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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 035 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 27 mars 2007

[Enregistrement électronique]

(1110)

[Traduction]

    Je déclare ouverte cette 35e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Aujourd'hui, nous examinons la question des produits de contrefaçon.
    Je souhaite la bienvenue à nos cinq témoins. Vous aurez l'occasion de nous parler un petit peu de vous. Je présume que vous allez tous faire un exposé liminaire d'environ 10 minutes.
    Nous allons commencer par Mme Nancy Segal, directrice adjointe de la Politique commerciale sur la propriété intellectuelle, de l'information et de la technologie, au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. J'espère avoir bien indiqué votre titre.
    Je vous remercie.
    Bienvenue au comité. Vous avez la parole.
    Je vous remercie.
    Je suis ravie d'être parmi vous et d'avoir aujourd'hui l'occasion de m'adresser aux membres du comité.

[Français]

    Ma direction préside le groupe de travail interministériel sur les questions de propriété intellectuelle. Ce groupe de travail est constitué de 10 ministères et organisations qui ont tous un intérêt ou des responsabilités en matière de droits de propriété intellectuelle, ce qui explique le nombre de fonctionnaires présents ici aujourd'hui.

[Traduction]

    J'ai l'intention de vous donner un aperçu général du problème, d'indiquer brièvement en quoi ont consisté les efforts internationaux visant à combattre la contrefaçon et le piratage, et d'expliquer l'objet du groupe de travail.
    Mon collègue du ministère de la Justice, Cal Becker, décrira l'actuel régime canadien en matière de droits de propriété intellectuelle. Le surintendant principal de la GRC, Mike Cabana, vous parlera de la répression des activités criminelles dans ce domaine. Kimber Johnston, de l'Agence des services frontaliers du Canada, vous parlera des procédures au civil et des mesures de protection frontalières. Enfin, Diana Dowthwaite, de Santé Canada, vous entretiendra de questions liées à la santé et à la sécurité. Ensuite, nous serons à votre disposition pour répondre à vos questions.
    Premièrement, la contrefaçon et le piratage constituent un problème croissant d'envergure mondiale. Bien que ceux qui s'opposent à des mesures plus énergiques de protection des droits de propriété intellectuelle prétendent qu'il s'agit de crime sans victime qui ne pose problème que dans les pays riches, ce n'est pas tout à fait exact.
    Par exemple, les produits pharmaceutiques contrefaits représentent au plus 1 p. 100 de l'offre globale de médicaments. Par contre, dans certains pays développés, l'offre de médicaments est constituée de produits contrefaits dans une proportion qui peut atteindre 50 p. 100, et qui présente une menace beaucoup plus importante pour la santé et la sécurité de leurs sociétés tout en entraînant des incidences financières plus graves pour l'économie.
    De plus, certains produits contrefaits, tels que les garnitures de freins pour automobiles faites de sciure de bois, des produits électriques qui ne respectent pas les normes de sécurité, de même que tout un éventail d'autres produits, suscitent des préoccupations.
    Je vais demander à mon collègue de la GRC d'aborder cette question et de vous parler d'autres nouvelles tendances à cet égard dans le cadre de son exposé sur les activités de répression.
    La contrefaçon et le piratage attirent à présent l'attention de la communauté internationale, comme en témoigne l'importance accordée à cette question dans le cadre du Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité, ou PSP, du G8, de l'OCDE, de l'APEC, de l'EMD, de l'OMC, et de l'OMPI.
    Par exemple, en vertu du PSP, nous visons une coopération plus étroite entre le Canada, les États-Unis et le Mexique dans le cadre d'initiatives visant à protéger les droits de propriété intellectuelle et à sensibiliser le public à l'importance de ces questions. Le G8 joue un rôle de chef de file dans ce domaine en traitant la question des droits de propriété intellectuelle comme une de ses principales priorités. L'OCDE a entrepris de mesurer les effets économiques de la contrefaçon et du piratage. L'APEC encourage les experts en PI de ses pays membres à discuter ensemble des pratiques exemplaires et à en assurer l'échange. L'Organisation mondiale des douanes discute actuellement d'instruments qui permettront aux autorités douanières d'améliorer leurs efforts pour réprimer la contrefaçon et le piratage. L'Organisation mondiale du commerce fournit à ses membres une tribune pour la discussion des aspects commerciaux des droits de propriété intellectuelle. Et l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle constitue un forum pour l'ensemble des pays souhaitant s'attaquer aux problèmes liés au cadre juridique international.

[Français]

    Ceci ne représente que le côté multilatéral. Les activités et les intérêts bilatéraux sont pareillement axés sur la question. Les États-Unis ont affecté à cette question d'importantes ressources dans le cadre de leurs efforts de diplomatie bilatéraux avec des pays précis, dont le Canada.

[Traduction]

    Le Canada a figuré sur la liste d'alerte spéciale 301 de 2006 de l'United States Trade Representative (USDR) qui reflète essentiellement les dictats de l'industrie américaine et dont se servent les représentants commerciaux des États-Unis pour faire pression sur leurs partenaires commerciaux au sujet des problèmes de PI. Le Canada est au bas de la liste depuis 11 ans. Nous sommes en compagnie de la Communauté européenne, de l'Italie, et du Mexique, parmi d'autres pays figurant sur cette même liste.
    Des facteurs à la fois intérieurs et internationaux ont donc amené le gouvernement du Canada à réexaminer son régime. C'est là qu'intervient notre groupe de travail interministériel.
    Dix organismes et ministères clés sont actuellement en train d'examiner les problèmes en vue d'analyser et de définir des solutions possibles. Ce groupe examine diverses options qui permettraient d'améliorer notre régime, et qui compte rédiger des recommandations pour examen par les responsables appropriés. Nous avons généralement réalisé des progrès, mais ce travail n'est pas encore terminé.

[Français]

    En tant que représentants du gouvernement, nous faisons appel à des groupes du secteur privé et travaillons en étroite collaboration avec eux. Il s'agit entre autres de la Chambre de commerce du Canada et du Réseau canadien de lutte contre la contrefaçon. Nous consultons régulièrement ces groupes au moyen de sondages, de tables rondes et de séminaires. Ce partenariat est essentiel pour mieux comprendre nos intérêts respectifs et nos préoccupations.
(1115)

[Traduction]

    Le Canada est d'avis que la collaboration entre les pays — pas seulement entre les gouvernements mais entre les secteurs industriels également — est tout à fait essentielle. Nous parlons ici d'un problème mondial.
    Je conclus là-dessus et je cède la parole à mon collègue du ministère de la Justice, Cal, qui pourra vous expliquer l'actuel régime de protection des droits de propriété intellectuelle.
    Vous avez la parole, monsieur Becker.
    Le ministère de la Justice assure un soutien juridique aux ministères ayant la principale responsabilité de l'application des droits de propriété intellectuelle.
    Vous avez entendu Nancy parler de produits contrefaits et piratés. Mais avant de vous décrire le cadre juridique, je me disais qu'il serait peut-être utile de vous expliquer la distinction entre les produits contrefaits, d'une part, et les produits piratés, d'autre part. Je comprends que les audiences d'aujourd'hui portent sur la contrefaçon, mais il existe, à toutes fins pratiques, des équivalences en matière d'application.
    Lorsque nous parlons de produits piratés, par exemple, nous parlons de produits qui constituent une violation commerciale du droit d'auteur, c'est-à-dire de DVD, de reproduction illégale de films, de logiciels et de musique. Par contre, les produits contrefaits sont des produits qui constituent une contrefaçon commerciale d'une marque de commerce. Donc, la contrefaçon est liée aux marques de commerce, alors que le piratage est lié au droit d'auteur.
    Les mesures d'application se ressemblent bien souvent, mais relèvent de régimes législatifs différents, selon qu'il s'agit de contrefaçon ou de droit d'auteur, et je pense que vous constaterez aujourd'hui que la plupart des témoins d'aujourd'hui ont lié les deux dans leurs remarques liminaires. Autrement dit, nous essayons de combattre à la fois la contrefaçon et le piratage.
    Aujourd'hui, je voudrais vous présenter les grandes lignes du régime juridique qui visent les produits contrefaits et piratés. Dans un premier temps, il faut se familiariser avec — et vous m'excuserez l'usage de ce terme — l'architecture du régime canadien d'application des mesures douanières.
    Le personnel de l'Agence des services frontaliers du Canada est chargé d'exécuter les lois d'autres ministères relativement aux marchandises interdites, contrôlées ou réglementées. Par exemple, la Loi sur les produits dangereux est une loi dont Santé Canada est responsable, mais les douanes sont chargées d'appliquer les mesures douanières à la frontière au nom d'un ministère client. Ainsi le personnel douanier applique la Loi sur les produits dangereux à la frontière au nom du ministère client pour lequel, dans la loi qui relève de sa responsabilité, les produits font l'objet d'une interdiction, d'un contrôle ou d'une réglementation.
    Il importe de comprendre que les douanes ont le même éventail de pouvoirs et de privilèges en matière d'application des mesures douanières à la frontière à l'égard de l'ensemble de leurs ministères clients. Autrement dit, pour ne citer que cet exemple, les interdictions visant les produits dangereux ne sont pas explicitées dans une loi douanière. Les douanes s'appuient sur des procédures et privilèges du protocole standard en ce qui concerne l'application des mesures touchant les produits dangereux. L'interdiction proprement dite relative aux produits dangereux est inscrite dans la loi du ministère parrain — en l'occurrence, Santé Canada.
    Il est bien important de comprendre cette réalité car, si des modifications devaient être apportées aux dispositions relatives aux produits contrefaits ou piratés, ces articles modifiés ne se trouveraient pas normalement dans la Loi sur les douanes. Elles se trouveraient plutôt dans les lois qui relèvent d'Industrie Canada dans cet exemple-ci, ce ministère étant responsable, dans une large mesure, de l'application de la Loi sur le droit d'auteur et de la Loi sur les marques de commerce. Cette même architecture existe aux États-Unis, en Australie, à la Communauté européenne et au Royaume-Uni.
(1120)
    Il faut également comprendre qu'au Canada, nous n'interdisons pas à l'heure actuelle l'introduction de produits contrefaits ou piratés. Ainsi le rôle de l'Agence des services frontaliers du Canada est relativement limité en ce qui concerne les produits contrefaits et piratés.
    Je précise qu'il existe des procédures permettant aux titulaires de droits de déposer une requête devant un tribunal de compétence supérieure afin d'obtenir une ordonnance autorisant l'interception des produits à la frontière. Ainsi, l'Agence des services frontaliers peut être autorisée à intercepter certains produits par suite d'une ordonnance de la cour. Elle a également un rôle à jouer relativement à l'application du droit criminel par la GRC. Par exemple, il est possible que la GRC communique des renseignements à l'ASFC au sujet de présumées importations de produits contrefaits ou piratés. Dans de tels cas, l'Agence des services frontaliers joue un rôle en établissant éventuellement un avis de signalement, en interceptant les produits concernés, et en en informant la GRC. À ce moment-là, la GRC procède à la saisie des produits et il peut y avoir ou non des poursuites criminelles.
    Le travail de l'Agence des services frontaliers du Canada peut également comprendre le fait de signaler à la GRC l'arrivée de chargements de présumés produits contrefaits ou piratés. Dans ces cas-là, la GRC peut décider d'être présente, de procéder à la saisie des produits et d'entamer des poursuites criminelles. Ceci dit, le rôle premier de l'ASFC consiste à exécuter les ordonnances de la cour lorsqu'il s'agit d'affaires civiles et de collaborer avec la GRC, dans le contexte de ses enquêtes criminelles, en l'informant de l'arrivée de chargements ou de cargaisons suspects ou encore en les interceptant grâce aux renseignements fournis par la GRC.
    Notre régime de propriété intellectuelle confère à notre personnel de l'Agence des services frontaliers un rôle moins important par rapport aux autres pays que j'ai mentionnés. Aux États-Unis, par exemple, l'agence des services frontaliers est l'autorité compétente lorsqu'il s'agit de déterminer si les produits sont contrefaits ou piratés, et cette dernière a le pouvoir de saisir les produits, de les stocker et de les détruire, et ce aux frais du gouvernement américain.
    Il faut bien comprendre que le gouvernement américain lui-même constitue une source de propriété intellectuelle considérable. Les intérêts des secteurs d'activité à forte production de propriété intellectuelle coïncident avec ceux du gouvernement américain. On dit que cette industrie représente une valeur de 810 milliards de dollars aux États-Unis. On dit que leurs produits protégés par le droit d'auteur constituent leurs plus importantes exportations, et vous comprendrez donc facilement que le gouvernement américain est prêt à faire le nécessaire pour faire respecter les droits de propriété intellectuelle, étant donné que, le plus souvent, ce sont des droits américains de propriété intellectuelle.
    Les autres administrations, soit l'Union européenne, le Royaume-Uni et l'Australie, tendent à faciliter la protection des droits de propriété intellectuelle par le titulaire des droits. En général, dans ces autres territoires ou pays que je viens de mentionner, les coûts d'exécution sont à la charge, non du gouvernement, mais des détenteurs. Ces derniers doivent donc supporter les coûts qu'entraîne le fonctionnement des régimes d'inscription, l'entreposage des produits contrefaits et piratés et la destruction de ces produits. De façon générale, il appartient aux détenteurs des droits de supporter ces coûts par le biais d'un régime d'inscription prévoyant également des cautionnements, des garants et des garanties.
(1125)
    Pour résumer, le Canada n'a pas conféré à son Agence de services frontaliers des pouvoirs importants relativement aux produits contrefaits ou piratés; d'autres pays en accordent davantage. La seule vraie différence entre ces pays ou territoires, c'est-à-dire entre les États-Unis, d'une part, et l'Union européenne, le Royaume-Uni et l'Australie, d'autre part, est l'étape à laquelle on détermine que les produits sont ou non contrefaits ou piratés. Le deuxième point décisionnel concerne le fait de savoir qui va supporter les coûts d'exécution.
    Comme je vous l'ai déjà dit, aux États-Unis, les intérêts des détenteurs de droits de propriété intellectuelle sont jugés correspondre tout à fait à ceux du gouvernement américain. Les autres administrations considèrent cette question du point de vue du degré de soutien gouvernemental qui convient pour permettre l'application de droits qui sont essentiellement des droits économiques privés. Comme je viens de le dire, aux États-Unis, le gouvernement américain soutient le système; dans d'autres pays, les coûts sont essentiellement à la charge des détenteurs de droits.
    Voilà donc ce en quoi consiste notre régime, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Becker.
    Madame Segal, est-ce bien M. Cabana qui est le prochain sur votre liste?
    En effet.
    Je vous remercie.
    Monsieur Cabana, pourriez-vous également nous donner un bref aperçu de vos activités?
    Monsieur le président, honorables membres du comité, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui.
    Je m'appelle Mike Cabana, et je suis le directeur général de l'Intégrité frontalière de la GRC. L'Intégrité frontalière comprend le programme d'exécution fédéral, dont découle le mandat d'exécution de la GRC en matière de contrefaçon.
    Après mon bref exposé liminaire, je serai à votre disposition pour répondre à toutes vos questions, comme Mme Segal vous l'a déjà dit.
    On dit des crimes contre les droits de propriété intellectuelle qu'ils sont le fait au XXIe siècle, et j'estime que cette affirmation est assez juste. Il y a 10 ans, on ne percevait pas les crimes contre les droits de propriété intellectuelle comme un problème criminel grave au Canada. La contrefaçon frappait principalement les articles de luxe, comme les montres Rolex ou les vêtements griffés. Les marchandises contrefaites étaient écoulées surtout dans les marchés aux puces et la plupart des consommateurs savaient ce qu'ils achetaient. Dans la population et même chez les policiers, beaucoup croient qu'il en est toujours ainsi, mais en fait, cette perception ne colle plus à la réalité.
    La situation a énormément changé au cours des dernières années. On a saisi au Canada des marchandises contrefaites dans pratiquement toutes les catégories de produits que vous pouvez imaginer — des pièces d'autos, des appareils électriques, des produits pharmaceutiques, des aliments, des cosmétiques, et j'en passe. Il est arrivé que des marchandises contrefaites soient écoulées dans les rayons de grands magasins. La plupart des commerçants au détail ne le savent habituellement pas et vendent alors, à leur insu, des marchandises contrefaites à des consommateurs qui ne se doutent de rien. Or, bon nombre de ces produits présentent des risques graves pour la santé et la sécurité. Certains pourraient même avoir contribué à des décès au Canada, notamment des produits pharmaceutiques contrefaits.
    Le cas des médicaments contrefaits présente en effet une difficulté particulière, puisque la plupart des gens se les procurent par Internet. La GRC participe déjà à plusieurs enquêtes de longue haleine qui sont en cours sur des cyberpharmacies. Pour la police, ces cas sont très difficiles, parce que les compagnies affichent une adresse au Canada, mais le serveur est en fait dans un autre pays.
    Les piles contrefaites posent un autre type de problème. Il n'est pas rare qu'elles coulent et certaines ont même explosé. Bien qu'on ne puisse pas affirmer que toutes les piles qui ont coulé ou explosé étaient des contrefaçons, la GRC sait qu'il y a eu plusieurs cas semblables signalés à Santé Canada, et qu'il s'agissait souvent de jouets — il y a eu huit cas où des enfants ont été brûlés.
    J'ai un emballage vide ici, et je peux vous dire que j'ai personnellement été exposé à ce risque. J'ai ici un paquet de piles contrefaites qui faisaient partie du même chargement, d'après ce qu'on m'a dit, que celui qui contenait les piles qui ont explosé dans le tiroir de mon bureau. C'est assez surprenant de voir l'intensité de la déflagration.
    Au Québec, des enquêteurs ont saisi plus de deux tonnes et demie de piles contrefaites, dans la seule année 2005. L'entreposage et la destruction de ces piles posent tout un problème. Pourquoi créer sciemment des produits présentant un tel danger? Par cupidité, pour l'amour de l'argent, et parce que le risque est faible. Nos rapports de renseignements stratégiques nous révèlent que les marges de profit sont très considérables et que les risques de se faire prendre — et d'être incarcéré quand on se fait prendre — sont très faibles. Si faibles, en fait, qu'au Canada, pratiquement tous les grands groupes du crime organisé et même des groupes de terroristes, comme l'a révélé un dossier particulier, se livrent très activement à la fabrication, à l'importation et à la distribution de marchandises contrefaites.
    Le secteur privé estime que l'impact de cette activité sur l'économie légitime et sur les divers ordres de gouvernement serait de 20 à 30 milliards de dollars par année. Bien que la GRC ne soit pas prête à avancer un chiffre exact, compte tenu de ce que nous avons vu de ce crime, je n'hésite pas à dire que l'impact est certainement de l'ordre des milliards de dollars et que sa croissance ne fait aucun doute.
    Le Canada n'est pas le seul pays frappé par ce phénomène. Interpol affirme qu'une part importante du commerce mondial — un chiffre qui représente des centaines de milliards de dollars — repose dorénavant sur des marchandises contrefaites. C'est en partie pour ces raisons que la GRC a retenu l'intégrité économique, qui concerne, entre autres, les crimes contre les droits de propriété intellectuelle, parmi ses cinq priorités stratégiques.
    Nous réalisons des progrès. La GRC mène environ 400 enquêtes sur des crimes contre les droits de propriété intellectuelle chaque année et le nombre d'accusations portées est passé d'une moyenne de 400 ces dernières années à plus de 700 en 2005.
(1130)
    La GRC copréside depuis cinq ans l'Interpol Intellectual Property Crime Action Group — groupe qui, depuis le siège social d'Interpol à Lyons, en France, se penche sur les actions à prendre devant la criminalité contre la propriété intellectuelle. Y participent les représentants d'organisations policières et du secteur privé de tous les coins du monde, qui s'emploient à mettre en oeuvre des initiatives — comme une banque de données des droits de propriété intellectuelle internationaux — afin d'améliorer la coordination de la répression.
    Les autorités policières reconnaissent qu'elles doivent collaborer de plus près afin de cibler les grands réseaux du crime organisé qui ont souvent des relations à l'internationale. Récemment, la GRC s'est associée au Canadian Anti-Counterfeiting Network dans une campagne de sensibilisation publique pour laquelle ont été produites des annonces radiophoniques et des affiches où l'on explique comment reconnaître les marchandises contrefaites.
    La GRC travaille aussi avec plusieurs ministères, notamment l'Agence des services frontaliers du Canada et Santé Canada, pour enquêter sur ces crimes. Les services de police municipaux reconnaissent l'importance de ces enquêtes. Il y a eu de grosses saisies et de nombreuses accusations ont été portées.
    Cela dit, il reste encore beaucoup à faire, et bien des obstacles à surmonter.
    Pour le moment, nous n'avons pas le pouvoir de saisir les produits de la criminalité contre les droits de propriété intellectuelle. La Loi sur les marques de commerce ne prévoit pas d'infractions, de sorte que nous devons faire la preuve qu'il y a eu fraude pour porter des accusations de contravention en vertu du Code criminel. Souvent les criminels importent séparément les produits, les étiquettes volantes et les étiquettes de produits, et aucune disposition législative n'interdit cette pratique.
    Les peines imposées par les tribunaux pour le moment ne dissuadent pas vraiment les criminels et il n'est pas rare qu'on impose des peines à répétition à un même groupe pour des crimes contre les droits de propriété intellectuelle, puisqu'à leurs yeux, les amendes ne représentent en fait que des frais d'exploitation.
    Bien que l'ASFC veuille aider et que son aide soit appréciée, on ne peut que déplorer qu'elle n'ait pas le pouvoir nécessaire aux points d'entrée pour stopper ces marchandises, pas plus que la GRC ne l'a entre les points d'entrée, puisque les marchandises contrefaites ne sont pas illégales au sens de la Loi sur les douanes.
    Les ressources sont aussi tout un défi. Exception faite de petites équipes de projet conjointes GRC-ASFC à Montréal et à Toronto, il n'y a aucune équipe chargée d'enquêter exclusivement sur les crimes contre les droits de propriété intellectuelle. À Vancouver, pourtant, le nombre de conteneurs de marchandises de contrefaçon portés à la connaissance de la GRC par l'ASFC aux fins d'enquête est passé d'environ 50 à 60 en 2002-2003 à plus de 300 en 2005 — et cela, précisons-le, dans le contexte actuel où l'ASFC ne procède pas à des recherches systématiques de telles marchandises, mais les trouve dans le cours de ses activités normales. D'autres grandes villes présentent des statistiques semblables.
    Or, la plupart des enquêtes de cette nature devraient se dérouler sous forme de projets, afin d'essayer de démanteler le groupe en cause qui a vraisemblablement des antennes internationales; malheureusement, les ressources disponibles sont tout simplement insuffisantes pour permettre d'enquêter sur tout. Dans la plupart des cas, il n'y a donc pas d'enquête criminelle et les marchandises sont tout simplement abandonnées par l'importateur, aux yeux duquel il s'agit encore une fois de simples frais d'exploitation.
    Pour terminer sur un point positif, je me réjouis de la plus grande conscience du phénomène dans la population. En outre, le gouvernement fédéral a constitué un groupe de travail interministériel sur les droits de propriété intellectuelle, dirigé par le MAECI, auquel participent tous les intéressés du gouvernement et qui est chargé de déterminer où se situent les lacunes dans les textes de loi et dans les ressources, et de recommander des façons de les combler.
    Là-dessus, je tiens à remercier le comité de m'avoir donné l'occasion de parler des crimes contre les droits de propriété intellectuelle. Il est important et constructif de faire progresser la compréhension de ce problème et nous vous sommes reconnaissants d'avoir eu aujourd'hui l'occasion de le faire.
    Je vous remercie.
(1135)
    Merci beaucoup.
    Madame Johnston, comptez-vous également faire un exposé liminaire?
    Oui, monsieur le président. Je suis consciente du fait que mes collègues de la GRC et du ministère de la Justice ont déjà abordé la question de l'application des mesures douanières à la frontière, et je vais donc être brève.
    D'abord, je tiens à vous remercier de l'occasion qui nous est donnée de parler de la façon dont l'Agence des services frontaliers du Canada aide à combattre la prolifération de produits contrefaits et piratés. Comme on vous l'a déjà expliqué, dans un premier temps, nous avons un recours civil. À la fois la Loi sur le droit d'auteur et la Loi sur les marques de commerce permettent à un titulaire de droits d'obtenir une ordonnance de la cour ordonnant à l'ASFC de repérer et de retenir des chargements de produits soupçonnés de violer leurs droits de propriété intellectuelle.
    De plus, l'ASFC peut retenir les produits qui constituent une violation des droits de propriété intellectuelle d'un détenteur en vertu du droit criminel. La Loi sur le droit d'auteur prévoit des sanctions criminelles, et il en va de même pour le Code criminel.
    Quand la GRC nous communique des renseignements au sujet d'importations qui pourraient éventuellement prouver qu'une infraction criminelle a été commise, l'Agence établit un avis de signalement au sujet des produits en question. Au moment de l'interception des chargements, l'Agence saisit les produits pour les fins de la preuve et les transfert à la GRC, qui entame des poursuites.
    Enfin, si l'ASFC, au moment d'examiner un chargement pour les fins de l'application de la Loi sur les douanes, trouve des produits qui peuvent enfreindre éventuellement des droits de propriété intellectuelle, nous demandons à la GRC de nous dire si ces derniers répondent à leurs critères relativement aux poursuites judiciaires, et dans l'affirmative, les produits sont saisis pour les fins de la preuve.
    Toutefois, pour des raisons pratiques, la GRC ne peut pas intenter des poursuites criminelles chaque fois que des produits sont soupçonnés de violer des droits de propriété intellectuelle. Quand le chargement n'est pas suffisamment important pour justifier des poursuites pénales, l'importateur est informé que l'authenticité des produits est mise en doute et, dans de tels cas, il décidera le plus souvent d'abandonner les produits.
    Voilà ce qui m'amène à vous parler d'un des défis auxquels nous sommes confrontés en tant qu'agence. La Loi sur les douanes autorise l'ASFC à retenir des produits qui sont interdits, contrôlés, ou réglementés par les lois du Parlement jusqu'à ce qu'elle soit convaincue qu'ils ont été traités conformément à la loi applicable. À l'heure actuelle, toutefois, aucune loi ne précise que les produits contrefaits constituent des produits interdits, contrôlés ou réglementés.
    Aux termes de la Loi sur le droit d'auteur, les produits à proprement parler ne sont pas interdits. Par contre, des sanctions sont prévues pour celui qui fabrique, vend ou importe sciemment des produits contrefaits pour des fins de vente. La Loi sur les marques de commerce est également muette sur ce point. Étant donné qu'il n'existe aucune loi complémentaire précisant que les produits contrefaits sont interdits, ces derniers ne peuvent être ciblés ou retenus par l'ASFC en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par la Loi sur les douanes.
    Par contre, comme on vous l'a déjà mentionné, l'ASFC travaille de concert avec ses partenaires interministériels pour explorer diverses possibilités qui permettront de répondre aux préoccupations grandissantes concernant les risques que présentent les produits contrefaits non sécuritaires, les pertes de revenu qu'ils entraînent, et la participation des groupes du crime organisé à cette activité.
    Je vous remercie, et je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Et enfin, du ministère de la Santé, nous accueillons Mme Dowthwaite.
    Bonjour. Je m'appelle Diana Dowthwaite et je suis directrice générale responsable de l'inspectorat de la Direction générale des produits de santé et des aliments de Santé Canada.
    Je voudrais commencer par vous donner un bref aperçu du rôle et du mandat de l'inspectorat. Le rôle de l'inspectorat consiste à exécuter un programme national de conformité et d'exécution aux termes de la Loi sur les aliments et drogues, et ce à l'égard de tous les produits qui relèvent du mandat de la Direction générale des produits de santé et des aliments, à l'exception des produits réglementés à titre d'aliments. Cette catégorie comprend les produits pharmaceutiques, les médicaments vétérinaires, les produits biologiques, les produits de santé naturels, et les instruments médicaux. Nous dispensons ces services dans l'ensemble du Canada, et nous avons des inspecteurs en Colombie-Britannique, au Manitoba, en Ontario, au Québec, et au Canada atlantique.
    Nous avons quatre fonctions centrales clés qui nous aident à nous assurer que les produits de santé vendus sur le marché canadien sont légalement autorisés à la vente et qu'ils sont sécuritaires: premièrement, notre rôle proactif dans la promotion de la conformité par l'entremise de nos différents programmes d'inspection, en vertu desquels les entreprises qui comptent mener certaines activités, telles que la fabrication, l'importation, l'emballage, l'étiquetage, le commerce de gros, les essais, et la distribution des médicaments au Canada, sont tenues de faire l'objet d'une inspection avant d'obtenir un permis d'exploitation. Ces entreprises font l'objet d'une inspection régulière en fonction d'un cycle qui peut varier entre deux et quatre ans, selon la nature de leurs activités. Ces inspections sont liées à nos conditions d'obtention d'un permis.
    Deuxièmement, nous avons un rôle réactif par l'entremise de nos activités de vérification de la conformité et d'enquête, dans le cadre desquelles nous cherchons activement à atténuer les risques en nous appuyant sur les renseignements obtenus de sources différentes, tels que les plaintes de consommateurs, l'industrie ou d'autres autorités de réglementation. C'est dans ce domaine que nous effectuons la majeure partie de notre travail relatif aux produits de santé contrefaits.
    En troisième lieu, nous avons la capacité, grâce à nos deux laboratoires certifiés ISO en Ontario et au Québec, d'effectuer des analyses de laboratoire, qui représentent un élément critique des enquêtes que nous menons pour vérifier la conformité. Cette activité est d'autant plus pertinente dès lors qu'il s'agit d'enquêtes sur les produits contrefaits.
    Enfin, nous exécutons un programme d'agrément des établissements en vertu des permis d'exploitation aux établissements qui fabriquent des médicaments ou des dispositifs médicaux relativement aux activités que je viens de mentionner.
    Afin d'arriver plus facilement à remplir notre mandat et à réduire la possibilité que des produits de santé contrefaits s'introduisent dans la chaîne d'approvisionnement, nous travaillons avec d'autres autorités policières et organismes de réglementation, tels que la GRC et l'ASFC, de même que les ordres provinciaux de pharmaciens. Nous travaillons également avec nos partenaires internationaux, par l'entremise de protocoles d'entente, de traités et d'autres tribunes internationales, en vue d'accroître notre capacité de détection et de recensement des produits de santé contrefaits.
    Les produits contrefaits présentent un risque pour la santé et la sécurité du public, étant donné qu'ils peuvent prévoir la mauvaise dose, les mauvais ingrédients, des additifs dangereux, ou pas de principes actifs du tout, ce qui peut éventuellement entraîner des risques graves pour la santé des patients.
    Ces produits constituent une nouvelle tendance relativement à la chaîne d'approvisionnement des pays développés, et je peux vous affirmer que c'est même le cas au Canada. Au cours de l'été de 2005, la GRC a déposé des accusations contre deux pharmacies distinctes qui pratiquaient la vente au détail de produits pharmaceutiques contrefaits. Dans ces deux cas, étant donné que la contrefaçon constitue une activité criminelle, l'inspectorat a travaillé de pair avec la GRC et le collège des pharmaciens approprié en vue de nous faire profiter de leur expertise en matière d'enquête et d'analyse laboratoire, et nous conseiller au sujet de la Loi sur les aliments et drogues.
    Les incidents impliquant les produits de santé contrefaits sont fort complexes et supposent souvent la participation de nombreux organismes intérieurs et internationaux de réglementation et policiers. Au Canada, la vente de produits de santé contrefaits constitue une violation de la Loi sur les aliments et drogues, puisque ces produits font partie de la catégorie des produits non approuvés. La vente de tels produits peut également enfreindre d'autres lois, telles que la Loi sur le droit d'auteur et le Code criminel, et en conséquence, la responsabilité des enquêtes peut éventuellement être renvoyée aux autorités réglementaires.
    Il est tout à fait impossible, comme vous l'ont fait remarquer mes collègues, qu'une seule entité réussisse à elle seule à combattre la contrefaçon. Ce problème exige l'application d'une approche multipartenaire et multinationale.
    L'inspectorat est actuellement en train d'élaborer une stratégie anticontrefaçon visant à réduire la possibilité que des produits de santé contrefaits s'introduisent dans la chaîne d'approvisionnement canadienne; à accroître notre capacité de détection et de repérage; à sensibiliser les gens aux risques qui y sont associés; et à réduire les mesures qui facilitent la contrefaçon de produits de santé.
    Comme c'est le cas pour la GRC, à l'heure actuelle, nous faisons face à de nombreux défis. Par exemple, les mécanismes actuels de surveillance réglementaire sont dépassés. La Loi a plus de 50 ans, et la Loi sur les aliments et drogues, de même que le règlement d'application, ne prévoient aucune interdiction touchant directement la contrefaçon.
(1140)
    De plus, les peines que prévoit la Loi sont davantage axées sur les risques pour la santé et donc moins sur les sanctions à proprement parler, si bien qu'elles peuvent ne pas offrir une désincitation suffisante aux activités frauduleuses, comme la contrefaçon des produits de santé. Comme nous le savons tous, les poursuites supposent un gros investissement de ressources, et nous ne sommes pas équipés pour le moment dès lors qu'il s'agit de repérer les cas de fraude; c'est là que la GRC nous fait bénéficier de son aide. Nous nous efforçons de moderniser notre cadre de réglementation afin de pouvoir contrer plus efficacement ce genre de violations.
    À l'heure actuelle, nous n'avons ni l'expérience ni les ressources nécessaires pour faire enquête sur les intentions des parties concernées. Par le passé, notre approche a toujours été axée sur l'atténuation des risques pour la santé là où les parties réglementées ont la responsabilité de prendre les mesures qui s'imposent pour se conformer aux exigences législatives et réglementaires. Mais, d'après ce que nous observons des tendances actuelles en matière de contrefaçon, les auteurs de ces actes ont non seulement des intentions malhonnêtes, mais ils ne tiennent aucun compte des exigences du régime de réglementation.
    À l'heure actuelle, nous menons nos activités dans un environnement caractérisés par l'expansion rapide des échanges mondiaux, si bien que nous assistons à la création de chaînes d'approvisionnement de médicaments complexes, de ventes accrues par Internet de produits de santé meilleur marché et peut-être contrefaits, et à un volume plus élevé d'importations de produits de santé, dont les caractéristiques trompeuses compliquent grandement l'évaluation de leur validité.
    Les mécanismes actuels de surveillance réglementaire, à eux seuls, ne sont pas suffisants pour permettre de contrer efficacement les menaces que présentent de tels produits. Protéger la santé et la sécurité des Canadiens est une responsabilité partagée par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, de même que les professionnels de la santé, l'industrie et les consommateurs. Notre stratégie anticontrefaçon doit permettre d'atténuer les risques que présentent les produits de santé contrefaits pour la santé et la sécurité des Canadiens. Elle mettra l'accent sur de nouveaux pouvoirs législatifs, un plan de sensibilisation des consommateurs et — c'est l'élément le plus important — la création de partenariats plus étroits entre les organismes de réglementation et l'industrie.
(1145)
    Merci beaucoup. Vous nous avez tous fait des exposés fort informatifs. C'est grandement apprécié. Et, bien entendu, vous avez tous insisté sur la nécessité d'améliorer les lois dans ce domaine.
    Madame Segal, avez-vous des remarques à faire en guise de conclusion?
    Non, je ne pense pas. Nous sommes prêts à répondre aux questions des membres du comité.
    Très bien. Conformément à notre pratique habituelle, nous allons maintenant ouvrir un tour de questions. Normalement l'opposition officielle dispose de sept minutes pour ouvrir la période des questions, et elle est suivie du Bloc québécois, du NPD, et des membres de la majorité.
    Encore une fois, je vous remercie.
    Nous allons commencer par M. Cullen.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je voudrais remercier tous les témoins qui se joignent à nous aujourd'hui.
    Je suppose que ce qui me dérange le plus, c'est le temps que nous investissons dans la recherche d'éléments de réponse, de solutions, et d'idées qui nous permettront de régler ce problème.
    C'est en 2005 que les États-Unis nous ont mis sur une liste d'alerte, et bien des mois auparavant, la Coalition anticontrefaçon de Washington a exhorté le gouvernement américain à désigner le Canada, ainsi que la Chine, comme une priorité en raison de leur bilan pitoyable en matière de protection des droits de propriété intellectuelle.
    En 2005, il y a eu cinq décès à Hamilton qui étaient liés — et j'ignore comment tout cela a fini par être réglé — à des médicaments contrefaits qui étaient des reproductions du produit pharmaceutique Norvasc. De plus, une femme est récemment décédée sur l'île de Vancouver à cause d'une pharmacie électronique.
    Nous parlons donc d'un problème qui nous est connu depuis un bon moment. En fait, d'après Interpol, entre 5 et 7 p. 100 des échanges mondiaux concernent à présent des produits contrefaits. L'Organisation mondiale de la santé affirme que les faux produits pharmaceutiques génèrent 36 milliards de dollars par année et, selon les estimations, ce montant passera à 75 milliards de dollars d'ici 2010.
    Pour ce qui est de la contrefaçon des marques de commerce — dans ma circonscription électorale, nous avons l'Association canadienne de normalisation — à l'heure actuelle, des produits arrivent au Canada —entre autres, ceux dont nous parlait le représentant de la GRC, à savoir des piles contrefaites, des produits électriques contrefaits, etc. — qui portent justement la marque d'accréditation de l'ACN.
    Au fonds, nous savons plus ou moins ce qu'il faut faire pour régler ce problème. Je ne cherche pas à simplifier à outrance, mais il me semble clair que nous devons absolument muscler notre Loi sur les marques de commerce. Il nous faut également des sanctions criminelles plus énergiques. Il paraît qu'il y a des gens à Montréal qui vont dans les cinémas avec des caméras très sophistiquées sur leurs cravates. Ces gens-là reproduisent le film de cette façon et, une heure plus tard, c'est déjà disponible sur DVD. Le crime organisé est impliqué là-dedans. Il est évident que les sanctions criminelles ne sont pas assez sévères à l'heure actuelle.
    Nous avons également une idée de ce qu'il faut faire en ce qui concerne l'Agence des services frontaliers du Canada. Nous avons parlé du fait que cette dernière n'a pas de mandat. Il lui faut justement un mandat, de même que les ressources nécessaires pour lui permettre de jouer un rôle qui n'est pas purement complémentaire — étant donné que c'est le mandat qu'elle a actuellement, c'est tout à fait normal — mais maintenant il convient de lui donner le mandat et les ressources que cela suppose de traiter directement le problème des produits contrefaits et piratés.
    Si les États-Unis ont cru bon de nous mettre sur une liste d'alerte et de nous classer au même rang que la Chine — avec tout le respect que je dois à la Chine — en raison de violation des droits de propriété intellectuelle, il me semble que c'est une indication qu'il convient à présent de prendre des mesures. J'ai peur pour la sécurité des Canadiens, qu'on parle de produits pharmaceutiques ou électriques.
    Je sais, évidemment — moi-même j'ai été impliqué en 2007 au moment où le groupe de travail examinait la question — que nous sommes au courant du problème depuis un moment. En fait, le problème des produits pharmaceutiques était connu de la GRC au moins en 2000, et je suis convaincu que cette dernière avait aussi prévenu le ministère.
    Donc, nous sommes au courant des problèmes. Je sais que l'implication d'autant de ministères rend la situation plus complexe, mais je me demande quand nous allons finalement définir des solutions et les mettre en application. J'espère que le gouvernement va déposer un projet de loi omnibus qui va apporter justement des solutions en ce qui concerne la Loi sur les marques de commerce, la Loi sur le droit d'auteur, les pouvoirs de l'Agence des services frontaliers du Canada, et les sanctions criminelles qui sont nécessaires. Quand allons-nous voir des mesures concrètes dans ce domaine?
(1150)
    Merci beaucoup.
    Je suis d'accord avec vous. Nous y travaillons depuis fort longtemps, et comme vous l'avez dit vous-même, c'est un problème très complexe.
    Au comité, nous nous efforçons justement d'en arriver à des solutions vraiment efficaces. Il s'agit de faire avancer ce dossier et d'établir un cadre de travail qui nous permettra de collaborer avec la communauté internationale et donc d'attaquer ce problème à une échelle mondiale.
    L'année dernière, nous avons réalisé des progrès considérables à la fois au Canada et à l'étranger. Au Canada, nous avons dialogué avec les principales parties intéressées canadiennes afin de connaître leurs vues, y compris l'Association canadienne de normalisation et d'autres acteurs de l'industrie à qui ce dossier tient à coeur et qui ont beaucoup d'expérience dans ce domaine. Nous avons analysé cette information de façon à éventuellement formuler des recommandations à soumettre à l'examen du gouvernement. À l'échelle internationale, en plus de participer aux discussions dans différentes tribunes internationales, nous examinons les mesures adoptées par d'autres pays. Cal vous a parlé d'autres régimes qui nous intéressent et que nous essayons d'évaluer, afin de voir quels éléments pourraient éventuellement être incorporés dans notre propre régime juridique et administratif.
    Donc, ce travail continue. Autour de la table, l'ensemble des ministères et organismes gouvernementaux sont d'accord généralement sur ce qu'il faut faire, et maintenant nous travaillons à peaufiner les détails. Nous allons proposer des mesures dans les plus brefs délais. Pour le moment, nous n'avons pas de calendrier précis.
    Vous avez fait mention de plusieurs éléments. Et nous examinons justement les possibilités que vous avez évoquées, pour ce qui est de modifier la Loi sur les marques de commerce, les pouvoirs de l'ASFC, la Loi sur le droit d'auteur, etc. Le fait que ce dossier soit complexe explique en partie la raison pour laquelle nous devons prendre le temps de bien assimiler tous les aspects du problème.
    En même temps, nous travaillons avec des collègues dans d'autres tribunes. Nous travaillons également à l'échelle internationale, comme vous l'ont dit nos collègues de la GRC. Il ne s'agit pas d'immobilisme de notre part. Nous nous attaquons aux problèmes au Canada et à l'étranger au mieux de nos compétences, et nous essayons de formuler les meilleures recommandations possible afin de faire progresser la situation.
    En ce qui concerne la liste d'alerte, je précise que le Canada ne reconnaît pas la liste d'alerte spéciale 301. En ce qui nous concerne, cette dernière repose sur des analyses qui ne sont ni fiables ni objectives. C'est un processus dicté exclusivement par l'industrie américaine. D'ailleurs, nous avons à maintes reprises indiqué à nos homologues américains que cette liste d'alerte spéciale 301 ne repose pas sur des analyses objectives.
    Je reconnais également que l'industrie américaine aime bien mettre quiconque lui déplaît, en raison de son régime de droit de pays, sur le même plan que la Chine et les autres grands transgresseurs, mais nous ne sommes pas sur le même plan. Ce n'est pas la même chose. Si vous ne figurez pas sur la liste d'alerte d'une façon ou d'une autre, vous n'êtes peut-être pas bien important. La plupart des pays qui ont d'importants échanges commerciaux se trouvent sur la liste d'alerte.
    Je vous accorde une petite question de suivi.
    Je vous exhorte à passer à l'action. Pour ce qui est de la liste d'alerte, le fait est qu'il y a des gens à Montréal et ailleurs qui se munissent de petites caméras, comme vous le savez fort bien, et qui sortent aussitôt des DVD.
    Les groupes du crime organisé sont fortement impliqués dans cette activité, et plus nous attendons, plus ils s'impliquent. Pour le moment, les risques sont limités alors que les bénéfices sont faramineux. C'est la santé et la sécurité des Canadiens qui est en jeu.
    Monsieur MacKenzie, j'espère que le gouvernement y verra une réalité et annoncera des mesures concrètes dans ce domaine.
    Je suis convaincu que vous avez fait passer votre message.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Ménard.

[Français]

    Comme mon collègue, qui est d'un autre parti, je pense qu'il s'agit d'un problème très grave. Je vais simplement ajouter que nous devons être conscients du fait que le bien-être et la santé dont nous jouissons généralement sont largement dus au fait que les droits d'auteur sont respectés depuis la Révolution française. Cet état de chose s'est ensuite maintenu au XIXe siècle.
    De toute évidence, quand les droits d'auteur ne sont pas respectés dans le domaine du divertissement, on perd beaucoup de profits et d'artistes de qualité qu'on n'arrive pas à rétribuer. Il y a aussi toutes les avancées technologies dont nous profitons aujourd'hui. Elles existent à mon avis parce que nos sociétés ont respecté les droits d'auteur. Évidemment, celles qui nous voisinent sont toujours très fortement tentées de nous voler nos droits d'auteur. C'est ce qui est arrivé avec la Chine, mais j'ai l'impression que plus ce pays va entrer dans le circuit économique mondial, plus il va se faire jouer le même tour. Il va peut-être alors opter pour le respect économique.
    Parlons des punitions. Il est évident qu'elles sont nécessaires et qu'elles doivent être dissuasives. À mon avis, il faut qu'elles soient tout de même autre chose qu'une peine d'emprisonnement. Entre la prison et la situation actuelle, je pense qu'il y a du progrès à faire.
     Dans les cas où l'on finit par arrêter quelqu'un pour une infraction au droit de propriété intellectuelle et que cette personne comparaît devant les tribunaux, quelles sont les peines prévues? Quelqu'un peut-il répondre à cette question?
(1155)

[Traduction]

    Cette question s'adresse-t-elle à quelqu'un en particulier?

[Français]

    Je pense à la GRC, qui est peut-être davantage au courant de la situation, ou à la directrice du...
    Pour ce qui est de notre régime juridique, on pourrait demander à Cal Becker. On pourrait ensuite passer à la GRC.

[Traduction]

    Si vous me permettez, je voudrais répondre en anglais. Je pense qu'il faut bien comprendre que la Loi sur le droit d'auteur prévoit déjà des peines assez sévères, plus précisément une peine d'emprisonnement maximale de cinq ans, s'il y a une déclaration de culpabilité par suite d'une procédure par voie d'acte d'accusation, et une amende de 1 million de dollars. Comme on vous l'a déjà fait remarquer, il n'existe pas d'infraction correspondante dans la Loi sur les marques de commerce en ce qui concerne les produits contrefaits.
    Pour répondre à votre question principale au sujet du genre de sanctions que nous envisageons, je pense que tout le monde s'accorde généralement à reconnaître qu'une peine d'emprisonnement de cinq ans ou une amende de 1 million de dollars, ou les deux, sont suffisantes dans ce contexte. Ce qui manque, éventuellement, c'est une loi qui autoriserait l'Agence des services frontaliers du Canada à participer aux mesures d'application de la loi. Le problème n'est pas tant l'insuffisance des sanctions — du moins, sur papier — mais plutôt l'absence des pouvoirs qui permettraient à l'Agence des services frontaliers du Canada de participer pleinement aux activités anticontrefaçon et antipiratage.

[Français]

    Je m'excuse de vous interrompre. C'est que nous avons si peu de temps. Les preuves soumises et la façon dont on applique ces lois me préoccupent également. Par expérience, je sais que dans bien des cas, les gens comparaissent devant un juge qui entend environ 60 causes au cours du même après-midi, dans la plupart des cas des plaidoyers de culpabilité. Les ententes sont alors négociées à partir d'un genre de moyenne. En fin de compte, pour qu'on accorde à un individu une amende de plusieurs milliers de dollars, il faut qu'il s'agisse d'une contravention assez grave.
    Étant sensibilisé à cette question, si j'étais juge et que j'entendais ce genre de cause, j'aimerais bien qu'on me présente une preuve du profit que cette contravention a rapporté à l'accusé et du train de vie que mène celui-ci. On le fait dans le cas du crime organisé. Évidemment, ce sont des gens qu'on surveille longtemps. J'ai toujours demandé aux policiers chargés de ces enquêtes de chercher à savoir quels étaient le montant dans le compte de banque, les habitudes et les automobiles des suspects. Est-ce que vous le faites?
    Lorsque vous menez une enquête sur un cas de contrefaçon, est-ce que vous poussez les choses plus loin, de façon à prouver au juge quel profit le suspect a retiré des violations et à faire en sorte que la punition soit proportionnelle au profit plutôt qu'aux simples frais d'opération?
    Je m'adresse aux gens de la GRC.
(1200)
    Je vous remercie de votre excellente question.
     Tout dépend du type d'enquête. À l'heure actuelle, la priorité de la GRC est le crime organisé. S'il est question d'une enquête sur un cas de contrefaçon qui implique une organisation criminelle, le type de démarche dont vous venez de parler — où on regarde les avoirs et le train de vie des individus impliqués — fait partie de l'enquête, jusqu'à un certain niveau. Malheureusement, les lois actuelles ne comportent aucun mécanisme permettant de saisir ces biens, de les confisquer. Par contre, comme je l'ai expliqué, dans le contexte de l'enquête, nous regardons cela.
    Êtes-vous bien reçus par les tribunaux quand vous arrivez avec des preuves semblables? Très souvent, toutes ces causes sont confiées aux jeunes procureurs qui viennent de débuter. Ce ne sont pas vraiment des actes criminels, ce sont des choses moins graves. Ils n'ont pas l'expérience ni la préparation pour plaider. Est-ce exact?
    Je ne voudrais pas généraliser, mais en effet, dans certains cas, ces causes sont confiées à des procureurs qui sont peut-être un peu plus jeunes. En ce qui a trait aux efforts de sensibilisation, la GRC a rencontré les procureurs de la Couronne. Je crois que la dernière fois, c'était en Colombie-Britannique il y a quelques mois, pour justement sensibiliser les procureurs à la réalité de la contrefaçon et leur expliquer que ce n'est plus celle d'il y a 10 ou 15 ans. C'est un travail d'envergure. Il va falloir quand même quelque temps avant de venir à bout de sensibiliser le système judiciaire, mais l'intégrité de celui-ci dicte que les juges imposent les sanctions qu'ils croient adéquates.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Monsieur Comartin, c'est à vous, pour sept minutes.
    Je voudrais aborder rapidement la question de l'hypocrisie, madame Segal.
    À mon avis — et mon opinion s'appuie, me semble-t-il, sur des informations assez fiables — s'il y a un pays qui devrait figurer sur la liste d'alerte, ce sont les États-Unis eux-mêmes, étant donné que, proportionnellement, la quantité de produits contrefaits qui passent par les États-Unis, qui y sont introduits et fabriqués est de loin plus importante que celle que nous avons à traiter au Canada. Êtes-vous d'accord?
    En fait, je n'ai pas du tout de statistiques là-dessus. L'OCDE possède actuellement une analyse économique des activités de contrefaçon et de piratage dans le monde entier. C'est justement ça l'un des plus graves problèmes — à savoir qu'aucun des pays concernés ne possède les statistiques requises. Il va sans dire que c'est une activité clandestine, et il est donc assez difficile d'obtenir de telles statistiques.
    Évidemment, si vous avez des mesures d'application plus musclées à la frontière qui vous permettent de bien suivre la situation, vous réussirez peut-être à saisir une plus grande quantité de produits. Mais si vous n'avez pas les ressources nécessaires à la frontière, il devient difficile de savoir ce qui passe à la frontière sans détection. Donc, il est très difficile de tirer quelque conclusion que ce soit des chiffres que nous possédons actuellement.
    Ce fut une réponse fort diplomatique, madame Segal.
    En fait, je vous dis la vérité. Nous travaillons étroitement avec les États-Unis dans bien des dossiers, y compris la protection des droits de propriété intellectuelle, de même qu'avec d'autres pays, et je peux vous assurer que les statistiques posent gravement problème.
    Monsieur le Surintendant principal, ce que vous nous avez dit m'inquiète un peu.
    Peut-être devrais-je adresser mes observations à vous tous. J'espérais que vous nous donneriez aujourd'hui des recommandations précises concernant les modifications à apporter aux diverses lois. Je ne sais pas si nous allons les obtenir de quelqu'un d'autre, mais je m'attendais à ce que vous nous fassiez des recommandations spécifiques.
    Monsieur le Surintendant principal, en ce qui concerne les points que vous avez soulevés, je ne sais pas si c'est un problème de ressources insuffisantes ou non, mais je ne comprends pas très bien pourquoi nous ne pouvons avoir recours ou ne recourons pas aux articles du Code de façon à déclarer que les responsables sont des groupes du crime organisé, à les mettre en accusation en conséquence, et à saisir les produits conformément aux dispositions de ces articles, même celui qui prévoit l'inversion du fardeau de la preuve. La structure actuelle est-elle inadéquate? Y a-t-il quelque chose qui ne va pas? Si c'est le cas, nous aimerions bien le savoir.
    Pour vous dire la vérité, ce qui manque, c'est un cadre législatif énergique relatif à ce type d'infractions. De plus, la plupart des enquêtes que nous menons sont d'ordre historique, en ce sens qu'il faut presque toujours remonter en arrière pour prouver l'existence de l'organisation criminelle et son implication, qui est très difficile à faire étant donné les ressources que nous possédons actuellement.
(1205)
    La GRC a-t-elle des recommandations précises à nous faire sur la façon d'améliorer les articles du Code qui concernent le crime organisé?
    Il faudrait que je me penche de plus près là-dessus avant de pouvoir formuler des recommandations précises. Avant de…
    Je me permets de vous interrompre, étant donné que je n'ai pas beaucoup de temps.
    Y a-t-il des modèles efficaces ailleurs, que nous pourrions éventuellement appliquer ici? Que ce soit au sein de l'Union européenne ou — je sais que ce ne serait pas aux États-Unis, bien qu'il y ait peut-être un certain nombre d'États qui ont fait un travail intéressant dans ce domaine — ou ailleurs, existe-t-il d'autres modèles dans des pays industrialisés comme le Canada qui auraient permis de réprimer efficacement ce phénomène?
    Je ne suis pas au courant.
    Y en a-t-il, madame Segal?
    Cela fait justement partie du problème. Chaque pays est confronté au problème mondial grandissant de la contrefaçon et du piratage. Tous les pays cherchent à améliorer leur régime. Par conséquent, tous examinent, presque en permanence, ce qu'ils font actuellement, ce qu'ils pourraient faire, et ce qui est efficace ou non.
    Il est très difficile de dire qu'un pays en particulier possède actuellement un régime efficace. Vu les nouvelles technologies et tout le reste, il est très difficile de réprimer ces activités. Les pays font ce qu'ils peuvent à l'interne, et à l'échelle internationale également. Mais il faut une collaboration plus étroite et un système d'échange d'information plus intégré afin de mieux combattre ce problème.
    Nous avons observé, cependant, que lorsque nous empêchons l'introduction au Canada d'un envoi de fausses piles, grâce à nos liens avec le Mexique et les États-Unis, nous pouvons leur communiquer immédiatement que nous avons arrêté un envoi de produits contrefaits émanant de tel pays, car si nous empêchons l'entrée de ces produits au Canada, il est évident que les responsables vont essayer ensuite de les faire entrer au Mexique ou aux États-Unis. Mais si nous prévenons les autorités à l'avance — et nos collègues d'autres pays nous préviennent aussi — nous pouvons nous préparer en conséquence et informer l'ASFC de surveiller les envois afin de repérer les produits en question.
    Dans une large mesure, notre succès dépend de la coopération internationale, car les mesures prises par un seul pays ne seront jamais suffisantes pour enrayer ce problème.
    Madame Johnston, à supposer qu'on vous confère les pouvoirs dont parlait tout à l'heure le responsable du ministère de la Justice, l'ASFC a-t-elle fait une évaluation des coûts supplémentaires et du nombre d'employés additionnels qu'il faudra pour s'attaquer efficacement à ce problème à la frontière?
    Je ne peux pas vous donner de chiffres précis concernant le coût des ressources additionnelles. Par contre, je peux vous indiquer le nombre d'interceptions de produits contrefaits effectuées grâce aux moyens que je vous ai expliqués tout à l'heure, interceptions que nous effectuons conformément à la Loi sur les douanes ou de concert avec la GRC dans le cadre d'opérations conjointes.
    En vertu du régime actuel, nous procédons à environ 1 000 interceptions de produits contrefaits chaque année, et nous pouvons supposer que ce nombre augmenterait en flèche si on devait nous donner les pouvoirs de cibler et d'examiner spécifiquement les produits contrefaits. Je peux vous dire que, selon nos estimations, si on devait nous conférer les pouvoirs législatifs appropriés, le volume de produits contrefaits interceptés serait considérable. Bien entendu, il nous faudrait à ce moment-là évaluer quelles ressources seraient requises, mais pour le moment, nous n'avons pas encore fait une évaluation des coûts.
    Et vous n'êtes pas non plus en train de le faire?
    Cela fait partie des diverses analyses que nous effectuons de concert avec nos partenaires interministériels relativement aux options que nous pourrions éventuellement retenir. Bien entendu, si nous devions retenir cette option-là, nous ferions une évaluation précise des conséquences financières, mais comme nous n'avons pas encore tiré de conclusions à ce sujet, nous n'avons pas non plus procédé à une évaluation précise des coûts.
    Très bien.
    Merci beaucoup.
    Si vous me permettez de vous demander un petit éclaircissement, madame Segal, n'est-il pas possible d'obtenir de la documentation d'autres pays au sujet de leurs méthodes? Certains d'entre eux nous ont critiqués. On peut donc supposer que leurs méthodes de répression sont plus efficaces. J'ai donc du mal à croire qu'il n'y a pas à l'heure actuelle de méthodes qui donnent de bons résultats.
    Deuxièmement, les autres pays du monde acceptent-ils volontiers de collaborer avec nous, ou certains d'entre eux posent-ils problème sur ce plan-là?
    Mais, premièrement, n'y a-t-il pas des régimes ailleurs qui puissent nous servir d'exemples?
(1210)
    Je ne dirais pas qu'il n'existe pas de bons exemples. Au contraire, il y a d'excellents exemples, mais vous m'avez demandé s'il existe un régime quelque part qui s'attaque directement au problème. Je peux vous dire que oui, il y en a qui s'attaquent au problème, mais il n'en existe pas, à ma connaissance, qui règlent le problème ou qui permettent de tout intercepter à la frontière ou d'enrayer complètement ce phénomène.
    La situation évolue très rapidement, et dans le contexte de la mondialisation, étant donné l'accroissement des échanges commerciaux et les progrès technologiques, il devient très difficile de stopper complètement ce genre de phénomène. Par conséquent, il s'agit plutôt d'adopter les mesures les plus efficaces possible — c'est-à-dire de partager les pratiques exemplaires et d'actualiser le régime au fur et à mesure — afin de combattre le problème et, bien sûr, de travailler de manière coopérative.
    Pour répondre à la deuxième partie de votre question, il est évident que certains pays posent davantage problème que d'autres. Une bonne partie des activités qui portent atteinte aux droits de propriété intellectuelle ainsi qu'une bonne partie des activités de contrefaçon ont lieu dans des pays comme la Chine, la Russie, et d'autres. Nous avons également entendu dire que certains produits contrefaits sont fabriqués en Russie mais portent une étiquette qui dit « Fabriqué en Chine », de sorte qu'il devient difficile par moments de savoir d'où proviennent ces produits. Il est vrai qu'on peut certainement suivre les activités jusqu'à un certain point, mais cela suppose des efforts considérables, et n'oublions pas que c'est une cible mobile. Lorsqu'un pays réussit à stopper cette activité, elle se déplace ailleurs. Donc, beaucoup de pays différents sont concernés, et si cette activité continue, ce n'est pas nécessairement parce que les pays eux-mêmes ne souhaitent pas y mettre fin.
    Je pense qu'il a été mentionné plus tôt que la Chine s'intéresse de plus en plus à la protection de ses propres droits de propriété intellectuelle, et si je ne m'abuse, la Chine était peut-être au deuxième rang l'année dernière pour le nombre de demandes de brevets qu'elle a déposées. Ce sont les États-Unis qui ont déposé le plus grand nombre de demandes. Dans les pays où il y a actuellement un problème de grande envergure, des pressions vont nécessairement être exercées sur les autorités depuis l'intérieur pour que ces dernières prennent des mesures énergiques pour s'y attaquer.
    C'est un problème international, et il faut donc y travailler à l'échelle internationale.
    Je comprends. Il est évident que chaque pays rencontre cette difficulté, mais je me demandais plutôt si d'autres pays ont un régime législatif qui pourrait éventuellement nous intéresser.
    Non. Il y a les modèles qui s'appliquent aux États-Unis et au sein de la CE — je pense que Cal vous en a parlé — mais dans un cas, l'accent est mis sur la responsabilité gouvernementale — c'est-à-dire que c'est le gouvernement qui assume les coûts, etc. — alors que, dans l'autre, l'idée maîtresse consiste à faciliter, dans la mesure du possible, l'exercice des droits privés par les détenteurs de ces droits.
    D'accord. En tant que comité, nous aimerions voir quelles autres mesures législatives…
    Ce sont les deux modèles qui s'appliquent à l'heure actuelle, et ni l'un ni l'autre n'est efficace à 100 p. 100.
    Très bien. Je ne voudrais pas abuser de mes privilèges de président.
    Passons donc maintenant aux membres de la majorité. C'est à M. Norlock, pour sept minutes.
    Bonjour. Je voudrais vous remercier de votre présence et de nous informer de la situation actuelle en ce qui concerne le piratage et la violation des droits de propriété intellectuelle.
    Je voudrais d'abord adresser une question à M. Becker, du ministère de la Justice, qui fait suite aux points soulevés par mon ami, M. Cullen. Elle porte sur les mises en accusation, car depuis environ l'an 2000, nous assistons à une augmentation soutenue — en fait, je dirais que c'est une augmentation plutôt exponentielle que soutenue — des violations dans les deux domaines que j'ai mentionnés.
    Je suppose que mes questions découlent du fait que le Canada nous observe à l'heure actuelle, en ce sens que le citoyen moyen se demande ce qui se passe et dans quelle mesure nous possédons les ressources nécessaires au gouvernement. La première chose qu'un citoyen ou citoyenne ordinaire demanderait au ministère de la Justice et probablement le nombre approximatif d'avocats que nous avons à notre service, et étant donné que nous sommes touchés par ce problème depuis au moins cinq ans sinon davantage, cette unité ou certains avocats ou experts qui font partie de cette unité du ministère de la Justice ne sont-ils pas en train de rédiger des mesures législatives qui pourraient éventuellement intéresser le ministre ou le personnel du ministre, et ce en vue de contrer ce problème grandissant, qui présente un danger non seulement pour nous, à nos bureaux, mais pour les personnes qui se servent de piles, qui consomment des produits pharmaceutiques, ou qui nourrissent leurs animaux et les membres de leurs familles? Le ministère a-t-il rédigé de nouvelles mesures législatives, etc.?
    Avant de poser trop de questions, je vous invite à répondre à cette question, de même que d'autres, s'ils le désirent.
(1215)
    La réponse la plus brève que je puisse vous faire est non, nous n'avons pas rédigé de mesures législatives en vue de nous attaquer spécifiquement au problème de la contrefaçon et du piratage.
    Par contre, nous assurons un soutien juridique aux ministères qui sont responsables de ces questions — par exemple, aux ministères qui ont la responsabilité stratégique des services frontaliers, des marques de commerce, du droit d'auteur, etc. En d'autres termes, notre rôle, à part en ce qui concerne les poursuites intentées pour des activités de contrefaçon et de piratage, a consisté tout simplement à assurer un soutien juridique à ceux qui ont la responsabilité stratégique d'appliquer les lois en question.
    Pour ce qui est de savoir combien d'avocats participent à ce travail — je crois bien que c'était ça la première partie de votre question — vous avez, si je ne m'abuse, une dizaine de ministères qui sont plus ou moins représentés aujourd'hui — pas nécessairement autour de cette table — mais disons qu'il y a une dizaine de services distincts du contentieux qui assurent ce soutien à leurs clients particuliers. Donc, je vous dirais qu'il y en a, grosso modo, entre 10 et 15.
    Me dites-vous qu'il y a 10 ou 15 avocats au ministère de la Justice ou 10 ou 15 avocats un peu partout qui traitent ce problème?
    Tous les avocats dont je parle sont rattachés au ministère de la Justice mais ils travaillent dans les locaux de leurs clients, qu'il s'agisse du ministère de la Santé, de l'Agence des services frontaliers, d'Industrie Canada, ou de Patrimoine canadien. Autrement dit, tous ces avocats sont des employés du ministère de la Justice, car il appartient au ministère de la Justice de fournir l'ensemble des services juridiques.
    Donc, nous parlons de 10 à 12 avocats qui sont appelés à traiter ces questions très complexes dans les différents ministères.
    L'impression des gens, c'est qu'il y a toute une armée d'avocats, et donc, qu'est-ce qu'ils font tous?
    Non. Bien sûr, nous avons une dizaine de ministères qui sont directement concernés par ces questions.
    Merci pour cette réponse, car je voudrais maintenant en arriver à l'essentiel.
    Donc, à moins qu'on ne vous présente — je ne veux pas parler d'« instructions »; je vais être gentil — des demandes explicites ou précises dans ce sens, vous-même ne prendrez pas l'initiative de rédiger des dispositions législatives. Vu votre expérience avec les autres ministères, on dirait que vous leur assurez un soutien juridique. Donc, en assurant ce soutien juridique, vous seriez à même de recenser les difficultés et les exigences que suppose l'application des lois actuelles. Dans ce contexte, ne serait-il pas normal que vous communiquiez directement avec les responsables politiques, en leur disant: nous avons besoin de ceci; il nous faut telle et telle mesure et voilà en quoi pourrait consister la solution; pourriez-vous donc nous aider en déposant ces dispositions devant le Parlement? Est-ce que cela arrive ce genre de choses, ou mes suppositions à titre de nouveau député sont-elles tout à fait inexactes?
    La première responsabilité d'un élu ou d'un député, me semble-t-il, est la santé et la sécurité des personnes qui nous envoient au Parlement. Je vous pose donc la question: faut-il que le ministre prenne l'initiative de faire rédiger un projet de loi? Est-ce au ministre de vous dire: vous devez faire ceci ou cela, ou le ministre devrait-il s'attendre à ce que vous lui disiez: « Écoutez, voilà la difficulté que nous rencontrons depuis cinq ou dix ans. C'est un problème grave. Nous avons besoin d'aide. Voilà donc les mesures législatives qu'il convient de faire adopter. »
    Est-ce une attente déraisonnable?
    Vous avez parlé, avec beaucoup de diplomatie, d'« instructions ».
    C'est un mot assez direct. Je suppose que j'aurais pu dire…
    Non. C'est tout à fait le terme approprié dans ce contexte. Ce qu'on vous a dit aujourd'hui, c'est que les hauts fonctionnaires conjuguent actuellement leurs efforts dans le cadre d'un comité interministériel auquel sont représentés une dizaine de ministères. Ils ont déterminé quelles améliorations pourraient éventuellement être apportées au régime.
    Donc, dans un sens, nous attendons effectivement qu'on nous donne des instructions.
    Je vous remercie.
    Je ne voudrais pas que vous ayez l'impression que tout cela dépend de vous, parce que vous faites évidemment partie d'une équipe qui fait de son mieux pour aider la population canadienne, et notamment la branche qui est responsable de l'application des lois, pour qui j'ai énormément de respect.
    Je voudrais poser des questions qui font suite à celles de M. Ménard au sujet des peines qui conviennent dans ce contexte.
    Je vous ai entendu dire que la peine maximale est une peine d'emprisonnement de cinq ans ou une amende de 1 million de dollars. Ai-je raison de dire que l'on inflige rarement la peine maximale au Canada, si bien que, face à une infraction non pas mineure mais moyennement grave, les tribunaux sont susceptibles d'infliger une peine intermédiaire? Dans ce cas, on peut supposer qu'il s'agirait d'une peine d'emprisonnement de deux ans ou d'une amende de 500 000 $. Est-ce une bonne supposition?
(1220)
    Je dirais que non. En général, les peines infligées sont bien inférieures. Il n'y a pas vraiment de raison à cela, si ce n'est peut-être la nature du dossier et des arguments et l'éventualité d'une entente entre la Couronne et la défense — par exemple, un sursis en échange d'un certain plaidoyer, etc.
    En règle générale, les peines infligées ne sont pas sévères. Il arrive rarement qu'on inflige une peine d'emprisonnement. Le plus souvent, il s'agit plutôt d'une peine de détention à domicile d'un maximum de six ou huit mois, et d'une amende assez considérable. Quand je dis « considérable », je parle d'une somme allant de 5 000 $ à 15 000 $, selon la gravité de l'infraction.
    Il faut également comprendre que bon nombre de ces infractions supposent un investissement très important de ressources pour mener les enquêtes et préparer les poursuites. Comme l'a laissé entendre le surintendant principal Cabana, la GRC considère comme des priorités toute infraction touchant le droit d'auteur qui comporte également des risques pour la santé et la sécurité du public, ou qui implique les organisations criminelles ou le terrorisme. Donc, le nombre d'infractions qui présentent vraiment une menace pour la sécurité du public, en raison de l'implication de criminels organisés ou de terroristes, ou encore à cause des produits eux-mêmes, est relativement limité. Si vous voulez, il ne s'agit pas de crimes purs de piratage ou de contrefaçon. C'est tout à fait autre chose.
    Je suis désolé, mais je vais devoir vous interrompre. Voilà qui termine donc le premier tour.
    Nous passons maintenant à M. Chan, pour cinq minutes.
    Merci infiniment de votre présence et des renseignements détaillés que vous nous fournissez.
    Je partage la passion de mes collègues autour de la table en ce qui concerne la gravité de cette problématique. Mais il convient, à mon avis, de s'intéresser plus particulièrement aux activités de contrefaçon qui entraînent des risques pour la santé et la sécurité des Canadiens. Si nous envisageons de rédiger ou de proposer des mesures législatives, il convient tout particulièrement de prévoir des peines d'emprisonnement minimales pour les personnes qui font preuve d'une indifférence totale à l'égard de la sécurité des Canadiens.
    De plus, je voudrais féliciter Diana pour les efforts déployés par son ministère à la frontière. En 1996-1997, quand Santé Canada a proposé de réprimer la vente de produits à base d'herbes médicinales, c'était à mon avis une décision lourde de conséquences qui a fait beaucoup de torts aux communautés ethniques.
    Je pense que ce qui nous dérange le plus, si on parle de la Chine, c'est qu'on y fabrique maintenant de faux produits alimentaires. Je ne sais pas si vous en avez entendu parler, mais ils sont capables de faire de faux oeufs qui ressemblent à de vrais oeufs. Ils vendent de faux oeufs sur le marché. Étonnant, n'est-ce pas? Ils font de faux oeufs qui ressemblent à de vrais oeufs, et ils arrivent toujours à faire des profits.
    Ce qui m'inquiète le plus, c'est qu'ils fabriquent même de faux produits qui ne coûtent pas cher, comme les nouilles, par exemple. Ils volent les marques de commerce et fabriquent des produits dangereux qui nuisent à la santé des personnes qui les consomment. C'est un grave problème en Chine. Les gens ont des inquiétudes au sujet de l'introduction de ces produits dans le réseau alimentaire qui leur fournit ce qu'ils mangent, surtout que certains volent des marques de commerce qui sont excellentes et dont dépendent vraiment les gens, et notamment les produits de santé, les médicaments et les composés.
    Je sais que nous permettons l'entrée au Canada de ces produits. Il est très difficile de surveiller ces activités, d'adopter des lois pour les contrer, etc. Je comprends qu'il faut parfois autoriser l'entrée au Canada de ces produits afin de permettre aux communautés ethniques d'y avoir accès. Mais la question des marques de commerce est très importante. J'espère que, quand le temps viendra de rédiger de nouvelles dispositions législatives, Cal, vous n'allez pas négliger le problème des marques de commerce des produits de santé et médicaments qui sont importés au Canada. C'est un problème courant.
(1225)
    C'est très intéressant.
    Peut-être devrions-nous laisser le temps aux témoins d'intervenir à ce sujet. On ne vous a pas vraiment posé de questions, mais y en a-t-il parmi vous qui voudraient faire des observations à ce sujet?
    Je voudrais simplement dire que nous sommes au courant de ce problème. C'est l'une des raisons pour lesquelles les efforts déployés par la communauté internationale pour collaborer avec la Chine sont si importants. Il y a moyen de s'y attaquer ici, mais il y a aussi moyen de s'y attaquer là-bas.
    Comme vous le dites, nous ne parlons pas d'un problème qui ne préoccupe pas les pays en développement. Comme je l'ai dit au début de mon exposé liminaire, ce n'est pas un combat qui oppose les pays riches aux pays pauvres. En fait, les pays en développement sont beaucoup plus à risque, à bien des égards, étant donné qu'ils ne possèdent pas les mêmes ressources que nous pour s'attaquer au problème.
    Il y a toujours moyen de faire mieux, mais nous devons tous travailler ensemble — pays développés et en développement — afin d'enrayer ce problème.
    Vous avez une minute, madame Barnes.
    Je vous remercie.
    Madame Segal, vous êtes la présidente de ce groupe de travail. Patrimoine canadien a également un rôle à jouer dans la protection des droits de propriété intellectuelle. Je voudrais savoir quel est le rôle de ce ministère par rapport à votre groupe de travail. Je crains que les priorités de tous les membres de votre groupe de travail ne soient pas les mêmes dans ce domaine.
    J'aurais aimé que les responsables de la propriété intellectuelle au ministère du Patrimoine canadien soient présents aujourd'hui, et je me demande pourquoi ils ne sont pas là.
    La réponse partielle à votre question est le sujet du travail du groupe, à savoir la contrefaçon — en tout cas, d'après le titre. Si je ne m'abuse, nous avons un représentant de Patrimoine canadien qui peut nous venir en aide si des questions sont soulevées qui concernent ce ministère, mais ce groupe de travail est censé s'intéresser aux risques pour la santé et la sécurité publique. Dans la mesure où des organisations criminelles sont impliquées et qu'il s'agit de produits protégés par le droit d'auteur, la question du piratage est effectivement pertinente, mais nos exposés étaient surtout axés sur les risques pour la santé des produits contrefaits, comme les faux produits pharmaceutiques, et ce genre de choses.
    En ce qui concerne le rôle de ce ministère au sein du groupe de travail, son apport est essentiel. Ce ministère est représenté, de même que tous les autres organismes et ministères, chaque fois que nous tenons une réunion interministérielle. Nous sommes généralement tous d'accord sur ce qu'il faut faire. Il n'y a pas de différence d'opinion entre les ministères et organismes qui y participent; il nous faut actualiser notre régime, et nous essayons de nous pencher sur les détails, et même les grands principes du travail qu'il y a à faire. Nous examinons la question des ressources et les modifications qu'il faudra sans doute apporter aux lois concernées. Il n'y a pas de différence d'opinion au sein du groupe.
    Je vous remercie.
    Madame Mourani.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Tout d'abord, je vous remercie de vos témoignages. J'ai beaucoup appris aujourd'hui.
    Ma question s'adresse à M. Becker. Lors de l'échange que vous avez eu tout à l'heure avec M. Norlock concernant un groupe de travail qui serait constitué de 10 ministères, j'ai compris que vous attendiez des instructions du ministre pour rédiger un projet de loi, mais que vous aviez déjà travaillé à des améliorations ou des pistes d'amélioration possibles. Quelles sont ces améliorations possibles?

[Traduction]

    Si vous me permettez, madame Mourani, je vais répondre en anglais.
(1230)
    Très bien.
    J'imagine que ma réponse sera très frustrante pour les membres du comité.
    Au sein du comité, nous avons réussi à dégager un accord général sur la nature des problèmes à régler et peut-être même la façon de les régler correctement. Mais ce sont des questions d'intérêt public et, par conséquent, des instructions ou une position ministérielle devront être définies avant que nous ne puissions vous en parler en détail. Ces choix n'ont pas encore été opérés; ce n'est pas à nous, à titre de fonctionnaires, de faire ces choix.
    Différents membres du groupe vous ont expliqué ce matin en quoi consiste ces problèmes. Et le fait de cerner un problème facilite peut-être la définition de la solution. Par exemple, l'Agence des services frontaliers du Canada n'est pas autorisée à intercepter des produits contrefaits ou piratés à la frontière. Voilà qui suggère d'ores et déjà une solution possible. Notre Loi des marques de commerce ne prévoit aucune infraction qui serait semblable à celle que prévoit la Loi sur le droit d'auteur. Voilà un autre problème qui suggère une solution.
    Je pourrais continuer. Dans une certaine mesure, les problèmes dont on vous a parlé autour de la table suggèrent le genre de solution qui serait approprié. Je suis très conscient du fait que notre rôle aujourd'hui consiste à vous décrire les problèmes, plutôt qu'à prescrire les solutions, car les ministres concernés n'ont pas encore opéré leurs choix ou prescrit une politique particulière dans ce domaine.

[Français]

    Vous dites que les peines sont peu sévères, qu'elles peuvent consister en l'assignation à résidence, etc. Est-ce que ces peines sont imposées aux trafiquants ou aux personnes qui sont en possession d'objets trafiqués ou contrefaits?

[Traduction]

    Qu'elles visent les personnes condamnées pour la vente des produits piratés ou contrefaits. Généralement, nous parlons de personnes qui ont d'importantes opérations sur Internet pour la vente de logiciels piratés, ou encore de grands détaillants, par exemple, d'équipement sportif qui vendent des produits contrefaits. On leur inflige des peines et des amendes relativement importantes, qui sont de l'ordre de six à huit mois d'assignation à résidence.

[Français]

    Sont-elles aussi imposées à des commerçants qui ne sont pas forcément les personnes qui ont fabriqué le produit mais qui vendent le produit? C'est ce que je comprends. Il peut s'agir de commerçants qui ne s'y connaissent pas et qui achètent des produits contrefaits sans vraiment imaginer que ce genre de produit est illégal.

[Traduction]

    Dans les cas que je vous décris, nous parlons de détaillants qui savaient pertinemment qu'ils vendaient des produits contrefaits ou piratés. Cependant, il arrive parfois — et là je ne vais nommer personne — qu'un détaillant ait une ligne d'habillement de couturiers en magasin et que la compagnie qui distribue cette marque de vêtements remarque la présence des produits contrefaits en magasin. À ce moment-là, les produits sont retirés du magasin et un règlement intervient entre le détenteur des droits et le détaillant qui ne donne pas lieu à des poursuites criminelles.

[Français]

    Lorsqu'on arrête des membres du crime organisé, leur donne-t-on des peines aussi minimes ou si on tient compte du fait que ces gens font partie d'un réseau organisé, etc.?

[Traduction]

    En fait, nous parlons surtout de détaillants de produits piratés ou contrefaits qui n'ont aucun lien avec le crime organisé.
    Le surintendant Cabana serait peut-être mieux placé pour vous parler des poursuites visant des groupes de criminels organisés, mais pour ma part, je ne suis pas au courant.

[Français]

    À ma connaissance, il y a eu très peu de poursuites au criminel impliquant des personnes identifiées comme faisant partie du crime organisé traditionnel. Comme je l'expliquais tout à l'heure, l'indépendance judiciaire de la cour fait en sorte qu'il appartient au juge de décider des peines. Je crois qu'il est raisonnable de déduire que les peines qui seraient imposées à des gens impliqués dans le crime organisé seraient plus sévères que celles qui seraient imposées à des commerçants.
(1235)

[Traduction]

    Votre temps est écoulé. Avez-vous…

[Français]

    J'essaie de comprendre.
    Est-ce difficile ou compliqué de faire des arrestations dans ce cadre de criminalité? Oublions la drogue et parlons du commerce de produits contrefaits qui implique des membres d'organisations criminelles. La perception du processus judiciaire n'est-elle pas la même que lorsque vous les arrêtez pour possession de drogue ou d'armes à feu?
    Pour ce qui est de la perception du système judiciaire, la question devrait probablement être adressée aux gens qui y participent, aux juges.
    Y a-t-il des peines imposées en fonction de cela, ou est-ce que cela ne tient pas la route? Y a-t-il eu de ces cas?
    La principale distinction est celle que je mentionnais plus tôt. Elle se situe au niveau de notre capacité d'attaquer les biens de l'organisation des groupes criminalisés. Qu'il s'agisse de tels biens ou de stupéfiants, ce sont les mêmes groupes qui sont impliqués. La différence, c'est que si les offenses ont été commises en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, on a la possibilité de saisir les biens de cette organisation.
    Mme Maria Mourani: Mais pas dans ce cas-ci?
    Sdt pal Mike Cabana: Pas dans ce cas-ci.
    D'accord. Merci.

[Traduction]

    Merci.
    J'aimerais obtenir un éclaircissement à ce sujet. N'est-il pas vrai que l'organisation qui exporte les produits d'un autre pays vers le Canada devrait être une organisation illégale? Comment définit-on le « crime organisé », par opposition aux organisations qui importent tous ces produits illégaux? J'essaie de comprendre.
    La définition du crime organisé se trouve dans le Code criminel. Elle est assez large. Il s'agit de trois personnes ou plus, mais selon moi, « trois personnes ou plus » comprendraient, s'il est question d'importation, à peu près n'importe qui qui importe des produits contrefaits. Évidemment, la GRC se concentre sur les organisations criminelles traditionnelles, telles que…
    Les organismes traditionnelles.
    … les hors-la-loi et des groupes de ce genre.
    Il faudrait que ce soit une organisation d'un certain genre pour que…
    Passons maintenant à M. Brown.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je m'intéresse à la question du droit d'auteur et des produits contrefaits et piratés depuis fort longtemps. Au cours de la dernière législature, j'étais membre du Comité du patrimoine canadien et j'ai beaucoup appris sur le traité de l'OMPI. Le Canada a signé ce traité il y a bien des années, mais il n'a toujours pas été ratifié. L'ancien gouvernement ne l'a pas fait et, pour le moment, notre gouvernement n'a pas non plus proposé de le faire, même si ce dernier semble vouloir de nouveau faire avancer ce dossier.
    Cette question suscite beaucoup de frustration au Canada. Je n'y avais jamais beaucoup réfléchi, du point de vue de l'impact sur la sécurité publique, avant qu'il soit question de vous inviter à comparaître devant le comité. Je suis très content de voir que vous vous intéressez à la question.
    Le ministère de l'Industrie a nécessairement un rôle bien important dans ce contexte. Je sais que vers la fin de la dernière législature, il avait été proposé de créer un comité législatif mixte spécial pour examiner la question du droit d'auteur, donc cela semble susciter beaucoup d'intérêt. Je suis content de vous voir ici aujourd'hui, et de recevoir d'autres renseignements à ce sujet. Certains d'entre nous insistons pour que quelque chose se fasse dans ce domaine.
    Madame Segal, je m'intéresse tout particulièrement au travail de votre groupe interministériel. Peut-être pourriez-vous nous en parler. J'ai vraiment envie d'en savoir davantage. Je sais que vous en avez déjà un peu parlé, mais je voudrais obtenir d'autres détails au sujet de ce groupe, parce qu'il faut que ce dernier participe à ces efforts. Parlez-moi donc des progrès réalisés par le comité.
    Ce groupe existe depuis un moment, comme on vous l'a signalé. Au départ, le problème que nous avions était justement le fait qu'il n'y ait pas de groupe; c'est-à-dire que chacun avait sa part du gâteau, pour ainsi dire, pour ce qui est d'assurer la protection des droits de propriété intellectuelle, que cela passe par le système judiciaire, les activités de répression, ou la coopération internationale. Personne n'avait la responsabilité de coordonner les activités ou de s'assurer que toutes les parties intéressées communiquaient entre elles.
    Au départ, le groupe interministériel avait surtout pour mandat de cerner les problèmes ou les défis associés au régime canadien. Ce régime fonctionne, néanmoins; nous protégeons les droits de propriété intellectuelle, et nous permettons aux titulaires de droits de les exercer par l'entremise de notre régime juridique. Il existe certaines lacunes, mais la situation a tout de même progressé.
    Il s'agissait donc de bien cerner la situation au Canada — par conséquent, il fallait que tous les intervenants clés au Canada participent à ce travail — et aussi de faire intervenir la dimension internationale, à savoir ce qui arrive à l'extérieur du Canada dans d'autres pays, et surtout dans des pays qui sont nos partenaires. Nous voulions savoir dans quelle mesure ils avaient réussi à relever les défis et comment nous pourrions modifier notre régime de façon à y faire face, tout en respectant nos obligations internationales et en maintenant la coopération qui existe déjà. Cette coopération se développe de plus en plus au fur et à mesure que progresse la situation car, à l'échelle internationale, on reconnaît à présent que ce n'est pas un problème qui peut être réglé par un seul pays à l'intérieur de ses frontières.
(1240)
    Il y a évidemment le côté législatif et le côté répression, mais en ce qui vous concerne, quel est le mandat de votre groupe?
    Notre mandat consiste à examiner globalement ce qu'il faut faire au Canada pour solutionner ces problèmes. Il s'agit de constituer un cadre en bonne et due forme, de prévoir les ressources nécessaires et de voir quelles ressources sont justement requises pour s'y attaquer.
    Donc, vous souhaitez faire des recommandations sur des mesures législatives spécifiques qui permettront…
    Oui, absolument.
    Très bien. Dans ce cas, dites-moi quand ce groupe va déposer un rapport et auprès de qui ce rapport sera déposé?
    Vous me demandez auprès de qui nous allons déposer notre rapport? Eh bien, étant donné que chacun a une tranche du gâteau, il faut nécessairement que chacun soit au courant des recommandations que nous allons faire et qu'il les accepte. Donc, la plupart des organismes et ministères concernés devront nécessairement adhérer aux mesures proposés.
    Maintenant, pour ce qui est d'éventuelles modifications législatives, les ministères qui sont responsables des lois concernées devront être d'accord, comme ils devront l'être sur la question des ressources. Il faut que tout le monde soit sur la même longueur d'onde.
    Dans ce cas, quand est-ce qu'on peut s'attendre à recevoir un rapport de votre groupe?
    Nous travaillons aussi fort que possible afin de vous présenter quelque chose sous peu.
    Vous voulez dire, dans deux mois, trois mois, six mois? J'essaie de savoir quand vous allez mettre la dernière main à votre rapport.
    Nous essayons de peaufiner les détails et de progresser le plus rapidement possible, mais je n'exerce aucun contrôle sur le programme. Je ne sais pas quand…
    Et qui exerce ce contrôle, dans ce cas?
    Sans doute les organismes centraux, mais…
    Quand vous dites « les organismes centraux », vous voulez dire les industries?
    Mais nous ne sommes pas encore prêts. Nous peaufinons toujours les détails, mais nous essayons de faire avancer ce travail le plus rapidement possible.
    Très bien.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous fais simplement remarquer qu'en octobre 2005, le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international a indiqué que des stratégies étaient en voie d'élaboration afin d'améliorer l'application des lois pertinentes dans le domaine qui nous intéresse aujourd'hui. Donc, dois-je comprendre que nous poursuivons ce travail mais qu'il n'a encore rien donné? Est-ce bien ce que vous nous dites? N'y a-t-il pas un ministre ou ministère directeur qui soit chargé de ce projet?
    Je ne dirais pas que notre travail ne donne rien. Il est certain que les activités se sont multipliées où les gens sont davantage sensibilisés au problème, et en même temps, nous profitons au maximum du cadre actuel pour nous y attaquer. Donc, un cadre est actuellement en place que nous pouvons utiliser et que nous utilisons concrètement.
    Nous profitons, entre autres, d'une coopération plus étroite avec nos partenaires internationaux, et notamment les États-Unis et le Mexique, étant donné que nous avons des frontières intégrées, etc. Donc, nous ne nous contentons absolument pas d'immobilisme. Les améliorations apportées à notre régime intérieur constituent un aspect du problème, mais nous n'avons certainement pas été inactif.
    Y a-t-il un ministre ou ministère directeur?
    Non.
    Non? Très bien.
    C'est-à-dire qu'Industrie Canada et Patrimoine canadien sont responsables de l'application de la Loi sur le droit d'auteur et de la Loi sur les marques de commerce. Il y a aussi l'ASFC, qui a un rôle à jouer dans l'application de leurs lois. Et enfin, le ministère de la Justice a ses propres fonctions dans ce contexte.
    Il faut bien comprendre que cette problématique ne cadre pas parfaitement avec le mandat d'un seul ministère, et par conséquent, nous n'avons pas un seul ministre qui soit responsable de tout.
    Mais n'est-il pas vrai que le ministère de la Justice est normalement chargé de rédiger les projets de loi et de coordonner toutes ces autres activités? C'est l'impression que j'avais.
(1245)
    Il appartient normalement au ministère d'orientation — c'est du moins ce que j'ai cru comprendre — d'élaborer les recommandations, et par la suite, le ministère de la Justice participe au processus en élaborant le cadre juridique qui permettra de mettre en oeuvre les politiques en question.
    D'accord. Très bien.
    Madame Barnes, c'est à vous.
    Je ne comprends pas très bien parce que, par le passé, j'avais cru comprendre que, du moins sous l'ancien gouvernement, le ministère de la Sécurité publique était le ministère directeur qui dirigeait le travail du groupe de travail et qu'il aurait normalement préparé un mémoire au Cabinet prévoyant la participation d'autres personnes si cette participation semblait nécessaire. Mais là vous me dites que personne ne dirige ce processus, qu'aucun ministère ne dirige ce travail, et je comprends donc que rien de concret n'ait encore été proposé.
    C'est une responsabilité conjointe. La question…
    Il n'y a pas de ministre ou ministère directeur?
    On m'a demandé si un ministre est responsable de toute cette activité. Le fait est qu'il n'y a pas un seul ministre…
    Ma question est la suivante: y a-t-il un ministre directeur? Au sein du gouvernement actuel, y a-t-il un ministre qui dirige l'ensemble du travail qui s'effectue dans ce domaine?
    Nous n'en sommes pas encore là.
    J'ai l'impression que non. C'est choquant, en réalité, étant donné que c'est surtout une question de sécurité publique, et c'est pour cette raison que le ministre de la Sécurité publique était chargé de tout ce dossier sous l'ancien gouvernement.
    Je vais donc essayer de poser des questions qui concerne la santé, étant donné que personne ne dirige ce dossier.
    Parlons donc de Santé Canada. Quand vous communiquez directement avec le public, l'effet est vraiment très positif, et je pense que vous vous efforcez généralement de le faire quand un problème surgit touchant les aliments qui peuvent avoir un impact sur la santé. D'après ce que nous ont dit nos attachés de recherche, vous avez un numéro d'urgence que quiconque peut composer pour obtenir des renseignements ou déposer une plainte au sujet de médicaments achetés sur Internet.
    Je voudrais savoir ce que vous pensez de ce programme et dans quelle mesure vous vous servez de cette information pour améliorer l'efficacité de vos interventions. Là je ne parle pas d'une solution législative; je parle maintenant de stratégies non législatives. Qu'en est-il de ce service? L'avez-vous évalué? Est-il utile à ce chapitre-là?
    Il y a différentes démarches. Nous avons un numéro de téléphone que nous inscrivons sur les avis publics afin d'informer les consommateurs qu'ils ont la possibilité de nous appeler s'ils ont une plainte particulière à formuler. Nous avons également une autre démarche, c'est-à-dire la notification des effets indésirables des médicaments. Il s'agit d'une autre unité de Santé Canada qui fait partie de la même direction générale que moi. Ainsi les consommateurs, les médecins et les patients peuvent téléphoner et nous signaler les effets indésirables de certains médicaments. Cette information est ensuite analysée pour que nous en dégagions les tendances éventuelles, et ensuite nous pouvons déterminer s'il convient ou non de prendre des mesures.
    Quelle information ce service peut-il nous fournir au sujet des médicaments contrefaits au Canada?
    C'est là que la situation se complique beaucoup. C'est justement l'une des difficultés que nous rencontrons par rapport au nombre considérable de produits contrefaits qui sont au Canada. Il est très difficile d'établir un lien direct entre un produit contrefait et un décès, car ce dernier peut ou non avoir été causé par le produit en question.
    Selon les estimations de l'Organisation mondiale de la santé, 50 p. 100 des médicaments vendus sur Internet sont des médicaments contrefaits. Cette dernière a donc établi ce lien. Comment se fait-il que nous ne réussissions pas à établir ce même lien?
    Nous n'y arrivons pas pour toutes les raisons que j'ai déjà évoquées: parce que ces médicaments doivent faire l'objet de tests; parce qu'il faut être en mesure de faire une analyse au laboratoire pour déterminer s'il s'agit ou non de médicaments contrefaits; parce qu'il faut faire énormément de recherche afin de savoir d'où ils proviennent; et parce qu'il faut pouvoir profiter d'une étroite collaboration avec un grand nombre de partenaires différents. Je ne peux certainement pas affirmer que nos statistiques nous permettraient de dire que la proportion est de 50 p. 100 ou de 20 p. 100.
    Je voudrais maintenant m'adresser à la représentante de l'Agence des services frontaliers du Canada.
    À l'heure actuelle, l'Agence des services frontaliers dispense-t-elle une formation spécifique au sujet des produits contrefaits?
    Non, pas un cours de formation spécifique. Comme je vous le disais tout à l'heure, nous n'avons pas de programme qui concerne spécifiquement la contrefaçon et l'interception des produits contrefaits. Pour les raisons que nous avons déjà évoquées, nous n'avons pas le pouvoir aux termes de la loi d'effectuer le travail de ciblage et de détection de ces produits. Ceci dit, nous avons tout de même acquis une certaine expertise. Cette formation serait évidemment dispensée aux employés si jamais on nous conférait les pouvoirs appropriés. La formation ferait partie des activités de définition et d'exécution du programme.
    Nous avons néanmoins acquis une certaine expertise, comme le mentionnait mon collègue de la GRC. Nous participons à diverses opérations mixtes à Toronto et à Montréal. Ces agents ont donc acquis une certaine expertise du fait d'avoir traité ces produits dans l'exercice de leurs fonctions.
    Existe-t-il des spécialistes de la contrefaçon à l'ASFC?
    Je n'irais pas jusqu'à les qualifier de spécialistes de la contrefaçon. Je dirais simplement que, du fait d'avoir eu à traiter ces produits dans l'exercice de leurs fonctions quotidiennes, ils ont acquis une certaine expérience et expertise relativement aux produits contrefaits.
    Je vous remercie.
    Je tiens également à féliciter la GRC des efforts qu'elle déploie pour renseigner le public sur les produits contrefaits. J'ai vu les renseignements qui sont affichés sur votre site Web, et j'estime que c'est un bon début. Évidemment, vu l'attitude du gouvernement actuel, vous ne serez pas à la frontière à moins qu'on ne vous y convoque.
    Donc, il s'agit maintenant de parler de stratégie. Un aspect de cette stratégie, comme M. Becker nous l'a clairement expliqué, est nécessairement législatif. Madame Segal, j'imagine que cette stratégie comportera également des éléments non législatifs. Pourriez-vous nous parler justement de ces éléments non législatifs et nous indiquer quelles mesures pourraient potentiellement être prises dès maintenant — par exemple, le partage des bases de données quand vous obtenez des renseignements intéressants? Voilà une idée qu'on explorait il y a quelques années, mais autant que je sache, elle n'a jamais été concrétisée.
(1250)
    Vous avez le temps de répondre brièvement.
    Eh bien, nous examinons toutes les possibilités en vue d'améliorer le régime actuel, y compris l'échange d'information. Mais, quand nous envisageons de prendre de telles initiatives, nous devons évidemment nous assurer qu'elles cadrent avec notre législation sur la protection de la vie privée et d'autres exigences.
    Comme vous l'a dit Cal, il ne m'appartient pas de prescrire quoi que ce soit. Mon rôle consiste à vous transmettre des renseignements techniques sur les possibilités que nous explorons actuellement, mais je ne peux pas vous parler en détail des recommandations précises que nous pourrions formuler.
    Je vous remercie.
    Je voudrais poser une question évidente aux deux derniers témoins, et j'invite également M. Cabana à y répondre.
    Avons-nous des données sur les produits contrefaits? Combien d'accusations ont été déposées par le ministère de la Santé, l'Agence des services frontaliers du Canada ou la GRC? Avons-nous une idée de la situation à ce chapitre? Existe-t-il des données sur l'étendue du problème?
    Je vous ai indiqué tout à l'heure que nous interceptons environ 1 000 envois chaque année. Je précise, toutefois, que les envois que nous interceptons en appliquant la Loi sur les douanes ne sont pas nécessairement très importants. Nous ne parlons pas nécessairement d'immenses quantités de produits ou de grands conteneurs de produits contrefaits. Il faut bien comprendre cette réalité-là car, comme je l'ai dit dans mes remarques liminaires, même si nous faisons intervenir les autorités policières, souvent la GRC décide pour des raisons d'ordre pratique de ne pas engager des poursuites. Souvent la quantité de produits est à ce point minime que cela ne justifierait pas de déposer des accusations, d'intenter des poursuites, etc.
    Pour ce qui est du nombre d'accusations et de poursuites, je m'en remets aux connaissances des responsables de la GRC, bien entendu, étant donné que ces activités relèvent de leur responsabilité.
    Je vous ferais la même réponse. Un certain nombre d'enquêtes sont actuellement en cours chez nous sur des médicaments potentiellement contrefaits mais, encore une fois, nous renvoyons ces dossiers à la GRC pour suite à donner.
    Les 1 000 envois que vous interceptez chaque année comprennent-ils des produits comme le cassava que mon électeur fait venir de quelque part? J'ai reçu une plainte à ce sujet, parce qu'il a été arrêté à la frontière et on lui a dit que son cassava était un produit contrefait. Est-ce compris ou…?
    Je ne suis pas sûr de savoir ce que c'est que le cassava.
    Ce sont les grosses pommes de terre qu'ils achètent au marché alors qu'ils ne sont pas censés le faire. J'imagine que ce chiffre ne comprend pas ce genre de choses?
    Je ne sais pas. Je ne peux pas vraiment répondre à cette question, mais je peux vous dire qu'il y a une grande diversité de produits. En ce qui concerne la proportion de produits de chaque catégorie, je sais qu'il s'agit le plus souvent de vêtements de couturiers.
    Monsieur Cabana.
    Comme je vous l'ai déjà dit, dans le passé, nous déposions environ 400 accusations chaque année, mais en 2005, nous en avons déposé environ 700 dans tout le Canada. Il faut bien comprendre que ces 700 accusations ne sont pas toutes liées à l'activité des organisations criminelles, dans le sens traditionnel. Elles correspondent à un infime pourcentage; je dirais que c'est moins de 15 p. 100 ou 20 p. 100.
    Je vous remercie.
    M. MacKenzie est notre dernier intervenant.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je voudrais remercier ma collègue, Mme Barnes, de nous avoir signalé qu'ils n'ont pas fait le travail qu'il fallait pour ce qui est d'élaborer des dispositions législatives qui vous aideraient, vous, à vous acquitter de vos responsabilités.
    Madame Segal, je vous demande donc s'il y a jamais eu un ministre directeur dans ce dossier.
    Nous n'avons jamais atteint l'étape où l'on doit normalement soumettre un mémoire au Cabinet. C'est normalement à ce moment-là qu'un ministre directeur…
(1255)
    Oui, je comprends.
    Est-ce que l'un d'entre vous saurait quelles pertes d'emplois et de revenu nous aurions subies en raison de l'entrée au Canada de produits piratés et contrefaits? Quelle est l'étendue des pertes subies par les entreprises légitimes, notamment au niveau des revenus?
    Nous examinons cet élément-là dans le contexte de l'étude menée par l'OCDE, mais là aussi, c'est une évaluation qui est difficile à faire. Si on parle du pourcentage des échanges mondiaux, il s'agit de savoir si cela comprend des produits qui ne peuvent être contrefaits, tels que le pétrole — remarquez bien, s'ils sont capables de fabriquer de faux oeufs, peut-être peuvent-ils également fabriquer du faux pétrole. Donc, dans les statistiques qui sont publiées en ce moment, la comparabilité n'est pas établie.
    Cela fait partie du travail que nous effectuons dans un contexte international, mais il est difficile de faire une estimation des pertes au Canada également, étant donné que c'est une activité clandestine. Les groupes industriels ont leurs propres estimations, et selon ces dernières, les pertes subies par les entreprises sont considérables. Et la situation n'est pas toujours très claire quand il s'agit de savoir si ces pertes sont subies ici au Canada ou sur des marchés externes.
    Monsieur le Surintendant, je constate que vous avez un certain nombre d'articles devant vous. S'agit-il de produits contrefaits?
    En effet.
    Pourriez-vous nous dire de quoi il s'agit?
    J'ai devant moi un tube de faux Krazy Glue. D'ailleurs, je vous invite à l'examiner, car on ne peut pas savoir que c'est du faux en le regardant. Afin de déterminer s'il s'agissait d'un produit contrefait, il a fallu faire une analyse en bonne et due forme. Donc, créer cette expertise, même chez les agents d'exécution à la frontière, semble presque impossible. Il faut faire une analyse détaillée du produit.
    Il marche?
    Je ne l'ai pas essayé. J'ai déjà eu une expérience avec les piles, et cela m'a suffi.
    J'ai également devant moi un paquet de piles Duracell qui sont des piles contrefaites. On le sait en raison des erreurs grammaticales et fautes d'orthographe qui se trouvent au verso du paquet.
    J'ai aussi acheté une lampe à éclairs électroniques. Même si aucune marque n'est indiquée, il y a un logo UL et une étiquette au verso, et ce logo UL est contrefait.
    La deuxième lampe, qui est semblable à une lampe à lave, je suppose, mais pas ici, parce qu'elle a pris feu. Cela rejoint notre discussion de tout à l'heure. Ce produit a été acheté à un magasin réputé, et le magasin en question ne se rendait pas compte qu'il vendait des produits contrefaits. Dès qu'on l'en a informé, le produit a été rappelé, à titre de produit contrefait. Encore une fois, vous allez voir l'étiquetage UL approprié sur la boîte, alors qu'il s'agit d'un produit contrefait.
    La dernière lampe est une lampe de type fluorescent. C'est la même chose. C'est un produit contrefait.
    Dans ce cas, peut-on dire que même un consommateur canadien éclairé aurait beaucoup de mal à déterminer qu'il s'agit d'un produit contrefait qui pourrait être dangereux ou potentiellement causer des blessures au consommateur lui-même ou à un membre de sa famille?
    Selon le type de produit, je dirais que non seulement le consommateur aurait du mal à faire la distinction, il lui serait tout à fait impossible de voir une différence entre les deux produits.
    Vous nous dites que les piles ont pris feu. Si vous deviez afficher cette information sur votre site Web, cela pourrait-il éventuellement influer de façon négative sur le fabricant légitime de ces piles?
    En effet, les responsables de l'industrie ont des inquiétudes au sujet des avertissements qui sont donnés aux consommateurs. C'est pour cette raison que nous travaillons en étroite collaboration avec l'industrie privée, afin de minimiser les effets négatifs.
    Je vous remercie.
    Je voudrais adresser une question à la représentante de l'ASFC. Nous arrivons à faire un travail assez raisonnable — peut-être même plus que raisonnable — pour ce qui est de vérifier les conteneurs qui arrivent au Canada. Mais, supposons que nous ayons des entreprises au Canada qui fabriquent des produits contrefaits; vérifions-nous les conteneurs qui quittent le pays?
    Je me permets de répéter que nous n'avons pas le pouvoir de vérifier les conteneurs afin de détecter l'arrivée ou la sortie de produits contrefaits. C'est ce dont on parlait tout à l'heure.
    En général, les douaniers ont le pouvoir d'inspecter les exportations qui quittent le Canada, à condition que, encore une fois, l'exportation du produit en question soit interdite, contrôlée ou réglementée en vertu d'une loi du Canada. C'est exactement les mêmes conditions que pour l'importation, si vous voulez.
    Les douaniers inspectent les conteneurs de produits destinés à l'exportation, à condition qu'ils soient interdits ou que l'exportateur soit tenu d'avoir un permis aux termes de la Loi sur les licences d'importation et d'exportation. Mais à moins que la Loi ne précise que les produits en question sont contrôlés, interdits ou réglementés, nous n'examinons pas et nous n'interceptons non plus les produits qui quittent le Canada.
(1300)
    Donc, il est juste de dire que nous ne vérifions pas régulièrement les envois qui quittent le Canada, et c'est peut-être l'une des raisons pour lesquelles certains de nos partenaires commerciaux ne sont pas contents de nous, n'est-ce pas?
    C'est exact.
    Donc, ce n'est pas exagéré de dire cela?
    Si je peux me permettre de modifier légèrement ce que vous venez de dire, je précise que le Canada ne constitue pas une source importante des produits contrefaits.
    Le savons-nous vraiment?
    Oui, nous le savons. Selon les estimations, la plupart des produits contrefaits viennent de Chine, de Russie et d'autres pays. Des estimations existent. Le Canada n'est pas une source importante de produits contrefaits.
    Me reste-t-il du temps?
    Oui, et faites vite.
    En ce qui concerne les CD contrefaits dont on a entendu parler à Toronto, je crois me souvenir que ces CD étaient fabriqués à Toronto — c'est-à-dire, non pas les produits contrefaits, mais les droits de propriété intellectuelle. Il me semble que cette possibilité existe, étant donné que ce n'est pas difficile à faire, et on n'a pas besoin de beaucoup de places pour fabriquer ce genre de choses.
    Donc, selon vous, ces produits sont surtout utilisés au Canada?
    Je ne suis pas au courant du cas dont vous parlez. Évidemment, cette capacité existe. Mais, encore une fois, rien ne permet de conclure que le Canada est un fabricant important de produits contrefaits. Je crois savoir que, notamment si nous parlons de production en série, que ce genre de produit est fabriqué le plus souvent dans d'autres pays. Il y a des cas de contrefaçon de produits au Canada, comme il y en a certainement dans la plupart des pays du monde — à la fois les pays développés et en développement.
    Très bien.
    Merci beaucoup.
    M. Cabana a dit que les Canadiens éclairés auraient beaucoup de mal à voir la différence. J'ai acheté du crazy glue qui ne marchait pas mieux que de la fécule de maïs pour coller des choses. Mais je n'ai jamais supposé qu'il pourrait s'agir d'un produit contrefait. Donc, je vous remercie de m'avoir éclairé.
    Monsieur Cullen, vous avez une brève question?
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais simplement faire une observation pour le compte rendu.
    Je connais la plupart des personnes qui siègent à ce groupe de travail interministériel — à l'exception de Mme Segal qui, me semble-t-il, y participe depuis moins longtemps — et je peux vous affirmer, en toute connaissance de cause, qu'en l'absence du genre de coordination qui était nécessaire, le ministre de la Sécurité publique, lorsque nous étions au pouvoir, a pris en charge tout ce dossier. Il voulait absolument faire avancer ce travail, et comprenait à quel point il peut être difficile d'amener tous les ministères à travailler ensemble.
    C'est donc le ministre de la Sécurité publique, étant donné qu'on parlait de risques pour la santé et la sécurité du public, qui a pris en charge tout ce dossier et qui était donc le ministre directeur.
    Là-dessus, nous allons conclure la réunion.
    Je voudrais remercier nos témoins pour leur présence aujourd'hui.
    Y en a-t-il parmi vous qui ont une dernière observation à faire? Notre temps est écoulé, mais…
    Madame Segal.
    Je voudrais remercier les membres du comité de l'intérêt qu'ils portent à cette question. C'est évidemment une question que nous prenons tous très au sérieux, et nous nous efforçons de travailler aussi rapidement que possible afin de combler les lacunes du régime canadien. En même temps, nous continuons à travailler avec nos partenaires au Canada et à l'étranger, afin de relever les défis auxquels nous sommes confrontés et d'assurer la meilleure protection possible aux Canadiens.
    Je vous remercie.
    Nous devons nous réunir brièvement pour discuter de nos travaux futurs. Serait-il possible de faire cela après la réunion de jeudi?
    Des voix: D'accord.
    Le président: Dans ce cas, voulez-vous bien inscrire cela dans vos calendriers?
    Je vous remercie.
    La séance est levée.