:
Monsieur le président, merci beaucoup.
J'ai beaucoup de choses à dire. C'est pour cela que je vais parler 15 minutes plutôt que 10.
[Français]
Monsieur le président, membres du comité, bonjour.
Il y a presque un an, je me suis présenté ici pour vous parler des plans et priorités de CBC/Radio Canada. En fait, je vous avais alors présenté mes trois priorités, ce nous appelons chez nous mes trois « P »: nos personnes, notre programmation et notre planification stratégique.
Ces priorités n'ont pas changé, mais notre environnement est devenu substantiellement plus compliqué. L'effondrement de la publicité à la télévision au cours des six à huit derniers mois a considérablement amputé les budgets d'exploitation des radiodiffuseurs canadiens, tant privés que publics, et évidemment, CBC/Radio Canada n'a pas été épargnée.
La nécessité pour tous de réduire les coûts afin de refléter cette réalité diminue la capacité des radiodiffuseurs de continuer à offrir les niveaux de service auxquels les Canadiens en sont venus à s'attendre. Cela est particulièrement vrai pour la radiodiffusion locale.
Cet après-midi, je n'ai pas l'intention de faire de chantage.
[Traduction]
Je ne suis pas ici cet après-midi pour vous faire chanter.
[Français]
En fait, j'aimerais plutôt commencer par exprimer une de mes convictions les plus profondes: CBC/Radio Canada doit rester profondément enracinée dans les régions.
[Traduction]
CBC/Radio-Canada doit rester profondément enracinée dans les régions.
[Français]
Nous jouons un rôle clé dans la vie sociale, culturelle et démocratique de ce pays, et pour ce faire, nous devons être présents dans les communautés canadiennes. C'est de cette façon que nous permettons aux enjeux et aux défis auxquels sont confrontés les gens dans une communauté d'être entendus et partagés par les autres communautés, partout au pays. Cette identification à la vie des personnes des autres communautés est l'essence même de l'identité nationale, l'essence même du mandat de CBC/Radio Canada. Et cela restera pour nous une priorité tant que j'occuperai le poste de président-directeur général de CBC/Radio Canada. Donc, je ne suis pas ici pour faire des menaces et vous dire que nous allons nous retirer des régions. Je veux cependant crier haut et fort pour que vous réalisiez que l'efficacité avec laquelle nous offrons nos services aux Canadiens dans toutes les régions du Canada est déterminée en grande partie par la structure de notre financement et l'étendue de notre mandat. C'est de cela que je veux vous parler aujourd'hui.
[Traduction]
Comment financer notre mandat? C'est vrai que CBC/Radio-Canada reçoit des contribuables un peu plus de un milliard de dollars par année. Tous les représentants des radiodiffuseurs et des câblodistributeurs qui se sont retrouvés ici même au cours des deux dernières semaines en ont parlé. Chaque fois qu'on veut nous refuser l'accès aux initiatives de financement supplémentaire du gouvernement ou du CRTC ou qu'on veut critiquer nos services, on commence avec les crédits du gouvernement.
Mais ces radiodiffuseurs et ces câblodistributeurs ne vous disent pas, dans leurs exposés, que CBC/Radio-Canada a également un mandat en vertu de la Loi sur la radiodiffusion, un mandat que personne d'autre n'a — offrir une gamme incroyable d'émissions et de services aux Canadiens aux quatre coins du pays, sur six fuseaux horaires et en deux langues officielles. Maintenant que les sources de revenu commercial représentent le tiers de notre budget total, nous avons beaucoup moins d'argent pour remplir ce mandat que la dernière fois que j'étais ici, il y a moins d'un an.
Nous avons dû faire des choix difficiles au cours des derniers mois et je n'ai pas eu de plaisir à faire ces choix. Nous n'avons simplement aucun moyen de nous retrouver avec un manque à gagner de 171 millions de dollars sans toucher à tous nos services, y compris nos services régionaux.
Mais vous devriez savoir qu'en essayant d'équilibrer notre budget, nous avons protégé la radiodiffusion régionale de façon disproportionnée par rapport au reste de la Société. CBC consacre 38 p. 100 de son budget total pour les services régionaux, même si 20 p. 100 de toutes les compressions seront effectuées dans les régions. Radio-Canada consacre 18 p. 100 de son budget pour les services régionaux, même si les compressions dans les régions ne représentent que 14 p. 100 des compressions globales.
Nous avons quand même maintenu notre présence géographique presque intacte. C'est le choix que nous avons fait — réduire un peu plus dans les réseaux pour protéger du mieux que nous pouvions les régions. Est-ce que ça veut dire que je suis content d'enlever sept postes à Sudbury ou six à Sydney ou sept à Windsor? Certainement pas. Nous retirons de ces stations des employés intelligents, dévoués et passionnés et nos services en seront touchés.
Et pour vous donner un bref aperçu de l'impact que cela aura, laissez-moi vous citer un courriel que j'ai reçu de l'une de nos employées qui travaille à l'émission d'information du matin à CBC Cap-Breton. Je ne crois pas pouvoir l'exprimer mieux qu'elle et je vais simplement lire quelques phrases de son courriel.
J'ai de la peine pour CBC et pour la perte qu'en subira le Canada qui ne le réalise pas encore. Je suis tellement triste que je peux imaginer qu'un jour personne ne racontera l'histoire de la fillette de 10 ans dans une petite communauté de Cap-Breton qui a décidé d'enlever les déchets sur un terrain de pique-nique parce qu'elle était inquiète pour les chevreuils qui marchent « pieds nus » dans le champ. Personne n'organisera des forums et ne provoquera des discussions sur des questions importantes pour les communautés qui se vident de leurs concitoyens. Personne ne donnera voix aux citoyens ordinaires.
Si nous avions plus de ressources, ou si les mesures que nous avons prises nous donnaient une certaine souplesse de façon prolongée, ou si nos revenus commerciaux redevenaient de façon permanente ce qu'ils ont déjà été, j'aimerais remettre des personnes et investir de l'argent dans les régions. Comme je l'ai déjà mentionné, le lien que nous avons avec les régions au Canada est un élément important de notre mandat.
Au cours des dernières semaines, de nombreuses rumeurs ont circulé sur le fait que le gouvernement envisage d'appuyer d'une certaine façon la radiodiffusion locale. J'ai bien peur de ne pas en savoir beaucoup plus que vous à propos de ces rumeurs, mais ce que je peux vous dire, c'est que nous accueillerions favorablement de la part du gouvernement tout appui financier qui nous permettrait de renforcer notre présence régionale et de réinvestir dans les régions.
Mais il y a un problème plus important. Le modèle économique sur lequel fonctionne la télévision généraliste, tant publique que privée, n'est plus viable. Il ne fonctionne plus depuis plusieurs années. La crise économique actuelle n'a fait qu'accélérer ce qui était déjà un déclin constant de la valeur de la publicité à la télévision. Pour CBC/Radio-Canada, les problèmes économiques actuels sont particulièrement frustrants parce qu'ils surviennent à un moment où nos services connaissent une croissance et une popularité extraordinaires auprès des Canadiens. Vous trouverez plus d'information sur ce sujet dans le mémoire que nous vous avons fait parvenir la semaine dernière. Ces succès sont de plus en plus menacés à cause d'un modèle de financement qui ne suffit plus pour nous permettre d'offrir tous les services que les Canadiens veulent de leur radiodiffuseur public.
[Français]
Alors, où sont les pistes de solution? Une partie de la solution réside notamment dans des mesures pour appuyer, entre autres choses, les émissions canadiennes originales de qualité, diffusées sur une multitude de plateformes et présentées en primeur aux heures de grande écoute. Le Fonds des médias du Canada, dont on a annoncé la création récemment, s'articule autour de ces préoccupations. Tout au long de l'élaboration des lignes directrices de ce fonds, il sera important de ne pas dévier de ces orientations.
Une autre partie de la solution serait de donner aux télédiffuseurs généralistes l'accès aux droits de distribution, aux mêmes revenus provenant des droits d'abonnement dont profitent les chaînes spécialisées depuis des années. Comme nous l'avons répété à maintes reprises devant le CRTC, nous croyons que les droits de distribution devraient être reliés à des priorités précises aux yeux du conseil — comme l'amélioration des services locaux —, et que cela devrait être intégré aux conditions de licence d'un radiodiffuseur.
Enfin, il y a le Fonds pour l'amélioration de la programmation locale du CRTC. Nous croyons que ce fonds contribuera à améliorer les services locaux s'il reste axé sur les petits marchés, contient des initiatives et force l'engagement de chaque radiodiffuseur à investir dans des communautés spécifiques. Pour CBC/Radio-Canada, l'accès à ce fonds est vital. Il pourrait nous permettre d'améliorer notre programmation dans huit stations de langue anglaise et douze stations de langue française, en fonction des règles déjà annoncées. D'ailleurs, nos plans et budgets pour 2009-2010 reposent sur notre accès au fonds selon ces fameuses règles déjà annoncées. Tout changement aux règles ou à notre admissibilité à ce fonds aura un impact majeur sur nos plans.
[Traduction]
Ces solutions aideraient tous les télédiffuseurs généralistes, publics et privés. Toutefois, pour le radiodiffuseur public, il y a quelque chose d'autre. Nous avons besoin d'un nouveau contrat avec les Canadiens, un protocole d'entente qui établirait clairement les priorités des Canadiens pour leur radiodiffuseur public et les ressources nécessaires pour atteindre ces objectifs. Sans cela, nous devons concentrer nos efforts pour trouver sur le marché les ressources qui nous manquent pour faire fonctionner tous nos services, mais sans avoir la souplesse dont disposent les radiodiffuseurs commerciaux. La crise économique actuelle met en évidence le problème. Contrairement aux autres radiodiffuseurs, CBC/Radio-Canada n'a pas accès aux marchés des capitaux ou à des emprunts commerciaux pour gérer ses flux de trésorerie. En période de déclin économique, cela signifie que la Société ne peut utiliser une marge de crédit pour réduire l'impact de la chute des revenus et se sortir intelligemment d'un ralentissement. Cela signifie que pour chaque dollar de revenu perdu, la Société doit immédiatement couper un dollar pour équilibrer son budget au cours du même exercice financier.
En gelant les dépenses et en coupant les coûts, nous avons été capables d'atteindre l'équilibre financier pour l'exercice qui s'est terminé le 31 mars. Mais pour 2009-2010, face à un manque à gagner projeté de 171 millions de dollars, nous ne pouvions tout simplement pas équilibrer notre budget sans faire des compressions majeures. Comme vous le savez, j'ai annoncé une réduction de 800 postes dans toute la Société. De plus, nous préparons des plans pour essayer de générer 125 millions de dollars de fonds supplémentaires en monétisant certains de nos actifs.
Vendre des actifs pour équilibrer notre budget, vendre des actifs pour, en réalité, payer les coûts liés aux compressions d'effectifs et pour payer des indemnités de départ, ce n'est pas la meilleure décision de gestion, mais nous n'avons pas d'autre choix.
[Français]
Certaines émissions ont donc dû être supprimées. Le personnel a été réduit dans de nombreuses stations. En toile de fond à ces compressions, nous avons tenté de protéger autant que possible certaines de nos priorités, soit conserver notre radio sans publicité; améliorer nos nouveaux médias; protéger notre présence régionale; maintenir notre programmation canadienne distinctive et protéger nos initiatives transculturelles.
Je ne suis pas très heureux de ce que nous avons dû faire et je sais que beaucoup de Canadiens et Canadiennes s'inquiètent des effets des réductions de services dans leurs communautés respectives. Je dois vous mentionner que nous travaillons en étroite collaboration avec nos employés et nos syndicats pour trouver des idées afin de réduire l'impact de ces compressions sur nos services et notre personnel. Les derniers mois m'ont démontré, encore une fois, que nos employés constituent notre actif le plus important et que nous devons faire tout notre possible pour les conserver à notre emploi. Chez nous, chaque personne est importante et c'est à chacune d'elles que revient le crédit de la livraison, jour après jour, d'émissions distinctives et rassembleuses, dans un environnement incertain, changeant et difficile. Toutes ces personnes méritent notre respect et notre appui.
Trois principes clés ont servi de base à nos décisions. Premièrement, CBC/Radio-Canada continuera à concentrer ses efforts en vue de se transformer en une entreprise de contenu plutôt que de demeurer un simple radiodiffuseur. Deuxièmement, CBC/Radio-Canada cherchera à rester le plus important créateur et distributeur de contenu canadien sur toutes les plateformes utilisées par les Canadiens. Troisièmement, nous voulons rester profondément enracinés dans les régions, conformément à l'engagement dont j'ai parlé plus tôt.
[Traduction]
Nous ne sommes plus simplement un radiodiffuseur avec des composantes médias individuelles pour la radio, la télévision et Internet. Nous sommes une entreprise de contenu intégré.
Laissez-moi vous donner un exemple. Au cours de la dernière élection fédérale, nous avons diffusé des analyses, des profils et des reportages à la radio et à la télévision, mais sur Internet, les Canadiens pouvaient en obtenir beaucoup plus: diffusion audio et vidéo en mode continu, profils et résultats détaillés pour chaque circonscription à partir d'une carte interactive. Le site Reality Check mettait à l'épreuve les promesses et les déclarations des candidats. Le site Voter Tool Kit fournissait de l'information précise et indiquait où et comment les Canadiens pouvaient voter.
Internet a permis au radiodiffuseur public de devenir un forum public. Des milliers de personnes ont débattu des enjeux locaux dans des forums créés dans chaque circonscription. Plus de 10 000 commentaires ont été affichés sur ce site seulement. Le site En ligne, Citoyens a regroupé les francophones de partout au pays dans des discussions politiques sur les enjeux. Les Canadiens ont proposé des questions directement aux candidats et ont affiché des milliers de photos et de vidéos. Les débats sur les enjeux ont amené les Canadiens à afficher plus d'un quart de million de messages sur nos sites. C'est ce que j'appelle s'impliquer politiquement.
Le soir des élections, nos sites Web étaient une autre source pour obtenir des résultats instantanés. Près de quatre millions de pages Web ont été visionnées sur le site Canada Votes de CBC.ca le jour des élections seulement. Le site Web de Radio-Canada a connu sa troisième journée de trafic le plus élevé de toute son histoire. Notre auditoire a même dépassé nos frontières. Grâce à la diffusion en continu, plus de 10 000 personnes à l'étranger ont pu suivre en direct la couverture des élections.
Tout cela, en plus de nos auditoires à la radio et à la télévision...
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie beaucoup M. le président de CBC/Radio-Canada.
Je vais poursuivre sur la perte de revenus de Radio-Canada dont vous avez parlé. Votre document contient une excellente explication à la page 11. On voit très bien que les crédits gouvernementaux à CBC/Radio-Canada ont chuté de près de 400 millions de dollars depuis 1990. C'est un très bon document. On voit très bien que vous avez subi des pertes importantes et que vous devez procéder à 800 mises à pied. Ce n'est pas rien.
On sait que plusieurs messages ont été envoyés à ce gouvernement conservateur. En février 2008, ce même comité, qui n'était pas composé des mêmes personnes, a déposé à la Chambre un rapport. Le consensus auquel en était arrivé le comité ainsi que vos demandes étaient clairs: tout le monde demandait à ce gouvernement conservateur un financement stable sur sept ans, assorti de conditions et d'un protocole d'entente, pour vous permettre de savoir où vous alliez d'année en année, sans attendre à la dernière minute.
On demandait ensuite un financement de 40 $ par habitant. J'ai fait le calcul: avec la population actuelle, cela donne environ 1,3 milliard de dollars.
Vous demandiez également qu'on ajoute de façon permanente les fameux 60 millions de dollars que vous allez toujours quêter et que vous irez quêter dans quelques jours au Conseil du Trésor. Même si le ministre a donné sa parole, je n'ai pas l'impression que vous avez reçu une réponse officielle concernant ce montant supplémentaire et bizarroïde de 60 millions de dollars.
Effectivement, ce comité demandait trois grandes conditions, dont 1,374 milliard de dollars, ce qui représente 41,83 $ par habitant. Le message était clair. Il l'était aussi quand vous avez demandé à la chambre de commerce une marge de crédit.
Vous avez écrit au premier ministre, vers la fin de février, pour lui demander une rencontre. Or, vous n'avez pas encore reçu d'accusé de réception. Est-ce exact?
En 1995, un ancien PDG de CBC/Radio-Canada a démissionné parce qu'il n'avait pas obtenu le financement auquel il aspirait et qu'il jugeait nécessaire. Vous avez été engagé par ce gouvernement conservateur il y a environ deux ans. Quel genre de discussion avez-vous eue? Avez-vous discuté du financement que vous exigiez pour gérer Radio-Canada?
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Merci infiniment, monsieur le président.
Merci beaucoup, monsieur Lacroix. J'ai beaucoup apprécié l'ensemble de vos commentaires et de votre exposé, mais j'ai particulièrement aimé certaines phrases. Elles m'ont frappé dans la mesure où elles me sont apparues comme le coeur même de votre plaidoyer.
À la page 1 de votre document, on dit ceci:
Nous jouons un rôle clé dans la vie sociale, culturelle et démocratique de ce pays, et, pour ce faire, nous devons être présents dans les communautés canadiennes. C'est de cette façon que nous permettons aux enjeux et aux défis auxquels sont confrontés les gens dans une communauté d'être entendus et partagés par les autres, partout au pays.
Par contre, la phrase clé qui m'a le plus frappé est la suivante:
Cette identification à la vie des personnes des autres communautés est l'essence même de l'identité nationale.
Je suis souverainiste, mais si j'étais un Canadien conventionnel voulant que le Canada repose sur des assises solides, je prendrais cette phrase au pied de la lettre. Il me semble que l'identité nationale est le coeur même d'une nation. Si on n'est pas capable de garantir cela en investissant les fonds nécessaires, où s'en va-t-on? Je ne suis pas ici pour défendre le Canada, mais il reste que la question se pose vraiment.
Pour être en mesure de réaliser votre mandat, vous demandez des ressources supplémentaires. Vous en manquez présentement parce que vos revenus diminuent. Partout dans le monde, les pays industrialisés ont décidé, étant donné la crise économique, d'investir massivement dans l'emploi pour relancer l'économie. Ils investissent des centaines de millions de dollars voire des centaines de milliards de dollars pour soutenir l'économie et l'emploi, de façon à ce qu'il n'y ait pas trop de pertes d'emplois. Dans votre domaine, 800 emplois pourraient être perdus. Il n'y a pas de fonds pour compenser cela. En lieu et place, on va investir des millions de dollars dans la construction de ponts, de routes et de ports, bref dans tout ce qui est plutôt matériel. Je n'ai rien contre cela, mais à mon avis, la culture vaut au moins un pont. Un pont de 800 millions de dollars, ça existe. Par contre, pour que des investissements dans la culture se réalisent, il faut qu'il y ait une volonté collective et politique. Pour cette raison, ma question repose sur le commentaire suivant, qui se trouve à la page 5:
[...] nous avons besoin d'un nouveau contrat avec les Canadiens, un protocole d'entente qui établirait clairement les priorités des Canadiens pour leur radiodiffuseur public et les ressources nécessaires pour atteindre ces objectifs.
Ne cherchez-vous pas par là à obtenir que les Canadiens ou leur gouvernement réinvestissent dans la culture? C'est précisément là que se situe le principal problème.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Lacroix, je vous remercie de contribuer à l'étude si importante que nous menons.
Mes questions reviennent principalement de mes commettants. Nous avons reçu un certain nombre d'appels téléphoniques et de courriels à ce sujet dans ma circonscription d'Edmonton—Sherwood Park, étant donné la situation économique. Selon les médias, Sylvain Lafrance, le vice-président principal des Services français de Radio-Canada, aurait, en un an à peine, cumulé plus de 80 000 $ en dépenses pour des billets de théâtre et des notes d'hôtel, ce qui comprendrait 6 000 $ en repas et 10 000 $ pour une activité de financement à 1 000 $ le couvert; le ministre a d'ailleurs présenté une réponse écrite à cet égard.
Puis, mercredi dernier, nous avons appris, à la lecture de certains articles de Sun Media, qu'encore une fois, en moins d'un an, Radio-Canada avait dépensé au moins 61 000 $ pour neuf réunions de janvier à juin. Ces dépenses comprennent 21 600 $ pour permettre à 21 directeurs et cadres supérieurs responsables des ressources humaines de séjourner au Château Beauvallon, à Mont-Tremblant, au Québec, pendant deux jours; près de 3 500 $ pour des réunions à l'hôtel Renaissance, à Toronto, pour des cadres supérieurs de la télévision; plus de 18 000 $ pour une conférence d'une demi-journée au Casino du Lac-Leamy; un peu plus de 6 000 $ pour une retraite de luxe dans les Laurentides pour 22 cadres supérieurs, au Manoir Saint-Sauveur; plus de 1 600 $ pour un repas de travail; plus de 3 500 $ pour une journée au club de golf St. Andrew's Valley, à Toronto; et encore 1 500 $ pour des réunions à l'hôtel Le Germain. Encore faut-il calculer les primes versées au cours de l'année financière 2007-2008, qui ont atteint près de 964 000 $ pour 12 cadres supérieurs.
Vous voyez pourquoi nos commettants s'inquiètent. Je sais que les porte-parole de Radio-Canada disent que ces dépenses sont conformes à la politique de l'entreprise, et précisent que lorsqu'il faut rencontrer les gens en personne, il vaut mieux le faire à l'extérieur pour éviter les dérangements.
Croyez-vous que dépenser près de 150 000 $ pour neuf réunions corresponde à une bonne politique d'entreprise?
Monsieur Lacroix, je tiens tout d'abord à revenir un peu sur les commentaires de mon collègue, M. Del Mastro, qui s'inquiète du fait que les journalistes de Radio-Canada sont trop bien rémunérés. Or, je ne crois pas pouvoir en trouver un seul qui le soit trop. J'ai travaillé comme reporteur local pour Radio-Canada et, lorsque tout allait bien, je touchais 60 $ par jour, plus 35 $ pour un entrefilet, mais s'il était refusé, tant pis pour moi. Les gens que je connaissais faisaient leur métier par bonté de coeur, pour améliorer le monde, parce qu'au fond, le salaire était assez pitoyable. Si je comprends bien, on ne peut même plus se permettre d'engager des reporteurs locaux. Je voulais que cela figure au compte rendu.
J'aimerais maintenant revenir aux pertes dans les régions. Comme vous le savez, c'est un gros problème chez nous, et je ne le dis pas par esprit de clocher. Nos communautés dépendent totalement de Radio-Canada. S'ils perdent leur service dans le Nord, ils perdent leur voix, un point, c'est tout. On parle de 28 p. 100, mais si je fais les calculs pour le nord du Canada, on constate une réduction de 50 p. 100 à Sudbury, de 50 p. 100 à Thunder Bay, de 100 p. 100 dans le nord du Manitoba, et de 100 p. 100 en Saskatchewan. On n'a vraiment pas l'impression que les compressions ont été équilibrées, parce que si vous éliminez deux emplois dans un marché si restreint, c'est toute l'émission de l'après-midi qui disparaît. Dans ce cas, vous empêchez également une vaste région, de la taille de l'Europe occidentale, d'avoir accès à des programmes artistiques, qui présentent des écrivains du Nord, et qui font entendre les voix de la région.
Alors, en prenant cette décision — et je sais que ce n'est pas facile de mettre des gens à pied —, tenez-vous compte des façons d'économiser de l'argent mais également de la responsabilité d'offrir des services dans une région donnée?
Je vous remercie encore d'être ici aujourd'hui. C'est très bien de votre part.
[Traduction]
J'aimerais faire quelques commentaires, monsieur Lacroix. Puis, je poserai quelques questions.
J'ai été agent de police pendant près de 19 ans. J'ai été renversée d'apprendre aujourd'hui, pour la première fois, que le salaire moyen d'un employé de CBC/Radio-Canada est beaucoup plus élevé que le salaire moyen d'un policier, qui met sa vie en péril tous les jours. De vous entendre dire que le salaire pourrait dépasser 76 000 $ et peut-être, dans certains cas, 84 000 $ en moyenne, quand on songe au fait que ceux qui font les manchettes ont un salaire beaucoup moins élevé que cela, que le salaire de ceux qui ne font que rapporter les nouvelles est beaucoup plus élevé que cela, et tout ça à même les deniers publics, je dois vous avouer que tout cela m'a renversée.
J'aimerais également parler du montant de 4 millions de dollars qui sera utilisé pour les primes. Je peux vous assurer que les policiers ne reçoivent pas de primes simplement parce qu'ils font du bon travail et j'espère que les Canadiens jugeront que lorsque le gouvernement aide financièrement des sociétés, tous ces employés devraient faire du bon travail sans s'attendre à recevoir une prime.
C'étaient là mes deux commentaires. J'aimerais maintenant passer aux questions.
Moi aussi, j'ai entendu de nombreux commentaires d'électeurs sur le sujet. Comme vous le savez, c'est un gouvernement conservateur qui a mis sur pied CBC/Radio-Canada, et nous sommes donc très intéressés et nous sommes engagés face à la notion que c'est quelque chose qui reflète l'identité canadienne. Un grand nombre de mes commettants disent qu'ils voudraient avoir un contenu exclusivement canadien à CBC/Radio-Canada.
Dans votre exposé, vous avez dit que vous vouliez respecter certaines priorités clés — et je vais répéter ce que vous avez dit. Vous avez dit qu'on retrouvait parmi les priorités clés l'idée de conserver nos émissions de radio sans publicité, d'améliorer les nouveaux médias, de protéger notre empreinte régionale de radiodiffusion et nos initiatives interculturelles. Eh bien, monsieur, je dois vous dire que je vois beaucoup plus d'émissions comme Martha Stewart, Wheel of Fortune, Jeopardy, The Simpsons; et récemment, on nous a parlé de deux émissions de télé-réalité que vous avez l'intention de diffuser, soit Battle of the Blades et Super Speller.
J'aimerais savoir combien d'émissions américaines de ce genre correspondent aux priorités clés que vous avez identifiées, celles qui vous tenaient à coeur.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais d'abord vous remercier, monsieur Lacroix, d'avoir accepté de comparaître aujourd'hui, ainsi que pour la discussion que nous avons eue la semaine passée.
[Traduction]
J'aimerais dire tout d'abord que c'est évidemment pour nous un plaisir que de participer à ce débat en tant que députés. Je suis certaine que nous partageons tous le plaisir de discuter de ces questions importantes.
L'une d'entre elles, qui concerne CBC/Radio-Canada, notre télédiffuseur public national, nous tient particulièrement à coeur, non pas simplement parce que nous représentons nos électeurs, mais également parce que nous sommes Canadiens. Certains commentaires critiques que j'ai entendus me semblent très préoccupants. Évidemment, je comprends que la critique a toujours sa place et qu'il est important de poser des questions dans le contexte actuel. En voyant mes collègues d'en face parler en termes très négatifs du travail que fait CBC/Radio-Canada, j'estime que dans le contexte des difficultés actuelles, nous devons établir des relations positives avec notre télédiffuseur public ainsi qu'avec tous les médias et nous devons chercher à améliorer la situation pour tous ceux qui perdent leur emploi et pour tous les Canadiens qui comptent sur CBC/Radio-Canada et sur son importante programmation.
Je suis bien consciente des défis que doit relever CBC/Radio-Canada. Grâce à la société, je connais bien la région où j'ai grandi et je connais aussi l'ensemble de la planète; j'apprécie donc grandement son travail.
J'aimerais aborder la question suivante, même si je sais qu'elle a été présentée de bien des façons différentes aujourd'hui, mais en mettant particulièrement l'accent sur les compressions budgétaires imposées dans ma région, surtout à la station appelée North Country située à Thompson, au Manitoba. J'aimerais aussi attirer l'attention sur la suppression, dans la province voisine de Saskatchewan, de la station Keewatin Country, située à La Ronge.
Vous avez dit que les stations ne subiront pas de compressions budgétaires et j'aimerais me convaincre que c'est bien ce qui est prévu. Pourtant, il semble y avoir une contradiction dans l'information fournie. Le jour même où on a appris que ces deux stations allaient fermer, on a parlé non plus de stations, mais de bureaux alors qu'en réalité, dans la licence du CRTC et dans le site Web de CBC/Radio-Canada, on dit qu'il s'agit de stations.
Ce que je voudrais dire au nom de ma région et de mes voisins situés plus à l'ouest, c'est qu'il faut reconsidérer les décisions concernant ces stations. Soyons précis. Nous parlons d'une personne dans chacun des deux endroits, qui se fait le porte-parole d'une région comme la mienne, 11 fois plus grande que l'Angleterre, et c'est la même chose dans la province voisine. Dans ma région, c'est la station North Country de CBC, où une personne s'adresse à 23 localités; dans le nord de la Saskatchewan, son homologue s'adresse à 18 localités. Ces deux personnes font un travail remarquable qui est essentiel non seulement pour notre région, mais pour nos provinces et pour l'ensemble de la nation.
Ma question est sans doute plus spécifique, mais compte tenu de la proportion de la population qui vit à Winnipeg par rapport à celle qui vit à l'extérieur, je crains que si nous perdons notre station, au lieu d'avoir un animateur qui assure la programmation régulière à l'extérieur de Winnipeg, nous aurons un journaliste auquel on fera appel en fonction des événements à couvrir. Je crois savoir que la situation est la même en Saskatchewan.
Compte tenu de l'importance accordée à la programmation régionale, comme vous l'avez indiqué et comme le précise le mandat de CBC/Radio-Canada, je demande, au nom de la région que je représente ainsi que de la région voisine, que ces stations soient rétablies, que l'on reconnaisse l'importance de leur programmation et que le travail effectué par ces deux employés de part et d'autres de la frontière provinciale soit considéré comme essentiel à la réalisation du mandat de CBC/Radio-Canada. Il va encore y avoir bien des discussions sur la solution à trouver, mais au nom des gens que je représente, j'aimerais essentiellement faire admettre que les émissions conçues dans le nord pour le nord sont essentielles au mandat de CBC/Radio-Canada.
Voilà mon commentaire et ma question. Merci.