieur le président.
    Merci de vos réponses.
    Merci.
    Monsieur Holland, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    Je suis perturbé par ce qui a été dit à propos de la torture. Je suis perturbé parce que, même si vous dites qu'il y a beaucoup de zones grises et d'ambigüités, et qu'il n'existe aucune réponse simple à cette question épineuse, le juge O'Connor s'est exprimé très clairement à ce sujet. Voici l'extrait du rapport qui s'y rapporte: « On ne devrait jamais communiquer d'information à un pays où il y a un risque crédible qu'elle entraînerait un recours à la torture ou y contribuerait. » C'est ce que je m'attendais à entendre aujourd'hui, particulièrement de votre part, monsieur O'Brian.
    Je vais vous donner un exemple très précis. En ce qui concerne M. Elmaati, nous savons à présent que sa confession a été obtenue par la torture. Pendant l'enquête, les fonctionnaires du SCRS et de la GRC n'ont cessé de répéter qu'ils n'avaient aucune preuve que la torture était pratiquée en Syrie et que, par conséquent, ils considéraient que la confession n'avait pas pu être obtenue par ce moyen. Toute cette question fait évidemment l'objet d'un examen. Personne ne veut qu'un citoyen canadien se trouve de nouveau dans une telle situation.
    Ma question, qui concerne l'Égypte et la Syrie, s'adresse tout particulièrement à vous. Nous savons que, dans les cas sur lesquels notre comité se penche actuellement, il y a eu des problèmes dans ces deux pays. Échangeriez-vous des renseignements avec ces deux pays aujourd'hui, oui ou non?
    Je vais répondre à votre question en trois temps. Vous avez exprimé votre déception, et je crains que je vais vous décevoir une fois de plus.
    Premièrement, vous avez fait allusion aux constatations précises de M. le juge Iacobbuci, à propos desquelles je ne peux faire aucun commentaire, pour les raisons que j'ai mentionnées plus tôt.
    Deuxièmement, vous avez dit que vous étiez déçu parce que je n'avais pas pu donner une réponse catégorique en ce qui a trait à l'utilisation des renseignements. Je suis désolé de vous avoir déçu à ce sujet, et vous voudrez peut-être poser cette question à notre directeur, au ministre ou à qui que ce soit d'autre. J'ai tenté de vous donner une réponse approfondie pour vous expliquer pourquoi, dans le domaine du renseignement, la situation n'est pas si simple. Je suis assez vieux pour faire référence à la commission McDonald, pendant laquelle on avait évoqué les défis que tout service de renseignements devait relever pour répondre à la fois aux exigences en matière de sécurité et aux exigences sur le plan de la démocratie. J'ai la naïveté de croire que notre pays est capable de répondre à ces deux types d'exigences et que nous avons mis en place un système qui...
    Il n'en demeure pas moins que des personnes ont été détenues et torturées. Ces personnes étaient des citoyens canadiens. Cette information a été utilisée par des agents canadiens du renseignement. Aujourd'hui, j'aurais aimé que l'on me donne une réponse qui correspond en tous points à ce qui est indiqué dans le rapport du juge Iacobucci, à savoir que nous n'utiliserions jamais des renseignements s'il y a des raisons crédibles de penser qu'ils ont été obtenus par la torture. On me dit qu'il y a des feux jaunes, qu'il est possible que l'on s'en serve et qu'il est possible que l'on ne s'en serve pas. Qu'est-ce qui nous dit que cela ne se reproduira jamais? Je vais être direct et précis. Aujourd'hui, compte tenu de ce que nous savons, et compte tenu des épreuves que nous avons traversées, échangerions-nous des renseignements avec l'Égypte ou la Syrie de la même façon que nous l'avons fait dans le passé? Veuillez répondre par oui ou non.
    Je suis désolé, M. Holland, mais j'ai envie de vous répondre, comme un ancien solliciteur général, Herb Gray, avait l'habitude de le faire à la Chambre des communes, que je ne suis pas d'accord avec la prémisse de votre question. Comme je l'ai déjà mentionné, je ne peux pas m'exprimer à propos du rapport de M. le juge Iacobucci. Je peux m'exprimer à propos de...
    Répondez à la question. Échangeons-nous des renseignements avec l'Égypte et la Syrie?
    Excusez-moi, mais j'essaie de répondre à la question. Je peux répondre à votre question concernant les propos du juge O'Connor, qui a affirmé que le SCRS n'échangeait aucun renseignement avant les terribles incidents dont a été victime M. Arar, et que nous n'avons fourni aucun renseignement aux Syriens à propos de M. Arar. Je peux parler de cela. Mais franchement, je rejette vos affirmations générales selon lesquelles nos pratiques sont inappropriées. Nous avons un système...
(1045)
    Ma question est simple et directe. Compte tenu de tout ce que nous savons, compte tenu du fait que des citoyens canadiens ont été à l'étranger et que des fonctionnaires canadiens possédaient cette information, je veux avoir l'assurance que cela ne se reproduira pas. Je veux avoir l'assurance que nous ne continuons pas à échanger des renseignements de la même manière que nous le faisions auparavant. Ma question est simple, et il est possible d'y répondre par oui ou non: continuons-nous à échanger des renseignements comme auparavant avec l'Égypte et la Syrie?
    Je ne peux pas entrer dans les détails, mais oui, nous continuons à échanger des renseignements avec des organismes répartis dans 147 pays. Et dans la grande majorité des cas, les antécédents de ces pays en matière de respect des droits de la personne ne sont pas aussi reluisants que ceux du Canada.
    Monsieur MacKenzie.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie le groupe de témoins de s'être présentés ici aujourd'hui.
    Monsieur O'Brian, en raison de vos feux rouges, jaunes et verts, nous nous retrouvons dans une grande zone grise. Avez-vous le rapport O'Connor sous les yeux?
    Je n'ai pas le rapport complet avec moi. Je n'ai qu'une copie des recommandations découlant des conclusions de fait.
    D'accord.
    Les recommandations 14 et 15 sont assez explicites pour ce qui est de l'échange de renseignements, des droits de la personne et de la torture. Selon la recommandation 14, vous devriez examiner vos politiques relatives à l'échange de renseignements avec des pays ayant un dossier douteux en matière de droits de la personne. Selon la recommandation 15, les organismes canadiens ne devraient pas accepter de renseignements de pays ayant des antécédents douteux en matière de droits de la personne.
    J'aimerais que vous expliquiez aux Canadiens, à tous ceux qui nous regardent aujourd'hui, ce que vous faites pour donner suite aux recommandations 14 et 15, car selon moi, on a en quelque sorte laissé entendre de façon confuse que les organismes canadiens admettent la torture. Je crois que ces recommandations sont très explicites, et qu'il doit y avoir une différence entre les pratiques actuelles et les pratiques qui étaient en place avant le rapport O'Connor. J'aimerais beaucoup que vous expliquiez aux Canadiens les mesures que le SCRS a prises pour donner suite aux recommandations 14 et 15.
    Merci, monsieur.
    Je crois qu'au moment où le directeur s'est présenté devant le comité... et je répète que, d'après moi, le CSARS a évoqué le fait que nous disposions à présent d'un nouveau système de mise en garde — nous utilisons d'ailleurs des mises en garde depuis plusieurs années — que nous utilisons dans les cas où des indices nous laissent croire que le personnel peut être détenu à l'étranger, ou lorsqu'il y a un risque que cela se produise. Cette mise en garde que nous utilisons à l'égard de tout renseignement que nous échangeons énonce que nous demandons que cette personne soit... J'ai le libellé exact sous la main, mais je ne le trouve pas — je suis désolé. Le directeur en a parlé: nous avons un nouveau système de mise en garde.
    Tant la GRC que le SCRS ont conclu des protocoles d'entente avec le ministère des Affaires étrangères, conformément à l'une des recommandations du juge O'Connor, précisément pour régler cette situation où quelqu'un se retrouve...
    Excusez-moi de vous interrompre, mais le temps file. La recommandation 14 énonce ce qui suit: « Les politiques devraient comprendre des directives visant expressément à éliminer toute possibilité de complicité du Canada dans la torture, à éviter le risque d'autres transgressions des droits de la personne et à assurer la responsabilisation. » Puis, selon la recommandation 15, l'information provenant de pays ayant des antécédents douteux en matière de droits de la personne devrait être désignée en tant que telle, et des mesures adéquates devraient être prises pour évaluer sa fiabilité.
    Est-ce que le SCRS se conforme actuellement à ces recommandations?
    Oui.
    Et il n'y a pas de zones grises ni de feu rouge, jaune ou vert?
    Là encore, j'essaie de... À plusieurs reprises, j'ai présenté des excuses à mon ami M. Holland parce qu'il est tentant de répondre simplement par oui ou non à une question que je considère comme complexe. Toutefois, il existe une réponse de nature juridique, une réponse de nature opérationnelle, une réponse de nature systémique, et c'est ce que je tente de vous fournir.
    Honnêtement, si vous lisez les recommandations 14 et 15, et si vous examinez le rapport du SCRS d'il y a trois ans, dans lequel nous avons garanti au ministre des Affaires étrangères, après avoir signé des ententes, que nous donnerions suite à ces recommandations, vous constaterez que le Service canadien du renseignement de sécurité a souligné qu'il était très difficile de donner de telles garanties. Comment peut-il garantir qu'il ne recevra jamais des renseignements de ce genre, alors qu'il ne sait pas d'où proviennent ces renseignements, et ainsi de suite?
    En fait, nous avons apporté des correctifs à cet égard, et pour la suite des choses, nous ferons tout notre possible. Et je...
    Je m'arrête ici. Merci.
(1050)
    Êtes-vous en train de nous dire que le SCRS ne tolère pas la torture et que...
    Tout à fait. Bon Dieu!
    J'estime que c'est ce que les Canadiens veulent entendre. Ils veulent que le SCRS dise qu'il n'admet pas la torture et qu'il n'utilise pas en toute connaissance de cause des témoignages obtenus par la torture.
    Comme je l'ai dit plus tôt, ce que j'ai lu de mieux à ce propos provient de la décision rendue par la Chambre des Lords. Lord Brown a déclaré ce qui suit:
La torture est un mal inqualifiable. Elle ne peut jamais être justifiée. Au contraire, elle doit toujours être punie [...] Toutefois, à l'occasion, la torture peut permettre d'obtenir des renseignements susceptibles de sauver des vies, peut-être de nombreuses vies, ce qui soulève inévitablement la question suivante: quel usage peut-on faire de ces renseignements?
    Le tribunal conclut que de tels renseignements ne peuvent jamais être utilisés dans le cadre d'une procédure criminelle ni dans le cadre d'une procédure judiciaire. Mais Lord Brown ajoute ce qui suit:
    Il est accepté que le pouvoir exécutif puisse se servir de tous les renseignements qu'il obtient, qu'il s'agisse de déclarations obtenues sous la contrainte ou de tout autre type de renseignements qu'elle permet d'obtenir. De fait, le pouvoir exécutif n'a pas seulement le droit d'utiliser ces renseignements; à mon sens, il a le devoir de le faire. Il a la responsabilité capitale de préserver la sécurité de l'État.
    Merci.
    Nous allons passer à M. Kania, s'il vous plaît.
    Monsieur O'Brian, la recommandation 14 du rapport du juge O'Connor indique ce qui suit: « On ne devrait jamais communiquer d'information à un pays où il y a un risque crédible qu'elle entraînerait un recours à la torture ou y contribuerait. » Selon vous, cette phrase comporte-t-elle une quelconque ambiguïté?
    J'ai l'impression de présenter sans cesse des excuses.
    J'aurais deux commentaires à faire. Je serais plus à l'aise si l'on ajoutait le mot « sciemment », car dans la réalité, il arrive souvent que nous ne savons pas. C'est mon premier commentaire.
    Mon deuxième commentaire est le suivant: penchons-nous un instant sur ces cas exceptionnels et extrêmement rares dont tout le monde parle — et je ne vous demande pas cela seulement pour simplifier les choses ou à des fins argumentatives et légalistes... La simple vérité est la suivante: si nous obtenons des renseignements qui peuvent empêcher des incidents comme la tragédie d'Air India, les attentats du 11 septembre ou tout autre incident de ce genre, en toute franchise, nous les utiliserons, peu importe d'où ils proviennent. Ces cas sont extrêmement rares. Pour le reste, nous mettons en place un système qui garantit que nous respectons les valeurs canadiennes.
    Ainsi, avec ces deux réserves — l'ajout du mot « sciemment » et la prise en compte des cas exceptionnels — je réponds à votre question par l'affirmative.
    Essentiellement, d'après ce que vous venez de dire, je crois comprendre que vous convenez avec moi du fait que vous avez modifié la recommandation 14 du rapport du juge O'Connor.
    Vous pouvez tirer cette conclusion. Si c'est le cas, je reconnais mon erreur. Il se peut qu'à mon retour au bureau, j'apprenne que mon directeur ou le ministre a un mot à me dire. Mais si c'est ce que vous avez conclu, c'est...
    Comme vous le savez, il s'agit d'un comité public, notre réunion d'aujourd'hui est télévisée, et vous êtes ici pour représenter le SCRS. D'après la réponse que vous venez de me donner à propos de la recommandation 14, ne trouvez-vous pas qu'il est raisonnable de conclure que, pour l'essentiel, vous dites aux gens que vous utiliserez tous les renseignements crédibles pouvant vous être utiles d'une manière ou d'une autre dans certaines circonstances, même s'ils ont été obtenus par la torture?
    Non, excusez-moi. Vous avez dit — je ne sais plus exactement, pardonnez-moi — « dans certaines circonstances » ou « dans certains cas », peu importe. Non. Je vous ai répondu de manière approfondie pour tenter de vous dire que, dans certains cas occasionnels et inhabituels, qui ne se présentent pour ainsi dire qu'une seule fois dans une vie, ce type de renseignement peut présenter un grand intérêt pour la sécurité nationale du pays.
(1055)
    Si quelqu'un regarde notre débat...
    Ce que je dis à la population canadienne, c'est que nous sommes assujettis à un nombre immense de contrôles. Le Service canadien du renseignement de sécurité, l'inspecteur général, et qui sais-je encore, évaluent la manière dont nous exerçons notre jugement. Toute mauvaise décision sera relevée, et la population canadienne peut avoir l'assurance qu'elle en sera informée.
    Mais essentiellement, par votre réponse, vous légitimez l'utilisation de la torture. En effet, s'il y a des gens en Syrie, ou des gens qui ont des liens avec ce pays ou avec tout autre pays, qui regardent notre débat à la télévision en ce moment, ils sauront que nous pourrions utiliser tout renseignement qu'ils obtiennent. Ces gens sauront, puisqu'ils l'auront entendu pendant la télédiffusion du débat de notre comité public, que le SCRS a affirmé que nous pourrions utiliser tout renseignement sur lequel nous mettons la main. Pourquoi alors s'abstiendraient-ils de tenter d'obtenir ces renseignements? La recommandation visait à mettre un terme à l'utilisation de la torture et à faire savoir que nous ne collaborerons pas avec les pays qui l'utilisent.
    Ce que vous êtes en train de dire, c'est que vous n'êtes pas d'accord avec la recommandation et que vous tolérez la torture.
    On invoque le Règlement; nous allons donc devoir nous interrompre.
    Cela me désole que vous ayez tiré cette conclusion. Je suis d'accord avec...
    Monsieur O'Brian, on a invoqué le Règlement, je vais donc simplement...
    J'invoque le Règlement parce que j'ai présenté une motion la semaine dernière. J'aimerais avoir l'occasion d'en débattre avant que la séance d'aujourd'hui ne soit levée.
    D'accord. S'il en est ainsi, nous allons donc devoir mettre fin abruptement à notre réunion. Nous allons devoir suspendre la séance et libérer la salle.
    Je suis désolé. Je n'ai pas été avisé de la présentation de cette motion.
    En toute justice, monsieur le président, j'ai présenté cette motion la semaine dernière.
    Je sais, mais cette motion aurait dû être déposée, et vous auriez dû m'en aviser de manière à ce que je l'inscrive à l'ordre du jour.
    D'accord.
    Puisque vous ne l'avez pas fait, nous allons suspendre la séance pour une ou deux minutes. Nous devons libérer la salle à 11 heures.
    Je remercie nos témoins de leur contribution.
    Où est mon maillet?
    La séance est suspendue. Tous les travaux ultérieurs de notre comité s'effectueront à huis clos.
    Oui, mais ce que j'essaie de dire, c'est qu'il n'est pas nécessaire d'attendre une minute ou deux.
    Oui, nous devons attendre une minute ou deux. Nous devons libérer la salle.
    Pourquoi?
    Nous devons libérer la salle si nous voulons poursuivre nos travaux à huis clos.
    Désolé, il n'est pas nécessaire de...
    La séance est suspendue pour deux minutes.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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