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INST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 5 mai 2003




¹ 1530
V         Le président (M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.))
V         M. Konrad von Finckenstein (commissaire à la concurrence, Bureau de la concurrence, ministère de l'Industrie)

¹ 1535

¹ 1540
V         Le président
V         M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD)
V         Le président
V         M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne)
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Peter Sagar (sous-commissaire de la concurrence intérimaire, Bureau de la concurrence, Direction générale de la politique, ministère de l'Industrie)

¹ 1545
V         M. James Rajotte
V         M. Peter Sagar
V         M. James Rajotte
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. James Rajotte
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. James Rajotte
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. James Rajotte
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Richard Taylor (sous-commissaire de la concurrence intérimaire, Bureau de la concurrence, Direction générale des affaires criminelles, ministère de l'Industrie)

¹ 1550
V         M. James Rajotte
V         Le président
V         M. James Rajotte
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. James Rajotte
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. James Rajotte
V         Le président
V         M. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.)
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Serge Marcil
V         M. Konrad von Finckenstein

¹ 1555
V         M. Serge Marcil
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Serge Marcil
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Le président
V         M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ)

º 1600
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein

º 1605
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         M. Peter Sagar
V         M. Paul Crête

º 1610
V         M. Peter Sagar
V         Le président
V         M. Paul Crête
V         Le président
V         M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.)
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Szabo
V         M. Konrad von Finckenstein

º 1615
V         M. Peter Sagar
V         M. Paul Szabo
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Szabo

º 1620
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Szabo
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Peter Sagar
V         M. Paul Szabo
V         M. Peter Sagar
V         M. Paul Szabo
V         M. Peter Sagar
V         M. Paul Szabo
V         Le président
V         M. Brian Masse

º 1625
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Brian Masse
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Brian Masse
V         M. Richard Taylor
V         M. Brian Masse
V         M. Konrad von Finckenstein

º 1630
V         M. Brian Masse
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Brian Masse
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Brian Masse
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Le président
V         M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.)
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         M. Richard Taylor
V         M. Larry Bagnell
V         M. Richard Taylor
V         M. Larry Bagnell

º 1635
V         M. Richard Taylor
V         M. Larry Bagnell
V         M. Richard Taylor
V         M. Larry Bagnell
V         M. Richard Taylor
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         Le président
V         M. David Chatters (Athabasca, Alliance canadienne)
V         M. Paul Szabo
V         M. David Chatters
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. David Chatters

º 1640
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. David Chatters
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. David Chatters
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. David Chatters
V         Le président
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Richard Taylor
V         Le président
V         M. Larry Bagnell
V         Le président
V         M. Larry Bagnell

º 1645
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         Le président
V         M. Larry Bagnell
V         M. Richard Taylor
V         M. Peter Sagar
V         Le président
V         M. Larry Bagnell
V         Le président
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête

º 1650
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête

º 1655
V         M. Richard Taylor
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Crête
V         Le président
V         M. Larry Bagnell
V         M. Richard Taylor
V         M. Larry Bagnell
V         M. Richard Taylor
V         M. Larry Bagnell
V         M. Richard Taylor
V         M. Larry Bagnell
V         M. Richard Taylor
V         M. Larry Bagnell
V         M. Richard Taylor

» 1700
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Le président
V         M. David Chatters
V         M. Konrad von Finckenstein
V         Le président
V         M. David Chatters
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. David Chatters
V         Le président
V         M. Paul Szabo

» 1705
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Szabo
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Szabo
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Paul Szabo
V         Le président
V         M. Paul Crête
V         M. Konrad von Finckenstein

» 1710
V         M. Paul Crête
V         Le président
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Peter Sagar
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein

» 1715
V         M. Larry Bagnell
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. Larry Bagnell
V         M. Peter Sagar
V         Le président
V         M. James Rajotte
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. James Rajotte
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. James Rajotte

» 1720
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. James Rajotte
V         M. Konrad von Finckenstein
V         M. James Rajotte
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 040 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 5 mai 2003

[Enregistrement électronique]

¹  +(1530)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.)): Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous procédons à l'examen des causes possibles de la hausse récente des prix de l'essence, des effets négatifs majeurs de cette hausse sur l'économie, et ce, en vue de recommander les mesures correctives appropriées au gouvernement fédéral.

    Nous recevons aujourd'hui, du ministère de l'Industrie, M. Konrad von Finckenstein, commissaire de la concurrence; M. Richard Taylor, sous-commissaire de la concurrence intérimaire; et M. Peter Sagar, sous-commissaire de la concurrence intérimaire.

    Je préviens les membres du comité qu'il pourrait y avoir un vote à 16 heures ou à 16 h 30 à la Chambre. Je ne suis pas bien sûr de quoi il s'agit, mais c'est ce qu'on m'a dit. J'aimerais qu'on entende tout de suite l'exposé du commissaire, après quoi nous poserons nos questions.

    Bienvenue de nouveau, monsieur le commissaire.

+-

    M. Konrad von Finckenstein (commissaire à la concurrence, Bureau de la concurrence, ministère de l'Industrie): Merci beaucoup, monsieur le président, heureux d'être des vôtres.

    Je suis heureux de pouvoir discuter du rôle du Bureau de la concurrence concernant les prix de l'essence. Les prix de l'essence constituent un sujet délicat. Les consommatrices et les consommateurs canadiens réagissent avec colère et frustration aux hausses temporaires des prix en se demandant si les principaux détaillants d'essence ne se livrent pas à la fixation des prix.

    Au cours des années, le Bureau de la concurrence a consacré d'importantes ressources à des enquêtes sur ce marché. L'objectif du Bureau est d'assurer un marché équitable, efficace et concurrentiel, ce qui permet aux consommatrices et aux consommateurs de bénéficier de bas prix et encourage les entreprises à innover et à offrir de nouveaux produits.

[Français]

    Il convient de noter que la Constitution ne confère pas au gouvernement fédéral le pouvoir de réglementer les prix, sauf dans une situation d'urgence nationale. C'est là une responsabilité qui incombe aux provinces. La plupart d'entre elles ont décidé de ne pas intervenir à cet égard et de laisser les forces du marché déterminer le prix de l'essence. Je suis moi aussi convaincu qu'un marché concurrentiel est la meilleure méthode de réglementation des prix de l'essence. Des prix fixés par le gouvernement plutôt que par le marché se traduisent habituellement par des prix plus élevés pour les consommateurs.

    Le rôle du Bureau de la concurrence consiste à mettre en application la Loi sur la concurrence, laquelle comporte des dispositions criminelles relatives à la fixation des prix et au maintien des prix ainsi que des dispositions civiles concernant, entre autres, les fusionnements et l'abus de position dominante. Toutes ces dispositions s'appliquent aux marchés de l'essence et des autres produits pétroliers. L'objet de la Loi sur la concurrence est de préserver et de favoriser la concurrence au Canada.

    Bien que nous suivions de près l'évolution du secteur pétrolier aux fins de la mise en application de la Loi sur la concurrence, il est important de noter que le Bureau de la concurrence n'est pas une agence de surveillance des prix de l'essence. Jusqu'en 1995, cette importante fonction relevait de Ressources naturelles Canada. À l'heure actuelle, la collecte régulière de données est effectuée par MJ Ervin & Associates et par certaines provinces. Ces données sont ensuite analysées par diverses agences gouvernementales et par le bureau.

[Traduction]

    Avant de parler des événements de février, il est nécessaire de faire quelques observations concernant les prix de l'essence. Le prix de l'essence au Canada, en termes réels et en excluant toutes les taxes, est aussi bas qu'il l'était dans les années 80. De plus, il n'y a aucune différence importante du prix de base de l'essence, si l'on exclut les taxes et compte tenu du taux de change, entre le Canada et les États-Unis. En outre, comme le rapporte l'Agence internationale de l'énergie, les prix sont plus bas au Canada que dans la plupart des pays industrialisés.

    Maintenant, qu'est-ce qui s'est passé en février? Au début de février, les prix de l'essence ont commencé à augmenter à travers l'ensemble de l'Amérique du Nord et ont atteint leur sommet durant la deuxième semaine de mars 2003. Depuis ce temps, les prix sont redescendus à leur niveau de décembre 2002. Tous les renseignements disponibles jusqu'à ce jour confirment que ces augmentations du prix de l'essence résultaient directement de l'augmentation du prix du pétrole brut qui a été causée par quatre facteurs : (1) une crise politique au Venezuela qui a touché la production de pétrole de ce pays; (2) à cette époque, l'imminence d'une guerre en Irak; (3) le temps anormalement froid dans le nord-est de l'Amérique du Nord; et (4) les stocks bas en Amérique du Nord.

    Au cours de la dernière année, les augmentations des prix de détail de l'essence au Canada ont été similaires aux augmentations des prix du pétrole brut et aux augmentations des prix de détail de l'essence à travers le monde.

    Parlons des enquêtes précédentes du Bureau. Depuis 1990, le Bureau de la concurrence a mené quatre enquêtes de grande envergure en ce qui a trait à l'industrie des produits pétroliers et n'a trouvé aucune preuve suggérant que les augmentations périodiques des prix faisaient suite à un complot national ou régional visant à limiter la concurrence dans l'approvisionnement en produits pétroliers, ou à un comportement abusif par des entreprises dominantes dans le marché. D'ailleurs, il est important de noter que chaque période d'augmentation des prix a été suivie d'une baisse atteignant les niveaux précédents. Plusieurs enquêtes faites par nos homologues à travers le monde ont conduit à des résultats similaires.

    Par exemple, certains d'entre vous se souviendront de l'augmentation des prix de détail de l'essence au Canada que nous avons connue lors de l'été 1999. Cette augmentation a entraîné de nombreuses plaintes de consommateurs alléguant que cela dénotait un manque de concurrence. Le Bureau a enquêté sur ces hausses et a déterminé qu'elles se fondaient sur des décisions d'établissement des prix individuelles, prises en fonction des forces du marché. En particulier, nous avons conclu que ces hausses pouvaient être attribuées à l'augmentation du prix du brut sur les marchés mondiaux, ce qui a entraîné une hausse du prix de gros de l'essence à travers l'Amérique du Nord.

    Depuis 1972, des poursuites ont été intentées à la suite d'enquêtes du Bureau dans 13 cas de maintien de prix relativement aux prix de l'essence ou de l'huile de chauffage. Huit de ces cas ont donné lieu à des condamnations. Cependant, ces cas touchaient des marchés locaux et des incidents isolés. Cela démontre clairement que le Bureau de la concurrence a toujours été déterminé à enquêter sur des plaintes et à mettre en application les dispositions criminelles de la loi en ce qui concerne l'industrie pétrolière lorsque cela s'avère approprié.

    On peut trouver des renseignements supplémentaires sur les activités du Bureau reliées à l'essence sur le site Web du Bureau : http://www.cb/bc.gc.ca.

¹  +-(1535)  

[Français]

    Les questions structurelles. Comment faisons-nous pour promouvoir la concurrence dans un marché qui ne compte que quelques joueurs? Le bureau a pris des mesures efficaces lorsqu'il a fallu régler des problèmes en matière de concurrence qui pouvaient découler de fusionnements proposés dans l'industrie de l'essence. À cet égard, il a fait obstacle à des projets de transactions susceptibles de réduire ou d'empêcher sensiblement la concurrence; il a obligé des parties à se départir d'importants éléments d'actif tels que des raffineries, des terminaux et des stations-services; et il a obligé des raffineurs à approvisionner des détaillants indépendants.

    Par exemple, la coentreprise proposée entre Petro-Canada et Ultramar Diamond Shamrock, en 1998, aurait entraîné le fusionnement par Petro-Canada de ses trois raffineries et de plus de 1 800 stations-services avec la raffinerie d'Ultramar et des 1 300 stations-services de cette dernière dans l'Est du Canada. Le bureau, après examen de la situation, a déterminé que le projet de fusionnement de ces deux principaux acteurs au Québec et dans les provinces de l'Atlantique aurait pour effet d'empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence. Cela aurait vraisemblablement entraîné une hausse des prix au Québec et dans les provinces de l'Atlantique. Compte tenu de l'opposition catégorique du bureau à la coentreprise, Petro-Canada et Ultramar ont renoncé à leur projet.

[Traduction]

    En 2000, afin d'amener tous les intéressés, soit l'industrie, les gouvernements et les consommateurs, à mieux comprendre le fonctionnement des marchés de l'essence au Canada, Industrie Canada et Ressources naturelles Canada ont commandité une étude indépendante des marchés canadiens de l'essence par le Conference Board du Canada.

    Dans son rapport rendu public en février 2001, le Conference Board du Canada a déclaré que les Canadiennes et les Canadiens bénéficient de l'actuel système de marché libre qui détermine les prix de l'essence. De fait, le Canada peut se vanter d'avoir des prix qui sont parmi les plus bas du monde. Le Conference Board a aussi conclu que les prix de détail de l'essence se sont ajustés de la même manière en réponse aux changements des prix du pétrole brut, que ce soit pour les augmentations ou les baisses de prix du brut. Les études commandées par le Bureau de la concurrence en sont également venues à la conclusion que le temps nécessaire pour un changement des prix de l'essence au détail suite à un changement du prix du pétrole brut est en moyenne le même pour les augmentations et les baisses des prix du brut.

    Vous allez maintenant vous demander si ces conclusions sont encore valides deux ans plus tard. Pour le savoir, j'ai demandé à des économistes du Bureau de la concurrence de mettre à jour quelques-unes des analyses économétriques faites par le Conference Board. En utilisant la même méthodologie mais une base de données mise à jour, leurs résultats confirment ceux du Conference Board d'il y a deux ans : notamment, (1), les changements des prix de gros suivent de très près les changements des prix du pétrole brut; (2) les changements des prix de détail suivent de très près les changements des prix de gros; et (3) il n'y a aucune symétrie en ce qui concerne les prix de détail, c'est-à-dire qu'ils baissent ou qu'ils augmentent de la même manière suite à une baisse ou à une augmentation des prix de gros. Nous rendons disponibles les résultats détaillés de cette mise à jour, et celle-ci figure en annexe à mon mémoire.

    En février 2003, nous avons reçu une demande de M. Lorne Nystrom, député, et de cinq autres Canadiens pour que nous menions une enquête concernant les liens entre la concentration des entreprises, l'intégration verticale dans l'industrie pétrolière canadienne et les augmentations des prix de l'essence. Les requérants ont affirmé qu'ils croyaient que le Parlement avait confié au Bureau de la concurrence un mandat afin qu'il examine la situation d'ensemble et les effets de la concentration d'entreprises et de l'intégration verticale sur les consommatrices et les consommateurs canadiens, sur les entreprises canadiennes et sur la vitalité de l'économie canadienne.

    C'est en se fondant sur ces motifs qu'ils ont demandé au Bureau de la concurrence de mener une enquête sur l'industrie pétrolière canadienne. Comme nous l'avons indiqué dans notre réponse à cette demande, même si le mandat du Bureau inclut le rôle très important d'enquêteur et de promoteur de la concurrence, la loi actuelle ne donne pas au Bureau le pouvoir de mener une étude sur l'industrie. Une telle étude sur l'industrie en général ne devrait pas être menée par un organisme d'enquête mais plutôt par un organisme neutre.

    Fait intéressant, à l'automne 2001, pendant que votre comité révisait le projet de loi C-3, une résolution a été proposée pour permettre au commissaire de la concurrence, avec l'approbation du ministre de l'Industrie, de demander au Tribunal canadien du commerce extérieur d'enquêter sur l'état de la concurrence et le fonctionnement des marchés dans tout secteur ou secteur secondaire de l'économie canadienne. Le ministre de l'Industrie déposerait un tel rapport à la Chambre des communes.

    Puisque ce projet de modification n'a pas encore fait l'objet de consultations auprès des intervenants, le gouvernement a indiqué qu'il devrait bénéficier d'une franche discussion avant de considérer une telle addition à la loi. Donc, nous examinons actuellement la possibilité d'ajouter cette proposition au processus de consultations de la prochaine série de modifications de la loi afin de donner au gouvernement l'occasion de consulter de façon très étendue les intervenants sur ce sujet. Évidemment, si une telle proposition était adoptée lorsque les prochaines modifications seront apportées à la loi, cela faciliterait le genre d'étude qui a été demandé dans le secteur pétrolier.

    Je conclus. En principe, il ne fait aucun doute selon moi qu'un marché concurrentiel est la meilleure méthode de réglementation des prix de l'essence. En terminant, je voudrais ajouter que, dans l'ensemble, le Bureau de la concurrence a les outils qu'il lui faut pour enquêter sur les agissements anticoncurrentiels et traiter des problèmes structurels qui pourraient surgir dans le secteur pétrolier. Je tiens à redire aussi que, si le Bureau de la concurrence obtenait la preuve d'agissements contraires à la Loi sur la concurrence, nous n'hésiterions pas à prendre les mesures voulues.

    Encore une fois, je vous remercie de m'avoir écouté et je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.

¹  +-(1540)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Nous confirmons l'objet du vote. Dès que nous le connaîtrons, je vous en parlerai.

    Il s'agit d'une motion pour revenir à l'ordre du jour. De deux choses l'une : quatre de votre côté et quatre de notre côté, soit quatre de l'opposition et quatre du parti ministériel peuvent rester pour poursuivre les travaux du comité, ou alors, il faudra suspendre la séance quelques instants avant la tenue du vote. Je propose un compromis pour que nous puissions continuer nos travaux ici, pendant que d'autres votent à la Chambre, si l'opposition le veut bien.

+-

    M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Je vais rester, à moins qu'on m'appelle.

+-

    Le président: Nous sommes quatre de ce côté, et nous pouvons continuer.

    Monsieur Rajotte, vous êtes le premier à poser les questions et vous avez la parole

+-

    M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

    Merci beaucoup, messieurs, d'être venus nous donner cet excellent exposé. Il était presque trop bon puisqu'il a répondu à presque toutes les questions que j'avais préparées.

    J'aimerais revenir à certains éléments de votre exposé, monsieur von Finckenstein. Le premier se rapporte à la plainte qu'on entend souvent, de la part du public : quand le prix du brut augmente, on constate une augmentation du prix de l'essence mais quand le prix du brut descend, il n'y a pas de baisse correspondante du prix de l'essence. Vous en parlez à la page 5 de votre mémoire. Vous dites que les changements des prix de gros suivent de près les variations des prix du brut. En outre, dans le rapport du Conference Board du Canada, on affirme qu'il n'y a pas de preuve d'asymétrie dans les ajustements des prix de détail.

    Pourriez-vous nous donner davantage d'explications? Dans quelle mesure les prix de gros, les prix du brut et les prix de détail se suivent-ils? Y a-t-il un délai qu'on constate souvent, ou est-il variable?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: M. Sagar, qui m'accompagne, est notre économiste en chef et peut probablement vous répondre mieux que moi.

    Peter.

+-

    M. Peter Sagar (sous-commissaire de la concurrence intérimaire, Bureau de la concurrence, Direction générale de la politique, ministère de l'Industrie): Merci.

    Il semble qu'il y ait un délai, d'après les calculs du Conference Board. C'est assez normal, les prix devant s'ajuster. C'est presque une constante, de mois en mois, selon le moment où on fait les relevés. On constate un délai.

    Nous en parlons en détail dans le document. Vous le constaterez à la page 4, où nous faisons état de la relation entre les prix de détail et les prix du brut. Vous constaterez que partout au Canada, plus ou moins, une augmentation d'un cent le litre de brut provoquera un changement d'environ 1,3 p. 100 des prix de détail, et le contraire, lorsque le prix baisse, c'est dans la même proportion. Nous n'avons donc pas constaté d'écart important des marges au détail, pour ces trois années, ni du côté du raffinage, ni dans les prix de gros, ni dans les prix à la pompe. Il y a certes des variations, mais pas de changement significatif.

¹  +-(1545)  

+-

    M. James Rajotte: Pour ce qui est du délai, est-ce une période fixe ou variable?

+-

    M. Peter Sagar: On pourrait faire une analyse plus approfondie des périodes. Comme le Conference Board, nous avons tenu compte d'un délai d'un mois. Nous avons considéré le prix courant et les variations sur un mois. Cela semble expliquer une bonne part des variations et, mieux encore, il semble que l'industrie arrive à anticiper les augmentations et les baisses, et les périodes d'ajustement des prix sont assez courtes.

    Concrètement, à bien y penser, on constate que les prix s'ajustent très rapidement. Dans une analyse de mois en mois, on voit que l'augmentation du prix du brut a un effet sur le prix à la pompe, pendant le mois même. Il y aura aussi une légère augmentation le mois suivant, mais il pourrait s'agir, en partie, de statistique tardive pour les relevés.

+-

    M. James Rajotte: Ma deuxième question porte sur la première page de votre mémoire, où vous dites que le gouvernement fédéral n'a pas la compétence constitutionnelle pour réglementer les prix, cette responsabilité relevant des provinces. La plupart des provinces ont décidé de ne pas réglementer. Je crois comprendre que l'île-du-Prince-Édouard a un marché réglementé, mais c'est peut-être le dernier marché au Canada dont les prix sont réglementés, et la taxe d'accise est toujours donnée comme la plus élevée au pays.

    Est-ce vrai? Quelle est la relation? Est-ce un exemple à suivre, pour les autres provinces, pour la réglementation des prix? Est-ce que cela prouve qu'un marché compétitif est plus efficace pour garantir les prix les plus bas aux consommateurs canadiens?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: L'expérience passée a prouvé que les provinces qui ont procédé à une déréglementation, comme la Nouvelle-Écosse, ont vu une chute des prix du détail. Si vous voulez des précisions sur la situation de l'île-du-Prince-Édouard, je peux essayer de voir si j'en ai. Je n'en ai toutefois pas sous la main, et je ne peux pas répondre précisément à votre question.

+-

    M. James Rajotte: Vous dites que la déréglementation en Nouvelle-Écosse a été suivie d'une baisse de prix.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Oui.

+-

    M. James Rajotte: J'aimerais maintenant parler de la partie de votre exposé intitulée Les prix de l'essence—Perspective, à la page 2. Vous dites que le prix de l'essence au Canada, en excluant toutes les taxes, est plus bas qu'il était dans les années 80 et qu'en outre, il n'y a aucune différence importante du prix de base de l'essence entre le Canada et les États-Unis, en excluant les taxes.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Chacun sait que le prix de l'essence est composé de divers éléments, mais si vous ne vous penchez que sur le prix du produit lui-même, c'est-à-dire du brut, une fois raffiné, comme je le dis dans mon exposé, il n'y a en effet pas de différence importante entre les prix américains et canadiens. Les différences proviennent des taxes, du taux de change et d'autres éléments de ce genre.

    L'étude du Conference Board disait la même chose, et notre mise à jour aussi, d'après les chiffres disponibles et les chiffres qui sont maintenant recueillis par M.J. Ervin, et même les chiffres historiques recueillis par l'Agence de surveillance du secteur pétrolier. C'est en effet ce que révèlent ces chiffres.

+-

    M. James Rajotte: Vous dites plus loin que le Canada peut se vanter d'avoir des prix de l'essence parmi les plus bas du monde industrialisé. Est-ce que l'étude du Conference Board, ou une autre, donne une liste des prix de l'essence à l'échelle internationale? Quel est le rang du Canada? Si les États-Unis ont les prix les plus bas, le Canada suit-il de près?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Mon collègue, M.Taylor, va vous répondre.

+-

    M. Richard Taylor (sous-commissaire de la concurrence intérimaire, Bureau de la concurrence, Direction générale des affaires criminelles, ministère de l'Industrie): Nous n'avons pas fait de comparaison des prix, mais diverses publications, dont une d'importance, je crois, dans une revue d'affaires, ont montré que le Canada arrivait au deuxième rang pour le prix de l'essence après les États-Unis. C'est ce que nous avons relevé, de manière constante.

    C'est assez semblable. Comme l'a dit Konrad, les taxes font la différence. En fait, partout dans le monde, la différence de prix est attribuable aux taxes. Lorsque les prix étaient à leur plus haut niveau au Canada, ailleurs, en Grande-Bretagne, par exemple, le prix est monté à 1,60 $ le litre, en dollars canadiens. C'est plus du double que ce que nous payions. Mais là encore, les taxes font la différence.

    Quand on enlève les taxes et le taux de change, le prix de l'essence est très semblable, à l'échelle mondiale. Certaines différences sont attribuables aux frais de transport. En effet, la distance par rapport aux installations de raffinage a une influence sur le prix.

¹  +-(1550)  

+-

    M. James Rajotte: Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?

+-

    Le président: Il vous en reste pour au moins une bonne question.

+-

    M. James Rajotte: Dans ce cas, j'en poserai deux petites.

    Vous avez parlé de l'effet de la crise vénézuélienne. Y a-t-il moyen de déterminer quelle part est attribuable à la guerre en Irak, à la crise vénézuélienne ou aux stocks bas en Amérique du Nord? Est-il possible de le faire? Est-ce que M.J. Ervin ou quelqu'un d'autre fait l'analyse de ce qui est attribuable à l'un ou l'autre de ces facteurs?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Toutes sortes de spécialistes du marché font de leur mieux pour l'estimer, mais je pense qu'il n'y a pas de méthode scientifique permettant vraiment de distinguer entre ces facteurs et de dire, par exemple, que 20 p. 100 est dû à la crise vénézuélienne et le reste, à la guerre en Irak. Ce sont tous des facteurs qui influencent le marché, mais je ne crois pas qu'on puisse les isoler. Nous n'avons pas vu, du moins, d'études à cet effet.

+-

    M. James Rajotte: Ma dernière question est très courte.

    En faisant la recherche préparatoire à cette étude, on a compté 19 enquêtes sur ce sujet au cours des dernières décennies. Y a-t-il d'autres secteurs qui attirent autant l'attention que celui-là, au Canada ou en Amérique du Nord?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Il est clair que c'est le secteur dont les prix sont les plus visibles. Les prix du brut et les prix du gros occasionnel sont affichés. On voit le prix de l'essence à tous les coins de rue, et les consommateurs sont bien sensibles à la question, puisqu'ils en voient le reflet dans leur facture de chauffage. Cela attire beaucoup d'attention, et a fait l'objet de si nombreuses études et enquêtes, notamment chez nous, parce que ça intéresse beaucoup les gens.

    Ces prix semblent bouger tous en même temps. Il y a quelque chose qui cloche sûrement. Mais nous n'avons jamais trouvé de preuve de quelque type de collusion que ce soit, sauf très localement, lorsque quelques stations se regroupent pour garder les prix à un certain niveau. Dans ces cas-là, nous avons entamé des poursuites, avec un certain succès.

    Nous n'hésitons pas à le faire, mais cela attire l'attention puisque d'emblée, avant même que l'étude soit entamée, il peut sembler que le marché ne fonctionne pas bien pour ce secteur, mais les apparences sont trompeuses.

+-

    M. James Rajotte: Merci.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Marcil, c'est à vous.

[Français]

+-

    M. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.): Merci, monsieur le président.

    En ce qui a trait à la question soulevée par certains parlementaires sur le fait qu'il y avait collusion, vous n'arrivez pas à la conclusion qu'il y a une collusion actuellement, parce que aucune preuve n'a été déposée au Bureau de la concurrence qui aurait pu vous amener à faire une analyse et à évaluer s'il y avait réellement collusion ou pas.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Exactement. Nous n'avons pas trouvé de preuve, et personne ne nous en a présenté. Je ne dis pas qu'il n'en existe pas, je dis seulement que je n'en ai encore trouvé aucune. Même après avoir fait des enquêtes et des recherches, nous n'avons trouvé aucune preuve, sauf dans les marchés très locaux où il y a une question de maintien des prix et là, nous avons fait des poursuites.

+-

    M. Serge Marcil: Je donne un exemple. Entre ma ville, la ville principale, Valleyfield, et Montréal, pour les mêmes pétrolières, il pouvait y avoir une différence de 10 ¢ le litre, et je n'exagère pas. Ça veut dire que ce n'est pas nécessairement la pétrolière qui posait problème, mais les distributeurs locaux.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: C'est possible, mais le fait qu'il y ait une différence de prix n'indique pas qu'il y a une collusion. Comme je le disais, beaucoup d'entre vous, comme députés, et beaucoup de petites compagnies avez déposé des plaintes au Bureau de la concurrence. Chaque fois que nous en recevons une, nous faisons un examen, et s'il y a la plus petite indication qu'il pourrait y avoir collusion, nous faisons des enquêtes, mais nous n'avons pas trouvé de preuves, sauf au niveau local.

¹  +-(1555)  

+-

    M. Serge Marcil: Pour le bénéfice de ceux qui lisent les procès-verbaux des comités et ceux de la Chambre, comment le Bureau de la concurrence fonctionne-t-il, dans ce cas-ci? On pourrait parler d'un autre secteur, comme le gaz propane, mais prenons seulement ce cas-ci. Est-ce que le Bureau de la concurrence entreprend une enquête de son propre gré lorsqu'il voit qu'il y a réellement une différence énorme ou des fluctuations, ou attendez-vous toujours d'avoir des plaintes?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Nous avons le pouvoir d'entreprendre des enquêtes nous-mêmes, mais généralement, nous répondons aux plaintes. Lorsque quelqu'un nous écrit une lettre ou fait une représentation, nous faisons un examen initial, nous allons visiter la localité, nous allons parler avec les vendeurs et les acheteurs des produits et nous déterminons s'il y a un minimum de preuves pour faire une enquête. S'il y en a, nous commençons une enquête et à ce moment-là, nous décidons comment progresser. Nous pouvons faire des demandes, nous pouvons aller en cour et obtenir un mandat qui oblige la personne à nous fournir des données. Nous pouvons même faire une perquisition et saisie. Nous nous rendons sur place et nous saisissons tous les documents, avec l'approbation de la cour. Nous étudions ces documents et s'il y a des preuves, nous commençons un processus formel devant la cour.

+-

    M. Serge Marcil: Le Bureau de la concurrence est un instrument, un outil d'enquête. Est-ce que vous vous sentez bien équipés pour répondre à toutes les demandes d'enquête que vous recevez et pour mener à bien les études que vous faites?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Si vous parlez des outils, oui, nous avons tous les outils nécessaires. Les dispositions de la Loi sur la concurrence sont suffisantes pour faire notre travail. Si vous parlez de budget, des ressources, non, je n'ai pas les ressources nécessaires pour mener les enquêtes que je voudrais mener. Nous devons, à ce moment-là, établir des priorités. Nous devons évaluer toutes les plaintes et déterminer celles pour lesquelles nous allons entreprendre une enquête et celles que nous allons devoir remettre à plus tard ou auxquelles nous ne pourrons pas donner suite.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Crête, c'est votre tour.

[Français]

+-

    M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Merci, monsieur le président.

    Je voudrais tout d'abord vous remercier pour la présentation. Je partage votre point de vue sur le fait que la concurrence est la meilleure façon d'atteindre un prix satisfaisant. Quant à la préoccupation des consommateurs, le fait que ce soit un marché captif et qu'il n'y ait pas de succédané possible en bout de ligne, il est certain que les effets pour les consommateurs sont très logiques et entraînent de l'inflation. Donc, ces préoccupations de la part des consommateurs sont un peu normales.

    Pour bien comprendre la façon dont vous fonctionnez et où on peut aller, prenons l'exemple du premier trimestre de 2003, période pendant laquelle il y a eu une hausse soudaine des prix. Vous mentionnez quatre causes de la hausse du prix du pétrole brut, donc à la source. Parmi ces quatre causes, y en a-t-il une qui a une influence ou qui joue sur la question des profits au raffinage? Le prix du pétrole brut, pour la période, peut avoir augmenté de l'ordre de 50 p. 100, alors que la marge au raffinage aura augmenté de 138 p. 100, ce qui, en bout de ligne, a signifié une hausse du prix de l'essence de 36 p. 100. C'est vrai qu'entre le départ et la fin, il y a une certaine correspondance entre les prix, mais il y a une augmentation très significative à l'une des étapes, celle du raffinage.

    Est-ce que vous avez le pouvoir et les moyens d'enquêter lorsqu'une situation comme celle-là se présente?

º  +-(1600)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Nous pouvons sévir en faisant des enquêtes de vérification seulement s'il y a une violation de la Loi sur la concurrence. Le seul fait qu'il y ait une hausse des prix n'est pas suffisant pour dire qu'il y a violation de la Loi sur la concurrence. Ça ne nous donne pas les motifs pour entreprendre un examen ou pour mener une enquête.

+-

    M. Paul Crête: Le fait qu'il y ait une augmentation très significative des profits au moment du raffinage, c'est-à-dire qu'on a constaté qu'il en coûte normalement environ 5 ¢ le litre d'essence pour raffiner et qu'on en est maintenant à 10 ¢ et 12 ¢ de marge de profit, pourrait-il, selon vous, être un indice suffisant pour décider d'entreprendre une étude, ou est-ce que ça prend vraiment une preuve plus tangible, comme une preuve d'avocat, par exemple, pour bien comprendre, un bout de papier ou quelque chose qui nous garantirait qu'il y a eu collusion? Est-ce qu'avec des indices suffisants vous pouvez déclencher une enquête, un peu comme un policier peut le faire? Le policier ne déclenche pas l'enquête une fois qu'il est sûr que la personne est coupable, il déclenche l'enquête quand il juge qu'il a un nombre d'éléments suffisants pour le faire.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Je vais vous citer la loi, à l'article 10:

10(1) Le commissaire fait étudier, dans l'un ou l'autre des cas suivants, toutes questions qui, d'après lui, nécessitent une enquête en vue de déterminer les faits:

a) sur demande faite en vertu de l'article 9;

    C'est dans le cas où un citoyen en a fait la demande. Mais pour le reste, c'est chaque fois qu'il a des raisons de croire qu'il y a collusion; c'est vraiment le test. Il doit avoir des raisons de croire qu'une personne a contrevenu, qu'il existe un motif justifiant une ordonnance ou qu'une infraction visée a été perpétrée. Cela veut dire qu'on doit avoir une preuve ou une indication que quelqu'un a peut-être commis un crime ou violé la loi.

+-

    M. Paul Crête: D'accord. Tout à l'heure, vous nous avez dit qu'il n'y avait pas d'analyses scientifiques des quatre causes qui ont été identifiées par rapport à la hausse du prix du pétrole brut.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Comme je l'ai dit, tous les renseignements recueillis lors de notre recherche ont indiqué que ces quatre causes étaient responsables de la hausse des prix, qu'elles avaient eu une influence sur les prix. S'il y a une crise au Venezuela, par exemple, ça n'a rien à voir avec la Loi sur la concurrence, mais ça cause une augmentation des prix, en raison de la rareté du pétrole.

+-

    M. Paul Crête: Pour évaluer la pertinence de la concurrence qui existe, réelle ou pas, il faut que vous ayez des instruments de base solides et sérieux qui peuvent vous servir. Un des éléments serait, me semble-t-il, une analyse qui vous dirait que ces quatre critères ou d'autres... Mais vous dites qu'il n'y a pas d'analyses scientifiques permettant d'expliquer effectivement l'impact de l'une ou l'autre de ces quatre causes. Je voudrais juste savoir si le fait qu'il n'y ait pas au Canada d'agence de surveillance des prix de l'essence--je ne parle pas du Bureau de la concurrence--ne vous enlève pas, finalement, un outil important pour entreprendre une analyse de la situation, à savoir s'il y a collusion ou pas ou s'il y a matière à enquête.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Les données qui étaient auparavant recueillies par le ministère des Ressources naturelles, et qui le sont maintenant par MJ Ervin & Associates, sont essentielles pour nous, et nous les utilisons. Je n'ai aucune raison de croire que les données fournies par MJ Ervin & Associates ne sont pas vraies ou qu'elles sont moins fiables que celles qui étaient recueillies par Ressources naturelles Canada. Ce n'est pas à moi de déterminer s'il serait préférable d'obtenir ces données d'une agence gouvernementale plutôt que d'une agence privée. La seule chose qui nous importe est d'avoir des données qui soient correctes et recueillies objectivement. Rien n'indique que les données de MJ Ervin & Associates n'étaient pas correctes ou qu'elles étaient biaisées.

º  +-(1605)  

+-

    M. Paul Crête: Les chiffres sont fournis par cette firme qui a succédé à Ressources naturelles Canada. Considérant le fait que les chiffres indiquent clairement qu'il y a eu une hausse soudaine vraiment importante du profit réalisé au niveau de la marge du raffinage, croyez-vous qu'il y ait matière à mener enquête? Devez-vous plutôt attendre d'avoir copie d'un document signé par toutes les compagnies où il serait écrit en toutes lettres qu'il y a collusion?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Comme je vous le disais, le fait qu'il y ait une hausse de prix, le fait qu'il y ait une nette différence entre le prix du brut et le prix au détail et le fait que la marge ait augmenté ne constituent pas une preuve qu'il y a eu violation de la Loi sur la concurrence. Cela indique uniquement que le marché est très volatile. Plusieurs facteurs influencent les prix de l'essence, mais je ne vois pas de relation avec la Loi sur la concurrence.

+-

    M. Paul Crête: J'essaie de bien comprendre votre mandat. Si je comprends bien, vous ne pouvez intervenir que lorsqu'on vous a donné la preuve qu'il y a collusion. Sans critiquer le Bureau de la concurrence, je crois que cet organisme devrait avoir un mandat plus étendu. Si soudainement il y a une hausse de prix importante à une des étapes du processus de mise en vente du produit, cela pourrait constituer un indice suffisant pour décider qu'il y a matière à analyser cette situation en profondeur. Peut-être que le Bureau de la concurrence, à cause de son mandat légal, n'est pas le meilleur organisme pour le faire, mais c'est sûrement une lacune du processus d'analyse actuel. Le nombre de demandes d'enquête que vous avez reçues depuis des années nous montre que s'il y a justice, il n'y a pas apparence de justice.

+-

    M. Peter Sagar: Monsieur le président, permettez-moi de répondre.

    Vous avez raison, voir une augmentation aussi marquée des profits d'une société soulève toujours des questions. Il faut donc tâcher de comprendre pourquoi c'est ainsi. Pour les sociétés pétrolières, les raffineurs et les détaillants, les profits sont constitués par une toute petite différence entre le prix des produits bruts et le prix des produits au détail. Un tout petit changement au niveau des marges entraîne donc un grand changement au niveau des profits. Par exemple, la marge de profit des raffineurs était, en janvier 2002, de près de 8 ¢ le litre. C'était peut-être 5 ¢, 7 ¢, 8 ¢ ou 9 ¢, mais moins de 10 ¢, ce qui est légèrement plus bas que la moyenne des trois dernières années, alors que c'était autour de 10 ¢. Cette marge a augmenté graduellement pour atteindre 11 ¢ et 12 ¢ en janvier ou mars 2003. Ce n'était qu'une différence de 3 ¢ le litre, mais cela s'est traduit en une différence de 37 à 40 p. 100 au niveau des profits. C'est une fluctuation qu'on voit assez souvent.

+-

    M. Paul Crête: Il est très étonnant de constater qu'alors que le prix de base de la ressource monte, la marge de profit sur le raffinage augmente soudainement au lieu de diminuer. On devrait s'attendre, normalement, à ce que le prix de vente soit le moins cher possible. Cette situation est contraire aux principes économiques de base. Normalement, lorsque vos matières premières vous coûtent plus cher et que vous voulez continuer à faire des affaires, vous augmentez votre productivité ou vous trouvez d'autres moyens vous permettant d'afficher un prix concurrentiel. C'est ainsi dans un marché libre. Dans la situation actuelle, dans une période où le prix monte, contrairement à ce qu'on devrait s'attendre selon les principes économiques, il y a une plus grande marge de profit au niveau du raffinage. Cela ne vous apparaît-il contraire à la logique économique?

º  +-(1610)  

+-

    M. Peter Sagar: Il ne s'agissait pas d'une augmentation soudaine mais plutôt graduelle de leur marge de profit. Il s'agissait plutôt de rattrapage par rapport à une période où leur marge de profit avait été très basse. Il faut bien savoir que les sociétés pétrolières sont très complexes. Elles ont beaucoup d'activités, beaucoup d'opérations, et leurs frais ne proviennent pas que du prix du pétrole brut. Il faut tâcher de voir précisément pourquoi cela s'est passé ainsi durant cette période précise. Cela n'indique pas nécessairement qu'il y ait eu collusion ou un manque de concurrence.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Crête.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Pourrais-je conclure, s'il-vous-plaît?

[Traduction]

+-

    Le président: Non, je vous ai déjà accordé trois minutes. Toutes mes excuses, il faut poursuivre. Vous reviendrez au second tour.

    Monsieur Szabo, vous avez la parole.

+-

    M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Monsieur von Finckenstein, dans votre témoignage, vous avez parlé de l'étude effectuée par le Conference Board en 2001. Ou plutôt, de l'étude faite en 2000, mais rendue publique en février 2001. Vous avez déclaré que le prix dépend d'une saine concurrence. Pensez-vous que les indépendants font partie de cette concurrence? Dans l'affirmative, pourquoi le Conference Board ne s'est-il pas adressé aux indépendants, en menant son étude?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Il va de soi que les indépendants font partie du marché. Je ne me souviens pas précisément des chiffres les plus récents, mais environ 30 p. 100 du pétrole raffiné est vendu par des indépendants. Ils forment donc une part importante du marché.

    Que je sache, le Conference Board les a consultés. Il a tenu une discussion approfondie, a parlé à tout le monde, leur a écrit, etc. Y a-t-il quelque chose dans cette étude qui laisse croire que les indépendants n'ont pas été consultés et que tout cela n'est fondé que sur des données qui excluent les indépendants?

+-

    M. Paul Szabo: C'est une vérification qu'on peut faire objectivement, et que je vous laisse le soin de faire. On me dit que les indépendants n'y ont pas participé.

    Mon avant-dernière question porte sur la concurrence et le fait qu'on puisse être à la fois grossiste et détaillant. Quand on est aussi détaillant, on a la possibilité d'influencer le prix que devront payer ses concurrents.

    Avez-vous pu déterminer, quand existent de telles relations, si l'expérience est différente de celle que vous décrivez en termes généraux, dans votre texte? Êtes-vous au courant de l'effet de l'interfinancement du poste d'essence, du fait de l'existence d'un atelier de mécanique, d'un dépanneur, ou d'autre chose? Quel effet cela a-t-il?

    De toute évidence, les indépendants, parce qu'ils sont plus petits, ne peuvent pas investir le capital nécessaire à l'élargissement de la gamme de services offerts aux consommateurs, alors que les grossistes peuvent par interfinancement réduire les marges de profit pour l'essence et créer une situation désavantageuse pour les indépendants dont ils sont les fournisseurs.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Vous soulevez bon nombre de questions. Je vais essayer d'y répondre dans l'ordre où vous les avez posées.

    Pour commencer, au sujet de la relation entre les producteurs intégrés et les détaillants, c'est une question que nous avons examinée à maintes reprises, habituellement par suite des plaintes des détaillants qui estiment que l'entreprise intégrée, ou le raffineur, vend son essence à un prix inférieur aux prix de gros exigés des détaillants. Ils estiment que cela nuit à la concurrence et qu'il s'agit d'une manoeuvre d'éviction. Nous avons entendu plusieurs allégations de ce genre. Nous avons toujours fait enquête, puisqu'il semble peu logique de vendre quelque chose à des prix si différents.

    Nous n'avons pourtant jamais constaté que c'était une méthode permanente ou que c'était destiné à éliminer des concurrents. Nous avons trouvé qu'il y avait habituellement une explication très logique et que c'était un phénomène temporaire.

    Deuxièmement, vous avez soulevé la question de l'interfinancement et de la vente d'autres produits à part l'essence. Si vous étudiez le marché, vous pourrez conclure que le profit sur l'essence est très faible et que la plupart des stations-service tirent leurs revenus non pas de l'essence, mais du coca-cola, des cigarettes ou des autres produits vendus. Sur ces produits, la marge est très élevée et l'essence sert à attirer les consommateurs. C'est pourquoi on trouve aujourd'hui très peu de stations-service qui ne vendent que de l'essence, au Canada. La plupart ont un dépanneur qui vend des produits avec une marge de profit importante, et c'est de ces produits qu'elles tirent leur revenu.

    Manifestement, les détaillants indépendants devraient faire la même chose que les entreprises intégrées, et combiner les deux. Certains l'ont fait, d'autres pas. Ont-ils les moyens de le faire? Y a-t-il de l'interfinancement?

    Peter, je présume que vous êtes en mesure d'expliquer les conclusions du Conference Board et notre mise à jour au sujet de l'interfinancement.

º  +-(1615)  

+-

    M. Peter Sagar: En effet, l'interfinancement a été étudié et deux calculs ont été faits. Je vous passe les détails. L'un portait sur le prix du brut et l'autre, sur le prix du gros occasionnel des produits raffinés.

    Au sujet des prix du gros, on n'a pas constaté un interfinancement évident. Pour le prix du brut, et c'est peut-être ce qui est le plus révélateur au sujet de l'intégration verticale du raffinage, même si ce n'est pas facile à comprendre, on a trouvé un effet sensible, mais minime. Ainsi, une augmentation de 1 ¢ le litre du prix du brut donnerait lieu à une réduction de 0,015 ¢ le litre, si le grossiste faisait adéquatement l'escompte. En d'autres mots, ce n'est pas un facteur important du prix de l'essence.

+-

    M. Paul Szabo: J'ai une dernière question.

    Cela dit, il est assez surprenant que nous n'ayons pas encore reçu d'explications au sujet de la baisse du nombre de détaillants indépendants. Il nous reste encore cela à comprendre.

    Monsieur von Finckenstein, je comprends vos explications au sujet de la hausse des prix lorsque vous invoquez la situation en Irak, au Venezuela et les températures froides qui font monter la demande. Vous concluez ensuite que les prix demeurent assez uniformes, pas seulement au Canada mais en général dans le monde entier.

    Toutefois, avez-vous étudié les cas où il y a eu hausse des prix? Avez-vous analysé, par exemple, la situation en Irak entre février et mars afin de voir si l'augmentation du prix de gros du produit de base, en raison de la conjoncture internationale, s'est accompagnée d'une hausse simultanée des prix de gros et de détail? J'imagine qu'une augmentation du prix de gros se répercute dans l'ensemble du système et entraînera donc un prix plus élevé pour le consommateur. Qu'arrive-t-il cependant lorsque la hausse des entreprises de raffinage vient s'ajouter à celle des prix de gros et de détail? Qu'arrive-t-il quand ces entreprises profitent de la situation en se disant que de toute façon, les gens s'attendent à une augmentation des prix et que ça n'est donc pas grave?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Êtes-vous en train de dire qu'elles se dissimulent derrière cela pour...

+-

    M. Paul Szabo: Non, je ne veux pas me lancer dans des conjectures. Je vous demande, compte tenu de vos analyses et de vos conclusions, si vous pouvez affirmer que la hausse du prix de détail résulte uniquement de la majoration du prix de gros, ou on profite de l'occasion pour augmenter aussi les marges bénéficiaires de gros et de détail?

º  +-(1620)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Les trois points figurant à la page 5 de notre exposé répondent à cela. Nous y précisons que les changements des prix de gros suivent de très près les changements des prix du pétrole brut, qu'il n'y a aucune asymétrie en ce qui concerne les prix de détail et que les augmentations et les diminutions suivent les mêmes changements au niveau des prix de gros. Il n'y aurait pas asymétrie comme dans votre hypothèse, si des hausses excessives des prix de gros coïncidaient avec des majorations tout aussi déraisonnables des prix du brut. S'il y a symétrie dans les augmentations des prix du brut et du raffiné et dans les hausses des prix de gros et de détail, alors la situation que vous évoquez est exclue.

+-

    M. Paul Szabo: Vous avez toutefois analysé la situation entre février et mars, et il me semble que vous avez parlé d'une augmentation des marges oscillant autour de 8 ¢ à 11 ¢, et ce, pendant une période de hausse des prix de gros. Il y a donc eu un changement réel et vérifiable des marges, au moment où les événements en Irak, par exemple, entraînaient un changement.

    Il n'y a donc pas que de la symétrie. Si on peut se cacher sous le couvert d'un événement... Si une telle chose s'était produite, est-ce qu'elle ne vous semblerait pas répréhensible?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Ici, je vais m'en remettre à mon économiste en chef pour vous répondre.

+-

    M. Peter Sagar: Modestement. Permettez-moi d'abord de répondre au sujet des équations du Conference Board. Selon elles et selon notre propre analyse de ces études, une augmentation de 1 ¢ le litre du prix du brut entraînera une majoration de plus de 1 ¢ le litre du prix de détail. Autrement dit, les marges augmentent à peu près en parallèle avec les autres hausses, ce qui tient peut-être au fait que les entreprises de raffinage ne peuvent extraire un litre complet de mazout ou d'essence d'un litre de pétrole, et qu'elles doivent aussi assumer des coûts de transport. Cela peut expliquer en partie les autres augmentations.

+-

    M. Paul Szabo: Si vous permettez, vous ne parlez pas de la marge ici mais des coûts d'exploitation. Ce sont deux choses différentes.

+-

    M. Peter Sagar: Je le sais, mais tout cela explique la différence entre le prix du brut et le prix de détail.

+-

    M. Paul Szabo: Du prix. Je vous parle cependant de la marge bénéficiaire.

+-

    M. Peter Sagar: Lorsque nous avons étudié les écarts de prix, ils se situaient à approximativement 1,3¢ le litre à la pompe, mais ils variaient aussi selon les villes du Canada, en raison de circonstances différentes comme la concurrence, les distances et le reste. Toutefois, si l'on se penche sur l'écart entre les prix de gros et les marges de détail, l'augmentation transmise dans le système est légèrement inférieure à 1¢ le litre. Elle oscille entre 0,8 et 0,9¢, et les détaillants tiennent donc pleinement compte de la demande locale. Ils sont d'ailleurs quelque peu coincés chaque fois que le brut augmente et, dans l'ensemble, on assiste à une majoration des marges pour couvrir tous ces coûts, car ces marges ne sont pas toutes des profits; elles représentent l'écart de prix total. Elles correspondent donc à une marge brute plutôt qu'à un profit.

+-

    M. Paul Szabo: Monsieur le président, bien que mon temps de parole soit écoulé, les sujets abordés ici me paraissent importants. J'aimerais donc savoir si le comité veut bien demander des documents sur les changements de prix survenus entre février et mars, pour connaître l'impact du changement dans le prix mondial et le prix de détail, ainsi que les effets réels sur les marges de détail et de gros. Selon les renseignements dont je dispose, il est considérable, et si tel est le cas, ce pourrait être une tactique de concurrence qui a été utilisée récemment, et il serait important que le comité le sache.

+-

    Le président: Je suis sûr que l'attaché de recherche a pris bonne note de cela.

    Monsieur Masse.

+-

    M. Brian Masse: Je vous remercie, monsieur le président.

    Excusez-moi d'aborder une question déjà traitée dans votre exposé, mais j'aimerais que vous nous donniez plus de détails sur le lien entre les hausses et les baisses des prix de gros. Je n'ignore pas que vous concluez à un lien très étroit entre les deux, lien qui d'ailleurs va se poursuivre, mais bon nombre de Canadiens ne suivent pas nécessairement la chose, ou ils se disent que des événements comme la guerre en Irak ou autre chose vont avoir une incidence sur les prix, mais ils ne savent jamais quand tout cela va se produire. Ils ne voient qu'un prix qui augmente, en sachant qu'il est censé redescendre après un mois ou deux quand les choses se seront replacées, mais ils ont l'impression de ne pas voir le même lien au moment de la diminution.

    M. Rajotte a parlé du nombre de fois où cette question a été abordée. Par conséquent, quelles mesures prendriez-vous pour établir une certaine transparence, afin que les consommateurs puissent s'attendre à une hausse pendant une période donnée, une fois que l'excédent sera utilisé, mais aussi à une baisse assez parallèle à celle du prix du pétrole?

º  +-(1625)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Je ne sais pas si c'est vraiment un problème d'apparence parce qu'à l'heure actuelle, par exemple, les prix ont beaucoup baissé. Mais personne n'en parle. C'est lorsque les prix montent que les consommateurs protestent. Lorsque les prix montent, cela crève les yeux. Mais lorsqu'ils baissent, on trouve que c'est normal.

    Il s'agit d'un prix très instable, et bien sûr, vous savez tous que l'une des causes de l'instabilité tient au fait qu'il existe un cartel de producteurs à l'OPEP qui échappe à toutes les lois sur la concurrence de tous les pays. Ce prix est très visible, et les données sont accessibles à tous le monde. Je ne crois pas non plus qu'on puisse en faire davantage pour que les choses soient transparentes.

+-

    M. Brian Masse: Nous avons fait de l'essence une nécessité dans notre société, et je ne parle pas seulement de notre consommation personnelle mais aussi de l'usage que nous en faisons dans les loisirs et l'industrie. Lorsque les prix sont gonflés à cause d'un quelconque conflit qui a éclaté ailleurs dans le monde six mois plus tôt, et que les prix baissent plus tard, les consommateurs canadiens n'ont pas assez de temps pour connaître les causes de ces fluctuations. Je ne crois pas que ce soit raisonnable.

    Si ce n'est pas vous, qui, à votre avis, devrait avoir la responsabilité de créer cette transparence? Sans cette transparence, il y aura toujours des allégations de collusion parce que, soyons réalistes, conduisez sur n'importe quelle rue et vous allez voir les prix monter et descendre en l'espace de quelques heures. Et en tant que consommateur, vous ne pouvez pas savoir si les stocks des postes d'essence ont été consommés plus vite qu'on pensait parce que tout cela est souterrain et vous ne savez pas quelle réserve ils ont. Qui devrait être responsable de cela? Comment peut-on créer cette transparence? Est-ce qu'il y a une solution à cela?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: M. Crête a mentionné l'Agence de surveillance du secteur pétrolier que nous avions justement pour cette raison; cet organisme gouvernemental s'assurait de connaître les prix parce qu'on avait le sentiment que les prix n'étaient pas suffisamment transparents et qu'on entrait dans l'inconnu. Je n'ai rien contre l'Agence de surveillance du secteur pétrolier. J'aimerais qu'on en crée une rien que pour régler cette question du point de vue de la transparence, etc. Mais cette agence aurait-elle un grand effet sur les Canadiens? Se sentiraient-ils davantage rassurés que maintenant? À mon avis, c'est une décision qu'il incombe aux politiciens de prendre. Je ne suis que responsable de l'administration d'une loi. Mais d'après ce que j'en sais, l'expérience de l'Agence de surveillance du secteur pétrolier n'a pas donné aux Canadiens plus d'assurance ou plus de transparence qu'ils n'en ont maintenant.

+-

    M. Brian Masse: Donc cela pourrait se faire, mais vous n'avez pas confiance. Il faudrait peut-être créer un autre organisme, ou d'autres règles, pour régler cette question.

+-

    M. Richard Taylor: Je connais très bien la question de l'essence parce que je dirige la Direction générale des affaires criminelles qui fait enquête sur ce genre de chose. J'observe très attentivement les prix de l'essence lorsque je conduis tous les matins. Aux États-Unis, la U.S. Energy Information Administration a fait des recherches extrêmement minutieuses. Allez sur leur site Web où il est question de tout cela, ça commence en décembre avec les rumeurs de guerre et l'instabilité politique, comme ils appellent cela. Ils ont prévu la date à laquelle les prix descendraient et ont fait un lien avec l'accroissement de la production par les autres États membres de l'OPEP.

    Si vous le vouliez, et je n'en fais pas la suggestion, mais la U.S. Energy Information Administration contrôle tous les prix de l'énergie : le gaz naturel, l'électricité, tout. Ils se donnent beaucoup de mal pour dire aux consommateurs quels prix vont augmenter et à quel moment ils vont descendre, et ils anticipent ces fluctuations. Ce modèle pourrait peut-être vous intéresser. Ça marche très bien.

+-

    M. Brian Masse: Cela me sera très utile. Je vais certainement le consulter.

    Je vais passer à une autre question. Il y en a une autre que je reçois souvent—et j'aime souvent aller à la pêche—c'est celle des fins de semaine. Dans votre document, à la page 5, vous dites qu'« ils peuvent tout aussi bien augmenter avant n'importe quelle autre fin de semaine de l'année ». Plus loin, vous dites : « Les augmentations qui surviennent avant les longues fins de semaine ont davantage de chance d'être acceptées par les concurrents qui anticipent la demande plus élevée suscitée par le congé, mais cette situation ne repose sur aucune preuve statistique ». Est-ce parce qu'on n'a pas fait les calculs ou qu'on n'a pas les ressources pour les faire?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Désolé, de quoi parlez-vous?

º  +-(1630)  

+-

    M. Brian Masse: Désolé. C'est à la page 5, la deuxième puce qui commence par : Il n'existe aucune preuve empirique comme quoi les prix de l'essence augmentent avant les longues fins de semaine.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Parlez-vous de l'étude du Conference Board ou de la nôtre?

+-

    M. Brian Masse: Oui, désolé. J'aurais dû être plus précis. J'essaie de voir si... Vous notez à la fin que vous ne pouvez pas le prouver statistiquement. Beaucoup de gens au pays disent que c'est ce qui se produit, surtout l'augmentation généralisée.

    Si 60 ou 70 p. 100 des détaillants locaux augmentaient leurs prix, ce serait une chose; mais quand c'est la presque totalité d'entre eux—et le seul qui ne le fait pas est un indépendant qui affirme ensuite subir des pertes—les gens pensent que c'est quelque chose d'autre.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: C'est une question d'offre et de demande. Le prix des roses augmente le Jour de la Saint-Valentin. Tous les fleuristes en ville vont augmenter leurs prix avant la Saint-Valentin. Faut-il y voir un complot? Pas forcément. Remarquez, ça pourrait être le cas, je ne dis pas que ça ne l'est pas. Mais ça pourrait tout aussi bien être qu'à cause de l'augmentation de la demande à cette date de l'année, on augmente le prix des roses. C'est la même chose pour l'essence. Les gens partent pour un long week-end, pour faire des promenades, etc., et en profiter ce n'est pas forcément un complot.

+-

    M. Brian Masse: Ce qui est délicat ici, c'est qu'il faut en tenir compte parce que toute notre société est bâtie autour de cela. D'habitude, quand on vend des choses en grosse quantité, la marge bénéficiaire baisse mais ici elle augmente pour profiter de la situation. C'est ce qui explique la frustration des gens. Quand tout le monde agit de la même façon au même moment... Ma question, donc, est : avez-vous fait une étude pour le prouver? Quelqu'un a-t-il déjà fait du travail là-dessus?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Non, nous n'avons pas fait d'étude sur cette question.

+-

    Le président: Merci, monsieur Masse.

    Monsieur Bagnell.

+-

    M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Merci.

    Dans votre document, vous dites être convaincu que les hausses et les baisses correspondent aux prix de gros et aux événements mondiaux. Pour moi, dans certains de ces cas, les mouvements sont beaucoup plus rapides. Êtes-vous convaincu que c'est constant partout au pays dans les diverses régions, dans les diverses localités?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Ce n'est pas une question de conviction. Je regarde les chiffres et je vois ce qui se passe. Nous avons examiné la chose; nous avons fait des études. Mon collègue a toutes sortes de tableaux par ville et par usages. Regardez la courbe du brut; regardez la courbe du détail—dans ce cas-ci c'est Winnipeg—et elles évoluent essentiellement parallèlement. C'est ce que les chiffres nous disent. Évidemment, à l'occasion, il y a une bosse ou une irrégularité, mais la tendance est la même.

+-

    M. Larry Bagnell: Pensez-vous que lorsque le Canada était propriétaire de Petro-Canada, que le fait que l'État soit propriétaire de l'entreprise, que celle-ci agit comme cerbère pour empêcher la collusion entre le petit nombre d'acteurs sur le marché?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Je ne pense pas qu'une société d'État garantisse quoi que ce soit. On espère qu'elle respecte la Loi sur la concurrence, comme toute autre entreprise, mais ce n'est pas toujours le cas. Il arrive que des sociétés d'État soient en infraction comme cela arrive à des entreprises du secteur privé.

+-

    M. Larry Bagnell: Au sujet des huit condamnations pour les petits cas, pouvez-vous me dire quel était le plus petit? Est-ce qu'il s'agit de très petites stations régionales...?

+-

    M. Richard Taylor: Oui, il s'agit de très petits cas. Je ne peux pas vous dire combien ils représentaient en dollars. Il s'agissait de cas où un détaillant téléphonait au siège social pour dire que le détaillant voisin offrait un prix inférieur et demandait au siège social d'intervenir. Nous appelons cela un prix imposé. C'était des cas très localisés qui impliquaient, un, deux ou trois détaillants, cela ne représentait pas des millions de dollars. Les huit cas de prix imposés étaient très localisés, dans les environs d'une ville ou le long d'une petite rampe d'autoroute.

+-

    M. Larry Bagnell: Est-ce que le Bureau de la concurrence a la capacité et les ressources nécessaires pour s'occuper de toutes ces petites stations-service au Canada?

+-

    M. Richard Taylor: Comme Konrad l'a dit, nous sommes toujours à court de ressources. J'ai 33 enquêtes importantes en cours à l'heure actuelle et 25 agents, ce qui fait environ 0,8 agent par cas, ce qui est insuffisant.

+-

    M. Larry Bagnell: Pouvez-vous me dire à peu près combien d'entreprises contrôlent les ventes de gros—mettons 80 p. 100 du brut disponible sur le marché de gros?

º  +-(1635)  

+-

    M. Richard Taylor: Il y a 11 raffineries au Canada, cela vous donne une idée du nombre d'intervenants.

+-

    M. Larry Bagnell: Elles appartiennent toutes à des sociétés différentes?

+-

    M. Richard Taylor C'est exact, il y a Irving et Co-op et il y a un certain nombre de raffineries proches de la frontière où on peut aller chercher de l'essence par camion et, troisièmement, on peut transporter de l'essence par navire. Il y a différentes manières d'approvisionner un marché local en essence.

+-

    M. Larry Bagnell: Combien de ces raffineries appartiennent en totalité ou en majorité à des Canadiens?

+-

    M. Richard Taylor: Je ne le sais pas.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Nous pouvons obtenir ce renseignement, monsieur Bagnell; nous ne l'avons pas maintenant.

+-

    M. Larry Bagnell: Très bien. C'est tout, monsieur le président.

+-

    Le président: Monsieur Chatters, bienvenue au Comité de l'industrie.

+-

    M. David Chatters (Athabasca, Alliance canadienne): Merci.

    Je trouve tout à fait extraordinaire que nous nous lancions dans cette étude, cette enquête, en quelque sorte, de l'industrie de l'essence alors qu'aujourd'hui l'essence se vend 44 ¢ le litre à Toronto et je ne reçois pas beaucoup de lettres de plaintes à mon bureau, contrairement au mois de février.

+-

    M. Paul Szabo: C'est un rabais en raison du SRAS.

+-

    M. David Chatters: Oui, vous avez raison, monsieur Szabo et vous avez vous-même soulevé la question d'une prime sur le prix de l'essence en raison de la menace de guerre en Irak. Il y a divers événements qui incitent les marchés à inclure une prime dans le prix et peut-être que le SRAS est un cas légitime.

    Mais en février 2003, selon un article du Edmonton Journal, M. Dan McTeague a accusé l'industrie d'exploitation du consommateur et de mercantilisme et il aurait dit qu'il était absolument essentiel que le gouvernement agisse rapidement pour faire éclater le trust. M. McTeague a depuis longtemps comme cheval de bataille la pratique des sociétés pétrolières intégrées verticalement de réduire le prix à la rampe pour leurs stations-service, c'est-à-dire qu'elles établissent un prix abusif pour les détaillants indépendants.

    Que répondez-vous à cela? Est-il prouvé qu'il y a moins de détaillants indépendants sur le marché qu'il y en avait auparavant ou est-ce qu'il y en a autant, mais pas les mêmes?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: La part de marché des indépendants n'a pas diminué. Le nombre d'indépendants a diminué car il y a eu une consolidation parmi eux. Il faut une certaine économie d'échelle pour pouvoir survivre comme indépendant.

    Pour ce qui est de la question des prix de gros et des prix de détail et des raffineries intégrées qui se servent de leur intégration pour évincer les indépendants, nous nous sommes opposés très vigoureusement au projet de loi déposé par M. McTeague à cet effet, car nous estimions, premièrement, qu'il s'appliquait à l'ensemble de l'industrie, et pas seulement au secteur pétrolier. Deuxièmement, il y a parfois des raisons parfaitement légitimes de faire cela, par exemple, un producteur qui acquiert un réseau de distribution le fait pour réduire ses coûts de distribution et il doit pouvoir bénéficier de ses économies dans certains cas.

    La Loi sur laconcurrence nous fournit les instruments nécessaires pour intervenir lorsqu'une entreprise applique une telle politique de manière systématique afin d'évincer ses concurrents indépendants. Nous n'avons jamais trouvé de preuve permettant de porter des accusations car, comme je le disais, il s'agit d'habitude d'une décision de gestion parfaitement rationnelle et non pas d'un moyen d'éliminer la concurrence.

+-

    M. David Chatters: J'ai toujours maintenu que s'il y a quelqu'un dans cette industrie à qui il faut faire des reproches, c'est le gouvernement et les taxes qu'il prélève sur l'essence. Je pense qu'il a en grande partie caché les augmentations de taxes lors du changement du système impérial au système métrique. Je pourrais vous citer de nombreux exemples. Avez-vous jamais réussi à déterminer pourquoi les détaillants hésitent tellement à annoncer les prix de l'essence, qui sont les plus faibles dans le monde, sans inclure la taxe pour que tout le monde sache qui est à blâmer?

º  +-(1640)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: En fait, ils le font dans une certaine mesure. Si vous vérifiez, vous verrez que les détaillants collent sur la pompe des affiches dans lesquelles elles décomposent le prix de l'essence : tant pour le brut, tant de bénéfice, tant de taxes. Je crois savoir qu'ils comparaîtront mercredi et vous devriez alors leur demander pourquoi ils n'indiquent pas le prix de l'essence à 22 ¢ plus la taxe de 60 ¢, par exemple. Ce n'est pas tout à fait cela, mais la taxe est assez élevée.

    Tout ce que je peux vous dire, c'est que notre tâche est de nous assurer qu'il n'y a pas de pratique anticoncurrentielle. Il y a deux genres de pratique anticoncurrentielle. Il y a la fixation des prix ou une conspiration quelconque et il y a le recours à des moyens illégaux pour évincer la concurrence en profitant d'une position dominante sur le marché. Nous n'avons trouvé aucune preuve que de telles pratiques existent.

+-

    M. David Chatters: Enfin, je voudrais parler de la question de l'égalisation de la température, car je pense que c'est une question que nous devrons poser aux sociétés pétrolières lorsqu'elles comparaîtront. À mon avis, s'il y a un abus dans l'industrie pétrolière au Canada, c'est l'égalisation de la température, la moyenne qu'on égalise est beaucoup plus élevée que la température moyenne au Canada. Je songe particulièrement à l'hiver où les Canadiens n'obtiennent peut-être pas le volume d'essence qu'ils ont payé en raison de l'égalisation de la température.

    Avez-vous déjà examiné cette question et qu'avez-vous conclu?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Il n'y a pas d'abus. À la condition d'appliquer la formule de manière uniforme, on peut choisir n'importe quelle température. Ce ne serait pas nécessairement la température réelle du pays; il s'agit simplement d'une manière de normaliser le volume à livrer et on peut choisir n'importe quelle température. Cela n'a pas vraiment d'effet sur le prix. Il suffit d'utiliser la même température qu'il fasse froid ou qu'il fasse chaud pour normaliser. C'est possible que vous obteniez beaucoup moins d'essence que vous le souhaitez, mais cela ne veut pas nécessairement dire qu'on vous exploite.

+-

    M. David Chatters: Mais la température moyenne utilisée se traduit peut-être en un volume suffisant aux États-Unis, mais ici où la température moyenne est beaucoup plus basse...

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Elle ne représente peut-être pas la température moyenne au Canada. Il est évident que la température moyenne au Canada n'est pas de 53 degrés mais que ce n'est pas injuste et il n'y a pas d'abus. On pourrait choisir 50 degrés, ce qui n'est certainement pas la température moyenne dans ce pays. Mais ça ne fait pas de différence. À la condition de le faire de manière uniforme, on obtient toujours un certain volume correspondant à cette température.

+-

    M. David Chatters: Très bien, c'est tout.

+-

    Le président: Monsieur Chatters, je pense que vous avez dit que nos prix sont les plus faibles. Je pense que nous arrivons au deuxième rang; je pense que c'est aux États-Unis que le prix est le plus bas. Je voulais juste vous le mentionner.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Nous vous avons fourni un renseignement erroné en réponse à une question que M. Bagnell a posée à mon collègue.

+-

    M. Richard Taylor: Il y a 18 raffineries appartenant à 11 sociétés différentes.

+-

    Le président: Très bien, au suivant. Est-ce que quelqu'un a d'autres questions à poser?

    Monsieur Bagnell, puis monsieur Crête.

+-

    M. Larry Bagnell: Dans ce tableau, Daniel, je constate que les prix du brut ont augmenté en avril, alors que les prix à la pompe diminuaient. Bien sûr, j'espère que la prochaine fois vous inclurez le Nord.

+-

    Le président: Restons-en aux questions. Veuillez s'il vous plaît poser votre question.

+-

    M. Larry Bagnell: Très bien.

    Si vous regardez la première colonne de l'analyse indépendante qui exclut le Nord, vous verrez un certain prix dans la première colonne puis, vers le milieu de la dernière colonne, on constate que les prix à la pompe ont diminué alors que le prix du brut a augmenté de 25 à 28 $.

º  +-(1645)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Quel tableau examinez-vous?

+-

    M. Larry Bagnell: Eh bien, tous, si j'interprète bien ce tableau. Si vous regardez vers le milieu de la page, il y a un groupe de quatre villes qui commence par Toronto. Dans la dernière colonne, les quatre prix à la pompe sont inférieurs au prix à la pompe dans les quatre premières villes du tableau, où le prix du brut était plus bas.

+-

    Le président: Je pense que nous en avons déjà parlé. Les différentes taxes imposées par les provinces déterminent le prix final de l'essence.

+-

    M. Larry Bagnell: Peut-être, mais les taxes sont constantes dans ce tableau. Ce que je dis, c'est que le Bureau de la concurrence a indiqué que les prix varient en fonction du prix du brut alors qu'on constate ici le contraire.

+-

    M. Richard Taylor: Nous avons dit qu'il s'agissait d'un prix mensuel moyen. Il peut certainement y avoir des écarts. Je pense qu'il y en a souvent, en raison des conditions locales, de la concurrence locale, dans ces marchés.

+-

    M. Peter Sagar: Je pense que si vous regardez dans la colonne intitulée « Taxes à la pompe » qui est l'avant-dernière, vous verrez que les taxes sont plus élevées jusqu'à ce qu'on arrive à Plattsburgh où elles diminuent soudainement. Puis il y a les prix pour Toronto et les autres villes où les taxes sont moins élevées; c'est peut-être ce qui explique la différence.

    Encore une fois, c'est difficile à dire sans faire une analyse détaillée, mais si vous voulez vraiment savoir quel est le prix à la pompe sans les taxes, cela vous donne une meilleure idée.

+-

    Le président: Monsieur Bagnell, vous voudrez peut-être discuter de cela en privé avec M. Sagar.

+-

    M. Larry Bagnell: Très bien. C'était ma seule question.

+-

    Le président: Très bien. Merci.

    Monsieur Crête.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Merci, monsieur le président.

    Dans la loi qui vous régit, on peut lire, au paragraphe 10(1):

Le commissaire fait étudier, dans l'un ou l'autre des cas suivants, toutes questions qui, d'après lui, nécessitent une enquête en vue de déterminer les faits:

    On peut aussi lire, à l'alinéa 10(1)c):

c) chaque fois que le ministre lui ordonne de déterminer au moyen d'une enquête si l'un des faits visés aux sous-alinéas b)(i) à (iii) existe.

    Quelle est votre interprétation? Le ministre peut-il demander qu'une enquête soit menée non seulement quand il y a preuve de collusion, mais aussi sur tout sujet qu'il considère pertinent dans les cas correspondant aux situations décrites aux sous-alinéas b)(i) à (iii)? Est-il exact de dire que le ministre aurait la possibilité de vous faire faire une étude par souci de transparence?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Le ministre peut demander que je fasse enquête, mais l'alinéa 10(1)b) commence par ces mots: « chaque fois qu'il a des raisons de croire ». Cela veut dire que même si le ministre demande que je le fasse, je vais faire enquête seulement si j'ai raison de croire qu'une de ces situations existe. Cela veut dire que pour qu'il y ait enquête, il faudra qu'il y ait des preuves ou des indications très claires à l'effet qu'il y a collusion, violation des règles ou une infraction.

+-

    M. Paul Crête: Monsieur le président, mon interprétation est différente. Il est bien écrit à l'alinéa 10(1)c):

c) chaque fois que le ministre lui ordonne de déterminer au moyen d'une enquête si l'un des faits visés aux sous-alinéas b)(i) à (iii) existe.

    L'alinéa 10(1)c) n'est pas affecté par la première phrase de l'alinéa 10(1)b) qui se lit ainsi: « chaque fois qu'il a des raisons de croire » . Par contre, les sous-alinéas 10(1)b)(i) à (iii) précisent en quelles circonstances le ministre peut demander qu'il y ait enquête.

    J'espère que le texte français que j'ai est bon. Je voudrais m'assurer qu'on se comprenne, parce que selon moi, cela signifie qu'à chaque fois que le ministre ordonne de déterminer au moyen d'une enquête si l'un des faits visés aux sous-alinéas 10(1)b)(i) à (iii) existe, il n'a pas besoin d'une preuve que le fait existe au préalable. Il peut considérer pertinent de demander qu'il y ait enquête.

º  +-(1650)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Permettez-moi de vous répondre en anglais.

+-

    M. Paul Crête: Bien sûr. Nous avons d'excellent traducteurs ici.

[Traduction]

+-

    M. Konrad von Finckenstein: L'alinéa 10(1)c) stipule clairement que le ministre peut m'ordonner de déterminer au moyen d'une enquête si l'un des faits visés aux sous-alinéas b)(i) à (iii) existe. Les sous-alinéas b)(i) à b)(iii) commencent par « chaque fois qu'il [le commissaire] a des raisons de croire ». Alors le ministre peut m'ordonner de le faire et je le ferai à la condition d'avoir des raisons de croire que l'une de ces choses se produit. Si je n'ai aucune raison de croire que c'est le cas, alors même si le ministre me l'ordonne, il n'y a rien à examiner.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Je m'en tiens à mon interprétation différente, mais il faudrait faire vérifier tout cela.

    Il n'en reste pas moins que le ministre a le pouvoir de vous demander d'enquêter s'il juge pertinent de le faire et il pourrait le faire sans nécessairement avoir de preuve de collusion entre les mains. Il pourrait considérer pertinent de le faire parce qu'il est un politicien et qu'il pourrait vouloir s'assurer qu'il y a suffisamment de transparence. Le ministre a le pouvoir de vous demander cela. Il s'agissait plus d'une remarque que d'une question.

    J'aimerais revenir à la question des augmentations de prix de février et des quatre causes dont vous avez parlé, notamment les stocks bas en Amérique du Nord. N'êtes-vous pas responsable de déterminer pourquoi les stocks sont bas en Amérique du Nord? N'est-ce pas votre rôle de déterminer si, effectivement, cela est le résultat du hasard ou si c'est le résultat d'une opération qui permet de justifier des profits au raffinage qui, autrement, ne seraient pas là, vu que le nombre de raffineries a diminué et compte tenu des conditions du marché?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Franchement, cela ne fait pas partie de mon mandat. Mon mandat est de voir s'il y a violation de la Loi sur la concurrence. Le fait qu'il y ait des profits extraordinaires n'est pas une indication suffisante pour présumer qu'il y a violation de la Loi sur la concurrence.

+-

    M. Paul Crête: J'en conclus, monsieur von Finckenstein, qu'il faudrait une preuve de collusion, c'est à dire un document écrit, un témoignage enregistré ou une preuve du fait que des gens se sont parlé ou ont conclu une entente. L'autre possibilité serait que quelqu'un fasse une étude exhaustive qui démontrerait que les quatre éléments mentionnés ne peuvent expliquer la hausse des prix. Très peu de gens ont les moyens de se payer une telle étude.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Nous devons considérer les faits, et si des événements qu'on ne peut pas expliquer raisonnablement sur le plan économique se produisent, que le marché ne fonctionne pas de façon normale, qu'il semble y avoir des gestes illégitimes qui sont posés, nous ferons enquête. Même les quatre facteurs dont nous avons parlé ne nous donneront pas de certitudes. Il faut que nos conclusions soient bien étayées et que nous n'ayons pas d'explication raisonnable.

+-

    M. Paul Crête: Les quatre facteurs sont utilisés pour défendre la position actuelle et non pour dire qu'il y a matière à enquête.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: J'ai dit bien clairement que tous les renseignements disponibles indiquent que ce sont ces quatre facteurs. Il s'agissait d'une explication et non pas d'une défense.

+-

    M. Paul Crête: Je vais vous poser une dernière question. Il s'agit de la même que j'ai posée précédemment, car elle m'apparaît assez fondamentale. M. Szabo est intervenu dans le même sens. Vous avez parlé plus tôt de raison économique. Au cours de la période du premier trimestre 2003 un phénomène qui me semble économiquement inexplicable s'est produit. On a observé, au cours de cette période, une hausse du prix du brut et en même temps une hausse des profits liés au raffinage, alors que les frais fixes étaient de beaucoup inférieurs aux profits. Dans une économie normale, si le prix de départ d'un produit normal a augmenté, comme c'est le cas au niveau du raffinage, on va essayer de vendre avec moins de profit pour être capable, en bout de ligne, de vendre son produit. Il s'agit d'un marché fermé. Cela explique peut-être le phénomène. Mais si c'est le cas, il va falloir des règles particulières.

    Avez-vous une explication plausible sur le plan économique du fait que les profits au raffinage augmentent en même temps que le prix du brut augmente?

º  +-(1655)  

[Traduction]

+-

    M. Richard Taylor: Je dirais simplement que lorsqu'une crise mondiale menace, peut-être une guerre, une pénurie grave, il n'est pas incompatible avec les lois de l'économie qu'une entreprise s'attende à ce que ses coûts augmentent. Elle doit trouver d'autres sources de pétrole. Cela peut entraîner des coûts importants et elle peut commencer à augmenter ses prix ou ses marges.

    Nous savons que les marges ont augmenté pendant cette période. Elles ont augmenté par rapport à leur niveau traditionnel de 7 ou 9 ¢ le litre, ce qui n'est pas incompatible avec les lois de l'économie, qu'en temps d'incertitude, d'augmentation des coûts, comme c'était le cas en février et mars, que des entreprises se disent qu'elles devront peut-être accroître leur niveau de bénéfices.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Toutes les compagnies font la même chose en même temps. Si votre explication sur la marge de profit est exacte, tout le monde va l'accroître au raffinage au même moment et de la même manière. Toutes les entreprises vont faire les mêmes choix économiques de la même manière et au même moment. N'est-ce pas un indice qu'il y a matière, au moins, à étudier cette question à fond?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Il y a une différence entre des comportements simultanés, parallèles et des complicités. Nous appelons le phénomène que vous observez parallel pressing. On l'observe beaucoup dans cette industrie. Le fait que les prix fluctuent de la même façon en même temps n'est pas suffisant pour dire qu'il y a complicité ou complot.

+-

    M. Paul Crête: Je ne dis pas qu'il y a un complot, j'essaie de comprendre la réalité.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Bagnell, vous aviez deux dernières questions.

+-

    M. Larry Bagnell: Monsieur Taylor, pouvez-vous nous dire si vous menez à l'heure actuelle des enquêtes sur des cas, importants ou mineurs, liés au prix du pétrole. Et, dans l'affirmative, quand prévoyez-vous avoir fini?

+-

    M. Richard Taylor: Je ne peux pas parler de cas qui ne sont pas du domaine public. L'article 29 de la Loi sur la concurrence exige que nos enquêtes soient confidentielles. Mais comme Konrad l'a dit, au cours des 20 dernières années, il y a eu un grand nombre d'enquêtes au sujet de cette industrie.

+-

    M. Larry Bagnell: Je ne demandais pas de détails précis. Puis-je demander alors combien il y a de cas au total, d'enquêtes en cours et de cas qui n'ont pas été traités?

+-

    M. Richard Taylor: Nous avons probablement 200 plaintes ou dossiers actifs et il y a 33 affaires en instance où nous tâchons de déterminer s'il pourrait y avoir une responsabilité criminelle pour une infraction à la Loi sur la concurrence.

+-

    M. Larry Bagnell: Je compatis avec votre manque de ressources. C'est un problème que je reconnais depuis le début de ces audiences. Avez-vous une idée approximative du temps qu'il vous faudra pour terminer ces enquêtes?

+-

    M. Richard Taylor: J'ai promis à Konrad que ce serait d'ici la fin de l'année. Nous avons des problèmes de ressources, mais nous établissons des priorités et nous en venons à bout. Nous avons des normes de service. Nous pourrions utiliser davantage de ressources, mais je ne pense pas qu'il y ait de cas importants qui attendent faute de ressources.

+-

    M. Larry Bagnell: Alors la loi ne vous permet pas de me dire si vous menez des enquêtes au sujet de cette industrie.

+-

    M. Richard Taylor: Je peux probablement vous dire si nous nous intéressons à une industrie donnée, mais il faut que je me demande si en soi ce renseignement suffit pour identifier quelqu'un ou pour lui causer du tort. S'il n'y a que deux entreprises dans une industrie, et que je vous dis que nous examinons ce secteur, vous pourriez deviner assez facilement à qui nous nous intéressons, alors je pense...

+-

    M. Larry Bagnell: Je voudrais simplement savoir si l'industrie fait l'objet d'enquêtes.

+-

    M. Richard Taylor: Je vais m'y prendre autrement.

    Nous recevons assez souvent des plaintes au sujet de l'essence. Nous les examinons même si nos ressources sont restreintes. Les deux messieurs assis derrière nous s'occupent à plein temps de ces plaintes. Peter a au moins un autre employé. Ainsi, avec les gestionnaires, cela fait trois ou quatre personnes qui consacrent tout leur temps au dossier de l'essence. Cela vous donnera peut-être une idée de l'importance du nombre de dossiers qui concernent cette industrie.

»  +-(1700)  

+-

    M. Larry Bagnell: Comme M. Masse l'a dit, ce n'est peut-être qu'un problème de communication. Je ne sais pas si vous avez un site web ou si vous communiquez ces renseignements importants au grand public—ceux qui ne concernent pas une affaire, mais qui vous préoccupent. Si plus de gens le savaient, les membres du comité ne soulèveraient peut-être pas la question puisque les citoyens seraient au courant de l'excellent travail que vous avez fait et auraient toute cette information.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: C'est toujours une question de moyens. Par rapport à celui d'autres pays, notre service est sous-financé. De plus, le Comité du patrimoine m'a demandé de lui remettre un rapport qui nous compare à nos principaux partenaires. Nous arrivons en cinquième ou sixième place. En outre, je vais peut-être subir une réduction de budget cette année. Il est donc très difficile pour moi de diffuser ceci comme vous me le demandez. N'oubliez pas non plus que l'essence n'est qu'un des secteurs qui préoccupe les gens.

+-

    Le président: Merci, monsieur Bagnell.

    Monsieur Chatters.

+-

    M. David Chatters: Merci, monsieur le président.

    Cela me renverse. De tous les prix pratiqués dans le monde, ceux de l'industrie pétrolière sont à l'avant-dernier rang parmi les plus bas. Il n'y a vraiment pas lieu de chercher des croque-mitaines. Félicitons-la plutôt de ce qu'elle apporte aux automobilistes et de sa contribution au PIB en général. Je n'en reviens pas de toute cette suspicion à cause de la montée des prix. Pour commencer, lorsque les prix montent, ils montent dans tout le secteur.

    Grand Dieu! Wal-Mart envoie tous les jours des employés vérifier le prix chez Superstore pour savoir ce que fait la concurrence. Je ne crois pas que ce soit illégal. C'est la concurrence. Je suis certain que McDonald sait exactement ce que Wendy demande tous les jours pour son quart de livre aussi et adapte son prix en conséquence.

    Ma question est la suivante. Plusieurs fois cet après-midi on a mentionné l'absence de moyens. Pour les besoins du rapport que le comité va rédiger, j'aimerais savoir si vous pourriez nous donner—surtout en raison du fait que M. McTeague a été très critique vis-à-vis du travail que votre bureau fait—des indications de ce manque de moyens. Tout le monde veut plus d'argent. Tout le monde pourrait dépenser plus d'argent et faire mieux, mais le comité aimerait avoir des preuves que vous pourriez effectivement mieux protéger l'intérêt public et défendre la concurrence si vous aviez plus de moyens.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Si vous le voulez, je serai heureux de vous remettre les études qui font la comparaison entre le Canada et les États-Unis, la France, le Royaume-Uni et le Japon pour que vous puissiez voir où nous nous situons.

    Il ne s'agit pas non plus d'une somme énorme. En tout, il nous faut 45 millions de dollars, ce qui n'est pas une somme astronomique. Mais, pour des raisons qui m'échappent, il me paraît difficile d'arriver à être financé comme il se doit.

+-

    Le président: Je suis certain qu'il y aura d'autres questions.

+-

    M. David Chatters: D'accord.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Je parle bien d'un total de 45 millions, pas d'une augmentation de 45 millions.

+-

    M. David Chatters: Merci, ce sera tout.

+-

    Le président: Monsieur Szabo.

+-

    M. Paul Szabo: Merci, monsieur le président.

    Je meurs d'impatience d'entendre M. McTeague comme témoin devant le comité pour se défendre. J'estime que c'est son droit, mais c'est là une autre question.

    Je suis désolé si l'on n'a pas fait disparaître la question de la collusion. Je ne crois pas qu'il y ait le moindrement de collusion. Tous ceux qui ont étudié la question sont arrivés à la conclusion qu'il n'y en a pas. Ils ont conclu qu'il s'agit de pratiques commerciales normales. Ils arrivent au même résultat uniquement à cause de la façon dont ils font des affaires. Certains phénomènes surviennent—qu'il s'agisse de guerres ou d'autre chose—et leurs effets s'en font sentir. On peut suivre les répercussions de bout en bout. Chaque fois qu'un de ces phénomènes se produit—et cela se répercute jusque chez le détaillant—s'il y a un concurrent en face, l'un monte ses prix et l'autre fait pareil parce que c'est ainsi que se font les affaires. Ce n'est pas de la collusion, c'est l'usage dans le commerce.

    Il y a toutefois un autre aspect dont on n'a pas parlé, celui de la rentabilité du secteur pétrolier. Je ne crois pas que la demande baisse au Canada. Je ne crois pas qu'on ait jamais été capable de satisfaire à la demande du consommateur au pays. Je ne suis pas sûr qu'on ait jamais été à court d'essence et qu'un croque-mitaine ait forcé le secteur à déclarer qu'il nous faut nous protéger contre ce risque ou qu'on s'en serve comme prétexte pour dire que l'approvisionnement est compromis. Ça n'a jamais été un problème. Mais lorsque ça en deviendra un, là, tout le monde en sera conscient.

    Le problème, si les compagnies publient des états financiers très robustes en fin d'année alors que certaines d'entre elles n'ont pas atteint leurs objectifs de bénéfice ni de rendement par action et que le prix du titre baisse, c'est qu'elles doivent donc vouloir obtenir un rendement sur les capitaux investis et rapporter à leurs actionnaires sans quoi le prix du titre va en pâtir. Quelle que soit l'évolution du marché, de la demande ou de la technologie, il vous faut monter les prix si vous n'atteignez pas le volume projeté dans votre plan d'entreprise et dans les projections que vous avez faites pour l'année à venir.

    Comment le Bureau examine-t-il tout ce qui est incorporé, surtout lorsque les compagnies, au dernier trimestre de leurs cycles financiers n'ont pas atteint leurs objectifs et que les actionnaires réclament une augmentation des prix pour tirer un plus grand bénéfice d'un volume inchangé tout simplement parce que l'entreprise n'atteindra pas son objectif de volume pour l'année?

»  +-(1705)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: C'est une question intéressante et vous devriez la poser au secteur pétrolier. Ce n'est pas notre mandat.

    Notre mandat est de nous assurer qu'il existe un marché concurrentiel. De veiller à ce que le marché ne soit pas truqué par suite de collusion ou qu'il n'y ait pas de comportement sur le marché qui contrevienne à la loi. Elle est muette sur la rentabilité, la maximisation des bénéfices, l'exploitation du consommateur ou le mercantilisme, appelez ça comme vous voudrez. Rien de tout cela ne figure dans la loi. Elle ne porte que sur les ententes destinées à influencer le marché.

+-

    M. Paul Szabo: Admettez-vous que les autres mesures qu'elles peuvent prendre, comme augmenter les prix au détail et augmenter les marges bénéficiaires au détail, sont des outils qui leur permettent d'atteindre leurs objectifs de rentabilité?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Si vous croyez dans le marché, dans la concurrence, cela arrive, mais cela disparaît aussi parce que tout le monde n'emboîtera pas le pas. Si vous agissez de la sorte, vos ventes vont en pâtir. Si vous augmentez exagérément vos prix à la fin de l'année pour atteindre vos objectifs, à moins que tout le monde soit dans la même situation, vous n'allez pas vous en tirer comme ça. Par contre, si tout le monde est dans la même situation, cela signifie peut-être qu'il est temps pour le secteur d'augmenter ses prix.

+-

    M. Paul Szabo: Mais si vous examinez ce qui se passe au niveau du détail, tout le monde emboîte le pas.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Comme je l'ai dit en réponse à M. Crête, le parallélisme conscient ne constitue pas une infraction à la Loi sur la concurrence; ça se pratique beaucoup dans ce secteur comme dans d'autres.

+-

    M. Paul Szabo: Merci.

+-

    Le président: Monsieur Crête.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Merci, monsieur le président.

    J'aimerais avoir votre avis. On a identifié un problème de transparence. Beaucoup d'études ont été faites au cours des dernières années, et les consommateurs ne sont jamais satisfaits des résultats. D'autre part, il s'agit d'un produit très particulier et dont le marché est fermé.

    Quels seraient, selon vous, les gestes qu'il faudrait poser pour que ce problème d'apparence de manque de transparence puisse être réglé, sans présumer du reste? Préféreriez-vous la création d'une agence gouvernementale de surveillance des prix, une étude sur l'industrie comme il est fait mention dans votre rapport, ou toute autre suggestion? Quelles seraient vos principales recommandations sur cette question?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Il me semble qu'il serait préférable qu'une étude sur l'ensemble de la situation soit faite par un organisme indépendant qui aurait des pouvoirs, qui pourrait faire comparaître des témoins et recueillir de l'information. Il devrait aussi avoir le pouvoir de protéger l'information confidentielle que, forcément, personne ne veut partager, mais qui serait essentielle pour en arriver à une conclusion basée sur les faits réels.

    Comme nous le mentionnions, le Tribunal canadien du commerce extérieur serait en mesure de le faire. Il serait nécessaire que ces analyses soient faites de façon objective par un organisme public qui aurait le pouvoir d'obtenir de l'information et qui aurait les moyens de protéger l'information confidentielle.

»  +-(1710)  

+-

    M. Paul Crête: Merci beaucoup.

[Traduction]

+-

    Le président: Y a-t-il d'autres questions?

    Monsieur Bagnell.

+-

    M. Larry Bagnell: Vous venez de dire que le parallélisme conscient n'est pas une infraction aux termes de la loi. Cela n'en est-il pas tout autant un problème pour le consommateur?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Non. Si le marché est concurrentiel et s'il y a suffisamment d'acteurs sur le marché, même si certains imiteront les autres, ils ne le feront pas tous. S'ils pratiquent tous les mêmes prix aux dépens du consommateur, tôt ou tard il y aura un nouveau venu sur le marché. Il est tout à fait naturel pour des rivaux de se tenir à l'oeil, de suivre les prix de l'autre et de se donner un avantage ou d'offrir le même produit au même prix. Quand vous avez un produit—ici un produit de base—bien peu de choses distinguent l'essence d'une compagnie à l'autre et il n'est pas rare que les prix s'établissent au même niveau parce que chacun a les mêmes coûts et vend un produit dont le vendeur laisse le consommateur indifférent pourvu qu'il obtienne le produit.

    Dans un marché concurrentiel efficace, les prix s'établissent d'ordinaire au même niveau. Cela a l'air d'être truqué, mais en fait cela marche parfaitement et si les prix d'un concurrent montent ou baissent, ceux des autres vont suivre. Cela ne signifie pas forcément que le consommateur est une victime.

+-

    M. Larry Bagnell: Eh bien, si le marché va corriger les prix parallèles, pourquoi investissons-nous dans un bureau de la concurrence pour mettre fin à la collusion?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: La collusion, c'est une autre chose. C'est créer un prix artificiellement élevé, ce qui n'arriverait pas normalement, en raison uniquement du fait que les entreprises ne se font pas la concurrence entre elles. Ici, elles se font concurrence, mais aboutissent au même résultat à cause de la structure de l'industrie, du produit qu'elles vendent et du fait que leur base de coût est très semblable.

+-

    M. Peter Sagar: Il faut aussi distinguer entre ce que vous avez appelé le parallélisme conscient, c'est-à-dire lorsque les entreprises décident de faire de la collusion de facto sans passer un accord entre elles—cela peut être une réaction acquise—et ce qui se produit dans un marché concurrentiel efficace. Si vous observez une généralisation du parallélisme conscient, vous allez peut-être voir en fait une augmentation de la marge bénéficiaire. Vous observerez peut-être des mouvements de prix beaucoup plus rapprochés que la normale.

    La difficulté de le prouver dans le cas du pétrole, comme Konrad l'a dit, c'est que le produit est essentiellement le même—les mêmes techniques de production sont employées par tout le monde, les coûts de base sont les mêmes et les coûts de distribution varient sans doute très peu—et du point de vue du consommateur, il y a très peu de différenciation du produit. On observera donc des mouvements de prix très semblables. Là où se concentre l'effort concurrentiel, c'est la réduction de la marge bénéficiaire. Ils ne peuvent pas se battre sur le terrain des coûts car ils accuseraient très vite des pertes; ils se font la lutte sur le plan du marketing, de l'emplacement et de services à valeur ajoutée comme celui de nettoyeur, qu'offre Petro-Canada.

+-

    M. Larry Bagnell: Oui, je n'essayais pas d'aller jusqu'à ce degré...

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Il n'y a rien d'illégal dans le parallélisme conscient, rien du tout. Ce n'est pas une atteinte à la Loi sur la concurrence.

»  +-(1715)  

+-

    M. Larry Bagnell: Je sais. C'est la difficulté.

    Là où je veux en venir, pour ce qui est du consommateur, c'est que nous avons un système pour lutter contre ceux qui le font illégalement mais lorsque cela se fait légalement, et si nous essayons de créer une société concurrentielle—ce cas me semble pas mal concurrentiel d'après ce que vous avez dit, mais je parle de la situation générale—peut-être faut-il trouver dans la société des recours contre le parallélisme conscient si cela conduit à des prix abusifs.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Je ne suis pas de votre avis. Ce n'est pas indiqué. Le parallélisme conscient est une indication du bon fonctionnement du marché. Ne pénalisons pas ceux qui le pratiquent. Pour moi, ce n'est pas un problème. C'est le signe qu'il y a des transactions comparables pour la production d'un produit dans des circonstances très semblables; les gens vont donc essayer de maximiser leurs prix et vont tout naturellement graviter autour d'un prix commun.

+-

    M. Larry Bagnell: Oui. Ce n'est pas à cette situation que je pensais. Je pensais plutôt à celles où les prix bondissent ou se maintiennent à un niveau bien plus élevé qu'il ne le devrait. Si cela se fait illégalement, vous pouvez les épingler mais si ce n'est pas le résultat de coups de téléphone ou d'interaction consciente, vous n'y pouvez rien.

+-

    M. Peter Sagar: Ces problèmes ont tendance à se corriger d'eux-mêmes parce qu'un des acteurs trouvera le moyen de quitter la combine et il n'y a rien qui le lie. Deuxièmement, il y aura des nouveaux venus attirés par les gros bénéfices. La marge qui fait problème est vraiment très étroite.

+-

    Le président: Merci, monsieur Bagnell.

    Monsieur Rajotte.

+-

    M. James Rajotte: Merci, monsieur le président. J'ai quelques courtes questions à poser pour faire suite à celles de M. Bagnell. C'est peut-être davantage une observation.

    Pour moi, l'industrie ne peut pas y trouver son compte quand il s'agit de parallélisme parce que si vous ne prenez qu'une seule station-service, si elle suit les prix de ses concurrents, les gens diront que c'est le signe de collusion. Si cette station-service baisse ses prix en deçà de ceux de ses concurrents, on l'accuse de brader. Si la station-service a des prix plus élevés que ceux de ses concurrents, on l'accuse d'exploiter le client.

    Ce n'est peut-être qu'une observation de ma part et peut-être ne voulez-vous pas y répondre, mais il me semble que l'industrie est coincée. Comment peut-elle réagir à cela lorsque les politiciens s'en prennent à elle et qu'ils peuvent l'attaquer, quelle que soit la situation?

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Votre question porte sur les apparences ou les allégations. Il est évident que l'industrie ne peut pas empêcher les gens de lancer des allégations. Votre exemple est un peu extrême. Une seule station-service qui fait une de ces trois choses ne pourra sans doute pas... Même si les allégations sont lancées, il ne s'agira que d'allégations. Ce dont il est question ici, c'est la Loi sur la concurrence. Pour contrevenir à la loi... aucun de ces actes en soi n'enfreint le moindrement la Loi sur la concurrence.

+-

    M. James Rajotte: Ce que je dis, c'est que peu importe ce que l'industrie fait ou ce que divers acteurs de l'industrie font, il y a toujours moyen de lancer une attaque ou une allégation injustifiée contre eux. Disons que c'est une observation de ma part.

    Ma deuxième question fait suite à ce dont M. Szabo parlait, l'offre. Pour moi, il est évident que si l'offre baisse, si vos stocks s'épuisent, le prix va augmenter. Il semble que ce soit ce qui s'est produit en février et mars. N'est-ce pas votre conclusion à vous? Lorsque les stocks baissent, quelles que soient les circonstances, le prix augmente en conséquence.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Oui. Comme le Conference Board l'a constaté et nous aussi dans notre étude, le facteur le plus important du prix de l'essence, c'est le prix du brut. C'est ce que les économistes appellent la symétrie des prix—un prix suit l'autre.

+-

    M. James Rajotte: Ma troisième et dernière question rejoint ce que disait mon collègue d'en face, et je parle des marges de profit et de l'inquiétude devant l'augmentation des marges de profit. Si vous prenez certains faits et chiffres de M.J. Ervin, si vous prenez le prix de l'essence au détail à Toronto en mars de cette année, qui était de 82¢, 35¢ représentait le prix du brut, 6¢ pour la commercialisation, 30¢ pour les taxes et 10¢ pour le raffinage. D'après les informations que j'ai vues, il me semble que les autres intrants sont assez stables si l'on exclut les taxes, même si l'on tient compte du marché international, selon les informations des agences internationales qui ont étudié ces données.

    Pouvez-vous m'indiquer un élément de cette étude où l'on se penche sur les marges de profit aux niveaux du gros et du détail qui nous permettrait d'apaiser cette préoccupation? Il me semble que ces chiffres expliquent assez bien ce problème.

»  -(1720)  

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Non, je ne peux pas, et comme je l'ai dit auparavant en réponse à M. Szabo, la marge de profit ne nous préoccupe pas. Cela ne fait pas partie de notre mandat.

    Si une entreprise fait de jolis profits ou non, ou ce que l'on juge être des profits déraisonnables ou exorbitants, si c'est parce qu'on a fixé les prix, dans un tel cas, nous serions très inquiets, mais en soi, si une entreprise tire parti d'une situation, quelle qu'elle soit, pour faire de gros profits, cela n'est nullement contraire à la Loi sur la concurrence.

+-

    M. James Rajotte: Alors, à votre avis, le marché pétrolier et celui du détail sont suffisamment concurrentiels pour contrer un joueur de cette industrie dont la marge de profit serait jugée quelque peu trop élevée, quoique, à mon avis, dans notre pays, nous devrions à tout le moins célébrer le profit. Mais s'il y a un joueur dans cette industrie qui fait des profits excessifs, il est évident que la concurrence est suffisante pour le contrer.

+-

    M. Konrad von Finckenstein: Je n'ai pas de commentaires à faire sur les marges de profit. Tout ce que je peux vous dire, c'est que je n'ai pas constaté de marge de profit qui aurait été causée par un comportement anticoncurrentiel.

+-

    M. James Rajotte: Merci.

-

    Le président: Merci, monsieur Rajotte.

    Monsieur Crête, aviez-vous des questions?

    Au cours de la fin de semaine, je suis allé faire un tour au marché des fermiers, et j'ai songé à l'étude de cette semaine. Pour une raison quelconque, lorsque je suis allé acheter des légumes ou des fleurs pour la fin de semaine, j'ai remarqué que les prix étaient presque tous les mêmes. Donc, au sujet du parallélisme que vous avez mentionné à maintes reprises en réponse à M. Bagnell, c'est une très bonne comparaison. Vous n'avez qu'à aller au marché des fermiers. Les seules fois où j'ai vu qu'il y avait une différence, c'était parce que le produit n'était pas de même qualité.

    Peut-être que nous ne sommes pas assez habitués à cela. Quelqu'un a mentionné Wal-Mart, quelqu'un d'autre a mentionné les dépanneurs, le prix des Big Mac et bien d'autres choses. Nous avons presque fait le tour du monde aujourd'hui.

    Monsieur von Finckenstein, monsieur Sagar et monsieur Taylor, merci beaucoup d'être venus. Je sais que vous êtes toujours disponibles lorsque nous avons des questions, donc merci beaucoup d'avoir pris le temps d'être des nôtres aujourd'hui.

    La séance est levée.