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INST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY, SCIENCE AND TECHNOLOGY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 30 octobre 2001

• 0835

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): La séance est ouverte. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous allons étudier les répercussions sur l'économie canadienne des attentats terroristes du 11 septembre 2001.

Nous sommes réunis ici ce matin parce que le comité a invité des intervenants de l'industrie qui nous décriront au cours des quelques prochains jours les circonstances particulières dans lesquelles ils se trouvent et les nouveaux problèmes auxquels ils se heurtent, les solutions qu'ils proposent à court et à long terme et les mesures que les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux devraient prendre, selon eux.

Nous croyons que les participants aideront le comité à définir le cadre de son étude. C'est pourquoi nous sommes heureux d'accueillir ce matin l'honorable Brian Tobin, notre propre ministre de l'Industrie, qui nous donnera certaines informations pour commencer et certains conseils.

Monsieur le ministre.

L'honorable Brian Tobin (ministre de l'Industrie): Merci beaucoup, madame la présidente, et merci à vous tous, mesdames et messieurs les membres du comité, de l'occasion de comparaître devant le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie qui examinera de très près la situation économique au Canada au cours des jours et des semaines à venir.

Manifestement, au lendemain des événements du 11 septembre, tous les gouvernements du monde, et certainement le gouvernement du Canada, ont dû s'accorder un temps d'arrêt pour réfléchir à leurs priorités à moyen et à long terme, mais surtout à court terme. D'abord et avant tout, tous les gouvernements doivent veiller à la sécurité de nos citoyens et veiller également à la sécurité de nos frontières. Mais cette sécurité ne doit pas être obtenue au détriment de ce qui est important pour les gouvernements partout dans le monde ni porter atteinte à la nature même de notre société ou à nos libertés individuelles.

[Français]

Aujourd'hui, je veux vous parler de la situation économique au Canada et aux États-Unis, et de la façon dont le gouvernement du Canada a répondu aux événements du 11 septembre. Je veux aussi vous parler de ce qui doit être fait pour assurer la vitalité des industries canadiennes.

Avant le 11 septembre, l'économie du Canada avait commencé à ralentir, comme celle des États-Unis. Toutefois, nos données économiques de base étaient solides.

[Traduction]

Les prévisionnistes nous ont annoncé une contraction de l'économie américaine au cours du premier semestre de 2001, et la reprise en 2002—cela semble être le consensus—devrait être lente. Pour le Canada, les prévisions ne sont pas aussi nettes. Comme nous le savons tous, le ministre des Finances présentera sous peu les perspectives du gouvernement.

À la fin de l'été, les marchés boursiers canadiens et américains avaient diminué d'environ un tiers depuis qu'ils avaient atteint leur sommet. Ils ont chuté au lendemain des attentats, mais ont repris depuis la plus grande partie du terrain perdu. Bien sûr, nous avons été témoins hier d'une autre réaction du marché aux événements qui se sont produits.

L'industrie canadienne s'est dite préoccupée par la situation à la frontière entre le Canada et les États-Unis et presque tous les membres du comité ont exprimé, comme vous, madame la présidente, des craintes à propos du bon fonctionnement de notre frontière.

Les préoccupations relatives à la congestion aux postes frontaliers se sont accrues au fil des ans parallèlement au volume du commerce. Le commerce bilatéral est passé de 189 milliards de dollars en 1991 à 563 milliards de dollars en 2000.

C'est l'alerte de niveau un aux États-Unis. Au départ, il y a eu d'importants délais qui ont été réduits étant donné que les Américains ont ajouté de nouvelles ressources. Les délais d'attente aux postes frontaliers sont presque les mêmes qu'avant le 11 septembre, mais il y a des pointes. Les États-Unis consacrent plus de ressources aux vérifications.

• 0840

Le trafic commercial aux États-Unis est presque le même qu'avant le 11 septembre. Il faut avouer que le trafic passager a diminué de 35 p. 100. La question est de savoir si les délais d'attente augmenteront lorsque le volume reviendra à des niveaux plus habituels. Il ne fait aucun doute qu'une des raisons pour lesquelles les délais d'attente sont presque normaux, c'est que les volumes ont baissé de plus d'un tiers.

Il est prioritaire pour le gouvernement de s'assurer que la frontière ne représente pas un obstacle au commerce et à l'investissement, et c'est une question qui intéresse toutes les régions du Canada, parce qu'elles sont toutes touchées. La présidente du comité m'a écrit pour m'exprimer vos préoccupations à propos des problèmes de congestion à la frontière de même qu'à mon collègue, l'honorable Martin Cauchon, qui a communiqué avec vous et avec d'autres membres du comité, parfois tous les jours.

Nous devons profiter du travail que nous faisons avec les États-Unis en vue de l'adoption de nouvelles mesures de sécurité pour trouver de nouveaux moyens de faciliter le commerce. Autrement dit, nous devons reconnaître qu'un problème existait à nos frontières avant le 11 septembre. Le problème se posait déjà, un problème que de nombreux députés avaient soulevé à de nombreuses reprises il y a déjà assez longtemps.

Compte tenu du fait que les échanges bilatéraux entre le Canada et les États-Unis ont augmenté considérablement au cours des dix dernières années et qu'une bonne partie de l'infrastructure et des systèmes en place ont été construits pour une autre époque, une autre ère, les entreprises de toutes les régions du pays, en fait, les travailleurs de toutes les régions du pays, veulent qu'on leur envoie un signal clair que le problème des frontières sera réglé et que la solution retenue réglera non seulement les problèmes qui se posent depuis le 11 septembre en raison de la nécessité d'une sécurité accrue, mais aussi la question plus fondamentale de la libre circulation entre le Canada et les États-Unis.

[Français]

Le gouvernement du Canada a pris les mesures nécessaires pour assurer la circulation des biens à nos frontières. Le premier ministre a rencontré le président Bush pour en discuter. Mon collègue l'honorable John Manley a aussi rencontré Tom Ridge, directeur de la sécurité intérieure.

Avant le 11 septembre, le gouvernement du Canada avait déjà pris des mesures importantes pour créer un régime fiscal propice à la croissance économique et à l'amélioration de notre qualité de vie.

[Traduction]

Les importantes réductions d'impôt annoncées par mon collègue, l'honorable Paul Martin, de même que d'autres mesures financières et d'ajustements annoncées après le 11 septembre, comme celles qui concernent l'infrastructure et le programme d'aide de 160 millions de dollars pour l'industrie du transport aérien, joueront un rôle important dans la relance de l'économie à moyen terme. Il y a aussi eu la prise en charge pendant une durée de 90 jours des coûts d'assurance des compagnies aériennes et des aéroports et, bien sûr, il y a quelques jours, une garantie de prêt de 75 millions de dollars pour Canada 3000. En fait, il se pourrait fort bien que d'autres transporteurs aériens cherchent à obtenir l'aide du gouvernement du Canada; nous l'avons reconnu.

De plus, depuis le 11 septembre, la Banque du Canada a réduit ses taux d'intérêt directeurs de 125 points de base, ce qui porte la réduction totale à 300 points de base depuis le début de l'année. Les intérêts ont ainsi été ramenés à leur niveau le plus bas depuis 1961—en 40 ans. Ces réductions visent à stimuler l'économie en renforçant la confiance des consommateurs et des entreprises. Il ne fait aucun doute que le moment n'a jamais été aussi propice depuis longtemps et qu'il pourrait ne pas l'être avant longtemps pour profiter des taux d'intérêt très favorables au Canada.

Depuis le 11 septembre, le gouvernement a annoncé de nouvelles mesures antiterroristes dont le coût s'élève à 290 millions de dollars, ce qui porte le total de nos nouveaux investissements dans les services de police, la sécurité et le renseignement à 1,8 milliard de dollars depuis le budget 2000.

• 0845

Ces mesures incluent ce qui suit:

[Français]

une loi antiterroriste, le projet de loi C-36; le gel des avoirs terroristes dans les banques canadiennes; des mesures de sécurité aux aéroports et aux points d'entrée.

[Traduction]

En outre, l'ADRC doit accélérer l'échange de renseignements avec le United States Customs Service et, bien sûr, le premier ministre a créé le comité spécial du Cabinet chargé de la sécurité.

[Français]

Les trois industries les plus touchées par les événements du 11 septembre sont l'industrie aérienne, l'industrie aérospatiale et l'industrie du tourisme. Avant le 11 septembre, l'industrie aérienne avait déjà des difficultés.

[Traduction]

L'industrie s'attend à des pertes de revenu à l'échelle du Canada de l'ordre de 20 à 25 p. 100 d'ici la fin de l'année, et à une modeste amélioration seulement en 2002. Des coûts plus élevés seront engagés pour la sécurité dans les aéroports, les assurances et les dépenses aéroportuaires. Comme je l'ai dit, le gouvernement a accordé à Canada 3000 des garanties de prêt de 75 millions de dollars. D'autres transporteurs ayant un solide plan d'entreprise présenteront leur demande au gouvernement qui l'étudiera en fonction de ses mérites.

Des réductions d'emploi sont néanmoins prévues dans l'industrie du transport aérien et elles toucheront chaque région du Canada. Des réductions majeures d'emploi dans l'industrie aérospatiale à l'échelle internationale ont été annoncées et d'autres sont prévues.

[Français]

Boeing et Bombardier ont réduit leur production et annoncé la mise à pied de 30 000 et de 6t

[Traduction]

Airbus a décidé de réduire sa production, ce qui aura des répercussions pour certains de ses fournisseurs au Canada. Il pourrait cependant peut-être y avoir de nouvelles possibilités d'affaires dans le domaine de la défense, de l'entretien des aéronefs et des ventes d'aéronefs privés.

Les hôtels, les centres de villégiature, les compagnies aériennes, les organisateurs de croisières, les entreprises de location automobile et les entreprises de divertissement ont tous été durement touchés dans toutes les régions du pays. L'Association canadienne des agents de voyages prévoit une baisse de 30 à 40 p. 100 des activités de ses membres au cours des trois prochains mois. L'industrie du tourisme de l'Ontario, la plus importante au Canada, évalue à près de 100 millions de dollars les conséquences à la fin de l'année. D'autres régions enregistreront des pertes de revenu proportionnelles.

On observe des signes de reprise, mais la faiblesse devrait se prolonger jusqu'en 2002, surtout pour les voyages long-courriers et les entreprises associées aux transporteurs aériens—par exemple, les agences de location d'automobiles et les hôtels d'aéroport.

Le mois dernier, peu après les attentats terroristes, j'ai rencontré mes homologues provinciaux et territoriaux responsables du tourisme pour parler de l'établissement d'un partenariat plus efficace afin d'appuyer la croissance continue de l'industrie touristique canadienne. Nous devons nous rappeler que quelque 550 000 Canadiens travaillent dans cette industrie dont les revenus ou les ventes s'élèvent à quelque 54 milliards de dollars par année. C'est un volet important de l'économie du Canada et s'il y a un canari dans l'économie pour mesurer rapidement et efficacement l'impact d'un ralentissement, c'est bien le secteur du tourisme.

Après avoir consulté mes collègues de tous les gouvernements provinciaux, je suis heureux d'annoncer aujourd'hui que le gouvernement du Canada accordera à la Commission canadienne du tourisme 20 millions de dollars de plus que prévu pour le marketing afin d'encourager les Canadiens à voyager au Canada et d'attirer les Américains, surtout des États limitrophes.

Les ventes d'automobiles sont demeurées stables en raison des promotions offertes. En fait, j'ai rencontré Maureen Kempston Darkes hier qui m'a dit que malgré une chute spectaculaire des ventes qui n'avait rien de surprenant dans les jours qui ont suivi le 11 septembre, à cause des très généreuses offres de chacun des fournisseurs et d'une campagne de marketing très agressive et, bien entendu, d'un mode de financement très attrayant, en fait, le mois d'octobre a été un mois record pour les ventes dans l'histoire de l'industrie. Cela m'a surpris, mais ce sont de très bonnes nouvelles.

• 0850

Je pense que cela devrait nous indiquer à tous que peu importe la difficulté des défis ou des circonstances, la réaction qu'il faut avoir à chaque niveau, ce n'est pas de se laisser porter par le cours des événements, mais d'essayer plutôt de prendre le contrôle de la situation.

Il faut féliciter l'industrie automobile d'avoir pris le taureau par les cornes et d'avoir obtenu des résultats aussi remarquables en sachant relever les défis et en se montrant à la hauteur des circonstances.

L'industrie a fabriqué un nombre record de véhicules en 1999 et 2000, soit trois millions. On s'attendait à ce que la production retombe aux niveaux de 1998. Les prévisions établies après le 11 septembre montrent encore une production de 2,5 millions de véhicules. Il pourrait s'agir cette année d'une troisième année record.

Le ralentissement économique mondial a déjà entraîné une réduction de la demande d'énergie. Le déclin marqué des voyages par avion depuis le 11 septembre a affaibli la demande. La baisse prévue de la demande mondiale de pétrole est évaluée à un million de barils par jour. Par conséquent, les prix du brut ont diminué de plus de 20 p. 100 depuis le 11 septembre. Les économies qui sont répercutées sur les consommateurs pourraient avoir l'effet de relance voulu sur les dépenses des ménages et soutenir les finances des entreprises.

Les activités militaires accrues et un élargissement du conflit, si jamais cela se produisait, pourraient entraîner des hausses spéculatives des prix. Nous pouvons nous attendre à ce que les marchés pétroliers mondiaux demeurent instables.

À long terme, les États-Unis voudront s'assurer d'avoir accès à une source sûre d'énergie, d'où une augmentation de leur désir de s'approvisionner au Canada. Cela pourrait entraîner de nouveaux investissements dans les sables bitumineux et l'infrastructure du gazoduc du Nord.

Les événements du 11 septembre ont ébranlé un secteur manufacturier déjà affaibli au Canada et aux États-Unis. En septembre, il y avait déjà 44 000 emplois de moins qu'au début de l'année dans le secteur canadien de la fabrication. Cela n'inclut pas les retombées des événements du 11 septembre.

Si nous arrivons à rétablir la confiance—et je pense que nous progressons rapidement dans cette voie pour ce qui est de nos frontières—la plus grande préoccupation pour la plupart des fabricants et des détaillants demeurera la mesure dans laquelle les récents événements peuvent s'aggraver. Cela pourrait prolonger le ralentissement qui se fait déjà sentir. Il vaut la peine de mentionner encore une fois que les délais à la frontière sont un grave sujet de préoccupation pour à peu près toutes les industries et non pas seulement celle de l'automobile.

Les institutions financières canadiennes risquent moins d'être directement touchées puisque le BSIF s'est aperçu de la nécessité de surveiller les prêts aux entreprises des secteurs les plus vulnérables.

Je suis heureux de pouvoir vous dire que la Banque de développement du Canada offre aux clients admissibles, surtout ceux des secteurs des exportations, du gros, du transport et du tourisme, la possibilité de reporter les remboursements de capital pendant une période pouvant aller jusqu'à quatre mois. Je dois dire que le secteur privé a déjà réservé un très bon accueil à l'initiative qui permet de reporter jusqu'à quatre mois le versement des paiements de capital.

Dans le secteur des technologies des communications et de l'information, les attentats ont eu un impact immédiat puisque les réseaux ont été surchargés. Les attentats ont fait naître des préoccupations à propos de la sécurité et certains ont demandé qu'il y ait un contrôle plus strict de l'accès et de l'utilisation des systèmes de communications. Un avantage de la tragédie pour ce secteur aura peut-être été la possibilité d'un recours accru aux technologies de communications, comme la vidéoconférence.

Je pourrais vous donner un bref aperçu de l'impact sur les régions, si vous me le permettez.

C'est dans les secteurs du transport aérien et du tourisme que l'impact immédiat au Canada atlantique, comme dans le reste du Canada, s'est fait sentir le plus fortement. Cependant, le fait que la haute saison touristique était déjà terminée au Canada atlantique a un peu atténué cet impact.

[Français]

Le Québec est touché par les mises à pied chez Air Canada, chez Air Transat et dans l'industrie aérospatiale. Une baisse de l'activité touristique a aussi lieu.

[Traduction]

En Ontario, les conséquences directes les plus notables se sont fait sentir dans les secteurs du transport aérien et de l'aérospatiale, de même que dans celui de l'automobile. Étant donné sa forte dépendance à l'égard du commerce avec les États-Unis, et notamment l'importance du secteur de l'automobile, l'Ontario est très sensible à un ralentissement prolongé aux États-Unis. Cette dépendance est particulièrement évidente dans les régions du sud-ouest et du centre-sud de la province.

• 0855

L'ouest du Canada sera touché par les mises à pied chez Air Canada et dans l'industrie aérospatiale. Le tourisme a beaucoup diminué dans l'Ouest canadien. Le secteur forestier de la Colombie-Britannique avait déjà souffert, comme nous le savons, à cause du différend au sujet du bois d'oeuvre et de la baisse générale de la demande.

Dans le secteur pétrolier, la baisse récente des prix du pétrole pourrait avoir des conséquences sur les plans d'investissement et entraînera sûrement une baisse des recettes du gouvernement. Nous l'avons déjà constaté. Je pense cependant qu'à long terme ce secteur profitera vraisemblablement de l'intérêt accru aux États-Unis de l'accès à une source sûre d'approvisionnement en énergie en Amérique du Nord. Je crois que les réalités politiques auront une incidence positive tant dans l'Ouest du Canada qu'au large de la côte est. Nous espérons que ce sera le cas également pour la production de gaz naturel dans le Nord du Canada.

L'intégration Nord-Sud de l'économie en Amérique du Nord s'est traduite par des flux commerciaux des deux côtés de la frontière d'une valeur de 1,9 milliard de dollars par jour. L'intensification rapide du commerce bilatéral a exercé des pressions sur les gens, les pratiques et l'infrastructure à la frontière. Le Canada et les États-Unis ont uni leurs efforts pour régler les problèmes qui se posent. Nous devons maintenant accélérer nos efforts. Étant donné l'adoption à grande échelle d'un système de stockage et de gestion au moment adéquat par la plupart des industries, y compris l'industrie agro-alimentaire, des délais à la frontière peuvent avoir de graves répercussions, y compris une augmentation des coûts.

Je le répète, les problèmes à la frontière n'ont pas commencé le 11 septembre. Les nouvelles mesures de sécurité que ces tragiques événements nous obligent à prendre exigeront que nous examinions d'un oeil nouveau toutes les solutions possibles.

[Français]

Le gouvernement est déterminé à trouver des solutions novatrices qui vont répondre à nos besoins de sécurité et qui vont encourager le commerce entre le Canada et les États-Unis.

Les événements du 11 septembre ont eu un impact direct sur quelques industries, mais toutes seront touchées par un ralentissement général. La question des frontières est une des priorités du gouvernement. Nous devons continuer à soutenir le développement d'une économie canadienne innovatrice.

[Traduction]

Madame la présidente, en conclusion, les événements du 11 septembre ont fait ressortir les défis que suppose le maintien de nos relations commerciales avec les États-Unis, qui sont à bien des égards la pierre angulaire de notre économie.

Nos échanges ont augmenté considérablement au cours de la dernière décennie par suite de l'Accord de libre-échange, l'ALENA. En fait, ils ont à peu près triplé dans l'ensemble. Les chiffres sont impressionnants. Nous avons depuis longtemps déjà de la difficulté à assurer la libre circulation des marchandises, des services et des personnes.

Les événements du World Trade Centre n'ont fait qu'aggraver ces problèmes. Le rôle et le défi du gouvernement consistent à se pencher sur les questions relatives à la frontière afin de trouver une solution permanente pour que nous ayons une frontière sûre et efficace de même qu'un périmètre sûr et efficace.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur le ministre.

Il y a un certain nombre de personnes qui aimeraient vous poser des questions. Je tiens à rappeler aux membres du comité que le ministre sera avec nous jusqu'à 9 h 50 environ. Puis, il a une autre réunion.

Je vais commencer par M. Penson.

M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente. Je vous souhaite la bienvenue au comité ce matin, monsieur le ministre, de même qu'à vos représentants qui sont ici.

Je suis heureux que le comité ait décidé de tenir des audiences pour discuter de l'importance des événements du 11 septembre pour l'économie et de leurs répercussions sur les entreprises canadiennes et les Canadiens ordinaires. Ce sera l'occasion pour les entreprises et les industries canadiennes de témoigner devant le comité et de lui faire part de leurs priorités.

À mon avis, toutefois, monsieur le ministre, l'économie était déjà chancelante lorsque les événements du 11 septembre sont survenus. Même à ce moment-là, l'industrie nous avait indiqué que sa priorité était d'essayer de faire en sorte qu'il y ait renforcement des facteurs économiques fondamentaux, que les taux d'imposition diminuent et que la position concurrentielle des entreprises canadiennes s'améliore en attirant l'investissement.

Selon moi, même à ce moment-là, vous étiez tout à fait hors jeu pour ce qui était de votre approche des priorités. Vous essayiez de faire valoir l'idée de subventions aux entreprises, de subventions à PTC et d'un plan d'action pour l'innovation axé sur les communications à large bande. Vos projets ne soulevaient vraiment aucun enthousiasme.

• 0900

Après le 11 septembre, monsieur le ministre, je dois dire qu'étrangement, vous avez arrêté de parler d'un grand nombre de ces questions. Je suis content que le ministère vous ait donné l'information voulue sur les questions que vous avez soulevées aujourd'hui. C'était un bon exposé et je suis heureux de le constater.

Je dois dire que vous semblez continuer à avoir besoin d'importantes sommes gouvernementales pour des projets, comme celui du plan d'action pour l'innovation et les services à large bande, que personne ne semble appuyer au Canada à un moment où nous avons besoin d'argent pour resserrer les contrôles à nos frontières de manière à apaiser les préoccupations des États-Unis en matière de sécurité, de même que les nôtres; à un moment où les priorités des entreprises canadiennes sont de toute évidence d'avoir en place un nouveau protocole frontalier pour protéger le type d'activité dont vous avez parlé tout à l'heure.

Les Canadiens ordinaires comprennent très clairement—peut-être plus clairement que vous—que le fait de ne pas avoir accès à la frontière américaine pourrait influer sur leur niveau de vie si nous n'arrivons pas à ériger le périmètre de sécurité que voudraient avoir les États-Unis. Je vous ai posé des questions à la Chambre et d'autres vous en ont posé aussi. Il est difficile d'obtenir une réponse de vous.

Je sais que vous menez aussi d'autres campagnes, mais il me semble que vous devriez renoncer aux politiques erronées que vous défendez et mettre plutôt l'épaule à la roue pour assurer l'accès des Canadiens à l'économie américaine.

Je vous ai demandé aujourd'hui de vous engager envers les Canadiens à abandonner votre campagne au leadership. Arrêtez de vous intéresser aux tunnels, à l'infrastructure et aux ponts. Ce qu'ils veulent, c'est la sécurité à la frontière, l'accès au marché américain. Suspendez votre campagne et faites votre devoir de ministre de l'Industrie du Canada.

M. Brian Tobin: Monsieur Penson, une des merveilles de la télévision—et j'espère que la séance est télévisée—c'est que lorsque quelqu'un fait le genre de discours superficiel et imbu d'esprit de parti que vous venez tout juste de faire, les Canadiens peuvent tout de suite savoir ce qui l'intéresse vraiment. Ce qui vous intéresse, ce n'est pas l'économie du Canada, ce n'est pas la sécurité de nos frontières, ce n'est pas l'avenir de ce pays...

M. Charlie Penson: Mais je ne fais pas une campagne au leadership.

M. Brian Tobin: Je vous ai écouté poliment. C'est très clair. Votre parti ne recueille que 7 p. 100 des voix selon les sondages; vous ne pourriez remporter aucune campagne pour le moment.

Je dois vous dire en toute honnêteté que je ne pense pas que les Canadiens, à cette étape-ci du jeu, soient très impressionnés par ce genre d'approche au petit bonheur en espérant que quelque chose va marcher quelque part. Le fait est que lorsqu'on rejette l'innovation, comme vous venez de le faire au nom de votre parti—disons donc que c'est là la position officielle de l'Alliance—vous devriez peut-être prendre le temps de réfléchir...

M. Charlie Penson: Et les communications à large bande?

M. Brian Tobin: Laissez-moi reprendre tous vos points. Commençons par le premier. Lorsque vous rejetez l'innovation—c'est vous qui avez soulevé la question—laissez-moi vous dire ce que vous rejetez. Vous rejetez toutes les mesures prises par le gouvernement actuel au cours de la dernière décennie, soit depuis 1993, pour réinvestir dans nos universités, nos centres d'excellence, les sciences et la technologie de même que la recherche et le développement; offrir des bourses à de jeunes hommes et de jeunes femmes de talent; accorder une aide pour des études de troisième cycle; fournir du travail et un soutien aux étudiants du niveau de doctorat; appuyer l'élaboration et l'application de nouvelles technologies et de nouvelles connaissances qui sont commercialisées pour enrichir le Canada.

Vous avez rejeté PTC, mais laissez-moi vous donner en exemple un prêt qui a été fait par PTC—et soit dit en passant, c'était avant mon temps. Ce programme existait déjà depuis longtemps à mon arrivée. J'aimerais bien m'en attribuer le mérite, mais je ne le peux pas. J'ai hérité de tous ces programmes que vous avez rejetés de mon prédécesseur, John Manley, et des gouvernements qui ont été au pouvoir depuis 1993—chacun d'entre eux. Je n'ai inventé aucun nouveau programme, monsieur Penson, pas un seul.

Prenons PTC. PTC a accordé un prêt remboursable à une petite entreprise qui avait une idée au sujet d'un appareil du nom de BlackBerry. C'est une des innovations qui a connu le plus de succès, une innovation qui a fait le tour du monde, rapporté des sommes énormes au Canada et créé des milliers de nouveaux emplois ici.

Vous venez tout juste de me dire que si vous aviez à prendre une décision au sujet de ce petit investissement dans un prêt remboursable—parce qu'il n'y a pas de subvention...

M. Charlie Penson: Une contribution remboursable.

M. Brian Tobin: ...lorsque cette entreprise avait besoin d'une mise de fonds initiale pour prendre de l'expansion, répandre son idée partout dans le monde et remporter un succès mondial, vous, Charlie Penson, auriez dit non.

Eh bien, lassez-moi vous dire...

M. Charlie Penson: Laissez-moi dire ce que j'ai à dire...

M. Brian Tobin: ...que la politique gouvernementale nécessite un petit peu plus d'imagination, un petit plus d'équilibre.

Vous avez soulevé une deuxième question qui...

M. Charlie Penson: Je suis capable de dire ce que j'ai à dire. Je veux savoir...

La présidente: Vous devrez attendre, monsieur Penson, parce que vous avez épuisé votre temps.

M. Brian Tobin: Vous avez dit ce que vous aviez à dire et je ne vous ai pas interrompu. Si vous trouvez la situation intenable, vous n'avez qu'à vous en aller. Vous devriez partir.

• 0905

Pour ce qui est du deuxième point, au sujet des services à large bande, vous vous êtes levé et vous avez annoncé au nom de l'Alliance canadienne—qu'on se le dise, c'est là la déclaration de l'Alliance canadienne...

M. Charlie Penson: Allez-y.

M. Brian Tobin: ...que les Canadiens des régions rurales et du Nord n'ont pas besoin d'ordinateurs...

Une voix: Quand même! Il vient du Nord du Canada.

M. Brian Tobin: ...qu'ils n'ont pas besoin d'un accès efficace à Internet. Vous venez de dire que c'est un gaspillage de temps et d'argent. Nous avons eu un groupe de travail du secteur privé et tous les gouvernements provinciaux, y compris le gouvernement de votre province...

M. Charlie Penson: Laissez-moi répondre.

M. Brian Tobin: Non, c'est vous qui avez posé la question.

M. Charlie Penson: Je représente...

La présidente: Un peu de silence, s'il vous plaît.

M. Brian Tobin: Vous m'avez posé des questions, je vais y répondre.

M. Charlie Penson: Je représente une circonscription rurale...

La présidente: Silence, s'il vous plaît.

M. Brian Tobin: Monsieur Penson, je ne vous ai pas interrompu.

La présidente: Monsieur Penson, vous aviez quatre minutes pour poser vos questions...

M. Charlie Penson: Oui, je le sais.

La présidente: ...le ministre avait le droit d'y répondre et vous n'avez pas arrêté de l'interrompre.

M. Charlie Penson: Mais je n'ai pas pris mes quatre minutes et j'ai une autre question.

La présidente: Vous avez eu quatre minutes.

M. Charlie Penson: Non, madame la présidente.

La présidente: Je suis désolée, nous allons continuer.

M. Brian Tobin: Monsieur Penson...

M. Charlie Penson: Monsieur le ministre, je représente une circonscription rurale du Nord...

M. Brian Tobin: ...je ne vous ai pas interrompu.

M. Charlie Penson: Leur priorité, aujourd'hui, c'est d'essayer d'être assurés d'un accès à la frontière américaine.

M. Brian Tobin: Votre circonscription ne veut pas être sur Internet. J'ai compris.

M. Charlie Penson: Nous avons Internet.

M. Brian Tobin: Nous allons vous mettre plus loin sur la liste.

M. Charlie Penson: Nous ne sommes plus à l'ère des chevaux et du télégraphe, monsieur le ministre.

La présidente: Silence, s'il vous plaît. Nous allons passer au prochain questionneur.

M. Brian Tobin: Ne craignez rien, vous ne serez pas les premiers.

La présidente: Monsieur St. Denis, s'il vous plaît.

M. Charlie Penson: Ça fait des années que nous l'avons. Vous êtes tellement en retard et vous pensez que vous êtes en avance.

La présidente: Fermez le micro de M. Penson.

M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Merci, madame la présidente.

Merci d'être ici, monsieur le ministre. Je vais essayer de vous faire oublier les regrettables questions d'introduction de mon collègue d'en face.

Vous avez parlé du BlackBerry. En fait, on a dit aux nouvelles qu'au Point zéro à New York, c'était le seul moyen de communication possible pour secourir les travailleurs lorsqu'un certain nombre de tours pour les téléphones cellulaires ont été mises hors service. Je pense donc que vos commentaires sur l'importance non seulement de PTC, mais aussi de la contribution du gouvernement fédéral au développement de l'industrie au Canada sont très pertinents.

M. Brian Tobin: Si vous me le permettez, j'ajouterai très brièvement que tous les membres du Congrès américain ont maintenant leur BlackBerry. M. Penson aura le sien un de ces jours. Je vais essayer de lui en trouver un pour Noël.

M. Brent St. Denis: Dans quelques moments, nous pourrons examiner la situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement—et nous devrions le faire—à court et à long terme. À court terme, j'applaudis certes aux efforts déployés par notre premier ministre et le Cabinet dans des circonstances très difficiles. Mais nous devrons, en temps et lieu, faire face à ce qui va arriver à long terme.

J'aimerais vous donner l'occasion, si vous le voulez, de parler de l'initiative des communications à large bande dont vous vous êtes fait le champion, je pense. Je viens d'une circonscription rurale du nord de l'Ontario. Je suis d'accord avec vous pour dire que les régions rurales et du nord du Canada méritent d'entrer dans le XXIe siècle. Je me demandais donc si vous pouviez nous dire quelques mots au sujet de ce qui nous attend à long terme. Vous pourriez aussi nous faire des commentaires sur la frontière, à long terme.

Pour terminer, je pense que l'annonce—et je vois que M. Watson est là derrière—que la CCT recevra 20 millions de dollars de plus aidera des circonscriptions comme ma propre circonscription rurale du nord de l'Ontario.

Merci, madame la présidente.

M. Brian Tobin: C'est avec plaisir que je vous ferai part de mes commentaires sur les services à large bande. La réalité, c'est que dans le monde où nous vivons aujourd'hui, ceux qui vivent dans une collectivité qui n'a pas accès à des services Internet haute vitesse, sont très désavantagés en termes de soins de santé, de télémédecine, d'accès à l'éducation et de téléapprentissage. Il leur est aussi très difficile d'attirer des investissements dans leur collectivité pour profiter de l'économie axée sur le savoir.

Les collectivités autochtones sont celles qui sont les moins bien desservies du pays. Ce sont les collectivités que nous devrions brancher en premier pour leur offrir l'occasion d'être reliées au reste du monde, d'avoir accès à toute la technologie et à toutes les possibilités offertes par Internet. Matthew Coon Come a très bien su résumer la situation quand il a parlé des Canadiens autochtones: «Nous avons manqué la révolution industrielle; nous n'avons pas l'intention de manquer cette révolution-là.»

Pour ce qui est des coûts de la prestation de services à large bande, je tiens à les replacer dans leur contexte, parce que les gens ont tendance à faire des propositions bidons, comme M. Penson vient juste de le faire, pour ensuite les démolir. Nous dépensons au Canada plus de 10 milliards de dollars sous la forme d'assurance-chômage, chaque année, pour venir en aide aux gens où ils vivent. Nous nous servons du régime d'assurance-chômage pour leur venir en aide parce qu'ils n'ont pas pu travailler toute l'année ou qu'ils ont eu de la difficulté à se trouver du travail durant une période donnée.

• 0910

Nous dépensons des milliards de plus par l'entremise d'autres paliers de gouvernement pour venir en aide aux gens qui ne sont pas capables de réaliser leur plein potentiel. Nous parlons ici d'une dépense ponctuelle de l'ordre de quelques centaines de millions de dollars par année sur une période de quatre ans. Il suffit de comparer cette somme aux 12 milliards de dollars dépensés chaque année pour l'aide sociale sous une forme ou une autre.

Lorsque le réseau sera en place, il reliera tous les Canadiens à leurs gouvernements, à leurs établissements d'enseignement et à leurs établissements médicaux et leur offrira toutes sortes de possibilités pour ce qui est du commerce électronique, du développement économique, des loisirs et de l'éducation. Par comparaison au budget total du gouvernement ou à notre budget social total, ce n'est pas un gros investissement, mais les conséquences seront énormes pour les collectivités qui auront été branchées.

Je tiens à vous rappeler que cette mesure a été recommandée par un groupe de travail du secteur privé. Ce n'est pas une invention du gouvernement. Ce n'est pas une chose que j'ai imaginée, monsieur Penson. Cette initiative faisait partie des plans du gouvernement du Canada à une époque où j'étais encore premier ministre provincial. Mais c'est une politique que je suis heureux de promouvoir, parce que je pense qu'il s'agit d'une politique gouvernementale qui contribuera au développement du pays.

Nous avons décidé à une époque d'installer des voies ferrées dans toutes les régions du pays—même dans des régions où selon certains nous n'avions aucune raison économique de le faire. Mais en installant ces voies ferrées d'Ouest en Est, nous avons bâti un pays. Pourquoi se contenter de moins à une époque où la technologie définit notre capacité de développement d'un pays? Vous le pourriez peut-être, mais pas ce gouvernement-ci.

La présidente: Merci beaucoup.

M. Brian Tobin: On peut faire deux choses en même temps, monsieur Penson. C'est possible. Peut-être que ce n'est pas une chose dont vous avez l'habitude de l'autre côté de la Chambre, mais nous arrivons de ce côté-ci à accomplir plusieurs tâches en même temps.

Merci, madame la présidente.

La présidente: J'aimerais bien que nous arrivions à limiter les questions et les réponses à ceux qui sont censés en poser et à ceux qui sont censés y répondre à mesure que nous avançons.

M. Brian Tobin: M. Penson m'a posé une question et je ne suis pas habitué...

La présidente: Je comprends, monsieur le ministre, mais j'aimerais bien que...

M. Brian Tobin: Vous êtes dure avec moi.

La présidente: ...nous concentrions tous notre attention sur les questions à l'étude aujourd'hui.

[Français]

Monsieur Bergeron, s'il vous plaît.

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Merci, madame la présidente.

J'accueille avec beaucoup de plaisir cette première occasion que nous avons d'échanger formellement depuis ma nomination comme porte-parole du Bloc québécois en matière d'industrie, de sciences et de technologie. Je dois vous dire que je suis un petit nouveau à ce comité, que c'est la première fois, depuis que j'y participe, que la séance du comité est télévisée, et que c'est la première fois que je vois le comité aussi animé. J'espère qu'il n'y a pas de lien entre le fait que le comité est télévisé et le fait qu'il est animé.

Monsieur le ministre, je pense qu'il n'y a absolument aucun problème à ce qu'un gouvernement, dans cette nouvelle économie, veuille favoriser l'innovation et le virage technologique, surtout pour un pays qui faisait figure de parent pauvre en matière de recherche et développement parmi les pays du G-7 depuis nombre d'années. En ce sens-là, j'appuie entièrement les initiatives du gouvernement qui visent à faire prendre au Canada le virage technologique.

Cela dit, puisque vous avez fait allusion tout à l'heure au problème énergétique, je m'étonne que ce gouvernement, qui se targue de vouloir faire de l'innovation technologique sa priorité, ait décidé de mettre fin à la recherche sur la fusion nucléaire au Canada, décision qui a occasionné la fermeture du plus important projet de recherche et développement en matière énergétique au Québec, le tokamak de Varennes. Je pense qu'il y a une certaine incohérence entre le discours du gouvernement et ses actes concrets sur le terrain.

Cela dit, puisqu'on parle d'énergie, monsieur le ministre, vous avez fait une présentation fort éloquente quant au fait qu'il y avait déjà des signes évidents de ralentissement économique avant les événements du 11 septembre dernier. Je pense que vous avez bien mis en lumière également le fait que les événements du 11 septembre dernier n'ont fait qu'accentuer ces signes du ralentissement économique.

Si on regarde objectivement le moment où les premiers signes de ce ralentissement ont commencé à se faire sentir au niveau des indicateurs, on constate qu'étrangement, cela a fait suite, en termes de semaines et de mois, à cette espèce de flambée des prix de l'essence. Y a-t-il un lien direct ou indirect? Je pense qu'il y a certainement un lien direct.

• 0915

Au sujet de la flambée des prix de l'essence, on a senti que ce gouvernement avait réagi avec une certaine apathie, pour ne pas dire une certaine inertie. Alors même qu'un comité du Parti libéral recommandait au gouvernement d'intervenir énergiquement dans le dossier des prix de l'essence, le gouvernement s'est contenté de confier une étude au Conference Board, sur lequel siègent d'ailleurs les pétrolières, qui a rendu public, en janvier dernier, un rapport fort complaisant par rapport au problème de l'augmentation des prix de l'essence.

Monsieur le ministre, puisque vous êtes nouveau titulaire de la fonction par rapport à votre prédécesseur, qui avait institué cette étude du Conference Board, j'aimerais vous demander si le gouvernement entend faire quelque chose de plus proactif pour rendre l'énergie fossile abordable pour les consommateurs et consommatrices canadiens, sachant pertinemment que toute augmentation des prix de l'essence pour les transporteurs a des conséquences considérables, car les transporteurs vont imputer aux producteurs cette augmentation, et les producteurs vont nécessairement imputer aux consommateurs l'augmentation qui leur a été transmise, ce qui contribue à l'augmentation de l'inflation et, éventuellement, à un ralentissement économique.

M. Brian Tobin: Merci beaucoup de votre commentaire ou de votre déclaration sur le programme d'innovation du Canada. C'est une déclaration positive.

[Traduction]

Madame la présidente, pour ce qui est des prix de l'énergie, je tiens tout d'abord à remercier mon collègue de ses commentaires et je dois admettre que je suis d'accord avec lui pour dire que le prix de l'essence ou de l'énergie a une incidence sur les choix des consommateurs. Cela ne fait aucun doute.

Je pense que la question plus vaste est de savoir si je crois moi-même ou si le gouvernement croit qu'il faudrait à ce moment-ci créer une espèce d'organisme de réglementation qui établirait les prix au Canada.

Vous avez fait allusion au rapport du Conference Board. Il est arrivé à la conclusion qu'il ne pouvait pas recommander ce genre d'approche.

Il y a eu de nombreuses études qui ont été faites, comme vous le savez, un peu partout au Canada dont la plupart—à peu près toutes sauf peut-être une ou deux—sont arrivées à la même conclusion. En fait, à ma connaissance, il y a aujourd'hui en place un organisme à l'Île-du-Prince-Édouard et il existe à Terre-Neuve un mécanisme d'examen. Je ne pense pas qu'à part cela il existe—mais il se pourrait que je me trompe—des organismes ailleurs au Canada qui établissent les prix.

Je remarque, par exemple, qu'il n'y a pas au Québec d'organisme qui fixe les prix arbitrairement pour l'essence, pour le chauffage des maisons ni en fait pour l'hydro-électricité. Je ne pense pas non plus que le gouvernement du Québec accepterait que les prix soient fixés par le marché.

Je pense surtout aux énormes exportations d'énergie hydro-électrique du Québec aux États-Unis. Je ne pense pas que le Québec serait prêt à défendre la notion que les États-Unis devraient maintenant établir—comme vous le proposez ici—des organismes et fixer arbitrairement—pas en fonction du marché, mais dans leur propre intérêt ou selon ce qui serait politiquement populaire à ce moment-là—les prix pour les ventes d'hydro-électricité du Québec aux États américains.

Laissez-moi vous dire ceci. Je comprends votre point de vue. Mais si vous regardez ce qui s'est passé dernièrement, nous avons été témoins d'une diminution importante des prix du brut. Nous avons été témoins d'une réduction correspondante importante des prix du pétrole et des autres combustibles.

Je pense que nous en sommes tous très heureux. Nous reconnaissons tous—comme vous l'avez dit, que c'est bon pour le consommateur. Pour répondre à votre question, je dirais que je n'envisage pas pour le moment—et je ne pense pas que le ministre des Ressources naturelles envisage lui non plus—la création d'un organisme fédéral qui établirait les prix pour l'essence ou d'autres combustibles ou encore les prix pour l'hydro-électricité.

La présidente: Merci.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Il n'était pas nécessairement question...

[Traduction]

La présidente: Non, je suis désolée, monsieur Bergeron, nous devons continuer. Nous avons très peu de temps pour les questions et les réponses ce matin. Si chacun prend trois minutes et demie ou quatre minutes, ça me va, mais je n'aurai assez de temps que pour une seule réponse avant de passer à quelqu'un d'autre.

Permettez-moi de rappeler aux députés pourquoi nous sommes ici aujourd'hui.

Monsieur Bagnell.

M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Merci.

Monsieur le ministre, je tiens simplement à vous remercier d'avoir dit que la construction du gazoduc pourrait être accélérée dans les circonstances actuelles, parce que ce serait un immense projet pour nous—le plus gros projet dans l'histoire du Nord. Vingt milliards de dollars nous donneraient un gros coup de pouce.

• 0920

Je tiens aussi à dire pour les gens qui sont ici et qui ne le sauraient peut-être pas—parce que j'ai assisté à bien des réunions auxquelles ils n'ont peut-être pas assisté—que l'attention accordée, pas seulement par ce comité-ci et par les membres et la présidente du comité et par vous-même, mais aussi par d'autres ministres à la question des frontières a été merveilleuse.

Toutes sortes d'activités sont en cours dans divers comités et réunions et c'est merveilleux, parce que c'est une question tellement importante à ce moment-ci. Peut-être la plus importante. Tout le monde a fait et continue à faire un magnifique travail.

La dernière chose que je voulais dire—et vous pourrez commenter tout ce que je viens de dire—c'est que je regardais la télé hier soir et que c'était embarrassant. Je pensais être revenu à l'âge des ténèbres lorsque quelqu'un parlait encore une fois des services à large bande. C'est à croire que les ordinateurs ne sont pas nécessaires de nos jours. On abandonne les régions rurales; on abandonne le Nord. Nous vous savons vraiment gré de vous être fait le défenseur du Nord. Les régions rurales du Canada se trouvent elles aussi souvent laissées pour compte. Le Nord se sent souvent privé de tout. Je sais que d'autres partis vous appuieront.

De toute évidence, l'ordinateur fait partie de l'économie d'aujourd'hui. Nous apprécions vraiment votre aide. Continuez à défendre le Canada rural et le Nord.

Merci.

M. Brian Tobin: Madame la présidente, cela me donne l'occasion de faire observer—et je pense que c'est important—que d'autres gouvernements, et pas seulement le gouvernement fédéral, s'intéressent aux services à large bande et à haute vitesse.

J'ai rencontré le premier ministre Lord du Nouveau-Brunswick il y a quelques jours. Il m'a dit que c'était une des plus grandes priorités de son gouvernement. Il veut savoir quand la politique va être mise de l'avant. Il veut que nous travaillions en partenariat pour offrir des services haute vitesse à large bande au Nouveau-Brunswick.

Le Yukon—la circonscription de mon ami, M. Bagnell—a été l'un des gouvernements les plus progressistes au Canada et l'un des plus visionnaires puisqu'il a dépensé son argent pour pouvoir offrir des services haute vitesse à large bande aux résidents du Nord. Il voudrait lui aussi devenir partenaire du gouvernement national.

Le gouvernement de l'Alberta—qui est un gouvernement que vous connaissez peut-être, monsieur Penson—a lui aussi inscrit les services haute vitesse à large bande sur sa liste de priorité et dépense de l'argent pour atteindre les objectifs qu'il s'est fixés.

Le nouveau gouvernement de la Colombie-Britannique a inscrit les services haute vitesse à large bande parmi ses objectifs, il est prêt à débourser et il voudrait conclure un partenariat avec le gouvernement national.

Si vous parcourez le pays, vous verrez que les gouvernements de toutes les régions, peu importe leur allégeance politique, sont arrivés à la conclusion qu'il est essentiel que le Canada soit en ligne, que tous les citoyens, peu importe où ils vivent, aient accès à des services haute vitesse. J'ai de la difficulté à comprendre pourquoi...

Soit dit en passant, nous avons tenu il n'y a pas tellement longtemps à Québec une réunion des ministres des Sciences et de la Technologie que j'ai coprésidée avec Pauline Marois, la vice-première ministre du Québec. Nous avons émis une déclaration unanime à cette réunion de tous les gouvernements du Canada, de chaque province, peu importe l'allégeance politique—l'accès à des services Internet haute vitesse est une des caractéristiques qui définit une économie concurrentielle moderne et il fait partie de l'infrastructure nécessaire.

Nous devons être plus réfléchis, avoir des vues plus mesurées et nous montrer franchement plus intelligents dans nos commentaires avant d'émettre des propositions bidons et de les démolir sans penser à l'avenir du Canada. Notre travail ne s'arrête pas au trimestre ou à l'an prochain; nous construisons un pays pour la prochaine génération. Les étapes que nous franchissons maintenant déterminent dans quelle mesure nous serons prospères et concurrentiels plus tard.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Bagnell.

Madame Desjarlais, s'il vous plaît.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Nous avons les sports sanguinaires de ce côté-ci et un love-in de l'autre. C'est une matinée plutôt intéressante.

M. Brian Tobin: Je vais envoyer une carte de remerciements à M. Penson avant que tout cela soit fini.

Mme Bev Desjarlais: Oui, je me suis bien amusée.

Revenons à la sécurité à la frontière. Il y en a qui pensent que nous devrions avoir une grande frontière autour du Canada et des États-Unis et oublier les douanes et toute autre forme d'obstacle à la frontière, qu'en pensez-vous? Quelle est au juste la position du gouvernement? Allons-nous avoir un périmètre de sécurité au Nord?

M. Brian Tobin: Je vous remercie beaucoup de votre question. Je pense que c'est une question extrêmement utile, parce qu'elle me donne l'occasion de dissiper la confusion qui entoure toute la question d'une frontière par opposition à un périmètre.

L'opposition officielle a posé des questions à la Chambre des communes et se demandait si c'était possible ou non d'avoir un périmètre de sécurité de sorte qu'il ne serait ainsi plus nécessaire d'avoir une frontière.

Je pense qu'il faut préciser clairement que personne—et j'en ai parlé par exemple avec l'ambassadeur Cellucci que je connaissais déjà quand j'étais premier ministre et qu'il était gouverneur—ne parle d'éliminer les frontières. Personne aux États-Unis ne serait prêt à renoncer à ses frontières et encore moins à en promouvoir l'élimination. La question est la suivante: en plus d'avoir une frontière poreuse, efficace, à libre circulation et sûre, pouvons-nous aussi prendre des mesures supplémentaires pour avoir un périmètre commun ou conjoint sûr dans la mesure où nous avons des frontières?

• 0925

Cela se fait déjà sous différences formes. Prenez le dédouanement préalable. Il est possible de passer aux douanes au Canada avant l'arrivée aux États-Unis. On peut aussi franchir les douanes aux États-Unis avant l'arrivée au Canada.

On se demande aujourd'hui, par exemple, dans le cas des conteneurs qui pourraient arriver par bateau du Canada, s'il pourrait y avoir dédouanement préalable pour les États-Unis, ou s'ils arrivent des États-Unis, s'ils peuvent être dédouanés préalablement pour le Canada.

Donc, quand on parle d'un périmètre de sécurité, ce sont là les considérations pratiques auxquelles on pense. Ce n'est pas une question de sécurité à la frontière ou de périmètre de sécurité. Nous avons besoin des deux. C'est dans notre intérêt économique d'avoir les deux.

Mme Bev Desjarlais: Je suis très contente d'entendre cela, parce qu'on se préoccupe beaucoup, surtout dans les collectivités situées le long de la frontière en Ontario et un peu au Nouveau-Brunswick aussi, de l'augmentation de la criminalité. Si la frontière disparaissait, disons dans la région de Windsor, un problème pourrait se poser parce que dix fois plus de crimes sont commis du côté de Detroit que du côté canadien. Cette communauté ne voudrait pas que les risques augmentent.

M. Brian Tobin: Les seuls que j'ai entendus défendre ce genre d'approche—établissons un périmètre de sécurité et débarrassons-nous des frontières—sont des membres de l'Opposition officielle. Ce n'est pas la politique du gouvernement et, soit dit en passant, ce n'est pas non plus la politique du gouvernement américain. Tous ceux qui pourraient penser pendant un seul instant que le gouvernement américain serait prêt à renoncer à ses frontières ne comprend pas très bien le gouvernement américain.

Nous sommes tous d'accord pour dire que si nous pouvons arriver à mieux contrôler que par le passé la façon dont les marchandises, les services ou les personnes pénètrent dans nos pays respectifs, et si nous avons confiance dans les mesures réciproques que nous prenons, alors nous pourrons créer un environnement où régnera une plus grande confiance pour nos citoyens, nos entreprises et notre commerce.

Mme Bev Desjarlais: J'aurais un commentaire à faire sur l'importance de l'innovation et du réseautage de toutes les régions du pays. C'est une question importante. Pour quelqu'un qui vient d'une région rurale éloignée, un membre des collectivités autochtones, l'accès est important.

Vous avez aussi indiqué, et Matthew Coon Come l'a dit lui-même, qu'il est important de pouvoir profiter des occasions qui s'offrent.

Les collectivités autochtones ont souffert. Le gouvernement n'a pas réussi au fil des ans à mobiliser suffisamment de ressources pour toutes les collectivités au Canada, mais surtout pour les collectivités autochtones, pour le logement, l'approvisionnement en eau et les égouts, au point tel que, franchement, la situation prend actuellement des proportions catastrophiques. Il n'est peut-être pas aussi important d'avoir accès à Internet que d'avoir un toit sur la tête et de l'eau à boire.

C'est pourquoi je crois que la priorité pour le moment devrait être de veiller à ce que les gens aient accès à une eau potable, à un logement et aux services nécessaires. Même si notre parti est en faveur de la recherche et de la technologie et trouve que l'innovation est importante, la priorité pour le moment, soit dit sans vouloir vous offenser, doit être de faire en sorte que le gouvernement fasse quelque chose avec l'infrastructure de notre pays.

M. Brian Tobin: Je suis d'accord avec vous pour dire que c'est prioritaire. Il est prioritaire d'avoir un toit sur la tête, d'avoir la chance de faire des études, d'être en bonne santé—c'est évident. Une des priorités, sûrement, pour nos Autochtones est d'avoir les moyens de s'élever au-dessus de leur condition pour cesser de dépendre de la gouvernance. Nous devons aussi partager avec eux nos chances de succès sur le plan commercial. Tous les dirigeants autochtones à qui j'ai parlé voudraient que la communauté soit davantage en mesure de répondre à ses propres besoins, de se gouverner et de créer des richesses. Les communautés autochtones veulent participer à la vie économique, ne pas être des pupilles de l'État, mais plutôt contribuer à l'économie et être maîtres de leur propre destinée. Je pense que nous pouvons tous comprendre cela.

La présidente: Monsieur Volpe, s'il vous plaît.

[Français]

M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je n'ai pas de présentation à faire parce que c'est vous qui devez la faire, mais j'ai des questions.

D'abord, je vous adresse mes compliments pour la stratégie qui vise le futur.

[Traduction]

Pardonnez-moi de vous ramener à ce que je croyais être notre sujet de discussion aujourd'hui, c'est-à-dire les répercussions sur l'économie canadienne des attentats terroristes du 11 septembre. Je vais demander à tous mes collègues d'être indulgents et prêcher pendant un moment pour ma propre paroisse.

• 0930

La dernière fois que nous avons traversé une période de crise, la région de Niagara, le Golden Horseshoe, a fini par se désindustrialiser. C'est en partie parce que les Américains ont commencé à prendre des décisions en matière d'investissement qui n'incluaient pas la région autour de Toronto ni pour l'investissement ni pour les fournisseurs. Un grand nombre de nos usines ont fermé leurs portes et toute la technologie est déménagée dans le nord de l'État de New York. Cette région a connu une renaissance économique, tout comme certaines régions du Michigan et de l'Ohio, et nous avons langui dans une récession pendant cinq ou six ans.

Le plus gros impact du 11 septembre a été une diminution du transport par camion.

Vous avez dit dans votre exposé que les délais d'attente sont presque revenus à la normale, grâce en partie à une réduction de 30 p. 100 de la circulation. Je sais que vous avez une série d'initiatives. Vous nous avez donné une idée d'un grand nombre d'importantes initiatives à long terme.

Étant donné que j'ai décidé de prêcher pour ma paroisse, je vais vous demander ce que vous entendez faire à court terme. Que faisons-nous pour nous assurer que l'écoulement du trafic aux frontières—à Windsor, Fort Erie et Niagara Falls, surtout dans la partie ouest de la province, et ailleurs aussi—répondra aux exigences de l'industrie des deux côtés de la frontière pour ce qui est de recevoir leurs produits dans les délais fixés de manière à ne pas décourager l'investissement dans 6, 8 ou 12 mois d'ici?

M. Brian Tobin: Madame la présidente, je tiens à remercier le député de sa question, parce qu'elle touche au coeur même de la question que nous étudions ici aujourd'hui. Il s'agit du maintien de la confiance pour ce qui est non seulement de notre activité économique actuelle, mais aussi des décisions futures en matière d'investissement. C'est la principale préoccupation du ministère de l'Industrie.

Pour mettre les choses au point, et je n'ai peut-être pas été assez clair, quand j'ai parlé d'une diminution de 35 p. 100 du trafic, je voulais parler d'une diminution de 35 p. 100 du nombre de personnes qui franchissent la frontière. Actuellement, la baisse pour le trafic commercial, et je pense que c'est le chiffre le plus récent, est à peu près de l'ordre de 5 p. 100.

Globalement, si on considère l'état de l'économie et la contraction dont nous avons tous parlé, la circulation à la frontière est presque revenue à la normale. Une des raisons pour lesquelles les délais sont à peu près les mêmes qu'ils l'étaient avant le 11 septembre, c'est que le nombre de visiteurs qui traversent la frontière a diminué du tiers à peu près. En fait, la circulation commerciale est presque la même qu'avant.

Quant à savoir ce que nous faisons, à tous les niveaux, les ministres responsables, surtout le ministre Cauchon, ont rencontré leurs homologues aux États-Unis. Ils ont établi un protocole qui est compris des deux côtés de la frontière et ils ont essayé d'instaurer la confiance dans les mesures supplémentaires que chacun des deux pays a prises.

Comme vous le savez, plus de gens et une nouvelle technologie seront utilisés. Il y aura d'importants investissements. Au total, jusqu'à maintenant, le Canada s'est engagé à dépenser plus de 200 millions de dollars. Tous ces investissements technologiques ne peuvent pas se faire du jour au lendemain, comme vous le savez sûrement, mais l'engagement est là.

Les programmes et la technologie qui conviennent seront utilisés dans les aéroports et aux frontières. Les aéroports font tout autant partie de la libre circulation des marchandises, des personnes et des services entre le Canada et les États-Unis. Nous devons le reconnaître. C'est pourquoi nous avons décidé d'accorder notre aide à l'industrie du transport aérien. C'est pourquoi le Cabinet a décidé d'accorder des garanties de prêt de 75 millions de dollars à Canada 3000 pour assurer le maintien de la concurrence au Canada.

• 0935

En ce qui concerne la frontière, la question est aussi de savoir quoi faire à long terme face au problème qui existait avant le 11 septembre. Comme vous le savez, il y a un comité de travail qui est présidé du côté canadien par le vice-premier ministre Herb Gray, et qui réunit David Collenette, le ministre des Transports, et des représentants du gouvernement de l'Ontario, du gouvernement du Michigan de même que du gouvernement des États-Unis. Par exemple, il y a la question du pont Ambassador à Windsor. Nous voudrions que ce groupe de travail soit capable de travailler plus rapidement avec une plus grande efficacité d'une manière qui reflète l'urgence de la situation.

Bref, le gouvernement du Canada prendra toutes les mesures nécessaires, monsieur Volpe, pour que les échanges bilatéraux évalués à 1,9 milliard de dollars se fassent le plus efficacement possible à la frontière étant donné que 87 p. 100 de tout ce que nous exportons est destiné aux États-Unis.

La présidente: Merci. Merci beaucoup, monsieur Volpe.

Monsieur Strahl, s'il vous plaît.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, PC/RD): Merci, monsieur le ministre pour votre présence et pour votre exposé plutôt exhaustif. Vous avez parlé de l'état de l'économie, de la sécurité, de l'avenir de nos programmes sociaux. À côté de moi, on pouvait entendre toutes sortes de répliques. On croyait entendre un ministre des Finances prenant fait et cause pour les pauvres. Je crois que vous avez fait du bon travail.

M. Brian Tobin: Merci beaucoup. Je prends tout cela comme un compliment, monsieur Strahl.

M. Chuck Strahl: J'ai quelques questions à vous poser. Pour commencer, j'aimerais savoir pourquoi le ministre a été exclu du comité spécial du Cabinet sur la sécurité, étant donné que le secteur de l'industrie est concerné, surtout après les événements du 11 septembre. Il me semble qu'à l'époque de C.D. Howe, c'est le ministre de l'Industrie qui menait les affaires, étant donné les répercussions que ce type de situation de guerre a sur l'ensemble de la population canadienne. Voilà pour ma première question.

Ma deuxième question, monsieur le ministre, porte sur votre choix des priorités. Si vous repassez la bande d'enregistrement, vous vous apercevrez que toutes les questions que vous avez évoquées—le logement des Autochtones, l'accès à large bande, l'accès frontalier, le programme d'infrastructure—constituent des priorités pour vous. Or, vous ne pouvez pas avoir d'aussi nombreuses priorités. Toutes sont importantes. Toutes, espérons-le, se réaliseront. Mais lorsqu'on a des priorités, surtout à une période de diminution de l'enveloppe budgétaire, il faut choisir quelles sont les plus importantes.

La question que l'on se pose ici ce matin, selon moi, ce n'est pas de savoir si l'accès à large bande est important, puisque ça l'est dans les perspectives économiques à long terme pour le Canada. La question est de savoir si c'est la priorité la plus importante. À mon avis, l'accès frontalier est peut-être plus important à l'heure actuelle. C'est pourquoi les premiers ministres Harris, Landry, Campbell et Lord, même s'ils sont très intéressés par l'accès à large bande, parlent surtout de l'accès aux frontières américaines. C'est leur priorité, comme celle de 74 p. 100 des chefs de direction, ainsi que le révélaient les titres de la presse hier. Selon eux, c'est actuellement une priorité extrêmement importante.

Je sais que l'on peut faire plus d'une chose à la fois, mais j'espère qu'au moment de fixer les priorités, vous vous souviendrez que la chose la plus importante, comme vous l'avez dit dans le journal hier, en parlant de la sécurité périmétrique, c'est l'infrastructure pour le passage de la frontière. Voilà le genre de questions qui préoccupe les gens. Si j'habite à Peace River, je peux bien être en faveur de l'accès à large bande mais je ne serais pas plus avancé si je ne peux pas brancher mon ordinateur, faute de pouvoir payer ma note d'électricité parce que je ne peux pas vendre mon blé, je ne peux pas vendre mon pétrole et mon gaz, je ne peux pas traverser la frontière, je ne peux pas livrer mon bois. Aussi, l'accès à la frontière est une priorité et j'aimerais savoir si vous considérez cette question comme une priorité.

Je passe maintenant à ma dernière question. Les choses se bousculent dans le secteur de l'industrie et je pense que votre ministère va être très sollicité. J'aimerais demander au ministre comment il va éviter les conflits d'intérêts, puisqu'un article révèle qu'une vingtaine d'invités conviés à un dîner spécial ont promis de consacrer 25 000 $ par an à la campagne à la direction du ministre...

La présidente: Monsieur Strahl.

M. Chuck Strahl: ...comment le ministre va-t-il s'y prendre pour éviter les conflits d'intérêts avec ses fonctions de ministre de l'Industrie?

La présidente: Monsieur Strahl, cette question n'est pas pertinente.

M. Brian Tobin: Madame la présidente, je suis ravi une fois de plus que la séance soit filmée par les caméras de télévision, puisque la réponse à cette question me paraît évidente. C'est sans doute un autre exemple de la culture dont vous avez héritée du Parti de l'alliance canadienne, même si vous appartenez maintenant à la Coalition conservatrice démocratique.

Une voix: C'est le PC/RD.

M. Brian Tobin: Excusez-moi, je n'ai pas bien compris le nom. Quelqu'un essaie de m'indiquer le sigle du parti.

• 0940

Franchement, il ne faut pas réfléchir beaucoup pour demander si la sécurité à la frontière—le transport des biens et services canadiens vers les États-Unis, qui représente 87 p. 100 de nos exportations—est une plus grande priorité qu'un millier d'autres choses... Je ne sais pas si vous vous êtes levé de bonne heure ce matin pour concocter une telle question, mais il est clair que la protection de l'accès pour le marché canadien devrait être la plus grande de toutes les priorités. Notre première priorité est d'assurer le fonctionnement du moteur économique du Canada.

M. Chuck Strahl: Merci.

M. Brian Tobin: Mais une fois que l'on est parvenu à la conclusion qu'il est important de protéger le travail des Canadiens, vous pouvez extrapoler que le Canada ne doit s'intéresser à aucun autre dossier. C'est un point de vue tout à fait légitime, je suppose, que peut adopter la Coalition conservatrice démocratique et selon lequel on ne devrait s'intéresser à rien d'autre qu'aux questions frontalières. Et selon votre liste, l'appui aux peuples autochtones et au logement n'est pas important; on ne peut rien faire dans ce domaine si l'on accorde la priorité à la sécurité aux frontières...

M. Chuck Strahl: Ce n'est pas ce que j'ai dit. Je voulais savoir tout simplement quelle était votre priorité.

M. Brian Tobin: Excusez-moi. Permettez-moi de prendre sur mon temps pour vous demander quels sont les éléments de votre liste que vous voulez éliminer.

M. Chuck Strahl: Je n'ai pas demandé de les «éliminer». J'ai tout simplement voulu m'assurer que l'accès aux frontières était une priorité et je remercie le ministre de me l'avoir confirmé.

M. Brian Tobin: Je vous remercie de confirmer que vous reconnaissez qu'il est possible de poursuivre d'autres dossiers utiles au Canada, même si la priorité la plus importante pour le Canada est la frontière—c'est ma plus importante priorité. Est-ce que vous reconnaissez cela?

M. Chuck Strahl: J'ai tout simplement demandé au ministre de ne pas se fixer cinq priorités, mais s'il en fait sa priorité principale, nous pouvons aussi nous intéresser aux autres aspects.

M. Brian Tobin: Je tiens à vous poser la question pour que votre réponse figure au compte rendu. En effet, vous êtes ici également pour répondre au nom de votre parti: acceptez-vous que nous puissions avoir d'autres priorités?

M. Chuck Strahl: Oui. Nous sommes d'accord sur les priorités. Je pense que vous...

M. Brian Tobin: Que le compte rendu mentionne donc que ce nouveau parti a d'autres priorités.

La présidente: Merci beaucoup.

Nous allons passer à Mme Torsney, et je rappelle aux membres qu'il nous reste peu de temps. Le ministre doit nous quitter vers 9 h 50.

Madame Torsney, s'il vous plaît.

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Merci.

Par bonheur, je sais que le ministre peut marcher tout en mâchant de la gomme et je sais que vous pouvez manier à la fois les buts à court terme et les buts à long terme.

La frontière est une de mes préoccupations. De nombreuses entreprises de ma circonscription affirment que les temps d'attente sont plus longs à la frontière, mais que la Garde nationale facilite la circulation commerciale de l'autre côté de la frontière. Je crois qu'elle va quitter cette semaine et qu'il est prévu d'augmenter le contingent de gardes à la frontière américaine. Mais j'espère que vous aurez l'occasion, monsieur le ministre, de parler aux gouverneurs des États voisins de la frontière, l'État de New York et celui du Michigan, afin qu'ils prennent des mesures intérimaires pour maintenir la Garde nationale ou disposer de ressources humaines appropriées du côté américain. C'est une préoccupation majeure pour les gens de ma circonscription et je sais que beaucoup d'autres députés autour de cette table se sentent également concernés.

Je pense que c'est l'occasion pour nous de mettre en application du matériel de haute technologie et d'autres moyens de contrôler les camions et les conteneurs transportés par bateau et par chemin de fer, et je me demande où l'on peut trouver cette technologie. Nous avons chargé certaines de nos entreprises canadiennes de fournir cette technologie, en particulier grâce aux subventions PTC—qui ne sont pas véritablement des subventions, mais des investissements—afin de nous assurer de mettre en place les meilleures technologies.

D'autre part, les entreprises qui exercent leurs activités de part et d'autre de la frontière ont pris des décisions à long terme et elles ont besoin de connaître les possibilités existantes. Les entreprises qui ont pignon sur rue au Canada essaient de vendre leurs produits dans le monde entier. Elles font concurrence à d'autres sociétés pour obtenir des contrats de recherche. La question de la frontière n'est pas la seule, mais si elle pose problème, il faut vraiment l'examiner de près. J'aimerais savoir quelles sont les mesures de coordination que prend le Cabinet à ce sujet?

Les membres de ma chambre de commerce me posent des questions concernant l'accès aux soins médicaux. C'est un problème dans ma circonscription. Est-ce que vous en parlez avec vos homologues? Est-ce que vous faites en sorte que tout le reste de l'infrastructure donne la possibilité aux entreprises ou filiales canadiennes de concurrencer leurs homologues américaines? Les entreprises sont prêtes à collaborer, mais nous savons qu'aux États-Unis les impressions passent parfois pour la réalité et que si l'on entend constamment parler de la frontière, en particulier dans les interventions à la Chambre, les entreprises vont se détourner du Canada et vont préférer investir au Tennessee. Je sais que ce serait là une décision tout à fait erronée et j'aimerais savoir quelles sont les mesures de coordination que prend le Cabinet à ce sujet.

• 0945

M. Brian Tobin: Tout d'abord, la coordination est très étroite. J'aimerais revenir à un commentaire antérieur.

Il y a une semaine, j'ai présenté un exposé sur l'état de l'économie canadienne au comité de sécurité du Cabinet. Les différents ministres collaborent très étroitement. C'est actuellement la priorité du Cabinet canadien. Cela demeurera la priorité du Cabinet et du gouvernement du Canada et certainement de notre caucus pendant un certain temps.

Je constate comme vous que certains font des déclarations alarmistes, des deux côtés de la Chambre, dans le but de retirer quelque avantage politique ou de faire les manchettes, ou tout simplement pour attirer l'attention. J'essaie d'être aussi équilibré que possible. En fin de compte, ce sont nos propres électeurs qui en payent le prix.

La présidente: Absolument.

M. Brian Tobin: Je pense que l'attitude non partisane ou très peu partisane que l'on a pu constater chez nos voisins américains nous offre un meilleur modèle de réaction en période de crise que le comportement que nous avons noté aujourd'hui chez certains membres de l'opposition.

Nous ne devons jamais perdre de vue que les États-Unis sont la plus grande machine économique, un colosse dans l'histoire de l'humanité. Vingt-cinq pour cent de toutes les exportations des États-Unis sont destinées au Canada. Ce n'est pas uniquement dans notre intérêt que nous voulons garantir un fonctionnement efficace de la frontière. Les États-Unis y ont aussi un intérêt, un grand intérêt.

J'ai récemment eu des entretiens avec l'ambassadeur Cellucci. Je ne vais pas le citer, mais j'ai été très encouragé par son analyse de la situation, en tant qu'ancien gouverneur de la côte Est, et par sa volonté de maintenir l'efficacité des échanges à la frontière et sa volonté, au nom de son gouvernement, de faire en sorte que la frontière fonctionne de manière plus efficace que jamais. Cela implique l'introduction de certaines technologies.

Est-ce que nous nous penchons sur la technologie? La réponse est oui. Bien entendu, le ministre le mieux placé pour parler en détails des mesures prises est sans doute le ministre Cauchon.

Nous savons que le programme NEXUS a été suspendu pendant un certain temps dans le cadre des mesures de sécurité renforcée. NEXUS et la prochaine génération technologique est sans aucun doute l'orientation que nous devons adopter si nous voulons être en mesure de laisser circuler librement les marchandises et les personnes de la manière la plus efficace possible à la frontière. C'est pourquoi l'idée d'étendre le périmètre me paraît appropriée. Nous avons déjà appliqué certaines mesures.

L'instauration d'un périmètre de sécurité ne signifie tout simplement pas supprimer la frontière. C'est une idée dont nous devons absolument nous débarrasser. Ce n'est pas une proposition qui vient du gouvernement américain. Ce n'est pas une proposition du gouvernement canadien. Elle vient de l'opposition. Ce n'est pas une option qui s'impose.

Prenons des mesures pour que la frontière soit sûre, efficace, fluide et ouverte. Établissons conjointement le périmètre le plus large possible. C'est dans l'intérêt de nos deux pays et c'est l'option que nous choisirons.

La présidente: Merci.

Merci beaucoup, madame Torsney.

Monsieur le ministre, avec votre permission, je vais accorder une minute à M. Rajotte, puis une minute à M. Speller. Vous pourrez répondre par la suite.

M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente. Merci, monsieur le ministre.

Avant tout, j'aimerais dire que je suis heureux que vous ayez indiqué clairement aujourd'hui que l'accès de la frontière est votre plus grande priorité. Je suis très encouragé par votre déclaration. J'aurais aimé vous l'entendre dire plus tôt, mais je suis très encouragé.

M. Brian Tobin: Je l'ai dit à plusieurs reprises. Je suis content que vous m'ayez écouté pour la première fois aujourd'hui.

M. James Rajotte: J'ai une question très rapide. Pouvez-vous nous indiquer précisément ce que vous avez fait pour répondre aux préoccupations de l'industrie? Par exemple, vous avez indiqué que le premier ministre a rencontré le président. Vous avez dit que John Manley a rencontré Tom Ridge. Avez-vous rencontré votre homologue américain? Avez-vous rencontré le secrétaire au Commerce? Dans l'affirmative, quels ont été les résultats de ces entretiens?

Pouvez-vous nous indiquer avec précision les mesures que vous avez prises depuis le 11 septembre pour répondre aux préoccupations de l'industrie?

M. Brian Tobin: Tout d'abord, le secrétaire au Commerce a parlé de ces questions avec mon homologue, ou plutôt mon collègue, le ministre Pettigrew. Le solliciteur général a rencontré son homologue. Le ministre des Affaires étrangères a rencontré son homologue. Le premier ministre a rencontré le président.

M. Charlie Penson: Et vous?

M. Brian Tobin: Charlie, je sais que vous voulez absolument marquer un point avant la fin de la journée.

M. Charlie Penson: Non. Je me serais attendu à ce que vous preniez part vous aussi à ces rencontres.

M. Brian Tobin: J'apprécie l'effort. J'ai siégé moi aussi pendant de nombreuses années dans les rangs de l'opposition.

M. Charlie Penson: Vous y retournerez peut-être.

M. Brian Tobin: Je peux vous assurer que je me levais un peu plus tôt le matin pour préparer mes questions.

J'ai rencontré récemment l'ambassadeur américain pour discuter des questions frontalières. J'ai rencontré tous mes collègues du Cabinet. J'ai participé à la réunion du comité de sécurité du Cabinet. Nous avons pris toutes les mesures relevant de notre responsabilité.

• 0950

Je vous ferai remarquer que d'autres ministres ont une responsabilité directe en matière de sécurité. Ces ministres exercent leurs obligations de manière excellente et efficace.

La présidente: Merci.

Monsieur Speller, s'il vous plaît.

M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Merci, monsieur le ministre. Je tiens à vous remercier d'avoir adopté une position ferme en matière d'accès au marché américain.

L'industrie de l'acier est présente dans ma région. La prise de mesures antidumping et compensatoires par les États-Unis est une autre façon de fermer la frontière. L'acier semble occuper une place importante dans les priorités nationales des Américains.

Quelles mesures le gouvernement du Canada prend-il pour maintenir l'accès de l'industrie de l'acier? Avez-vous déjà rencontré les représentants de l'industrie de l'acier? Est-ce que vous les aidez à pénétrer sur le marché américain?

M. Brian Tobin: Je peux répondre à votre question par l'affirmative. J'ai moi-même, avec d'autres membres du Cabinet, rencontré tout récemment des représentants du secteur canadien de l'acier. Je pense que nous étions cinq ou six ministres à assister à cette réunion, il y a quelques soirs.

Le ministère des Finances, le ministère du Commerce et le ministère de l'Industrie travaillent en étroite collaboration aujourd'hui avec le ministère des Affaires étrangères afin d'examiner les répercussions des récentes décisions, en particulier sur le secteur de l'acier au Canada.

Pour le moment, je ne peux pas vous en dire plus. Le Cabinet a été saisi de cette question qui est actuellement débattue. Je peux vous dire que nous nous sommes penchés sur la situation actuelle de l'industrie canadienne de l'acier. Nous comptons préciser dans quelques jours les mesures que nous jugerons approprié de mettre en place pour venir en aide à l'industrie de manière à faciliter l'accès à la frontière américaine et à la protéger contre toute tentative déraisonnable de pénétrer notre marché selon des méthodes commerciales qui ne seraient pas équitables et libres.

La présidente: Merci.

Merci beaucoup, monsieur Speller.

Monsieur le ministre, nous tenons à vous remercier d'être venu témoigner aujourd'hui. Nous vous remercions d'avoir souligné que le Canada accorde la priorité à l'accès de la frontière par l'industrie canadienne.

J'aimerais me faire l'écho des préoccupations soulevées par un certain nombre de membres de notre comité relativement à l'importance d'assurer la libre circulation à la frontière et de renforcer la sécurité pour répondre à un certain nombre de ces préoccupations.

J'aimerais également vous demander de prendre en compte les commentaires de Mme Torsney et de présenter des observations au gouvernement du Michigan. La garde placée à la frontière doit quitter Detroit à compter de jeudi. Cela paraît étrange, car il semble que c'est grâce à elle que la circulation commerciale s'écoule normalement au point d'entrée de Detroit. La circulation automobile progresse extrêmement lentement, compte tenu du fait qu'elle a diminué de 35 à 60 p. 100 dans les tunnels et donc qu'elle est moins dense que d'habitude.

Je vous demande donc de continuer à collaborer avec vos collègues des États-Unis et à faire les observations qui s'imposent. Nous vous remercions énormément d'être venu aujourd'hui.

M. Brian Tobin: Merci, madame la présidente.

Je peux vous dire que nous allons surveiller la situation...et que nous apprécions le travail qu'effectue le comité en invitant de nombreux secteurs de l'économie canadienne à venir exposer, en ce moment tout à fait opportun, l'état de la situation dans leur secteur et à présenter des avis et des recommandations à l'intention du gouvernement sur les mesures à prendre pour répondre aux problèmes qui se posent.

Je vous félicite, vous et tous les membres du comité, pour votre initiative à ce chapitre.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur le ministre.

Nous allons prendre cinq minutes de pause pendant le changement de témoins. Nous invitons les représentants du secteur de l'automobile à venir prendre place à la table.

Nous prenons une pause de cinq minutes.

• 0953




• 1001

La présidente: Nous allons reprendre nos travaux. Monsieur Volpe, vous voulez faire un rappel au Règlement?

M. Joseph Volpe: Oui, j'aimerais apporter une précision pour toutes les personnes intéressées.

Maintenant que pratiquement tous les fonctionnaires d'Industrie Canada ont quitté la salle, de même que les médias—ils sont tous retournés à leurs postes—je pense que c'est probablement un des mouvements les plus dynamiques pour reprendre conscience et assurer à la population que nos sentinelles sont de retour à leurs postes.

La présidente: Très bien monsieur Volpe, mais je peux vous dire que des représentants du ministère de l'Industrie sont restés pour observer les travaux et que nous sommes télévisés, si bien que les journalistes peuvent nous voir à distance.

Cela étant dit, nous avons un très important secteur de l'économie devant nous, à savoir l'industrie automobile. Nous sommes très heureux d'accueillir aujourd'hui M. Mark Nantais, président de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules, M. Doug Jure, conseiller spécial de DaimlerChrysler Canada; et M. Michael Sheridan, directeur des relations gouvernementales à la compagnie Ford Canada Limitée.

Nous entendrons également M. Robert Armstrong, président de l'Association des fabricants internationaux automobiles du Canada; M. Stephen Beatty, vice-président, Affaires corporatives de Toyota Canada Inc.; et M. Art Thomas, premier gestionnaire, Affaires corporatives de Honda Canada Inc.

Nous avons aussi le plaisir d'accueillir l'Association des fabricants de pièces automobiles en la personne de son président M. Gerald Fedchun.

Je propose à chacun d'entre vous de présenter une déclaration préliminaire, puis nous passerons aux questions. Sans plus attendre, je vais donner la parole à M. Mark Nantais.

M. Mark Nantais (président, Association canadienne des constructeurs de véhicules): Merci, madame la présidente, et merci aux membres du comité de nous donner la possibilité de témoigner aujourd'hui.

J'ajoute également que c'est pour nous un grand plaisir de nous associer à d'autres membres du secteur de l'automobile dans le cadre de ce groupe d'experts.

Pour ceux d'entre vous qui ne seraient pas au courant, l'ACCV est l'association nationale des plus grands fabricants d'automobiles au Canada. Nous comptons parmi nos membres DaimlerChrysler Canada, la compagnie Ford, General Motors du Canada, l'International Truck and Engine Corporation et le constructeur Volvo.

Les présents travaux ont pour but d'évaluer les répercussions économiques de la tragédie du 11 septembre aux États-Unis sur les secteurs de notre économie. Nous savons tous que les attaques terroristes ont profondément ébranlé notre économie, mais surtout notre sentiment de sécurité.

Je crois qu'il est important de souligner que l'industrie de l'automobile a fait l'objet d'une rationalisation complète en Amérique du Nord en 1965, avec la signature du Pacte de l'automobile. Cette rationalisation a permis aux usines de produire des véhicules vendus dans les deux pays, des pièces détachées et des véhicules traversant la frontière canado-américaine sans pratiquement aucun délai.

L'intégration de l'industrie s'est encore plus renforcée avec la signature de l'Accord de libre-échange canado-américain en 1989, puis avec l'Accord de libre-échange nord-américain en 1994. Actuellement, les produits du secteur de l'automobile représentent environ 25 p. 100 du commerce bilatéral entre le Canada et les États-Unis, soit à peu près 300 millions de dollars des échanges quotidiens—je souligne qu'il s'agit bien d'échanges quotidiens—qui se chiffrent à 1,3 milliard de dollars. C'est une donnée très importante. Depuis plus de 35 ans, le secteur de l'automobile des deux pays compte sur la libre circulation des pièces détachées et des véhicules à la frontière pour assurer la bonne marche de l'industrie dans les deux pays.

Toutes nos sociétés membres ont perdu une part importante de leur production au Canada, en conséquence directe des événements du 11 septembre et elles ont toutes réduit par la suite leur production de véhicules en raison de la diminution des ventes aux États-Unis.

• 1005

Au Canada, la production a diminué d'environ 15 p. 100 depuis septembre par rapport à l'année dernière et, pour les membres de l'ACCV, la chute de production atteint près de 20 p. 100.

On prévoit que la production de véhicules au Canada tournera autour de 2,45 millions d'unités par comparaison à environ 3 millions au cours de chacune des deux dernières années. Cette différence équivaut à la production annuelle de deux usines moyennes d'assemblage de véhicules.

Pour ce qui est du marché intérieur, même si le Canada a connu une année record l'an dernier avec des ventes de près de 1,6 million d'automobiles et de camionnettes, il a fallu 12 ans au Canada pour dépasser son record antérieur de ventes de 1988, et ce record de ventes en l'an 2000 est dû en grande mesure à l'application d'incitatifs très coûteux qui ne pourront être maintenus à long terme.

En effet, le Canada est le seul pays de l'OCDE à ne pas avoir vendu plus de véhicules dans les années 90 que dans les années 80. Ce constat est illustré par l'âge moyen des véhicules au Canada qui est d'environ 8,3 ans par comparaison à 7,2 aux États-Unis.

Le fait qu'au Canada le revenu disponible soit une considération majeure au moment de l'achat d'un nouveau véhicule ou d'un autre important bien de consommation est une préoccupation pour nos membres.

Si les ventes de véhicules déclinent, il sera tout simplement impossible de renouveler l'ancien parc par des véhicules équipés de dispositifs antipollution et des systèmes de sécurité les plus modernes. Cela risque de retarder les progrès en matière de protection de l'environnement, de la santé et de la sécurité du public.

Le problème devient évident lorsqu'on compare le prix moyen d'achat d'un véhicule vendu au Canada et aux États-Unis avec le revenu personnel disponible. Pour acheter un nouveau véhicule au Canada en 1991, un consommateur devait investir 105 p. 100 de son budget personnel disponible. Un consommateur américain ne devait y consacrer que 98 p. 100. En 2000, il fallait y consacrer 146 p. 100 du revenu personnel disponible au Canada, par comparaison à 96 p. 100 aux États-Unis. Telle est la comparaison, en dépit du fait que les véhicules sont beaucoup moins chers au Canada, en moyenne 3 100 $ environ, sur une base monétaire commune.

Malgré les événements du 11 septembre, on prévoit que les ventes de véhicules légers au Canada varieront de 1,49 à 1,51 million. Ce sera malgré tout une assez bonne année, mais je répète que ces ventes sont le résultat de coûteux programmes d'incitation mis en oeuvre par les fabricants.

Vous savez peut-être également que les processus de fabrication de nos membres reposent sur le système de livraison juste à temps des pièces détachées à nos usines canadiennes. Les systèmes de livraison juste à temps permettent d'augmenter l'efficience et par conséquent de réduire les coûts d'exploitation en réduisant les stocks que devraient sinon conserver les usines.

Pendant les jours qui ont suivi le 11 septembre, la production des usines automobiles a été perturbée par les délais de livraison des pièces dont la circulation a été ralentie à la frontière canado-américaine. Cette perturbation a été ressentie de part et d'autre de la frontière. Les pièces détachées fabriquées au Canada ne pouvaient être livrées aux États-Unis et pareillement, les pièces fabriquées aux États-Unis ne pouvaient parvenir aux usines canadiennes.

Les chutes imprévues de production dues à la pénurie de pièces détachées coûtent environ 1 million à 1,5 million de dollars de l'heure, soit environ 25 000 $ la minute aux usines de fabrication.

Afin de répondre aux retards rencontrés à la frontière, certains fabricants ont décidé d'augmenter de 5 p. 100 leurs stocks de pièces dans leurs usines, mais cela implique des coûts supplémentaires importants. Ces coûts sont désormais considérés comme des coûts de base que les usines canadiennes ne devaient pas assumer auparavant et représentent un des nombreux facteurs qu'il faudra prendre en considération lors des prochaines décisions d'investissement.

Le Canada et les États-Unis ont négocié des ententes commerciales en tenant pour acquis que le passage de la frontière ne ralentirait pas le commerce qu'ont facilité ces ententes. Le Canada doit s'efforcer de prendre les mesures nécessaires pour que le passage de la frontière ne soit pas ralenti; faute de quoi, la viabilité à court et à long terme des industries hautement intégrées telles que l'industrie automobile canadienne risque d'être compromise.

Nous estimons qu'il est dans l'intérêt de la sécurité nationale du Canada et des États-Unis de maintenir une frontière sûre, mais aussi une économie forte qui ne peut exister sans un commerce transfrontalier fluide.

L'engorgement de la frontière canado-américaine a considérablement diminué depuis les tragédies du 11 septembre, mais cela est dû en grande partie à l'augmentation du personnel et à une diminution de 15 à 20 p. 100 de la circulation de camions de l'industrie automobile à la frontière.

Au moment où les économies américaines et canadiennes commencent à rebondir, il est indispensable d'adopter une approche coordonnée et stratégique de la gestion de la frontière. Nous appuyons une approche coordonnée des questions de sécurité périmétrique. À la frontière canado-américaine, en particulier pour le transport de surface, nous devons prendre plusieurs mesures importantes visant à faciliter la circulation des marchandises à faible risque qui sont susceptibles d'avoir d'importantes répercussions économiques et à concentrer les ressources sur les activités à plus haut risque.

Nous pensons en particulier qu'il faudrait prendre les mesures suivantes.

La sécurité des Canadiens et des Américains est fondamentale. La sécurité économique de notre pays repose sur le commerce, mais à notre avis, la promotion de la sécurité et la facilitation du commerce ne sont pas nécessairement contradictoires.

• 1010

Les meilleurs moyens d'appuyer les efforts visant à augmenter la sécurité physique et faciliter le commerce transfrontalier consistent à définir les risques que présentent les marchandises et les personnes au passage de la frontière. Nous devons affecter nos ressources collectives d'inspection et d'exécution aux expéditions de marchandises et aux voyageurs présentant des risques élevés, tout en assurant la libre circulation à la frontière des envois et des voyageurs à risque faible.

Peu de temps après les tragédies du 11 septembre, des ressources supplémentaires ont été affectées aux points de passage terrestres les plus fréquentés, en vue d'optimiser l'infrastructure existante des douanes.

Nous approuvons l'octroi par les États-Unis de ressources supplémentaires dans leurs crédits pour faire en sorte que les points d'engorgement à la frontière continuent d'être dotés d'un personnel suffisant.

L'accréditation préalable des chauffeurs et des voyageurs réguliers, sur une base coordonnée, et la mise en liaison des bases de données faciliteraient le mouvement efficace des marchandises et des voyageurs à faible risque.

Les personnes et les marchandises préautorisées pourraient emprunter des voies réservées. La mise en commun des bases de données permettrait de faciliter et d'accélérer le passage de la frontière en autorisant le dédouanement électronique automatique des marchandises et des personnes à faible risque.

Nous devrions approfondir nos connaissances et explorer la façon d'utiliser la technologie du transpondeur afin de faciliter le mouvement des marchandises commerciales à faible risque mais à haute valeur ajoutée.

Certaines initiatives sont très utiles. C'est le cas par exemple du programme d'autodédouanement qui vise à faciliter le mouvement de marchandises provenant de sociétés qui traversent fréquemment la frontière.

L'autodédouanement permet, dans certaines conditions spéciales, d'obtenir des privilèges de dédouanement avant l'arrivée et d'évaluer soi-même les droits de douane à payer. Les données recueillies dans le cadre du programme d'autodédouanement au sujet de l'importateur, du chauffeur et du transporteur permettent de considérer certaines cargaisons comme des marchandises à faible risque.

Malheureusement, l'application du système d'autodédouanement a été retardée et plusieurs des modifications prévues qui lui ont été apportées ont rendu le processus inutilement complexe et potentiellement coûteux.

Nous poursuivons notre collaboration avec l'ACDR afin de remédier à ces anomalies pour que le processus fonctionne de manière aussi efficace que prévu à l'origine.

La congestion à la frontière a toujours posé problème. À moyen terme, il est essentiel d'optimiser la capacité existante de l'infrastructure frontalière, mais, à plus long terme, nous devons aussi prévoir améliorer et étendre l'infrastructure à certains points clés, de part et d'autre de la frontière.

Nos problèmes à la frontière existaient avant le 11 septembre, et il n'y a aucune solution simple et facile pour les résoudre. Au contraire, ils exigent une approche globale, stratégique et bilatérale. Puisqu'il est question de ces problèmes sérieux à la frontière, nous tenons à dire combien nous apprécions les efforts permanents entrepris par le gouvernement fédéral en faveur de notre économie nationale et de nos intérêts en matière de sécurité.

Le ralentissement de l'économie aux États-Unis et dans une moindre mesure au Canada s'est accentué depuis les événements tragiques du 11 septembre. Aujourd'hui plus que jamais, il est nécessaire de prendre des mesures pour stimuler l'industrie canadienne, augmenter l'abordabilité des biens de consommation comme les automobiles et accroître la productivité des usines canadiennes.

Nous aimerions également profiter de notre présence ici pour féliciter et remercier le gouvernement fédéral d'avoir pris des mesures proactives en vue de réduire les impôts au Canada. La réduction des impôts sur le revenu des particuliers mise en oeuvre l'année dernière s'est avérée très efficace pour stimuler la consommation à une période de ralentissement économique. Nous encourageons le gouvernement fédéral à maintenir cette tendance à l'avenir.

Mis à part les questions relatives à la frontière, que recommandons-nous d'un point de vue financier? Nous pensons que le gouvernement devrait se pencher sur les questions suivantes.

L'impôt des grandes sociétés qui, par sa nature même, est un impôt sur le capital, a une incidence disproportionnée sur les sociétés qui nécessitent de gros investissements, telles que les entreprises manufacturières comme les fabricants d'automobiles qui doivent faire d'importants investissements en capital-actions. Étant donné que l'impôt des grandes sociétés s'applique à toutes les entreprises, quelle que soit leur rentabilité, il représente un coût financier annuel pour les sociétés qui investissent au Canada—et augmente inutilement le coût de location et de financement des véhicules par les consommateurs. L'impôt des grandes sociétés constituant un coût important et inutile pour les sociétés qui font affaire au Canada, nous recommandons tout simplement son élimination.

Beaucoup de pays dans le monde autorisent les groupes de sociétés à transférer les pertes fiscales entre leurs filiales à 100 p. 100, permettant ainsi de rationaliser le processus de planification fiscale du point de vue de la société. Au Canada, cette pratique n'est pas autorisée, ce qui augmente les frais d'administration et met en place une structure fiscale non concurrentielle.

L'ACCV recommande que le gouvernement fédéral adopte des modifications afin de mettre en place un système simple et efficient qui permettrait aux entreprises canadiennes de transférer leurs pertes fiscales entre les filiales d'un même groupe de sociétés et qui placerait le Canada en bonne position pour attirer les investissements internationaux.

En ce qui a trait aux impôts retenus sur les intérêts, la convention fiscale actuelle signée par le Canada et les États-Unis réduit les taux des retenues à la source à un maximum de 10 p. 100 lorsque l'intérêt obtenu dans un pays est payé à un habitant d'un autre pays.

• 1015

Les États-Unis étant le principal partenaire commercial du Canada, cette retenue d'impôt sur les intérêts fait figure d'anomalie, puisqu'elle est inexistante dans les conventions fiscales signées par les États-Unis avec d'autres pays développés. Cette retenue est particulièrement préoccupante pour l'industrie de l'automobile, étant donné que d'autres pays nous font sérieusement concurrence pour les investissements dans ce secteur, peut-être aux dépens du Canada.

Passons maintenant au crédit d'impôt à l'investissement manufacturier. Le secteur manufacturier est un important employeur de l'économie canadienne. Les investissements se font à l'échelle mondiale et la lutte pour les obtenir est plus féroce que jamais. Les gouvernements des États-Unis et des autres pays membres continuent à baisser les impôts des sociétés de manière à attirer de nouveaux investissements. En conséquence, il est important que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour être un pays attrayant pour les investissements après impôt.

Nous sommes en faveur des crédits d'impôt à la R-D, afin d'encourager les investissements dans les emplois de la haute technologie et d'ouvrir de nouvelles perspectives d'avenir, mais les investissements dans le secteur manufacturier créent des emplois plus nombreux pour les Canadiens moyens à l'heure actuelle.

Compte tenu de la période d'incertitude que nous traversons actuellement, nous estimons que le gouvernement du Canada devrait envisager d'adopter un crédit d'impôt à l'investissement manufacturier afin d'encourager les entreprises à créer des emplois chez nous. Un crédit d'impôt de 5 p. 100 à l'investissement pour les nouveaux équipements manufacturiers permettrait de conserver et d'élargir l'infrastructure manufacturière canadienne, de créer des emplois connexes et d'entraîner d'autres retombées économiques.

Par ailleurs, il faudrait éliminer les taxes sur les nuisances, les taxes existantes sur les automobiles, par exemple la taxe sur l'air climatisé, et cesser d'envisager l'application de nouvelles taxes qui ne font qu'augmenter le prix des véhicules et retarder le renouvellement du parc automobile. Comme je l'ai mentionné précédemment, le renouvellement plus lent du parc automobile ne fait que s'opposer à l'application de meilleures normes de protection de l'environnement et de sécurité au profit de l'ensemble de la population canadienne.

En terminant, madame la présidente, j'aimerais rappeler les différents points que j'ai abordés aujourd'hui. Nous pensons que le gouvernement fédéral doit, maintenant plus que jamais, faciliter l'instauration d'un environnement commercial propice à la croissance économique. Cela nécessite l'application à la frontière canado-américaine d'une politique qui permette au Canada de conserver sa place dans une économie nord-américaine intégrée et d'un régime fiscal qui assure aux consommateurs et aux investisseurs la confiance nécessaire pour continuer à faire tourner notre industrie.

Comme nous aimons à le dire, c'est l'automobile qui fait rouler le Canada. Nous espérons que le gouvernement du Canada partage notre volonté de conserver une industrie automobile dynamique.

Une fois encore, je remercie le comité de m'avoir donné la possibilité de venir témoigner et je me tiens à votre disposition pour répondre aux questions que vous voudrez bien me poser.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Nantais.

Nous allons maintenant donner la parole à M. Armstrong.

M. Robert J. Armstrong (président, Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada): Madame la présidente, je tiens d'abord à vous remercier, vous et les membres du comité, de nous donner la possibilité de vous présenter aujourd'hui notre point de vue sur les conditions du marché dans notre secteur de l'industrie et de partager la table avec mes deux collègues de l'ACCV et de l'AFPA.

Afin de vous situer un peu notre association, je vous dirai pour commencer que l'AFIAC compte 14 sociétés membres. Nous représentons 50 p. 100 des ventes de véhicules de tourisme, 20 p. 100 des ventes de camionnettes et 20 p. 100 de la production automobile au Canada.

Bien que les sièges sociaux de nos entreprises membres soient situés à l'extérieur de l'Amérique du Nord, c'est-à-dire en Europe, au Japon ou en Asie, la majorité de nos membres produisent leurs véhicules dans d'autres endroits situés à l'intérieur de la région visée par l'ALENA.

Cela nous ramène évidemment aux inquiétudes concernant la frontière. Nous ne nous contentons pas de transporter des produits et des pièces détachées entre le Canada et les États-Unis, comme Gerry vous le dira plus tard; nous facilitons l'expédition et nous transportons des produits entre nos usines du Canada et celles des États-Unis et du Mexique, et également dans le sens inverse. Par conséquent, ce sont d'importants échanges dans les deux sens.

Nos membres qui produisent au Canada exportent 90 p. 100 de leur production aux États-Unis et au Mexique et même jusqu'au Japon et à l'Extrême-Orient.

Deux de nos sociétés membres, Honda et Toyota, ont lourdement investi dans leurs installations canadiennes depuis quelques années et elles prévoient augmenter leur production totale de plus du double entre 1998 et 2003.

Comme l'a dit Mark, l'industrie automobile canadienne a un peu ralenti depuis quelque temps, après plusieurs années de croissance ferme. À la fin du mois d'août, l'industrie dans son ensemble n'avait pas lieu de se réjouir. Au 31 août de cette année, les ventes de véhicules légers avaient chuté de près de 8 000 unités, soit 7 p. 100, par rapport à la même période en 2000.

Ces résultats révélaient de meilleures perspectives à court terme pour le Canada, étant donné que le chiffre d'affaires de l'industrie était nettement meilleur qu'au sud de notre frontière. Cependant, en raison du ralentissement de l'économie américaine, la production de véhicules légers au Canada a accusé une diminution de 42 000 unités, soit 16,3 p. 100, un déclin important sur 12 mois que l'on peut principalement attribuer à la diminution des ventes sur le marché américain.

• 1020

Ces chiffres reflètent bien entendu le ralentissement de la demande de produits fabriqués au Canada sur le marché nord-américain, mais les attaques terroristes ont eu des effets immédiats et spectaculaires. Nous avons constaté une diminution de la clientèle chez nos concessionnaires de toutes les régions du Canada ainsi qu'aux États-Unis. En septembre, les ventes de véhicules de tourisme ont diminué de 9,3 p. 100 par comparaison à septembre 2000. La production de véhicules légers a diminué de 43 000 unités, soit 18 p. 100 par rapport à l'an dernier.

Les événements du 11 septembre n'ont évidemment fait qu'aggraver l'effet négatif sur la confiance des consommateurs et cet effet cumulatif s'est greffé aux préoccupations existantes concernant la faiblesse de l'économie. La clé de l'avenir est de protéger les investissements déjà faits dans les installations canadiennes afin de pouvoir conserver les emplois canadiens jusqu'à ce que le marché nord-américain retrouve sa confiance et que l'on assiste à une reprise des dépenses de consommation.

Depuis le 11 septembre, notre industrie a connu des résultats divers. Comme l'a indiqué le ministre ce matin, certains fabricants ont eu la chance de lancer de nouveaux produits qui ont contribué à augmenter la fréquentation des salles d'exposition chez les concessionnaires, produisant ainsi une augmentation à court terme des ventes. D'autres constructeurs ont eu recours à de nouveaux incitatifs financiers toujours plus attrayants qui auront à leur tour une grande incidence sur la rentabilité à long terme de chaque entreprise.

Par conséquent, les préoccupations à court terme de l'économie canadienne portent sur la production. En effet, puisqu'un emploi sur sept est lié au secteur de l'automobile, nous sommes évidemment un secteur vital pour l'économie du pays et sans aucun doute le plus grand secteur de l'industrie à offrir des emplois de haute qualité commandant de bons salaires. Nous ne souhaitons pas que les constructeurs doivent réduire les périodes de travail, les heures supplémentaires ou, pire, éliminer certaines usines à cause des répercussions négatives sur l'économie. Nos sociétés membres ayant obtenu d'excellents résultats au cours des dernières années, rien ne semble indiquer que des fermetures d'usines ou des réductions des périodes de travail seront nécessaires dans un avenir proche.

Ce sont les perspectives de développement du réseau canadien d'approvisionnement qui nous préoccupent. Nos membres peuvent vous dire que rien ne rend une région plus attrayante qu'une source locale fiable de pièces détachées de haute qualité et à coût concurrentiel. Le Canada qui offre une telle situation en plus d'une main-d'oeuvre industrieuse et efficiente, a été un endroit attrayant pour nos membres qui y ont fait de nouveaux investissements commerciaux au cours de la dernière décennie et nous souhaitons que cette tendance se maintienne.

Par ailleurs, nous avons bénéficié, depuis quelques années, d'augmentations favorables des ventes dans toute l'Amérique du Nord et cette augmentation de la production intervient dans la région visée par l'ALENA. Poursuivant sur notre lancée, nous voulons nous assurer que notre gouvernement maintiendra un climat commercial favorable au développement des constructeurs déjà installés au Canada et attrayant pour les constructeurs automobiles en expansion qui cherchent à ouvrir de nouvelles usines de production. Nous espérons que le Canada saura retenir leur attention.

Tournons-nous maintenant vers la frontière. Je ne sais pas combien de membres du comité ont eu l'occasion hier de voir l'intervention télévisée en direct du président Bush. Personnellement, je l'ai vue au cours de la réunion du comité de sécurité intérieure. Il a fait une déclaration extrêmement importante qui a capté notre attention. Il a dit clairement dans sa déclaration que les États-Unis tenteront de rendre compatibles et d'harmoniser leurs procédures d'immigration et de douanes avec celles du Mexique et du Canada. Cela peut avoir des conséquences positives et négatives, mais il a dit clairement que les États-Unis allaient viser l'harmonisation et la compatibilité.

C'est un objectif que nous avons toujours recherché, à savoir laisser le monde des affaires fonctionner de la même manière dans les trois pays. Les usines canadiennes qui importent des pièces détachées des États-Unis bénéficient d'un système de dédouanement assez efficient. Nous ne rencontrons pas beaucoup de problèmes dans ce domaine, mais, depuis le 11 septembre, nous avons de la difficulté à exporter nos produits vers les États-Unis. Le problème est de taille, puisque 90 p. 100 de nos exportations vont vers le sud. Par conséquent, les Américains pourraient se pencher sur ce problème.

Gerry et moi en particulier, et Mark également, examinons cette question depuis deux ans. Nous examinons les préoccupations relatives à l'infrastructure de la frontière canado-américaine. Nous avons rencontré des représentants de la province de l'Ontario, des États du Michigan, de l'Ohio et de New York, ainsi que des représentants des gouvernements fédéraux des deux côtés de la frontière. Depuis deux ans, les entretiens ont été nombreux. La situation était prévisible par tous. À l'occasion d'un congrès au Mexique, Gerry et moi-même avons indiqué que nous allions faire face à de graves problèmes et que la solution ne serait pas dans la construction d'un nouveau pont ou d'un autre tunnel.

Par conséquent, il faut privilégier l'efficience. C'était bien agréable d'entendre le ministre Tobin déclarer ce matin que le gouvernement du Canada en faisait une priorité. Nous voulons nous assurer que le gouvernement collabore étroitement avec nous dans le secteur de l'industrie et avec les représentants des douanes des deux pays. Puisque le président Bush l'a confirmé au sujet du Mexique, nous devons nous aussi les attirer dans l'équation. Nous voulons que la frontière reste ouverte afin de permettre un mouvement efficient et fluide des marchandises à faible risque.

Nous devrions essentiellement bénéficier d'un traitement spécial. L'industrie de l'automobile est un secteur à faible risque et nous devrions bénéficier d'un traitement privilégié de la part des trois gouvernements. La technologie devrait nous permettre d'assurer la circulation des marchandises. Mark a soulevé certaines questions dans son exposé. Ce qu'il nous faut avant tout, c'est l'assurance que la frontière restera ouverte.

• 1025

La déclaration faite hier par le président paraît intéressante, mais que signifie-t-elle? Nos appréhensions et nos inquiétudes quant à la nature du plan américain sont au nombre des raisons qui nous ont amenés à prendre la parole aujourd'hui. Nous ignorons le degré de sévérité de ce plan. Madame la présidente, vous avez dit ce matin que la Garde nationale se retirerait jeudi. Cela nous préoccupe beaucoup, parce qu'elle a été d'un grand secours pour assurer la circulation de nos camions. Nous devons ouvrir l'oeil.

Bien entendu, il faut tenir compte de la question du renforcement de la sécurité. Nous devons faire en sorte qu'elle ne ralentisse pas la circulation des marchandises qui va certainement augmenter. Les statistiques révèlent une accalmie, mais les ventes vont reprendre dès que la confiance sera revenue et que les consommateurs seront de retour dans les salles d'exposition d'autos. Nos ventes sont à la hausse. Je peux vous dire qu'en octobre, le chiffre d'affaires était à la hausse en Amérique du Nord—pour diverses raisons, sans doute—mais il est à la hausse, si bien que la production va reprendre et que la circulation des marchandises va s'intensifier dans notre secteur. Nous avons besoin de cette confiance.

Il ne suffit pas de retrouver un degré de fluidité comparable à celui qui existait avant le 11 septembre. Tous les points d'entrée canadiens, y compris ceux de la frontière américaine, étaient déjà au maximum de leur capacité le 10 septembre. Il fallait déjà augmenter le personnel et agrandir l'infrastructure dans ces points clés et, désormais, nous devons faire face aux défis et à l'obligation d'accroître l'efficience du passage des marchandises à faible risque malgré le renforcement des mesures de sécurité pour la protection des Canadiens et des Américains.

Je répète que l'industrie de l'automobile est énormément tributaire des marchés internationaux, tant pour la vente de ses produits que pour l'importation de matériel et de composants. Comme je l'ai dit plus tôt, ces derniers proviennent de la région visée par l'ALENA, mais également d'Europe et d'Asie. L'accès au matériel, aux pièces détachées et aux fournisseurs de services est particulièrement crucial pour les usines automobiles qui appliquent couramment de nos jours des systèmes d'approvisionnement juste à temps. Nous ne voulons pas que l'Amérique du Nord se transforme en forteresse.

Il faut comprendre également qu'en cas d'application d'un périmètre pour les procédures d'immigration et de police, il ne faudrait pas empêcher la circulation des marchandises en provenance et à destination du reste du monde. Incidemment, c'est vital pour les Canadiens, parce que vous savez que nos échanges commerciaux avec les États-Unis sont énormes. Mais, permettez-moi de vous faire remarquer que notre pays a besoin d'accroître ses échanges commerciaux avec le reste du monde. Par conséquent, assurons-nous que notre gouvernement s'oppose à la transformation de l'Amérique du Nord en forteresse.

Par ailleurs, les produits fabriqués au Canada doivent atteindre ce marché plus tôt—je m'écarte un peu de mon texte...

La présidente: Monsieur Armstrong, puis-je vous demander...?

M. Robert Armstrong: Oui. Je voulais simplement terminer et souligner ce point.

Je ne parlerai pas de l'imposition et des autres aspects connexes, puisque nous appuyons les propos tenus par M. Nantais.

Pour terminer, je dirai que nous avons besoin d'une reprise de la confiance des consommateurs. Nous ferons tout notre possible pour que le consommateur soit content et qu'il reprenne ses achats. Nous devons montrer aux Américains que nous sommes un pays sûr.

Nous avons besoin de quelques stimulants pour faire renaître l'espoir et comme je l'ai dit, continuer à exercer des pressions sur les États-Unis. Il faut que tous nos ministres collaborent et qu'ils communiquent eux-mêmes avec leurs homologues de l'autre côté de la frontière. Les actions isolées ne suffisent pas. Il faut qu'ils se réunissent tous pour trouver une solution et faire en sorte que la frontière soit et demeure ouverte.

Merci.

La présidente: Merci beaucoup.

Nous allons maintenant donner la parole à M. Gerald Fedchun, le président de l'Association des fabricants de pièces d'automobile.

M. Gerald Fedchun (président, Association des fabricants de pièces d'automobile): Merci.

Madame la présidente est certainement au courant, mais au cas où d'autres membres du comité l'ignoreraient, je précise que l'Association des fabricants de pièces d'automobile représente 90 p. 100 des fournisseurs de pièces détachées et de services pour les automobiles neuves—ou les nouveaux véhicules, puisque la moitié de notre production au Canada est celle de véhicules légers. Nous réunissons plus de 400 membres, 100 000 employés et, en 2001, notre chiffre d'affaires est estimé à environ 32 milliards de dollars. De cette production, les deux tiers sont exportés, 90 p. 100 vers les États-Unis, une grande partie vers le Mexique et le reste dans divers pays du monde.

Il est important de noter que notre secteur est une industrie très jeune. En 1965, notre production totale se chiffrait à un demi-milliard de dollars et en 1991, notre chiffre d'affaires total n'était que de 12,5 milliards de dollars. On constate donc que notre secteur a connu une croissance extraordinaire et qu'une partie de cette croissance est due à l'augmentation de nos ventes à l'exportation. Comme on l'a déjà dit, la production nord-américaine est désormais totalement intégrée. Les fabricants nord-américains d'automobiles sont interdépendants.

• 1030

Avant le 11 septembre, le passage de la frontière occasionnait peu de problèmes et de retards. Plusieurs solutions ont été entreprises depuis quelques années. J'ai consulté de vieux documents remontant à 1995. On y faisait l'annonce de nouvelles formules telles que l'adhésion des États-Unis au système CANPASS qui se trouvait à Sarnia. Ce système est suspendu pour le moment.

Les événements du 11 septembre exigent le renforcement des mesures de sécurité. Tout cela est faisable. La technologie existe et l'application intelligente des nouvelles technologies et procédures peut permettre d'améliorer l'accès à la frontière et de renforcer la sécurité.

Si notre frontière est ouverte, c'est grâce à l'approvisionnement juste à temps. Je ne sais pas si on vous l'a expliqué. Le fait est que nous n'avons pas de stock. Nous construisons les pièces pour nos clients qui peuvent les utiliser quelques heures plus tard. C'est tout. Les stocks que nous avons se trouvent à bord du camion, de l'avion ou du train qui les transporte. Nous ne conservons pas de stock et notre client non plus.

Si nos livraisons sont retardées à la frontière, tout à coup le besoin de conserver des stocks se fait sentir. Notre client nous demande de garder des pièces en réserve, pour le cas où on en aurait besoin; notre client nous demande d'ouvrir un entrepôt de notre côté de la frontière, au cas où on en aurait besoin. Nous devons désormais faire face à toutes ces dépenses. Par contre, nos concurrents de l'autre côté de la frontière sont épargnés, si bien que, lentement mais sûrement, nous devenons de moins en moins concurrentiels. Nos clients craignent également une fermeture de la frontière, si bien que notre approvisionnement n'est plus fiable. Lentement mais sûrement, la part de notre production destinée à l'exportation diminue et 66 000 emplois au Canada sont menacés. Il est possible de prévenir une telle situation et nous recommandons de l'éviter.

Nous avons plusieurs recommandations à faire pour éviter qu'une telle situation ne se produise. Certaines de ces recommandations ont déjà été mentionnées auparavant. La grande priorité est que le périmètre de sécurité nord-américain contre le terrorisme englobe le Canada. Cela est impératif, non pas dans l'intérêt d'un autre pays, mais pour notre propre bénéfice. Je veux que le Canada soit l'endroit le plus sûr en Amérique du Nord. L'avantage secondaire d'un tel état de choses est que les autres habitants d'Amérique du Nord seront également en sécurité.

Deuxièmement, le Canada doit appliquer de meilleures mesures de contrôle le long de notre périmètre. Nos mesures de contrôle doivent être les meilleures. Personne ne doit pouvoir nous accuser de ne pas appliquer les normes les plus strictes dans ce domaine. Il doit être évident que le système de contrôle canadien est aussi bon ou même meilleur que n'importe quel autre et qu'on peut donc lui faire confiance. On a pu laisser entendre—et certains médias ont abondé en ce sens—que le système de contrôle canadien n'est pas aussi bon qu'il devrait l'être. Je peux vous dire que j'ai appris au fil des ans dans le commerce qu'une impression devient réalité. Par conséquent, nous devons faire en sorte que notre système de contrôle soit perçu comme le meilleur et que cela devienne réalité.

À la frontière actuelle, nous devons étendre les formalités de prédédouanement dans les deux pays, formalités qui seraient une extension des contrôles préalables qui se pratiquent actuellement dans les aéroports. Il ne s'agit pas d'appliquer de nouvelles méthodes, mais tout simplement d'étendre le système actuellement existant dans les aéroports. Cela pourrait s'avérer très utile. En effet, le contrôle permet d'effectuer un tri avant de classer le fret en fonction des éléments à haut risque et à faible risque, afin de permettre la circulation plus rapide du fret et des personnes à faible risque. Cela permettrait de disposer de plus de temps pour inspecter de la manière appropriée le fret présentant des risques élevés.

Il faut créer des laissez-passer de haute sécurité pour les voyageurs réguliers, particuliers et employés des transports, afin d'accélérer et de faciliter la circulation à la frontière des personnes dont il a été déterminé au préalable qu'elles présentaient un faible risque, et de disposer ainsi de plus de temps pour inspecter les personnes et marchandises présentant un risque élevé.

Nous avons besoin de mettre en place un système de traitement électronique des formulaires de douane avant la frontière. C'est tout à fait faisable. Lorsque le camion quitte l'usine, le fournisseur canadien peut transmettre sous forme électronique au point d'entrée toutes les informations devant entrer dans la déclaration de douane. Lorsque le camion se présente à la frontière, le prédédouanement a déjà eu lieu et il peut franchir rapidement la frontière, muni de l'autorisation de sécurité appropriée. La technologie existe déjà, il suffit de l'utiliser.

Pour que cela soit possible, nous devons disposer d'une certaine infrastructure. Il faut disposer, aux points de passage de la frontière, de gares de triage sûres où les marchandises peuvent être inspectées afin de permettre un passage rapide de la frontière. Il faut également une infrastructure améliorée pour le passage de la frontière. C'est quelque chose que nous demandions avant le 11 septembre. En réalité, nous avons besoin d'un nouveau pont à Fort Erie, d'une nouvelle route dans le sud de l'Ontario pour mener à ce pont et d'un nouveau pont à Windsor. Toutes ces choses sont plus importantes maintenant qu'elles ne l'étaient auparavant.

• 1035

Si toutes ces mesures sont prises, la frontière canado-américaine pourra demeurer très ouverte, plus ouverte qu'elle ne l'a été par le passé pour les échanges commerciaux, mais en fait plus étanche que jamais aux terroristes et aux indésirables. La technologie nous le permet. Il nous faut tout simplement prendre la décision de l'utiliser. Notre industrie sera prête à faire sa part pour que cela soit possible.

Je vous remercie.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Fedchun.

Nous allons maintenant passer aux questions et nous allons commencer par M. Penson.

M. Charlie Penson: Je remercie le groupe et je lui souhaite la bienvenue aujourd'hui au comité.

Beaucoup d'entre nous comprenons l'importance de l'industrie de l'automobile et des pièces de rechange pour le secteur manufacturier canadien. Nous savons qu'elle produit des recettes énormes et qu'elle contribue à une grande part de nos exportations. Je crois que le groupe a présenté d'excellentes suggestions.

Voici quelques points que j'aimerais vous entendre commenter. Votre industrie représente un risque faible sur le plan de la sécurité et il est même possible de remédier à certains problèmes de manière à diminuer encore les risques. Le Canada n'a pas vraiment à se soucier de respecter les normes de sécurité américaines. Si les Américains décident de se servir de la frontière comme moyen de représailles pour nous punir de ne pas collaborer avec eux, votre industrie risque d'en souffrir énormément.

J'aimerais vous demander de nous préciser ce que cela implique sur le plan des investissements. Je pense que Honda a soulevé la question. Étant donné que vous exportez 90 p. 100 de votre production aux États-Unis ou au Mexique, si la frontière vous pose problème, pourquoi ne déménageriez-vous pas votre usine aux États-Unis puisque c'est là-bas que se trouve votre marché?

Je crois que M. Fedchun nous a vraiment convaincus lorsqu'il a dit que le Canada doit se trouver à l'intérieur du périmètre de sécurité. Il est important que le gouvernement canadien comprenne que c'est une nécessité absolue, compte tenu de la taille de votre industrie. L'intégration est telle au sein de votre industrie que les répercussions seraient lourdes pour vous.

Cela donne en fait deux questions. J'aimerais demander à M. Thomas de présenter son point de vue sur les investissements.

M. Art Thomas (Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada; premier gestionnaire, Affaires corporatives, Honda Canada Inc.): Si j'ai bien compris vos commentaires, la frontière est, de notre point de vue, aussi cruciale pour nous que pour nos collègues. L'idée d'investir dans des usines et dans des emplois au Canada est importante pour nous. Une des raisons qui nous ont amenés à choisir le Canada, indépendamment des avantages économiques, c'est la proximité par rapport à notre clientèle.

Nous exportons un grand nombre de pièces détachées aux États-Unis et dans 12 autres pays du monde, mais c'est ici que nous fabriquons le modèle Civic qui est le véhicule de tourisme numéro un au Canada. Nous voulons être proches de nos clients. Nous ne voulons pas nous retrouver dans une situation où le gouvernement, si je peux m'exprimer ainsi, nous dicterait certaines stratégies d'investissement. C'est pourquoi, il est important pour nous que la frontière soit ouverte et accessible.

Pour reprendre les commentaires de Bob, je m'inquiète de la circulation nord-sud et sud-nord, mais également des échanges avec les autres pays du monde, parce que non seulement nous exportons dans beaucoup d'autres pays, mais nous importons également de nombreux endroits différents.

J'espère avoir répondu à votre question.

La présidente: Je crois que M. Fedchun aimerait répondre, lui aussi.

M. Charlie Penson: Auparavant, j'aimerais demander une précision à M. Thomas. La plupart de vos produits sont exportés aux États-Unis, n'est-ce pas?

M. Art Thomas: C'est exact.

La présidente: Monsieur Fedchun.

M. Gerald Fedchun: Si la frontière n'est pas totalement ouverte et libre, notre industrie s'étiolera. Nous ne disparaîtrons pas complètement parce qu'il y aura toujours une certaine production ici, mais ce sera sans commune mesure avec ce que nous avons connu dans les années passées.

C'est très simple. Prenons le cas d'une entreprise qui veut installer une usine quelque part. La direction doit calculer tous les coûts et choisir l'endroit qui lui permet d'obtenir les coûts de production les plus faibles. Actuellement, notre système de soins de santé constitue un gros avantage, et c'est la même chose pour la valeur du dollar canadien. La formation de notre main-d'oeuvre spécialisée représente aussi un gros avantage. Il y a beaucoup d'autres éléments en faveur d'une importante production ici.

Mais si tout à coup nous devons maintenir des plus grands stocks, faire face à des retards à la frontière, nous serons moins fiables et la qualité de nos produits sera remise en question à cause de tout cela. Lentement mais sûrement, les fabricants vont se rendre compte que le Canada n'est peut-être pas le meilleur endroit pour leurs usines et qu'il serait peut-être préférable de les installer plus près de leurs autres centres de production.

• 1040

C'est la simple réalité à laquelle il faut faire face en économie. C'est pourquoi nous devons garder la frontière aussi perméable qu'elle a toujours été afin d'éviter que des coûts supplémentaires ne viennent alourdir le bilan lorsque nous tenterons d'implanter de nouvelles usines au Canada.

M. Mark Nantais: Gerry a bien décrit la situation, mais j'aimerais ajouter que pour éviter la menace dont vous avez parlé, nos compagnies membres des deux côtés de la frontière interviennent aux niveaux les plus élevés du gouvernement pour s'assurer que la frontière ne fera pas l'objet d'un enjeu commercial destiné à nous pénaliser. Nous travaillons très fort pour l'adoption d'une approche stratégique bilatérale de gestion de la frontière et je pense que c'est de cette manière que nous pourrons éviter la menace que vous avez décrite.

M. Charlie Penson: Monsieur Nantais, vous étiez présent lorsque le ministre a témoigné ce matin. Il a affirmé que la circulation commerciale à la frontière était pratiquement revenue à la normale. Ne pensez-vous pas que nous devons continuer à rester vigilants, compte tenu de la déclaration faite par George Bush hier et de la volonté des États-Unis de renforcer la sécurité à la frontière si le Canada n'harmonise pas ses politiques d'immigration et certains autres aspects avec les États-Unis? N'est-ce pas cela le véritable danger?

M. Mark Nantais: Vous avez tout à fait raison, surtout si les Américains renforcent les mesures de sécurité au point d'empêcher la circulation de nos pièces détachées et de nos produits finis. C'est la raison pour laquelle nous travaillons de part et d'autre de la frontière pour éviter une telle situation.

Si nous prenons le cas de notre industrie, nous avons bénéficié d'un climat commercial très favorable au Canada, mais je pense que nous entrons actuellement dans une ère tout à fait nouvelle. Le Pacte de l'automobile n'existe plus. Les fabricants ne sont plus tenus de continuer à investir au Canada. Bien sûr, il y a l'ALENA. Nous fonctionnons sur une base nord-américaine et bientôt, peut-être, à l'échelle de tout un hémisphère. Il ne faudrait pas que les ententes commerciales que nous concluons soient dérangées d'une manière ou d'une autre, tout au moins en ce qui a trait à la circulation nord-sud, par des obstacles à la frontière.

M. Charlie Penson: Monsieur Nantais, prenez-vous part à des rencontres organisées réunissant des groupes canadiens et leurs homologues américains de manière régulière pour tenter de trouver une solution à ce problème?

M. Mark Nantais: Vous savez, il y a beaucoup de groupes différents, mais dans le secteur de l'auto, comme Bob l'a indiqué au départ, nous travaillons en très étroite collaboration à l'examen des questions qui touchent notre secteur. Nous avons aussi des liens, par l'entremise des associations et des sociétés membres, avec d'autres organisations qui s'intéressent également à la question de la frontière.

Je le répète, la clé ici est une approche coordonnée, alignée des politiques que nous appliquons au Canada, par comparaison aux politiques américaines.

M. Charlie Penson: Merci.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Penson.

Monsieur McTeague, s'il vous plaît.

M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.): Je vous remercie d'être venus aujourd'hui et je remercie madame la présidente et le comité de donner la priorité à ce débat.

Monsieur Beatty, j'ai un intérêt très net pour votre industrie. Vous direz bonjour à mon bon ami F. David Stone, de la même compagnie, avec qui j'ai travaillé il y a de nombreuses années.

J'ai quelques questions à poser à M. Nantais et aux autres témoins. J'aimerais vous demander, en toute déférence, si vos efforts auprès de vos homologues américains ont été couronnés de succès lorsque vous avez tenté de leur faire comprendre le message, compte tenu du fait que ces compagnies ont des intérêts communs avec vous. Pouvez-vous nous donner un exemple?

Je sais, monsieur Beatty et monsieur Thomas, que vous avez des usines ailleurs: à Sparta, dans le Kentucky, à Georgetown, ainsi que des usines en Californie.

Vous pouvez peut-être nous dire dans quelle mesure vous êtes parvenu à faire comprendre à vos homologues que le Canada représente une partie importante de la fabrication et de la commercialisation des automobiles à l'échelle nord-américaine. Vous pouvez peut-être également nous donner des exemples de mesures de renforcement de la sécurité dans vos propres compagnies étant donné que beaucoup d'entre elles peuvent très bien représenter des symboles auxquels des terroristes voudraient s'attaquer, et, par voie de conséquence, dans vos usines au Canada.

M. Robert Armstrong: Je dirai tout simplement qu'une des sources de préoccupation de notre industrie a été Washington.

Les hauts fonctionnaires américains n'ont pas été autorisés à prendre part à la conférence que nous avons organisée la semaine dernière sur les problèmes de la frontière. Mais le nouveau chef des douanes m'a également informé qu'il ne pouvait pas envisager de nous rencontrer, pas plus que nos homologues américains, avant le 15 novembre. C'est pourquoi nous tentons de faire progresser les choses de notre côté.

Nous craignons qu'ils ne prennent toutes les décisions et qu'à notre prochaine rencontre, ils nous exposent les nouvelles procédures à suivre à la frontière et nous invitent, à ce moment-là, à venir discuter avec eux.

Les deux prochaines semaines seront cruciales. C'est pourquoi j'ai dit que la déclaration faite par le président des États-Unis hier était assez claire quant au plan qu'il a l'intention de mettre en place. C'est pourquoi nous demandons instamment au gouvernement canadien principalement de faire en sorte que nous ayons une équipe coordonnée qui puisse rencontrer l'équipe américaine, l'équipe de sécurité intérieure, afin de trouver une solution pendant que de notre côté, Mark, Gerry et moi-même ferons nos propres démarches auprès de nos homologues de l'industrie américaine. Malheureusement, ils n'ont pas pu rencontrer les gens de Washington qui sont toujours absorbés par cette équipe de sécurité intérieure.

• 1045

Mark, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Mark Nantais: Je crois que vous avez bien décrit la situation. Je ne sais pas si les vice-présidents des compagnies ont pu rencontrer des responsables à Washington. L'accès à quelques-uns d'entre eux est tout simplement impossible à cause de la situation actuelle à Washington. Je sais que les rencontres que nous avons tenté d'obtenir ont été retardées plusieurs fois. Il s'agissait de rencontres bilatérales avec des représentants du gouvernement américain.

La situation est très difficile. Les temps sont très difficiles à Washington et je ne suis pas certain que nous puissions en faire reproche aux Américains, mais nous devons poursuivre notre travail, et le plus tôt sera le mieux. Je crois que nous devons persévérer jusqu'à ce que nous puissions nous entendre sur une façon de procéder afin d'optimiser les échanges commerciaux, sans compromettre la sécurité.

M. Michael Sheridan (directeur des relations gouvernementales, Compagnie Ford Canada Limitée; Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada): Chacun des Trois Grands ont fait, de part et d'autre de la frontière, un travail gigantesque en faveur du maintien d'une frontière ouverte.

Nous avons abordé le dossier de la frontière avec des délégations des États. Nous avons fait une importante démarche à Washington. Je peux dire que la délégation canadienne a fait un excellent travail en faveur du maintien d'une frontière ouverte. Elle a fait une excellente intervention à Washington pour faire passer ce message. Chacun des Trois Grands s'est penché sur cette question avant le 11 septembre, mais depuis, ils ont multiplié leurs efforts.

M. Dan McTeague: Est-ce qu'il me reste du temps pour une autre question?

La présidente: Je crois que M. Beatty souhaite répondre.

M. Dan McTeague: Monsieur Beatty, merci.

M. Stephen Beatty (vice-président, Affaires corporatives, Toyota Canada, inc.; Association des fabricants internationaux d'automobiles du Canada): Merci.

J'aimerais souligner également qu'il est clair qu'une compagnie comme Toyota qui fait environ les deux tiers de son chiffre d'affaires en Amérique du Nord, tente très activement, de part et d'autre de la frontière, d'engager un dialogue avec ses homologues de l'industrie et avec le gouvernement.

Mais, selon moi, la réalité est que les Américains ne sont pas intéressés à examiner les répercussions économiques des événements du 11 septembre; la seule chose qui les intéresse, ce sont les incidences sur le plan de la sécurité. L'industrie et le gouvernement doivent faire front commun au sujet des impressions concernant la sécurité à la frontière. En effet, la sécurité est la priorité numéro un des décideurs de Washington et des autorités frontalières. Le fait que les préoccupations en matière de sécurité ne soient pas nécessairement très fondées, ne change rien à l'affaire; c'est une préoccupation tout à fait réelle actuellement. C'est elle qui reçoit la priorité.

En tant que Canadiens, je pense que nous devons nous demander ce que nous pouvons proposer aux Américains pour répondre à ces préoccupations et leur trouver une solution.

Je peux vous dire que du point de vue des entreprises, il ne s'agit pas d'un problème à court terme découlant des difficultés de passage de la frontière et de leurs conséquences sur nos activités quotidiennes, ni d'un problème à long terme, puisque des sociétés comme Toyota sont tout à fait convaincues que le Canada est un bon choix et que les investissements que nous avons faits ici ont été de bonnes décisions. Le problème se situe plutôt à moyen terme et dépendra de la décision des Américains d'imposer des mesures de sécurité à la frontière.

Nous pensons que c'est là qu'il faudrait placer notre priorité et c'est pourquoi nous cherchons à élargir notre partenariat avec l'industrie et le gouvernement des deux côtés de la frontière. Nous estimons qu'il faut se pencher sur ces questions.

La présidente: Monsieur McTeague, avant de poursuivre...

Monsieur Fedchun, s'il vous plaît.

M. Gerald Fedchun: J'aimerais préciser rapidement que nous avons beaucoup d'alliés aux États-Unis. La Motor Equipment Manufacturers Association, notre homologue américaine, travaille également sur ce dossier.

En réalité, nous importons plus de pièces détachées des États-Unis que nous en exportons du Canada, si bien qu'il y a aux États-Unis un grand nombre d'entreprises et de personnes qui partagent les mêmes intérêts que nous. Nous tentons de les mobiliser dans un même groupe afin de nous assurer que toutes les mesures seront prises pour montrer que la technologie peut permettre de rendre la frontière plus sûre qu'elle ne l'a jamais été et assurer la circulation rapide des marchandises que nous voulons exporter ou importer.

M. Dan McTeague: À ce sujet, à supposer que les priorités concernant la sécurité à la frontière seront définies, et compte tenu du fait que les chefs de direction seront convaincus de la nécessité de créer une frontière commune pour l'échange de biens et services, comment vos organisations réagiraient-elles si, après coup, elles constatent que les problèmes demeurent à la frontière, en raison de l'appréhension des États-Unis? Quelle position vos organisations adopteront-elles vis-à-vis de vos sociétés mères, sous divers aspects, étant donné que vous aurez plus d'influence que nous les députés, pour exposer l'argument que vous venez de présenter?

• 1050

M. Gerald Fedchun: Nous n'aurons pas d'autre choix que de nous battre jusqu'au bout, car c'est une question de vie ou de mort pour notre industrie et pour nos homologues américains. Nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas gagner; c'est aussi simple que cela. C'est pourquoi nous gagnerons.

M. Dan McTeague: Merci.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur McTeague.

[Français]

Monsieur Bergeron, s'il vous plaît.

M. Stéphane Bergeron: Merci, madame la présidente.

Je dois vous dire qu'en tant que député québécois, cette évocation des difficultés que rencontre l'industrie automobile à la suite des événements tragiques du 11 septembre dernier me laisse pour le moins perplexe. Il n'y a qu'une seule usine de fabrication d'automobiles située sur le territoire du Québec, et c'est l'usine de GM à Boisbriand. La fermeture de cette usine a été annoncée avant le 11 septembre dernier. Pourtant, on disait de cette usine que c'était l'une des usines les plus performantes en Amérique du Nord, selon une analyse menée en 1998 par le cabinet du fiscaliste Yvon Cyrenne pour le Comité de soutien de l'industrie automobile dans les Basses-Laurentides. On y indique que l'usine de GM était parmi les plus concurrentielles du groupe américain.

Alors, il y a lieu de se demander quelles sont les raisons pour lesquelles GM a décidé de mettre fin aux opérations de l'usine de Boisbriand. Bien sûr, on a indiqué que les deux véhicules qui étaient fabriqués à Boisbriand étaient en perte de vitesse en termes de ventes. Le marché n'y est plus, semble-t-il.

Peut-être est-ce là une illustration d'un certain manque de vision ou de planification de la part de l'entreprise, qui n'a pas su capitaliser sur une usine performante pour prévoir l'intégration d'un nouveau modèle.

Je sais également, ou je crois savoir que vous n'avez pas été des plus favorables à la comparution devant ce comité des gens de l'usine de Boisbriand. Vous adressez ce matin un certain nombre de demandes au gouvernement par rapport aux difficultés que vit l'industrie à la suite des événements du 11 septembre, et je pense que c'est légitime. Je crois que vous y avez fait allusion également ce matin. Vous êtes, je l'imagine, fort conscient que vous devrez également mettre en place un certain nombre de mesures pour faire face aux effets des événements du 11 septembre.

Ma question est la suivante. Par rapport aux mesures que vous devez mettre en place pour faire face aux événements du 11 septembre et compte tenu de la nouvelle conjoncture qui a découlé des événements du 11 septembre, quelles sont les prévisions de GM pour l'usine de Boisbriand particulièrement?

Au moment où on en a annoncé la fermeture, on a fait part d'un plan ou de prévisions ou, du moins, d'intentions nobles à l'égard de l'usine de Boisbriand. Est-ce que, d'une part, les événements du 11 septembre remettent en question les engagements de GM par rapport à Boisbriand? D'autre part, par rapport aux événements du 11 septembre, qu'entend faire GM pour demeurer un partenaire au Québec au niveau de l'automobile?

[Traduction]

La présidente: Monsieur Nantais, je ne suis pas certaine que vous ayez en main toute l'information nécessaire pour répondre à cette question.

Je prie les membres du comité d'excuser l'absence des gens de General Motors, qui n'ont pas pu venir eux-mêmes aujourd'hui. Mais comme M. Nantais représente l'Association canadienne des constructeurs de véhicules, nous allons le laisser répondre.

M. Mark Nantais: Merci, madame la présidente.

Il est certain que les gens de General Motors seraient mieux placés pour répondre aux questions comme celle-là; malheureusement, notre représentant de GM est à l'extérieur du pays et n'a pas pu revenir à temps pour l'audience de ce matin.

Mais votre question reflète une réalité qui existe bel et bien dans l'industrie automobile. Elle met en relief la fragilité de cette industrie au Canada. Nous avons une surcapacité de 22 millions d'unités dans le monde entier, dont environ 35 p. 100 en Amérique du Nord. Nous avons un marché très changeant, où les préférences des consommateurs évoluent constamment en ce qui concerne les véhicules sport et les autres types de véhicules. Bien sûr, quand ces préférences changent, la demande relative à ces véhicules peut augmenter ou diminuer. Donc, la décision a été prise. Je ne peux pas parler au nom de GM, mais votre question montre encore une fois que le marché change et qu'il y a une surcapacité sur le marché nord-américain, comme sur le marché mondial.

Vous avez tout à fait raison de dire, madame la présidente, que je ne suis pas très bien placé pour répondre à ces questions-là. Mais tout le monde doit comprendre que la situation est plutôt fragile dans notre industrie. Il y a le Mexique et d'autres pays qui sont en train de devenir beaucoup plus intéressants qu'avant pour les investisseurs.

• 1055

Je n'en dirai pas plus. Ce sont des questions qu'il faudrait plutôt poser aux représentants de General Motors.

La présidente: Merci.

Monsieur Beatty.

M. Stephen Beatty: J'allais justement dire qu'il appartient aux gens de GM de vous parler des détails relatifs à l'usine GM. Mais j'espère que M. Bergeron écoutera aussi les préoccupations que nous exprimons aujourd'hui, au nom des autres constructeurs de la province de Québec.

Par exemple, il y a au Québec des fabricants de pièces du groupe Toyota qui sont touchés par les répercussions des ralentissements à la frontière. Pour eux et pour les autres entreprises liées à la fabrication de pièces dans la province, c'est une question préoccupante. Nous espérons pouvoir bénéficier de votre appui pour régler les problèmes à la frontière.

La présidente: Monsieur Fedchun.

M. Gerald Fedchun: Je voudrais simplement souligner que notre association compte plus de 20 fabricants de pièces de la province de Québec. Je ne sais pas exactement combien de travailleurs ils emploient, mais je sais qu'ils sont plus nombreux que les travailleurs de l'usine GM.

Au Québec, il y a un nombre croissant de fabricants qui produisent des pièces en aluminium et en magnésium parce qu'ils y ont facilement accès à l'aluminium, au magnésium et à l'électricité, ce qui leur confère un avantage naturel. Il y a donc une industrie de fabrication de pièces de plus en plus importante au Québec.

L'ouverture de la frontière est essentielle au succès de ces fabricants. Comme ce sont des nouveaux venus sur le marché, ils doivent faire le nécessaire pour ne pas être désavantagés parce qu'ils doivent prendre à d'autres entreprises leur part du marché. Donc, s'il y a des obstacles en ce sens, c'est difficile pour eux.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: J'ai indiqué tout à l'heure que je pense que les demandes que vous adressez au gouvernement sont légitimes. Je me permets de le rappeler simplement pour rassurer M. Beatty et M. Fedchun, qui ont fait des interventions fort pertinentes.

Je comprends les motivations de l'absence de General Motors ce matin devant nous, mais j'ose espérer que j'obtiendrai une réponse à la question que j'ai posée ce matin. Je dois dire que moi-même et plusieurs membres de ce comité, vraisemblablement, aurons pris bonne note du commentaire de M. Nantais, qui disait que du point de vue de la législation, de la réglementation et du point de des salaires également, on voit, dans l'industrie de l'automobile, plusieurs avantages à investir au Mexique, par exemple, plutôt qu'au Canada.

[Traduction]

La présidente: Merci, monsieur Bergeron.

Madame Torsney, s'il vous plaît.

Mme Paddy Torsney: Merci.

Premièrement, c'est un plaisir d'entendre vos commentaires et de discuter de certaines des questions qui vous intéressent au plus haut point. Le secteur de l'automobile est certainement important dans ma circonscription, et surtout celui des pièces.

Le ministre a mentionné que GM avait enregistré un chiffre de ventes record en octobre, et j'espère que cela s'est répercuté partout. Mais ces résultats ont été obtenus grâce à des mesures incitatives. Je me demande combien de temps ça va continuer. Nous pouvons peut-être encourager les gens qui nous regardent à s'acheter une nouvelle voiture. Mais quel est le coût de ces mesures pour l'industrie? Et est-ce qu'elles peuvent être maintenues?

Ma deuxième question s'adresse à M. Nantais. Il a mentionné un certain nombre de mesures fiscales. J'espère que, quand les entreprises songent à investir au Canada ou à prendre de l'expansion au Canada, elles ne décortiquent pas nécessairement toutes les mesures fiscales différentes en disant «nous ne sommes pas intéressés à cause de cet impôt ou de cette taxe», mais qu'elles regardent l'ensemble du régime fiscal et le taux global.

Vous avez mentionné en particulier des encouragements fiscaux pour le secteur de la fabrication. La première question qui m'est venue à l'esprit, c'est celle du coût. Avez-vous calculé combien ça coûterait? Est-ce qu'il y a une mesure comparable ailleurs? Nous devons faire des comparaisons. Quels sont les avantages?

Enfin, ma dernière question porte sur un point pratique. J'imagine que les pièces, par exemple, sont expédiées dans des camions et des conteneurs de chemin de fer. Je ne comprends pas très bien pourquoi il ne serait pas possible d'inspecter et de sceller ces camions et ces conteneurs avant leur départ. Quand ils traversent la frontière, je suppose qu'ils ne sont pas fermés, mais je peux me tromper. Est-ce qu'on vérifie maintenant tous les coffres, est-ce qu'on regarde sous le capot de tous les véhicules, et ainsi de suite? Est-ce que c'est une des raisons des files d'attente? Est-ce qu'il y a des moyens d'améliorer le passage de la frontière? J'espère bien que l'industrie envisage d'utiliser des machines à rayons X ou d'autres appareils pour les inspections à la frontière, afin de s'assurer qu'il n'y a pas de gens cachés dans les conteneurs, dans les coffres ou ailleurs.

• 1100

Je ne pense pas qu'il y ait eu beaucoup de discussions sur ces possibilités ou sur ces mécanismes, et sur ce que nous pourrions faire pour aider les entreprises canadiennes et faire en sorte que ces méthodes soient appliquées à la frontière. C'est évidemment important pour nous tous.

Voilà donc les différentes questions que j'avais à vous poser.

M. Michael Sheridan: Pour répondre à votre première question sur les décisions d'investissement, il est clair que les entreprises examinent l'ensemble des facteurs qui peuvent influencer ces décisions. Le coût de la main-d'oeuvre est un facteur important, mais il y a aussi l'aspect fiscal. Les taux d'imposition des entreprises devraient baisser en deçà de ceux de nombreux États américains; c'est donc un avantage, en fait. Les entreprises le comprennent et le reconnaissent clairement quand elles doivent décider où investir.

Il y a aussi le crédit d'impôt à la R-D, dont Mark a parlé tout à l'heure. Le crédit d'impôt à l'investissement est un avantage supplémentaire qui pourrait inciter des fabricants à investir davantage au Canada. Encore là, le coût dépend vraiment de l'importance de l'investissement puisque le crédit d'impôt correspond à 5 p. 100 du montant investi.

Mais nous examinons ces facteurs dans leur ensemble. Il y a notamment l'impôt sur le capital. Il est clair que cet impôt a un impact disproportionné sur notre industrie. Nos entreprises sont fortement capitalisées. La compagnie Ford, par exemple, a investi 8 milliards de dollars au Canada pendant les années 90, ce qui nous désavantage très clairement du point de vue de l'impôt sur le capital. C'est pourquoi, naturellement, nous avons demandé au gouvernement de voir s'il ne pouvait pas le supprimer parce que cela désavantage nettement les entreprises qui investissent au Canada.

Mme Paddy Torsney: Mais l'incitatif fiscal accordé au secteur manufacturier, les 5 p. 100... Le ministre des Finances n'acceptera pas une recommandation du comité s'il n'a aucune idée de ce que ça va lui coûter. Pouvons-nous retourner un ou deux ans en arrière pour voir à combien s'élevaient en moyenne les investissements? Pouvons-nous faire des projections pour l'avenir et essayer de voir ce que vous aimeriez faire ou ce que vous pourriez faire? Pouvez-vous garantir que vous allez investir dans l'équipement si vous bénéficiez de cette mesure? Quelles sont les projections relatives au coût d'une mesure de ce genre?

M. Michael Sheridan: Le problème, c'est qu'il y a un coût seulement s'il y a des investissements.

Mme Paddy Torsney: En effet.

M. Michael Sheridan: Il n'y a aucun coût s'il n'y a aucun investissement. Ces temps-ci, comme Mark l'a déjà mentionné, nous sommes en situation de surcapacité et nous devons essayer de faire concurrence à d'autres endroits en Amérique du Nord, principalement pour attirer et retenir les investisseurs. Pour ce qui est de retourner en arrière, j'ai bien l'impression que les niveaux d'investissement ne seront pas les mêmes, pour les prochaines années, que pendant la dernière décennie. Encore une fois, nous allons essayer d'obtenir des mesures incitatives du gouvernement. Je soupçonne que ce sera difficile du point de vue de l'industrie.

Bien sûr, le montant dépend des investissements. Cela ne coûte rien si personne n'investit.

Mme Paddy Torsney: Vos chiffres de ventes pour octobre, comparativement...

M. Michael Sheridan: Il y a certainement un problème à ce sujet-là. Si nous étions encore en septembre, avant la crise... Nous nous attendions tous à un ralentissement de l'industrie cette année. Les événements du 11 septembre ont évidemment eu des conséquences sur la confiance des consommateurs des deux côtés de la frontière. Pour essayer de contrer cette baisse de confiance des consommateurs, l'industrie a offert toutes sortes de choses pour inciter les gens à acheter des véhicules. Ce qu'il faudra déterminer, c'est si nous avons simplement devancé, en 2001, les ventes que nous aurions réalisées en 2002 et si nous allons en payer le prix l'an prochain. C'est la question que nous devons nous poser. Les mois de septembre et d'octobre devraient être assez bons pour cette année, mais ce qui nous inquiète, c'est que ce sont peut-être des ventes de moins pour 2002.

La présidente: Monsieur Fedchun.

M. Gerald Fedchun: Je voudrais faire un commentaire sur ce que vous avez dit au sujet des appareils qu'il serait possible d'installer aux postes-frontières, par exemple de grosses machines à rayons X pour radiographier des camions entiers. Cela fait partie de l'infrastructure que nous avons recommandée. C'est évidemment une décision que les gouvernements devront prendre des deux côtés de la frontière, parce qu'ils seraient responsables de ces machines et qu'ils devront approuver leur utilisation. Nous recommandons aussi que les camions soient scellés, mais encore là, les gouvernements devront adopter des lois pour que le niveau d'inspection soit différent quand les camions sont scellés.

Nous approuvons toutes ces mesures. C'est le genre de méthodes et d'équipement qui pourraient accélérer le passage de la frontière tout en améliorant la sécurité.

La présidente: Monsieur Beatty.

M. Stephen Beatty: Merci.

• 1105

En réponse à votre question sur les incitatifs, je vais vous faire part de mon opinion personnelle, qui n'est pas nécessairement celle de l'industrie. Les incitatifs ne sont probablement pas une bonne chose, qu'ils soient appliqués par l'industrie ou par le gouvernement.

Ce qu'il faudrait faire des deux côtés, c'est examiner l'environnement d'affaires global dans lequel nous fonctionnons et faire les investissements nécessaires à long terme pour que le Canada soit un endroit attrayant, non seulement pour vivre, mais pour continuer à faire grandir nos entreprises.

C'est pourquoi, dans une large mesure, ce qu'il nous faut, ce sont des programmes d'investissement dans l'infrastructure. Dans certains cas, c'est lié à la question de ce qu'il en coûte globalement pour faire des affaires au Canada, mais je ne suis pas certain qu'il faille mettre l'accent sur les incitatifs plutôt que d'examiner les éléments qui nous rendent compétitifs, comme pays et comme entreprises, pour ce qui est de notre production ici au Canada.

Si vous me permettez de suggérer une préférence au comité, je choisirais ces investissements stratégiques plutôt que les mesures incitatives, d'un côté comme de l'autre.

La présidente: Avant que vous poursuiviez, je vais donner la parole à M. Jure.

M. Doug Jure (expert-conseil, DaimlerChrysler Canada; Association canadienne des constructeurs de véhicules): Je voudrais en revenir au passage de la frontière et à l'expédition de marchandises de part et d'autre. Pour vous donner une idée de la situation, je peux vous citer l'exemple de Detroit et de Sarnia, où nous sommes un des principaux utilisateurs. Au total, nos expéditions dans un sens ou dans l'autre s'élèvent à 1 480 par jour. Et la valeur des véhicules que nous envoyons chaque jour aux États-Unis par Sarnia et Detroit atteint 53 millions de dollars. La majorité de ces expéditions se font par camion. Je peux vous assurer que notre compagnie serait très intéressée à explorer toutes les technologies permettant de faciliter les inspections à la frontière.

Il y a aussi des questions relevant de la compétence des provinces, par exemple les registres électroniques que nous devons tenir quand nos camions circulent en Ontario; nous y travaillons. Il y a une foule de questions qui se rattachent à tout ça, mais ça vous donne une petite idée du trafic à la frontière.

Mme Paddy Torsney: Que se passe-t-il pour votre personnel en ce qui concerne les formalités d'immigration? Est-ce qu'il y a des retards? Est-ce que c'est un problème si vous voulez amener un nouveau président qui vient d'ailleurs, ou est-ce que vos employés éprouvent des difficultés quand ils doivent passer la frontière canado-américaine?

M. Doug Jure: Il y a parfois des problèmes. Entre Windsor et Auburn Hills, nous avons 400 employés qui traversent constamment la frontière. Il y a des jours où ils ont du mal à entrer au Canada, mais le lendemain, tout va bien.

Mme Paddy Torsney: D'accord.

M. Gerald Fedchun: Les choses ont été difficiles pendant un bout de temps, mais c'est variable. Un des problèmes, du côté américain, c'est que les agents d'immigration des États-Unis ont beaucoup de latitude. Quand j'étais à ITT, un de mes vice-présidents a été refoulé à la frontière un jour qu'il se rendait à notre siège à social à Detroit parce qu'il n'avait pas répondu correctement à leurs questions. Ce sont des choses qui arrivent, mais en général, cela ne pose pas de problème grave.

Pour le moment, c'est simplement le volume—plutôt que les questions posées—qui a ralenti considérablement le passage des personnes. Il faut espérer que les ajouts de personnel du côté américain vont aider à régler le problème. Depuis un mois environ, c'est simplement un problème de main-d'oeuvre.

La présidente: Merci, madame Torsney.

Nous poursuivons.

Monsieur Strahl, s'il vous plaît.

M. Chuck Strahl: Merci, madame la présidente.

Je remercie les représentants de l'industrie d'être venus aujourd'hui. Leurs présentations étaient intéressantes. Je pense que vous nous avez tous donné une meilleure idée de l'urgence de la situation, ce qui est important.

Le ministre a dit plus tôt ce matin que l'industrie du tourisme était en quelque sorte le canari dans la mine et que les problèmes allaient se manifester d'abord dans le secteur du tourisme. Mais il est certain que, dans le secteur de la fabrication, c'est vous qui faites office de canari. Tous vos commentaires sont extrêmement importants pour nous, et nous tenons à répondre le mieux possible à vos préoccupations.

Je me demande bien pourquoi le ministre de l'Industrie n'a pas rencontré son homologue américain, surtout si, comme quelqu'un l'a mentionné, l'administration américaine ne veut pas rencontrer les représentants de la plus grosse industrie des deux pays. Je ne sais pas ce que nous allons pouvoir faire avant le 15 novembre, à part nous faire l'écho de ce sentiment d'urgence.

Je voudrais faire deux ou trois commentaires avant de poser ma question.

Je vous encourage fortement à continuer à lier l'assainissement de l'environnement à la vente de vos véhicules neufs. C'est une question très importante en Colombie-Britannique. Nous dépensons là-bas des dizaines de millions de dollars par année pour vérifier les émissions des véhicules qui ont déjà une vingtaine d'années et qui polluent dix fois plus que les véhicules neufs.

• 1110

Je pense que c'est une bonne chose de continuer à insister sur le fait que les véhicules neufs sont beaucoup meilleurs pour l'environnement. C'est bon pour les ventes, mais aussi pour l'environnement, et je vous encourage à continuer à faire ce lien et à travailler fort pour construire des véhicules aussi peu polluants que possible.

Pour ce qui est de la sécurité, il me semble que nous allons voir diverses choses à ce sujet-là. Il y a les questions de sécurité personnelle, par exemple la sécurité d'emploi, le sentiment de sécurité, la sécurité des voyageurs. Ce sont des choses personnelles. Il y a la sécurité économique de notre pays et de votre industrie, qui est reliée au reste et qui est également importante. Et il y a évidemment aussi la sécurité physique, ce qui se rattache au périmètre de sécurité que le Président a évoqué.

Je pense que nous devons tous, dans toutes nos conversations, faire bien comprendre que tout cela est relié. Nous devons nous occuper de ce sentiment de sécurité. Il est autant psychologique que réel, mais nous devons nous en occuper et relier toutes ces choses.

Il y a deux points qui m'intéressent. J'aurais voulu parler de la Loi sur la concurrence, mais nous avons réservé ça pour un autre jour.

Il y a une chose que personne n'a mentionnée, et c'est la ferveur patriotique qui anime les Américains en ce moment. Encore une fois, que ce soit réel ou imaginaire, j'ai l'impression qu'il y a des gens dans certaines industries—et je me demande si c'est le cas dans la vôtre—qui craignent que les sociétés mères rapatrient une partie de leurs activités aux États-Unis pour en retirer en quelque sorte une prime au patriotisme et que le slogan «produit des États-Unis»—qui est excellent, d'ailleurs, tout comme «produit au Canada»—serve d'excuse pour ramener l'industrie aux États-Unis.

J'aimerais savoir si vos sociétés mères ou si les membres de votre industrie sont inquiets de cette éventualité parce que j'ai l'impression que, même s'il y a une industrie nord-américaine de l'automobile à laquelle nous sommes inexorablement liés, ce qui est tant mieux, les sociétés mères pourraient bien se servir de ça comme prétexte. Qu'est-ce que vous en pensez?

Deuxièmement, dans les industries qui appliquent la méthode juste à temps, combien de temps faut-il pour que les gens fassent des changements dans leurs investissements?

Monsieur Fedchun, vous avez dit par exemple que, si nous ne réglons pas les questions liées au périmètre de sécurité, l'industrie risque de dépérir. Je doute que ça se produise demain. Mais ce que vous dites, c'est que les investissements, les efforts de modernisation, et ainsi de suite seront mis de côté si nous ne réussissons pas à nous organiser.

Combien de temps avons-nous? Jusqu'au 15 novembre? Encore six mois? Ou alors, est-ce que ça va se faire graduellement? Est-ce qu'il y a des dates clés pour l'industrie, à votre avis?

Il y a donc deux choses. Est-ce que les gens de votre industrie s'inquiètent de ce sentiment patriotique, et que pouvons-nous faire pour y remédier? Et qu'est-ce que si passe pour les industries qui appliquent la méthode juste à temps?

M. Gerald Fedchun: Je peux répondre à votre deuxième question, mais je ne suis pas qualifié pour répondre à l'autre puisque la majorité des membres de mon association appartiennent à des intérêts canadiens. Mais je peux répondre à votre question sur la production juste à temps.

C'est lié aux changements de modèles, parce qu'il y a des appels d'offres pour chaque modèle. Supposons par exemple que le modèle 2004 de la Toyota Camry doive être redessiné. Votre entreprise fait une offre et obtient le contrat. Il s'agit maintenant de savoir où vous allez produire le nouveau modèle. C'est alors que la question va se poser et, évidemment, ça se passe... Nous avons des centaines de modèles produits en Amérique du Nord. La question va se poser chaque fois qu'il y aura un appel d'offres pour un nouveau modèle.

C'est pourquoi les choses vont se faire graduellement, parce que 10 à 15 p. 100 des modèles sont changés chaque année; chaque modèle dure en moyenne de trois à quatre ans avant d'être modifié de façon significative. Ce sera donc un changement très graduel, comme la marée qui se retire très lentement.

M. Stephen Beatty: Monsieur Strahl, je ne pense pas qu'il y ait une seule et unique réponse à votre question.

Je suis ici aujourd'hui avec un collègue de notre usine, Greig Mordue. Greig est en train d'aider à organiser la production d'un tout nouveau modèle en janvier. Nous avons déjà annoncé que la production de la Lexus se ferait maintenant au Canada.

Donc, nous sommes encore en phase d'expansion au Canada, et les investissements vont se poursuivre un certain temps. Mais notre entreprise n'en est pas à la même étape de son histoire que les autres compagnies qui sont représentées ici.

• 1115

La réponse, je pense, c'est que les gens doivent prendre leurs décisions d'investissement en temps réel, ce qui fait qu'il n'est vraiment pas possible de remettre à plus tard notre réflexion sur le cadre économique et commercial au Canada. Il se prend des décisions continuellement. Et vous pouvez influencer les décisions de l'industrie.

Comme je l'ai déjà dit, nous en sommes actuellement à une belle étape dans l'histoire de notre croissance. Ce n'est pas le cas de toutes les compagnies.

La présidente: Monsieur Sheridan.

M. Michael Sheridan: Merci.

Pour commencer, en réponse à votre premier commentaire sur le message à saveur écologique dont se servent les fabricants pour vendre leurs véhicules au Canada, c'est clairement une question dont nous avons tenu compte dans l'industrie en général, et chez Ford en particulier.

Vous avez dit qu'un véhicule de dix ans était dix fois plus polluant qu'un neuf. En réalité, il l'est 22 fois plus. C'est donc encore plus important que vous le dites. Nous sommes très fiers d'avoir mis sur le marché des véhicules peu polluants.

Sur la question du patriotisme, nous produisons 600 000 voitures et camions légers au Canada. Nous avons le mandat mondial pour la production de la Windstar, de même que pour la Crown Victoria et la Grand Marquee, pour la compagnie Ford. À l'usine de camions ontarienne, nous produisons aussi les camionnettes de la série F. Je ne pense pas que la ferveur patriotique que vous avez évoquée aura des répercussions importantes sur nos usines. Nous produisons aussi, à Windsor, en Ontario, 1,5 million de moteurs destinés principalement au marché américain.

Nous sommes très fiers de notre présence au Canada. Et je ne crois pas que le sentiment patriotique aura des effets significatifs.

Un petit détail au sujet de la méthode juste à temps: quatre heures après leur départ de Windsor, nos moteurs se retrouvent dans un camion du Michigan. La frontière est donc extrêmement importante pour nous. Encore une fois, nous expédions entre 1,1 et 1,2 million de moteurs de Windsor vers les États-Unis, à destination de huit de nos quinze usines d'assemblage. Ce délai de quatre heures est notre point de référence. Quand il y a eu des problèmes à la frontière le 11 septembre, il y a des usines qui ont dû fermer des deux côtés de la frontière parce qu'il était impossible de transporter nos moteurs vers le marché.

En ce qui concerne les décisions d'investissement, il s'en prend chaque jour. Nous investissons dans le monde entier, et dans toute l'Amérique du Nord. Quand nous prenons ces décisions, nous tenons compte des éléments et des facteurs qui nous touchent au jour le jour. Il n'y a pas vraiment de fenêtre précise. C'est une question cruciale qu'il faut régler le plus vite possible.

La présidente: Monsieur Fedchun.

M. Gerald Fedchun: Je voulais faire un commentaire au sujet du patriotisme. Les gens n'oublient jamais qui sont leurs amis.

Si j'ai bien compris, le NCSM Vancouver vient de partir pour le Moyen-Orient. Je pense que c'est le sixième navire canadien en service là-bas.

Le 11 septembre, il y a environ 150 avions qui ont été détournés vers le Canada. Les passagers ont été hébergés dans des communautés de tout le pays, parfois même chez l'habitant. Il y a une foule de gens qui ont parlé de cette hospitalité aux États-Unis. Elle a reçu énormément de publicité. Je ne dirais pas que c'est hors de proportion avec ce qui est arrivé; c'est proportionnel aux sentiments d'amitié et d'hospitalité que les événements ont suscités. Les Canadiens sont des gens généreux. Je ne pense pas que ce soit oublié plus tard, quand chacun devra se demander qui sont ses amis.

M. Chuck Strahl: J'espère que vous avez raison. Je suis d'accord avec vous. À certains égards, je pense que nous devons rebâtir certains des liens d'amitié que nous entretenions avec nos partenaires américains. Bien franchement, je pense qu'ils ont parfois été malmenés ces dernières années.

Je suis d'accord avec vous. Il est important que nous fassions notre part, tant pour lutter contre le terrorisme que pour montrer que nous sommes prêts à tenir compte des préoccupations du Président, et aussi de celles de M. Harris, de M. Campbell et de M. Landry, au sujet du périmètre de sécurité. C'est une question qui touche particulièrement votre industrie, mais d'autres aussi.

Est-ce que j'ai le temps de poser une autre question?

Les décisions relatives aux investissements et aux efforts de modernisation vont être cruciales pour l'avenir de l'industrie. Une usine qu'on laisse dépérir est condamnée à mort. La modernisation est importante, et le réinvestissement aussi.

Est-ce qu'un d'entre vous serait prêt à me dire à quel point il est important que le Canada et les États-Unis harmonisent leurs lois sur la concurrence? Il y aura probablement une entente bilatérale une fois que cet examen sera terminé. Est-ce que c'est un élément qui vous préoccupe? Pensez-vous que vous pourriez devenir des victimes? Est-ce qu'il est possible, d'une manière ou d'une autre, d'avoir une politique de concurrence harmonisée entre le Canada et les États-Unis?

• 1120

M. Gerald Fedchun: Je peux répondre. Je ne sais pas quelles sont les différences. Je suis gêné de le dire, parce que j'ai une maîtrise en droit et que j'ai étudié le droit de la concurrence avec un spécialiste il y a vingt ans. Malheureusement, je ne m'occupe plus de ce domaine depuis dix ans. Je savais où se situaient les différences, mais je ne le sais plus. Mes collègues sont probablement dans la même situation. Nous devrons trouver un peu plus d'information avant de pouvoir vous répondre.

M. Chuck Strahl: Certainement.

Je vais donc conclure. M. von Finckenstein nous a montré un exemple d'une éventuelle entente bilatérale entre le Canada et les États-Unis. Dans le cas des industries qui appliquent la méthode juste à temps, en particulier, je dirais qu'il est important que vous soyez convaincus que cette entente répond à toutes vos attentes. C'est une possibilité. Des lois antimonopoles, ou de bonnes lois sur la concurrence, sont importantes pour les industries comme la vôtre. Je dirais qu'il faut des dispositions au sujet de la frontière, parce que c'est une possibilité. Tous les moyens pourront être—et seront—utilisés contre vous, dans une industrie aussi compétitive que la vôtre doit l'être.

Si vous avez le temps, et surtout si vous avez les connaissances nécessaires, je vous incite fortement à y jeter un coup d'oeil et à vous assurer que ça répond à vos attentes.

Merci.

La présidente: Monsieur Nantais, vous voulez répondre?

M. Mark Nantais: Je voudrais ajouter quelque chose, monsieur Strahl. Premièrement, l'ACCV va présenter un mémoire au comité qui étudie la Loi sur la concurrence.

Deuxièmement, vous avez soulevé une question très intéressante. Nous allons examiner la chose et y réfléchir.

La présidente: Merci beaucoup.

Je dois préciser aux membres du comité que bon nombre des entreprises sont membres du CCCE, qui a déjà comparu devant le comité pour exprimer ses préoccupations sur certains aspects de la question.

Nous allons maintenant passer à M. Volpe.

M. Joseph Volpe: Merci, madame la présidente. Je voudrais poser quelques questions très brèves. Elles ne se rattachent peut-être même pas précisément au sujet du jour.

Je voudrais d'abord vous remercier de la franchise et de l'ouverture d'esprit dont vous avez fait preuve ce matin dans notre discussion sur la frontière. Cela m'a certainement donné une meilleure idée de la situation de l'industrie.

Je prends bonne note également du fait que M. Armstrong a injecté un certain optimisme dans sa présentation en disant que les ventes pourraient augmenter bientôt. Il s'y attend, et j'imagine qu'il y travaille.

Je n'ai pas noté le même optimisme chez M. Nantais. C'est peut-être parce qu'il n'a pas tout à fait mis l'accent sur les mêmes choses.

Monsieur Nantais, quand vous nous avez présenté votre analyse comparative des prix, je vous ai peut-être mal compris ou mal entendu. Il me semble vous avoir entendu dire qu'il y avait une différence d'environ 3 000 $, en faveur du Canada, pour un véhicule moyen. Si j'ai bien compris ce chiffre, ça voudrait dire que les consommateurs canadiens sont considérablement avantagés quand ils veulent acheter un véhicule typique assemblé ou fabriqué en Amérique du Nord, comparativement aux consommateurs américains. Est-ce que je vous ai bien compris?

M. Mark Nantais: En fait, pour ce qui est du prix d'achat des véhicules en fonction d'une devise commune, les Canadiens sont en meilleure posture. Cependant, une fois qu'on ajoute les taxes et tout le reste, c'est plutôt l'inverse.

Je tiens à préciser, au sujet de cette comparaison du prix moyen des transactions par rapport au revenu personnel disponible, que les Canadiens avaient besoin de 105 p. 100 de leur revenu personnel disponible pour acheter un véhicule en 1991, alors qu'il en fallait 98 p. 100 pour les Américains.

Tout au long des années 90, il est devenu de plus en plus facile pour les Américains d'acheter un véhicule. Il ne leur fallait plus que 96 p. 100 de leur revenu personnel disponible, alors que c'est exactement le contraire qui s'est produit au Canada. La proportion est montée jusqu'à 146 p. 100 du revenu personnel disponible, pour un véhicule moyen, compte tenu des prix des transactions et en dépit du fait que les Canadiens pouvaient, en fonction d'une devise commune, acheter un véhicule pour 3 100 $ de moins en moyenne qu'aux États-Unis.

M. Joseph Volpe: Je sais que vous comparez des statistiques, mais vous n'analysez pas—du moins, pas à mon avis—les raisons pour lesquelles il en est ainsi. Mais je n'ai pas l'intention de vous demander de le faire maintenant.

Est-ce que c'est une question de productivité du côté canadien? Je sais que vous n'avez pas voulu dire que c'est strictement à cause des taxes. En fait, est-ce que c'est parce qu'au Canada, non seulement le revenu disponible, mais aussi le revenu relatif ont diminué tandis que le revenu des Américains augmentait?

• 1125

Il y a toutes sortes de facteurs. Il y a aussi, peut-être, que la marge bénéficiaire est un peu plus tentante pour les fabricants du côté canadien que du côté américain.

J'ignore si l'un ou l'autre de ces facteurs entre en jeu, mais puisque vous avez dit quand nous parlions du passage de la frontière que c'était un facteur très important pour attirer les investisseurs du côté canadien de la frontière, j'ai pensé que je pouvais soulever la question. J'aurais besoin de mieux comprendre quelle pourrait être la dynamique à cet égard. Je ne le dis pas dans un sens négatif, parce que je suis vraiment satisfait de la façon dont vous avez tous abordé la question de la frontière ce matin. Vos commentaires ont été extrêmement intéressants.

Je devrais peut-être reposer ma question à un autre moment, quand nous nous pencherons sur autre chose, mais j'aimerais quand même connaître vos réflexions à ce sujet-là.

M. Michael Sheridan: Je peux essayer.

Je pense qu'il faut aborder la question sous deux angles: d'abord, le marché des véhicules au Canada, c'est-à-dire la vente de véhicules aux consommateurs canadiens; et ensuite, la production de véhicules au Canada, principalement en vue de leur exportation vers les États-Unis, le Mexique et d'autres pays du monde.

Quand on regarde les ventes de véhicules aux Canadiens, on se rend compte que, dans l'ensemble, pour tous les fabricants établis au Canada, nous faisons des profits moins élevés sur les véhicules que nous vendons aux consommateurs canadiens parce que les prix que nous leur demandons sont plus bas qu'ils le seraient sur le marché américain. Et, à mon avis, c'est tout simplement parce que les consommateurs canadiens ont un revenu disponible moins élevé pour s'acheter des véhicules.

Cela s'est manifesté de différentes façons. Par exemple, il y a eu moins de véhicules vendus au Canada dans les années 90 que dans les années 80. C'est tout à fait particulier à notre industrie. Sur la plupart des marchés du monde, il s'est vendu plus de véhicules dans les années 90 que dans les années 80, mais il s'en est vendu moins au Canada, notamment parce que le revenu disponible des Canadiens est resté stagnant pendant une bonne partie des années 90. Il y a même eu un déclin entre 1990 et 1994-1995, avant que les choses se rétablissent un peu vers la fin de la décennie.

M. Joseph Volpe: Vous pourriez m'aider à comprendre un peu mieux si vous me donniez une idée du nombre de voitures par habitant au Canada comparativement aux États-Unis ou à la France, par exemple.

M. Michael Sheridan: Eh bien, comparativement aux États-Unis, où on compte en moyenne deux véhicules par ménage, il y en a environ 1,6 au Canada.

Au Canada, la segmentation penche aussi en faveur des petits véhicules. Les petites voitures ordinaires, par exemple, y occupent près de 60 p. 100 du marché, comparativement à 30 p. 100 environ aux États-Unis. Donc, la segmentation s'est déplacée, au Canada, vers les véhicules plus petits, plus abordables, et le nombre de véhicules par ménage est plus bas au Canada qu'aux États-Unis.

Je ne sais pas si ça vous aide.

M. Joseph Volpe: Oui, c'est intéressant; je vous remercie.

M. Stephen Beatty: J'aimerais ajouter qu'il y aussi des répercussions, premièrement, sur les fabricants d'automobiles eux-mêmes et, deuxièmement, sur l'économie en général.

De toute évidence, si nous avons des marges bénéficiaires plus faibles au Canada, notre capacité de réinvestir notre argent est limitée, et c'est pourquoi la question des prix abordables préoccupe tout le monde dans le secteur de l'automobile depuis quelques années. Je vous dirais également que, comme fabricants d'automobiles, nous sommes évidemment en concurrence les uns avec les autres sur le marché. Nous essayons tous désespérément de repositionner nos véhicules de manière à ce qu'ils soient plus abordables pour les Canadiens et qu'ils nous permettent de réaliser des profits.

C'est la raison pour laquelle, par exemple, quand nous avons lancé notre nouvelle Camry en septembre, nous avons offert un véhicule qui, grâce à des baisses de prix et à un nouveau contenu, permettait aux consommateurs d'en avoir 3 000 $ de plus pour leur argent par rapport au modèle qu'il remplaçait. Mais il y a des limites très concrètes à ce que nous pouvons faire et aux moyens que nous pouvons prendre pour faire bénéficier les consommateurs de ces améliorations de fabrication et de ces baisses de coût.

Donc, nous travaillons aussi fort et aussi vite que possible pour offrir des véhicules abordables de notre côté. Mais c'est une des questions économiques plus vastes sur lesquelles nous allons devoir nous pencher si nous voulons assurer la santé à long terme de notre secteur—des deux côtés.

M. Joseph Volpe: Je vais dire à mes enfants que nous ferions mieux de commencer à viser la moitié inférieure de cette moyenne, chez nous en tout cas.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Volpe.

C'est maintenant au tour de M. Rajotte, s'il vous plaît.

M. James Rajotte: Merci, madame la présidente.

Je tiens à remercier tous les invités qui ont comparu aujourd'hui, pour leurs déclarations et en particulier pour les recommandations très précises qu'ils nous ont présentées. Je leur en suis très reconnaissant.

• 1130

J'apprécie tout particulièrement leurs recommandations sur la question de la sécurité et de l'accès à la frontière. Le fait que vous ayez tous insisté fortement sur la nécessité de garder la frontière ouverte et de permettre aux marchandises de continuer à circuler, sur les questions comme les bases de données communes et les cartes de sécurité pour les gens qui voyagent souvent...je pense que ce sont d'excellentes idées auxquelles nous devrions donner suite.

Je voudrais poursuivre la discussion sur les questions soulevées par M. Volpe, à savoir qu'il s'est vendu moins de voitures au Canada dans les années 90 que dans les années 80. Si j'ai bien compris, le Canada est le seul pays de l'OCDE où ça s'est produit—ce qui m'a particulièrement frappé—et c'est lié au revenu personnel disponible des Canadiens. La proportion est passée de 98 à 96 p. 100 aux États-Unis, et de 105 à 146 p. 100 au Canada, n'est-ce pas?

Est-ce que vous, vos associations ou vos industries avez une idée de la raison pour laquelle le revenu disponible a chuté à un point tel au Canada?

M. Michael Sheridan: Tout au long des années 90, le revenu disponible nominal n'a pas chuté; il a augmenté, en fait, mais pas aussi rapidement qu'aux États-Unis. Comme Mark l'a dit tout à l'heure, nous avons applaudi quand le gouvernement a annoncé diverses initiatives visant à réduire les impôts au mois d'octobre de l'an dernier—le moment était bien choisi pour notre industrie, étant donné le ralentissement qui s'était amorcé en octobre. L'augmentation du revenu disponible, grâce à l'amélioration de la situation fiscale des Canadiens, nous a aidés à atténuer le déclin prévu pour l'industrie en 2001. Donc, la question du revenu disponible se rattachait en partie au problème de la fiscalité, qui a été réglé dans une certaine mesure l'an dernier en octobre.

M. James Rajotte: Vous avez dit que la question se rattachait «en partie» à la fiscalité. Et à quoi d'autre?

M. Michael Sheridan: Elle se rattache en partie aussi à la croissance de l'emploi. Quand on compare le taux de chômage au Canada et aux États-Unis, on constate que, même à 7 p. 100, il est beaucoup plus élevé ici. La productivité est certainement un facteur également.

M. James Rajotte: Est-ce que quelqu'un d'autre veut commenter?

Toujours sur ce point, dans ce cas, les baisses d'impôt qui ont été recommandées touchaient surtout les entreprises. Comme vous l'avez mentionné, il y avait des baisses d'impôt à la fois pour les entreprises et pour les particuliers dans l'exposé budgétaire du mois d'octobre. Évidemment, il y a des gens de ce côté-ci qui pensent que nous devrions aller plus vite et plus loin dans le sens de la réduction des impôts des particuliers, comme de ceux des entreprises. Pensez-vous que ce soit nécessaire, compte tenu en particulier des répercussions des événements du 11 septembre?

M. Gerald Fedchun: À mon avis, les réductions les plus importantes pour les entreprises se rattachent—du moins de notre point de vue—aux coûts de la recherche et du développement. L'industrie s'est restructurée, ce qui fait que nos clients, les autres constructeurs, confient plus d'activités de R-D aux fabricants de pièces. Ces constructeurs impartissent non seulement la production de pièces et de modules, mais également leur mise au point technique.

Pour que l'industrie canadienne des pièces bénéficie de sa juste part—ou plutôt, comme j'aime à le dire, pour qu'elle obtienne plus que sa juste part—, nous devons faire plus de R-D. Nous espérons donc que le gouvernement conservera le crédit d'impôt à la R-D, et même qu'il l'améliorera. Je sais qu'il est déjà très généreux.

AUTO 21 est une nouvelle initiative parrainée par le gouvernement fédéral; nous l'attendions avec impatience parce que c'est une autre façon de favoriser la R-D au Canada. Nous sommes très contents de cette initiative, qui nous permettra de continuer à assumer plus que notre juste part des activités de production et des activités connexes de mise au point. Ces activités de mise au point apportent aussi des emplois de grande valeur, et amènent des travailleurs techniques bien formés et bien rémunérés.

M. James Rajotte: Sur la question du crédit d'impôt à la R-D, j'ai eu l'occasion de visiter l'été dernier des entreprises de technologie de tout le Canada. Les gens de ces entreprises m'ont dit à peu près la même chose, à savoir qu'ils étaient tout à fait en faveur du crédit d'impôt à la R-D. Une de leurs préoccupations, c'est que le système utilisé au Canada pour appliquer ce crédit d'impôt change souvent, tout comme les règlements qui s'y rattachent, ce qui les oblige à s'ajuster chaque année. Ils ont trouvé la situation très difficile de ce point de vue-là. Mais les choses étaient alors moins stables, et il leur était plus difficile de planifier les prochaines années à cause des modifications apportées par le gouvernement à son crédit d'impôt. Avez-vous vécu le même genre de chose dans vos industries?

M. Gerald Fedchun: En 1998, le ministre du Revenu de l'époque a tenu un important séminaire sur le crédit d'impôt à la R-D à Vancouver; ça nous a été très utile. Ce séminaire a donné naissance à un comité conjoint de l'industrie et du gouvernement, et les gens du secteur de l'automobile ont rencontré les représentants du gouvernement pour leur dire: «Voilà comment nous faisons notre R-D. Comment est-ce que ça concorde avec vos formalités administratives?» Le gouvernement nous a beaucoup aidés. Nous avons établi une nouvelle série de lignes directrices du côté de l'industrie automobile, ce qui a rendu les choses plus prévisibles.

• 1135

C'est un des rares cas où nous avons travaillé avec le gouvernement et où nous avons obtenu de très bons résultats pour l'économie canadienne. Ça a très bien marché, et nous en sommes très satisfaits.

M. James Rajotte: Merci.

La présidente: Claude Drouin.

[Français]

M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Merci, madame la présidente. Merci à nos témoins de leurs présentations devant le comité ce matin.

On est tous conscients, à la suite des événements du 11 septembre dernier, de l'importance de la sécurité et, en même temps, de la problématique que ça peut causer au niveau de la fluidité des passages aux frontières.

Vous avez mentionné, monsieur Fedchun, que nous importions plus de pièces que nous en exportions, mais dans votre introduction, vous mentionnez qu'on aurait l'obligation d'ouvrir des entrepôts de l'autre côté. Il me semble que ça devrait être la même chose pour les Américains, qu'ils devraient avoir l'obligation, eux aussi, d'avoir des entrepôts chez nous. Ils ont sûrement la même problématique que nous.

[Traduction]

M. Gerald Fedchun: Vous avez tout à fait raison, et c'est pourquoi nous avons des alliés importants aux États-Unis; nous voulons être certains que la frontière restera ouverte. Notre industrie est pleinement intégrée. Le Canada tire un bénéfice net du secteur de l'automobile parce que nous importons plus de pièces que nous n'en exportons, tandis que nous exportons beaucoup plus de véhicules finis que nous n'en importons. La balance commerciale avec les États-Unis penche donc en notre faveur pour l'ensemble du secteur de l'automobile. Mais il y a bien des gens des deux côtés de la frontière pour qui c'est une question très importante.

[Français]

M. Claude Drouin: Oui, je pense que c'est important. Dans votre présentation, vous avez mentionné les nouvelles technologies et la façon de faire pour faciliter le passage ou le transport des pièces ou de l'équipement. Je pense que vous avez à travailler avec nos compagnies américaines de l'autre côté et à faire des propositions aux deux paliers de gouvernement pour assurer que la marchandise passe le plus rapidement possible la frontière.

C'était mon commentaire, madame la présidente.

[Traduction]

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Drouin.

Je voudrais revenir à quelques commentaires qui ont été faits tout à l'heure. Mme Torsney a posé des questions sur le crédit d'impôt à la fabrication et sur le coût de cette mesure incitative. Je me demande ce qu'il en coûterait de ne pas adopter de mesure de ce genre. Je ne sais pas si M. Jure pourrait nous en parler.

Je regarde ce qui s'est passé à Windsor, par exemple, où le projet relatif à l'usine DaimlerChrysler a été mis de côté temporairement en janvier. Il en coûte très cher pour construire ou remettre en service une usine de ce genre, et pourtant ça a été mis de côté. Il me semble que ce serait un incitatif qui permettrait de créer ou de garder des milliers d'emplois au Canada. Je pourrais peut-être avoir l'autre...

M. Doug Jure: Je pense que si vous regardez la situation de DaimlerChrysler au troisième trimestre de l'an prochain... Depuis notre restructuration, près de 5 000 de nos employés ont quitté la compagnie, soit parce qu'ils ont pris une retraite anticipée, soit parce qu'ils ont été mis à pied. Il y a deux usines qui ont été fermées: l'usine de camions Western Star à Kelowna et l'usine d'autobus Thomas Built juste au sud de London. Il y a aussi la question de l'usine de Pillette, qui n'a toujours pas de mandat de production.

Ce que ça veut dire pour nous, c'est que, comme pour la question de la frontière, nous devons bénéficier de certains incitatifs en tant que multinationale germano-américaine. Nous sommes en concurrence avec différents États américains qui sont assez généreux de ce côté-là, en particulier en ce qui concerne la formation, les subventions et les autres mesures d'encouragement de cette nature.

Donc, ce que nous recommandons au sujet de ces taxes, ainsi que des mesures qui permettraient de faire des affaires au Canada plus facilement et à moindre coût, fait partie des facteurs. Tout ça a une influence. Comme l'a dit Michael, il se prend des décisions chaque jour, et notre industrie a une énorme surcapacité.

Dans le cas du Freightliner, l'usine de Portland ne sera pas fermée, mais celle de la Colombie-Britannique le sera. C'est peut-être une indication de la présence que doivent avoir les gouvernements, tant au fédéral qu'au provincial.

• 1140

La présidente: Sur ce point, quand nous parlons des répercussions des problèmes à la frontière et que nous examinons les décisions prises, il est très difficile de savoir exactement ce qui se passe.

J'ai écouté M. Beatty parler des projets pour les prochains mois; il me semble—corrigez-moi si je me trompe—que l'industrie automobile planifie pour les trois ou quatre années à venir. Il y aura donc certains projets qui iront de l'avant parce que les décisions ont déjà été prises, que les coûts sont déjà prévus dans bien des cas et que les investissements ont commencé.

Quand l'économie américaine se redressera dans trois ans et que nous chercherons à analyser rétrospectivement ce qui s'est passé, je crains fort que les constructeurs d'automobiles... Il y a des fabricants de pièces et de moules, dans ma circonscription, qui s'inquiètent de voir que les clients ne viennent pas de ce côté-ci. Donc, quand on entend parler de véhicules de tourisme et de véhicules commerciaux, je pense qu'il y a un malentendu. Ces véhicules de tourisme transportent aussi des gens d'affaires, pas seulement des touristes.

Le tourisme a été durement touché à Windsor, mais les affaires également. Ces véhicules-là, qui ne viennent pas de ce côté-ci de la frontière, appartiennent à des gens qui prennent des décisions au sujet de l'achat de pièces ou de l'utilisation des installations de fabrication de moules. Ils disent qu'ils ne peuvent pas venir au Canada en ce moment; il y a bien sûr l'attente du côté canadien, mais aussi le fait qu'ils ne savent pas combien de temps il leur faudra pour rentrer aux États-Unis. Il y a toujours de longues attentes pour les gens qui veulent entrer aux États-Unis dans des véhicules de tourisme—parfois jusqu'à deux heures et demie, selon l'heure de la journée.

Je m'inquiète beaucoup de ce qui va se passer jeudi et des conséquences que ça pourrait avoir. Nous savons que les Américains veulent autoriser l'embauche de personnel additionnel, mais il faudra de neuf à douze mois de formation avant que ces gens-là soient en poste à la frontière. Je ne sais pas très bien qui va assumer le coût de la Garde nationale. C'est sur cette question que porte le débat en ce moment aux États-Unis.

Les Américains se préoccupent de la sécurité autant que nous, parce qu'il ne s'agit pas seulement d'avoir de l'équipement et de savoir qui traverse la frontière. La sécurité dépend de la viabilité économique. Les autorités, à Washington, ont beau se concentrer actuellement—et à juste titre—sur l'actualité, sur les menaces quotidiennes et sur le problème de l'anthrax, elles reconnaissent aussi que leur viabilité économique est essentielle à leur propre sécurité.

Nous devons chercher une solution ensemble et changer notre message au sujet de la frontière. La frontière est une priorité parce que c'est aussi une priorité en matière de sécurité. Ce que je déplore, c'est qu'il est très difficile d'obtenir des statistiques au sujet des décisions prises. Comme l'a souligné M. Sheridan, il y a des investissements tous les jours. Je suis sûre que M. Beatty partage les sentiments de M. Jure et de M. Thomas, mais comment pouvons-nous obtenir ces chiffres? Et comment pouvons-nous transmettre cette information jusqu'en haut de l'échelle, jusqu'aux gens qui prennent les décisions au sommet? Nous essayons de leur parler, de les influencer et de leur faire comprendre que l'industrie automobile se trouve actuellement dans une situation difficile à cause de la question de la frontière. Comment pouvons-nous divulguer cette information alors que certaines des décisions sont des décisions stratégiques en matière d'investissements, que vous ne voulez évidemment pas mettre à la portée de vos concurrents? Je ne sais pas vraiment comment fournir la bonne information aux gens.

Y a-t-il des commentaires à ce sujet-là? Monsieur Jure.

M. Doug Jure: Tout d'abord, pour ce qui est de l'information que je vous ai fournie tout à l'heure au sujet du trafic à la frontière, je ne pense pas que les gens de Ford ou de GM soient extrêmement surpris d'apprendre que nous sommes un des plus gros utilisateurs du pont Ambassador. Vous n'avez qu'à regarder les camions. Mais l'information à laquelle j'ai fait allusion a été préparée à Washington et, comme nous l'avons dit tout à l'heure, nos bureaux à Washington la transmettent aux différents échelons de la bureaucratie américaine. Cela ne fait aucun doute. Et je pense que cette information a aussi été transmise au ministre Manley quand il est allé rencontrer le gouverneur Ridge à Washington.

Donc, nous faisons notre part de ce côté-là, puisque notre multinationale participe à ces échanges d'information. Mais je pense qu'il faut également définir en quoi consiste la sécurité. Il y a différents niveaux de risque, et nous sommes au plus bas niveau. La stratégie doit tenir compte de ce faible risque dans le cas de notre industrie.

La présidente: D'autres commentaires? Monsieur Fedchun.

M. Gerald Fedchun: Vous avez parlé des gens qui traversent souvent la frontière. Il me semble que nous pourrions leur faciliter beaucoup la vie en utilisant un système de cartes de haute sécurité pour les gens qui voyagent beaucoup, pour qu'ils puissent avoir leur propre file d'attente et traverser la frontière très rapidement. La mise en oeuvre d'un système de ce genre est une de nos priorités parce que nous avons énormément de gens—des ingénieurs et des vendeurs—qui traversent très souvent la frontière puisque notre industrie est tellement intégrée. Pour pouvoir vendre des produits de l'autre côté de la frontière, il faut d'abord concevoir ces produits et les vendre, et c'est ce que ces gens-là font.

• 1145

La présidente: Monsieur Beatty.

M. Stephen Beatty: Madame la présidente, je voudrais faire quelques commentaires. Dans notre présentation préliminaire, nous avons évidemment déclaré qu'il fallait régler les questions de la sécurité et du transport des marchandises au-delà de la frontière. Mais la grande question, que vous avez soulevée d'ailleurs, c'est de savoir où le Canada s'en va et quels seront les investissements dans notre secteur à la lumière de ce qui s'est passé le 11 septembre et de la situation depuis lors. Je dirais qu'à bien des égards, cela n'a rien changé aux décisions qui doivent se prendre dans notre secteur. Il y a des restructurations dans tous les grands secteurs économiques. Il y a des compagnies qui vont prendre de l'expansion, et il y en a d'autres qui vont devoir annuler des projets d'investissement.

Le défi pour le Canada—et je peux le dire au nom de Toyota et de toutes les autres compagnies internationales qui s'intéressent au Canada—sera de faire de notre pays le meilleur endroit au monde pour investir, grâce à sa situation économique générale. Nous sommes convaincus que le Canada est un pays où il fait bon vivre, et c'est pourquoi nous fabriquons des produits ici. Je pense que c'est un message que nous devons transmettre, non seulement aux sociétés mères des entreprises qui sont présentes ici, mais à beaucoup d'autres sociétés du monde entier; nous devons nous montrer aussi dynamiques que possible, à la suite des événements du 11 septembre, pour essayer de faire comprendre aux investisseurs potentiels que le Canada demeure un endroit sûr et économiquement viable pour faire des affaires. C'est la véritable tâche qui nous attend à la suite du 11 septembre; nous devons redoubler nos efforts pour faire du Canada un endroit attrayant. Je le dis en tant que Canadien, et non à titre de représentant d'une compagnie.

La présidente: Cela dit, il est très important pour l'industrie automobile que les choses se déroulent efficacement à la frontière. Les membres de la Bridge and Tunnel Operators Association se sont réunis hier à Detroit; j'y étais. Ils s'étaient déjà réunis dimanche et avaient dressé un plan en sept points, qui prévoyait notamment une autorisation préalable obligatoire pour tout le trafic commercial. Cette mesure aidera à assurer la sécurité et facilitera le passage de la frontière. J'imagine que les gens du secteur de l'automobile seraient d'accord avec cette mesure.

M. Gerald Fedchun: Cette autorisation préalable est un des aspects les plus importants pour nous. Un des problèmes de sécurité, actuellement, c'est que les camions qui vont du Canada aux États-Unis doivent traverser le pont Ambassador et qu'ils ne sont pas inspectés avant d'être arrivés de l'autre côté. Donc, un terroriste qui voudrait vraiment prendre le pont pourrait le faire très facilement; personne ne l'arrêtera avant qu'il soit rendu sur la structure même. Et, bien sûr, si la structure s'écroule, ce sera la catastrophe.

Donc, ce qu'il nous fait réellement du point de vue de la sécurité et des douanes, c'est une autorisation préalable avant que les véhicules commencent à circuler sur les structures de ce genre.

La présidente: En fait, un des autres points qui font partie de leur plan, ce serait d'inverser l'inspection et les formalités de douanes, de sorte que les services des douanes et de l'immigration américains seraient déplacés du côté canadien, et vice-versa. Depuis hier, et d'ici mercredi si je comprends bien, tous les ponts et les tunnels en Ontario fonctionneront selon un système qui permettra d'éliminer les files d'attente sur les ponts et dans les tunnels eux-mêmes; il faudra maintenant faire la queue sur les places ou dans les rues, ce qui risque de créer des problèmes dans les villes touchées. Nous devons donc prendre ces mesures de façon beaucoup plus claire et plus rapide.

Je crois que la France et la Grande-Bretagne ont déjà pris des mesures de ce genre, à savoir que les véhicules sont inspectés avant d'entrer dans les tunnels.

M. Gerald Fedchun: En effet.

La présidente: Je ne pense pas que ce soit nouveau, mais c'est probablement une mesure que le Canada et les États-Unis devraient envisager pour assurer la sécurité de ces installations, de même que des gens qui s'y trouvent et des marchandises qui y passent.

Je ne suis pas certaine que nous ayons d'autres questions. Je ne pense pas, mais je voudrais que chacun de vous nous fasse un dernier commentaire, si vous jugez que nous avons oublié un élément dans notre discussion d'aujourd'hui ou si vous voulez ajouter quelque chose pour terminer. Nous vous remercions d'être venus. Nous croyons que la frontière a une importance vitale pour le secteur de l'automobile, et je trouve aussi très important que nous continuions à nous pencher sur certaines des questions que vous avez soulevées, par exemple au sujet de la recherche et de la nécessité d'investir.

AUTO 21 était un bon début, mais il y a évidemment beaucoup d'autres choses que nous pourrions envisager et faire au Canada dans le domaine de la recherche. Il y a aussi la question de l'infrastructure qui mène à vos installations, par exemple le pont de Windsor. Et il y a d'autres éléments que nous pourrions—et que nous devrions—envisager.

Pour nous aider à dégager le message de la séance d'aujourd'hui, je vous serais reconnaissante de nous faire part de vos conclusions au nom du secteur de l'automobile.

• 1150

Monsieur Fedchun, vous avez quelque chose à dire?

M. Gerald Fedchun: Je voudrais simplement dire que, si nous ne continuons pas à accorder la priorité à la question de la frontière, l'industrie pourrait facilement se retrouver très vite au niveau où elle en était en 1991, soit à 12 milliards de dollars seulement plutôt qu'à 32 milliards.

La présidente: Monsieur Nantais.

M. Mark Nantais: Ce que je veux vous dire avant de vous quitter, c'est que nous ne devons pas nous reposer sur nos lauriers. Nous ne pouvons pas tenir pour acquis... Notre industrie cherche à s'assurer... Je ne voudrais pas être perçu comme indûment négatif dans mes prévisions parce que je pense que notre industrie est en assez bonne santé au Canada. Est-ce qu'elle sera toujours la même, comme Gerry l'a souligné, dans cinq ou dix ans? Je soupçonne qu'elle sera radicalement différente parce que les choses changent et que nous devons continuer à regarder l'image globale. La question de la frontière n'est qu'une de celles dont nous devons tenir compte pour attirer de nouveaux investissements à l'avenir.

Ce sera tout.

La présidente: Monsieur Sheridan.

M. Michael Sheridan: La situation me rappelle les débuts du Pacte de l'automobile, en 1965. Nous avons produit à l'époque 700 000 automobiles et camions légers au Canada, et nous en avons vendu environ 700 000 au Canada. Les exportations et les importations étaient minimes. Mais en l'an 2000, notre industrie a produit près de 3 millions de véhicules au Canada et notre population en a acheté environ 1,5 million; à peu près 85 p. 100 de notre production a été exportée au sud de la frontière, ainsi que dans 40 ou 50 autres pays partout dans le monde.

Donc, l'industrie a réussi grâce à une frontière transparente. Et ce facteur a non seulement favorisé notre industrie, mais aussi celle des pièces.

Comme Gerry l'a mentionné, nous avons commencé en 1965 avec des ventes de pièces de 500 millions de dollars et nous avons maintenant largement dépassé les 30 milliards; notre succès vient donc en grande partie du fait que l'industrie automobile est intégrée à l'échelle nord-américaine, ce qui exige une frontière perméable dont le maintien devrait être un objectif à long terme.

La présidente: Monsieur Jure, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Doug Jure: Je voudrais ajouter à ce sujet-là que la question se rattache également à l'infrastructure, comme vous l'avez mentionné. Il est certain que nous pouvons améliorer la procédure à la frontière, mais s'il y a encore des files d'attente parce que nos camions doivent traverser Windsor en passant par le chemin Huron Line, c'est un secteur commercial et résidentiel qui ne peut tout simplement pas soutenir toute cette circulation. Donc, le gouvernement fédéral et celui de l'Ontario doivent envisager des améliorations à l'infrastructure, qui s'imposent d'ailleurs depuis longtemps.

La présidente: Merci.

Monsieur Armstrong.

M. Robert Armstrong: Je tiens à répéter que j'espère que notre gouvernement dispose d'un groupe bien coordonné, d'une équipe qui travaille avec les Américains parce que—même si j'espère me tromper complètement—ce pourrait bien être le calme avant la tempête.

La présidente: Monsieur Beatty.

M. Stephen Beatty: Merci. J'ai deux commentaires à faire.

Je voudrais d'abord vous remercier de nous avoir invités à comparaître devant le comité pour échanger des idées avec vous.

Je voudrais dire aussi que tout le monde, à mon avis, partage les mêmes préoccupations ou les mêmes opinions sur la nécessité de régler les questions de la frontière et de la sécurité. Mais, d'un autre côté, il ne faut pas réagir de façon exagérée. Les bases sont encore très solides au Canada, et nous devons non seulement nous rappeler comment les choses se passaient avant le 11 septembre, mais aussi regarder vers l'avant et nous demander comment rebâtir notre secteur et notre économie.

La présidente: Monsieur Thomas.

M. Art Thomas: Merci beaucoup.

J'aimerais vous mentionner que la compagnie Honda applique une stratégie vraiment nord-américaine; la question de la frontière est donc primordiale pour nous à bien des égards, évidemment. Mais en même temps, notre croissance au Canada a été excellente et demeure positive. Donc, l'augmentation des ventes, des exportations, de la capacité de production—et, bien sûr, des impôts—a été une très bonne chose. Nous encourageons le gouvernement à continuer à chercher des moyens de créer au Canada un climat économique qui permette de faire durer cette période de croissance pour nous et aussi—il faut l'espérer—pour tous les membres de l'industrie.

Merci beaucoup.

La présidente: Merci à tous d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. Votre secteur est très important à nos yeux. Les séances que nous tenons cette semaine sont évidemment très importantes pour l'économie canadienne et la population du Canada, et nous savons quel rôle vous jouez.

• 1155

J'ai accompagné le ministre Manley à Washington la semaine dernière et je peux vous assurer que, lors de sa rencontre avec le gouverneur Ridge, il a évoqué l'importance de notre frontière et de notre sécurité aux postes-frontières pour le transport de nos produits. Comme vous l'avez entendu plus tôt, le ministre Tobin a dit très clairement à tout le monde que la question de la frontière était une priorité pour notre gouvernement. Nous allons donc continuer à travailler avec vous pour faire en sorte que l'industrie automobile soit non seulement forte, mais en croissance au Canada. C'est l'objectif de notre comité.

Merci beaucoup. Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 15 h 15.

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