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FOPO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent des pêches et des océans


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 6 mai 2003




· 1330
V         Le président (M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.))
V         M. André Boucher (coordonnateur, Regroupement des pêcheurs professionnels du Nord de la Gaspésie)

· 1335

· 1340

· 1345
V         Le président
V         M. André Boucher

· 1350

· 1355
V         Le président
V         M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ)
V         M. André Boucher

¸ 1400
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. André Boucher
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. André Boucher
V         Le président
V         M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD)

¸ 1405
V         M. André Boucher
V         M. Peter Stoffer
V         M. André Boucher
V         M. Peter Stoffer
V         Le président
V         M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC)
V         M. André Boucher
V         M. Loyola Hearn
V         Le président

¸ 1410
V         M. Bob Wood (Nipissing, Lib.)
V         Le président
V         M. Reed Elley
V         Le président
V         M. André Boucher
V         Le président
V         M. André Boucher
V         Le président
V         M. André Boucher
V         Le président
V         M. André Boucher
V         Le président
V         M. André Boucher

¸ 1415
V         Le président
V         M. Peter Stoffer
V         M. André Boucher
V         Le président
V         M. Loyola Hearn

¸ 1420
V         Le président
V         M. André Boucher
V         M. Peter Stoffer
V         Le président
V         M. André Boucher
V         Le président
V         M. André Boucher
V         Le président

¸ 1425
V         M. Georges-Henri Hubert (vice-président et copropriétaire, Groupe de commerce international Eng.-Hubert inc.)

¸ 1435
V         Le président
V         M. Georges-Henri Hubert
V         Le président
V         M. Peter Stoffer
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Peter Stoffer
V         M. Georges-Henri Hubert
V         Le président
V         M. Loyola Hearn

¸ 1440
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         Le président
V         M. Jean-Yves Roy
V         Le président
V         M. Georges-Henri Hubert
V         Le président
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy

¸ 1445
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         M. Georges-Henri Hubert
V         M. Jean-Yves Roy
V         Le président
V         M. Georges-Henri Hubert
V         Le président
V         M. Georges-Henri Hubert
V         Le président
V         M. Georges-Henri Hubert
V         Le président
V         M. Peter Stoffer
V         M. Georges-Henri Hubert

¸ 1450
V         Le président
V         M. Georges-Henri Hubert
V         Le président
V         M. Georges-Henri Hubert
V         Le président
V         M. O'Neil Cloutier (directeur, Alliance des pêcheurs professionnels du Québec)
V         Le président
V         M. O'Neil Cloutier
V         Le président
V         M. O'Neil Cloutier
V         Le président
V         M. Peter Stoffer
V         Le président
V         M. O'Neil Cloutier
V         Le président
V         M. O'Neil Cloutier

¹ 1510

¹ 1515
V         Le président

¹ 1520
V         M. Loyola Hearn
V         M. O'Neil Cloutier

¹ 1525
V         Le président
V         M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Alliance canadienne)

¹ 1530
V         M. O'Neil Cloutier
V         Le président
V         M. Jean-Yves Roy

¹ 1535
V         M. O'Neil Cloutier

¹ 1540
V         Le président
V         M. Bob Wood
V         M. O'Neil Cloutier
V         M. Bob Wood
V         M. O'Neil Cloutier

¹ 1545
V         M. Bob Wood
V         M. Jean-François Martel (vice-président, Alliance des pêcheurs professionnels du Québec)
V         M. O'Neil Cloutier
V         Le président
V         M. Bob Wood
V         Le président
V         M. Peter Stoffer

¹ 1550
V         M. O'Neil Cloutier
V         M. Peter Stoffer

¹ 1555
V         M. O'Neil Cloutier
V         M. Peter Stoffer
V         M. O'Neil Cloutier
V         Le président
V         M. O'Neil Cloutier
V         Le président










CANADA

Comité permanent des pêches et des océans


NUMÉRO 033 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 6 mai 2003

[Enregistrement électronique]

·  +(1330)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.)): Nous allons reprendre nos travaux et poursuivre notre étude relative aux questions touchant les pêches de l'Atlantique, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement.

[Français]

    Maintenant, nous avons M. André Boucher, du Regroupement des pêcheurs professionnels du Nord de la Gaspésie.

    Bonjour. Je vous invite à faire votre présentation, s'il vous plaît.

+-

    M. André Boucher (coordonnateur, Regroupement des pêcheurs professionnels du Nord de la Gaspésie): Je vous remercie. Je remercie ce comité d'avoir accepté de nous entendre sur la perception qu'ont nos pêcheurs de la gestion des pêches.

    Comme vous le savez, je représente un groupe de pêcheurs qui réside dans la partie nord de la péninsule gaspésienne, c'est-à-dire entre Trois-Pistoles et Pointe Gaspé. Ce sont, pour la très, très grande majorité, des pêcheurs qui utilisent des engins fixes avec des bateaux de moins de 50 pieds. Ces pêcheurs pêchent principalement le turbot dans le golfe Saint-Laurent, dans les zones 4S et 4T. Nous représentons directement et indirectement une centaine de pêcheurs qui dépendent de cette ressource.

    Je vais faire une brève lecture du mémoire que nous avons présenté l'automne dernier, puisqu'au printemps dernier, lorsque le comité était à Rimouski, nous avions mentionné que nous travaillions à la préparation d'un mémoire sur notre perception de la gestion des pêches. Nous avons effectivement déposé ce mémoire à la Chambre des communes l'automne dernier avec la collaboration du député de notre secteur, M. Roy. Jusqu'à quel point le mémoire a-t-il circulé? On l'ignore, mais on pense qu'il fait son bout de chemin, parce qu'il y a des députés et des gens qui nous en ont parlé. Le mémoire traitait principalement de la disparité de la répartition des ressources dans notre secteur.

    Les pêcheurs de poisson de fond vivent des difficultés importantes de rentabilité. Ceux-ci s'interrogent sur la façon de répartir et de gérer les ressources marines, soit le turbot et le crabe des neiges, puisque dans les mêmes secteurs de pêche, des détenteurs de permis de crabe des neiges réalisent des revenus considérables, ce qui engendre des disparités importantes de revenus.

    En ce qui concerne la gestion du turbot, depuis quelques années, les pêcheurs soutiennent que l'utilisation du maillage de filet de six pouces est inappropriée. Suite à des prévisions qui se sont avérées fausses disant que le turbot serait de retour en 2001-2002, les pêcheurs ont demandé que des analyses soient réalisées. Il n'y a pas eu de suivi positif à la recommandation du CCRH à l'effet que la maturité sexuelle et le taux de croissance du poisson à la maturité devaient être connus. Le CCRH a répété la demande l'année suivante, en plus des recommandations concernant la répartition quant à l'utilisation du maillage de cinq pouces et demi et de six pouces.

    Lors de la réunion du Comité de gestion régionale sur le turbot, les représentants ont mentionné que pour 2002-2003, les maillages de cinq pouces et demi et de six pouces seraient utilisés sur une base commerciale dans une proportion de 50-50.

    C'est une toute autre façon de faire qui a été autorisée. Le maillage de cinq pouces et demi a été autorisé pour la zone 4T seulement. La période de pêche a été établie à la dernière minute, désignée comme une pêche expérimentale avec du maillage de cinq pouces et demi seulement et limitée à des captures équivalentes à un maximum de 30 p. 100 du quota. Les pêcheurs n'ayant pas de filets de cinq pouces et demi n'ont pu participer, même si la période initiale a été prolongée jusqu'à 12 semaines de façon sporadique.

    On se demande si ça vaut la peine de participer à des comités organisés par le ministère puisque les propos qui sont tenus lors de ces comités ne se reflètent pas toujours.

    L'IML, l'Institut Maurice-Lamontagne, a organisé, avec deux ou trois pêcheurs, une pêche scientifique utilisant à la fois le maillage de cinq pouces et demi et de six pouces. Ce fut peu concluant puisque des participants n'ont pas capturé suffisamment de poisson pour un échantillonnage acceptable avec le maillage de six pouces et que les sites étaient fréquentés par le crabe des neiges. Des participants ont abandonné, n'étant pas intéressés à passer des heures à retirer les crabes pris dans les filets.

    Les recommandations du CCRH n'ont pas suscité un grand intérêt chez les scientifiques. Les pêcheurs restent dans l'incertitude face à leur avenir et disent que le ministère prépare leur expulsion en les privant d'allocations équitables de crabe des neiges et en ne leur permettant pas de capturer leur quota de turbot. Les pêcheurs québécois ont perdu 13 p. 100 de leur historique de pêche au détriment des pêcheurs de Terre-Neuve suite à la décision du ministère l'an passé.

    Entente sur l'exécution d'un projet conjoint: entente de cogestion, crabe des neiges, zone 17. Depuis le début de 1990, les pêcheurs de poisson de fond de la zone 17 revendiquent l'obtention d'allocations substantielles ou de permis temporaires de crabe des neiges pour combler le manque à gagner attribuable à la diminution du poisson de fond.

    Refus du ministère. Pourtant, il y a une augmentation importante de la biomasse de crabe des neiges. Ceux-ci sont pris accidentellement dans les filets maillants et doivent être remis à l'eau sous peine d'amende. À la page 18 de l'Annexe I du mémoire que je vous ai présenté, des photographies de crabes capturés par des prises accidentelles démontrent le gaspillage inacceptable de ressources, étant donné que le crabe remis à l'eau meurt inévitablement.

·  +-(1335)  

    Mise en place de l'entente de cogestion. Vingt-deux détenteurs de permis de crabe des neiges dans la zone 17. Avant la saison de pêche de 1998, première année de l'entente de cogestion, le regroupement, qui représente principalement des pêcheurs de poisson de fond, a reçu une lettre du bureau régional du MPO mentionnant que des discussions étaient en cours avec les crabiers de la zone 17.

    L'Annexe II: « Lettre du MPO du 20 mars 1998--consultation élargie », page 19. Cette lettre incluait le mandat, la composition du groupe de travail mis en place le 21 novembre 1997 et la proposition conjointe datée du 23 janvier 1998.

    Commentaires et interrogations. Au 3e paragraphe, on mentionne qu'il s'agit d'une consultation élargie et que les commentaires doivent être acheminés avant le 31 mars 1998. Pourquoi attendre si longtemps avant de faire une consultation, si le groupe de travail est en place depuis presque quatre mois?

    L'entente sur l'exécution du projet de cogestion a été planifiée en 1997. La proposition conjointe MPO-crabiers reçue au regroupement était datée du 23 janvier 1998. Pourquoi attendre cinq mois avant que le MPO fasse connaître son intention au regroupement, considérant que ce devait être une consultation élargie et que le délai pour transmettre les commentaires se limitait à 11 jours de l'envoi de la lettre? Il est clair que le processus de mise en place de l'entente de cogestion avec les crabiers de la zone 17 a été fait en catimini et sans consultation réelle. Il s'agit d' un manque de transparence et d'objectivité inacceptables dans la gestion publique d'une ressource qui appartient à tous les citoyens canadiens.

    Correspondance du Regroupement des pêcheurs professionnels du Nord de la Gaspésie. En réponse: Annexe III, « Lettre du R.P.P.N.G. du 26 mars 1998--demande de discussion ». Le regroupement informe le MPO de son insatisfaction face à la proposition conjointe et demande une discussion. Il n'y a eu aucune réponse de la part du ministère à la lettre du 26 mars.

    Le regroupement a fait parvenir une autre lettre, Annexe IV: « Lettre du R.P.P.N.G. du 16 avril 1998--contre-proposition à la formule de partage », page 26, qui incluait une contre-proposition à la formule proposée dans la lettre du 20 mars 1998. Encore une fois, il n'y a eu aucune réponse. Par la suite, le regroupement a appris par hasard que l'entente de cogestion était bel et bien en vigueur selon les propositions conjointes initiales. Celle-ci n'a jamais fait l'objet de discussions: consultation bidon et manque de transparence.

    Tonnage consenti par l'entente de cogestion. Suite à l'entente, des informations crédibles ont circulé à l'effet que les crabiers auraient demandé 1 400 tonnes métriques, environ la moyenne des captures des trois années précédentes à l'entente, afin de s'assurer un quota de base de 1 200 tonnes métriques. Sans plus de négociations, le MPO leur a consenti 1 600 tonnes métriques. Les pêcheurs admissibles aux allocations temporaires ont été privés d'un volume important. La réduction du quota global disponible pour les crabiers n'était que le prélude à la signature de l'entente de cogestion puisque depuis la mise en place de l'entente, les volumes et les revenus des crabiers ont augmenté de façon fulgurante: Annexe V, « Tableau sommaire des revenus moyens des 22 crabiers de la zone 17 depuis 1995 », page 29, comparativement aux turbotiers: Annexe VI, « Tableau comparatif des revenus--crabiers et turbotiers--résidants de la zone 17 de crabe », page 30.

    Questionnement. Ces faits ont été corroborés par le directeur régional de la gestion des ressources de l'époque; ce serait plus facile de gérer de cette façon. Pourquoi les décideurs ont-ils agi ainsi en connaissant très bien le besoin des pêcheurs de poisson de fond d'augmenter leur revenu et sachant très bien que les stocks de crabe des neiges étaient en nette progression pour la majorité des zones côtières de pêche au crabe? On souhaite la disparition des pêcheurs côtiers dépendant du poisson de fond, sans avoir à les compenser financièrement.

    Commentaires et constat. La situation des pêcheurs de turbot est catastrophique à cause de la faible récolte de poisson de fond. De la fin de la saison 1999 jusqu'à maintenant, les captures de turbot se sont limitées à une moyenne d'environ 30 p. 100 des quotas consentis en 1998. Les pêcheurs dépendant du turbot demandent des allocations plus substantielles, mais le MPO se retranche derrière le respect des ententes de cogestion en vigueur, zone 12 et sous-zones, et zone 17. Devant des cas exceptionnels comme celui-ci, le MPO a le pouvoir de modifier ou d'annuler toute entente.

    Il est évoqué dans le milieu que ce sont les crabiers qui décident de l'orientation du ministère concernant la gestion de cette ressource. Des exemples corroborent cette impression. Pourtant, l'article 14.1 de l'entente est clair: Annexe VII, « Extrait de l'entente de cogestion de la zone 17 », page 31.

·  +-(1340)  

    a) Dans le journal Pêche Impact de février-mars 2002, à la page 39, les propos du président de l'Association des crabiers de la zone 17 sont révélateurs: Annexe VIII, « Article à la page 39 du journal Pêche Impact de février-mars 2002 », page 32.

    b) Juin-juillet 2001, le regroupement avait discuté et préparé avec le MPO un protocole pour une pêche expérimentale au crabe des neiges. Le 29 juin 2001, en conférence téléphonique avec un représentant du MPO, le conseil d'administration de notre regroupement en était venu à une entente verbale sur le protocole numéro 7, qui devait être le protocole final. Le représentant du MPO a invoqué qu'il devait rencontrer les représentants des crabiers le jeudi suivant et que les conditions de permis pourraient être disponibles. Avant de procéder, le regroupement devait recevoir la version finale du protocole. Cette version reçue à la toute fin du vendredi après-midi avait été modifiée considérablement. En effet, un plan de déploiement émanant de la rencontre du jeudi avait été ajouté à la version 7 du protocole. Le conseil d'administration a dû annuler le projet de pêche expérimentale.

    c) Un autre exemple que le MPO est fortement entraîné par les orientations définies par les crabiers. À la réunion du Comité consultatif du crabe des neiges de la zone 17 tenue le 14 février 2001, le regroupement a déposé un document: Annexe IX, cinquième paragraphe, « Demande de modification présentée le 14 février 2001 au Comité consultatif du crabe des neiges de la zone 17 », page 33, demandant de modifier le pourcentage disponible aux allocations temporaires pour les pêcheurs de poisson de fond de la zone 17. Il était mentionné au cinquième paragraphe que si la modification était consentie, les crabiers pourraient capturer les allocations allouées aux pêcheurs de poisson de fond qui accepteraient de les leur vendre.

    Il n'y a eu aucune suite au document déposé. La modification non consentie, le cinquième paragraphe devenait caduc. Pourtant, au sixième paragraphe de l'avis aux pêcheurs du 28 mars 2001: Annexe X, « Avis aux pêcheurs du 28 mars 2001 », page 36, le MPO autorisait les pêcheurs de crabe traditionnels à participer à la capture d'allocations temporaires, ce qui ne se faisait pas auparavant.

    Conclusion. Le MPO doit revoir sa façon de répartir la ressource. Pour le poisson de fond, il y a d'importants problèmes. Pour les crustacés, particulièrement le crabe, les augmentations des quotas démontrent une disponibilité de la ressource qui devrait être partagée plus équitablement.

    Les décisions ministérielles des derniers temps concernant le crabe de diverses zones vont à l'encontre des principes de justice naturelle. Considérant que les ententes de cogestion avec les crabiers sont venues à échéance, il est temps pour le MPO de modifier la façon de partager la ressource. Il faudrait revenir en arrière et considérer les captures des années précédentes aux ententes, considérer les volumes capturés pour les trois années avant la mise en place, et c'est à partir de ce volume de base que l'excédent pourrait être consenti aux pêcheurs de poisson de fond en difficulté.

    Cette façon permettrait aux crabiers de retirer des revenus plus que confortables et aiderait les pêcheurs dépendants du poisson de fond à réaliser des revenus plus décents.

    La lecture que je viens de vous faire comprend les principaux éléments contenus dans le mémoire dont vous avez reçu une copie en anglais, qui a été traduite par le ministère. Évidemment, la version française avait été déposée le printemps dernier.

    En ce qui concerne l'Annexe X, qui parle d'un avis aux pêcheurs, au dernier paragraphe, nous avons dû, et je m'en excuse, joindre la version anglaise d'un communiqué. Dans la version anglaise du mémoire, l'Annexe X est un communiqué plutôt qu'un avis aux pêcheurs, parce que cet avis aux pêcheurs n'avait pas été émis en anglais; il avait été émis seulement en français.

    Voilà pour cette présentation.

    Je voudrais aussi, si vous le permettez, attirer votre attention sur des commentaires sur la Révision de la politique sur les pêches de l'Atlantique.

    En mai 2001, nous avions reçu un document qui avait été préparé par le ministère pour demander la perception des organisations sur la Révision de la politique sur les pêches de l'Atlantique. Ce que nous avons fait, c'est que nous avons numérisé le sommaire du document de travail sur l'orientation et les principes stratégiques reliés à la Révision de la politique sur les pêches de l'Atlantique. Nous avons inséré des commentaires en caractères gras et en italique soulignés. Cette modification du texte original a été faite par notre regroupement. Malheureusement, je n'ai pas la traduction de ce document; j'ai déposé des copies en français.

·  +-(1345)  

    Afin d'attirer votre attention, nous avons fait des commentaires sur des remarques qui étaient dans le document. Je pense qu'il serait trop long d'en faire la lecture complète, mais si vous avez...

[Traduction]

+-

    Le président: Je vous demanderais de résumer puisque vous n'aurez pas le temps de tout lire.

[Français]

+-

    M. André Boucher: Oui. On dit:

Même si le MPO préconise une approche axée sur la conservation pour la gestion des pêches, le terme « conservation » n'a pas encore été adéquatement défini.

    Ce qu'on dit, c'est qu'il est important que le terme « conservation » soit défini clairement, parce que l'industrie ne peut identifier les espèces qui doivent être conservées. A titre d'exemple, est-ce que le phoque doit être conservé de façon plus marquée que la morue?

L'importance des considérations économiques et sociales dans les décisions de gestion des pêches du MPO n'est pas déterminée.

    L'aspect économique et social est intimement lié à l'accès et à la répartition de la ressource. Lorsqu'une communauté ne peut accéder à une ressource à proximité à cause d'une mauvaise répartition, il s'en trouve des répercussions sociales négatives.

Les conflits et l'incertitude concernant l'accès à la répartition des ressources ainsi que les désaccords sur la façon dont les décisions devraient être prises continuent d'entraver les progrès d'autres dossiers de la gestion des pêches.

    Les pouvoirs qui sont conférés aux représentants du ministère ainsi que les informations pertinentes pour chaque flottille pourraient permettre d'éviter des conflits et l'incertitude concernant l'accès à la répartition des ressources pour les espèces plus lucratives: crabe, crevette, homard.

L'approche classique de la gestion des pêches au Canada est trop paternaliste. Ceux qui exploitent la ressource et en bénéficient n'exercent guère d'influence sur la gestion et sont peu encouragés à l'utiliser de façon durable.

    Il circule dans le milieu que ceux qui exploitent la ressource et en bénéficient exercent une grande influence sur la gestion et comptent l'utiliser de façon durable. Plus les revenus de pêche sont élevés, plus ils sont intéressés à l'utiliser de façon durable.

    Il y a plusieurs autres éléments comme ça aussi.

L'effondrement des stocks de poisson de fond de l'Atlantique a bien montré au gouvernement et à l'industrie que le Canada a besoin d'une approche de gestion des pêches plus axée sur la conservation. Les programmes de réduction de la capacité et d'adaptation qui ont été mis sur pied depuis devraient donner naissance à une industrie plus autonome et professionnelle.

    Il aurait peut-être été nécessaire que la révision se fasse au début du moratoire. Cela aurait eu pour effet d'apporter des correctifs appropriés.

    Dernièrement, on a discuté du fait que lors de la mise en vigueur du moratoire, en 1996, selon plusieurs pêcheurs--ça ne fait pas partie du document, mais je dois vous faire cette remarque--, il aurait dû y avoir, à ce moment-là, une analyse des permis non utilisés. Le ministère aurait dû faire un relevé de ces permis pour les cinq années précédant le moratoire et voir à ce que les permis inutilisés soient retirés de la circulation, parce que depuis le moratoire, plusieurs de ces permis sont revenus en circulation, et dans certains secteurs, il y a une augmentation définitive de la pression de pêche.

Puisque la conservation est la priorité absolue dans le contexte des décisions touchant les pêches, il faut donner à ce terme une définition précise. Nous proposons la suivante: La conservation correspond à une utilisation durable qui protège les processus écologiques et la diversité génétique dans l'intérêt des générations actuelles et futures.

    Il serait important d'établir des priorités en regard de la diversité génétique.

    Accès et répartition des ressources.

En vertu du régime législatif actuel, le ministère des Pêches et Océans jouit de vastes pouvoirs discrétionnaires pour distribuer la richesse, c'est-à-dire le capital naturel, sous forme de permis de pêche et de quotas. La façon dont cette richesse est distribuée a des effets considérables sur la performance économique des collectivités tributaires de la pêche et sur la viabilité économique des entreprises de pêche individuelles, grandes ou petites.

    Ça, c'est notre commentaire: Les ressources halieutiques font partie du patrimoine canadien, et c'est la responsabilité du ministère de les répartir de façon équitable. Il est important alors de définir le terme « équitable ». Comme les représentants du ministère jouissent de vastes pouvoirs discrétionnaires, c'est à eux d'établir les critères d'équité. Il faut se demander si l'équité consiste à garder une grande disparité des revenus entre les pêcheurs d'un même secteur.

Le processus déterminant l'accès et la répartition des ressources doit être juste et être perçu comme tel, transparent et assujetti à des règles claires et cohérentes et à des modalités d'application. Le MPO propose une approche en trois étapes: d'abord, les politiques et les ententes actuelles devraient être codifiées, et les mécanismes de règlement des différends devraient être ouverts et transparents. A cette fin, le ministère pourrait reconnaître les ententes de partage actuelles, à quelques exceptions près, et établir des parts à plus long terme pour les flottilles.

    C'est le document qui disait ça.

    Notre perception est toute autre. Si le ministère reconnaît les ententes de partage actuelles, il faudrait savoir si le partage s'applique aux flottilles par province ou aux flottilles par espèce. Dans l'éventualité où le ministère reconnaîtrait les ententes de partage actuelles des flottilles par espèce, ce serait alors la fin des activités de pêche pour plusieurs pêcheurs, car la polyvalence escomptée serait anéantie. Cette démarche serait inéquitable et inacceptable.

·  +-(1350)  

On pourrait envisager, par exemple, la création d'un comité indépendant chargé de prendre des décisions en fonction des politiques et des critères établis. La mise sur pied d'un tel mécanisme prendra toutefois un certain temps.

    Il ne faudrait pas qu'un comité indépendant serve de bouc émissaire aux décisions prises par le ministère.

    En gros, c'étaient les principales remarques. Il y en a quelques autres. Je suis certain que vous aurez l'occasion de les lire.

    Notre principale revendication, comme je viens de vous le mentionner, tourne autour de la répartition des ressources. Dans certains secteurs, comme dans le secteur de la zone 17, qui est la partie ouest de l'estuaire, les recommandations des scientifiques quant aux diminutions de crabe pour cette année étaient de 15 p. 100. Selon l'ensemble des pêcheurs, avec les captures qui se font actuellement encore dans les filets maillants à des profondeurs allant jusqu'à 160 et 170 brasses, il est évident que le crabe dans ce secteur a été moins affecté que dans d'autres secteurs. Pour les pêcheurs, la raison en est simple: depuis plusieurs années, il n'y a plus de chalutage dans le secteur, même pas de chalutage à la crevette. Cela vaut pour tout le secteur, sauf pour quelques exceptions situées entre Baie-Comeau jusqu'à Baie-Trinité. Mais pour tous les autres secteurs de la zone 17, il n'y a plus de chalutage, même pas de chalutage à la crevette. Donc, ce que les pêcheurs disent, c'est que le crabe demeure à un niveau très stable. Le cycle naturel de sept ou huit ans, qui n'est pas encore tout à fait défini, serait tout à fait perturbé par cette situation.

    Les pêcheurs ont commencé à être actifs depuis le 1er avril. Or, la semaine dernière, il y avait encore des pêcheurs qui ont passé plusieurs heures à démailler du crabe dans leurs filets. Il y a des photos dans le mémoire, d'ailleurs, qui démontrent à quel point dans certains secteurs, le crabe peut être abondant, et ce n'est pas dans des zones de pêche au crabe traditionnelles. C'est à des profondeurs de plus de 100 brasses, généralement à des profondeurs de plus de 130 brasses.

    Donc, cela veut dire qu'il y a du crabe dans les filets, et c'est une ressource qui est détruite. Afin d'estimer le tonnage détruit à chaque année dans notre secteur, il faudrait peut-être se référer aux sciences, qui nous avaient déjà informés que ce gaspillage pourrait être très, très important.

    Nous avons tenté l'an dernier de faire une pêche expérimentale au crabe. Pour les profondeurs de 100 à 140 brasses, ça s'est avéré très positif. Pour 140 brasses et plus, la difficulté que nous avons rencontrée n'est pas qu'il n'y avait pas de crabes, mais plutôt qu'ils n'entrent pas dans les cages qui sont utilisées actuellement. Par contre, ils se prennent dans les filets parce qu'ils vont dans les filets pour manger le poisson qui y est capturé. Ils restent alors pris dans les filets.

    Donc, ce qu'on avait demandé pour cette année, c'était la possibilité d'avoir une autre pêche expérimentale pour essayer de trouver un casier qui serait approprié, parce que le crabe qui est généralement à ces profondeurs, c'est du vieux crabe qui s'en va mourir. Mais il pourrait être récupéré.

·  +-(1355)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Je vous ai demandé de mettre fin à votre présentation parce que nous voulions avoir suffisamment de temps pour la période des questions.

    Monsieur Roy.

[Français]

+-

    M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ): Oui, merci, monsieur le président.

    Monsieur Boucher, je vous souhaite de nouveau la bienvenue devant le comité. Pour ceux qui l'ignorent--monsieur le président, vous étiez là--, il s'était déjà présenté devant le comité à Rimouski.

    Les problèmes ne semblent pas avoir été corrigés. Les choses ne semblent pas avoir changé beaucoup. Mais ce que vous nous dites, c'est qu'à l'heure actuelle, il y aurait suffisamment de crabe pour faire en sorte que vos pêcheurs, les pêcheurs qui appartiennent à votre regroupement, puissent vivre de façon décente s'il y avait un partage correct et bien effectué.

    Mais il y a une entente, il me semble, avec les crabiers de votre secteur, qui est renouvelée à chaque année. Ce n'est pas une entente permanente, mais quand même, elle est renouvelée à chaque année.

+-

    M. André Boucher: L'entente de cogestion touchant la zone 17 est terminée depuis le 31 mars. Selon l'avis aux pêcheurs que nous avons reçu, elle n'a pas été renouvelée.

    L'avis que nous avons reçu, pour ce qui est du plan de pêche de 2003, n'est que temporaire; on nous dit que l'entente fait l'objet de discussions. Pour notre part, nous faisons valoir au ministre qu'il pourrait y avoir une entente, mais nous souhaitons qu'elle soit moins généreuse que celle qui s'est terminée le 31 mars. Comme il est mentionné dans le mémoire, avant la signature de l'entente en 1998, les crabiers traditionnels de la zone 17, au nombre de 22, avaient capturé environ 1 400 tonnes métriques de crabe. Vous avez d'ailleurs un tableau qui indique les revenus gagnés depuis le début.

    Ils avaient demandé 1 400 tonnes métriques pour en obtenir 1 200; en effet, cette quantité permettait à cette époque aux 22 crabiers de vivre très bien. Ils gagnaient des revenus se situant entre 200 000 $ et 300 000 $. Le ministère leur a offert 1 600 tonnes métriques, et on a fait par la suite une proposition d'entente de cogestion se chiffrant à 1 600 tonnes métriques.

    Une proportion de 40 p. 100 de l'excédent des 1 600 tonnes métriques pouvait être consentie en allocation temporaire, soit aux communautés autochtones, soit aux pêcheurs de poisson de fond. La proportion de 60 p. 100 de l'excédent des 1 600 tonnes métriques allait aux crabiers traditionnels, ce qui fait que l'an passé, le TAC, incluant la pêche expérimentale, a atteint un volume de production de 3 000 tonnes.

    Ainsi, les 1 600 premières tonnes allaient aux crabiers traditionnels et 60 p. 100 des 1 400 tonnes allaient aussi aux crabiers traditionnels. Il y avait eu un peu au-delà de 500 tonnes, dont 100 tonnes allouées à une communauté autochtone. Ainsi, les revenus des crabiers traditionnels se situent généralement entre 500 000 $ et 600 000 $ depuis quelques années et ce, pour sept à huit semaines de pêche. Dans certains cas, ceux qui ont des poissonneries et veulent écouler leur crabe à meilleur prix pêchent pendant 10 semaines.

    Or, l'automne dernier, on a dit au ministre qu'on voulait bénéficier d'une répartition plus équitable. Il nous a dit ne pas vouloir déshabiller Pierre pour habiller Jacques. J'ai eu l'occasion de le rencontrer la semaine dernière lorsqu'il est venu à Rimouski et je lui ai réitéré la même demande. Je lui ai rappelé nos pourparlers de l'automne dernier et lui ai dit qu'à mon avis, il était possible de faire une répartition plus équitable à l'intérieur de la zone 17 et que nos pêcheurs pourraient en bénéficier.

    Il semble difficile de faire passer ce message. De toute évidence, ceux qui bénéficient de cette chasse gardée depuis plusieurs années n'ont pas intérêt à céder.

    Pour ce qui est de 2003, le ministère a décidé de réserver une partie du volume réservée aux allocations temporaires, soit environ 100 tonnes, et ajouter un nouveau permis de pêche pour une communauté autochtone. Or, le ministère avait déjà acheté à grands frais, soit 2 millions de dollars la pièce, deux permis pour la communauté autochtone de Viger. Dans ce cas-ci, on en a remis un à la communauté autochtone de Betsiamites.

    Cette année, nous avons sensiblement la même allocation temporaire que l'an passé, mais nos pêcheurs demeurent encore dans l'incertitude parce que nous ne savons pas quand le turbot sera de retour. Ce n'est pas avec 17 000 ou 18 000 livres de crabe que les pêcheurs pourront réaliser un revenu d'entreprise décent.

    Dans le mémoire, vous trouverez un tableau qui démontre, pour 2001, la disparité de revenus entre les deux groupes. Pourtant, ils ont des bateaux semblables et ils pêchent dans les mêmes secteurs. Cette situation crée des disparité à l'intérieur des villages. Ça donne lieu à des tractations. Dans le même village, on retrouve un groupe de pauvres et un groupe de riches. À Tourelle, la chose est particulièrement flagrante parce que c'est un village et que certains sont très riches alors que d'autres doivent se qualifier pour l'assurance-emploi pour manger l'hiver. Pour ces raisons, il faut qu'il y ait un changement d'attitude de la part du ministère.

    On espère qu'avec de petits documents comme celui-là et avec la diffusion de nos propos, vous serez en mesure d'influencer le ministre et qu'en retour, cela aura des répercussions.

¸  +-(1400)  

+-

    M. Jean-Yves Roy: Que pensez-vous de ce qui se passe dans la zone 12?

+-

    M. André Boucher: Dans la zone 12, je peux vous dire que les revenus des crabiers sont comparables à ceux qui ont cours dans la zone 17.

    Hier, à la télévision, j'ai constaté qu'on faisait grand cas des événements survenus au Nouveau-Brunswick. Certains individus disaient avoir développé cette pêche. Or, cette pêche a été développée à partir d'une ressource qui appartient à tous les Canadiens. Qui a développé cette ressource-là? Ce sont les gouvernements qui ont permis qu'il y ait des bateaux adéquats pour que cette pêche soit développée, qui a subventionné des usines pour transformer le crabe et qui a permis de vendre ce dernier sur les marchés. C'est donc une ressource naturelle qui appartient à tous les Canadiens, peu importe que ce soit le gouvernement fédéral ou le gouvernement provincial qui a permis l'évolution de cette pêche.

    Pour ce qui est de la zone 12, lorsque l'entente de cogestion a été appliquée, il y a quelques années, ils disaient que 500 000 $ de revenus étaient nécessaires pour pêcher 200 000 ou 250 000 livres de crabe. En outre, ils disaient qu'il fallait un bateau d'une valeur d'un million ou d'un million et demi de dollars. Ce n'est pas vrai.

    Je vais vous donner un exemple qui peut s'appliquer aussi aux autres zones. Si vous consultez le tableau--je n'ai malheureusement pas eu le temps de le terminer, mais je pourrai éventuellement en laisser une copie--vous verrez que l'an passé, soit en 2002, dans la zone 17, le revenu moyen des 22 crabiers était de 584 000 $. Ces données proviennent du ministère; ce n'est pas nous qui les inventons. Pour 2003, on dit que chaque crabier a subi une réduction moyenne de ses revenus de l'ordre de 10,68 p. 100. Or, maintenant, ils sont 23, parce qu'on a enlevé une partie du volume à l'allocation temporaire.

    Le fait est que cette année, le crabe ne sera pas à 2,50 $ mais à 3,10 $. Ainsi, même s'il y a une diminution des revenus de 10,68 p. 100, elle est compensée par une augmentation de près de 60 000 $. Ils vont passer cette année à 646 000 $, ce qui fait que depuis la mise en application de l'entente de cogestion, à la fin 1997, ces gens ont bénéficié d'une augmentation de revenus de l'ordre de 239 p. 100.

+-

    M. Jean-Yves Roy: Alors que vos pêcheurs...

+-

    M. André Boucher: Alors que nos pêcheurs font face à un déficit d'exploitation.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Stoffer.

+-

    M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Monsieur, dans le document que vous nous avez remis, en fait je vais directement à la page qui m'intéresse, vous signalez—et j'ai cru que c'était tout particulièrement révélateur, pour être honnête—que la consultation n'était que de la frime. En fait, cela s'est passé en 1998, et vous dites « Voilà un exemple de consultation bidon ainsi que du manque de transparence du ministère ». Monsieur, ce commentaire porte sur la situation qui existait le 26 mars 1998. Avez-vous toujours la même opinion du MPO et de son processus de consultation?

¸  +-(1405)  

[Français]

+-

    M. André Boucher: En fait, on n'a pas été consultés encore pour le renouvellement de l'entente de cogestion portant sur la zone 17. On aurait dû l'être l'automne dernier. Donc, n'ayant pas été consulté, je ne peux pas vous dire si je considère que c'est de la frime ou si ça se fait en cachette; il n'y a pas eu de consultations.

[Traduction]

+-

    M. Peter Stoffer: Puis, à la page 11, vous ajoutez :

Peut-être que l'on souhaite la disparition des pêcheurs côtiers dépendants du poisson de fond sans avoir à les compenser financièrement...

    C'est un commentaire assez percutant. À bien des égards, je suis d'accord avec vous, d'après ce que j'ai pu observer sur les deux côtes. Est-ce que certains de ceux que vous représentez sont du même avis ou s'agit-il simplement là de votre opinion personnelle?

[Français]

+-

    M. André Boucher: Je dois vous dire que l'avis exprimé dans le document n'est pas le mien mais celui des pêcheurs que je représente.

[Traduction]

+-

    M. Peter Stoffer: Très bien. Merci. Ça va.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Hearn.

+-

    M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je n'ai qu'une question à poser. Divers intervenants ont obtenu au cours des dernières années des quotas de crevette et de crabe; je pense particulièrement aux coopératives, peut-être aux entreprises, aux Premières nations. Dans certains cas, certains de ces intervenants n'exploitaient même pas la ressource. Ils ont reçu un quota qu'ils ont immédiatement revendu à quelqu'un d'autre, parfois directement sur l'eau, sans participer directement eux-mêmes à ce secteur. Croyez-vous qu'on devrait attribuer de cette façon l'accès à une ressource qui appartient aux pêcheurs? Croyez-vous plutôt que la ressource devrait être distribuée à ceux qui vont personnellement pêcher, pour que ce soit eux qui tirent profit de l'exploitation de cette ressource?

[Français]

+-

    M. André Boucher: Je suis tout à fait d'accord avec vous. Dans notre secteur, lorsqu'il y a des allocations, nous avons un seul pêcheur qui ne participe pas à la pêche, qui vend son allocation. L'ensemble de nos dirigeants considèrent que ceux qui n'ont pas de bateau, qui ne participent pas à la pêche et qui ne satisfont pas aux critères pour obtenir des allocations devraient être retirés de la pêche. C'est ce que nous pensons et ce que nous souhaitons.

    Actuellement, dans les discussions que nous avons avec le ministère, on nous dit qu'à partir de 2004, il va y avoir un changement d'attitude et qu'on va relever les historiques de pêche des participants avant de donner des allocations. Nous avons utilisé ce processus-là avec la collaboration du ministère pour mettre en place, dans notre secteur, des quotas individuels pour le turbot en 1998. C'est ce processus que nous avons réussi à établir avec un fonctionnaire du ministère. Nous avons relevé l'historique de pêche de 1991 à 1997, puis nous avons établi des quotas individuels qui n'étaient pas tous égaux, en fonction de l'historique de pêche.

    C'est pour ça que je vous disais tout à l'heure que c'est ce que le ministère aurait dû faire en 1993. Il aurait dû relever l'historique de pêche et retirer les permis des individus qui n'avaient pas d'historique de pêche.

[Traduction]

+-

    M. Loyola Hearn: Je suis parfaitement d'accord, monsieur le président. Ce que je crains c'est que lorsque l'on prendra des décisions un peu plus tard, nous découvrirons qu'on parlera alors de droits acquis qui protégeront nombre de ces groupes qui auront déjà obtenu des permis par le passé. J'espère qu'on reconnaîtra à ce moment-là que ce sont ceux qui gagnent leur vie à exploiter cette ressource qui devraient en tirer le plus grand profit.

    Monsieur le président, je soulève ce problème parce que je crois que c'est une des questions les plus importantes sur lesquelles nous devrions nous pencher; je crois que nous devrions dans nos recommandations souligner le problème parce qu'une part toujours croissante de cette ressource qui doit supposément être utilisée au profit de ceux qui l'exploitent directement est attribuée à ceux qui ne participent à la pêche que de façon indirecte; bien souvent, une large partie des profits vont également ailleurs, et non pas à ceux qui exploitent directement la ressource. Cela devient un problème toujours plus important qui pourrait détruire la pêche telle qu'elle existe aujourd'hui.

+-

    Le président: Merci, monsieur Hearn.

    Monsieur Wood, avez-vous des questions?

¸  +-(1410)  

+-

    M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): Non, merci.

+-

    Le président: Très bien.

    Monsieur Elley.

+-

    M. Reed Elley: Je n'ai pas d'autres questions.

+-

    Le président: Très bien. J'aimerais poser quelques questions.

    À l'annexe III... Je suis surpris que vous ayez dit qu'ils vous ont donné 11 jours pour répondre. En fait, ils vous ont donné moins de temps que cela puisque la lettre porte la date du 20 mars. Évidemment, elle a dû être envoyée, puis reçue et lue. Est-ce que quelqu'un a demandé à M. Daniel Boisvert pourquoi il vous a donné moins de 11 jours pour faire vos commentaires?

[Français]

+-

    M. André Boucher: Oui.

[Traduction]

+-

    Le président: Et qu'a-t-il dit?

[Français]

+-

    M. André Boucher: Il a dit que c'était le comité de gestion qui avait pris la décision et que la lettre avait été envoyée. C'est tout; nous n'avons pas eu plus d'explications que cela. Il a dit que c'était la lettre et que nous avions 11 jours. C'est pour ça que nous avons déposé les copies de documents, parce que nous considérons que cette façon de faire est inacceptable. C'est inacceptable pour un ministère de faire une consultation qui, en réalité, n'en est pas une puisqu'on nous dit que nous avons 11 jours pour répondre. Par la suite, nous avons demandé une rencontre pour pouvoir au moins en discuter, et nous n'avons jamais eu de réponse à cette lettre du 26 mars 1998 faisant suite à la vôtre du 20 mars concernant l'objet en titre, qui faisait suite à une discussion avec les membres du conseil d'administration.

    Nous avons demandé une rencontre et on ne nous l'a jamais accordée. Nous avons fait des appels. Bien sûr, nous n'avons pas les enregistrements téléphoniques parce que nous ne faisons pas ça, mais nous avons fait des appels pour demander une rencontre, et on nous disait que le processus était en marche. A un moment donné, nous avons appris que l'entente était signée et que c'était réglé. Mais selon nos informations, elle était signée depuis fort longtemps. L'entente de principe entre les crabiers traditionnels et le ministère remontait à quelques mois déjà. On s'était entendus sur un principe et on nous consultait à la dernière minute.

[Traduction]

+-

    Le président:  Je comprends ce que vous voulez dire quand vous parlez de consultation bidon.

    Vous avez répondu à une partie de ma question, mais vous n'avez toujours pas dit si on avait demandé à M. Boisvert pourquoi vous n'avez jamais reçu réponse aux lettres du 26 mars et du 16 avril?

[Français]

+-

    M. André Boucher: Pour la lettre du 16 avril, on nous a répondu verbalement que le document émis avec la proposition de partage 60-40 était la proposition sur laquelle on s'était entendus avec les crabiers traditionnels. Ça en restait là. C'est tout ce que nous avons eu comme information verbale. Le document qu'il nous avait envoyé était inchangé. Ça en restait là, c'est tout. C'est souvent la façon de procéder de certaines personnes au ministère.

[Traduction]

+-

    Le président: Très bien.

    Savez-vous où se trouve ce M. Boisvert aujourd'hui?

[Français]

+-

    M. André Boucher: Il est au même endroit, au même poste.

[Traduction]

+-

    Le président: Très bien. Merci.

    J'ai peut-être mal saisi ce que nous ont dit d'autres témoins, mais lorsque nous avons entendu les pêcheurs de crabe des neiges, ils nous ont dit qu'ils savaient parfaitement quelle taille de crabe conserver et quelle taille remettre à la mer, pour qu'il puisse continuer à grandir. Cela va directement à l'encontre de ce que vous avez dit aujourd'hui, soit que le crabe remonté à bord des casiers meurt inévitablement lorsqu'il est rejeté à la mer.

    Pourquoi avez-vous dit que tous ces crabes meurent?

[Français]

+-

    M. André Boucher: Peut-être que je me suis mal exprimé, mais ce dont je vous parlais tout à l'heure, c'est du crabe qui est capturé dans les filets. Ce crabe qui est capturé dans les filets accidentellement doit, selon la réglementation, être rejeté à l'eau par les pêcheurs. Mais vous savez, lorsqu'un crabe est pris dans un filet et que les pêcheurs doivent passer cinq, six ou parfois sept heures à démailler ce crabe pour pouvoir récupérer leurs filets, je dois vous dire que quand le crabe sort de là, il lui manque des pattes, il lui manque des morceaux.

    L'an dernier, j'ai vu un cas où le pêcheur a été obligé de revenir au quai avec le crabe dans son rouleau parce que le vent s'était levé. Le filet est sur un rouleau. Il a dû rouler son rouleau parce que le vent s'était levé. Il n'avait pas d'autre choix, et il n'avait plus le temps de démailler tout ce crabe-là des filets. Il est donc rentré au quai avec plein de crabes dans le filet, et on a considéré qu'il avait commis une infraction parce qu'il avait ramené du crabe au quai. Il ne l'avait même pas démaillé. Les gens sont montés sur le bateau et ont volé tout le crabe qu'il y avait dans le filet.

¸  +-(1415)  

[Traduction]

+-

    Le président: Si j'ai bien compris, il est pratiquement inévitable que le crabe pêché en prise accidentelle meure. Je suppose que nos autres témoins parlaient du crabe qui était pêché avec les bons engins et c'est pourquoi ils disaient qu'ils pouvaient remettre le crabe à la mer s'ils jugeaient qu'il était trop petit. Je comprends maintenant. Très bien.

    Monsieur Stoffer.

+-

    M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président.

    Monsieur, on nous a déjà parlé de ce problème, du fait que certains pratiquent en fait l'écrémage ou sont forcés de rejeter à la mer un produit qu'ils ont pêché. Dans le cas qui nous occupe, il s'agit des crabes qui sont pris dans un filet.

    Dites-vous que ces crabes devraient être débarqués, soit comme parties d'un quota attribué pour l'autre espèce, ou tout au moins amenés à l'usine de transformation pour être par la suite vendus plutôt que simplement rejetés à la mer?

[Français]

+-

    M. André Boucher: Je vais retourner un peu en arrière. On avait été consultés par le RPPA, le comité ministériel qui avait été nommé pour les critères d'accès.

    On s'est présentés à Québec. C'était un comité ministériel pour des consultations sur les critères d'accès, et il y avait des représentants des universités. Il y en avait de Vancouver, d'Ottawa, et ainsi de suite. Il y avait un monsieur de Toronto auquel on a dit qu'on était obligés de rejeter le crabe qui était capturé dans les filets, et le monsieur m'a dit que j'étais menteur. C'était M. Kroeger qui présidait ce comité-là. Monsieur m'a dit que j'étais menteur parce que l'information qu'il tenait du ministère était que le crabe qui était pris accidentellement dans les filets pouvait être conservé. J'ai dit que c'était absolument faux. J'ai dû envoyer à M. Kroeger des copies de poursuites, de documents judiciaires qui démontraient qu'il y avait des pêcheurs qui avaient ramené du crabe qui avaient été poursuivis et qui avaient dû payer l'amende. Cela en est resté là.

    Ce que je peux vous dire en réponse à votre question, c'est que lorsqu'on fait des prises accidentelles dans d'autres espèces, il y a un certain pourcentage qui peut être conservé. On pourrait peut-être envisager cette possibilité. Pour les pêcheurs qui pratiquent la pêche au turbot, il y a un pesage à quai à 100 p. 100, et le peseur à quai a le mandat de vérifier s'il reste d'autres prises à l'intérieur du bateau. A ce moment-là, il pourrait y avoir un certain adoucissement de la réglementation pour que, lors des débarquements de turbot, 10 p. 100 ou 15 p. 100 du crabe capturé accidentellement puisse être conservé et déduit de l'allocation temporaire. Le volume qui serait conservé serait déduit de l'allocation temporaire ou du quota. A ce moment-là, il y aurait moins de gaspillage. Je ne dis pas que ça ferait du crabe commercial de 2L ou 3L pour vendre sur les marchés, mais le crabe pourrait être arrangé puis vendu pour la chair.

    C'est vrai que c'est un gaspillage éhonté. C'est pour ça que le monsieur m'avait dit que je racontais des mensonges, parce qu'il considérait que c'était ahurissant de voir qu'on pouvait gaspiller un si grand volume de crabe, alors qu'avec les prix d'aujourd'hui, c'est une ressource considérable.

[Traduction]

+-

    Le président: Une brève question, s'il vous plaît.

+-

    M. Loyola Hearn: J'aimerais simplement préciser quelque chose. Je crois que nous parlons en fait ici du crabe pêché dans des casiers plutôt que du crabe pêché dans les filets. Si vous trouvez des petits crabes, des crabes à carapace molle, peu importe, dans un casier, vous pouvez les remettre à la mer parce qu'ils sont vivants, se déplacent, et ne sont pas entortillés dans les filets. Même dans ces circonstances, certains se demandent combien de crabes survivent en raison de la profondeur de l'eau.

    Nous parlons ici plutôt de crabes pris dans les filets maillants, des engins qui sont utilisés pour pêcher la morue, le flétan, ou d'autres espèces, dans des eaux plus profondes. Le crabe finit par être entortillé dans la ficelle et très souvent déchiré. Vous seriez plus prudents si vous pouviez le vendre. Ce qui est plutôt ironique c'est qu'il y a quelques années, lorsqu'on mouillait les filets maillants pour la morue ou le turbot, ou une autre espèce, le crabe était un gros problème. On les écrasait avant de les rejeter à la mer. Mais aujourd'hui, le crabe est une espèce qui est beaucoup plus lucrative que les autres espèces.

    C'est ça la différence—les casiers où le crabe est vivant, un peu comme un casier pour pêcher le homard, et les filets maillants où le crabe est entortillé et il est alors très difficile de libérer le crabe sans l'endommager.

¸  +-(1420)  

+-

    Le président: Monsieur Boucher, je vais vous demander une précision afin de m'assurer que j'ai bien compris. Vous dites qu'actuellement aucune prise accidentelle de crabe n'est autorisée? En d'autres termes, tout le crabe doit être rejeté à la mer?

[Français]

+-

    M. André Boucher: Oui, tout doit être rejeté à l'eau.

    Les pêcheurs ne font pas exprès d'aller dans ces secteurs-là, parce qu'il arrive, à certaines occasions, que le crabe se situe à 140, 150 ou 160 brasses de profondeur et, dans un secteur donné, il va entrer dans les filets. Mais il n'y a aucun pêcheur de poisson de fond qui pêche le turbot qui soit intéressé à passer plusieurs heures à démailler des filets pleins de crabe. A ce moment-là, les pêcheurs travaillent rapidement, et le crabe est détruit. S'il y avait la possibilité de pouvoir ramener à quai une certaine quantité de crabe, alors ils feraient peut-être attention pour le démailler; ils prendraient du temps. Mais là, le crabe ne leur rapporte rien; il leur fait perdre du temps, donc il est détruit.

    Les scientifiques nous disent qu'environ 99 p. 100 du crabe qui est pris dans les filets et rejeté à l'eau va mourir.

[Traduction]

+-

    M. Peter Stoffer: C'est très frustrant de voir ce genre de choses mais on leur dit de le rejeter à la mer.

    Il y a certainement une raison pour laquelle le MPO vous dit de faire cela. Le ministère ne peut pas simplement dire « rejetez le crabe à la mer »; il doit certainement vous donner une raison logique.

+-

    Le président: Je crois que cette raison logique, comme l'a signalé M. Boucher, serait que le ministère cherche simplement à éviter les abus. Il craint que les gens ne disent que le crabe qu'ils ont pêché représente des prises accidentelles alors qu'il s'agissait d'une pêche dirigée. En d'autres termes, si aucun profit n'est réalisé de cette façon, si tout doit être rejeté à la mer, il y a lieu d'espérer que personne ne se livre à de telles pratiques.

    Je crois que M. Boucher disait que s'il y a un pourcentage, un petit pourcentage— disons comme il l'a signalé 10 ou 15 p. 100 des prises accidentelles, quelque chose du genre—au moins on encourage les pêcheurs à conserver ce crabe mais on n'encourage pas la pêche illégale de l'espèce.

    Est-ce que c'est ce que vous avez dit, monsieur Boucher?

[Français]

+-

    M. André Boucher: Jusqu'en 1992 ou 1993, les pêcheurs pouvaient ramener à quai le crabe pris accidentellement dans les filets. Effectivement, ils ramenaient ce crabe à quai et ils le vendaient sur le marché local ou aux consommateurs qui allaient sur les quais à un prix inférieur au prix du crabe conventionnel.

    Je ne suis pas un pêcheur, mais ce qu'on m'a dit, c'est qu'il y a eu des pressions de la part des pêcheurs de crabe traditionnels, qui trouvaient que cela faisait en sorte de défaire un petit peu leur marché local. Comme les autres vendaient du crabe moins cher, cela nuisait un petit peu à leur marché local.

    Il y a des déclarations. Dans le document, il y a un tableau. On peut y lire ce qui suit:

Les données ayant servi à la préparation de ce tableau proviennent de documents fournis par le MPO ainsi que par les énoncés du président des crabiers de la zone 17 qui soutient que 80 p. 100 des débarquements sont vendus aux usines et 20 p. 100 sur le marché de détail.

    Cela veut dire que ce 20 p. 100 est très lucratif pour eux, parce que c'est vendu à 4 $ ou 5 $ la livre au quai. C'est la raison pour laquelle les pêcheurs me disaient qu'ils ne veulent plus que les pêcheurs en ramènent aux quais; ça nuit au marché local.

    Je dois vous dire que dans nos régions, il y a un volume assez important de transactions qui se font localement pour la vente du crabe. Je peux vous dire que la semaine dernière, à Matane, des pêcheurs de crabe traditionnels vendaient le crabe 6 $ l'unité. C'est assez lucratif.

[Traduction]

+-

    Le président: Très bien. Merci beaucoup, monsieur Boucher. Ces échanges ont été fort intéressants et nous vous remercions d'être venu nous rencontrer cet après-midi pour nous présenter cet exposé. Merci beaucoup.

[Français]

+-

    M. André Boucher: C'est moi qui vous remercie.

[Traduction]

+-

    Le président: Notre prochain témoin est M. Georges-Henri Hubert.

¸  +-(1425)  

[Français]

+-

    M. Georges-Henri Hubert (vice-président et copropriétaire, Groupe de commerce international Eng.-Hubert inc.): Bonjour. Ça me fait plaisir d'être parmi vous cet après-midi parce que c'est quelque chose d'essentiel. Pour moi, en tout cas, ce qui représente la démocratie, c'est un comité comme le vôtre, en autant qu'on soit sûr que ce qu'on va vous dire ait des chances de se rendre plus haut et que ce soit efficace. Je considère que c'est vraiment ça la démocratie.

    La démocratie nous joue des tours aussi. Elle nous a joué un tour au niveau de la description du produit qu'on a. On a un produit ici qui est de l'huile de phoque du Groenland, Phoca groenlandica, et drôlement, tous les pays de la planète acceptent ce produit-là comme étant quelque chose de hautement recevable chez eux, mais les États-Unis d'Amérique nous refusent l'ouverture de leurs frontières. On travaille très, très fort pour faire changer les choses.

    Je vous ai laissé un petit texte sur l'historique. Rapidement, ça commence en 1972 avec le Mammal Protection Act, qui dit essentiellement, en ce qui nous concerne, que les produits du phoque du Canada sont refusés outre-frontières. C'est un embargo. Eux appellent ça un « ban », mais moi, j'appelle ça un « embargo ». Je leur ai déjà dit en riant que mon nom n'était pas Fidel Castro, que c'était juste Georges Hubert et qu'ils n'avaient pas d'affaires à nous imposer des embargos, pas plus sur les produits du phoque que sur les produits du homard ou sur d'autres espèces de mollusques ou de poissons.

    Mais les lobbyistes aux États-Unis sont très forts. Les lobbyistes canadiens sont très forts. Les vôtres aussi sont très forts, du côté d'Ottawa. On a été reçus à l'Assemblée nationale du Québec où il y avait eu une séance, il y a environ 18 mois, sur des problèmes reliés à l'application de l'ALENA. Donc, cela a suivi son cours sans qu'il y ait de grandes chances de résultats, parce que c'est un dossier qui est transmis aux Affaires étrangères .

    Ensuite, on a présenté un document bien étoffé qui s'appelle: Pour une équité de l'industrie canadienne du phoque sur les marchés des États-Unis d'Amérique et de l'Union Européenne. Alors, c'est aussi un autre document. On a relevé des choses comme de la publicité sur la recherche qui se fait sur les loups-marins, un peu dans le genre de Québec Science ou quelque chose comme ça, qui vante les mérites d'une recherche faite afin de voir comment on peut faire pour empêcher les loups-marins de se reproduire. Donc, on en aura moins; on aura moins de dégâts. Il y a des tendances comme ça. Nous, nous préférons nous en occuper, les transformer et faire de l'argent avec ça.

    Essentiellement, il y a la loi américaine sur la protection des mammifères marins. Pour ma part , je dis que rien ne nous empêcherait d'aller aux États-Unis avec nos produits du phoque si on s'en occupait, mais jusqu'ici, on s'en n'est pas occupé. C'est supposé être votre ministère des Affaires étrangères qui s'en occupe, ainsi que le ministère des Pêches et Océans, pour d'autres volets.

    Je crois qu'il faut aller devant les Américains. Il y a un monsieur qui a mentionné cet avant-midi que peut-être si on avait quelques millions de dollars à investir dans la publicité pour parler aux Américains directement et leur offrir nos produits...

    Ce que vous avez à vos côtés, dans la petite bouteille d'Omega, c'est quelque chose qui est maintenant retenu en Europe, en France. Ça peut se prendre avec des statines, qui est un médicament anticholestérol. Et si vous avez des Omega-3 avec ça, avec des statines, ça vous fait le meilleur mélange pour diminuer votre taux de cholestérol. Ça fait des miracles.

    De plus--ça pourrait être un bon dossier Québec-Ottawa--, en France, ils ont prévu que les gens qui bénéficient de l'assistance sociale ont droit à ces médicaments-là gratuitement. C'est payé par l'État.

    Donc, l'idée est déjà partie au gouvernement du Québec. Ça va faire son chemin, mais c'est actuellement le résultat.

¸  +-(1435)  

[Traduction]

+-

    Le président: Êtes-vous prêt à répondre aux questions?

[Français]

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Oui.

[Traduction]

+-

    Le président: C'est très intéressant lorsque les témoins nous posent des questions.

    Nous commencerons par M. Stoffer.

+-

    M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président.

    J'aimerais d'abord remercier notre témoin de nous avoir apporté ces échantillons.

    Vous ne le savez peut-être pas, mais en 1999, nous avons fait exactement ce que vous venez nous demander. Le comité a recommandé au ministre et au gouvernement du Canada de demander aux États-Unis d'ouvrir leur marché et de se défaire de la Marine Mammal Protection Act, qui nuit à nos Inuits et à nos chasseurs de phoques les empêchant de vendre les produits du phoque aux États-Unis.

     Nous savons que les Autochtones de l'Alaska peuvent vendre les produits du phoque aux États-Unis, mais nos Autochtones ne peuvent pas le faire. Cela a toujours été une pomme de discorde. Nous l'avons signalé dans notre rapport de 1999. Je voulais simplement vous signaler que cette recommandation a déjà été faite. C'est au comité d'en décider, mais je crois cependant qu'il serait peut-être utile de formuler cette recommandation à nouveau simplement pour insister un peu plus sur la question.

    Si les choses se passaient comme vous le désirez, et si vous aviez les marchés que vous recherchez, combien de gens pourraient être employés, par exemple, à la fabrication de ce produit?

[Français]

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Je ne suis pas sûr d'avoir compris la question.

+-

    M. Jean-Yves Roy: Combien de phoques faudrait-il?

+-

    M. Georges-Henri Hubert: À l'heure actuelle...

+-

    M. Jean-Yves Roy: Combien de personnes pourraient être employées?

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Vous voulez que je vous révèle des secrets de fabrication? Je ne le ferai pas, mais je peux vous dire qu'il y a suffisamment de phoques. Pour ce qui est du Phoca groenlandica, il y a suffisamment de phoques du Groenland qui viennent et qui s'en vont pour tous les États-Unis d'Amérique. Il n'y a que 500 milligrammes par capsule.

+-

    M. Jean-Yves Roy: Combien de personnes pourraient obtenir un emploi dans la région si on développait ce produit aux États-Unis?

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Présentement, l'usine des Îles-de-la-Madeleine est en marche. Il y en a également une à Terre-Neuve. On parle d'une vingtaine d'employés qui se consacrent aux activités régulières. Il faut ensuite voir à la distribution et à la mise en marché. Pour celle-ci, il faudrait augmenter les endroits de mise en marché, établir un système de grossiste, et ainsi de suite. Tout ça se trouve dans les calepins. On sait quoi faire, encore faut-il que la frontière soit ouverte.

[Traduction]

+-

    M. Peter Stoffer: Ça dit « Produit du Canada »; d'où vient ce produit?

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Ça vient de Terre-Neuve. C'est un excellent produit de Terre-Neuve.

+-

    Le président: Monsieur Hearn.

+-

    M. Loyola Hearn: Monsieur le président, j'aimerais simplement poser une autre question.

    Évidemment, puisque je viens de Terre-Neuve, je connais bien ces capsules. Si M. Efford avait été des nôtres aujourd'hui, il aurait été le parfait vendeur. Quels autres produits du phoque pourrions-nous fabriquer et vendre à l'échelle internationale, si seulement nous avions le cran de le faire?

¸  +-(1440)  

[Français]

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Est-ce qu'il a dit « aux autres pays »?

+-

    M. Jean-Yves Roy: Non, il a dit « quels autres produits ».

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Toutes les parties du phoque sont commercialisables, mais présentement, elles ne sont pas commercialisées à cause de la petitesse du marché. Il est possible de rentabiliser la fabrication de protéines très précieuses dans le domaine de l'alimentation, autant pour l'aquaculture que pour les humains.

    Bien sûr que le gros lot, c'est la fourrure. Ce marché n'a jamais été aussi florissant. On a atteint des prix qui ne se sont jamais payés dans toute l'histoire connue du loup-marin--aux Îles-de-la-Madeleine, on l'appelle ainsi--en d'autres mots, du phoque. Toutes les parties du phoque, son poil entre autres, sont utilisées et génèrent une large gamme de produits.

    Or, nous sommes les uniques propriétaires de ces lots de mammifères marins. Les seuls de qui nous nous sommes inspirés sont les Norvégiens. La Norvège fait la chasse au rorqual, un genre de petite baleine qui donne une huile de grande qualité. Pour ce qui est du reste, c'est nous qui sommes là. Nous jouissons d'un genre d'exclusivité naturelle; à mon avis, les générations à venir pourront en profiter.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Elley, avez-vous d'autres questions?

[Français]

    Excusez-moi, monsieur Roy.

+-

    M. Jean-Yves Roy: Vous m'avez oublié, monsieur le président.

+-

    Le président: Monsieur Roy, s'il vous plaît.

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Veuillez m'excuser, mais la question demande qu'on donne des détails sur d'autres espèces également.

    Pendant toute la journée, on a parlé de préserver la morue, du moins ce qui en reste, et de lui donner une chance de se renouveler par le biais d'un moratoire. Je suis plus ou moins d'accord là-dessus. Il reste que si on diminue la quantité de bouffe des loups-marins au printemps, il est certain que ça va donner une chance aux autres espèces de prendre un peu d'expansion.

    Dans chaque rapport qui traite des ressources, on dit que les phoques mangent tout. On va donc devenir une partie de la solution au problème en allant aux États-Unis. Alors, il faut y aller.

    Venez-vous avec moi?

+-

    Le président: Monsieur Roy, c'est à vous.

+-

    M. Jean-Yves Roy: Vous parlez beaucoup du marché américain. J'ai posé des questions à ce sujet à quelques reprises en Chambre, et on m'a répondu que les négociations durent depuis deux ans. Quels sont les résultats des négociations? C'est très difficile de savoir ce qui se passe et quels seront les résultats. C'est là ma question. Il faudrait que le comité, à un moment donné, pose la question de façon très précise, qu'il fasse savoir qu'il veut connaître le résultat des négociations et peut-être même qu'il fasse comparaître quelqu'un du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, pour qu'on nous dise où en sont les négociations.

+-

    M. Georges-Henri Hubert: J'aimerais souligner, monsieur Roy, qu'un organisme qui se consacre à l'industrie du loup-marin a été créé au Québec. Il s'appelle la Table filière loup-marin inc. Je suis conseiller pour cet organisme et les développements ...

+-

    M. Jean-Yves Roy: Ça n'avance pas.

+-

    M. Georges-Henri Hubert: C'est bloqué. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international n'a pas la volonté d'aller plus loin. On y a peur du lobby écologiste aux États-Unis, qui est très fort. Ce dernier peut se payer une page de publicité dans le New York Times, ce qui coûte des centaines de milliers de dollars. Ce lobby est donc très fort aux États-Unis. Quand il intervient, il peut provoquer beaucoup d'effets néfastes.

+-

    M. Jean-Yves Roy: J'aimerais aussi savoir s'il y a mise en marché de ce produit au Canada.

¸  +-(1445)  

+-

    M. Georges-Henri Hubert: C'est en train de se faire.

+-

    M. Jean-Yves Roy: Vraiment?

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Oui, oui, oui.

+-

    M. Jean-Yves Roy: Qu'en est-il de l'étranger? À titre d'exemple, y a-t-il une mise en marché en Asie?

+-

    M. Georges-Henri Hubert: A l'étranger, nous sommes présents à Guangzhou, à Hong Kong, à Beijing.

+-

    M. Jean-Yves Roy: En d'autres mots, cela commence.

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Oui, cela commence.

+-

    M. Jean-Yves Roy: Bien. Est-ce que cela...?

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Vous savez, il y avait une grande inquiétude de voir la Chine se joindre à l'OMC, mais auparavant, on s'inquiétait du fait qu'elle ne soit pas membre de l'OMC. Elle en fait maintenant partie. Il faut donc se réajuster. Nous devons nous assurer qu'un supplément alimentaire comme celui-ci soit conforme à nos règlements et à nos lois régissant l'alimentation, mais là-bas, c'est bien pire. C'est un fouillis total. Il faut s'ajuster aux règles des deux pays.

+-

    M. Jean-Yves Roy: J'aimerais vous poser une dernière question. Recevez-vous une aide quelconque de la part du gouvernement du Canada pour l'exportation de ce produit?

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Nous sommes connus partout. Nous faisons partie de...

+-

    M. Jean-Yves Roy: Je parle d'aide financière. Recevez-vous une aide financière du gouvernement du Canada?

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Je travaille avec un banquier privé. Je parle d'une banque moyenne, pas d'une grosse banque. Je ne veux pas travailler avec une banque qui oeuvre au niveau international; je n'ai pas des bons rapports avec de telles institutions. Je veux savoir avec qui je travaille. Je travaille donc avec mon ami chinois, comme je l'appelle. Nous travaillons avec une banque que nous connaissons bien.

+-

    M. Jean-Yves Roy: J'espère que vous n'êtes pas propriétaire.

    Ma question est la suivante. Je veux savoir si vous recevez de l'aide du gouvernement du Canada pour mettre ce produit en marché. Nous faisons face à un moratoire sur la morue. On en a parlé tout au long de l'avant-midi et une partie de la journée. Ce moratoire existant, on dit qu'il faut développer l'industrie du phoque, mais pas tuer pour tuer, comme certains l'ont souligné. Je suis d'accord avec eux; il n'est pas question de tuer pour tuer. C'est une ressource qu'on doit exploiter, et il existe des produits liés à cette ressource.

    Malheureusement, vous me dites que le gouvernement du Canada n'offre aucune aide pour le développement et la mise en marché de ces produits. Si on le faisait, on pourrait arriver à développer une véritable industrie et à créer des emplois. Êtes-vous d'accord avec moi? Voilà ma question.

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Nous ne recevons pas d'aide actuellement pour toutes sortes de raisons. Le produit n'est supposément pas à point, mais ce n'est rien de bien sérieux. Tout est conforme à nos lois et aux règlements de Santé Canada.

+-

    M. Jean-Yves Roy: Cela répond à mes questions.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Hubert, ces capsules que vous avez distribuées proviennent-elles de la transformation de phoques du Groenland?

    M. Georges-Henri Hubert : Oui.

    Le président : Y a-t-il une différence selon l'espèce de phoque? Pourriez-simplement obtenir cette huile de n'importe quelle espèce de phoque?

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Non, parce que...

[Français]

la meilleure qualité d'huile provient du Phoca groenlandica, qu'on appelle en anglais « harp seal ». Nous tâchons d'obtenir la meilleure huile possible à tous points de vue. La meilleure qualité d'huile dépend aussi de l'âge du phoque au moment où il est abattu. Il ne faut pas qu'il soit trop vieux. Il ne faut pas qu'il soit trop jeune non plus, il ne doit pas être un pup--en français, on dit « bébé phoque »--, ce n'est pas bon.

[Traduction]

+-

    Le président: Nous sommes donc chanceux que la meilleure huile possible provienne du phoque qui est le plus abondant au Canada.

[Français]

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Oui, c'est vrai. Nous sommes naturellement chanceux. Nous devrions donc en profiter, tout comme les Américains, à mon sens.

[Traduction]

+-

    Le président: Si nous avions accès par exemple au marché chinois, nous n'aurions pas besoin de nous inquiéter du marché américain, n'est-ce pas?

[Français]

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Il y a environ 300 millions d'Américains. Ces 300 millions sont beaucoup plus riches que les 80 millions de Chinois qui ont les moyens d'en acheter.

+-

    Le président: C'est ainsi pour l'instant, mais ce ne sera pas nécessairement le cas dans le futur.

    M. Stoffer, vous avez la parole.

[Traduction]

+-

    M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président.

    Monsieur, combien de capsules ou de pilules peut-on obtenir d'un phoque?

+-

    M. Georges-Henri Hubert: C'est un secret de fabrication!

    Des voix : Oh, oh!

    M. Georges-Henri Hubert : Je vous enverrai une petite lettre.

[Français]

Je vous enverrai un mémo.

¸  +-(1450)  

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Hubert, combien coûte un de ces contenants au détail?

[Français]

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Le prix, chez Jean Coutu, d'un contenant de 120 capsules est de 10,99 $ à 11,99 $, dépendant de la marge de profit du marchand.

[Traduction]

    Entre 10,99 $ et 11,99 $, qu'il y ait solde ou pas.

[Français]

+-

    Le président: Y a-t-il d'autres questions? Merci beaucoup.

[Traduction]

+-

    M. Georges-Henri Hubert: Vous prenez deux capsules le matin et deux en soirée.

    Merci beaucoup.

+-

    Le président: Nous accueillons maintenant de l'Alliance des pêcheurs professionnels du Québec, M. O'Neil Cloutier, directeur, et Jean-François Martel, vice-président.

[Français]

+-

    M. O'Neil Cloutier (directeur, Alliance des pêcheurs professionnels du Québec): Bonjour. Nous avons la chance de nous présenter pour la deuxième fois devant le Comité permanent des pêches et des océans. Nous avons comparu, en effet, l'an passé. Je vous reconnais, d'ailleurs, monsieur Stoffer.

    J'espère être aussi amusant que notre prédécesseur. Nous ne parlerons toutefois pas de cartilage de requin, ni de phoque. Nous nous attarderons plutôt sur la position officielle de l'ensemble des pêcheurs côtiers du Québec sur la Révision de la politique sur les pêches de l’Atlantique. Vous recevrez ce document un peu plus tard. Il est très technique; je me dois donc de le lire en ajoutant des notes explicatives. Nous sommes en mesure de répondre à toutes vos questions, en précisant toutefois que...

[Traduction]

+-

    Le président: N'avez-vous qu'une copie du document?

+-

    M. O'Neil Cloutier: Oui. Vous en recevrez une après notre intervention, si tout le monde veut faire des copies.

+-

    Le président: Disposez-vous d'une copie supplémentaire?

+-

    M. O'Neil Cloutier: Non.

+-

    Le président: C'est malheureux pour les interprètes.

    Monsieur Stoffer.

+-

    M. Peter Stoffer: Pourrions-nous prendre une pause d'une minute pour faire une photocopie pour les interprètes? Elles auront la tâche assez difficile, car ce n'est pas facile lorsqu'il s'agit d'une présentation technique. 

+-

    Le président: Prenons-nous une pause de deux ou trois minutes? Très bien. Nous prendrons deux ou trois minutes pour faire une photocopie ou deux du texte. En fait, si nous faisons des photocopies, nous pourrions en faire pour tout le monde. Cela nous donnera le temps de prendre un café.

¸  +-(1454)  


¹  +-(1507)  

[Français]

+-

    M. O'Neil Cloutier: Monsieur le président, vous nous dites qu'on a 15 minutes pour la présentation. J'espère être assez rapide, mais pas trop pour les interprètes.

+-

    Le président: Ce n'est pas nécessaire de lire la présentation, car nous l'avons devant nous maintenant.

+-

    M. O'Neil Cloutier: D'accord.

    D'entrée de jeu, nous tenons à spécifier que nous sommes l'une des quatre organisations membres de l'Alliance des pêcheurs professionnels du Québec, notre structure provinciale, qui représente presque exclusivement les pêcheurs côtiers de homard, entre autres tous les pêcheurs de homard de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine, une partie des pêcheurs de crabe des zones 16, 13, 14 et 15 de la Côte-Nord et les pétoncliers des zones 14 et 15 de la Côte-Nord.

    On doit dire aussi que les pêcheurs côtiers gaspésiens sont en parfaite harmonie avec le document qui a été déposé par le Conseil canadien des pêcheurs professionnels, dont nous sommes membre par l'intermédiaire de notre organisation provinciale.

    Évidemment, ce document touche la vision qu'ont les pêcheurs côtiers de la Révision de la politique sur les pêches de l'Atlantique. Évidemment, cette Révision de la politique sur les pêches de l'Atlantique n'a pas été demandée par les pêcheurs côtiers puisqu'à l'heure actuelle, la révision ne fait pas l'affaire et n'a jamais fait l'affaire des pêcheurs côtiers pour plusieurs raisons. Nous comprenons aujourd'hui que l'ampleur de cette révision se reflète présentement dans la crise du crabe que l'on vit actuellement dans l'Atlantique. Je vais vous l'expliquer tout à l'heure.

    Alors, pour les pêcheurs côtiers, il est très essentiel que la nouvelle politique soit assise sur deux principes fondamentaux auxquels nous avons toujours tenu et auxquels nous allons toujours tenir. Nous espérons que le gouvernement et le ministre vont en tenir compte. Il s'agit du principe du capitaine propriétaire sur son bateau, pour que la pêche reste de la pêche et non pas une industrialisation à outrance, et du principe de la séparation de la flotte, pour qu'on puisse voir des pêcheurs transférer leurs connaissance, leur culture de la mer à leur famille, à leurs enfants, filles et garçons,

    Si ces deux principes ne sont pas mis en évidence dans l'ensemble du texte sur la révision, nous allons nous y opposer et nous allons le faire savoir au gouvernement par des moyens que nous comptons prendre le moment venu. Nous espérons que le gouvernement, qui se fait accuser présentement de ne jamais écouter les pêcheurs, écoutera les pêcheurs cette fois-ci, et non pas la grosse industrie.

    Alors, le principe du capitaine propriétaire est fort simple. Pour opérer un bateau et obtenir un permis, il faut que le permis soit au nom d'une personne qui a les connaissances et les compétences requises pour aller sur l'eau, ainsi que le niveau de scolarité nécessaire pour bien comprendre les principes fondamentaux de la conservation et les principes économiques reliés à la pêche. Il faut que cette personne-là soit identifiée et identifiable. Il faut qu'elle soit aussi imputable. Alors, à ce moment-là, il faut que le permis soit au nom d'une personne et non d'une compagnie, comme on l'a vu dans le passé.

    On a pu voir, dans les années 1970, la BC Packers, une compagnie de l'Ouest canadien, qui, ayant eu une permission du gouvernement canadien, était venue ici, dans le golfe Saint-Laurent, notamment à Gaspé, et pendant 24 ans sans interruption, nous n'avons pas vu une queue de hareng aux Îles-de-la-Madeleine. Cette pêche à tout simplement été ruinée.

    Alors, nous ne voulons pas voir ces grands mouvements de grands bateaux qui sont contestés présentement à l'échelle mondiale. On ne vous apprend rien; je pense que vous écoutez la télévision comme nous, que vous vous déplacez comme nous.

    Alors, pour nous, c'est fondamental que le ministre n'adopte pas une révision comme on l'a fait dans l'Ouest avec le rapport Sprout. Vous savez ce qui s'est passé dans l'Ouest canadien, où 50 p. 100 des pêcheurs sont totalement disparus.

    Pour le gouvernement, ça peut paraître une option intéressante lorsqu'on dit qu'il y a beaucoup trop de pêcheurs, mais ce n'est pas une option très vivante, très vivifiante ou très louable pour les collectivités. Nous pensons qu'il y a d'autres options, notamment le partage de la richesse, mais éliminer d'une façon aussi difficile, aussi abrupte, 50 p. 100 des pêcheurs par une technicalité est une chose dont nous ne voulons pas ici, en Atlantique.

¹  +-(1510)  

    Le deuxième principe, c'est celui de la séparation de la flotte. Nous pensons que nous devons--et cela est déjà allé beaucoup trop loin--conserver les pêches à un niveau d'exploitation raisonnable, c'est-à-dire qu'il faut qu'on exploite la mer avec des bateaux qui ne dépassent pas la capacité de reproduction ou de régénérescence des espèces. A ce moment-là, on a un principe qui nous protège et qui empêche les industries, la grosse industrie, d'effectuer des opérations de pêche avec de très gros bateaux. C'est le principe de séparation de la flottille.

    Tous les bateaux de moins de 65 pieds doivent avoir comme opérateur soit le capitaine propriétaire ou un capitaine. Nous devons conserver ce principe. C'est le seul qui nous protège contre la venue de très gros bateaux qui ne viseraient qu'à récupérer le maximum de revenus, donc qui généreraient des besoins en capitaux importants, ce qui ferait l'affaire des banques, mais pas celle des pêcheurs côtiers ni celle des collectivités ni celle de la ressource. On a vu cela dans le passé; on ne veut pas le revoir.

    Chez nous, dans le golfe, on a une flottille qui s'apparente très bien à une volonté régionale de développement et de conservation. Je peux vous dire que dans ma région à moi, en Gaspésie, nous sommes 225 pêcheurs de homard qui vivons relativement bien de la pêche au homard, bien que nos revenus soient très modestes. On ne voudrait pas faire remplacer cela par sept ou huit bateaux. Cela ferait l'affaire de la grosse industrie, mais on ne voudrait sûrement pas voir cela. Sinon, c'en serait fini des régions. Alors, c'est bien important que vous compreniez ça.

    Le document est une synthèse du document que le Conseil canadien des pêcheurs professionnels a déposé. Nous savons très bien qu'il y a présentement des industriels qui veulent avoir accès. Alors, pour eux, il serait important que la loi soit modifiée en leur faveur, mais nous tenons à vous aviser que si jamais cela se faisait en leur faveur, ce serait tout simplement la fin des pêches.

    On a éliminé des stocks tout autour de la planète sans aucune amertume, sans aucune arrière-pensée. En tout cas, on vous avise que si jamais les stocks qui nous font vivre sont éliminés, ça ne sera pas parce qu'on ne vous l'aura pas dit. Vous allez le savoir. Vous le savez présentement. Alors, il ne faudrait pas qu'on se retrouve dans deux ou trois ans pour se faire dire que si quelqu'un vous avait avisés... Non, non, vous le savez.

    Nous sommes des pêcheurs. Nous n'avons pas demandé la Révision de la politique sur les pêches de l'Atlantique. Il a fallu qu'un illuminé convainque quelqu'un à Ottawa de s'embarquer là-dedans, et on sait qui est cet illuminé. On va garder son nom, mais on n'a jamais demandé la Révision de la politique sur les pêches de l'Atlantique. Pour nous, il n'est pas question qu'on autorise l'accès à la pêche aux industriels. Pourquoi? Vous le voyez aujourd'hui, et je pense que ce qui se passe dans le golfe Saint-Laurent présentement tombe à pic. Il y a là 4 000 personnes qui sont menacées de ne pas avoir d'emploi en usine, tout simplement parce qu'il y a des gens qui ont beaucoup de moyens, suffisamment de moyens même pour ne pas pêcher, puisqu'ils l'ont annoncé, et qui s'en foutent carrément.

    Alors, si ces deux principes-là sont sautés, on va avoir affaire à ce genre de situation. Il est très important que vous sentiez qu'on ne peut pas tenir un gouvernement ni un ministre de cette façon-là au Canada, qu'il soit libéral, conservateur, allianciste, bloquiste ou peu importe.

    Alors, présentement, ce qui se passe dans les pêches, dans la pêche au crabe, c'est exactement l'illustration de ce qui va se passer dans les autres pêches si on fait sauter ces deux principes-là. Je peux vous dire qu'il y a bien des industriels qui attendent juste le moment de pouvoir rentrer avec leurs gros sous et ensuite décider de tout ce qui va se passer dans l'Atlantique. Et c'est fort simple. Pourquoi? Parce que c'est une question d'argent. Vous le voyez aujourd'hui, c'est vraiment une question d'argent.

    On a assiégé une région, une municipalité, on a posé des gestes très malheureux. Il n'est pas question qu'on s'assoie, qu'on dise que c'est vrai, qu'on les encourage, qu'on change la loi et qu'on rende cela plus permissible.

¹  +-(1515)  

Il ne faut pas penser que nous sommes en Amérique du Sud. Si on vous dit ça, c'est parce qu'on l'a vécu. Moi-même, mon collègue et d'autres collègues avons été les principaux initiateurs du partage en 1995 et on y a presque laissé notre peau. On s'est battus à l'époque pour faire accepter le principe du partage et on pense qu'il y a de la place dans les pêches pour ce genre d'initiative sociale. C'est collectif, c'est social, et on ne voudrait pas que d'autres gens soient aux prises avec ce même problème.

    Donner aux entreprises un accès aux pêches serait éliminer, en fin de compte, une grosse partie de la collectivité. Alors, à ce moment-là, il faut y penser. Je pense qu'il faut y penser.

    Vous avez vu ce qui s'est passé pour la morue. C'est un exemple très, très éloquent. Le gouvernement canadien, avec ses ministres, ses fonctionnaires, ses députés, sa pêcherie en général, s'organisent pour contrôler ses efforts de pêche, ses plans de conservation à l'intérieur du golfe, en oubliant qu'une morue n'a pas de frontières, comme un hareng ou un sébaste, et en oubliant que 200 miles plus loin, elles vont être prises par des flottilles étrangères, par des bateaux qui sont comme celui qu'on a vu en Nouvelle-Écosse en fin de semaine, des bateaux où les gens travaillent 16 heures par jour au profit de grosses sociétés, de très grosses sociétés, et qui prennent tout ce qui bouge au fond de l'eau. Nous, pendant ce temps-là, les caves à l'intérieur, nous continuons cette mascarade. On se tord les boyaux, on se lance des invectives, on se bat pour avoir une queue de poisson, alors que ces grosses entreprises-là y ont accès autant que nous, parce que le poisson voyage et qu'elles ramassent tout le poisson pendant que nous, à l'intérieur, on n'a plus rien. Et c'est la deuxième fois.

    Il ne faudrait pas qu'on pousse l'odieux d'accepter le rapport Sprout. Je crois que les députés au Canada devraient tout simplement remettre ça aux oubliettes et dire qu'on est capables de réformer. On peut peut-être réformer différemment. Sinon, il faut accepter que les deux principes mentionnés tout à l'heure soient inscrits et protégés à l'intérieur du document.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Nous passerons maintenant aux questions. Monsieur Hearn.

¹  +-(1520)  

+-

    M. Loyola Hearn: Merci beaucoup, monsieur le président.

    J'ai été frappé par votre commentaire sur le document de la révision de la politique. Nous avons nous aussi été surpris. On ne nous a certainement pas consultés là-dessus. En fait, nous n'avons pas participé directement aux consultations.

    Si vous étudiez la liste de ceux qui ont comparu devant le groupe responsable de la révision, vous constaterez qu'elle est bien différente de la liste de témoins que le comité entendra lors de ses déplacements. Les témoins que nous avons entendus aujourd'hui nous ont tous dit la même chose que vous. Il s'agit de gens qui sont directement touchés, qui ont toujours participé au secteur des pêches, qui sont ceux qui tirent directement profit de l'exploitation des ressources halieutiques, comme ce devrait être le cas, et ils nous disent que le détenteur de permis devrait être celui qui pêche à bord du bateau.

    Je ne sais pas pourquoi on a lancé cette révision de la politique. Je ne sais pas vraiment qui avait proposé cette révision. Comme je l'ai dit, si vous étudiez la liste des témoins, il est clair que nombre de ceux qui se sont adressés aux responsables de la révision avaient des intérêts directs.

    Je suis parfaitement d'accord avec les principes que vous avez énoncés, et je crois qu'il en va de même pour tous mes collègues ou tout au moins la majorité d'entre eux. Je me demande simplement si le simple pêcheur à plein temps peut vraiment se faire entendre. Très souvent lorsqu'on tient de grandes audiences, il semblerait que l'industrie soit représentée et lorsque les pêcheurs le sont, ils sont habituellement représentés par les grands syndicats et je me demande parfois si ces derniers communiquent bien le message de celui qui est à bord du bateau de pêche.

    Qu'en pensez-vous?

[Français]

+-

    M. O'Neil Cloutier: Oui. Sauf avis contraire, je crois que les grands syndicats de pêcheurs--au Québec, on en n'a pas, mais on a de grandes organisations, par contre--communiquaient très bien les enjeux de la réforme.

    Pour ma part, j'ai assisté à quatre réunions sur la réforme. La première réunion qu'on a eue avec M. Paul Sprout a eu lieu à Gaspé même, où étaient réunis l'ensemble des acteurs de l'industrie des pêches, c'est-à-dire les crevettiers, crabiers, homardiers, morutiers, turbotiers de tout acabit, mobiles, fixes, côtiers et semi-hauturiers, et tous, tant qu'il y en avait, ont demandé à Paul Sprout de ne pas toucher aux deux principes fondamentaux mentionnés tout à l'heure.

    J'ai assisté à trois réunions que je qualifierais d'humaines, de très humaines. On y avait accès, on avait droit de parole, on pouvait déposer des mémoires. D'ailleurs, on ne fait que déposer des mémoires depuis trois ans. Il faudrait peut-être aller voir dans les bureaux de M. Sprout; vous les y trouveriez.

    J'ai assisté à une dernière réunion à Halifax cet hiver, au mois de janvier, qui a été qualifiée de non-humaine par l'ensemble des participants. C'était une réunion où M. Sprout avait pris soin de confronter l'ensemble des syndicats de pêcheurs, c'est-à-dire des grandes organisations et des petites organisations de pêcheurs, à l'ensemble des industriels de la pêche, qui étaient représentés par des avocats. Et ça, on n'a pas aimé ça du tout, du tout.

    Dans nos discussions, on nous confrontait toujours à des messages que des avocats traduisaient, qu'ils nous transmettaient pour leurs clients, qui étaient de très gros industriels. Quand on parle de gros industriels, on parle de Daley Brothers Limited, Blue Cove Group Inc., Clearwater, de tous ces gros groupes qui veulent avoir accès à la ressource, qui veulent prendre la ressource.

    Alors, j'ai trouvé ça profondément choquant, pour ne pas dire écoeurant, de la part du ministère que de nous avoir convoqués à une réunion où tous les dés étaient pipés d'avance.

    Encore une fois, par l'intermédiaire de nos organisations provinciales, pour ceux qui en ont, et de nos syndicats, pour ceux qui, comme Terre-Neuve, en ont, nous avons demandé à M. Sprout de ne pas toucher à ces deux principes fondamentaux qui font que la pêche s'articule aujourd'hui autour de cinq provinces dans l'Atlantique. Et c'est très bien ainsi. S'il y a des provinces qui en ont plus et que d'autres en ont moins, ça n'a pas d'importance, du moment que ce sont des pêcheurs qui peuvent vivre avec leur famille dans les collectivités et gagner leur vie des fruits de la mer. Je ne pense pas qu'il ait compris.

    Il faudrait peut-être que vous transmettiez à vos organisations respectives la volonté que nous avons de ne pas changer cela, de ne pas changer ces deux principes-là. Je pense que c'est très important que quelqu'un comprenne au Canada où on s'en va.

    C'est sûr que pour un gouvernement ou pour quelqu'un qui pense récupérer beaucoup de sous, c'est beaucoup plus simple de remplacer les pêcheurs actuels par 100 bateaux d'industriels que d'avoir 20 000 pêcheurs, disons, qui travaillent pendant trois, quatre, cinq ou six mois à chaque année et que devoir répondre à tous leurs besoins et à tous les tracas qui peuvent survenir les années où il n'y a pas de poisson, celles où il y en a trop, celles où il y a moins de partage ou pas de partage, et devoir tenir compte des autochtones. C'est sûr que c'est beaucoup plus simple sur papier, mais ça n'a pas d'âme non plus.

    Je tiens à répéter ce que j'ai lu, et ça sera probablement le sens de ma dernière intervention. J'ai lu un livre cet hiver où on traitait de l'histoire fabuleuse de la morue. La morue a été le premier élément de troc dans le monde, avant le poivre. Alors, l'histoire était fort intéressante et tout allait très bien jusqu'à ce que de grandes industries provenant de l'Angleterre inventent, en 1885, le premier chalut à vapeur. En l'espace de 40 ans, dans le golfe, il n'y avait plus de morue. Il ne restait plus rien ni sur les côtes du Labrador ni sur les côtes de Terre-Neuve. Pour quoi? Pour l'industrialisation, juste pour l'industrialisation, pour permettre aux banques de faire de gros profits en finançant ces grosses entreprises, sans permettre aux gens, à la population de vivre.

    Alors, moi, j'ai un bateau qui me permet, par exemple, de gagner 70 000 $ par année, mais je fais vivre trois personnes avec ce 70 000 $. Il y a des gens qui ont des bateaux de 700 000 $ qui sont en grève présentement. Ce ne sont pas des gros bateaux d'industriels, mais ce sont des bateaux qui s'orientent davantage vers la grosse industrie et qui font vivre cinq personnes. Mais ils ont 700 000 $. Alors, c'est facile à comprendre.

¹  +-(1525)  

[Traduction]

+-

    Le président: C'était une longue réponse.

    Monsieur Hearn, avez-vous une autre question? Non?

    Très bien. Monsieur Elley.

+-

    M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Alliance canadienne): Je tiens à vous remercier d'être venu nous rencontrer pour nous présenter cet exposé.

    Vous avez mentionné ce qui s'est produit sur la côte Ouest. Je viens de l'île de Vancouver et je représente la circonscription maritime de la région. Les pêcheurs de ma circonscription me disent exactement ce que vous venez de nous dire.

    Comme vous le savez, il y a eu l'effondrement des stocks de morue en 1990 et le MPO avait un plan. Il a racheté un grand nombre de permis. Sur la côte Est, nous savons que le résultat a été qu'il y avait plus de gens qui pêchaient qu'auparavant. Il y a donc quelque chose qui n'a pas fonctionné, parce que le rachat après tout devait régler le problème.

    Sur la côte Ouest, évidemment, il y a eu le programme de rachat de permis et vous avez raison, 50 p. 100 des pêcheurs ne pêchent plus. C'est tout un problème pour l'ouest du pays. Cela veut dire évidemment qu'on a détruit le mode de vie de ces gens. C'est aussi simple que ça.

    Je crois que vous avez visé juste lorsque vous avez dit que le problème c'est qu'il existe deux visions complètement incompatibles de ce que devraient être les pêches. Pour être honnête, je pense—et mes pêcheurs sont du même avis—que le MPO vise à trouver une façon de ne plus avoir à traiter avec 20 000 ou 25 000 pêcheurs au Canada, parce que ça pose des problèmes. C'est beaucoup plus facile d'avoir affaire à deux, trois, quatre ou six grandes sociétés et de gérer de cette façon une pêche plus sélective.

    Je pense donc que c'est là que réside le problème, et nous, les parlementaires, et vous, les pêcheurs, devons faire front commun et trouver une façon de contrer cette tendance, si elle existe en fait. J'aimerais savoir ce que vous en pensez et si vous jugez que j'ai bien interprété la situation.

¹  +-(1530)  

[Français]

+-

    M. O'Neil Cloutier: Vous avez très bien saisi. Le problème est que personne ne semble vouloir écouter.

    Je crois que nous, les organisations de pêcheurs, avons suffisamment déposé de documents depuis trois ans. Nous avons suffisamment parcouru de kilomètres depuis trois ans, de Halifax à Ottawa, en passant par Montréal, Québec, Gaspé et Moncton, pour espérer, au moins, que quelqu'un comprenne quelque chose à ce sujet .

    Si, comme vous me dites, personne ne vous écoute non plus, cela va très mal. Comment pourrons-nous trouver une stratégie pour nous faire tous entendre?

    Je pense qu'il faut interpeller les élus. C'est dommage d'ailleurs que M. Farrah ne soit pas ici, parce qu'il est le digne représentant du parti au pouvoir. Il faut interpeller tout simplement le futur premier ministre, parce que j'ai l'impression que le premier ministre sortant ne se mêlera plus de ce dossier.

    Retardez donc le plus possible l'adoption du projet de réforme. Je ne sais pas où en est le processus d'adoption, à quelle lecture on en est. Il faut interpeller le futur premier ministre ou la future première ministre et lui demander quel mode d'exploitation il ou elle veut établir dans l'ensemble du Canada Atlantique. Il faudrait peut-être revenir en arrière dans le cas du Pacifique. On sait ce qui s'est vraiment passé dans le Pacifique. On a dépensé des milliers de dollars pour aller voir. On le sait. On sait tous ce qui s'est passé. Je crois donc que notre stratégie devrait consister, notamment, à interpeller le futur premier ministre et retarder l'adoption de la réforme. Je crois qu'un projet de loi a été déposé, que la réforme est présentée. Retardez son acceptation le plus possible et voyez quelles politiques économiques au niveau des pêches la future première ministre ou le futur premier ministre entend adopter. Nous sommes incapables d'influencer le ministère des Pêches et des Océans. Nous avons essayé. Nous connaissons le 200, rue Kent, par coeur. Nous y allons quatre ou cinq fois par année. Nous avons essayé, mais nous sommes impuissants. Nous croyons que le gouvernement va adopter cette nouvelle politique et que cela va provoquer la fin des émissions.

    On peut voir ce phénomène dans l'industrie du crabe. Cette industrie a déjà été une belle industrie, mais elle n'a plus d'âme maintenant parce qu'il y a trop d'argent par individu. Elle n'a plus d'âme. Les gens n'écoutent plus. Ils font trop d'argent. Alors, quand ils font trop d'argent, ils n'écoutent plus. C'est fort simple. Mais cela a été une belle industrie.

    Si je possédais deux millions de dollars et que vous tentiez de me convaincre d'aller vous rencontrer, je n'irais pas si je n'en avais pas le goût. Si je ne possédais pas deux millions de dollars, je serais obligé d'aller vous rencontrer et j'irais. C'est ainsi.

    On a vu dans d'autres pays ce qui arrive quand les industries deviennent trop grosses, quand elles s'accaparent l'ensemble des richesses, Nous avons vécu cela en 1995 en Gaspésie. Le 8 mai 1995, il y avait 300 employés d'usine sur le terrain, devant mon bungalow, prêts à nous lyncher, ma femme, mes enfants et moi, parce que j'avais osé parler de partage des richesses. C'était le même débat qu'aujourd'hui. Nous avons vécu cette situation; nous la connaissons bien. Je préfère quand même parler de partage des richesses, parce que c'est beaucoup plus humain que de parler de non-partage et de réserver l'ensemble des revenus de la pêche à quelques entreprises très florissantes. On ne veut pas de cela. On ne veut pas de méga-entreprises. Elles n'ont pas d'âme. Il n'y a plus de vie quand c'est ainsi. Cela ne reflète pas la culture des habitants, cela ne reflète pas la culture du Canada et cela vide les régions.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Roy.

[Français]

+-

    M. Jean-Yves Roy: Merci. D'après ce que vous me dites, moi, je fais une comparaison entre deux domaines où on vit possiblement des difficultés à l'heure actuelle. Je fais une comparaison avec la forêt.

    Je vais vous donner un bel exemple. Si vous êtes propriétaire de lots privés et que vous avez l'intention de les exploiter toute votre vie, vous ne ferez pas de coupe à blanc. Vous ne les plumerez pas et vous ne vous en irez pas.

    Ce qu'on a vécu au Québec avec l'industrie forestière, c'est que justement, de grandes entreprises ont eu accès à notre ressource, et ça, de façon importante. Elles ont complètement coupé l'ensemble de notre forêt, au point où on est rendus presque à une rupture de stock à la grandeur du Québec. Vous avez probablement vu le film L'Erreur boréale; ce n'est pas une illusion.

    Je fais une autre comparaison avec l'agriculture. Ce qu'on vit possiblement dans l'agriculture, c'est que le gouvernement fédéral, à l'heure actuelle, en négociant avec l'Organisation mondiale du commerce, risque d'abandonner ce qu'on appelle les plans conjoints. Si vous abandonnez les plans conjoints en agriculture, on va se retrouver uniquement avec de très grandes entreprises concentrées autour des grands centres. Il n'y en aura plus en région.

    Je suis du même avis que vous et je considère que c'est la même chose dans le secteur de la pêche.

    M. Boucher nous a fait une remarque tout à l'heure que je relisais et qui me posait des difficultés. Je vais vous la relire parce que c'est dit justement dans la politique de révision:

L'approche classique de la gestion des pêches au Canada est trop paternaliste.

    Je la lis très lentement.

Ceux qui exploitent la ressource et en bénéficient n'exercent guère d'influence sur sa gestion et sont peu encouragés à l'utiliser de façon durable.

    C'est ce qui est dit dans le document dont vous nous parlez.

    Voici le commentaire de M. Boucher:

Il circule dans le milieu que ceux qui exploitent la ressource et en bénéficient exercent une grande influence sur la gestion et comptent bien l'utiliser de façon durable. Plus les revenus de pêche sont élevés, plus ils sont intéressés à l'utiliser de façon durable.

    La dernière phrase me pose un problème. Je lui aurais posé la question tout à l'heure, si on avait eu le temps. Personnellement, je ne crois pas ça, parce que plus une entreprise fait de l'argent, plus elle veut en faire, et plus elle veut en faire rapidement, moins elle s'occupe de la conservation.

    Êtes-vous d'accord avec moi là-dessus?

¹  +-(1535)  

+-

    M. O'Neil Cloutier: Oui, je suis d'accord. Je dirais même que dépendamment de la grosseur de l'entreprise, si c'est encore une entreprise qui est dirigée par un particulier ou une entreprise familiale, il peut peut-être avoir une fin à la volonté de vouloir faire beaucoup d'argent et penser plus à la conservation, plus à l'exploitation durable. Mais si c'est une entreprise sans âme, c'est-à-dire une entreprise à numéro, une multinationale qui exploite, elle veut des profits, point. Alors, moi aussi j'ai un peu de misère face à ça, parce que ce n'est pas ce qu'on voit présentement dans la crise du crabe qui nous frappe dans l'Atlantique. Ce n'est vraiment pas ça.

    Pour faire le parallèle avec la forêt, c'est vrai. M. Desjardins et beaucoup d'autres, d'ailleurs, ont dénoncé la façon de faire des grosses entreprises et ont remarqué le parallèle qu'il y avait avec les pêches. C'est devenu tellement préoccupant que...

    Est-ce que vous êtes venu en voiture?

    M. Jean-Yves Roy: En avion.

    M. O'Neil Cloutier: Pour ceux qui retournent en Gaspésie, s'ils passent par le sud, à l'entrée du pont de Campbellton qui joint le Nouveau-Brunswick à la Gaspésie, vous remarquerez les collines sur la route 132. Elles sont en train de se faire cleaner. Le seul contact visuel que les touristes ont en arrivant dans ce secteur-là va devenir celui de montages tout simplement chauves. Moi, je pensais que c'était seulement notre tête qui pouvait être chauve, mais là, les montagnes vont devenir chauves complètement. Pourquoi? Parce qu'on ne peut pas arrêter les grandes entreprises de vouloir le bois à tout prix. C'est la même chose dans le domaine de la pêche.

    Quand une entreprise fait trop d'argent, quand le bateau coûte trop cher, qu'il est devenu tellement gros que c'est le banquier qui force le pêcheur à aller à la pêche ou que c'est le banquier qui gère l'entreprise, ça va mal. Eux, ils font de l'argent. Vous le voyez à la bourse; vous voyez les résultats des banques. Il y a deux gros groupes qui font de l'argent dans le monde présentement: les pétroliers et les banquiers.

    Alors, c'est vrai. Comment arrêter ça? C'est une autre problématique. Nous, je pense que nous n'avons pas perdu espoir encore. On ose croire que quelqu'un va se réveiller à Ottawa et va dire de garder les pêches à une dimension plus humaine. Ce serait peut-être préférable, mais on n'en a pas le pouvoir. On ne sait même pas qui va prendre les décisions. C'est ça qui est très difficile pour nous.

    Prenons l'exemple des pêcheurs de homard en Gaspésie. Saviez-vous que les pêcheurs de homard en Gaspésie créent 800 emplois dans une bande d'exploitation d'à peine un mille de largeur sur à peu près 400 kilomètres autour de la Baie-des-Chaleurs, de Gaspé-Nord jusqu'à Miguasha? Quant aux crabiers--juste en guise de comparaison--il y a 130 entreprises pour l'ensemble du golfe, soit 160 milles par 160 milles pour créer 450 emplois sur les bateaux. Nous, on vit dans un territoire d'exploitation d'un mille de largeur sur de 20 milles le longueur du littoral, on crée 800 emplois et on s'assure qu'année après année, les mesures de conservation soient suffisantes pour nous permettre d'avoir des revenus d'année en année. Ça fait 50 ans que ça dure. On ne s'est pas trompés; on a travaillé fort jusqu'à maintenant

    On a été les premiers à mettre des mesures de conservation assez solides pour le homard à partir de 1996. On a voulu les appliquer en 1992, mais le gouvernement n'était pas prêt. On voulait augmenter la taille légale du homard pour permettre à nos homards de pondre et de grossir pour augmenter le groupe, mais le gouvernement n'était pas prêt à nous suivre en 1992. Il a fallu attendre en 1997 pour réussir à augmenter la taille légale du homard en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine.

    Mais on vit quand même avec deux millions de livres qui sont prises en Gaspésie. Ce n'est pas beaucoup deux millions de livres: 225 pêcheurs propriétaires et 800 emplois. Vous allez me dire que c'est de l'emploi de timbres. On n'est pas gênés d'avoir de l'emploi de timbres puisqu'il y en a partout. On les a pareil, par exemple, nos emplois. Ce sont deux millions de livres de homard qu'on entre bon an mal an, et la ressource est très, très stable. Ça, ce sont des modèles de développement économique, de soutien économique.

    Si ça se passait comme ça dans l'ensemble des autres ressources, on aurait beaucoup plus d'emplois. Au tournant du siècle, il y avait 4 000 pêcheurs côtiers en Gaspésie. Il en reste 300.

¹  +-(1540)  

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Wood.

+-

    M. Bob Wood: Monsieur Cloutier, je pense que vous avez signalé un peu plus tôt que vous représentiez trois groupes. Combien de pêcheurs représente l'Alliance des pêcheurs professionnels du Québec?

[Français]

+-

    M. O'Neil Cloutier: Je représente entre 600 et 700 pêcheurs côtiers de trois régions: c'est-à-dire de la Côte-Nord, de Sept-Îles vers La Tabatière et Blanc-Sablon, donc la Côte-Nord du Québec; de la Gaspésie, de Gaspé-Sud, à partir de Gaspé jusqu'à Miguasha. Malheureusement, nos turbotiers de Gaspé-Nord nous ont quitté pour d'autres raisons. La diminution de l'espèce a créé beaucoup de remous quand la ressource n'était pas là. Alors, ils nous ont quitté. La troisième région, ce sont tous les pêcheurs de homard des Îles-de-la-Madeleine, ainsi que les pêcheurs de crabe des zones 16, 15, 14 et 13 de la Côte-Nord, de Sept-Îles, incluant les pétoncliers. Donc trois régions sont représentées.

[Traduction]

+-

    M. Bob Wood: J'a pris quelques notes rapides, et j'essaie de comprendre exactement ce que vous avez dit. J'espère que vous pourrez m'aider.

    Vous avez mentionné lors de votre exposé d'autres options qu'on pourrait retenir. Vous en souvenez-vous? Je ne sais pas si vous parliez de la séparation des flottilles, ou de ces soi-disant contrats... Quelles sont ces autres options que vous avez mentionnées?

[Français]

+-

    M. O'Neil Cloutier: Oui, les autres options, c'est de faire une fois pour toutes la distinction entre la pêche industrielle et la nécessité de maintenir une pêche que je qualifierais d'artisanale. Quand je parle d'une pêche artisanale, cela ne veut pas dire avec des méthodes de l'âge de pierre, mais artisanale dans son ensemble, c'est-à-dire avec des bateaux de taille moyenne, donc des besoins en capitalisation moindres que ceux de la pêche industrielle.

    Nous croyons que dans un plan d'eau comme le golfe Saint-Laurent, il est utopique de croire qu'on peut pratiquer la pêche industrielle, parce que n'est pas assez grand, pas assez vaste. Alors, on devrait avoir un modèle de développement dans ce plan d'eau-là, dans l'ensemble du golfe Saint-Laurent, pour les cinq provinces, un modèle qui s'apparenterait plus au développement de la pêche artisanale, c'est-à-dire des pêcheurs de catégorie moyenne avec des capitalisations moyennes et employant le maximum de personnes, et non pas une pêche industrielle avec de très gros bateaux, des coûts très élevés pour ces bateaux-là, de très grosses infrastructures et immobilisations, de très gros besoins de capitalisation et très peu de main-d'oeuvre. C'est ce que je disais: il y a une autre option. Il faudrait faire comme avant. Choisissons-la, par exemple, parce qu'elle est en train de disparaître.

    Avant, en 1960, en Gaspésie, il y avait 4 000 pêcheurs côtiers qui vivaient de l'agriculture, de la forêt et de la pêche en même temps; c'était des gens polyvalents. En hiver, ils bûchaient; au printemps et en automne, c'était l'agriculture, et au printemps, à l'été et en automne, c'était la pêche. On a remplacé cela par une centaine de chalutiers dans la pêche au poisson de fond. Maintenant, les chalutiers ne peuvent plus pêcher. Pourquoi? Parce qu'on n'a pas mesuré la capacité du plan d'eau, la capacité d'absorption du plan d'eau. On pensait qu'on pouvait pêcher avec ces équipements de plus en plus performants, de plus en plus industrialisés, mécanisés et on s'est trompés. On s'est trompés puisqu'on a la preuve aujourd'hui que ce n'était pas possible, que c'était de l'utopie. C'est nous, les Gaspésiens, qui sommes pris avec ça maintenant. Les gros bateaux sont partis tout comme les banques, qui se sont tournées vers d'autres secteurs, mais nous, on est pris avec le problème. La pêche est fermée, de même qu'à Terre-Neuve d'ailleurs.

    Comprenez-vous l'autre option? C'est celle qui vise à rendre la pêche plus humaine, à revenir en arrière, à exiger que la taille des bateaux soit réduite lors du remplacements des bateaux. On ne peut pas, évidemment, tourner la page d'un coup sec, mais on peut dire, par exemple, comme on le dit présentement dans le golfe suite au propos du ministre: pour le crabe, ça va être 200 000 tonnes par bateau; c'est suffisant. Utilisez vos bateaux, mais quand ils seront vraiment finis, achetez-en de plus petits. Faites vivre d'autre monde. C'est le message que le ministre passe.

¹  +-(1545)  

[Traduction]

+-

    M. Bob Wood: Monsieur Martel.

[Français]

+-

    M. Jean-François Martel (vice-président, Alliance des pêcheurs professionnels du Québec): J'aimerais vous donner un exemple assez récent: en Islande, des pêcheries de morue ont été ruinées. La concurrence avec l'Angleterre ainsi qu'avec d'autres pays était très forte. Ils ont commencé par délimiter les eaux territoriales à trois milles, ensuite à dix, puis à cinquante. Ils ont retiré le chalutage à l'intérieur de la zone de 50 milles, et maintenant, ils pêchent probablement avec de gros bateaux, parce que la mer est assez agitée.

    Il faut que les bateaux soient adaptés à la géographie locale. Ainsi, ils ont changé d'engin de pêche et ont remonté les stocks, comme nous le faisons avec le homard. On est partis d'une biomasse qui était basse et on l'a augmentée. Dans certains secteurs, ils ont plus de difficulté alors qu'ailleurs, les choses vont mieux. Il reste qu'en général, le mouvement est à la hausse.

    Il faudrait apprendre de nos erreurs; ce n'est pas la première fois qu'on est confrontés à ce problème. Cela remonte aux années 1950, 1960 et 1970. Il semble qu'on n'ait pas appris notre leçon. En ce sens, rien n'a changé.

    Quand on a rouvert la pêche à la morue après le moratoire, tout le monde a continué à utiliser les mêmes engins et les mêmes petits carrés à chaque flotte. Personne n'a perdu son petit carré. Pourquoi est-on obligés de cesser les activités à nouveau alors qu'en plus, cette fois-ci, rien n'est prévu pour soutenir ces gens-là? Rien.

    À cause de la crise du crabe, ceux qui travaillent dans le secteur de la morue ne pourront pas recevoir d'allocations de soutien. Il n'y a plus de pêche au crabe. La situation est grave. Si aucune mesure n'est prise, ça va être la révolution partout autour du golfe, et la prochaine fois que vous viendrez ici, ce sera peut-être en camion blindé plutôt qu'en avion. Merci.

+-

    M. O'Neil Cloutier: Monsieur le président, excusez-moi d'insister, mais est-ce que vous comprenez bien l'autre option? On disait plus tôt que la politique et la réforme s'orientaient vers l'industrialisation et vers une plus grande mécanisation des méthodes. Or, à mon avis, on devrait faire le contraire. On devrait ramener l'exploitation des pêches à un niveau plus décent, plus respectueux de la ressource, plus social, plus vivable, plus collectif, et l'orienter davantage vers les humains plutôt que vers des robots, des téléviseurs et des appareils à 25 000 $ ou 38 000 $.

    Vous comprenez?

[Traduction]

+-

    Le président: Je pense que nous comprenons très bien.

    Voulez-vous ajouter quelque chose, monsieur Wood?

+-

    M. Bob Wood: Non, merci.

+-

    Le président: Monsieur Stoffer.

+-

    M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président.

    J'adore entendre les termes «social» et «collectif». Quels mots merveilleux! Sans aucun doute les termes préférés de Tommy Douglas.

    Monsieur Cloutier, je suis très heureux de vous revoir.

    Certaines choses se sont produites récemment et j'aimerais que vous me disiez ce que vous en pensez. Lorsque le ministre des Pêches de l'époque, M. John Crosbie, avait décidé de mettre fin à la pêche à la morue dans le golfe et dans le nord de Terre-Neuve et au Labrador, il avait dit que la seule façon de régler le problème était d'avoir un système de QIT, de quotas individuels transférables. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

    De plus, un peu plus tôt cet hiver, le ministre a levé le moratoire qui existait depuis 10 ans pour la pêche à la morue au large du Cap-Breton dans 4Vn et il a autorisé les chalutiers à pêcher dans cette zone pendant la pêche d'hiver après un moratoire de 10 ans. Je crois qu'il a autorisé cinq à six chalutiers à pêcher pendant trois mois dans cette zone. Nous pensions tous que c'était absolument ridicule de prendre cette décision parce que nous savons que cette pêche est la méthode la plus destructrice. Lorsque les stocks de morue dans le reste du golfe étaient en péril, comme tout le monde le savait, nous nous sommes demandé pourquoi il autorisait ce genre d'activité. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

    Pourriez-vous également me dire si vous êtes membre du Conseil canadien des pêcheurs professionnels?

¹  +-(1550)  

[Français]

+-

    M. O'Neil Cloutier: Oui, on est membre du Conseil canadien des pêcheurs professionnels, mais je ne connais pas vraiment toutes les ramifications que cette organisation peut avoir à Terre-Neuve.

    Néanmoins, vous avez soulevé la très importante question de l'image. Une image, c'est ce qu'on utilise pour expliquer certaines choses aux jeunes enfants qui ne comprennent rien.

    La gestion par quota individuel, c'est le coeur du problème. Les fonctionnaires fédéraux de Pêches et Océans ont toujours dit qu'on devait contrôler l'effort de pêche par le biais des quotas individuels. Les quotas individuels ne sont pas une mesure de conservation mais bien une mesure économique, et je vais vous le prouver.

    Supposons que vous avez 300 000 livres de crabe. Le crabe de qualité 4L est convoité par le marché japonais. Alors, que faites-vous de votre quota individuel? Vous capturez 300 000 livres de crabe 4L et vous jetez tout le reste à l'eau. Pourquoi? Parce que c'est le plus payant. Il y a du 2L à 2 $ la livre, du 3L à 3 $ et enfin, du 4L à 4 $. Donc, vous allez garder les 300 000 livres de crabe 4L et jeter le reste par-dessus bord. On appelle ça du « high-grading ». Si ce crabe est abîmé ou blessé, il ne vaut plus rien.

    Pour ce qui est de la morue, la situation était la même. Il y a quatre prix: la petite est 45 ¢; celle qui mesure entre 16 et 24 pouces est 55 ¢; celle qui mesure entre 24 et 30 pouces est 65 ¢ et celle de 30 pouces et plus est 70 ¢. D'après vous, que faisait celui qui avait un contingent individuel de 300 000 livres? Il s'assurait d'avoir 300 000 livres de morue à 70 ¢ la livre. Qu'est-ce qu'il faisait du reste? Il le jetait par-dessus bord, mortes ou éventuellement mangées par les fous de Bassan. Voilà à quoi rime le quota individuel.

    Si on avait des quotas individuels dans le secteur du homard, que feraient les petits rusés? Pour ma part, je ferais partie des rusés. Je profiterais de l'occasion et tenterais de faire en sorte que les pauvres 12 000 livres de homard que je capture par année soient du homard à 7 $ et non à 5 $. Je garderais tous mes gros homards--j'aurais tout le temps pour le faire--et je rentrerais avec 12 000 livres de homard à 7 $ la livre.

    Cela a été une révolution dans l'Atlantique. Personne n'a jamais osé en parler. Pourquoi? Parce que ça fait l'affaire de la grande industrie et des industriels en général. Il y a un bon rapport entre le prix d'achat et le prix de vente. En outre, ça fait l'affaire des grosses flottilles. C'est simple. Il reste qu'on a fait une erreur fondamentale et qu'on ne cesse de la répéter.

    Vous avez entendu les commentaires--et je voudrais en parler plus tard, si vous m'accordez cinq minutes--de l'Association des crabiers gaspésiens, selon lesquels les pêcheurs de homard devraient avoir des quotas individuels. On n'en veut pas. Cela nous rapprocherait de la pêche industrielle, sans limites et sans responsabilisation. On ne veut pas de cela. On est des gens responsables. Je l'ai expliqué, mais ils ne veulent pas écouter.

    Prenons l'exemple d'un contingent de 3 000 tonnes de morue, comme ce qu'on a eu l'an passé dans le golfe Saint-Laurent. Vous pourriez, pour que ça dure le plus longtemps possible, diviser ces 3 000 tonnes en quatre périodes de quatre mois à tant de milliers de tonnes par mois. Prenons trois mois à 1 000 tonnes par mois. Les gens qui fonctionnent selon un quota concurrentiel ne pourraient pas choisir de ramasser la grosse morue et jeter la petite par-dessus bord parce qu'ils ne sauraient pas à quel moment le quota serait atteint. Ils seraient donc obligés d'embarquer leur damné poisson au lieu de le jeter par-dessus bord et d'avoir à pêcher quatre fois plus pour obtenir uniquement la catégorie qu'ils veulent.

    Mais ceux qui fonctionnent selon un quota individuel font cela parce que c'est leur quota. Ils en prennent donc quatre fois plus pour atteindre la quantité de poisson voulue. Voilà qui est facile à comprendre. Je ne sais pas pourquoi les gens refusent de comprendre. Il doit y avoir une raison et elle est sans doute d'ordre économique.

    Le quota individuel, monsieur Stoffer, ce n'est pas une mesure de conservation, croyez-moi.

[Traduction]

+-

    M. Peter Stoffer: Il n'y a pas très longtemps, j'étais à South West Nova, en Nouvelle-Écosse, et j'ai répété il y a six mois ce que j'avais dit il y a quatre ans : je crois que vous verrez dans la région des Maritimes un système de QIT pour la pêche au homard. Tout le monde a ri de moi. Ils ont dit que c'était impossible, que cela ne se produirait jamais.

    D'après vous, si les gestionnaires du MPO poursuivent dans la même veine, y aura-t-il un système de QIT dans le secteur du homard, qui concentrerait la ressource entre les mains d'un nombre toujours plus limité d'intervenants?

¹  -(1555)  

[Français]

+-

    M. O'Neil Cloutier: Encore une fois, ça dépend du lieu où on se trouve. Prenons l'exemple de Shelbourne, l'endroit d'où vient M. Thibault. Est-ce bien Shelbourne?

[Traduction]

+-

    M. Peter Stoffer: Il vient de Digby.

[Français]

+-

    M. O'Neil Cloutier: On a, pour le homard, une pêche hauturière. Les pêcheurs de homard capturent 50 000 livres de homard le long du Banc Georges, au large de la baie de Fundy. Dans de tels secteurs, ce serait peut-être possible, compte tenu du volume, mais encore une fois, je tiens à préciser que ça ne serait pas une mesure de conservation. Ce serait une mesure strictement économique. Il faut faire attention.

    Nous ne sommes pas d'accord sur la mise en application de mesures dont nous ne connaissons pas vraiment l'impact. Le quota individuel est une mesure économique qui permet à celui qui le détient d'en faire ce qu'il veut .

    Imaginez qu'un individu fonctionnant avec un quota individuel pêche 50 000 livres de homard--c'est beaucoup plus que 12 000 livres--et qu'il décide de ne garder dans ce lot de homards que les plus payants sur le marché. D'après vous, que fait-il des autres homards?

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Quelqu'un d'autre veut faire des commentaires? Personne?

    Merci beaucoup, monsieur Cloutier. Nous vous sommes reconnaissants d'être venus nous rencontrer.

[Français]

+-

    M. O'Neil Cloutier: Vous n'avez pas de questions, monsieur le président?

[Traduction]

-

    Le président: Non, je crois que mes collègues ont posé toutes les questions pertinentes. Merci beaucoup.

    La séance est levée.