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Nous croyons comprendre avoir été invités ici aujourd'hui parce que des télédiffuseurs tels que CTV et Global ont menacé de fermer des stations locales si les distributeurs de services par câble et par satellite n'interviennent pas pour les sauver. Ils prétendent que le système de télévision en direct traditionnel « ne fonctionne plus ». Monsieur le président, il ne s'agit là que d'une fiction inventée à des fins égoïstes. Jusqu'à récemment, la télévision en direct était très rentable. Comme il s'agit d'une industrie qui évolue de façon cyclique, elle redeviendra rentable.
Il y a quatre ans seulement, d'après les chiffres du CRTC, la télévision en direct canadienne a rapporté presque 250 millions de dollars de bénéfices d'exploitation. Il y a deux ans, l'industrie était si rentable que CTV a acheté CHUM Ltd. Pour un milliard de dollars, CTV a acquis 6 chaînes de télévision en direct, 34 stations de radio et 21 chaînes spécialisées pour la plupart très rentables. En 2007 également, Canwest Global, déjà lourdement hypothéqué après avoir acheté les journaux du groupe Hollinger, s'est endetté d'un milliard de dollars additionnel pour acquérir Alliance Atlantis et ses 18 chaînes spécialisées. À eux deux, CTV et Global sont désormais propriétaires de 56 des chaînes spécialisées canadiennes les plus rentables. L'année dernière, la chaîne TSN a rapporté, à elle seule, plus de 60 millions de dollars en bénéfices d'exploitation à CTV. Les diffuseurs CTV et Global détiennent tous les deux des entreprises télévisuelles rentables. Et, contrairement à ce qu'affirment CTV et Canwest, leurs actifs de radiodiffusion doivent être évalués comme la somme de leurs composantes, et non pas comme si chaque élément était une entreprise indépendante. Rien que l'année dernière, les bénéfices d'exploitation cumulés des chaînes de télévision en direct et spécialisées de CTV s'élevaient à environ 200 millions de dollars. Global n'était pas loin derrière avec ses 164 millions en bénéfices d'exploitation. Alors où est le problème?
Récemment, le PDG de Canwest Global, Leonard Asper, a déclaré: « Dans toute cette couverture médiatique, on oublie souvent de mentionner que les entreprises de Canwest sont très rentables et qu'elles génèrent bien au-delà de 500 millions de dollars par an en bénéfices d'exploitation ». Ce montant comprend la télévision et les journaux. Asper a ajouté: « le seul problème est que nos prêteurs trouvent notre hypothèque trop élevée ».
À Rogers, nous avons nous aussi des hypothèques à payer; nous éprouvons également des difficultés sur le plan de nos intérêts dans le secteur de la télévision en direct. Mais comme Tony Viner vous le dira, nous ne sommes pas venus ici pour demander de l'aide. Nous ne demandons pas non plus aux consommateurs et aux actionnaires d'autres entreprises de prendre en charge nos problèmes financiers. La situation économique s'améliorera bientôt, et l'histoire nous montre que lorsque l'économie se porte mieux, la télévision en direct redevient rentable. De grâce, ne vous laissez pas leurrer par la soi-disant « solution du tarif de distribution ». Ce n'est ni plus ni moins qu'une taxe imposée aux consommateurs. On n'avait pas vu de combine aussi insidieuse depuis longtemps. Le CRTC l'a déjà rejetée à deux reprises parce que ce n'est qu'une opération de sauvetage par un moyen détourné. C'est prélever d'un côté pour parer à un besoin ailleurs. C'est une mainmise fondée sur le mythe que les distributeurs de services par câble et par satellite ne contribuent pas assez au système. Rien n'est plus faux.
Nos services apportent beaucoup de valeur aux télédiffuseurs en direct. Les câblodistributeurs offrent aux stations de télévision locales une distribution garantie et des postes prioritaires dans la grille des canaux. Nous offrons aux stations de télévision en direct la substitution simultanée d'émissions. C'est-à-dire que lorsqu'une émission américaine populaire est diffusée simultanément aux États-Unis et au Canada — par exemple, lorsque l'émission « House » est diffusée sur les ondes de Global et de Fox à 20 heures les lundis soirs —, les téléspectateurs ne captent que le signal de Global, peu importe le canal qu'ils regardent. Par conséquent, les publicités diffusées par Global sont vues par beaucoup plus de téléspectateurs, et le temps publicitaire peut être vendu à des prix plus élevés.
La substitution de signaux identiques représente 300 millions de dollars par an pour les diffuseurs en direct. Cela fait partie du marché réglementaire qu'a conclu le CRTC avec les radiodiffuseurs en direct et les câblodistributeurs. En vertu de cet accord, les radiodiffuseurs fournissent des signaux, et nous les aidons à accroître leurs revenus publicitaires en accordant la priorité à leurs stations, en en faisant la promotion et en leur accordant de la programmation. J'ai bien dit programmation. Peu de gens savent que chaque année, les entreprises de distribution de services par câble et par satellite versent environ 215 millions de dollars pour subventionner les coûts de la production télévisuelle. Les radiodiffuseurs comme CTV et Global ne paient qu'environ 30 p. 100 de ce qu'il en coûterait pour produire une émission canadienne diffusée aux heures de grande écoute. Leur appétit pour des subventions est insatiable.
Récemment, le CRTC nous a ordonné, à nous, les distributeurs, de contribuer 60 millions de dollars de plus à même nos revenus pour subventionner la programmation locale dans les petites villes et celles de taille moyenne. Il en est donc ainsi. Cependant, notre appui aux radiodiffuseurs en direct n'est qu'une de nos contributions au système. Nous aidons à financer CPAC, la chaîne parlementaire, et nous offrons notre propre excellente programmation locale, comme pourra vous l'expliquer Colette Watson. La télévision communautaire, financée par les câblodistributeurs, devient rapidement la source la plus respectée de télévision véritablement locale au Canada. Pour plus de 30 millions de dollars par an, les 33 stations de télévision communautaire de Rogers offrent bien plus de programmation locale que n'importe quelle station en direct commerciale n'importe où au pays.
Ainsi donc, lorsque CTV et Global nous accusent de ne pas en faire assez, et qu'ils menacent de fermer des stations, quelles sont leurs vraies intentions? Lorsqu'ils exigent l'imposition d'un tarif de distribution, comment prévoient-ils dépenser cet argent? Croyez-moi, ils ne l'investiront pas dans une couverture accrue des nouvelles locales dans votre région du pays. La triste réalité est que la plupart des sommes que dépensent CTV et Global en matière de programmation vont directement à Hollywood. Chaque année, le total grimpe. Au cours des trois dernières années, les radiodiffuseurs en direct ont dépensé 25 p. 100 de plus à Hollywood, alors que leurs autres coûts augmentaient d'environ 2 p. 100 seulement. Pour ce qui est du tarif de distribution, le chiffre le plus souvent cité est de 50 ¢ par abonné, par mois et par chaîne locale.
Dans son récent témoignage devant ce comité, le président du CRTC, Konrad von Finckenstein, a expliqué en ces termes l'impact de ce genre de subvention pour les consommateurs: « Pour mettre cette question dans son contexte, le tarif de distribution que nous avons refusé était celui de 50 ¢ par signal que demandaient CTV et Canwest. À Toronto, cela aurait entraîné une augmentation de 6,50 $ par mois pour les abonnés au câble. À Montréal, ce montant aurait été de 4,50 $, et à Ottawa, de 6,50 $ ».
Comme l'a dit le président, on refilerait cette taxe aux consommateurs. Quelle que soit la situation économique, et surtout en ces temps très difficiles, il est tout à fait aberrant d'imposer une taxe de 6,50 $ par mois aux gens sans rien leur donner en retour. Les consommateurs en seront indignés. Cette injustice serait d'autant plus grave que le tarif de distribution mettrait en oeuvre la pire des solutions en matière de politique publique: un système d'imposition à deux niveaux. Les abonnés aux services par câble ou par satellite auraient à payer bien plus, alors que ceux qui captent leurs signaux télévisés au moyen d'antennes en V ou d'antennes de toit ne paieraient aucune taxe à la consommation tout en continuant à capter gratuitement la télévision en direct. Ce genre de système serait absolument injuste.
Nous ne sommes pas des pique-assiettes. Les entreprises de câblodistribution canadiennes ont toujours travaillé à faire de notre système de radiodiffusion le meilleur au monde. À elle seule, Rogers Cable a fait des investissements en capital de 6,5 milliards de dollars au cours des 10 dernières années. Ces investissements considérables ont fait du Canada un modèle envié à l'échelle mondiale, et ont profité à toutes les parties intéressées. Nous livrons aux Canadiens des images télévisées ultra nettes et de très grande qualité. Nous élargissons les zones de rayonnement de la télévision locale, ce qui élargit l'auditoire des radiodiffuseurs et leur permet d'augmenter les prix qu'ils demandent pour les publicités. À nos propres frais, nous remplaçons des signaux américains par des signaux canadiens afin que les radiodiffuseurs canadiens puissent avoir les droits exclusifs de distribution des émissions américaines les plus regardées. Nous investissons des centaines de millions de dollars dans la télévision canadienne de grande écoute et locale, et nous offrons une couverture locale approfondie par la voie de nos propres chaînes communautaires.
Monsieur le président, il ne peut être dans l'intérêt du public de demander à nos abonnés d'en faire plus, de payer pour les pratiques commerciales douteuses de CTV et de Global. Le système n'est pas déficient. L'industrie de la télévision évolue de façon cyclique. Elle a déjà connu des crises auparavant et a surmonté ses difficultés pour redevenir rentable et rapporter des milliards de dollars à ses propriétaires. L'histoire a tendance à se répéter. Ainsi, c'est avec le plus grand respect que nous donnons ce simple conseil à votre comité: laissez à l'histoire le temps de se répéter une fois de plus.
Merci, monsieur le président. Nous répondrons avec plaisir à vos questions.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
[Français]
Merci beaucoup.
Mesdames et messieurs les membres du Comité permanent du patrimoine canadien, permettez-moi de vous présenter mes collègues. À ma gauche, il y a Pierre Dion, président et chef de la direction de TVA, et à ma droite, il y a Serge Sasseville, vice-président aux Affaires corporatives et institutionnelles de Quebecor Media.
Nous vous remercions de cette invitation. Nous nous présentons à nouveau devant vous aujourd'hui pour mettre dans une juste perspective une situation que nous avions déjà portée à votre attention une première fois le 20 février 2007. Nous sommes ici également afin de vous demander expressément d'user de toute votre influence pour forcer les décisions majeures urgentes qui s'imposent.
Il est malheureux qu'il ait fallu attendre que la télévision généraliste canadienne soit fragilisée au point où nous sommes aujourd'hui confrontés à la fermeture de plusieurs stations et au licenciement de plusieurs milliers d'employés pour tous nous rendre enfin compte que le fameux modèle canadien ne fonctionne plus.
J'ai pris la parole sur diverses tribunes depuis plus de trois ans afin d'alerter les autorités et les divers intervenants à l'égard des conséquences catastrophiques qu'ont sur notre télévision généraliste les déficiences graves de nos structures règlementaires et l'incapacité du régulateur de comprendre l'évolution technologique et les conséquences majeures qu'elle a sur le paysage audiovisuel, tant au Canada que partout ailleurs dans le monde.
Déjà en novembre 2005, j'annonçais la fin de la télévision telle que nous la connaissons aux membres de l'Académie canadienne du cinéma et de la télévision.
En avril 2006, dans le cadre d'une journée consacrée aux grands défis du petit écran organisée par Infopresse, un magazine spécialisé dans le domaine des médias, j'avais utilisé une image choc en parlant d'un véritable tsunami technologique pour décrire la force de l'impact des changements vécus par les médias traditionnels en général et par la télévision généraliste en particulier. Nous subissions alors déjà les effets de la fragmentation des auditoires et de l'érosion de nos revenus publicitaires. Il était clair que la télévision généraliste se dirigeait tout droit vers une impasse. Tous les indicateurs étaient au rouge et l'urgence de revoir en profondeur nos façons de faire s'imposait déjà. J'avais annoncé la fin des séries lourdes telle Vice caché, pourtant au coeur de l'identité canadienne en radiodiffusion, qui coûtent trop cher en droits de diffusion et rapportent trop peu de revenus publicitaires, seule source de revenus des télévisions généralistes. C'est l'intransigeance du Fonds canadien de télévision qui a tué ces séries lourdes qui, comme la série Un homme mort, faisaient l'unanimité des critiques et réussissaient malgré tout à rejoindre des auditoires importants, quoiqu'en baisse. Cet organisme nous a en effet refusé l'accès aux droits qui nous auraient permis de décliner ces émissions sur toutes les plateformes et de rentabiliser ainsi les investissements importants que nous devions y consacrer.
En 2006, dans le cadre de l'instance sur la revue de la politique de télédiffusion, nous demandions déjà au CRTC de mettre en oeuvre les conditions nécessaires à un rééquilibre dans le système canadien de radiodiffusion de façon à repositionner la télévision généraliste vis-à-vis des chaînes spécialisées et des producteurs indépendants, en lui permettant de bénéficier elle aussi de redevances d'abonnement et des droits lui permettant de décliner sur toutes les plateformes les émissions qu'elle finance.
En 2007 et en 2008, dans le cadre de l'instance sur le Fonds canadien de télévision, nous avons à nouveau tenu le même discours devant le CRTC, tout en insistant sur le fait que la télévision généraliste ne pouvait plus continuer à soutenir significativement le financement de productions telles que la dramatique et les grandes émissions de variétés de qualité, en satisfaisant aux exigences discriminatoires du Fonds canadien de télévision. Nous plaidions qu'il fallait rapidement instaurer un nouveau modèle de financement, où les risques sont répartis entre le producteur et le diffuseur, et les revenus partagés en conséquence. Nous proposions de hausser notre contribution annuelle à un nouveau fonds de programmation à 30 millions de dollars par année et de l'augmenter chaque année de 20 p. 100, soit un investissement de plus de 100 millions de dollars sur trois ans, tout en renonçant aux contributions de Patrimoine canadien.
Toujours en 2007 et en 2008, dans le cadre de l'instance sur la revue du cadre règlementaire de distribution, nous revenions à la charge devant le CRTC en affirmant qu'il devait réviser et assouplir sa réglementation afin de favoriser la production de contenu canadien de qualité en répondant aux besoins des consommateurs qui, de plus en plus, peuvent regarder les émissions qui les intéressent au moment, à l'endroit et au moyen du support qui leur convient.
Nous avions alors démontré que le statut réglementaire des chaînes spécialisées, qui leur permet d'avoir accès à des revenus publicitaires mais aussi et surtout à des redevances obligatoires, faisait en sorte qu'elles disposent d'une formidable force de frappe publicitaire grâce à leur capacité de proposer une offre multicanaux très attrayante pour les annonceurs. Ensemble, ces chaînes dominent le marché, tandis que la télévision généraliste voit fondre ses parts de marché comme neige au soleil, alors que c'est à elle qu'il revient d'offrir la plus grande part de contenu canadien significatif. Nous avions fait la preuve que les obligations réglementaires qui sont imposées à la télévision généraliste et les coûts qui y sont rattachés n'ont rien à voir avec le fardeau des chaînes spécialisées et que la situation ne pourrait pas tenir longtemps.
J'ai répété les mêmes arguments devant le CRTC lors d'une réunion de planification triennale tenue en janvier 2008.
Plus de trois années se sont écoulées depuis nos premières interventions, et nous devons malheureusement constater que tout va encore plus vite que ce que nous avions prévu.
Par ailleurs, le CRTC, hormis les nombreuses discussions auxquelles il a été partie, n'a pris aucune décision ni initiative significative pour éviter la catastrophe appréhendée. Pire, plutôt que de s'attaquer dès maintenant au problème dans le cadre des audiences sur le renouvellement des licences des télévisions conventionnelles qui débuteront la semaine prochaine, le conseil a choisi de reporter en 2010 l'étude des questions de fond, une approche qui ne peut se justifier dans les circonstances actuelles et qui nous incite à vous demander d'intervenir sans délai afin d'empêcher la disparition de la télévision généraliste canadienne.
Pour survivre, la télévision généraliste a besoin de flexibilité dans sa structure de financement et dans sa structure de droits d'exploitation, afin de pouvoir continuer à produire et à diffuser des émissions à succès sur le plus grand nombre possible de canaux de distribution.
Bien que nous soyons toujours d'avis que notre proposition de hausser à 100 millions de dollars sur trois ans notre contribution annuelle à un nouveau fonds de programmation aurait été la meilleure solution pour le système canadien de radiodiffusion, nous saluons la décision du ministre du Patrimoine canadien et des Langues officielles de créer le Fonds des médias du Canada afin de pallier les problèmes de gouvernance, de financement et d'orientation du Fonds canadien de télévision. Nous demeurons toutefois à l'affût de ce qui sera mis en place afin de rendre opérationnelle cette décision et de s'assurer qu'il sera enfin possible pour la télévision généraliste d'obtenir le financement et les droits qui sont une condition préalable aux investissements dans la programmation qui compte.
J'aimerais vous rappeler que dans son opinion minoritaire en annexe du rapport du CRTC sur le Fonds canadien de télévision en date du 5 juin 2008, le conseiller Michel Morin affirmait ce qui suit:
Non seulement la proposition de QMi laissait-elle plus d'argent pour les autres participants au FCT, mais elle représentait un engagement ferme à consacrer plus d'argent à la production de contenu canadien que dans le cadre actuel des règles du FCT et, notamment, un montant garanti pour la production de dramatiques. Tout le monde sortait gagnant. Il y avait plus d'argent pour les autres télédiffuseurs dans le système et plus de contenu canadien pour les téléspectateurs du réseau TVA.
Le coût de la programmation originale pèse lourd dans les résultats de la télévision généraliste. Il n'a par contre pratiquement aucun impact sur ceux des chaînes spécialisées qui sont moins sensibles aux résultats d'écoute en raison des revenus de redevances garantis.
Dans le marché francophone, TVA est le seul diffuseur privé à investir massivement dans la production de séries dramatiques et d'émissions de variétés de qualité. Au cours de l'exercice 2007-2008, le réseau TVA a investi plus de 116 millions de dollars en programmation de contenus canadiens.
Pour demeurer le leader dans son marché, TVA consacre actuellement près de 90 p. 100 de ses dépenses de programmation à du contenu original canadien, essentiellement en information, des dramatiques et des grandes émissions de variétés. Nos résultats en termes d'écoute sont exceptionnels, soit 30 p. 100 de parts de marché, selon les derniers sondages BBM, pour la saison qui s'achève. La semaine dernière, la finale de Star Académie a connu une pointe de 3 millions de téléspectateurs. Les galas dominicaux de Star Académie ont attiré une moyenne supérieure de 2,4 millions de téléspectateurs, plus que toute autre émission diffusée au Canada.
Toutes les séries dramatiques de TVA se sont classées, au moment de leur diffusion, parmi les 30 émissions les plus regardées de la télévision francophone. Elles ont généré, de façon générale, plus d'un million d'auditeurs. Nos résultats dans le domaine de l'information sont tout aussi exceptionnels. Nous arrivons systématiquement en première position pour les grands rendez-vous électoraux ou pour la couverture de grands événements internationaux. Nos bulletins de nouvelles rejoignent régulièrement près de trois fois plus de téléspectateurs que ceux de Radio-Canada.
Nous déplorons que les résultats financiers ne compensent pas tous les risques pris au bénéfice du contenu canadien. J'aimerais d'ailleurs porter à votre attention des statistiques très révélatrices. En 2008, les dépenses en émissions canadiennes originales de la télévision généraliste privée au Québec se sont chiffrées à 171 millions de dollars, alors que les services spécialisés et de télévision payante de langue française n'ont consacré que 125 millions de dollars à ce type de dépenses, préférant réserver des sommes importantes à l'acquisition d'émissions de catalogue antérieurement diffusées par d'autres entreprises, la plupart du temps par des télévisions généralistes.
Malheureusement, les bénéfices ne suivent pas le choix qu'a fait la télévision généraliste d'investir davantage dans des émissions canadiennes originales. En 2008, le bénéfice d'exploitation des services spécialisés et de télévision payante de langue française s'est chiffré à 121,7 millions de dollars, alors que celui de la télévision généraliste au Québec ne s'est chiffré qu'à 39 p. 100 de cette somme, soit 47 millions de dollars.
Nous annonçons à nos investisseurs tous les risques supplémentaires associés à nos activités. Les dirigeants de Corus et d'Astral Media peuvent se permettre de rassurer les leurs: la crise économique a moins de prise sur leurs résultats. Dans un communiqué de presse émis le 9 avril 2009, Astral Media rapportait d'ailleurs la citation suivante, attribuée à M. lan Greenberg, son président et chef de direction:
La vigueur et la résilience des résultats du deuxième trimestre démontrent une fois de plus l'importance d'avoir des sources de revenus bien équilibrées et diversifiées lorsque les conditions économiques sont plus difficiles.
Ces entreprises peuvent miser sur des revenus de redevances stables ou en croissance en profitant des investissements massifs que font les télédistributeurs afin d'augmenter la base de leur clientèle. Au cours des cinq dernières années, Astral Media a distribué en moyenne 90 millions de dollars par année à ses actionnaires, soit près de 13 p. 100 des revenus du groupe. Astral Media affiche une profitabilité deux fois supérieure à celle de TVA. Les actions de cette société sont donc perçues par les investisseurs comme étant un meilleur achat que celles de TVA.
Astral Media bénéficie de surcroît de l'utilisation de réseaux de distribution dans lesquels elle n'est pas tenue d'investir. Vidéotron a investi plus d'un milliard de dollars au cours des cinq dernières années pour rendre son réseau plus performant, prenant un risque financier considérable, plus particulièrement dans le contexte actuel. Selon ses propres rapports annuels, Astral Media n'a consacré au cours des cinq dernières années que 39,3 millions de dollars à ses infrastructures en acquisition d'immobilisations corporelles pour la télévision.
Les distributeurs canadiens mettent à la disposition des chaînes spécialisées une autoroute pavée à neuf pour qu'elles puissent rejoindre leurs clients tout en exploitant leurs entreprises dans le confort de leur chasse gardée, donc à l'abri de la concurrence. De nouvelles sources de financement sont nécessaires et elles doivent être à la hauteur de l'ensemble des besoins de la télévision généraliste. La première de ces sources de financement nous vient des occasions créées par la multiplication des fenêtres de diffusion. Nous avons en effet la possibilité de récupérer, au moins en partie, les pertes de revenus publicitaires subies par l'antenne généraliste en exploitant des contenus sur toutes les fenêtres de diffusion. Pour cela, il faut que les diffuseurs puissent bénéficier des droits d'exploitation appropriés. TVA recherche la collaboration des producteurs pour la négociation et l'obtention de tels droits.
Toutes les parties doivent se mettre d'accord sur les nouvelles réalités de la télévision, comme l'a fait l'Union des artistes en février dernier en concluant avec TVA une entente collective définissant précisément les paramètres de la déclinaison des contenus sur l'ensemble des fenêtres. Ce partenariat permet un partage des revenus générés par les nouvelles plateformes plutôt que le paiement à l'avance de sommes par TVA pour des exploitations qui ne présentent pour le moment aucune perspective de revenus. La seconde de ces sources de financement doit provenir d'un rééquilibre dans le système canadien de radiodiffusion afin de permettre aux télévisions généralistes d'avoir accès à des redevances pour la distribution de leur signal.
La preuve n'est plus à faire que la télévision généraliste devrait avoir un égal accès aux redevances actuellement réservées aux chaînes spécialisées. Mais nous nous objectons à ce que ces redevances soient déterminées et imposées par le CRTC et qu'elles viennent ainsi s'additionner automatiquement à la facture que doit défrayer le citoyen. Aucune personne sensée n'oserait aujourd'hui proposer d'imposer aux citoyens un fardeau financier supplémentaire pour recevoir des services auxquels ils ont déjà accès.
Nous proposons plutôt de rééquilibrer le système en laissant la détermination du niveau des redevances à la libre négociation entre les diffuseurs, qu'ils soient généralistes ou spécialisés, et les entreprises de distribution. Dans ce contexte, le prix juste et raisonnable pour la distribution d'un signal serait davantage fonction des résultats d'auditoire et de l'intérêt des consommateurs pour le service proposé, plutôt que fonction de prix déterminés par les plans d'affaires des entreprises soumis il y a plusieurs années au CRTC et qui n'ont aucune assise avec les nouvelles réalités.
On peut facilement convenir que certaines aberrations doivent être corrigées. Par exemple, il serait assez logique qu'un service d'information continue comme LCN, qui a des résultats d'audience supérieurs à ceux de son concurrent RDI, ait accès à des redevances assez semblables. Or, ce n'est pas le cas aujourd'hui. RDI reçoit un dollar par mois par abonné, alors que LCN ne reçoit en moyenne que 46 ¢ par mois par abonné.
Finalement, je le répète, le CRTC doit accélérer le processus de déréglementation de la télévision généraliste. Il doit questionner les obligations faites à la télévision généraliste de recourir à la production indépendante et accepter de considérer les frais de licence payés par la télévision généraliste comme étant de réels investissements permettant d'exploiter, sur l'ensemble des plateformes de diffusion, les droits de programmes dont elle a fait des succès. Le CRTC doit revoir toute son approche qui vise à intervenir par quotas, par choix de programmes dits prioritaires et qui oriente les investissements que consent la télévision généraliste et fait en sorte que les investissements dans le contenu le sont souvent en pure perte et avec pour premier objectif de remplir des obligations réglementaires.
Depuis près de 60 ans, notre modèle d'affaires s'est construit sur une foi inébranlable dans le contenu et la culture émanant des gens d'ici. Nous y contribuons massivement, non seulement en soutenant la production originale, mais en lui assurant un très grand rayonnement. Nos filiales diffusent et distribuent ce contenu en le déclinant sur un ensemble de médias ou de plateformes à l'échelle du pays.
Pour l'exercice 2008, ce sont plus de 370 millions de dollars que Quebecor Media a investis dans le développement, la création, la production, la diffusion et la promotion de contenu canadien. Par ses investissements, Quebecor Media se hisse au rang de premier producteur privé de contenu original au pays.
Je vous remercie de votre attention.