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HAFF Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 3 décembre 2002




Á 1105
V         Le président (M. Peter Adams (Peterborough, Lib.))

Á 1110
V         Mme Maureen Mancuso (professeure de science politique, Université de Guelph)
V         Le président
V         M. Michael Atkinson (vice-président (académique), Université de la Saskatchewan)
V         Le président
V         M. Daniel Weinstock (professeur de philosophie, Université de Montréal)

Á 1115
V         Le président
V         M. Ian Greene (professeur de science politique, Université York)

Á 1120
V         Le président
V         M. C.E.S. Franks (témoignage à titre personnel)
V         Le président
V         M. C.E.S. Franks

Á 1125
V         Le président
V         M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne)
V         Le président
V         M. Ian Greene

Á 1130
V         Le président
V         M. Michael Atkinson
V         Le président
V         M. Ken Epp
V         M. Ian Greene

Á 1135
V         Le président
V         M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.)
V         Mme Maureen Mancuso
V         M. Joe Jordan
V         Le président
V         M. Michael Atkinson
V         M. Joe Jordan
V         Le président
V         M. Ian Greene

Á 1140
V         Le président
V         M. Daniel Weinstock
V         Le président
V         Mme Maureen Mancuso
V         Le président
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)
V         M. C.E.S. Franks

Á 1145
V         M. Yvon Godin
V         M. C.E.S. Franks
V         M. Yvon Godin
V         M. C.E.S. Franks
V         M. Yvon Godin
V         Le président
V         M. Jacques Saada (Brossard—La Prairie, Lib.)

Á 1150
V         Le président
V         Mme Maureen Mancuso
V         Mr. Jacques Saada
V         Mme Maureen Mancuso
V         Le président
V         Mr. Jacques Saada

Á 1155
V         M. Daniel Weinstock
V         Le président
V         M. C.E.S. Franks
V         M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ)
V         Le président
V         M. Michael Atkinson

 1200
V         Le président
V         M. Ian Greene
V         Le président
V         M. Ian Greene
V         Le président
V         Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.)

 1205
V         Le président
V         Mme Carolyn Parrish
V         M. C.E.S. Franks
V         Mme Carolyn Parrish
V         M. C.E.S. Franks
V         Des voix
V         M. C.E.S. Franks
V         Mme Carolyn Parrish
V         M. C.E.S. Franks
V         Mme Carolyn Parrish
V         Le président
V         M. Daniel Weinstock

 1210
V         Le président
V         M. Daniel Weinstock
V         Le président
V         Mme Maureen Mancuso
V         Le président
V         M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC)
V         M. C.E.S. Franks
V         M. Rick Borotsik

 1215
V         M. C.E.S. Franks
V         M. Rick Borotsik
V         M. C.E.S. Franks
V         M. Rick Borotsik
V         M. Ian Greene
V         M. C.E.S. Franks
V         M. Rick Borotsik
V         M. Ian Greene
V         Le président
V         M. Daniel Weinstock
V         Le président
V         M. Rick Borotsik
V         M. C.E.S. Franks
V         Mme Maureen Mancuso

 1220
V         Le président
V         M. Michael Atkinson
V         M. Daniel Weinstock
V         M. Ian Greene
V         Le président
V         M. Michael Atkinson

 1225
V         Le président
V         M. Daniel Weinstock

 1230
V         Le président
V         M. Ken Epp
V         M. Ian Greene
V         M. C.E.S. Franks

 1235
V         M. Ken Epp
V         Mme Maureen Mancuso
V         Le président
V         M. Tony Tirabassi (Niagara-Centre, Lib.)
V         M. Ian Greene
V         M. Tony Tirabassi
V         M. Ian Greene
V         M. Tony Tirabassi
V         M. Ian Greene

 1240
V         Le président
V         M. Yvon Godin
V         Le président
V         M. Yvon Godin
V         Le président
V         M. Ian Greene
V         M. Yvon Godin
V         M. Ian Greene
V         M. Yvon Godin
V         M. Ian Greene
V         M. Yvon Godin
V         Le président
V         M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.)

 1245
V         M. Michael Atkinson
V         M. Geoff Regan
V         Le président
V         Mme Maureen Mancuso
V         M. Michael Atkinson

 1250
V         Le président
V         M. Ian Greene
V         Le président
V         M. Rick Borotsik
V         Le président
V         Mme Maureen Mancuso
V         Le président
V         M. Ian Greene
V         Le président
V         M. Daniel Weinstock
V         Le président
V         M. Rick Borotsik
V         Le président
V         M. Joe Jordan

 1255
V         Le président
V         Mme Maureen Mancuso
V         M. Joe Jordan
V         Mme Maureen Mancuso
V         M. Joe Jordan
V         Mme Maureen Mancuso
V         Le président
V         M. Joe Jordan
V         Le président
V         M. Daniel Weinstock
V         M. Michael Atkinson

· 1300
V         Le président
V         Mme Maureen Mancuso
V         M. C.E.S. Franks
V         M. Ian Greene
V         M. Daniel Weinstock
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre


NUMÉRO 011 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 3 décembre 2002

[Enregistrement électronique]

Á  +(1105)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)): Chers collègues, la séance est ouverte. Peut-être pourrions-nous commencer. Conformément au mandat que nous confère le sous-alinéa 108(3)a)(iii) du Règlement, nous procéderons à l'examen des questions relatives à l'incorporation d'un code de déontologie dans le Règlement de la Chambre.

    Avant de vous présenter nos témoins, je pourrais indiquer la façon dont nous travaillerons à partir de maintenant.

    Aujourd'hui, bien sûr, nous accueillons nos témoins et nous y arrivons.

    Jeudi, nous entendrons d'abord le conseiller en éthique du gouvernement fédéral, M. Howard Wilson, qui nous consacrera environ une heure. Ensuite, nous aurons un déjeuner de travail, vous vous en souviendrez, avec le Président de la Chambre et le sénateur Oliver, déjeuner au cours duquel nous poursuivrons le débat. Comme vous le savez, ce sera un déjeuner de travail informel dans les appartements du Président. J'espère, soit dit en passant, que vous ne l'oublierez pas. Ce n'est pas un événement social, mais un déjeuner de travail, même s'il n'aura pas lieu ici dans la salle du comité.

    Mardi prochain, j'ai pensé que nous pourrions poursuivre, et peut-être conclure, l'examen des mesures d'initiative parlementaire. Ensuite, jeudi, pour tenir compte de notre intérêt pour le sujet et en réponse à la motion de l'Alliance canadienne, nous reviendrons à la question de la sécurité.

    Pour votre information, je vous signale que nous avons obtenu des réponses à toutes nos demandes d'information sur la sécurité, sauf de la GRC. Donc, nous avons les documents et nous serons certainement prêts dans une semaine, soit jeudi, à examiner cette question.

    Je suis très honoré de vous présenter nos témoins d'aujourd'hui. À nouveau, au nom de mes collègues, je tiens à vous dire que nous vous sommes des plus reconnaissants de venir nous rencontrer pour nous aider à examiner cette question très importante.

    Nous accueillons donc Mme Maureen Mancuso, professeure de science politique à l'Université de Guelph. De l'Université de la Saskatchewan, nous avons M. Michael Atkinson, vice-président des affaires universitaires. Monsieur Atkinson, merci d'avoir parcouru toute cette distance pour venir nous rencontrer. De l'Université York, nous accueillons M. Ian Greene, professeur de science politique et de l'Université de Montréal, M. Daniel Weinstock, professeur de philosophie.

    Professeur Weinstock, il y a au moins environ six semaines, j'ai entendu, et je pense au moins une autre personne ici présente, l'exposé que vous avez donné lors du déjeuner sur la Colline, initiative dont nous vous remercions infiniment. Merci d'être là.

    Nous accueillons également M. Ned Franks, ex-professeur de science politique à l'Université Queen's. Monsieur Franks, nous vous sommes très reconnaissants d'être là.

    On m'a dit que vous feriez peut-être une brève déclaration. L'ordre de présentation m'importe peu. Est-ce que je peux procéder dans l'ordre dans lequel j'ai présenté les témoins?

    Madame Mancuso, vous seriez la première, si vous êtes d'accord. Allez-y.

Á  +-(1110)  

+-

    Mme Maureen Mancuso (professeure de science politique, Université de Guelph): Je commencerai peut-être par vous parler un peu des attentes, parce que je crois qu'elles sont ici très grandes.

    Quand on parle de l'historique des scandales politiques, si ces scandales nous enseignent quoi que ce soit, c'est que les représentants élus oublient de comprendre ce que le public attend de leur comportement. Les scandales qui minent la confiance à l'égard du gouvernement, qui ternissent la réputation des hommes et des femmes politiques et qui donnent lieu à la création de comités comme le vôtre sont, en bout de ligne, des exemples d'actes politiques qui perturbent et ternissent les attentes du public.

    Dans certains cas, ces attentes sont plutôt irréalistes. Après tout, les citoyens sont étrangers au monde politique et ne sont vraiment pas familiers avec les exigences quotidiennes de la politique. Ils font fi des exigences du travail et surestiment les avantages apparents qu'il comporte. Nous devons quand même comprendre et examiner ces attentes parce qu'elles sont l'expression de la confiance du public dans le gouvernement. Je ne vais pas m'aventurer trop loin sur cette question de la confiance. Je pense que vous savez tous qu'elle est faible et à la baisse.

    Cependant, j'ai ici un tableau, si cela vous intéresse, qui indique une forte dégradation de l'opinion des citoyens à l'égard du Parlement. Bien sûr, en contrepartie, les perceptions des hommes et des femmes politiques sont beaucoup plus élevées. Lorsqu'il s'agit du Sénat, même là, la situation est encore moins reluisante. Même la majorité des hommes et des femmes politiques ont peu de confiance en cette institution, voire aucune.

    En guise d'introduction, je rappelle aux membres du comité qu'à mon avis, les attentes du public sont ici en jeu, et je propose fermement que l'on respecte ces attentes, qu'elles soient fondées ou non.

+-

    Le président: Merci beaucoup de cette intervention. Nous l'apprécions.

    Michael Atkinson.

+-

    M. Michael Atkinson (vice-président (académique), Université de la Saskatchewan): Je tiens à vous remercier de l'occasion qui m'est offerte de comparaître à nouveau devant un autre comité parlementaire pour parler de la possibilité d'intégrer un code de déontologie à l'intention des parlementaires.

    Croyez-le ou non, j'ai participé à la rédaction d'un Livre vert sur les conflits d'intérêts qui a été déposé en 1973 par le ministre MacEachen. Je n'avais que 12 ans à l'époque, mais ça a été une occasion en or. J'ai eu la chance de m'associer aux députés au fil des ans qui cherchaient une façon d'améliorer la confiance des membres du public dans l'institution qu'est le gouvernement.

    Comme Mme Mancuso, je tiens à souligner que l'effort actuel qui, à maints égards, se veut une nette amélioration par rapport à ce que nous avons essayé de faire dans les années 1970 et à ce que les comités subséquents ont tenté de réaliser, ne nous permettra néanmoins de proposer qu'une réponse négligeable à certaines des attentes du public en vous les parlementaires. À certains égards, comme Mme Mancuso l'a souligné, ces attentes sont irréalistes, mais par contre, elles méritent certainement qu'on s'y arrête.

    En conclusion, je tiens à dire qu'à mon avis, le document qui a été réuni fait état beaucoup mieux de ce qui est raisonnable pour les parlementaires d'une part, et de ce qui constitue des attentes raisonnables de la part du public, d'autre part.

+-

    Le président: Monsieur Atkinson, merci beaucoup.

    Daniel Weinstock.

[Français]

+-

    M. Daniel Weinstock (professeur de philosophie, Université de Montréal): Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner. Je vais d'abord m'exprimer en français et je répondrai ensuite aux questions dans la langue qui aura été utilisée pour les poser, en supposant que ce sera l'anglais ou le français.

    Comme l'a mentionné plus tôt le président, j'ai eu l'occasion de parler plus longuement du problème de l'éthique politique à l'occasion d'un petit déjeuner sur la Colline. J'ai à cet effet un texte relativement long que je serais heureux de rendre disponible à qui le voudra. Vous n'aurez qu'à m'en faire la demande après la séance.

    Je voudrais maintenant faire ressortir deux thèmes qui me semblent importants et qui rejoignent, jusqu'à un certain point, ceux qui ont été brièvement évoqués par mes collègues.

    Je dirai d'abord que le public semble bien mal comprendre le système politique, les principes, les structures, les éléments déclencheurs qui donnent lieu à des conflits, qui créent des tensions et qui rendent le rôle du politicien difficile en termes d'éthique.

    Quand je dis que le public comprend mal ces choses, ce n'est pas pour le blâmer, bien au contraire. À mon avis, il serait essentiel d'inclure dans toute approche systématique du problème de l'éthique politique une campagne de sensibilisation du public au fonctionnement de notre système démocratique. Après tout, ce dernier est basé sur l'opposition, le conflit et la contestation, des comportements qui ne sont pas nécessairement ceux qu'on recherche chez nos compagnons de dîner ou chez nos amis. J'aurais aimé aborder cette dimension.

    Je dirai ensuite que, de manière générale, un code de déontologie qui cible uniquement les comportements individuels des députés, sans prendre en considération le système dans lequel les parlementaires évoluent et les conflits de rôles parfois causés ou créés par ce système, sera forcément incomplet. Pour ces motifs, je ferai valoir la nécessité de se pencher sur les dysfonctionnements systémiques occasionnels qui ont tendance à causer les problèmes auxquels le code de déontologie, bien qu'il se concentre parfois trop sur le rôle individuel des parlementaires, tente de répondre. Merci.

Á  +-(1115)  

+-

    Le président: Je te remercie beaucoup, Daniel.

[Traduction]

    Le comité apprécierait beaucoup obtenir un exemplaire de votre texte avant que vous ne partiez.

    Monsieur Greene, je m'excuse. Comme vous le constatez déjà, la présidence est très désorganisée au sein de ce comité. Vous deviez intervenir, et j'ai sauté votre nom. C'est mon erreur.

    Donc, la parole est à M. Ian Greene de l'Université York.

+-

    M. Ian Greene (professeur de science politique, Université York): Eh bien, je suis très heureux d'être ici. Je vous remercie beaucoup de m'avoir invité.

    D'abord, je tiens à dire que le code de déontologie et la création d'un poste indépendant de commissaire à l'éthique sont à mon point de vue un grand pas en avant. Dix provinces et trois territoires ont maintenant adopté un code de déontologie et huit provinces ont un commissaire indépendant à l'éthique.

    Chaque fois que je prononce une allocution dans d'autres pays au sujet de la contribution du Canada à la déontologie politique, je parle de ces situations, mais c'est très gênant de dire à quel point le régime fédéral tire de l'arrière. S'il vous plaît, assurez-vous que ce projet de loi soit adopté cette fois-ci. Il y a déjà eu des projets de loi mort-nés dans le passé, et ce serait si merveilleux que celui-ci soit adopté.

    Dans les provinces qui ont des régimes comme celui-ci, le nombre de scandales en matière de déontologie a été réduit de façon draconienne. Je pense que les problèmes d'éthique qu'ont connus le gouvernement Mulroney et le gouvernement actuel, soit la totalité ou la plupart d'entre eux, auraient pu être évités si le projet de loi que vous étudiez actuellement avait été adopté. Alors je vous en prie, faites ce que vous pouvez pour vous assurer qu'il sera adopté cette fois-ci, qu'il ne soit pas une fois de plus relégué aux oubliettes. Je pense que la plupart des parlementaires sont honnêtes et sont dévoués au public. Ce projet de loi permettra de redorer votre réputation et celle de tous les parlementaires.

    L'objectif du code de déontologie est de toute évidence établi dans l'avant-projet de loi, mais il est important de se rappeler qu'un projet de loi comme celui-ci ne pourrait jamais être déposé dans un pays qui ne croit pas à l'égalité. L'objectif de cette mesure législative est de veiller à ce que tout le monde soit traité sur le même pied et que les titulaires d'une charge publique n'obtiennent pas de faveurs spéciales en raison du poste qu'ils occupent. Cela permet d'accroître la confiance que nous avons en l'intégrité du gouvernement.

    L'efficacité de cette mesure législative dépendra de la personne qui sera nommée au titre de commissaire indépendant à l'éthique. J'aurais préféré que le commissaire soit choisi par consensus entre tous les partis, mais c'est là une lacune mineure du projet de loi. Ce projet de loi devrait être adopté, et je pense qu'à l'avenir, le consensus prévaudra. Quant à savoir qui pourrait faire un bon commissaire à l'éthique, ce qui se passe dans les provinces nous indique que des juges à la retraite font souvent d'excellents candidats ou candidates.

    En ce qui a trait à l'information, le rôle que joue le commissaire est absolument essentiel. Je proposerais un petit changement au projet de loi: au lieu de stipuler que le commissaire «peut» rencontrer les parlementaires, on devrait préciser «doit» rencontrer les parlementaires, au moins les premières années du nouveau régime.

    Une autre réserve concerne les critiques du juge Parker dans le rapport sur l'affaire Sinclair Stevens au sujet des fiducies sans droit de regard. Un tel type de fiducie peut-il vraiment exister? Je pense qu'il faut étudier sérieusement cette question afin de s'assurer que ce régime fonctionne bien et qu'il se traduise par une augmentation de la confiance du public envers les parlementaires.

    Merci, monsieur le président.

Á  +-(1120)  

+-

    Le président: Monsieur Greene, merci beaucoup.

    Pour ajouter à vos statistiques et à l'un de vos commentaires, on m'a remis copie d'un reportage de la CBC dans lequel on dit ceci: «L'ancien maire de Winnipeg, Bill Norrie, pourrait devenir le premier commissaire aux conflits d'intérêts du Manitoba. Son nom a été proposé par tous les partis politiques. Il appartient maintenant au Cabinet provincial d'approuver sa nomination.» Voilà un nom de plus ajouté à la liste dont vous avez parlé.

    J'ai maintenant le plaisir de vous présenter M. Ned Franks, de l'Université Queen's.

+-

    M. C.E.S. Franks (témoignage à titre personnel): Merci, monsieur le président.

    J'ai rédigé certaines observations qui sont beaucoup trop longues à lire, mais j'en ai remis un exemplaire au greffier de sorte qu'il pourra les distribuer à qui les veut.

    À l'instar des autres, je dois vous féliciter pour en être rendus à ce stade-ci.

+-

    Le président: Si je peux me permettre d'ajouter un commentaire, je dirais que la raison pour laquelle je ne suis pas intervenu pour obtenir un exemplaire, c'est que j'ai supposé que le texte n'avait pas été traduit. Si c'est le cas, nous allons le faire parvenir à la traduction, et les membres du comité en recevront certainement des exemplaires.

+-

    M. C.E.S. Franks: Merci.

    Permettez-moi de vous féliciter ainsi que le Parlement pour en être rendus là où vous êtes. Des projets de loi sur les conflits d'intérêts ont été déposés en 1978, 1983, 1988, 1989, 1991 et 1992. Pour diverses raisons, aucun d'entre eux n'a franchi le processus législatif et du Parlement.

    Je vais faire des observations sur trois aspects. Vous allez probablement conclure que je suis assez cynique, mais ma première observation est que je n'aime pas particulièrement l'énoncé général voulant que les parlementaires doivent remplir leurs fonctions publiques avec honnêteté et selon les normes d'éthique les plus élevées. Je n'aime pas cet énoncé parce que même si l'on est bien intentionné quand on parle de normes éthiques des plus élevées, je pense que ce sont des voeux pieux ou une prétention à l'excellence. Je sais très bien que les hommes et les femmes politiques n'ont pas toujours respecté les normes déontologiques les plus élevées, et je sais qu'ils ne le feront pas dans l'avenir non plus.

    Le véritable objectif de tous ces documents sur les conflits d'intérêts est d'établir des normes minimales portant sur les conflits d'intérêts ou les abus de pouvoir en vue d'obtenir des gains personnels. Cela est très bien, et cela doit être dit clairement, mais je vais seulement vous faire une mise en garde. Si vous insérez une déclaration de principes généraux, comme le respect de normes déontologiques les plus élevées, quiconque travaille dans les médias au Canada pourra dire que les parlementaires ne respectent pas les normes éthiques les plus élevées si l'un d'entre eux prend de l'alcool, se conduit mal, gonfle un compte de dépenses, ou quelque chose du genre, même si ces actions ne sont pas punissables, qu'il n'y a pas de conflits d'intérêts et qu'elles n'enfreignent rien d'autre. Je ne sais pas si c'est ce genre de chose qu'on veut prévenir. Il serait beaucoup plus pertinent de prévenir les conflits d'intérêts et les abus de pouvoir pour tirer des gains personnels, et j'aimerais que la déclaration générale le précise plutôt que d'exhorter à l'excellence.

    Ma deuxième observation porte sur le problème des intérêts. On sait très bien que dans le domaine de la politique, un parlementaire peut avoir beaucoup d'intérêts, même des intérêts pécuniaires, que ce soit simplement détenir des actions dans une entreprise ou encore posséder l'entreprise, être un administrateur ou que sa femme soit administratrice ou employée de la compagnie, et ainsi de suite. Quelque part dans cette zone grise, il faut tirer une ligne entre ce qui est perçu comme susceptible de provoquer un conflit d'intérêts, et ce qui ne l'est pas.

    Moi j'aimerais que l'on incorpore dans le Règlement de la Chambre une pratique qui ressemble beaucoup plus à celle des Britanniques. Lorsqu'il y a conflit d'intérêts ou apparence de conflit, le député doit déclarer à la Chambre qu'il a un intérêt dans l'affaire, par exemple, s'il est administrateur d'une entreprise, si sa femme travaille pour l'entreprise ou en est administratrice, ou s'il a déjà travaillé pour une société pétrolière et que l'on examine la question du protocole de Kyoto et ainsi de suite. Je ne pense pas qu'il y ait quoi que ce soit de répréhensible là-dedans. Tout ce que cela fait, c'est de préciser les grands principes. Le député n'a pas besoin d'aller jusqu'à refuser de participer au vote, sauf s'il y a manifestement un conflit d'intérêts majeur.

    Le troisième point que je veux soulever ici a été mentionné par le professeur Greene, et cela concerne la nomination du commissaire à l'éthique. À mon avis, le processus proposé dans l'avant-projet de loi n'est pas satisfaisant. Le commissaire à l'éthique aura sans doute une influence énorme sur les parlementaires des deux chambres et de tous les partis s'il veut faire son travail comme il faut. Le commissaire aura besoin de la confiance, du respect de tous les partis dans les deux chambres. À tout le moins, le premier ministre devrait être tenu, comme c'est le cas par exemple en vertu de la Loi pour la nomination des membres du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, de consulter les chefs des partis à la Chambre des communes avant de procéder à la nomination du commissaire à l'éthique.

    Le Sénat doit être consulté également, et je pense vraiment que cela devrait être inscrit dans le projet de loi. En général, nous avons des problèmes avec ce genre de nominations au Canada, mais pour celle-ci, qui a des répercussions directes sur tous les membres de tous les partis dans les deux chambres, il faut améliorer le processus.

    Maintenant, j'aimerais vous dresser une liste de certains enjeux en style télégraphique. Premièrement, c'est difficile de transcrire nos préoccupations dans une loi, et il s'ensuit que les tribunaux peuvent mettre leur nez dans les affaires du Parlement. Même si on prévient que la loi ne restreindra pas les droits et privilèges du Parlement, je pense que le problème demeure.

    Deuxièmement, même avec un commissaire à l'éthique, on doit admettre qu'il y a des règles et des normes de pratiques différentes dans les deux chambres, et il va falloir que cela soit clarifié d'une façon ou d'une autre.

    Troisièmement, je ne mentionnerai qu'une petite chose. Est-ce que l'expression «institution du Parlement» qui figure dans l'avant-projet de loi a véritablement une signification juridique? Je n'ai jamais vu un tel concept juridique avant.

    Quatrièmement, il y a certains types d'activités qu'une personne qui quitte son poste ne devrait pas exercer, et certaines interdictions s'appliquent déjà aux ministres. Le projet de loi n'en fait pas mention.

Á  +-(1125)  

    Je pense que je vais m'arrêter ici. Je pourrais parler pendant une heure, comme vous le comprendrez, mais je suis professeur et je dois savoir quand m'arrêter.

    Merci.

+-

    Le président: Merci beaucoup d'avoir été si bref.

    Si je peux me permettre de le répéter, nous serions très heureux de recevoir, après la réunion ou plus tard, des documents écrits, soit par voie électronique ou autrement, de l'un ou l'autre d'entre vous, et je vous remercie de résumer vos interventions de façon si succincte.

    Permettez-moi de vous expliquer, et par le fait même à mes collègues, comment nous allons procéder: nous cédons la parole aux députés de l'un ou l'autre des côtés de la Chambre, en commençant par l'opposition officielle et en poursuivant par les autres partis. Nous prenons normalement environ cinq minutes pour chaque échange.

    Soit dit en passant, je voudrais vous demander, chers collègues, si vous le pouvez, d'adresser vos questions à une personne, mais si ce n'est pas possible, dans ce cas, comme vous êtes peu nombreux, je vais vous permettre d'intervenir un peu plus longtemps, peut-être six ou sept minutes, et s'il reste du temps, nous pourrons entreprendre un deuxième tour.

    Les témoins doivent savoir que le temps de réponse est inclus dans le temps réservé aux députés. Si les questions des députés sont longues, vous aurez peu de temps pour y répondre; les questions courtes vous laissent plus de temps. Ce n'est pas très respectueux, mais je vais devoir respecter cette façon de procéder, d'accord?

    J'ai sur la liste actuellement Ken Epp, Joe Jordan, Michel Guimond, Jacques Saada, Yvon Godin et ensuite quelqu'un d'autre.

    Donc, Ken Epp.

+-

    M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Merci beaucoup.

    Je vous remercie d'être tous ici aujourd'hui.

    J'aimerais d'abord poser une question au professeur Greene. Vous avez dit que le code de déontologie devrait être assorti d'un objectif clair. J'en éprouve une certaine confusion parce que plusieurs d'entre vous ont dit que les attentes du public sont extrêmement élevées et pourtant, j'ai remarqué que la plupart des conflits qui ont été rendus publics impliquaient des ministres. Pourtant, les ministres sont traités différemment, dans leur rôle de ministre, qu'ils ne sont traités, et nous aussi, en tant que parlementaires, dans ce code de déontologie. Il me semble que nous devrions aborder le problème là où il est plutôt que d'essayer de créer un problème qui serait une fausse cible nous empêchant de régler les vrais problèmes concernant les ministres et l'utilisation de leurs pouvoirs.

    Lorsque vous avez dit que le code de déontologie devrait être assorti d'un objectif clair—c'est ce que j'ai noté ici—à quelle définition pensiez-vous?

+-

    Le président: Monsieur Greene.

+-

    M. Ian Greene: Je pense que les objectifs tels que décrits dans cet avant-projet de loi sont clairs et efficaces. Si vous comparez ces objectifs avec le code du premier ministre ou les lois provinciales, qui portent sur les ministres—pour qui les normes sont parfois plus élevées—je pense que le projet de loi devrait mentionner l'idée d'objectivité et d'impartialité, parce que les ministres ont le devoir d'appliquer la loi, et donc de l'appliquer de façon équitable et impartiale.

    Donc, je pense que les normes doivent être plus élevées pour les ministres. Personnellement, j'aimerais que ces normes soient incluses dans le projet de loi plutôt que d'établir des lignes directrices distinctes pour les ministres. Mais je pense que les principes du présent projet de loi renferment 75 p. 100 de ce qui doit être inclus pour les ministres également, c'est donc un grand pas dans la bonne direction.

    Ce que je crains, c'est qu'à tenter d'adopter un code parfait, on va peut-être en retarder l'adoption, il ne sera peut-être pas adopté. Mais à l'avenir, j'aimerais que les lignes directrices portant sur les ministres soient incluses dans ce projet de loi également.

Á  +-(1130)  

+-

    Le président: Si l'un ou l'autre d'entre vous souhaite intervenir très brièvement dans la question de quelqu'un d'autre...

    Monsieur Atkinson.

+-

    M. Michael Atkinson: Je comprends que vous puissiez craindre que les parlementaires, qui ne sont pas des titulaires officiels d'une charge publique, ne se retrouvent pas dans le genre de conflits d'intérêts qui sont établis dans le code. Mais en réalité, le code n'est pas confiné à ce contexte étroit de relations de contrepartie ou au fait de profiter de la situation que l'on associe parfois directement aux conflits d'intérêts. Le code porte bien sur la question de faire valoir des intérêts privés, le recours à l'influence—autrement dit, les abus de pouvoir et l'influence indue, dont les deux, à mon avis, sont malheureusement à la portée d'un parlementaire.

    Donc, je crois que ces règles sont tout à fait appropriées pour les parlementaires. En fait, les parlementaires ont, et doivent avoir des règles et la possibilité, non pas seulement d'avoir ces règles, mais d'engager effectivement la conversation et la discussion au sujet du comportement de leurs collègues vis-à-vis ces règles.

+-

    Le président: Monsieur Epp.

+-

    M. Ken Epp: Ma question suivante porte sur le projet de règlement des plaintes. J'ai un gros problème avec le fait que les députés à nouveau vont voir leurs plaintes réglées en public et les ministres, en privé, un peu comme cela s'est toujours fait. Les membres du Cabinet demandent des avis au commissaire. Actuellement, le titre est conseiller. S'il y a un problème, le premier ministre peut le soumettre au conseiller en éthique. Celui-ci fait ensuite rapport au premier ministre. Il me semble que le projet de soi sur les écarts de conduite ou les écarts de conduite présumés des ministres reconduit ce processus. Cela ne vous dérange pas?

+-

    M. Ian Greene: Peut-être devrais-je régler ce problème d'abord. Oui, cela me dérange. Comme je l'ai déjà dit, je pense que ce projet de loi englobe la majorité des règles qui empêcheront, comme Michael Atkinson l'a dit, les ministres de se retrouver dans des situations où ils pourraient exercer une influence indue ou obtenir des compensations abusives. Les lignes directrices à l'intention des ministres vont un petit peu plus loin, mais je pense que s'il y avait des enquêtes ou des plaintes, cette mesure législative en réglerait la plupart.

    Il va y avoir des problèmes si des plaintes ne sont pas réglées en vertu de cette mesure législative mais qui relèvent des lignes directrices. Il y aura des gens comme vous qui feront remarquer, je pense à bon droit, qu'il y a deux poids deux mesures. La plainte est réglée par le premier ministre. Le premier ministre actuel veut être responsable de ce genre de choses.

    Alors, voyons ce qui se produira dans l'avenir. Je pense qu'à l'avenir les lignes directrices seront intégrées au projet de loi. Je pense que nous aurons ce genre de problèmes.

    Je voudrais simplement ajouter une autre chose. La première province qui a eu une loi sur les problèmes de déontologie est l'Ontario en 1988. D'abord, cette loi ne devait s'appliquer qu'aux ministres et aux secrétaires parlementaires. En bout de ligne, elle a été adoptée pour s'appliquer à tous les députés en poste. Je pensais d'abord que peut-être cette loi était inutilement large, mais en dernière analyse, peut-être que le tiers ou la moitié des demandes proviennent de députés ordinaires qui ne font pas partie du Cabinet, mais qui s'intéressent aux conflits d'intérêts. Je pense que ça a été la bonne décision à prendre que de l'appliquer à tout le monde.

Á  +-(1135)  

+-

    Le président: S'il n'y a pas d'autres commentaires, nous allons céder la parole à M. Joe Jordan.

+-

    M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Merci, monsieur le président. Par votre entremise, je veux remercier les témoins d'être ici aujourd'hui.

    Je tiens simplement à souligner qu'il y a des choses qui se passent au moment même où on examine cette question d'éthique et qu'on se demande si elle devrait s'appliquer aux députés d'arrière-ban. On discute actuellement du déficit démocratique, et ces députés d'arrière-ban pourraient bien, éventuellement, obtenir plus de pouvoirs. Ça, il ne faut pas l'oublier lorsque nous examinerons la pertinence de cette mesure législative dans cinq, six, sept ans, si nous passons à l'autre question.

    Trois questions émergent de ce projet de loi, et j'aimerais très brièvement connaître votre opinion à ces sujets.

    La première question est que l'on s'écarte du rapport Milliken-Oliver en ce sens que cet avant-projet de loi n'exige pas que le conjoint divulgue ses intérêts. Est-ce que vous pouvez penser à une raison qui le justifie? Personne d'entre vous n'a fait de commentaires à ce sujet. Est-ce que c'est un problème ou si on pourrait peut-être passer à côté?

+-

    Mme Maureen Mancuso: Je pense effectivement qu'éviter cette question invite à… [Note de la rédaction: Difficultés techniques]… Par exemple, Revenu Canada ne permet pas aux contribuables de nier les actifs de leur conjoint ou conjointe ou qu'ils n'ont aucune répercussion sur leurs responsabilités fiscales. La question que va poser le public est pourquoi le Parlement devrait-il fermer les yeux sur des intérêts qui peuvent avoir une influence et qui sont détenus dans la famille? Je pense vraiment que vous prêtez flanc à la critique du public qui soupçonnera le pire. On jugera qu'il s'agit d'une régression flagrante par rapport au travail antérieur du comité, le rapport Milliken-Oliver. Je peux dire que le Canada sera alors la seule démocratie anglo-américaine qui n'exige pas la divulgation des intérêts du conjoint ou de la conjointe sous une forme ou une autre.

+-

    M. Joe Jordan: Comme nous n'avons pas beaucoup de temps, puis-je demander seulement si quelqu'un veut intervenir au sujet de la possibilité de ne pas divulguer ces intérêts.

+-

    Le président: Est-ce que quelqu'un veut faire d'autres commentaires?

+-

    M. Michael Atkinson: Aux États-Unis, cela est très clair. On ne divulgue pas les intérêts des conjointes pour préserver leur autonomie. Ce que je veux dire, c'est que tout cela découle des mouvements féministes des années 70 et 80. Les conjointes sont des personnes indépendantes qui ont des intérêts à elles, et la cause a été entendue et discutée à satiété.

    Mais actuellement, Mme Mancuso a raison; l'opinion publique accepte l'argument, mais dans le contexte particulier du type de projet de loi que vous examinez aujourd'hui, on n'en est pas encore rendu là.

+-

    M. Joe Jordan: Je vais peut-être mentionner les deux autres choses et obtenir de brefs commentaires.

    La deuxième chose, c'est que la structure de ce projet de loi nous propose un conseiller ou un commissaire à l'éthique qui joue peut-être parfois un double rôle. Lorsque les spécialistes provinciaux de l'éthique sont venus comparaître, ils ont dit que ce commissaire jouait un rôle de prêtre à environ 90 p. 100, et de policier à 10 p. 100. Donc, son rôle est surtout un rôle de consultation, mais il manie également le bâton à l'occasion: vaut mieux prévenir que guérir.

    Le lièvre qu'on a levé se présente comme suit: une personne peut être placée dans une situation où elle consulte le conseiller en éthique et divulgue toutes sortes d'informations pour obtenir des conseils. Dans des circonstances tout à fait différentes, un an ou deux plus tard, elle se retrouve à l'autre bout de la lorgnette et le même conseiller qu'elle a consulté détient maintenant des informations que la personne n'aurait jamais divulguées sachant qu'elle fait l'objet d'une enquête.

    Je n'ai peut-être pas bien expliqué, c'est le problème des deux chapeaux... Ce que je veux dire, c'est que le poste proposé devrait être confié à deux personnes qui porteraient chacune leur chapeau.

    Professeur Greene, vous avez mentionné que le conseiller en éthique doit rencontrer les 301 députés. Mais le calendrier des activités du Parlement est tel qu'il va passer tout son temps en réunion, à l'encontre de ce qu'il devrait normalement faire. Y voyez-vous un problème?

+-

    Le président: Nous allons commencer par M. Ian Greene et ensuite M. Daniel Weinstock.

+-

    M. Ian Greene: Je pense que le commissaire, compte tenu du nombre de députés et de sénateurs, devrait avoir un ou plusieurs adjoints de très haut rang qui pourraient l'aider dans ces réunions; par contre, je crois que ces rencontres sont vraiment essentielles.

    La question des deux chapeaux m'a toujours préoccupé. Dans la plupart des cas, les problèmes ne sont pas des problèmes de chapeaux, si on regarde un peu les précédents dans les provinces. Mais il peut survenir un conflit d'intérêts entre le rôle de conseiller privé d'un commissaire, son rôle éventuel d'enquêteur, comme vous l'avez signalé. Cette difficulté peut être contournée si le commissaire se fait remplacer par un autre commissaire provincial pour faire l'enquête dans un cas de conflit. On doit donc avoir une solution de rechange lorsqu'on se retrouve avec ce genre de conflit. Je ne pense pas que cela se pose très souvent.

Á  +-(1140)  

+-

    Le président: Daniel Weinstock et Maureen Mancuso.

    Je dois préciser qu'on nous a dit aussi que 3 000 nominations par le gouverneur en conseil seront assujetties à cette mesure législative.

    Daniel.

+-

    M. Daniel Weinstock: Il y a deux éléments contradictoires à considérer, et je ne sais pas encore si je saurai établir un équilibre.

    L'un d'eux va dans le sens que vous avez mentionné. Dans les relations avocat-client, si un client sait que son avocat va utiliser à d'autres fins l'information divulguée durant une consultation privée, cela aura un effet inhibiteur, et la dernière chose que l'on souhaite dans ce genre de fonction, c'est que cette inhibition altère les révélations d'une personne au commissaire.

    L'autre danger, qui va exactement dans le sens opposé au premier élément—et c'est ce que je veux dénoncer—c'est que l'on ne veut pas se retrouver dans une situation où le rôle consultatif d'un organisme responsable affirme une chose, tandis que son rôle décisionnel affirme le contraire.

    Je comprends bien votre problème, mais il y en a un autre, à savoir qu'il doit y avoir un genre de lien entre les deux fonctions, sinon vous courez le risque de...

+-

    Le président: Madame Mancuso.

+-

    Mme Maureen Mancuso: Je suis d'accord, même si je pense que le projet de loi crée un volume énorme de travail et beaucoup de paperasserie.

    Vous pourriez peut-être envisager quelqu'un qui exécuterait une fonction de type registraire et qui s'occuperait d'enregistrer les déclarations, et un conseiller à l'éthique qui donnerait les conseils, séparant ainsi les deux fonctions. Il y aurait une personne à qui on ferait ces déclarations et qui nous dirait comment remplir les formulaires, ce dont le projet de loi fait abstraction, soit dit en passant. Je pense qu'à moins de régler cela, ça laisse la porte ouverte à l'utilisation de toutes sortes de normes différentes.

    Je dirais aussi que l'exemple britannique est excellent. En réalité, cela permet aux députés de poser une question dans certaines catégories et de forcer le parlementaire à répondre par oui ou par non, et ensuite à l'autre partie de donner les véritables détails de l'intérêt qui est divulgué.

    Je pense vraiment que c'est là une lacune qu'il faut combler dans ce projet de loi.

+-

    Le président: Yvon, Michel n'est pas là, donc je vais interchanger vos tours. La parole est accordée à Yvon Godin. Ensuite, nous reviendrons au Bloc québécois.

    Si je puis me permettre de faire un commentaire, quand vous donnez vos réponses, je pense que vous devez tenir compte de la différence d'envergure et de la nature entre le niveau fédéral et le niveau provincial. Cela nous a été mentionné à quelques reprises. Ce n'est pas seulement une question d'importance, mais nous croyons qu'il y a une grande différence entre ces deux niveaux. Donc, si vous pouviez le mentionner de temps en temps...

    Yvon Godin, suivi de Jacques Saada.

[Français]

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Merci, monsieur le président.

    Tout à l'heure, monsieur Franks, vous disiez qu'on devait se limiter aux conflits d'intérêts plutôt que... [Note de la rédaction: Inaudible]... Avez-vous une idée approximative de ce qu'on fait au Royaume-Uni ou ailleurs, dans les autres pays? J'aimerais que vous élaboriez là-dessus.

[Traduction]

+-

    M. C.E.S. Franks: Je ne suis pas un spécialiste des conflits d'intérêts dans les différentes assemblées législatives. Ce qui m'a vraiment frappé dans les propositions ici, d'après ce que j'en ai compris, c'est qu'un député pourrait aller déclarer au greffier de la Chambre qu'il y a conflit d'intérêts. Les deux en discuteraient et ce serait tout.

    Je me demande si le député ne devrait pas faire une déclaration publique parce que les parlementaires sont redevables au public. Il devrait être stipulé, même si c'est une loi mineure, qu'ils peuvent toujours participer au vote sur le projet de loi.

    Je dois ajouter qu'à ce moment-là de nos discussions je constate que l'article 21 du Règlement, qui porte sur les conflits d'intérêts, n'a pas été modifié depuis 1867 et qu'il a très rarement été invoqué. Je pense que nous avons effectivement un problème ici.

    Je répète qu'à certains égards, je préfère la pratique britannique qui consiste à obliger un député, soit en comité, soit à la Chambre, à déclarer publiquement qu'il a un intérêt dans la chose en question. Je ne suis allé plus loin.

Á  +-(1145)  

[Français]

+-

    M. Yvon Godin: Je trouve qu'on commence à couper les cheveux en deux, et ce ne sont sûrement pas les miens. Si on parle de tels conflits, si on va aussi loin que ça... Moi, je voyais cela pour les ministres ou quelque chose d'assez gros.

    Prenons un exemple. Avec tout le respect que je leur dois, il y a une bonne majorité de députés à la Chambre des communes qui sont avocats. Si on doit voter sur un projet de loi qui peut influencer les avocats au Canada, est-ce que cela voudrait dire qu'il y a un conflit d'intérêts et que tous les députés à la Chambre des communes qui sont avocats ne voteraient pas?

    Je suis un ancien représentant syndical. Si on doit voter sur une loi antibriseurs de grève, je ne voterais pas parce que je me trouverais en conflit d'intérêts. Ce n'est pas un conflit d'intérêts. Un conflit d'intérêts, c'est plutôt quand on reçoit quelque chose soi-même à la faveur d'un vote. C'est quand on en profite soi-même qu'il y a un conflit d'intérêts. J'aimerais avoir plus d'explications là-dessus, parce qu'on est rendus au point où ce sont les députés qui sont touchés. La population va s'attarder aux 301 députés et pas seulement à ceux du gouvernement, qui ont le pouvoir de prendre des décisions.

+-

    M. C.E.S. Franks: Je pense qu'il y a peut-être trois niveaux de conflits. Il y a les mini-conflits, qui, je pense, ne sont pas importants. Par exemple, si on est avocat, on peut voter sur une question qui affecte l'emploi des avocats, mais si on est le PDG d'une banque ou quelque chose comme ça, je pense qu'on doit s'abstenir de voter. Il y a des choses sur lesquelles on peut s'exprimer quand il y a peut-être un conflit d'intérêts, mais on peut à la fois voter sur le sujet.

+-

    M. Yvon Godin: Si, par exemple, le PDG a donné sa démission et qu'il n'est plus PDG d'une compagnie, qu'il est devenu un citoyen ordinaire, à ce moment-là, selon vous, il ne serait plus en conflit d'intérêts parce qu'il n'aurait plus d'intérêts directs dans cette compagnie.

+-

    M. C.E.S. Franks: Non, mais s'il est complètement dans cette compagnie, je pense qu'il y a un conflit.

+-

    M. Yvon Godin: Par ailleurs, je dois vous féliciter en ce qui concerne les époux et les épouses. C'est comme fermer la porte d'en avant et ouvrir la porte d'en arrière, et laisser les gens en suspens afin de se garder une petite place. Là-dessus, je veux vous féliciter: tout le monde est unanime pour dire que

[Traduction]

Le conjoint ou la conjointe doit divulguer.

[Français]

    Là-dessus, je vous remercie.

[Traduction]

+-

    Le président: Nous avons ensuite Jacques Saada, Michel Guimond, Carolyn Parrish, Rick Borotsik et moi-même.

[Français]

+-

    M. Jacques Saada (Brossard—La Prairie, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. Merci à vous tous d'être présents ce matin.

+-

     Madame Mancuso, vous avez commencé votre présentation en parlant de la perception populaire des politiciens. Je suis bien placé, comme tous mes collègues, je présume, pour savoir que c'est effectivement vrai. Les questions que je vais poser et les commentaires que je vais faire visent à vous inviter à vous exprimer sur la possibilité qu'un tel code d'éthique augmente encore cette perception au lieu de la régler.

    Tout d'abord, si vous me le permettez, monsieur Greene, je voudrais vous dire que j'ai bien retenu votre déclaration sur la réduction des cas de scandales en éthique, mais je voudrais vous rappeler que depuis 1993, à ma connaissance, à la Chambre des communes aussi bien qu'au Sénat, il n'y a eu aucun cas de manquement à l'éthique, et on n'avait pas de code. Je me défile auprès de M. Franks parce que ça vient de détruire son approche, mais ce n'est pas grave.

    Deuxièmement, il y a plusieurs dispositions qui nous régissent sur le plan de l'éthique: le Code criminel, la Loi sur le Parlement du Canada, le Règlement de la Chambre des communes et des règlements administratifs. Donc, il existe déjà, à toutes fins pratiques, des éléments de code. Ça ne s'appelle pas un code d'éthique, mais ça se retrouve, et si on regroupe tout cela, c'est effectivement un code d'éthique. Il manque peut-être des éléments dont on pourrait discuter.

    Si on adopte un code d'éthique, est-ce qu'on n'augmente pas la perception selon laquelle il faut qu'on en ait un pour corriger des problèmes?

    Le point que je vais maintenant soulever est le plus important sur le plan de la substance. Je veux parler de l'utilisation politique potentielle des formules proposées dans ce projet. Si on peut permettre que des plaintes soient déposées en matière d'éthique par des collègues qui peuvent rester anonymes, si on peut être jugés par un tribunal de pairs, comment peut-on empêcher l'utilisation politique de ces plaintes? Ce n'est pas une situation qui se présente dans le cas des avocats, où il y a un barreau, ou bien dans le cas des ingénieurs ou des notaires. Nous, nous sommes en politique. Comment peut-on empêcher l'utilisation politique de ce processus?

Á  +-(1150)  

[Traduction]

+-

    Le président: Madame Mancuso.

+-

    Mme Maureen Mancuso: À propos de votre première question, à savoir si un code n'empirerait pas les choses plutôt que de les améliorer, d'après notre recherche—et nous avons consulté beaucoup de Canadiens et un grand nombre d'hommes et de femmes politiques et de journalistes du milieu à la fin des années 1990 pour connaître leurs opinions—et on nous a dit qu'un code aidait effectivement à rendre les règles publiques, et ces gens-là voulaient un genre de manuel ou de guide qui leur permettrait de faire leur évaluation. Actuellement, ils n'en ont pas. À mon avis, vous auriez intérêt à établir les règles avant qu'ils ne le fassent.

+-

    Mr. Jacques Saada: Pouvez-vous me préciser quelles règles?

+-

    Mme Maureen Mancuso: En ce qui a trait à la réforme éventuelle, il y en a deux que votre comité pourrait envisager actuellement. Premièrement, créer une commission de déontologie qui soit indépendante et chargée de faire enquête sur les plaintes du public. Vous remarquerez que le public est absent de vos délibérations. C'était dans le projet de loi initial, mais il en a été évincé. Soixante et un pour cent des membres du public ont dit que cela réduirait beaucoup la corruption; 43 p. 100 des politiciens et politiciennes ont dit que cela réduirait beaucoup la corruption et 52 p. 100 des journalistes interviewés ont abondé dans le même sens.

    L'autre chose très intéressante, qui porte sur la divulgation, est qu'il faudrait obliger tous les politiciens et politiciennes à révéler publiquement leurs déclarations de revenus. Je ne suis pas d'accord, mais c'était dans le sondage; 48 p. 100 des membres du public, 15 p. 100 des politiciens et politiciennes et 32 p. 100 des journalistes étaient très en faveur d'une telle mesure.

    Nous avons donc sondé ces personnes sur un certain nombre de réformes. Les suggestions étaient intéressantes. J'ai un exemple de ce sondage que je vais laisser au comité et que vous pourrez examiner plus en détail.

+-

    Le président: Nous vous en remercions.

    Je cède maintenant la parole à Daniel Weinstock, et ensuite à M. Franks, je pense.

+-

    Mr. Jacques Saada: Cela réduira la corruption de zéro à moins zéro, n'est-ce pas?

    Des voix: Oh, oh!

Á  +-(1155)  

[Français]

+-

    M. Daniel Weinstock: Je veux tout simplement dire qu'il faut qu'on soit bien conscient des raisons pour lesquelles vous voulez qu'il y ait un code d'éthique. Disons que ce n'est que pour des questions de window dressing.

    On pense qu'il y a de réels problèmes auxquels on doit s'attaquer, et la question de savoir l'impact que cela va avoir sur l'opinion publique est en quelque sorte secondaire.

    Ma collègue de gauche pourra peut-être me dire que je me trompe complètement, mais je pense que s'il y a dans le public, de manière générale, une opinion un peu négative des politiciens, c'est pour des raisons qui dépassent beaucoup les problèmes qui sont touchés dans ce paquet. Le public a l'impression que ce qui ce passe à la Chambre des communes relève plus du théâtre que du réel débat de fond et qu'il y a des limites telles à ce que peuvent dire les politiciens que rien de réel ne peut être débattu.

    Je crois qu'il y a des perceptions qui sont nées dans le public d'un ensemble de causes qui débordent de loin le cadre de ce projet. Il faut bien être conscient de ça. Je crois que cet ensemble de causes plus vaste va faire que les conflits d'intérêts et les problèmes de corruption vont être exacerbés dans la conscience publique et que si ces autres questions étaient également traitées, il y aurait peut-être une fringale moins grande de la part des médias et du public pour tous les petits... Je crois qu'il faut bien être conscient de cela. Il y a peut-être un écart important entre ce que le projet tel qu'il est présentement libellé peut faire et ce que le public voudrait idéalement de ses politiciens dans une démocratie.

[Traduction]

+-

    Le président: Ned Franks.

+-

    M. C.E.S. Franks: Un bref commentaire. Si l'on croit que les attentes irréalistes sont un problème, et je le pense, alors on ne devrait pas les enchâsser ni dans la loi ni dans le Règlement de la Chambre. C'est ce qui m'énerve lorsqu'on parle des normes éthiques les plus élevées.

    Nous devons considérer ici un niveau acceptable de normes, pas les plus élevées. Je pense qu'il serait tout à fait irréaliste de demander à des professeurs de respecter les normes d'éthique les plus élevées, et je ne demanderais pas à des politiciens et politiciennes ce que je ne demanderais pas à des professeurs.

[Français]

+-

    M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Merci, monsieur le président.

    J'ai deux questions, que je vais vous poser en rafale pour que vous ayez le temps d'y répondre.

    Je dois vous avouer que je n'ai pas encore une opinion claire et définitive sur les divulgations des conjoints des personnes à charge. Vous semblez tous être du même avis à ce sujet, mais j'aimerais savoir si vous avez envisagé aussi la possibilité que les conjoints des députés ne posent pas leur candidature à un poste électif. Ils ou elles—cette chambre compte pour le moment davantage d'hommes députés et nous sommes encore loin de la parité ou du 52 p. 100 de députées qui serait représentatif de la composition de la population—collaborent avec leur conjoint ou leur conjointe député, j'en conviens. Est-ce que le fait de forcer les conjoints et conjointes à la divulgation ne remet pas en question leur indépendance? Est-ce que ça ne les assujettit pas, d'une certaine façon? C'est ma première question.

    J'ai déjà posé ma deuxième question au ministre Manley, et il a trouvé qu'elle méritait réflexion. Il devrait éventuellement revenir sur la question, peut-être avec un amendement ou autre chose du genre.

    Je veux maintenant aborder la question des cadeaux. Je ne sais pas si vous avez consulté les «bleus» des réunions antérieures du comité. En résumé, disons qu'en droit civil—c'est le régime qui prévaut au Québec—et particulièrement en ce qui a trait à la théorie générale des biens, il existe plusieurs catégories de biens, par exemple les biens meubles, les biens immeubles et les biens attachés à perpétuelle demeure, mais on parle ici de biens pouvant être qualifiés de consomptibles ou de non consomptibles. Je suis pleinement conscient du fait que j'aborde ici des considérations très précises qui comportent des nuances fines.

    Si on parle de cadeaux, on peut dire qu'un téléviseur, par exemple, est un bien non consomptible. Il est possible que certains téléviseurs, qui ont vu le jour en même temps que la télévision, il y a 50 ans, soient encore en état de marche. C'est donc un objet qui ne disparaît pas après usage.

    Mais que fait-on des billets de hockey et de base-ball, et des parties de golf? Si nous sommes invités par une compagnie ou un entrepreneur quelconque à une partie de hockey, une fois la partie «consommée», soit après les trois périodes réglementaires, s'il n'y a pas eu de temps supplémentaire, le billet est utilisé et il n'en reste plus rien. Vous comprenez la nuance qui existe entre cette situation et celle où on reçoit un téléviseur.

    Vous, qui êtes universitaires et qui avez sûrement réfléchi à ces questions, êtes-vous d'avis que, toutes catégories confondues, les dons de ces cadeaux doivent être divulgués?

[Traduction]

+-

    Le président: Michael Atkinson est le suivant, et ensuite M. Ian Greene.

+-

    M. Michael Atkinson: À propos de la seconde question, on oublie qu'une certaine gêne, un sens de l'obligation résident peut-être seulement dans l'esprit de la personne. La loi américaine—et je pense qu'elle nous renseigne ici—a contribué à nous empêcher de penser que nous devions absolument distribuer des billets de hockey. Qui sait? Ce que les Américains ont plutôt fait—et ce que nous prévoyons raisonnablement faire ici—c'est de créer une mesure préventive, une façon de vous empêcher de vous retrouver dans une position dans laquelle nous devons déterminer votre état d'esprit.

    À mon avis, la distinction est moins importante que l'intention derrière le geste. Ces règles visent à nous empêcher d'avoir à poser cette question en imposant un ticket modérateur de 250 $.

  +-(1200)  

+-

    Le président: Monsieur Ian Greene.

+-

    M. Ian Greene: Je pense également que bon nombre de demandes d'enquêtes adressées aux commissaires à l'éthique dans les provinces concernent ce genre de questions, et que ces commissaires représentent une source de conseil. Il est très important que l'on sache que les représentants élus et les parlementaires qui ne sont pas élus n'acceptent pas de faveurs spéciales, sinon ils perdraient notre respect.

    Donc, je pense que ce projet de loi réglera nombre de ces problèmes.

    Et si vous consultez les rapports annuels du commissaire à l'intégrité de l'Ontario, vous verrez les nombreuses questions semblables et des réponses appropriées. Je pense que cela sera très utile.

    Ce genre de règles encouragera plus de personnes qualifiées à se présenter en politique. Je pense que ces règles ne décourageront personne de se présenter en politique. Actuellement, certaines personnes ne veulent pas s'impliquer en politique parce qu'elles ne veulent pas être assimilées aux indésirables qui siègent au Parlement. Je ne pense pas que ce soit le cas, mais elles n'en pensent pas moins. Je crois que les nouvelles règles inciteront plus de gens à se présenter en politique.

+-

    Le président: Est-ce que quelqu'un veut faire d'autres commentaires sur la question des conjoints? Non? On en a eu assez?

+-

    M. Ian Greene: Dans toutes les affaires qui ressemblent à celle de Sinclair Stevens, il est bon de laisser les conjoints de côté.

+-

    Le président: C'est maintenant au tour de Carolyn Parrish.

    Je crois qu'on vous a remis un feuille qu'utilise Mme Parrish lorsqu'elle pose ses questions.

+-

    Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.): J'aimerais d'abord faire quelques commentaires.

    D'après tous les sondages commentés, ce que j'ai cru comprendre, c'est que de 6 à 8 p. 100 des membres du public suivent véritablement la politique de proche. On peut supposer que les médias et les professeurs d'université figurent parmi les plus influents dans ces 6 à 8 p. 100. J'ai eu deux enfants qui ont fréquenté l'université, et eux avaient deux proches qui ont fait la même chose, ces quatre personnes avec qui j'ai un contact intime, deux à l'Université York et deux à l'Université de Toronto...

  +-(1205)  

+-

    Le président: Un instant, madame Parrish. Pourriez-vous décrire la fiche d'information de façon plus précise?

+-

    Mme Carolyn Parrish: C'est une fiche d'information qui a été distribuée. Elle contient tous les règlements, tous les aspects du Code criminel et toutes les questions qui touchent les conflits d'intérêts qui orientent nos travaux depuis le milieu des années 1800, comme on me l'a précisé.

    La raison qui m'a incitée à distribuer cette fiche est que cela me fâche toujours d'entendre les gens parler de nous, d'entendre dire que presque tous les parlementaires sont honnêtes mais que le public est contre les parlementaires.

    Je vais revenir au point que j'ai soulevé, c'est-à-dire que 6 à 8 p. 100 des gens au sein de la population canadienne suivent la politique, donc vous exercez vraiment une influence. Ces quatre enfants dont j'ai parlé refusaient de dire à leurs professeurs de science politique que j'étais députée. Ils ne voulaient pas non plus m'inviter à participer à leurs travaux parce qu'ils disaient que leurs professeurs prétendaient que nous ne valions rien. Ils prétendaient que tous les hommes et toutes les femmes politiques sont des personnes difficiles, méchantes, malhonnêtes, etc. Donc, mes quatre enfants avaient honte de moi à cause de quelques personnes à l'Université de Toronto et à l'Université York.

    Je tiens à vous dire, d'abord, que nous sommes assujettis à des règles et des règlements, même s'ils sont vieux. Et parfois, cela ne nuit pas d'avoir de vieux règlements. Deuxièmement, je pense que tout le monde vient ici animé de très bonnes intentions et nous voulons tous être réélus, et personne ne veut être réduit à deux députés à la Chambre à cause des incidents qui sont survenus au pauvre M. Stevens. Nous sommes régis par les scrutins et par le désir d'être réélu.

    Voilà pour ma petite intervention. Maintenant, j'aimerais poser quelques questions.

    Premièrement, nous avons un système ici, et vous avez donné le système américain en exemple. Aux États-Unis, par exemple, 45 des 50 États accueillent de grosses usines Lockheed Martin. Donc, lorsque ces gens déclarent un conflit d'intérêts parce qu'ils ne travaillent pas pour Lockeed Martin, 45 des 50 États comptent d'importantes populations qui travaillent pour Lockheed Martin. Donc dans quelle mesure ces gens-là peuvent-ils être indépendants, et comment peuvent-ils déclarer un conflit d'intérêts?

    Ma deuxième question est la suivante. Nous avons ici un système de parti, les gens votent en fonction d'un programme et nous avons la solidarité du parti. Nous ne votons pas en tant qu'indépendants comme ils le font aux États-Unis. Et nos lois ne sont pas toutes constituées de projets de loi et d'initiatives parlementaires; elles sont issues d'un système de parti. Le fait qu'un membre du Parti libéral piétine à la Chambre des communes et s'humilie en disant: «J'ai un conflit d'intérêts», ça ne va pas changer la façon dont le vote va passer à la Chambre, avec un gouvernement majoritaire. Et cette personne peut exercer beaucoup plus d'influence au caucus et dans les comités que peut en avoir son vote à la Chambre des communes. J'aimerais que vous abordiez cette question.

    J'ai siégé au comité Milliken-Oliver, et à la fin, le projet de loi n'a pas été adopté parce que le consensus général—et ce n'était pas le nôtre, mais bien celui des témoins—était que l'on était en train d'établir des règles de conduite en faveur des escrocs. Si vous avez un système comme celui que nous avons actuellement qui est, je dois l'admettre, un peu plus lâche, il est assez facile d'attraper les gens qui se comportent mal. Si on établit des règles très strictes, on prend les génies qui sont malhonnêtes, et on leur montre comment éviter de se faire prendre à tout prix. C'était une des préoccupations de ce comité. Et je pense que vous étiez témoin parce qu'il me semble vous avoir déjà vu.

    Ça me fâche vraiment que des gens qui influencent le public, et surtout les jeunes, arrivent avec cette attitude que vous avez tous, à savoir: «Le public ne vous fait pas confiance, vous êtes des escrocs, et nous sommes venus vous aider.»

+-

    M. C.E.S. Franks: D'abord, madame Parrish, j'aimerais vous dire qu'il est dommage que vous n'ayez pas envoyé vos enfants à l'Université Queen's parce qu'ils m'auraient eu comme professeur. Je me souviens que vous êtes déjà venue il y a quelques années faire un exposé à mes étudiants et qu'ils avaient beaucoup d'admiration pour vous.

+-+-

    Mme Carolyn Parrish: Vous ne leur avez pas dit que j'étais malhonnête, n'est-ce pas?

+-

    M. C.E.S. Franks: Non, mais je ne vous connais pas.

+-

    Des voix: Oh, oh.

+-

    M. C.E.S. Franks: Ce que je dis à mes étudiants, c'est que les hommes et les femmes politiques font un travail très difficile, et qu'on ne peut pas s'attendre à les aimer. C'est pourquoi, par exemple, je doute de ces normes d'éthique les plus élevées parce que les normes d'éthique sont ce que les philosophes appelleraient—pardonnez-moi, Daniel—essentiellement des concepts contestables. Ces normes représentent des choses différentes pour des personnes différentes, et mes normes d'éthique ne sont peut-être pas les vôtres, et c'est ça qui m'inquiète.

    L'autre chose que je veux mentionner, c'est le conflit d'intérêts. Il y a une grande différence entre avoir un intérêt et un conflit d'intérêts. Ce qui me préoccupe, c'est quand quelqu'un avoue avoir un intérêt dans des choses insignifiantes, comme posséder des actions d'une entreprise ou être administrateur d'une très petite entreprise dans un grand secteur touché par un projet de loi d'intérêt public. Je pense que le public est suffisamment intelligent pour dire que ce n'est pas un conflit mais que la personne est honnête en le disant.

    Vous êtes membre d'une profession, si je me souviens bien, et je suis sûr qu'il y a un projet de loi...

+-

    Mme Carolyn Parrish: Je façonnais des opinions.

+-

    M. C.E.S. Franks: Eh bien, vous pourriez avouer un intérêt s'il s'agissait d'un projet de loi.

    Derrière tout cela, je ne pense pas que l'on doive jamais se reprocher d'avoir un intérêt. Comme je l'ai dit dans mes commentaires plus détaillés, l'intérêt au sens juridique est un élément clé de la politique. Peut-être que l'on devrait avoir davantage confiance aux hommes et aux femmes politiques lorsqu'ils agissent en fonction d'un intérêt que lorsqu'ils agissent en fonction d'idéaux. Au moins, on sait alors ce qui les motive et on sait qu'ils assument les conséquences de leurs gestes. Il n'y a rien de mal à avoir un intérêt, c'est un ingrédient important et essentiel de la politique.

    La véritable question est d'établir une distinction entre le fait d'avoir un intérêt, d'avoir un intérêt caché, de l'avoir divulgué et de l'avoir là où vos intérêts personnels entrent en conflit avec votre devoir de politicien. Je pense que nous devons faire ces distinctions. Je crois qu'à cet égard le projet de loi fait un assez bon travail dans l'ensemble.

+-

    Mme Carolyn Parrish: En quoi cela touche-t-il le vote selon le système de parti que nous avons ici? Quelqu'un pourrait-il en parler?

+-

    Le président: Nous avons un problème, parce que les autres vont répliquer, madame Parrish, et nous manquons de temps.

    Daniel—et nous allons y revenir si nécessaire—et ensuite Mme Mancuso.

+-

    M. Daniel Weinstock: Je ne sais pas si je serai capable de parler de tout ce que vous avez mentionné. En général, je suis tout à fait d'accord avec ce que vous dites, et je pense que l'un des principaux problèmes en ce qui concerne les perceptions du public, si vous me permettez de défendre mon groupe en quelque sorte, ce n'est pas tellement nous, mais une mauvaise compréhension, de la part du public, du fonctionnement du système démocratique.

    Je vais revenir à ce qu'on a mentionné ici il y a à peine une seconde. Le système repose sur la contestation, sur le conflit, sur une manière très rigoureuse et parfois conflictuelle de présenter les opinions et qu'elles soient contestées. Franchement, cela ne favorise pas nécessairement le plus amical, le plus sympathique comportement. Je suis convaincu que si le public est mécontent des hommes et des femmes politiques, c'est en partie parce que le public ne comprend pas le système.

    C'est la même chose avec les avocats. Pourquoi les avocats et les hommes et les femmes politiques sont-ils toujours au bas de la liste dans les sondages portant sur la confiance accordée à telle ou telle catégorie? Je ne sais pas à quel rang on se situe, au fait, les professeurs d'université, mais pourquoi les avocats et les hommes et les femmes politiques sont-ils toujours au bas de l'échelle? Je pense que c'est plus qu'une coïncidence que ces gens-là représentent les deux institutions centrales de notre société qui reposent sur le conflit institutionnalisé, la guerre institutionnalisée.

    Ce que j'ai dit dans mes brèves remarques, c'est qu'il faut informer davantage le public à ce sujet parce que, bien honnêtement, il y a une profonde incompréhension.

    Je tiens à répéter l'une des choses que vous...

  +-(1210)  

+-

    Le président: Il faut que ce soit très rapide, monsieur Weinstock.

+-

    M. Daniel Weinstock: Oui.

    Tout le monde en a contre tous les codes de déontologie, qu'ils s'appliquent aux hommes et aux femmes politiques ou à une autre profession, parce que ce que vous faites essentiellement, c'est de donner un mode d'emploi aux tricheurs. Ce que vous êtes en train de faire, c'est de dire voici les règles et voici ce que vous devez faire pour les contourner.

    Alors, soyons très clairs au sujet des limites d'un code de déontologie. On ne pourra pas empêcher les gens qui veulent obtenir de l'influence ou se méconduire de le faire. On ne pourra tout simplement pas. Le code n'y réussira pas.

+-

    Le président: Merci.

    Si quelqu'un voulait faire des commentaires sur ce sujet, sur ce système de parti et de caucus dont a parlé Mme Parrish, je l'apprécierais.

    Madame Mancuso.

+-

    Mme Maureen Mancuso: Je m'apprêtais à reprendre le dernier point qu'a soulevé M. Weinstock et votre question.

    Premièrement, je donne un cours sur le Parlement et les assemblées législatives et je ne dis jamais à mes étudiants que les parlementaires sont des escrocs. Je crois que tout notre travail, et même les résultats des sondages auprès du public, ont, dans certains domaines, renforcé l'idée que les gens ont effectivement un seuil de respect et de soutien à l'égard de leurs parlementaires.

    Là encore, les médias jouent un rôle, parce que l'on n'entend pas souvent parler des bienfaits de nos parlementaires; mais seulement des écarts. Je pense qu'une partie de la solution est de faire passer le message qu'il se fait également de bonnes choses.

    En ce qui concerne votre commentaire précis au sujet des personnes qui ne font pas confiance aux hommes et aux femmes politiques parce qu'elles ne comprennent pas ce qu'est la politique, dans notre étude, 25 p. 100 se sont dits fortement d'accord avec cet énoncé et 43 p. 100 de plus ont dit être quelque peu d'accord. Donc je pense qu'il y a quelque chose à faire pour corriger la façon dont les gens conçoivent le fonctionnement du processus. Pour beaucoup d'entre eux, c'est un processus très mystérieux.

+-

    Le président: La parole est maintenant à Rick Borotsik, suivi du président, de Ken Epp, Tony Tirabassi et Yvon Godin.

+-

    M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le président, moi je vois les choses un petit peu différemment de Mme Parrish. J'aime les règles. J'aime avoir un code de déontologie qui repose sur des règles. C'est comme toute autre chose. On peut très bien le voir comme un mode d'emploi pour les gens malhonnêtes, mais c'est comme un cadenas sur votre porte: ça empêche les gens honnêtes d'entrer, mais les voleurs vont entrer de toute façon. À tout le moins ainsi, avec un code de déontologie bien précis, nous pourrons donner l'impression de respecter un code. Donc je suis en faveur de ce code.

    Une autre des questions que M. Franks a abordées, je crois, et que l'autre panel n'a pas élaborée, c'est la nomination du commissaire. Les règles étant établies, elles doivent être appliquées et le commissaire doit être nommé. Nous avons déjà eu d'autres commissaires ici, au fait, d'autres provinces, qui ont dit que la nomination doit être faite à l'unanimité des partis, comme cela vient tout juste d'être précisé au Manitoba.

    Monsieur Franks, vous avez dit que la personne doit avoir la confiance de tous les députés. Pourriez-vous donner plus de détails à ce sujet? Peut-être que d'autres aimeraient aussi en parler. L'une des pierres angulaires, je crois, pour que tout ce processus fonctionne, c'est la confiance que l'on a dans le commissaire.

+-

    M. C.E.S. Franks: J'estime qu'on peut faire une distinction, disons, entre la nomination de chefs de sociétés d'État qui s'occupent d'activités gouvernementales, et celle d'un commissaire à l'éthique pour tout le Parlement, dont la responsabilité couvre les députés de tous les partis et en qui tous les partis et tous les députés doivent avoir confiance.

    C'est ce qui s'est produit, comme je l'ai dit dans mes observations, avec le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, qui agit à titre de mandataire du Parlement lorsqu'il s'agit d'information secrète. La plupart des parlementaires préfèrent ne pas s'en mêler, parce que cela peut être assez gênant. Ce qui se passe alors, c'est que le premier ministre ou le gouvernement, pour faire les nominations, c'est-à-dire des nominations par décret, consulte les chefs de tous les partis au Parlement. Il s'ensuit que le comité est constitué de membres variés.

+-

    M. Rick Borotsik: Êtes-vous en train de dire que la nomination devrait se faire après consultation avec les chefs de parti ou les députés du Parlement? Dans certaines provinces, les députés de l'Assemblée législative doivent voter à 66 p. 100 ou aux deux tiers pour approuver la nomination de cette personne.

  +-(1215)  

+-

    M. C.E.S. Franks: Je ne vais pas répondre à votre question parce que je n'ai pas réfléchi à toutes ses ramifications.

+-

    M. Rick Borotsik: S'il vous plaît, répondez-moi.

+-

    M. C.E.S. Franks: Il faut procéder de façon à ce que les députés soient satisfaits.

+-

    M. Rick Borotsik: Est-ce que quelqu'un d'autre a un commentaire là-dessus?

    Le président: Adressez-vous à la présidence, s'il vous plaît.

    M. Rick Borotsik: Monsieur le président, absolument, je m'adresse au panel par votre entremise.

+-

    M. Ian Greene: Une autre façon de procéder pourrait être que le premier ministre consulterait les chefs de tous les partis d'opposition. Mais je pense qu'il doit y avoir effectivement consensus et respect à l'égard de la personne qui est nommée. Cela va être très important.

+-

    M. C.E.S. Franks: Peut-être que chaque parti devrait établir ses propres règles à cet égard.

    Je dois ajouter que le Sénat aussi doit être consulté. Nous ne pouvons pas prétendre que cette question relève uniquement de la Chambre des communes.

+-

    M. Rick Borotsik: Mme Parrish a parlé des professeurs d'université. Je vais aborder l'autre moitié de l'équation, c'est-à-dire les médias.

    Certes, les médias ont un rôle à jouer dans la façon dont les hommes et les femmes politiques sont perçus par le public, et l'image n'est pas très positive, malheureusement. Ma question ressemble à la balle frappée dans le champ gauche. Dans certains gouvernements, les membres de la galerie de la presse fournissent également une divulgation de leurs intérêts. Pour moi, c'est bonnet blanc, blanc bonnet, parce que ces gens-là pourraient très bien avoir un conflit d'intérêts lorsqu'ils scrutent un député, un véritable intérêt pécuniaire. À votre avis, est-ce que les médias devraient être assujettis à ce genre de règlement? Monsieur Greene?

+-

    M. Ian Greene: Je ne pense pas qu'on puisse dicter une éthique dans la politique sans que les médias en fassent autant. Je pense que les médias doivent réfléchir au sujet de la déontologie et des normes qui les régissent. Je pense qu'ils sont partie du problème. Mais je crois qu'il leur appartient de régler la question.

    À mon avis, tous les partis politiques devraient avoir leur propre code de déontologie. Cela éviterait certains des problèmes auxquels vous avez fait allusion.

    On m'a reproché d'être trop optimiste et positif au sujet des hommes et des femmes politiques, et cela me réjouit.

+-

    Le président: Daniel Weinstock.

+-

    M. Daniel Weinstock: Je crois que les médias doivent s'autoréglementer de façon beaucoup plus rigoureuse que ce n'est le cas maintenant.

    Il y a un effet de rétroaction entre la perception qu'a le public des hommes et des femmes politiques, l'image que ces derniers renvoient et ce que diffusent les médias pour faire mousser les ventes. Cela nous ramène à la discussion que nous avions ici, c'est comme le hockey. Pardonnez-moi l'analogie. Si vous ne comprenez pas vraiment toutes les subtilités du hockey... J'ai vécu aux États-Unis où tout ce que les gens voulaient voir, c'étaient des batailles, et un match gagné deux à un sans une bataille n'était pas un bon match. Je pense que cela est semblable, si vous suivez l'analogie, à ce qui se passe en politique. Si vous ne comprenez pas vraiment les subtilités de ce qui se passe et pourquoi les choses sont faites de certaines façons, ce que vous voudrez voir dans le journal le matin ou à la télévision à votre réveil, ce sont des scandales.

    Donc, je pense que nous devons aborder toute cette constellation de choses: la façon dont les hommes et les femmes politiques présentent leurs travaux au public, et la façon dont c'est présenté par les médias qui viendra changer les attentes du public.

+-

    Le président: Rick Borotsik.

    M. Rick Borotsik: Est-ce que j'ai encore du temps?

    Le président: Oui, certainement.

+-

    M. Rick Borotsik: Là encore, monsieur Franks, vous semblez ne pas être d'accord sur le fait que nous, hommes et femmes politiques, devrions respecter les normes d'éthique les plus élevées. Vous avez dit qu'il est très difficile de respecter de telles normes. Je ne suis pas d'accord avec vous dans une certaine mesure.

    Nous sommes 301 députés, incluant beaucoup de professeurs. Vous avez dit que vous n'exigiez pas les mêmes normes pour les professeurs. Je crois que lorsque vous entrez en politique, en fait, vous devez être au-dessus de tout soupçon.

    Est-ce que vous proposez que l'on élimine le préambule et que l'on dise simplement que nous devrions être des députés médiocres et des membres médiocres de notre société?

+-

    M. C.E.S. Franks: J'ai une objection personnelle à des voeux pieux comme ceux-ci. Je suis la politique depuis trop longtemps. Je sais que les hommes et les femmes politiques souffrent du péché originel comme nous tous et omettent souvent de respecter les normes d'éthique les plus élevées. Je ne pense pas qu'il faille en faire une déclaration. Je trouve que très peu de personnes s'engagent en politique sans y aller à fond. J'ai le plus grand respect pour ces gens-là. Souvent, il est préférable d'omettre les déclarations, en partie parce que, comme je le dis, les normes éthiques sont tellement contestables.

+-

    Mme Maureen Mancuso: Oui. Je pense que pour avoir un code, il doit y avoir un élément d'aspiration. C'est tout ce que ça prend. Un préambule qui renferme une certaine aspiration. Si l'aspiration la plus noble n'est pas la norme d'éthique la plus élevée, je ne sais pas ce que c'est.

    Je pense cependant, pour revenir à la question des médias, que Westminster est un bon exemple où le Parlement a effectivement demandé aux membres de la galerie de la presse de déclarer leurs intérêts tout comme aux attachés de recherche parlementaires. Toutes les déclarations ont été faites, mises à jour, classées et prises en charge par le même greffier qui s'occupe des intérêts et des formulaires de déclaration des députés. C'est un bon exemple d'un système qui oblige en fait les journalistes à divulguer leurs intérêts.

  +-(1220)  

+-

    Le président: Veuillez être très bref parce que tout le monde veut intervenir.

    Michael Atkinson, Daniel Weinstock et ensuite Ian Greene.

    Michael.

+-

    M. Michael Atkinson: En 1996, lorsque nous avons fait notre sondage, nous avons posé aux membres du public et ensuite aux hommes et aux femmes politiques la même question. C'était l'énoncé suivant: «Peut-on s'attendre à ce que les députés aient des normes d'éthique plus élevées que la personne moyenne?» Fait intéressant, les hommes et les femmes politiques le réfutaient plus énergiquement que le public dans son ensemble. Ce sont les hommes et les femmes politiques, rendons à César ce qui appartient à César, qui voulaient des normes plus élevées: 75 p. 100 des politiciens préconisaient cela. Environ 55 p. 100 des membres du public ont donné la même opinion, en pensant que cela ne se produira jamais ou par souci d'équité. Pourquoi les hommes et les femmes politiques devraient-ils suivre un code de déontologie?

    Ce qui est important ici, je pense, c'est que les membres élus du Parlement ont clairement indiqué qu'ils s'attendent à avoir des normes plus élevées pour eux-mêmes.

    Le président: Monsieur Weinstock. Ensuite, la parole est à Ian Greene.

+-

    M. Daniel Weinstock: Je veux simplement insister sur une distinction. Qu'est-ce que l'on entend par des normes éthiques?

    Je crois qu'il est tout à fait correct d'inscrire dans le préambule qu'il existe des normes éthiques qui sont inhérentes aux fonctions des parlementaires. Il faudrait tout le temps rappeler les raisons pour lesquelles un parlementaire entre en politique. Ensuite, il y a ce que le public entend par normes éthiques, c'est-à-dire la plupart du temps des choses qui concernent le sexe, l'argent et l'alcool.

    Je pense que nous avons toutes les raisons de nous attendre à ce que les parlementaires respectent les normes qui sont inhérentes au rôle de parlementaire. Je crois qu'on met trop l'accent sur le dernier élément. C'est peut-être un problème. Je ne vois pas pourquoi nous devrions exiger que les parlementaires se comportent mieux que les avocats ou n'importe qui d'autre, tous sont humains.

    Le président: Ian.

+-

    M. Ian Greene: L'expression «normes éthiques les plus élevées» apparaît dans la plupart, sinon dans la totalité des codes de déontologie et des lois des provinces.

    Au départ, j'avais les mêmes craintes que le professeur Franks. En bout de ligne, je pense que c'est une bonne chose. Cela permet aux commissaires d'interpréter la loi de façon à colmater les brèches et à préserver l'intégrité du régime.

+-

    Le président: Pour l'information de mes collègues, le président, ensuite Ken Epp, Tony Tirabassi, Yvon Godin et Geoff Regan.

    Ce que j'aimerais faire, c'est de revenir à la question de niveau et à la nature du gouvernement fédéral qui est distincte de l'autre. Nous avons rencontré les commissaires des provinces.

    J'étais à Queen's Park lorsque le gouvernement libéral a proposé le projet de loi sur les conflits d'intérêts, j'étais adjoint parlementaire, comme on les appelait à cette époque, tout comme j'étais ici secrétaire parlementaire. Dans les deux cas, ma femme et moi avons trouvé très utiles la séance d'information et les explications lorsque je suis devenu adjoint parlementaire là-bas et secrétaire parlementaire ici, et c'est utile pour moi depuis en tant que député. Donc cette partie, le volet prévention dont le commissaire a parlé, je l'ai trouvée extrêmement utile.

    J'en étais également très conscient, ayant occupé les postes aux deux niveaux... Le gouvernement de l'Ontario est un très gros gouvernement, mais le gouvernement fédéral est beaucoup plus gros et beaucoup plus diversifié. On nous a dit qu'il est virtuellement impossible pour nous d'éviter les conflits d'intérêts. Par exemple, nous sommes en conflit d'intérêts maintenant. Si nous proposons cela dans le projet de loi, nous le faisons pour nous-mêmes.

    Puis-je vous donner un autre exemple des différences? Les assemblées législatives provinciales siègent beaucoup moins souvent que nous, soit dit en passant, et c'est normalement le premier ministre qui convoque l'assemblée, alors que nous avons un calendrier de rotation sur deux ans. Nous siégeons dix mois par année et presque toutes les semaines de l'année. Nous nous réunissons de neuf à dix heures par jour lorsque nous sommes ici. Nos propos sont consignés. Nos propos sont consignés en ce moment même, et c'est pourquoi nous précisons jusqu'à la moindre chose que nous voulons faire.

    Je sais que M. Franks va nous rappeler encore ses trois niveaux, mais comment éviter un conflit d'intérêts en politique? Comment expliquer aux gens que lorsque nous exprimons notre vote, nous n'avons pas de conflit d'intérêts? Mme Parrish a donné l'exemple des districts aux États-Unis, et j'ai une usine de la Société Générale Électrique dans ma circonscription mais je n'ai jamais travaillé pour cette société de ma vie et pourtant je suis en conflit dans un certain sens.

    Pourriez-vous faire des commentaires sur ces choses?

    D'abord, Michael Atkinson.

+-

    M. Michael Atkinson: Il existe une différence fondamentale entre un ministre de la Couronne et un secrétaire parlementaire ou un député. Le poste du premier comporte de nombreuses responsabilités, des responsabilités administratives, juridiques, que les députés n'ont tout simplement pas, également certaines exigences et restrictions auxquelles ne sont pas assujettis les députés.

    Donc, il ne fait aucun doute que la responsabilité des députés découle de leur rôle législatif, leur rôle de représentants, qui est de faire valoir tous ces intérêts dont vous parliez. Comme l'a déjà dit M. Franks lorsqu'il a parlé des intérêts, nous avons tous des intérêts. Vous avez intérêt à bien faire votre travail. Essentiellement, votre travail est défini en grande partie par les attentes qu'a le public à votre égard, qui s'attend aussi à ce que vous fassiez valoir ces intérêts. Que ce soit les usines dont vous avez parlé tout à l'heure ou d'autres intérêts dans votre circonscription, c'est votre devoir de bien les faire valoir.

    À mon avis, les ministres de la Couronne sont un peu restreints à cet égard, peu importe l'avis de certaines personnes au sujet de certaines responsabilités des ministres qui sont aussi députés, et qui doivent faire valoir ces intérêts, parce qu'ils ont aussi cette autre charge, si vous voulez, à assumer. C'est très important que nous fassions la distinction.

    Ce qui se passe ici en partie, c'est qu'on met tout ça ensemble, et c'est bien, mais il ne faut pas perdre de vue le fait que les lignes directrices ici ne devraient pas, et je ne crois pas que ce soit le cas, restreindre les responsabilités des députés de faire valoir les intérêts qui sont dans leur circonscription. Si tel était le cas, les lignes directrices viendraient réduire votre rôle légitime.

    Par contre, cela crée effectivement des problèmes. Pour revenir à la question de la nomination du commissaire à l'éthique, je pense que l'une des raisons pour lesquelles il en est question dans le projet de loi tient au fait que cette personne doit être responsable pour ces ministres de la Couronne et rendre des comptes au premier ministre à cet égard. Et le premier ministre, ou quiconque est responsable de faire ces suggestions, a erré en pensant que tout est prévu. Et ce n'est pas une chose déraisonnable.

    Comme mes collègues, je pense que pour maintenir un certain équilibre, ce n'est pas la bonne façon de procéder, mais on peut comprendre qu'il y a des exigences contradictoires ici. C'est ce qui se produit lorsque vous mêlez tout. La bonne nouvelle est que ce faisant, nous pouvons faire le type de distinctions que vous êtes en train de faire.

    Je ne peux faire de commentaire sur la question du niveau comme tel. Mais je suppose que vous allez devoir me persuader, monsieur Adams, que d'une façon ou d'une autre la portée de l'implication vient atténuer dans un certain sens vos responsabilités à l'égard de vos électeurs et vos responsabilités à l'égard du public différemment de ce qui se produirait au niveau provincial. Je ne sais pas exactement ce qui en est, mais peut-être qu'il me faut simplement comprendre et réfléchir un peu plus.

  +-(1225)  

+-

    Le président: Monsieur Weinstock, voudriez-vous faire un commentaire là-dessus? Dans votre exposé, vous avez aussi fait la différence entre vos interventions dans des professions—par exemple l'éthique médicale ou l'éthique juridique—et l'approche adoptée au Parlement. Ici, les gens ont des antécédents professionnels différents, ils arrivent avec leurs propres conceptions et ils doivent les adapter à leur nouvel environnement?

+-

    M. Daniel Weinstock: Oui. Je vais rappeler ce que la personne à ma droite a dit tout à l'heure. Je pense que le système parlementaire fonctionne lorsqu'il permet de canaliser et de mettre en commun des intérêts différents dans un contexte structuré et civilisé. Le système ne fonctionnerait pas si les 301 députés étaient tous des philosophes, qui discuteraient au niveau platonique des principes purs. Je pense que la démocratie parlementaire fonctionne parce qu'elle nous permet d'en arriver à de bons compromis. Cela fonctionne lorsqu'elle nous permet d'en arriver aux justes équilibres entre des intérêts contradictoires—des intérêts régionaux, professionnels, collectifs, peu importe. Donc un élément fondamental de ce fonctionnement est qu'il y a des intérêts. N'est-ce pas?

    Finalement, il faut tout simplement tirer une ligne un peu arbitraire entre mes antécédents et mes propres intérêts actuels. Où cela s'arrête-t-il? Eh bien, à ma conjointe, à mes enfants ou à mon premier cousin. À un moment donné, il faut tirer la ligne et reconnaître que je devrai décider plutôt arbitrairement dans quelle mesure l'expression légitime des intérêts, couplée à l'expression légitime des intérêts de 300 autres représentants, glissera un peu plus vers mes intérêts personnels.

    Je veux insister sur une chose. C'est ce que j'essaie de clarifier dans le document. C'est une zone grise. J'ai de la difficulté à tout mettre en noir et blanc, même si je comprends pourquoi nous voulons le faire et que la tentation est forte. Il faut être conscient des dangers de traiter quelque chose qui est essentiellement gris comme si c'était noir et blanc. Quiconque devra faire appliquer ce code devra être conscient des dangers qui existent.

  +-(1230)  

+-

    Le président: Je dois continuer, mais si je pouvais avoir des commentaires sur une autre chose, je vous serais très reconnaissant de parler de la question du niveau et de la diversité.

    Une autre chose à laquelle j'essaie de réfléchir, et que vous avez soulevée, c'est qu'il est plus facile de régler les choses au niveau provincial parce que ces choses, mais pas toutes, y sont beaucoup plus spécifiques. Mais une grande partie de notre travail est très très général. Vous comprenez? Cela concerne les motifs sous-jacents à la loi, des choses comme ça. En ce sens, il est plus difficile d'éviter ici les «conflits potentiels», pour utiliser l'expression la plus courante.

    Quoi qu'il en soit, les prochains intervenants sont Ken Epp, Tony Tirabassi et Yvon Godin.

+-

    M. Ken Epp: Avant de poser ma question, j'aimerais faire un commentaire sur ce sujet.

    Je me souviens lorsque nous rédigions le rapport Milliken-Oliver il y a cinq ans, ou peu importe depuis combien de temps, que l'un des exemples que j'avais donnés était celui d'un agriculteur qui vit dans une collectivité agricole, qui a été élu parce que les autres agriculteurs ont dit: voici la personne qui nous comprend, nous allons donc l'envoyer nous représenter. Ensuite, on présente le projet de loi sur la Commission canadienne du blé, ou quelque chose du genre, qui place cet agriculteur en conflit direct parce qu'en tant qu'agriculteur, il est directement touché par le résultat de cette loi. Pourtant, son obligation est de représenter les désirs des agriculteurs de la circonscription où il a été élu. Par conséquent, ou bien il fait son travail et se retrouve en situation de conflit, ou encore il ne fait pas son travail et il évite ainsi le conflit. C'était un véritable dilemme que nous avons discuté à l'époque.

    Avant que vous ne fassiez des commentaires à ce sujet, je veux aussi parler de toute cette question qui consiste à avoir un ensemble de règles dans le code, un commissaire, un comité chargé d'examiner le projet de loi, la loi qui sera étudiée à la Chambre et ainsi de suite. Je m'interroge sur l'utilité effective du comité. Nous vivons ici dans un milieu politique très partisan. La tentation d'attirer l'attention du public sur les lacunes d'une personne dans un autre parti est extrêmement grande. Comment pouvons-nous éviter cela? Si nous avons un comité de parlementaires, comment pouvons-nous amener ce comité, ou même le commissaire, à travailler de façon non partisane?

+-

    M. Ian Greene: J'ai reçu un appel d'un journaliste de la Saskatchewan il y a quelques années au sujet du genre de situation que vous venez de décrire. L'Assemblée législative était sur le point de voter des changements à la Saskatchewan Wheat Pool, et il était très fâché que tant de députés semblaient être en conflit. Je lui ai dit: «Non, c'est une question d'intérêt général. Ils ne sont pas en conflit.» Il était très déçu.

    Je crois que l'avant-projet de loi englobe cette question. Il y a beaucoup de questions qui sont d'intérêt général. Je pense que ce que les députés doivent faire, et ce que le commissaire à l'éthique fera, c'est de demander s'il s'agit d'une question d'intérêt général. Dans la plupart des cas, on peut facilement voir si quelqu'un est en train de s'enrichir ou d'accorder des faveurs spéciales à un ami, à un associé ou à un membre de sa famille. Mais quand ce n'est pas évident, au moins on a un commissaire indépendant à l'éthique vers lequel on peut se tourner.

    Il y a aussi l'importance de la question. Oui, il y a de nombreux conflits potentiels. Combien de conflits sont assez importants pour empêcher les gens de faire leur travail? Personne n'est parfaitement impartial, mais cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas avoir un système judiciaire impartial.

+-

    M. C.E.S. Franks: Ça touche les deux ici, mais si vous regardez le projet de loi, qui à mon avis est assez bon—ce sont de bonnes propositions—vous constatez que c'est le début d'un dialogue. Cela va prendre des années avant de déterminer quand un intérêt provoque un conflit d'intérêts, ou quand un conflit d'intérêts est assez important pour être dévoilé publiquement ou qu'un député doive s'abstenir.

    Là encore, ça va prendre du temps, parce que ces choses-là sont très générales de par leur nature et qu'elles doivent être précisées. Mais ici aussi, je vous rappelle que le Parlement compte deux chambres, et que les pratiques historiques du Sénat sont assez différentes de celles de la Chambre des communes. C'est une des choses qu'on devra régler au fur et à mesure que le projet de loi sera intégré à la pratique. Je ne peux pas vous dire si on trouvera la solution dans l'harmonie ou si chacun restera sur sa position.

    Merci.

  +-(1235)  

+-

    M. Ken Epp: En ce qui concerne le règlement des conflits, lorsqu'un rapport est publié... La façon dont les choses semblent se préciser, c'est que les plaintes ne peuvent être présentées que par un parlementaire et non par le public. J'ai remarqué qu'au moins une étude s'en préoccupe. Par contre, si on permet au public de le faire, les plaintes frivoles s'accumuleront jusqu'à paralyser le travail du commissaire.

    Lorsque vous tenez une audience, devrait-elle être publique pour rassurer le public que tout se passe dans les règles, ou si les audiences doivent être à huis clos afin de protéger la personne potentiellement innocente qui est accusée à tort? Si l'audience se tient en privé, à ce moment-là les suppositions qui se feront au sujet de ce qui se passe sont souvent pires que si l'audience était publique. Que pensez-vous de cela?

+-

    Mme Maureen Mancuso: Je pense effectivement que le public devrait être autorisé à déposer des plaintes. Je crois que vous mêlez deux problèmes. Si vous craignez de recevoir des allégations frivoles ou vexatoires, je pense que vous devez établir les procédures adéquates pour régler ce problème, par exemple des amendes rattachées au dépôt de ce genre de plaintes. Mais si on laisse le public de côté, une fois de plus, on risque de vous accuser de dresser des murs pour protéger les députés, ce qui va encore renforcer l'opinion qu'a le public sur la façon dont le Parlement fonctionne.

+-

    Le président: Tony Tirabassi.

+-

    M. Tony Tirabassi (Niagara-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier les panélistes de leur participation aux travaux de notre comité.

    Je crois que c'est M. Greene qui a parlé du commissaire à l'éthique indépendant qui a été créé dans d'autres provinces. Je crois que dans un cas, cela a réduit le nombre d'infractions pour inconduite de moitié.

    M. Ian Greene: Oh, beaucoup plus que cela.

    M. Tony Tirabassi: Si le projet de loi que nous étudions actuellement vise tant que ça à améliorer la perception qu'a le public, est-ce qu'il y a des preuves qui montrent que la perception du public s'améliore après la nomination d'un commissaire indépendant, que ce soit par une participation accrue au scrutin lors des élections, ou les conclusions d'un sondage, une plus grande participation du public?

+-

    M. Ian Greene: Après que les régimes de déontologie indépendants et les lois afférentes ont été mis en place dans de nombreuses provinces canadiennes, la confiance du public envers les politiques a doublé. Le nombre de scandales d'ordre déontologique a diminué. Donc, je pense que oui, il y a des preuves et que cela fait une différence pour la perception du public. Si les gens ont davantage confiance dans le régime politique, ils vont davantage participer à la vie politique.

+-

    M. Tony Tirabassi: C'est quand même important.

+-

    M. Ian Greene: C'est difficile à prouver en termes absolus. Je suis les sondages au sujet de la perception qu'a le public des hommes et des femmes politiques et je les compare aux scandales d'ordre déontologique signalés dans les médias. Moins il y a de scandales, plus grande est la confiance dans les hommes et les femmes politiques. Je suis convaincu que les régimes mis en place dans les provinces ont eu un rôle important à jouer dans la réduction du nombre de ces scandales.

+-

    M. Tony Tirabassi: Encore là, dans notre régime actuel, s'il y a mauvaise conduite ou allégations de comportement inapproprié de la part d'un membre du Cabinet, le premier ministre doit intervenir et le ministre doit répondre de ses actes.

    Est-ce que la présence d'un commissaire à l'éthique réduit les attaques de première ligne dans la plupart des provinces? Autrement dit, est-ce que le leader, ou le ministre, se lève et dit qu'un commissaire indépendant a rendu une décision, un commissaire totalement indépendant, est-ce qu'il vous demande pourquoi continuer de porter plainte?

+-

    M. Ian Greene: C'est juste. Là encore, dans le rapport annuel du commissaire à l'éthique de l'Ontario, on précise souvent que les députés doivent non seulement respecter les règles sur les conflits d'intérêts, comme ils le font, mais qu'ils doivent surveiller leur comportement à l'Assemblée législative car les gens les regardent à la télévision et se font des images négatives à partir de là également.

    Que les députés de l'Ontario aient pris note du conseil, je n'en sais rien. Chacun son problème. Cette mesure législative que nous étudions ne résoudra pas tous les problèmes d'éthique, mais c'est un pas dans la bonne direction.

  +-(1240)  

+-

    Le président: Yvon Godin, Geoff Regan et ensuite Rick Borotsik.

[Français]

+-

    M. Yvon Godin: On n'a pas abordé la question des dons qu'on reçoit comme candidats aux élections. Dans le cadre du code d'éthique, on parle de 250 $; or, il est possible qu'on reçoive 1 000 $ ou 2 000 $ d'une personne de notre circonscription. Tout le monde pense que puisqu'on a reçu une telle somme, on est vendu à cette personne.

    Comment l'éventuel code d'éthique traiterait-il de cette question qui touche les députés? Si le fait de recevoir un billet de hockey crée tout un scandale, alors qu'on est autorisés à recevoir 2 000 $ ou 3 000 $ pour préparer l'élection, je me demande où on tire la ligne.

[Traduction]

+-

    Le président: Ça dépend des équipes en présence.

+-

    M. Yvon Godin: Si c'est en ville, très bien. Vous allez au gala d'ouverture et c'est gratuit.

    À l'Assemblée législative, le comportement, la façon de régler ça, c'est une autre chose, n'est-ce pas?

    Je ne sais pas si je me suis bien expliqué.

+-

    Le président: Ian Greene.

+-

    M. Ian Greene: Je sais qu'en Ontario et en Colombie-Britannique les députés ont droit à certains avantages si c'est dans le cadre de leurs fonctions de circonscription. S'ils ne sont pas certains si cela pourrait constituer une faveur spéciale, ou si cela s'apparente à un devoir de représentant de comté, ils vérifient auprès du commissaire à l'éthique. Les réponses ne sont pas toujours faciles à donner.

+-

    M. Yvon Godin: Non. Je vais prendre un exemple. Un député travaille presque sept jours sur sept, à mon avis. Je pense que vous êtes tous d'accord. Vous travaillez au Parlement. C'est quelque chose que le public ignore parfois.

    De toute évidence, ce que les membres du public voient, s'ils assistent à un événement et que vous êtes à la table d'honneur, c'est à quel point vous êtes chanceux d'avoir un repas gratuit. Ils oublient que peut-être ce soir-là vous préféreriez être avec votre famille. Vous n'avez pas d'autre choix que d'être là à 19 heures pour prendre ce repas gratuit, d'une façon, parce que vous devez représenter le public.

+-

    M. Ian Greene: Ce n'est pas un conflit. Ce n'est pas un conflit d'intérêts, ça fait partie de la réalité.

+-

    M. Yvon Godin: Très bien. C'est la même chose que ce qu'un collègue me disait au sujet d'un tournoi de golf. Il y a des groupes qui organisent des tournois de golf qui aiment bien que le député fédéral, le député de l'Assemblée législative y soient. Ils aiment vous voir là.

    Le week-end dernier, j'étais avec un groupe de personnes qui rendaient hommage au travail des pompiers, des policiers et des gardes forestiers. Les gens aiment cela. Vous représentez tout le public. Ils veulent que vous y soyez.

+-

    M. Ian Greene: Par contre, si une entreprise payait votre abonnement à un club de golf et si elle risquait de tenter d'influencer votre comportement, ça, vous ne pourriez pas empêcher les critiques.

+-

    M. Yvon Godin: Vous avez raison.

+-

    Le président: On cède maintenant la parole à Geoff Regan, ensuite à Rick Borotsik et à Joe Jordan.

+-

    M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je veux d'abord parler de la question des plaintes du public. Aujourd'hui, le professeur Atkinson a dit que nous sommes l'une des rares professions dans lesquelles il y a des conflits institutionnels. Ou était-ce le professeur Greene?

  +-(1245)  

+-

    M. Michael Atkinson: Ce peut être moi ou lui.

+-

    M. Geoff Regan: Un de vous a parlé des conflits institutionnels et a dit que seuls les avocats et les hommes et les femmes politiques se retrouvent probablement dans une situation où il y a tant de conflits institutionnels. Ça m'étonne de voir que si un membre du public voulait formuler une plainte, il n'aurait qu'à s'adresser à un député adverse de la Chambre des communes qui serait enchanté de la formuler, si elle s'avérait être totalement légitime. Je suis consterné de voir que ce filtre pourrait fonctionner, peut-être pas tellement un filtre, en fait, mais quelque chose de semblable.

    Deuxièmement, en ce qui concerne l'idée que nous devrions avoir un registraire chargé de recevoir les formulaires et ainsi de suite, il me semble que ce poste supplémentaire n'est pas nécessaire parce que le commissaire à l'éthique a du personnel. Il n'est pas seul dans ce bureau. C'est un bureau avec du personnel qui peut s'occuper de recevoir la documentation, de s'assurer qu'elle est complète, sans qu'on ajoute le salaire élevé d'une personne chargée de ce travail

    Quelqu'un a dit que nous devrions changer—peut-être à la blague—le goût des médias pour les conflits, ou idéalement essayer de convaincre les médias de ne pas rechercher uniquement les scandales et les conflits. Cela nécessiterait un chambardement de comportement de grande envergure parce que les médias réagissent à l'intérêt du public pour les conflits. Ils savent que les gens veulent deux choses. Ils veulent savoir quel temps il fera et voir des conflits. Ils vont regarder votre émission de télévision ou lire votre journal si vous leur offrez ces deux choses, autrement ils ne le feront pas. Je ne sais donc pas comment vous pourriez régler ce problème.

    Au sujet de l'idée de mon collègue Rick Borotsik, à savoir que nous devrions être au-dessus de tout soupçon pour faire notre travail, je suis d'accord avec lui, mais j'ajouterais ceci: je me suis demandé dans quel type de travail on ne voudrait pas d'une personne au comportement irréprochable. Surtout dans un travail où quelqu'un exerce un pouvoir sur d'autres personnes, on s'attend aux normes d'éthique les plus élevées. Je suis certain que vous êtes d'accord là-dessus.

+-

    Le président: Madame Mancuso.

+-

    Mme Maureen Mancuso: En ce qui concerne la première question au sujet du public qui utiliserait les députés, les membres du public se sentent déjà débranchés des députés et des sénateurs, si bien que cela réduirait davantage leur capacité d'accès à ces gens-là pour trouver une solution à leurs problèmes.

    Je pense que cela ouvre aussi la porte à la politisation du processus comme on en a parlé un peu ce matin. Si vous devez trouver un député de l'opposition qui accepte de formuler votre plainte, vous courez le risque de politiser tout le processus, et j'ai entendu un certain nombre d'entre vous dire qu'il fallait éviter cela.

    En ce qui concerne le deuxième point touchant le registraire, en Grande-Bretagne, il y a un greffier de la Chambre qui est nommé pour s'occuper des formulaires. Une chose encore qui est très délicate, c'est votre réaction si les gens ne se conforment pas. Vous vous souviendrez qu'en Grande-Bretagne, Enoch Powell, la cause est bien connue, a refusé, dès le moment où on a créé le poste de registraire et obligé les gens à déclarer leurs avoirs, de remplir une déclaration et la Chambre n'est pas intervenue, notamment parce qu'Enoch Powell est un député au-dessus de tout soupçon, mais il n'a pas respecté les règles.

    Je ne sais pas ce qui se produirait ici en pareil cas. Je ne pense pas que le code précise exactement quel type de sanctions pourraient s'appliquer. Donc, si vous voulez donner l'impression que c'est un code qui a du mordant, il faudrait peut-être peaufiner un peu plus les choses pour bien préciser la portée des pénalités qui pourraient être imposées.

+-

    M. Michael Atkinson: À vrai dire, à ce sujet, pour reprendre ce qui vient d'être dit, le fait que l'on prévoie dans le code que le commissaire à l'éthique rejetterait la plainte, déterminerait qu'elle est fondée, ou déterminerait qu'elle est fondée mais qu'il n'y a aucune mesure correctrice donne au commissaire à l'éthique considérablement de latitude pour déterminer quelle devrait être la mesure correctrice.

    Je présume que le commissaire à l'éthique—même si les présomptions sont peut-être précisément ce qu'on doit étudier ici—devrait expliquer ses recommandations et en convaincre le comité. On ne sait pas beaucoup de choses quant au type de mesure correctrice qui doit être prise. Je comprends pourquoi, parce que la force de ce régime est qu'il n'est pas trop normatif, et je pense qu'on ne veut pas provoquer ce modèle d'enquête qui pourrait ensuite se multiplier et donner l'impression même que nous voulons éviter.

    Mais je vous exhorte à vous demander si vous êtes convaincus que la seule disposition ici qui donne au commissaire à l'éthique la possibilité de proposer une mesure correctrice qui est acceptée par le parlementaire ne prévoit pas que le parlementaire, comme dans le cas d'Enoch Powell, ne l'accepte pas. Qu'est-ce qui se passe alors?

    C'est un simple sujet de réflexion sur la façon dont vous allez régler le problème, pas nécessairement une chose à régler maintenant.

  +-(1250)  

+-

    Le président: Monsieur Greene.

+-

    M. Ian Greene: J'aimerais faire des commentaires sur les filtres concernant les plaintes inutiles. Je pense que les whips des partis joueraient un rôle important pour s'assurer que les plaintes ou les demandes qui sont formulées sont présentées de bonne foi. En outre, les rapports annuels des commissaires à l'éthique peuvent être très utiles pour proposer des améliorations au régime de déontologie.

    Je me souviens qu'il y a quelques années en Ontario le commissaire à l'intégrité a dit qu'il recevait trop de plaintes frivoles et que les whips devaient faire un meilleur travail. L'année suivante, il a félicité les whips pour avoir fait un meilleur travail.

    En Colombie-Britannique, où le public peut envoyer des plaintes, le commissaire à l'éthique a précisé que le système fonctionnait assez bien et que l'on ne recevait pas beaucoup de plaintes frivoles.

+-

    Le président: Rick Borotsik, ensuite Joe Jordan et je vais récapituler.

+-

    M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président.

    Nous avons parlé—et je veux simplement y revenir et entendre vos commentaires—de la déclaration du conjoint. Comme vous le savez, dans cette proposition et ce projet de loi particulier, il n'est pas question d'une telle déclaration.

    Vous avez tous dit que vous seriez en faveur de la déclaration du conjoint. Vous l'avez tous dit. Je n'ai entendu personne alléguer le contraire.

    D'après vous, si le projet de loi est adopté sans qu'il soit question de déclaration du conjoint, la situation sera-t-elle pire ou meilleure lorsqu'il y aura un conflit, et que le public aura encore l'impression que nous essayons de cacher quelque chose?

    Deuxièmement, est-ce que l'une des raisons pour lesquelles on ne propose pas de déclaration de conjoint, ce n'est pas seulement l'indépendance dont nous avons parlé, mais ce serait un facteur, selon certaines personnes—je crois que c'est peut-être le ministre qui l'a dit—qui dissuaderait les gens de se présenter à des postes de représentants élus comme parlementaires? Je ne suis pas d'accord. Pouvez-vous très rapidement dire si vous êtes d'accord ou non avec moi?

+-

    Le président: Maureen Mancuso et ensuite Ian Greene.

+-

    Mme Maureen Mancuso: Je ne suis pas d'accord.

    M. Rick Borotsik: Moi non plus.

    Mme Maureen Mancuso: Je pense que l'on pourrait notamment envisager un compromis, ce qu'a fait effectivement le Parlement britannique, à savoir la déclaration du conjoint, mais seulement dans trois catégories précises. On a demandé une déclaration du conjoint pour ce qui est de la détention d'actions, pour les dons et pour les voyages à l'étranger. Donc, on n'exige pas de déclaration pour les mêmes catégories que celles qui sont demandées au conjoint du politique. On a demandé de faire une déclaration pour un sous-ensemble de catégories, ce que vous pourriez envisager peut-être comme compromis.

+-

    Le président: Ian Greene et ensuite Daniel Weisntock.

    Je suis président du comité, Rick.

    N'y faites pas attention, chers amis.

+-

    M. Ian Greene: Je suis marié à une comptable agréée, et lorsque ma femme était vérificatrice, je devais déclarer mes investissements pour qu'elle ne soit pas en situation de conflit. Je ne vois pas de problèmes à ce que les députés doivent expliquer à leur conjoint pourquoi c'est important. Lorsque vous êtes en position de responsabilité et de privilège, cela comporte de plus grandes responsabilités. Je pense que c'est absolument important.

    Je crois que le code de déontologie du premier ministre exige effectivement que les conjoints déclarent leurs actifs, de sorte que cette disposition sera toujours là. Il faut que ce soit appliqué aussi aux députés et aux sénateurs. Nous y arriverons un jour. Je pense que c'est dangereux que de ne pas inclure une telle disposition.

+-

    Le président: Daniel.

+-

    M. Daniel Weinstock: Je vais revenir à la mise en garde que j'ai évoquée en réponse à d'autres questions. Du point de vue du public, je pense que c'est un désastre. Pour revenir à ce que nous discutions ici, cela indique en quelque sorte une grosse ligne rouge au-delà de laquelle vous pouvez tricher, et tricher légalement.

    Cela étant dit, même si vous insérez cette disposition, cela ne veut pas dire qu'une personne est... Vous savez, nous avons des conjoints et des conjointes, mais nous avons aussi des cousins et des amis. Nos vies sont compliquées et elles sont tissées de toutes sortes de réseaux différents. Je pense que c'est vraiment une question de perception du public, et il est important que le public ne pense pas que les parlementaires ont prévu une trappe par où ils peuvent s'échapper. Mais si l'on veut être très très lucide sur le fait que simplement parce que vous mettez le mot «conjoint», cela ne veut pas dire, encore une fois, que quelqu'un qui a l'intention de violer le principe du conflit d'intérêts ne va pas trouver un moyen de le faire.

+-

    Le président: Très bien, Rick.

+-

    M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Joe Jordan.

+-

    M. Joe Jordan: Merci, monsieur le président.

    J'aimerais aborder la question des plaintes contre les députés. Je crois avoir entendu des opinions contradictoires. M. Regan a brièvement expliqué pourquoi il devrait s'agir seulement de plaintes de députés contre des députés. Une des raisons, c'est qu'on peut faire intervenir le contrôle du whip.

    La deuxième question, cependant, est que l'on a aussi la possibilité d'exercer un contrôle sur la divulgation de la plainte. Les députés pourraient très bien être liés par les règles qui leur permettent de ne pas divulguer qu'ils ont formulé la plainte. Je dirais que si vous en avez jamais la chance, regardez le courrier que les députés reçoivent. Si vous pensez une seconde que les groupes d'intérêts du Canada ne pourraient envoyer 8 000 plaintes au sujet d'un député demain, vous vous leurrez. Absolument, cela pourrait se produire et se produirait.

    En ce qui a trait aux processus, et dans une vie antérieure j'ai enseigné dans un collège aussi, les élèves peuvent se plaindre contre les enseignants. C'est bien, mais vous avez aussi des protections et des processus en place.

    Dans notre monde, nous devons être très conscients du fait que la perception du public à un certain moment du cycle électoral peut être fatale pour nous, pour nos carrières. Une accusation, une fois faite, laisse des traces. Je crois qu'il serait naïf de penser que cela ne serait pas partisan ou qu'il n'y aurait pas possibilité de partisanerie.

    Je me demande ce que vous en pensez. Comment trouver un processus qui réponde aux besoins mais qui réduise au minimum les chances d'utiliser une telle manoeuvre? Redorer la réputation de quelqu'un une fois qu'il a perdu une élection, merci quand même. En réalité, c'est trop peu, trop tard.

    Ce que je demande, je pense, est où est-ce que l'on trace la ligne?

  +-(1255)  

+-

    Le président: Madame Mancuso.

+-

    Mme Maureen Mancuso: Tant aux États-Unis qu'en Grande-Bretagne, les citoyens et les groupes de défense, les gens qui défendent une cause commune, sont ceux qui portent le plus grand nombre d'accusations aux États-Unis, par exemple, contre les membres du Congrès, plus que n'importe qui d'autre. Le public a donc pleinement le droit de le faire.

    Je pense qu'il faut donner ce pouvoir au commissaire à l'éthique, ou au fonctionnaire, de sélectionner les plaintes et de déterminer...

+-

    M. Joe Jordan: Puis-je vous arrêter là? C'est bien, mais le fait que 7 000 personnes disent publiquement qu'elles ont porté plainte, qu'il y a une plainte d'éthique contre Joe Jordan un mois avant le dépôt des brefs électoraux, vous ébranle. Est-ce que vous êtes en train de dire que c'est une meilleure situation?

+-

    Mme Maureen Mancuso: Je dis que vous contrecarrez l'accusation, et cela se produit. Les autres pays...

+-

    M. Joe Jordan: Allons!

+-

    Mme Maureen Mancuso: ...semblent gérer le problème lorsqu'il y a des élections. C'est le même cycle électoral. Aux États-Unis, certains sont en élection tous les deux ans. C'est donc très bien géré dans ces pays lorsque le même genre de chose se produit, lorsque les membres du public ont le droit de faire ces plaintes. Ils ne se précipitent pas pour rendre des plaintes publiques en vue d'abattre un candidat. Ce n'est pas le cas.

+-

    Le président: Y a-t-il quelqu'un d'autre? Monsieur Jordan, ça va?

+-

    M. Joe Jordan: Très bien.

+-

    Le président: Monsieur Weinstock, s'il vous plaît.

+-

    M. Daniel Weinstock: En un sens, on abandonne l'otage à son sort. Beaucoup dépend de la culture politique dans laquelle ces mécanismes, ces outils, sont déposés. On ne peut prédire comment les choses vont fonctionner au Canada en nous basant sur la façon dont elles fonctionnent en Angleterre, parce qu'il y a des traditions, des façons de faire, des cultures politiques qui sont très différentes.

    Moi je préconiserais l'adoption d'un mécanisme qui serait déployé graduellement au fil des ans, de sorte que les gens s'habituent à penser en fonction d'un code de déontologie, que ça devienne une partie de leur... Voyez-vous ce que je veux dire? Mettre ça dans les mains du public, presque immédiatement, dans le contexte d'une culture politique qui, pour des raisons diverses, pourrait être empoisonnée par des conflits de parti pourrait être un problème. Alors que déployer ce système graduellement au fil du temps, habiliter le public à utiliser un mécanisme avec lequel il a eu au départ la chance de se familiariser, d'en voir les limites et les forces, pourrait être une meilleure façon de procéder.

+-

    M. Michael Atkinson: Daniel, je pense dans une certaine mesure que votre commentaire concernant la déclaration du conjoint et les gros cercles rouges pourrait s'appliquer facilement à cette disposition. Seuls les députés ont le droit de soulever des questions au sujet d'autres députés. L'attente, qui je pense n'est pas simplement cynique mais raisonnable, est que cela sera fortement influencé par des considérations partisanes dès le début. Cela pourrait très bien compromettre le rôle du commissaire à l'éthique, qui devra alors tenter de juger des motifs partisans cachés derrière certaines allégations que personne de nous ne veut vraiment voir de toute façon.

    Pourquoi ne pas envisager un seuil, une exigence? Si on veut faire une allégation, alors que ce soit fait distinctement des procédures courantes. Faisons-en une exigence, une assermentation, quelque chose, mettons quelque chose dans les mains du public, des lobbyistes et d'autres, qui leur donne l'impression que ce dont nous parlons ici est sérieux.

    Je comprends très bien vos préoccupations. Je comprends aussi qu'on se demande comment les choses vont se passer ici. Se baser sur ce qui s'est produit au Royaume-Uni et aux États-Unis n'est peut-être pas un guide parfait, même si je pense que ça devrait probablement nous donner une certaine assurance. Je dirais qu'il faudrait songer à mettre un obstacle, un seuil, faire en sorte qu'il soit difficile de présenter une plainte, mais pas impossible. C'est ce que vous avez ici, c'est impossible.

·  -(1300)  

+-

    Le président: Je voudrais simplement essayer de combler certaines lacunes, parce que comme vous le savez, nos propos sont consignés. Cela concerne le comité.

    Il n'y a aucun comité ailleurs au Canada, dans aucune assemblée législative, qui joue le genre de rôle direct, y compris celui d'un organisme d'enquête, comme celui qui est prévu dans les propositions du gouvernement fédéral. Par contre, il y a un comité à cette fin au Royaume-Uni.

    Que pensez-vous de notre proposition d'un comité, si vous avez une idée? Nous n'avons pas beaucoup de temps. Deuxièmement, avez-vous des suggestions pour réduire au minimum la partisanerie possible au comité.

+-

    Mme Maureen Mancuso: Je pense que l'idée de créer un comité est bonne. Ce que nous avons constaté dans notre sondage, ce qui était intéressant lorsque j'ai parlé aux politiciens, c'est qu'on a certainement mentionné—nous en avons parlé tout à l'heure—la possibilité d'une plus vaste réforme parlementaire, d'habiliter les députés d'arrière-ban, de leur permettre d'avoir davantage leur mot à dire dans les délibérations. Je pense que c'est un véhicule qui permettra aux députés de sentir une certaine sorte de responsabilité. Vraiment, je pense que c'est une bonne idée.

+-

    M. C.E.S. Franks: Votre question concerne un ou deux comités, il me semble. J'hésite à nouveau à répondre à cette question, mais il va falloir qu'elle soit clarifiée. Vous allez constater qu'il y a des règles pas mal différentes actuellement, ou disons des normes de comportement, dans les deux chambres.

    L'autre question est de savoir quelles fonctions le comité exercerait-il. Je ne pense pas que le comité devrait effectivement faire des enquêtes ou prendre des décisions officielles sur des cas particuliers. Je pense que le comité devrait être une rampe de lancement pour permettre au commissaire à l'éthique d'évaluer les choses et de poser des questions, qu'il devrait faire preuve de prudence et être interrogé. Je ne pense pas qu'il devrait aller plus loin que ça parce que, à ce moment-là, il est vraiment dangereux de se retrouver dans une partisanerie malsaine.

+-

    M. Ian Greene: L'approche du comité est une idée nouvelle, que ce soit deux comités ou un comité mixte. Je pense que cela peut être très avantageux pour le commissaire à l'éthique. La façon dont il travaillera dépendra de l'intégrité des gens qui siégeront au comité. Je pense qu'il conviendrait à tous les partis de s'assurer d'avoir des représentants au sein de ce comité qui le feront fonctionner.

+-

    M. Daniel Weinstock: Un comité peut avoir deux fonctions. L'une des choses dont nous n'avons pas parlé beaucoup, et quelque chose que j'ai essayé d'aborder dans ma présentation, est le fait que ce dont nous parlons ne repose pas sur des règles en noir et blanc, mais nage dans le gris. Un parlementaire consciencieux est une personne qui va se demander sérieusement si telle ou telle action respecte ou non la règle. Je pense qu'il n'y a pas de réponse claire.

    L'une des fonctions d'un comité est de compléter le rôle du commissaire à l'éthique. On peut essayer de ne pas avoir ce genre de mentalité de gendarme au sujet de ces choses-là. Ou bien vous faites 35 kilomètres heure dans une zone de 30, ou bien vous ne les faites pas. La règle s'arrête là. Je pense que le fait d'avoir seulement un commissaire à l'éthique encourage ce genre de mentalité, alors qu'un comité constitué de personnes différentes qui ont des points de vue différents pourrait être plus convenable à ce qui constituerait, après tout, des jugements et des zones grises.

    La deuxième fonction très différente qu'un comité pourrait exécuter concerne la préoccupation qui a été soulevée souvent au sujet de la politisation d'un code de déontologie. Comment pouvons-nous mettre en place des garanties qui empêcheront cette politisation dans la mesure du possible? On ne fera que donner plus de munitions aux fervents de la politique partisane.

    Bien honnêtement, une partie de la solution repose sur le fait d'avoir un comité constitué de membres de tous les partis, indépendamment de leur poids à la Chambre des communes, pour éviter que l'on ait ce genre de pacte de destruction mutuelle. Si quelqu'un commence à mal agir au sein du comité, cela invite les autres à le faire. Ce serait plus prudent d'avoir un comité qui compenserait les risques d'une politisation excessive.

-

    Le président: J'apprécie beaucoup ces commentaires. Comme vous le savez, normalement, nos comités sont composés en fonction d'une représentation proportionnelle des partis. Nous avons en fait un sous-comité qui fonctionne de la façon dont vous parliez, mais je comprends.

    Chers collègues, en votre nom, j'aimerais remercier Maureen Mancuso, de l'Université Guelph, Michael Atkinson de l'Université de la Saskatchewan, Ian Greene de l'Université York, Daniel Weinstock de l'Université de Montréal et Ned Franks de l'Université Queen's. Nous vous remercions, ces témoignages ont été extrêmement utiles pour nous.

    Daniel, en ce qui concerne ce comité, vous êtes conscient que tous les whips en font partie. C'est l'une des raisons pour lesquelles certaines personnes disparaissent; elles se préparent pour la période des questions. Les gens qui forment normalement ces comités en réalité siègent autour de cette table.

    Merci beaucoup, et en tant qu'ancien professeur d'université, je vous remercie tout particulièrement d'avoir respecté le temps qui vous était imparti. C'est vraiment merveilleux de votre part.

    Chers collègues, nous allons nous ajourner dans un instant, mais puis-je vous rappeler que jeudi, nous rencontrons le commissaire fédéral à l'éthique, M. Howard Wilson, après quoi nous aurons un déjeuner de travail avec le Président et le sénateur Oliver. J'exhorte tous les partis, soit dit en passant, à informer leurs membres que ce déjeuner de travail est un volet important de notre travail.

    Le comité s'ajourne jusqu'à 11 heures jeudi.