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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 005 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 8 juin 2006

[Enregistrement électronique]

(1540)

[Traduction]

    Nous allons déclarer la séance ouverte. Il y a quelques points que j'aimerais régler avant que nous ne commencions à entendre les témoins.
    Il faut en effet prendre certaines décisions. L'une concerne le budget du comité pour le rapport. Le greffier vous en a tous distribué copie. Il semble qu'on a prévu un budget de 19 750 $ pour faire comparaître des témoins et imprimer le rapport. Il comprend certains frais divers. Souhaite-t-on en débattre?
    Avons-nous le rapport, monsieur le président?
    Oui, c'est la longue feuille. Elle porte uniquement sur le budget. Je voulais vous laisser quelques instants pour l'examiner.
    Joe, pourriez-vous en proposer l'adoption, je vous prie?
    Je fais une proposition à cet effet.
    Il est proposé par M. McGuire d'adopter le rapport. Y a-t-il d'autres observations ou des questions?
    Allez-y.

[Français]

    Est-ce que c'est le budget de l'étude qu'on est en train de réaliser sur l'Afghanistan? Si je comprends bien, on la finirait le 31 octobre.

[Traduction]

    Monsieur le président, il dit que, s'il a bien compris, l'étude doit prendre fin le 31 octobre. C'est moi qui ai inséré cette date limite.
    Monsieur Bachand, je ne crois pas qu'on ait... Nous ne sommes pas obligés d'attendre jusqu'à la fin d'octobre. Nous pourrions achever notre étude plus tôt. C'est simplement une date qui a été insérée de manière à ce que nous puissions aller de l'avant.

[Français]

    Si jamais on nous permettait de faire un voyage en Afghanistan, à Kandahar, ce ne serait pas inclus dans ce budget, ce serait inclus dans un autre budget pour les voyages, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Le budget à l'étude concerne strictement la rédaction du rapport et les questions qui l'entourent. Il faudrait faire approuver séparément les voyages.
    Une proposition a été faite par M. McGuire. Y a-t-il d'autres questions? Tous ceux qui sont pour la motion?
    (La motion est adoptée.)
    L'autre point à régler est une motion voulant que nous nous rendions au Quartier général de la Défense. Je suppose que cette visite est nécessaire. Il va nous falloir une fourgonnette et tout le reste. Nous avons prévu de le faire jeudi prochain, à l'heure où notre comité siège habituellement. Le greffier a pris des dispositions pour qu'une fourgonnette attende les membres du comité à la porte tout de suite après la période de questions afin de les transporter jusque là-bas et de les ramener. Nous serons en liaison constante avec la Chambre, naturellement, au cas où il y aurait des surprises.
    Aura-t-on droit à une escorte de VUS noirs ou...?
    Des voix: Oh, oh!
    Il se peut que de gros VUS noirs nous accompagnent, mais ils carbureront peut-être à l'huile de canola ou à je ne sais trop quoi encore.
    Quelqu'un peut-il en faire la proposition?
    La proposition en a été faite par M. Hiebert. Tous ceux qui sont pour la motion?
    (La motion est adoptée.)
    Je vous remercie. Passons maintenant à l'ordre du jour.
    Aujourd'hui, nous accueillons un groupe de témoins venus nous faire des exposés. J'aimerais souhaiter la bienvenue à M. Steven Staples, de l'Institut Polaris. C'est celui qui a tout ce matériel de haute technologie — ça me semble à moi de la haute technologie, mais probablement moins aux autres.
    Nous accueillons aussi Kevin McCort, de CARE Canada, je crois. Kevin, c'est un plaisir de vous avoir parmi nous.
    Enfin, nous accueillons M. Gerry Barr et Mme Erin Simpson, du Conseil canadien pour la coopération internationale.
    Nous allons commencer par entendre la déclaration de M. Staples, après quoi nous passerons aux autres, dans l'ordre. Nous allons entendre toutes les déclarations avant de poser des questions.
    Monsieur, vous avez la parole.
    Monsieur le président et honorables membres du comité, je vous remercie beaucoup de m'avoir invité à comparaître cet après-midi. Mon dernier passage devant le Comité permanent de la défense nationale remonte à mars 2003, c'est-à-dire il y a trois ans. Il est agréable de revoir certains visages que je connais, dont Mme Gallant et M. Bachand.
    Ironiquement, nous allons voir combien de ces questions dont nous avions alors discuté sont toujours aussi actuelles.
    Je tiens à faire remarquer que mon témoignage d'aujourd'hui n'a été confirmé que lundi, de sorte qu'il faudra m'excuser. Habituellement, nous vous aurions fourni d'avance le texte de notre déclaration dans les deux langues officielles, mais certains documents ont été distribués plus tôt, notamment un rapport intitulé Nos troupes sur le terrain, que nous avons diffusé il y a quelques semaines et qui s'est retrouvé dans les boîtes aux lettres.
    Au cours des dernières semaines, le ministre des Affaires étrangères Peter MacKay a comparu devant les deux comités, soit celui du Sénat et celui de la Chambre des communes, et chaque fois, il a été question de certaines études effectuées par l'Institut Polaris dans le cadre du débat national sur l'Afghanistan. Fait peu étonnant, M. Mackay ne souscrivait pas à nos conclusions, et j'aimerais profiter de l'occasion pour rétablir les faits aujourd'hui, de même que pour répondre à certaines autres affirmations.
    Je vous invite à poser des questions si vous avez besoin d'éclaircissements.
    Le 17 mai, l'Institut Polaris a rendu public un rapport rédigé par notre chargé de recherche associé, Bill Robinson, intitulé Nos troupes sur le terrain : Les opérations militaires canadiennes en Afghanistan et les missions de maintien de la paix des Nations Unies. Le rapport s'appuie sur un mémoire que nous avons présenté au comité des finances de la Chambre des communes l'automne dernier, durant les consultations prébudgétaires. Il s'intitulait It's Never Enough: Canada's alarming rise in military spending. Je vous en ai apporté des exemplaires en français et en anglais aujourd'hui.
    À votre dernière réunion du 6 juin, le ministre MacKay vous a dit que les dépenses totales engagées jusqu'ici par le Canada dans les multiples opérations en Afghanistan totalisaient 2,3 milliards de dollars environ, que la partie absorbée par la Défense nationale était de 1,8 milliard et que cela s'ajoutait au coût des opérations des Forces canadiennes en Afghanistan et au coût connexe de la mission comme tel.
    Je suis sûr que les membres du comité aimeraient aussi connaître le coût total de la mission. Les données fournies par le ministre MacKay représentent les coûts supplémentaires de la mission et excluent le coût en personnel. Ajoutez-y les soldes, les heures supplémentaires et les primes, et le plein coût de cet engagement excède 4,1 millions de dollars.
    Malheureusement, nous n'avons pas la liste des missions précises dont s'est servi le ministre MacKay pour arriver à ce total, mais elle ressemble probablement beaucoup à la liste de missions que nous avons documentées dans notre rapport intitulé Nos troupes sur le terrain. De la même façon, notre rapport a établi à 2,6 milliards de dollars le coût supplémentaire de ces missions depuis l'automne 2001, d'après les données de la Défense, de sorte que nous nous rapprochons pas mal des données fournies par le ministre MacKay. Dans notre rapport, nous avons inclus à la fois le plein coût et les coûts additionnels parce que, bien que les deux soient valables, ils mesurent des réalités différentes, et j'aimerais faire remarquer que le ministère de la Défense nationale utilise les deux méthodes comptables dans sa planification.
    Le ministre MacKay et d'autres soutiendraient qu'il faut utiliser le coût supplémentaire inférieur parce qu'il faut payer les soldats de toute façon. C'est vrai, mais le budget de défense grimpe en flèche en raison du besoin de recruter, de former et de déployer plus de troupes à l'étranger; par conséquent, une évaluation des coûts des missions devrait tenir compte de leur plein coût, pas seulement du prix de l'essence et des munitions consommées en Afghanistan.
    Voilà qui m'amène à parler de la tendance qui se dégage des dépenses militaires globales du Canada. Dans le mémoire que nous avions soumis au comité des finances l'automne dernier, nous expliquions que le niveau actuel des dépenses militaires du Canada est déjà très élevé, selon les normes de l'OTAN.
    Je vous renvoie simplement à la diapositive que voici. Ces chiffres nous viennent de l'OTAN. Nous avons fait ressortir les sept pays membres de l'OTAN qui dépensent le plus. Il y a 26 membres en tout. Où le Canada se situe-t-il, en termes de dollars réels? Voyez ici : il est au septième rang. Je vous rappelle que ce sont là les données de l'OTAN. Tout comme l'OTAN, j'ai inclus la Russie, simplement aux fins de la comparaison. C'est pourquoi vous voyez ce montant là. Le Canada, dont les dépenses ont atteint 11 milliards de dollars US en 2004, est au septième rang des dépenses parmi l'alliance des 26. À l'échelle mondiale, il figure au quinzième rang. Même aujourd'hui, nos dépenses militaires sont très élevées.
    Au cours des prochaines années, par suite des deux derniers budgets qui ont tant accéléré les dépenses militaires du Canada, ces dépenses débordent presque littéralement du graphique.
(1545)
    Passons à la diapositive suivante qui illustre les tendances des dépenses militaires. En 2005-2006, nos dépenses militaires étaient de 15 milliards de dollars environ. Tous ces montants sont en dollars de 2005, et ils ont tous été rajustés, de sorte que nous comparons des réalités semblables. Les données vont de 1980 jusqu'au budget actuel de 2005. Vous pouvez constater l'augmentation marquée sous le régime Trudeau. Voici le régime Mulroney, puis, bien sûr, la fin de la guerre froide en 1989-1990. Et voilà la période où nous avons touché le dividende de la paix et réduit les dépenses militaires jusqu'à la fin des années 1990.
    C'est aussi durant cette période que le budget fédéral a commencé à afficher des surplus. On peut voir que les fonds de la Défense sont à nouveau affectés à des dépenses militaires, au point de renouer presque avec le niveau de la fin de la guerre froide. Le jour où le mur de Berlin est tombé, les dépenses du Canada avaient presque atteint le même niveau. Les dépenses engagées en 2005-2006, qui totalisaient quelques 15 milliards de dollars, étaient déjà inférieures de seulement 5 p. 100 aux dépenses engagées à la fin de la guerre froide. D'ici deux ans, nous aurons dépassé ce niveau, ayant récupéré tout le dividende de la paix de l'après-guerre froide.
    Si l'on inclut les augmentations de 12,8 milliards de dollars sur cinq ans annoncées dans le budget des libéraux en 2005, alliées aux crédits additionnels prévus dans le dernier budget conservateur, soit 5,3 milliards de dollars de plus, les dépenses militaires du Canada atteindront 21,5 milliards de dollars d'ici à la fin de la décennie. Voyons que cela donne. Nous allons ajouter ces augmentations. Voici vers quoi se dirigent les dépenses militaires du Canada au cours des prochaines années, soit à bien au-delà de 20 milliards de dollars, tout à fait en haut du tableau. Je vous rappelle à nouveau que nous comparons des réalités semblables. Ce sont tous des dollars rajustés tenant compte du dernier budget. Cela représente une croissance de 43,3 p. 100 par rapport aux dépenses actuelles. Ainsi, les dépenses militaires du Canada se situeront comparativement à un niveau plus élevé que toutes les dépenses en dollars rajustés engagées depuis la Seconde Guerre mondiale.
    Le principal moteur de ce niveau élevé de dépenses militaires est le besoin perçu d'accroître l'interopérabilité de nos forces avec celles des États-Unis, d'aider les Américains à mener leur lutte contre le terrorisme. Il serait peut-être bon de vous rappeler que le niveau des dépenses des États-Unis est plus élevé que celui de tous les autres pays combinés et qu'il est, pourrait-on dire, en train de ruiner le pays.
    Voilà qui nous ramène à l'Afghanistan. La mission en Afghanistan est en réalité un polygone d'essai d'une plus grande intégration militaire avec les forces des États-Unis. À nouveau, le ministre MacKay a fait de son mieux pour décrire notre rôle actuel comme étant une mission humanitaire de consolidation de la paix et tout sauf une contribution à la lutte antiterroriste des États-Unis. Il a aussi affirmé à votre comité que notre engagement a pour objet d'aider l'Afghanistan à retrouver la stabilité, la sécurité, la démocratie et l'autosuffisance. Toutefois, cette description ne correspond pas au raisonnement tenu par le gouvernement dans le discours du Trône cette année selon lequel nous sommes en Afghanistan « pour défendre les intérêts nationaux, combattre le terrorisme international et aider le peuple afghan à repartir à neuf dans un pays libre, démocratique et paisible ». Le gouvernement a défini l'intérêt national du pays comme étant l'établissement de rapports multilatéraux et bilatéraux plus solides, en commençant par les relations du Canada avec les États-Unis.
    La mission en Afghanistan a évincé tout autre rôle éventuel de nos militaires sur la scène internationale. Au cours des cinq dernières années, la mission afghane a absorbé 68 p. 100 de nos dépenses militaires engagées dans des missions internationales. Bien que le ministre MacKay ait décrit la mission comme une opération d'appui aux Nations Unies, en réalité, durant la même période de cinq ans, le plein coût de notre contribution aux missions de maintien de la paix des Nations Unies n'a été que de 214 millions de dollars, soit 3 p. 100 de nos dépenses militaires engagées dans le cadre de missions internationales.
    Figurant jadis fièrement dans la liste des dix pays qui contribuaient le plus de troupes aux missions de paix des Nations Unies, le Canada se classe maintenant au cinquantième rang, tout juste derrière la Roumanie et avant le Mali. En termes de soldats comme tels, nous ne fournissons que 59 soldats de la paix. On peut faire asseoir toutes les troupes de maintien de la paix que nous contribuons aux Nations Unies dans un seul autobus scolaire.
    Entre temps, en Afghanistan, nous assistons, selon moi, à une américanisation des Forces canadiennes à mesure que nous adoptons les tactiques de guerre des États-Unis. Ainsi, l'effort de reconstruction, qui est louable, ne représente qu'une infime partie de notre rôle. Seulement 250 des 2 300 troupes déployées en Afghanistan sont consacrées à notre équipe provinciale de reconstruction, alors que plus de 1 000 font partie du groupement tactique canadien engagé dans des missions à l'américaine de recherche et de destruction dans la campagne. Par ailleurs, comme vous le savez, nos troupes sont actuellement placées sous le commandement des forces américaines, dans le cadre de l'opération Enduring Freedom. Le fait est devenu péniblement évident aux Canadiens récemment quand les commandants canadiens ont dû reconnaître que la décision de bombarder et de raser une école d'Azizi, tuant plus d'une douzaine de civils et d'enfants de même que des combattants talibans, avait été prise par leurs supérieurs américains.
    À un moment donné au cours des prochains mois, nous ramènerons nos troupes sous le commandement de l'ISAF de l'OTAN, mais aucune date fixe n'est prévue. Pourtant, les membres du comité ont peut-être eu l'impression que le ministre MacKay appariait ces deux missions, c'est-à-dire l'opération Enduring Freedom des États-Unis et l'ISAF de l'OTAN, en soutenant que l'une serait le prolongement de l'autre. Ce serait une nouvelle pour l'OTAN, qui voit ces deux missions comme étant très distinctes. Tout d'abord, l'OTAN est clairement mandatée par les Nations Unies — ce qu'il ne faut pas confondre avec des missions dirigées par les Nations Unies. Ce n'est pas une mission de maintien de la paix , mais à défaut de l'être, elle est mandatée par les Nations Unies, ce qui est peut-être le mieux, alors que ce n'est pas le cas de l'opération Enduring Freedom. L'OTAN est engagée dans une mission de soutien de la paix, non pas dans une mission de contre-terrorisme.
(1550)
    Interrogé par un journaliste du Globe and Mail récemment au sujet des deux missions, le secrétaire général de l'OTAN, Jaap de Hoop Scheffer, a déclaré :
Cette mission sera distincte de l'opération Enduring Freedom... Tout comme moi, les alliés considèrent effectivement cette mission comme étant une mission de l'OTAN...
    La différence fondamentale, c'est que l'opération Enduring Freedom est essentiellement une mission de contre-terrorisme, une opération anti-insurrectionnelle, alors que l'ISAF est une mission de stabilisation.
    Ce point est extrêmement important, parce que le débat est de savoir si la mission de contre-terrorisme que mène le Canada de concert avec les États-Unis est fondamentalement incompatible avec les objectifs des missions de soutien de la paix de l'OTAN. Comme l'a déclaré le secrétaire général de l'OTAN, cet organisme a pour mission de gagner le coeur et l'esprit de la population afghane. Or, votre comité doit être de plus en plus préoccupé par le nombre de rapports en provenance de l'Afghanistan selon lesquels nous sommes en train de perdre cette lutte, que les vainqueurs sont les Talibans.
    Il y a deux semaines, l'ex-secrétaire à la Défense des États-Unis John J. Hamre a déclaré dans le New York Times que l'Afghanistan est la crise qui couvera cet été. Au cours des deux dernières semaines, les Talibans se sont manifestés en nombres sans précédent, réunis par groupes de jusqu'à 300 hommes. Les États-Unis sont en train de revenir sur leur décision de réduire le nombre de leurs troupes en Afghanistan et ils ont retardé le relais du bâton à l'OTAN.
     Le Senlis Council, un groupe britannique de réflexion, nous a donné d'autres mauvaises nouvelles. D'après des entrevues prolongées sur le terrain, en Afghanistan, avec des agriculteurs afghans, il a conclu que les interventions militaires énergiques menées jusqu'ici par les troupes américaines et leurs partisans ont fait perdre aux forces de la coalition l'appui de la population locale. Le rapport ajoute que la population a peu gagné de l'occupation, surtout dans le Sud où l'on avait tant promis et où l'on a si peu livré. Le conseil estime que, dans la province de Helmand où les Britanniques sont en train de s'installer, juste à côté de Kandahar, 80 p. 100 de la population appuient les Talibans.
    Quant aux attaques, en 2004, on n'a dénombré que cinq attentats suicides, alors qu'il y en a eu 21 durant le premier semestre de 2006 seulement, et ces attaques sont plus perfectionnées et mortelles. Nous avons déjà constaté que les Canadiens se rendent compte que leurs jeeps blindées ne sont plus suffisantes pour les protéger et qu'ils misent maintenant presque exclusivement sur les LAV III. Combien de temps avant que les Talibans réussissent à percer leur blindage?
    À nouveau, le ministre MacKay a prôné une approche multidimensionnelle qui incluait de l'aide au développement et du soutien politique de même qu'un rôle militaire. Cependant, c'est l'approche politique qui retient le moins l'attention, et il faut y voir tout de suite, avant qu'il ne soit trop tard.
    La semaine dernière, j'ai eu le privilège d'accompagner Dr Seddiq Weera à une conférence de presse qui a eu lieu ici, sur la Colline parlementaire. Dr Weera est un diplomate et un Canadien de souche afghane qui a été emprisonné pendant plus de quatre ans en Afghanistan, sous le régime soviétique. Plus tard, il est venu au Canada faire des études à l'université McMaster et à l'Université de Toronto. Il agit maintenant comme conseiller auprès du gouvernement Karzai. Lors de la conférence de presse, il a exhorté le gouvernement du Canada à appuyer un processus de paix renouvelé qui réunirait à la table toutes les factions politiques de l'Afghanistan, y compris les Talibans. Il a rencontré les dirigeants talibans et affirmé qu'il a une liste de ceux qui sont disposés à amorcer un dialogue.
    Cependant, selon le ministre MacKay, comme il l'a déclaré cette semaine, la paix n'intéresse pas les insurgés. Je soutiens, tout comme Dr Weera, que ce genre de vue axée sur l'ennemi sera notre perte, parce que plus la mission de combat se prolonge, plus elle aide les Talibans et al-Qaïda à recruter. Nos propres dirigeants militaires ont déclaré que, pour un perdu, dix sont trouvés. Par ailleurs, aux États-Unis, l'été dernier, le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld a lui-même déclaré qu'il faut entamer des pourparlers avec les plus modérés des Talibans.
    Or, nous avons ici un diplomate de souche afghane d'influence qui a fait ses études au Canada et qui peut nous aider à assumer un rôle significatif dans ce pays. Que fait le gouvernement? Les porte-parole des Affaires étrangères ont annulé leur rencontre avec lui à la dernière minute. Il y a de quoi se demander si le gouvernement du Canada s'intéresse vraiment à trouver une solution diplomatique en Afghanistan. Apprendrons-nous que notre rôle de combat a été aussi inutile que l'homme qui se débat dans des sables mouvants? Si c'est le cas, je crains que l'Afghanistan ne se transforme en Irak pour le Canada.
    En guise de conclusion, l'Institut Polaris exhorte votre comité à informer tout d'abord le gouvernement que notre rôle dans la mission de combat dirigée par les États-Unis est, en fin de compte, une mission impossible. Il faut évaluer le succès de la mission militaire objectivement et travailler de concert avec nos alliés au sein de l'OTAN à une fin rapide de l'opération Enduring Freedon en Afghanistan.
(1555)
    Ensuite, soutenons les efforts déployés par Dr Weera et d'autres personnes en Afghanistan en vue de faire primer la solution diplomatique à la guerre afghane, essentiellement civile.
    Enfin, il faut en revenir à nos engagements militaires à l'égard des Nations Unies et répondre favorablement la prochaine fois qu'elles nous demanderont de contribuer des troupes à des missions de maintien de la paix.
    Voilà qui met fin à ma déclaration.
    Monsieur Staples, je vous remercie.
    Monsieur McCort, vous avez trois minutes.
     Merci monsieur le président et honorables députés. Merci beaucoup de m'avoir invité à vous parler aujourd'hui du Canada et de l'Afghanistan.
    Je me nomme Kevin McCort et je suis le vice-président directeur de CARE Canada, une organisation non-gouvernementale qui fournit de l'aide humanitaire et de l'aide au développement à plus de 40 pays.
    On m'a invité à comparaître aujourd'hui pour partager avec vous l'expérience acquise par CARE au cours de ces nombreuses années de présence en Afghanistan, surtout en ce qui concerne la motion adoptée le 16 mai par le comité. Cette motion comporte beaucoup d'aspects, mais je parlerai surtout du rapport entre les opérations militaires des Forces canadiennes en Afghanistan et leurs efforts d'aide à la reconstruction du pays.
    CARE a travaillé en Afghanistan de 1961 à 1980 puis de nouveau de 1989 jusqu'à présent. Nous travaillons dans 14 provinces dans tout le pays. Nous avons plus de 200 employés, dont 99 p. 100 sont afghans. Notre organisation croit au développement des ressources locales et adopte une approche à long terme.
    J'ai eu l'occasion de visiter l'Afghanistan à la fin du mois de mai dernier. J'y ai rencontré un grand nombre de nos employés; ceux d'autres ONG, des membres du gouvernement afghan, des militaires canadiens, du personnel des organismes d'aide; des diplomates, des habitants des régions pauvres de Kaboul et des villageois des provinces de Lokar et de Paktia.
    Je suis allé en Afghanistan pour deux raisons : premièrement, pour examiner les projets financés par le Canada dans le cadre du programme CARE et deuxièmement, parce que c'est une question qui suscite beaucoup d'intérêt au Canada, pour comprendre les relations complexes et changeantes entre les forces militaires présentes en Afghanistan et les organisations de développement traditionnelles telle que la nôtre.
    Je pourrais parler pendant des heures des diverses complexités de ce pays, mais mon temps de parole étant limité, je me concentrerai sur deux recommandations essentielles qui traitent de ce rapport entre les opérations militaires et la reconstruction.
    D'abord, je dois souligner de nouveau combien il est important d'éviter les pertes civiles et de respecter les populations locales. Bien que les militaires canadiens savent qu'ils perdront l'appui de la population en cas d'accident ou d'actions négligentes, il est important de le répéter.
    Je me trouvais à Kaboul le jour de l'attaque de Azizi, à laquelle les forces canadiennes n'ont pas participé. Mon hôte Afghan a comparé cette attaque et les pertes civiles aux opérations des soviétiques durant les années 1980. En 1986, il a perdu des membres de sa famille lors d'une attaque similaire. Il a relaté ces incidents vieux d'il y a 20 ans comme s'ils avaient eu lieu la veille. La une des journaux change, mais les personnes qui ont vécu une telle situation ne l'oublient pas, et certaines peuvent rejoindre les rangs des insurgents aujourd'hui comme on l'a vu dans le passé. En fait, ce membre, qui est l'un de nos employés, avait rejoint les moudjahidines en 1986 suite à l'attaque dont a été victime de sa famille. Ce genre d'incident ne facilite certainement pas les efforts de reconstruction.
    J'ai quitté Kaboul deux jours avant l'accident de circulation impliquant les forces de la coalition et à l'origine des manifestations menant à la destruction du bureau que j'avais utilisé durant ma visite en Afghanistan. Notre bureau se situait dans l'un des bâtiments détruits. Une population mécontente et impuissante face à une présence militaire massive, s'en est pris à d'autres organisations internationales comme CARE. Nous n'avons pas l'intention de quitter l'Afghanistan après cette attaque, mais si notre organisation ou d'autres organisations se trouvent dans l'obligation de partir, les efforts de reconstruction en souffriront.
    Dans tous les pays où nous travaillons, notre sécurité tient surtout à notre intégration dans les collectivités locales et au fait qu'elles acceptent notre présence. Nous pensons que les actions des forces de coalition ne doivent pas porter préjudice à l'acceptation de notre présence en Afghanistan tout comme nous pensons que les Nations unies ou les autres ONG doivent opérer de manière discrète et dans le respect de la culture, des coutumes et des traditions afghanes.
    Nous ne devons pas mélanger, et c'est mon deuxième point, les missions des entités chargées surtout des opérations militaires avec celles des organismes chargés de la reconstruction. Je sais que la sécurité est nécessaire au développement tout comme je sais que le développement peut réduire la sécurité. Mais je suis convaincu que les organisations spécialisées dans un domaine ne devraient pas jouer le rôle et avoir les responsabilités des organisations spécialisées dans un autre domaine.
    Le programme de solidarité nationale est un très bon exemple des efforts de reconstruction et de développement qui ont lieu aujourd'hui en Afghanistan. C'est une initiative du gouvernement afghan, financée en grande partie par des donateurs internationaux, y compris l'ACDI, et à laquelle participent beaucoup d'ONG comme CARE pour aider à la mise en oeuvre du programme dans tout le pays. Voici comment fonctionne le programme. Les O.N.G. jouent le rôle d'agent de liaison. Elles rencontrent les représentants des collectivités et les aide à élire démocratiquement des comités de développement de la collectivité. Ces comités gèrent un processus, impliquant hommes et femmes, pour établir l'ordre des priorités de la collectivité. Les membres de la collectivité se prononcent, par scrutin, sur le projet qu'ils jugent le plus important pour la communauté. Les fonds nécessaires pour réaliser le projet sont transférés directement par le ministère de la reconstruction rurale et du développement au comité de développement de la collectivité qui met en oeuvre le projet.
(1600)
    L'agent de liaison surveille le processus, aide le comité au besoin et fournit des rapports d'étape au ministère de la reconstruction rurale et du développement. Idéalement, ce processus se répétera avec de moins en moins d'intervention de l'agent de liaison. Cela permet à la collectivité et de renforcer ses capacités de gestion et d'établir une relation productive entre le gouvernement et les citoyens.
    Vous vous demandez peut-être pourquoi j' explique cela en détail. C'est parce que la mise en oeuvre du programme de solidarité nationale exige une collaboration avec la population à la base. Les forces militaires ou les équipes de reconstruction provinciales n'ont ni le temps ni l'expertise nécessaires. Il faut être accepté et protégé par la population locale, ce qui n'est peut-être pas le cas pour les militaires étrangers. Et lorsqu'il y a un partenariat entre les autorités locales et des O.N.G, où le personnel est en majorité afghan, les coûts sont bien plus inférieurs à ceux qui impliqueraient une ERP.
    Les membres de la collectivité que j'ai visitée à Paktia savent bien que la communauté internationale soutient le programme de solidarité nationale, les forces de coalition et les ERP. En fait, ils ont eu affaire avec ces parties et se sont fait une opinion sur leurs forces et leurs faiblesses. Je leur ai posé une question simple : au plan de la reconstruction, que préférez-vous, les équipes de reconstruction provinciale ou le programme de solidarité nationale? C'est le second choix qui l'a remporté. À mon sens, nous aiderons mieux à reconstruire l'Afghanistan si nos méthodes de travail correspondent aux attentes des Afghans.
    Les ERP canadiennes n'ont pas de plan de reconstruction en Afghanistan. Tel qu'on me l'a expliqué, leur mandat est axé sur l'instauration de la sécurité, l'infrastructure de la justice et les capacités du gouvernement provincial. Je n'ai rien contre car les activités dont j'ai entendues parler s'alignent fortement sur leur mission axée sur la sécurité.
    Je pense qu'en tant que Canadiens, nous pouvons choisir la façon dont nous contribuons à l'effort de reconstruction. À mon avis, les programmes menés par des civils tel que le programme de solidarité nationale devraient être la priorité.
    Je pourrais peut-être terminer en disant un petit mot au sujet de Asif Rahimi qui est le sous le ministre responsable du programme de solidarité nationale. Asif a une longue relation avec CARE et le Canada. Il travaillait pour CARE alors qu'il était réfugié au Pakistan, puis de nouveau à la réouverture de notre bureau en Afghanistan. Il a ensuite immigré au Canada et a travaillé pour CARE à Ottawa. Il est retourné à Kaboul où il joue un rôle important au sein du gouvernement afghan.
    Il symbolise peut-être notre approche au développement et à la reconstruction en Afghanistan. Son engagement est un engagement à long terme, qui change avec le temps, mais qui demeure solide face à des défis énormes et à des situations changeantes. Nous devons continuer de respecter notre engagement envers Asif et des gens comme lui, parce qu'en fin de compte, il est comme nous.
    Je vous remercie de votre attention et je suis prêt à répondre à vos questions.
(1605)
    Merci, monsieur McCort.
    Monsieur Barr ou madame Simpson, l'un de vous deux peut prendre la parole.
    Monsieur Casson, je commence. ma collègue, Erin Simpson, est ici surtout pour répondre aux questions qui suivront, nous l'espérons, ces déclarations préliminaires.
    Je commencerai par dire que le conseil canadien pour la coopération internationale est un organisme-cadre des ONG canadiennes qui travaillent à l'étranger pour lutter contre la pauvreté dans le monde et promouvoir la paix et les droits de la personne. Je remercie le président et le comité de me donner l'occasion de présenter, dans le cadre de votre examen, le rôle du Canada en Afghanistan. Les soldats canadiens et les Afghans risquent leur vie et leur avenir et nous anticipons favorablement une réflexion précise du comité.
    Je vais parler aujourd'hui de trois questions. La première concerne les rôles des civils et des militaires pour fournir de l'aide aux Afghans. Le deuxième point concerne le mandat de l'engagement militaire du Canada. Finalement, j'aimerais dire qu'il faut porter une plus grande attention au développement et aux droits de la personne en Afghanistan.
    Le flou entre les stratégies d'aide et les stratégies militaires est le problème qui se pose de toutes parts aux nombreuses ONG actives en Afghanistan. Mon collègue, monsieur McCort en a touché quelques mots. Ce flou apparaît lorsque les militaires fournissent de l'aide et lorsque l'aide fournie par les ONG ou le gouvernement est liée, implicitement ou explicitement, à une stratégie militaire.
    C'est un problème qui met à risque ceux qui reçoivent l'aide et ceux qui la fournissent et parce que l'aide ne sert pas ses objectifs -- la lutte contre la pauvreté et la promotion des droits de la personne et, dans le cas de l'aide humanitaire, la santé et la sécurité alimentaire des collectivités.
    Il est probable qu'aucun des membres du comité n'ait été surpris d'apprendre que les ONG ont été choquées par les récentes déclarations du lieutenant-colonel Tom Doucette au Ottawa Citizen indiquant que l'aide au développement est un outil anti-insurrectionnel utile en Afghanistan. C'est un commentaire qui met en lumière une controverse continue au sujet de l'aide en Afghanistan depuis l'invasion menée par les États-Unis en 2001. Tout au cours de la guerre, la fourniture de l'aide par, ou en collaboration étroite avec, les forces de la coalition a mis des populations en péril. Quand l'aide renforce la stratégie militaire de l'un des camps, l'aide devient une arme, et ceux qui la reçoivent deviennent souvent des cibles.
    La position officielle du Canada est qu'il n'y a pas de confusion au niveau des rôles dans la stratégie du Canada en Afghanistan car l'aide humanitaire -- c'est-à-dire, l'aide pour sauver des vies-- n'est pas fournie par l'équipe de reconstruction provinciale à Kandahar. En fait, c'est simplement une distinction de poste budgétaire, pas une distinction de rôles. L'armée entreprend des travaux de développement de la collectivité, comme les réparations des écoles locales. Un fonds de coopération civile-militaire géré par l'armée sert à financer ce genre d'activités; les détails des dépenses n'ont pas été communiqués aux organisations qui en ont fait la demande.
    Au-delà de ces programmes, le programme Établir la confiance envers le gouvernement de l'ACDI pour l'Afghanistan est décrit publiquement comme une aide aux collectivités qui coopèrent avec les forces de la coalition pour chasser les talibans. L'objectif est d'affaiblir les talibans en récompensant les collectivités qui affichent leur soutien pour les forces de la coalition.
    Si cela est vrai -- et je répète, si cela est vrai -- cette stratégie est en violation flagrante des principes humanitaires de neutralité, d'impartialité et d'indépendance, des principes implantés dans les conventions de Genève et des principes qui ont été réaffirmés par de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU.
    Le programme semble ne pas faire de distinction entre combattants et non-combattants, distinction qui est aussi enchâssée dans les conventions de Genève. Ces principes sont fondamentaux à l'objectif général des conventions qui est d'assurer un minimum de protection aux non-combattants dans les zones de guerre. En poussant des collectivités à prendre parti pour le Canada dans une guerre contre les talibans, nous impliquons ces collectivités dans la guerre -- mais nous ne pouvons pas les protéger. Même le gouverneur de Kandahar a déclaré que les militaires ne peuvent pas protéger ces projets ou ces collectivités. Donc si nous lions systématiquement l'aide à l'offensive militaire contre Al-Quaïda et les talibans, les collectivités qui reçoivent cette aide au su de tout le monde deviennent des cibles.
(1610)
    Je pense que le comité devrait faire une enquête sur les déclarations du lieutenant-colonel Doucette. Nous devons avoir des clarifications sur la position de l'armée concernant l'utilisation de l'aide au développement dans ses campagnes et je dirai respectueusement que le Canada doit corriger la situation. Le comité devrait aussi demander immédiatement des clarifications à l'ACDI sur son approche sur le terrain et les raisons de cette approche. L'aide devrait être fondée sur les besoins et les droits des Afghans et ne pas être liée à une stratégie militaire ou politique et, sauf en cas de situation exceptionnelle, les forces militaires devraient éviter de s'engager dans des activités de reconstruction ou de secours en Afghanistan. Les travailleurs de l'aide sont tout indiqués pour ce travail.
    La mission des forces militaires devrait être la sécurisation des régions et la protection des civils afghans et les communications militaires devraient souligner cette mission et éviter des messages qui mettent l'accent sur le rôle des forces dans l'aide humanitaire et la reconstruction qui doit être le fait des personnes dont c'est le métier.
    Au-delà de la distinction entre les stratégies militaires et les stratégies d'aide, il faut aussi faire la distinction entre les opérations canadiennes en Afghanistan et l'opération Enduring Freedom des États-Unis qui est essentiellement une opération militaire de combat. À notre avis, le transfert de l'opération Enduring Freedom à la FIAS de l'OTAN et autorisée par l'ONU devrait se faire rapidement et sans délai. Le mandat de l'OTAN devrait préciser que la force ne doit être utilisée qu'en dernier recours et à des fins de sécurité et de protection.
    Une grande variété de menaces à la sécurité pèsent sur l'Afghanistan. Le comité le sait, évidemment. Les menaces posées par des seigneurs de guerre, par exemple, et par d'autres factions et une campagne militaire qui n'a pour objectif que la défaite des talibans ne pourra pas assurer la sécurité de tous les Afghans. Bien sûr, la pauvreté et les violations des droits de la personne sont à l'origine de la violence en Afghanistan. Aujourd'hui, les ressources de développement du Canada se concentrent sur le type de sécurité qui devrait vraiment être de la responsabilité des militaires et de la police -- par exemple, le paiement des salaires des policiers afghans, des programmes de destruction des grandes armes et ce genre d'activité. Près de 40 p. cent des actifs que l'ACDI consacre pour le développement de l'Afghanistan visent une réforme du secteur de la sécurité.
    Le Canada devrait porter une plus grande attention aux initiatives en cours visant à résoudre les conflits de longue date entre diverses factions, y compris la mise en oeuvre du plan d'action pour la paix, la justice et la réconciliation, qui rejoint un peu la remarque faite tout à l'heure sur l'établissement des priorités de certaines initiatives politiques. Nous devons aussi investir plus dans les droits des femmes et s'intéresser plus au développement des moyens de subsistance durables et au développement des collectivités locales.
    Pour résumer très rapidement, les militaires devraient se limiter à la sécurité à la protection des civils et ne pas acheminer de l'aide. L'aide acheminée par des organismes gouvernementaux ou non gouvernementaux ne devrait pas être liée, explicitement ou implicitement, à des stratégies militaires. Le transfert de la FIAS devrait se faire rapidement et les implications de ce transfert devraient être clairement énoncées aux citoyens canadiens.
    Finalement, les ressources et l'attention doivent être dirigées vers le processus de paix, de réconciliation, en même temps que le soutien aux programmes liés au genre, les moyens de subsistance et les développements des collectivités.
(1615)
    Une fois de plus, merci beaucoup de m'avoir donné l'occasion d'exprimer nos points de vue.
    Merci beaucoup.
    Nous commençons notre série de questions. C'est un tour de sept minutes.
    Monsieur McCallum, je crois comprendre que vous voulez commencer.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis quelquefois légèrement tiraillé entre mon rôle de membre de l'opposition et celui d'ancien ministre de la défense. Je crois que c'est le deuxième qui va l'emporter -- du moins pour ma première question.
    Monsieur Staples, au sujet du montant des dépenses militaires, je rejette totalement l'idée que le Canada dépense beaucoup pour la défense, parce que la façon intelligente d'évaluer les dépenses, c'est en tant que pourcentage du PIB, qui montre le niveau des dépenses par rapport à l'économie totale. Les dépenses du Canada sont les plus basses -- où parmi les plus basses, à part le Luxembourg -- de tous les pays de l'OTAN. Si vous consultez les chiffres, nous sommes peut-être au huitième rang ou pas loin, mais quand nous dépensons 10 milliards de dollars et que le Royaume-Uni dépense 50 milliards de dollars, elles sont beaucoup moins que cinq fois plus grandes que les nôtres en termes de PIB ou de population. Donc dans l'ensemble, nos dépenses militaires sont basses -- mais elles augmentent.
    J'ai du mal à croire, en étant raisonnable et en comparant, que nos dépenses vont vraiment passer de 15 milliards de dollars à 20 milliards de dollars en deux ans. Pouvez-vous nous dire comment, s'il vous plaît ?
    Certainement.
    Je commence par la dernière question, surtout si je me suis trompé. J'ai dit que ce serait 21,5 milliards de dollars -- je prendrai le chiffre exact ici -- à la fin de la période de cinq ans. Donc ce serait dans le budget de 2017-2011 à la fin de la décennie. Donc ce n'est pas seulement en quelques années, mais c'est sur...
    Votre tableau montrait qu'elles allaient augmenter de 5 milliards de dollars en deux ans. Je ne le crois pas, sauf si vous ajoutez le coût du matériel. Si c'est ce que vous faites, je pourrais le croire.
    Est-ce que le coût du matériel est inclus dans ces chiffres?
    Oui, nous utilisons de vrais chiffres estimatifs des dépenses, donc pas seulement le budget, mais nous incluons aussi tout revenu qui...
    Il n'est donc pas étonnant que vos chiffres soient élevés.
    Mais ce chiffre a été donné par le général O'Connor lui-même, aujourd'hui ministre de la Défense, pendant la campagne électorale, quand il a dit qu'elles dépasseraient 21 milliards de dollars à la fin de la décennie. Donc j'utilise ses chiffres pour déterminer ce que nous aurons dépensé à la fin de ces cinq ans.
    Il a probablement utilisé des chiffres d'encaisse, et ils le font pour les comptes d'exercice, donc seulement une petite fraction du coût de tout matériel est comptée, ce qui devrait être beaucoup plus bas que ce que vous avez présenté.
    Il a donné ce montant, donc nous utilisons ses chiffres.
    Le problème, c'est que dans votre budget de 2005, le budget des libéraux, au moins vous avez divisé les dépenses dans chacune des cinq années, donc nous savions à quoi ressemblait la courbe, mais avec les conservateurs, nous n'avons pas les divisions exactes -- bien qu'ils aient dit qu'ils continuaient vos augmentations et ils y ajoutaient 5,3 milliards de dollars. et c'est seulement dans le dernier budget que nous avons eu le montant de 1,1 milliard de dollars, en plus sur les deux prochaines années.
    Je vous recommanderais de ne pas tenir compte des promesses électorales, quand l'objectif est de montrer de gros chiffres, parce qu'ils ne sont pas comparables aux autres chiffres que vous avez dans votre série.
    J'aimerais vous poser une question sur l'interconnexion. Elle s'adresse probablement aux trois autres témoins ou à celui ou celle qui veut y répondre. Je n'essaie pas de vous prêter des propos, mais je vous demande d'essayer de trouver une solution à un problème possible. C'est très bien de dire que vous voulez protéger les femmes, bâtir des écoles pour les filles et atteindre tous ces bons objectifs, je ne pourrais être plus d'accord avec vous, mais si vous le faites dans un périmètre protégé par l'armée et que le jour suivant la construction d'une école, les talibans la rasent, vous n'irez pas très loin. C'est très bien qu'il y ait des casques bleus dans un environnement propice aux casques bleus, mais dans un endroit où les talibans sont partout, les casques bleus n'ont pas leur place. Il faut donc une forte présence militaire pour protéger ces écoles et les autres projets que vous construisez, voire même pour combattre les personnes qui essaient de les détruire. Je suis donc très favorable à de grands efforts de développement et de diplomatie, mais je ne peux pas comprendre comment vous pouvez faire tout cela sans une forte présence militaire.
    Je ne prétends pas que vous êtes nécessairement en désaccord avec moi, mais je vous demande comment vous conciliez ces deux objectifs, si vous êtes d'accord avec la façon dont je décris le problème?
(1620)
    Monsieur McCort, allez-y.
    C'est un problème complexe. En tant que représentants de CARE, nous savons que nous avons construit des écoles pour les filles à l'époque où les talibans gouvernaient le pays, avec leur approbation et leur appui. Nous l'avons fait dans quelques collectivités. Nous avons reçu des fonds de l'ACDI pour des programmes qui ont contribué à bâtir des écoles pour les filles et à permettre aux filles de fréquenter l'école.
    Ces écoles n'ont pas été détruites. Nous avons travaillé avec les collectivités de sorte que ces écoles leur appartiennent clairement. Je pense qu'il y a un risque si ces écoles sont construites de manière à ce qu'elles ne soient pas considérées comme de la propriété de la collectivité et une priorité pour elle. Elle devient alors une cible. Lorsque les écoles sont clairement intégrées aux priorités de la collectivité et que la collectivité elle-même est assez forte pour repousser les talibans, ces écoles semblent perdurer.
    Cependant, les ressources dont disposent les collectivités pour repousser les éléments anti-gouvernementaux, les insurgés talibans, semblent faiblir. Elles faiblissent pour diverses raisons. Il y a notamment le manque de débouchés économiques. Il y a aussi les pressions constantes et sans fin qui pèsent sur ces collectivités.
    Monsieur Barr.
    Je dirais certainement qu'il y a un besoin évident d'une forte présence militaire là-bas et que la sécurité des civils doit être au coeur même des considérations des Forces canadiennes.
    Mes observations visaient à nous orienter vers une solution pour atténuer un peu les contradictions qui se créent lorsqu'on essaie de faire du développement dans lequel le rôle de l'armée se conjugue à celui des acteurs non gouvernementaux. Si le Canada intervient sur les lieux d'un conflit aigu, comme c'est le cas là-bas, et si ses projets de développement sont associés à l'armée, qui est également un acteur dans la guerre, alors les collectivités qui sont les prétendues bénéficiaires du travail de développement deviennent des cibles et des cibles assez immédiates.
    Le gouvernement de Kandahar lui-même a dit que les forces armées et policières n'étaient pas capables de protéger ces collectivités et qu'elles n'étaient pas capables de protéger les projets envisagés. Dans ce contexte, elles deviennent des cibles vulnérables assez évidentes, suivant une sorte de politique du pire qui vise à miner la valeur du développement.
    Le développement est toujours infiniment complexe sur les lieux d'un conflit aigu. S'il est fait par l'armée et qu'il est lié à la collaboration des villages et des régions avec l'armée, je le répète, en terrain de conflit aigu, il génère ces contradictions.
    Nos forces travaillent donc peut-être à l'encontre de la partie de leur mandat qui consiste à protéger les civils lorsqu'elles mènent des projets de développement qui sont mal perçus et qui font des collectivités des cibles pour les insurgés.
    Merci.
    Monsieur Bachand, c'est votre tour.

[Français]

    Je veux d'abord vous remercier. Cela fait du bien d'entendre des visions différentes concernant la présence canadienne en Afghanistan. J'étais probablement là en même temps que vous, monsieur McCort; j'y suis allé du 14 au 18 mai. J'étais là au moment des bombardements à Azizi. Je vous avoue être revenu un peu bouleversé par la situation que j'ai vue là-bas. Pourtant, j'étais allé dans des théâtres d'opérations assez difficiles dans le passé, en Érythrée, en Éthiopie, en Bosnie, mais je n'avais jamais rien vu d'aussi pire que la situation en Afghanistan. C'était d'une grande tristesse et très frustrant pour nous de ne pas pouvoir sortir et aider les enfants qui étaient très mal pris. Les mesures de sécurité étaient tellement serrées qu'on ne pouvait pas quitter les véhicules blindés. On pouvait seulement voir ce qui se passait à l'extérieur. Tout cela fait beaucoup réfléchir. On se demande si la mission de l'armée canadienne est bien conduite. Par contre, pendant qu'on est là, on a d'excellents breffages de l'OTAN.
    J'étais un invité de l'OTAN. J'ai été surpris d'apprendre que le général Richards, qui est le commandant en chef des forces de l'OTAN en Afghanistan, a dit que la prochaine étape étant le Sud, c'est-à-dire là où sont les Forces canadiennes, il y aurait un peu une mise au point à faire avec la mission canadienne parce qu'il trouvait que cette mission devait faire un peu moins la chasse aux talibans et assurer un peu plus la protection et la sécurité des gens qui doivent faire la reconstruction.
    J'imagine que ce langage est comme de la musique à vos oreilles. Les Canadiens nous reprochent beaucoup, je crois, de participer à Operation Enduring Freedom. Je suis un ami des Américains, mais ce n'est pas tout le monde au Canada qui l'est présentement. Quand les gens savent que les troupes canadiennes évoluent dans le cadre de Operation Enduring Freedom, cela leur pose problème. Je suis l'un des partisans d'une entrée rapide de l'OTAN et je peux vous dire qu'il y a des plans en cours afin de faire en sorte que cela se produise le plus rapidement possible.
    J'aimerais vous entendre parler du changement de mission. J'imagine que vous partagez à 100 p. 100 la philosophie de l'OTAN qui veut que l'on cesse de faire la chasse aux talibans, qui ne constitue que de la provocation, afin que l'on se concentre sur la sécurité et que l'on gagne le coeur et l'esprit des Afghans, plutôt que de voir les troupes canadiennes chasser les talibans. Il y a probablement des gens dans ces familles, dans ces villages, qui ont de la famille chez les talibans. Ce n'est donc pas très populaire de revenir avec des cadavres de talibans et de les afficher. Enfin, je ne sais pas ce qu'ils font, mais il me semble que ce serait une bonne solution.
    J'aimerais entendre votre opinion sur l'avis du général Richards. Trouvez-vous que c'est la bonne et la seule voie qu'on doit poursuivre, au moment où on se parle?
(1625)

[Traduction]

    Si je peux vous répondre en anglais, je suis tout à fait d'accord qu'il est essentiel de cesser la chasse et d'intensifier la protection. Il est important pour notre organisation que nous ne demandions pas la protection de l'armée pour nous-mêmes. Nous réclamons la protection des collectivités. Si elles sont en sécurité, notre personnel sera en sécurité.
    Notre point de départ concernant la protection, c'est que les collectivités elles-mêmes sont la première étape. Notre personnel, qui est d'origine afghane, s'y mêle parfaitement. Dans les zones dangereuses, nos employés ne se déplacent même pas avec crayons et papier pour que leur intégration soit complète. Il serait dangereux pour moi de m'y rendre et c'est risqué pour eux, mais ils ne sont pas des cibles.
    Nous croyons que cette évolution doit se produire le plus rapidement possible, mais il ne faudrait pas comprendre que nous demandons de la protection pour nous-mêmes et notre personnel. Nos employés continueront leurs activités de façon indépendante, adopteront les mesures de sécurité qu'ils choisissent — comme de se déplacer sans crayon ni papier —, mais ils ont besoin des collectivités elles-mêmes pour sentir qu'ils ne seront pas visés et qu'ils seront protégés.
    De plus, nous entendons souvent nos collègues des droits de la personne nous dire que pour beaucoup d'Afghans, pour les femmes en particulier, les talibans ne sont pas la seule et même pas la principale menace à la sécurité, donc en mettant l'accent sur la chasse aux talibans, les forces internationale qui participent à Operation Enduring Freedom ne répondent pas à leur besoin de sécurité. Dans la collectivité, la principale menace à la sécurité d'une femme peut être la police locale. Ce peut être les caïds de la drogue ou les criminels. C'est le climat général d'insécurité qu'il faut changer et cette façon de faire n'aide en rien, donc je suis d'accord avec ce que vous avez dit.
(1630)
    Monsieur Bachand, il vous reste une minute.

[Français]

     J'ai une autre inquiétude, cette fois en ce qui a trait au moment où on va prendre le contrôle complet de l'Afghanistan. Le général Richards et le général Jones, qui est le commandant de l'OEF, nous ont dit que l'aspect anti-insurrection va rester entre les mains de l'OTAN et que l'aspect anti-terrorisme va rester entre les mains de Operation Enduring Freedom.
    En fait, cela présente un problème, selon moi, car il peut y avoir confusion dans le commandement et le contrôle. Je ne pense pas, dans le cas de ce qui s'est passé à Azizi, que les Américains aient avisé l'OTAN qu'ils allaient bombarder l'endroit.
    J'ai peur, compte tenu de la présence des soldats de la communauté internationale, qu'il y ait des morts à la suite de tirs amis. Il peut aussi y avoir une confusion dans le commandement. Je trouve que c'est dangereux qu'il y ait ces deux types d'interventions. Je voudrais seulement savoir quel est votre avis à ce sujet.
    Si le temps ne nous le permet pas, monsieur le président, je suggère qu'on m'envoie une réponse écrite.

[Traduction]

    Monsieur Staples, allez-y. Il reste 30 secondes.
    Selon le New York Times, les Américains se demandent si l'OTAN sera en mesure de gérer l'activité militaire accrue et les combats qui ont lieu là-bas. Selon cet article, on envisagerait de retarder l'étape 4, qui consiste à ce que l'OTAN prenne le relais d'Operation Enduring Freedom dans la partie est.
    Les Américains sont sceptiques quant à la capacité de l'OTAN, concrètement et moralement, d'assumer ce qu'ils considèrent comme un rôle d'anti-insurrection. De plus en plus, ils évitent de se prononcer. Lorsque le brigadier-général Fraser a repris le commandement en février, nous nous rappelons que ce dernier commandant américain a exhorté les troupes canadiennes à aller là-bas et... à les tuer. En fait, je dirais que le Canada a brouillé les cartes entre les deux missions. Pendant très longtemps, il était difficile pour les Canadiens de même comprendre que nous agissions dans le cadre d'Operation Enduring Freedom. Les fonctionnaires, les médias et les porte-parole de l'armée canadienne éludaient la question. Ils essayaient de dire que nous étions rattachés à l'OTAN. Maintenant, il est clair dans l'esprit de tout le monde, depuis le bombardement d'Azizi, que nous agissions dans le cadre d'Operation Enduring Freedom, donc même si nous faisons la transition vers l'OTAN, peut-être un moment donné cet été, le problème de la présence d'Operation Enduring Freedom dans le pays demeurerait.
    C'est assez. C'était tout le temps dont disposait M. Bachand.
    Nous allons céder la parole à M. Christopherson pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre exposé. Je ne suis pas le porte-parole de la défense pour notre parti. C'est Dawn Black, mais Dawn avait un autre engagement, donc je suis ici pour le remplacer de mon mieux. Je vous remercie beaucoup de nous éclairer un peu là où nous en avons bien besoin.
    Je veux simplement m'assurer de bien comprendre. Operation Archer est la mission canadienne associée à Operation Enduring Freedom, qui bien entendu, est dirigée par les États-Unis et se veut une opération antiterrorisme et anti-insurrection, en grande partie. La mission ISAF de l'OTAN mandatée par l'ONU est une mission plus conventionnelle de paix et d'assistance. Est-ce bien cela? Oui.
    Je vais vous poser quelques questions à ce propos. Pour les besoins de la cause, imaginons que notre mission relève toujours d'Enduring Freedom et que demain, elle passe instantanément aux mains de l'OTAN. Après ce changement, quelles seront les différences entre les activités quotidiennes de nos troupes aujourd'hui et leurs activités demain? N'importe lequel d'entre vous peut me répondre.
    C'est une très bonne question, à laquelle je n'ai pas entendu de bonne réponse à la dernière réunion, lorsqu'elle a été posée devant le comité.
    On semble croire que ce sera une continuation : que la mission sera simplement une continuation, qu'il y aura très peu de différence. C'est d'ailleurs pourquoi j'ai souligné que ce ne serait pas ce à quoi s'attend l'OTAN, parce que l'OTAN voit ces missions très différemment. Comme M. Bachand vient de le préciser, le commandant en chef de l'OTAN voudrait que les Canadiens changent de stratégie lorsqu'ils agiront dans le contexte de l'OTAN, mais je pense que le gouvernement doit s'expliquer. C'est l'une des questions fondamentales qui devaient être expliquées avant que nous votions sur le prolongement de la mission pendant deux années de plus.
    Avez-vous quelque chose à ajouter, madame Simpson?
    J'abonde dans le même sens que Steve et je crois qu'il faudrait vraiment clarifier les choses. Le ministre O'Connor a dit dans un débat récent à la Chambre que rien ne changerait dans cette transition, ce qui surprendrait vraiment beaucoup de monde, comme Steve l'a dit. Je pense qu'il faut véritablement clarifier tout cela.
    Comme Steve l'a mentionné, ces deux missions ont des buts et des structures différentes, et même l'appui qu'elles reçoivent de la communauté internationale est différent. La mission de l'OTAN est une opération de soutien de la paix, je le répète. Elle vise à contribuer à la mise en oeuvre du Pacte pour l'Afghanistan, un accord de paix qui a été signé et en vue duquel le Canada a beaucoup travaillé. Il prévoit tout un train de mesures de soutien pour la réconciliation ainsi que des mesures de sécurité assorties d'une force de sécurité robuste, mais autorisée par l'ONU. C'est une mission assez différente d'Operation Enduring Freedom.
    Les plus récentes résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU qui font mention d'Operation Enduring Freedom et de la mission ISAF exposent très clairement que ce sont deux missions distinctes et que bien qu'on s'attende à ce qu'il y ait des communications entre elles, ce sont des missions distinctes qui englobent des activités différentes.
    Je pense donc vraiment que le comité doit s'occuper de cette question.
(1635)
    Si je le peux, j'aimerais ajouter une chose.
    Veuillez me corriger si je me trompe, mais je croyais que l'OTAN était en train de débattre à l'interne afin de déterminer si elle allait se lancer dans cette aventure et dans l'affirmative, ce qu'elle allait faire exactement et quelles responsabilités elle allait assumer. Je croyais que c'était ce débat qui l'empêchait d'assumer son rôle, puisqu'elle devrait déjà l'assumer. Est-ce exact? Y a-t-il toujours un débat à l'OTAN sur ce que l'organisme estime être sommé de faire? Je vous prierais de m'aider un peu.
    Je crois qu'il y a eu un débat et qu'il y en a encore un. C'est ce dont les Hollandais débattaient. Ils se demandaient quel rôle ils allaient assumer en Afghanistan. Est-ce que ce sera une mission de soutien de la paix semblable à ce que nous considérerions comme une opération de maintien de la paix de l'ONU? C'est semblable, et je pense que les Canadiens sont...
    En fait, en général, toutes les missions de maintien de la paix de l'ONU s'inscrivent dans le contexte du chapitre 7 ces temps-ci, ou du moins 90 p. 100 d'entre elles. Elles sont donc robustes; les soldats peuvent se défendre ou riposter, mais ils ne forment pas pour autant une force de combat. Comme l'un de mes collègues du Collège des Forces canadiennes me l'a expliqué, il y a une différence entre être capable de combattre et initier le combat. Dans une mission de l'OTAN, on est capable de riposter, mais dans une mission anti-insurrection, on ne cherche pas la bataille. La différence est la source du combat, elle se trouve dans le fait de l'engager à dessein.
    Comme cette question soulève beaucoup d'inquiétude, je voulais souligner que le débat des Hollandais a eu pour résultat, entre autres, l'accord sur le transfert de prisonniers. Des conditions très strictes ont été établies dans cet accord. Même si le Parlement l'a approuvé, il n'a pas fait de chèque en blanc et leur accord sur le transfert de prisonniers est bien meilleur que le nôtre. Je n'entrerai pas dans ce débat, parce que je pense que vous devriez inviter Amir Attaran ou Michael Byers, peut-être, pour en discuter. À titre d'exemple, cependant, c'est l'un des résultats positifs.
    Je pense que ce débat va reprendre à Riga à l'automne, au prochain sommet de l'OTAN, en novembre.
    Je suis curieux, mais qu'arrivera-t-il si l'OTAN ne parvient pas à une entente et n'accepte pas de prendre le relais?
    Ensuite, je crois comprendre que le Canada a offert de reprendre le leadership de cette mission et je suis certain qu'il a dû se battre contre les autres qui le voulaient aussi. Je présume que c'est la mission de l'OTAN qu'il reprendra en 2008, n'est-ce pas?
    Vous pouvez peut-être répondre à ces deux questions. La première est hypothétique : qu'arrivera-t-il si l'OTAN demeure contre et qu'elle n'est pas prête à prendre gentiment le relais, pour que le Canada puisse faire une belle petite transition? Ensuite, quel est le rôle que nous avons offert de jouer en 2008, que personne d'autre, d'après moi, ne voulait assumer? Quoi qu'il en soit, comment cela sera-t-il possible?
    Ce n'est pas entièrement clair à mes yeux.
    Je pensais qu'on parlait de 2009 dans la proposition, qui est sortie quelques jours avant le débat.
(1640)
    Je peux me tromper.
    En gros, vous avez raison que nous pourrions reprendre cette émission. Ce que cela signifie essentiellement n'est pas clair, mais il est assez clair que l'OTAN est prête à prendre le sud. Il y a une approche progressive pour reprendre une province à la fois, dans le sud, et je pense que l'est sera la dernière étape, la quatrième étape. Les choses évoluent donc.
    Cela dit, l'OTAN semble rechigner à prendre le relais. Lorsque les libéraux ont approuvé notre déplacement vers le sud dans le cadre d'Operation Enduring Freedom, le délai était censé être très court : nous nous serions essentiellement déplacés vers le sud, puis la transition à l'OTAN se serait faite presque tout de suite. Mais il y a eu un retard. Les Britanniques ont mis du temps à arriver, les Hollandais ne sont pas encore là et ils n'arriveront pas avant l'automne. C'est pourquoi il n'y a pas de date fixe.
    Je l'ai appris par la bande, mais je me trouvais avec le major-général Lewis MacKenzie, qui m'a dit qu'il avait parlé aux gens de SACEUR et de l'OTAN. Il m'a dit qu'ils hésitaient à voir exactement ce qui allait arriver et à recruter des troupes dans le sud avant que l'OTAN ne soit prête à prendre le relais, ce qui est curieux, parce qu'on peut se demander si nous avons pris trop d'avance, devant l'OTAN, puis que nous avons été laissés en plan. Il y aurait lieu de creuser davantage la question.
    Mon temps est-il écoulé, monsieur le président?
    Oui. Merci beaucoup.

[Français]

    Qui va parler, de votre côté? Allez-y.

[Traduction]

    J'aimerais proposer que nous levions la séance.

[Français]

    D'accord. Votre motion est recevable.

[Traduction]

    Y a-t-il quelqu'un qui veut appuyer cette motion?
    Demandez-vous un appuyeur ou le vote?
    Je demande le vote. On me dit qu'il n'y a pas de débat.

[Français]

    On me dit qu'il n'y a pas de débat. On passe donc au vote immédiatement.

[Traduction]

    Demandez-vous le vote?

[Français]

    (La motion est adoptée.)
    Le vice-président (M. Claude Bachand): La séance est levée.