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AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 23 novembre 2004




¿ 0910
V         La présidente (Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.))
V         L'hon. Joseph Handley (premier ministre et ministre des Affaires autochtones, Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest)

¿ 0915

¿ 0920
V         La présidente
V         M. Jeremy Harrison (Desnethé—Missinippi—Rivière Churchill, PCC)
V         L'hon. Joseph Handley
V         M. Jeremy Harrison
V         L'hon. Joseph Handley

¿ 0925
V         M. John Holden (conseiller juridique, ministère de la Justice, Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest)
V         La présidente
V         M. Jeremy Harrison
V         La présidente
V         M. Bernard Cleary (Louis-Saint-Laurent, BQ)
V         L'hon. Joseph Handley

¿ 0930
V         M. Bernard Cleary
V         L'hon. Joseph Handley

¿ 0935
V         La présidente
V         L'hon. Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)
V         L'hon. Joseph Handley
V         L'hon. Sue Barnes
V         L'hon. Joseph Handley
V         L'hon. Sue Barnes

¿ 0940
V         M. John Holden
V         L'hon. Sue Barnes
V         L'hon. Joseph Handley
V         L'hon. Sue Barnes
V         L'hon. Joseph Handley
V         L'hon. Sue Barnes
V         M. Roy Erasmus (directeur, négociations, ministère des Affaires autochtones, Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest)
V         L'hon. Sue Barnes
V         L'hon. Joseph Handley
V         La présidente
V         M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, PCC)

¿ 0945
V         L'hon. Joseph Handley
V         M. Gary Lunn
V         La présidente
V         M. Lloyd St. Amand (Brant, Lib.)

¿ 0950
V         La présidente
V         L'hon. Joseph Handley
V         M. John Holden
V         M. Lloyd St. Amand
V         La présidente
V         M. Lloyd St. Amand
V         L'hon. Joseph Handley
V         M. Lloyd St. Amand
V         La présidente
V         M. André Bellavance (Richmond—Arthabaska, BQ)

¿ 0955
V         L'hon. Joseph Handley
V         M. John Holden
V         M. André Bellavance
V         M. John Holden
V         M. André Bellavance
V         L'hon. Joseph Handley
V         La présidente

À 1000
V         M. David Smith (Pontiac, Lib.)
V         M. Roy Erasmus
V         M. David Smith
V         L'hon. Joseph Handley
V         M. David Smith
V         La présidente
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)

À 1005
V         L'hon. Joseph Handley
V         M. Roy Erasmus
V         M. Pat Martin
V         L'hon. Joseph Handley

À 1010
V         La présidente
V         L'hon. Sue Barnes
V         La présidente
V         L'hon. Joseph Handley
V         L'hon. Sue Barnes
V         M. Roy Erasmus
V         L'hon. Sue Barnes
V         M. Roy Erasmus
V         L'hon. Sue Barnes
V         La présidente
V         M. Jeremy Harrison

À 1015
V         L'hon. Joseph Handley
V         La présidente
V         M. Lloyd St. Amand
V         L'hon. Joseph Handley
V         M. Lloyd St. Amand
V         L'hon. Joseph Handley
V         M. Lloyd St. Amand
V         L'hon. Joseph Handley
V         M. Lloyd St. Amand
V         L'hon. Joseph Handley
V         La présidente
V         M. Bernard Cleary

À 1020
V         La présidente
V         L'hon. Joseph Handley
V         La présidente
V         M. Bernard Cleary

À 1025
V         L'hon. Joseph Handley
V         M. John Holden
V         La présidente
V         M. John Holden
V         La présidente
V         L'hon. Joseph Handley

À 1030
V         La présidente










CANADA

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 009 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 23 novembre 2004

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¿  +(0910)  

[Traduction]

+

    La présidente (Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.)): Bonjour. La séance est ouverte.

    Nous tenons aujourd'hui, 23 novembre, notre séance numéro 9. Conformément à l'ordre de renvoi du mardi 2 novembre 2004, nous étudions le projet de loi C-14, Loi mettant en vigueur l'Accord sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale conclu entre le peuple tlicho, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et le gouvernement du Canada et modifiant la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie et d'autres lois en conséquence.

    Nous recevons ce matin l'honorable Joseph Handley, premier ministre et ministre des Affaires autochtones du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.

    Je vois que vous êtes accompagné. Je vous invite à commencer et à nous présenter les personnes qui sont avec vous. Nous avons hâte de vous entendre. Merci.

+-

    L'hon. Joseph Handley (premier ministre et ministre des Affaires autochtones, Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest): Merci, madame la présidente.

    C'est un honneur pour moi d'être ici ce matin devant le comité.

    Je suis accompagné de Roy Erasmus, le directeur des négociations du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, et de John Holden, le conseiller juridique de notre gouvernement.

    Madame la présidente, comme je l'ai dit, c'est un honneur pour moi d'être ici pour vous parler du projet de loi C-14, Loi sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernement du peuple tlicho. Je remercie les membres du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord de m'avoir invité à témoigner devant eux.

    Sachez que je suis tout à fait en faveur de l'adoption rapide de cette mesure législative, en vertu de laquelle le Canada autorisera la mise en vigueur du premier accord global sur la gestion des terres et des ressources naturelles et l'autonomie gouvernementale dans les Territoires du Nord-Ouest.

    L'Accord décrit le pouvoir législatif du gouvernement tlicho dans un certain nombre de domaines de compétence territoriale. Il clarifie les relations futures entre le gouvernement tlicho, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et le Canada. Il procure également au peuple tlicho certains avantages économiques, dont le versement d'une somme de 150 millions de dollars sur une période de 15 ans et la concession de droits d'exploitation du sol et du sous-sol sur des terres d'une superficie totale de 39 000 kilomètres carrés entourant les quatre communautés tlichos.

    L'Accord établit clairement le droit de propriété et le pouvoir du peuple tlicho sur une autre grande partie des Territoires du Nord-Ouest. Sa ratification ne fait pas seulement l'affaire du peuple tlicho, mais aussi de nombreuses personnes et entreprises qui souhaitent investir dans les Territoires du Nord-Ouest. Le règlement de cette autre revendication territoriale marque le début d'une précieuse contribution à la prospérité économique des Territoires du Nord-Ouest.

    La mise en oeuvre de l'Accord apportera une plus grande stabilité économique et politique pour le peuple tlicho et aussi pour les autres habitants du Nord et les Canadiens qui profiteront de cet accord.

    Madame la présidente, l'Accord ne peut entrer en vigueur sans la promulgation de trois lois territoriales, en sus du projet de loi C-14. Le pendant de ce dernier à l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest, qui approuve l'Accord sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale du peuple tlicho, a été adopté en octobre 2003. Au mois de juin 2004, c'était au tour de la Loi autorisant l'établissement de gouvernement communautaire tlicho d'être adoptée. Le troisième texte de loi, la Loi sur l'établissement d'un organisme de services communautaires, a franchi l'étape de la deuxième lecture et notre comité permanent devrait en avoir terminé l'étude au début de décembre.

    Les lois des Territoires du Nord-Ouest nécessaires à la ratification de l'Accord tlicho ne peuvent prendre effet avant l'entrée en vigueur du projet de loi C-14, lequel autorisera et entérinera l'Accord, de même que l'accord sur le traitement fiscal, en plus de fournir une reconnaissance légale à l'Accord et aux lois visant le peuple tlicho. L'entrée en vigueur de toutes les lois de ratification, et de l'Accord lui-même, dépend de l'adoption de cette mesure législative.

    J'aimerais maintenant faire un bref historique du dossier. L'Accord sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale du peuple tlicho a été signé par le gouvernement canadien, le peuple tlicho et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, le 25 août 2003, dans la communauté tlicho de Rae-Edzo ou Behchokò, après plus de 10 longues et pénibles années de négociations.

    En fait, celles-ci ont duré encore plus longtemps, si on calcule le temps pris pour les négociations relatives à la revendication territoriale globale des Dénés et des Métis, qui a été à l'origine de la revendication des Tlichos.

    Les négociations menant à l'Accord tlicho ont été longues et difficiles, mais aussi coûteuses, car il a fallu les financer à l'aide de prêts du gouvernement du Canada, que doit maintenant rembourser le peuple tlicho.

    Madame la présidente, de nombreux événements importants et succès chèrement acquis ont pavé la voie au présent Accord. Le peuple tlicho a travaillé avec ses voisins, les Akaitchos et les Deh Chos, à la ratification d'accords destinés à protéger les intérêts de chacune des parties aux frontières de leurs territoires respectifs. Ces accords accessoires prouvent à quel point les peuples autochtones sont intéressés à collaborer entre eux afin qu'il soit possible de négocier des accords sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale de chacun, sans nuire aux intérêts des autres.

    L'Accord tlicho est unique en ce sens qu'il est le seul accord de ce genre que je connaisse à avoir été paraphé deux fois par les négociateurs en chef. Après avoir paraphé l'Accord une première fois en 2002, les trois parties ont entrepris une étude et une consultation publiques sans précédent au cours desquelles elles ont sollicité l'avis de tous les particuliers et des groupes intéressés. Plus de 40 groupes ont été invités officiellement à examiner et à commenter l'Accord.

    L'étude comportait une série de rencontres avec des groupes individuels, dont plusieurs séances publiques. L'exercice s'est soldé par un certain nombre de modifications apportées à l'Accord original. Mais il a surtout permis aux parties intéressées—et c'est ce qui était important—d'exprimer publiquement leurs préoccupations.

    Une fois l'étude terminée, l'Accord a été paraphé une seconde fois et le peuple tlicho s'est prononcé en faveur de sa ratification. En tout, 93 p. 100 des Tlichos en âge de voter ont participé au processus de ratification, et 84 p. 100 d'entre eux ont voté en faveur de l'Accord. À la lumière de ces chiffres, vous conviendrez certainement que le peuple tlicho est largement favorable à l'Accord.

    À la date d'entrée en vigueur de ce dernier, les Tlichos entreprendront les démarches nécessaires pour s'assurer un avenir prospère. Voilà pourquoi ils ont si hâte—et on les comprend—que les dernières étapes menant à cette date soient franchies. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest pense, comme eux, que le projet de loi C-14 constitue peut-être l'étape la plus critique de ce processus.

    La mise en oeuvre de l'Accord tlicho correspond à la vision exposée par notre gouvernement dans son plan stratégique, intitulé Une population, des communautés et un territoire autonomes—Une responsabilité partagée. Une des grandes priorités définies dans ce plan consiste à négocier des ententes justes avec les gouvernements canadien et autochtones et à conclure des accords sur la gestion des terres et des ressources naturelles et l'autonomie gouvernementale.

    Cette vision démontre que nous avons à coeur, en tant qu'organe législatif, de prendre les mesures nécessaires, en collaboration avec les gouvernements autochtones, pour aider ceux-ci à disposer plus librement de leurs terres et de leurs ressources, et à mieux contrôler leurs destinées aux plans économique, social, culturel et politique. Nous comprenons les Tlichos de vouloir accéder à l'autonomie gouvernementale et devenir des partenaires à part entière du Canada et des Territoires du Nord-Ouest, et s'efforcer avec nous et d'autres peuples autochtones d'atteindre d'autres objectifs importants, tels que le partage des revenus et le transfert des responsabilités, et nous les appuyons.

    Les liens utiles que nous avons consolidés au cours des dernières années avec différents groupes autochtones sont extrêmement importants. Nous avons tous intérêt, en tant que dirigeants au niveau fédéral ou territorial, ou d'un gouvernement autochtone, à entretenir ces liens de collaboration.

    En favorisant l'adoption de ce projet de loi, le Canada et les Territoires du Nord-Ouest montreront clairement aux dirigeants autochtones de tout le pays qu'ils reconnaissent le droit inhérent des Autochtones à l'autonomie gouvernementale et à la libre disposition de leurs terres et de leurs ressources, et qu'ils tiennent à développer des partenariats en parfait accord avec notre but commun, qui est de régler définitivement, et de façon juste et appropriée, la question de l'autonomie gouvernementale et les revendications territoriales.

    L'Accord tlicho prouve que les gouvernements populaires et autochtones peuvent coopérer ensemble tout en assurant la protection des intérêts et des droits de tous les intéressés. Toutes les personnes vivant au sein des communautés tlichos ou en territoire tlicho continueront de jouir de la protection offerte par la Constitution et par la Charte canadienne des droits et libertés.

    L'Accord tlicho dotera essentiellement le peuple tlicho d'un gouvernement autonome. Sauf que ce dernier représentera toutes les personnes résidant dans le territoire tlicho, qu'elles soient ou non des citoyens tlichos. Le principe de la démocratie sera strictement observé. Tous les électeurs admissibles habitant dans les communautés tlichos ou sur des terres tlichos pourront élire leurs conseillers et certains membres du gouvernement tlicho.

    L'accord sur les services intergouvernementaux, qui est accessoire à l'Accord tlicho, oblige le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest à créer un organisme de services communautaires chargé d'offrir des programmes et des services à tous les résidents des collectivités tlichos, et non seulement aux Tlichos. Voilà qui démontre encore une fois comment les gouvernements populaires et autochtones peuvent travailler ensemble à la défense des droits et des intérêts de tous.

    L'Accord tlicho établit une nouvelle norme en ce qui a trait au règlement des revendications territoriales et à l'attribution de l'autonomie gouvernementale. Il offre des certitudes au peuple tlicho tout en autorisant une certaine évolution, avec le temps, de l'autonomie gouvernementale.

    Comme en font foi l'Accord tlicho et le projet de loi qui en autorise l'entrée en vigueur, le Canada et les Territoires du Nord-Ouest tiennent réellement à ce que les Autochtones jouissent d'une plus grande autodétermination et de plus d'autonomie et à ce que les propriétaires originaux reprennent naturellement le contrôle de leurs terres. Le projet de loi C-14 représente l'élément crucial de la mise en oeuvre de l'Accord et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest espère que le comité et le Parlement lui accorderont leur appui.

    Avant de terminer, j'aimerais féliciter les trois parties à l'Accord, tout particulièrement l'équipe tlicho, qui attendait depuis si longtemps un tel dénouement.

¿  +-(0915)  

    Je prie le comité d'approuve le projet de loi C-14 et tous les députés de l'adopter le plus vite possible, pour l'ensemble de la population tlicho, pour les autres peuples autochtones au Canada et pour le bien des Territoires du Nord-Ouest et de tous les Canadiens.

    Pour conclure, je voudrais inviter tous les membres du comité à venir dans les Territoires du Nord-Ouest pour rendre visite à notre gouvernement et au gouvernement tlicho et pour constater eux-mêmes l'importance de cet accord pour toute la population des Territoires. Vous serez certainement les bienvenus et je me ferai un plaisir de recevoir n'importe lequel des membres du comité ou, encore mieux, le comité au complet.

    Merci, madame la présidente.

¿  +-(0920)  

+-

    La présidente: Merci beaucoup, monsieur le premier ministre.

    Le Parti conservateur va débuter ce premier tour de questions.

    Monsieur Harrison, s'il vous plaît.

+-

    M. Jeremy Harrison (Desnethé—Missinippi—Rivière Churchill, PCC): Merci, madame la présidente.

    Je tiens à remercier le premier ministre et ses fonctionnaires d'être venus jusqu'à Ottawa pour témoigner aujourd'hui devant notre comité. Je crois que je vais profiter de l'offre que le premier ministre nous a faite d'accueillir les membres du comité dans les Territoires du Nord-Ouest; j'aimerais beaucoup lui rendre visite.

    J'ai également remarqué la présence du premier ministre dans la tribune du Président, hier, pendant la période des questions. J'espère pour lui que, dans les Territoires du Nord-Ouest, la période des questions ne se déroule pas tout à fait comme la nôtre.

    Je voudrais surtout demander au premier ministre et à ses fonctionnaires quels sont les principaux avantages que la signature de cet accord et sa mise en oeuvre apporteront au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.

+-

    L'hon. Joseph Handley: Merci, madame la présidente.

    Cet accord présente un certain nombre d'avantages. Tout d'abord, comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, c'est le premier accord qui reconnaît aux peuples autochtones un droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et qui leur restitue les terres qui étaient les leurs. Plus précisément, cet accord sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale apporte des certitudes non seulement au peuple tlicho, mais aussi à l'industrie et à notre gouvernement, parce qu'il précise quelles sont les règles du jeu, quelles sont les lignes directrices et quelles sont les relations entre les différents intérêts pour quiconque désire faire des affaires dans la région. Cet accord est extrêmement important sur le plan économique pour que nous puissions profiter des richesses exceptionnelles que recèle notre territoire.

    Sur le plan politique, cet accord est important ne serait-ce que parce que les gens se sentent valorisés et ont le sentiment d'être des partenaires à part entière dans le développement économique, social et culturel de leur peuple. Ce projet de loi contient aussi des dispositions qui reconnaissent les droits et pratiques traditionnels ainsi que les aspects culturels de la vie des Tlichos, mais je crois que c'est extrêmement important pour les gens qui vivent là. En plus de tout le reste, en plus des avantages économiques, il y a des avantages politiques du fait que les Tlichos obtiennent enfin l'autonomie gouvernementale à laquelle ils ont droit.

+-

    M. Jeremy Harrison: Une disposition qui inquiétait un peu notre parti, en ce qui concerne la certitude et la finalité dont vous avez parlé, c'est l'article 27.6.1 qui envisage de nouveaux droits ancestraux, qu'ils soient découverts par la Cour suprême ou une autre instance compétente. Je me demande si le gouvernement s'inquiète ou non des nouveaux droits qui pourraient être inclus dans l'Accord. Le premier ministre pourrait-il me dire ce qu'il pense de cette disposition?

+-

    L'hon. Joseph Handley: Non, madame la présidente, cette disposition de l'Accord ne m'inquiète pas particulièrement. Il s'agit d'un accord très spécial pour nous, dans les Territoires du Nord-Ouest. Il se peut que des problèmes surgissent à l'avenir, madame la présidente, mais je voudrais demander à M. Holden, notre conseiller juridique, de vous donner une réponse plus précise à cette question.

¿  +-(0925)  

+-

    M. John Holden (conseiller juridique, ministère de la Justice, Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest): En ce qui concerne l'article 27.6.1, une clause dite de « rouverture », si vous voulez, il est important de la situer dans son contexte, c'est-à-dire le chapitre de l'Accord concernant la fiscalité. Il faut se demander quelles sont les limites de cette clause et quel est son but?

    Le libellé de l'article 27.6.1 nous permet de voir qu'elle porte sur les pouvoirs de taxation et les exemptions. Elle ne permet pas de rouvrir entièrement l'Accord tlicho.

    Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest trouve normal qu'on puisse inclure dans l'Accord des changements qui pourraient survenir en ce qui concerne les pouvoirs de taxation et les exemptions.

    Il ne faut donc pas oublier le contexte. Cela porte sur les pouvoirs de taxation et les exemptions; ce n'est pas une clause qui permet de rouvrir l'ensemble de l'Accord. Son rôle se limite donc à la fiscalité.

+-

    La présidente: Monsieur Harrison, il vous reste du temps.

+-

    M. Jeremy Harrison: Je n'ai pas d'autres questions à poser à nos invités pour le moment.

+-

    La présidente: Très bien.

    Monsieur Cleary.

[Français]

+-

    M. Bernard Cleary (Louis-Saint-Laurent, BQ): Monsieur le premier ministre, j'ai été très heureux de constater à quel point vous sembliez souhaiter que le dossier se conclue le plus rapidement possible. Nous aussi, nous voulons travailler le plus rapidement possible.

    Hier, j'ai assisté à une réunion du Comité permanent des finances au cours de laquelle j'ai pu entendre le représentant du gouvernement du Nunavut, qui était venu expliquer au comité à quel point les méthodes de financement de son gouvernement étaient inadéquates, cela pour la bonne et simple raison qu'on avait adopté les méthodes de taxation des autres gouvernements. En réalité, ces méthodes défavorisent énormément le gouvernement du Nunavut. Par conséquent, il est obligé d'aller voir le gouvernement central à tout moment pour essayer de compenser le manque de financement.

    Comme vous êtes sans aucun doute conscient de ce problème, avez-vous eu l'occasion d'en discuter et de proposer des méthodes de financement différentes? Je pense notamment aux redevances sur les richesses naturelles, aux mines, etc. Dans cette négociation, avez-vous trouvé d'autres méthodes qui vont faire en sorte que le gouvernement des Tlichos ne sera pas pénalisé sur le plan du financement à l'avenir et ne devra pas, chaque année, aller se mettre à genoux devant le gouvernement central pour demander des subventions de financement?

[Traduction]

+-

    L'hon. Joseph Handley: Je vous remercie de cette question.

    Comme vous le savez peut-être, les Territoires du Nord-Ouest ont le privilège de posséder des richesses et un potentiel économique considérable. Il y a d'abord nos mines de diamant. Nous avons deux mines en exploitation qui produisent chaque année des diamant de qualité d'une valeur d'environ 3 milliards à 4 milliards de dollars, et qui se trouvent dans le territoire traditionnel du peuple tlicho. Nous avons aussi de riches gisements pétroliers et gaziers. On projette de construire le pipeline de la vallée du Mackenzie. Nos mines de diamant semblent bien peu de chose par rapport au potentiel que représentent le pétrole et le gaz. Nous avons la chance d'avoir un territoire qui pourrait devenir très riche et qui rejoindra bientôt les provinces nanties du Canada.

    Le député a raison de dire que notre formule de financement est désuète. Elle a été établie lorsque les Territoires du Nord-Ouest possédaient très peu de ressources économiques à part les ressources traditionnelles. Il est temps d'en changer. Je dis souvent que notre gouvernement se ruine à soutenir le développement économique, parce que le développement économique coûte cher. Notre gouvernement n'est pas suffisamment financé pour pouvoir le faire.

    Nous avons travaillé en collaboration avec les gouvernements autochtones, y compris les Tlichos, pour négocier avec le gouvernement fédéral en vue de la dévolution, c'est-à-dire la responsabilité et les droits sur les terres, l'eau les ressources minières et, en même temps, le partage des revenus des richesses naturelles. C'est très décourageant. Cela dure depuis 18 ans et nous n'avons pas réussi à faire autant de progrès que nous le souhaiterions. C'est essentiel tant pour nous que pour les gouvernements autochtones étant donné les richesses qui sont extraites des Territoires. Un des présidents d'une compagnie minière m'a dit récemment qu'il venait de faire un chèque de 132 millions de dollars en redevances au gouvernement fédéral. Nous aurions aimé qu'une partie de cet argent reste dans le Nord, pour le gouvernement tlicho et pour nous-mêmes.

    Nous négocions avec le gouvernement fédéral. Nous voulons en arriver à la dévolution et au partage des revenus des richesses naturelles. J'ai proposé au premier ministre de procéder, dans l'intervalle, à un partage provisoire des redevances et des impôts entre les gouvernements autochtones, notre gouvernement et le gouvernement fédéral, et cela d'une façon équitable et qui reconnaisse le coût du développement économique et la difficulté de former des gens pour travailler dans les mines. Je crois qu'il y a un potentiel. Le peuple tlicho a d'ailleurs accompli quelque chose d'admirable dans le cadre des ententes sur les répercussions et les avantages. Il a réussi à conclure, avec les sociétés minières, une entente pour le financement de bourses d'étude. En quelques années, le nombre d'étudiants au niveau postsecondaire est passé d'une dizaine seulement à 130. années.

    Madame la présidente, les possibilités sont là. Nous les exploitons. Nous le faisons avec les Tlichos comme partenaires. Notre territoire a un avenir économique exceptionnel.

    Merci.

¿  +-(0930)  

[Français]

+-

    M. Bernard Cleary: Je veux poser une question complémentaire. Il semble que vous soyez conscient de l'importance de ce moyen de financer le gouvernement des Tlichos. Favorisez-vous la participation de la nation tlicho aux compagnies qui exploitent les mines, comme cela s'est fait chez les Cris, au Québec? Pensez-vous que les compagnies minières ou les compagnies qui exploitent d'autres ressources soient prêtes à faire une place au gouvernement ou aux Tlichos eux-mêmes de façon à ce que ces derniers puissent bénéficier continuellement des retombées économiques de leurs ressources?

[Traduction]

+-

    L'hon. Joseph Handley: Merci.

    Oui, il s'agit certainement d'une possibilité et le peuple tlicho a d'ailleurs, par l'entremise de son agence commerciale, mis sur pied un certain nombre de sociétés très prospères qui offrent des services et un soutien à l'industrie minière. Nous avons appuyé totalement ce genre d'initiatives et nous cherchons à les favoriser.

    Je souhaite également qu'un jour, les peuples autochtones des Territoires du Nord-Ouest puissent être associés à certaines entreprises minières, comme l'a fait l'Aboriginal Pipeline Group qui a obtenu un tiers des intérêts dans le pipeline. Non seulement ils obtiendront des emplois dans le secteur de l'approvisionnement et des services de soutien, mais ils auront une participation dans ces entreprises. Il y a toutes sortes de nouveaux projets et nous en sommes à la phase d'apprentissage. Dans le cas du pipeline, une participation du tiers montre bien comment les peuples autochtones peuvent bénéficier du développement de leur région.

    Merci.

¿  +-(0935)  

+-

    La présidente: C'est au tour de Mme Barnes, puis de M. Lunn.

    Madame Barnes.

+-

    L'hon. Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.

    Messieurs, nous vous souhaitons la bienvenue à notre comité.

    Je trouve toujours très intéressant que des élus viennent témoigner devant des comités fédéraux et nous avons devant nous le premier ministre et ministre des Affaires autochtones de votre territoire. De toute évidence, cela montre l'importance que vous accordez à cette situation.

    Je vous ai rendu visite lorsque vous étiez ministre des Finances. Je dois dire que les assemblées législatives diffèrent les unes des autres et que la vôtre est assez inhabituelle par rapport au Parlement où nous siégeons. Je voudrais vous donner l'occasion de nous dire en quelques mots si votre assemblée législative est partisane, si vous délibérez en anglais, en français ou dans une autre langue et comment vous avez procédé à la ratification de cet accord. Allez-y, s'il vous plaît.

+-

    L'hon. Joseph Handley: Merci.

    Notre assemblée législative est composée de 19 membres. Chacun de nous présente sa candidature dans une circonscription. Nous ne sommes pas les candidats d'un parti, mais seulement des gens qui désirent se mettre au service du public. Une fois que nous sommes élus, nous choisissons parmi les 19 d'entre nous un président, un premier ministre puis six ministres dont deux de Yellowknife, qui compte environ 40 p 100 de la population, deux du sud et deux du nord. Cela donne une bonne répartition géographique.

    Comme nous n'avons qu'une petite assemblée législative, cette formule nous convient bien, car elle nous permet de profiter au maximum des talents de ces 19 élus.

    Nous ne suivons pas le modèle habituel de la majorité face à l'opposition. Nous gouvernons plutôt par consensus. Nous passons beaucoup de temps à résoudre les problèmes de façon à servir les intérêts de la plupart des gens du Nord. Notre leader du gouvernement à la Chambre joue un rôle très important en nous aidant à conclure les ententes nécessaires pour parvenir à un consensus, dans toute la mesure du possible.

    Nous avons également une assemblée législative qui prend des mesures énergiques pour que nous rendions toujours des comptes à la population de tous les territoires et pour qu'elle sache ce qui se passe à l'assemblée législative et quelle est l'importance des enjeux. Nous utilisons donc huit langues officielles. Il n'y a pas toujours de services d'interprétation dans la totalité de ces huit langues, mais si un membre de l'assemblée désire parler dans sa langue traditionnelle, il a parfaitement le droit de le faire.

    Ces huit langues sont également reconnues comme langues officielles en ce sens que les gens peuvent demander, par exemple, la transcription des délibérations dans une des langues officielles.

    Avec une population aussi diverse que la nôtre, qui compte des Inuvialuits et des Dénés parlant de nombreuses langues différentes en plus de l'anglais et du français, c'est assez compliqué, mais c'est indispensable pour que nous soyons vraiment représentatifs et que nous rendions vraiment des comptes à nos concitoyens.

    Merci.

+-

    L'hon. Sue Barnes: Le tlicho est-il l'une des langues officielles de votre assemblée législative?

+-

    L'hon. Joseph Handley: Oui, c'est une des langues officielles, tant la langue orale qu'écrite.

+-

    L'hon. Sue Barnes: Merci beaucoup.

    J'ai été très impressionnée par l'économie et l'avenir économique de votre territoire. Je tiens à féliciter votre négociateur.

    Je voudrais maintenant m'adresser à M. Holden, car je voudrais savoir si vous êtes d'accord ou non avec ce que je vais dire. C'est au sujet du même article que celui dont on vient de parler, l'article 27.6.1. Selon mon interprétation, l'Accord tlicho prévoit qu'à l'avenir, si le gouvernement du Canada ou le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest accepte d'accorder et à un autre groupe autochtone des Territoires des avantages fiscaux supérieurs à ceux que prévoit l'Accord tlicho, le gouvernement du Canada, le gouvernement des Territoires et le gouvernement tlicho pourraient négocier, à la demande de ce dernier, en vue d'accorder des avantages équivalents au peuple tlicho.

    Est-ce une bonne interprétation de cet article?

¿  +-(0940)  

+-

    M. John Holden: Oui. L'essentiel est qu'en pareilles circonstances, les parties devront négocier et s'efforcer de conclure un accord. Encore une fois, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest croit que, par souci d'équité, cet article doit être inclus dans l'accord.

+-

    L'hon. Sue Barnes: Et c'est parce qu'il y a d'autres accords qui n'ont pas encore été finalisés dans vos territoires et que vous voulez montrer la voie de l'équité pour le présent et pour l'avenir, monsieur le premier ministre?

+-

    L'hon. Joseph Handley: Oui, il y a plusieurs accords d'autonomie gouvernementale en cours de négociation. Il y en aura d'autres et il est important de montrer la direction qu'ils doivent prendre.

+-

    L'hon. Sue Barnes: Vous avez mentionné que vous ne représentiez pas de partis politiques. Quand les législateurs ont voté pour à l'unanimité à la Chambre, chacun d'eux a dû estimer qu'il comprenait suffisamment les enjeux pour pouvoir voter. En fait, ils siègent comme indépendants, n'est-ce pas?

+-

    L'hon. Joseph Handley: C'est exact, ils siègent comme indépendants. Il y a eu beaucoup de consultations, beaucoup de débats sur cette question avant le vote afin que tout le monde comprenne parfaitement la situation.

+-

    L'hon. Sue Barnes: Monsieur Erasmus, en tant que négociateur, pensez-vous que les consultations ont été suffisantes?

+-

    M. Roy Erasmus (directeur, négociations, ministère des Affaires autochtones, Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest): Oui, les consultations ont été suffisantes. En fait, comme le premier ministre l'a souligné dans son exposé, c'est le premier accord, du moins dans les Territoires du Nord-Ouest, qui ait été paraphé deux fois.

    Après la première ratification, il y a eu une période de consultation au cours de laquelle les gens ont été invités à assister à des assemblées publiques. Ils ont pu faire valoir leurs arguments et poser des questions aux négociateurs, de même qu'au conseiller juridique qui se trouvaient là. Je ne pense pas que cela ait été fait ailleurs.

+-

    L'hon. Sue Barnes: En effet.

    Monsieur le premier ministre, de toute évidence, vous souhaitez que votre économie en bénéficie. Pensez-vous que cet accord et sa ratification auront des répercussions…? Ou plutôt, est-ce que la non-ratification de cet accord aurait des répercussions négatives sur votre économie dans le Nord?

+-

    L'hon. Joseph Handley: Le message que cela enverrait à l'industrie et aux investisseurs des Territoires du Nord-Ouest, c'est que le climat est incertain. Nous aurions alors beaucoup de difficulté à continuer, non seulement dans la région tlicho, mais dans toutes les autres régions des Territoires du Nord-Ouest qui négocient leur autonomie gouvernementale. Si cela arrivait, de nombreux débouchés économiques potentiels seraient compromis. Il est très important de préciser quelles sont les règles du jeu, dans l'intérêt tant des Tlicho, que des Autochtones, de l'industrie et de notre gouvernement. Je crois donc essentiel que cet accord soit ratifié.

+-

    La présidente: Merci.

    Monsieur Lunn, s'il vous plaît.

+-

    M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, PCC): Merci beaucoup, madame la présidente, et soyez les bienvenus, monsieur Handley, vous et vos fonctionnaires.

    Je voudrais d'abord vous demander de m'excuser pour mon retard ce matin. J'arrive tout juste de Colombie-Britannique.

    Il y a une vingtaine d'années, après mon diplôme universitaire, je suis allé travailler dans les Territoires du Nord-Ouest, au sud de Great Bear Lake. J'aime donc beaucoup votre territoire qui, d'après la première page du Globe and Mail, deviendra peut-être une province dans pas si longtemps.

    D'autre part, quand vous parlez de l'importance du partage des revenus tirés des ressources, il est certain que les Territoires sont riches en ressources et c'est donc une chose qui va devoir se faire. Personnellement, je crois que ce serait avantageux pour tous les niveaux de gouvernement. Peut-être aurions-nous quelques leçons à apprendre de M. Williams, le premier ministre de Terre-Neuve, et qu'un jour nous aurons ces discussions avec les Territoires.

    Pour passer à l'Accord tlicho, je dirais d'abord que la lecture de l'accord suscite effectivement des inquiétudes et des questions. Cela dit, les membres du Parti conservateur qui siègent à ce comité n'ont aucunement l'intention de retarder l'adoption de ce projet de loi. Cette mesure sera sans aucun doute examinée et adoptée rapidement à la Chambre et je compte bien suivre de près la façon dont elle sera mise en oeuvre.

    Devant cette mesure, l'étendue de votre territoire et certains des problèmes que soulèveront les règlements futurs des revendications territoriales , je me demande si vous voulez que cet accord serve de modèle. En voyant certains des pouvoirs prévus, j'ai l'impression—et je sais que c'est discutable—que nous créons un nouveau palier de gouvernement. Certains des pouvoirs accordés au gouvernement tlicho—et cela pourrait d'excellents résultats—semblent être très vastes et créer un autre niveau de gouvernement. Toutefois, mes voeux de succès accompagnent le peuple tlicho et j'espère que cet accord sera bénéfique pour la population des Territoires.

    Je vais vous poser une question. Pourriez-vous me dire si à votre avis cela crée un troisième ou quatrième niveau de gouvernement?

    Deuxièmement, quelles seront les conséquences de cet accord sur les règlements futurs accords des revendications territoriales? Je crois qu'il faudrait qu'un gouvernement provincial ou territorial prévoit des dispositions assez uniformes pour ces accords. Autrement dit, s'ils sont très différents, ne deviendra-t-il pas impossible d'organiser un processus de consultation pour tous les accords auxquels il faut s'attendre? Je crois qu'il y en aura d'autres et j'aimerais donc savoir ce que vous en pensez.

¿  +-(0945)  

+-

    L'hon. Joseph Handley: Merci.

    Comme je l'ai dit dans mon exposé, il s'agit de la première entente conclue dans les Territoires du Nord-Ouest sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale et cet accord est donc unique en son genre. C'est quelque chose de nouveau.

    Je ne suis pas certain qu'il s'agisse vraiment d'un modèle qui sera suivi pour toutes les autres ententes d'autonomie gouvernementale. Je suppose qu'un bon nombre des nouveaux accords qui seront négociés présenteront, eux aussi, certaines particularités.

    Nous pourrions aussi discuter quant à savoir s'il s'agit d'un nouveau palier de gouvernement. C'est une forme de gouvernement public. C'est un gouvernement tlicho, mais aussi un gouvernement public. Si le peuple tlicho n'avait pas suivi cette voie, nous aurions pu avoir un gouvernement autochtone. Théoriquement, cela aurait pu s'apparenter au système de réserves du sud. Les gens ont préféré se doter d'un gouvernement public qui représentera toute la population de la région et tous les Tlicho. Ce n'est donc pas tout à fait un autre palier de gouvernement.

    Je ne le qualifierais pas non plus de modèle. Au fil des ans, lorsque nous négocierons des ententes d'autonomie gouvernementale, nous constaterons que certaines choses seront les mêmes, mais il y aura aussi un bon nombre de situations particulières.

    Cela ne nous inquiète pas beaucoup. Cet accord, tel qu'il est, ne nous pose aucun problème. Si nous en avions d'autres très similaires, nous pourrions sans doute nous en accommoder également, mais nous ne verrions pas d'inconvénient à ce que les accords qui suivront soient différents à certains égards. Cela ne se passerait pas exactement de la même façon.

    Merci.

+-

    M. Gary Lunn: Merci.

+-

    La présidente: Nous allons maintenant avoir des tours de cinq minutes. Ce sera d'abord M. St. Amand, puis M. Bellavance.

    Monsieur St. Amand.

+-

    M. Lloyd St. Amand (Brant, Lib.): Merci, madame la présidente.

    Monsieur Handley ou monsieur Holden, vous avez entendu les membres du comité et M. Lunn, par exemple, faire valoir clairement que le projet de loi allait sans doute être adopté. Nous sommes certainement prêts à adopter cette mesure, mais certains membres du comité éprouvent quand même quelques inquiétudes.

    M. Prentice n'a pas pu venir ce matin, mais je sais qu'il s'inquiète particulièrement de la Charte des droits et de ses répercussions sur cet accord. On a fait valoir, au cours du débat, que l'accord indiquait clairement que la Charte ne s'applique pas. L'article 2.15.1 de l'accord porte que la Charte s'applique. Si vous me permettez de lire cet article au complet :

La Charte canadienne des droits et libertés s'applique au gouvernement tlicho à l'égard de toutes les questions relevant de sa compétence.

    Si j'ai bien compris, la Constitution tlicho se présente comme la loi suprême du peuple tlicho. Étant donné qu'elle se présente comme telle et que l'accord sur les revendications territoriales précise bien que la Charte des droits et libertés s'applique, je me demande s'il n'y a pas une asymétrie entre ces deux clauses, et si, sans le vouloir, nous ne risquons pas d'exclure un groupe de citoyens canadiens de l'application de la Charte des droits.

¿  +-(0950)  

+-

    La présidente: Monsieur le premier ministre.

+-

    L'hon. Joseph Handley: Merci, madame la présidente.

    À notre connaissance—et c'est ce que pensait également le peuple tlicho, la Charte des droits et libertés a certainement préséance sur toute loi tlicho, mais je vais demander à M. Holden d'ajouter d'autres précisions.

+-

    M. John Holden: Si vous prenez l'article 3.1 de la Constitution tlicho, il y est dit que cette dernière est la loi suprême de la nation tlicho. Je crois donc que, logiquement, il s'agit de vérifier ce que dit la Constitution. L'article 2.3 de la Constitution tlicho porte que :

La Charte des droits et libertés canadienne s'applique au gouvernement tlicho et à ses institutions à l'égard de toutes les questions relevant de sa compétence.

    Ce genre de disposition laisse clairement entendre que le gouvernement tlicho et ses institutions devront protéger les droits et libertés individuels conformément aux responsabilités que lui confère l'article 2.1 de la Constitution. Cela ne veut pas dire que la Constitution tlicho l'emporte sur la Constitution canadienne ou la Charte des droits.

    Je serais d'accord avec le premier ministre pour dire que si l'on compare le libellé de la Charte avec celui de l'accord et des dispositions pertinentes de la Constitution Tlicho, rien ne permet de croire que le risque dont vous parlez existe vraiment.

+-

    M. Lloyd St. Amand: Merci, monsieur Holden et monsieur le premier ministre.

    Me reste-il du temps, madame la présidente?

+-

    La présidente: Vous avez 30 secondes.

+-

    M. Lloyd St. Amand: Je me demande si l'un de vous trois connaît le projet de loi C-20, la Loi sur la gestion financière et statistique des Premières nations, qui est actuellement devant la Chambre des communes. Je sais que ce n'est pas l'objet de votre venue, mais je me demandais si vous connaissiez ce projet de loi.

+-

    L'hon. Joseph Handley: Madame la présidente, seulement dans les grandes lignes; je n'ai pas du tout suivi les délibérations à ce sujet.

+-

    M. Lloyd St. Amand: Très bien. Je ne vais donc pas vous poser la question.

    Merci.

+-

    La présidente: C'est au tour de M. Bellavance, puis de M. Smith, et ensuite de M. Martin.

[Français]

+-

    M. André Bellavance (Richmond—Arthabaska, BQ): Monsieur le premier ministre, je vous remercie, vous et les personnes qui vous accompagnent, de votre présence, une présence qui est d'autant plus pertinente que vous avez fait preuve d'une très bonne expertise en ce qui concerne les négociations avec les peuples autochtones en 1992-1993 et maintenant, dans le cas de l'entente avec le peuple tlicho.

    Vous connaissez sans doute l'accord avec les Nisga'as en Colombie-Britannique. Il y a également eu des accords au Québec, lorsque le Parti québécois était au pouvoir. Je pense à la Paix des braves avec les Cris et à l'entente commune avec les Inuits. Avez-vous décelé dans l'entente avec le peuple tlicho un élément bien spécifique qu'il n'y avait pas dans vos ententes précédentes et dans les autres ententes dont j'ai fait mention, si vous les connaissez? Quelle est la principale différence?

¿  +-(0955)  

[Traduction]

+-

    L'hon. Joseph Handley: Madame la présidente, je pense que je vais laisser M. Holden vous répondre, si vous le voulez bien, car je ne connais pas les détails de certains des autres accords.

+-

    M. John Holden: Votre question concernait les différences entre l'Accord nisga'a et cet accord-ci, n'est-ce pas?

[Français]

+-

    M. André Bellavance: Je parle non seulement de l'accord avec les Nisga'as, mais également des accords que vous avez conclus en 1992-1993 et des accords qui ont été conclus ailleurs au Canada avec d'autres peuples autochtones. J'aimerais savoir s'il y a dans l'entente avec le peuple tlicho une particularité qu'on ne trouvait pas ailleurs. Quelle serait la principale différence?

[Traduction]

+-

    M. John Holden: Le différence est, je pense, que contrairement à l'Accord inuvialuit ou l'Accord saulteaux, cet accord comprend des dispositions d'autonomie gouvernementale. Les autres accords des Territoires du Nord-Ouest—les accords inuvialuits, saulteaux et gwich'in—portent uniquement sur les terres et les ressources. Comme le premier ministre l'a mentionné dans sa déclaration liminaire, cet accord ouvre vraiment une nouvelle voie.

    Si vous me demandez en quoi cet accord diffère de l'Accord nisga'a, en Colombie-Britannique, la différence la plus évidente est que le modèle adopté n'apporte pas les mêmes certitudes—c'est un modèle de modification plutôt qu'un modèle de non-affirmation, de non-exercice comme l'accord tlicho.

[Français]

+-

    M. André Bellavance: Monsieur le premier ministre, vous disiez tout à l'heure que vous ne souhaitiez pas que cet accord devienne un modèle, mais je ne veux pas mal vous interpréter. Par contre, dans votre allocution, vous avez dit que l'entente avec le peuple tlicho établissait une nouvelle norme en ce qui a trait au règlement des revendications territoriales et à l'attribution de l'autonomie gouvernementale. M. Holden vient de dire qu'on parlait plus spécifiquement d'autonomie gouvernementale dans cet accord. À tout le moins, cet accord pourrait-il servir de modèle en ce qui a trait à l'autonomie gouvernementale? Il ne s'agit pas nécessairement d'une entente à laquelle il faudra toujours se référer, mais est-ce une entente qui pourrait servir de modèle intéressant pour des ententes futures?

[Traduction]

+-

    L'hon. Joseph Handley: Madame la présidente, cet accord pourrait devenir un modèle qui pourrait être suivi de très près par d'autres groupes qui négocient des ententes sur des revendications territoriales ou l'autonomie gouvernementale. Rien ne les oblige à suivre ce modèle, mais l'Accord tlicho sera certainement examiné attentivement par les groupes qui désirent obtenir l'autonomie gouvernementale. Je m'attends à ce qu'il y ait d'autres accords très similaires.

    En même temps, comme je l'ai dit en réponse à une autre question, chaque nouvel accord pourrait être également unique en son genre. Les gens peuvent vouloir faire les choses un peu différemment de ce qui a déjà été fait. Toutefois, notre gouvernement territorial n'a pas d'objection à cet accord et si d'autres accords du même genre étaient conclus à l'avenir, nous n'y verrions pas d'inconvénient.

+-

    La présidente: Merci.

    Juste un autre éclaircissement. Quand vous demandez quelle est la différence entre disons, l'Accord nisga'a et celui-ci, comme le premier ministre l'a indiqué, le gouvernement tlicho est un gouvernement populaire tandis que le gouvernement nisga'a n'en est pas un. C'est également une des différences.

    C'est maintenant à M. Smith qui sera suivi de M. Martin.

À  +-(1000)  

+-

    M. David Smith (Pontiac, Lib.): Monsieur le premier ministre et messieurs, merci beaucoup d'être venus.

    Nous voudrions également vous féliciter, en tant que membre de l'équipe de négociation, pour cet accomplissement. Vous avez négocié pendant 10 longues années et sans doute bien plus longtemps avant également.

    Une question importante à mes yeux est celle des consultations. La dernière fois, nous avons pu demander aux Tlicho comment ils avaient été consultés. Cette fois, ma question concerne la population des Territoires du Nord-Ouest. Vous avez dit qu'il y avait eu d'importantes consultations. M. Erasmus aura peut-être quelque chose à ajouter à ce sujet.

+-

    M. Roy Erasmus: Oui. Merci.

    Comme je l'ai déjà dit, cet accord a été conclu dans des circonstances très particulières dans les Territoires du Nord-Ouest. À notre avis, il n'y a eu aucun autre accord que les négociateurs aient paraphé à deux reprises. Après la première ratification, la population a été consultée et la teneur du document a été rendue publique. Les gens ont été invités à des assemblées où étaient réunis les négociateurs, les conseillers juridiques et d'autres personnes. Les gens pouvaient venir pour exprimer leurs opinions et leurs craintes et dire si cet accord les satisfaisait ou non. Ils pouvaient également poser directement des questions aux personnes qui se trouvaient là et obtenir des réponses. Nous avons trouvé ce processus satisfaisant et nous supposons que cela deviendra la norme à compter de maintenant.

+-

    M. David Smith: J'ai appris quelque chose aujourd'hui, à savoir que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest compte 19 représentants qui ne sont pas affiliés à un parti. Les élus représentent les citoyens de leur circonscription et sont donc directement responsables de leurs décisions. J'en conclus que lorsque vous décidez d'appuyer une mesure, comme tous les membres de l'assemblée législative ont décidé d'appuyer cet accord, c'est vous qui prenez cette décision, ce n'est pas votre parti. Les élus ont pris cette décision parce qu'ils étaient entièrement pour, n'est-ce pas?

+-

    L'hon. Joseph Handley: Oui, madame la présidente, c'est exact. Chacun de nous représente la population qui l'a élu et nous prenons nos décisions sur cette base. Nos décisions ne se basent pas sur la politique d'un parti. C'est ainsi que nous représentons nos concitoyens.

+-

    M. David Smith: Certains membres du comité avaient des inquiétudes. Par le passé, des Tlicho sont venus répondre à ces questions. Aujourd'hui, c'est vous qui êtes ici. Je ne sais pas si vous avez suivi notre dernière réunion, mais vous pensez la même chose. Je viens du Québec et ma circonscription se trouve en marge de la région visée par cet accord. Je l'ai lu; j'ai participé à différentes séances d'information. Quand je vois que les gens qui seront touchés directement sont totalement pour, je peux seulement vous adresser mes félicitations. J'appuie entièrement votre accord. Je vous soutiens entièrement.

+-

    La présidente: Merci beaucoup, monsieur Smith.

    Monsieur Martin.

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Merci, madame la présidente, et merci à vous, monsieur le premier ministre et à vos invités, d'être venus nous voir.

    Je dirais simplement que le caucus néo-démocrate à la Chambre des communes appuie tout à fait ce projet de loi et que nous ferons tout en notre pouvoir pour qu'il soit adopté rapidement. Nous reconnaissons son importance historique, car c'est un accord très particulier qui porte à la fois sur une revendication foncière globale et l'autonomie gouvernementale. Nous ne sommes pas sûrs que cette entente pourrait ou devrait servir de modèle. Je ne crois pas que nous soyons prêts à aller aussi loin, car nous savons que tout le monde ne serait pas d'accord pour que le déroulement des futures négociations soit fixé à l'avance.

    Je signale simplement que j'ai vécu au Yukon pendant huit ans à une époque où il n'y avait pratiquement pas de développement dans ce territoire parce que tout était bloqué en attendant l'issue des revendications territoriales. Pour pouvoir construire une maison pour ma famille, j'ai dû jalonner une concession minière et faire croire que je cherchais de l'or, car vous ne pouviez pas obtenir de terrain dans tout le territoire à cause des revendications territoriales en suspens.

    Je voudrais savoir—et je crois connaître la réponse—si, étant donné que les investisseurs recherchent la stabilité et exigent la stabilité pour investir, quelles sont les possibilités que vous envisagez en attendant que les revendications territoriales soient réglées une par une?

À  +-(1005)  

+-

    L'hon. Joseph Handley: Comme nous l'avons déjà dit, cet accord apporte des certitudes au peuple tlicho, mais aussi à l'industrie, aux investisseurs et aux autres intéressés qui sauront maintenant quelle sont les règles du jeu, quelles sont les terres disponibles, qui sont les propriétaires des terrains et comment ils peuvent les exploiter.

    Par exemple, je peux vous dire que dans les régions où nous n'avons pas encore réglé les revendications territoriales, dans les régions de Deh Cho et d'Akaitcho, l'industrie peut très difficilement venir s'installer. Ces deux secteurs se trouvent au sud de notre territoire. Nous avons un bon potentiel forestier, mais cette industrie a été fermée parce qu'on ne savait pas exactement qui pouvait émettre un permis sans soulever d'objections, etc.

    Quand nous voyons ce qui se passe dans les régions où les revendications n'ont pas été réglées par rapport à la situation dans les autres, la différence est énorme. C'est d'autant plus important que nous avons des mines de diamant, qui sont très rentables et qui suscitent beaucoup d'intérêt, de même que d'autres minerais, du pétrole et du gaz. Je ne saurais donc trop insister sur l'importance de ratifier cet accord, tant pour le peuple tlicho que tous les résidents des Territoires.

    M. Erasmus désire ajouter quelque chose.

+-

    M. Roy Erasmus: Je voudrais seulement dire un mot au sujet du modèle d'application générale. Ce n'est certainement pas ce que nous préconisons. Comme le premier ministre l'a dit, chaque groupe autochtone est particulier. Bien entendu, la politique d'autonomie gouvernementale du gouvernement fédéral permet d'adopter des modèles différents pour les différents groupes.

    Nous avons aussi notre propre politique. Nous voudrions assurer une certaine uniformité afin de faciliter les choses. Nous voudrions également que ce soit abordable et réalisable. Nous ne voulons pas négocier quelque chose d'utopique sans aucun espoir de réussir et nous essayons donc de rester réalistes, mais en assurant quand même une certaine uniformité. C'est nous qui allons devoir vivre dans la région et nous essayons donc de faire en sorte que ce soit négocié de cette façon.

+-

    M. Pat Martin: C'est très intéressant.

    Je suppose que vous avez écouté avec intérêt les réflexions du premier ministre concernant l'avenir des Territoires du Nord-Ouest, qui deviendra bientôt une province dont vous choisirez le nom, je suppose.

    Ma question va un peu plus loin que l'aspect pratique de ce qui suivra. Nous savons que vos accords-cadres sur la dévolution sont bien avancés, mais qu'il y a encore des négociations en cours. Les négociations qui se poursuivent n'ont pas encore débouché sur une conclusion définitive. Vous heurtez-vous à une résistance de la part des groupes qui continuent à négocier? Cela entre-t-il en conflit avec la dévolution? N'est-ce pas prématuré?

+-

    L'hon. Joseph Handley: Avec cet accord, nous aurons réglé quatre revendications territoriales qui représentent une grande partie des Territoires du Nord-Ouest. Tous ces organismes et gouvernements ont hâte de procéder à la dévolution et au partage du revenu des ressources.

    Nous avons trois revendications qui restent à régler : celles des Akaitcho, des Deh Cho et des Métis des Territoires du Nord-Ouest. Tous ces groupes, qui sont situés dans le sud du territoire, voudraient réaliser davantage de progrès à leurs tables de négociation avant que nous ne procédions trop rapidement à la dévolution. Ils ont donc quelques hésitations, mais en même temps ils acceptent que nous poursuivions nos progrès sur le plan de la dévolution pendant qu'eux poursuivent leurs négociations. Bien entendu, ils souhaiteraient obtenir d'abord leur règlement, si la chose est possible.

À  +-(1010)  

+-

    La présidente: Merci, monsieur Martin.

    C'est au tour de Mme Barnes et M. Harrison, puis M. Cleary pour le troisième tour.

    Madame Barnes.

+-

    L'hon. Sue Barnes: Merci beaucoup, madame la présidente.

    Monsieur le premier ministre, vous avez mentionné l'accord sur les services intergouvernementaux, les 10 premières années suivant l'entrée en vigueur de cet accord. Qu'est-ce que cette entente comprenait exactement? Je voudrais seulement quelques exemples. Est-ce l'éducation? Quels sont les services couverts et comment procédera-t-on? Comment ce système va-t-il être mis sur pied et pourquoi?

+-

    La présidente: Monsieur Handley.

+-

    L'hon. Joseph Handley: Madame la présidente, de façon très générale, à une certaine époque, nous avions un conseil scolaire et une commission sanitaire Dogrib. Un de ces organismes était chargé de l'éducation et l'autre de l'administration de la santé au niveau des Tlicho. À la demande du peuple tlicho, ces services ont été regroupés au sein d'une commission des services communautaires Dogrib qui fournissaient des servies administratifs dans les domaines de l'éducation et de la santé.

    L'accord sur les services intergouvernementaux comprend une disposition aux termes de laquelle les services qui avaient été confiés à la commission des services communautaires Dogrib seront gérés par ce nouvel organisme. En fait, nous continuerons à administrer les programmes de santé et d'éducation de la même façon que par le passé. Je crois que les services sociaux sont également fusionnés avec les services de santé. Nous allons continuer comme avant, mais avec un nouvel instrument juridique.

+-

    L'hon. Sue Barnes: Monsieur Erasmus, pouvez-vous nous dire, en tant que négociateur, dans quelle mesure ce processus a renforcé les capacités de la communauté tlicho et a eu des répercussions sur la façon dont tout le Nord peut opérer?

+-

    M. Roy Erasmus: En fait, je n'ai pas négocié cet accord. À partir d'un certain stade, il n'est plus nécessaire d'avoir des négociateurs. C'est comme pour la participation du gouvernement fédéral. Mme Isaac a repris le dossier tlicho, mais elle ne l'a pas vraiment négocié. Je n'ai pas négocié l'accord. Je suis intervenu une fois les négociations terminées.

    Il y a eu un certain renforcement des capacités, mais pas autant que nous le souhaiterions. Le financement fédéral alloué pour les revendications territoriales pose certains problèmes. On ne reçoit pas vraiment d'argent avant la date d'entrée en vigueur, si bien qu'il est très difficile de renforcer les capacités comme nous le voudrions.

    Selon nous, ce genre d'accord est du ressort du gouvernement fédéral et c'est lui qui devrait les financer. Si nous commençons à les financer nous-mêmes, ce pourrait être un dangereux précédent. Il faudrait donc qu'à l'avenir le financement du renforcement des capacités soit accordé avant la date d'entrée en vigueur, je suppose.

+-

    L'hon. Sue Barnes: Je vais poser ma question plus simplement. Quand l'argent commencera-t-il à rentrer?

+-

    M. Roy Erasmus: Il commencera à rentrer à la date d'entrée en vigueur.

+-

    L'hon. Sue Barnes: Alors…?

[Français]

    C'est donc maintenant nécessaire. C'est tout.

[Traduction]

+-

    La présidente: Merci beaucoup, madame Barnes.

    Monsieur Harrison, s'il vous plaît.

+-

    M. Jeremy Harrison: Merci, madame la présidente.

    J'aurais une question de plus à poser au premier ministre. Pense-t-il que cet accord réduit l'autorité ou les pouvoirs de son gouvernement ou des gouvernements qui lui succéderont dans les Territoires du Nord-Ouest?

À  +-(1015)  

+-

    L'hon. Joseph Handley: Madame la présidente, je pense qu'un jour—surtout après les 10 premières années—le peuple Tlicho se verra confier des pouvoirs et des responsabilités en ce qui concerne la mise en oeuvre des programmes et services. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'une érosion au sens négatif du terme. Je vois cela comme une façon d'administrer notre gouvernement.

    Il y a certains programmes et services qui ne seront sans doute jamais transférés. Il s'agit par exemple de la justice et des services correctionnels, ou encore de responsabilités d'une vaste portée comme l'exploitation d'une infrastructure telle que l'infrastructure de transport, par exemple. Ce sont des choses qui resteront peut-être toujours sous la responsabilité du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. Mais pour ce qui est des programmes d'éducation, des programmes de santé, de certains programmes municipaux, ils pourraient tous être administrés un jour par les gouvernements communautaires et régionaux.

    Je ne vois pas cela comme une évolution négative de notre gouvernement ou une façon négative de gouverner. Il me paraît naturel que les gens assument la responsabilité de leurs propres programmes.

+-

    La présidente: C'est au tour de M. St. Amand, qui sera suivi de M. Cleary.

+-

    M. Lloyd St. Amand: Merci, madame la présidente.

    Messieurs, si j'ai bien compris, l'Accord tlicho s'applique à environ 3 000 personnes. Est-ce à peu près ce chiffre?

+-

    L'hon. Joseph Handley: Je crois qu'il est plus près de 3 500, mais c'est à peu près cela.

+-

    M. Lloyd St. Amand: La majorité de ces personnes sont-elles membres de la communauté Tlicho?

+-

    L'hon. Joseph Handley: C'est exact.

+-

    M. Lloyd St. Amand: Et il y a seulement quelques non-Autochtones, c'est-à-dire quelques dizaines ou peut-être quelques centaines, n'est-ce pas?

+-

    L'hon. Joseph Handley: C'est exact. Cela n'a pas changé non plus au cours des années. Les chiffres sont restés largement les mêmes.

+-

    M. Lloyd St. Amand: Très bien. Quel que soit leur nombre, bien entendu, nous reconnaîtrons tous qu'ils ont des droits.

    Cela m'amène à poser quelques questions. Premièrement, les non-Autochtones ont-ils pu faire connaître leurs opinions au sujet de cet accord? Dans l'affirmative, quelle était l'opinion générale des non-Autochtones?

    Deuxièmement, cet accord va-t-il vraiment permettre à ces non-Autochtones de participer aux prises de décisions s'ils désirent le faire?

+-

    L'hon. Joseph Handley: Oui, tous les gens de la région tlicho—ou même des Territoires—ont eu la possibilité de dire ce qu'ils pensaient du projet d'accord. Ceux qui résident dans la région tlicho ont eu de nombreuses occasions de le faire. À ma connaissance, il n'y a pas eu de vives objections, mais seulement des demandes d'éclaircissement quant à la façon dont cet accord s'appliquerait.

    Les personnes qui vivent dans les communautés tlicho reconnaissent, je crois, qu'elles résident dans une région d'environ 3 500 habitants. Il y a sans doute tout au plus 200 ou 250 personnes qui ne sont pas des Tlicho. Elles reconnaissent qu'il s'agit de communautés tlicho et elles sont satisfaites de ces dispositions.

    Les gens savent, je crois, qu'ils peuvent défendre leurs intérêts, et que leurs intérêts sont protégés et que la Charte des droits et libertés s'applique, par exemple. Ils peuvent présenter leur candidature comme membres du conseil. Certains postes, comme celui de chef, ne leur sont pas accessibles à moins qu'ils ne deviennent membres du peuple tlicho et il y a d'ailleurs un processus qui leur permet de le devenir. Ils pourraient le devenir, s'ils le voulaient et si une personne se soumet à ce processus, elle pourra devenir membre. Mais c'est la seule restriction pour ceux qui ne sont pas des Tlicho.

    Madame la présidente, je n'ai entendu personne se plaindre que ses droits étaient limités de façon inacceptable.

    Merci.

+-

    La présidente: Merci, monsieur St. Amand.

    Monsieur Cleary, s'il vous plaît.

[Français]

+-

    M. Bernard Cleary: Merci, madame la présidente.

    Monsieur le premier ministre, d'entrée de jeu, je dois vous dire que je suis moi-même un autochtone, un Innu du Lac-Saint-Jean. J'ai été élu à la dernière élection dans un comté blanc de la région métropolitaine de Québec.

    J'avais fait autre chose avant, mais au cours des 25 dernières années, j'ai été négociateur pour des groupes autochtones du Québec. J'ai donc été à même d'apprécier les gouvernements d'en face, parce que je négociais toujours contre deux gouvernements. Je dois vous dire que je n'ai pas les félicitations faciles envers les gouvernements. Les Tlichos ont été chanceux de travailler avec un gouvernement territorial disposé à faire en sorte que les Indiens s'établissent de façon solide. Cela est tout à votre honneur. Je dois vous dire également que vous ne vous vantez pas beaucoup à l'égard de ce qui a été accepté dans cette entente. C'est la deuxième fois que je vois cela. Pendant 25 ans, j'ai essayé de faire reconnaître le droit des autochtones d'utiliser les richesses de leur sous-sol, ce qui est inaccessible dans les autres provinces, du moins au Québec, où on n'a jamais été capable de faire une percée dans ce domaine.

    Cette entente constitue une belle réussite, même si cela a déjà existé au Yukon. C'est le seul endroit où j'avais déjà vu cela. C'est une chose merveilleuse que d'avoir permis aux autochtones d'utiliser les richesses de leur sous-sol. Comme vous l'avez dit, c'est avec ces richesses que les communautés autochtones vont se développer. Aux États-Unis, les communautés qui se sont développées sont celles qui étaient assises sur le pétrole. Sans les richesses de leur sous-sol, jamais les groupes autochtones ne vont réussir à vraiment se développer.

    Vous pouvez donc en être fier. Vous ne vous ferez peut-être pas d'amis au sein des gouvernements du Québec et des autres provinces, mais vous pouvez en être fier. Vous allez certainement vous en faire du côté des autochtones. Vous avez regardé la situation avec beaucoup d'ouverture d'esprit et je pense que vous avez ouvert une grande porte. Vous dites que cette entente n'est pas un modèle. Je voudrais bien qu'au moins cette partie de l'entente devienne un modèle.

    Merci.

À  +-(1020)  

[Traduction]

+-

    La présidente: Monsieur le premier ministre, s'il vous plaît.

+-

    L'hon. Joseph Handley: Merci, madame la présidente.

    Je peux seulement dire qu'en tant qu'Innu, M. Cleary reconnaît certainement, lui aussi, que les gens du Nord ont un sens très pratique de la vie et des façons dont nous pouvons travailler ensemble. Le modèle qui a été négocié par les Tlicho, notre gouvernement et le gouvernement fédéral me semble être un bon exemple d'accord pratique, réalisable et qui peut servir de modèle. Ce ne sera pas nécessairement pas la norme. Nous ne croyons pas qu'on puisse répéter la même chose pour tout le monde, mais que chaque groupe a des droits. Oui, nous sommes fiers de l'accomplissement du peuple tlicho et nous sommes heureux d'y avoir participé.

    Merci.

+-

    La présidente: Merci.

    Merci, monsieur Cleary…ou aviez-vous une autre question?

[Français]

+-

    M. Bernard Cleary: Ma question porte sur la constitutionnalisation de l'autonomie gouvernementale. Dans la majorité des ententes, on a tendance à souhaiter une forme d'étapisme, parce qu'un gouvernement autochtone se construit par étape. Or, au moment où on voudra constitutionnaliser une partie de ces ententes, il est évident qu'il sera extrêmement difficile de rouvrir la Constitution pour améliorer un certain nombre de choses qu'on ne peut pas prévoir dans une entente.

    Avez-vous pensé à des mécanismes qui permettraient une certaine évolution de l'entente afin qu'on puisse corriger des choses qu'on n'a pas prévues ou qu'on ne pouvait pas prévoir parce qu'on n'avait pas de boule de cristal? Avez-vous un mécanisme prévoyant la réouverture de l'entente pour qu'on puisse profiter de l'évolution des choses?

À  +-(1025)  

[Traduction]

+-

    L'hon. Joseph Handley: Oui, madame la présidente, il y a là une disposition qui permet cela. Je vais peut-être demander à M. Holden de vous expliquer plus en détail comme cela fonctionnera.

+-

    M. John Holden: Je considère que la partie de l'Accord qui concerne l'autonomie gouvernementale se situe dans le contexte des choses qui évoluent et qui sont nouvelles. Un des aspects de cet accord que j'apprécie le plus est qu'il permet d'aborder de nouvelles questions concernant les droits à l'autonomie gouvernementale—un domaine nouveau et en pleine évolution—et qu'il est possible d'apporter dans l'Accord et dans son cadre un élément que les négociateurs n'avaient pas prévu au départ, quelque chose de nouveau qui a été légalement reconnu.

    À mon avis, ce modèle de certitude est l'une des plus grandes contributions que les négociateurs aient apportées, en ce sens que les droits fonciers, c'est-à-dire les droits ancestraux concernant les ressources foncières, l'utilisation des terres, etc.—font l'objet de dispositions très strictes qui apportent des certitudes. L'élément autonomie gouvernementale est capable d'adaptation et de souplesse, mais c'est dans le sens où il intègre dans l'Accord quelque chose de nouveau et d'imprévu. Si cet accord ne permettait pas de faire face à quelque chose de nouveau, il serait inévitable qu'un juge intervienne pour déterminer ce que les parties voulaient dire et quelle était leur intention et on évite donc cette situation. Cette entente permet de faire face à des événements nouveaux ou imprévus en ce qui concerne les droits à l'autonomie gouvernementale autochtone et de les englober. À mon avis, un des principaux atouts de cet accord c'est qu'il permet de répondre aux nouveaux besoins qui surgiront dans quelques années.

+-

    La présidente: À titre d'éclaircissement, pourriez-vous nous dire de quelle disposition de l'Accord vous parlez?

+-

    M. John Holden: C'est l'article 2.10.2.

+-

    La présidente: Merci beaucoup, monsieur Holden.

    Je crois que les membres du comité n'ont pas d'autres questions à poser d'après ce que je peux voir. Je voudrais permettre au premier ministre de dire le mot de la fin, à moins que M. Martin ne veuille poser une autre…

    D'accord, les membres du comité n'ont pas d'autres questions à poser.

    Je voudrais vous remercier d'avoir passer du temps avec nous ce matin. Si vous avez une dernière déclaration à nous faire, je vais vous accorder un peu de temps pour conclure la réunion.

    Merci.

+-

    L'hon. Joseph Handley: Merci, madame la présidente.

    Je voudrais seulement dire que j'ai lu avec intérêt une bonne partie de la transcription de vos dernières délibérations. J'apprécie la rigueur avec laquelle tous les membres du comité ont posé des questions et exprimé leur opinion . Cela nous permettra d'avoir une bonne loi.

    Je tiens à remercier le peuple tlico, une fois de plus. Cet accord leur ouvre d'énormes possibilités et j'estime que les négociateurs des différentes parties ont fait un excellent travail. Encore une fois, j'exhorte le comité et les membres de notre Parlement à adopter ce projet de loi le plus rapidement possible.

    J'invite sincèrement tous les membres du comité à venir dans les Territoires du Nord-Ouest célébrer l'entrée en vigueur de cette loi. Je crois que c'est là un chapitre important de l'histoire du Canada.

    Merci.

À  -(1030)  

-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Des voix: Bravo!

    La présidente: Il est 10 h 30. Je sais que vous n'aviez pas d'autres questions à poser, mais je voudrais vous rappeler que le délai pour soumettre des amendements, si quelqu'un ose le faire, est le 3 décembre.

    À notre prochaine réunion, jeudi, nous recevrons le grand chef de l'Assemblée des Premières nations, Phil Fontaine. Il sera accompagné du chef régional des Territoires du Nord-Ouest, Bill Erasmus, de l'Assemblée des Premières nations. Ce sont donc les deux témoins que nous avons pour jeudi, à 9 heures.

    Je remercie également tous ceux qui sont venus assister à notre réunion de ce matin. Merci.

    La séance est levée.