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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 017 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 30 avril 2009

[Enregistrement électronique]

  (1110)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous étudions la contribution fédérale à la réduction de la pauvreté au Canada, et dans ce cadre nous accueillons chaleureusement M. Kirby. Nous vous remercions infiniment du temps précieux que vous prélevez sur votre calendrier chargé pour venir nous rencontrer. Le comité considère que la santé mentale est non seulement une question grave, mais aussi une question dont le public est insuffisamment informé. Nous apprécions que vous veniez nous en parler dans le contexte de notre étude de la pauvreté.
    Monsieur Kirby, je vais vous demander de présenter les invités qui vous accompagnent, et je crois savoir que vous aurez ensuite un exposé de 10 à 15 minutes à nous faire. Vous connaissez la procédure que nous suivons ici. Il nous restera du temps pour poser quelques questions à tour de rôle.
    Bienvenue, monsieur. Vous avez la parole. Si vous voulez présenter vos collègues, nous pourrons ensuite commencer.
    Puis-je dire dire également qu'il est gratifiant que vous ayez invité quelqu'un qui a passé tant d'années à l'autre endroit à prendre la parole de ce côté-ci de l'édifice. Merci infiniment.
    Je suis accompagné aujourd'hui des trois personnes qui dirigent les principaux programmes de la commission. Le Dr Howard Chodos est responsable de l'étude sur la stratégie en matière de santé mentale au Canada. La Dre Jayne Barker est directrice des politiques et de la recherche à la commission. Micheal Pietrus est à la fois notre directeur des communications et le directeur du programme anti-stigmatisation.
    Je crois savoir que ma déclaration liminaire a été distribuée aux membres dans les deux langues. Je ne vais pas la lire intégralement, mais je vais la suivre de plus ou moins près.
    Je suis réellement ravi qu'un comité de la Chambre des communes ait demandé à la commission de venir lui parler de la question de la santé mentale au Canada, car c'est non seulement un sujet important, mais c'est aussi une cause très personnelle pour moi. Je suis donc ravi d'esquisser pour vous, dans ma déclaration liminaire, le travail de la commission avant de céder la parole et de répondre aux questions que vous pourriez avoir sur tout aspect intéressant la santé mentale.
    Je pense qu'il importe de mettre en perspective les maladies mentales. Cette année, 7 millions de Canadiens connaîtront un épisode de maladie mentale. Cela fait une personne sur cinq, mais je peux vous dire que les spécialistes de la santé mentale, les chercheurs professionnels, pensent plutôt que le chiffre progresse rapidement pour s'approcher de un à quatre, plutôt que de un à cinq. Autrement dit, le pourcentage va croissant. Nous savons qu'au cours de la récession, l'incidence de la maladie mentale chez les Canadiens va sensiblement s'accroître.
    Malheureusement, nombre de ces personnes n'obtiendront pas d'aide. Cela est dû à deux raisons. Premièrement, nulle part dans le pays n'existe-t-il une offre suffisante de services de santé mentale. La deuxième raison est que les malades ont peur de se déclarer à cause de la stigmatisation associée à la maladie mentale. De fait, cette stigmatisation représente l'un des plus grands obstacles empêchant les personnes d'accéder à un traitement approprié. La stigmatisation et la discrimination imposent un lourd fardeau à ceux souffrant de problèmes de santé mentale. De fait, nombre de malades vous diront que la stigmatisation et la discrimination dont ils sont l'objet de la part de membres de la famille, d'amis et de collègues sont plus difficiles à supporter que les symptômes de la maladie elle-même. Je veux souligner que cette stigmatisation n'est pas celle infligée par le grand public, qui est réelle mais que les malades ne perçoivent généralement pas; c'est la stigmatisation qui est le fait de leurs proches — leur famille, les amis et collègues.
    En termes économiques, la maladie mentale coûte à l'économie canadienne le chiffre estimatif de 33 milliards de dollars par an. Pour mettre cela en perspective, cela représente la moitié du budget de l'Ontario. Plus frappant encore, et je pense que vous serez surpris de l'apprendre, davantage de journées d'hospitalisation sont causées par une maladie mentale que par le cancer ou les maladies cardiaques combinés
    Ce chiffre paraît presque incroyable, aussi je vais vous l'expliquer. Si une personne est atteinte d'une maladie mentale suffisamment grave pour qu'elle doive être hospitalisée, son séjour à l'hôpital va être habituellement d'une durée considérable, souvent de plusieurs mois. Typiquement, une personne hospitalisée pour maladie cardiaque ou cancer y séjourne beaucoup moins longtemps. Mais cela explique, si l'on considère l'accroissement de la fréquence des maladies mentales et la durée d'hospitalisation des patients, pourquoi il existe une pénurie de lits d'hôpital dans le pays.
    Si vous parlez aux employeurs, vous apprendrez que la partie des coûts de soins de santé absorbée par les employeurs — c'est-à-dire les indemnités d'invalidité à court terme et les frais de médicaments — qui augmente le plus rapidement est le fait de la maladie mentale. De fait, entre 4 et 12 p. 100 des coûts salariaux sont maintenant accaparés par la maladie mentale. Le chiffre exact varie, évidemment, d'un employeur à l'autre.
    Plus intéressant encore, la quantité de médicaments administrés pour dépression, anxiété et autres troubles de l'humeur est devenue supérieure à celle des médicaments cardiovasculaires. Je pense, par exemple, au Lipitor et à d'autres médicaments de cet ordre, qui ont pris le pas sur les médicaments cardiovasculaires comme principal médicament remboursé par les régimes d'assurance.
    La Commission de la santé mentale part d'un point de vue très simple, à savoir qu'une personne atteinte de maladie mentale mérite le même niveau de service que tout autre malade. Nous ne disons pas qu'un malade mental peut prétendre à ce que le problème soit traité instantanément, pas plus qu'une personne atteinte d'une maladie physique ne le peut. Nous savons que c'est impossible. Mais ce qui se passe, c'est que les services offerts aux personnes atteintes de maladie mentale sont très largement pires que ceux donnés aux personnes atteintes d'une maladie physique.
    Comme vous le savez sans doute, la commission est l'aboutissement d'un rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, que j'ai présidé. Ce rapport était intitulé « De l'ombre à la lumière ». Le titre attirait l'attention délibérément sur la stigmatisation. Ce problème est resté dans l'ombre pendant trop longtemps. De fait, si vous me demandiez de résumer en une phrase l'objectif réel de la commission, c'est de garder la question de la santé mentale hors de l'ombre pour toujours, autrement dit, ne la laissons pas glisser de nouveau dans l'ombre.
    Nous sommes structurés sur le plan légal comme société sans but lucratif. Nous ne sommes pas un fournisseur de services. Nous sommes un catalyseur. Nous avons un conseil d'administration composé de 18 membres. Douze, dont moi-même, sont des membres non gouvernementaux, c'est-à-dire des représentants ou des particuliers appartenant au secteur privé dans tout le pays. Nombre d'entre eux sont des fournisseurs de services. Trois d'entre eux sont eux-mêmes des malades, afin d'assurer que nous connaissions la perspective du consommateur. L'autre tiers de nos membres appartiennent au pouvoir public, l'un au gouvernement fédéral et cinq aux provinces et territoires.
    Nous avons le soutien actif de toutes les provinces et de tous les territoires, Québec excepté. Vis-à-vis de la province du Québec, à sa demande en fait, nous avons maintenant noué une relation bilatérale. Le problème à cet égard est que le Québec nous considère comme une institution fédérale, ce que nous ne sommes pas. Je le répète, sur les 18 membres du conseil, un seul est nommé par le gouvernement fédéral. Le Québec, si je puis exprimer les choses ainsi, s'est figé dans le contexte constitutionnel intergouvernemental.
    En revanche, sur le terrain, au Québec, à Montréal — et Jayne Barker pourra vous en parler, si vous le souhaitez — nous avons le soutien enthousiaste des fournisseurs de services aux personnes atteintes de maladie mentale. De fait, des représentants du gouvernement siègent au comité directeur de notre projet destiné aux sans-abri de Montréal. Donc, la réalité est que, au niveau très élevé des subtilités constitutionnelles, le gouvernement du Québec renâcle, mais sur le terrain, le niveau qui compte réellement, vu que notre objectif est d'aider les gens, nous bénéficions d'un très bon soutien, même au Québec.
    Nous avons huit comités consultatifs qui sont véritablement conçus de manière à nous doter des meilleurs conseils possibles sur toute une série d'enjeux. Pour vous donner quelques exemples, nous en avons pour les enfants et les adolescents, les personnes âgées, nous avons un comité consultatif pour les familles et un comité consultatif pour les soignants membres de la famille.
    Permettez-moi de dire en passant, au sujet des familles, que la vaste majorité des services de santé mentale dans notre pays sont réellement dispensés gratuitement par les familles. J'entends par là que la quantité de travail qu'ils ont à faire pour s'occuper à la maison d'un patient souffrant de maladie mentale est énorme, et tout ce travail est bénévole, parce que ces soignants le font chez eux pour leurs proches.
    Par exemple, la nécessité de soins de relève, pour donner un répit à ceux qui connaissent cette situation très stressante, est un sujet qu'aucun gouvernement n'a encore abordé. Nous avons aussi un comité consultatif sur le droit et les maladies mentales, car il existe dans ce domaine quelques grandes bizarreries, et nous allons proposer quelques changements. Il concerne principalement la façon dont la police et d'autres traitent les appels au service 911 en rapport avec une crise mentale.

  (1115)  

    Une parenthèse intéressante est que si vous parlez avec le chef de police de n'importe quelle grande ville, il vous dira que près de 50 p. 100 des appels au 911 concernent une crise de maladie mentale. En ce sens, nos agents de police sont les travailleurs de santé mentale de première ligne lorsque survient une crise.
    Quel est notre objectif? Notre objectif est réellement d'offrir l'espoir que le système peut être modifié, et modifié dans leur intérêt, ce qui nous amène au premier enjeu, celui sur lequel travaille le Dr Chodos, à savoir une stratégie de santé mentale pour le Canada.
    Nous avons fait deux choses. Nous avons enclenché un processus à deux étapes. La première consiste à déterminer ce que nous visons réellement. Autrement dit, si nous pouvions réviser le système, à quoi ressemblerait-il à l'arrivée? À cette fin, nous avons produit un document, et nous en avons des copies en anglais et en français si cela vous intéresse. C'est un document cadre. Il a fait l'objet de larges consultations. Howard et son équipe ont visité 13 villes à travers le pays et plus de 1 300 Canadiens ont répondu à notre consultation en ligne, dont maintes organisations, si bien que le nombre réel est en fait beaucoup plus important que cela.
    Nous sommes sur le point de finaliser le cadre, qui bénéficiera d'un très large appui à travers le pays de la part de toutes les parties intéressées — pouvoirs publics, malades touchés, soignants, fournisseurs de services, et ainsi de suite.
    La deuxième étape sera la plus difficile: comment passer du point de départ au point d'arrivée? La raison pour laquelle c'est la partie la plus difficile, je le mentionne en passant, c'est que nous avons certes pu réunir un consensus sur le point d'arrivée visé, mais pour aller d'ici à là, beaucoup de gens vont devoir modifier ce qu'ils font et leur façon de le faire, et donc la difficulté sera de convaincre les gens de changer. C'est très symptomatique de la phrase de Mark Twain lorsqu'il disait « Tout le monde est en faveur du progrès, c'est juste le changement que les gens n'aiment pas ».
    Nous sommes tombés d'accord sur ce qui constituerait le progrès, mais le changement sera plus difficile. Nous travaillerons là-dessus au cours des quelques années qui viennent.
    Je ne vais pas lire la courte esquisse du cadre, lequel est résumé dans les huit points vignettes du mémoire. Je vais plutôt parler du deuxième des quatre grands piliers, soit l'action en faveur des malades mentaux sans-abri.
    Dans le budget déposé il y a 15 mois environ, le gouvernement fédéral a demandé à la commission d'entreprendre cinq projets pilotes pour essayer de cerner par quels moyens nous pourrions fournir les services aux sans-abri atteints de maladie mentale. C'est un problème qui confond les gouvernements de tous les pays industrialisés. Jane pourra vous parler plus en détails des études précises. Elles sont actuellement en cours, ce qui est remarquable, car il ne nous a fallu que 12 mois pour aller de zéro à l'envoi de chercheurs sur le terrain. Les résultats ne seront pas utiles seulement au Canada; les organisations internationales responsables de fournir des services aux itinérants sont également concernées de très près.
    Pour mettre les choses en perspective, et bien que personne ne connaisse le chiffre exact, près de 50 p. 100 des personnes vivant dans la rue sont atteintes d'une maladie mentale d'une sorte ou d'une autre. Nombre d'entre elles ont également des problèmes de toxicomanie. L'incidence de la maladie mentale chez les sans-abri est très forte.
    Pour ceux d'entre vous qui n'avez pas lu le livre, allez voir le film The Soloist, et vous comprendrez. Il est sorti tout juste la semaine dernière. C'est l'histoire d'un sans-logis souffrant de schizophrénie dans les rues de Los Angeles. Il vaut la peine d'être vu car il mettra le problème en perspective.
    Notre troisième initiative est notre campagne décennale de lutte contre la stigmatisation et la discrimination, gérée par Mike Pietrus. Ce sera la première tentative systématique de changer les attitudes du public.

  (1120)  

    C'est évidemment très difficile à faire, mais nous savons d'après l'expérience australienne, où une campagne anti-stigmatisation est menée depuis près de 15 ans maintenant, et de la Nouvelle-Zélande, où elle est menée depuis 10 ans, ainsi que de l'Angleterre et de l'Écosse où ce travail a été lancé il y a quelque temps, qu'un programme correctement ciblé — et par-là je n'entends pas les annonces de service public classiques à la télévision, mais un programme ciblé sur des catégories de populations très précises — peut effectivement être très efficace.
    Nous avons donc décidé de cibler deux groupes, initialement, pour des raisons très précises. L'un est celui des enfants et adolescents, car, franchement, il est beaucoup plus facile de modifier les attitudes des enfants que celles des adultes. Nous savons aussi que 70 p. 100 des adultes atteints de maladie mentale ont connu leur première épisode de cette maladie avant l'âge de 18 ans. Donc, si nous pouvons inculquer a la prochaine génération de Canadiens des attitudes positives à l'égard des personnes souffrant de maladie mentale, ce sera d'importance cruciale. Les résultats à l'étranger ont montré qu'une telle campagne est susceptible de connaître un bon succès.
    Le deuxième groupe que nous allons cibler est celui des prestataires de soins de santé, et particulièrement ceux de soins de santé mentale. Vous pourrez être nombreux à vous demander — car c'est certainement la question que je me suis posée moi-même au début — pourquoi ? Tout de même, un médecin ou une infirmière doivent considérer qu'un patient souffrant de maladie mentale doit être traité de la même façon qu'un patient souffrant de cancer ou de maladie cardiaque ou d'autre chose. Mais le fait est qu'il n'en est rien. Le fait est que les professions de la santé et les soignants ont les mêmes attitudes négatives envers les malades mentaux que toute autre profession et tout autre Canadien. Donc, nous espérons modifier ces attitudes pour régler au moins le problème de la stigmatisation aux mains des soignants.
    Enfin, permettez-moi de dire un mot sur la pauvreté, étant donné que c'est là une partie importante de votre travail, et je l'inscrirai dans deux contextes. Le premier est que, si la maladie mentale touche des personnes de tous âges, la réalité est que beaucoup de données montrent que plus le revenu est faible, et plus grande est l'incidence de la maladie mentale. Il y a là un peu le problème de la poule et de l'oeuf: votre revenu peut être faible parce que vous souffrez de maladie mentale, mais la réalité est qu'il y a un lien très clair entre le revenu et la maladie mentale. L'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes de Statistique Canada fait apparaître très clairement l'existence d'une corrélation très étroite entre la situation socioéconomique et la maladie mentale.
    Un deuxième problème se profile à l'horizon. L'incidence de la maladie mentale chez les Canadiens va sensiblement augmenter dans le courant de la récession. C'est toujours le cas, car lorsque les gens se trouvent soudainement au chômage, ils ont un problème, les familles vivent un stress énorme, et l'impact sur la famille et les enfants est très dévastateur.
    Pour vous donner juste quelques exemples, au cours des trois premiers mois de cette année, à Oshawa — et je cite Oshawa uniquement parce que je me trouve à connaître les chiffres — le nombre de personnes demandant de l'aide pour des problèmes de santé mentale a augmenté de 20 p. 100 l'an dernier. Nous savons que dans une ville comme Windsor, les chiffres sont sensiblement supérieurs à cela. Nous savons aussi, malheureusement, que cela va exercer de très grandes répercussions sur les enfants, car l'effet du stress accru dans les ménages par suite des licenciements — dans certains cas touchant les deux soutiens de famille — est tel qu'il impose un stress supplémentaire énorme sur la famille et met les enfants sous forte pression.
    Il y a donc un lien clair côté revenu, et nous avons commencé à nous demander si l'on ne pourrait pas faire quelque chose pour réduire l'incidence des problèmes de santé mentale pendant une récession.
    Cela dit, ce n'est pas un problème spécifiquement canadien. Des données provenant de Nouvelle-Zélande montrent que le taux de suicide, par exemple, grimpe en flèche en période de récession. Les gens n'en peuvent plus et abandonnent tout simplement.
    Permettez-moi de revenir au début, en guise de conclusion. Tout ce que peut faire la commission, c'est être un catalyseur de la réforme. Nous ne fournissons pas concrètement de services. Nous pouvons cajoler, nous pouvons parler, nous pouvons soulever le problème, nous pouvons aiguillonner et nous pouvons formuler des idées d'action. Mais, au bout du compte, le succès ultime de la commission dépendra entièrement de la réponse des Canadiens eux-mêmes, et je dis à vous et à tous vos collègues parlementaires que nous avons réellement besoin de votre soutien, car vous êtes des leaders dans vos collectivités.

  (1125)  

    Que vous participiez à des manifestations avec nous, que vous preniez la parole sur le sujet et simplement indiquiez qu'il est maintenant admissible de parler de santé mentale, sans stigmatisation... il y a beaucoup de petites choses surprenantes que vous pouvez faire qui ne coûtent rien et qui nous aideraient beaucoup dans notre travail.
    J'ai été ravi que vous nous invitiez à comparaître aujourd'hui, monsieur le président, et je suis très impatient de travailler avec vous et vos collègues à l'avenir.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Kirby. Au moment où nous nous embarquons dans cette étude de la pauvreté, je pense que l'une de nos tâches consiste à déterminer les actions que nous pouvons entreprendre, et vous pouvez manifestement nous en apprendre beaucoup à cet égard.
    Nous allons commencer avec notre premier tour de table, qui sera de sept minutes pour les questions et les réponses. Je commencerai avec mon collègue, M. Savage.
    Vous avez sept minutes, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux certainement remercier tous les témoins d'être venus nous rencontrer aujourd'hui et de nous parler du travail entrepris.
    Ce serait un manquement de ma part, docteur Kirby, de ne pas souligner particulièrement le travail que vous avez abattu dans le domaine de la santé dans ce pays et le travail que vous avez accompli au Sénat. Si quelqu'un doutait que le Sénat peut remplir une fonction utile au Canada, vous êtes un exemple brillant du genre de travail qu'il peut faire. Le travail que vous avez effectué, tant dans la sphère publique que la sphère privée, a été très important. En tant que Néo-Écossais, je n'attendais rien de moins de vous, vous qui avez passé la plus grande partie de votre vie publique en Nouvelle-Écosse.
    Je peux franchement dire que dans le travail que je fais sur la pauvreté et auprès de groupes qui se consacrent à la santé mentale dans ma région, je vois des gens qui ont aujourd'hui affiché votre portrait sur le mur. Vous ne voudriez pas exagérer l'impact du travail que vous avez accompli, mais pour ceux qui ont vécu dans l'ombre pendant de si nombreuses années, il est très considérable. Je vous en félicite.
    J'aimerais parler un peu d'un aspect que vous avez effleuré, ce que j'appelle l'infrastructure sociale du Canada. Il semble qu'une bonne partie de l'infrastructure sociale que nous avons mise en place pour protéger, ainsi que pour ouvrir de meilleures perspectives aux Canadiens, qu'il s'agisse de l'assurance-emploi ou d'autres programmes, n'est pas très bien conçue pour ceux atteints de maladie mentale.
    Si vous vous fracturez le bras, vous savez quoi faire. Vous le faites soigner et vous savez qu'une fois réparé, vous pouvez retourner au travail. J'aimerais savoir si vous, ou l'un de vos collaborateurs, avez des idées sur ce point spécifique et sur ce que nous pourrions faire. Faudrait-il avoir une infrastructure sociale spéciale qui s'occupe des gens atteints de maladie mentale et les traite dans un cadre entièrement séparé, par exemple? Ou bien faudrait-il modifier certains des programmes que nous avons pour nous occuper de ceux qui soit déjà vivent dans la pauvreté soit s'y dirigent et qui n'ont pas le soutien dont ils ont besoin?

  (1130)  

    Merci de cette question, et merci de votre préambule.
    Je me souviens que lorsque j'étais chef de cabinet du premier ministre de la Nouvelle-Écosse, il y a très longtemps de cela, si quelqu'un avait mis mon portrait sur le mur, c'aurait été pour y lancer des fléchettes. Il y a donc peut-être du progrès.
    Je ferai quelques remarques et je demanderai ensuite à Jayne de compléter.
    Si vous prenez du recul pour considérer l'ensemble des programmes fédéraux, particulièrement ceux de RHDCC, qu'il s'agisse des prestations de maladie de l'AE ou des prestations d'invalidité du RPC, etc., tous ont été conçus pour ceux touchés par une maladie physique. C'est à eux que l'on songeait lorsqu'on a conçu ces programmes.
    Franchement, ils ne marchent pas très bien dans le cas des maladies mentales. Permettez-moi juste de vous donner un exemple, et vous savez cela mieux que moi. Je crois que c'est 15 semaines. Lorsque vous arrivez à la fin des 15 semaines, vous perdez les prestations de maladie de l'AE. Cinquante pour cent des personnes qui sont toujours malades à la fin de la quinzième semaine souffrent d'une maladie mentale. Autrement dit, la moitié des personnes qui arrivent en fin de droits et qui ont encore besoin d'aide mais ne l'obtiennent plus souffrent d'une maladie mentale.
    Le deuxième facteur est qu'un grand nombre des maladies mentales sont chroniques ou de nature épisodique. Vous vivez une période de dépression. Vous allez mieux, vous retournez au travail et vous souffrez d'un nouvel accès. Fréquemment, le temps écoulé entre ces deux accès n'est pas suffisamment long pour que vous deveniez admissible de nouveau au programme AE. Encore une fois, cela est dû simplement au fait que lorsque les prestations de maladie AE ont été conçues, on s'est simplement demandé, en toute logique, ce qu'il fallait faire pour quelqu'un souffrant d'une maladie? Eh bien, ces malades vont guérir, comme M. Savage l'a dit, et retourneront au travail. Voilà donc un problème qu'il faut considérer.
    Les prestations d'invalidité du RPC sont un autre problème. Alors que techniquement, légalement, elles s'appliquent aux maladies mentales, tous les tests qu'il faut subir pour toucher les prestations d'invalidité du RPC sont clairement axés sur une affection physique. Vous allez être frappé d'incapacité pendant quelque temps, mais l'infirmité est une limitation physique, et non mentale.
    En générale, si vous regardez les programmes, il serait beaucoup plus rationnel que je vous dise de ne pas essayer de bricoler et rapiécer un programme conçu pour une maladie physique; retranchons la maladie mentale de ces programmes et concevons un programme unique adapté aux caractéristiques spécifiques de la maladie mentale, c'est-à-dire qu'il faut typiquement plus de temps avant que l'état s'améliore, qu'elle est parfois épisodique et que la nature du traitement est également différente.
    Je pense donc que la réponse à votre question est que je serais effectivement en faveur de rechercher une nouvelle façon de faire, en un sens, un ensemble de programmes conçus pour ceux souffrant de maladie mentale.
    Maintenant que le RPC est autorisé à lancer des projets pilotes, ce qu'il ne pouvait pas faire jusqu'il y a quelques années, je pense que vous avez un véhicule qui rend l'expérimentation possible. Il faudra veiller très soigneusement à ce que toute modification des programmes soit adaptée à la rue. Ce que j'entends par-là, c'est que je veux réellement savoir ce qui va se passer sur le terrain. Je dis cela comme technocrate moi-même. Parfois, j'échoue complètement à anticiper comment les gens vont réagir à un programme donné. Mais, avec le RPC, vous pouvez maintenant tenter des expériences.
    Souhaitez-vous ajouter quelque chose?

  (1135)  

    Non, je n'ai réellement rien à ajouter. Je pense que Mike a très bien couvert le sujet. Je dirais juste que la commission est réellement intéressée à examiner les programmes actuellement disponibles et à aider à définir ce que pourrait être un nouveau programme, une approche différente.
    C'est donc là votre intention? Et je sais que je n'ai pas beaucoup de temps, monsieur le président.
    Vous formuleriez quelques recommandations au RHDCC quant à...
    Les fonctionnaires de RHDCC se montrent en fait très positifs à cet égard, et je n'ai rien à reprocher au ministère, mais il nous faut collaborer avec lui pour élaborer un programme, puis le mettre à l'essai comme projet pilote.
    J'espère, franchement, que nous pourrons lancer cela au cours des six prochains mois. J'en fais une très grande priorité, simplement parce que cela nous débarrasserait d'un grand nombre de problèmes réellement stressants avec lesquels se débattent les malades mentaux qui doivent naviguer dans un labyrinthe de programmes qui ne sont pas conçus pour eux en premier lieu.
    Merci beaucoup, et merci, monsieur le président.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Lessard.
    Sept minutes, je vous prie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je veux aussi remercier les personnes qui sont présentes ce matin. Nous apprécions énormément votre contribution au domaine de la santé mentale. Vous nous en faites profiter, ce matin.
    Un certain nombre de choses me réjouissent, entre autres l'attention que vous portez au personnel soignant. C'est une dimension indispensable pour ce qui est du soutien et de l'évolution de la prise de conscience concernant l'apport à la société des personnes qui ont un problème de santé mentale.
    Par ailleurs, vous dites qu'il faut réussir à donner de l'espoir. Bien avant moi, quelqu'un a dit qu'être pauvre, ce n'était pas seulement manquer d'argent, mais que c'était aussi ne pas avoir d'espoir. Or, je pense que vous réussissez, dans une certaine mesure, à redonner de l'espoir à certaines personnes. Je ne parle pas seulement de l'étude que vous avez faite, mais aussi des initiatives que vous avez prises, par exemple ces huit comités que vous avez mis sur pied pour réfléchir à ces questions et offrir une opinion concernant certains secteurs de la population.
    Sentez-vous déjà qu'il y a, au sein de la population canadienne, un consensus à l'égard de l'orientation que vous voulez donner à vos travaux?

[Traduction]

    Vu que Howard vient juste d'achever des audiences nationales sur cette question même, je vais lui demander de répondre.

[Français]

    Je pense qu'il est peut-être un peu tôt pour dire s'il y a un consensus dans l'entièreté du pays, mais il reste que nous avons rencontré des centaines de Canadiens dans 13 villes lors de 15 rencontres. Nous avons aussi entrepris une consultation en ligne dans le cadre de laquelle nous avons reçu au-delà de 1 700 réponses détaillées sur notre document-cadre relativement à l'élaboration d'une stratégie en matière de santé mentale au Canada.
    Dans la mesure où il peut y avoir consensus sur un sujet aussi complexe que la santé mentale, nous considérons avoir reçu un appui considérable de la part des intervenants de ce secteur. Nous avons réuni dans une même salle des représentants des divers gouvernements provinciaux et territoriaux, des fournisseurs de soins et des personnes vivant avec des problèmes de santé mentale. Nous avons discuté en détail des huit objectifs que nous proposons dans le document-cadre et avons fait voter ces personnes sur chacun des objectifs, en utilisant une échelle de 1 à 5. Or, pour l'ensemble des objectifs, le résultat s'est toujours situé entre 4 et 5. L'appui à l'égard de l'ensemble des objectifs que nous avons proposés semble considérable. De leur côté, les gens ont fait beaucoup de suggestions concernant la révision de notre document ou certains aspects de notre travail qui, selon eux, comportaient des faiblesses. Il y a eu aussi des suggestions visant à améliorer la façon dont nous abordions ces questions.
    En général, nous sentons que les gens veulent collaborer avec la commission et qu'ils appuient le travail que nous avons fait à ce jour. Nous reconnaissons que ce n'est qu'un début. Nous envisageons un meilleur avenir pour le domaine de la santé mentale, mais nous savons qu'il nous reste beaucoup de travail à faire avant de pouvoir déterminer la façon d'atteindre ces objectifs. En nous fondant sur les consultations que nous avons menées et qui se sont terminées la semaine passée, nous en concluons que l'orientation générale que nous suivons fait l'objet d'un appui considérable.

  (1140)  

    Pour bien comprendre la façon dont les choses peuvent évoluer, il faut peut-être cibler des populations en particulier. Nous avons fait une étude sur l'employabilité, ce qui nous a permis de constater que certaines parties de la population avaient moins accès à l'emploi et étaient moins capables de garder un emploi. Cela a un effet direct, tout comme le chômage, sur la santé mentale. Je pense entre autres aux Autochtones.
    Je reviens à l'un des premiers propos de M. Kirby en ce qui concerne la contribution parfois inégale d'une province à l'autre. J'aimerais que vous vous attardiez particulièrement sur le rôle du gouvernement central dans le domaine de la santé mentale. Selon vous, quelle est la mesure principale que le comité devrait recommander afin de faire une différence dans les résultats des interventions du gouvernement fédéral auprès des peuples autochtones, pour prendre cet exemple? Cela nous éclairerait sur la façon de faire les choses.

[Traduction]

    Merci.
    Je vais traiter directement du volet autochtone, avant de céder la parole de nouveau à Howard.
    Lorsqu'on considère les statistiques sur la santé mentale des premières nations, des Métis et des Inuits, il y a lieu pour tous les Canadiens d'avoir honte. Lorsqu'on considère le taux de suicide chez les enfants de moins de 24 ans, en particulier des premières nations et des Inuits, on est atterré.
    Si vous prenez le taux de suicide chez les adolescents canadiens, c'est la deuxième plus grande cause de décès chez nos enfants entre les âges de 15 et 24 ans, après seulement les accidents de voiture. Si vous regardez les données pour les premières nations et les Inuits, qui relèvent de la compétence du gouvernement fédéral, il est entre cinq et sept fois plus élevé que la moyenne nationale.
    En tant que Canadien, j'en ai honte. Je pense qu'il faut déployer un effort considérable pour améliorer les services de santé mentale offerts aux premières nations, aux Inuits et aux Métis, dans les réserves, qui sont une responsabilité fédérale directe, mais franchement aussi dans les villes. Il y a davantage d'enfants autochtones vivant dans les villes canadiennes — c'est-à-dire, hors réserve — qu'il y en a dans les réserves. Tous les problèmes de santé mentale et d'abus de substance sont colossaux. Le fait est que nous avons une occasion unique dans le monde d'agir.
    Nous savons que c'est possible. Nous savons, par exemple, que le travail effectué par l'Australie auprès de ses aborigènes et le travail accompli par la Nouvelle-Zélande auprès des Maoris ont eu des effets très considérables au cours des 10 dernières années sur le plan de l'amélioration de leur santé mentale. Je pense, franchement, qu'il n'est pas seulement temps, mais que nous, les Canadiens, n'avons que trop tardé à déployer le même effort.
    Donc, monsieur Lessard, je suis totalement d'accord avec vous là-dessus.
    Howard, aimeriez-vous dire un mot sur les autres sujets?

  (1145)  

    Merci. En ce qui concerne le rôle des différents ordres de gouvernement, et en particulier celui du gouvernement fédéral, la commission a été structurée de façon à pouvoir travailler avec tous les niveaux de gouvernement et à s'attaquer à certains des problèmes juridictionnels complexes qui se posent, surtout à l'égard des populations indigènes de ce pays. Mike a fait état des populations en réserve et hors réserve, où le besoin de services enjambe les limites juridictionnelles et où les malades éprouvent énormément de difficulté à se procurer des services appropriés.
    Il est prématuré pour nous de recommander une mesure centrale en particulier, mais nous avons ouvert le dialogue avec différentes collectivités autochtones et nous écoutons très attentivement ce qu'elles ont à dire. La commission possède un comité consultatif des premières nations, des Inuits et des Métis. En particulier, ils nous ont encouragés à adopter ce qu'ils appellent une perspective qui permette à leurs malades d'être traités dans un milieu de sécurité culturelle, qui prennent en compte non seulement leurs besoins linguistiques ou culturels mais aussi l'environnement global — l'environnement socioéconomique et politique — de façon à pouvoir établir des partenariats qui permettront d'offrir à ces malades le type de soins dont ils ont besoin pour guérir et apprendre à mieux confronter les problèmes de santé mentale propres à leur situation.
    Notre première étape a donc consisté à écouter aussi attentivement que possible afin de comprendre la réalité. Les visites à travers le pays effectuées dans le cadre de notre document nous ont emmené notamment dans le Nord. Nous nous sommes rendus à Iqaluit et à Yellowknife et je peux vous dire que c'était la première fois que je me rendais dans ces régions du pays. Les difficultés y sont énormes. Lorsque nous parlons des insuffisances du système dans le Sud et dans les régions plus peuplées du pays, vous savez sûrement aussi bien que moi que dans le Nord il faut partir littéralement de zéro, car les services y sont tout simplement inexistants.
    Il faut se montrer réaliste quant à ce que l'on peut espérer accomplir. Mais le défi est absolument immense et nous sommes résolus à collaborer avec les populations autochtones pour déterminer comment nous pouvons avancer sur ce front.
    Merci beaucoup. Il ne vous reste plus de temps dans ce tour.
    Nous allons maintenant passer à M. Thibeault. Bienvenue au comité, monsieur. Nous sommes heureux de vous voir. Vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Merci de venir nous rencontrer. Ayant travaillé pendant 10 ans dans les rues comme travailleur de première ligne, je n'ai cessé de griffonner des notes tellement j'ai de questions à poser.
    L'une des choses que j'ai pu constater à maintes et maintes reprises dans différentes collectivités, c'est ce que j'appelle le cycle: le cycle de la pauvreté et le cycle de la maladie mentale dans lequel les gens se retrouvent coincés. Cela commence avec la maladie mentale. S'ils sont atteints d'une maladie mentale, ils perdent leur emploi et leur logis. Par une suite de circonstances malheureuses et du fait de leur maladie mentale, ils se retrouvent sous l'emprise d'une substance ou d'une autre, ce qui prolonge la spirale.
    Il existe un grand nombre d'organisations faisant un travail fantastique. Dans ma ville de Sudbury, je songe à l'Association canadienne pour la santé mentale, au Centre de santé communautaire de Sudbury — il y en a tellement. Cependant, nous essayons de rompre ce cycle à partir de tellement de points de départ différents. Nous essayons d'intervenir au niveau du logement, au niveau des services de santé mentale. Nous ouvrons quatre ou cinq dossiers différents, tous cherchant à trouver pour cette personne un système de soutien.
    À votre avis, avez-vous pu trouver une façon de rompre ce cycle et le gouvernement fédéral peut-il faire quelque chose pour unifier les efforts de toutes ces excellentes organisations en établissant un point d'accès unique et enrayer cette valse, de façon à offrir le soutien à partir de ce guichet?

  (1150)  

    Monsieur le président, je vais demander à Jayne de répondre et j'ajouterai ensuite un mot.
    Je suis d'accord avec vous. Il est intéressant que vous ayez passé des années en première ligne. Cela éveille en moi beaucoup d'échos. C'est là où j'ai passé la plus grande partie de ma carrière aussi.
    Les projets pilotes de recherche sur la santé mentale et l'itinérance entrepris par la commission avec des fonds fédéraux sont une réelle occasion de travailler avec la population des malades mentaux itinérants de cinq villes à travers le Canada et d'examiner de près quelles approches donnent les meilleurs résultats.
    Nous savons, non pas d'après des recherches canadiennes mais d'après des recherches étrangères, que ce que l'on appelle l'approche « priorité au logement » est très prometteuse, mais elle n'a jamais été mise à l'essai dans le contexte canadien. C'est une méthode où le choix du client détermine les services donnés à la personne, où l'on offre non seulement un logement adéquat mais aussi une diversité de services auxiliaires et de santé mentale afin que ces patients puissent devenir des citoyens en état de fonctionner.
    Les premières indications sont que les personnes qui participent à ce genre de programmes peuvent redevenir des citoyens à part entière et retrouver la stabilité du logement et la stabilité sanitaire. Nous espérons que ces projets expérimentaux nous donneront des indications solides à soumettre au gouvernement avec des recommandations pour faire précisément ce dont vous parlez.
    Heureusement, si vous cherchez un exemple, ma ville de Sudbury, toujours, a mis en place quelque chose de similaire et nous cherchons comment accéder à un financement fédéral. Nous envisageons une initiative de type « priorité au logement ». Nous avons mis sur pied une alliance d'intervenants communautaires, qui englobe même l'hôpital. Vous avez déjà mentionné combien de temps et de services, de services d'ambulance, de services de police, sont accaparés par le problème.
    J'ai également eu l'occasion de vivre quelque temps à Vancouver. Ils avaient là un excellent programme pilote dont je ne sais pas s'il existe encore. Je crois qu'il s'intitulait « Voiture 87 », où un agent de police patrouillait avec une infirmière de santé mentale. Ce sont là d'excellentes idées que l'on pourrait reproduire ailleurs. Je sais qu'à l'époque c'est la police de Vancouver qui appliquait cela, mais la GRC disait souhaiter disposer de ces ressources afin d'offrir le même type de service.
    Mme Jayne Barker: Oui, absolument.
    Permettez-moi de dire encore un mot sur le problème sur le terrain. Si vous souffrez d'une maladie physique, que faites-vous? Supposons un instant qu'il ne s'agisse pas d'une urgence. Vous allez voir votre omnipraticien qui ensuite vous pilote à travers le système, si vous avez besoin d'un test ou de voir un spécialiste. Dans la pratique, votre médecin de famille devient votre naviguant dans le système, votre gestionnaire de cas. Il n'existe rien de semblable du côté de la maladie mentale.
    Il faut entrer dans le système quelque part. C'est complexe, c'est le moins que l'on puisse dire. Il y a quelques années, j'ai même essayé de dresser un diagramme de tous les endroits auxquels il faut s'adresser pour obtenir tous les services. J'ai renoncé. C'était trop compliqué à comprendre.
    À l'évidence, des changements sont nécessaires... et cela nous ramène à la question de savoir comment parvenir à notre résultat ultime. Il faut une sorte de gestionnaire de cas, de navigateur du système, quelque chose. Il faut quelqu'un qui fasse pour la personne souffrant de troubles mentaux ce que le médecin de famille et le cabinet du médecin de famille font pour ceux souffrant de maladie physique, cela ne fait aucun doute.
    Il me reste une minute et demie. J'aime siéger dans ce comité. C'est excellent.
    L'une des choses à considérer également en mettant en place des services fédéraux — et je suis impatient de connaître votre avis à ce sujet — pour une personne sans logis, ou toxicomane, ou vivant dans la pauvreté, qui a besoin d'accéder à des services dans un bâtiment dans lequel elle peut se sentir déplacée... On en revient à la fierté de la personne et au stigmate associé à la maladie mentale, ou au fait d'être sans-abri. Tout d'un coup, la personne connaît cette épiphanie qui lui fait vouloir arrêter la drogue ou de ne plus vivre dans la rue, et elle pousse une porte et on ne l'autorise pas à entrer parce qu'elle ne s'est pas douchée pendant deux semaines. Comment faire en sorte que nos services soient accessibles aux malades mentaux?

  (1155)  

    Là encore, c'est quelque chose qui se fait relativement bien dans beaucoup de collectivités. Beaucoup ont des services d'approche dans la rue et des travailleurs qui circulent dans les rues et rencontrent les gens là où ils se trouvent. Voiture 87 est réellement un bon exemple d'un projet pilote à Vancouver, qui donne d'assez bons résultats. Mais ces programmes sont très loin d'être offerts partout. Il faut beaucoup de créativité, sur le plan de la levée des fonds, du rassemblement de crédits venant de différents endroits, pour mettre en place ce genre de programme dans une ville.
    Vous avez raison, ce peut être une véritable barrière à l'accès aux services que de devoir aller dans un bureau intimidant où l'on vous refuse souvent l'entrée. C'est l'une des choses que nous constatons dans notre étude sur l'itinérance, sur le type d'approche requise pour répondre aux besoins particuliers de personnes de milieux ethnoculturels différents, où la langue et les coutumes peuvent ériger des obstacles supplémentaires. Les Autochtones qui veulent se prévaloir de services destinés principalement à des blancs, peuvent se trouver très intimidés, et cela peut ériger des obstacles réels.
    Cela fait partie de ce que nous espérons apprendre.
    Merci, Jayne. Et Glenn, merci encore d'être venu aujourd'hui.
    Nous allons passer au dernier intervenant lors de ce tour.
    Monsieur Komarnicki, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Kirby et merci aux autres témoins. Vous faites certainement preuve de beaucoup de passion et d'une abondance de savoir et de compréhension. J'apprécie que vous poussiez les recherches sur le terrain pour voir ce qui marche, et c'est une bonne chose. Je vous perçois certainement comme ayant un rôle d'assistance, d'encouragement, de facilitation. Il est bon pour nous de passer d'une approche de gestion de crise à quelque chose de plus global, comme vous l'avez mentionné.
    J'ai quelques questions sur plusieurs domaines. Vous en avez mentionné un, dont il a été question dans le numéro de printemps des Nouvelles de la CSMC. Vous avez lancé votre campagne anti-stigmatisation et anti-discrimination auprès d'un groupe d'étudiants en journalisme et services communautaires. Je me demande si c'était une décision stratégique ou non.
    Deuxièmement, quels sont les résultats, et sur quoi allez-vous construire votre campagne à partir de maintenant?
    Je vais demander à Mike Pietrus, qui est responsable de cette campagne, de répondre.
    C'est très intéressant, car initialement nous espérions uniquement toucher les étudiants en journalisme. Les médias contribuent largement à façonner l'opinion publique et les perceptions de la maladie mentale, notamment de par le langage employé. C'est le langage qui devient blessant, qui stigmatise.
    Nous savons d'après le travail effectué en Australie, par exemple, qu'il faut commencer à la source, là où l'on peut avoir le plus d'impact, et donc influencer les jeunes étudiants en journalisme. Nous avons donc approché le Mount Royal College comme site d'essai pilote et, voyez-vous ça, nous avons été extrêmement ravis de voir qu'un certain nombre d'autres facultés — par exemple, la faculté des études sanitaires et communautaires, qui regroupe les sciences infirmières, le travail social et la criminologie — étaient également très intéressée et nous a demandé d'organiser une deuxième session pour ses étudiants aussi.
    Nous avons fait venir quatre experts pour en parler selon différentes optiques. Nous avons invité également deux consommateurs, des personnes qui avaient une expérience personnelle, qui pouvaient raconter leur vécu. Encore une fois, c'est le contact direct avec des personnes qui ont un vécu de maladie mentale qui réussit si bien à casser ces stéréotypes et nombre des mythes qui entourent la maladie mentale.
    Je suis ravi de dire que cela a été un grand succès. C'est l'une des initiatives que nous voulons poursuivre et reproduire dans d'autres universités à travers le pays, et peut-être même au niveau des écoles secondaires, où nous pourrons toucher les jeunes à un âge encore plus précoce.
    Notre consultante principale, la Dre Heather Stuart, de l'Université Queen's, a préparé un questionnaire avant-après, ce qui nous a permis de jauger les opinions des participants avant la conférence ou le symposium et de les mesurer à la sortie.
    Juste pour vous donner une idée du succès de ce programme, le Mount Royal College est venu nous demander si nous pourrions faire cela régulièrement et utiliser ces étudiants, d'une certaine façon, comme cobayes afin de déterminer en quoi, au fil d'études de journalisme de trois ans, par exemple, et du programme de services communautaires de trois ans, les programmes d'éducation anti-stigmatisation et ce genre de choses pourraient modifier leurs opinions et points de vue. Le collège espère que nombre de leurs enseignants et professeurs pourront introduire cela dans leurs programmes d'enseignement.
    Nous pensons que c'est un excellent point d'intervention.

  (1200)  

    Merci.
    Les barrières sont nombreuses, mais la stigmatisation est probablement celle qui se répercute sur tous les autres aspects. Il est donc bon que vous entrepreniez cette initiative, ainsi que les autres que vous pourrez lancer à l'avenir.
    L'autre sujet d'intérêt, bien sûr, est votre modèle « priorité au logement ». J'ai toujours considéré que si vous avez un toit sur la tête, un lit pour dormir et de la nourriture sur votre table, vous pouvez commencer à vous attaquer aux autres problèmes auxquels vous êtes confrontés. Ce n'est pas un problème propre à un groupe particulier, il est commun à tout le monde. Votre modèle « priorité au logement » vise au premier chef, évidemment, à procurer un logis. Un emploi est un autre élément important qui vous donne le soutien ou la structure requise pour avancer.
    J'aimerais savoir, tout d'abord, où vous en êtes avec votre recherche et quel progrès vous avez réalisé à sur le terrain à cet égard.
    Deuxièmement, et peut-être ne le saurez-vous qu'une fois votre recherche terminée, quel est le parc de logements disponibles? Est-ce que d'autres facteurs interviennent, en sus de la disponibilité physique? Faut-il envisager des formes d'aide telles que des compléments de revenu, en sus du parc résidentiel, pour créer le fondement à partir duquel une personne pourra trouver un travail?
    Peut-être l'un de vous pourrait-il parler de cela. Je crois savoir que Vancouver est l'une des villes par lesquelles vous allez commencer cette action.
    Merci de la question.
    Vous avez raison. Le modèle « priorité au logement » est réellement intéressant, et le simple bon sens nous dit qu'avoir un logement décent et sûr est une condition primordiale si l'on veut établir la stabilité dans la vie de quelqu'un, que la personne souffre d'une maladie mentale ou non.
    La difficulté à trouver des appartements appropriés dans diverses villes — et c'est un défi — en est une à laquelle nous commençons tout juste à nous attaquer. Comme Mike l'a dit, nous avons reçu les crédits il y a un an environ et sommes réellement partis de rien. Il a fallu toute l'année dernière pour nouer les relations avec les prestataires de service et les chercheurs dans chacune des cinq villes. Nous avons travaillé fort pour asseoir la collaboration avec les organisations de chaque ville. Nous ne voulions pas arriver et dicter ce qu'il convenait de faire, nous voulions plutôt créer des coalitions de chercheurs et de fournisseurs de service travaillant avec nous, et nous y sommes parvenus dans chaque ville.
    Une demande de proposition a été lancée fin septembre et nous avons maintenant sélectionné dans chaque ville des fournisseurs de service et des chercheurs. Les fonds commencent à être distribués.
    Nous n'avons pas encore commencé à recueillir les données. Nous prévoyons de le faire à la fin de l'été. La recherche elle-même se déroulera sur les quatre prochaines années et nous en sommes donc tout au début. Nous n'avons pas encore de résultats ni rien du genre, mais nous sommes ravis que les choses soient en train et que nous commencions à relever le défi de la difficulté à trouver des logements appropriés.
    Vous avez mentionné Vancouver, et du fait des Jeux olympiques, bien entendu, Vancouver représente un défi particulier. Il est difficile en ce moment de trouver un appartement à Vancouver, quel que soit le revenu dont on dispose. Mais toute la question des suppléments au loyer est importante car le type de logement que l'on a les moyens de payer en l'absence de ces suppléments est souvent de qualité inférieure et n'apporte pas la sécurité et la stabilité dont ont besoin les personnes souffrant de maladie mentale pour que leur état s'améliore. Cela fait donc partie des solutions que nous examinons.
    Je crois que je vais manquer de temps. Il me reste encore des questions à poser. Ayant obtenu les crédits pour créer la commission, puis les crédits pour ses projets, il sera évidemment très intéressant de voir, dans quelques années, les fruits de ce travail. Vous aurez probablement isolé alors des orientations précises.
    J'ai remarqué que vous avez mentionné plusieurs comités consultatifs mais j'estime qu'il existe quelques problèmes qui recoupent tous ces aspects. Mais j'imagine, voyant votre organisation, que vous avez des groupes spécialisés qui se penchent sur des questions spécifiques devant être traitées séparément. Je vous soumets ce sujet afin que vous en traitiez à un moment ou à un autre, mais pas nécessairement maintenant.
    Vous pourrez y revenir à la prochaine fois.
    Pourrais-je juste faire une remarque à ce sujet?
    Certainement.
    Vous avez raison, nombre des problèmes sur lesquels nous travaillons mettent en jeu plusieurs comités consultatifs, et nous avons effectivement un mécanisme permettant de réunir plusieurs comités consultatifs pour travailler collectivement sur ces aspects.
    Permettez-moi juste de faire une autre remarque sur le rôle du gouvernement fédéral, car l'une de nos approches de l'itinérance a été de prendre l'argent du gouvernement fédéral et de l'utiliser comme un levier, c'est-à-dire pour amener d'autres à contribuer des fonds. Et nous y sommes parvenus. Nous disposons actuellement de 25 p. 100 de plus que les fonds fédéraux que nous avons reçus, obtenus par différents moyens. Nous avons les gouvernements provinciaux, nous avons les autorités sanitaires régionales, et nous avons le secteur privé qui contribuent également.
    Vous avez cité le cas de Vancouver. En guise d'illustration intéressante, le secteur privé à Vancouver — tout comme le fait le secteur privé à Montréal, Toronto, Calgary et d'autres villes — paye pour des logements avec services de soutien pour un groupe de personnes dont nous couvrons ensuite les services de santé mentale. Puisque nous n'avons pas à payer pour leur logement, nous pouvons traiter beaucoup plus de malades.
    C'est un sujet intéressant et la nature des questions autour de la table prouve absolument que c'est un enjeu non partisan. C'est un enjeu non partisan au sens plus large que tout le monde semble prêt à mettre de côté les frontières juridictionnelles traditionnelles et à reconnaître que le problème existe et à vouloir mettre la main à la pâte.
    C'est l'une des choses très encourageantes que l'on constate. Ce sont là des gens du secteur privé, des administrations publiques et de divers services qui tous semblent prêts à dire: « Nous n'allons pas suivre notre habitude de fonctionner uniquement dans notre petite boîte carrée; nous sommes prêts à ouvrir la perspective ».

  (1205)  

    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer au deuxième tour, où nous allouons cinq minutes pour les questions et les réponses. Nous allons commencer avec Mme Folco.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Je voudrais vous remercier, tous les quatre, de cette présentation extrêmement intéressante, particulièrement pour moi parce que j'ai un projet de loi d'intérêt privé au sujet de ce qu'on appelle en anglais episodic illness et qui touche la possibilité, pour les personnes souffrant de ce problème, de recevoir divers types de prestations. J'ai surtout examiné l'assurance-emploi, mais vous avez mentionné d'autres prestations que je vais vouloir étudier.
    Je voudrais d'abord dire que c'est la première fois que j'en entends parler. J'aimerais bien, peut-être, qu'on puisse soit se rencontrer, soit échanger des documents, pour que je puisse incorporer l'élément que vous avez apporté au débat, au moins, sinon les catégories de personnes qui seraient touchées par ce projet de loi si jamais il était présenté à la Chambre des communes. C'est une chose à laquelle je tiens beaucoup, évidemment.
    Vous avez aussi parlé d'un projet, monsieur Kirby. Je présume qu'il s'agit d'un projet-pilote. J'aimerais en savoir davantage. En d'autres termes, j'aimerais que vous me teniez au courant de ce que vous faites à ce sujet pour que je puisse, en temps et lieu, l'incorporer dans mon travail et en faire quelque chose de plus sérieux puisqu'il touchera des clientèles plus élargies. Je crois que c'est important.
    Ce que vous avez fait aussi, certainement, c'est essayer d'éliminer encore d'autres tabous dans notre société, et nous vous en sommes très reconnaissants.
    J'aimerais bien vous entendre au sujet de deux éléments. Je sais que le temps passe très vite. Premièrement, vous avez mentionné en passant le fait que le gouvernement du Québec n'est pas partenaire dans ce projet. J'aimerais que vous offriez non pas des recommandations mais des suggestions pour qu'on puisse amener le gouvernement provincial à y participer, avec tout le respect que j'ai à l'endroit des compétences provinciales et fédérales.
    Deuxièmement, j'aimerais vous parler des femmes et des immigrants récents. Vous avez parlé des sans-abri et des personnes qui souffrent d'une maladie mentale. De façon générale, j'aurais aimé que vous nous disiez quelque chose sur la question des femmes et des immigrants récents, et que vous nous disiez comment vous voyez la question culturelle, surtout en ce qui a trait aux immigrants récents, parce que chez certains groupes, cette question est très forte et la réaction est de complètement cacher la personne qui souffre d'une maladie mentale.
    Je vais me taire parce que je voudrais entendre votre réponse.

[Traduction]

    C'est vrai, merci de ces questions.
    Avant de céder la parole à mes collègues, permettez-moi de réagir à votre première remarque. J'ignorais l'existence de votre projet de loi d'initiative parlementaire. Par la suite, veillons à rester en contact, car cela est vraiment essentiel.
    Cependant, ce que j'ai dit au sujet du projet pilote est que j'espère avoir des discussions dans un proche avenir avec RHDCC au sujet de l'exécution d'un projet pilote portant très exactement sur ce dont vous avez parlé. Il serait donc utile que nous nous tenions tous les deux au courant.
    Pour ce qui est de la question concernant l'aspect multiculturel, je vais faire appel à Howard, puis à Jane.

  (1210)  

[Français]

    Merci de la question. Au sujet de nos relations avec le gouvernement du Québec et le ministère de la Santé et des Services sociaux, comme M. Kirby l'a mentionné au départ, nous entretenons une relation bilatérale avec le gouvernement afin d'échanger de l'information pour nous tenir au courant des initiatives, de part et d'autre, dans le domaine de la santé mentale. C'est une première chose.
    Deuxièmement, comme on l'a expliqué, un des sites des projets-pilotes en ce qui concerne l'itinérance et la maladie mentale est à Montréal, et nous travaillons étroitement avec les intervenants dans ce secteur. D'une certaine façon, nous essayons de développer à la fois nos rapports avec les représentants du gouvernement du Québec, dans la mesure du possible, et nos relations avec les intervenants du secteur, afin de mieux comprendre la situation au Québec et de permettre un échange d'information partout au pays sur ce qui se passe au Canada anglais, de fournir cette information aux intervenants au Québec et vice versa.
    Nous espérons, dans la mesure où nous ferons face à des questions semblables partout au pays, que cette démarche axée sur l'échange d'information va nous permettre de développer nos rapports avec le gouvernement, mais en même temps, d'établir une certaine présence de la commission au Québec, pour que les gens puissent en tirer profit.
    Qu'en est-il des communautés culturelles?
    Pour l'instant, nous n'avons pas de projet précis concernant les communautés culturelles. Cependant, dans notre document, nous proposons un cadre pour régler ce genre de problèmes et fournir un environnement sécuritaire aux gens afin qu'ils puissent aborder leurs problèmes de santé mentale, tout en reconnaissant qu'il y a d'énormes différences entre les communautés.
    Avant de céder la parole à Mme Barker, j'aimerais faire une suggestion. Je suis très impliquée dans ce milieu, et si je pouvais vous aider, il me ferait énormément plaisir de le faire.
    Madame Barker, voulez-vous ajouter quelque chose?

[Traduction]

    Merci de l'occasion d'intervenir dans cette discussion.
    Nous avons, par le biais de nos comités consultatifs, deux projets axés tout particulièrement sur les besoins des communautés multiculturelles. L'un des projets a pour objet d'évaluer les obstacles en matière d'accès aux services de santé mentale pour les personnes nouvellement arrivées au Canada. L'autre projet a pour objet d'examiner et d'élaborer en vérité des outils pour les praticiens en santé mentale afin que ceux-ci puissent utiliser diverses langues, ce dans le contexte d'approches appropriées et très adaptées à la culture.
    L'expérience dans les différentes cultures peut beaucoup varier, autant dans la façon dont la maladie mentale est vécue que dans la façon dont elle est interprétée, culturellement. Il n'existe même pas en chinois d'équivalent de l'expression « maladie mentale ». C'est ainsi qu'il existe d'énormes différences. Il s'agit là d'un défi, au fur et à mesure que le Canada accueille des nombres croissants de personnes d'origines ethniques différentes. Nous n'avons en réalité pas adapté le système de santé mentale afin qu'il puisse offrir des service appropriés à tous ces groupes. Nous nous efforçons, grâce à ces deux projets, de mettre au point des outils et de mieux comprendre les barrières qui existent .
    Madame Barker, je répète mon offre.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Lobb.
    Vous disposez de cinq minutes, monsieur.
    Et merci beaucoup d'être des nôtres aujourd'hui. Je suis heureux d'avoir entendu ce que vous prônez.
    Un élément déconcertant pour moi dans le parcours que nous avons vécu tout au long de notre étude sur la pauvreté est que nous avons accueilli divers groupes — nous en avons en fait rencontré encore d'autres tout juste l'autre jour — qui nous ont décrit des stratégies de réduction de la pauvreté. Ce qui me dépasse réellement est que dans la quasi-totalité des cas, il n'a été aucunement fait mention dans leurs exposés de santé mentale ou de toxicomanie. Il a beaucoup été question d'assurance-chômage, de suppléments du revenu garantis et de prestations fiscales pour enfants, mais dans le document que nous avons ici, il n'y est pas une seule fois fait mention de santé mentale ou d'accoutumance. Je pense qu'il est vraiment dommage que des groupes militent en faveur de la réduction de la pauvreté et du sans-abrisme sans faire état de ces autres choses. Je serais curieux de savoir pourquoi ces groupes n'en font pas mention.

  (1215)  

    Je ne peux pas parler pour leur compte, mais je peux vous livrer mes supputations, et elles sont sans doute assez justes. Le stigmate qui est rattaché à la santé mentale et à l'abus de substances est tellement important que la plupart de ces groupes ne veulent même pas nécessairement offrir des services à ces personnes. En d'autres termes, il y a un sentiment voulant que, si vous souffrez d'une maladie mentale et d'un problème de toxicomanie, vous êtes un petit peu « là-bas », et ces groupes veulent s'occuper de la population générale de Canadiens pauvres ou à faible revenu.
    J'ignore si ce que nous proposons est la réponse, mais ce que je peux vous dire est que c'est cela qui arrive lorsque le système est structuré comme il l'est.
    En fait, cela arrive même lorsqu'on trace un trait entre l'abus de substances et la santé mentale. Si vous souffrez des deux problèmes, ce qui n'est pas rare, et que la première personne à laquelle vous demandez de l'aide est un travailleur en santé mentale, il est courant que l'on vous dise « Allez faire soigner votre problème d'abus de substances et revenez ensuite me voir », ou alors il se passe la chose inverse si votre premier arrêt concerne votre toxicomanie. La réalité est que les deux problèmes sont si imbriqués l'un dans l'autre que vous ne pouvez pas les séparer.
    Je devine donc que le vrai problème est que les gens essaient de faire semblant que la chose n'est pas sortie de l'ombre pour eux.
    Merci de ces observations. Il est assez clair pour moi et pour d'autres que l'on peut bien augmenter le financement visant ces personnes, mais que si l'on ne s'attaque pas à l'autre problème, il va de toute manière se manifester et finira par s'emballer.
    Je sais que nous allons manquer de temps, mais je suis vraiment enthousiasmé par vos projets de démonstration et votre programme « priorité au logement ». Nous allons faire du travail d'extension dans différentes villes par suite de notre étude sur la pauvreté, et il serait formidable que vous vous entreteniez avec les gens dans peut-être pas toutes, mais au moins certaines, des villes pour entendre ce qu'ils font à la base.
    Il vous suffirait de communiquer avec Jayne.
    Je reviendrai à ce que j'ai dit au début. Il nous faut obtenir l'adhésion de tout le monde, et nous serions ravis de pouvoir offrir toute l'aide que le nous pouvons à l'un quelconque d'entre vous, collectivement en tant que comité, ou individuellement.
    Merci.
    Si vous deviez faire une synthèse, de votre point de vue, quel est l'élément le plus important, en matière de santé mentale, que le comité doit veiller à ne pas omettre dans son rapport?
    L'aspect le plus important en ce qui concerne l'intervention auprès de personnes atteintes de maladie mentale, bien franchement, est la multiplication des logements supervisés mis à leur disposition. Si vous regardez le rapport du comité sénatorial, vous verrez que nous y recommandons une augmentation très sensible, sur 10 ans, du nombre d'unités de logement avec services de soutien. Ce serait là la première priorité.
    La deuxième priorité, comme je l'ai dit en réponse à la question de M. Savage, serait le remaniement de l'ensemble des programmes fédéraux destinés à aider les gens, afin qu'ils soient conçus expressément ou explicitement en vue de tenir compte des différences entre une maladie mentale et une maladie physique, et pas un simple bricolage des différents programmes, mais l'élaboration d'un programme unique, de manière à éviter les chevauchements perpétuels et la nécessité pour les gens de sans cesse traiter avec des personnes différentes.
    Voilà, spontanément, les deux choses que je considère comme étant les plus importantes.
    L'autre chose à laquelle nous devrions réfléchir est la question de savoir s'il vous faudrait offrir aux employeurs un incitatif d'un genre ou d'un autre. Nous avions fait cela dans le temps — je fais le tour de la table, et j'imagine qu'aucun de vous n'était ici —, lorsque je suis arrivé à Ottawa. Dans les années 1970, nous avions lancé un ou deux projets pilotes dans le but d'encourager les employeurs à offrir des emplois aux personnes ayant une incapacité physique. Voyez où nous en sommes aujourd'hui: accès aux immeubles publics avec rampes, toilettes adaptées — nous avons fait beaucoup de chemin dans ce pays au cours des 25 dernières années à l'égard des déficiences physiques. Cela a en grande partie vu le jour grâce aux initiatives consenties au départ par le gouvernement fédéral aux employeurs, les autorités fédérales décidant par la suite de modifier l'accès aux édifices publics, et ainsi de suite. Il nous faut faire la même chose en ce qui concerne les maladies mentales.
    Le fait est que plus de 80 p. 100 des personnes atteintes de maladie mentale sont employables. Il vous faudra peut-être prévoir certaines adaptations. Si vous avez quelqu'un qui vit un épisode de dépression et qui est absent du travail pendant deux ou trois jours, la chose est gérable; il vous faudra procéder à certains aménagements en milieu de travail. Mais vous feriez beaucoup pour nous faire avancer plus loin encore sur la voie que nous avons choisie en matière de maladies physiques et de déficiences physiques en recommandant des projets pilotes traitant de ce genre de questions, afin que nous puissions commencer à déterminer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, ce qui est exactement ce que nous avons fait dans le cas des incapacités physiques.
    Merci, Ben.
    Merci, monsieur le sénateur.
    Nous allons maintenant passer au Bloc.
    Madame Beaudin, vous disposez de cinq minutes.

  (1220)  

[Français]

    Merci beaucoup.
    Merci à vous d'être ici aujourd'hui.
    On reçoit tellement d'information en même temps. D'abord, je suis contente de vous entendre dire que le logement devrait être une priorité. Il existe actuellement plusieurs programmes fédéraux sur le logement qui touchent, entre autres, l'itinérance. Vous avez même dit que le logement est une chose, particulièrement lorsqu'on touche à l'itinérance et aux gens qui souffrent de maladie mentale, mais que tout le soutien qui vient avec le logement est également essentiel.
    Dans ma communauté, plusieurs organismes travaillent auprès des itinérants. On peut bien avoir le plus beau programme fédéral de logement, si les travailleurs de rue, les psychologues, les personnes ressources qui soutiennent ces gens n'étaient pas là, ce programme ne serait pas un succès. On ne récupérerait pas les itinérants qui, souvent, ne sont pas prêts, du jour au lendemain, à aller vivre en appartement. Je trouve que c'est important.
    Dans votre document, j'ai été impressionnée de voir que 70 p. 100 des adultes développent une maladie mentale avant ou à l'âge de 18 ans. Vous faites donc une priorité des enfants et des adolescents. Bravo! C'est une question de prévention et j'aimerais que vous m'en parliez davantage. En termes de prévention, comment pourriez-vous rejoindre les enfants et les adolescents?

[Traduction]

    Je conviens avec vous que le simple fait d'offrir un logement aux gens n'est souvent pas la réponse. Ces personnes ne peuvent pas entretenir leur logement, le propriétaire devient frustré, et il s'ensuit un cercle vicieux. Prévoir des services de soutien adéquats est précisément ce qui est nécessaire.
    Mike a mentionné que l'une des choses que vous voudrez peut-être inclure dans votre rapport est la nécessité de prévoir davantage de logements supervisés. Nous ne demandons pas simplement des logements ordinaires, mais des logements assortis de services de soutien, car c'est vraiment cela qui aide les gens à se stabiliser. C'est la combinaison de ces deux choses. Les services de soutien seuls n'assurent pas la sécurité et la stabilité dont les gens ont besoin. Ce qu'il leur faut, c'est la combinaison des deux choses.

[Français]

    En ce qui concerne la prévention et la promotion de la santé mentale, un de nos objectifs, dans le cadre du développement d'une stratégie, est de promouvoir la santé mentale auprès de toute la population. Nous reconnaissons que les mesures qui font la promotion d'une bonne santé mentale auprès de l'ensemble de la population peuvent aussi contribuer à la prévention de la maladie mentale. Malheureusement, nous ne savons pas exactement comment la prévenir, mais les données probantes indiquent que des interventions ciblées dans des domaines précis, que ce soit à l'école ou ailleurs, sont la meilleure voie à suivre pour développer des programmes de prévention. Nous espérons pouvoir intégrer la prévention et la promotion à tout ce qui se fait dans le secteur, afin que ces activités ne soient pas des activités à part.
    Je sais que vous avez examiné la situation des aînés, des jeunes, des Inuits, des Métis et des premières nations. Y a-t-il un segment de la population qui est plus touché par la maladie mentale qu'un autre?

[Traduction]

    Étant donné votre commentaire, je vais demander à Mike Pietrus de vous entretenir du programme anti-stigmatisation. Idéalement, je suppose, si vous me disiez qu'il ne nous était possible d'investir de l'argent que dans un seul segment de la population, je choisirais les enfants, et ce pour deux raisons. Premièrement, vous empêcheriez le problème qui survient lorsque les personnes sont plus âgées; vous le stopperiez très tôt et, deuxièmement — et le chiffre que je vais vous donner est époustouflant —, seul un enfant canadien sur six qui a besoin d'aide professionnelle, soit seulement 17 p. 100 d'entre eux, l'obtient. Il n'y a aucun autre volet du système de soins de santé dans lequel 84 p. 100 des personnes ne seraient pas servies sans qu'il y ait tout un tollé. Un partie du problème...et cela rejoint le facteur de stigmatisation dont j'aimerais que Mike Pietrus vous entretienne. Ceci va vous renverser: 40 p. 100 des parents canadiens, soit deux couples de parents sur cinq, ne le diraient à personne si leur enfant souffrait d'une maladie mentale. Ils en seraient trop gênés. Ainsi donc, 40 p. 100 des enfants ne vont pas obtenir de l'aide du fait que leurs parents n'en recherchent pas. Puis il y en a 40 p. 100 d'autres qui ne sont pas servis du fait que nous ne disposions d'aucun moyen de les servir.
    Aimeriez-vous intervenir?

  (1225)  

    Rejoindre les enfants est si important, car ils ne savent pas grand-chose de la maladie mentale, et il y a également la stigmatisation entourant la maladie mentale et les appels au secours. Comme l'a dit Mike, une intervention précoce est très importante et peut faire toute la différence dans la vie de la personne plus tard.
    L'une des choses que nous examinons dans le cadre de l'initiative anti-stigmatisation est l'identification de programmes à l'échelle du pays qui fonctionnent bien, surtout ceux visant les enfants et les jeunes, qu'ils soient de nature éducative, qu'ils soient déjà en place au sein du système scolaire, qu'il s'agisse de programmes s'inscrivant dans les arts, qu'ils soient offerts sur Internet, par exemple — nous sommes à la recherche de moyens différents d'aborder les jeunes gens afin qu'ils puissent en apprendre davantage au sujet de la maladie mentale et apprivoiser la chose. Mais il s'agit également d'engager les personnes qui ont une influence auprès des jeunes gens: les éducateurs, les conseillers en orientation, et, surtout, les parents. Encore une fois, donc, il s'agit d'essayer d'obtenir l'engagement de toutes ces personnes. Voilà ce que nous faisons.
    Lorsque nous releverons des programmes qui réussissent, nous allons les évaluer, voir comment nous pourrions faire pour les améliorer, au besoin, puis commencer à tenter de les reproduire à l'échelle du pays, de telle sorte que les collectivités ne démarrent pas à la case départ, pour éviter, pour commencer, d'avoir à réinventer la roue. À la phase deux, ce que nous espérons pouvoir faire c'est construire autour de ces programmes qui requièrent peut-être davantage de travail, de financement. Puis, en bout de ligne, à la phase trois, nous examinerions ces choses auxquelles les gens n'auraient pas pensé au préalable, aux idées qui n'ont pas pu être explorées, pour ensuite retenir certains de ces programmes et les faire progresser.
    Encore une fois, toute l'idée derrière cela n'est pas de réinventer la roue, mais d'offrir aux gens les trousses d'outils et les programmes qu'ils pourront utiliser afin de ne pas avoir à commencer à la case départ.
    Je regrette, mais votre temps est écoulé.
    Merci beaucoup, Mike.
    Nous allons maintenant passer à M. Vellacott, pour cinq minutes, je vous prie.
    Je suis très heureux que les membres de ce panel soient des nôtres ici aujourd'hui. Il s'agit d'une question dont je sais qu'elle nous habite tous. Certains d'entre nous autour de la table, moi-même compris, connaissons la chose de plus près, l'ayant côtoyée au sein de notre famille, ou autre, alors nous comprenons le tableau plus général, avec les groupes de soutien et ainsi de suite, et ce de manière très directe, aussi.
    Une chose que j'allais suggérer, et c'est peut-être davantage un commentaire, et vous pourrez y réagir... J'aurais quatre questions distinctes à poser relativement au refus, à la stigmatisation, à toute la gamme de réactions; la paranoïa entourant les questions relatives à la maladie mentale et la raison pour laquelle certains des sans-abri souffrent de ce problème; et il y a également la question de l'emploi et de la source de stress que ce peut être, et je pense que c'est ce que vous avez laissé entendre; et, enfin, du fait de la déclaration que vous avez faite au sujet des soins familiaux, qui, je pense, sont en tout temps un élément clé, la nature des personnes qui entourent les malades et en qui ceux-ci font confiance. Ma question concerne ce que nous pourrions faire pour changer le régime fiscal. Voilà à quoi je veux en venir avec mes quatre questions.
    En ce qui concerne la question du déni et de la stigmatisation, je sais qu'il y a l'aspect stigmatisation, et je suis très sensible à cet élément-là du problème, mais il y a également l'aspect déni de la réalité. Je ne connais pas trop le détail de cette étude et du reste du travail que vous avez fait, mais, dans ce domaine, comme vous le savez sans doute très bien, plus le QI de la personne est élevé, plus grand est le déni. Peut-être que c'est la stigmatisation, mais c'est également tout autant le fait que la personne... Par exemple, qui autour de cette table aimerait dire, il y a cette partie de ma vie qui ne fonctionne peut-être pas comme elle le devrait? Il y a donc cet aspect. Vous auriez peut-être quelques rapides commentaires à faire là-dessus.
    Par ailleurs, j'ignore comment l'on s'y prendrait pour changer les choses, car tant que la personne n'en est pas arrivée au point d'accepter qu'elle souffre du problème, qu'il y a moyen d'y faire quelque chose, qu'il ne s'agit pas d'un terrible secret à cacher de la société, ou autre... j'imagine que c'est là qu'intervient la société, pour faire la différence. Mais je ne sais pas comment l'on pourrait faire pour changer cela. Et, croyez-moi, j'en sais quelque chose du problème. Si une personne refuse d'accepter la réalité, il est difficile pour elle d'obtenir l'aide requise.
    Bien sûr, et la seule façon dont vous pourrez réellement vous attaquer au problème c'est de manière indirecte, en réduisant la stigmatisation à un point tel que les gens ne se croient plus obligés de cacher la réalité.
    Le problème aujourd'hui est que les gens ont très peur. Si une personne souffre d'un problème mental et a tellement peur que ses amis, les membres de sa famille, lui diront, reprends-toi, tu n'as aucun problème, etc., alors elle aura peur d'en parler même avec ses plus proches amis. Vous ne pouvez donc pas vous attaquer directement au problème; il vous faut modifier l'environnement, de telle sorte que la personne se sente à l'aise pour en parler.
    Oui. En d'autres termes, c'est comme lorsqu'une personne souffre de colite ou de diverticulose de l'intestin ou de quelque autre problème, qui s'inscrit dans toute une gamme de choses. Nous avons, chacun, nos différents...
    En passant, juste pour vous donner un exemple, il y a 30 ans, le cancer du sein était traité de la même façon que l'est la santé mentale aujourd'hui. Il y a 30 ans, une femme atteinte de cancer du sein ne le disait à personne. En fait, il n'en était même pas question dans les journaux, car ceux-ci n'avaient pas le droit d'utiliser le mot « sein ». C'est plutôt intéressant, mais il nous faut changer les choses.

  (1230)  

    Oui, exactement.
    Permettez-moi de passer maintenant à ma troisième préoccupation. Je reviendrai sur ces autres questions si j'ai du temps à la fin.
    Je veux parler de la question de l'emploi, dont je sais que vous soulignez l'importance dans le contexte de la santé mentale, du rétablissement de la stabilité, etc. Je pense que vous avez évoqué ce fait-là également, et vous y êtes sans nul doute très sensible, mais pour certaines personnes, l'emploi — et il s'agit peut-être de quelque chose de cyclique, d'épisodique, comme vous l'avez dit, la roue tourne — est un stress en soi et requiert parfois un cadre de vie tout à fait différent, plus pastoral, plus calme, en plein air, ou autre. Oui, nous pouvons restructurer les situations d'emploi et ainsi de suite, mais peut-être qu'il importe simplement qu'il y ait quelque garantie de soutien, sans que ce soit, comme vous dites...
    Tout à fait. Écoutez, un emploi « normal » ne va pas, cela est clair, être la solution pour certaines personnes. D'un autre côté, en ce moment, ce qui se passe lorsque vous souffrez d'une maladie mentale, de dépression ou autre, est que les employeurs sont tout simplement portés à ne pas vous recruter, en dépit du fait que vous feriez, 90 p. 100 du temps, du très bon travail. J'aimerais donc voir instaurer des incitatifs qui permettent de surmonter cela. Il y aura bien évidemment certaines personnes pour lesquelles cela ne fonctionnera pas et pour lesquelles il faudrait tout un réseau de soutien, absolument.
    Je vais passer très rapidement à ma dernière question.
    Il y a l'aspect soins familiaux, et, comme vous l'avez souligné à juste titre, il s'agit des personnes auxquelles l'intéressé fait confiance, et même là, il lui faut en arriver au point... certaines relations familiales reposent davantage sur la confiance que d'autres. Mais si vous pouviez recommander quelque changement dans le cadre du régime fiscal afin de venir en aide à ces autres soignants, ces sources de soutien... Est-ce une piste que vous avez explorée?
    Oui, mais nous ne nous sommes pas penchés sur des chiffres précis. Lorsque le comité sénatorial s'est penché sur cette question, nous en étions arrivés à la conclusion qu'il fallait trouver un moyen — sous forme de déduction fiscale ou d'une autre mesure de réduction de l'impôt — de reconnaître, franchement, que les gouvernements obtiennent quantité de services gratuits, car en l'absence de cet encadrement assuré par les parents de ces personnes, celles-ci seraient nombreuses à devoir vivre en établissement, ce qui coûterait beaucoup d'argent aux pouvoirs publics fédéraux et provinciaux.
    Il faudrait que ce fait soit reconnu dans une certaine mesure et il y aurait tout particulièrement lieu de prévoir un service de relève. Je vais vous donner un exemple, car je me suis entretenu tôt ce matin au téléphone avec quelqu'un. Une dame de 84 ans, qui s'occupe de son conjoint âgé de 87 ans qui souffre de maladie mentale, a désespérément besoin d'un répit, sans quoi elle va craquer. Or, non seulement ces services n'existent pas, mais elle n'aurait même pas les moyens de se les procurer, car ils ne sont pas couverts par l'assurance-maladie.
    Cet exemple, je tiens à le préciser, n'est pas unique. Il en existe bien d'autres encore. Le même principe s'applique dans le cas des couples qui ont des enfants atteints de maladie mentale, lorsque la mère quitte son travail afin de pouvoir rester à la maison pour s'occuper de l'enfant. Le revenu familial diminue sensiblement, or, le régime fiscal n'en tient pas compte, en dépit des économies considérables que cela suppose pour le système de soins de santé.
    Merci beaucoup, et merci à vous, monsieur Vellacott.
    Nous passons maintenant à M. Pacetti.
    Bienvenue, monsieur. Vous disposez de cinq minutes, même si vous avez dit qu'il ne vous en faudra qu'une ou deux.
    Merci, monsieur le président.
    J'ose espérer que cela ne prendra que deux minutes. Il s'agit d'un sujet fort intéressant. J'ai l'habitude de siéger au Comité des finances, et ma participation ici fait changement. Je pense que nous abordons ici un sujet dont nous ne traitons normalement que très brièvement au Comité des finances. Des groupes comparaissent devant le comité pour demander de l'argent, mais nous ne sommes pas trop certains d'avoir une compréhension approfondie des problèmes.
    Ma question vous a déjà été posée, mais, je suppose, depuis une perspective différente. En ce qui concerne les services, ceux-ci parviennent-ils en bout de ligne aux personnes qui en ont réellement besoin? Comparaissent devant le Comité des finances de nombreux groupes représentant différentes choses et offrant différents services. Je ne suis pas si certain qu'ils assurent des services — car le prestateur de services ultime en matière de soins de santé n'est-il pas le palier provincial? Ces groupes sont-ils simplement là pour la forme? Il semble qu'ils demandent des programmes, mais y intervient quantité de travail administratif. Y a-t-il de l'argent qui est bloqué quelque part et qui n'est pas mis au service du bénéficiaire ultime?
    Oui, et j'aurais deux commentaires à faire.
    Le système est-il inefficient? Son inefficience est colossale. Il est inefficient du fait qu'il y ait un si grand nombre de prestateurs de services en activité dans n'importe quelle municipalité et que la même gamme de services soit assurée par un nombre important de prestateurs de services.
    Suis-je d'avis que le système puisse être remanié de manière à être beaucoup plus efficient et à ce qu'avec un dégraissement administratif davantage d'argent retombe aux niveaux inférieurs? Absolument. C'est ce que fera la stratégie pour la santé mentale.
    Permettez que je sois clair. Dans le cas de la personne moyenne souffrant d'une maladie mentale, moins du tiers des deniers publics dépensés sur elle le sont par des services de soins de santé. Le reste est dépensé par des services de logement, de formation, d'intervention sociale, etc. Si une personne fait un infarctus, tout l'argent est dépensé par le service de soins de santé. Il y a non seulement fragmentation au niveau prestation de services, il y a également fragmentation au palier provincial et au palier fédéral.
    Il n'y a au niveau fédéral aucun ministre responsable des personnes souffrant de maladie mentale. Les fonds dépensés par le palier fédéral proviennent de quantité de poches. Il en est de même au palier provincial, et il en est de même sur le terrain. Vous avez absolument raison. Il y a un énorme élément de chevauchement.

  (1235)  

    Pardonnez-moi de vous interrompre, mais c'est simplement que nous ne disposons pas de beaucoup de temps.
    Nous avons des bureaux de circonscription, et un grand nombre des personnes qui viennent nous voir vivent des temps difficiles — et certaines d'entre elles vivent des temps difficiles en permanence. Tout dépend de ce pour quoi elles s'y présentent. Nous nous efforçons de les diriger sur la bonne voie, mais ce ne sera en fait pas forcément vers des établissements de soins de santé traditionnels. Les députés québécois — nous avons les CLSC — les renvoient à un CLSC, et parfois il y a un suivi, mais il semble qu'il n'y ait tout simplement pas suffisamment de ressources. Parfois, l'intervention est une réussite, mais il ne semble pas que ce soit toujours le cas. Je ne sais même pas quel est le taux de réussite.
    L'autre partie de la question concerne le financement. Je pense que vous en avez parlé dans le contexte de programmes adéquats du point de vue du gouvernement. Ce que j'ai constaté est que des entreprises ont pris en charge un certain nombre de choses. Le Comité des finances s'est rendu l'an dernier à Victoria, et il semblait qu'il y avait en place une initiative conjointe entre la chambre de commerce de Victoria et les sans-abri. Lorsque nous sommes allés à Halifax, nous avons constaté que, là-bas, c'était toujours les travailleurs sociaux versus la chambre de commerce. Il n'y avait pas ce lien entre les deux. J'aimerais connaître votre point de vue. Est-ce qu'il se fait du travail coopératif? La santé mentale est une préoccupation dans les lieux de travail. Et, soyons francs, bien des fois, l'employeur, au lieu de traiter du problème, essaiera de trouver le moyen de se débarrasser de la personne, afin de ne pas avoir à s'en préoccuper.
    Cela arrive, certes. La réalité est qu'il y a une prise de conscience croissante, chez les gros employeurs du pays, à tout le moins, qu'il leur faut réellement commencer à s'occuper du problème. Nous avons un comité consultatif sur la main-d'oeuvre qui oeuvre à l'heure actuelle aux côtés d'un certain nombre d'entreprises à des projets pilotes visant à déterminer — et je vais utiliser le terme que nous employons dans le cas des personnes handicapées — quels les aménagements en milieu de travail seraient requis pour qu'elles puissent employer des personnes atteintes de maladie mentale.
    Nous faisons des progrès en la matière, et cela sera financièrement très avantageux pour les entreprises. Lorsqu'une personne part en congé d'invalidité de courte durée, l'employeur continue de verser son salaire pendant cette période. Si donc vous n'avez pas à renvoyer la personne chez elle, ou si elle n'est absente du travail que pour une période beaucoup plus courte, l'argent que vous auriez, autrement, dépensé, va maintenant être versé directement dans votre marge bénéficiaire.
    Il y a donc là un énorme incitatif financier. Les employeurs plus progressistes au pays commencent à s'en rendre compte. Je vais demander à Jane de vous entretenir plus particulièrement là-dessus.
    Nous espérons marquer en la matière de très réels progrès. Je vous dirais, chose intéressante, que les gouvernements et les agences gouvernementales sont loin d'être les meilleurs intervenants face à cette question.
    J'allais revenir sur le commentaire que vous avez fait quant à la question de savoir si la responsabilité à l'égard des sans-abri revient aux collectivités. Vous avez cité l'exemple de Victoria, où le milieu des affaires estime avoir une certaine responsabilité à l'égard des sans-abri ou du sort des sans-abri.
    Il existe au Canada plusieurs localités, et la ville de Calgary est un très bon exemple, où les personnalités du monde des affaires et d'autres se sont mobilisés. Sur la base de mon expérience et de ce que j'ai pu constater, je pense que tant que chaque Canadien n'aura pas assumé une certaine part de responsabilité à l'égard des sans-abri et n'aura pas reconnu avoir un rôle à jouer pour changer les choses, il n'y aura pas le genre de changement durable et d'engagement envers le changement qu'il nous faut.
    Le milieu des affaires est un très important intervenant en vue du maintien à long terme de changements.
    Merci, monsieur Pacetti. Nous sommes heureux de vous compter parmi nous ici aujourd'hui.
    Nous allons maintenant passer à M. Cannan, qui dispose de cinq minutes. Nous terminerons bientôt. Nous avons eu de très bonnes discussions. Ce n'est pas comme si nous pouvions vous avoir tous les jours.
    Je vais autoriser Glenn à poser une question, ainsi que Candice, pour boucler la boucle.
    Vous disposez de cinq minutes, monsieur Cannan, après quoi nous passerons aux autres, pour une petite minute.
    Merci, monsieur le président. Merci aux témoins.
    Merci, monsieur Kirby, pour votre travail exceptionnel. Travaillant étroitement avec l'Association canadienne pour la santé mentale dans ma circonscription, ce que Glenn a évoqué, et avec le travail formidable en cours partout au pays et dans le milieu des affaires... le modèle inspiré de la stratégie de Calgary, qu'est en train d'adopter notre propre collectivité. Il faut la participation de tous les paliers de gouvernement, de la collectivité, des contribuables — et le milieu des affaires en est un gros élément — pour qu'un plan réussisse.
    J'aimerais parler d'un aspect du progrès et du changement. J'ai un certain vécu personnel: ma fille aînée va avoir 24 ans cette année, et elle a souffert d'un trouble de la personnalité limite et a fait une dépression nerveuse au bout de deux années d'université. J'ai donc eu l'occasion de travailler avec des professionnels. Il y en a beaucoup dans la communauté, et j'apprécie leur dévouement.
    Ma question pour vous est la suivante. En ce qui concerne votre commission, quelle est, selon vous, la définition de « maladie mentale », et quel pourcentage de Canadiens en sont touchés?

  (1240)  

    Voulez-vous répondre?
    Eh bien, il n'existe pas de définition universelle, mais les différentes définitions de la santé mentale englobent en règle générale l'idée que la personne peut entretenir de bonnes relations avec d'autres, peut contribuer à la société en conservant un emploi. La façon dont une personne réfléchit et se sent doit lui permettre de fonctionner pleinement et de s'engager dans la vie de tous les jours.
    Lorsque vous commencer à parler de maladie mentale, vous vous intéressez en fait à l'incidence qu'a votre maladie sur votre façon de penser, de réagir et de vous comporter, et sur ce que vous ressentez. Les symptômes sont manifestés, comme je le dis, dans la façon dont vous pensez, dont vous vous sentez ou dont vous vous comportez.
    Pour ajouter quelque chose à cela, la définition officielle de la santé mentale, au moins aux fins de notre travail, que nous avons utilisée dans le contexte de l'élaboration de la stratégie en santé mentale provient de l'Organisation mondiale de la santé, qui dit que la santé mentale est:
... un état de bien-être dans lequel la personne peut se réaliser, surmonter les tensions normales de la vie, accomplir un travail productif et fructueux et contribuer à la vie de sa communauté.
Voilà une définition de la santé mentale.
    Ce que nous avons essayé de faire, c'est établir une distinction entre santé mentale et maladie mentale, et reconnaître que les personnes vivant avec des symptômes de maladie mentale peuvent également jouir d'un degré élevé de santé mentale, en ce sens qu'elles peuvent avoir une vision positive de la vie et la résilience requise pour composer avec les symptômes de leur maladie.
    Lorsque nous parlons donc de santé mentale et de maladie mentale, il s'agit en définitive de deux choses différentes. Le fait d'avoir une santé mentale positive peut contribuer beaucoup, indépendamment du fait de présenter des symptômes de maladie mentale. Nous aimerions favoriser le degré le plus élevé de santé mentale positive pour l'ensemble des Canadiens, tout en nous efforçant de trouver des moyens d'encourager les gens et de leur permettre de composer avec les symptômes de la maladie mentale lorsqu'ils les vivent.
    Je pense qu'il s'agit là d'un fait et d'un excellent message qu'il nous faut communiquer aux Canadiens. Vous avez évoqué le fait que nous en sommes, avec la santé mentale, au point où nous en étions avec le cancer du sein il y a de cela 30 ans. C'est là une excellente analogie. Je crois que les personnes atteintes de maladie mentale méritent les services et le soutien et un accès à ces derniers.
    Le gouvernement fédéral s'efforce d'assurer les fonds requis aux provinces et aux territoires. J'ai passé neuf ans à travailler en administration locale, oeuvrant à ce niveau et assoyant les fonds, mais le défi que nous avons, vu les différents champs de compétence, est de veiller à ce que les provinces dépensent l'argent là où nous le souhaiterions. Comme vous l'avez dit, les logements supervisés sont un aspect dont nous ont parlé d'autres témoins qui ont comparu devant le comité, et nous continuerons de livrer ce message aux provinces. Encore une fois, chaque province et territoire est unique.
    J'ai une question de suivi au sujet des services destinés aux personnes dont vous avez parlé. La police dit qu'environ 50 p. 100 des appels à la ligne 911 sont le fait de problèmes de santé mentale. Qu'envisagez-vous en ce qui concerne le réseautage avec notre système judiciaire et les intervenants dans l'application du Code criminel? Le groupe de travail va-t-il faire des recommandations en la matière?
    Absolument. La réalité est que lorsqu'il y a eu désinstitutionnalisation dans ce pays... On a fermé les anciens asiles, comme on les appelait lorsque j'étais petit, les hôpitaux psychiatriques. En théorie, nous allions verser ces personnes à des installations communautaires, sauf que l'on n'a pas construit assez vite ces installations communautaires. Le résultat en est que les rues et les prisons sont en définitive devenues les asiles du XXIe siècle, ce qui est, franchement, scandaleux.
    Nous travaillons non seulement avec les services correctionnels canadiens — nous allons en fait offrir avec eux dans deux mois environ une conférence portant précisément sur cette question —, mais, je pense, avec l'ensemble des personnes intéressées au sein du système judiciaire, à commencer par la magistrature et les avocats, en reconnaissance du fait qu'il nous faut faire deux choses. Il nous faut commencer à offrir des services de santé mentale aux personnes qui sont incarcérées, ce que nous ne faisons pas à l'heure actuelle. Ces personnes sont de ce fait moins bien portantes lorsqu'elles sortent de prison que lorsqu'elles y sont entrées. Plus important encore, il nous faut commencer à nous concentrer sur la question plus large de savoir comment empêcher que ces personnes se retrouvent en prison au départ. Créer des tribunaux pour les situations de santé mentale est une façon de faire, mais nous croyons qu'il en existe peut-être d'autres.
    Notre comité consultatif sur la santé mentale et le droit est présidé par un juge de l'Ontario, Ted Ormston, qui a créé en Ontario la toute première cour de santé mentale du monde occidental. Il a des idées très originales, dont nous sommes en train de discuter avec les provinces et les responsables des prisons et du système pénitentiaire.

  (1245)  

    Merci, Ron.
    Il ne nous reste presque plus de temps, mais je vais autoriser une question à Glenn, puis ce sera au tour de Candice; étant donné votre gracieuse présence ici, vous aurez droit, vous aussi, à une question.
    Allez-y, Glenn.
    Merci, monsieur le président. Je vous suis reconnaissant de m'autoriser à poser une question, et je tâcherai d'être bref.
    Vous avez mentionné le rapatriement. Je suis certain que nous pourrions discuter pendant une heure et demie du rapatriement et du terme qu'ils utilisent lorsqu'ils ont arraché des personnes, sans planification préalable, aux établissements, pour les mettre dans la communauté. Nombre des questions dont nous discutons aujourd'hui auraient pu être réglées s'il y avait eu un effort suffisant de planification préalable.
    Nous avons beaucoup parlé de l'approche « priorité au logement », et l'une des choses qui sont, je pense, très claires, et que j'aimerais vous entendre expliquer est... C'est formidable lorsque vous pouvez avoir un toit au-dessus de votre tête. C'est là un élément important en vue de la réduction du sans-abrisme et de l'intervention dans les cas de maladie mentale. Mais ce n'est pas parce que la personne a un toit au-dessus de sa tête que vous pouvez vous en laver les mains. Le fait de devenir locataire est assorti de nombreuses responsabilités, et la personne souffrant de maladie mentale doit tout d'un coup se préoccuper d'avoir à payer toutes ses factures. La stratégie « priorité au logement » ne peut pas se limiter au seul fait d'offrir aux gens un toit. Il y a quantité d'autres services de soutien qui doivent être en place. Est-ce exact?
    Absolument.
    L'un des soutiens dans le cadre du programme que nous mettons à l'essai est l'interface avec le locateur. Ainsi, si le propriétaire connaît certaines frustrations ou s'il survient quelque chose, il y a quelqu'un qu'il peut appeler et qui peut aller régler les problèmes.
    Il s'agit également d'apprendre aux personnes qui ont vécu dans la rue, qui n'ont peut-être pas les aptitudes requises pour traiter avec un propriétaire et qui n'ont jamais eu l'occasion de s'y exercer, comment traiter avec un propriétaire. Il s'agit de leur apprendre toutes sortes de choses que vous devez savoir pour maintenir un appartement ou un autre logement. Vous avez tout à fait raison: des soutiens au niveau de l'interaction avec le propriétaire et des soutiens pour traiter des problèmes de santé et de santé mentale sont absolument essentiels.
    Merci, Glenn.
    Candice, merci d'être des nôtres ici aujourd'hui. Vous avez droit à une question.
    Merci beaucoup de me donner l'occasion d'en poser une. Je vais essayer d'être aussi brève que possible, moi aussi.
    Ma question concerne les traitements. Je sais que dans bien des cas, quantité de médicaments auront été prescrits. Bien souvent, cela a contribué au problème ou bien n'en a pas favorisé la résolution. J'aimerais savoir si vous avez regardé du côté des programmes et des communautés confessionnels pour aider les personnes souffrant de troubles mentaux, dans le contexte d'une approche davantage holistique.
    Vous demandez si nous l'avons fait? Nous n'en sommes encore qu'à nos débuts. La réponse est que nous ne l'avons pas fait, mais le ferons. La réponse est oui.
    Permettez-moi de vous dire mon intérêt personnel dans ce dossier. J'avais une soeur qui avait pendant de nombreuses années souffert de dépression grave et a même fait une tentative de suicide. Elle est morte plus tard, du cancer. Elle me disait qu'elle avait le sentiment d'obtenir davantage d'aide de son conseiller spirituel que de son psychiatre. Ce que je vous dis là est purement anecdotique, mais cela vous donne une petite idée de mon parti pris en la matière.
    La réalité est que les Canadiens autochtones ont compris depuis des siècles qu'il vous faut traiter la personne dans son entier, et la personne dans son entier, ce n'est pas juste la tête, ce n'est pas juste le corps physique. C'est la combinaison des deux, et il y a là un élément spirituel. J'emploie le terme spirituel plutôt que confessionnel, qui a une connotation plutôt religieuse. Le spirituel n'est pas forcément religieux, au sens normal du terme.
    Hier, lors d'une rencontre à laquelle Jayne Barker et moi sommes allés avec les IRSC, nous avons discuté de la question de savoir comment obtenir des preuves pour établir empiriquement ce qui semble être constaté, soit que l'élément spirituel du traitement est très important.
    Merci à vous, monsieur Kirby, et à vos collègues, d'avoir été des nôtres ici aujourd'hui.
    Nous allons suspendre nos travaux pendant une ou deux minutes, le temps d'interrompre la télédiffusion. Nous traiterons à la reprise de certains travaux du comité.
    Si vous permettez, j'aimerais vous dire à tous, en guise de conclusion, un grand merci de nous avoir accueillis. Je ne dis pas cela pour vous flatter, mais il est vraiment important que des leaders canadiens comme vous s'intéressent à ce dossier. Si vous êtes d'accord, monsieur le président, nous communiquerons dans les mois à venir avec les membres du comité et, par leur intermédiaire, avec leurs collègues à la Chambre, pour discuter d'événements auxquels vous pourriez participer à nos côtés.
    Si des leaders communautaires comme vous sont prêts à se lever et à prendre position sur la question de la santé mentale, ce sera là un énorme pas en avant pour réduire la stigmatisation. Merci beaucoup, donc, de nous avoir invités. Ravis d'avoir été des vôtres.
    Bien sûr, comme vous le savez, tout ce que vous ferez parvenir à la greffière sera distribué aux membres du comité, en plus de tout renseignement sur d'autres réunions que vous pourrez avoir. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant suspendre la séance pendant quelques minutes.

  (1245)  


  (1250)  

    J'invite les membres du comité à retrouver leurs places.

[Français]

    Monsieur le président, en attendant que les collègues reviennent, on pourrait peut-être ramené cela à la séance publique, car nos personnes ressources ont ramené cela à huis clos.
    Merci.

[Traduction]

    Si je me souviens bien, il me semble que lorsque nous nous sommes quittés à la fin de la dernière réunion, nous étions en train de discuter d'un amendement dont j'avais fait lecture. C'est là mon souvenir. J'ignore quel est le sentiment du comité ou s'il nous serait possible d'en arriver à un consensus.
    Je sais que M. Lessard aimerait avoir au moins une réunion, peut-être deux, et il souhaiterait que cela se fasse non pas à la fin de l'étude sur la pauvreté, mais plus tôt. Je ne sais pas exactement ce qu'il a en tête. Je ne crois pas, encore une fois selon mon souvenir, qu'il avait terminé, ni étayé en la matière toutes ses réflexions.
    Pour que les choses soient bien claires pour tout le monde, l'amendement de M. Komarnicki, et dont nous discutons, demande que la motion soit modifiée en ajoutant, après les mots « étudie » et « le », ce qui suit: « à la conclusion de l'étude sur la pauvreté et pour une réunion, ».
    Voilà donc de quoi nous traitons en ce moment, pour que les choses soient bien claires.
    J'ai une liste d'intervenants. J'ai M. Savage, puis M. Lessard.
    Monsieur Savage, vous avez la parole.
    Monsieur le président, je serais prêt à intervenir après M. Lessard, au cas où il réponde, ce faisant, à ma question. Cela est-il possible?
    Je veux bien.
    Monsieur Lessard, vous avez la parole.

[Français]

    Monsieur le président, souvenons-nous qu'il s'agit d'une motion qui demande que le comité étudie de quelle façon a été géré le Fonds à l'accessibilité. Ce fonds a pour but d'aider les organismes à superviser leurs travaux, particulièrement en ce qui concerne la question des personnes handicapées. L'amendement de M. Komarnicki vise à limiter dans le temps le débat à une séance, et ce après la fin de nos travaux de l'étude sur la pauvreté.
    Monsieur le président, je ne sais pas si M. Komarnicki maintient toujours son amendement, mais je suggère, avec déférence et beaucoup de respect, que nous disposions d'abord de la question principale. Par la suite, nous pourrons décider du temps que nous y consacrerons. Il me semble que cette motion contient deux éléments. On peut difficilement déterminer maintenant le temps que nous y consacrerons. D'autre part, le sujet qui doit être débattu est suffisamment urgent pour ne pas attendre à la fin de nos travaux sur la pauvreté.
    Cela étant dit, une fois que nous aurons disposé de ma motion, si le comité l'approuve, je vais suggérer que notre personnel de soutien nous fasse des suggestions en ce qui concerne l'aménagement du temps de travail, afin de ne pas empiéter sur le temps de l'étude sur la pauvreté. Mon intention n'est pas du tout de retarder l'étude sur la pauvreté. Au contraire, vous savez jusqu'à quel point nous y tenons. Il s'agit de faire en sorte que les deux questions s'harmonisent et non qu'elles se confrontent. Je n'exclus pas que nous n'y consacrions qu'une séance. Toutefois, il ne faut pas s'y limiter. Ce serait nous limiter dès le début et nous enlever un outil qui pourrait nous permettre de faire notre travail comme il le faut. Je pense qu'il ne faut pas faire cela.

  (1255)  

[Traduction]

    Merci, monsieur Lessard.
    Mike, je vous ai ici sur ma liste.
    L'une des choses que je recommanderais est la suivante: nous sommes en train de discuter de l'amendement, alors il nous va falloir en régler le sort, de toute manière, avant de revenir à la motion principale. À titre de compromis, peut-être que nous pourrions — encore une fois, j'imagine que vous allez devoir mettre cela aux voix à un moment donné — essayer d'intégrer cela à une réunion de sous-comité, au cours de laquelle nous pourrions entreprendre cela, sensibles que nous sommes au fait que vous aimeriez que cela se fasse avant la fin de l'étude sur la pauvreté, sans oublier que les ministres vont comparaître devant nous. La semaine prochaine, nous sommes en déplacement, alors il faudra peut-être qu'un sous-comité discute du moment où cela pourrait se faire. Je ne voudrais pas que nous nous emballions, mais ce serait peut-être un bon compromis.
    Monsieur Savage, vous avez la parole. Je n'ai pas d'autre nom ici pour l'instant.
    Merci.
    Je tiens à remercier M. Lessard. Il a répondu à certaines des questions que j'avais.
    Lorsque la chose a, pour la première fois, été soulevée, j'aurais appuyé un amendement disant que nous ferions cela après l'étude sur la pauvreté. Je n'appuierai plus cet amendement. Ceci s'inscrit, à mon sens, dans l'étude sur la pauvreté. La façon dont les personnes handicapées sont touchées est très importante.
    Comme les collègues le savent, j'ai soulevé cette question à la Chambre hier. Il se pose un certain nombre de questions très sérieuses autour de ce programme, qui a été lancé dans un esprit très noble, mais qui semble avoir fait fausse route. Il nous faut nous occuper de cela.
    L'idée de M. Lessard, si je l'ai bien compris, est que nous appuyions cette motion aujourd'hui, pour ensuite demander à la greffière et au personnel de nous revenir avec une recommandation.
    J'estime qu'il nous faut nous entretenir avec les fonctionnaires. Il nous faudra peut-être entendre également d'autres témoins. Pour aujourd'hui, je serais tout à fait en faveur d'adopter cette motion sans délai ni limite de temps, pour qu'on puisse nous revenir avec une recommandation.
    Êtes-vous également en train de proposer que nous ayons une réunion de sous-comité pour essayer de déterminer comment intégrer cela dans notre programme?
    Cela m'irait très bien également.
    J'ai par ailleurs une question au sujet du voyage. Nous ne voyageons pas tous à compter de la semaine du 11 mai, et il serait peut-être possible pour certains membres du comité de se réunir pour s'occuper de cela.
    Le seul problème est que nous n'aurons à ce moment-là pas de personnel de soutien disponible.
    J'ai Massimo.
    Je sais que ce n'est pas mon comité, mais si vous me permettez de vous offrir un conseil, à notre comité, chaque fois que nous fixons des délais, nous ne les respectons jamais, car il arrive toujours quelque chose.
    J'aimerais autant voter en faveur d'une motion comme celle-ci, faire venir les fonctionnaires, et le comité directeur pourra alors se réunir et décider de la marche à suivre et du nombre de réunions que vous voudrez avoir. Les fonctionnaires vous fourniront davantage de renseignements à ce moment-là.
    Je serais en faveur de la motion telle qu'elle est écrite, et je recommanderais que le comité aille de l'avant avec ce qui a été proposé.
    Très bien. Quelqu'un d'autre souhaite-t-il intervenir au sujet de l'amendement proposé?
    Allez-y, Ed.
    Monsieur le président, vu la discussion, je pense qu'il serait approprié que je retire l'amendement et que la motion originale demeure telle quelle, l'idée étant que l'aspect temporel soit réglé en fonction de la disponibilité du personnel et de tout ce qui pourrait se passer d'autre.

  (1300)  

    Y a-t-il consentement unanime pour que l'amendement soit retiré?
    (L'amendement est retiré.)
    Le président: Formidable. Nous revenons donc à la motion principale, telle qu'elle a été lue plus tôt. Quelqu'un souhaite-t-il en discuter plus avant?
    Excusez-moi, aviez-vous un dernier commentaire à faire, monsieur Lessard?

[Français]

    Monsieur le président, je demande la tenue d'un vote par appel nominal sur la motion.

[Traduction]

    Absolument.
    Très bien. Nous allons procéder à un vote par appel nominal.
    (La motion est adoptée par 11 voix contre 0.)
    Le président: Il est 13 heures, alors je vais lever la séance. Nous allons rencontrer les ministres lors de notre réunion mardi prochain.
    La séance est levée.
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