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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 24 mars 2005




¹ 1535
V         Le président (M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.))
V         Mme Cathy Holtslander (agent de projet, Coalition au-delà de l'agriculture industrielle)

¹ 1540
V         Le président
V         M. Bob Friesen (président, Fédération canadienne de l'agriculture)

¹ 1545

¹ 1550
V         Le président
V         Mme Diane Finley (Haldimand—Norfolk, PCC)

¹ 1555
V         Mme Cathy Holtslander
V         M. Bob Friesen
V         Le président
V         M. James Bezan (Selkirk—Interlake, PCC)
V         Mme Cathy Holtslander
V         M. James Bezan
V         Mme Cathy Holtslander
V         M. James Bezan
V         Mme Cathy Holtslander
V         M. James Bezan
V         Mme Cathy Holtslander

º 1600
V         Le président
V         Mme Denise Poirier-Rivard (Châteauguay—Saint-Constant, BQ)
V         Mme Cathy Holtslander
V         Mme Denise Poirier-Rivard

º 1605
V         Mme Cathy Holtslander
V         Le président
V         M. Bob Friesen
V         Le président
V         L'hon. Wayne Easter (Malpeque, Lib.)
V         M. Bob Friesen
V         L'hon. Wayne Easter

º 1610
V         M. Bob Friesen
V         L'hon. Wayne Easter
V         Mme Cathy Holtslander

º 1615
V         Le président
V         M. Charlie Angus (Timmins—Baie James, NPD)
V         Mme Cathy Holtslander
V         M. Charlie Angus

º 1620
V         M. Bob Friesen
V         Le président
V         Mme Cathy Holtslander
V         Le président
V         M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, PCC)

º 1625
V         M. Bob Friesen
V         M. Gerry Ritz
V         M. Bob Friesen
V         M. Gerry Ritz
V         M. Bob Friesen
V         M. Gerry Ritz
V         Le président
V         L'hon. David Kilgour (Edmonton—Mill Woods—Beaumont, Lib.)

º 1630
V         Mme Cathy Holtslander
V         L'hon. David Kilgour
V         Mme Cathy Holtslander
V         L'hon. David Kilgour
V         Mme Cathy Holtslander
V         L'hon. David Kilgour
V         Mme Cathy Holtslander
V         L'hon. David Kilgour
V         M. Bob Friesen
V         L'hon. David Kilgour
V         M. Bob Friesen
V         L'hon. David Kilgour
V         M. Bob Friesen
V         L'hon. David Kilgour
V         M. Bob Friesen
V         L'hon. David Kilgour
V         Le président
V         M. Bob Friesen
V         Le président
V         L'hon. David Kilgour
V         M. Bob Friesen
V         L'hon. David Kilgour
V         M. Bob Friesen
V         L'hon. David Kilgour
V         M. Bob Friesen
V         L'hon. David Kilgour
V         M. Charlie Angus
V         Le président
V         L'hon. David Kilgour
V         M. Bob Friesen

º 1635
V         Le président
V         L'hon. David Kilgour
V         Le président
V         L'hon. David Kilgour
V         Le président
V         M. Roger Gaudet (Montcalm, BQ)
V         Mme Cathy Holtslander
V         M. Roger Gaudet
V         Mme Cathy Holtslander
V         M. Roger Gaudet
V         Mme Cathy Holtslander

º 1640
V         M. Roger Gaudet
V         Le président
V         Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.)
V         Mme Cathy Holtslander
V         Mme Rose-Marie Ur
V         M. Bob Friesen

º 1645
V         Mme Rose-Marie Ur
V         M. Bob Friesen
V         Mme Rose-Marie Ur
V         M. Bob Friesen
V         Le président
V         M. James Bezan (Selkirk—Interlake, PCC)
V         M. Bob Friesen
V         M. James Bezan
V         M. Bob Friesen

º 1650
V         M. James Bezan
V         M. Bob Friesen
V         Le président
V         L'hon. Claude Drouin (Beauce, Lib.)
V         M. Bob Friesen

º 1655
V         L'hon. Claude Drouin
V         Le président
V         L'hon. Claude Drouin
V         Mme Cathy Holtslander
V         Le président
V         M. Gerry Ritz
V         Mme Cathy Holtslander
V         L'hon. David Kilgour
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 030 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 24 mars 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¹  +(1535)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.)): Veuillez prendre vos places, la séance va commencer.

    La séance d'aujourd'hui sera relativement courte. Nous souhaitons terminer l'audition des témoins pour 17 heures. Nous aurons ensuite quelques décisions à prendre à huis clos avant de rentrer chez nous. Nous devrons aussi nous assurer que nos invités puissent prendre leurs avions et rentrer dans leurs circonscriptions. Je suis sûr qu'ils veulent y rentrer avant la fin de semaine.

    Nous poursuivons cet après-midi l'étude du projet de loi C-27. Nous entendrons des représentants de la Fédération canadienne de l'agriculture. Évidemment, M. Bob Friesen, son président, vient régulièrement devant notre comité. Il est ici aujourd'hui pour nous communiquer son opinion sur le projet de loi.

    Nous accueillerons également Cathy Holtslander, représentant une autre organisation, la Coalition au-delà de l'agriculture industrielle.

    Je souhaite la bienvenue aux témoins.

    J'ai l'impression que Cathy sera la première. Voulez-vous commencer ? Si vous pouvez vous limiter à une dizaine de minutes, ou même moins, nous pourrons ensuite passer aux questions.

+-

    Mme Cathy Holtslander (agent de projet, Coalition au-delà de l'agriculture industrielle): Merci.

    Je vais lire mon mémoire, et cela prendra probablement moins de 10 minutes.

    La Coalition au-delà de l’agriculture industrielle est un organisme national qui représente des centaines de milliers de Canadiens. L’organisme est constitué d’organisations locales, provinciales et nationales qui s’attaquent à des problèmes touchant les fermes, la main-d’oeuvre, la santé, l’environnement, le bien-être des animaux, la ruralité et la vie en ville, ainsi qu'à des problèmes économiques liés à la production animale. Nous aspirons à une production animale fondée sur la santé et la justice sociale.

    Nous avons de sérieuses réserves au sujet du projet de loi C-27 et je suis ravie de pouvoir vous les exposer aujourd’hui. Le projet de loi C-27 est la deuxième étape d’un plan en trois temps pour réorganiser la réglementation canadienne en matière d’alimentation et d’agriculture. La troisième étape ne passera pas devant le Parlement car ce sera la mise en place d’un nouveau règlement adopté par décret et ne faisant donc pas l’objet d’un débat public. Comme le projet de loi C-27 remplacera les parties des lois agroalimentaires qui portent sur l’application, il obligera l’ACIA à se doter d’un nouveau règlement universel. Or, le remaniement en profondeur d’un règlement donne invariablement lieu à des changements stratégiques importants, par la restructuration des règles qui régissent le domaine visé.

    Aujourd'hui, le gouvernement a manifesté sa volonté de mettre en pratique lesrecommandations du Comité consultatif externe sur la réglementation intelligente, présentées en septembre 2004. Nous savons que le projet de loi C-27 est plus qu’une mesure administrative; c'est le mécanisme par lequel le gouvernement réalise un plan bien établi, étape par étape, à l’insu du public canadien.

    Je pourrais faire une analogie qui m’est venue récemment lorsque je regardais les finales du Brier, les championnats de curling. La loi de 1997 qui a créé l’ACIA représentait les pierres degarde du joueur de tête, en apparence insignifiantes, devant les anneaux. Le projet de loi C-27 représente les pierres du second, peut-être en position de marquer. Le remaniement réglementaire représentera les pierres du troisième, placées pour le dernier lancer. Malheureusement, il semble que le skip soit l’USDA et que Cargill et Monsanto soient les arbitres. Lorsque le nouveau règlement “intelligent” aura été adopté, nous ferons partie de la « ligue américaine » et nous aurons perdu notre autonomie.

    Une bonne part du problème lié au projet de loi C-27 tient à ce qu’il n’indique pas à l’ACIA dequel côté elle est. D’ailleurs, la mission même de l’Agence contient une contradiction : « L'Agence a comme objectifs de contribuer à la salubrité des réserves alimentaires ..., de faciliter le commerce des aliments, des animaux, des végétaux et des produits connexes. » Le projet de loi C-27 ne fait rien pour corriger le fait que la réglementation de la nourriture et de l’agriculture, pour des motifs de santé et de sécurité, est contraire à la promotion du commerce. De par leur nature, les règlements limitent et contrôlent les avantages privés dans le but de protéger l’intérêt supérieur du public. Le rapport du CCERI aggrave le problème, comme on le constate dans sa Vision, dont voici unpassage : « Le système réglementaire doit rehausser la performance des marchés et faciliter l'innovation, la compétitivité, l'esprit d'entreprise et l'investissement dans l'économie canadienne. »

    Des indices portent à conclure que l’ACIA est indûment influencée par ses liens avec l’entreprise privée. Nous en voulons pour preuve ce passage du rapport de 2000 de la Vérificatrice générale sur l’ACIA : « Les principaux mécanismes consultatifs font abondamment appel au secteur... Au rang des intervenants clés du « groupe des 30 » de l'Agence, se trouvent 30 groupements sectoriels, sept groupements universitaires et professionnels et un groupement de consommateurs. »

    En outre, vous avez appris récemment que le directeur général du Conseil des viandes du Canada, service de la réglementation et du commerce, avait travaillé 34 ans pour Agriculture et Agroalimentaire Canada et l’ACIA. Le Conseil des viandes du Canada représente les plus grands intérêts du domaine du conditionnement de la viande au Canada; son témoignage disait entre autres choses ceci :

Nous avons travaillé de près avec l'Agence d'inspection des aliments pendant denombreuses années... La réglementation et le manuel de procédure changent constamment, et nous sommes constamment en train de discuter de la façon de respecter les exigences, des changements à apporter à nos processus, de la meilleure façon de procéder partout au Canada.

    Serait-ce la queue qui commande le « chien de garde » ? Le projet de loi C-27 ne fait rien pour corriger la situation. Au contraire; il ne fournit pas les mécanismes requis pour assurer une transparence accrue, une meilleure participation du public et une plus grande reddition decomptes au sujet des mesures d’inspection et d’application. C’est pourquoi notre plus grande crainte au sujet du projet de loi C-27 est qu’il engendre un cadre permettant à une bureaucratie non élue, l’ACIA, de réorganiser la réglementation qui régit l’alimentation et l’agriculture au Canada, d’une manière qui place le commerce avant la sécurité publique et qui fasse passer l’intégration avec le système réglementaire américain avant le contrôle démocratique et légitime du Canada sur les règles qui régissent la nourriture que nous consommons. Nous croyons que le double mandat de l’ACIA la compromet au point où il devient impossible d’accepter un tel élargissement et un tel affermissement de ses pouvoirs sans que l’on intervienne d’abord sur son mandat.

    On pourrait revoir l'ACIA en s'inspirant de la Food Standards Agency du Royaume-Uni, le chien degarde indépendant de la salubrité des aliments.

    D’ici à ce que l’ACIA concentre son attention uniquement sur la réglementation de la santé, de la sécurité et de l’intégrité de l’agriculture canadienne, nous croyons que ce serait une erreur d’affermir et d’élargir ses attributions et ses pouvoirs.

    Je vais maintenant vous exposer des doléances plus précises au sujet du projet de loi C-27.

    L’article 8 autorise l’ACIA à conclure un accord avec un gouvernement étranger et un organisme réglementaire (c’est-à-dire une société privée) pour la collecte, la communication et l’utilisation de renseignements en vue d’assurer ou de contrôler l’application des lois ou pour la tenue d’enquêtes. Ce pouvoir est beaucoup trop vaste et prête à des abus, surtout de la part de gouvernements et d’organismes étrangers qui ne sont pas assujettis aux lois canadiennes en matière de protection des renseignements personnels et d’accès à l’information.

    Le projet de loi C-27 accroîtra la capacité de l’ACIA de recueillir de l’information sur les Canadiens. Toutefois, il n’oblige pas l’ACIA à plus de transparence en fournissant aux Canadiens l’intégralité de ses résultats d’inspection, résultats de tests ou motifs de décisions. Voici ce que dit la Vérificatrice générale du Canada au sujet du dernier rapport annuel de l’ACIA : « ...l’Agence ne répond pas adéquatement àmes attentes relativement à une information juste et fiable. »

    L’article 9 autorise l’ACIA à adopter les résultats d’inspections d’un gouvernement ou d’un organisme étrangers pour des produits importés au Canada. Cette disposition correspond à la recommandation du CCERI de mettre en place un système d’essai unique des produits agricoles en Amérique du Nord. Cela ressemble à une abdication de la responsabilité du Canada à l’égard de la santé et de la sécurité des Canadiens.

    L’article 23 permet à l’Agence de demander à la Cour fédérale une ordonnance permanente. Étant donné l’absence de mécanisme d’appel dans le projet de loi C-27, ce pouvoir semble excessivement arbitraire.

    L’article 56 indique les nombreux types de règlements qui peuvent être pris en vertu de la Loi. L’article 57 indique les documents produits par des organismes extérieurs qui peuvent être incorporés par renvoi. Considérant le double mandat de l'ACIA et les recommandations du comité consultatif externe, les articles 56 et 57 ne permettraient pas à l’ACIA de formuler des règlements qui s’appuieraient sur un cadre de gestion du risque plutôt que sur un cadre de protection de la santé et de la sécurité; s’appuieraient sur des méthodes axées sur le rendement, des mesures volontaires et des stratégies d’information irréalisables au lieu de normes applicables et de limites précises; intégreraient le système agricole et alimentaire canadien au système américain, pour des motifs de commerce, au détriment de la santé publique et des possibilités économiques des agriculteurs sur d’autres marchés; adopteraient des processus d’essai et d’approbation élaborés et des décisions prises à Washington; se répercuteraient sur les gouvernements provinciaux et locaux et engendreraient des barrières à la diversité culturelle qui traduit les valeurs locales et régionales, dans le but d’accroître le commerce et les échanges interprovinciaux.

    Nous craignons que l’ACIA, dépendant des grandes entreprises du secteur, ne mette en place des exigences réglementaires qui feront essentiellement office de barrières aux marchés pour ces entreprises et ces exploitations agricoles indépendantes, au lieu de servir de mesures nécessaires de santé et de sécurité. Un système réglementaire favorable à la transformation à grande vitesse, à la centralisation, à la haute technologie, aux immobilisations coûteuses, aux droits et aux capitalisations importantes nuirait à l’économie rurale en concentrant la production de viande et d’animaux dans une poignée degrands centres de conditionnement. Un tel système restreindrait également le choix des consommateurs en éliminant le petit producteur qui est garant de la diversité régionale, ethnique et culturelle dans la production alimentaire.

    Le modèle industriel à grande échelle à l'américaine, axé sur les exportations et privilégié par les intervenants industriels de l’ACIA, rend le Canada plus vulnérable aux litiges commerciaux comme la fermeture de la frontière aux bovins canadiens, en raison d’un cas d’ESB, et les droits compensateurs imposés sur les porcs canadiens. La façon dont l’ACIA s’est débarrassée du problème de la grippe aviaire semble découler de son obsession des apparences, à des fins commerciales, au détriment d’une réaction juste, raisonnable et fondée sur des faits scientifiques aux problèmes de santé.

    En résumé, le double mandat de l’ACIA constitue un problème de fond qui doit être résolu. Les recommandations du CCERI ont engendré un contexte stratégique au sein duquel la réécriture de règlements est susceptible de réduire et non pas d’améliorer la santé et la sécurité des Canadiens et de nuire à l’intégrité de l’agriculture canadienne. L’ACIA n’a pas un dossier reluisant en matière de transparence et de communication de renseignements au public, un mal auquel le projet de loi C-27 ne remédierait pas; au contraire, le projet de loi conférerait à l’ACIA plus de pouvoir pour recueillir, partager et utiliser de l’information. Vu les rapports étroits qu’entretient l’ACIA avec de grands acteurs de l’industrie agroalimentaire, les possibilités que soit pris en vertu du projet de loi C-27 un règlement équitable pour les fermes familiales et les petits transformateurs sont compromises.

¹  +-(1540)  

    Le projet de loi C-27 n’est pas une simple mesure administrative; c'est un mécanisme destiné à affermir et à élargir le pouvoir de l’ACIA d’apporter des changements structurels au régime canadien d’inspection des aliments et d’application des règles en la matière. Par conséquent, nous recommandons de ne pas adopter le projet de loi C-27.

+-

    Le président: Merci beaucoup, Mme Holtslander.

    J'ai oublié de présenter une autre personne, Heather Holland, qui s'occupe des questions de sécurité des produits alimentaires à la FCA. Merci d'être venue.

    M. Friesen.

+-

    M. Bob Friesen (président, Fédération canadienne de l'agriculture): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Comme d'habitude, c'est un plaisir pour moi de m'adresser à votre comité au sujet de questions qui touchent au coeur même de notre secteur. J'ai toujours la conviction que les personnes qui se trouvent autour de cette table partagent les mêmes intérêts que nos membres.

    Permettez-moi de dire tout d'abord que nous appuyons les objectifs du projet de loi. Nos réserves concernent certaines ambiguïtés du texte. Nous allons mettre ces ambiguïtés en lumière et vous demander certaines précisions, et je peux dire que nous avons avec nous le mémoire qui vous a été présenté par les Producteurs laitiers du Canada, qui contenait certaines propositions pour éliminer ces ambiguïtés.

    L'une de ces ambiguïtés concerne par exemple l'utilisation du mot « choses», notamment à l'article des définitions, sans que ce mot soit défini. Nous pensons que cela est beaucoup trop ambigu.

    Cela dit, permettez-moi de mentionner quatre éléments positifs du projet de loi. Le premier est l'article 9, concernant l'inspection étrangère. Vous savez peut-être que le secteur s'inquiète depuis déjà longtemps parce que nous avons mis en oeuvre des programmes de sécurité des aliments sur les exploitations elles-mêmes, des programmes environnementaux durables, etc., alors que nous n'avons aucune garantie de ne pas être obligés de faire concurrence à des produits importés n'ayant pas été assujettis aux mêmes critères. Nous croyons que cette nouvelle mesure permettra d'imposer le fardeau à l'exportateur avant que son produit n'arrive chez nous.

    Cela dit, nous devons évidemment surveiller de très près l'inspection et les normes d'inspection à l'étranger mais, après ça, nous aurons le moyen de dire que tel ou tel produit répond à nos normes. Cela atténuera certainement les préoccupations du secteur canadien.

    En ce qui concerne l'article 13, touchant les exemptions d'urgence, nous pensons qu'il est important, et je vais vous donner un exemple. Vous vous souviendrez qu'à l'époque de la tempête de glace, l'industrie laitière avait connu de grosses difficultés à cause de l'interruption du courant électrique et qu'elle n'avait pas pu exporter son lait pour le réimporter sous forme de lait en poudre à cause d'un cafouillage bureaucratique. Nous croyons que le changement envisagé facilitera cela de manière beaucoup plus efficiente.

    Au sujet de l'article 14, touchant la reconnaissance des résultats de l'inspection, voici encore un exemple, avec la grippe aviaire, où on a dû utiliser les laboratoires de l'ACIA parce qu'on estimait qu'il ne suffisait pas qu'un laboratoire provincial puisse confirmer le résultat d'un essai. Voilà donc encore un changement utile.

    En ce qui concerne l'article 20, touchant l'altération d'un produit réglementé, je présidais l'Office canadien de commercialisation du dindon la première fois où il y a eu une crainte d'altération de viande de dindon en Colombie-Britannique, juste avant le jour de l'Action de grâces. Nous pensons qu'il doit y avoir un mécanisme beaucoup plus efficace permettant d'intenter des poursuites pénales et d'imposer des critères beaucoup plus rigoureux d'application des règlements. Encore une fois, on va dans la bonne voie.

    Cela dit, il semble que l'objectif du projet de loi soit de rationaliser les pouvoirs d'inspection et d'application des règlements afin d'accroître l'harmonisation et de réduire le chevauchement et le double emploi en permettant à l'ACIA de travailler à partir d'un seul texte de loi, ce qui sera extrêmement utile, à notre avis.

    Revenons maintenant aux ambiguïtés. Nous pensons que certaines d'entre elles pourraient être réglées lors de la formulation des textes réglementaires mais, si tel était le cas, il faudrait évidemment entreprendre une consultation attentive et délibérée du secteur pour s'en assurer.

    Voyons rapidement quelques exemples d'articles au sujet desquels nous souhaitons obtenir plus de clarté et de précision, et vous avez notre mémoire à ce sujet.

    La nouvelle définition de « produit réglementé » donnera au ministre le pouvoir d'homologuer les fermes et, peut-être aussi, les animaux et les produits. Il est donc très important de bien comprendre que l'homologation doit concerner les produits réglementés et de connaître la justification des procédures d'homologation des animaux et des végétaux s'ils sont considérés comme des produits réglementés.

¹  +-(1545)  

    Ma deuxième remarque concerne l'expression « pas incompatibles ». Le ministre peut faire certaines choses s'il juge qu'elles ne sont pas incompatibles. Qu'est-ce que ça veut dire? Cette expression est-elle définie quelque part ? A-t-on indiqué quand le ministre pourra intervenir sur la base de son simple jugement que quelque chose n'est pas incompatible ?

    Ma dernière remarque concerne la clarté et l'intention. Je dois dire que l'un des aspects positifs du projet de loi est le paragraphe 12(3) qui dispose que « nul ne peut être déclaré coupable d'avoir contrevenu à un arrêté provisoire » -- et voici mon interprétation de ce qui suit -- si la personne qui pourrait être vulnérable savait qu'elle devait faire quelque chose. On parle ensuite d'un préavis suffisant. C'est très positif.

    Toutefois, on dit au paragraphe 16(2) qu'il « est interdit à quiconque d'avoir en sa possession un produit réglementé dont il sait ou devrait savoir qu'il a été importé en contravention... ». Nous pensons qu'il faudrait plutôt dire « a été sciemment importé ». En effet, comment juger qu'une personne savait où devait savoir ? Si l'on ajoutait « sciemment », ce serait plus clair. Tant que la personne n'a pas fait quelque chose délibérément, assurons-nous d'agir au moyen d'incitatifs et d'encouragements et non pas de punitions.

    En ce qui concerne la responsabilité financière, l'ACIA pourrait peut-être nous donner des éclaircissements. Nous craignons en effet de constater qu'aucune responsabilité financière n'est attribuée à l'ACIA quant à son rôle d'application de la loi. Que se passerait-il du point de vue de l'indemnisation automatique obligatoire qui passe par le truchement de l'ACIA, dans le cas d'une maladie devant être signalée, par exemple ? Il est très important de rendre ceci plus clair, d'autant plus que les coûts et responsabilités associées à l'application de la Loi visent à assurer le bien public.

    Comme vous le savez, les agriculteurs sont toujours prêts à agir pour le bien public mais nous ne voulons tout simplement pas qu'ils soient obligés d'assumer toute la responsabilité et la culpabilité. L'organisme chargé d'appliquer la Loi ou, dans certains cas, de rendre des décisions sur la base de son seul jugement, devrait également assumer une certaine responsabilité et culpabilité.

    Considérant les vastes pouvoirs attribués par le projet de loi, nous pensons qu'il faut renforcer la reddition de comptes. Au dernier paragraphe, nous suggérons quelque chose comme un mécanisme de surveillance pour veiller à ce que ces vastes pouvoirs ne soit pas exploités ou invoqués de manière abusive.

    Nous avons une préoccupation concernant la réglementation de la salubrité des aliments, ce qui me ramène à l'ambiguïté du projet de loi où l'on dit que personne ne doit préparer d'aliments avec de l'eau qui n'est pas saine. Premièrement, il faudrait définir ce qu'est l'eau saine. Deuxièmement, quand on parle de « conditionnement » dans le projet de loi, on mentionne la production et la récolte. Il faudrait préciser dans quel type de production et de récolte on peut utiliser ce genre d'eau. Manifestement, on n'utilise pas le même type d'eau pour irriguer les champs et pour laver les aliments dans un restaurant. Il est donc essentiel d'inclure une définition claire de l'eau saine.

    Nous avons également une préoccupation au sujet de l'établissement des paramètres. Vous savez tous que le secteur a fait preuve de leadership au cours des 10 dernières années en matière de programmes de salubrité alimentaire sur les exportations agricoles. Avec le renforcement des pouvoirs de l'ACIA, nous craignons que l'agence ne décide soudainement de rendre ces programmes obligatoires. Or, nous pensons qu'ils sont déjà efficaces grâce à l'encouragement et à l'incitation. Les producteurs agricoles savent que ces programmes répondent à leurs intérêts mais les choses vont beaucoup mieux, dans ce secteur, quand on agit par l'exemple et le leadership plutôt que par l'imposition d'un règlement.

    Il conviendrait de clarifier l'utilisation des ordonnances temporaires. En quoi se distinguent-elles des règlements ? Quand est-il approprié d'adopter une ordonnance temporaire en attendant un règlement ? Quelle sera la portée, la rigueur et l'applicabilité d'une ordonnance temporaire par rapport à un règlement ?

¹  +-(1550)  

    Je crois que je vais en rester là. Nous avons d'autres préoccupations mais je ne voudrais pas monopoliser le temps de parole. Qu'il suffise de dire que nous allons continuer de travailler avec les responsables de ce projet de loi pour préciser les éléments que je viens de mentionner et pour veiller à ce que nos préoccupations soient prises en considération lors de la formulation des règlements.

+-

    Le président: Merci beaucoup, M. Friesen.

    Je vous remercie tous les deux de vos excellentes déclarations liminaires et de ne pas avoir dépassé 10 minutes.

    Nous allons suivre la règle de cinq minutes pour les questions. J'ai compté le nombre de participants et il nous faudra 50 minutes environ.

    Diane, à vous l'honneur.

+-

    Mme Diane Finley (Haldimand—Norfolk, PCC): Je remercie les témoins d'aujourd'hui. J'apprécie beaucoup votre contribution. Vous nous avez donné matière à réflexion.

    J'ai une question pour vous deux. Vous parlez dans le document d'une période de deux ans durant laquelle l'ACIA peut porter des accusations au cas où elle a dû fermer une exploitation. En théorie, elle peut fermer une exploitation et elle a deux ans pour porter des accusations. Avez-vous abordé cela dans vos mémoires ? Quel est votre avis à ce sujet ?

¹  +-(1555)  

+-

    Mme Cathy Holtslander: Je n'ai pas traité explicitement de cette question mais... Par exemple, dans le cas de la grippe aviaire, il semble que l'ACIA a été assez draconienne à l'égard des petits producteurs. Peut-être n'exige-t-on pas assez de reddition de comptes de l'ACIA pour nous assurer que ses mesures sont à la fois juste et raisonnables ? Certains intérêts commerciaux risquent de primer sur l'intérêt des producteurs individuels, notamment des petits. Il conviendrait donc d'assurer cette reddition de comptes et de veiller à ce que les questions de commerce et de sécurité soient clairement définies afin d'assurer un certain équilibre.

+-

    M. Bob Friesen: Je pense qu'il s'agit certainement là d'une question de reddition de comptes, de responsabilité et de culpabilité. J'aurais cependant fait une distinction entre le tort causé délibérément et le tort causé involontairement. Il est clair que si c'est involontaire, l'ACIA ne devrait pas pouvoir dire à un exploitant : « Il s'est passé ceci il y a deux ans et nous venons maintenant d'apprendre que c'est à cause de ce que vous avez fait ». Par contre, s'il y avait eu une intention de causer du tort, par exemple en altérant un produit, il serait tout à fait légitime d'appliquer rigoureusement la Loi et, s'il a fallu deux ans pour intenter des poursuites, ce serait acceptable.

    Je crois qu'il faut faire une distinction entre l'intention de faire du mal et le cas où le mal a été causé par inadvertance. Certainement, le participant ne serait pas responsable. Je pense qu'il faut traiter cette question dans le cadre de la responsabilité et de la culpabilité.

+-

    Le président: M. Bezan.

+-

    M. James Bezan (Selkirk—Interlake, PCC): Qu'est-ce que la Coalition au-delà de l'agriculture industrielle ?Je ne la connais pas du tout. Qui représentez-vous ?

+-

    Mme Cathy Holtslander: C'est une organisation assez nouvelle, une coalition qui existe depuis deux ans. Nos membres comprennent des organisations telles que le Syndicat national des cultivateurs, Canadian Organic Growers, l'Union Paysanne, le Congrès du travail du Canada, des organisations provinciales, comme la Society for Environmentally Responsible Livestock Operations of Alberta, et des organisations locales qui ont été créées en réaction à des projets d'élevage intensif de bétail envisagés dans leur région.

+-

    M. James Bezan: Quel est votre objectif fondamental ?

+-

    Mme Cathy Holtslander: Promouvoir l'élevage durable du bétail. Notre vision est axée sur la production de bétail pour la santé et la justice sociale. Nous faisons la promotion d'un élevage de bétail contribuant aux collectivités locales, aux exploitations familiales, à un bon niveau de vie pour les agriculteurs et les travailleurs, etc..

+-

    M. James Bezan: Vous recommandez que ce projet de loi soit rejeté ?

+-

    Mme Cathy Holtslander: Oui.

+-

    M. James Bezan: Que devrions-nous faire entre-temps ? Nous avons une agence qui fonctionne depuis neuf ans sans mandat réel, sans réglementation, sans loi organique indiquant clairement ce que le gouvernement souhaite accomplir. Que proposez-vous comme mesure intermédiaire ?

+-

    Mme Cathy Holtslander: Nous ne voulons pas que le projet de loi C-27 soit adopté parce qu'il entérinerait le mandat actuel de l'ACIA ainsi que son mode de fonctionnement, et lui donnerait plus de pouvoirs. Nous pensons qu'il devrait y avoir une agence d'inspection des aliments axée sur la santé et la sécurité, et sur l'intégrité de l'agriculture canadienne, en laissant à un autre organisme le soin de s'occuper de la promotion commerciale.

    L'un des modèles pourrait être l'agence britannique, la United Kingdom Food Standards Agency, qui relève directement du Parlement et dont le rôle consiste à assurer la protection et la santé des consommateurs. Si nous avions une agence canadienne d'inspection des aliments axée sur ces objectifs, nous serions d'accord pour qu'elle ait une fonction d'exécution bien définie et adéquate. Par contre, quand nous voyons qu'elle est également chargée de faire la promotion du commerce, qu'elle est reliée au système de réglementation américain dont le gouvernement fait la promotion par l'initiative de la réglementation intelligente, et qu'elle a des relations étroites avec les grands lobbyistes américains de l'agriculture, comme Cargill et Tyson, nous ne pensons pas qu'elle soit adéquate pour assurer la sécurité des petits producteurs et transformateurs indépendants.

º  +-(1600)  

+-

    Le président: Votre temps de parole est écoulé.

    Mme Rivard.

[Français]

+-

    Mme Denise Poirier-Rivard (Châteauguay—Saint-Constant, BQ): Merci, monsieur le président.

    Mesdames et messieurs, bonjour et merci d'être ici pour répondre à nos questions. Cela va nous éclairer et nous aider à prendre une décision.

    D'après le projet de loi C-27, les missions fondamentales de l'Agence canadienne d’inspection des aliments sont: premièrement, de protéger les consommateurs; deuxièmement, d'uniformiser les pratiques de salubrité, de sécurité et d'inspection; et troisièmement, de promouvoir des échanges commerciaux et le commerce en ce qui concerne l'agriculture.

    Voyez-vous une contradiction entre la première et la dernière mission de l'agence? Pourquoi? Comment?

[Traduction]

+-

    Mme Cathy Holtslander: Oui, nous pensons qu'il y a contradiction entre protéger la santé et la sécurité et faire la promotion du commerce. Par exemple, les entreprises qui tentent d'élargir leurs marchés vont tenter de faire une concurrence sur les prix au palier international. Si elles peuvent utiliser des méthodes moins favorables à l'environnement, ou des substances qui ne sont peut-être pas sécuritaires pour la santé ou pour l'environnement, par exemple si elles peuvent utiliser des résidus antibiotiques ou des hormones de croissance, cela risque d'affecter la santé mais va contribuer à leurs profits. Donc, nous pensons qu'il y a contradiction entre protéger la santé et faire la promotion du commerce car le résultat ultime sera que l'on va essayer de contourner les règlements sur la santé afin de réduire les coûts et d'accroître les profits.

[Français]

+-

    Mme Denise Poirier-Rivard: Dans le cas des semences, n'est-il pas contradictoire de voir, d'une part, que l’agence gouvernementale est chargée de défendre la santé publique et l'environnement contre les risques potentiels causés par la technologie, et de voir, d'autre part, cette agence promouvoir ces mêmes technologies, qui profitent avant tout à la grande industrie internationale des OGM?

    À votre avis, y a-t-il un conflit d'intérêts? Quel devrait être le rôle de l'agence dans le débat sur les OGM?

º  +-(1605)  

[Traduction]

+-

    Mme Cathy Holtslander: Je pense qu'une des fonctions appropriées de l'Agence canadienne d'inspection des aliments serait de veiller à ce que des essais exhaustifs soient effectués, de bonnes recherches scientifiques, avec des débats publics, avant d'autoriser des choses telles que les OGM. De plus, l'ACIA ne devrait pas s'occuper de choses telles que l'octroi de permis dans des contextes où elle tirera un profit de la vente des OGM homologués. Il y a là clairement un grave conflit d'intérêts.

+-

    Le président: M. Friesen.

+-

    M. Bob Friesen: Je dois dire tout d'abord que l'ACIA croit en un système fondé sur la science et que, si elle fait la promotion d'OGM ayant fait l'objet d'une évaluation sur le plan de la santé et de l'environnement parce qu'elle estime qu'ils sont sécuritaires sur ces deux plans, nous n'avons aucun problème avec ça.

    L'un des aspects positifs du rôle de l'ACIA en matière de sécurité des aliments et de promotion d'aliments de qualité et sécuritaires au Canada est que nous pouvons nous bâtir ainsi une solide réputation internationale puisque les marchés internationaux verront que notre agence valide des programmes sérieux au Canada, en commençant par les programmes de sécurité des aliments sur les exploitations. De plus, l'agence peut également indiquer publiquement que certaines mesures ont été prises pour rehausser la sécurité et la qualité de nos produits alimentaires.

    Cela dit, je pense que l'ACIA devrait faire preuve d'un peu plus de discrétion et de responsabilité dans ses déclarations publiques. Je songe ainsi à ce qu'elle a dit juste avant Noël au sujet de l'ESB. Elle a parlé de tous les essais qui avaient été effectués sur les aliments du bétail et a dit qu'un pourcentage très élevé de ces essais montrait qu'il y avait des protéines étrangères ou animales dans les aliments du bétail mais qu'elle ne savait absolument pas quelle en était la source. Il n'était pas nécessaire de publier ça, d'autant plus que je téléphonais à cette époque-là à une organisation agricole des États-Unis pour lui dire que notre système était aussi sécuritaire que le leur. Mon correspondant m'a alors demandé ce que je pensais de l'article de journal indiquant que l'ACIA avait affirmé qu'elle n'avait aucune idée de ce qu'il y avait dans nos aliments pour le bétail.

    Il faut que l'agence agisse de manière plus responsable à cet égard mais, si nous pouvons corriger ce genre de choses, j'estime qu'elle peut fort bien nous aider à promouvoir nos produits alimentaires sains dans le monde entier.

+-

    Le président: Merci.

    Nous passons maintenant à M. Easter.

+-

    L'hon. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Merci, Messieurs.

    Je m'adresse d'abord à Bob car je pense que vous êtes le premier à avoir mentionné l'organisme de surveillance. Comment devrait-il être structuré ? Qu'est-ce qu'Il ferait ? Songez-vous à une surveillance de toutes les activités de l'ACIA ?

+-

    M. Bob Friesen: Nous indiquons dans notre mémoire que l'on devrait fixer des exigences de reddition de comptes sur l'administration, la gestion, la formation, la communication et l'exécution des règlements par l'ACIA. Or, le projet de loi consiste seulement à donner beaucoup plus de vastes pouvoirs à l'agence. Cela pourrait fort bien être bénéfique à condition qu'il y ait un mécanisme garantissant qu'elle n'en abuse pas.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Cependant, Bob, la surveillance 'est normalement une fonction ministérielle, en tout cas sur le plan de l'administration.

    Je songe plus à d'autres secteurs, et la grippe aviaire en serait l'exemple parfait. Comment un organisme de surveillance pourrait-il être utile à l'égard de certains des efforts opérationnels que déploie l'ACIA dans ses activités quotidiennes pour assurer la sécurité de nos approvisionnements alimentaires ?

º  +-(1610)  

+-

    M. Bob Friesen: C'est une excellente question. Tout d'abord, nous devons nous assurer que ça n'a rien de politique. Nous sommes favorables à un système fondé sur la science et nous pensons que la politique n'a rien à voir avec ça.

    Vous vous souviendrez qu'il y avait dans le passé un comité consultatif de parties prenantes de l'ACIA. Pour des raisons que nous ignorons, il a été abandonné. Le recréer pourrait être un bon départ car cela lui permettrait d'évaluer des situations comme le processus appliqué contre la grippe aviaire. Quelles étaient les échappatoires ? Où étions-nous vulnérables ? Comment pourrions-nous changer le système pour qu'il soit plus efficace ? Je pense que ce serait un excellent départ.

+-

    L'hon. Wayne Easter: Nous devrons y penser sérieusement, monsieur le président.

    Dans votre déclaration, Cathy, j'ai noté que vous avez parlé de la mauvaise gestion du dossier de la grippe aviaire. Vous savez probablement qu'il y a eu un rapport interne de l'ACIA, qui a d'ailleurs été publié, au sujet de cette situation. Ce qui compte, ce sont les résultats. Même si la grippe aviaire a causé beaucoup de dégâts financiers en Colombie-Britannique, la science a quand même réussi à en arrêter la diffusion.

    J'ai eu l'expérience du chancre de la pomme de terre à l'Île-du-Prince-Édouard. Comme l'agence doit protéger nos approvisionnements alimentaires et nos marchés -- et j'estime que nous devons faire les deux -- elle est obligée de prendre des décisions difficiles. Lorsqu'il y a eu cette crise de la pomme de terre, elle a fait arracher les plantations des jardins privés. Je suis sûr qu'il y a encore des gens qui sont furieux à cause de ça mais je suis sûr aussi que le problème aurait été beaucoup plus grave si nous n'avions pas agi de cette manière et que nous n'aurions pas encore retrouvé notre marché. Donc, pour bien faire son travail, l'agence est parfois appelée à prendre des mesures très agressives qui ne sont peut-être pas aussi simples qu'il n'y paraît.

    Comme l'a dit James, vous recommandez le rejet du projet de loi. Notre objectif est de l'adopter en l'améliorant là où c'est possible, dans l'intérêt de la collectivité agricole et du grand public. Ce que je vous dis, c'est que nous allons faire le nécessaire pour qu'il soit adopté. Cela étant, avez-vous des modifications à proposer pour l'améliorer ?

    J'ai pris note de votre processus d'appel. C'est quelque chose dont nous avons déjà pas mal entendu parler et sur lequel nous devrions peut-être revenir. Avez-vous d'autres suggestions ?

+-

    Mme Cathy Holtslander: Ce qu'il faudrait faire, c'est restructurer le mandat de l'Agence. L'ACIA devrait être un organisme indépendant se concentrant sur la sécurité des aliments et l'intégrité de l'agriculture, comme le fait la British Food Standards Agency, et nous devrions séparer les questions de qualité et de sécurité des questions de commerce. À cette condition, et s'il y avait un processus pas seulement ouvert mais aussi participatif pour l'élaboration des règlements sur la sécurité des aliments, cela nous permettrait d'acquérir une réputation exceptionnelle en matière de sécurité des aliments, ce qui contribuerait d'ailleurs à notre succès commercial. Nous pourrions alors à avoir accès à d'autres marchés que seulement les États-Unis.

    Comme vous le savez, les exportations agricoles canadiennes sont de plus en plus destinés aux États-Unis. Avec l'annonce, aujourd'hui, que le gouvernement veut aller de l'avant au sujet des recommandations sur la réglementation intelligente, cela y signifie que nous n'aurons pas de règlements canadiens mais adopterons les règlements américains dans toute la mesure du possible, afin d'intégrer nos économies. On a spécifiquement parlé de l'agriculture dans ce contexte. Si l'on veut adopter le projet de loi C-27 et mettre en oeuvre la réglementation intelligente, nous allons nous retrouver avec un système de production alimentaire fondé sur des règlements américains. Or, ils ne sont pas aussi bons que les nôtres et il sera beaucoup plus difficile de nous extraire du système de production agricole impulsé par l'USDA. Les Canadiens ont beaucoup plus confiance en leurs aliments que les Américains et nous devrions agir pour rehausser encore plus notre qualité avec des normes encore plus élevées

    Après la crise de l'ESB, vous dites que la grippe aviaire a été réglée rapidement et avec rigueur. Eh bien, l'ESB aurait pu être réglée si l'ACIA avait imposé des contrôles à 100 %. Elle y a résisté et c'est à cause du lien américain.

º  +-(1615)  

+-

    Le président: Votre temps de parole est écoulé, Mme Holtslander. Je suis désolé mais nous devons passer à quelqu'un d'autre sinon nous ne finirons pas à temps.

    M. Angus.

+-

    M. Charlie Angus (Timmins—Baie James, NPD): Je vous remercie tous les deux d'être venus aujourd'hui.

    M. Friesen, vous êtes presque devenu un membre du comité et c'est un plaisir de vous revoir. Je m'intéresse particulièrement à ce que vous avez dit au sujet des causés délibérément ou par inadvertance, parce que c'est l'une de mes grandes préoccupations au sujet de ce projet de loi. Je suis très inquiet du caractère très vague de ce texte et des pouvoirs que l'on veut accorder à l'agence, avec les conséquences que cela pourrait avoir sur les producteurs.

    Voilà pourquoi je voudrais connaître votre opinion, Mme Holtslander, car c'est la première fois que vous comparaissez devant notre comité. Il me semble que, lorsque nous convoquons des représentants de l'ACIA, nous donnent toujours de merveilleuses réponses mais ce que nous entendons sur le terrain est bien différent. Nous pourrions peut-être avoir de meilleures réponses au sein de ce comité si nous avions de la merde de poulet sur le plancher mais il me semble qu'il y a une vraie différence entre les réponses éthérées que nous obtenons à Ottawa et ce que nous voyons sur le terrain.

    L'exemple donné par M. Easter sur ce qui s'est passé à l'Île-du-Prince-Édouard est excellent. Il faut se pencher sur les exemples concrets de l'ACIA à l'action pour pouvoir juger du sens réel de ce projet de loi.

    Ma question concerne donc votre réserve à l'égard du pouvoir d'imposer des injonctions permanentes, de l'absence apparente de transparence et de la possibilité d'intenter des poursuites. Avez-vous vu des exemples de l'ACIA à l'action qui ont eu une incidence notable sur les petits producteurs ?

+-

    Mme Cathy Holtslander: J'ai entendu parler d'une situation en C.-B. La province avait adopté de nouveaux règlements sur l'inspection des viandes. Lorsque le projet de loi C-27 a été déposé, l'ACIA a dit dans un communiqué de presse ou sur son site Web qu'elle allait amener les règlements canadiens au niveau de ceux de la province. Donc, il y a maintenant en C.-B. des inspections fédérales de toutes les inspections provinciales de la viande. Cela a eu une incidence profonde sur les petits producteurs, les producteurs indépendants et les petits abattoirs de la région.

    L'une des propositions était que des abattoirs mobiles inspectés par les autorités fédérales interviennent dans les collectivités éloignées, par exemple chez les éleveurs de bisons. Lorsque cette proposition a été présentée à l'ACIA, elle l'a rejetée sans aucune explication alors qu'il s'agissait d'une bonne innovation pour ce marché.

    Nous craignons que ce genre de réaction brutale et injuste envers le petit producteur ne se généralise si le projet de loi est adopté pour tout le Canada. Cela aurait une incidence profonde sur les collectivités rurales, ou en tout cas sur leur possibilité d'avoir une économie locale en plus de l'économie d'exportation, et sur leur possibilité d'améliorer leur infrastructure pour la production et la transformation du bétail.

+-

    M. Charlie Angus: Mon autre question au sujet du projet de loi C-27 concerne les normes, et j'en entends parler dans la population. Je n'ai rien contre l'adoption de normes en matière de réglementation mais le degré de confiance des consommateurs canadiens est déjà très élevé -- beaucoup plus que celui des consommateurs américains. Je me suis laissé dire qu'il est de 60 % environ aux États-Unis pour la viande, alors qu'il est largement au-dessus de 80 % chez nous.

    La question est celle-ci : quelle norme appliquons-nous ? J'aimerais que vous répondiez tous les deux à cette question. Personnellement, je ne nous vois pas appliquer une autre norme que la norme USDA parce que c'est là qu'est le pouvoir. Si nous adoptons la norme américaine, qu'est-ce que cela signifiera pour nos producteurs, pour la confiance de nos consommateurs et pour notre efficacité sur les grands marchés, les autres marchés d'exportation ? On ne semble pas expliquer dans le projet de loi quelles seront les normes qui seront appliquées.

º  +-(1620)  

+-

    M. Bob Friesen: Je suis d'accord avec vous. Nous devons avoir une norme très élevée.

    Nous exportons plus de 60 % de notre production agricole. Nous avons donc besoin d'un niveau de confiance très élevé envers nos produits dans le monde entier. Voilà pourquoi vous constaterez également que les dirigeants des organisations agricoles appuient l'adoption de normes très rigoureuses : c'est qu'ils tiennent à ce que rien ne mette en danger la réputation de nos produits alimentaires et la confiance des consommateurs.

    Nous croyons aussi que les méthodes appliquées pour assurer la sécurité de nos aliments devraient être uniformes dans tout le pays. L'une des dernières choses que nous voulons au Canada, et même dans le monde -- nous en avons discuté à la Fédération internationale des producteurs agricoles... tout produit alimentaire mis en vente doit être sûr. Nous ne pourrions accepter que certains le soient et que d'autres le soient moins. Nous ne voulons pas que la sécurité des aliments devienne un facteur de concurrence -- autrement dit, quelqu'un en C.-B. pourrait dire que ses aliments sont plus sûrs que ceux de la Saskatchewan. Il nous faut assurer l'uniformité chez nous et aussi sur le plan international.

    Nous ne pourrons jamais consacrer trop d'efforts à établir et à protéger cette réputation. Cela dit, les agriculteurs sont prêts à accepter leur part de responsabilité et de culpabilité à condition que l'on reconnaisse qu'ils font preuve de diligence et que l'octroi de pouvoirs plus vastes à l'agence ne fasse pas l'objet d'abus.

+-

    Le président: Très rapidement car nous avons déjà dépassé notre horaire.

+-

    Mme Cathy Holtslander: Très bien.

    Dans le rapport sur la réglementation intelligente, on recommande que le Canada limite le nombre de ses exigences réglementaires. On y dit qu'il peut être parfois difficile d'amener les Américains à participer à nos efforts de réglementation en coopération et qu'il serait peut-être dans l'intérêt public du Canada de simplement nous aligner sur l'approche des États-Unis, ce qui ne témoigne pas, à mon avis, d'un engagement très ferme à l'égard de règlements spécifiquement conçus au Canada.

    Cela semble vouloir dire qu'il est trop difficile de formuler nos propres règlements et que nous allons prendre ceux des États-Unis. Or, j'ai la ferme conviction que les Américains dissimulent leur propre problème d'ESB. Si nous adoptons les règlements américains, ce serait un recul pour nous.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    M. Ritz.

+-

    M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, PCC): Merci, monsieur le président.

    Mesdames et Messieurs, merci de vos témoignages d'aujourd'hui.

    Le but du projet de loi, me semble-t-il, est de rationaliser tout le processus, de la ferme à l'assiette. Je me demande cependant si nous pouvons faire cela avec un tel projet qui soulève de nombreux problèmes, mais il ne faudrait pas non plus jeter le bébé avec l'eau du bain. Je crois qu'il faut clairement aller dans la voie proposée. Nous sommes un pays exportateur puisque 85 % à 90 % de ce que nous produisons va à l'étranger. Les États-Unis sont notre plus gros client, et nous sommes leur plus gros client.

    Mme Holtslander, je crains que votre communication n'arrive un jour en retard si nous voyons ce que le premier ministre a signé hier à Crawford, au Texas. C'est comme ça que les choses avancent avec cette intégration des marchés canadiens et américains. Il y a du bon et du mauvais. Je partage certaines de vos préoccupations mais je ne suis pas aussi inquiet que vous au sujet des Monsantos et des Cargills de ce monde. Ce sont des entreprises qui font autant d'affaires au Canada qu'ailleurs et ce sont des partenaires raisonnables.

    S'il y a un problème de taille -- si l'on pense qu'être une grande entreprise n'est pas une bonne chose -- je constate que l'un de vos membres est le Congrès du travail du Canada qui représente évidemment le pacte de l'automobile et le secteur de l'automobile. Peut-être que l'on préférerait briser le système des usines pour disperser le syndicat et les usines dans tout le pays, mais je ne pense pas que ce soit ce qu'il préfère.

    Mes préoccupations portent plus sur le coût à la sortie de la ferme. J'adresse ma question à Bob : en ce qui concerne les organisations agricoles que vous représentez, comment pouvons-nous nous assurer que nous agissons de manière responsable et que nous profitons de toutes les occasions de minimiser les coûts à la sortie de la ferme ?

º  +-(1625)  

+-

    M. Bob Friesen: Vous avez tout à fait raison, à 100 %. Cela nous préoccupe et c'est l'une des raisons pour lesquelles nous voulons des éclaircissements sur la responsabilité financière. Quand je lis le projet de loi, j'ai l'impression que l'ACIA pourra faire pratiquement tout ce qu'elle veut. Dans certains cas, elle pourra prendre des décisions subjectives. En fin de compte, il semble cependant que la responsabilité financière devra être assumée à la ferme. Nous devons nous assurer que tel ne sera pas le cas.

+-

    M. Gerry Ritz: Avez-vous travaillé là-dessus ? Je sais que vous avez eu votre réunion. Avez-vous parlé du type de dispositions que l'on devrait inclure dans le projet de loi pour nous assurer que ce ne sera pas le cas ?

    Il nous faut des taux d'indemnisation beaucoup mieux assurés, beaucoup mieux garantis, et différentes choses comme ça... et les responsabilités. Elles sont toujours transférées. Comment faire cesser cela ? Est-il possible de mettre ce genre de chose dans ce projet de loi ou cela devrait-il faire partie d'un mécanisme de surveillance que l'on n'a pas prévu et qu'il faudrait inclure ?

+-

    M. Bob Friesen: C'est une bonne question. Je ne suis pas expert en rédaction de projets de loi mais je pense que nous devons régler ces questions le plus possible dans ce texte, et les traiter le mieux possible dans l'élaboration des règlements, et avoir ce comité de surveillance et certainement, pour commencer, relancer le comité consultatif des parties prenantes. Je pense que ces trois éléments se complètent.

    Je crois aussi que nous devons revoir le système d'indemnisation de la Loi sur la santé des animaux. C'est quelque chose que nous avons fait il y a huit ans, je crois, et qu'il faudrait revoir maintenant à la lumière de l'expérience acquise pour nous assurer que c'est toujours pertinent pour le secteur.

    Au sujet de ma dernière remarque -- on a parlé un peu plus tôt -- concernant la grippe aviaire en C.-B., et l'exemple de la pomme de terre, on fait des choses en sachant qu'elles ne seront pas populaires, et c'est parce que nous voulons nous assurer que nous préservons notre réputation, mais ensuite, quand la décision est politique pour savoir si l'on devrait ouvrir la frontière ou non, et que ça n'a rien à voir avec la science, c'est ça qui est frustrant.

    Mais le secteur vous dira aussi, au sujet de la grippe aviaire, que l'agence n'avait pas assez de souplesse quand elle a dit que deux élevages devaient être détruits, je crois, parce que le secteur avait le sentiment qu'il y avait là un problème, et pourtant on ne pouvait pas ordonner que les troupeaux soient détruits tant qu'on n'avait pas les résultats des essais.

    Le sentiment est que, si l'agence était intervenue beaucoup plus rapidement pour détruire ces troupeaux, cela aurait peut-être prévenu la diffusion ultérieure de la maladie. Donc, dans ce cas, l'agence n'avait pas assez de souplesse pour agir. Elle ne voulait pas les faire détruire avant d'être sûre qu'ils étaient infectés parce que c'est seulement ainsi que l'on pouvait aussi garantir que les éleveurs seraient indemnisés par le truchement de la Loi sur la santé des animaux.

+-

    M. Gerry Ritz: Dans le modèle américain, c'est exactement ce qu'on a fait dans le cas des flambées épidémiques au Delaware et au Texas. On est intervenu immédiatement pour éliminer le problème à la racine.

    Évidemment, les audiences d'Abbotsford était une garantie de catastrophe. Je sais que M. Easter a parlé du rapport qui a été publié, qui avait été rédigé par l'ACIA et édité par l'ACIA, et qui ne permettait l'expression d'aucune dissidence. C'était tout à fait intéressé.

+-

    M. Bob Friesen: Autre chose concernant ce que vous avez dit au sujet de nos marchés aux États-Unis -- je pense que M. Angus y a fait allusion mais je n'étais pas là à ce moment-là -- plus nos marchés sont intégrés, plus nous allons devoir répondre de manière appropriée avec notre réglementation.

    Je ne veux absolument pas miner notre souveraineté mais il est clair que nous allons devoir examiner comment nous pourrons harmoniser nos règlements -- et ceci soulève évidemment tous les autres aspects, et M. Steckle connaît le problème en ce qui concerne la gestion des pesticides. Plus nos marchés seront intégrés, plus nous devrons harmoniser nos systèmes réglementaires.

+-

    M. Gerry Ritz: Nous allons devoir forger un consensus, ça ne fait aucun doute.

+-

    Le président: Très bien, vous avez déjà dépassé votre temps d'une minute.

    Nous passons maintenant à M. Kilgour.

+-

    L'hon. David Kilgour (Edmonton—Mill Woods—Beaumont, Lib.): Comme tout le monde, je vous remercie d'être venus témoigner.

    Je dois dire, madame Holtslander, que votre mémoire est excellent. Je l'ai lu du début à la fin et j'invite les autres à s'en inspirer. Je partage également votre scepticisme à l'égard de l'ACIA. J'ai eu une expérience particulièrement mauvaise avec elle. Je pense qu'elle est excessivement prudente à l'égard du risque du point de vue de la sécurité, mais très peu amicale envers...

    Je crois comprendre que votre préoccupation est qu'elle n'est pas très amicale à l'égard des producteurs.

º  +-(1630)  

+-

    Mme Cathy Holtslander: Oui, mais surtout des petits.

+-

    L'hon. David Kilgour: Vous pensez, par exemple, qu'elle frappera plus fort sur les petits producteurs que sur les grands. Pourriez-vous développer votre pensée à ce sujet ?

+-

    Mme Cathy Holtslander: Par exemple, elle peut exiger la collecte et la tenue d'informations à son intention, en vertu des pouvoirs réglementaires que lui accorde le projet de loi. Selon le mécanisme adopté, cela pourrait devenir un obstacle pour les petits producteurs et transformateurs.

    Si elle exigeait des informations très techniques, sur l'ADN, par exemple, ou des données informatisées de pointe, cela exigerait beaucoup d'investissement en temps et en argent, et il serait beaucoup plus facile à une grande entreprise d'élevage ou de transformation de les fournir qu'à un petit agriculteur indépendant.

+-

    L'hon. David Kilgour: Voudriez-vous que le projet de loi soit séparé en deux, avec la promotion commerciale d'un côté et la sécurité de l'autre ? Pensez-vous que ce serait possible ?

+-

    Mme Cathy Holtslander: Je suis pas sûre de bien vous comprendre.

+-

    L'hon. David Kilgour: Il y aurait une partie concernant la sécurité et une autre concernant l'aide donnée aux producteurs pour commercialiser leurs produits, au Canada et à l'étranger.

+-

    Mme Cathy Holtslander: Oui, je pense que si les questions de sécurité étaient traitées de manière raisonnable, juste et rigoureuse, cela pourrait effectivement faciliter le commerce parce qu'on aurait des produits de bonne qualité.

    Ma crainte, c'est que les normes risquent d'être assouplies pour permettre à certains acteurs d'avoir accès à certains marchés tout en excluant leurs concurrents, qui sont les petits joueurs, en formulant des règlements constituant un fardeau très lourd pour ces derniers et non pas pour les autres.

+-

    L'hon. David Kilgour: Bien dit.

    M. Friesen, le projet de loi C-80 prévoyait un conseil consultatif, comme vous le savez, et vous l'avez mentionné aujourd'hui. Avez-vous pu savoir pourquoi cela a été retiré du projet de loi C-27 ? Malgré tout le pouvoir que détient la Fédération de l'agriculture, vous n'arrivez pas à savoir pourquoi on a exclu le conseil ministériel ?

+-

    M. Bob Friesen: Le conseil consultatif ministériel ? Non, je parlais du conseil consultatif des parties prenantes.

+-

    L'hon. David Kilgour: Bon, si c'est son nom...

+-

    M. Bob Friesen: Le conseil consultatif des parties prenantes nommé par le ministre. Cela fait plusieurs années que nous demandons aux ministres de l'agriculture de le rétablir.

+-

    L'hon. David Kilgour: Et que vous répondent les gens du ministère pour justifier son retrait ?

+-

    M. Bob Friesen: Nous n'avons jamais obtenu d'explication.

+-

    L'hon. David Kilgour: Pourriez-vous nous donner une ébauche de disposition qui serait adéquate --

+-

    M. Bob Friesen: Absolument.

+-

    L'hon. David Kilgour: Pour quand en aurions-nous besoin, M. le président ?

+-

    Le président: Tout doit être devant le comité d'ici au 21 avril.

    Ça va ?

+-

    M. Bob Friesen: Oui.

+-

    Le président: Nous voulons avoir tous les amendements et avoir recueilli toutes les opinions possibles d'ici au 21 avril.

+-

    L'hon. David Kilgour: Une dernière question. Si l'inspection d'une expédition est retardée pendant longtemps, les marchandises risquent de se détériorer, n'est-ce pas ? Avec ce projet de loi, qui serait responsable ?

+-

    M. Bob Friesen: Voilà exactement ce que nous craignons avec ce texte -- il est trop ambigu en ce qui concerne la responsabilité financière. C'est pourquoi nous réclamons des éclaircissements, soit dans le projet de loi lui-même, soit dans la réglementation, pour savoir qui serait responsable, quelle serait la raison du retard -- pour que les coûts correspondants n'aient pas à être assumés par l'exploitation agricole elle-même.

+-

    L'hon. David Kilgour: Personne ne vous a consulté sur les détails du projet de loi ?

+-

    M. Bob Friesen: Nous sommes consultés aujourd'hui.

+-

    L'hon. David Kilgour: C'est ça, la consultation ?

+-

    M. Bob Friesen: Oui, c'est ça.

+-

    L'hon. David Kilgour: Eh bien, je regrette de voir que --

+-

    M. Charlie Angus: Ce n'est pas ce que m'a dit l'ACIA quand j'en ai discuté avec elle. Elle m'a dit qu'elle avait consulté.

+-

    Le président: Ce n'est pas le comité qui tient des consultations. Notre rôle est d'examiner le texte en détail.

+-

    L'hon. David Kilgour: Eh bien, M. le président, pratiquement tous les autres groupes industriels consultent les fonctionnaires et -- si je comprends bien -- formulent avec eux des solutions qui semblent équitables pour les deux parties. Toutes les parties prenantes... Pourquoi n'a-t-on pas consulté la Fédération de l'agriculture et le groupe de Mme Holtslander ?

+-

    M. Bob Friesen: Je serais très heureux que le comité recommande au gouvernement de consulter l'industrie chaque fois qu'un projet de loi doit être rédigé. Toutefois, ce n'est pas ce que l'on a fait jusqu'à présent, par exemple dans le cas de la Loi sur les espèces menacées. Nous recevons le projet de loi et c'est ensuite que nous avons la possibilité de donner notre opinion.

º  +-(1635)  

+-

    Le président: Je tiens à ce que vous sachiez que le président ne partage pas ce principe, mais c'est celui qui est appliqué.

+-

    L'hon. David Kilgour: M. le président --

+-

    Le président: Nous devons avancer. Votre temps de parole est écoulé.

+-

    L'hon. David Kilgour: C'est un scandale ! Je tiens à dire --

+-

    Le président: M. Gaudet, vous avez cinq minutes.

[Français]

+-

    M. Roger Gaudet (Montcalm, BQ): Merci, monsieur le président.

    Je vais continuer dans la foulée de M. Kilgour. J'aimerais que vous envoyiez au comité les améliorations que vous aimeriez voir apporter au projet de loi C-27. Ainsi, lorsqu'on en fera l'étude article par article—à compter du 21 avril, si j'ai bien compris—, on pourra étudier vos recommandations et voir si elles sont acceptables ou non. J'aimerais que vous fassiez cela avant le 21 avril.

    Je vous pose maintenant ma première question. Vous dites que l'ACIA a un double mandat. Quel est-il?

[Traduction]

+-

    Mme Cathy Holtslander: Je citais un extrait du document de l'ACIA disant qu'elle doit contribuer à la sécurité des aliments et faciliter le commerce des aliments, des animaux, des végétaux et des produits correspondants. C'est tiré de son rapport annuel de 1997-1998.

    Son double mandat consiste donc à réglementer la santé et la sécurité et à faire la promotion du commerce.

[Français]

+-

    M. Roger Gaudet: D'accord, merci.

    Vous dites aussi que l'ACIA n'a pas un dossier reluisant en matière de transparence et de communication de renseignements au public, un mal auquel le projet de loi C-27 ne remédierait pas. Au contraire, le projet de loi C-27 conférerait à l'ACIA plus de pouvoir pour recueillir, partager et utiliser de l'information, même auprès des gouvernements et des organismes privés et étrangers.

    Expliquez-moi donc votre point de vue sur ce sujet.

[Traduction]

+-

    Mme Cathy Holtslander: C'est l'article 8 qui dit ceci :

L'Agence peut conclure un accord visant la collecte, l'utilisation et la communication de renseignements avec un ministère, un organisme public ou une organisation réglementaire, au Canada ou à l'étranger, en vue d'assurer ou de contrôler l'application des lois ou pour la tenue d'enquêtes.

    C'est ce qui lui donne le pouvoir de recueillir et de partager des informations.

    Il n'y a là-dedans rien concernant les communications avec les Canadiens ni l'explication de ses décisions. Le projet de loi ne porte pas là-dessus. Et comme l'ACIA aura le droit, en vertu de ce projet de loi, de négocier des ententes avec des gouvernements et des organismes étrangers -- c'est elle qui peut les désigner -- ils ne seront pas assujettis aux lois du Canada concernant la protection des renseignements personnels ou la divulgation de l'information. Je crois que c'est une vulnérabilité. Il se peut que les gens qui traitent avec l'ACIA constatent que des renseignements les concernant sont recueillis et utilisés par des gouvernements étrangers et que l'on ne puisse rien y faire.

[Français]

+-

    M. Roger Gaudet: Comment trouvez-vous l'engagement du directeur général du Conseil des viandes du Canada, qui a travaillé pendant 34 ans avec l'ACIA? Croyez-vous qu'il peut avoir des conflits d'intérêts dans son rôle de dirigeant de ce conseil?

[Traduction]

+-

    Mme Cathy Holtslander: Je pense que c'est une relation très étroite. Il y a une sorte de porte tournante entre les hautes sphères de la bureaucratie et les lobbyistes industriels. Ces derniers jouissent d'un accès inégal au processus de formulation des règlements par rapport à la personne chez qui j'achète de la viande de boeuf, qui est un éleveur organique de la région de Hudson Bay en Saskatchewan. Quel accès a-t-il à l'ACIA pour influencer l'élaboration des règlements ?

    Je crois que les lobbyistes des grandes entreprises ont un accès déloyal à l'ACIA par rapport aux producteurs indépendants.

º  +-(1640)  

[Français]

+-

    M. Roger Gaudet: Avant de terminer, j'ai seulement une remarque à faire: je fais beaucoup plus confiance aux petits producteurs qu'aux grands producteurs.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup, M. Gaudet.

    Je donne la parole à Mme Ur.

+-

    Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Moi aussi, je vous remercie de vos exposés, qui étaient très intéressants.

    Je vais me faire l'avocate du diable. Je pense qu'il y a ce genre d'atmosphère cet après-midi.

    Nous sommes tous ici plus ou moins proches du monde de l'agriculture mais si un député de la ville ne connaissant rien à l'agriculture avait écouté vos exposés, qu'aurait-il pensé ? L'ACIA appuie le projet de loi C-27 qui contient de bonnes modifications que j'approuve. Cathy, quant à elle, s'y oppose. Il est très difficile à un député de savoir quoi faire quand les témoins présentent des opinions radicalement opposées. Cela rend la situation très intéressante, certes, mais difficile.

    Quand on dit que l'agriculture doit pouvoir s'adresser au gouvernement par une seule voix, cela nous facilite le travail, parce que nous voulons évidemment ce qu'il y a de mieux pour toute l'agriculture. Moi, je suis venue à Ottawa pour défendre les petits, parce que les gros semblent avoir toujours le moyen de se faire entendre par les comités. Je respecte donc votre position, Cathy, même si je ne partage pas votre opinion au sujet de l'ACIA. Grâce à son caractère scientifique et aux bonnes données scientifiques que nous avons eues avec l'ESB, nous avons été le premier pays à pouvoir vendre de la viande de boeuf conditionnée à si bref délai. C'est parce que c'était fondé sur la science. Peut-on améliorer les choses ? Probablement. Nous avançons continuellement.

    Quand notre comité a tenu des audiences à Abbotsford sur la grippe aviaire, j'ai vu -- je ne sais pas si vous serez d'accord avec moi -- que l'ACIA possède d'excellentes politiques et des techniques fondées sur la science mais que, ce qui lui manque, c'est une sorte d'équipe DART capable d'intervenir rapidement pour régler un problème.

    Seriez-vous plus favorable à l'ACIA si elle avait une telle équipe ?

+-

    Mme Cathy Holtslander: Je vois le problème un peu différemment. Suite à des communications avec les gens d'Abbotsford, j'ai constaté que les décisions d'abattage ont été prises sans avoir recours à toutes les données scientifiques qui étaient disponibles et sans tenir compte de l'expérience acquise dans d'autres pays, comme aux Pays-Bas, en Italie et même aux États-Unis. L'agence a alors agi sans tenir compte du tout de la science.

    On a eu l'impression que ses décisions étaient plus politiques, son objectif étant de donner l'impression qu'elle était forte, rapide et draconienne, dans l'intérêt de la relation commerciale. Les gens qui ont été sacrifiés ont été les petits producteurs. Ils ont été très mal traités, comme vous avez pu le constater quand ils se sont adressés à votre comité, et n'ont pas été correctement indemnisés. Donc, je ne pense pas qu'avoir une équipe créée pour mettre en application une mauvaise décision fondée sur de mauvaises informations permettrait d'améliorer la situation.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Merci, madame Holtslander.

    M. Friesen, en ce qui concerne la réduction des chevauchements et des choses faisant double emploi, dans le projet de loi C-27, pensez-vous que partir de dix et mettre huit domaines dans un seul texte de loi ou un seul domaine d'inspection l'amènera à moins bien faire son travail ? Cela aura-t-il une incidence négative sur l'industrie ?

+-

    M. Bob Friesen: Je ne pense pas. Cela témoigne du désir que nous avons depuis déjà un certain temps de ne pas compartimenter la loi et les politiques. Plus nous pouvons faciliter le processus pour qu'il fonctionne bien et soit plus efficient, plus cela nous convient.

    Je voudrais revenir sur certaines de vos remarques antérieures, monsieur le président. Nous appuyons les objectifs du projet de loi et les modifications proposées parce que nous avons des milliers et des milliers d'agriculteurs dont la vie dépend d'un système très rigoureux de réglementation de la sécurité des produits alimentaires. Nous devons continuer à le renforcer.

    Maintenant, en ce qui concerne la distinction entre les petits producteurs et les grands, il faut dire d'abord qu'être petit n'est pas une garantie de sécurité. En outre, les petits producteurs ne devraient pas être assujettis à des critères différents que les grands. Nous sommes ici pour produire des aliments sains. Que le producteur soit petit ou grand n'a rien à voir avec la sécurité de ses produits. C'est plutôt l'application uniforme et très rigoureuse du système de réglementation qui y contribue.

º  +-(1645)  

+-

    Mme Rose-Marie Ur: Je suis tout à fait d'accord au sujet de la responsabilité financière. Là aussi, que le producteur soit petit ou grand, ce n'est pas lui qui devrait l'assumer. On dit toujours « ils causent et nous payons ». Cela doit changer. Par l'intégration verticale de ce produit alimentaire, il devrait y avoir des mécanismes de contrepoids et chaque élément de la chaîne alimentaire devrait faire partie de cette obligation financière de recouvrer les coûts en fonction du rôle qu'il doit jouer.

    Comment pourrions-nous exprimer cela dans le projet de loi ?

+-

    M. Bob Friesen: C'est une très bonne question mais nous serions certainement prêts à nous y soumettre.

+-

    Mme Rose-Marie Ur: J'aime vous l'entendre dire parce que je pense que c'est très important. Il faut que cela soit intégré au projet de loi pour nous assurer que nos producteurs primaires ne soient pas obligés d'assumer tous les coûts.

+-

    M. Bob Friesen: Excellent. Merci.

+-

    Le président: M. Bezan

+-

    M. James Bezan (Selkirk—Interlake, PCC): Merci. monsieur le président.

    Je suis très heureux des remarques que vous avez faites aujourd'hui, Bob. Elles sont très constructives et vous avez étudié le projet de loi de manière très objective. Certains des groupes que nous avons accueillis ne nous ont pas apporté de contribution très valable, à mon avis, et je suis content de voir que vous jugez qu'il y a des bons éléments dans le texte, et des mauvais aussi.

    En ce qui concerne la surveillance, comment pensez-vous que nous pourrions l'assurer dans le projet de loi ? Devrait-il y avoir un comité parlementaire assurant la surveillance de l'ACIA où cela devrait-il être une combinaison de l'industrie et du gouvernement ? Quelle est votre position ?

+-

    M. Bob Friesen: Nous n'avons pas d'idée préconçue quant à la nature de ce comité de surveillance. Je crois que l'objectif primordial est de veiller à ce que l'ACIA n'abuse pas de ses pouvoirs, que nous puissions répondre très rapidement en cas de problème et nous avons le sentiment qu'un changement pourrait améliorer la manière dont fonctionne l'agence. En ce qui concerne sa composition, nous tenons toujours à ce que ces comités comprennent une bonne représentation de l'industrie et des parties prenantes, mais il pourrait y avoir d'autres parties ayant des idées précises sur qui devrait faire partie de ce comité.

+-

    M. James Bezan: L'une des choses importantes est la reddition de comptes et je pense que l'on commence à l'avoir quand il y a une surveillance. La seule chose que nous créons avec ce projet de loi, ce sont des super-inspecteurs. Nous avons déjà des exemples de situations où des inspecteurs ont pris des décisions par erreur ou par malveillance et, à l'heure actuelle, il n'y a aucun recours. Ce que je sais, c'est que la Coalition au-delà de l'agriculture industrielle ne veut pas que nous soyons trop liés avec les systèmes américains mais il faut bien reconnaître que l'USDA a un système très transparent. Si l'on estime avoir été mal traité, il y a une procédure d'appel et d'indemnisation. Ceci s'applique à tout le monde, grand ou petit producteur ou transformateur.

    Voudriez-vous qu'il y ait quelque chose de cette nature dans ce projet de loi ? À l'heure actuelle, il n'y a rien.

+-

    M. Bob Friesen: J'ai deux remarques à faire à ce sujet. Je ne sais pas qui sont ceux que vous appelez les super-inspecteurs. Soyons clairs : les agriculteurs ne réagissent pas très bien quand on leur impose des décisions. Ils tiennent à faire preuve de diligence dans leurs activités, ils veulent travailler avec l'ACIA et l'industrie pour s'assurer que notre réputation en matière de salubrité des aliments continue de s'améliorer. Quelle que soit la manière dont nous le faisons, nous y sommes favorables.

    Permettez-moi de dire en passant qu'il y a certaines preuves -- et vous avez raison -- que des inspecteurs entrent dans de petits établissements de transformation avec toutes sortes d'exigences que certains pourraient considérer comme étant frivoles, simplement parce qu'ils veulent faire preuve d'autorité. Je pense qu'il doit y avoir un mécanisme intégrant un processus d'appel ou permettant en tout cas à la partie visée de se plaindre.

    Selon mon expérience de l'industrie de la volaille, je peux vous dire que les transformateurs avaient peur de faire l'objet de représailles s'ils se plaignaient de la manière dont l'ACIA se comportait et, évidemment, c'est l'ACIA qui a le dernier mot à ce sujet. Il faut donc vraiment adopter un système garantissant que cela ne puisse pas se produire si l'on décide d'accroître les pouvoirs de l'agence.

    En ce qui concerne le risque d'erreur et le fait d'en imputer la responsabilité à l'industrie, vous avez absolument raison, et c'est pour ça que nous avons soulevé le problème de la reddition de comptes et de la responsabilité financière. Il faut qu'il y ait un processus auquel l'industrie sera prête à participer, en partenariat avec l'ACIA, mais il nous faut également des principes très clairs de reddition de comptes, de responsabilité financière et de culpabilité.

º  +-(1650)  

+-

    M. James Bezan: Une partie du projet de loi qui me préoccupe également est que tout n'est pas décidé par décret du conseil ou par le ministre. Certaines choses pourront être décidées et mises en oeuvre par le président de l'agence. À mon avis, son rôle doit être de gérer l'agence et de veiller à ce qu'elle applique correctement la Loi. Mais, avec ce projet de loi, le président aura des pouvoirs concernant les méthodes, l'équipement et les procédures qui seront utilisées, encore une fois sans surveillance ni recommandations de l'industrie. Avez-vous examiné cette question ? Avez-vous des inquiétudes au sujet de l'article 24 ?

+-

    M. Bob Friesen: J'ai toujours des inquiétudes quand on dit « à la discrétion du ministre » parce que, selon nous -- et on me corrigera si je me trompe -- quand on dit que le ministre peut faire tout ce qu'il juge approprié, cela ne veut pas vraiment dire que c'est lui qui décide, c'est simplement une agence qui relève de sa responsabilité. Donc, encore une fois, il faut éviter que l'accroissement de pouvoirs entraîne des abus.

+-

    Le président: Merci beaucoup, M. Bezan.

    M. Drouin.

[Français]

+-

    L'hon. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Monsieur le président, je veux remercier nos témoins de leur présence. Ils nous permettent de bonifier ou de clarifier certains articles du projet de loi C-27.

    Je voudrais seulement vérifier auprès de M. Friesen quelque chose que certains de mes collègues ont mentionné à quelques reprises plus tôt. Étant donné qu'il n'y a pas eu de consultations auparavant et que vous nous mentionnez qu'il pourrait y avoir certains irritants ou, à tout le moins, que certaines clarifications devraient être apportées, j'apprécierais que vous nous fassiez parvenir un document dans lequel vous auriez ajouté des choses ou bonifié certains articles du projet de loi, afin que nous puissions nous assurer de prendre les meilleures dispositions pour aider et protéger nos producteurs. Je vous encourage fortement à le faire.

    Merci beaucoup.

    On parle beaucoup d'intégration. Je voudrais une clarification à ce sujet. Bien que je n'aie pas encore beaucoup le pouce vert, j'apprends le plus rapidement possible. Je constate que nos deux marchés sont intégrés. Toutefois, notre réglementation semble être beaucoup supérieure à celle des Américains. Cela ne nous empêche pas d'avoir une bonne performance dans le domaine de l'agriculture et, si j'ai bien compris M. Friesen, de pouvoir exporter jusqu'à 60 p. 100 de notre production. Par conséquent, ce n'est pas nécessairement contraignant d'avoir une réglementation ou des normes plus sévères, même si on a un marché intégré.

    Est-ce le cas, ou suis-je dans le champ?

[Traduction]

+-

    M. Bob Friesen: Non, je ne pense pas que vous vous trompiez. Votre remarque est légitime. Quand nous parlons d'intégration et d'harmonisation, je pense qu'il faut également faire preuve de prudence. Il faut examiner attentivement ce que l'on veut harmoniser afin d'éviter que cela ne devienne un obstacle à la concurrence. Comme nos marchés sont intégrés, et considérant ce que sont les marges dans le secteur de la production primaire, nous devons essayer d'obtenir tous les avantages compétitifs possibles ou être au moins à égalité avec nos concurrents à cet égard, et éviter que les modifications apportées au système de réglementation ne mettent en danger la salubrité de nos aliments. Il est clair que nous jouissons actuellement d'une excellente réputation parce que notre système est très rigoureux. Je suis absolument convaincu qu'on ne doit pas envisager l'harmonisation si cela risque de nous faire perdre notre système de réglementation rigoureux ou notre réputation. En revanche, si c'est seulement une question de compétitivité, je pense que ça vaut la peine de l'envisager sérieusement.

º  -(1655)  

[Français]

+-

    L'hon. Claude Drouin: Merci.

[Traduction]

+-

    Le président: Avez-vous fini ?

[Français]

+-

    L'hon. Claude Drouin: Non, j'ai un dernier commentaire.

    Madame Holtslander, vous avez mentionné que la salubrité et la sécurité ne vont pas nécessairement de pair avec le commerce ou l'exportation. Cela ne devrait-il pas, au contraire, rassurer les pays étrangers et permettre à nos producteurs d'avoir un produit qui soit reconnu comme étant sécuritaire et salubre?

[Traduction]

+-

    Mme Cathy Holtslander: Oui. Je pense que des normes rigoureuses formulées au Canada et correctement appliquées favorisent notre commerce et rehaussent notre réputation internationale.

    Par contre, quand on examine l'initiative de la réglementation intelligente visant à intégrer le système de réglementation canadien au système américain, on constate que cela débouche sur un abaissement des normes canadiennes. Cela nous ferait dépendre du marché américain et nous exclurait des marchés européens, japonais ou autres qui ont des normes plus élevées que les États-Unis.

    Si nous voulons intégrer notre système d'élevage du bétail au système américain, nous allons leur vendre nos vaches, nos cochons, etc., et acheter les leurs. Si nous disons qu'on ne peut pas vendre de bétail au Canada avec certains antibiotiques et que les Américains disent que leurs producteurs pensent que cela les aidera à avoir des taux de croissance plus élevés, et des profits plus élevés, comment allons-nous pouvoir leur vendre nos animaux mais refuser les leurs ? Si nous voulons intégrer les systèmes, nous aurons les mêmes règles dans les deux pays. Mais nos autres partenaires commerciaux, réels ou potentiels, diront : « Nous pensons que ces médicaments sont dangereux et nous ne les voulons pas dans la viande que nous consommons ; désolés, vous ne pouvez pas commercer avec nous ».

    Si nous avons de normes plus élevées, conçues au Canada, nous pourrons commercer avec tout le monde mais, si nous nous intégrons au système américain qui a des normes moins élevées, nous serons exclus des autres marchés.

+-

    Le président: Quelqu'un demande une précision.

+-

    M. Gerry Ritz: Je reviens sur ce que Claude demandait. Vous dites craindre que les normes américaines n'entraînent un abaissement des normes canadiennes. Si c'est vrai, pourquoi le Japon achète-t-il plus de produits alimentaires américains que canadiens ? Tout le monde sait que le Japon est très exigeant car il attache beaucoup d'importance à la salubrité des aliments.

+-

    Mme Cathy Holtslander: Je ne sais pas.

+-

    L'hon. David Kilgour: Un rappel au règlement.

-

    Le président: Je ne pourrai pas en accepter beaucoup plus car nous allons sortir d'ici en retard. Beaucoup de gens ont des avions à prendre et il nous reste une demi-heure.

    Je tiens à remercier nos témoins d'aujourd'hui. Ils nous ont présenté des opinions différentes mais je pense que ce que nous voulons tous, c'est garantir la salubrité de nos approvisionnements alimentaires, autant dans l'intérêt des Canadiens que dans l'intérêt de ceux qui achètent nos produits.

    Comme je l'ai dit à tous les témoins, vous avez jusqu'au 21 pour nous communiquer vos réflexions, vos motions ou vos recommandations. Si vous le faites, nous en tiendrons compte. Évidemment, vous devez comprendre que je suis à la merci de ces gens-là. Nous ne renverrons le projet de loi devant la Chambre que lorsque nous aurons la conviction qu'il est satisfaisant, et nous voulons que vous puissiez participer au processus. Si vous pouvez nous aider d'ici au 21, nous tiendrons compte de vos opinions et elles seront intégrées à ce qui deviendra le futur projet de loi.

    Merci à nouveau et joyeuses Pâques.

    [La séance continue à huis clos].