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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 22 mars 2005




¿ 0905
V         Le président (l'hon. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.))
V         M. Ron Moran (président national, Union Douanes Accise)
V         Le président
V         M. Ron Moran
V         Le président
V         M. Vic Toews (Provencher, PCC)
V         Le président
V         L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.)
V         M. Ron Moran
V         Le président
V         M. Jean-Pierre Fortin (vice-président national, Région du Québec, Union Douanes Accise)
V         Le président
V         M. Ron Moran

¿ 0910

¿ 0915
V         Le président
V         M. Ron Moran
V         Le président
V         Sgt é.-m. Gaétan Delisle (président, Association des membres de la police montée du Québec)

¿ 0920

¿ 0925
V         Le président
V         M. Vic Toews
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         M. Vic Toews
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         Sgt é.-m. Gaétan Delisle

¿ 0930
V         M. Vic Toews
V         Sgt é.-m. Gaétan Delisle
V         M. Vic Toews
V         Sgt é.-m. Gaétan Delisle
V         M. Vic Toews
V         Sgt é.-m. Gaétan Delisle
V         M. Vic Toews
V         Sgt é.-m. Gaétan Delisle
V         Le président
V         M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ)
V         M. Ron Moran

¿ 0935
V         M. Richard Marceau
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         M. Richard Marceau
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         M. Richard Marceau
V         Le président
V         M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD)
V         M. Ron Moran

¿ 0940
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Ron Moran
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Ron Moran
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Ron Moran
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Jean-Pierre Fortin

¿ 0945
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         Le président
V         M. Mark Warawa (Langley, PCC)
V         M. Ron Moran
V         M. Mark Warawa

¿ 0950
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         M. Mark Warawa
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         Le président
V         L'hon. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.)

¿ 0955
V         M. Ron Moran
V         L'hon. Denis Paradis
V         M. Ron Moran
V         Le président
V         M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ)

À 1000
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         M. Serge Ménard
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         M. Serge Ménard
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         M. Serge Ménard
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         M. Serge Ménard
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         M. Serge Ménard
V         Sgt é.-m. Gaétan Delisle
V         M. Serge Ménard
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         M. Serge Ménard
V         Le président
V         M. Ron Moran
V         Le président
V         M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC)
V         M. Ron Moran

À 1005
V         Le président
V         L'hon. Roy Cullen
V         Le président
V         M. Jean-Pierre Fortin
V         M. Garry Breitkreuz
V         Le président

À 1010
V         Le président

À 1015
V         Comm. Giuliano Zaccardelli (commissaire, Gendarmerie royale du Canada)

À 1020
V         Le président
V         M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC)

À 1025
V         Comm. Giuliano Zaccardelli

À 1030
V         Le président
V         M. Richard Marceau
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Richard Marceau
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Richard Marceau
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Richard Marceau

À 1035
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Richard Marceau
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Richard Marceau
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Richard Marceau
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         Le président
V         L'hon. Roy Cullen

À 1040
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         Le président
V         M. Robert Vincent (Shefford, BQ)
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Robert Vincent
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Robert Vincent

À 1045
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Robert Vincent
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Robert Vincent
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Robert Vincent
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         Le président
V         M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC)

À 1050
V         Le président
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Peter MacKay
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Peter MacKay
V         Comm. Giuliano Zaccardelli

À 1055
V         M. Peter MacKay
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Peter MacKay
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Peter MacKay
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Peter MacKay
V         Le président
V         L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.)
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         L'hon. Paul Harold Macklin

Á 1100
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         Le président
V         M. Serge Ménard
V         Comm. Giuliano Zaccardelli

Á 1105
V         M. Serge Ménard
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Serge Ménard
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Serge Ménard
V         Le président
V         L'hon. Denis Paradis

Á 1110
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         L'hon. Denis Paradis
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         Le président
V         M. Richard Marceau
V         Comm. Giuliano Zaccardelli

Á 1115
V         M. Richard Marceau
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         Le président
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         Le président
V         M. Garry Breitkreuz
V         Comm. Giuliano Zaccardelli

Á 1120
V         M. Peter Martin (sous commissaire, Services nationaux de police de la Gendarmerie royale du Canada)
V         Le président
V         M. Garry Breitkreuz
V         Le président
V         M. Garry Breitkreuz
V         Le président
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Garry Breitkreuz
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         Le président
V         L'hon. Roy Cullen

Á 1125
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Peter Martin
V         Le président
V         M. Richard Marceau
V         Comm. Giuliano Zaccardelli

Á 1130
V         M. Richard Marceau
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Richard Marceau
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Peter Martin
V         M. Joe Comartin
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Peter Martin
V         M. Joe Comartin
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         M. Joe Comartin
V         M. Peter Martin
V         Le président
V         Comm. Giuliano Zaccardelli
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


NUMÉRO 025 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 22 mars 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¿  +(0905)  

[Français]

+

    Le président (l'hon. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.)): Nous allons commencer. Je demanderais aux représentants des médias de quitter la salle.

    Il s'agit de la 25e réunion du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile. Nous poursuivons notre étude sur la fermeture des postes de la GRC. Deux de nos témoins aujourd'hui sont de l'Union Douanes Accise: M. Ron Moran, président national, et M. Jean-Pierre Fortin, vice-président national pour la région du Québec. M. Gaétan Delisle, président de l'Association des membres de la police montée du Québec, est aussi parmi nous.

    Je vous invite à faire une présentation d'au plus 10 minutes, puis les membres du comité pourront poser des questions.

    Monsieur Moran.

+-

    M. Ron Moran (président national, Union Douanes Accise): Merci beaucoup, monsieur le président.

    D'abord, j'aimerais vous remercier ainsi que les membres du comité d'avoir accepté de nous entendre ce matin. Comme vous l'avez mentionné, nous avons demandé à notre confrère Gaétan Delisle, de l'Association des membres de la police montée du Québec, de se joindre à nous aujourd'hui. Il est maintenant notoire qu'une des solutions que nous voulons proposer à ce comité est la création d'une patrouille des frontières, et nous allons en parler un peu plus en détail. Comme vous l'avez proposé, nous allons faire une présentation relativement brève dans le but de donner l'occasion aux membres du comité de poser des questions. Nous ne nous étendrons pas sur des sujets dont les membres du comité ne veulent pas nécessairement entendre parler; nous allons plutôt nous pencher sur ceux qui les intéressent.

    Avant de commencer, nous souhaitons faire une mise au point: depuis la création de l'Agence des douanes, certains de nos représentants et représentantes sur le terrain ont été réprimandés pour avoir tenu des propos sur plusieurs sujets—dont la sécurité à la frontière—qui sont reconnus pour être la position du syndicat. Il est évident que ce qui nous interpelle surtout, en tant que syndicat, c'est le manque de sécurité et le manque de suppléants pour nos gens qui travaillent seuls dans des postes isolés. Au Canada, y a 139 bureaux où certains de nos membres travaillent des quarts de travail seuls.

    Notre priorité demeure la santé et la sécurité de ces gens, mais nous allons souvent plus loin et nous partageons les observations sur la sécurité publique que font nos membres sur le terrain.

    Monsieur le président, de quelle immunité jouissons-nous lorsque nous comparaissons devant des comités comme celui-ci? Six de nos membres ont déjà été réprimandés par les gens de l'Agence des douanes pour avoir tenu des propos qui, selon leurs dires, vont à l'encontre de certaines de leurs politiques.

+-

    Le président: J'aurais souhaité qu'on pose cette question avant de demander à comparaître. Selon moi, les délibérations de ce comité ne peuvent servir directement à d'autres fins. Par contre, la présente séance de ce comité est du domaine public puisqu'elle est télévisée. C'est une question technique.

+-

    M. Ron Moran: C'est aussi ce que nous croyions, mais nous avions besoin d'être rassurés. Nous nous posions des questions à ce sujet en nous rendant ici plus tôt.

+-

    Le président: Il ne fait pas de doute que les nouvelles vont sortir.

    Monsieur Toews.

[Traduction]

+-

    M. Vic Toews (Provencher, PCC): J'invoque le Règlement. Je veux simplement m'assurer que le témoin comprend bien que s'il devait faire l'objet de mesures disciplinaires suite à sa comparution, nous aimerions en être avisés—en tout cas, mon parti veut le savoir. Autrement dit, en cas de mesures disciplinaires, le comité veut être tenu au courant, car nous voulons que vous nous fassiez un rapport complet. Nous ne voulons pas entendre une version revue et corrigée dictée par la crainte de sanctions. Nous souhaitons que vos commentaires soient respectueux et véridiques mais nous voulons les réponses complètes.

+-

    Le président: Monsieur Cullen.

+-

    L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Je vous remercie, messieurs, d'être ici.

    Monsieur Moran, vous avez parlé de six cas de mesures disciplinaires touchant les membres de votre syndicat. Je ne suis pas au courant et je n'en connais pas les motifs. Je crois que vous avez dit que c'était parce qu'ils s'étaient opposés à une directive générale, ou quelque chose du genre. Avez-vous des précisions à ce sujet? Pourriez-vous les fournir au comité?

+-

    M. Ron Moran: Oui. Nous pouvons certainement vous les donner. Le processus de grief est en cours et il sera entendu par la Commission des relations de travail de la fonction publique. Tout se trouve ainsi dans un dossier que nous nous ferons un plaisir de vous communiquer ainsi qu'à tout membre du comité que cela pourrait intéresser.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Fortin, avez-vous quelque chose à ajouter?

+-

    M. Jean-Pierre Fortin (vice-président national, Région du Québec, Union Douanes Accise): Oui, monsieur le président. J'aimerais juste dire qu'elles pourraient de toute façon être distribuées par la partie patronale. Il y a M. Denis Lefebvre qui est présent ici aux audiences. Il pourrait sûrement en fournir une copie aux membres du comité.

+-

    Le président: J'aimerais confirmer que nous sommes ici pour vous entendre sur l'enjeu des fermetures de bureaux, pas forcément sur des actions disciplinaires ou sur d'autres cas. Il faudrait donc limiter nos commentaires aux enjeux prévus.

    Continuez, monsieur Moran.

+-

    M. Ron Moran: Merci beaucoup pour ces clarifications, monsieur le président.

    Étant donné que nous ne ferons qu'un sommaire de la présentation qui a été distribuée, nous demanderons qu'elle soit intégralement annexée au procès-verbal.

    Il est évident qu'une des choses qui semblent avoir motivé le suivi que votre comité fait est qu'un nombre assez impressionnant d'intervenants ont soulevé des craintes par rapport aux fermetures de bureaux au Québec. Votre comité est même allé jusqu'à recommander qu'il y ait une halte à cela, tout au moins jusqu'à ce que vous ayez eu l'occasion de vous pencher plus en profondeur sur la question. Malgré cette intervention de la part de votre comité, les bureaux ont été fermés.

    Cela correspond à une situation à laquelle nous avons été exposés assez souvent, à savoir que la bureaucratie, dans plusieurs cas, malheureusement, passe par-dessus les recommandations que les députés peuvent faire. Malgré ce contexte, nous demeurons optimistes quant au fait que nous réussirons, en travaillant tous ensemble, à trouver des solutions à ces situations.

    Nous allons faire une proposition. Comme je vous l'ai dit, j'espère que nous aurons l'occasion d'en parler un peu plus en profondeur. Nous proposons une chose que nous prônons depuis longtemps, soit la création d'une patrouille des frontières.

    Si les membres du comité sont d'accord, je vais passer à l'anglais, parce que je connais mieux mon texte en anglais.

¿  +-(0910)  

[Traduction]

    Je voulais simplement vous rassurer, il ne s'agit pas d'aligner les employés le long d'une étendue de terrain de 8 900 kilomètres, ni de leur demander d'attendre que quelqu'un traverse illégalement la frontière. Il s'agit plutôt d'assurer une présence et une patrouille proactive, d'engager du personnel et de renforcer la sécurité frontalière.

    Le 9 décembre dernier, le commissaire Zaccardelli a déclaré que, même si la GRC a le mandat de patrouiller la frontière entre les points d'entrée, elle ne possède pas les ressources nécessaires au maintien des détachements ni à la patrouille active de la frontière du Québec. Au Québec et en Ontario, ni la Sûreté du Québec, ni la Police provinciale de l'Ontario, n'ont le mandat et l'autorité d'assurer la sécurité frontalière. En fait, elles ont plutôt éloigné leurs ressources de la frontière. Dans le cadre de leurs témoignages devant votre comité, les maires de municipalités établies le long de la frontière sud du Québec ont affirmé être aux prises avec de graves difficultés liées à la criminalité transfrontalière, sans posséder les moyens ni les ressources nécessaires à leur règlement. Nul doute que d'autres maires de municipalités longeant la frontière du Canada exprimeraient exactement le même sentiment. D'ailleurs, nous avons entrepris d'obtenir leur soutien.

    À notre avis, nous assistons à une grave crise de la sécurité frontalière au Canada. La fermeture de neuf détachements de la GRC au Québec a simplement projeté la question à l'avant-scène de l'actualité, tout en exacerbant la crise. Qui plus est, les opérations de culture et de trafic du cannabis ajoutent à la complexité de cette crise. En effet, l'exportation du cannabis à la frontière canadienne représente un sujet de préoccupation pour nous autant que pour les Américains, qui sont confrontés à son importation.

    Dernièrement, nous avons lu le témoignage que la vice-première ministre avait livré le 1er février 2005 aux membres de votre Sous-comité de la sécurité publique et nationale, en compagnie du président et du vice-président de l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC). Sans être autrement surpris, nous sommes extrêmement déçus de constater l'intensité des efforts déployés pour atténuer l'existence du danger qui existe le long de la frontière.

    Un des incidents qui a attiré l'attention sur la situation à la frontière s'est produit juste avant les Fêtes, alors que nos membres ont dénombré le passage illégal d'au moins 17 véhicules. Or c'est un des points d'entrée où nous avons les effectifs les plus importants au Québec. Il y a environ 50 agents à tout moment à Lacolle mais cela n'a pas empêché ce phénomène. La vice-première ministre a parlé de 18 véhicules pendant l'année alors que nos membres ont dénombré au moins 17 de ces véhicules durant cette période de trois semaines.

    On dit toujours qu'il s'agit de gens qui se trompent, qui ne connaissent pas exactement leurs obligations quand ils passent à la frontière et que, dans la majorité, on les ramène ainsi à la frontière. La réalité est qu'après un rapide sondage téléphonique auprès de nos membres qui travaillent à la frontière, nous devons conclure que si l'on en ramène 2 p. 100 à la frontière, c'est un maximum. En fait les douanes n'ont aucune compétence, et le comité le sait, pour faire quoi que ce soit. Notre compétence se limite au terrain qu'occupe le point d'entrée et, au-delà, cela relève de la police.

    Dans le cas des 17 véhicules à Lacolle, pour reprendre cet exemple, bien qu'on ait signalé chacun des véhicules à la police, en indiquant les numéros d'immatriculation et en donnant une description des véhicules, aucun n'a été intercepté ni ramené au poste de Lacolle pour les formalités nécessaires. Or, dans un cas, il s'agissait d'un autobus.

    Dans un éditorial que publiera sous peu la revue Blue Line Magazine, que lisent les agents des forces de l'ordre partout au Canada, le rédacteur en chef Morley Lymburner parle d'une recherche récente qu'il a entreprise avec un collègue et qui les a menés à conclure qu'il est très fréquent que les autorités canadiennes et américaines traversent la frontière pour faire ce qu'elles ont à faire. On a vu cela récemment à Niagara Falls ainsi qu'à Windsor où la police poursuivait des véhicules et a continué à les poursuivre sur le sol canadien après avoir traversé la frontière. Dans un cas, le véhicule a été intercepté par un agent armé sur le terrain des douanes à Windsor.

¿  +-(0915)  

+-

    Le président: Puis-je vous demander de conclure maintenant afin que nous ayons le temps de vous poser des questions?

+-

    M. Ron Moran: Certainement.

    La seule chose que je dirais pour conclure c'est que les agents de l'ASFC et ceux de la GRC disent souvent que les équipes internationales de police des frontières ou ÉIPF seraient la solution idéale à la sécurité frontalière. Cependant, comme le soulignent bien des extraits des sites Internet de l'ASFC et de la GRC, les ÉIPF sont des équipes d'exécution axées sur les renseignements et pas du tout sur le terrain—et n'ont pas de mandat de patrouille. On croit que parce que la patrouille frontalière américaine fait partie des ÉIPF, les équipes canado-américaines patrouillent conjointement la frontière mais, comme vous le savez bien, la réalité est tout autre, et les quelques ressources encore déployées qui étaient réservées à la frontière ont été retirées.

    Une de nos inquiétudes est que les délais d'intervention qui laissaient déjà beaucoup à désirer sont devenus maintenant dangereux pour nos membres qui travaillent seuls. Bien que nous nous opposions à la politique qui permet que l'on travaille seul et que nous ayons déclaré publiquement à plusieurs reprises que nous ne voulions pas que nos membres travaillent seuls aux points d'entrée, nous avons l'impression que la création d'une patrouille frontalière canadienne, relevant de l'ASFC, permettrait au moins une présence. L'effet dissuasif, évidemment, tellement incalculable, serait certainement l'argument principal pour créer une telle patrouille.

    Nous terminerons là-dessus et sommes prêts à répondre à vos questions.

    Non, avant, mon collègue aimerait dire quelques mots.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Delisle, allez-y. Avant de commencer, pourriez-vous nous présenter votre collègue?

+-

    Sgt é.-m. Gaétan Delisle (président, Association des membres de la police montée du Québec): Je m'appelle Gaétan Delisle et je suis présentement membre de la GRC. Mon rang est celui de sergent d'état-major. J'exerce également des fonctions formelles au sein de la GRC en tant que représentant divisionnaire dûment élu en vertu du paragraphe 96(1) du Règlement de la Gendarmerie royale du Canada. M. André Girard, qui m'accompagne, est l'autre représentant divisionnaire de la division C. Il est ici aussi en tant que secrétaire-trésorier de l'Association des membres de la police montée du Québec, dont je suis le président.

    Je remercie le président de m'avoir accordé une certaine immunité. La dernière fois, je me suis présenté dans le cadre de mes fonctions officielles de président de l'association, tout en étant également membre de la GRC. Il y a effectivement des mesures disciplinaires qui pèsent contre moi et qui ont été initiées par des représentants de la GRC qui sont ici présents, MM. Latour et MacDonald. Je me ferai un devoir de vous les faire parvenir éventuellement.

    J'ai donc des fonctions officielles en tant que membre de la GRC, en plus de mon mandat de représenter les membres du syndicat. J'ai reçu un ordre direct de mon commandant qui va témoigner tout à l'heure, M. Borduas, selon lequel je ne peux pas sortir des limites territoriales du Québec. Cela veut dire que je ne peux pas me rendre à Ottawa dans le cadre de mes fonctions officielles. Je témoigne donc ici en tant que président de l'association des membres, et je me sers de mon temps pour le faire. C'est dans cette optique qu'il nous fait un immense plaisir de venir vous faire part de ce que nos membres ressentent. Tant au niveau de la GRC, à l'interne, qu'au niveau de l'association, les deux groupes ont une opinion unanime: ils considèrent que ce n'est pas une décision correcte que de fermer des détachements de la GRC au Québec.

    Comme vous pouvez le voir, les pratiques déloyales à mon encontre en tant que président de l'association existent au sein de la GRC. Cela va continuer, et c'est malheureux parce que plusieurs de nos membres seraient plus aptes à collaborer à propos des statistiques ou de toute autre information disponible au niveau de la GRC. Nos responsables ne sont pas imputables en ce qui a trait aux décisions prises sous une forme administrative quelconque. C'est déplorable, et nous le déplorons au niveau de l'association.

    J'étais également présent lorsque les maires des diverses municipalités sont venus vous faire part de leur point de vue qui, je crois, reflétait celui de la population des municipalités. Ils sont donc venus vous informer de leurs craintes, de ce qu'ils croyaient être leur rôle au niveau du gouvernement local, en relation avec les fonctions exercées par la GRC au Québec.

    Je peux vous dire sans équivoque qu'en ce qui concerne les détachements qui ont été fermés, nous avons des statistiques qui démontrent que nos collègues ont fait un travail incroyable auprès de la population québécoise, et cela, dans toutes les régions du Québec. Malheureusement, nous verrons dans l'avenir qu'une seule région du Québec sera favorisée parce qu'elle bénéficiera de ce service. Nous pensons que toute la population devrait bénéficier des mêmes services de la police fédérale, qui est spécialisée dans plusieurs domaines.

    Je vous présente certaines statistiques. On parlait récemment de la patrouille des frontières. Vous savez que plusieurs détachements frontaliers ont été fermés. C'est peu dire. Sur une période de seulement deux semaines, on a ramassé du côté américain plus de 350 kilogrammes de marijuana qui avaient été laissés là. Cela veut dire que les gens qui ont apporté la marijuana de l'autre côté de la frontière sont revenus au Canada illégalement. Aucun suivi n'est fait, pour la simple et unique raison que nous n'avons plus maintenant les moyens d'être présents. Nous n'avons plus les moyens de répondre directement à la demande des douaniers ou d'autres. Nous avons des cas d'espèce qui démontrent clairement que, même si la Sûreté du Québec et la police municipale répondent aux attentes des douaniers à certains moments, il est évident qu'ils n'ont pas le mandat pour en faire le suivi.

    Je vais terminer en parlant des grow-ops. Vous savez que c'est un problème majeur, particulièrement sur le territoire des détachements que l'on a fermés.

¿  +-(0920)  

    Considérons quelques statistiques sur le détachement de Joliette. Ce détachement comptait quatre enquêteurs et l'an dernier seulement, ceux-ci ont été en mesure de démanteler 35 différentes organisations impliquées dans la culture de la marijuana. Vous pouvez être assurés que cela a affecté financièrement des organisations criminelles de cette région. On a relocalisé ces gens à Saint-Jérôme et à Trois-Rivières. Il ne faut pas se leurrer. La distance a un impact sur l'efficacité policière et sur la capacité de transmettre de l'information sur le crime organisé. Ce faisant, ce n'est plus tout à fait là, même si on veut créer des secteurs d'activité spécialisés. Quand on n'occupe pas le terrain, quand on ne fait pas de perquisitions chaque jour et que l'information n'est pas reçue, ce qui peut arriver est incroyable.

    En attendant vos questions, je conclurai par ces mots. Si le gouvernement fédéral décidait de maintenir la prestation des services de la GRC en province, il me semble qu'il serait alors tout à fait normal que les dirigeants de la GRC se conforment à cette décision. Par contre, si les dirigeants de la GRC divergent d'opinion, il me semble qu'un comité d'appui pourrait analyser cela et peser le pour et le contre. Selon nous, lorsque la carte policière du Québec a été refaite, ces différents endroits étaient protégés par la GRC, mais présentement, elle n'est plus présente. Merci.

¿  +-(0925)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Delisle.

    Nous allons maintenant passer aux questions des députés. Tout d'abord, du Parti conservateur, monsieur Toews.

    Je vous rappelle à tous que nous sommes ici pour discuter de la question de la fermeture des détachements. Afin d'utiliser au mieux notre temps, je suggère que nous limitions nos questions à ce sujet.

    Monsieur Toews, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Vic Toews: Merci, monsieur le président.

    Le problème, c'est... D'après ce que nous avons entendu aujourd'hui, nous avons des agents à la frontière qui ne sont pas habilités à intervenir au-delà d'une certaine limite géographique et qui n'ont pas grand pouvoir en fait d'arrestation puisque, essentiellement, les gens traversent la frontière sans s'arrêter. Une fois qu'ils ont dépassé le point d'entrée, cela ne relève plus de la compétence de ces agents. Or on est en train de supprimer des détachements de la GRC, ces détachements mêmes qui pouvaient intervenir n'existent plus.

    C'est déjà assez grave. Je crains en plus que cela soit néfaste à nos relations avec les agents américains avec lesquels nous menons des initiatives mixtes et nous devons coordonner nos efforts.

    Ce que m'ont dit les agents à la frontière, c'est que même dans les meilleures circonstances, ils ne peuvent pas communiquer par radio parce que les fréquences et les systèmes sont différents. J'aimerais savoir quelles complications cela a créées avec nos collègues américains.

[Français]

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: Nous croyons que notre plus gros problème est que les Américains ne nous prennent plus au sérieux. Présentement, le Canada semble abdiquer sa responsabilité de patrouiller la frontière canadienne. Il semble laisser cette tâche au côté américain. Vous avez complètement raison quand vous soulignez le fait que les Américains sont très sérieux à la frontière. Je vous donne quelques chiffres. Avant le 11 septembre, la U.S. Border Patrol comptait 500 patrouilleurs à la frontière. Ils sont maintenant plus de 1 000, soit environ 1 200. On voit l'intérêt que ces gens portent à cette question, compte tenu du fait que cette présence a été renforcée et que le côté canadien a complètement délaissé cette question.

[Traduction]

+-

    M. Vic Toews: Excusez-moi, un instant. Vous avez parlé de 500 à 1 000... S'agit-il de la frontière québécoise ou de l'ensemble du Canada?

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: De l'ensemble du Canada.

[Français]

    Ils ont plus que doublé leurs effectifs, puisqu'ils sont environ 1 200. Présentement, à la frontière américaine, il n'y a aucun bureau où les gens travaillent seuls. De plus, ils sont appuyés par une patrouille de frontière. On est capable de voir les deux côtés. Au Québec, à titre d'exemple, il existe environ 47 bureaux frontaliers. Sur ces 47 bureaux, seulement trois sont occupés par plus de deux agents en tout temps, 24 heures par jour. Cela indique avec quel sérieux on semble considérer le problème de la patrouille frontalière.

[Traduction]

+-

    Sgt é.-m. Gaétan Delisle: Puis-je répondre à ce sujet? Il y a de nombreux rapports au sein de la GRC qui portent effectivement sur l'intégrité de la frontière comme telle. On a maintes fois signalé que même avec ce que nous avions—au début nous avions beaucoup de monde qui travaillaient là, mais, suite à une décision administrative, ces gens ont progressivement été retirés—la distance demeure un problème pour les détachements actuels comme à Coaticook, St-Georges-de-Beauce et Rock Island. Il est difficile d'imaginer la complexité de certaines de ces régions, le fait que Rivière-du-Loup n'existe plus—je parle du Québec, pas d'autres régions du pays—il faut donc maintenant répondre de Rimouski. Je ne sais pas si vous connaissez cette région. C'est la même chose pour Coaticook; c'est terminé. Maintenant, c'est Sherbrooke. Et Granby, qui était également à proximité, n'existe plus. La distance est encore plus importante.

¿  +-(0930)  

+-

    M. Vic Toews: Très brièvement, quand on assiste à ces réorganisations, on nous dit toujours que l'on va centraliser l'administration et qu'ainsi il y aura davantage d'agents disponibles. C'est ce que l'on nous a dit au Manitoba alors que j'étais procureur général provincial. Cela ne fut jamais le cas. Ce que j'aimerais savoir, c'est quelles sont les mesures spécifiques prises par la GRC pour combler cette lacune nouvelle.

+-

    Sgt é.-m. Gaétan Delisle: Je crois que le commissaire serait le mieux placé pour répondre. Tout ce que je puis vous dire...

+-

    M. Vic Toews: Êtes-vous au courant de quoi que ce soit? J'aimerais que vous m'en parliez, vous, parce que j'ai suffisamment entendu le commissaire.

+-

    Sgt é.-m. Gaétan Delisle: Je puis vous dire que je suis représentant de division depuis environ 27 ans et que j'ai ainsi vu beaucoup de commissaires durant ma carrière.

    Le problème auquel vous faites allusion est que l'on nous dit qu'on fait l'administration ailleurs. Or, et vous avez probablement entendu dire la même chose dans votre région, on régionalise le service. Je ne pense pas que cela a donné les résultats annoncés. En fait, nous avons maintenant davantage de monde qui font de l'administration et cela coûte plus cher, mais c'est une autre question.

+-

    M. Vic Toews: C'est important.

+-

    Sgt é.-m. Gaétan Delisle: L'idée était de mettre tout le monde sur le front mais je n'y crois pas, personnellement, parce que les chiffres indiquent le contraire.

+-

    M. Vic Toews: Qu'a-t-on fait pour combler cette lacune? Vous dites que l'on a probablement mis plus de monde en administration. Qu'en est-il des patrouilles? Qu'a fait la GRC pour combler cette lacune?

+-

    Sgt é.-m. Gaétan Delisle: Évidemment, si l'on supprime—et c'est la raison pour laquelle nous sommes ici, à propos des détachements—certaines des personnes qui faisaient déjà un travail fantastique à propos du crime organisé dans cette région... parce que, ne nous leurrons pas : les installations de culture sont le fait du crime organisé dans tous les cas, qu'il s'agisse des motards ou du crime organisé de tout autre type. L'intention est la même. Pourquoi les a-t-on retirées? Ce n'est pas moi qui peux répondre. C'est à eux de répondre. Tout ce que je vous dis c'est que nous voyons que malheureusement

[Français]

les gérants de la GRC ne sont pas tenus de rendre compte. C'est dommage.

[Traduction]

+-

    Le président: Ils ne sont pas tenus de rendre compte.

[Français]

    Monsieur Marceau, vous disposez de cinq minutes.

+-

    M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président. Merci aux témoins d'être venus comparaître à ce comité ce matin.

    Quand, au Bloc québécois, nous avions soulevé la question de la fermeture des postes de la GRC, nous avions en tête deux raisons principales: d'abord, la lutte contre le crime organisé et ensuite, le problème des frontières, qui a été assez clairement illustré ce matin.

    Nous connaissons, bien entendu, l'importance qu'accordent les Américains aux problèmes de sécurité aux frontières. Nous savons aussi à quel point il est important pour nous, de ce côté-ci de la frontière, d'y garder une circulation qui soit la plus fluide possible. Compte tenu du commerce que nous faisons avec les Américains, nous avons tout avantage à le faire.

    Ma première question s'adresse à M. Moran. Vous dites que la meilleure façon de s'assurer que la sécurité aux frontières est adéquate consiste, en premier lieu, à rouvrir ou maintenir les neuf postes de la Gendarmerie royale du Canada qui ont été fermés, malgré une recommandation ferme de ce comité et, en deuxième lieu, à créer une patrouille aux frontières. Il s'agit de deux solutions complémentaires, et c'est ce que vous êtes venus nous dire aujourd'hui. Est-ce que j'ai bien compris?

+-

    M. Ron Moran: C'est exact. Cela résume bien notre position. Nous sommes d'avis que la patrouille à la frontière compléterait très bien le mandat, d'autant plus qu'en retirant ce service de l'Agence du revenu pour l'inclure dans le même portefeuille que la GRC et le Service canadien du renseignement de sécurité, le gouvernement a déjà, de façon tout à fait tangible, franchi une étape en vue de donner un certain sérieux, ou du moins plus de sérieux, à la façon dont il aborde la question de la frontière.

    Pour en revenir à ce qu'on disait plus tôt, je précise que les Américains fournissent des statistiques à l'Agence des services frontaliers du Canada. Étant donné qu'ils ont des capteurs et des caméras sur le terrain, ils savent combien de personnes utilisent les routes non gardées pour se diriger vers le nord, donc vers le Canada. Ils fournissent à toutes les fins de mois des statistiques à ce sujet.

    Par le biais de l'accès à l'information, nous avons essayé à maintes reprises d'obtenir ces renseignements, qui sont sous l'emprise de Sécurité publique Canada, mais nous nous sommes chaque fois retrouvés face à un mur. Je suggère donc aux membres de ce comité d'essayer, en vertu de leurs pouvoirs parlementaires, d'obtenir ces chiffres.

    Nous savons par contre, et nous en parlions plus tôt, qu'à 1 600 reprises en 2004, des gens se sont délibérément abstenus de s'arrêter aux bureaux de la douane. Il s'agit là des chiffres de l'agence.

¿  +-(0935)  

+-

    M. Richard Marceau: Monsieur Fortin.

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: M. Marceau a entièrement raison.

    Nous voulons apporter un complément au travail des policiers de la Gendarmerie royale du Canada, mais il reste que nous avons besoin de ces gens à la frontière. La douane demeure une première étape d'intervention. Ensuite, quand il s'agit de mandats fédéraux, le suivi des dossiers est pris en charge par la GRC. Quant aux mandats provinciaux, ils sont de la responsabilité de la Sûreté du Québec.

    Concernant ce que disait plus tôt M. Thompson au sujet du mandat des douaniers, j'aimerais préciser qu'en vertu de C-18, nous faisons office de policiers et sommes par conséquent les premiers à intervenir dans le cas de toute cause criminelle. Nous sommes, à juste titre, assujettis au Code criminel, comme n'importe quel policier fédéral ou provincial. Je voulais uniquement apporter cette correction.

+-

    M. Richard Marceau: Merci.

    Dans un avenir très rapproché, le premier ministre Martin va rencontrer le président Bush. À votre avis, le premier ministre est-il en mesure de dire au président Bush qu'à l'heure actuelle, la frontière canado-américaine est sécuritaire pour les Canadiens et les Américains, que ce soit en termes de terrorisme, de trafic de drogues ou de trafic transfrontalier du crime organisé?

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: Absolument pas. En fait, compte tenu des effectifs en place, il ne pourrait même pas donner l'illusion que la frontière canadienne est sécuritaire.

+-

    M. Richard Marceau: Merci.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Marceau.

    Monsieur Comartin, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): Merci, monsieur le président.

    Merci d'être ici.

    Monsieur Fortin ou monsieur Moran, il y a trois incidents sur lesquels j'aimerais revenir à propos de la sécurité à nos frontières. Je les aborde du point de vue de l'incursion par la police du côté américain sur notre territoire, notamment l'incident dans la région de Niagara Falls qui s'est terminé par la mort d'un de nos citoyens; l'incident à Windsor où un agent de police s'est tué en approchant de la frontière et l'incident que vous avez décrit au tunnel où des agents de police armés, des spécialistes de la lutte contre la drogue de Détroit, se sont attaqués à un groupe de personnes à main armée.

    J'ai correspondu avec Brian Masse, l'autre député de Windsor, avec le ministre des Affaires étrangères et le solliciteur général d'alors. Ils nous ont assurés à l'époque—il y avait d'abord eu les deux incidents de Windsor—qu'un protocole avait été signé et que cela ne se reproduirait pas et nous avons ensuite eu l'incident de Niagara Falls.

    Pourriez-vous nous dire si à votre avis l'Agence des services frontaliers va pouvoir faire quoi que ce soit pour convaincre les forces de police du côté américain de ne pas faire d'incursions sur le territoire canadien.

+-

    M. Ron Moran: Le protocole ou l'absence de compétence, le fait que la compétence cesse là où débute la frontière, existait avant ces incidents et est toujours en vigueur. Aussi, dire qu'il y a quelque chose d'autre maintenant... ce dont je parlais tout à l'heure, et cela va être publié, je le répète, dans la revue Blue Line Magazine, qui est probablement la revue la plus réputée qui circule au Canada, c'est que l'on a conclu que ce genre de situation est en fait très fréquent. Évidemment, nous n'entendons parler que de celles qui se terminent par une tragédie ou qui suscitent un intérêt politique. Toutefois, d'après cette étude, c'est quelque chose qui est extrêmement courant. En fait, les responsables du maintien de l'ordre n'ont pas le choix et...

    Les criminels font fi des frontières. Ils n'ont aucun respect pour la loi, ils n'ont aucun respect pour les frontières et quand on essaie de les arrêter, on les pousse parfois à faire pire.

    Toutefois, dans tout ce contexte, lorsque le Canada s'éloigne de la frontière, lorsque le Canada n'assume pas son rôle, lorsqu'il n'est pas au moins présent, lorsqu'il n'essaie pas au moins d'intervenir, il y a là un problème de souveraineté. Si nous comptons sur les Américains pour s'occuper de notre sécurité, de la sûreté publique, c'est notre souveraineté même qui est en jeu et c'est ce qui arrive lorsque nous disparaissons aux frontières.

¿  +-(0940)  

+-

    M. Joe Comartin: C'est tout, monsieur le président. Merci.

+-

    Le président: Merci, monsieur Comartin.

    Monsieur Cullen, vous avez cinq minutes.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Merci, monsieur le président, et merci, messieurs.

    Tout d'abord, je crois que le premier ministre, lorsqu'il verra le président Bush, abordera avec aplomb la question de la sécurité à la frontière. En fait, le Department of Homeland Security dit toujours qu'il est tout à fait satisfait de la coopération de notre pays en matière de crime transfrontalier. Pourrait-on faire mieux? Bien sûr. Pourraient-ils faire mieux? Bien sûr. Nous avons une frontière de 3 000 kilomètres.

    J'aurais simplement une question, monsieur Moran, parce que je me suis entretenu avec M. Fortin et avec M. Paradis. Vous soulevez la question de cette patrouille frontalière canadienne. Une lettre a été envoyée à M. Jolicoeur et je ne comprends pas très bien ce qui se passe. Est-ce que vous dites que le détachement n'aurait pas dû être supprimé? Est-ce que vous proposez une patrouille frontalière canadienne qui serait composée, si je ne m'abuse, de membres de votre syndicat? Je ne comprends pas très bien.

+-

    M. Ron Moran: Je crois qu'on a déjà posé une question similaire et je vous prie de m'excuser si je n'ai pas été suffisamment clair. Ce que nous disons, c'est que les deux ne sont pas incompatibles. Les deux services sont maintenant reliés, ce qui nous semble être une heureuse initiative, le service des douanes étant maintenant associé à la GRC.

    Le voeu de la GRC, d'après ce qu'a dit le commissaire lui-même, est de toute évidence de se concentrer sur les enquêtes internationales, sur le recueil de renseignements sur ce qu'ils appellent « les gros poissons ». C'est très bien, s'il s'agit de surveiller de près ce qui se passe aux frontières. Ce que nous disons, c'est que si la GRC n'a pas envie de s'en occuper, nous, nous voulons le faire, mais nous disons aussi qu'il faut maintenir les détachements et que l'on n'aurait pas dû les supprimer car il n'y a absolument...

+-

    L'hon. Roy Cullen: Vous voudriez donc les deux, les détachements et cette patrouille frontalière qui...

+-

    M. Ron Moran: Compléterait.

+-

    L'hon. Roy Cullen: ... ce qui multiplierait le nombre de membres de votre syndicat, n'est-ce pas?

+-

    M. Ron Moran: C'est le problème que nous avons toujours comme syndicat, il est très facile pour les politiques d'essayer de critiquer nos interventions en disant que tout ce qui nous intéresse, c'est d'augmenter notre base. Or, ce qui nous inquiète, et nous l'avons déclaré, c'est le fait que nous avons des membres qui travaillent seuls, sans secours suffisamment accessible, à 139 postes différents dans notre pays.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Je n'ai que cinq minutes. Excusez-moi de vous interrompre constamment.

    J'ai déjà entendu cela, je comprends, je vous écoute mais après avoir eu cet entretien avec M. Fortin, j'ai poursuivi la question et, d'après ce que je comprends—corrigez-moi si je me trompe—ces patrouilles frontalières existaient il y a de nombreuses années et le problème était que ces petites unités devaient courir partout et arrivaient souvent trop tard. Elles déployaient ainsi beaucoup d'énergie mais ne réalisaient pas grand-chose. Ce que me semble avoir constaté la GRC, aussi, c'est que l'on ne peut pas être partout.

    Nous avons une immense frontière. Vous parlez de passer illégalement ces postes frontières, mais si l'on est un terroriste sérieux ou quelqu'un qui a des réserves énormes de drogues, est-ce que c'est vraiment à la frontière de Lacolle que l'on essaie de passer ou est-ce que l'on ne préférerait pas se faufiler dans la forêt ailleurs?

    Il faut comprendre que quand on a une frontière aussi énorme, on est obligé de faire des choix et je ne suis pas sûr que d'avoir des groupes qui courent partout et consomment des quantités d'essence énormes soit la meilleure solution.

[Français]

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: Merci, monsieur.

    Pour ce qui est de l'essence, nous pourrions avoir des autos hybrides, ce qui nous aiderait à en dépenser moins. Mais il y a toujours un juste milieu. Nous écoutions le responsable de la Gendarmerie royale du Canada, qui nous disait qu'il était impossible d'être partout à la fois. Nous sommes complètement d'accord, mais il y a une grande marge entre être partout et n'être nulle part.

    Actuellement, au Canada, il y a plus de 250 routes non gardées. On parle de routes qui sont complètement carrossables, même en période hivernale. Pour un pays qui se dit sûr, il est insensé qu'il n'y ait personne à la frontière. On dit que les douaniers connaissent bien le terrain. Pourquoi ne pourraient-ils pas avoir le même mandat pour compléter celui de la Gendarmerie royale du Canada? En effet, je ne crois pas que la Gendarmerie royale du Canada dépensait de l'essence de façon indue à la frontière. On est là pour faire un travail, et je crois que les Américains le font bien.

    Nous voulons, nous aussi, aborder toute la question des bureaux où nos gens travaillent seuls. Monsieur Cullen, vous avez même regardé la fameuse analyse du risque et vous savez que le fait que nos gens travaillent seuls dans leurs bureaux pose un problème. Votre gouvernement se prépare à mettre deux personnes à certains endroits où on a décidé que c'était dangereux, mais pas à d'autres endroits. On a deux poids, deux mesures. Ce sont des arguments qui ne se tiennent pas, selon nous.

¿  +-(0945)  

[Traduction]

+-

    L'hon. Roy Cullen: Merci.

    Je sais que depuis le dernier budget, en 2005, l'ASFC recevra plus d'un demi-milliard de dollars de plus. Ceci pour renforcer notre capacité aux frontières. Je ne sais pas si elle va vouloir donner suite à cette proposition, mais je comprends ce que vous dites. Le gouvernement doit s'assurer qu'il fait tout ce qu'il peut de la façon la plus rentable possible. Face à une frontière aussi énorme, nous devons faire certains choix stratégiques.

    Autre chose, la Sûreté du Québec est en fait la police sur le terrain au Québec. La GRC est une force nationale qui traite de questions fédérales et qui concentre essentiellement ses efforts sur la collecte de renseignements. C'est la Sûreté du Québec qui doit surveiller de près les frontières.

[Français]

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: Je veux dire que la Sûreté du Québec n'a pas le mandat d'intervenir directement à la frontière. Nous avons fait nos propres recherches, monsieur Cullen, et il n'existe actuellement aucun protocole d'entente entre la Sûreté du Québec et le gouvernement fédéral, sauf pour leur remettre les gens en état d'ébriété que nous avons arrêtés afin qu'ils poursuivent l'enquête.

    Actuellement, aucun protocole d'entente n'existe au sujet des gens qui passent tout droit à tous les points d'entrée au Canada. La Sûreté du Québec n'en a pas, et la Gendarmerie royale du Canada n'en avait pas jusqu'à tout récemment.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Cullen.

    Monsieur Warawa, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Mark Warawa (Langley, PCC): Merci, monsieur le président.

    Je dirais qu'après ce que nous avons entendu, nous avons un aperçu du plan de Kyoto pour l'environnement, il s'agit de garder tout le monde dans son bureau et de n'avoir personne qui patrouille les rues.

    Je vous remercie d'être venus et de participer à cet échange avec nous sur ce problème très sérieux qui concerne notre sécurité nationale.

    J'aurais une question et je ne sais pas qui voudrait y répondre. Quelqu'un sait-il quel est le pourcentage de notre budget destiné à l'ASFC qui reste à Ottawa et quel est le pourcentage qui va au service actif?

+-

    M. Ron Moran: Nous sommes en train de poser justement cette question en vertu de la Loi sur l'accès à l'information parce qu'il semble que les chiffres soient pires qu'ils ne l'étaient il y a environ un an et demi. À ce moment-là, nous avions présenté une demande semblable et posé exactement cette question : Quels sont les faits? Quel est le montant total destiné aux services douaniers et quelle est la ventilation? Dans cette demande, nous demandions combien restait ici à Ottawa.

    Quand les douanes faisaient toujours partie de l'ADRC, la ventilation était 55 p. 100 de l'argent qui ne quittait jamais Ottawa. Les services de douanes étaient donc assurés sur le terrain avec 45 p. 100 du budget.

    D'après les indications que nous avons actuellement, nous devrions à nouveau poser cette question, et c'est pourquoi nous avons eu recours au processus d'accès à l'information. Nous faisons face à tous les obstacles habituels mais nous obtiendrons ces chiffres. L'ASFC étant maintenant une agence distincte et devant ainsi avoir son propre service des ressources humaines et sa propre structure, les chiffres sont encore pires. Mais même s'ils demeuraient à 55 p. 100, nous estimons que c'est une situation absolument déplorable.

+-

    M. Mark Warawa: Merci.

    Je suppose qu'un des choix stratégiques que fait le gouvernement porte sur la façon d'arrêter son budget. J'estime qu'il serait préférable, pour ma part, d'utiliser cet argent sur le terrain et d'envisager des choses comme une patrouille frontalière.

    L'élimination des détachements de la GRC dans les années 1990 en Ontario et, l'année dernière, au Québec a-t-elle rendu la frontière plus ou moins sûre? Certes, d'après ce que vous nous avez dit, je suppose que c'est moins, mais je m'inquiète beaucoup—et je ne suis certainement pas le seul—car j'estime que nos frontières devraient être sûres. Nous sommes un pays souverain et notre gouvernement est censé assurer la sécurité de tous les Canadiens. Les décisions qui ont été prises visant à fermer ces postes aux frontières ou ces détachements ont-elles amélioré ou empiré la sécurité à nos frontières?

¿  +-(0950)  

[Français]

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: En ce moment, le niveau de sécurité à la frontière est en baisse. Le Canada semble baisser les bras à côté des Américains qui, eux, ont renforcé le côté sud de notre frontière. Les problèmes de nos employés qui travaillent seuls ne sont pas réglés, et les autorités se dégagent continuellement de cette responsabilité. Le niveau de sécurité ne cesse de baisser à la frontière. Ottawa investit dans toutes sortes de projets. Nous parlions de la question financière: cet argent ne vient pas des régions. Les hauts dirigeants de l'agence qui parlent au syndicat dans différentes régions au Canada nous disent que l'argent n'arrive pas.

[Traduction]

+-

    M. Mark Warawa: Merci.

    J'ai ici un communiqué que vous m'avez remis, et qui présente des statistiques choquantes. Apparemment, 1 600 véhicules auraient brûlé la frontière l'an dernier sans s'arrêter aux postes de douane, et 3 000 personnes seraient entrées illégalement au Canada à simplement 2 des 200 points d'entrée. Donc, si je fais la multiplication, cela veut dire que 600 000 personnes seraient entrées illégalement au Canada. Les 1 600 véhicules qui ont brûlé la frontière ont été vus, ils ne se sont pas arrêtés aux postes de douane, ils ont simplement poursuivi leur chemin. Vous avez même dit que l'un d'entre eux était un autobus.

    Que deviennent ces gens? Est-ce que vous contactez la GRC? En tout cas, la GRC n'est pas présente sur le terrain, donc que deviennent ces gens? Ils entrent illégalement au Canada. Ils accélèrent au lieu de ralentir et ils brûlent la frontière. En fonçant à travers la frontière ils mettent en danger le public. Que deviennent ces véhicules? Est-ce qu'on les récupère? Est-ce qu'on signale leur immatriculation à la GRC? Que deviennent ces milliers de véhicules?

[Français]

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: Les directives que les douaniers canadiens reçoivent actuellement sont d'appeler la Gendarmerie royale du Canada en premier lieu. Quand un événement comme celui que vous décrivez se produit, nous devons appeler la Gendarmerie royale du Canada. Le problème, c'est que la GRC n'est plus là. Les statistiques que vous avez présentement et qui viennent de l'Agence canadienne des douanes sont très conservatrices. Je suis un douanier ayant 22 ans d'expérience et je suis dans mes bureaux de façon constante. Mes employés me disent qu'ils n'appellent plus la Gendarmerie royale du Canada parce qu'elle n'est plus sur le terrain, et que la Sûreté du Québec n'est à peu près jamais disponible. Il n'y a personne. C'est ce qui me fait dire que les chiffres que vous avez devant vous, et il est important que les membres du comité le sachent, ne sont pas justes parce qu'ils sont très conservateurs.

+-

    Le président: Merci, messieurs Fortin et Warawa.

    Monsieur Paradis.

+-

    L'hon. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Bienvenue aux gens de l'agence et à ceux de la GRC. Merci beaucoup d'être ici pour nous éclairer sur ce qui se passe vraiment aux postes-frontières.

    M. Fortin mentionnait tout à l'heure qu'il y avait 47 postes-frontières au Québec. Il y en a 10 dans mon comté. C'est une bonne proportion. Il y a aussi des routes non gardées dans mon comté. Par exemple, à Noyan, où on partage le bureau des douanes avec les Américains, il y a, à 500 mètres, une route complètement ouverte, pavée, avec un petit écriteau qui demande aux voyageurs de se présenter au bureau des douanes, point final. Les douaniers avec lesquels j'ai discuté n'ont aucune façon de voir s'il y a des gens qui se promènent sur cette route. Ils ont appris plus tard qu'un Américain avait fait sortir quelqu'un de sa voiture, que cette personne avait traversé à pied, était montée dans une automobile canadienne, était allée à Montréal et était revenue deux semaines plus tard. À son retour, elle a fait cela en sens inverse mais s'est fait arrêter par les gens de la U.S. Border Patrol de l'autre côté. Du côté américain, on surveille un peu plus.

    Cela n'a pas de sens. On nous a déjà expliqué la raison pour laquelle on ne voulait pas fermer cette route. Apparemment, les pompiers en ont parfois besoin pour traverser à la frontière entre le Canada et les États-Unis. Il y a beaucoup de collaboration entre les pompiers. Cela n'a pas de bon sens de laisser des routes ainsi ouvertes entre le Canada et les États-Unis. Je dois vous dire que la surveillance est beaucoup plus sévère du côté américain.

    Je pense qu'il est très important de garder les postes de la GRC ouverts. On a le problème des douanes, mais on a aussi le problème des plantations de marijuana, qui existent un peu partout dans nos comtés. C'est devenu une calamité. Les gens vendent du pot dans les écoles secondaires et même primaires. Je répète que la Sûreté du Québec est débordée.

    Les maires se sont réunis dernièrement dans le coin de Hemmingford pour exercer des pressions sur la Sûreté du Québec. Ils disaient que depuis la fusion des corps municipaux avec la Sûreté du Québec, ils ne sont plus capables d'avoir de services de la Sûreté du Québec. La Sûreté du Québec a déjà du mal à remplir son propre mandat, et je pense qu'il ne faut pas trop compter sur elle pour remplir des mandats de douane.

    Je ne déteste pas du tout l'idée de la patrouille des frontières. Monsieur Fortin ou monsieur Moran, cette idée d'une patrouille des frontières a-t-elle déjà été suggérée à l'administration de l'agence? Avez-vous des chiffres là-dessus? Combien cela coûterait-il et combien de gens faudrait-il?

¿  +-(0955)  

+-

    M. Ron Moran: Nous sommes d'avis depuis très longtemps qu'il faudrait une patrouille des frontières. Maintenant, dans le contexte du projet de loi qui formalise la création de la nouvelle agence des douanes, nous croyons que l'occasion est là, parce qu'on est en train d'établir clairement son mandat. On nous a demandé de comparaître devant le comité du Sénat qui va se pencher sur le projet de loi C-26. Nous allons demander aux sénateurs d'amender le projet de loi de manière à ce que le mandat inclue une patrouille des frontières.

    Selon nos estimations très conservatrices et très préliminaires, il faudrait environ 250 années-personnes pour assurer une présence visible.

+-

    L'hon. Denis Paradis: Dans tout le Canada?

+-

    M. Ron Moran: Oui. Il faudrait réévaluer cela, évidemment, mais on partirait de rien. Il faut être clair. Comme vous l'avez mentionné, monsieur Paradis, les mandats de la GRC sont de faire la police routière, d'intervenir lorsqu'il y a des appels pour des problèmes intérieurs et ainsi de suite. Elle n'a pas de ressources qui s'occupent uniquement de patrouiller la frontière. Le seul endroit où il en restait—et c'était, à ce que l'on comprend, de l'argent des Initiatives anticontrebande—était le Québec, où il y avait neuf détachements. Même au Nouveau-Brunswick, où il n'y a pas de police provinciale et où c'est la GRC qui est la police, cette dernière a le mandat de s'occuper de la sécurité routière et des disputes intérieures, mais n'a pas de ressources qui s'occupent spécifiquement de patrouiller la frontière.

    D'après ce que l'on comprend, jusqu'à preuve du contraire, aucun corps policier n'a de ressources spécifiques pour patrouiller la frontière. Nous sommes déjà sur le terrain et nous les voyons passer aux ports de douane en nous montrant le doigt du milieu. Nous aimerions être capables de faire quelque chose, parce que cela devient extrêmement frustrant, comme vous pouvez vous l'imaginer. Nous sommes censés être là pour faire respecter la loi et nous sommes impuissants dans de telles situations.

+-

    Le président: Monsieur Ménard.

+-

    M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ): Merci.

    D'abord, on peut clarifier la question du protocole avec la Sûreté du Québec: il n'y en a pas. Cela a été lancé par le commissaire la première fois qu'il s'est présenté devant nous. La deuxième fois, il n'en parlait plus parce que j'avais vérifié et que je savais qu'il n'y en avait pas. Je savais qu'il n'y en avait pas au temps où j'y étais, et j'ai appris qu'il n'y en avait pas eu depuis. La troisième fois qu'il est venu, on nous parlait d'ententes ponctuelles avec les corps policiers locaux. Je crois que cela se limite aux cas de conduite avec facultés affaiblies, qu'on veut justement confier aux autorités locales. C'est du moins ce que vous avez constaté sur le terrain.

    J'aimerais que vous me parliez de ce qui a déjà existé et qui a été, semble-t-il, aboli; je parle des équipes d'intervention mobiles en 1993. Pouvez-vous nous dire ce qui se faisait alors, de qui ces équipes étaient composées et ce qu'il en est advenu?

À  +-(1000)  

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: Oui. Ces équipes d'intervention mobiles découlaient directement d'un programme qui s'appelait les Initiatives anticontrebande, les IAC, dans notre jargon. C'étaient des ressources qui venaient appuyer l'exécution des lois dans nos différents bureaux. C'était une bonne chose. Elles comblaient vraiment un vide au sein de notre organisation, venaient prêter main-forte dans nos bureaux où les gens travaillent seuls. Elles y arrivaient de façon impromptue et soutenaient les opérations douanières un peu partout.

    Encore une fois, monsieur Ménard, on s'explique mal, particulièrement dans la région du Québec, qu'on ait cessé toute activité à la frontière de ces équipes d'intervention mobiles. D'ailleurs, M. Cullen sera sans doute content, parce que les véhicules sont présentement stationnés aux bureaux de douanes et on ne les utilise plus. Il faudrait peut-être les recycler. Ce sont des véhicules qui avaient été attribués à nos gens pour soutenir les opérations.

    Ce qu'on veut, en fin de compte, ce sont des équipes d'intervention mobiles du genre de celles qui ont déjà existé, et dont le mandat serait élargi pour leur permettre de couvrir les routes non gardées quand elles se déplacent d'un endroit à l'autre. Comme M. Moran l'a dit à plusieurs reprises au comité, nous sommes déjà sur le terrain. Il ne faut pas voir cela à l'échelle nationale et internationale, mais plutôt par secteur. On veut tout simplement des équipes qui viennent seconder les bureaux et qui aient aussi le mandat de patrouiller ces routes non gardées.

+-

    M. Serge Ménard: Ces équipes ont été abolies il y a environ un an et deux mois, n'est-ce pas?

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: Oui.

+-

    M. Serge Ménard: Dans ces équipes, y avait-il des agents de la GRC? De qui étaient-elles composées?

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: M. Delisle peut répondre pour la GRC, bien que souvent on avait des patrouilles conjointes. On patrouillait, par exemple, le lac Champlain, le Richelieu. On travaillait en étroite collaboration avec les gens de la Gendarmerie royale du Canada et il y avait souvent des équipes conjointes.

+-

    M. Serge Ménard: De qui ces patrouilles conjointes étaient-elles formées? De gens du service des douanes et de la Gendarmerie royale du Canada?

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: Et de la Gendarmerie royale du Canada. Nous concertions nos efforts.

+-

    M. Serge Ménard: Les détachements qui ont été fermés en faisaient-ils partie? Avaient-ils un rôle à jouer dans ces équipes d'intervention mobiles?

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: Oui, ils étaient directement impliqués.

+-

    M. Serge Ménard: Cela a été coupé et vous ne savez pas pourquoi?

+-

    Sgt é.-m. Gaétan Delisle: Dans la GRC, on retrouve des équipes spécialisées pour faire cela à certains des endroits, mais elles ont été réduites de beaucoup. Elles mènent leurs enquêtes, au port de Lacolle en particulier. Mais la patrouille des frontières qui existait, elle, n'existe plus.

+-

    M. Serge Ménard: Pouvez-vous nous donner une idée du résultat de leurs activités? Par exemple, ces équipes ont-elles procédé à des arrestations, démonté des réseaux? Arrêtaient-elles des gens qui cherchaient à franchir les frontières?

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: Il est absolument certain qu'à la frontière, en ce moment, les mesures d'exécution diminuent du fait que les effectifs et la surveillance diminuent. Cela va ensemble. Je n'ai pas de chiffres avec moi, mais il me fera plaisir, monsieur Ménard, si vous nous réinvitez à votre comité, de tenter de les obtenir pour les partager avec le comité.

+-

    M. Serge Ménard: Si vous pouvez nous envoyer des documents, nous sommes disposés à les recevoir dans un court laps de temps.

+-

    Le président: Vous avez ces chiffres?

+-

    M. Ron Moran: Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter—je crois l'avoir déjà dit—que l'effet de dissuasion est incalculable. Si on ne risque rien à traverser la frontière parce qu'on sait qu'il n'y a pas d'effectifs, c'est drôlement différent quand on ne sait pas si on va rencontrer une de ces patrouilles. L'effet de dissuasion est donc incalculable, mais il est prédominant dans l'esprit des gens qui travaillent avec le crime organisé.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Breitkreuz, vous avez une minute et ensuite nous devrons suspendre nos travaux.

+-

    M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC): Merci beaucoup.

    J'ai juste une petite question. Je m'interroge sur les priorités du gouvernement et la façon dont il utilise son argent pour faire respecter la loi et améliorer la sécurité publique. Le registre des armes à feu devait être un outil efficace pour contrer la contrebande d'armes à feu à la frontière. Est-ce que c'est le cas d'après vous? Le registre des armes à feu est-il un outil efficace; ou pensez-vous que nous ferions mieux de consacrer plus de ressources aux activités policières de première ligne, par exemple la protection de nos frontières? Que pensez-vous de cet argent qu'on consacre au registre des armes à feu comparativement à d'autres priorités?

+-

    M. Ron Moran: Les gens qui font de la contrebande d'armes n'ont nullement l'intention d'enregistrer ces armes de toute façon. Cela leur est complètement égal de savoir qu'il existe un registre avec tous les numéros de série des armes à feu.

    En fait, l'échange de cannabis contre des armes à feu est une pratique courante au sein du crime organisé et devient un problème important au Canada. Divers services policiers de maintien de l'ordre consacrent des ressources spécifiquement à ce problème. C'est un problème particulièrement important dans le contexte de la criminalité liée aux gangs à Toronto. On sait très bien que ces armes entrent illégalement au Canada. Il est vraisemblable qu'elles passent la frontière à des endroits où il n'y a personne pour surveiller ce trafic.

À  +-(1005)  

+-

    Le président: M. Cullen a une dernière remarque, et ensuite nous allons devoir interrompre la séance.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Monsieur le président, j'aimerais très brièvement rectifier quelque chose que M. Fortin a dit, je crois, à moins que ce soit M. Moran, je ne suis pas sûr. L'Agence des services frontaliers du Canada et la Sûreté du Québec ont des protocoles d'entente. Si quelqu'un brûle la frontière, on contacte normalement la Sûreté du Québec, et c'est d'ailleurs ce qui se fait à chaque fois.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Fortin, vous vouliez soulever une autre question.

+-

    M. Jean-Pierre Fortin: Jusqu'à présent, la douane canadienne a saisi tout près de 10 000 armes à feu à la frontière. Ce sont des chiffres que l'on pourra partager avec le président du comité pour que celui-ci vous les envoie. Ils ont été rendus publics au Sénat, au comité de M. Colin Kenny.

[Traduction]

+-

    M. Garry Breitkreuz: Monsieur le président, il faudrait leur demander de nous remettre quelque chose par écrit parce que nous n'avons pas le temps maintenant.

    Merci.

[Français]

+-

    Le président: Merci beaucoup. Nous allons suspendre la séance pour cinq minutes. Je remercie nos témoins.

À  +-  


À  +-  

À  +-(1010)  

[Traduction]

+-

    Le président: Je vais maintenant demander aux caméramen de quitter la salle.

[Français]

    Nous allons continuer notre réunion.

    Nous recevons M. Zaccardelli, commissaire de la GRC; M. Pierre-Yves Bourduas, commissaire adjoint et commandant de la division C à la GRC; M. Peter Martin, sous-commissaire des Services nationaux de police, à la GRC.

    Nous devions siéger jusqu'à 11 heures, mais le commissaire m'indique qu'il lui sera possible de rester une quinzaine de minutes de plus, étant donné que nous avons commencé un peu en retard.

    Nous poursuivons notre étude sur la fermeture des postes de la GRC. Le commissaire a déjà comparu devant ce comité. Nous avons adopté une motion qui se lit comme suit:

Que le Commissaire de la GRC, le commandant de la Division C et l'Union Douanes Accise soient invités à comparaître devant le Comité le 10 mars 2005 relativement à la fermeture des détachements de la GRC au Québec.

    Le but de notre réunion d'aujourd'hui est de demander au commissaire de nous expliquer la raison pour laquelle la recommandation a été ignorée.

    Nous avons reçu une lettre de la ministre McLellan, qui nous disait qu'elle ne pouvait pas accepter notre invitation, mais qu'elle faisait confiance à la GRC pour ce qui était de cette décision.

    Je vais donner la parole au commissaire, qui a préparé une déclaration, puis les membres du comité poseront des questions. Nous réservons une quinzaine de minutes, à la fin, pour discuter d'une motion que M. Breitkreuz avait proposée,

[Traduction]

    et nous vous demanderons des explications sur les déclarations du commissaire selon lesquelles il n'y aurait pas d'arriérés dans les tests d'ADN effectués par les laboratoires. Je crois, monsieur Zaccardelli, que M. Martin est là pour nous expliquer cela. De toute façon, nous le ferons à la fin.

    Commençons par votre exposé.

À  +-(1015)  

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli (commissaire, Gendarmerie royale du Canada): Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité.

[Français]

    Bonjour, monsieur le président et membres du comité.

[Traduction]

    Je vous remercie de me donner la possibilité de discuter des questions liées à la surveillance et à la gestion du travail de la Gendarmerie royale du Canada dans la province de Québec.

    Comme vous l'avez dit, monsieur le président, je suis accompagné du sous-commissaire Peter Martin, qui est responsable des services nationaux de police, ce qui englobe la question des analyses génétiques, et il va donc pouvoir m'aider à répondre à vos questions à ce sujet. Naturellement, vous connaissez Pierre-Yves Bourduas, le commissaire adjoint responsable du Québec à la GRC.

    Après une brève allocution, je serai heureux de répondre à vos questions et de discuter avec vous.

[Français]

    Comme vous pouvez l'imaginer, les dernières semaines ont été particulièrement éprouvantes pour la Gendarmerie royale et pour la communauté de l'application de la loi dans son ensemble. En plus du choc et de la douleur, les événements de Mayerthorpe, en Alberta, ont soulevé une foule de questions touchant les affaires internes, les enquêtes et la société en général.

    Alors que je me préparais pour notre rencontre de ce matin, j'ai été frappé par le sentiment de participer à l'histoire et de faire oeuvre utile. Cela imprègne notre travail en tout temps, bien sûr, mais particulièrement dans des moments comme ceux-là.

    Depuis plus de 130 ans, la Gendarmerie royale du Canada travaille auprès des communautés locales en tant que service de police national, dans un contexte international, avec l'appui et au nom de la population du Canada.

[Traduction]

    Nous sommes animés par une vision simple, singulière et mobilisatrice : faire ce qu'il faut, du mieux que nous le pouvons, pour assurer la sécurité du Canada et des Canadiens.

    Comme vous le savez, le contexte de l'application de la loi a beaucoup changé depuis quelques années. La mondialisation, la technologie et la science ont des effets sans précédent sur la nature de la criminalité, les capacités des criminels, particulièrement le crime organisé, le rythme du changement et les niveaux de risque auxquels nous faisons face.

    Ces mêmes effets ont aussi fondamentalement changé la façon dont nous travaillons. Nous travaillons davantage en laboratoire, devant des ordinateurs, en partenariat avec d'autres services de police partout au Canada et dans le monde, et même avec des organismes qui ne font pas partie des forces de l'ordre. L'émergence de phénomènes qui transcendent les frontières, comme le terrorisme, la cybercriminalité, la criminalité financière et le crime organisé nous obligent à changer nos façons de faire.

    Si je fais cette brève analyse contextuelle, c'est dans un but bien précis que vous allez comprendre. Les changements qui sont apportés au Québec, à l'instar des nombreux autres changements que nous avons effectués dans l'ensemble de notre organisation partout au pays, reflètent notre responsabilité continue d'assurer que la GRC est en mesure de réagir à la situation à laquelle elle fait face maintenant.

    Nous sommes très conscients des questions soulevées par votre comité et, en fait, nous nous sommes penchés sur bon nombre d'entre elles dans le cadre de notre processus décisionnel touchant le Québec. Nous partageons vos regrets et même vos préoccupations au sujet des grands changements dans la nature même de la vie des collectivités que ces décisions opérationnelles laissent présager.

    Comme vous le savez, l'établissement sur de nombreuses années d'un réseau de petits détachements de la GRC au Québec était le reflet de la confiance qui existait entre la population de la province, la Sûreté du Québec et le service de police national.

À  +-(1020)  

[Français]

    On ne peut trop insister sur l'importance du rôle de la GRC dans la vie des collectivités du Québec, rôle qui constitue une partie également importante de notre évolution comme service de police.

    Cette confiance demeure intacte et notre engagement envers les citoyens n'a certes pas changé, mais on ne peut nier que nous devons changer nos façons de faire si nous voulons continuer de tenir notre engagement. Ce n'est pas facile à faire, mais il faut absolument le faire.

[Traduction]

    Après avoir analysé minutieusement les demandes auxquelles nous faisons face et nos capacités sur le plan des ressources humaines, structurelles et opérationnelles au Québec, nous avons pris une série de décisions qui, croyons-nous, représentent la meilleure façon pour la GRC de continuer de remplir sa mission : assurer la sécurité de la population et des collectivités du Canada. Au Québec, cette philosophie est partagée avec la SQ ainsi que les autres forces policières.

    J'aimerais toutefois apporter une précision. Même si je comprends la résistance que nous avons rencontrée, et elle ne me laisse pas indifférent, je me dois de souligner qu'en fait je suis très enthousiaste à l'idée que ces changements pourraient nous permettre de faire un meilleur travail au Québec.

    Le redéploiement des ressources au Québec nous permettra de mieux travailler avec nos partenaires dans les domaines de l'application de la loi, du développement social et du système de justice pénale, afin d'accroître notre capacité collective de répondre aux besoins. En concentrant nos ressources là où elles sont les plus pertinentes et utiles, je crois que nous pouvons accomplir de véritables progrès dans l'atteinte de nos objectifs au Québec et dans le reste du Canada.

    Comme vous le savez, en tant que commissaire, j'ai la responsabilité, en vertu de la loi fédérale qui établit la portée et les limites de mon rôle et de celui de la GRC, de superviser et de gérer la Gendarmerie royale du Canada d'une manière indépendante et la plus efficace possible, du mieux que je peux. Je m'acquitte de mon mandat en collaboration avec les cadres supérieurs de la Gendarmerie et en consultation avec nos partenaires, avec la ministre dont je relève et aussi avec les citoyens du Canada dans le cadre du système parlementaire et d'autres mécanismes.

[Français]

    Nous vivons une période difficile. Les événements du 3 mars n'ont fait qu'accentuer le niveau de risque et la complexité des influences externes auxquelles nous sommes confrontés.

    J'ai un groupe de collègues compétents et déterminés à la haute direction de la GRC. Je peux compter sur un effectif d'hommes et de femmes engagés et qualifiés partout au pays, et sur l'appui et l'intérêt soutenu de nos partenaires de l'application de la loi, de l'administration et des milieux politiques.

    Je suis convaincu que tous ensemble nous saurons affronter les défis de notre époque, que nous n'aurons pas peur de nous adapter pour les relever, que nous trouverons des façons encore plus innovatrices et efficaces de réaliser notre vision commune de faire du Canada un pays sûr. Merci.

[Traduction]

    Merci. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.

+-

    Le président: Merci, monsieur le commissaire.

    Nous passons à M. Thompson pour cinq minutes.

+-

    M. Myron Thompson (Wild Rose, PCC): Merci.

    Bienvenue, messieurs.

    Monsieur Zaccardelli, je suis un peu perplexe. D'un côté, on parle d'améliorer la sécurité du pays et des Canadiens, et de l'autre on parle de mettre à pied des centaines de personnes dans les services de police, de fermer des détachements, de fermer un laboratoire très utile pour la lutte contre la criminalité à Edmonton—tout cela, alors qu'on continue à gaspiller des millions et des millions de dollars à tenir des registres des armes à feu qui ne servent strictement à rien. Je pense que c'est un fait bien reconnu maintenant.

    Vous nous parlez aujourd'hui de toutes ces choses qui vont vous permettre d'améliorer votre travail. J'avoue que j'ai du mal à vous comprendre. Nous venons de finir de parler des gardes à la frontière, en insistant sur la nécessité d'une présence de la GRC—ou tout au moins d'une possibilité d'intervention dans certaines situations. Or, ces gens-là ne sont plus là. On ne peut plus faire appel à eux, et pas seulement au Québec, mais ailleurs aussi.

    Je vois dans le compte rendu de la réunion du 9 décembre une petite citation de M. Zaccardelli qui reconnaît qu'il est important d'avoir une présence à la frontière. À deux reprises, il dit : « Il faut avoir une présence. » Or c'est quelque chose qui est en voie de disparition. Où est cette présence? Vers quoi nous dirigeons-nous? Vous avez l'air de dire une chose, mais c'est le contraire qui se produit. Alors je commence à vieillir et j'ai une certaine éducation, mais bonté divine, vous allez quand même devoir m'expliquer cela.

À  +-(1025)  

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Merci pour cette question.

    Je vieillis moi aussi, mais j'aimerais reprendre certaines de vos remarques, et corrigez-moi si j'en oublie.

    Nous parlons de ressources. Il a fallu à la GRC des années pour passer d'un budget nul à un budget de deux milliards de dollars, mais au cours des six dernières années notre budget est passé de deux à plus de trois milliards de dollars. Je pense que cela en dit long sur l'appui que le gouvernement et la société apportent à notre travail. Nous avons reçu énormément d'argent.

    Vous avez dit qu'on supprimait des centaines de postes. Je suis désolé, mais c'est complètement faux. On n'a pas supprimé de postes. Je le répète, nous sommes passés de deux milliards à trois milliards de dollars au cours des six dernières années.

    Vous parlez du laboratoire d'Edmonton. Je dois vous dire que quand je suis devenu commissaire, j'ai pris une décision fondamentale au sujet des laboratoires. Depuis un certain nombre d'années, les vérificateurs généraux avaient examiné la question des laboratoires et affirmé qu'il fallait les rendre plus efficaces. Nous parlions auparavant de six laboratoires. Ce que nous avons dit, c'est que nous avions un service de laboratoire au Canada avec six bureaux situés stratégiquement dans six endroits différents. Il y a toute une différence entre dire que nous avons six laboratoires et dire que nous avons un laboratoire avec six bureaux stratégiquement situés. Les changements que nous avons apportés à ces laboratoires ont été fondamentaux pour les améliorations que nous avons réalisées. Le service de nos laboratoires est de première classe à l'échelle mondiale. Nous sommes très fiers de ce que nous faisons, qu'il s'agisse des analyses d'ADN ou autre.

    Nous sommes obligés de prendre des décisions difficiles. Ce que nous avons fait à Edmonton s'inscrivait dans le cadre de la restructuration, mais il n'y a absolument pas eu de suppression ou de réduction de services. Les échéanciers auxquels nous nous engageons en matière d'analyses génétiques ou autres restent les mêmes. Ce que nous avons fait à Edmonton s'inscrivait dans le cadre de la réorganisation des laboratoires; nous cherchons toujours à améliorer les choses.

    J'aimerais maintenant parler des fermetures de détachements, car c'est une bonne remarque. Comme je l'ai dit dans mon exposé, nous avons réfléchi à la question, nous en avons discuté et nous avons tenu des consultations pendant plusieurs années. Nous avons pris très au sérieux les recommandations et les suggestions de votre comité, de nos collègues des services de police et de l'ensemble de la société au Québec, et nous avons tenu des consultations. Nous sommes convaincus que la restructuration en cours au Québec, qui s'inscrit dans le cadre de la restructuration généralisée dans l'ensemble du pays, contribuera à améliorer le service. Les gens qui quittent ces détachements ne quittent pas le Québec; ils sont simplement redéployés et utilisés de façon plus stratégique au Québec en coordination avec le reste du pays et aussi avec nos partenaires aux États-Unis, car nous avons une frontière de 5 000 milles ou 8 000 kilomètres.

    Nous avons créé stratégiquement un certain nombre d'unités qui s'appuient sur des services de renseignement et ont un rôle proactif et non pas réactif. C'est la même chose que ce que les Américains ont mis sur pied de leur côté. J'irais même jusqu'à me vanter un peu en affirmant que les Américains ont copié le dispositif que nous avions établi. C'est nous qui avons mis au point le principe de l'équipe intégrée de la police des frontières, en Colombie-Britannique : des équipes souples et mobiles qui peuvent intervenir non seulement à la frontière mais aussi à l'intérieur du pays. C'est le principe, et cela fonctionne extrêmement bien.

    Les Américains en sont enchantés. Nous avons intégré nos dispositifs de radiocommunication. Nous collaborons. Nous sommes plus efficaces que jamais; tous les Américains à qui vous en parlerez vous le confirmeront. L'ambassadeur qui vient de partir et nos collègues aux États-Unis disent qu'il s'agit d'une pratique exemplaire.

    Je reçois des gens du monde entier. J'ai actuellement deux délégations ici, une de la Suisse et une de l'Allemagne, qui sont venues examiner le fonctionnement de cette démarche de police proactive.

À  +-(1030)  

    Le travail de la police de nos jours n'est plus figé. On est plus efficace en prenant les devants et en déployant stratégiquement les ressources en fonction des renseignements recueillis. C'est ce que nous faisons et nous en sommes fiers. Nous n'avons pas des détachements fermés, nous avons redéployé nos effectifs pour assurer au maximum la sécurité du Canada. Le Québec et le Canada sont plus sûrs aujourd'hui grâce aux décisions que nous avons prises à propos de ces détachements.

+-

    Le président: Monsieur le commissaire, nous devons poursuivre.

    Monsieur Marceau, c'est à vous.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Merci beaucoup, monsieur le président. Monsieur le commissaire, messieurs, merci d'être présents.

    J'avoue être déçu que la ministre n'ait pas daigné comparaître devant ce comité. Si je parlais bien l'anglais,

[Traduction]

    Je dirais qu'elle s'est dégonflée.

[Français]

    D'un côté, on vote ce soir sur une motion présentée par le Bloc québécois. J'ai eu l'honneur de parrainer cette motion qui donnerait lieu à un renversement du fardeau de la preuve dans le cas des gens trouvés coupables de crimes graves, entre autres les chefs du crime organisé. Cela ferait en sorte de faciliter la saisie des produits de la criminalité. D'un autre côté, on ferme des détachements de la GRC partout au Québec. On peut à tout le moins se questionner sur la volonté réelle du gouvernement de lutter contre le crime organisé et de prendre les moyens nécessaires pour y arriver.

    Le 7 décembre dernier, une motion a été présentée devant ce comité, et elle a été adoptée le 9 décembre. Je vais la lire parce qu'elle a de l'importance:

Que le Comité recommande au gouvernement que la GRC cesse immédiatement le redéploiement des effectifs du Québec pour garder ouverts les neuf détachements du Québec, et qu'elle s'assure de maintenir une masse critique de huit agents par poste.

    Y a-t-il quelque chose qui ne soit pas clair dans cette recommandation?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Non, elle est très claire. Je l'ai bien comprise.

+-

    M. Richard Marceau: Alors, pourquoi n'avez-vous pas suivi cette recommandation qui a été formulée par des gens élus par la population? Est-ce que la GRC est au-dessus des lois? Est-ce qu'elle ne fait aucun cas des désirs des députés?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Ce n'est pas du tout le cas. Nous respectons toujours la loi. Cependant, comme j'ai tenté de l'expliquer la dernière fois que je suis venu ici, la décision avait en majeure partie déjà été prise avant que la résolution ne soit adoptée par le comité, soit avant le 9 décembre, à savoir celle de fermer des détachements, de déménager des bureaux et de transférer des membres.

+-

    M. Richard Marceau: D'abord, est-il impossible de faire marche arrière? Ensuite, la motion a été adoptée le 9 décembre. Or, je sais que la GRC suit de près les comités lorsque ceux-ci débattent de questions qui la concernent. Vous savez donc très bien que cette question avait déjà été soulevée. Des lettres avaient été écrites et des questions avaient été posées. Vous saviez qu'une majorité de députés avaient exprimé la volonté qu'on ne ferme pas ces postes.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Je comprends très bien cela. Comme je l'ai déjà dit, la décision était déjà prise en grande partie. J'aimerais en outre expliquer qu'en vertu de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, qui est fédérale, je suis tenu en tant que commissaire de gérer l'organisation le plus efficacement possible. Il faut que je respecte cette loi. Bien sûr, je dois rendre compte à mon ministre, mais il reste que selon cette loi, je dois voir à ce que le déploiement des ressources soit efficace.

+-

    M. Richard Marceau: Ce matin, à la barre des témoins, quelqu'un a précisé que 1 600 voitures étaient passées aux douanes sans qu'il y ait de suivi. La GRC ne pouvait pas s'en charger puisqu'elle avait disparu. On peut donc se poser des questions sur l'efficacité du redéploiement. Est-il vraiment efficace de laisser passer autant de monde à la frontière?

À  +-(1035)  

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Je ne peux pas commenter ce que ces témoins ont dit parce que je n'ai pas entendu leur témoignage. Il reste, monsieur Marceau, que je suis le commissaire et que la loi m'oblige à gérer l'organisation avec mes collègues membres de la haute gestion. Je ne sais pas qui a comparu devant vous ce matin, mais je suis sûr que ces gens ne font pas partie de la haute gestion de l'organisation et qu'ils n'ont ni l'obligation ni la responsabilité d'en assurer l'efficacité.

+-

    M. Richard Marceau: Donc, si je comprends bien, c'est vous qui avez pris la décision, et celle-ci a ensuite été approuvée par la ministre. C'est exact?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai approuvé la décision de fermer des détachements, et le commandant de la division, de concert avec ses officiers supérieurs, après plusieurs consultations auprès de la population du Québec...

+-

    M. Richard Marceau: Laissez-moi reformuler ma question. La décision a-t-elle été prise par la GRC ou par la ministre?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Elle a été prise par moi.

+-

    M. Richard Marceau: Elle a donc été approuvée par la ministre. Ce matin, on a reçu une lettre de la ministre dans laquelle elle dit ceci: « [...] j'appuie sans réserve ce plan [...] ». Je comprends cela.

    Par contre, j'aimerais que vous m'expliquiez en quoi ceci est vrai, parce que je comprends pas. Le fait que les parlementaires veulent donner une certaine direction à tout cela « pourrait nuire [...] à l'indépendance des enquêtes. » Dites-moi en quoi la volonté des parlementaires exprimée par l'intermédiaire de ce comité de ne pas fermer neuf postes de la GRC pourrait nuire à des enquêtes en cours.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Si je n'ai pas suffisamment de flexibilité pour déployer des ressources d'après les renseignements en ma possession, cela peut affecter les opérations que je peux entreprendre et l'efficacité de l'organisation quand on parle du crime organisé.

    C'est l'équilibre qu'il faut avoir. Je suis responsable de l'organisation. D'après la loi, je dois déterminer quelles enquêtes on va commencer et quelles sont les priorités en me fondant sur les renseignements à ma disposition.

+-

    Le président: Merci, monsieur Marceau, M. Comartin m'indique qu'il va céder son temps à M. Vincent. Je vais cependant donner la parole à M. Cullen avant de la donner à M. Vincent.

[Traduction]

    Monsieur Cullen, vous avez cinq minutes.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Merci, monsieur le président, et merci à vous aussi, monsieur le commissaire et messieurs Bourduas et Martin.

    Il est regrettable que toute cette question de la fermeture des détachements au Québec ait été politisée à ce point par le Bloc québécois. Malheureusement, c'est inévitable car vous avez dit à maintes reprises, monsieur le commissaire, que le réalignement des ressources au Québec permettait en fait de renforcer la sécurité des Québécois et des Canadiens.

    Je crois que si quelqu'un représente la sagesse à cette table, c'est bien la personne qui est en première ligne et qui s'occupe au quotidien de la criminalité. Si le commissaire de la GRC ne sait pas comment redéployer les ressources, alors je me demande qui peut le faire. Si notre comité doit s'occuper de ce genre de décision, comme je l'ai dit à notre dernière réunion, si c'est à nous de décider que des détachements de la GRC doivent être maintenus ou fermés ou de décider comment la GRC doit être structurée, cela veut dire que nous devons prendre en charge la criminalité au Québec et dans les autres provinces. Ce n'est pas comme cela que les choses fonctionnent, comme l'a bien souligné le commissaire. Il y a une loi sur la GRC qu'il doit respecter.

    Personne n'aime voir disparaître un détachement dans sa région. Je suis sûr que cela suscite toutes sortes de remous politiques. Il y a eu le même genre de réalignement de la GRC dans d'autres provinces et effectivement il y a eu des petits problèmes, des problèmes politiques, mais de toute évidence quand le commissaire de la GRC dit, comme il l'a fait à maintes reprises à notre comité...

    Et je vous remercie, monsieur le commissaire, d'être revenu. La ministre a décliné notre invitation. Elle est venue nous rencontrer à propos du budget des dépenses, et avec le commissaire. Nous avons eu tout un dialogue. Je crois que nous sommes vraiment allés au fond de cette question. Le commissaire a dit, et je l'ai répété moi-même plusieurs fois, qu'il s'agissait de renforcer la sécurité des Québécois et des Canadiens. Je ne comprends donc pas pourquoi certains députés persistent à remettre la question sur le tapis.

    Monsieur le commissaire, j'ai une question. Nous savons que nous collaborons étroitement avec les Américains, avec nos équipes intégrées de la police des frontières. Lors d'un colloque sur la criminalité auquel j'ai participé récemment, on a parlé de gigantesques saisies de drogues organisées conjointement par les forces de maintien de l'ordre du Canada et des États-Unis. Il n'est jamais agréable de voir des gens enfreindre la loi ou traverser la frontière illégalement, mais pouvez-vous nous dire comment vous voyez ce problème des gens qui traversent illégalement la frontière par rapport à la lutte contre les grandes menaces terroristes ou les grands problèmes de drogues et de cultures clandestines?

À  +-(1040)  

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Tout d'abord, monsieur Cullen, je préciserai que depuis quelques années nous avons mis au point un modèle d'évaluation du risque de classe mondiale intitulé modèle Sleipnir, et que ce modèle a été adopté par de nombreux autres pays. Il nous permet d'intervenir activement en fonction de renseignements pour détecter les menaces les plus graves. Nous le faisons en partenariat. C'est pour cela que nous parlons d'intégration; nous prenons appui sur nos ressources collectives. Nous ne parlons pas de choix, mais notre priorité est clairement... La menace du terrorisme est clairement la priorité absolue. Les problèmes de crime organisé graves viennent en deuxième place, tout près, évidemment.

    La frontière est un problème important, mais l'essentiel n'est pas d'arrêter et de contrôler chaque individu. Il faut faire une évaluation du risque. Si vous avez de bons renseignements qui vous permettent de détecter les gens ou les organisations qui constituent des menaces, vous pouvez les cibler. Vous n'avez pas besoin d'arrêter tout le monde. D'ailleurs, nous n'avons pas assez de ressources pour contrôler tout le monde à la frontière, nous faisons donc une évaluation du risque, comme partout ailleurs. On ne contrôle pas nécessairement tous les bateaux qui arrivent aux ports, on fait une évaluation du risque et de la menace. C'est la même chose à la frontière. Nous ne nous intéressons qu'à ceux qui constituent véritablement une menace. Et en prenant l'initiative, en situant stratégiquement nos ressources de façon à pouvoir intervenir rapidement, nous sommes beaucoup plus efficaces. Nous ne gaspillons pas nos ressources. Nous prenons les devants.

    Bien souvent, il n'y a pas de menace à la frontière, ou ce n'est pas un problème. Mais si l'on nous signale quelque chose, si nous apprenons qu'il risque d'y avoir un problème demain ou la semaine prochaine, nous redéployons nos ressources pour faire face, qu'il s'agisse d'une menace terroriste, d'une menace de crime organisé ou d'une affaire de contrefaçon à grande échelle. Ce qui compte, c'est d'être présent à la frontière quand il le faut, quand il y a une menace sérieuse, en vertu d'un modèle d'évaluation de la menace. C'est de l'intervention intelligente, et pas simplement de la réaction aveugle.

+-

    Le président: Merci, monsieur le commissaire.

    Merci, monsieur Cullen.

[Français]

    Monsieur Vincent, vous allez prendre la place de M. Comartin.

+-

    M. Robert Vincent (Shefford, BQ): Monsieur Zaccardelli, en réponse à une question de mon confrère, vous avez dit, concernant la motion qui avait été prévue pour le 9 décembre, que vous ne pouviez pas prendre d'autre décision, étant donné que celle-ci avait déjà été prise. Il reste qu'à ce moment-là, nous vous avions déjà rencontré à deux reprises. Même avant que la fermeture des postes soit suggérée, nous avions eu des échanges avec vous.

    Vous avez répondu à mon confrère que le 9 décembre, vous ne pouviez pas faire marche arrière, mais on parle ici d'une situation bien antérieure au 9 décembre. Il s'agit du mois de septembre, voire du mois d'août. Votre décision concernant la fermeture des neuf postes de la GRC était-elle déjà prise au mois d'août?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Je ne suis pas sûr de la date exacte à laquelle la décision a été prise. Je peux le demander à M. Bourduas. Toutefois, si mes souvenirs sont exacts, la première résolution a eu lieu le 9 décembre. Avant cela, il y a eu des discussions, nous nous sommes rencontrés, et il y a eu des consultations. C'est la distinction que je voulais faire.

+-

    M. Robert Vincent: Vous saviez déjà que nous étions opposés à la fermeture des postes.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Oui, tout à fait. Nous avons pris cela en considération, de même que la position des maires et de tous nos partenaires. À la fin de toute cette consultation, qui a duré longtemps, j'ai dû prendre une décision.

+-

    M. Robert Vincent: J'essaie de comprendre. La décision avait déjà été prise, et vous saviez que nous étions opposés à la fermeture des postes. Alors, pourquoi avez-vous continué à opter pour la fermeture, sans attendre de savoir ce qui allait résulter des comités? Voyez où nous en sommes aujourd'hui. Pourquoi avez-vous continué votre démarche, sachant que nous allions mener cette affaire jusqu'au bout?

À  +-(1045)  

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Vous avez soulevé un bon point. Comme je l'ai dit, la consultation et l'examen de ce qui devait être fait a duré plus de deux ans, je crois. Après un certain temps, j'ai été obligé selon la loi de prendre une décision, et c'est ce que j'ai fait.

+-

    M. Robert Vincent: Je vous comprends parfaitement, mais la question que je vous pose est la suivante: vous saviez que vous deviez prendre une décision et que les parlementaires allaient en prendre une qui irait à l'encontre de votre position première. Pourquoi n'avez-vous pas suspendu la fermeture des postes de la GRC jusqu'à ce que nous soyons rendus au bout du tunnel?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Selon moi, on a consulté tout le monde, et la loi m'obligeait à prendre une décision sans délai. Selon les priorités, il m'était impossible de tarder davantage. Voilà pourquoi nous avons pris cette décision.

+-

    M. Robert Vincent: Vous dites que vos priorités sont les frontières, ce qui les traverse, la criminalité et la restructuration au niveau régional; mais tout passe par les frontières, tout transite par les frontières. Est-ce que cela n'est pas une priorité pour vous? Tout le transport entre le Canada et les États-Unis passe par les frontières. N'est-il pas important pour vous de savoir ce qui va se passer, s'il y a des armes, de la drogue? Tout transite par la frontière Canada—États-Unis. Vous, vous délaissez tout cela et ce n'est pas plus important. Vous fermez les postes.

    En tant que commissaire de la GRC, vous n'étiez pas au courant qu'il y avait des douaniers qui comparaissaient ici aujourd'hui?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Je savais qu'ils devaient comparaître devant ce comité. Ce que j'ai dit à M. Marceau, c'est que je ne savais pas ce qu'ils avaient dit. Je reviens à la réponse que j'ai donnée à M. Cullen. Je n'ai pas dit que la frontière n'était pas importante, puisqu'une grande part du marché doit traverser la frontière. Une grande partie de ce qui se passe à la frontière n'a rien à voir avec la criminalité.

+-

    M. Robert Vincent: Vous dites que cela n'a rien à voir avec la criminalité?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Monsieur Vincent, laissez-moi vous expliquer.

    Généralement, ce qui se passe à la frontière n'a rien à voir avec la gendarmerie ou la police. Ce qui est important pour moi, c'est d'avoir de l'information et des renseignements, au cas où des groupes criminalisés voudraient traverser la frontière. S'il s'agit d'un terroriste ou d'une personne qui a des liens avec la criminalité, je suis très intéressé. Je veux alors être présent pour être en mesure de réagir. C'est pour savoir à quel moment ces gens-là vont passer la frontière que nous attachons beaucoup d'importance aux renseignements. C'est pour combattre cette criminalité que nous avons créé des équipes intégrées un peu partout au pays. Nous voulons nous assurer d'être efficaces et flexibles pour combattre cette criminalité. Je ne veux pas vous donner l'impression que la frontière n'est pas importante pour nous.

+-

    Le président: Merci, monsieur le commissaire.

    Merci, monsieur Vincent.

[Traduction]

    Monsieur MacKay, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC): Merci, monsieur le président, monsieur le commissaire et messieurs les témoins.

    Je suis effaré par certains des propos que je viens d'entendre. Notre comité ne réagit pas aveuglément. Nous venons d'entendre dire des choses alarmantes, à savoir que 1 600 véhicules traversent la frontière sans s'arrêter. Vous venez de nous dire qu'on ne contrôle pas tous les véhicules ou tous les bateaux qui entrent au Canada, mais qu'on se contente de cibler certains éléments pour renforcer la sécurité à la frontière.

    Nous venons d'entendre le président de l'Union des douanes et accises ainsi qu'un cadre supérieur de la GRC qui est représentant de la division du Québec et président de l'Association des membres de la police montée, M. Delisle, —et j'espère qu'il ne va pas se faire taper sur les doigts à la suite de ce témoignage—nous dire que ce sont les Américains qui font le gros du travail maintenant. Ils ont plus que doublé leur présence à la frontière. En fait, nous abdiquons—je crois bien que c'est le terme qui a été utilisé—notre responsabilité à la frontière. Les agents de l'Union des douanes et accises nous disent qu'il leur est beaucoup plus difficile de compter sur la GRC en cas de crise depuis la fermeture des détachements de la GRC.

    Autrement dit, toutes ces histoires de redéploiement, de relocalisation stratégique, de réorganisation et de régionalisation, c'est en fait une question de fermeture. Cela veut dire qu'il y a moins d'agents à la disposition des Canadiens qui vivent à proximité de la frontière, moins d'agents auxquels faire appel en cas de crise. Cela veut dire que les agents de première ligne sont moins à même de protéger les citoyens canadiens et de protéger la souveraineté du Canada.

    Je suis donc sidéré de vous entendre soutenir que la sécurité s'est en fait améliorée. Comment pouvez-vous venir nous prétendre qu'avec moins d'agents, moins de ressources, moins de capacités à protéger notre souveraineté à la frontière, moins de capacités de maintien de l'ordre en dépit de l'accroissement de plus en plus flagrant du nombre de cultures illégales ou du nombre de personnes qui franchissent la frontière illégalement en transportant des produits de contrebande, comment pouvez-vous nous prétendre qu'avec tout cela, nous maintenons l'ordre de façon plus efficace? Et en plus, il y a la fermeture de la banque de données génétiques à Edmonton, au sujet de laquelle M. Breitkreuz vous interrogera un peu plus tard.

    En même temps, on nous dit qu'il y a plus d'administrateurs avec moins de responsabilités. Je ne suis pas d'accord avec mon ami M. Cullen quand il prétend que vous êtes le mieux placé pour cela. Si vous êtes en train de devenir de plus en plus une sorte de sous-ministre, je m'en remets à la parole de ces agents qui sont sur le terrain, en première ligne, qui répondent aux appels des citoyens et qui n'ont aucun contrôle sur les ressources. Vous au moins, vous avez une interaction avec la ministre qui, comme on l'a bien fait remarquer, n'est pas venue répondre à nos questions aujourd'hui.

    Comment pouvez-vous prétendre qu'avec moins d'agents, moins de ressources et moins de présence à la frontière nous jouissons d'une meilleure sécurité et nous avons une meilleure police? Comment osez-vous nous dire une chose pareille, monsieur le commissaire?

À  +-(1050)  

+-

    Le président: Monsieur le commissaire.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Monsieur le président, M. MacKay soulève plusieurs points. Si j'en oublie, n'hésitez pas à me le rappeler.

    Tout d'abord, il n'y a pas de banque de données génétiques à Edmonton. Il n'y en a jamais eue. Il y en a seulement une, et elle est située à Ottawa.

+-

    M. Peter MacKay: C'est le laboratoire judiciaire, excusez-moi. Il est fermé, donc vous avez raison.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Pour ce qui est d'avoir moins de ressources, je ne sais pas si vous étiez là quand j'ai pris la parole tout à l'heure, mais j'ai précisé que notre budget était passé de deux milliards à plus de trois milliards de dollars au cours des cinq ou six dernières années. Il nous a fallu 125 ans pour en arriver à deux milliards. Donc, nos ressources ont augmenté.

    Nous avons beaucoup plus de gens qui sont concentrés, qui s'occupent des frontières et peuvent intervenir à la frontière. Grâce aux équipes intégrées de police à la frontière que nous avons créées partout au Canada, avec nos partenaires ici et aux États-Unis, je crois que la sécurité est bien meilleure à la frontière.

    Pour ce que j'ai dit à propos...

+-

    M. Peter MacKay: Puis-je vous interrompre? J'aimerais que vous expliquiez la quadrature de ce cercle. Comment le fait de réduire la capacité et la présence à la frontière peut-il mener à une sécurité accrue? Comment pouvez-vous affirmer que le retrait d'une présence physique réelle assurant la garde de la frontière est une mesure qui permet de mieux protéger les Canadiens... Comment?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Je vais vous fournir des explications sur ce point précis. Le travail des détachements dont nous parlons ne s'effectuait pas entièrement à la frontière. Une bonne partie du travail de ces agents ne se situait pas nécessairement à la frontière. Ce que nous avons maintenant... Et nous parlons seulement d'une région du pays. Vous savez, la frontière s'étend sur 8 000 kilomètres.

À  +-(1055)  

+-

    M. Peter MacKay: Je le comprends tout à fait.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Si vous avez quelques agents qui se trouvent à un endroit, il ne faut pas être un génie pour se dire que s'il y a quelques agents qui surveillent un endroit, il suffit de se déplacer de quelques kilomètres et d'entrer plus loin.

    Ainsi, il faut considérer la frontière dans son ensemble. Par conséquent, nous croyons qu'afin d'être efficaces, il fallait regrouper les agents dans tout le pays. Nos employés n'étaient pas déployés de façon stratégique dans tout le pays, monsieur, pour répondre à votre question. Maintenant, c'est le cas...

+-

    M. Peter MacKay: Mais, monsieur le commissaire, vous éloignez les agents des zones où des problèmes existaient...

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Non, ce n'est pas ce que je fais.

+-

    M. Peter MacKay: ... comme les installations de cultures.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Si je puis me permettre, l'initiative que j'ai prise consiste à redéployer ces postes au Québec vers des endroits plus stratégiques. Je les ai rassemblés afin de former de plus grands groupes. Je les ai dotés de plus d'équipement. Et ils sont mieux à même de faire leur travail au Québec. En outre, ailleurs au pays, nous avons créé un système national, puis nous avons tissé des liens avec nos partenaires américains afin que nous travaillions réellement sans embûches tout au long de la frontière. Nous avons accru notre présence ainsi que notre capacité, et nous assumons beaucoup mieux nos responsabilités.

    Nous n'avons pas aboli de postes. Si nous avons déplacé des postes vers d'autres régions, cela ne signifie pas que ces postes ont été abolis. Nous avons redéployé les ressources de façon efficace. C'est ce que nous avons fait.

+-

    M. Peter MacKay: Cela équivaut à les retirer.

+-

    Le président: Merci, monsieur MacKay.

    Monsieur Macklin, vous avez cinq minutes.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous remercie, monsieur le commissaire, d'être venu nous rencontrer aujourd'hui.

    J'aimerais revenir au témoignage de l'Union Douanes Accise, que nous avons entendu précédemment, car un certain nombre d'observations ont été formulées. Plus précisément, je vais vous lire un passage du mémoire que cette organisation a déposé, et j'aimerais que vous me fassiez part de vos observations à ce sujet, car je crois qu'il s'agit ici de concepts dans les services de police et du processus que suppose le maintien de l'ordre. Voici une citation du mémoire :

Il ne s'agit pas d'aligner des employés le long d'une étendue de terrain de 8 900 kilomètres, ni de leur demander d'attendre que quelqu'un traverse illégalement la frontière. Il s'agit plutôt d'assurer une présence et une patrouille proactive, d'engager du personnel et de renforcer la sécurité frontalière.

    J'aimerais connaître vos observations sur ce passage, sur le rôle que pourrait jouer la GRC en matière de sécurité frontalière.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Je vous remercie de m'avoir posé cette question.

    Je crois que nous avons effectué ce redéploiement et cette restructuration précisément en vue d'atteindre cet objectif. Lors de nos consultations exhaustives, nous avons parlé à certains de nos employés qui travaillent près de la frontière ou à la frontière à certains moments. Ces employés eux-mêmes nous ont dit : « Écoutez, on ne se sert pas de nous de façon efficace. Nous patrouillons certains secteurs pour rien. Nous aimerions que notre travail soit fondé sur le renseignement. Nous aimerions prévoir les problèmes, agir sans tarder et nous attaquer aux personnes qui traversent réellement la frontière, au lieu d'intercepter des gens au hasard, car, pour la plupart, les gens sont très honnêtes et respectueux de la loi. » Ainsi, les agents se rendaient compte qu'il existait des lacunes pour ce qui est de l'efficacité.

    Comme je l'ai dit, nous avons ensuite groupé ces agents et les employés des services frontaliers. Vous savez, les responsables de l'ASFC ont donné leur accord à cette mesure. Nous ne disposons pas de ressources illimitées. Nous n'avons pas suffisamment de ressources pour nous acquitter de toutes les tâches. Par conséquent, nous avons tenté de regrouper les employés afin d'être efficaces et efficients. Ces agents occupent toujours leurs postes. En revanche, on utilise leurs services de façon beaucoup plus efficace et stratégique.

    Nous sommes beaucoup plus en sécurité aujourd'hui grâce au redéploiement effectué au Québec et dans tout le pays. J'en suis absolument convaincu. C'est l'objectif réel de cette initiative. Nous avons rendu les employés plus efficaces et plus efficients. Leur travail est axé sur des renseignements de sécurité afin qu'ils puissent cerner les problèmes et s'y attaquer, dès qu'ils surviennent et là où ils surviennent.

    Vous savez, il n'est pas nécessaire que les employés soient figés à la frontière pour qu'ils offrent de bons services policiers. Si notre organisation est munie de bons renseignements, alors les employés peuvent se trouver ailleurs et faire preuve de souplesse, réagir rapidement et s'attaquer aux problèmes. C'est ce que nous faisons. J'en suis très fier. Et nous servons de modèle à de nombreux pays qui viennent étudier ce que nous avons accompli ici.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Pour ce qui est de l'Agence des services frontaliers en tant que telle et des autres organismes d'application de la loi, au Québec plus particulièrement, cohabitent la GRC, la Sûreté du Québec et, je suppose, l'Agence des services frontaliers. Selon vous, existe-t-il un conflit, opposant les divers services policiers, qui doit être résolu? Comment interagissent-ils? Comment les responsabilités qui relèvent de la sécurité frontalière sont-elles intégrées de façon utile et pertinente? Je vous pose ces questions car, parmi les témoignages que nous entendons, je relève certaines observations au sujet de l'absence d'un protocole d'entente avec la Sûreté du Québec, par exemple, ce qui rend la coopération insuffisante. Y a-t-il une coopération? Le travail se fait-il de façon intégrée?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Lorsque je voyage dans tout le pays, comme j'occupe le poste de commissaire, on me demande souvent quel est le meilleur exemple d'intégration et de collaboration. Je réponds sans hésiter qu'il s'agit du Québec.

    Notre relation avec la SQ, avec les services policiers municipaux et avec les autres agences est parmi les meilleures qui soient. Nous discutons des problèmes et nous parvenons à une entente. Il existe une volonté et un désir de coopérer, et nous coopérons réellement. Est-ce que cela signifie que nous sommes en mesure d'affronter tous les défis? Non. Il y a des restrictions, et il y a des problèmes relatifs à la capacité, mais pour ce qui est de la collaboration, de la coopération, et de la volonté de nous entraider, les résultats sont éloquents. Prenez par exemple les équipes intégrées que nous avons. Nous ne faisons rien au Québec, aujourd'hui, sans la présence de nos partenaires clés, qu'ils oeuvrent dans le domaine de l'application de la loi ou non. Tous nos partenaires ont adhéré au concept d'intégration, et de travail axé sur le renseignement, car nous nous sommes rendu compte que nous sommes beaucoup plus efficaces lorsque nous mobilisons nos ressources collectives pour le bien commun que lorsque nous agissons séparément.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: S'agissant des équipes intégrées de la police des frontières du Canada et des États-Unis, certains ont affirmé qu'elles constituaient essentiellement une institution vouée à la collecte du renseignement. Est-ce une observation exacte, ou son objectif est-il plus vaste que la simple intégration de l'interdiction canadienne et américaine?

Á  +-(1100)  

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Absolument. Il faut bien plus que du renseignement, et je crois que le commandant peut le confirmer, car nous avons connu de grands succès ici ces derniers temps. Le travail de ces agents est axé sur le renseignement, mais, en outre, ils réagissent et démantèlent des organisations criminelles, ils s'attaquent à la criminalité. Ce sont des enquêteurs qui prennent des initiatives et qui combattent les problèmes les plus sérieux selon un système d'établissement de priorités sur lequel nous nous sommes tous entendus. C'est la beauté de la chose. Il ne s'agit pas d'une seule organisation qui s'intéresse à une seule liste de priorités, parallèlement à une autre organisation qui se concentre sur une autre liste de priorités. Nous avons tous convenu des responsabilités que nous allons assumer puis nous avons regroupé nos ressources collectives de façon efficace et efficiente.

    C'est pourquoi cette initiative m'enthousiasme tant. J'ai 34 ans et demi d'expérience dans les services policiers et je ne veux pas quitter ce domaine car nous vivons l'époque la plus excitante que nous ayons connue. Par conséquent, je vais poursuivre mon travail.

    Je sais que certaines personnes remettent en question les mesures que nous avons prises. Je suis prêt à recevoir leurs observations et leurs doléances, mais au bout du compte, comme je l'ai dit, il m'appartient de prendre les décisions finales sur le redéploiement de ces ressources car la loi m'oblige à le faire.

+-

    Le président: Merci, monsieur le commissaire et monsieur Macklin.

    Monsieur Ménard.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Merci, monsieur le président.

    Monsieur Zaccardelli, j'apprécie beaucoup vos efforts et je comprends vos difficultés d'organisation. Je suis quand même très inquiet au sujet de la sécurité des frontières terrestres, et c'est pour cela que je vous pose ces questions.

    Vous m'avez souvent enterré sous les roses, en espérant peut-être que j'oublie de vous parler de la réorganisation des services policiers au Québec. Vous savez très bien que l'une des clés de la réorganisation est l'établissement de niveaux de services. Je ne me souviens pas qu'à aucun des niveaux de services au Québec, il y ait la surveillance des frontières.

    Ensuite, je sais bien que les principes régissant une police municipale ou régionale peuvent être différents de ceux qui s'appliquent à la GRC. Je comprends qu'il y ait des différences. Un des principes de cette réorganisation était que la police locale ait les moyens d'affronter la plupart des actes criminels qui se produisaient sur son territoire. Pour ce qui se passait rarement ou peu souvent, on avait recours aux échelons supérieurs de la police. Je pense par exemple aux cas de meurtres, qui étaient l'affaire des niveaux de services plus élevés.

    Si l'on voulait cela, c'est justement parce qu'on était convaincus que le rapport intime entre les patrouilleurs qui sont sur le terrain et les enquêteur augmentait l'efficacité. Je comprends que votre problème ne soit pas tout à fait le même.

    Ce qui m'inquiète ici aussi, c'est ce qui a été soulevé. Si les gens savent qu'il n'y a pas d'escouades d'intervention mobiles, il y a plus de chances qu'ils planifient de passer aux douanes terrestres. Nous sommes dans la situation paradoxale où il semble plus facile de passer une mini-fourgonnette remplie de drogues que de passer une enveloppe à l'aéroport.

    Ensuite—on en a déjà parlé et vous m'avez corrigé avec raison—, il y avait une police dans les ports nationaux qui n'était pas la GRC. On a enlevé la police pour mettre à la place des agents de sécurité, et vous avez été obligés d'aller nettoyer le gâchis.

    J'ai fait la réorganisation policière au Québec. Il y avait des équipes d'intervention mobiles. La fonction exercée par une patrouille qui circule de sorte que les gens n'aient pas l'assurance que la façon la plus facile d'importer une bonne quantité de drogue est de passer tout droit avec une petite camionnette sans se faire attraper, est-ce une fonction que la GRC abandonne totalement?

    Êtes-vous d'avis que ce serait bien qu'il y ait une police particulière composée de douaniers, comme aux États-Unis—je pense que les Américains ont beaucoup augmenté leur personnel—, pour que vous puissiez vous consacrer au démantèlement des grandes organisations criminelles?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Merci, monsieur Ménard.

    Chaque jour, je dois composer avec les ressources disponibles pour que le travail soit fait. D'après la loi, je suis également obligé de maximiser l'utilisation de ces ressources, de les utiliser de la façon la plus efficace possible. Bien sûr, je peux décider demain de mettre la moitié des ressources au Québec, le long de la frontière, ou bien je peux avoir un autre plan.

    D'après moi, la décision que nous avons prise, après une consultation intense de presque deux ans auprès de tous nos partenaires, va rendre notre organisation plus efficace et le Québec, plus sécuritaire. Cette structure que nous avons mise en place va minimiser l'impact du crime organisé et réduire les possibilités de terrorisme au Québec. Ce sont des décisions que je dois prendre.

Á  +-(1105)  

+-

    M. Serge Ménard: Monsieur Zaccardelli, vous avez permis à d'autres de vous interrompre. Je comprends parfaitement votre position et votre raisonnement. Croyez-vous que les équipes d'intervention mobiles qu'on avait avant sont inutiles, ou croyez-vous qu'elles auraient une quelconque utilité si elles étaient menées par un autre corps?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: D'abord, la décision que j'ai prise était la bonne. Ces gens seront plus efficaces. Je ne les ai pas retirés du Québec, de la région. Ils sont là et ils vont répondre aux appels. S'il y création d'une autre organisation, d'un autre système, ce n'est pas à moi de le définir. Je ne peux que gérer l'organisation de la GRC et je vais le faire le plus efficacement possible. Si d'autres options doivent être proposées, ce n'est pas à moi de décider ce qu'elles devraient être.

+-

    M. Serge Ménard: Vous avez vu ce qui est arrivé dans le cas des ports nationaux. Le fait d'avoir enlevé les escouades d'intervention mobiles ne risque-t-il pas de vous causer des problèmes à l'avenir, comme ceux que vous avez dû résoudre dans les ports nationaux à un coût très élevé?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Le travail qu'on fait maintenant dans les ports est très efficace. On a amélioré ce que l'on faisait à l'époque. On a réorganisé nos effectifs et concentré notre travail dans les ports parce que c'était basé sur le renseignement. Cela fonctionne très bien, mieux qu'avant.

+-

    M. Serge Ménard: Il y a là des policiers aussi.

+-

    Le président: Monsieur Paradis.

+-

    L'hon. Denis Paradis: Merci, monsieur le président. Je souhaite la bienvenue à M. le commissaire et aux autres témoins.

    Tout d'abord, permettez-moi de situer rapidement Brome—Missisquoi. Sur les 47 postes-frontières du Québec, 10 sont situés dans mon comté. Il y a des routes non gardées comme dans les autres comtés j'imagine, par exemple à Noyan, où on passe à 500 mètres des douanes. Il n'y a personne, ni du côté canadien ni du côté américain. Il y a également deux lacs internationaux qu'il est important de patrouiller à mon humble avis: le lac Champlain et le lac Memphrémagog. C'est donc une immense porte d'entrée du côté canadien. Je me sens bien à l'aise, car chez moi il n'y a pas de poste de la GRC. Le plus près est à Granby et vous voulez le fermer, mais il est très utile à mes 10 postes-frontières, à mes deux lacs internationaux et à ces chemins non gardés.

    Les douaniers nous ont dit ce matin que, quand ils appellent la GRC—si quelqu'un passe tout droit ou pour d'autres raisons—, il n'y a pas de réponse. Ils nous ont aussi dit que la Sûreté du Québec était très occupée. Il y a eu des fusions avec d'autres corps policiers, entre autres. Les maires se plaignent même d'une baisse de service de la part de la Sûreté du Québec. La Sûreté du Québec ne peut donc pas remplir de mandat supplémentaire. Les douaniers ont du mal à rejoindre la Sûreté du Québec aussi. Les policiers locaux sont là pour les cas d'ivresse au volant et les problèmes de cet ordre. C'est leur apport à ce système de frontière.

    J'ai du mal à comprendre que, comme vous le dites, la meilleure façon pour la GRC de continuer à remplir sa mission est d'assurer la sécurité de la population et des collectivités. J'ai du mal à associer cette affirmation à ce que je viens de vous décrire. Je parlais souvent aux agents de la GRC quand il y en avait à Granby. Je parle également souvent aux douaniers. Encore en fin de semaine, j'étais avec des douaniers. Eux non plus ne comprennent pas. Les douaniers ne comprennent pas et la population ne comprend pas. Il n'y a pas grand monde qui comprenne ce que vous faites en ce moment.

    Vous dites avoir consulté des partenaires clés à un moment donné. J'ai assisté à une rencontre à Granby où tous les corps policiers étaient présents Les autres corps policiers, la Sûreté du Québec et les sûretés municipales demandaient à la GRC de ne pas partir. Ils ont besoin de chimie quand ils travaillent ensemble sur des dossiers. Cette chimie est difficile à créer avec les gens de Montréal, puisqu'ils ne les rencontrent que de temps en temps.

    La visibilité de la police est importante, on vous l'a répété. Si elle n'est pas sur le terrain, si on ne la voit jamais, n'est-ce pas une bénédiction pour tous ceux qui veulent commettre un crime? Si on ne voyait jamais la police sur la route, je crois que tout le monde irait un peu plus vite. On ne voit jamais la police. Il y a un effet dissuasif à voir la police. Cela, c'est important. Votre redéploiement fait en sorte qu'on va la voir moins, en tout cas chez moi. On va la voir beaucoup moins.

    Je vous invite fortement à aller vous-même visiter des postes-frontières. Venez voir sur le terrain, venez voir les « pousseux de pot ». Parlez aux douaniers et je pense que vous en apprendrez beaucoup. Je comprends que vous consultiez vos cadres supérieurs, mais ce qui se passe sur le terrain est si important. C'est la population qui réclame votre présence. Certains ne veulent pas de la police, mais la population réclame votre présence. C'est important.

    Je voudrais avoir votre opinion, comme M. Ménard tout à l'heure. Les douaniers nous ont proposé la création d'une patrouille des frontières, un peu comme celle des États-Unis, la U.S. Border Patrol. Quelle est votre opinion là-dessus? Si vous n'avez pas les ressources nécessaires, encouragez-vous les douaniers ou l'Agence des douanes à créer une patrouille des frontières? Les frontières, c'est important.

Á  +-(1110)  

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Monsieur Paradis, merci de vos questions.

    Permettez-moi de commenter sur le point que vous avez soulevé concernant la visite de postes-frontières. J'ai travaillé au Québec et j'ai visité tous les postes de la Gendarmerie royale au Québec et plusieurs autres postes. En fait, j'ai visité presque tous les postes du pays. Je comprends votre inquiétude, mais notre pays est vaste et notre défi est immense. Quand on sait qu'on ne peut pas être partout, il faut s'assurer d'être plus efficace.

+-

    L'hon. Denis Paradis: On ne vous demande pas d'être partout. On vous demande de rester là où vous êtes. C'est ce qu'on a demandé. Notre pays n'est pas plus grand ou plus petit aujourd'hui qu'il ne le sera demain.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Je comprends. J'aimerais également soulever le fait que notre principal mandat, au Québec, n'est pas d'être un corps policier visible. Ce n'est pas que nous ne voulions pas être visibles, mais il y a d'autres corps policiers qui ont ce mandat. C'est en travaillant en collaboration avec eux que nous serons plus efficaces.

    Vous avez mentionné que la Sûreté du Québec avait de la difficulté à assurer une présence un peu partout. C'est parce qu'elle comprend qu'elle ne peut pas être partout qu'elle travaille avec nous, avec les autres corps policiers et avec les autres agences au sein d'équipes intégrées. En formant des groupes intégrés, on peut être plus efficace. On essaie donc de le faire. Quand je rencontre le directeur général de la Sûreté du Québec, M. Proulx, c'est frustrant parce qu'on cherche des moyens d'améliorer l'efficacité.

    Vous avez soulevé la question de l'agence. Il ne m'appartient pas de décider de cela ou de commenter sur sa structure ou sur ce qui pourra arriver dans l'avenir.

+-

    Le président: Merci, monsieur Paradis.

    Monsieur Marceau, vous avez 10 secondes pour poser une dernière question.

+-

    M. Richard Marceau: Monsieur le commissaire, vous faites souvent allusion à la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. Je l'ai devant moi et je vous en lis trois dispositions. Dites-moi où il n'est pas prévu de rôle pour la ministre responsable devant le Parlement. Je vous lis d'abord l'article 4.

    4. La Gendarmerie peut être employée partout, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur du Canada, où le décide le gouverneur en conseil.

    Voici maintenant le paragraphe 5(1).

    5. (1) Le gouverneur en conseil peut nommer un officier, appelé commissaire de la Gendarmerie royale du Canada, qui, sous la direction du ministre, a pleine autorité sur la Gendarmerie et tout ce qui s'y rapporte.

    Je vous lis maintenant le paragraphe 21(1).

    21. (1) Le gouverneur en conseil peut prendre des règlements:

[...]

b) sur l'organisation, la formation, la conduite, l'exercice des fonctions, la discipline, l'efficacité et la bonne administration de la Gendarmerie;

    Ce n'est pas vrai que c'est simplement vous. Il y a un rôle pour le politique, pour la ministre, qui a des comptes à rendre à la Chambre.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Vous avez raison. Comme je l'ai dit au début, dans ma déclaration, je dois rendre des comptes à la ministre en question.

Á  +-(1115)  

+-

    M. Richard Marceau: Et elle doit rendre des comptes aux parlementaires.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Oui, absolument, mais selon la loi, c'est à moi de gérer l'organisation. Vous avez raison.

+-

    Le président: Nous avons terminé l'étude de ce sujet.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer à la question de M. Breitkreuz au sujet de l'ADN et de l'arriéré de travail. Le sous-commissaire Martin est ici pour nous fournir une réponse à cette question, alors je vais donner à M. Breitkreuz l'occasion de la poser.

    Nous allons d'abord entendre le sous-commissaire Martin.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Monsieur le président, si je puis me permettre, je vais écouter la question, et, si nous avons besoin d'aide, le sous-commissaire Martin interviendra car il est ici pour nous aider.

+-

    Le président: Très bien.

    Monsieur Breitkreuz.

+-

    M. Garry Breitkreuz: Merci beaucoup, monsieur, d'être revenu témoigner devant notre comité. Je l'apprécie.

    À titre de représentants de la population, il nous incombe de nous assurer que les meilleures mesures possible sont adoptées en matière de sécurité publique. Le 24 novembre 2004, vous avez déclaré : « Il n'y a aucun arriéré d'analyses génétiques. »

    Dans son rapport de 2000, le vérificateur général a précisé que « l'arriéré » représente les analyses qui ont été reçues mais qui ne sont pas terminées.  En 2002, la vérificatrice générale a constaté que le nombre de dossiers accumulés fluctuait d'une année à l'autre. Elle a même précisé dans l'un des paragraphes que « Certains experts avaient plus de 50 cas en souffrance, ce qui représente une année de travail. » Ce sont les conclusions de la vérificatrice générale. Vous connaissez fort bien certains des autres chiffres.

    J'ai ici une note de service interne que je vais lire. Il existe une contradiction flagrante entre votre témoignage devant notre comité et cette note de service interne, que je cite :

Bien que nous reconnaissions les efforts déployés par les employés des Programmes de collecte des éléments de preuve et des preuves biologiques du Service de laboratoire judiciaire, le temps est venu de renouveler nos efforts afin de fournir un service plus rapide à nos clients.

À partir d'aujourd'hui, les activités normales du groupe de la collecte des éléments de preuve et des preuves biologiques sont suspendues afin d'apporter des améliorations à la situation actuelle. Qu'est-ce que cela signifie?

Cela signifie que je vais parrainer un nouveau projet, qui s'intitule projet « On Time » ou « À temps », dont l'objectif est de s'attaquer au problème du délai d'exécution des tâches au sein du Programme de collecte des éléments de preuve et de biologie. Frederick Fromm sera le gestionnaire du projet et le gestionnaire du Programme de collecte des éléments de preuve et de biologie offrira un soutien logistique. Je fournirai également des conseils techniques sur les questions scientifiques.

Nous allons nous concentrer sur les résultats du traitement des cas et sur l'achèvement du projet de réingénierie. Les premières étapes consisteront à déterminer les statuts de tous les employés et anciens employés du programme, et à trouver les meilleures façons d'utiliser les ressources et de mettre à profit la diversification des modes de prestation des services afin de ramener la charge de travail à un niveau plus acceptable. Cet exercice de planification stratégique sera complété d'ici le 21 février 2005 et le projet initial sera lancé pour une période de six mois.

Tous les programmes seront examinés en fonction des priorités de nos clients. En outre, les décisions qui portent sur les ressources seront prises en conséquence. Toutes les solutions potentielles seront envisagées. Veuillez vous assurer que les membres de votre personnel sachent que ce projet est la priorité la plus importante parmi les opérations. Il est nécessaire que l'équipe de gestion nous appuie et coopère pleinement pour que ce projet soit un succès.

    Il existe donc évidemment un arriéré. Ma question est la suivante. Lorsque les services de collecte de preuve et de biologie de la GRC ont demandé 1,92 million de dollars pour éliminer l'arriéré d'analyses génétiques, et que ce service a demandé 1,13 million de dollars afin d'embaucher de nouveaux employés à temps plein, ainsi que 787 000 $ pour les opérations et l'entretien, pourquoi ces demandes ont-elles été refusées, monsieur? Je crois que, comme représentants élus des Canadiens, nous méritons une réponse.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Merci beaucoup. Je demanderais à Peter de compléter ma réponse.

    Vous avez soulevé la question des travaux en cours ou des arriérés. Nous pourrions parler sémantique mais comme je l'ai déjà dit à plusieurs occasions—je pense que je ne me contredis pas—il est certain qu'il y a toute une série de dossiers en cours. Si vous voulez parler de dossiers en souffrance, vous pouvez évidemment le faire. Je dis qu'ils sont en cours.

    Ce qui me semble le plus important, c'est ceci. Après la réorganisation, après les vérifications, après l'étude de la vérificatrice générale et des tas d'autres sortes d'études, nous avons consacré beaucoup de temps et d'effort et cette note de service—je ne sais pas qui l'a rédigée, ni la date qu'elle porte—fait état du désir que nous avons de devenir plus efficaces et rentables. Aujourd'hui, pour les grands crimes, nous garantissons et nous livrons un produit dans les 15 jours, ce qui est aussi bien, sinon mieux que partout ailleurs dans le monde.

    Outre ces grands crimes, nous avons négocié une entente avec les services de police pour ce qui est des délais : quand une affaire doit-elle passer en cour? Nous négocions dans chaque cas des délais qui les satisfont. Il y a également la possibilité de porter plainte. S'ils ne sont pas satisfaits, ou s'ils sont insatisfaits du service, ils peuvent se présenter et nous réexaminons les choses parce que c'est ce que nous souhaitons.

    Vous avez parlé de septembre 2005. Avec les changements que nous avons apportés et les méthodes que nous avons modifiées ainsi que la nouvelle technologie, d'ici à cette date, nous aurons sensiblement amélioré notre capacité d'offrir un service de classe internationale. Il y a des gens qui sont venus nous voir d'autres pays et nous ont dit : « nous aimerions bien en être à ce point-là! »

    Je ne veux pas dire que nous sommes entièrement satisfaits. Je veux que nous améliorions encore les choses. Je veux que nous soyons les meilleurs. Nous y travaillons très fort dans le contexte de cette réorganisation et cela n'a certainement pas été facile; cela dérange. Je suis très satisfait du progrès mais je ne peux pas dire que nous ayons encore fait tout ce que nous voulons faire.

    Je demanderais maintenant au sous-commissaire Martin d'ajouter ce qu'il souhaite et qui pourrait vous permettre de mieux comprendre où nous en sommes.

Á  +-(1120)  

+-

    M. Peter Martin (sous commissaire, Services nationaux de police de la Gendarmerie royale du Canada): Merci de cette question.

    À l'origine, les biologistes considéraient les cas du berceau à la tombe. Autrement dit, ils prenaient un cas et faisaient absolument toutes les analyses. Je ne sais pas si c'était à ce moment-là qu'a été rédigé le rapport dont vous avez parlé. Nous n'avons pas de biologistes qui sont là avec 50 dossiers sur leur bureau. Nous avons maintenant un processus en trois étapes pour tout ce qui est des services d'ADN. Il y a d'abord la récupération des éléments de preuve. C'est ensuite confié à un groupe analytique puis il y a la rédaction du rapport et la préparation des documents à présenter en cour ou ailleurs.

    Lorsque nous avons commencé cela, et lorsque les biologistes prenaient les cas du berceau à la tombe, nous pouvions gérer environ 300 cas en même temps. Nous avons maintenant un nouveau processus pour la récupération des éléments de preuve qui a en fait été breveté. Nous l'avons partagé avec d'autres agences du maintien de l'ordre, non seulement au Canada, mais dans le monde entier. Le nombre de cas que nous pouvons maintenant gérer du fait des nouvelles méthodes que nous avons adoptées est passé de 300 à 900. Notre capacité est d'environ 25 000 cas par an.

    Nous avons en outre embauché d'autre personnel. En 2000, nous avions environ 80 biologistes. Nous sommes passés à environ 118 à l'heure actuelle et nous continuons à doter en personnel nos laboratoires partout au pays.

    Quant à ce que nous faisons pour nous préparer à offrir encore de meilleurs services, nous avons adopté la robotique et atteint de nouveaux niveaux d'automatisation que nous avons en fait utilisés au site de la tuerie en série de Picton, ce qui nous a permis d'accroître réellement notre productivité. Nous sommes en train d'implanter cette technologie dans les différentes installations du pays qui font l'analyse génétique. Ce sera fait à peu près en septembre 2005 et cela nous permettra d'améliorer encore nos niveaux de service.

+-

    Le président: Merci.

    Je passerai à M. Cullen, mais avant, monsieur Breitkreuz, avez-vous une date ou un auteur pour le document que vous citiez?

+-

    M. Garry Breitkreuz: La date figurant sur ce document est le 8 février 2005.

+-

    Le président: Et qui en est l'auteur?

+-

    M. Garry Breitkreuz: Je n'ai pas demandé s'il m'autoriserait à... Ce n'est pas lui qui me l'a révélé, de toute façon, c'est le conseiller scientifique en chef des services de laboratoire judiciaires. C'est tout ce que je puis vous dire pour le moment.

+-

    Le président: Merci.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: J'aimerais faire un commentaire sur votre dernier point, si vous m'y autorisez. Toute indication selon laquelle quelqu'un aurait été sanctionné pour avoir témoigné est tellement absurde—et je sais que l'on en a déjà parlé ici. C'est tout à fait faux. Je ne vois donc aucun inconvénient... Je comprends votre position, monsieur, mais...

+-

    M. Garry Breitkreuz: Je veux que vous sachiez qu'il y a des gens à la GRC qui ont l'impression qu'il n'est pas possible de porter plainte. Ils viennent me dire qu'ils s'inquiètent que ces analyses d'ADN ne soient pas faites à temps et ils veulent que j'en parle avec les autorités pour essayer de faire quelque chose, et c'est pourquoi j'en parle.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Je comprends parfaitement et je suis tout à fait d'accord avec vous. Je voulais simplement que l'on sache que quelqu'un qui vient ici ou qui va ailleurs dire quelque chose n'est pas ensuite victime de sanction de la part de la GRC.

+-

    Le président: Monsieur Cullen.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Merci, monsieur le président.

    Merci, commissaire et monsieur Martin.

    Je serai très bref parce que nous avons déjà dépassé l'heure, mais je pense que l'un des problèmes que nous avons est un problème de définition. Si vous alliez dans une usine automobile et qu'il y avait 300 voitures en production, vous pourriez soit dire qu'il y a un retard de 300 voitures ou qu'il y a 300 voitures en construction.

    Je vous félicite, commissaire et monsieur Martin, d'essayer d'accélérer le processus et je suis heureux d'apprendre que les cas urgents sont exécutés en 15 jours.

    J'aurais deux petites questions. Tout d'abord, les délais de la GRC sont-ils plus ou moins longs que ceux du FBI?

    Deuxièmement, si vous permettez, une des questions plus importantes sur laquelle je me suis penchée est le fait qu'un grand nombre d'échantillons d'ADN recueillis pour des infractions graves, des meurtres et des viols n'arrivent pas aussi rapidement que certains, dont moi-même, le souhaiteraient, même si le Code criminel stipule que les juges doivent demander que l'ADN soit envoyé à la GRC. Pourriez-vous nous dire où nous en sommes à ce sujet et comment nous pourrions améliorer la question des échantillons requis par les tribunaux?

Á  +-(1125)  

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Je répondrai à votre dernière question et je demanderai à Peter de vous donner la comparaison avec le FBI.

    Votre question est en effet importante. Jusqu'à maintenant, il y a des cas où les juges et les tribunaux, malheureusement, n'ordonnent pas le prélèvement d'échantillons, même lorsque la loi l'autorise clairement. C'est sérieux et nous avons pris des mesures avec le ministère de la Justice. Il y a une stratégie qui vise à informer les juges et autres membres du pouvoir judiciaire qu'ils doivent demander des échantillons lorsque la loi le permet et que sinon, nous ne pouvons établir une banque de données. Il y a une stratégie très importante et à la GRC, au ministère, au cabinet de la ministre MacLellan et au cabinet du ministre Cotler, nous y travaillons tous. Nous informons les juges; comme vous le savez, ils sont assez indépendants, mais nous réalisons certains progrès.

    Pour ce qui est de la comparaison avec le FBI, j'ai dit que la comparaison avec d'autres organisations semblables dans le monde était très favorable.

    Pourriez-vous être un peu plus précis, Peter?

+-

    M. Peter Martin: Au FBI, la norme est de 60 jours. L'une des différences fondamentales entre les États-Unis et le Canada, c'est que le FBI n'établit pas de priorités pour les cas urgents ou prioritaires. Aux laboratoires scientifiques de la GRC, nous négocions, nous discutons des dossiers avec le corps policier ou l'enquêteur qui nous les envoie afin de déterminer s'il s'agit ou non d'une priorité et s'il faut obtenir les résultats des analyses dans l'urgence.

    Lorsque nous déterminons que le dossier est prioritaire, nous le traitons en 15 jours. Pour les autres cas, les cas d'identification ordinaire, nous demandons en moyenne entre 108 et 120 jours. Le chiffre en question varie selon le nombre de dossiers qui nous sont soumis pendant le mois en question. Mais lorsqu'il s'agit d'une demande prioritaire, nous assurons toujours le traitement en 15 jours.

    Vous avez peut-être remarqué la semaine dernière dans les journaux cet article faisant état d'un échantillon qui avait été transmis au laboratoire qui avait traîné pendant deux ans (il s'agissait d'un dossier de meurtre). Après enquête, nous avons constaté que ces prélèvements effectués par le corps policier enquêteur n'avaient pas été transmis au laboratoire mais avaient traîné dans la salle des pièces à conviction. Ils n'avaient été transmis au laboratoire que le 5 janvier. Malheureusement, ces prélèvements n'avaient pas été considérés comme prioritaires, de sorte qu'ils avaient été ajoutés à la liste de ceux dont le traitement nécessite entre 108 et 120 jours.

+-

    Le président: Merci, monsieur Cullen.

    Monsieur Marceau.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Merci beaucoup d'être ici.

    Une des questions qui ont été soulevées est celle de la capacité de la banque à faire tout le travail que lui donnerait le projet de loi C-13. Vous n'êtes pas sans savoir qu'on a soulevé en comité la question d'augmenter le nombre d'infractions qui pourraient mener au prélèvement d'échantillons biologiques.

    À votre connaissance, est-ce que la banque serait aujourd'hui en mesure d'exécuter dans un temps raisonnable toutes les analyses d'ADN qu'on lui demanderait d'effectuer en vertu des dispositions du projet de loi C-13, et même d'un projet de loi C-13 élargi?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Monsieur Marceau, vous avez soulevé un excellent point.

    La banque de données a maintenant la capacité d'accepter beaucoup plus d'échantillons. Le problème est qu'il faut attendre que la loi ait été modifiée. Tout va dépendre des changements qu'on apportera à la loi. La capacité actuelle de la banque sera-t-elle suffisante quand la loi aura été modifiée? Nous devons attendre que le Parlement prenne sa décision. Quand ce sera fait, nous pourrons déterminer si nous avons une capacité suffisante.

Á  -(1130)  

+-

    M. Richard Marceau: Permettez-moi de reformuler ma question. Je m'excuse si je n'ai pas été clair.

    À l'heure actuelle, vous seriez en mesure de faire le travail qu'exigerait le projet de C-13 s'il était adopté. Est-ce que vos ressources actuelles vous permettraient d'en faire plus que ce que prévoit le projet de loi C-13?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Oui.

+-

    M. Richard Marceau: Merci.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Marceau.

    Monsieur Comartin.

+-

    M. Joe Comartin: Commissaire, je ne sais pas si c'est à vous ou au sous-commissaire à répondre à cette question. Que je sache, il y a également des laboratoires d'analyse en Ontario et au Québec. Sans faire un débat de sémantique, combien de temps leur faut-il respectivement pour transmettre au corps policier chargé de l'enquête les résultats de l'analyse d'un prélèvement?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Je n'ai pas ce renseignement en tête, et je ne sais pas si le sous-commissaire l'a.

+-

    M. Peter Martin: La charge de travail de tous les laboratoires d'analyse canadiens est relativement bien répartie. Mais ce ne sont pas tous les laboratoires qui sont équipés pour analyser les empreintes génétiques. Dans le cas des prélèvements envoyés pour analyse de l'ADN, ceux-ci sont envoyés à Vancouver et à Ottawa. Mais ce ne sont pas tous les laboratoires qui font des analyses d'ADN. D'autres laboratoires sont spécialisés par exemple dans l'analyse d'échantillons de peinture, de cheveux et de fibres, si vous voyez ce que je veux dire. Les laboratoires d'analyse sont spécialisés, ce qui permet un plus grand niveau d'efficacité dans l'ensemble. Cela nous a permis d'améliorer les normes de service pour toutes nos interventions.

+-

    M. Joe Comartin: Monsieur Martin, je ne voulais pas parler des laboratoires fédéraux. À ma connaissance, il y a deux laboratoires provinciaux également. L'Ontario et le Québec ont chacun un laboratoire provincial qui fait des analyses d'ADN. C'est de ces laboratoires-là que je parle. Est-ce que vous savez en combien de temps en moyenne ils peuvent transmettre un résultat?

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Par rapport à nous?

    Si nous n'avons pas ce renseignement sous la main, nous allons vous le faire parvenir.

+-

    M. Peter Martin: Nous le leur avons demandé, mais ils ne veulent pas nous le dire.

+-

    M. Joe Comartin: Je vois, merci.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Cela signifie probablement quelque chose que j'ignore.

+-

    M. Joe Comartin: J'en tirerais personnellement une ou deux conclusions.

    En deuxième lieu, je ne vous comprends pas très bien lorsque vous parlez de négocier la date de remise des résultats d'une analyse. Qui détermine s'il s'agit d'un dossier urgent? Qui décide en dernier ressort?

+-

    M. Peter Martin: C'est le corps policier, c'est l'enquêteur qui envoie le prélèvement au laboratoire.

    Évidemment, il faut également prendre cela avec un certain bon sens. Si quelqu'un nous envoie un prélèvement en priorité, et s'il ne s'agit que d'un cas de cambriolage, il est évident que nous pourrions nous poser des questions. Mais il est clair que dans un cas de meurtre, lorsqu'il s'agit d'un crime perpétré avec violence, d'un cas d'agression avec voies de fait, il s'agirait en toute état de cause de cas prioritaires qui seraient traités de façon correspondante.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Puisqu'il n'y a plus de questions, je voudrais vous remercier bien sincèrement, commissaire, et vous aussi, messieurs Bourduas et Martin, pour votre témoignage devant nous. Nous vous savons gré d'avoir bien voulu rester un peu plus longtemps. Merci beaucoup.

+-

    Comm. Giuliano Zaccardelli: Merci beaucoup, monsieur le président. Merci.

-

    Le président: Merci à vous tous.

    La séance est levée.