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FAAE Rapport du Comité

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Réponse du gouvernement au quatrième rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international

« La politique internationale du Canada mise à l’épreuve en Haïti »

Monsieur le Président
Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
Chambre des Communes
Ottawa ON K1A 0A6


Cher collègue,

Au nom du gouvernement canadien, nous tenons à remercier les membres du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de l’examen attentif qui a présidé à la production de votre rapport intitulé : « La politique internationale du Canada mise à l’épreuve en Haïti ».

L’étude qu’a menée le Comité aura contribué de façon importante à définir l’approche du Canada sur son engagement en Haïti. Haïti demeure une priorité quant à l’engagement du Canada dans l’hémisphère. Le gouvernement partage l’analyse du Comité quant à l’ampleur des défis qui se posent au Canada et à la communauté internationale dans leurs interventions.

Le Canada est déterminé à accompagner Haïti dans ses efforts visant à mettre un terme aux conditions inacceptables qui prévalent dans le pays. Mais seuls, nous ne pouvons pas éliminer les causes de la précarité qui caractérise Haïti. Pour cette raison, et en reconnaissance du fait que le processus de reconstruction en est un de longue haleine, le Canada continue à déployer des efforts diplomatiques considérables dans le but de consolider l’engagement à long terme de ses partenaires et d’assurer qu’Haïti demeure une priorité. Le succès des conférences internationales de Port-au-Prince (juillet 2006) et de Madrid (novembre 2006) démontre que la communauté internationale reste ferme dans son engagement vis-à-vis Haïti. Le Canada continuera de faire écho aux messages transmis à ces occasions de façon à les renforcer. Pour être fructueuses, nos interventions doivent être guidées par des objectifs réalistes et souscrire aux préceptes d’une coordination étroite.

Haïti est à un point tournant de son histoire et peut, avec suffisamment d’appui, mettre fin aux cycles de la violence et de la pauvreté. Le pays, qui a complété un cycle électoral pour la première fois depuis l’entrée en vigueur de la Constitution de 1987, est maintenant dirigé par un gouvernement démocratiquement élu et très engagé. La situation de la sécurité, toujours fragile, se stabilise grâce à une meilleure concertation des efforts entre les nouvelles autorités et la MINUSTAH. Mais malgré la bonne volonté qui anime le gouvernement haïtien, les progrès sont lents et les défis demeurent nombreux pour renverser la spirale négative dans laquelle est plongée Haïti depuis de longues années. On commence tout juste à constater les résultats des investissements massifs consentis par la communauté internationale depuis 2004. Au chapitre de ces résultats, des routes, des prisons et des commissariats sont maintenant en réfection, les nouveaux policiers sont mieux formés, des avancées sur le plan macroéconomique (contrôle de l’inflation, transparence budgétaire) sont visibles et, pour la première fois en deux décennies, il y a croissance économique. Mais d’abord et avant tout, le peuple haïtien est disposé à travailler pour un avenir meilleur. Bien qu’il reste beaucoup à faire, l’avenir du pays se construit quotidiennement.

Deuxième bailleur bilatéral en importance avec 520 millions $ sur une période de cinq ans (2006–2011), le Canada continuera à jouer un rôle de premier plan et à travailler de concert avec les autorités haïtiennes et ses partenaires internationaux afin d’améliorer les conditions de vie en Haïti. Le Canada se démarque par son engagement soutenu, son respect du leadership exercé par les autorités haïtiennes, et une approche pangouvernementale mettant à profit un bassin d’expertises variées. Le Canada dispose d’un vaste réseau de partenaires canadiens et bénéficie d’une relation privilégiée avec Haïti, basée sur le partage d’une langue et l’appartenance à la grande famille de la Francophonie.

Les ministères et organismes fédéraux compétents ont examiné à fond ce rapport. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et l’Agence canadienne de développement international ont travaillé de façon conjointe, en consultation avec la Gendarmerie royale du Canada, le ministère de la Défense nationale et le ministère des Finances dans la préparation de la réponse aux recommandations du Comité.

Par conséquent, conformément à l’article 109 du Règlement de la Chambre des communes, nous avons le plaisir de déposer la réponse suivante au rapport du Comité.

Nous tenons à remercier de nouveau le Comité et ses membres pour le travail accompli et, du même élan, pour cette occasion qui nous est offerte d’apporter des précisions sur la nature de l’engagement du Canada en Haïti.


Ministre des Affaires étrangères et
ministre de l’Agence de promotion économique du Canada atlantique
Ministre de la Coopération internationale et
ministre de la Francophonie et des Langues officielles

Le gouvernement du Canada souhaite remercier les membres du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international pour les efforts ayant mené à la réalisation de leur rapport sur l’engagement canadien en Haïti.

RÉPONSES DÉTAILLÉES AUX RECOMMANDATIONS

Recommandation 1
Dans un cadre stratégique clair sur le rôle du Canada dans les États fragiles, le gouvernement devrait énoncer des objectifs concrets, axés sur les Objectifs du Millénaire pour le développement et la lutte contre la corruption, pour les interventions pangouvernementales canadiennes dans les États bénéficiaires. Le gouvernement devrait par la suite déposer au Parlement des rapports annuels de situation détaillant, pour chaque pays, l’ensemble des sommes dépensées et les résultats obtenus par rapport aux objectifs énoncés.
Réponse

Les donateurs de la communauté internationale, y compris des organisations d’une importance cruciale, comme l’OCDE, les institutions des Nations Unies et d’importantes ONG s’occupant de développement, ont reconnu l’existence d’une symbiose entre la sécurité et le développement. Par ailleurs, s’agissant des États fragiles, ils ont plaidé à plusieurs reprises en faveur d’une action complémentaire et concertée dans ces deux domaines. Sur le long terme, il est impossible de réduire la pauvreté sans un niveau raisonnable de stabilité et de sécurité. De même, il est impossible d’instaurer la sécurité lorsque règne une pauvreté abjecte et persistante.

S’agissant des programmes de développement au profit des États fragiles, y compris de tous les autres pays où il est présent, le Canada s’est fixé un certain nombre d’objectifs sur le long terme, nommément la réduction de la pauvreté et la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). En Haïti et dans d’autres États fragiles, le gouvernement du Canada a investi des efforts importants dans trois grands domaines cruciaux, c’est à dire la gouvernance démocratique, la sécurité et les modes de subsistance. Cette contribution prépare le terrain en vue de la réalisation des OMD sur le long terme. Cela vaut également pour les stratégies de développement nationales qui permettent d’optimiser l’aide internationale.

Il est reconnu que la corruption demeure un problème dans des pays où la gouvernance et les institutions publiques sont faibles. Face à ce problème, des ministères fédéraux tels que le MAECI et l’ACDI soumettent les fonds consacrés à l’aide au développement à des contrôles internes rigoureux. Dans le même élan, ils mettent à exécution des programmes pour aider à la poursuite des réformes engagées dans les pays en développement face à la corruption. Pour sa part, l’ACDI élabore actuellement une stratégie de lutte contre la corruption pour renforcer ces efforts.

Tout dernièrement, le gouvernement du Canada a adhéré à l’Initiative de transparence des industries extractives (ITIE) pour aider à améliorer la gouvernance dans des pays en développement qui disposent d’abondantes ressources naturelles (y compris des États fragiles). Pour cela, l’Initiative prévoit la communication et la vérification des paiements effectués par les entreprises et des recettes de l’État. L’ITIE vise à lutter contre le « fléau des ressources naturelles » : le risque que l’absence de transparence et de responsabilisation dans des pays disposant d’abondantes ressources pétrolières, gazières et minières engendre de la pauvreté et de la corruption. L’ITIE implique aussi la poursuite d’objectifs cruciaux, tels que la réduction de la pauvreté, la promotion de la démocratie et la prévention des conflits. Pour cela, il faut veiller à ce que les recettes provenant de l’exploitation des ressources naturelles se traduisent par une augmentation des fonds publics consacrés à la santé, à l’éducation et à d’autres priorités. Par ailleurs, le Canada a signé la Convention des Nations Unies contre la corruption, de sorte qu’il sera plus facile pour les ministères fédéraux canadiens de fournir une assistance technique aux pays en développement dans la lutte contre la corruption.

En 2005, le gouvernement du Canada a mis sur pied le Groupe de travail sur la stabilisation et la reconstruction (GTSR), qui est rattaché au MAECI. Cet organe est chargé de l’orientation et de la coordination stratégique des efforts déployés à l’échelle du gouvernement du Canada dans des pays en déroute et fragiles, tels que l’Afghanistan, Haïti et le Soudan. Le GTSR administre le Fonds pour la paix et la sécurité mondiales, assorti d’un budget de 500 millions $ sur cinq ans. Il doit permettre la mise à exécution de programmes polyvalents et à effet rapide afin de compléter et de renforcer les efforts de l’ACDI en vue d’une réduction durable de la pauvreté.

Le gouvernement du Canada est déterminé à déployer des efforts à l’échelle du gouvernement face aux besoins multiples et complexes des États fragiles. S’agissant de l’obligation de rendre compte de leurs activités, tous les ministères et organismes gouvernementaux rendent compte annuellement au Parlement des dépenses engagées. Plus précisément, ces dépenses font l’objet d’un examen en fonction des plans et priorités dégagés dans les Rapports sur les plans et priorités ainsi que le Rapport de rendement du Ministère. Dans ces rapports et d’autres documents pertinents présentés au Parlement, les ministères et organismes concernés mentionnent explicitement les mesures et objectifs canadiens en ce qui concerne les efforts déployés dans les États fragiles, tout particulièrement sur le plan diplomatique et du développement, et en vue de la stabilisation et de la reconstruction. Outre l’obligation de rendre compte de leurs activités conformément aux directives du Secrétariat du Conseil du Trésor, les sous ministres du MAECI et de l’ACDI se sont engagés à assurer la complémentarité des mandats et des principes opérationnels en ce qui concerne l’exécution de programmes dans des États fragiles. Qui plus est, les ministères ont pris l’engagement ferme, au titre de leurs objectifs stratégiques, d’évaluer les principaux efforts canadiens visant à rétablir la stabilité et à relancer le développement dans les États fragiles.

De plus, la ministre de la Coopération internationale s’est engagée, dans le Rapport sur les plans et priorités de l’ACDI pour 2006–2007, à publier un rapport sur les résultats du développement international, dans lequel certains progrès vers les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) seront présentés. Le FPSM rend compte de ses plans, résultats et dépenses (financiers et non financiers) par l’intermédiaire du Rapport sur les plans et priorités (RPP) et du Rapport sur le rendement du ministère (RRM). Ces rapports sont déposés au Parlement et seront accessibles par le public. Le FPSM respecte les obligations générales du gouvernement du Canada en ce qui concerne la transparence. À titre d’exemple, il veille à publier, en amont, les contrats ainsi que les ententes de subvention et de contribution.

Recommandation 2
Aux termes de son plan d’assistance à long terme pour Haïti, le gouvernement devrait déposer au Parlement un rapport sur l’aide du Canada à Haïti à la fin du mandat prorogé du Cadre de coopération intérimaire en 2007. Le rapport devrait contenir des renseignements concrets sur toutes les mesures prises pour corriger les problèmes recensés dans les évaluations des bailleurs de fonds — comme l’étude de 2004 de l’ACDI pour l’OCDE — ainsi que des informations précises sur les résultats de l’aide canadienne apportée à Haïti dans l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le développement, en vue de la mise au point du futur modèle de rapports au Parlement.
Réponse

L’ACDI a produit un premier rapport préliminaire sur les résultats atteints pour la période du Cadre de coopération intérimaire (Coopération Canada-Haïti — Synthèse des résultats dans le contexte du Cadre de coopération intérimaire (CCI) (avril 2004 — mars 2006), distribué au Comité parlementaire en juillet 2006) et prévoit rendre public un rapport pour l’ensemble de ses activités au terme de la mise en œuvre du CCI prorogé. Ce rapport détaillé sera disponible sur le site Web de l’ACDI et ses grandes lignes seront reprises dans le Rapport ministériel sur le rendement.

Chaque année, les ministres présentent leurs Rapports ministériels sur le rendement au Parlement, afin de rendre compte au Parlement et à la population canadienne. Les hauts gestionnaires des ministères et organismes respectifs se rendent disponibles pour répondre aux demandes éventuelles de précisions sur les informations contenues dans les Rapports ministériels sur le rendement. Et tel que mentionné sous la recommandation 1, la ministre de la Coopération internationale portera une attention particulière aux États fragiles dans son rapport annuel sur les résultats du développement.

Le gouvernement reconnaît l’importance d’intégrer les leçons apprises dans la planification et la mise en œuvre des initiatives actuelles afin d’y apporter les modifications nécessaires. Le Canada a joué un rôle de chef de file dans la reconnaissance des leçons apprises des actions en Haïti dans les années 90. Cette reconnaissance a mené entre autres à une meilleure coordination de l’effort, notamment via le Cadre de coopération intérimaire et la mise sur pied d’une mission intégrée des Nations Unies. Nous poursuivons maintenant notre effort pour appuyer le gouvernement haïtien à exercer son leadership en matière de coordination et à rallier la communauté des donateurs autour d’un cadre de résultats à atteindre avec des indicateurs explicites.

Recommandation 3
Dans le domaine de la sécurité, le Comité convient que la MINUSTAH doit avoir des pouvoirs et un mandat clairs pour désarmer les bandes de criminels. Le Canada, en collaboration avec ses partenaires internationaux, doit aider les Haïtiens à répondre au besoin primordial de normalisation et de sécurité dans tous les secteurs. Le Canada devrait également songer à augmenter sa contribution à la mission de l’ONU pendant la période de prorogation de son mandat.

Pour ce qui a trait à la réforme de la police, le Canada devrait participer davantage, au cours des deux ou trois prochaines années, à la création et la formation d’une force policière nationale politiquement neutre, en se rappelant les leçons tirées de son précédent programme de réforme de la police haïtienne.
Réponse

Le rétablissement de la sécurité et de l’ordre public est au centre de la stratégie canadienne en Haïti. Un environnement sécuritaire sur l’ensemble du territoire est une condition nécessaire à la réussite des interventions visant la reconstruction et le développement.

Dès les premiers mois de 2006, le Canada a reconnu la nécessité d’apporter des modifications au mandat de la MINUSTAH pour faire face à la menace croissante posée par les bandes criminelles en Haïti. Lors de consultations en marge de l’Assemblée générale de l’Organisation des États américains tenue à Saint Domingue (République dominicaine), en juin 2006, le Canada s’est entendu avec les partenaires clés de la région sur une approche coordonnée face aux négociations qui auraient lieu quelques semaines plus tard sur le renouvellement du mandat de la MINUSTAH. Le Canada a ensuite proposé l’adoption par l’Assemblée générale d’une déclaration sur Haïti qui insiste sur le renforcement des « efforts qui sont déployés pour assurer la mise en place des conditions de sécurité indispensables au succès des initiatives de développement en Haïti ».

Grâce à ces efforts, le mandat adopté par le Conseil de sécurité des Nations Unies, le 15 août 2006, comportait pour la première fois des dispositions permettant de « maximiser le rôle de la MINUSTAH dans la prévention de la criminalité, en particulier face à la menace que constituent les violences et les enlèvements commis par des bandes » et insistant sur l’instauration d’« une coordination optimale de façon à lutter contre la criminalité et la violence ». Quand est venu le moment de proroger le mandat de la mission en février 2007, le Canada a déployé des efforts similaires, y compris des consultations au niveau ministériel, pour maintenir ces mêmes dispositions dans la nouvelle résolution adoptée à cet effet.

La redéfinition du rôle de la MINUSTAH dans la lutte à la criminalité ainsi que la coordination accrue avec la Police nationale d’Haïti ont porté fruits. Dans son rapport du 19 décembre 2006 sur la MINUSTAH (S/2006/1003), le Secrétaire général de l’ONU souligne qu’au cours des six mois précédents, « la sécurité, dans l’ensemble, est restée relativement stable et, dans certaines zones, des améliorations sensibles sont à signaler », mais reconnaît que la situation demeure « fragile et incertaine ». Des opérations plus robustes menées par la MINUSTAH et la Police nationale haïtienne à partir du 22 décembre 2006 ont eu pour effet d’améliorer davantage la situation sécuritaire et de faire diminuer le nombre d’enlèvements de façon significative. Le Canada est tout à fait conscient de l’importance de soutenir ces efforts à long terme pour relever avec succès le défi que posent les gangs criminels; cette question a été soulevée à plusieurs occasions depuis avec des fonctionnaires supérieurs et des ministres de l’administration haïtienne et avec des partenaires clés de l’intervention en Haïti, pour renforcer la détermination des Haïtiens et de l’ONU à cet égard. Convaincus que la réussite des efforts de reconstruction passe par une MINUSTAH efficace, le Canada et le Brésil ont organisé conjointement, à Brasilia, une conférence de haut niveau visant à renforcer l’intégration de la mission, et cela, pour en améliorer l’efficacité opérationnelle.

En plus de ce travail fait afin de s’assurer que la MINUSTAH soit dotée de l’autorité et des moyens nécessaires pour la lutte aux bandes criminelles, le Canada contribue aux efforts menés pour améliorer la situation sécuritaire en Haïti. Plus précisément, le Canada appuie, par l’intermédiaire de la MINUSTAH et du PNUD, les efforts visant à améliorer la sécurité dans les collectivités les plus éprouvées par la violence des gangs. Par la création de comités pour la prévention de la violence et pour le développement, les collectivités vont mettre en œuvre des stratégies visant à réduire l’influence des groupes armés, à prévenir les conflits et à fournir des services conseils aux victimes de la violence et aux ex-membres de gangs. Ces comités vont aussi définir et mettre en œuvre de nouveaux programmes sociaux qui créeront un espace où le gouvernement pourra dispenser les services essentiels tels que la santé et l’éducation.

Le Canada apportera aussi une aide financière pour augmenter la capacité du gouvernement haïtien dans le domaine de la gestion de la frontière, afin de réduire l’incidence de crimes tels que la traite de personnes et le trafic d’armes, de stupéfiants et de migrants. Les projets réalisés dans ce domaine viseront à remédier à la vulnérabilité des frontières nationales du pays aux réseaux de criminels transnationaux qui exploitent Haïti comme point de transit. Le fait d’aider le gouvernement haïtien à renforcer son contrôle frontalier a aussi l’avantage de tisser des relations avec les pays voisins, notamment la République dominicaine et les pays de la CARICOM, pour le règlement de leurs problèmes communs.

Le Canada reconnaît le rôle crucial que joue la MINUSTAH dans la stabilisation et la reconstruction d’Haïti, et apprécie en particulier la contribution importante qu’apportent nos partenaires dans la région, qui fournissent plus de 60 pour 100 du contingent militaire. La mission est en fait devenue la manifestation concrète de la priorité attachée dans l’hémisphère à l’amélioration de la situation en Haïti. Le Canada reconnaît cet important facteur et entend veiller à ce que ses partenaires latino américains restent fermement engagés à long terme en Haïti : ce sont les deux facteurs qui guident ses décisions à propos de sa propre contribution à la Mission.

S’agissant du maintien de l’ordre, le Canada contribue depuis longtemps à la réforme de la Police nationale haïtienne (PNH). À ce titre, il est en mesure d’apporter une plus-value dans ce domaine. Aussi, le 8 octobre 2006, le SCT a-t-il approuvé une présentation en vue de la création d’un programme interne pour l’affectation de policiers à des opérations de paix et de maintien de la paix. Ce programme, qui relève de la GRC, permettra à celle-ci de mener et de poursuivre des activités relatives à la paix et au maintien de la paix. Maintenant que la GRC dispose d’un financement, d’ici mars 2008, il lui reste à recruter, former et remplacer des effectifs de manière à constituer un groupe de 200 policiers susceptibles d’être déployés dans le cadre d’opérations internationales. Certes, le passage vers la création des 200 postes prévus n’est pas terminé. Toutefois, il est prévu que ce nouveau programme permettra au Canada de respecter ses engagements à l’égard de la MINUSTAH, à savoir le déploiement de 100 policiers auprès de celle-ci au cours de l’année. À l’heure actuelle, 70 policiers œuvrent auprès de la MINUSTAH, ce qui représente plus des deux tiers des effectifs policiers déployés par le Canada auprès de missions de maintien de la paix. Les policiers canadiens déployés sont hautement compétents et, en règle générale, ont séjourné antérieurement en Haïti. Par conséquent, ils occupent des postes de commandement et à responsabilités. C’est ainsi que les deux derniers commissaires de police de la MINUSTAH étaient des Canadiens, et qu’un Canadien occupe actuellement les fonctions de sous commissaire de police. De plus, le Canada est fermement décidé à augmenter, à hauteur de 100 hommes, ses effectifs auprès de la MINUSTAH. Or, la réalisation de cet objectif est difficile en raison des critères linguistiques applicables, qui limitent le nombre de candidats compétents. À cela s’ajoutent les besoins à l’échelle nationale, qui limitent la capacité de déployer des effectifs à l’étranger. Toutefois, pour renforcer sa contribution à la MINUSTAH, le MAECI étudie actuellement d’autres options, notamment le déploiement de policiers canadiens à la retraite. Le Canada est déterminé à respecter ses engagements, y compris par la voie de la coopération avec les services de police provinciaux et municipaux et par le déploiement de policiers qui viennent tout juste de prendre leur retraite. La contribution du Canada aux opérations actuelles pour réprimer les bandes criminelles est particulièrement appréciée. Pour l’heure, le Canada a aussi détaché quatre officiers militaires, y compris aux fonctions de chef d’état-major du volet militaire de la MINUSTAH. L’objectif vise à soutenir dans son travail le commandement brésilien de la force internationale.

Comme le souligne le rapport du Comité, le Canada a participé à plusieurs efforts de réforme de la police haïtienne depuis 1994. Plus de 550 policiers canadiens ont participé aux différentes missions de la Police civile de la Force des Nations Unies en Haïti depuis lors. Dès 2004, le Canada a cherché à mettre à profit l’expérience acquise en Haïti pour faire en sorte que les efforts multilatéraux pour renforcer la police haïtienne portent fruits. L’une des leçons apprises est que l’élaboration d’un service de police jusqu’à maturité est lente et requiert des engagements financiers et de l’appui technique à long terme de la part de la communauté internationale. Cette dernière constatation est d’ailleurs au cœur des efforts menés par le Canada pour assurer une présence soutenue sur plusieurs années de la MINUSTAH vu le rôle crucial de celle-ci en vue de la mobilisation et de la coordination de ressources internationales pour la réforme de la police.

Aussi, des experts canadiens ont travaillé depuis 2004 avec des contreparties haïtiennes sur l’élaboration d’un plan de réforme de la police, travail qui a été repris par la suite par la MINUSTAH et les autorités haïtiennes en vue du plan national adopté en 2006. Plusieurs projets canadiens du Canada visent à assurer le professionnalisme de la police nationale haïtienne. Un projet du Fonds pour la paix et la sécurité (GPSF) permettra de réformer le Bureau de l’inspecteur général. L’Inspectorat général pourra ainsi exécuter le processus crucial de vérification (avec l’appui de la MINUSTAH) et veiller à ce que la police haïtienne soit dotée d’agents compétents et professionnels, ce qui renforcera la légitimité de la police haïtienne dans son ensemble. À plus long terme, l’ACDI planifie un projet de création d’une « Académie de police » dont le mandat sera d’assurer la formation du personnel cadre de la Police nationale haïtienne et ainsi d’en accroître le professionnalisme et l’efficacité.

Recommandation 4
Dans le secteur de la justice et du système pénitentiaire, puisque l’impunité règne toujours à travers tout le pays le Canada devrait travailler étroitement avec les autorités haïtiennes et ses partenaires internationaux pour mettre fin à l’impunité, mettre sur pied un système national de protection des droits de la personne, former les juges et réformer le système carcéral.
Réponse

Dans son rapport du 19 décembre, le Secrétaire général des Nations Unies dressait un portrait sombre du système de justice haïtien et soulignait que les efforts soutenus de la MINUSTAH et de la communauté internationales seraient décisifs pour la mise en place des réformes proposées par le gouvernement haïtien dans son plan d’action pour la réforme de la justice. Cette évaluation a été confirmée par l’International Crisis Group dans son rapport du 31 janvier 2007 qui renforçait également les conclusions tirées d’expériences passées, en Haïti et dans d’autres États fragiles, comme quoi la réforme dans le secteur policier est vouée à l’échec si la réforme dans les secteurs judiciaires et carcéraux n’avance pas au même rythme. Enfin, lors de récentes discussions présidées par le Canada avec les partenaires clés en Haïti, le DSRSG Mulet a souligné que la réforme de la justice devait dorénavant constituer l’une de quatre grandes priorités de la communauté internationale en Haïti. Les autorités haïtiennes ont mis en avant un plan d’action visant à résoudre le problème des détentions préventives et prolongées, mentionné dans le rapport du Comité permanent, et à améliorer le respect du droit fondamental des prévenus en attente de procès à être jugés dans un délai raisonnable. Ce plan vise aussi à rétablir la confiance du public dans le système juridique haïtien, en assurant l’indépendance de la magistrature et en luttant contre la corruption et les autres abus dans les institutions judiciaires. À cette fin, le FPSM prévoit d’intervenir dans le domaine des détentions prolongées en Haïti. Le fait de fournir des moyens et de l’équipement de base aux tribunaux de Port au-Prince, de faciliter les poursuites judiciaires contre les criminels et de débloquer et reconstruire les prisons congestionnées apporterait une justice rapide à un grand nombre de prévenus et cultiverait la confiance dans le fonctionnement du système judiciaire, qui reste incapable de répondre aux besoins immédiats. Il est établi que la réforme de la justice va continuer d’occuper une place cruciale dans les programmes canadiens en Haïti dans un avenir prévisible.

Dans le cadre de la stratégie intérimaire de l’ACDI, le renforcement d’État de droit et de la justice constitue l’un des trois axes prioritaires de programmation en gouvernance et renforcement de l’État. Deux projets dans le domaine de la justice sont en cours. Le premier vient en appui au ministère haïtien de la Justice et est exécuté par l’Organisation internationale pour la francophonie (OIF). Des experts de pays francophones viendront aider leurs homologues haïtiens à accroître les capacités de l’appareil judiciaire afin de rendre ce dernier plus indépendant et plus accessible aux citoyens et aux citoyennes. Le projet est structuré autour de trois composantes : le renforcement de l’accès à la justice; le renforcement de l’indépendance du pouvoir judiciaire; et le renforcement de la diffusion du droit et de l’information. Le deuxième projet vise à consolider l’État de droit et de la chaîne pénale et est exécuté en partenariat avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Ce projet vise à renforcer l’administration pénitentiaire pour diminuer les incidents liés à la sécurité, augmenter le respect des droits des détenus, améliorer les conditions de détention et favoriser la réinsertion des détenus.

Le Canada va aussi appuyer la réforme du système carcéral en déployant huit agents de correction qui travailleront au côté d’agents haïtiens et fourniront des services de formation, de mentorat et d’assistance dans le cadre de la MINUSTAH. Ces agents seront accompagnés de deux conseillers supérieurs canadiens en services correctionnels qui ont été choisis pour leur expertise dans le domaine à titre d’anciens membres du personnel de la MINUSTAH.

Un État de droit va bien au-delà des règlements et de la compétence du personnel qui les administre. Tout aussi important est l’émergence et l’ancrage d’une culture civique respectueuse de la loi et des droits de la personne. Plusieurs projets de l’ACDI cherchent également à favoriser la participation de la société civile dans la promotion et la protection des droits de la personne, notamment par la sensibilisation du public aux principes des droits de la personne, aux obligations de l’État et aux mécanismes disponibles. Notamment un projet de Réseau Liberté cherche à augmenter la capacité des journalistes haïtiens à contribuer aux débats sur la gouvernance et la protection des droits de la personne. Le Fonds d’appui à la justice et aux droits humains de l’ACDI, apporte des appuis financiers à divers projets et organisations susceptibles de faire progresser la justice, la démocratie, le dialogue national et les droits humains en Haïti. Ainsi, un projet permet à des personnes mineures (femmes et hommes) ayant été lésées dans leurs droits, de faire valoir leur cause en justice et un autre, aux femmes de lutter contre la violence à leur endroit.

Recommandation 5
Le Canada doit travailler avec ses partenaires internationaux et avec le nouveau gouvernement haïtien pour s’assurer qu’une priorité immédiate des plans de développement soit l’établissement d’un projet économique, la création d’emplois et des améliorations tangibles de la situation des classes pauvres haïtiennes. La stratégie globale de développement doit aussi accorder une attention particulière aux secteurs suivants : le développement rural et local, y compris la production agricole et la sécurité alimentaire; la scolarisation de base des enfants; le renforcement du pouvoir des femmes; la formation d’organisations syndicales et d’associations de la société civile fortes; et la création d’un climat propice aux investissements du secteur privé.

Étant donné le niveau de dégradation de l’environnement en Haïti, le Canada doit travailler avec ses partenaires internationaux et avec le nouveau gouvernement haïtien pour s’assurer qu’une priorité est également accordée à la résolution des graves problèmes environnementaux auxquels fait face Haïti, tel que la déforestation responsable des graves inondations, la pollution des berges et l’accumulation de déchets dans les rues des villes et des villages, pour n’en nommer que quelques-uns.
Réponse

Le Canada ainsi que l’ensemble des partenaires internationaux appuient et accompagnent le gouvernement d’Haïti dans l’élaboration d’une stratégie globale de développement pour Haïti.

Lors de la Conférence internationale pour le développement économique et social d’Haïti, tenue en juillet 2006 à Port-au-Prince, le gouvernement haïtien a présenté ses huit « chantiers », ou priorités, dont plusieurs répondent à la recommandation du Comité. Construisant sur les bases du Cadre de coopération intérimaire (CCI), ces priorités sont les travaux publics, l’apaisement social, la justice et la sécurité, l’augmentation des revenus, le renforcement de l’État, l’éducation, la santé, l’agriculture et l’environnement. C’est à cette conférence que le gouvernement du Canada a annoncé son engagement envers le développement d’Haïti de 520 millions $ pour 5 ans.

À l’heure actuelle, le gouvernement haïtien élabore un Document de Stratégie de réduction de la pauvreté final (DSRP) qui, comme le CCI, cherche à promouvoir une croissance profitant d’abord aux pauvres. Plusieurs des thèmes mentionnés par le Comité se trouvent dans le document préliminaire qui jette les bases du DSRP. Le gouvernement d’Haïti attache beaucoup d’importance à la préparation du DSRP, dont l’approbation est une condition pour bénéficier de l’annulation de sa dette envers une majorité de créanciers (voir recommandation 7). Le gouvernement haïtien a d’ores et déjà convenu d’une stratégie participative dans la finalisation du Document, ce qui facilitera la mise à contribution d’acteurs de la société civile.

Pour le Canada, la coordination de l’effort de développement est essentielle. L’ACDI apporte donc une aide stratégique à la préparation et au suivi éventuel du DSRP, comme cela a été fait pour la préparation et le suivi du CCI. Dans l’attente de la finalisation du DSRP par Haïti, la stratégie intérimaire de l’ACDI intègre les priorités énoncées par le nouveau gouvernement haïtien et vise essentiellement à défragiliser Haïti par la réduction de la pauvreté et la consolidation de l’État. Elle repose sur trois grands axes : la bonne gouvernance et le renforcement de l’État; l’accès aux services de base, notamment en santé et en éducation et l’apaisement social.

En éducation de base les projets visent appui à l’amélioration de la qualité par la formation des enseignants et, une meilleure administration des écoles dans le Département de l’Artibonite. L’ACDI planifie étendre ses efforts au niveau national de concert avec le plan du gouvernement haïtien en matière d’éducation. De plus, l’ACDI offre un appui aux cantines scolaires qui bénéficieront à 300 000 enfants.

En égalité entre les femmes et les hommes, le Fonds Kore Fanm II de 4 millions $CAN vise à améliorer l’efficacité des actions des organisations et institutions haïtiennes qui ont pour but de promouvoir, de protéger et de défendre les droits des femmes et de lutter contre la violence à leur endroit.

La participation de la société civile est essentielle pour le développement du pays. En ce sens, l’ACDI renforce la capacité de la société civile haïtienne et canadienne de livrer des services ainsi que d’interagir avec le gouvernement via plusieurs mécanismes dont le programme de coopération volontaire d’appui à la gouvernance qui facilite l’envoi de Canadiens pour réaliser des mandats de renforcement des capacités au sein d’organisations de la société civile haïtienne. Aussi, un fonds pour des projets de partenariat entre les organisations haïtiano-canadiennes et la société civile haïtienne et quatre fonds locaux ouverts aux propositions d’organisations locales font partie des mécanismes de l’ACDI à cet égard.

Le Canada cherche également à contribuer à la création d’un climat propice pour le secteur privé. Entre autres, l’ACDI a financé la première consultation du secteur privé et des bailleurs internationaux. Le secteur privé haïtien reconnaît que le rétablissement de l’État de droit est une priorité afin d’attirer l’investissement et apprécie les efforts du Canada en ce sens.

L’ACDI appuie directement des projets reliés au développement rural et local. À ce titre un programme intégré de développement local de 20 millions $CAN a été récemment approuvé et appuie les institutions de l’État haïtien pour l’élaboration d’une politique nationale de développement local et mettra en place une structure de coordination où seront représentés l’ensemble des intervenants en développement local. Ce programme comporte également un fonds de 10 millions $ qui financera des projets qui aident les collectivités à prendre en charge leur propre développement socio économique. Également, des projets de l’ACDI en développement agro-forestier et de gestion de bassin-versant ont une forte composante environnementale.

La dégradation de l’environnement en Haïti demeure une préoccupation pour le gouvernement haïtien et pour le Canada. Cependant, en termes de priorités immédiates, le gouvernement haïtien a clairement indiqué qu’il préfère que l’attention de l’ACDI soit tournée vers d’autres secteurs, notamment la gouvernance et l’éducation. Sans être un secteur d’intervention prioritaire en Haïti, l’environnement demeure un des thèmes transversaux de la programmation de l’ACDI, tout comme l’égalité entre les femmes et les hommes. Tous les projets de l’ACDI doivent impérativement respecter les lignes directrices de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, plus particulièrement le Règlement sur l’évaluation environnementale des projets réalisés à l’extérieur du Canada. Par ce mécanisme d’examen des attaques environnementales, il s’agit de dégager les possibilités d’améliorer la protection de l’environnement et d’éviter les impacts négatifs. De plus, il est à noter qu’un certain nombre de projets de l’ACDI procurent des avantages importants sur le plan environnemental, y compris, par exemple, l’intégration de bonnes pratiques agro-forestières dans le développement local et la gestion efficace des ressources en eau dans la vallée fertile de l’Artibonite.

Enfin, soulignons que le Canada maintient un dialogue politique soutenu avec le gouvernement haïtien et la communauté internationale pour que l’ensemble des priorités du gouvernement soient adressées par les partenaires collectivement.

Recommandation 6
Le Canada devrait s’assurer du maintien et de la consolidation des infrastructures électorales mises en place. Dans cet esprit il devrait fournir un plus grand soutien, tant financier que logistique, afin d’assurer la tenue des élections municipales, dont celles qui sont prévues pour décembre 2006. La tenue de ces élections est essentielle pour la sauvegarde de tout le travail qui a été accompli et pour éviter que le gouvernement ait la tentation de nommer les maires et ainsi reproduire une situation qui a constitué une des plus grandes sources de corruption en Haïti dans le passé.

Au-delà de la poursuite de l’assistance électorale, le Comité appuie vigoureusement la participation à long terme du Canada dans la création d’institutions démocratiques et de bonne gouvernance durables en Haïti. En particulier, le Canada devrait s’efforcer de solidifier le régime parlementaire en Haïti dans le but d’assurer une meilleure représentation de tous les citoyens au Parlement national.
Réponse

Dès 2004, suite au départ du Président Aristide, le Canada a reconnu l’importance de la tenue rapide d’élections démocratiques en Haïti. La Conférence internationale de Montréal sur Haïti, tenue en juin 2005 et coprésidée par les gouvernements du Canada et d’Haïti, avait permis aux représentants du gouvernement intérimaire haïtien, aux pays donateurs et amis, ainsi qu’aux institutions financières et aux organisations nationales, internationales et régionales, de s’entendre sur une approche concertée pour la mise en place d’un environnement sécuritaire et favorable à la tenue d’élections libres et transparentes en Haïti. Par la suite, le Canada a déployé des ressources importantes, autant financières que techniques et humaines, afin d’appuyer Haïti au cours de ce processus électoral. Le Canada a également fait preuve de leadership tout au long de celui-ci pour éviter qu’il ne dérape face aux multiples difficultés politiques, logistiques ou organisationnelles survenues en cours de route. En ce sens, l’aboutissement du cycle électoral en Haïti, avec la tenue des élections locales et municipales le 3 décembre 2006, représente une grande réussite pour Haïti.

Le Canada a investi plus de 35 millions $ en 2005–2006 pour le cycle électoral haïtien, qui inclut les élections présidentielles et législatives tenues en février et avril 2006, de même que les élections locales et municipales du 3 décembre dernier. Ces fonds, qui provenaient en majeure partie de l’ACDI, ont été utilisés pour financer l’organisation des élections, la production de plus de 3 millions de cartes d’identité, la mise sur pied de la Mission internationale d’évaluation des élections en Haïti, dirigée par Élections Canada, et la mobilisation de plus de 200 observateurs à court terme du Canada pour les élections présidentielles et législatives. Une partie de ces fonds provenait du Fonds global pour la paix et la sécurité du MAECI et a servi à l’acquisition de matériel de communications, au recrutement de 1300 agents de sécurité nationaux, et au déploiement de 25 experts policiers canadiens.

Le Canada se réjouit de la tenue des élections locales et municipales du 3 décembre 2006, qui ont permis de clore un cycle électoral qui revêtait une importance particulière pour la reconstruction des institutions démocratiques en Haïti. L’apport financier du Canada pour ces élections locales et municipales s’est élevé à 5 des 35 millions mentionnés ci-haut. À la demande expresse de l’ONU, le Canada a également redéployé un officier militaire pour qu’il agisse, au sein de la MINUSTAH, à titre de coordonnateur de l’appui logistique et de la sécurité entourant les élections, rôle qu’il avait déjà joué à l’occasion des élections présidentielles et législatives. Élections Canada était également sur place, dirigeant la Mission canadienne d’accompagnement des élections en Haïti, avec le déploiement de la mi-octobre à la mi-décembre 2006 d’experts auprès du CEP et de 22 observateurs internationaux à long terme sur l’ensemble du territoire.

L’une des préoccupations centrales du Canada tout au long de ce processus électoral a été de consolider les progrès et les acquis en matière de développement des institutions électorales. C’est pour cette raison qu’en plus de financer le déploiement d’observateurs canadiens, le Canada a contribué financièrement à la formation de 3000 observateurs nationaux, qui ont pris part au processus électoral en 2006 (dont 1000 lors des élections du 3 décembre dernier). Ces observateurs haïtiens pourront continuer de mettre à contribution leur expertise, acquise en 2006, lors de prochains cycles électoraux. Aussi, le Canada a mis l’accent tout au long du processus sur le renforcement des capacités locales pour l’organisation du cycle électoral 2006. Dans ce contexte, il faut reconnaître que si la MINUSTAH et l’OEA avaient joué un rôle important lors des élections présidentielles et législatives, c’est le Conseil électoral provisoire haïtien qui a été responsable de la majorité des préparatifs pour les élections du 3 décembre 2006. Par ailleurs, la tenue des élections locales et municipales remplit les conditions constitutionnelles pour la création des institutions électorales permanentes, d’où l’importance de cette dernière phase du cycle électoral et la priorité accordée par le Canada dès le départ à ce que le cycle soit mené à terme.

Toujours dans le but de consolider les acquis, le Canada s’est engagé avec l’Organisation des États américains (OEA) pour appuyer les autorités haïtiennes dans le développement d’un registre civil et dans la transformation du Conseil électoral provisoire afin de le doter d’un caractère permanent. L’OEA avait déjà travaillé à l’élaboration d’une liste d’électeurs avant les élections présidentielles du printemps 2006 et cette liste servira de base à l’élaboration du registre national.

Le Canada considère que le renforcement de la bonne gouvernance et des institutions parlementaires est une priorité dont toute l’importance se reflète dans la stratégie intérimaire de l’ACDI où le renforcement de l’exécutif et des institutions démocratiques fait partie de sa programmation. Poursuivant l’assistance technique offerte aux ministères clés durant la transition, l’ACDI élabore avec le nouveau gouvernement un programme structuré d’appui visant à renforcer sa capacité à exercer son leadership en matière de gestion et de coordination de l’aide internationale; à gérer la modernisation administrative; à assurer une gestion moderne des ressources humaines ainsi qu’une saine administration publique. Pour ce qui est de renforcer le secteur législatif, l’ACDI finance un projet du Centre parlementaire, donc le but est de prodiguer une assistance technique afin d’augmenter l’efficacité et de renforcer les capacités du Parlement haïtien, dans l’optique de sa contribution à la bonne gouvernance du pays. Ce projet est axé sur quatre composantes principales, soit le renforcement du rôle législatif et de supervision du Parlement; l’amélioration du dialogue entre le législatif et l’exécutif; l’ouverture du Parlement aux citoyens et citoyennes; et le renforcement du bureau administratif du Parlement.

Recommandation 7
Dans le cadre des énoncés de politique réclamés dans les recommandations 1 et 2, le Canada devrait souscrire officiellement à une stratégie pangouvernementale pour Haïti qui envisage une participation d’une durée d’au moins dix ans et qui précise que le financement à long terme — au-delà des affectations de cinq ans déjà annoncées en juillet 2006 — sera disponible pour appuyer sans réserve cette stratégie.

Il faut aussi songer à éliminer la dette bilatérale et multilatérale d’Haïti, qui s’élevait à 1,3 milliard $US en 2005 et qui oblige le gouvernement haïtien à affecter annuellement quelque 60 millions $US à son remboursement. Le Canada, de concert avec d’autres pays et organisations internationales, devrait oeuvrer à l’élimination de la dette d’Haïti, en accord avec l’Initiative d’aide aux pays pauvres très endettés.

Le Canada devrait également prêter son concours et son soutien aux organisations de la société civile. Une stratégie d’aide à long terme avec Haïti doit inclure à la fois le gouvernement et la société civile.
Réponse

Le Canada reconnaît l’importance d’une stratégie pangouvernementale et à long terme en Haïti. L’approche canadienne a déjà inclus plusieurs partenaires clés jusqu’à présent, soit Affaires étrangères et Commerce international Canada (MAECI), l’Agence canadienne de développement international (ACDI), la Défense nationale (DND), et la Gendarmerie Royale du Canada (GRC), impliquant de facto le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile (SPPCC). La collaboration étroite entre ceux-ci, renforcée par des contributions ponctuelles d’autres ministères comme celui des Finances sur les questions d’allégement de la dette et de la Justice dans la définition d’éventuelles interventions canadiennes dans ce secteur, a permis au Canada d’adapter ses actions en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain et d’agir rapidement au gré des urgences depuis 2004. Ceci dit, le Canada reconnaît qu’avec l’installation d’un nouveau gouvernement démocratique en Haïti et l’adoption d’un plan de développement qui vient préciser davantage les priorités et les besoins à plus long terme du pays, d’autres ministères du gouvernement canadien seront mis à contribution de façon accrue au cours des prochaines années.

Le Canada a appris des erreurs du passé et s’est engagé à accompagner Haïti à long terme. Dès sa première conversation avec le Président-élu Préval, en février 2006, le Premier ministre du Canada a assuré à son homologue que l’engagement canadien serait soutenu et à long terme, une assurance qui a été réaffirmée lors de la visite du Président Préval au Canada en mai. Lors de rencontres bilatérales avec les partenaires clefs et réunions multilatérales, le Canada continue de faire valoir que la reconstruction d’Haïti est un travail d’envergure qui requiert un engagement soutenu de la part de la communauté internationale. Dans le contexte interaméricain, le Canada fait preuve de la volonté politique nécessaire pour assurer que le dossier d’Haïti demeure une priorité régionale.

Le Canada s’est de fait positionné en leader et modèle pour les autres bailleurs de fonds et partenaires impliqués en Haïti. Lors de la Conférence internationale des bailleurs de fonds qui s’est tenue à Port au-Prince en juillet 2006, le Canada a été le seul bailleur de fonds à s’engager pour une période de cinq ans. L’approche canadienne est flexible et pourra s’ajuster aux priorités et besoins à long terme qui seront identifiés prochainement dans le Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté, que les autorités haïtiennes s’affairent à finaliser pour la fin 2007 ou le début 2008. Ce document constituera le nouveau cadre stratégique auquel adhérera la communauté des bailleurs de fonds.

De fait, l’effort canadien en Haïti va au-delà des seuls ministères. Ainsi, Élections Canada a joué un rôle clé pour accompagner Haïti dans son processus électoral. D’autres organismes, tels Droit et démocratie de même que le Centre parlementaire, sont actifs en Haïti. La province de Québec, où la diaspora haïtienne est importante, est également un acteur clé du processus. De même, la diaspora haïtienne au Canada est très active et joue également un rôle important pour la reconstruction d’Haïti, notamment à travers les initiatives provenant du secteur privé. L’ACDI travaille de concert avec diverses organisations représentatives de cette diaspora, notamment le Regroupement des organismes canado-haïtiens (ROCAHD). Enfin, il faut souligner le rôle important de la société civile canadienne, qui entretient des liens étroits avec la société haïtienne depuis plusieurs années.

Le Canada a longtemps appuyé la société civile haïtienne de façon significative dans un contexte de faiblesse des institutions étatiques. Avec la constitution d’un nouveau gouvernement, le Canada s’efforce maintenant de renforcer l’État dans sa capacité de livrer les services aux citoyens. Par ailleurs, l’appui à la société civile demeure important. Le Canada reconnaît que la société civile joue un rôle crucial pour travailler avec les instances gouvernementales au renforcement de la démocratie et de l’État de droit. Le Canada cherche donc à atteindre et à maintenir un équilibre entre son appui à l’appareil étatique et son appui aux organisations de la société civile.

La société civile canadienne a joué au fil des ans un rôle majeur pour appuyer le renforcement des capacités institutionnelles des organisations haïtiennes, notamment en ce qui a trait à la définition et à la mise en œuvre de projets de développement ainsi qu’à l’établissement d’un dialogue avec l’État. Des organisations non gouvernementales, des universités et des institutions canadiennes, en commençant par les communautés religieuses du Québec, ont œuvré en Haïti et des liens étroits se sont tissés entre les deux populations. Ce lien constitue encore aujourd’hui une des principales forces de la coopération canadienne en Haïti.

Le Centre de gestion des fonds de l’ACDI est responsable de la mise en œuvre d’une variété de fonds locaux sur les thèmes de la démocratie, la santé et l’éducation, le développement économique et l’emploi, et l’égalité entre les femmes et les hommes. Ces fonds permettent à l’ACDI de répondre rapidement à des initiatives et demandes de financement soumises par des organisations haïtiennes, canadiennes ou internationales, basées en Haïti. Ainsi, le Fonds d’appui à la démocratie et à la paix appuie la bonne gouvernance et les droits de la personne; le Fonds d’appui Justice et Droits humains appuie les initiatives d’organisations de la société civile (OSC) susceptibles de faire progresser la justice, la démocratie, le dialogue national et les droits humains en Haïti; le Fonds Kore Famn II vise à améliorer l’efficacité des actions et des organisations et institutions haïtiennes qui ont pour but de promouvoir, de protéger et de défendre les droits des femmes et de lutter contre la violence à leur endroit; le Fonds santé et éducation vise à contribuer à la satisfaction des besoins humains fondamentaux en matière d’éducation de base et de santé primaire; et le Fonds pour le développement économique et l’emploi cherche à promouvoir la création d’emplois en appuyant des opportunités économiques et communautaires qui soutiennent la prise en charge de leur développement par les populations à la base, et en soutenant la réalisation d’activités de réhabilitation et de construction d’infrastructures sociales et économiques comme éléments de base essentiels à un développement socio-économique local.

Sur la question de la dette, le Canada a également fait preuve de leadership, travaillant de concert avec différents partenaires internationaux afin d’appuyer les efforts d’Haïti visant à obtenir le soulagement de sa dette bilatérale et multilatérale. L’approche canadienne à cet effet a été pangouvernementale et a inclus l’appui de représentants des ministères des Finances, du MAECI ainsi que de l’ACDI. Le Canada a encouragé les créanciers à faire preuve de clémence à l’égard d’Haïti, qui a fait des efforts considérables pour améliorer sa situation macroéconomique et la situation de sécurité qui prévaut au niveau national. Dans ce contexte, l’ACDI a contribué depuis 2004–2005 15,8 millions $CAN pour combler les arrérages d’Haïti envers la Banque mondiale — ce qui aura permis à Haïti de recevoir de l’aide additionnelle de la Banque — et 18 millions $CAN pour ceux envers la Banque interaméricaine de développement. Plus récemment, l’ACDI a également mis de l’avant un projet de 16 millions $CAN qui contribuera au service de la dette d’Haïti envers la BID mais qui vise également le renforcement des capacités haïtiennes dans la gestion de la dette.

À la fin de 2006, Haïti a commencé à bénéficier de l’Initiative renforcée en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) et à obtenir des allégements de dette de la part de créanciers bilatéraux et multilatéraux. Le Canada a été l’un des principaux pays à plaider, à la Banque mondiale et au FMI, en faveur de l’inclusion d’Haïti parmi les PPTE. Tandis que le Canada jouait le rôle de premier plan, la Banque de développement interaméricaine a décidé d’alléger la dette d’Haïti. On estime que grâce à l’Initiative PPTE, la remise de dette totalisera 212,9 millions $US (environ 140 millions $US en valeur actualisée nette). Une fois terminé le processus de l’Initiative renforcée, Haïti serait admissible à un autre allégement de la dette de la part de la Banque mondiale, qui pourrait s’élever à 464,4 millions $US (243,3 millions $US en valeur actualisée nette). Après l’intégration d’Haïti aux PPTE, le Club de Paris des créanciers bilatéraux, dont le Canada, lui a accordé un allégement de dette jamais vu jusque là : un moratoire total sur le service de la dette exigible. Le Canada compte ajouter encore à l’allégement de la dette d’Haïti en arrêtant de percevoir les paiements du service de la dette et en effaçant complètement les créances de ses livres dès qu’Haïti atteindra le Point d’achèvement en vertu de l’Initiative renforcée en faveur des pays pauvres très endettés. Le Canada compte travailler avec la communauté internationale en vue d’annuler les dettes éligibles par Haïti lorsqu’elle aura atteint le point de décision de l’initiative PPTE. On s’attend à ce qu’après application complète des mécanismes d’allégement de la dette, la dette extérieure d’Haïti, en valeur actualisée nette, tomberait de 1,3 milliard à 480 millions $US, lorsque Haïti aura mené à bien le processus de l’Initiative renforcée.

L’allégement de la dette donnera au gouvernement haïtien une importante marge de manœuvre financière. Il pourra réorienter ses moyens financiers vers les initiatives qui réduiront la pauvreté et amélioreront la vie de tous les Haïtiens. Sans cette aide, l’obligation de continuer à consacrer des ressources considérables au remboursement de la dette ralentirait le développement du pays.