LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent des langues officielles
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 28 novembre 2006
[Enregistrement électronique]
[Français]
Bonjour, madame et messieurs. Je souhaite la bienvenue à nos témoins en personne et au téléphone, ainsi qu'à tous les membres du comité. On a des problèmes techniques ce matin, mais je pense qu'on va les régler.
Nous allons procéder de la manière suivante : nos témoins disposeront de cinq minutes chacun pour faire une présentation, et les membres du comité leur poseront des questions par la suite.
Nous allons commencer par M. Potié. M. Potié représente l'Association de la presse francophone.
Monsieur, vous avez environ cinq minutes pour faire votre présentation.
On peut dire à nos deux ou trois autres témoins qu'on leur parlera par la suite. Il semble qu'ils peuvent nous entendre.
Un témoin: Oui, on peut vous entendre.
J'aimerais vous remercier de l'occasion qui m'est donnée de vous parler des préoccupations de l'Association de la presse francophone, de même que de ses points de vue sur la vitalité des communautés et sur le Plan d'action pour les langues officielles.
L'Association de la presse francophone regroupe des journaux hebdomadaires et bimensuels francophones en situation minoritaire un peu partout au Canada, exception faite du Québec, évidemment.
Notre mandat consiste à faire la promotion de la presse écrite francophone dans tout le pays, à défendre ses intérêts et à assurer son développement.
Je vais commencer par parler de notre position sur la vitalité des communautés. Les journaux francophones sont un indicateur de la vitalité des communautés. Ce n'est pas un signe de vitalité communautaire francophone lorsqu'il n'y a aucun journal francophone dans une région donnée, mais lorsqu'un endroit a un ou plusieurs journaux francophones, c'est un bon signe de vitalité communautaire francophone et économique.
Les journaux sont également une source de vitalité pour ces communautés. Sans la présence d'un journal, la cohésion communautaire et les projets de développement, qu'ils soient d'ordre social, économique, politique ou éducatif, sont beaucoup plus difficiles à réaliser, s'il n'y a pas d'autres moyens communication adéquats. Nous en bénéficions aussi. De toute évidence, une communauté dont la population diminue ou dont l'économie est en difficulté aura peine à faire vivre un journal ou une radio. Les médias ont besoin de l'appui de la communauté.
Par rapport au plan d'action, je peux vous dire que l'ajout de mesures d'intervention destinées aux domaines de la santé, de la justice, de l'immigration et de l'alphabétisation a contribué à la vitalité de ces communautés et, par ricochet, à celle de nos journaux. Mais je ne peux quantifier les retombées économiques ou les articles que ces mesures ont entraînés. Il est très difficile pour nous d'évaluer l'impact exact du plan d'action sur nos journaux.
Nous remarquons cependant que le domaine des communications est pratiquement absent du plan d'action. Dans tout le document, il n'est mentionné qu'une fois ou deux, et ce, très brièvement. Nous trouvons évidemment que c'est là une lacune importante, compte tenu de la place qu'occupent les communications dans le monde d'aujourd'hui.
Nous parlons de communautés qui ont accès à un journal ou à une radio. Nous vivons dans un monde où l'offre de médias est énorme. Nous devons concurrencer et lutter contre l'assimilation. Le fait que les gens puissent syntoniser 70 postes de télé en anglais, voire 100 ou 200, et qu'ils aient accès à plus de 100 magazines en anglais au dépanneur constitue une grande concurrence pour nous. Il est très difficile, entre autres, d'offrir à nos jeunes un contenu qui les intéressera et les stimulera assez pour qu'ils restent dans la francophonie. Nous estimons que le plan d'action présente une lacune à cet égard.
Une autre lacune du plan est qu'on n'a pas communiqué avec les gens avant de l'élaborer. J'assiste à des réunions d'organismes où l'on évalue le plan. Il est très difficile pour moi de savoir ce qu'on a fait par rapport à ce plan.
Le grand public francophone n'a aucune idée des efforts de développement qui sont faits dans leur communauté. On a peut-être craint de mal dépenser les fonds, mais on n'a pas communiqué avec le public. Ce n'était pas de l'argent nécessairement gaspillé. Je parle ici de M. ou Mme Tout-le-Monde qui ne fait pas partie d'un organisme qui débat chaque jour de ces questions.
Notre organisme fait partie de la famille des organismes francophones. Nous pensons, tout comme la Fédération des communautés francophones et acadienne, que la somme d'argent allouée aux organismes francophones nationaux et provinciaux ne tient pas compte de l'inflation et du nombre de plus en plus grand de dossiers dans lesquels nous devons intervenir.
Pour être efficaces et réalistes, nous avons besoin d'une enveloppe plus importante, non pas par projet, mais en guise d'appui à une infrastructure de base dans divers secteurs de la communauté. On a multiplié les secteurs, mais nous nous retrouvons encore avec seulement deux ou trois personnes pour courir les comités permanents, etc. À un certain moment, on ne suffit plus à la tâche.
Je vais parler de mesures précises que l'on pourrait prendre pour aider la presse francophone et les communications dans leur ensemble. Nous sommes actuellement préoccupés par le fait que la Société canadienne des postes se retire financièrement du Programme d'aide aux publications. C'est 25 p. 100 de l'aide à la distribution postale qui disparaît. On ne connaît pas encore les conséquences de ce retrait sur nos journaux, mais cela nous préoccupe.
Il y a également une série de programmes d'appui à l'édition qui proviennent du Fonds du Canada pour les magazines. À toutes fins pratiques, il y a peu ou pas d'industries du magazine francophone à l'extérieur du Québec. Dans l'esprit de la Loi sur les langues officielles et de l'amendement qui a été adopté pour rendre la partie VII exécutoire, il y aurait lieu d'adapter ce fonds à la réalité de nos communautés et d'appuyer la presse écrite qu'on est capable de se donner, plutôt que d'exiger des critères non réalistes tels qu'un magazine papier glacé tiré à un nombre donné d'exemplaires.
La formation et la rétention du personnel, de même que la gestion de la publicité, sont deux autres de nos préoccupations. Le niveau de publicité du gouvernement fédéral n'est pas revenu à ce qu'il était avant le moratoire sur la publicité. La situation s'est améliorée, mais on est encore loin du niveau qui a déjà été atteint.
Merci de votre attention.
Merci beaucoup, monsieur Potié.
Nous allons maintenant passer à notre deuxième témoin, M. Pierre Bélanger, président du conseil d'administration de l'Alliance de la francophonie de Timmins.
Monsieur Bélanger, vous avez environ cinq minutes.
Bonjour. J'espère que le fait qu'on se parle au téléphone et qu'on ne puisse pas se voir n'est pas un mauvais présage pour l'avenir des organisations communautaires franco-ontariennes. J'espère que je ne vous parle pas d'outre-tombe, car on a appris hier que l'ACFO régionale de Supérieur-Nord, à Sault Ste. Marie, a fermé ses portes faute de moyens financiers.
Il est évident qu'il y a une crise au niveau des organisations communautaires. Je parlerai surtout des ACFO et de l'Alliance de la francophonie de Timmins, étant donné qu'on a changé notre nom et notre composition pour mieux refléter notre communauté et pour mieux assurer notre survie et notre efficacité.
Il ne fait aucun doute qu'il y a une crise, et elle est d'abord financière. M. Potié a fait allusion plus tôt à l'insuffisance du financement des organisations francophones et acadiennes. C'est un fait.
L'autre problème, c'est qu'on finance beaucoup plus d'organismes. Les organisations sur le terrain, celles qui font le travail dans les communautés, ont vu leur financement réduit dans les années 1990. Évidemment, leur financement n'a pas suivi la courbe de l'inflation, de sorte que l'Alliance de la francophonie de Timmins, qui dessert une population francophone de 19 000 personnes à Timmins uniquement, ne peut même pas avoir du personnel à temps complet: ni secrétaire, ni directeur général, ni agent de développement. Nous disposons d'un personnel à temps partiel et de bénévoles. Il s'agit d'un bénévolat que j'ai déjà qualifié, à Radio-Canada, de bénévolat d'extrême, parce qu'il se fait les soirs et les fins de semaine; c'est excessivement difficile.
Je vais vous rappeler rapidement l'importance des organisations de proximité, d'organisations sur le terrain comme l'Alliance de la francophonie, l'ACFO Kirkland Lake, l'ACFO Cochrane-Iroquois Falls, l'ACFO Temiskaming Shores, etc. C'est grâce au travail de ces organisations qu'on a pu obtenir des écoles secondaires françaises dans les années 1960, des centres de santé communautaires, des garderies francophones, des centres d'alphabétisation et, dans certains milieux, des centres culturels.
À Timmins, on a mené un combat pour avoir un journal et on a maintenant des journaux francophones. On s'est aussi battu pour avoir des collèges de langue française. Je n'ai pas à démontrer l'importance d'organisations comme les ACFO sur le plan du développement communautaire et de la vitalité des communautés linguistiques minoritaires francophones en Ontario.
La crise est liée au manque de moyens, surtout financiers, qui nous donnent les moyens administratifs de faire notre travail. Vous savez que dans les années 1990, on a subi des compressions budgétaires énormes. À titre de comparaison, notre budget était de 50 000 $ en 1985 et, au plus creux de la vague, dans les années 1997-1998, il est tombé à 31 000 $.
En 2006, on a un énorme, faramineux, mirobolant financement de 37 600 $, pour être plus précis. Évidemment, on ne tient pas compte de l'inflation, car si on utilisait le calculateur de l'inflation de la Banque du Canada, 50 000 $, en 1985, donnerait 86 000 $, en 2006.
Ce financement nous permettrait d'avoir au moins deux personnes à temps complet. On aurait les moyens de faire notre travail et de développer les dossiers prioritaires. Par exemple, la communauté de Timmins a besoin d'un centre de santé communautaire. On y travaille depuis des années, mais on se heurte toujours aux changements de gouvernement, aux affaires politiques conjoncturelles. On n'a pas de centre de santé communautaire, à Timmins, afin de desservir une population de 19 000 francophones. Je n'ai pas à vous expliquer nos problèmes de recrutement de médecins francophones. Ce dossier est prioritaire.
L'Alliance de la francophonie de Timmins a élaboré le volet francophone du plan stratégique de la ville. On se bat pour obtenir un nouveau campus du Collège Boréal, qui serait un centre des métiers et desservirait toute la région de Hearst jusqu'à New Liskeard, région dont Timmins est le noyau naturel du développement socioéconomique. Voilà un autre dossier prioritaire.
De façon réaliste, il nous faudrait 86 000 $. La semaine dernière, nous avons demandé au Comité permanent du patrimoine canadien un financement réaliste d'environ 60 000 $, avec une nouvelle formule de financement.
Si l'argent ne se rend pas directement aux organismes qui luttent sur le terrain pour offrir des services de qualité à la population francophone, qui luttent contre l'assimilation de notre population et qui oeuvrent de concert avec les autres organismes, dont l'Association de la presse francophone est évidemment un organisme très important, on n'aura pas les moyens de faire notre travail et on sera simplement obligés de fermer les portes de notre organisme. À présent, on est au bout de la corde, au bout du rouleau.
Cela fait déjà une dizaine d'années qu'on travaille très étroitement avec la communauté pour obtenir de l'argent pour combler le manque de financement. On a travaillé très fort au développement de projets, afin d'être en mesure de payer du personnel plus ou moins à temps complet pour au moins faire fonctionner nos organismes.
Actuellement, on est rendus au bout de la corde. Les communautés ne sont plus ce qu'elles étaient. Il y a eu des changements économiques importants. Très souvent, les entrepreneurs francophones ont vendu leurs entreprises à des multinationales anglophones américaines. Ces gens n'ont pas la même sensibilité vis-à-vis du milieu. On a de la difficulté à obtenir leur aide pour fonctionner. C'est donc une voie qu'on a explorée, mais qui ne donne pas les résultats escomptés. Cela ne peut pas pallier le manque de financement fédéral.
Évidemment, on vit une crise. L'ACFO Cochrane-Iroquois Falls vit une crise financière parce qu'elle a eu une énorme enveloppe de 18 000 $ l'année dernière. L'ACFO Kirkland Lake et l'ACFO Rive-Nord, à Elliot Lake, ont le même problème. Une crise majeure existe depuis 10 ans, mais à présent, elle est rendue à son point d'aboutissement. Quant à nous, si nous sommes incapables d'obtenir un meilleur financement pour nous permettre de fonctionner et d'opérer, nous serons obligés de mettre la clé dans la porte.
Les défis sont énormes parce que l'industrie forestière vit une crise très difficile qui affecte nos communautés. Il y a une crise quant à l'accès aux marchés américains, et on est en train de faire une restructuration. Cela ne nous aide pas dans notre tentative d'obtenir un meilleur financement afin de faire notre travail. On pourrait être des acteurs importants dans la résolution de cette crise, mais on n'a pas les moyens d'être présents pour faire notre travail adéquatement, car on n'a pas de personnel à temps complet.
D'accord.
En conclusion, il faut absolument trouver une solution pour augmenter l'enveloppe provinciale afin que les organisations de proximité, de terrain, près des pâquerettes et des pissenlits, qui sont bien intégrées, qui connaissent les besoins et qui travaillent avec les forces vives de leur milieu puissent avoir un financement stable qui leur permettra de fonctionner adéquatement et de façon structurée.
Merci beaucoup. Veuillez garder la ligne.
Nous allons donner cinq minutes à M. Grenier, du journal Le Voyageur de Sudbury, pour faire ses commentaires.
Monsieur Grenier.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de me donner cette occasion de m'adresser à vous.
Je parlerai vite et avec franchise. Je suis connu, à Sudbury, pour avoir un franc-parler et –
Monsieur Grenier, si vous pouviez attendre une minute; on ne vous entend pas bien. On va ajuster le volume.
On essaie de nouveau.
J'ai changé de téléphone; peut-être que cela aidera un peu.
Le président: C'est beaucoup mieux.
M. Réjean Grenier: Je suis connu ici pour ne pas donner dans la dentelle. Je tiens à vous dire, au départ, une chose fondamentale : j'ai la ferme conviction que l'unité canadienne passe par une communauté canadienne-française dynamique et en santé. Vous pouvez passer toutes les résolutions que vous voudrez sur la nation du Québec, mais tant que des communautés mourront à l'extérieur du Québec, les Québécois, qui ne sont pas fous, sauront que le Canada n'est pas leur pays. Alors, il est clair que les communautés hors Québec sont la clé de l'unité nationale.
Ce matin, je vais vous parler de la vitalité des communautés francophones, à la lumière du plan d'action, communément appelé le plan Dion. Je vais aussi parler des communications.
Depuis 30 ans, je suis dans les médias et je couvre assidûment toute cette question des communautés francophones. J'ai connu les leaders et les communautés, j'ai suivi les batailles épiques pour les écoles et pour toutes sortes de choses.
Je tiens à dire que le gouvernement fédéral s'est donné une responsabilité envers cette communauté. Cette responsabilité est reconnue dans la Constitution, dans la Charte des droits et libertés et dans la Loi sur les langues officielles. Il est clair que le gouvernement fédéral ne l'a pas prise au sérieux. Je pense aussi qu'il est clair que le plan Dion n'a eu aucun impact sur les communautés.
Un des éléments les plus dévastateurs que l'on constate surtout depuis environ sept ou huit ans, soit depuis le premier scandale à DRHC, l'ex-Service Canada, et depuis le scandale des commandites, c'est qu'une paranoïa s'est installée au sein de l'appareil gouvernemental, ce qui fait que les subventions gouvernementales sont maintenant rendues presque inaccessibles et toujours inefficaces. On subventionne des projets, mais on ne paie personne à la base pour les mener à bien. On donne des projets à des gens, on leur dit qu'ils ont tant d'argent pour mener à bien un projet, mais on ne leur paie pas un loyer ni le téléphone. Finalement, on ne paie pas grand-chose, et ils doivent obtenir des résultats. On nous demande ensuite d'analyser les résultats de toutes sortes de choses. C'est pas mal plus difficile à faire.
Les programmes qui sont spécifiquement destinés aux organismes minoritaires sont souvent organisés pour la majorité. Je vous donne un exemple. Il y a des programmes pour les jeunes stagiaires où on retrouve toutes sortes de critères, mais les critères qui s'adressent à la majorité sont faciles à remplir. Par exemple, dans ma communauté, je dois embaucher des diplômés francophones, mais il y a pas mal moins de diplômés francophones que de diplômés anglophones. Alors, au départ, mon choix est plus restreint.
Deuxièmement, si je veux embaucher un ou une graphiste, on ne prend pas en considération le fait qu'il n'y a pas de cours de graphisme en français à Sudbury. Toutefois, selon les critères, je ne peux embaucher quelqu'un de l'extérieur; je dois engager quelqu'un de Sudbury. Pour les francophones hors Québec, cette situation ne fonctionne pas. Ça va pour les gens de la majorité parce que le cours offert à Sudbury est en anglais. Ils ont le choix, mais pas moi. Pourtant, il y aurait une façon vraiment simple de régler de telles situations.
De récents jugements de la Cour suprême du Canada — je pense notamment au jugement Summerside — donnent des directives claires quant au traitement des minorités de langue officielle. Le juge Bastarache y explique en long et en large qu'un traitement égal ne veut pas dire l'application des mêmes critères. Il ajoute même que souvent, pour régler une situation défavorable, il faut donner plus ou donner autrement afin d'atteindre l'égalité. Il me semble que c'est clair, mais cela ne semble pas clair pour ceux qui élaborent les programmes au sein de l'appareil gouvernemental.
Les fonctionnaires ont tendance à généraliser et à vouloir que tout soit égal pour tous. Pourtant, la loi et les jugements permettent qu'il y ait une différence. Les minorités de langue officielle partent de très loin, rappelons-le.
Donc, le plan Dion n'a eu aucun effet sur les communautés francophones du pays, d'abord parce qu'il a été contré par cet immobilisme au sein de l'appareil gouvernemental, par ce choix de tout faire de manière égale, ce qui défavorise les communautés francophones. Une autre grande lacune du plan Dion — je pense que M. Potié y a fait allusion tout à l'heure —, c'est le secteur des communications, mais on n'en parle pas. On parle de santé et d'éducation, de justice, d'immigration, qui sont toutes de compétence provinciale, remarquez bien, ce qui fait en sorte qu'on donne de l'argent aux provinces, qui en font ce qu'elles veulent.
Dans certains cas, comme en Ontario, l'argent a été utilisé pour l'éducation, pour des programmes en français dans les conseils scolaires. C'est tant mieux. Dans les autres secteurs, je n'en ai aucune idée. Là encore, M. Potié y a fait allusion. Dans le plan Dion, on ne dit nulle part pour qui ce plan a été élaboré et ce qu'on fait avec l'argent. On dépense 750 millions de dollars, mais on ne dit pas aux gens de quelle façon on va les dépenser. Pourtant, il me semble qu'on n'a rien à cacher.
J'aimerais aussi vous parler des communications et vous rappeler qu'en 2004, M. Potié, de l'Association de la presse francophone, vous avait fait une présentation au sujet de la mort lente, mais programmée, de plusieurs publications. Par exemple, il y a deux ans, j'ai acquis le seul magazine d'affaires publié hors Québec, Le lien économique. Quand j'ai acheté cette publication, j'ai fait mes devoirs. M. D'Amours, s'il est présent, comprendra certainement que la BDC n'a pas financé cet achat sans que je lui présente un plan d'affaires. Celui-ci était basé sur des chiffres que j'avais obtenus de l'entreprise que j'achetais. Le plan d'affaires mettait donc en valeur certaines contributions du gouvernement fédéral, ce qui lui faisait une certaine publicité. Ce n'était pas « les gros chars », mais cela lui en faisait. Depuis que je l'ai acheté, en 2004, le gouvernement fédéral a acheté une seule publicité dans 15 publications. Je tire la langue, et ce magazine va probablement fermer ses portes. C'est le seul magazine de ce genre hors Québec.
L'autre problème concerne le Programme d'aide aux publications, dont a parlé M. Potié. Le fait que Postes Canada retire sa participation de 25 p. 100 à ce programme représente pour moi, qui je suis propriétaire de deux publications, une perte nette de plus de 40 000 $. Le voyageur et Le lien économique n'ont jamais, ensemble, réalisé des profits de plus de 40 000 $. Par conséquent, de deux choses l'une: on cesse de publier ou on augmente nos prix.
Notre communauté va accepter des augmentations de prix jusqu'à un certain point, mais viendra un temps où cela ne fonctionnera plus. Pourtant, c'est un journal qui a connu, en huit ans, une croissance de 650 p. 100 quant au nombre d'abonnés. Cela veut donc dire qu'il y a un intérêt. Nous avons commencé avec 2 005 foyers et nous sommes rendus à 15 000 foyers. Cela constitue quand même une demande. Le monde le veut. On sera incapables de le faire vivre si on coupe dans des programmes comme le Programme d'aide aux publications.
Je vais terminer en vous disant qu'en 2002-2003, le Programme d'aide aux publications donnait 10 millions de dollars à Rogers Communications; 9 millions de dollars à Transcontinental; et 2,5 millions de dollars à Quebecor. À l'ensemble des journaux francophones hors Québec, il donnait beaucoup moins d'un million de dollars; on parle ici de 26 journaux. Il me semble que cela n'a pas d'allure.
Je réitère ce que vous disait l'APF il y a deux ans et demi: ce qui se passe maintenant en ce qui a trait aux journaux hors Québec, c'est, pour plusieurs d'entre eux, une mort lente mais programmée. Depuis deux ans, les choses n'ont fait qu'empirer. Je me demande quand ça va changer.
Je vous remercie, monsieur Grenier.
Nous allons commencer la période de questions. Je demande aux députés d'identifier le témoin auquel ils posent leur question.
Monsieur D'Amours.
Merci, monsieur le président.
Je remercie MM. Potié et Bélanger de leur présence. Merci, monsieur Grenier, de vous joindre à nous par téléphone.
Donc, merci à ceux qui sont à distance.
Ma question s'adresse à deux intervenants : M. Potié et M. Grenier.
Monsieur Grenier, lorsque nous étions à Sudbury, nous avons eu la chance de discuter de la situation et de la problématique entourant le Programme d'aide aux publications depuis que Postes Canada a décidé d'éliminer sa part de financement.
Vous avez expliqué tout à l'heure l'impact que cela pourrait avoir. Je comprends que vous êtes très au courant de la situation. Ce n'est pas parce qu'une entreprise fait des profits qu'il lui reste automatiquement des sous en poche, car elle doit être en mesure de rembourser le capital sur ses emprunts. En fin de compte, l'impact de cette décision de Postes Canada sur les communautés de langue officielle pourrait être très grand, comme vous l'avez dit.
J'aimerais cependant que vous nous parliez davantage des risques qui peuvent s'ensuivre. Vous avez dit tout à l'heure que Le Voyageur compte maintenant 15 000 abonnés, mais à court et à moyen terme, soit d'ici quelques mois à un an, quels seront les impacts réels sur votre journal?
Monsieur Potier, de l'Association de la presse francophone, l'APF, peut-être pourriez-vous nous parler de ce que cela pourrait représenter à l'échelle nationale pour les journaux dans les communautés minoritaires de langue officielle. On parle vraiment de petits journaux dont le tirage est inférieur à 50 000 ou à 35 000 exemplaires par semaine.
Merci.
La première chose que je dois dire, c'est que l'impact sera différent sur le magazine que je publie, dont la situation est très précaire et dont la base de publicités commerciales est beaucoup moins grande parce que, comme je vous l'ai dit, le gouvernement fédéral n'y fait plus paraître d'annonces. De plus, c'est un magazine qui, parce qu'il s'adresse à une communauté assez restreinte — le monde des affaires hors Québec —, ne peut faire appel à Microsoft, par exemple, qui n'annonce pas dans un magazine qui n'a pas une distribution de 100 000 exemplaires. Donc, au départ, cela met vraiment en péril l'avenir du seul magazine d'affaires, qui, soit dit en passant, est imprimé sur du papier glacé et a très belle apparence. Nous recevons énormément de bons commentaires à son sujet.
Pour ce qui est du journal, nous avons déjà annoncé que nous allions augmenter le prix d'abonnement. Nous augmentons aussi nos prix de publicité. Nous espérons que la communauté sera capable d'assumer le coût de cette augmentation. Je pourrai, dans un an, vous donner une réponse beaucoup plus précise, mais présentement, je vais transférer ce manque à gagner à ma communauté; je n'ai pas d'autre choix.
Deuxièmement, bien sûr, nous sommes à inventer quelques autres projets de publicité qui feront que nous pourrons peut-être récolter quelques milliers de dollars de profit ici et là sur certains projets qui pourront venir compenser, du moins en partie, la perte de ces 40 000 $. Comme je vous l'ai dit, Le Voyageur n'a jamais fait un profit de 40 000 $. Alors, c'est clair que si nous ne voulons pas faire de déficit et si nous voulons rembourser nos dettes, comme vous dites, il va falloir, bien sûr, que nous trouvions des moyens ailleurs.
Il me semble cependant que ce qui serait encore beaucoup plus simple, ce serait que le gouvernement fédéral compense cette perte de 25 p. 100 dans son Programme d'aide aux publications.
L'autre possibilité serait de dire à Postes Canada que, bien que l'on comprenne pourquoi elle agit ainsi et qu'elle ne veuille plus donner de l'argent à Rogers Communications, qui en a plus qu'elle-même, elle doit tout de même tenir compte de l'impact de sa décision sur les communautés francophones et, respectant la loi S-3 et la Loi sur les langues officielles –
Monsieur Grenier, il faudrait que je vous arrête maintenant afin de donner à M. Potié quelques minutes pour répondre.
D'abord, pour ce qui est du Programme d'aide aux publications, je voudrais préciser que c'est une subvention reliée à l'envoi des journaux et des périodiques par la poste. Normalement, ce sont des journaux qui sont envoyés à des abonnés. Dans le cas de plusieurs de nos journaux, c'est la seule solution, en termes de distribution. Par exemple, à Vancouver, on n'insère pas notre journal dans le Publisac de façon à couvrir Vancouver dans son entier. Ce serait une façon beaucoup trop coûteuse de rejoindre nos lecteurs. On n'a donc pas le choix que de faire parvenir notre journal à nos lecteurs, c'est-à-dire ceux qui ont demandé explicitement de recevoir notre journal.
Les journaux en situation minoritaire subissent plus fortement certains impacts parce qu'ils n'ont pas de solutions de remplacement. Il est difficile pour eux, par exemple, de composer avec une importante hausse de tarif postal ou de choisir un autre moyen de distribution. De plus, il s'avère que les journaux à distribution par abonnement oeuvrent dans des régions où il y a déjà une publication. Dans l'Est ontarien, par exemple, plusieurs journaux font une distribution généralisée parce que le bassin de population le permet. Par contre, en Colombie-Britannique, en Alberta, au Manitoba, dans le Nord et dans les provinces Atlantiques, il s'agit de distribution par abonnement. Ce sont des endroits où les gens sont toujours sur le qui-vive. Ils se demandent constamment s'ils auront les ressources qui permettront à leur journal de survivre.
Le Gaboteur, à Terre-Neuve, et L'Eau vive, en Saskatchewan, ont dû cesser leurs opérations à plusieurs reprises, pour finalement recommencer, avec l'appui de la communauté et, il faut le dire, de subventions destinées aux communautés francophones. La marge de manoeuvre demeure cependant très étroite. Est-ce qu'un autre d'entre eux va fermer ses portes? C'est difficile à dire. Il reste que cette situation ne facilite pas la vie de ces régions, qui sont déjà en très grande difficulté.
J'abonde dans le sens de M. Grenier. La contribution de Postes Canada est réduite de 15 millions de dollars. En principe, il devrait y avoir un surplus de 15 millions de dollars grâce au dividende que Postes Canada va verser au gouvernement à la fin de l'année. Pour le gouvernement, compenser la différence revient au même.
Merci, monsieur le président.
Merci, messieurs, d'être présents par la voie des ondes. J'aurais aimé que vous soyez avec nous, mais il faut composer avec la situation. La technologie nous permet malgré tout de communiquer.
En matière de financement des communications, j'ai noté des choses qui, à mon avis, sont absolument épouvantables. Je trouve déjà presque impossible à croire que la communication n'ait pas fait partie du plan qui a été élaboré, compte tenu que le gouvernement a de très importantes responsabilités en ce qui concerne la vitalité des communautés francophones hors Québec.
Je note, par ailleurs, qu'il y a ingérence dans les compétences provinciales. Le gouvernement choisit de financer des domaines comme la santé et l'éducation, qui sont de compétence provinciale. Je note également que le financement accordé à des compagnies comme Rogers et Transco, entre autres, est beaucoup plus important que celui octroyé aux organismes liés plus étroitement à la communauté. Ces derniers perdent complètement leurs subventions.
Monsieur Bélanger, vous avez parlé de la nécessité de bénéficier d'un financement stable. Ça se comprend très bien: c'est le cas de tous les organismes qui reçoivent du financement. Vous avez aussi dit très clairement que le financement était le problème principal. J'aimerais tout de même savoir si vous réussissez à trouver des gens disponibles et aptes à occuper ces postes que vous êtes obligés de combler par des bénévoles.
Il est certain que dans notre communauté, il y a des personnes compétentes qui ont le désir d'oeuvrer au sein d'organismes communautaires francophones. La seule raison pour laquelle on ne peut pas les embaucher, c'est qu'on ne peut pas les payer. Ces gens ont le droit de travailler à temps complet et d'avoir une vie normale. Dans certains cas, ils nous font profiter de leur expertise en faisant du bénévolat, mais il reste que sans financement adéquat, il est à peu près impossible de bénéficier de leurs services à temps complet.
Comme le disait si bien M. Grenier, on doit toujours mettre sur pied des projets. Dans ces conditions, on peut avoir recours à des gens qui sont en formation. Dans certains cas, il s'agit de gens très compétents, mais il n'en demeure pas moins que sans financement stable, on ne peut pas payer ces gens sur une base régulière. Par conséquent, on n'a pas le meilleur des choix. On ne peut pas faire progresser des dossiers et être aussi efficaces quand on n'a pas de personnel à temps complet. C'est pourtant ça, le nerf de la guerre.
Monsieur le président, j'aimerais ajouter quelque chose. Je suis directeur général de l'Alliance de la francophonie de Timmins depuis 1995. Depuis 1998, j'y travaille à temps partiel parce qu'on ne peut plus me payer à temps complet. Le jour, je travaille donc pour un conseil scolaire, et en soirée, je sacrifie ma famille parce que je crois à la cause et j'essaie de faire avancer cette association du mieux que je le peux. Est-il acceptable, dans une société comme la société canadienne, de voir que des organismes qui défendent la nation franco-ontarienne sont aussi mal pris et qu'ils doivent compter sur des gens comme moi, qui travaille à temps partiel, et comme M. Bélanger, qui fait du bénévolat? Je pense que notre société est moderne, qu'elle est à l'avant-garde et que nous devons nous assurer que nos organismes francophones ont la volonté et le devoir de se développer.
Le plan Dion a aidé les infrastructures en place comme les conseils scolaires, les collèges et la santé, mais il a carrément nui aux organismes qui travaillent. Rien n'est venu aider les militants de base à combler les manques et les lacunes qui perdurent dans nos communautés francophones.
J'entends bien vos doléances et je peux d'ores et déjà vous annoncer que nous allons déposer une motion en ce sens au comité, parce qu'il y a une lacune extrêmement grave de ce côté. J'ai moi-même fait beaucoup de bénévolat. Le bénévolat, c'est bien beau, mais à un moment donné, les gouvernements doivent assumer certaines responsabilités à la source. Je trouve donc inacceptable ce qui vous arrive.
Monsieur Bélanger, vous avez dit qu'il faudrait que Patrimoine Canada vous assure un financement de base de l'ordre de 60 000 $. De plus, vous avez parlé d'une étude de financement. J'imagine qu'il s'agit d'une étude sur la façon de vous assurer du financement à long terme.
Pourriez-vous développer ce sujet?
Je réponds le plus brièvement possible. Vous savez, un financement de base de 60 000 $ – En fait, c'est 86 000 $ qu'il nous faudrait pour suivre l'inflation et retrouver le pouvoir d'achat que nous avions en 1985. Nous voulions être réalistes, mais en entendant ce que disait plus tôt M. Grenier, je crois que ce n'est pas réaliste. Je suis convaincu de la même chose que lui, à savoir que le gouvernement fédéral a l'obligation de nous assurer des moyens adéquats. Or, des moyens adéquats, c'est 86 000 $.
Vous savez que les ententes, l'interministériel, et les articles 41 et 42 obligent les ministères du gouvernement fédéral à nous aider à développer des projets. Nous ne devrions pas être obligés de connaître le fonctionnement de la fonction publique comme le fond de notre poche, nous ne devrions pas être obligés de connaître tous les programmes. Nous n'avons pas les moyens de faire ce travail. Nous devrions pouvoir travailler beaucoup plus facilement avec les ministères, comme Service Canada et d'autres, pour mettre sur pied des projets dans nos communautés.
Pour ce qui est du troisième volet, nous voudrions que la formule de financement tienne compte du nombre de francophones desservis ainsi que des milieux dans lesquels les associations doivent fonctionner. Dans certains milieux, il n'y a ni journaux, ni radios communautaires, ni médias. Faire du développement communautaire est un travail énorme, et ces gens devraient avoir un financement supérieur à ce qu'il est. J'ai bien aimé la formule de M. Grenier tout à l'heure. Quand nous visons l'égalité, nous sommes automatiquement défavorisés parce que nous n'avons pas l'infrastructure qui existe dans les grands centres pour faire du travail communautaire.
Merci, monsieur le président.
Il me fait plaisir de poser quelques questions à nos invités et de faire quelques commentaires.
Vous dites que les communautés francophones se meurent à petit feu, et cela m'inquiète à long terme, car c'est la direction que nous empruntons. Si les francophones hors Québec ont progressé aujourd'hui, c'est grâce aux organismes qui les ont aidés. Je pense, par exemple, à la Société des Acadiens et Acadiennes du Nouveau-Brunswick, la SAANB, et à la Société nationale de l'Acadie au Nouveau-Brunswick; je pense aussi à l'ACFO, en Ontario. Ces organismes ont travaillé avec les communautés. Je ne peux pas imaginer qu'une communauté aille de l'avant et réussisse quand les individus se lèvent le matin, vont travailler et reviennent à la fin de la journée de façon isolée. Je ne vois pas comment nous pourrions survivre. Bien que Mme Barbot dise qu'on ne devrait pas nous appeler une minorité, c'est la réalité.
Il n'y a qu'à voir les scandales qu'il y a eu ici, à Ottawa. La vérificatrice générale disait d'ailleurs que les programmes n'étaient pas mauvais, mais qu'ils étaient mal gérés. Alors, il ne faut pas punir tout le monde. Il ne s'agit pas de punir ceux qui reçoivent de l'aide, en retirant tous ces programmes; il faut mieux les gérer. Cela a ouvert la porte au gouvernement, qui dit maintenant qu'il y a des programmes mais qu'il ne peut pas les gérer. Il les abolit donc et paie la dette. Dans 15 ans, la dette nette sera éliminée — qu'elle soit nette ou sale, je m'en fiche carrément —, et nous sommes en train d'en payer le prix. Ce prix sera terrible. C'est comme vouloir rembourser en deux ans une hypothèque sur une maison en n'achetant plus d'épicerie. C'est ce que fait le gouvernement.
Ce sont les organismes qui souffrent de toutes les compressions, tant celles du Programme de contestation judiciaire que celles dans le domaine de l'alphabétisation. Le présent gouvernement ne semble pas croire que ces organismes doivent exister. On donne l'argent aux individus en leur disant, comme aux États-Unis, de s'occuper de leurs affaires et qu'ils sont assez pourvus.
J'aimerais entendre vos commentaires sur cette question. Le gouvernement ne devrait-il pas étudier toute cette question? Le Comité permanent des langues officielles devrait-il, dans son rapport, contester les décisions du gouvernement et dire qu'on a emprunté la mauvaise direction en enlevant à nos communautés les organismes capables d'organiser les gens et de mettre des programmes en place? Nous l'avons entendu, à Sudbury, par exemple, c'était clair: le Collège Boréal a dit que sans l'ACFO, il ne serait pas là. Il en va de même pour le réseau francophone de la santé en Ontario: sans l'ACFO et certaines organisations, il n'existerait pas. Personne ne le fera à notre place. Dans vos commentaires, vous avez clairement dit que vous aviez besoin d'argent pour cela. Ce n'est pas avec du bénévolat que cela pourra se faire.
Sur ce, j'aimerais entendre d'abord les commentaires de M. Pierre Bélanger.
Vous avez tout à fait raison, monsieur Godin : il faut mettre les priorités à la bonne place. Il faut s'assurer qu'il y ait un financement adéquat qui aide les organisations communautaires. On a beaucoup souffert du scandale des commandites et de la mauvaise administration de certains programmes, parce qu'on est devenus, d'une certaine façon, suspects. On a été un peu blâmés, alors qu'on n'avait rien à voir là-dedans, car on est transparents. Les deniers publics qu'on dépense sont justifiés par de multiples rapports d'efficacité qu'il faut produire. Il nous en coûte environ 2 000 $ en frais comptables chaque année pour nous assurer que chaque cent qu'on a reçu de Patrimoine Canada ou du gouvernement fédéral par l'entremise de différents programmes a été dépensé adéquatement.
Ce qui est en train de se passer, c'est que la crise est majeure et grave dans les organismes communautaires qui travaillent à la base. J'ai bien aimé les commentaires de MM. Grenier et Potié. La situation existe là également. Dieu sait qu'on a besoin d'une presse et de médias francophones en santé parce que quand on ne peut pas se parler entre nous et exister, c'est difficile d'inciter la jeune génération à prendre la relève sur le plan de la francophonie. C'est difficile de combattre l'assimilation. Il faut que tout l'outillage qui avait été mis sur pied soit mis en application. Il faut que l'argent soit au rendez-vous. Les francophones hors Québec ne sont pas simplement du matériel à référendum. On nous aime énormément quand les Québécois décident de leur avenir, mais entre les référendums, on nous coupe les vivres et on ne nous permet pas de faire notre travail. Le travail que nous faisons est très important parce que nous connaissons bien les besoins de la communauté. On s'assure que l'argent du gouvernement est dépensé de façon efficace et adéquate.
Sur ce, je passe la parole à M. Lacroix.
Je veux seulement ajouter qu'avec la nouvelle Loi sur les langues officielles et avec le projet de loi S-3, je pense que les organismes francophones vont devoir commencer à poursuivre le gouvernement, s'il ne fournit pas les fonds nécessaires et ne commence pas à nous desservir comme on a le droit de l'être. Nous ne sommes pas une minorité. Nous faisons partie d'une communauté de langue officielle. Nous sommes un peuple fondateur, et la nation franco-ontarienne, à partir de maintenant, exige son dû et son droit.
L'autre aspect porte sur les journaux. Il y a Postes Canada. Cela a peut-être fait l'affaire du gouvernement ou il a peut-être parlé avec Postes Canada. Il y a des coupes de 25 p. 100. Comme vous le dites, on dirait que les ristournes vont dans le même sens. On coupe les fonds des organismes. On coupe partout pour payer la dette nationale.
Il est clair, il me semble, qu'il y aurait des solutions faciles. Je ne m'aventurerai pas sur le terrain glissant des politiques du gouvernement; je vous laisse cela. Vous le faites très bien. Je crois qu'il y a des solutions assez faciles. Par exemple, Postes Canada pourrait compenser sur le plan des journaux francophones hors Québec, parce qu'il y a un cadre juridique qui le permet. La Société des postes pourrait dire que ce qu'elle a coupé en matière de subventions, elle l'achètera en publicité dans nos journaux. Ce serait très simple, et elle gagnerait quand même énormément d'argent en cessant de subventionner de gros organismes qui n'en ont peut-être pas besoin. Je ne veux pas parler pour elle, mais je sais que nous, nous en avons besoin et qu'il y aurait un moyen facile de le faire.
Une autre chose qu'il serait facile de faire, c'est de changer les règlements du Conseil du Trésor de sorte que, pour la publicité fédérale et pour les programmes fédéraux qui s'appliquent à tout le monde, on ait des critères spécifiques pour les francophones hors Québec, des critères qui respectent leur spécificité et les difficultés qu'ils ont. Il faut que ce ne soit pas général pour tout le monde. C'est le cas, par exemple, pour programme de stagiaires dont je vous parlais tout à l'heure. Il me semble que cela serait très clair. Par exemple, si un magazine est publié seulement tous les deux mois mais qu'une campagne publicitaire du gouvernement ne dure qu'un mois, c'est bien dommage, elle tombe juste entre les deux mois de publication du magazine. Dans un tel contexte, le seul magazine d'affaires au Canada français ne peut en bénéficier. Par contre, on voit les annonces en anglais ailleurs.
Monsieur Grenier, il faut que je vous interrompe.
Je demande à M. Lemieux de poser la prochaine question.
On a seulement cinq minutes, et c'est maintenant à M. Lemieux de prendre la parole. On a tous des questions très importantes et des réponses très importantes.
Non, il faut traiter tous les membres du comité de façon égale.
Monsieur Lemieux, vous avez la parole.
Il est difficile de commencer après tout cela.
Bonjour. Je vous remercie de vos présentations. À titre de député, je suis très sensible aux enjeux des franco-ontariens parce qu'il y a dans ma circonscription une communauté franco-ontarienne vivante et très importante. Dans ma circonscription de 100 000 personnes, 65 000 personnes sont des Franco-Ontariens.
J'aimerais parler un peu des associations communautaires. J'ai assisté samedi dernier à la réunion annuelle de l'ACFO de Prescott-Russell, dans mon comté. Oui, l'ACFO de Prescott-Russell vit une crise. J'aimerais parler un peu des subventions. Dans une présentation dont j'ai le texte devant moi, il est question de subventions de programmes plutôt que de subventions pour les coûts opérationnels. Selon moi, les subventions de programmes donnent des résultats. C'est important pour le gouvernement, pour les contribuables et pour nos communautés. Dans ma communauté, on considère qu'il est important de voir des résultats concrets.
Présentement, un des défis de l'ACFO de Prescott-Russell est de déterminer quel est le niveau d'appui dont elle bénéficie au sein de la communauté. L'ACFO de Prescott-Russell va-t-elle continuer? Quel sera son mandat?
J'aimerais poser la question à M. Bélanger: comment évaluez-vous l'appui dont jouit votre association dans votre communauté?
Dans notre cas, c'est assez facile à déterminer parce que nous organisons les activités et réalisons les projets que nous avons développés. Qu'il s'agisse de la Garderie Clin D'Oeil ou du journal Les Nouvelles, nous avons travaillé fort pour faire les études de faisabilité, aller chercher l'argent et entreprendre le processus.
Parlons de résultats. À la fin des années 1980 et au début des années 1990, nous étions encore subventionnés de façon adéquate, nous recevions une subvention de base suffisante. Je tiens à souligner que nous avons été efficaces. Une subvention de base ne signifie pas que les gens restent assis dans leur bureau à boire du café et à ne rien faire. Grâce à cette subvention de base, nous avions des employés à temps complet. Nous avons travaillé de concert avec la communauté pour mettre sur pied des projets qui répondaient à des besoins.
Il y a deux façons de déterminer l'appui que nous accorde la communauté. D'une part, la communauté a utilisé nos services. La Garderie Clin D'Oeil est maintenant prospère, car elle a comblé un besoin réel. C'est une garderie en croissance, qui dessert des centaines de familles. Nous avons réalisé cela à Timmins en partenariat avec le conseil scolaire. C'est un succès.
Les assemblées générales annuelles de l'ACFO sont toujours suivies par de nombreux francophones, malgré le fait que la vie ne soit pas plus facile à Timmins qu'à Ottawa et à Toronto. Les personnes font du bénévolat pour de multiples organismes. Leur tâche de travail ne s'est pas allégée, elle est devenue de plus en plus lourde. Il y a toujours du monde à nos assemblées générales annuelles ainsi qu'aux activités culturelles que nous organisons grâce à certains programmes. Les gens se servent aussi des organismes que nous avons mis sur pied et participent, par exemple, à leur conseil d'administration. Nous sommes une organisation qui fonctionne très, très bien en partenariat avec les autres organisations de la communauté.
Notre problème de fond a trait à ceci. Après 10 années de compressions, nous ne sommes plus en mesure d'embaucher du personnel à temps complet pour poursuivre le travail extraordinaire que nous avons réalisé, par exemple, avec la garderie et dans le cadre du projet de la Brigade anti-violence que nous avions mis sur pied avec la Ville de Timmins. Ce dernier projet permettait d'offrir des services aux aînés francophones pour contrer la fraude ainsi que pour donner de la formation aux jeunes francophones. Ce projet a été réalisé en partenariat avec la police de Timmins.
Maintenant, nous n'avons même plus les moyens de bénéficier des programmes. Nous ne sommes pas contre le fait que le gouvernement fédéral veuille mettre sur pied des programmes, mais pour développer ces programmes et accomplir des projets novateurs branchés sur la communauté, il faut un minimum de ressources dont nous ne disposons plus. Il nous faut des employés à temps complet, un bureau stable, un endroit où nous sommes en mesure de nous occuper de payer le loyer, d'avoir un ordinateur et un téléphone qui fonctionnent en tout temps pour pouvoir mener à terme ces projets.
Je n'ai rien contre les projets spéciaux en tant que tels. Ils permettent beaucoup d'innovations. Toutefois, nous avons besoin de certaines infrastructures de base qui, comme M. Bélanger l'a dit, nous permettent d'inventer des projets, de susciter de nouvelles initiatives et d'être à l'affût des besoins émergents. Sans les ressources de base, nous devenons, à certains égards, beaucoup moins efficaces.
Voici ce que j'ai à dire au sujet des projets. Un projet s'insère dans un exercice financier, mais dans les faits, dans la vraie vie, il est rare qu'un projet débute le 1er avril pour se terminer le 31 mars. Nous réalisons donc un projet, à la suite duquel nous devons faire des suivis. Il y a des retombées à ce projet. Après une étude, un sondage, une formation, des suivis doivent être faits, et il faut des gens pour assurer cette continuité. Autrement, le développement se fait en dents de scie. Une certaine année, nous avons trois employés; l'autre, nous en avons six; puis, soudain, nous en avons deux. C'est très difficile de fonctionner ainsi.
Merci, monsieur Potié.
Nous allons entamer notre deuxième tour de table. Chacun dispose de cinq minutes.
Je vais demander à M. Simard de poser des questions.
Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à nos invités.
J'adresserai mon premier commentaire à M. Grenier et M. Potié. Je poserai ensuite une question.
Le mandat de notre comité est de se pencher sur la vitalité des communautés francophones hors Québec et d'étudier les répercussions du plan d'action, afin de savoir si certains éléments pourraient être modifiés, si nous devrions renouveler le plan, moyennant quelle somme d'argent, et afin de savoir quelles recommandations nous devrions faire au gouvernement.
Monsieur Grenier, vous avez dit que le plan d'action n'a eu aucun impact. Selon nos informations, je peux affirmer que tel n'est pas le cas. Certaines choses ont très bien fonctionné, par exemple dans le domaine de la santé. Nous avons eu des commentaires très positifs sur ce plan. Pour ce qui est de l'immigration, même s'il n'y avait pas beaucoup de fonds, cela a été très positif. Quant à la justice, ça fonctionne bien. Sur le plan de l'éducation, il est trop tôt pour le savoir. Il ne semble pas que nous ayons eu assez d'information pour savoir si les programmes d'immersion ont eu un impact positif jusqu'à maintenant. Nous avons également constaté qu'il y avait des lacunes sur le plan culturel et, à mon avis, sur le plan des communications.
Selon le commentaire que nous entendons aujourd'hui, en effet, il existe une véritable instabilité dans tout le domaine des médias écrits et parlés. Si l'on pouvait incorporer les communications et le secteur culturel à l'intérieur d'un nouveau plan d'action, cela créerait une certaine stabilité.
Cela tombe-t-il sous le sens? Préconiseriez-vous un fonds stable pour les gens des communications?
C'est une bonne idée, bien sûr. On ne refuse jamais d'argent. Cependant, ce faisant, vous aurez à faire face à un problème. En effet, il y a deux types de médias au Canada français hors Québec. Il y a des journaux privés et des organismes à but non lucratif. Des problèmes sont liés aux subventions gouvernementales: souvent, le secteur privé ne peut y avoir accès. Ce secteur n'est pas beaucoup plus riche que les autres, parce qu'il n'a justement pas accès à ces subventions. Or, il ne doit vivre que de publicité. Le problème réside dans la façon de distribuer cet argent.
À mon avis, le secteur publicitaire serait plus égal pour tout le monde dans l'ensemble du pays et donnerait une visibilité au gouvernement, notamment au plan Dion, à ses réalisations, etc.
Nous aimerions certes que les communications soient incluses dans le plan d'action, comme un axe. Nous avons quand même engagé des discussions et établi une table de concertation en communications avec la Télévision française de l'Ontario, l'Alliance des radios communautaires du Canada et la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, la FCFA. Certains sujets et enjeux sont ressortis de nos discussions.
Je ne me ferai pas le porte-parole des autres intervenants, mais j'ajouterai que nous savons que les radios communautaires sont préoccupées, par exemple, par un fonds de production radiophonique pour les radios communautaires.
Plus tôt, j'ai mentionné que pour la presse écrite francophone, il existe un fonds d'appui qui s'appelle le Fonds du Canada pour les magazines. Il aurait besoin d'être adapté aux réalités du marché ou des marchés dans lesquels les communautés ou les éditeurs francophones sont obligés de travailler. C'est une autre piste intéressante.
Nous savons que toutes les communautés francophones sont intéressées à ce qu'il y ait une expansion du mandat, de la distribution et de la diffusion de la Télévision française de l'Ontario. Il est également question du fonds de production. Des mesures ont été prises à Téléfilm Canada pour réserver un certain montant du fonds à la production par des producteurs francophones à l'extérieur du Québec.
Il existe des possibilités de développer une série d'initiatives, de mesures ou d'adaptations de programmes existants susceptibles de donner un réel coup de pouce et un nouvel élan aux médias francophones au Canada.
Monsieur le président et les témoins qui sont présents, je veux simplement, en vertu de l'avis de 48 heures, déposer la motion suivante, qui pourrait être débattue à un autre moment :
Que le Comité permanent des langues officielles recommande au gouvernement d'exiger le maintien du financement de la Société canadienne des Postes envers le Programme d'aide aux publications pour les communautés de langue officielle
Je tiens à aviser les témoins que les députés ont reçu une copie de cette motion, qui sera débattue à un autre moment. Je pense qu'il s'agit d'une chose très importante si on veut être en mesure d'aider les communautés de langue officielle. Je présente donc cette motion aujourd'hui.
Merci, monsieur D'Amours.
Je demanderai à Mme Boucher de poser la prochaine question. Vous avez cinq minutes.
Monsieur le président, je voudrais juste préciser quelque chose. Je sais qu'elle ne sera pas débattu tout de suite, mais la motion ne dit pas la même chose en français et en anglais.
Bonjour. Je suis contente de rencontrer M. Potié ici, en personne, et de partager avec ceux qui sont un peu plus loin, mais avec qui on peut parler.
Comme vous le savez, je l'ai souvent dit et je le redis, notre gouvernement soutient de façon inébranlable la francophonie et les langues officielles. C'est important pour nous de travailler avec les gens de façon positive de sorte que nous puissions trouver des pistes de solution pour continuer à travailler à l'épanouissement des communautés en posant des gestes concrets. On a signé des ententes; la ministre a signé des ententes. On a eu une entente en immigration.
Depuis tout à l'heure, j'écoute ce qui se dit et je vois que ce qui est le plus important, ce sont les sommes qui se rendent directement aux communautés. Vous en avez beaucoup parlé. J'aimerais avoir votre avis sur le sujet.
Comment voyez-vous, monsieur Potié, le rôle de votre organisation en regard de cette question?
Comme je l'ai dit plus tôt, les journaux bénéficient de la vitalité des communautés. Pour les organismes qui travaillent au développement des communautés, cela aura un impact s'ils ont un financement adéquat pour leurs infrastructures de base et un financement qui leur permette de générer toutes sortes de nouvelles initiatives dans le développement de leur communauté. Je pense qu'on le voit, cela a un impact positif sur les journaux. Je ne pense pas qu'un journal puisse être contre le fait qu'il y ait un financement adéquat pour le développement des communautés. Cela serait avantageux pour la presse francophone et vice-versa. La présence de la presse est avantageuse pour le développement de la communauté.
Est-ce le sens de votre question?
Vous avez parlé aussi des lacunes contenues dans le plan d'action. D'après vous, quelle a été la plus grosse lacune du plan d'action?
Je vais le répéter, je pense qu'on a été surpris, parce qu'il faut tenir compte de notre environnement. On travaille avec des satellites. On ne parle pas de communications; or, on vit à l'ère des communications. On veut faire le développement d'une communauté francophone en situation minoritaire, mais on fait abstraction du fait que les communications pèsent très lourd dans notre vie quotidienne, personnelle et publique. Si on fait abstraction de cela, je pense qu'il manque un gros morceau du casse-tête.
Il y a aussi encore une question d'informer, de mobiliser, d'encourager l'engagement, d'encourager un échange entre le gouvernement et le grand public, ainsi qu'entre les organismes et le grand public. On n'a pas communiqué ce qu'on faisait avec ce plan. Je pense que ce serait important. M. Simard a raison: des choses ont été faites avec ces fonds, notamment en matière de santé et d'immigration, mais il n'y a pas eu de stratégie pour qu'on évolue ensemble et qu'on ait conscience des mêmes choses.
Monsieur Bélanger, d'après vous, les communications ont-elles été la plus grande lacune du plan d'action, ou y a-t-il autre chose?
Évidemment, les communications sont une des lacunes importantes. Il est fondamental que les organismes communautaires puissent travailler en partenariat avec des agents de communication en santé efficaces.
Il est impossible de faire notre travail, surtout en matière de lutte contre l'assimilation et de préservation de l'identité de notre jeunesse, si celle-ci ne peut pas se reconnaître dans les médias, si on ne peut pas se parler par l'entremise de nos journaux, de nos radios communautaires. On fait face à un autre problème, on perd la bataille contre les médias anglophones.
Le plan Dion a élaboré les grandes lignes; il a renforcé les établissements d'enseignement, il a travaillé au niveau de l'immigration et a contribué à la création d'un réseau de santé dans le Nord. Toutefois, je suis d'accord avec M. Potié pour dire que le plan Dion n'a eu aucun impact sur les communautés, sur les gens qui oeuvrent sur le terrain, dans les régions.
Je vais vous donner un exemple concret. À Timmins, cela fait 15 ans qu'on travaille pour avoir notre centre de santé communautaire francophone. On a été sur le point de réussir il y a une dizaine d'années, mais pour des raisons politiques, on a accordé le financement à un autre centre, même si notre demande était la plus solide et la mieux articulée. On ne contrôle pas les aléas de la politique et la gestion des programmes.
Un réseau existe, mais quel effet concret a-t-il sur le citoyen qui vit à Timmins, qui est obligé de recevoir une partie des services de santé en anglais parce qu'il n'y a pas de centre de santé communautaire francophone? Dans le secteur de la santé, le plan Dion n'a pas eu d'impact concret.
Monsieur Bélanger, je m'excuse, mais je dois vous arrêter.
Je vais demander à Mme Brunelle de poser la prochaine question.
Bonjour, messieurs. C'est une expérience assez spéciale de vous entendre ce matin, principalement M. Grenier.
J'avoue que je suis sidérée de voir à quel point le scandale des commandites a entraîné une paranoïa au sein de l'appareil gouvernemental. Et ce phénomène est de plus en plus évident. Vous en souffrez, de même que plusieurs organisations au Québec, entre autres les festivals, etc. Je me demande comment on s'en sortira. Il est toujours déplorable de voir un scandale de nature politique affecter des gens qui essaient en toute bonne foi de faire avancer des dossiers.
Monsieur Grenier, vous avez dit que les critères des programmes nuisent aux communautés francophones. Ce que je peux en comprendre, c'est qu'on connaît mal les problématiques que vous vivez. Notre comité devrait peut-être intervenir afin d'examiner les programmes plus attentivement, à la suite de la tournée que nous effectuerons. Il serait important de voir comment on pourrait venir en aide aux communautés. Compte tenu du peu de fonds disponibles, il importe de les utiliser de la façon la plus efficiente possible.
Monsieur Grenier, vous avez dit que le plan Dion n'avait eu aucun effet sur les communautés, qu'il leur aurait même nui plus qu'autre chose. Si ce plan a vraiment été inefficace dans votre cas et pour les communautés, que suggérez-vous? Quelles modifications devrait-on y apporter?
Merci pour la question.
Je pense que le plan d'action devrait porter davantage attention aux communautés sur le terrain des vaches, comme le disait plus tôt M. Bélanger. On a, bien sûr, réalisé des progrès au chapitre de l'éducation. Il y a eu des réalisations en Ontario, mais ces progrès ne sont pas nécessairement transmis aux communautés.
On vous parle d'ACFO qui ferment leurs portes, de gens qui font du bénévolat extrême. Tout cela n'a pas changé, bien au contraire. Le plan Dion n'est pas responsable de cet état de choses. Il est plutôt attribuable à l'immobilisme qui s'est installé au sein du gouvernement et qui fait en sorte que les fonctionnaires et ceux qui développent des projets essaient de jouer la carte de la sécurité, en quelque sorte. C'est plutôt cela qui a nui.
Selon moi, le plan Dion proposait de merveilleuses initiatives en santé et dans d'autres secteurs. Nous avons constaté certains résultats, mais ils se sont limités aux grandes infrastructures.
Il y a aussi la question de la pertinence des organismes locaux, à laquelle M. Lemieux a fait référence plus tôt. La pertinence de ces organismes ne fait plus de doute. N'eût été de l'ACFO, le Collège Boréal à Sudbury n'existerait pas. Pourtant, ce collège est aujourd'hui rempli d'étudiants.
Il est clair que ce sont les organismes communautaires qui obtiennent de tels résultats, grâce à un peu d'aide du gouvernement fédéral. Nous voulons, bien sûr, que cela continue.
Monsieur Potié, en ce qui a trait au financement, vous dites que la multiplication des dossiers vous rend les choses difficiles. J'aimerais que vous nous donniez quelques exemples.
Je dirais que c'est une situation sans issue. Cela remonte au Plan d'action pour les langues officielles, et même à plus tôt que cela. La partie VII de la Loi sur les langues officielles oblige le gouvernement à soutenir les collectivités francophones dans plusieurs sphères d'activités, comme la santé, la petite enfance, etc. Par conséquent, en tant qu'interlocuteurs, nous sommes appelés à faire affaire avec beaucoup plus de gens. C'est parfait, nous le voulons. Je ne dis pas que c'est une mauvaise chose, mais dans les faits, nous sommes convoqués à gauche et à droite. C'est bien, mais si nous n'y allons pas, nous avons l'air de ne pas nous occuper de nos affaires. Nous ne voulons pas donner cette impression. Mais nous faisons tout cela avec la même infrastructure de base.
Je vais vous donner l'exemple de l'Association de la presse francophone. Nous recevons suffisamment d'argent des programmes pour payer trois employés. Je suis obligé de générer des projets pour le reste. Au fond, ce n'est pas ainsi que devrait se faire le projet et ce n'est pas ainsi que je pourrai créer l'infrastructure de l'association que je devrais créer.
Merci, monsieur le président.
Je vais commencer par poser une question. Je ne sais pas si j'aurai le temps d'en poser deux.
Monsieur Grenier, quand nous étions à Sudbury et que nous nous sommes rencontrés, vous nous avez parlé d'un projet conjoint avec le Collège Boréal. M. Hubert, du Collège Boréal, avait dit à quel point le programme fonctionnait bien avec le journal Le Voyageur. Les journaux — je ne sais pas si votre journal est un journal quotidien ou hebdomadaire — ont une entente avec le collège pour aider les jeunes francophones à s'intéresser au journal français.
Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? Que pouvez-vous nous recommander pour d'autres communautés francophones dans le pays?
Il y a ce programme avec le Collège Boréal, mais il existe aussi avec les deux conseils scolaires, public et catholique, de notre région. C'est un peu ce qui nous permet d'avoir un nombre d'abonnements aussi élevé. Le nombre de nos abonnements est parmi les plus élevés au Canada, hors Québec.
Le seul problème relatif à ce programme est que les conseils scolaires et les collèges doivent payer les abonnements. Je voudrais bien les donner, mais cela ne fonctionne pas ainsi. De toute façon, le Programme d'aide aux publications dont nous parlions plus tôt n'accorde pas de subvention si le journal est donné. Nous sommes pris entre deux feux et il nous faut le vendre.
Un abonnement chez nous coûte 42 $. Celui que je vends au Collège Boréal coûte 12 $. J'accorde donc une subvention de 30 $ par abonnement au Collège Boréal. Je veux bien le faire, c'est un pari que je tiens. Je me dis que si j'augmente mes abonnements, je pourrai peut-être augmenter ma publicité. C'est un gros risque, ce n'est pas garanti, mais c'est pour cela qu'on se met en affaires. Le grand problème, dans tout cela, c'est que le Collège Boréal n'a pas plus d'argent que nous. C'est comme pour le Théâtre du Nouvel-Ontario, qui nous achète 6 000 $ de publicité par année et nous en paie environ 600 $. Le reste, nous le donnons. Nous faisons vivre les organismes communautaires, jusqu'à un certain point. Pourtant, si nous n'allons pas chercher les jeunes aujourd'hui qui souvent ne lisent que ce journal et n'ont que cela en français chez eux...
Monsieur Grenier, d'après ce que vous dites, vous subventionnez davantage les minorités que le gouvernement ne le fait. On pourrait peut-être bien échanger les rôles, dans la partie VII, à l'article 41, de la Loi sur les langues officielles.
Monsieur Bélanger, pouvez-vous nous dire quel pourcentage de la population représente la communauté? Les francophones sont-ils majoritaires, ou minoritaires? Quelle partie de l'Ontario votre région comprend-elle? Est-ce seulement Timmins?
Nous formons 41 p. 100 de la population de la ville de Timmins et nous formons environ 54 p. 100 de la population du district des services. Nous sommes donc majoritaires dans le district des services, mais nous sommes minoritaires dans la ville même.
Merci.
Monsieur Grenier, revenons à la question du journal, qui m'intéresse. Je crois que c'était une très belle initiative de votre part, d'autant plus que vous vendez l'abonnement à ce journal 12 $ aux étudiants du collège, alors qu'il se vend normalement 42 $.
Qu'en pensent les gens du collège? Quels ont été pour vous les résultats de cette initiative?
Vous savez comme moi que les francophones hors Québec ne sont pas des gens plaignards. Ils n'ont pas non plus tendance à lancer des fleurs. Ce sont des gens qui ne parlent pas beaucoup. Par contre, il nous arrive de rencontrer un, deux ou trois étudiants par hasard et que ceux-ci nous disent être très heureux de recevoir notre journal. Certains disent même être contents d'avoir choisi le Collège Boréal, en partie pour cette raison. Il y en a d'autres, bien sûr. C'est le genre de résultat qu'on obtient.
Il y a aussi des professeurs qui utilisent le journal en salle de classe. On a même préparé tout un document pédagogique axé sur l'utilisation du journal. Les professeurs nous font part de commentaires très positifs à ce sujet. Espérons qu'à long terme, ça incitera les jeunes à conserver leur français.