CC38 Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité législatif chargé du projet de loi C-38
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 2 juin 2005
¹ | 1530 |
Le président (M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.)) |
L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.) |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Le président |
Le président |
Le président |
Mme Margaret Somerville (professeur de droit Samuel Gale, Centre de médecine McGill, éthiques et droit) |
¹ | 1535 |
¹ | 1540 |
Le président |
Mme Margaret Somerville |
Le président |
M. Vic Toews (Provencher, PCC) |
¹ | 1545 |
Mme Margaret Somerville |
M. Vic Toews |
Mme Margaret Somerville |
M. Vic Toews |
Le président |
M. Réal Ménard (Hochelaga, BQ) |
¹ | 1550 |
Mme Margaret Somerville |
M. Réal Ménard |
Le président |
M. Réal Ménard |
Le président |
M. Bill Siksay (Burnaby—Douglas, NPD) |
Mme Margaret Somerville |
¹ | 1555 |
M. Bill Siksay |
Mme Margaret Somerville |
M. Bill Siksay |
Mme Margaret Somerville |
M. Bill Siksay |
Mme Margaret Somerville |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin |
º | 1600 |
Mme Margaret Somerville |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Mme Margaret Somerville |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Mme Margaret Somerville |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Mme Margaret Somerville |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Le président |
Mme Gwendolyn Landolt (vice-présidente nationale, REAL Women of Canada) |
º | 1605 |
º | 1610 |
Le président |
M. Vic Toews |
M. Réal Ménard |
M. Vic Toews |
Mme Gwendolyn Landolt |
º | 1615 |
Le président |
Mme Gwendolyn Landolt |
Le président |
Mme Gwendolyn Landolt |
Le président |
Mme Gwendolyn Landolt |
Le président |
M. Abdul Hai Patel (coordonnateur, Islamic Council of Imams-Canada) |
º | 1620 |
Le président |
M. James Lebo (membre, Comité de législation et réforme du droit, Association du Barreau canadien) |
º | 1625 |
º | 1630 |
M. Sean Foreman (président, Conférence sur l'orientation et l'identité sexuelles, Association du Barreau canadien) |
Le président |
M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC) |
º | 1635 |
M. James Lebo |
M. Rob Moore |
M. James Lebo |
M. Rob Moore |
M. James Lebo |
M. Sean Foreman |
º | 1640 |
Le président |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ) |
M. Abdul Hai Patel |
M. Richard Marceau |
M. Abdul Hai Patel |
M. Richard Marceau |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Richard Marceau |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Richard Marceau |
º | 1645 |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Richard Marceau |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Richard Marceau |
M. James Lebo |
Le président |
M. Bill Siksay |
º | 1650 |
M. Abdul Hai Patel |
M. Bill Siksay |
M. Abdul Hai Patel |
M. Bill Siksay |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Bill Siksay |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Bill Siksay |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Bill Siksay |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Bill Siksay |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Bill Siksay |
M. Sean Foreman |
º | 1655 |
M. Bill Siksay |
Le président |
M. Michael Savage (Dartmouth—Cole Harbour, Lib.) |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Michael Savage |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Michael Savage |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Michael Savage |
Mme Gwendolyn Landolt |
» | 1700 |
M. Michael Savage |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Michael Savage |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Michael Savage |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Michael Savage |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Michael Savage |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Michael Savage |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Michael Savage |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Michael Savage |
Le président |
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC) |
M. James Lebo |
» | 1705 |
M. Brian Jean |
M. James Lebo |
M. Brian Jean |
M. James Lebo |
M. Brian Jean |
M. James Lebo |
M. Brian Jean |
M. Sean Foreman |
M. Brian Jean |
M. Sean Foreman |
M. Brian Jean |
» | 1710 |
M. James Lebo |
M. Sean Foreman |
M. Brian Jean |
Le président |
M. Brian Jean |
Le président |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) |
M. James Lebo |
L'hon. Don Boudria |
» | 1715 |
M. James Lebo |
L'hon. Don Boudria |
M. Sean Foreman |
L'hon. Don Boudria |
M. Sean Foreman |
L'hon. Don Boudria |
Le président |
L'hon. Don Boudria |
Mme Gwendolyn Landolt |
L'hon. Don Boudria |
Mme Gwendolyn Landolt |
L'hon. Don Boudria |
Mme Gwendolyn Landolt |
L'hon. Don Boudria |
Mme Gwendolyn Landolt |
L'hon. Don Boudria |
Mme Gwendolyn Landolt |
L'hon. Don Boudria |
Mme Gwendolyn Landolt |
L'hon. Don Boudria |
Mme Diane Watts (recherchiste, REAL Women of Canada) |
Mme Gwendolyn Landolt |
Le président |
Mme Diane Watts |
Mme Gwendolyn Landolt |
Mme Diane Watts |
L'hon. Don Boudria |
Mme Diane Watts |
Mme Gwendolyn Landolt |
L'hon. Don Boudria |
Mme Gwendolyn Landolt |
L'hon. Don Boudria |
Le président |
M. Réal Ménard |
» | 1720 |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Réal Ménard |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Réal Ménard |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Réal Ménard |
Mme Diane Watts |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Réal Ménard |
Le président |
M. Réal Ménard |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Le président |
M. Gord Brown (Leeds—Grenville, PCC) |
M. James Lebo |
M. Gord Brown |
» | 1725 |
Mme Gwendolyn Landolt |
M. Gord Brown |
M. Abdul Hai Patel |
M. Gord Brown |
M. Abdul Hai Patel |
M. Gord Brown |
M. Abdul Hai Patel |
M. Gord Brown |
M. James Lebo |
M. Gord Brown |
Mme Gwendolyn Landolt |
» | 1730 |
M. Gord Brown |
Le président |
CANADA
Comité législatif chargé du projet de loi C-38 |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 2 juin 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1530)
[Français]
Le président (M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.)): Bonjour. Bienvenue au Comité législatif chargé du projet de loi C-38.
[Traduction]
Bon après-midi. Bienvenue au Comité législatif chargé du projet de loi C-38.
Mesdames et messieurs, avant d'aller plus loin, nous avons une petite affaire administrative à régler tant que nous avons le quorum. Vous conviendrez avec moi que c'est quelque chose de très important, puisqu'il s'agit d'adopter notre budget. Vous devriez l'avoir en main.
Il arrive. Il sort tout juste des presses.
[Français]
C'est l'occasion que nous avons de confirmer le budget afin qu'il soit présenté.
[Traduction]
Pour commencer, vous vous souviendrez que lorsque la Chambre a confié son mandat au comité, elle nous a attribué automatiquement 50 000 $. Ce budget modifie le montant initial de 50 000 $ pour ce nouveau montant.
L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.): Est-ce en sus?
Le président: Ce n'est pas en sus, le nouveau montant englobe le montant initial de 50 000 $.
Ai-je une motion?
L'hon. Paul Harold Macklin: Je la propose.
Le président: Nous n'avons pas besoin de comotionnaire, mais M. Ménard souhaite appuyer la motion de toute façon, de même que M. Siksay.
(La motion est adoptée. [Voir le Procès-verbal])
Le président: Merci.
Bienvenue aux témoins. Nous apprécions que vous soyez venus nous rencontrer aujourd'hui à si bref préavis. Nous avons décidé au début de la semaine comment nous allions procéder et nous n'avons donc pas eu la possibilité de vous inviter des semaines ou des mois à l'avance, mais nous apprécions que vous vous soyez libérés pour venir aujourd'hui.
Nous avons aujourd'hui un cas spécial. L'un de nos témoins doit absolument partir tôt et je suggère -- et j'apprécierais d'avoir le consentement unanime pour cela -- de permettre à ce témoin, Mme Somerville, du Centre for Medicine, Ethics and Law de l'université McGill, de nous faire son exposé de 10 minutes et puis, arbitrairement, j'accorderai cinq minutes à chaque parti, à partager entre les représentants de chaque parti, pour poser des questions à Mme Somerville ou formuler des commentaires. Nous reviendrons ensuite à notre mode de fonctionnement normal, soit 10 minutes pour les trois témoins restants et les tours de questions habituels.
Ai-je le consentement unanime?
Des voix: D'accord.
[Français]
Le président: Merci.
Bonjour, madame Somerville.
[Traduction]
Ceci est exceptionnel, mais nous allons vous accorder 10 minutes et nous aurons ensuite une période de questions de 20 minutes. Ensuite, dès 16 h 15, dans ces environs, si vous êtes obligée de partir, vous pourrez le faire.
Comme vous le savez bien—nous vous en avons informée—vous disposez de 10 minutes. Si vous avez apporté un mémoire ou document bilingue, il aura été distribué. S'il n'était pas dans les deux langues officielles, le comité le fera traduire avant de le distribuer à tous les membres.
Donc, vous avez 10 minutes, et nous aurons ensuite une période de questions et de commentaires.
Mme Margaret Somerville (professeur de droit Samuel Gale, Centre de médecine McGill, éthiques et droit): Merci, monsieur le président. Je remercie les membres du comité de la courtoisie qu'ils m'accordent.
Je dois admettre, ayant lu le journal ce matin, que je me suis demandée s'il valait la peine de venir vous parler, mais j'ai décidé que oui, ne serait-ce que pour faire quelques mises au point qui s'imposent.
Je perçois tout ce débat sur le mariage homosexuel comme un terrible conflit de droits. J'éprouve une sympathie extrême pour la communauté gaie et son désir d'une reconnaissance publique de la stigmatisation, de la discrimination et des méfaits dont elle a été victime et celui de pouvoir faire reconnaître publiquement l'amour et l'engagement à l'intérieur de leurs couples. Personnellement, je ne vois aucun problème avec cela.
Mon problème, c'est que je vois aussi un autre groupe très important qui n'a pas voix au chapitre dans ces débats car ce sont des enfants. Le travail que j'ai effectué au cours des deux dernières années portait sur l'effet qu'exercerait la légalisation du mariage homosexuel sur les enfants. Ce n'est pas seulement ma préoccupation première, c'est ma seule préoccupation dans cette affaire.
J'ai écrit précédemment que je considère que les enfants ont le droit fondamental à une mère et à un père—de préférence leurs propres parents biologiques. Ils ont le droit de savoir qui sont leurs géniteurs, dans toute la mesure du possible, et—à moins que l'on puisse justifier autre chose dans l'intérêt supérieur de cet enfant—d'être élevé au sein de cette famille biologique. J'ai écrit un long article à ce sujet. Je ne vais pas en traiter aujourd'hui.
Mes recherches les plus récentes, que je viens de présenter, n'ont pas encore été publiées. Il s'agit de la combinaison du mariage homosexuel et des nouvelles techniques de reproduction, un domaine sur lequel j'ai fait beaucoup de travail depuis leur arrivée sur la scène en 1980.
Il se trouve que je suis Australienne. Les Australiens ont été les premiers à mettre au point ces techniques, comme vous le savez probablement. J'ai été invitée à revenir travailler en Australie tout au début de ces techniques de reproduction. Comme Alan Trounson, l'un des fondateurs me l'a dit, en se grattant la tête : « Ma chère Margo, nous ne pensions pas avoir un problème jusqu'à ce qu'on te fasse revenir ».
J'aimerais esquisser quelques problèmes pour vous aujourd'hui, si vous le permettez. En effet, la transformation du mariage transforme la condition parentale. D'ailleurs, le projet de loi C-38 le reconnaît expressément puisqu'il déconnecte la condition parentale de la fonction biologique—le parent naturel, l'enfant naturel—et substitue la parenté légale à la parenté naturelle.
Ce changement fait une énorme différence dans toute une série de domaines. Premièrement, il fait une grosse différence pour ce qui est des normes, des symboles et valeurs sociétaux. Il fait également une différence pour les droits des enfants—par exemple, celui de savoir qui sont leurs parents biologiques et d'être élevés par eux. Encore plus important, à mon sens, je crois que des technologies seront prochainement disponibles qui susciteront des questions extraordinairement délicates et difficiles du point de vue de leur emploi dans un contexte de mariage homosexuel.
Ce que j'aimerais faire, c'est tirer quelques leçons des nouvelles techniques de reproduction. On a vu apparaître, au cours des neuf derniers mois, je dirais, un mouvement qui gagne de l'ampleur dans le monde, groupant ceux que l'on appelle des « adultes conçus par donneurs », donc des gens conçus au moyen des techniques de reproduction. Ils sont tous âgés entre 20 et 25 ans et ont des sites Internet sur lesquels ils se contactent les uns les autres. L'un s'appelle « Tangled Webs ». Ce que ces enfants font valoir presque unanimement, c'est que leurs besoins, leur bien-être et leur développement psychologique, même, ont été ignorés.
Je pense que c'est très largement vrai, comme en témoigne la littérature. Nous nous sommes beaucoup demandés, vis-à-vis des nouvelles techniques de reproduction, si elles nuiraient physiquement aux enfants. Ce que nous avons négligé de faire, c'est de nous demander ce que ces enfants ressentiraient. Comme une jeune femme l'a dit, du nom de Narelle Grech : « Je regarde dans le miroir et j'ai l'impression que la moitié de moi manque. Il me manque la moitié de mon essence biologique ». Elle est issue d'un don de sperme.
Je pense que c'est l'une des choses auxquelles il nous faut réfléchir, car une conséquence probable du mariage homosexuel sera que ces couples de même sexe voudront recourir aux nouvelles techniques de reproduction.
¹ (1535)
Vous pouvez visiter un site Internet appelé www.mannotincluded.com. Il a été récemment créé au Royaume-Uni pour contourner la nouvelle interdiction britannique de divulgation de l'identité des donneurs de gamètes, c'est-à-dire de sperme ou d'ovules. Ce site garantit que l'enfant ne pourra pas découvrir qui sont les parents. Ce site annonce que 40 p. 100 de ses clients sont des lesbiennes. C'est un gros problème dans le contexte du droit des enfants à connaître leur identité génétique.
Au Canada, l'approche du droit des enfants à connaître leur identité génétique est très incohérente. Ceux d'entre vous qui lisent le Globe and Mail ou viennent de l'Ontario connaissent probablement l'énorme controverse qui entoure la modification de la Loi sur l'adoption. L'existence de ce droit des enfants adoptés est un sujet chaud dans tout le pays. La même interrogation s'applique aux enfants issus de donneurs. Le problème est que la Loi sur la procréation assistée érige en acte criminel la divulgation de cette identité sans le consentement du donneur. Cela signifie que l'enfant n'a pas le droit automatique de savoir qui sont ses parents.
Il se profile quelque chose d'encore plus énorme. C'est imminent. Il s'agit de la possibilité de fabriquer des enfants non à partir d'un spermatozoïde et d'un ovule. Vous avez tous entendu parler du clonage, qui est une réplication asexuée par opposition à une reproduction sexuelle. D'autres possibilités futures sont de fabriquer un bébé à partir de deux ovules ou de deux spermatozoïdes. L'autre possibilité, qui vient d'être annoncée, est de fabriquer des spermatozoïdes et des ovules à partir de cellules souches adultes. Cela ouvre la possibilité à des couples de même sexe d'avoir leur propre enfant partagé—la moitié de la génétique venant d'un membre, homme ou femme, et l'autre moitié de l'autre. Ou bien vous pourriez avoir des parents multiples.
Déjà, un bébé est né aux États-Unis qui a trois parents génétiques. J'étais récemment à une conférence sur la biosécurité où l'on parlait de ce que l'on appelle la biologie synthétique, où vous partez des gènes pour construire un organisme vivant. Nous ne pourrions fabriquer des enfants de cette manière aujourd'hui, mais nous faisons beaucoup de choses avec ces techniques aujourd'hui que nous pensions impossibles auparavant.
C'est important car le droit de se marier est un droit composite. Ce n'est pas un droit unique. C'est le droit de se marier et de fonder une famille. Donc, si c'est une discrimination illégale d'empêcher des couples homosexuels de se marier, je fais valoir que c'est de la discrimination illégale que de les empêcher d'avoir un enfant de la seule manière possible pour eux. Cela pose la question de savoir si l'interdiction de ces technologies de reproduction—par exemple, dans la Loi sur la procréation assistée—ne représente pas aussi une discrimination illicite. On m'a dit—et je n'en ai pas confirmation—que les groupes militants pour le mariage homosexuel envisagent de contester la Loi sur la procréation assistée pour voir si elle serait jugée être de la discrimination illicite.
Je vous soumets qu'il nous faut réfléchir à de nouveaux droits pour les enfants. Premièrement, il y a le droit d'être issu de l'union d'un spermatozoïde naturel provenant d'un homme identifié et d'un ovule naturel provenant d'une femme identifiée. Deuxièmement, il y a le droit de connaître l'identité de ses parents biologiques. Troisièmement, il y a le droit d'être élevé par ses parents biologiques, c'est-à-dire d'avoir et un père et une mère, à moins qu'il y ait de bonnes raisons contraires dans l'intérêt supérieur de l'enfant.
Le problème du mariage homosexuel est qu'il enfreint tous ces droits de l'enfant. Nous avons donc ici un conflit des droits entre—
¹ (1540)
Le président: Un instant.
Mme Margaret Somerville: —rendre justice aux couples de même sexe... Et je pense réellement qu'il faut le faire. Mais ce qui me paraître être une erreur, c'est de le faire par la modification du mariage.
La raison pour laquelle je privilégierais les droits de l'enfant par rapport à ceux du couple de même sexe réside dans un ensemble de principes éthiques. En premier lieu figure le consentement éclairé. L'enfant est le seul qui ne donne pas de consentement. Un autre principe est de favoriser la personne la plus vulnérable. Je pense que dans cette circonstance, les enfants sont les plus vulnérables.
L'expérimentation sur enfant. Il s'agit là d'une expérience sociale sans précédent pendant des milliers d'années de pratique uniforme dans tous les types de sociétés.
Le hasard diffère moralement du choix.
La société a l'obligation de ne pas créer des orphelins génétiques, précisément ce que nous ferions. Je pense qu'il faut reconnaître un droit à l'origine génétique naturelle et à l'identité génétique. Nous devons reconnaître tout l'éventail des préjudices pouvant être causés, de même que les problèmes moraux, et nous devons être mus prioritairement par un principe appelé la non-maléficience—prioritairement, ne pas nuire.
En conclusion, les enfants et leurs descendants qui ne connaissent pas leur origine génétique sont privés du sentiment d'appartenance à une chaîne d'êtres humains reliant le passé, le présent et le futur par laquelle ils peuvent retracer la transmission de la vie jusqu'à eux au fil des générations. À notre connaissance, les humains sont les seuls animaux pour qui le sens de l'appartenance génétique fait partie intégrante de l'être. Nous connaissons les effets de la suppression de cette relation—par le biais des techniques de reproduction et de l'adoption—et savons qu'elle est néfaste pour les enfants, les parents biologiques, les familles et la société.
Le mariage homosexuel menace le droit des enfants de connaître et de ressentir leur patrimoine génétique dans leur vie et annule la reconnaissance par la société de son importance pour eux, leur famille élargie et la société elle-même.
Enfin, le mariage homosexuel ouvre également la question plus large et entièrement nouvelle, soit ce qu'exige moralement le respect du mode de transmission de la vie humaine.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
Nous passons maintenant, conformément à nos arrangements spéciaux, à des tours de questions et commentaires de cinq minutes pour chaque parti, et nous commençons avec le Parti conservateur.
M. Vic Toews (Provencher, PCC): Merci, madame. J'apprécie vos propos et c'est une optique que nous n'avons certainement pas encore entendue jusqu'à présent. De fait, tous les témoignages que nous entendons, surtout ceux en faveur de la notion de mariage homosexuel, affirment qu'il n'en résulterait pas de dommage démontrable pour les enfants. Je trouve votre témoignage très parlant, en ce sens que parfois nous tendons à considérer la question selon notre optique d'adulte, en fonction de notre droit personnel de choisir, sans tenir compte des conséquences de ces choix sur les autres générations.
Je tiens à vous remercier d'avoir mis cela en lumière, madame, car c'est un élément de débat qui a brillé par son absence dans toute cette ruée—et je dis bien « ruée »—pour faire adopter ce projet de loi le plus vite possible, comme si un été allait faire une grande différence dans le cours du millénaire ou plus depuis que cette définition du mariage existe. Mais, il semble bien que le gouvernement y soit résolu.
Je sais qu'un certain nombre d'études ont effectivement été menées dans le monde sur les effets sur les enfants, soit les enfants adoptifs d'un couple hétérosexuel, mais aussi les enfants dans une situation de mariage homosexuel.
Avez-vous connaissance de ces études qui ont pu être effectuées aux Pays-Bas, en Belgique ou aux États-Unis?
¹ (1545)
Mme Margaret Somerville: J'en ai lus des comptes rendus; je ne suis pas experte des effets sur les enfants. Mais du fait que j'ai mené ces recherches récentes, des gens en ont entendu parlé et m'ont écrit.
Voici une lettre. J'ai la permission d'utiliser son nom. Elle provient en fait d'une avocate de Vancouver qui m'a entendu lors d'une conférence il y a quelques semaines et qui m'a écrit et me dit qu'elle est elle-même adoptée. Voici le début de sa lettre :
Je suis heureuse que vous ayez pu détecter la souffrance qui m'anime. Les adoptés n'ont généralement pas la permission d'exprimer ces émotions [concernant leur ignorance de l'identité de leurs parents biologiques et de leur perte de contact avec eux] et sont perçus comme ingrats, et c'est une façon de les réduire au silence (ce qui n'est pas faire une faveur aux adultes d'aujourd'hui conçus par donneur). |
Ensuite une jeune femme australienne m'a écrit :
Il est naïf de dire et de donner à entendre que tout le monde se fera une raison de cette situation |
—elle parle du don de gamètes—
Qu'en est-il de la personne qui en est issue et qui n'a pas son mot à dire sur cette séparation intentionnelle d'avec sa mère biologique et sa famille maternelle?? |
Elle poursuit avec toutes sortes d'autres considérations, et elle indique :
De petites bribes d'information n'autorisant pas l'identification ne sont pas un substitut pour la personne en chair et en os : la famille de cette personne!! Vous n'encouragez pas seulement les gens à séparer intentionnellement les enfants de leur famille, vous serez la cause obligeant des gens à mettre en question leur identité et nul sur terre ne devrait jamais être obligé de faire cela. Comment quelqu'un ose-t-il à enlever à autrui la liberté de se connaître soi-même! C'est l'une des expériences les plus déshumanisantes que j'ai jamais connues de toute ma vie. De regarder dans le miroir jour après jour et de s'interroger, c'est l'un des pires sentiments. |
M. Vic Toews: Merci, madame.
Au cours de la dernière législature, lors du débat sur le projet de loi C-250 et les écrits haineux, nous avons entendu un membre néo-démocrate du comité dire que les hommes n'avaient aucune utilité, puisqu'il suffit d'une poire à jus pour faire le travail. C'était là ses paroles.
Que pensez-vous des propos de ce député néo-démocrate? Je pense que vous seriez quelque peu préoccupé par cette négation du rôle masculin dans la reproduction.
Mme Margaret Somerville: Je le suis, mais j'ajouterais quelque chose à cela.
Nous avons aujourd'hui les résultats de nouvelles recherches génétiques extraordinaires qui montrent que nous sommes nés avec des gènes qui induisent certains comportements. Cette recherche a été faite sur le comportement nourricier chez les rats, il se trouve, mais il n'y aucune raison de penser que nous ne nous comportons pas occasionnellement comme un rat.
Nous savons aujourd'hui à ce sujet qu'il faut un certain type de contact pour que ce gène soit imprégné, c'est-à-dire activé. S'il n'est pas imprégné à l'intérieur d'un très court laps de temps, il devient inactif à vie. Mon hypothèse est qu'il existe des gènes chez les humains, dont certains sont activés par le comportement maternel et d'autres par le comportement paternel vis-à-vis du bébé. Il y a complémentarité dans le rôle parental des deux sexes. Il existe des études et des rapports de recherche à ce sujet.
Voilà l'une des choses qui me préoccupent.
M. Vic Toews: Merci.
Le président: Merci. Vos cinq minutes sont écoulées.
Nous allons passer au Bloc Québécois.
[Français]
Monsieur Réal Ménard.
M. Réal Ménard (Hochelaga, BQ): Bonjour, madame Somerville. C'est un plaisir de vous retrouver. Je trouve que nous n'avons pas suffisamment l'occasion de nous voir. Il faudrait que j'aille à l'Université McGill, un de ces jours, pour luncher avec vous.
J'ai fait partie du comité chargé de revoir la Loi sur les techniques de reproduction humaine et de manipulation génétique. Il y a eu trois projets de loi. Le premier remonte à l'époque d'Allan Rock. Il y en a eu un autre ensuite quand Mme MacLellan était au ministère de la Justice. Le comité avait alors choisi de ne pas permettre de divulguer l'identité des donneurs. Les avis étaient partagés: certains témoins voulaient que ce soit permis, et d'autres s'y opposaient. Finalement, nous nous sommes ralliés à l'argument selon lequel une personne faisant un don d'ovules ou de sperme ne le fait pas pour élever une famille: il s'agit d'un geste de philanthropie, de solidarité sociale. En effet, comme vous le savez sans doute, un couple sur cinq au Canada est aux prises avec un problème d'infertilité.
En outre, sur le plan légal, on craignait, par exemple, qu'en permettant la divulgation des origines, un jeune de 18 ou 19 ans entame des procédures devant les tribunaux pour réclamer une pension alimentaire. C'était le dilemme devant lequel se trouvait le gouvernement au moment de l'étude de ce projet de loi.
Or, à mon avis, vos arguments ne cadrent pas avec le débat actuel. Aujourd'hui, il faut se demander si deux personnes de même sexe peuvent s'unir et décider d'organiser leur vie autour du mariage en tant que relation amoureuse. J'aimerais que vous déposiez des études, s'il en existe, qui remettent en cause les habiletés parentales de ces personnes.
Le droit de connaître ses origines est une question dont nous avons débattu quand est venu le temps d'adopter le projet de loi C-13, anciennement le projet de loi C-56. Il était question de techniques de reproduction. Il est possible que le législateur ait fait une erreur en ne permettant pas qu'on divulgue l'identité des donneurs, mais il en a été décidé autrement. En outre, je suis d'avis que cela n'a rien à voir avec le projet de loi C-38.
En ce qui concerne les habiletés parentales, vous savez peut-être que Mme Danielle Julien, de l'UQAM, une collègue que vous tenez sans doute en très haute estime, a étudié aux États-Unis et au Canada des groupes d'enfants élevés par des couples homosexuels. Or, rien n'indique qu'un enfant élevé par une famille homosexuelle devient homosexuel. Vous laissez entendre que l'enfant n'est pas au coeur des préoccupations de ce projet de loi, et je comprends mal votre point de vue. Tout comme vous, je serais très inquiet qu'un enfant grandisse dans un monde où il n'y aurait que des hommes ou que des femmes, nonobstant la question de l'homosexualité. À mon avis, les deux types de modèles sont nécessaires. Je saisis mal le lien que vous établissez entre ce projet de loi et la possibilité que les enfants soient négligés.
Je vous cède maintenant la parole.
¹ (1550)
[Traduction]
Mme Margaret Somerville: Encore une fois, je ne prétends pas être experte pour ce qui est de la meilleure situation pour les enfants. Non, c'est faux. Je ne prétends pas avoir toute la recherche à ma portée à ce sujet.
Ce que je sais, en revanche, c'est que dans certaines au moins, et probablement la majorité, des études qui comparaient les enfants élevés dans une famille homosexuelle et une famille hétérosexuelle, le groupe de comparaison était des enfants vivant avec des mères célibataires. Je ne pense pas que ce soit une comparaison légitime. Je pense qu'il faut comparer les enfants d'une famille intacte, composée d'un père et d'une mère, même si ce n'est pas toujours possible. Ce dont nous parlons ici, avec cette loi, c'est de la situation standard. Bien sûr, il y aura toujours des exceptions, qu'il s'agisse de couples homosexuels, de parents célibataires, d'enfants dont les parents décèdent, tout ce que vous voudrez.
Mais ce que fait ce projet de loi, c'est modifier radicalement la présomption de base. La présomption de base, à l'heure actuelle, où le mariage unit des couples hétérosexuels, c'est que les enfants ont le droit à une mère et à un père. Non seulement cela, mais ce droit est le résultat naturel de la connexion biologique. La raison même pour laquelle il faut une loi légitimant l'adoption, c'est qu'en l'absence du lien biologique, il faut lui substituer un lien légal. C'est exactement pourquoi cette loi représente un changement radical dans la nature de la parenté.
À l'heure actuelle, on peut arguer que la parenté résulte du lien biologique. Les lois relatives au mariage reconnaissent ensuite ce lien biologique mais ne le créent pas. Avec le projet de loi C-38, on élimine le lien biologique. C'est la raison d'être des modifications. Ensuite, il faut une loi pour rétablir un lien légal. C'est pourquoi on introduit la notion de parent légal, en remplacement de parent naturel. Cela signifie que ce que la loi peut accorder, la loi peut le reprendre ou le modifier. Ce n'est certainement pas une reconnaissance légale aussi forte que l'autre.
[Français]
M. Réal Ménard: Est-ce qu'il me reste du temps, monsieur le président? Non? Alors, disons qu'il s'agit là, de part et d'autre, d'une déception.
J'irai luncher à McGill; ce sera un plaisir.
Le président: Si Mme Somerville reste plus longtemps, vous aurez peut-être l'occasion de poser d'autres questions.
M. Réal Ménard: J'en serais ravi.
[Traduction]
Le président: Nous allons passer au Nouveau Parti démocratique.
Monsieur Siksay, cinq minutes, monsieur.
M. Bill Siksay (Burnaby—Douglas, NPD): Merci, monsieur le président.
Merci, madame Somerville, d'être venue nous rencontrer à bref préavis.
Ayant entendu votre réponse à M. Toews et M. Ménard, je m'inquiète de votre manque de familiarité avec les recherches sur les adultes conçus par donneur et l'expérience faite à cet égard. Lorsque nous vous demandons ces études, vous nous renvoyez à des sites Internet et citez des lettres anecdotiques que vous avez reçues. J'aimerais que vous nous en disiez plus à ce sujet.
Il me semble que c'est là un volet plutôt crucial de la théorie que vous présentez aujourd'hui. Mais vous dites ne pas être familière des recherches qui ont effectivement étudié cet aspect et qui pourraient donner des indications plus claires que ce q'on peut lire sur un site Internet quelconque ou trouver dans des lettres anecdotiques que vous ont adressées des personnes qui vous ont entendu prononcer une conférence quelque part.
Mme Margaret Somerville: Je n'ai pas dit qu'elles ne m'étaient pas familières; j'ai dit que je n'étais pas experte, ce qui est différent. Je ne revendique pas l'expertise. Mais je connais la littérature, l'ayant lue.
Pour ce qui est des sites Internet et les études sur des adultes conçus par donneur, cela est extrêmement récent. À ma connaissance, on n'a commencé à disposer des résultats qu'il y a neuf ou 12 mois. J'en ai maintenant accumulé un épais dossier sur mon bureau car c'est devenu mon plus récent projet de recherche et il n'est même pas encore terminé. Il y a quelques petites enquêtes d'opinion. Par exemple, dans une enquête auprès d'adultes conçus par donneur—et c'est très remarquable pour un sondage—la totalité des répondants ont dit que oui, ils estimaient avoir le droit de connaître leur origine biologique. On commence donc à posséder quelques études de petite envergure.
Il y a une abondante littérature sur l'insémination artificielle. Le don d'ovule est plus rare et beaucoup plus récent, et l'on a donc pas beaucoup de recherches là-dessus. J'apporte ce rectificatif.
L'autre considération, c'est que votre prémisse de base et votre placement du fardeau de la preuve posent problème. Vous me demandez de prouver que cela va nuire aux enfants, va poser un problème. Je pense plutôt que ceux qui veulent modifier la loi pour dire que les enfants n'ont pas besoin d'une mère et d'un père doivent, eux, prouver que ce n'est pas néfaste pour les enfants, alors que tout ce que nous connaissons jusqu'à présent tend à indiquer le contraire. Tout ce que nous savons sur les enfants est que ces derniers veulent savoir qui est leur mère et leur père, et non seulement ces derniers mais aussi la toile biologique plus large dans laquelle ils s'inscrivent. Il suffit de voir les adultes qui veulent remonter aux origines et voir le sol que foulait leur arrière-arrière-arrière-grand-mère il y a des générations de cela. C'est le même besoin.
¹ (1555)
M. Bill Siksay: J'ai quelque difficulté avec cela. Il me semble que les enfants veulent savoir qu'ils grandissent dans une famille, dans un cercle de personnes qui les aiment et les défendent et feront tout pour eux. Je pense que c'est cela qui importe, comme cadre familial.
L'une des choses que vous avez dites—
Mme Margaret Somerville: Puis-je juste dire—
M. Bill Siksay: Vous aurez l'occasion dans une seconde.
J'aimerais revenir sur une autre chose que vous avez dite, à savoir que l'on transformerait le concept de parenté, passant de la parenté biologique à la parenté légale, et vous avez mentionné les valeurs. J'aimerais savoir quels sont les changements dans les valeurs entourant l'état de parent que vous avez perçus? Y a-t-il une différence entre les valeurs qu'un couple gai et lesbien apporte à l'état de parent et celles qu'apporte un couple hétérosexuel? Avez-vous vu quoi que ce soit qui indique que des valeurs différentes seraient à l'oeuvre ici?
Mme Margaret Somerville: Pour répondre en premier à votre dernière question, je pense que les valeurs de l'institution sont transformées, car les valeurs actuelles en rapport avec le mariage hétérosexuel disent que les enfants ont droit à une mère et à un père, et que c'est là la valeur fondamentale, alors que vous dites que l'enfant n'a aucun droit. C'est donc une négation de cette valeur voulant que l'enfant possède ce droit.
Vous considérez cela selon la perspective de l'adulte et, effectivement, de ce point de vue, il n'y a probablement pas de différence. Je me place moi dans la perspective de l'enfant, et je pense que dans la perspective de l'enfant c'est un changement radical.
M. Bill Siksay: Vous dites donc que les gais et lesbiennes n'apportent pas les mêmes valeurs à l'état de parents que les hétérosexuels?
Mme Margaret Somerville: Non, ce que je dis c'est que l'enfant dans une relation homosexuelle n'a pas le même accès à ses parents biologiques, à moins que l'on ait recours à ces nouvelles techniques de reproduction, qui me paraissent être un mal pour d'autres raisons. L'enfant ne connaît pas la même expérience ou n'a pas le même accès à une mère et à un père et à ses propres parents biologiques.
Pour ce qui est de connaître l'identité des parents, rien que d'un point de vue très pratique, celui de la nouvelle pharmaco-génomique ou de la nouvelle médecine génétique, les gens veulent absolument savoir quelles sont leurs origines génétiques. Comme quelqu'un l'a fait remarquer, le seul fait d'avoir un frère ou une soeur dont l'enfant a une maladie peut vous donner une information précieuse sur vos propres enfants. Donc, bien sûr, ils veulent savoir, plus que jamais.
Le président: Merci.
Pour le Parti libéral, M. Macklin, le secrétaire parlementaire.
L'hon. Paul Harold Macklin: Merci beaucoup, monsieur le président et merci à vous, madame, d'être venue nous rencontrer aujourd'hui.
Je vais remonter au début de votre intervention, là où vous avez dit, si j'ai bien suivi, que vous n'avez pas de problème avec la reconnaissance des relations entre gais et lesbiennes et qu'il existe aujourd'hui de nombreux types de relations donnant naissance à des enfants qui n'entrent pas nécessairement dans la catégorie du « mariage ». Dans ce contexte, il me semble que nous, parlementaires, cherchons à donner une certaine reconnaissance légale à une certaine catégorie de membres de notre société afin qu'ils puissent recevoir certains avantages au sein de notre société.
Votre position est-elle que nous allons encourager ainsi la création de telles relations? Il m'apparaît que nous cherchons en fait à reconnaître les relations existantes et à conférer à celles-ci les mêmes avantages et que si des enfants se trouvent vivre dans ces unités familiales, nous n'enlevons aucun droit. Ou bien votre position en est-elle une de défense des enfants où vous dites, quelle que soit la nature des relations, il nous faut nous porter à la défense des enfants qui n'ont pas, comment dire, une situation parentale aimante telle qu'ils vont être exposés à un comportement et maternel et paternel dans les premiers stades de la vie?
º (1600)
Mme Margaret Somerville: Vous avez soulevé là de nombreux points.
Tout d'abord, il nous faut absolument reconnaître à quel point la discrimination et la stigmatisation dont ont souffert les homosexuels étaient répréhensibles et reconnaître leurs relations et leur accorder toutes les protections juridiques. Ce que je fais valoir ici, c'est que si je me mets à la place de l'enfant et que je me demande quelle norme je souhaite dans cette société pour les enfants, je veux que la norme reste telle qu'elle est, qu'un enfant a droit à une mère et à un père, de préférence ses propres parents biologiques. Je sais bien que tous les enfants n'auront pas cela, mais dans la négative nous ferons de notre mieux pour les élever et les aider. Je ne pense pas qu'il faille jeter par-dessus bord le droit d'avoir une mère et un père.
C'est tout comme les lois pénales, par exemple. Nous savons bien qu'elles vont être enfreintes parfois, mais il est très important de les avoir.
L'hon. Paul Harold Macklin: Désolé de vous interrompre, mais tout de même, nous ne jetons rien avec ce projet de loi. Est-ce que nous n'ouvrons pas les droits?
Mme Margaret Somerville: Si, vous jetez absolument par-dessus bord le droit d'un enfant d'avoir une mère et un père. En vertu de l'article 16 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, et même en vertu de la Convention relative aux droits de l'enfant, le mariage... Le Canada enfreindra même deux traités internationaux dont il est signataire car ce projet de loi confère le droit de se marier et de fonder une famille, et donc si un couple homosexuel se marie, il a le droit de fonder une famille. Cela signifie que l'enfant n'a pas droit à une mère et à un père, par définition.
L'hon. Paul Harold Macklin: Mais ne dites-vous pas à ce stade que ce que l'enfant doit connaître, c'est son origine biologique, autrement dit le père et la mère? N'est-ce pas là ce que vous dites?
Mme Margaret Somerville: Non, ce n'est que la première étape.
La première étape, c'est que la conception devrait être par un spermatozoïde et un ovule naturels. La deuxième étape, c'est que l'enfant doit savoir à qui appartiennent l'ovule et le spermatozoïde. Ensuite, la troisième étape, ce n'est pas seulement d'être fabriqué par un père et une mère, c'est d'être élevé par un père et une mère, car c'est ce qui est le mieux pour l'enfant. S'il en est qui pensent que ce n'est pas vrai ou que peu importe d'avoir une mère et un père, alors je pense que c'est à eux qu'appartient le fardeau de la preuve, et pas à moins de prouver que c'est ce dont l'enfant a besoin.
L'hon. Paul Harold Macklin: J'aimerais revenir à cette notion d'empreinte. Selon certains témoignages que nous avons entendus ces dernières années, si l'empreinte... Ce terme n'était pas utilisé, mais on parlait d'exposition aux influences paternelles et maternelles. On nous a dit que souvent, dans les familles ayant eu recours à ces procédés, les enfants trouvaient cela chez les grands-parents—les grands-mères, les grands-pères—et qu'ils avaient ainsi une assez bonne exposition. On peut donc penser que les grands-parents pourront largement compenser et fournir le type d'empreinte que l'on obtient dans ce processus biologique.
Mme Margaret Somerville: Cela se peut, mais le fait n'en demeure pas moins que vous abandonnez toujours l'idée que cela est la norme. La norme, c'est d'avoir deux parents qui ont une interaction constante, quotidienne, avec les enfants. Si vous en avez conscience, alors vous pouvez chercher un substitut.
L'hon. Paul Harold Macklin: Merci.
Le président: Nous allons maintenant revenir à notre mode de fonctionnement normal. Nous allons entendre REAL Women of Canada, puis l'Islamic Council of Imams-Canada, puis l'Association du Barreau canadien.
Madame Landolt et madame Watts, soyez les bienvenues.
Mme Gwendolyn Landolt (vice-présidente nationale, REAL Women of Canada): Merci beaucoup.
J'allais dire que c'est un plaisir que d'être ici aujourd'hui, mais je veux réitérer ce que Mme Somerville a dit. À la lecture des journaux ce matin, j'ai été très indignée de découvrir que tout est déjà dit et fait, et que notre comparution au comité n'est que pour la forme. De toute évidence, le gouvernement a décidé de faire adopter cette loi et nous sommes très troublées de faire partie d'une organisation ou d'un système qui consulte ostensiblement le public mais se moque réellement de ce que nous avons à dire. Je tiens à faire savoir cela très clairement. C'est un affront aux personnes comme moi et notre organisation, qui faisons partie du public, qui voulons participer au processus et faire connaître nos vues et être prises au sérieux. Il semble que ce gouvernement ne soit pas intéressé par ce que nous avons à dire et que nous sommes l'instrument d'une imposture.
Cependant, puisque je suis là, autant que j'exprime nos points de vue pour le procès-verbal même si, de toute évidence, certains Libéraux ne vont pas prêter attention à ce que nous avons à dire ou ne nous prendront pas au sérieux et n'en feront qu'à leur tête quoi que nous disions, si l'on en croit les journaux de ce matin.
Premièrement, je veux faire ressortir que nous sommes une association de femmes qui ont à coeur la condition des femmes et se soucient profondément des enfants. L'association a été fondée en 1983 et nous avons toujours analysé toutes les lois pour en déterminer les répercussions sur les familles et les femmes et leurs enfants. C'est là notre profonde préoccupation concernant le projet de loi C-38.
Premièrement, nous devons poser la question suivante : le droit britannique, américain et européen, à l'exception toute récente des Pays-Bas et de la Belgique, restreignent tous le mariage à l'union d'un homme et d'une femme. La Cour européenne des droits de l'homme, la Commission européenne des droits de l'homme et de nombreux traités des Nations unies déclarent tous que le mariage est celui d'un homme et d'une femme. Une personne raisonnable et réfléchie doit se demander, dans ces conditions, pourquoi le mariage, défini comme l'union d'un homme et d'une femme, est resté une telle constante à travers les cultures, les religions et les époques et dans tous les traités des Nations unies? La réponse est que la définition traditionnelle du mariage a une finalité. Elle est le ciment qui assure la cohésion de la société.
Modifier la définition du mariage détruit cette cohésion et conduit à la destruction ultime de notre société. Pourquoi et comment le projet de loi C-38 fait-il cela? Tout d'abord, et c'est surprenant, le mariage homosexuel aboutit à un recul du mariage. On pourrait penser qu'en accordant le statut marital aux couples homosexuels il y aurait un gain numérique de l'institution du mariage, mais en réalité peu de couples homosexuels veulent se marier et ceux qui le font divorcent à un rythme encore plus grand que les couples hétérosexuels. Dans le même temps, les couples hétérosexuels tendent à se détourner du mariage car ce dernier signifie tout et n'importe quoi, au gré de chacun, et finit simplement par perdre tout son sens. Cela va contribuer à cette désaffection pour le mariage traditionnel.
Pourquoi le mariage traditionnel est-il si précieux? Tout d'abord, il ne fait aucun doute maintenant que les enfants s'épanouissent le mieux au sein d'une famille hétérosexuelle. Comment le savons-nous? Statistique Canada nous l'apprend. Le Ministère a mené une étude longitudinale sur 23 000 enfants et les résultats en ont été publiés en partie en 1996 et l'autre partie en 1998. Le constat est que les enfants s'épanouissent le mieux avec une mère et un père. Les enfants, il ne faut pas l'oublier, ne sont ni des symboles de statut social pour les couples ni ne doivent être utilisés à des fins politiques. Ce sont des êtres humains qui ont droit à des soins aimants et responsables et à la dignité de leur propre chef. Par conséquent, la priorité doit aller à leur intérêt supérieur.
Nous sommes gravement préoccupées car des études scientifiques exhaustives indiquent que les enfants sont davantage exposés à préjudice s'ils sont élevés au sein d'une relation homosexuelle. La raison en est que les unions homosexuelles ne sont pas l'équivalent d'unions hétérosexuelles et ce sont ces différences qui sont néfastes.
º (1605)
Dans notre mémoire, que nous vous avons fait parvenir une semaine ou deux et dont nous espérons qu'il aura été traduit, nous avons soigneusement dressé une longue liste d'études. Vous les trouverez toutes aux pages 23 et 24 de notre mémoire, qui énumèrent les nombreuses études prouvant que les enfants souffrent d'une éducation homosexuelle.
Par exemple, les couples homosexuels sont moins durables que les couples mariés traditionnels. Il y a un plus grand taux d'infidélité chez les couples homosexuels. Tout cela repose sur des études. Il y a un manque d'engagement, ainsi qu'en témoigne le très petit nombre qui légalise leur union par le mariage. Les problèmes de santé mentale sont plus fréquents, et cela provient d'ailleurs d'études réalisées par les homosexuels eux-mêmes. Il y a un risque accru de suicide et d'abus de substances. Les homosexuels connaissent une espérance de vie sensiblement plus courte. Les partenariats de même sexe sont marqués par une incidence accrue de violence. L'éducation par des parents homosexuels influence l'orientation sexuelle des enfants. Les contacts sexuels entre enfants et parents homosexuels sont un problème.
Toutes ces études figurent dans la liste. Les études sont toutes là et ceux qui désirent les voir et se soucient réellement des enfants peuvent les consulter. Elles revêtent une importance cruciale pour la question qui nous occupe.
Nous admettons qu'il existe des études qui prétendent établir que l'éducation par des parents de même sexe est équivalente à celle de parents hétérosexuels, mais des experts en psychométrie et en recherche psychologique empirique ont analysé de près cette littérature et déterminé que ces études n'ont pas été menées de façon scientifique et que leur conclusion, soit l'absence de conséquences néfastes pour les enfants, n'est tout simplement pas justifiée. De fait, vous serez intéressés de savoir que le procureur général du Canada est intervenu à la Cour d'appel de l'Ontario en 2003 pour dire qu'il y a des craintes au sujet des enfants. Il a dit également que les études favorables à l'éducation par des parents homosexuels sont fondées sur des recherches non fiables et des méthodes défectueuses et donc représentent un fondement très ténu pour l'élaboration de la politique publique. Encore une fois, c'est le procureur général qui a présenté des preuves à cet effet.
Nous, en tant qu'organisation féminine, avons le souci des enfants. Les enfants sont notre préoccupation première, mais nous nous inquiétons également pour l'institution du mariage, car les enfants ont besoin d'une mère et d'un père. Là encore, vous verrez dans notre liste toutes sortes d'études indiquant que la responsabilité première de toute société est de protéger les enfants. Le projet de loi ne va pas dans ce sens car le mariage homosexuel conduira également à la revendication du statut conjugal pour d'autres sorte de relations.
La caractéristique qui définit les partenaires homosexuels comme groupe et comme couples n'est pas la croyance ou la biologie : c'est le comportement, et si vous utilisez le comportement comme critère pour contracter mariage, alors le mariage, qui était censé protéger l'identité profonde et l'ordre social, devient ouvert à tout. Si c'est là la règle directrice par laquelle on contracte un mariage, alors il ne peut y avoir nul principe—
º (1610)
Le président: Veuillez m'excuser, rappel au Règlement de M. Toews.
M. Vic Toews: J'ai beaucoup d'interférence dans mes écouteurs. Je ne sais pas si c'est un appareil auditif réglé trop fort mais il y a interférence et j'ai du mal à suivre votre présentation.
M. Réal Ménard: Je crois que Dieu est fâché.
M. Vic Toews: Je ne veux pas entrer dans une discussion sur la divinité de quiconque, mais il m'est très difficile de me concentrer sur ce que dit Mme Landolt avec cette interférence.
Mme Gwendolyn Landolt: J'allais faire valoir que si le comportement est la règle déterminante du mariage, alors il n'existe aucune raison valide de ne pas l'ouvrir à d'autres relations—frère-soeur, père-mère, et polygamie.
À cet égard, j'aimerais soulever un point. Le ministre de la Justice, M. Cotler, a comparu devant le comité le 12 mai. La déclaration qu'il a faite est marquée par une extrême duplicité et est très troublante pour notre organisation. Voici ce qu'a dit le procureur général, M. Cotler. Il a dit que la polygamie et l'inceste ne résulteront pas de l'adoption du projet de loi C-38 parce que « la polygamie, la bigamie et l'inceste sont des actes criminels au Canada. C'est la loi de ce pays. Elle ne changera pas ». Peut-être M. Cotler prend-il les Canadiens pour des imbéciles, mais il serait extraordinaire que le gouvernement puisse apporter ce changement extraordinaire à la définition du mariage en l'ouvrant aux personnes de même sexe sans pouvoir apporter d'autres changements à cette législation ultérieurement.
En dépit des affirmations de M. Cotler—il a dit aussi qu'il y a une différence entre des modifications au droit pénal et au droit civil, ce qui est parfaitement ridicule. Comme avocate, je suis très troublée qu'il affirme de telles choses devant le comité. A-t-il oublié les modifications apportées au Code criminel en rapport avec la pornographie, l'homosexualité, l'avortement? Il n'y a eu aucune difficulté à apporter ces changements, alors pourquoi les dispositions du Code criminel traitant de la polygamie ne seraient-elles pas modifiables elles aussi?
Il est clair à nos yeux que la définition du mariage peut et sera modifiée pour l'ouvrir à d'autres relations. En conservant le nom et le statut légal du mariage mais en en changeant la signification et le concept, il nous semble clair que la légalisation du mariage homosexuel équivaut à un rejet de ce que le mariage signifie et a signifié pendant des millénaires. De fait, il est remplacé par une extension relativiste, postmoderne de la préférence ou du choix privé en matière d'intimité personnelle, qui est loin de l'institution du mariage et de sa finalité dans la société.
º (1615)
Le président: Excusez-moi, il vous reste une minute.
Mme Gwendolyn Landolt: Nous voulons mentionner un autre problème que nous voyons dans les propos de M. Cotler. Il a fait une autre déclaration absurde en disant que le projet de loi protège la liberté de religion. C'est de la foutaise absolue. La Cour suprême du Canada, dans le renvoi de décembre, a clairement indiqué que toute protection des droits religieux relève des provinces. C'est pourquoi nous voyons toutes sortes de problèmes que connaissent les enseignants dans les écoles. Qu'en est-il du droit des parents qui objectent à cette éducation homosexuelle? Qu'en est-il du droit des enseignants de s'exprimer contre l'homosexualité? Est-ce que le statut d'oeuvre de bienfaisance des églises et organisations religieuses sera en péril à cause de ce projet de loi? Ce sont là des interrogations très graves qui restent sans réponse.
Selon les sondages, il existe environ 310 000 homosexuels au Canada—selon Statistique Canada—mais seulement 1 950 mariages homosexuels ont été contractés par des couples homosexuels canadiens. Pourquoi alors imposer ce projet de loi alors qu'il intéresse si peu d'homosexuels?
De fait, j'ai ici un article du numéro de mai d'un journal homosexuel. L'organisation est intitulée fab. Je cite :
Le mouvement pour le mariage gai au Canada est le fait d'une poignée d'avocats et d'activistes homo... il n'y a pas de mouvement de masse chez les gais en faveur du mariage homosexuel ici, au Canada. |
Le président: Merci.
Mme Gwendolyn Landolt: Et pourtant, vous allez bouleverser toute la loi pour une poignée de gens qui ne sont pratiquement pas intéressés. La politique publique—
Le président: Désolé, madame.
Mme Gwendolyn Landolt: Oui. Je veux dire que la politique publique doit s'occuper de ce qui est avantageux pour la société, monsieur le président. Elle ne doit pas être mise au service des fins privées d'une minorité.
Merci infiniment de votre patience.
Le président: Merci.
Nous allons maintenant passer à M. Patel, de l'Islamic Council of Imams-Canada.
M. Abdul Hai Patel (coordonnateur, Islamic Council of Imams-Canada): Merci, monsieur le président et honorables membres du comité.
L'Islamic Council of Imams-Canada est un collectif d'imams ou ministres du culte, au Canada. Avant d'aller plus loin, j'aimerais me faire l'écho des sentiments exprimés par Gwendolyn Landolt concernant la futilité de ces audiences, après avoir lu le journal d'aujourd'hui. J'exhorte le comité à prendre en compte notre intervention d'aujourd'hui avant la tenue de tout vote parlementaire.
Notre conseil a été fondé en 1990. Il regroupe des ministres du culte servant la communauté musulmane de tout le Canada. Nous appartenons à deux grandes sectes : la sunnite et la shi'ite. Nous délibérons sur maints sujets qui touchent la collectivité et proposons des solutions chaque fois que possible. La population musulmane au Canada est estimée à plus de 650 000, dont plus de la moitié vivent dans l'agglomération de Toronto.
Le 11 mars 2003, notre conseil a comparu sur ce même sujet devant le comité parlementaire, à Toronto, et a fait part de la position islamique sur le mariage homosexuel. La présentation d'aujourd'hui porte sur les problèmes potentiels et leurs solutions, soit les protections à inscrire dans le projet de loi C-38.
En tant qu'ancien membre de la Commission ontarienne des droits de la personne—mon mandat vient d'expirer en février de cette année—j'ai pleinement conscience de la nécessité de respecter les droits de tout un chacun. Cependant, je trouve que certains éléments du projet de loi C-38 pourraient faire l'objet de contestations futures en vertu du code des droits de la personne de l'Ontario.
J'aimerais commencer par vous citer l'arrêt de la Cour suprême du Canada.
Celle-ci a entendu des arguments concernant le renvoi les 6 et 7 octobre 2004 et rendu sa décision le 9 décembre 2004. Elle a opiné que : Le droit à la liberté de religion garanti par l'alinéa 2a) de la Charte a une porté assez étendue pour protéger les autorités religieuses contre la possibilité que l'État les contraigne à marier... deux personnes du même sexe contrairement à leurs croyances religieuses. |
Cette décision n'est pas pleinement reflétée dans la protection de l'article 3, qui stipule :
« Il est entendu que les autorités religieuses sont libres de refuser de procéder à des mariages non conformes à leurs convictions religieuses ». Il faut signaler que la décision de la Cour portait sur un libellé légèrement différent du projet de loi qui disait « La présente loi est sans effet... » sur la liberté des autorités religieuses de refuser de procéder à des mariages homosexuels. La Cour a estimé que cette disposition ne relevait pas de la compétence constitutionnelle du Parlement en ce sens qu'elle traite des personnes qui peuvent procéder au mariage, une compétence législative exclusive des provinces en vertu du paragraphe 92(12) de la Constitution. |
Nos préoccupations sont les suivantes.
La protection n'est pas assez clairement énoncée. Il faut présumer qu'elle se limite au clergé ou au ministre du culte de toute religion sur le lieu du culte. Si le refus intervient en dehors d'un lieu du culte, est-ce que la protection s'applique? Les exemples suivants illustreront mes craintes.
Une loi doit avoir un libellé explicite afin de protéger non seulement les personnes mais aussi les institutions religieuses. La plupart des lieux de culte, surtout ceux des religions non chrétiennes au Canada—et elles sont en nombre croissant—sont institutionnalisés et par conséquent délèguent à leur personnel, à des bénévoles, des groupes et comités la conduite des services religieux en rapport avec le mariage. L'omission de les protéger ouvre la porte à des contestations futures invoquant les croyances sincères.
La distinction est ténue entre un commerce et un lieu de culte. Par exemple, une salle de banquet passe contrat avec un ministre du culte—de toute religion, d'ailleurs—autorisé à célébrer le mariage et offre un forfait aux clients potentiels pour tous les services requis pour les noces. Un refus sera considéré comme une violation du Code des droits de la personne de l'Ontario car le service sera considéré comme une activité commerciale et, à ce titre, le ministre de culte sera obligé de procéder au mariage. Où est la protection des croyances religieuses dans ce cas? Le projet de loi ne dit pas clairement pour qui et où le refus sera acceptable.
Les juges de paix et autres commissaires ne sont pas protégés non plus pour leurs croyances religieuses. En tant que commissaire des droits de la personne en Ontario, j'ai dû moi-même veiller à ce que les droits de chaque Ontarien soient protégés, quelle que soit son orientation sexuelle; cependant, j'avais le choix de m'abstenir sur certaines questions lorsqu'elles étaient en conflit avec mes croyances religieuses. Pendant mes six années comme commissaire, il ne m'est jamais arrivé de devoir m'abstenir.
º (1620)
La même disposition d'abstinence n'est pas offerte aux juges, ce qui signifie que les adeptes de certaines religions ne pourront occuper de telles fonctions s'ils sont pratiquants.
La loi redéfinit la disposition sur l'égalité des sexes aux fins du mariage. Cela signifie-t-il que l'égalité s'étendra aux toilettes et vestiaires dans les lieux publics? Ce peut être là une problématique nouvelle. Les employeurs, les agents de négociations collectives et la Commission des droits de la personne sont toujours aux prises avec des difficultés concernant les toilettes et vestiaires à utiliser par les personnes en cours de changement de sexe, à un moment où elles ne peuvent être rangées dans aucun sexe. En Ontario, nous avons déjà connu deux ou trois cas de la sorte.
Enfin, le Parlement a pris la décision aventureuse de modifier la définition d'une institution familiale importante, chérie et appréciée depuis des temps immémoriaux et ébranle ainsi le fondement de nombreuses religions. Il serait sage de conserver la définition actuelle du mariage et de n'élargir que la définition de l'union civile aux couples de même sexe. Cela satisferait probablement la plupart des communautés religieuses et protégerait en même temps les droits des minorités.
Je vous remercie.
Le président: Merci.
Nous allons maintenant passer à l'Association du Barreau canadien, avec M. Lebo et M. Foreman.
M. James Lebo (membre, Comité de législation et réforme du droit, Association du Barreau canadien): Merci, monsieur le président. M. Foreman et moi allons partager nos dix minutes, si vous nous le permettez.
Les membres du comité seront soulagés d'apprendre que j'ai à peine lu le journal ce matin.
Je voudrais tout d'abord vous remercier de nous avoir invités. Comme la plupart d'entre vous le savent probablement, l'Association du Barreau canadien est une organisation professionnelle nationale qui compte environ 34 000 membres dans tout le pays. Un de nos objectifs—je dirais même un de nos principaux objectifs—consiste à améliorer le droit et l'administration de la justice.
L'ABC travaille depuis longtemps à l'élimination de la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Nous avons fait le ménage dans nos propres affaires. Nous avons fait des pressions sur les gouvernements. Nous sommes intervenus dans deux causes portées devant la Cour suprême du Canada sur cette question, en particulier le renvoi récent concernant la Loi sur le mariage. Nous avons également comparu devant divers comités, dont le vôtre, au sujet de plusieurs projets de loi déposés à la Chambre.
Messieurs les députés, il m'apparaît que nous étudions ce projet de loi dans des circonstances très particulières, à savoir que la pratique dont il traite—le mariage entre conjoints de même sexe—est déjà légale dans une bonne partie du pays. Elle est déjà reconnue, en ce moment même, dans sept provinces et un territoire, ce qui fait que 28 millions de Canadiens, soit environ 90 p. 100 de la population, vivent dans des endroits où le mariage entre conjoints de même sexe est légal.
À notre humble avis, le Parlement est donc dans l'obligation d'adopter ce projet de loi et d'uniformiser le droit à cet égard dans notre grand pays. Nous jugeons également qu'il y a eu suffisamment de débats sur cette question. En termes parlementaires, il est temps de la mettre aux voix.
En plus des longues consultations publiques qui ont eu lieu, il y a eu plusieurs décisions judiciaires à ce sujet-là. Les tribunaux supérieurs des trois provinces les plus peuplées du Canada—l'Ontario, le Québec et la Colombie-Britannique—se sont penchés sur la question, tout comme la plus haute cour du pays, la Cour suprême du Canada. Et la cour s'est prononcée sur bon nombre des aspects dont il a été question aujourd'hui et au cours de vos audiences précédentes. Je me permets de vous dire que, pour un député, c'est une occasion en or. Vous pouvez vous appuyer sur l'avis de la plus haute cour du pays, qui vous dit ce qu'il faut faire et où se situe le droit à cet égard.
Notre association vous a remis plus tôt un mémoire dans lequel nous exposons notre position plus en détail. Ce mémoire contient en particulier quelques points sur lesquels je voudrais m'attarder et dont M. Foreman va vous parler lui aussi.
Le premier point—auquel j'ai déjà fait allusion—, c'est que cette question a déjà été examinée très attentivement et a déjà été tranchée. La légalité de cette mesure, de cette proposition, ne fait aucun doute. La légalité du mariage entre conjoints de même sexe non plus. Il est incontestable que l'interdiction du mariage entre conjoints de même sexe serait contraire à la Charte des droits et libertés.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, il est important maintenant d'étendre cette légalité à l'ensemble du pays. Le Parlement est l'organe législatif habilité à le faire. Ce n'est que justice, pour que les droits de tous les Canadiens du pays soient respectés.
Je dois ajouter que la cohérence du droit n'est pas un concept abstrait. Il est important que les couples sachent à quoi s'en tenir au sujet de leurs relations matrimoniales. Comme vous le comprenez sûrement, dans les endroits où le mariage entre conjoints de même sexe n'est pas reconnu par la loi pour le moment, la situation n'est pas claire. Quelles sont les obligations et les responsabilités en cas d'échec de la relation, en cas de décès d'un conjoint, en cas d'incidents de toutes sortes qui se produisent inévitablement dans un mariage? À mon avis, il est important que les Canadiens le sachent.
L'autre aspect, c'est que c'est injuste pour les particuliers, et aussi pour les contribuables, qui doivent continuer à financer les causes portées devant les tribunaux dans tout le pays au sujet du mariage entre conjoints de même sexe. C'est un fardeau qui coûte très cher. Tous ceux d'entre vous qui ont déjà eu l'immense plaisir de participer à des causes de ce genre le savent. Cela coûte cher au gouvernement et aux contribuables du pays, et cela exige beaucoup de temps et d'attention qu'il serait plus utile de consacrer à autre chose.
Je voudrais aussi vous parler d'un autre aspect, celui de la liberté de religion.
º (1625)
Je tiens à préciser très clairement que l'ABC ne privilégie pas certaines valeurs de la Charte plutôt que d'autres, et qu'elle attache autant d'importance à la liberté de religion qu'à la protection contre la discrimination en vertu de l'article 15 de la Charte. Pour nous, ce sont deux valeurs clés de la Charte, qui ont déjà été prises en compte et qui sont toutes les deux respectées dans ce projet de loi. Nous sommes d'avis qu'il n'y a pas de contradiction entre ces droits. Ils sont tous les deux respectés, et nous vous demandons d'adopter rapidement le projet de loi.
Je vais laisser M. Foreman continuer.
Merci.
º (1630)
M. Sean Foreman (président, Conférence sur l'orientation et l'identité sexuelles, Association du Barreau canadien): Merci, monsieur le président, messieurs les membres du comité.
La Cour suprême du Canada a reconnu que le Canada formait une société diversifiée, où se côtoient diverses cultures et diverses religions, et où le respect de la dignité humaine est au coeur de notre identité collective. Le mariage civil n'oblige pas tous les couples mariés à assumer toutes les fonctions du mariage, que ce soit l'intimité et la compagnie, la reconnaissance sociale d'une relation stable, la répartition des avantages et des responsabilités économiques, le mélange des familles, ou le soutien à la procréation et à l'éducation des enfants. La vérité, c'est que les couples de même sexe peuvent assumer toutes les fonctions du mariage, y compris la procréation et l'éducation des enfants, et qu'ils le font effectivement.
Les familles gaies et lesbiennes sont une réalité de plus en plus courante dans notre pays diversifié, et les tribunaux s'entendent tous sur le fait que la protection des familles non traditionnelles ne va pas à l'encontre des valeurs familiales. Ils sont également tous d'accord pour dire, après avoir entendu de nombreux témoignages d'experts et des arguments étoffés de tous les points de vue, qu'il est dans le meilleur intérêt des enfants de permettre le mariage civil entre conjoints de même sexe, puisque cela ne cause pas de tort aux enfants de conjoints hétérosexuels tout en assurant la stabilité et la protection nécessaires aux enfants de conjoints de même sexe.
L'ABC appuie le projet de loi C-38, qui constitue à son avis une étape importante vers l'égalité pleine et entière des couples homosexuels. Il crée un régime de mariage civil cohérent pour tout le Canada, en même temps qu'il affirme les garanties offertes par la Charte au sujet de la liberté de religion en reconnaissant que les autorités religieuses sont libres de définir et de célébrer les cérémonies du mariage conformément à leurs convictions religieuses.
Pour conclure, l'ABC demande instamment au comité et au Parlement d'adopter sans délai le projet de loi C-38, et de montrer ainsi que le Canada a la ferme volonté d'assurer l'égalité et la justice pour tous.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
Nous allons maintenant passer à la première ronde de questions. Ce sera une ronde de sept minutes, question et réponse incluses. Nous allons commencer par le Parti conservateur.
Monsieur Moore.
M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC): Merci.
Merci également à tous les témoins qui sont ici.
Mes questions s'adressent à M. Lebo et à M. Foreman. J'ai lu votre mémoire et je sais que vous représentez une association professionnelle nationale. Je suis moi-même membre de l'ABC. Mais pour être bien franc, je pense que votre mémoire et votre présentation penchent un peu trop dans le sens de certains intérêts. Votre organisation professionnelle est censée représenter les avocats de tout le pays, mais je suis moi-même avocat et je tiens à vous dire que vous ne représentez certainement pas mon point de vue sur la question.
Mais j'aimerais que nous passions à certaines de vos affirmations, qui me semblent incompatibles avec le droit actuel—y compris avec la décision rendue par la Cour suprême dans le cadre du renvoi récent—et qui ne tiennent même pas compte de la réalité d'aujourd'hui. J'ai seulement quelques points à commenter, et j'aimerais avoir votre réaction sur chacun.
Vous dites notamment :
Les droits des conjoints de même sexe ne s’opposent pas aux droits des groupes religieux. Ils ne sont pas [non plus] en concurrence les uns avec les autres. Ils sont confirmés et protégés et par la Charte et, selon l’ABC, par le projet de loi C-38. |
Premièrement, j'espère que vous ne pensez pas que les mesures de protection de la liberté de religion censément prévues dans le projet de loi C-38 ont une quelconque valeur légale, parce que nous savons que la Cour suprême du Canada a déjà statué que cette disposition ne relevait pas de la compétence du gouvernement fédéral et qu'elle était ultra vires. Vous le savez très bien.
Dans sa décision sur le renvoi, la Cour suprême du Canada a dit aussi qu'il y avait, ou qu'il pourrait y avoir, un conflit entre ces droits; c'est écrit dans sa décision. Vous l'avez lue, et pourtant, vous dites dans votre mémoire qu'il ne peut pas y avoir de conflit. C'est complètement contradictoire. Je vous renvoie au cas des Chevaliers de Colomb. C'est un groupe religieux, dont la position entre actuellement en conflit avec les présumés droits des couples de même sexe qui souhaitent se servir de ses terrains pour y célébrer leur mariage. Vous n'avez qu'à regarder les journaux des derniers jours pour constater que votre affirmation est erronée. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Vous dites aussi que le projet de loi C-38 est requis par la Charte. C'est exactement la question qui a été posée à la Cour suprême du Canada, dont vous reconnaissez qu'il s'agit du plus haut tribunal du pays. La question qui lui a été soumise, c'est : « La définition traditionnelle du mariage est-elle inconstitutionnelle? » La Cour suprême du Canada n'a pas répondu à cette question. C'est notre plus haut tribunal, et jusqu'à ce qu'il rende un jugement dans ce sens-là, c'est sans doute le contraire de ce que vous affirmez qui est constitutionnel.
Il y a aussi un autre point, qui m'a fait rire tout haut quand j'ai lu votre commentaire à ce sujet-là; vous avez dit qu'il fallait assurer une cohérence nationale à cause de nos lois sur l'immigration et que, si le projet de loi C-38 était modifié, cela dérangerait beaucoup de gens. C'est tout le contraire. En effet, quand les gens qui se sont mariés ici hier—les concurrents de l'émission The Amazing Race—vont retourner chez eux, leur mariage ne sera pas reconnu parce que, comme vous le savez sûrement si vous avez étudié le contexte international, les autres pays n'ont pas suivi cette voie-là. Ils ont reconnu les droits à l'égalité, ce que nous pourrions faire, sans modifier la définition du mariage.
J'aimerais avoir vos commentaires sur ces trois points soulevés dans votre mémoire.
º (1635)
M. James Lebo: Merci beaucoup. Je suis très heureux de rencontrer un collègue de l'ABC; c'est toujours un plaisir.
Comme vous le savez sûrement, monsieur, nous avons dans notre association un conseil de direction composé de représentants élus, qui prennent des décisions sur les questions de politique de la même façon que le Parlement prend ses décisions, par vote de la majorité.
M. Foreman va répondre à certaines de vos observations, mais puisque j'étais présent à la Cour suprême du Canada, je voudrais vous signaler que, si la cour n'a pas répondu à la quatrième question, c'est en bonne partie en raison des droits déjà reconnus aux gens qui ont organisé leur vie à la suite des jugements rendus à ce sujet-là en Ontario, au Québec et en Colombie-Britannique. À mon humble avis, il n'y a rien là-dedans qui se traduise par une condamnation du projet de loi. Au contraire. Les réponses aux trois autres questions montrent clairement que la Cour suprême du Canada était d'accord avec les plus hauts tribunaux de l'Ontario, du Québec et de la Colombie-Britannique sur ce point et que la proposition contenue dans le projet de loi est conforme à la Charte. Si la conclusion contraire—
M. Rob Moore: Monsieur Lebo, je dois vous interrrompre.
Il y a toute une différence entre affirmer que quelque chose est conforme à la Charte—je reconnais ce que la cour a dit—et prétendre qu'elle est indispensable en vertu de la Charte, comme vous le dites dans votre mémoire. Vous représentez des avocats. Vous dites dans votre mémoire que la Charte « appelle » le projet de loi. Ce n'est pas ce qu'a dit la Cour suprême du Canada.
Vous pourriez peut-être nous parler aussi de l'aspect suivant. Je sais que vous connaissez Eugene Meehan, qui est un ancien président national de votre association. C'est un constitutionnaliste qui faisait partie du groupe d'avocats présents à la Cour suprême, Lang Michener, et j'ai vu un de ses mémoires qui contredit complètement bon nombre des affirmations que vous avez faites ici, y compris celles-ci. Le Parlement du Canada a-t-il compétence pour protéger les groupes religieux? Il dit que non. Les groupes religieux ou les autorités religieuses qui refusent de célébrer un mariage pourraient-ils s'exposer à des poursuites d'autres personnes? Il dit que oui. Le Parlement du Canada, par le biais du projet de loi C-38 ou autrement, a-t-il le pouvoir de protéger les groupes religieux ou les autorités religieuses? Il dit que non.
Vous pourriez peut-être moduler votre réponse à la lumière de cette opinion, qui est tout à fait contraire à ce que vous avez dit. J'aimerais savoir s'il a entièrement tort sur tous ces points et si, comme vous le dites dans votre mémoire, il ne peut pas y avoir de conflit entre les droits et si la liberté religieuse peut être protégée d'une manière ou d'une autre. Vous dites dans votre mémoire qu'à votre avis, le projet de loi C-38 protège les droits des groupes religieux.
M. James Lebo: Vous comprendrez sûrement, monsieur, qu'à titre d'ancien président, M. Meehan ne parlait pas au nom de l'organisation quand il a écrit cela. Bien sûr, il a droit à ses opinions, comme nous tous, monsieur.
M. Rob Moore: Ce que je veux dire, c'est que votre association ne représente pas le point de vue des avocats parce que moi, en tout cas, je n'ai pas été consulté. Je trouve tout simplement insultant que vous veniez ici en prétendant parler au nom de 38 000 avocats alors que personne ne m'a jamais demandé mon avis. Et je suis membre du barreau depuis cinq ans.
M. James Lebo: Monsieur, avec tout le respect que je vous dois, nous avons une tradition démocratique dans notre organisation, comme partout ailleurs au pays; nous élisons des membres à notre conseil de direction, et ce sont ces membres qui établissent nos politiques. Toutes nos politiques sont soumises à un vote et doivent être adoptées à la majorité. Évidemment, il y a des gens qui n'approuvent pas tout ce qu'a fait l'ABC, mais je peux vous garantir, monsieur, que dans ce dossier, l'ABC est tout à fait cohérente. Sa politique est restée la même depuis 1994.
Je vais laisser M. Foreman répondre à certaines des autres questions que vous avez soulevées.
M. Sean Foreman: J'ai eu l'occasion de lire les opinions rédigées par M. Meehan, et je me permets de vous dire que je n'y ai vu aucune contradiction avec la position énoncée par l'ABC. M. Meehan répondait à des questions très pointues posées par un client et il l'a fait, dans le cas de la protection de la liberté de religion, de façon très claire dans le contexte du renvoi à la Cour suprême. Il a dit que le gouvernement fédéral n'avait pas la compétence voulue pour inclure dans cette mesure législative fédérale des dispositions s'appliquant à la protection de la liberté de religion.
Il a toutefois confirmé, comme le fait le texte du renvoi à la Cour suprême, que la protection de la liberté de religion découle de la Charte elle-même, à l'alinéa 2a), et qu'aucune loi n'est donc nécessaire pour la garantir. Cette protection découle directement de la Charte, et la Cour suprême a indiqué clairement que ces droits n'entraient pas en collision et qu'il n'y avait pas de hiérarchie entre les droits garantis par la Charte. L'article 2 et l'article 15 coexistent; il n'y en a pas un qui a préséance sur l'autre. Les questions religieuses soulevées par les gens que la question préoccupe sont résolues par la Charte elle-même; il n'y a donc pas de collision inadmissible entre les droits, il n'y a pas de hiérarchie entre les droits, et le volet relatif à la liberté de religion est satisfaisant, certainement d'après la décision rendue par suite du renvoi et d'après la Charte elle-même.
º (1640)
[Français]
Le président: Thank you.
C'est maintenant au tour de M. Marceau, du Bloc québécois.
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ): Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup aux témoins qui sont venus nous faire leurs présentations, d'ailleurs fort intéressantes.
Je commencerais peut-être par M. l'imam. Vous avez suggéré dans votre présentation que la protection de la liberté de religion n'était pas assez explicite dans le projet de loi C-38.
J'ai fait une demande à un des témoins qui vous a précédé devant ce comité et qui est aujourd'hui dans la salle. Il m'a fait parvenir une suggestion d'amendement que j'étudie avec beaucoup d'attention et un esprit positif.
Auriez-vous la gentillesse et l'obligeance de nous faire parvenir, par l'intermédiaire du greffier du comité, des suggestions d'amendements que vous voudriez voir au projet de loi C-38 et qui pourraient apaiser certaines craintes que vous avez formulées concernant la liberté de religion? À mes yeux, celle-ci est aussi importante que le droit à l'égalité, qui inclut, à mon avis, le droit des conjoints de même sexe de se marier.
[Traduction]
M. Abdul Hai Patel: Merci de votre question, monsieur.
Je serais très heureux de vous soumettre des amendements dûment rédigés. J'ai énuméré certains des points à modifier et je vais certainement donner suite à votre requête. Y a-t-il un délai prévu pour soumettre...?
[Français]
M. Richard Marceau: Le comité prendra fin le 15 juin. Il faudrait donc envoyer les amendements le plus rapidement possible pour me permettre de bien les étudier et de m'assurer qu'ils puissent s'intégrer à l'ensemble du projet de loi.
[Traduction]
M. Abdul Hai Patel: Oui, je vais certainement m'en occuper le plus vite possible, d'ici quelques jours.
[Français]
M. Richard Marceau: Merci beaucoup, c'est fort apprécié.
Madame Landolt, c'est toujours un plaisir de vous voir. Nous avons souvent l'occasion de nous parler. Nous sommes rarement d'accord, mais nos discussions se font toujours dans un esprit de collaboration et de gentillesse mutuelle, ce que j'apprécie beaucoup.
Vous avez dit tout à l'heure que les mariages homosexuels avaient davantage tendance à se solder par un divorce. Pourriez-vous me donner les chiffres sur lesquels vous vous basez? À votre connaissance, combien y a-t-il eu de mariages gais et combien de divorces au Canada depuis que certaines juridictions canadiennes ont donné aux couples homosexuels le droit de se marier?
[Traduction]
Mme Gwendolyn Landolt: Au Canada, cela n'existe que depuis deux ans.
Mais aux Pays-Bas et en Belgique, deux pays où c'est autorisé, il y a eu une forte proportion de divorces dans ces cas-là. Une des raisons citées dans toutes les études—encore une fois, c'est bien documenté—, c'est que les couples de même sexe restent ensemble beaucoup moins longtemps que les couples hétérosexuels. En fait, la moyenne est d'un an et demi.
Il y a 1 950 couples canadiens de même sexe qui se sont mariés au Canada jusqu'ici, en deux ans seulement. Il semble que l'incidence des divorces sera plus élevée dans ce groupe, comme en Belgique et aux Pays-Bas.
[Français]
M. Richard Marceau: Je crois comprendre que les chiffres que vous citez ne sont pas canadiens. Est-ce exact? Je m'excuse, mais j'ai peu de temps pour poser des questions.
[Traduction]
Mme Gwendolyn Landolt: Nous n'avons pas de chiffres pour le Canada parce que c'est nouveau ici.
[Français]
M. Richard Marceau: D'accord. C'est ce que je voulais clarifier. Merci beaucoup. Si je vous presse un peu, ce n'est pas par manque de respect, mais parce que je n'ai que très peu de temps, malheureusement.
Vous avez dit tout à l'heure que there is already a trend away from marriage. De quand date ce mouvement?
º (1645)
[Traduction]
Mme Gwendolyn Landolt: L'Institut Hoover, aux États-Unis, a fait une étude échelonnée sur 15 ans. Cette étude portait sur la Scandinavie, la Belgique et la Hollande, et elle portait sur une période de 15 ans. Les chercheurs ont découvert que, dans ces pays-là, dès qu'on a autorisé l'union entre personnes de même sexe, que ce soit le mariage comme en Belgique ou l'union civile, les couples hétérosexuels ont commencé à avoir une moins haute opinion du mariage et à le délaisser. Il est évident que le mariage est moins populaire de nos jours, mais cela découle de changements dans le concept du mariage, dans sa reconnaissance par la société et dans les avantages qu'il procure aux gens mariés.
[Français]
M. Richard Marceau: J'essaie de comprendre. Vous parlez d'une étude sur 15 ans, mais la légalisation sur les mariages entre conjoints de même sexe ne remonte qu'à ces dernières années. Par conséquent, il a commencé à y avoir moins de mariages avant que les conjoints de même sexe obtiennent la possibilité de se marier. Je ne veux pas mettre de mots dans votre bouche, mais je veux bien comprendre.
Par exemple, au Québec, où je vis, il y a depuis des dizaines d'années un mouvement d'abandon du mariage, si je peux me permettre l'expression. Les gens vivent de plus en plus en union libre. Ce mouvement, madame Landolt, a commencé de nombreuses années avant que les couples de même sexe aient la possibilité de se marier. Je ne vois pas le lien de cause à effet. Je voudrais que vous m'éclairiez à ce sujet.
[Traduction]
Mme Gwendolyn Landolt: Vous avez raison de dire qu'il y a plus de gens qui vivent en union libre; 14 p. 100 des unions au Canada sont aujourd'hui des unions libres plutôt que des mariages officiels. Vous avez raison sur ce point, et c'est certainement plus prononcé au Québec.
Mais l'union civile des couples de même sexe est légale depuis bien des années en Scandinavie. Aux Pays-Bas, ces couples sont autorisés à se marier depuis 2000 ou 2001; cela fait donc cinq ans maintenant. Mais les unions civiles, qui sont équivalentes au mariage en Scandinavie, existent depuis longtemps dans les pays scandinaves.
Ce qu'on a constaté, dans ces pays-là, c'est que cela a accéléré le mouvement d'abandon du mariage traditionnel. Les gens s'en désintéressent de toute façon, mais parce qu'ils ne reçoivent pas la même reconnaissance, parce qu'ils n'obtiennent pas les mêmes avantages, ils sont de plus en plus nombreux à ne pas se marier, et quand on regarde l'expérience scandinave, on peut dire... Au Québec, le mariage a perdu de sa popularité, mais pour d'autres raisons, je pense, parce que le mariage entre conjoints de même sexe n'y est pas autorisé depuis longtemps.
Il y a un lien de cause à effet, comme vous dites, dans les pays scandinaves, en Belgique et aux Pays-Bas. Le mariage traditionnel perd du terrain, et le résultat—l'élément qui nous préoccupe, encore une fois—, c'est que des enfants naissent sans que leur père et leur mère soient unis officiellement par le mariage. Nous savons d'après les chiffres de Statistique Canada, par exemple, et d'après beaucoup d'autres études, que cela fait du tort aux enfants. C'est pourquoi nous disons qu'il faut étudier la question. Il faut éviter d'aggraver le problème.
[Français]
M. Richard Marceau: Merci. J'ai une dernière question à poser, monsieur le président. C'est une question brève qui commande une réponse par oui ou par non.
Pour les membres de l'Association du Barreau canadien, est-ce que l'article 3, que le ministre dit être déclaratoire, est constitutionnel en vertu du partage des compétences? Est-ce que c'est un empiètement dans les champs de compétence des provinces, ou est-il est légal, selon vous?
[Traduction]
M. James Lebo: Si j'ai bien compris le fond de votre question, vous voulez savoir si la protection de la liberté de religion, dans le projet de loi, est constitutionnelle. À mon avis, oui, parce que cela reflète l'alinéa 2a) de la Charte, qui est le texte fondateur à cet égard. C'est de là que vient cette protection.
Le président: Merci.
Monsieur Siksay, sept minutes, s'il vous plaît.
M. Bill Siksay: Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins.
Je dois dire que je suis un peu troublé par le point de départ de certains des témoins que nous avons entendus cet après-midi et par les déclarations qu'ils ont faites, d'autant plus que le Parlement a tenu un débat très approfondi sur la question—sans doute le plus approfondi depuis des années— et que le principe de ce projet de loi a été approuvé en deuxième lecture. Le Parlement s'est prononcé très clairement sur le projet de loi, et il me semble qu'une personne aussi bien informée que vous l'êtes sur le processus parlementaire, madame Landolt, doit se rendre compte que cela veut dire quelque chose ici, sur la colline du Parlement. Je trouve donc vos commentaires un peu préoccupants, du moins votre premier point.
Je voudrais poser une question à l'imam Patel au sujet des points qu'il a soulevés. Il me semble que beaucoup de vos observations se rapportent à des choses qui relèvent des provinces, et de l'Ontario en particulier. J'ai travaillé assez longtemps dans le domaine des droits de la personne en Ontario et j'ai une bonne expérience de ce domaine; je me demande seulement si vous croyez que la loi ontarienne sur les droits de la personne comporte des lacunes quant à la protection de la liberté de religion.
º (1650)
M. Abdul Hai Patel: Non, ce n'est pas la même chose pour la loi elle-même. Personnellement, je dis toujours aux gens que le Code des droits de la personne de l'Ontario est un des meilleurs au monde, sinon le meilleur. Il consacre et protège les droits de tous. Quant à son application, c'est une autre histoire, parce que c'est la cour qui fixe les peines, en définitive, quand une cause se rend devant les tribunaux.
En lui-même, le Code des droits de la personne de l'Ontario ne pose aucun problème, à mon avis, en ce qui concerne les droits individuels. Pour ce qui est de la liberté de religion, il protège également les gens, surtout en demandant aux employeurs de tenir compte des convictions religieuses.
Maintenant, le projet de loi C-38 va plus loin, en ce sens que, d'après moi, ce motif de protection n'est pas prévu dans le code. Quand le projet de loi C-38 sera adopté, il obligera tout le monde à respecter cela. Il y aura un conflit, comme je l'ai dit, aux points d'intersection avec le Code des droits de la personne de l'Ontario, quant à savoir ce qui va se passer si un ministre ou un autre membre du clergé refuse un service donné, que ce soit un baptême ou une autre cérémonie d'une autre religion, en ce qui concerne l'endroit où il sera possible de tracer la ligne. Ce que je me demande, c'est si c'est limité aux lieux de culte. Il faut le préciser. Si quelqu'un n'appartient pas à l'église et qu'on lui refuse un enterrement, par exemple... La question se pose également au sujet de l'enterrement des membres d'un couple gai, d'ailleurs.
Il y a un certain nombre d'autres points que je ne pouvais pas inclure dans ma présentation, mais comme on m'a demandé de soumettre des amendements, je pourrai y définir ces points-là, au sujet de la protection à accorder. Mais pour répondre à votre question, le code lui-même me convient. Il protège les droits de chacun, mais il ne protège pas le clergé s'il est appliqué à la lettre. N'importe quel membre du clergé qui refuserait d'offrir un service contreviendrait au Code des droits de la personne de l'Ontario. Et le mariage serait un de ces services. C'est mon interprétation, et c'est celle que le tribunal pourrait très bien retenir.
M. Bill Siksay: Il me semble que le gouvernement ontarien a adopté récemment un projet de loi omnibus pour essayer d'apporter certains des changements requis à cause des mariages entre conjoints de même sexe. Est-ce que vous ou votre organisation, ou d'autres, avez soulevé ces questions à ce moment-là, quand le gouvernement ontarien étudiait ce projet de loi?
M. Abdul Hai Patel: En fait, les Ontariens ont été complètement pris par surprise. Nous avons été très étonnés que le gouvernement fasse adopter ce projet de loi aussi vite, sans consultation et sans que beaucoup de gens en aient connaissance. Donc, nous n'avons pas eu notre mot à dire sur son contenu. En fait, il ne couvre pas... Il complète simplement plus ou moins le projet de loi C-38 à bien des égards.
M. Bill Siksay: Madame Landolt, vous avez parlé du nombre de mariages entre gais et lesbiennes qui ont eu lieu au Canada depuis que la loi a changé. Vous avez essayé de tracer un parallèle avec le déclin du mariage en général dans les pays où le mariage entre couples de même sexe existe déjà. Y a-t-il eu une baisse dans le nombre de mariages célébrés au Canada depuis deux ans?
Mme Gwendolyn Landolt: Encore une fois, cette situation n'existe au Canada que depuis juin 2004. Cela fait un an que la Cour d'appel de l'Ontario a prononcé sa décision. C'est pourquoi, nous devons nous tourner vers d'autres pays qui ont plus d'expérience dans ce domaine. Je crois que nous avons eu tort de ne pas nous intéresser à l'expérience des autres pays. C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas nous prononcer pour le moment.
Comme je l'ai dit, très peu de couples homosexuels ou conjoints de même sexe se sont mariés au Canada depuis.
M. Bill Siksay: Est-ce que les statistiques générales sur le nombre de mariages au cours de cette période ne sont pas encore disponibles?
Mme Gwendolyn Landolt: Si, et vous avez sans doute entendu le témoignage de la fonctionnaire du ministère de la Justice. Elle a signalé qu'environ 3 000 mariages de conjoints de même sexe avaient été enregistrés et qu'environ 65 p. 100 concernaient des Canadiens. Par conséquent, il y en a eu environ 1 950.
M. Bill Siksay: C'est de là que vous tirez vos chiffres.
Mme Gwendolyn Landolt: En effet, nos chiffres proviennent du témoignage de la fonctionnaire du ministère de la Justice.
M. Bill Siksay: Mais rien n'indique une baisse dans les statistiques générales au Canada au cours de cette période.
Mme Gwendolyn Landolt: Eh bien, nous n'avons pas eu le temps de les examiner. C'est exactement ce que je veux dire. En un an, c'est impossible. C'est pourquoi il est indispensable d'examiner la situation dans d'autres pays.
M. Bill Siksay: Je me demandais si vous aviez pris connaissance d'études à ce sujet au Canada.
Mme Gwendolyn Landolt: Nous devons nous tourner vers les autres pays qui ont une expérience dans le domaine.
M. Bill Siksay: Monsieur Foreman, vous nous avez dit que, selon l'ABC, le projet de loi protège les enfants des couples de conjoints de même sexe. J'aimerais vous demander de nous expliquer un peu pourquoi vous estimez que le projet de loi est important et comment il contribuerait à améliorer la situation.
M. Sean Foreman: Volontiers.
Je reconnais que la Cour suprême du Canada n'a pas nécessairement eu la possibilité de présenter une décision complète sur toutes les questions. Les cours d'appel de l'Ontario et de la Colombie-Britannique ont présenté des décisions unanimes qui fournissent, à mon avis, des indications au Parlement et aux députés sur ces questions.
Comme je l'ai dit, les tribunaux ont reçu des témoignages de spécialistes représentant tous les points de vue. Les énormes ressources consacrées à l'étude de cette question se chiffrent en centaines de milliers de dollars. Pour commencer, les tribunaux ont accepté et reconnu, au chapitre des droits ou avantages des enfants, qu'un grand nombre d'entre eux vivent dans des familles gaies et lesbiennes au Canada et que ce ne se sont pas nécessairement des enfants engendrés par leurs parents, mais d'enfants provenant de familles reconstituées. C'est un aspect important. Les droits et les intérêts de ces enfants sont protégés et renforcés par le fait que leurs parents ont accès à l'institution du mariage civil.
Par conséquent, les témoignages sur lesquels ces tribunaux ont appuyé leur analyse et leurs décisions fournissent des renseignements utiles. Tous les tribunaux qui se sont penchés sur cette question ont reconnu que les nouvelles dispositions protègent mieux les intérêts des enfants et des familles de conjoints de même sexe.
º (1655)
M. Bill Siksay: Merci.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
Nous allons maintenant passer au Parti libéral. Allez-y, monsieur Savage.
M. Michael Savage (Dartmouth—Cole Harbour, Lib.): Merci beaucoup.
Je remercie les témoins qui ont pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui.
J'aimerais tout d'abord poser une question à Mme Landolt. Vous avez beaucoup parlé du déclin du mariage. Vous avez dit à un moment donné qu'une des raisons pour lesquelles le mariage connaissait un déclin s'explique par le fait que les gens ne voient pas les mêmes avantages dans le mariage. Qu'entendez-vous par « avantages »?
Mme Gwendolyn Landolt: Eh bien, les avantages sont à la fois intrinsèques et extrinsèques, dans le sens que le mariage se traduit par des avantages financiers tels que les prestations du RPC. Il y a aussi les avantages de la reconnaissance. Les couples qui donnent naissance à des enfants et qui les élèvent font un énorme sacrifice. Ils se privent pour élever leurs enfants. Or, les enfants sont essentiels pour l'avenir du pays. Malheureusement, on ne considère plus de nos jours que ces parents font une contribution énorme au pays. Ils sont traités exactement comme tout le monde.
Les conjoints de même sexe ne font pas une contribution analogue... Ils peuvent avoir des enfants, mais ils ne peuvent pas procréer eux-mêmes. Or, si la société a toujours protégé le mariage au fil de l'histoire, c'est justement pour encourager la procréation.
Nous constatons, comme vous le savez, que la population du Canada connaît un déclin spectaculaire. Une des raisons, c'est que les gens pensent que le mariage ne signifie plus rien. Le mariage est ouvert à n'importe qui et les sacrifices de certains couples ne sont pas reconnus. Les gens refusent de s'engager dans une union conjugale.
M. Michael Savage: Ne pensez-vous pas que les personnes qui luttent pour avoir le droit de se marier ont plus de respect pour l'institution du mariage que beaucoup d'autres qui y ont accès automatiquement?
Mme Gwendolyn Landolt: La réponse à votre question se trouve dans les articles écrits à ce sujet par des homosexuels. Ils disent eux-mêmes que s'ils veulent avoir accès au mariage, c'est pour pouvoir changer cette institution. Je peux vous lire à ce sujet une citation que vous trouverez également dans notre mémoire. Ces gens-là disent qu'ils veulent changer carrément le sens et l'objet du mariage, parce qu'ils n'aiment pas ce qu'il représente actuellement. Par exemple, Gareth Kirkby, éditeur du journal homosexuel Xtra a écrit ceci:
Notre culture n'a pas la même hiérarchie que la culture hétérosexuelle. Nous savons que l'amour peut avoir des visages, des noms, des âges, et des lieux différents et nombreux... Nous savons qu'une relation qui dure 30 ans n'est pas meilleure qu'une relation de neuf semaines ou une aventure de neuf minutes—elle est différente, mais pas meilleure. |
Nous avons également d'autres études—
M. Michael Savage: Excusez-moi, je n'ai que quelques minutes—
Mme Gwendolyn Landolt: D'autres homosexuels... Je crois que c'est M. Eskridge qui dit vouloir changer le mariage—
M. Michael Savage: Je vais m'assurer de les retrouver.
Mme Gwendolyn Landolt: —parce que c'est différent. Et alors nous, nous disons : attention! Quelles sont les conséquences de tout cela pour la société canadienne et en particulier pour les enfants?
» (1700)
M. Michael Savage: Parlons des enfants, puisque vous avez souligné combien ils étaient importants. Je pense que vous faites la distinction entre faire des enfants et élever des enfants.
Vous faites la distinction, n'est-ce pas?
Mme Gwendolyn Landolt: Je crois que la Cour suprême du Canada a déclaré dans un jugement que c'est le couple hétérosexuel qui crée et élève les enfants. Les deux vont de pair. Bien sûr, il y a des enfants abandonnés et des enfants adoptés. Mais la vaste majorité des Canadiens, selon la Cour suprême du Canada—il s'agit de l'arrêt Nesbit et Egan—sont nés et élevés par leurs parents biologiques et c'est la raison pour laquelle il est culturellement important de préserver cet état de choses afin de protéger les enfants pour qu'ils aient un père et une mère afin de pouvoir définir leur identité sexuelle et de bénéficier de l'apport de leurs deux parents.
M. Michael Savage: Merci. Tout comme vous, je respecte la Cour suprême.
Je vais vous poser une question plus précise au sujet d'une enfant que je connais. Je suis le parrain d'une petite fille. J'ai moi-même deux enfants et je suis le parrain de plusieurs autres dont une petite fille élevée par un couple de lesbiennes qui ont une relation stable à Toronto. Cette enfant a une famille comme les autres, sauf qu'elle a deux mères. Avec ses parents, elle va à l'église, elle va au magasin, elle va au cinéma, elle joue au soccer. Elle fait tout ce que font les autres enfants. Elle joue dans la rue comme le font mes enfants.
Pourquoi ne peut-on pas dire qu'avec ses parents, elles forment une famille et que ses parents ont le droit de voir leur mariage reconnu par leur pays?
Mme Gwendolyn Landolt: Sauf que l'union de deux lesbiennes n'est pas la même chose que l'union d'un homme et d'une femme. Si vous lisez notre mémoire, vous pourrez prendre connaissance des études qui ont été faites à ce sujet. Les enfants sont différents lorsqu'ils sont élevés par deux personnes du même sexe. Leur mode de vie est différent. Ils vivent dans un contexte différent. Leur échelle de valeurs est différente. Et, que ce soit meilleur ou pire, les enfants n'ont pas la sécurité et la stabilité qu'ils auraient dans un mariage traditionnel. Ils sont différents.
Quelle que soit la relation du couple de même sexe, relation qui est tout à fait possible—ils peuvent faire ce qu'ils veulent quand et comme ils le veulent—ce n'est pas la même chose que l'union d'un homme et d'une femme qui se sont engagés pour la vie à élever leurs enfants. C'est pourquoi, les enfants sont différents.
M. Michael Savage: Je me rends compte que le bien-être des enfants vous tient à coeur et que vous voulez pour eux ce qu'il y a de meilleur. La petite fille dont je vous ai parlé ne pourrait pas avoir de meilleurs parents. Je l'ai constaté par moi-même et je le sais. À mon avis, la seule chose qui empêche ses parents de se marier, c'est qu'ils sont nés différents—ils n'ont rien fait de spécial, ils sont nés comme cela.
Mme Gwendolyn Landolt: Si vous ne parvenez pas à comprendre les différences, je vous suggère de demander à des enfants de venir témoigner... Je pense en particulier à une petite fille qui a été élevée par son père homosexuel. Elle était exposée à des choses que la plupart des enfants ne connaissent pas. Les relations sont différentes. La culture d'une union de même sexe... Vous voyez les choses de l'extérieur, mais les enfants sont différents. La situation est différente pour les enfants qui sont élevés dans une union de ce type.
M. Michael Savage: Je crois que je comprends la situation de l'intérieur. Connaissez-vous personnellement des enfants qui ont été élevés par des lesbiennes?
Mme Gwendolyn Landolt: Oui, malheureusement, et j'ai pu constater les différences. J'ai noté que ces enfants ont des problèmes d'identité sexuelle. J'ai noté beaucoup de différences.
M. Michael Savage: Ce n'est pas ce que j'ai constaté.
Mme Gwendolyn Landolt: Permettez-moi de préciser que j'ai siégé au Conseil d'administration de la Société d'aide à l'enfance de Toronto pendant 11 ans et j'ai constaté de nombreux traumatismes chez les enfants. C'est pénible de réaliser que les enfants sont des pions innocents dans toute cette histoire.
M. Michael Savage: Je suis d'accord. Certains des enfants dont vous avez examiné le dossier à la Société d'aide à l'enfance provenaient-ils de familles hétérosexuelles?
Mme Gwendolyn Landolt: Oui, on ne peut pas nier qu'il y ait des problèmes dans les unions hétérosexuelles. Mais il y en a beaucoup plus dans les unions de conjoints de même sexe. Dans de telles unions, les problèmes sont pratiquement inévitables. Les enfants sont différents. Ils n'ont pas les mêmes avantages. J'ai vu ces enfants et je sais qu'ils ont été malmenés.
M. Michael Savage: Ce qu'il y a de merveilleux, c'est que tous les enfants sont différents.
Mme Gwendolyn Landolt: Peut-être, mais les enfants peuvent subir des traumatismes. Encore une fois, je vous demande d'examiner les études que nous citons en référence. Nous avons fait de nombreuses études afin de définir ce qui est bon pour les enfants, parce que leur bien-être est notre souci principal. Si vous consultez notre mémoire et certaines des études auxquelles nous nous référons, vous ne manquerez pas de partager nos préoccupations.
M. Michael Savage: Je vais les lire.
Merci.
Le président: Merci.
Nous allons maintenant passer aux conservateurs.
Monsieur Jean.
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC): Merci, monsieur le président.
Je vais commencer par vous raconter une histoire en précisant au départ que je suis moi-même avocat. Combien d'opinions pouvez-vous obtenir si vous vous adressez à 100 avocats? Réponse: aucune si vous ne les payez pas et un minimum de 200 si vous leur versez des honoraires.
Ma première question s'adresse à M. Foreman et à M. Lebo. Croyez-vous à la notion d'application régulière de la loi et à la primauté du droit?
M. James Lebo: Évidemment.
» (1705)
M. Brian Jean: La façon de procéder à laquelle j'ai été soumis ici m'était tout à fait étrangère auparavant. J'ai pratiqué pendant 11 ans la profession d'avocat plaidant dans le Nord de l'Alberta. J'avais l'habitude de recevoir des rapports présentenciels longtemps avant le procès, les évaluations bilatérales en matière de garde au moins 30 jours avant le procès, les divulgations de la Couronne trois ou quatre mois au préalable et les listes de témoins avant le procès.
Ici, je n'ai rien reçu de tout cela avant les réunions. Si vous croyez à la notion d'application régulière de la loi, ainsi qu'à la primauté du droit, ne siégez pas à ce comité car à mon avis, ces principes ne sont pas respectés ici. Je reçois la liste des témoins le jour avant et les rapports quelques heures avant la convocation. Dans de telles conditions, c'est difficile de se préparer. Aussi, je vous demande de bien vouloir m'excuser si mes questions ne sont pas appropriées ou si mes recherches sont insuffisantes.
J'aimerais savoir tout d'abord pourquoi l'ABC présente dans son mémoire d'aujourd'hui une position différente de celle qu'il avait exprimée dans le rapport du Sénat, en mars 2003.
M. James Lebo: Je vous demanderais de me rafraîchir la mémoire au sujet du document dont vous parlez.
M. Brian Jean: Le rapport publié par le Sénat en 2003 cite l'ABC de la manière suivante :
Donc, l'ABC appuyait le projet de loi qui cherchait à conférer ces droits et responsabilités aux «conjoints de fait» de même sexe et hétérosexuels. Ceci devait se faire par la création d'une définition de conjoint de fait, applicable aux situations assimilables aux unions conjugales à la fois homosexuelles et hétérosexuelles. (Les termes «époux» et «épouse» seraient réservés aux couples hétérosexuels mariés.) |
M. James Lebo: Vous me présentez une question à laquelle je ne peux pas répondre, parce que je ne connais pas le contexte d'où est tirée cette citation. Toutefois, je peux vous dire que je suis membre du conseil de direction depuis 1988 et que notre position sur l'élimination de la discrimination en matière d'orientation sexuelle est demeurée la même depuis la première résolution, qui date je crois de 1994.
Je me propose de vous faire parvenir ma réponse plus tard dans une lettre.
M. Brian Jean: Dans ce même rapport au Sénat, il est clair que vous aviez deux définitions différentes. Je pense que personne ici ne souhaite voir la discrimination se perpétuer. Cependant, vous utilisez deux définitions différentes qui concordent essentiellement avec la position du Parti conservateur. Vous avez avancé ce point de vue en 2000 et en 2003 et c'est exactement ce que préconise aujourd'hui le Parti conservateur. Je me demande pourquoi vous avez changé de position.
M. James Lebo: Je regrette, mais je n'en ai aucune idée. Nous devrons nous pencher sur cette question et nous communiquerons avec vous plus tard, mais je peux vous assurer qu'aujourd'hui l'ABC a une position très claire sur ce projet de loi. Notre point de vue est aussi clair que lorsque nous nous sommes présentés devant la Cour suprême l'an dernier.
M. Brian Jean: Je ne suis pas d'accord avec vous.
Question suivante. Dans le même rapport, on peut lire, à la page 6, « Dans ce but, l'ABC a dégagé les omissions (immigration, Loi sur la preuve et contraignabilité du conjoint, »—c'est là que je veux en venir—« exemption maritale pour l'âge du consentement en vertu du Code criminel) dans la Loi sur la modernisation et demandait que le gouvernement traite rapidement de ces omissions. »
Ce qui m'inquiète, c'est l'exemption concernant l'âge du consentement au mariage en vertu du Code criminel. Je suppose que cela vient de là où est-ce d'un autre document?
M. Sean Foreman: Je ne connais pas bien le rapport auquel vous faites référence, je crois peut-être que vous faites référence à la Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations. Vous mélangez peut-être le point de vue de l'ABC concernant la péréquation des avantages et des obligations découlant de la reconnaissance égale des relations entre conjoints de fait, avec nos présentations actuelles et notre position constante relativement à la reconnaissance du mariage des conjoints de même sexe.
Permettez-moi de vous faire remarquer, monsieur, que ce sont deux questions très différentes et qu'il n'y a à mon avis, aucune incohérence entre ces deux positions.
M. Brian Jean: Je peux déposer ce rapport pour vous. C'est un mémoire intitulé Mémoire concernant le mariage et la reconnaissances des unions de conjoints de même sexe, présenté par l'Association du Barreau canadien, avec table des matières incluse. Je ne pense pas que l'erreur vienne de moi.
M. Sean Foreman: J'examinerai ce document avec plaisir.
M. Brian Jean: Ma question suivante concerne le droit international. Au paragraphe 3, page 4 de votre rapport, vous mentionnez encore une fois que vous êtes convaincu que le droit international serait plus simple dans une économie globale. Vous formulez cette opinion dans le rapport que vous avez présenté aujourd'hui et non pas dans celui qui remonte à trois ans.
Ayant étudié le droit international en Australie et compte tenu de votre position relativement au mariage et aux unions de conjoints de même sexe, j'estime que tout cela prête à confusion. Je tiens à vous faire remarquer qu'un nombre écrasant de pays réservent le mariage aux couples hétérosexuels mais proposent des unions aux personnes de même sexe. Je tiens à vous faire remarquer qu'il est expressément interdit aux couples de même sexe de se marier dans d'autres pays.
Par conséquent, cela ne ferait qu'ajouter à la confusion et aux difficultés que rencontrent les immigrants si nous adoptions ce type d'approche au Canada. Bien entendu, nous faisons partie d'une économie mondiale, ce qui ne ferait que multiplier les problèmes.
Je crois qu'une vingtaine de pays ont adopté la position du Parti conservateur et que seulement deux autorisent les mariages de personnes de même sexe. J'aimerais entendre vos commentaires sur l'intégration internationale à laquelle vous faites allusion à la page 4.
» (1710)
M. James Lebo: Je commencerai par dire que que nous avons le plaisir d'être maîtres chez nous. Je tiens à dire que le Parlement gouvernera le pays en fonction de notre Constitution et que cette dernière est claire à cet égard.
Si un couple de même sexe se rend dans un autre pays, il devra, sans doute, se conformer au régime en vigueur dans ce pays comme nous le faisons naturellement lorsque nous nous rendons nous-mêmes à l'étranger.
En tout respect, j'estime qu'il s'agit d'appliquer la Charte des droits et libertés que notre position respecte fidèlement.
M. Sean Foreman: J'aimerais ajouter quelques mots, si vous le permettez. Je voudrais signaler par exemple que l'Espagne vient récemment d'adopter une loi autorisant le mariage des conjoints de même sexe, sans passer par les tribunaux.
Aux États-Unis, cette notion est de plus en plus reconnue, comme par l'arrêt Goodridge au Massachusetts et dans d'autres régions des États où les contestations se poursuivent. La question est toute aussi litigieuse là-bas, mais je pense que c'est significatif sur le plan de la reconnaissance et de la réciprocité internationales.
M. Brian Jean: En effet, vous avez entendu—
Le président: Je suis désolé. Vous avez utilisé tout votre temps de parole.
M. Brian Jean: Merci.
Le président: Vous avez utilisé deux minutes de plus que le temps qui vous était imparti.
Nous allons passer aux libéraux.
Monsieur Boudria.
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je crois qu'il faut être très clair au sujet de l'étape que nous avons atteinte dans le processus législatif et je précise, afin d'éviter toute confusion, que le projet de loi a été approuvé en deuxième lecture. On peut lire dans La procédure et les usages de la Chambre des communes, de Marleau et Montpetit, que je me permets d'appeler notre manuel d'utilisation, à la page 628 :
Motion peut être débattue, modifiée et mise aux voix. Débat centré sur le principe et l'objet du projet de loi. |
Nous avons adopté le projet de loi en principe. Nous n'avons plus à nous demander si nous sommes pour le principe du projet de loi. La Chambre a décidé et voté à deux reprises : une fois sur une motion contraire qui a été rejetée; et une fois sur le principe, que la Chambre a accepté.
Bien entendu, il y a un renvoi au comité législatif et c'est de cela que nous nous occupons actuellement. Le comité législatif a le mandat et le pouvoir de retourner le projet de loi à la Chambre avec ou sans amendements. Le comité n'a pas le pouvoir de présenter un rapport contenant des recommandations de fond au sujet du projet de loi. Autrement dit, nous ne pouvons produire que des amendements. Nous ne pouvons présenter un rapport dans lequel nous demanderions d'examiner telle ou telle question. Ce n'est pas ce que l'on nous demande. Nous devons uniquement formuler au besoin des amendements.
Mes questions portent sur les amendements.
Imam, nous sommes prêts à examiner les amendements que vous voudrez bien nous soumettre afin de nous aider à préciser le texte du projet de loi en vue d'assurer une protection religieuse. C'est une question qui me préoccupe personnellement. Je tiens à ce que cette protection soit la plus solide possible. Merci de nous présenter des suggestions.
Permettez-moi maintenant de m'adresser aux autres témoins afin de leur demander leur opinion sur le libellé de l'article 3 qui se lit comme suit :
Il est entendu que les autorités religieuses sont libres de refuser de procéder à des mariages non conformes à leurs convictions religieuses. |
Cette protection est-elle suffisante? Vous êtes-vous penché sur la question? Pensez-vous que le libellé devrait être modifié afin d'offrir une plus grande protection ou pensez-vous que c'est suffisant ainsi?
M. James Lebo: Nous sommes satisfaits, puisque nous pensons que le texte du projet de loi est conforme à l'alinéa 2 a) de la Charte.
L'hon. Don Boudria: J'aimerais demander au même témoin s'il s'appuie sur le texte du point six de la décision de la Cour suprême qui se lit comme suit : « En ce qui concerne la Question 3, nous concluons que la liberté de religion garantie par la Charte protège les autorités religieuses de la contrainte d'avoir à marier deux personnes du même sexe contrairement à leurs croyances religieuses. »?
Est-ce que vos conclusions s'inspirent de ce texte ou est-ce que cela vous incite à penser que vos croyances sont protégées?
» (1715)
M. James Lebo: Certainement, puisque c'est exactement le point de vue que nous avons défendu devant la Cour suprême et c'est l'avis que la Cour suprême a émis dans ses conclusions.
L'hon. Don Boudria: Très bien.
M. Sean Foreman: Est-ce que je peux répondre moi aussi?
L'hon. Don Boudria: Mais bien entendu, monsieur.
M. Sean Foreman: Au paragraphe 59 de sa décision, la Cour suprême précise également que la protection permet d'éviter toute utilisation forcée de lieux sacrés pour la célébration de mariages de personnes du même sexe ainsi que l'obligation de collaborer à de tels mariages lorsqu'elle se penche sur la capacité de la Charte à protéger les libertés religieuses. Par conséquent, le libellé du projet de loi C-38 concernant la protection religieuse ne vise pas, à mon avis, à inscrire cette protection dans la loi; le texte se contente de refléter la protection existante qui découle de la Charte.
L'hon. Don Boudria: Très bien.
Ai-je le temps pour une autre question?
Le président: Certainement.
L'hon. Don Boudria: Merci.
J'aimerais savoir si REAL Women of Canada fait partie du groupe connu sous le nom de Defend Marriage Coalition?
Mme Gwendolyn Landolt: Vous voulez savoir si nous sommes membres de la Defend Marriage Coalition? Oui, nous le sommes.
L'hon. Don Boudria: Savez-vous que cette organisation a pris les commandes des sites Web des députés?
Mme Gwendolyn Landolt: Si j'ai bien compris, ils m'ont dit qu'ils avaient des sites Web pour les deux partis, conservateurs et libéraux, sur la même question. Je ne savais rien à ce sujet. Mais pourquoi pas, après tout, puisque les deux partis participent au débat? Je ne pense pas que cela pose problème.
L'hon. Don Boudria: Vous étiez donc au courant?
Mme Gwendolyn Landolt: Personnellement, je ne m'en occupe pas, mais je crois savoir qu'ils ont des sites Web pour certains libéraux et pour certains conservateurs.
L'hon. Don Boudria: Ce n'est pas ce que je voulais dire. Je voulais plutôt parler des noms de domaine.
Mme Gwendolyn Landolt: De quoi?
L'hon. Don Boudria: Si vous allez sur Internet et que vous cliquez sur l'adresse donboudria.ca, vous aboutissez directement au site de cette coalition dont vous affirmez être membre.
Mme Gwendolyn Landolt: Oui.
L'hon. Don Boudria: Vous étiez au courant?
Mme Gwendolyn Landolt: Je n'ai pas consulté les sites Web, mais je sais qu'ils ont des sites pour les deux partis, effectivement.
Quel est le problème?
L'hon. Don Boudria: Ce n'est pas la question que je vous pose. Je vous demande si votre organisation sait que la coalition à laquelle vous appartenez contrôle l'accès aux noms de domaine des députés et je crois que vous avez répondu par l'affirmative.
Merci.
Mme Diane Watts (recherchiste, REAL Women of Canada): Non, je ne pense pas que la réponse—
Mme Gwendolyn Landolt: Un instant. Comment?
[Français]
Le président: Merci, monsieur Boudria.
[Traduction]
Mme Diane Watts: La réponse n'est pas oui.
Mme Gwendolyn Landolt: La réponse n'est pas oui.
Mme Diane Watts: Nous ne sommes pas au courant de cela.
L'hon. Don Boudria: Alors, c'est une affaire qui mérite examen.
Si vous cliquez sur le site Web, donboudria.ca, un site que j'entretiens à mes frais depuis plusieurs années, vous constaterez qu'il a été détourné ou piraté par quelqu'un de Toronto qui l'a transféré ou vendu à une organisation qui porte le titre de Defend Marriage Coalition.
Si vous vous rendez sur mon site Web parlementaire, sur le site Don Boudria—il y a un lien—vous apprenez que vous êtes sur le site de l'organisation, un peu plus bas il y a des informations sur moi et au bas de la page, il y a des détails concernant une campagne de financement.
Vous n'étiez pas au courant de cela?
Mme Diane Watts: Non.
Mme Gwendolyn Landolt: Non, pas du tout.
L'hon. Don Boudria: Alors comme ça, vous appartenez à cette coalition et vous n'êtes pas au courant?
Mme Gwendolyn Landolt: Je savais qu'il y avait des sites Web, mais je n'avais aucune idée de leur contenu. Nous n'avons jamais été prévenues. Nous sommes simplement membres de la coalition, mais ce sont là des détails auxquels nous n'avons pas participé.
L'hon. Don Boudria: Merci.
[Français]
Le président: Merci. Nous passons maintenant au Bloc québécois.
Monsieur Ménard, vous disposez de cinq minutes.
M. Réal Ménard: Merci, monsieur le président. Si vous me le permettez, je vais poser une ou deux questions à mes amies de REAL Women of Canada. Je me permets de les appeler mes amies, mais je ne veux pas commettre d'abus de langage. On connaît nos susceptibilités réciproques.
Vous avez fait une déclaration extrêmement lourde de conséquences. Je me permets de vous inviter à la nuancer. On peut être pour ou contre le mariage. Dans une démocratie, c'est tout à fait le droit des citoyens d'appuyer ou non un projet de loi et d'avoir des valeurs éthiques et morales qui nous amènent à vouloir défendre le statu quo. Cela ne me pose aucun problème.
Cependant, j'ai un peu de mal à vous suivre lorsque vous semblez vous réclamer d'études — j'ai hâte de voir votre document — qui donnent à penser que ce que les psychologues appellent la psychogenèse, le développement d'un enfant vivant dans une famille homosexuelle, serait différent, et je ne parle pas d'éthique, de morale ou d'environnement. Si vraiment vous croyez cela, il y a un sacré problème de rigueur et d'honnêteté intellectuelle. Que vous soyez contre le mariage ne me pose aucun problème; que vous soyez fâchées contre le Bloc ou contre les Libéraux, que vous bloquiez nos télécopieurs, cela fait partie de la démocratie. Quand on est un élu du peuple, on peut accepter cela.
Toutefois, croyez-vous sincèrement, en toute honnêteté et en toute rigueur, qu'un enfant vivant dans une famille homosexuelle sera différent des enfants élevés dans une famille hétérosexuelle, sur le plan de sa psychogenèse? Je parle ici des stades de son développement: l'âge auquel il va marcher tout seul, auquel il va uriner, sa capacité à attacher les lacets de ses chaussures, sa motricité, son développement du langage, sa capacité de comprendre les mathématiques, son premier sentiment amoureux. Je veux simplement comprendre cette partie de votre intervention.
» (1720)
[Traduction]
Mme Gwendolyn Landolt: La réponse est—
[Français]
M. Réal Ménard: Si vous avez le nom d'un psychologue qui défend un tel point de vue, j'espère que vous allez nous le donner. Je crois que l'Association canadienne de psychologie doit venir témoigner la semaine prochaine. J'en appelle à votre rigueur et à votre honnêteté intellectuelle.
[Traduction]
Mme Gwendolyn Landolt: Vous me demandez si des enfants élevés par des parents homosexuels ou de même sexe sont différents des autres enfants. Je réponds sans hésiter que ces enfants sont très différents tout simplement parce qu'ils sont élevés de manière différente. Les enfants sont exposés à une culture différente: ils n'ont pas de référence en matière d'identité sexuelle ni de modèles à imiter. Les différences entre le mariage de conjoints de même sexe et le mariage traditionnel sont nombreuses. Ces différences que nous exposons dans nos références se répercutent sur les enfants.
[Français]
M. Réal Ménard: Non, ce n'est pas de cela que je vous parle.
[Traduction]
Je ne parle pas de cela.
[Français]
Je vous parle de la psychogenèse, du développement de l'enfant. Vous soutenez, à propos des stades qu'un enfant passe — je ne vous parle pas des parents —, que vous avez des références scientifiques. Vous et moi sommes des personnes intelligentes: nous comprenons le sens des mots. Sur le plan de la psychogenèse — l'âge auquel on attache un soulier, le premier pipi, la première capacité de comprendre une opération mathématique —, pensez-vous sincèrement que le cerveau d'un enfant issu d'une famille homosexuelle est différent? C'est ce que vous dites au comité. Vous avez le droit de le dire, mais je veux simplement comprendre si c'est vraiment ce que vous pensez.
[Traduction]
Mme Gwendolyn Landolt: Oui, leurs structures de comportement sont différentes et leur sexualité est différente, parce que ces enfants sont plus enclins à être attirés par des personnes de leur sexe. Par ailleurs, on a constaté qu'il y a plus d'interférences sur le plan sexuel avec les enfants qui sont élevés dans une union de conjoints de même sexe que dans une union traditionnelle. Cela perturbe le développement des enfants et entraîne la modification de leur identité sexuelle. Tous ces aspects là sont perturbés.
M. Réal Ménard: Qui a dit cela? Donnez-moi une référence.
[Français]
Donnez-moi une référence, parmi votre liste, qui soutient un tel point de vue.
[Traduction]
Mme Diane Watts: Nous avons deux pages de références.
Mme Gwendolyn Landolt: Elles sont toutes citées à la page 23. Avez-vous notre mémoire?
Une voix: Non.
Mme Gwendolyn Landolt: Nous l'avons fait traduire.
Reportez-vous aux pages 23 et 24 où nous faisons la liste de toutes les références prouvant que les enfants sont différents. Vous pouvez vérifier par vous-même les références qui concernent ces enfants. Vous constaterez que les parents ont des attentes à l'égard des enfants. Une étude australienne qui me vient à l'esprit actuellement montre que les enfants élevés par des couples de même sexe sont différents, que leurs valeurs sont différentes et que leur sexualité n'est pas aussi définie. Il y a de nombreuses catégories différentes : leur sociabilité est différente; leur perception d'eux-mêmes et leur estime de soi sont différentes.
J'aimerais que vous y jetiez un coup d'oeil parce que ce sont des sujets de préoccupation graves, pas pour vous ni pour moi, mais pour les enfants qui ne sont pas encore nés et les enfants qui grandissent actuellement.
[Français]
M. Réal Ménard: Mais est-ce que vous...
Le président: Non, je regrette, monsieur Ménard.
M. Réal Ménard: Excusez-moi, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Nous allons maintenant donner la parole au Parti libéral.
L'hon. Paul Harold Macklin: Merci. Étant donné que M. Brown a été très patient et qu'il n'a pas encore eu l'occasion de poser une question depuis deux heures, je pense que je vais lui céder mon temps de parole.
Le président: Très bien.
M. Brown du Parti conservateur.
M. Gord Brown (Leeds—Grenville, PCC): Merci, monsieur le président, et merci à vous monsieur Macklin. Je vais être rapide, parce que je sais que nous avons bientôt terminé.
Ma première question est destinée à l'ABC. Recevez-vous un financement du gouvernement fédéral?
M. James Lebo: Pas que je sache, monsieur. Nos activités sont financées par les cotisations de nos membres.
M. Gord Brown: Madame Landolt, est-ce que REAL Women reçoit un financement du gouvernement fédéral?
» (1725)
Mme Gwendolyn Landolt: Pas un sous.
M. Gord Brown: Il vaut autant que je continue—
M. Abdul Hai Patel: Aucun financement.
M. Gord Brown: Merci.
Pour moi, la protection des libertés religieuses est, bien entendu, un des sujets de préoccupation les plus graves que soulève ce projet de loi. C'est un sujet qui m'intéresse beaucoup et je sais que notre représentant de l'Islamic council va présenter certains amendements.
Puis-je vous demander à brûle-pourpoint, quelles sont les modifications que vous allez proposer? Dans l'état actuel des choses, le projet de loi est adopté en principe et le travail du comité consiste à présenter des amendements susceptibles d'améliorer le texte de loi. Alors n'hésitez pas à présenter des amendements.
M. Abdul Hai Patel: J'ai parlé des services. En Ontario, en particulier, le Code des droits de la personne stipule qu'il est contraire à la loi et au Code des droits de la personne de refuser un service sur la base de l'orientation sexuelle. D'après mon interprétation, une cérémonie de mariage peut être considérée comme un service et un imam ou un membre du clergé dans une mosquée, un temple, un hindou, un sikh ou autre, qui refuserait d'offrir un tel service serait en infraction par rapport au Code des droits de la personne.
On ne sait pas exactement à quel point interviendrait l'application de la Charte, mais si la Commission ontarienne des droits de la personne était saisie d'une telle cause, je suis certain que l'affaire serait portée devant les tribunaux et que le religieux serait jugé coupable d'une infraction, puisqu'il aurait refusé la prestation d'un service.
La liberté religieuse peut être suspendue dans d'autres cas. Je peux vous donner un exemple provenant d'une affaire dont j'ai moi-même présidé l'examen lorsque j'étais commissaire. Il s'agissait du propriétaire musulman d'un restaurant qui avait refusé de servir une personne aveugle qui s'était présentée dans son établissement avec son chien-guide. Pour un musulman, la salive d'un chien est considérée comme impure et inacceptable, mais pourtant, une personne aveugle ne peut se déplacer sans son chien. Cette cliente s'est sentie humiliée, insultée et finalement elle a dû attendre tellement longtemps pour se faire servir qu'elle a fini par partir.
Lorsque la commission a été saisie de cette affaire, elle a consulté un certain nombre de chefs religieux. C'est le regretté imam d'Ottawa qui m'avait donné la meilleure réponse. J'adhère totalement à son point de vue selon lequel les droits des particuliers, d'une personne aveugle, l'emportent sur les préjugés à l'égard des chiens ou autres dans de telles circonstances. Les droits de la personne aveugle l'emportent sur tous les autres droits.
Par conséquent, lorsqu'on refuse un service comme dans ce cas-là, que ce soit au restaurant ou dans une salle de banquet ou qu'il s'agisse par exemple des Chevaliers de Colomb... Comme je l'ai dit, si une salle de banquet propose un forfait ou engage un ministre du culte pour offrir un service et que ce dernier déclare: « Non, je ne veux pas bénir l'enfant d'un homosexuel », lorsqu'il s'agit d'un baptême ou d'une autre cérémonie de ce type... Les autres religions procèdent également à ce type de cérémonie, ainsi qu'à des mariages.
M. Gord Brown: Je comprends, mais j'aimerais savoir quelles sont les propositions que vous pouvez présenter pour protéger efficacement les institutions religieuses et exprimer clairement cette protection.
C'est pour moi un des plus grands problèmes que soulève ce projet de loi. Pour le moment, je ne peux imaginer une façon d'assurer cette protection. C'est pourquoi, je serais très intéressé de savoir ce que vous proposez à ce sujet.
M. Abdul Hai Patel: Puisque vous me renvoyez la balle et que vous me chargez de proposer le texte d'un amendement, je vous promets que je vais y réfléchir, mais je ne me sens pas en mesure de proposer quelque chose sur-le-champ.
Je pensais que le comité parlementaire irait plus loin dans l'élaboration d'amendements, mais je suis content d'avoir la possibilité de présenter mon point de vue sur la question.
M. Gord Brown: Très bien. Merci.
Je vais maintenant poser la même question à nos amis de l'ABC. Ils ont peut-être des idées sur le sujet.
M. James Lebo: Nous sommes d'avis, monsieur, que le projet de loi ne nécessite aucun amendement.
M. Gord Brown: Très bien. Il ne nous reste peut-être plus qu'une minute.
Madame Landolt, vous avez peut-être des idées à ce sujet?
Mme Gwendolyn Landolt: Oui. Étant donné qu'il s'agit d'une législation fédérale, il faut tenir compte du droit fédéral.
Pour commencer, j'aimerais signaler à mes savants confrères que je suis moi aussi membre de l'ABC. Ils savent que la Cour suprême a précisé que les droits civils, les droits religieux sont strictement de compétence provinciale. Par conséquent, nous sommes limités dans ce que nous pouvons faire. À titre d'exemple, la Loi de l'impôt sur le revenu est une loi fédérale qui protège les organismes de bienfaisance et les religions qui décident de ne pas célébrer des mariages de conjoints de même sexe. Qu'advient-il des organismes de bienfaisance qui n'acceptent pas les mariages de conjoints de même sexe? Ils devraient être protégés en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu.
Il faudrait modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne, qui relève du gouvernement fédéral, afin de protéger la liberté d'opinion et la liberté d'expression des gens sur la question du mariage de conjoints de même sexe. Beaucoup d'entre nous sommes contre ce type d'union et nous nous faisons traiter de tous les noms à cause de notre point de vue. J'aimerais que la Loi canadienne sur les droits de la personne protège mon point de vue et mon opinion. On ne peut faire appel qu'à la loi fédérale; c'est la seule chose que l'on puisse faire.
Je sais, bien entendu, qu'au niveau provincial, ainsi que l'a signalé mon savant confrère, des questions ont été soulevées au sujet de services tels que l'adoption et le recours à des parents d'accueil. À cause de cette loi et étant donné que la législation ontarienne considère qu'il s'agit d'un service, la Société d'aide à l'enfance s'est vue dans l'obligation de placer des enfants innocents dans des foyers constitués de conjoints de même sexe.
Il y a énormément de complications, mais le gouvernement fédéral doit bien entendu se limiter à son champ de compétence. La Loi canadienne sur les droits de la personne et la Loi de l'impôt sur le revenu offrent deux avenues que vous devriez envisager pour la présentation d'amendements.
» (1730)
M. Gord Brown: Très bien. Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup. Nous avons pratiquement ou même complètement utilisé le temps dont nous disposions.
Merci aux témoins d'être venus cet après-midi présenter leurs points de vue devant le comité législatif. Nous vous remercions de votre collaboration et de votre aide.
Pour ceux d'entre vous qui êtes intéressés, la prochaine réunion du comité débute dans 26 minutes, à 18 h.
Voilà. La séance est levée.