OGGO Rapport du Comité
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
CHAMBRE DES COMMUNES OTTAWA, CANADA K1A 0A6 |
38e Législature, 1re Session
Le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires a l’honneur de présenter son
TROISIÈME RAPPORT
Processus de nomination de M. Gordon Feeney au poste de président du conseil d’administration de Postes Canada Le présent document vise à informer la Chambre des conclusions du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires concernant le processus utilisé pour nommer M. Gordon Feeney au poste de président du conseil d’administration de la Société canadienne des postes en date du 30 septembre 2004 (C.P. 2004-1124). En vertu de l’article 111 du Règlement, un comité peut convoquer une personne nommée par décret pendant une période n’excédant pas 30 jours de séance à partir de la date à laquelle la nomination est déposée au Parlement, pour en examiner les titres, les qualités et la compétence de même que la capacité d’exécuter les fonctions du poste auquel elle a été nommée. Dans le délai de 30 jours établi par l’article 111 du Règlement, le Comité a consacré plusieurs séances à la nomination de M. Feeney. Le mardi 26 octobre dernier, il l’a rencontré ainsi que le ministre responsable, l’honorable John McCallum. Le jeudi 28 octobre a eu lieu une réunion de suivi avec M. Ritchie, président du comité des nominations de la Société canadienne des postes. Durant ces réunions, le Comité a soulevé une série de préoccupations au sujet du processus de sélection qui a mené à la nomination de M. Feeney. Bien que ces préoccupations débordent le cadre de l’article 111 du Règlement, le Comité les a examinées en vertu des pouvoirs que lui confère le paragraphe 108(2) du Règlement, qui autorise tous les comités permanents « […] à faire une étude et présenter un rapport sur toutes les questions relatives au mandat, à l'administration et au fonctionnement des ministères qui leur sont confiés de temps à autre par la Chambre ». Le 2 décembre 2004, le Comité a rencontré l’honorable Reg Alcock, président du Conseil du Trésor, pour discuter de ces préoccupations. En août de cette année, Mme Vivian Albo a annoncé son intention de démissionner de ses fonctions de présidente du conseil d’administration de Postes Canada; il a donc fallu lui trouver un remplaçant. La première responsabilité du nouveau président et du conseil d’administration serait de trouver un nouveau président et chef de la direction, en raison de la démission, le 12 août 2004, de l’honorable André Ouellet. C’est le Comité de régie et des nominations, présidé par le directeur de Postes Canada, M. Cedric Ritchie, qui s’est chargé de trouver un nouveau président du conseil d’administration. Le ministre avait demandé qu’on lui communique la liste des candidats avant le 30 septembre, faisant écho au sentiment d’urgence qui, selon M. Ritchie, était partagé par le conseil d’administration. Les responsabilités du président et chef de la direction ont été assumées à titre temporaire depuis la suspension avec rémunération du titulaire en février, mais il a fallu suspendre la recherche d’un remplaçant en attendant que la situation de M. Ouellet s’éclaircisse. S’adressant au Comité, M. Ritchie a fait savoir que les délibérations du comité des nominations avaient permis de retenir deux candidats dont les noms ont été communiqués au ministre après que le conseil d’administration eut examiné et entériné leur dossier. Le ministre McCallum a indiqué qu’il avait communiqué avec les porte-parole de l’opposition chargés des questions touchant Postes Canada de manière à les informer de son intention de nommer M. Feeney. Le 30 septembre 2004, il a annoncé la nomination. Le décret C.P. 2004-1124, nommant M. Feeney à titre amovible et à temps partiel pour une période de trois ans, a été déposé à la Chambre des communes par le ministre du Revenu national et le ministre responsable de Postes Canada, l’honorable John McCallum, et renvoyé au Comité le 13 octobre 2004 conformément au paragraphe 110(1) du Règlement. Le 15 mars 2004, le président du Conseil du Trésor a annoncé à Vancouver (Colombie-Britannique) la création d’un nouveau processus de nomination fondé sur le mérite pour le recrutement de tous les premiers dirigeants, directeurs et présidents des sociétés d’État (voir l’Appendice 1). Il a demandé aux conseils d’administration des sociétés d’État d’établir :
le processus de nomination suivant :
Le 23 avril 2004, le président du Conseil du Trésor, l’honorable Reg Alcock, a écrit à Mme Anne Joynt, présidente par intérim et directrice générale de Postes Canada, pour confirmer expressément que la Société serait tenu de respecter le processus annoncé le 15 mars 2004, sauf disposition contraire de la loi habilitante de l’organisation (voir l’Appendice 2). La lettre contenait la déclaration suivante, reprise substantiellement dans le communiqué du 15 mars : « Pour faire son travail, le comité de sélection devra compter sur des processus rigoureux comprenant le recours à une entreprise professionnelle de recrutement, ainsi qu’à des annonces publiques pour la sélection du premier dirigeant et du président. » Elle demandait ensuite que Postes Canada fournisse certains renseignements au sujet du comité de sélection et des critères de sélection en renvoyant le lecteur à la « pièce jointe » pour connaître les détails du processus. La pièce jointe en question apporte plusieurs modifications aux critères du processus énoncés dans la lettre et dans l’annonce du 15 mars en autorisant des exceptions aux critères clés. Ces critères, dont les modifications autorisant les exceptions, sont indiquées en caractères gras sont reproduits ci-dessous :
A. Le processus Lors de leur comparution devant le Comité, le ministre du Revenu national et le président du comité de sélection de Postes Canada ont soutenu que les critères du nouveau processus de nomination décrits dans la lettre du président du Conseil du Trésor ont été respectés relativement à la nomination de M. Feeney. M. Ritchie, président du comité de sélection, a attiré plus particulièrement l’attention du Comité au degré de discrétion conféré aux comités de sélection par le libellé de la pièce jointe, et il a indiqué qu’il avait été nécessaire de passer outre ce qui était considéré comme des étapes facultatives afin de respecter le délai imposé par le ministre : Il n'aurait pas été possible de fournir une liste de candidats dans les délais proposés par le ministre en suivant toutes les étapes normales du processus, comme publier des annonces pour le poste et faire appel aux services d'une agence de recrutement. J'ai discuté de la question avec Mme Albo (présidente par intérim du conseil d’administration), ainsi qu'avec le Comité de régie et des nominations et le conseil d'administration, qui en ont convenu. (1203 :28/10) M. Ritchie a également relevé certains éléments de la directive qui n’avaient pas été respectés : non recours à une entreprise de recrutement ni à la publicité dans les journaux nationaux ou la Gazette du Canada. Le 2 décembre, lors de sa comparution devant le Comité, le président du Conseil du Trésor a décrit le processus établi dans l’annonce faite en mars et dans la lettre envoyée à Postes Canada en avril comme un « processus de nomination intérimaire » parce qu’il s’attendait à d’autres changements à la suite de l’annonce, le 10 février 2004, que le processus serait examiné en détail dans le contexte de l’examen de la gouvernance des sociétés d’État. M. Alcock a indiqué que l’examen était presque terminé et qu’il pourrait donner lieu à un « processus entièrement nouveau .» (1235 :12/02 ) Il a déclaré que la nomination avait été faite selon un processus « ouvert » jusqu’à ce qu’un comité parlementaire puisse l’examiner et, ainsi, respecter l’engagement du gouvernement en matière de transparence et du rôle des parlementaires. Il a aussi fait valoir que l’esprit du processus de nomination intérimaire – trouver le meilleur candidat possible – avait été respecté. Il a été question précisément des contradictions apparentes entre les critères annoncés en mars et ceux décrits dans la lettre d’avril. M. Alcock a indiqué que la lettre avait autorisé certaines exceptions concernant la nécessité de retenir les services d’entreprises de recrutement qu’il a annoncée en mars à la suite des préoccupations exprimées par certaines sociétés au sujet de l’utilité de cette étape dans tous les cas et des coûts liés à ces services. Il a soutenu que ce changement ne signifiait pas qu’il revenait sur l’engagement donné en mars mais qu’il donnait une marge de manœuvre aux sociétés pour répondre à leurs besoins particuliers. En réponse à une question, il a ajouté que le changement tenait compte des conseils qu’il avait reçus à la suite de l’annonce faite en mars. Les membres du Parlement se sont demandé si le processus annoncé par le gouvernement en mars avait été contourné dans le cas de la nomination de M. Feeney à titre de président du conseil d’administration de Postes Canada. La réponse est non. En effet, la nomination de M. Feeney a eu lieu à la suite d’une recommandation soumise par le comité de sélection au ministre responsable et les membres du Parlement ont examiné sa nomination comme l’exigeait le processus intérimaire. […] Le processus annoncé en mars a pour objectif de trouver des personnes qui possèdent les compétences et qualités nécessaires pour diriger une société d’État. Dans le cas de M. Gordon Feeney, le processus a porté fruit! (Déclaration p. 3) Au cours de la discussion, M. Alcock a déclaré que les défis de la gouvernance moderne dans le secteur public exige un engagement constructif de la part de tous les parlementaires, dénué de tout esprit partisan et s’appuyant sur la reconnaissance générale de la nécessité d’améliorer le processus. Les membres du Comité ont été ravis de constater qu’il s’était montré réceptif à leurs préoccupations au sujet du processus de nomination tel qu’il a été appliqué dans le cas de M. Feeney, entre autres le fait que la nomination des dirigeants doit tenir compte de l’existence de deux langues officielles et du caractère bilingue des institutions fédérales, notamment des organisations comme Postes Canada, et le fait que les cadres supérieurs des institutions fédérales doivent refléter la diversité de la société canadienne et représenter convenablement la population de toutes les régions du Canada. B. Le rôle des relations personnelles Lors de sa comparution devant le Comité, M. Feeney a volontiers reconnu avoir travaillé avec le ministre McCallum pendant cinq ans à la Banque royale du Canada; le ministre à titre d’économiste en chef, et M. Feeney à titre de directeur des opérations de détail. M. Feeney a ajouté qu’ils interagissaient très peu au quotidien à l’époque où ils étaient collègues. Il a aussi indiqué au Comité qu’ils n’entretenaient pas de liens d’amitié étroits et qu’il a rencontré le ministre à deux occasions seulement depuis que celui-ci a quitté la Banque royale il y a quatre ans. Cette description de leurs relations a été substantiellement confirmée par le ministre McCallum lors de son témoignage. M. Cedric Ritchie a indiqué qu’il était celui qui avait premièrement recommandé la candidature de M. Feeney. À la suite d’un examen des exigences et des qualifications requises pour le poste, il a mentionné au ministre que M. Feeney conviendrait pour le poste et lui a recommandé de prendre sa candidature en considération. Le nom de M. Feeney a ensuite été ajouté à la liste des deux candidats possibles remise par le Comité de régie et des nominations au conseil d’administration de Postes Canada, lequel l’a approuvée et soumise au ministre. À l’instar de M. Feeney, le comité a dit s’être fié à « l'expérience des personnes et à leur bilan antérieur » (1240 : 28/10) pour recommander les candidats. M. Ritchie connaissait M. Feeney comme concurrent dans le secteur bancaire (M. Ritchie est l’ancien président de la Banque Scotia) et parce que les deux hommes ont siégé au conseil d’administration de la Banque de développement du Canada. M. Ritchie est l’actuel président du conseil de la BDC auquel M. Feeney siège toujours. Selon M. Ritchie, « j'ai beaucoup de respect pour M. Feeney, mais que je ne suis pas un copain de M. Feeney […] bien que nous puissions agir courtoisement l'un envers l'autre […] il est un concurrent et je n'hésiterais toujours pas à lui arracher autant de clientèle que je peux le faire ». (1245 : 28/10) Les observations et la recommandation qui suivent représentent la contribution du Comité à l’examen global de la gouvernance des sociétés d’État qui est rendu à l’étape finale. Les membres du Comité espèrent qu’on en tiendra compte, plus particulièrement dans le nouveau processus de nomination qui, selon le président du Conseil du Trésor, sera l’un des fruits que portera l’examen.
Compte tenu de ces observations et des conclusions qu’il a tirées au cours des audiences sur le processus utilisé pour nommer M. Feeney, le Comité recommande :
Les membres du Comité sont conscients que des réseaux de connaissances partageant les mêmes perceptions au sujet d’une personne sur la foi des observations et de l’expérience peuvent donner un éclairage que ne permet pas d’obtenir un processus de recrutement plus structuré. Qu’à cela ne tienne, à moins que les perceptions des réseaux informels soient contrebalancées par des processus de sélection plus inclusifs, transparents et concurrentiels, les réseaux de cadres supérieurs peuvent facilement se transformer en clubs confortables qui se perpétuent grâce au copinage et à l’indifférence suffisante vis-à-vis de la contribution possible d’autres individus. Le processus qui a abouti à la nomination de M. Feeney n’était pas sensiblement différent des processus traditionnels auquel prétendait se substituer la politique en matière de nomination annoncée par le président du Conseil du Trésor. Le fait que le président du comité de sélection, le candidat et le ministre qui a approuvé la sélection se connaissent et qu’ils partagent une longue expérience comme cadres supérieurs dans le secteur bancaire ne fait rien pour dissiper le genre de préoccupations que le nouveau processus de nomination devait régler. Les membres du Comité estiment que M. Feeney apportera une contribution importante à Postes Canada. Il est malheureux que le processus de sa nomination ait créé des défis additionnels pour lui au moment où il assume son poste à titre de président du conseil d’administration. Nous lui souhaitons tout le succès possible. Nous sommes également impatients de voir le suivi que donnera le président du Conseil du Trésor aux recommandations faites plus haut afin qu’il n’ait pas à réexaminer les questions soulevées dans le présent rapport. |