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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la santé


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 12 mars 2002




Á 1105
V         La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.))
V         
V         
V         Dr Arnold Naimark (président,Comité consultatif canadien de la biotechnologie)

Á 1110
V         
V         La présidente
V         Mme Suzanne Hendricks (vice-présidente, Comité de direction de projet sur la réglementation des aliments génétiquement modifiés, Comité consultatif canadien de la biotechnologie)

Á 1115

Á 1120
V         Dr Peter Phillips (co-président, Comité de direction du projet sur la réglementation des aliments génétiquement modifiés, Comité consultatif canadien de la biotechnologie)

Á 1125

Á 1130
V         La présidente
V         M. Merrifield
V         Mme Suzanne Hendricks
V         M. Merrifield
V         Mme Suzanne Hendricks
V         M. Merrifield
V         Dr Arnold Naimark
V         M. Merrifield
V         Dr Arnold Naimark

Á 1135
V         M. Merrifield
V         Dr Arnold Naimark
V         M. Merrifield
V         Dr Peter Phillips
V         La présidente
V         M. Lunney
V         Dr Arnold Naimark

Á 1140
V         M. James Lunney
V         Dr Peter Phillips
V         Dr Arnold Naimark
V         M. James Lunney
V         Dr Arnold Naimark
V         M. Lunney
V         Dr Arnold Naimark
V         Dr Peter Phillips
V         La présidente
V         M. Réal Ménard (Hochelaga--Maisonneuve, BQ)

Á 1145
V         Dr Arnold Naimark
V         M. Réal Ménard
V         Dr Arnold Naimark
V         Mme Suzanne Hendricks
V         M. Réal Ménard
V         Dr Peter Phillips

Á 1150
V         M. Réal Ménard
V         Mme Suzanne Hendricks
V         La présidente
V         M. Jeannot Castonguay (Madawaska--Restigouche, Lib.)
V         Dr Arnold Naimark

Á 1155
V         Dr Peter Phillips
V         M. Jeannot Castonguay
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.)

 1200
V         Mme Suzanne Hendricks
V         Mme Hélène Scherrer
V         Dr Arnold Naimark

 1205
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark

 1210
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         M. Merrifield
V         Dr Arnold Naimark

 1215
V         M. Merrifield
V         Dr Arnold Naimark
V         M. Merrifield
V         Dr Peter Phillips
V         M. Merrifield
V         Dr Peter Phillips
V         La présidente
V         M. James Lunney

 1220
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Mme Hélène Scherrer

 1225
V         Dr Peter Phillips
V         Mme Hélène Scherrer
V         Dr Peter Phillips
V         Mme Hélène Scherrer
V         Dr Peter Phillips

 1230
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente

 1235
V         Dr Peter Phillips
V         La présidente
V         Dr Peter Phillips
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         M. James Lunney

 1240
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente
V         Dr Arnold Naimark
V         La présidente










CANADA

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 061 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 12 mars 2002

[Enregistrement électronique]

Á  +(1105)  

[Traduction]

+

    La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. J'ai le plaisir d'ouvrir cette séance.

    Avant de commencer sur les sujets inscrits à l'ordre du jour, je voudrais informer les membres du comité que j'ai devant moi deux avis de motion, que nous essaierons de traiter jeudi puisque, comme vous le savez, il existe un délai de préavis de 48 heures.

    L'un émane de M. Merrifield de l'Alliance canadienne, qui propose :

Que le Dr Alan Bernstein, président des Instituts de recherche en santé du Canada, soit amené à se présenter devant le comité afin d'expliquer pourquoi les IRSC ont décidé d'ignorer le Parlement en imposant de nouvelles lignes directrices concernant la recherche sur les cellules souches embryonnaires juste avant la mise en vigueur de la loi, et de s'expliquer sur les contradictions existant entre le rapport du Comité permanent et les nouvelles lignes directrices.

    Nous débattrons de cette question jeudi.

    Nous avons un deuxième avis de motion émanant de M. Ménard du Bloc Québécois, qui propose:

Que les témoins aient dix (10) minutes pour faire leur déclaration d'ouverture puis que la période des questions aux témoins attribuent sept (7) minutes aux intervenants de chaque parti dans l'ordre suivant: l'Alliance canadienne, le Bloc Québécois, le Parti libéral, le Nouveau Parti Démocratique, la Coalition PC-DR et le Parti libéral, et qu'ensuite cinq (5) minutes soit allouées à chaque intervenant suivant, en alternant partis d'opposition et parti au pouvoir, à la discrétion de la présidente.

    M. Ménard essaie de faire en sorte que nos séances de questions soient un peu mieux structurées. Vous recevrez des copies de ces documents, en français et en anglais, de la part de notre greffier, M. Richard Rumas, qui remplace notre greffier habituel. M. Rumas remplacera M. Sokolyk pour les trois prochaines réunions.

+-

     Après ces avis de motion que vous recevrez et auxquels, je l'espère, vous réfléchirez et vous préparerez à débattre jeudi, nous allons passer à notre ordre du jour. Le Comité consultatif canadien de la biotechnologie est présent parmi nous en la personne de son président, le Dr Naimark. Celui-ci est accompagné par le Dr Phillips, co-président du comité de direction du projet sur les aliments contenant des OGM. Est également présente Suzanne Hendricks, co-présidente du même comité.

+-

     Bienvenue à monsieur le Dr Naimark et à ses compagnons. Nous vous invitons à commencer votre exposé.

+-

    Dr Arnold Naimark (président,Comité consultatif canadien de la biotechnologie): Merci, madame la présidente. Nous sommes heureux d'être ici aujourd'hui et non pas jeudi.

    La présidente: Vous avez de la chance.

    Dr Arnold Naimark: Je ferai quelques remarques en guise d'introduction, si vous le permettez, puis je demanderai à mes collègues de mettre l'accent sur un certain nombre de domaines. Nous serons ensuite enchantés de répondre aux questions et de participer à la discussion.

    Je ne vais pas rappeler les antécédents du CCCB, notre organisme, car ils sont probablement expliqués dans les documents qui vous ont été distribués.

    Au mois d'août de l'an dernier, nous avons publié notre rapport provisoire concernant l'amélioration de la réglementation sur les aliments génétiquement modifiés et autres aliments nouveaux au Canada. Ce rapport contient 5 recommandations d'ordre général et 24 recommandations spécifiques sur l'organisation et l'administration du système de réglementation, sur le contrôle des répercussions à long terme sur la santé et l'environnement, sur la transparence du système de réglementation et sur les exigences permettant au consommateur de faire ses choix en toute connaissance de cause et permettant une bonne gestion de l'environnement.

    Après la publication de notre rapport, nous avons invité toutes les parties intéressées à nous faire part de leurs commentaires sur tous les aspects du rapport, et nous prendrons ces commentaires en compte lors de l'élaboration du rapport final qui devrait être publié un peu plus tard au cours du printemps.

    Nombre des commentaires que nous avons reçus se concentrent sur l'un de nos projets de recommandation concernant l'étiquetage des aliments GM, considéré comme étant l'un des aspects devant aider le consommateur à faire ses choix en toute connaissance de cause. Cette recommandation demandait que le gouvernement s'assure de la mise au point d'une approche d'étiquetage concernant les modifications génétiques, qui soit efficace pour aider les Canadiennes et les Canadiens à faire leurs choix en toute connaissance de cause. Cette approche devrait comprendre la mise au point d'un ensemble de critères d'étiquetage sans équivoque concernant la teneur en organismes génétiquement modifiés des aliments; assurer que chaque donnée figurant sur l'étiquette peut être vérifiée; et mettre en place la norme de façon volontaire, tout au moins au départ, afin de tester son bien-fondé et son efficacité et de promouvoir son utilisation à grande échelle pour que les gens aient vraiment l'occasion de faire leurs choix en toute connaissance de cause. Nous avons indiqué que si une approche volontariste s'avérait être un échec, même s'il est clair qu'elle est importante en ce qui concerne le choix, un plan d'étiquetage obligatoire serait alors envisagé.

    Je veux mettre l'accent sur le fait que nos recommandations définitives n'ont pas encore été formulées. Toutefois, nous estimons qu'il serait intéressant pour ce comité d'avoir connaissance des facteurs qui ont conduit à nos projets de recommandations, puisqu'ils pourraient s'avérer utiles pour vos propres délibérations sur le sujet.

    Je devrais également vous expliquer que le principal fil directeur de nos délibérations était orienté vers l'avenir; c'est-à-dire que notre préoccupation concernait le système de réglementation et sa capacité à s'appliquer aux produits en cours d'élaboration ou susceptibles de se développer suite aux progrès rapides des sciences biologiques.

    Sachant que l'étiquetage de tous les aliments, y compris ceux génétiquement modifiés, est déjà obligatoire pour des raisons de santé--par exemple pour indiquer la présence d'allergènes potentiels ou des modifications nutritionnelles importantes--la question devient principalement celle d'un étiquetage visant à informer les consommateurs et à les aider à faire leurs choix sur des bases autres que celles ayant trait aux risques sanitaires connus. L'un des problèmes rencontrés lors des discussions sur l'étiquetage des aliments GM est la confusion apparaissant parfois car certaines personnes utilisent ce terme en pensant qu'il s'agit de produits contenant des substances anormales résultant de modifications génétiques, alors que d'autres l'utilisent dans un sens plus général pour des aliments dérivés de plantes modifiées, que le produit consommé contienne ou non des substances anormales. Il est important de clarifier ces deux questions.

    Pour que l'étiquetage réponde à sa vocation d'information efficace du client sur ses choix, il doit être éloquent; cela veut dire que l'étiquette doit apporter des renseignements utiles d'une manière compréhensible et doit se baser sur une norme raisonnable, dont l'observation peut être vérifiée au moyen d'un test objectif. Il est important de réaliser que ces exigences s'appliquent à la fois à l'étiquetage volontaire et obligatoire.

Á  +-(1110)  

    Un étiquetage efficace, permettant de distinguer les aliments génétiquement modifiés de ceux qui ne le sont pas, présuppose qu'il existe un système approprié permettant de séparer les récoltes génétiquement modifiées des récoltes de plantes classiques et que cette distinction puisse être maintenue à travers toutes les étapes de la production des aliments. En outre, il présuppose qu'il existe des mécanismes permettant de mettre en évidence que cette distinction a bien été préservée. En clair, des coûts importants sont associés au respect de ce que nous avons appelé les «conditions préalables à l'étiquetage».

    Savoir si l'étiquetage des aliments GM doit être volontaire ou obligatoire est une question controversée. Parmi les facteurs devant être pris en considération figure l'incidence potentielle de l'étiqueteuse sur le commerce international. De nombreuses personnes redoutent que l'étiquetage obligatoire pour des raisons autres que la santé ou la sécurité puisse en fait enfreindre les accords internationaux et amener certains de nos partenaires commerciaux à adopter des mesures compensatoires. D'autre part, certains autres partenaires commerciaux pourraient en fait exiger l'étiquetage obligatoire. En clair, si nous pouvions nous diriger vers une norme reconnue à l'échelle internationale, les conséquences négatives de l'étiquetage obligatoire sur le commerce seraient évitées.

    Alors que l'on a débattu sur le fait de savoir si l'étiquetage obligatoire est nécessaire pour contrôler les effets à long terme des aliments dérivés de récoltes GM sur la santé, notre étude préliminaire sur le sujet montre clairement que l'étiquetage obligatoire n'est pas suffisant et peut-être même pas nécessaire pour effectuer un tel contrôle. Le défi réel consiste à concevoir un système de contrôle fiable ayant un coût de mise en place non prohibitif. Des projets étudiant en détail ces questions sont en cours à l'heure actuelle, à la fois au Canada et à l'étranger.

    C'est sur la base des points que j'ai cités auparavant que nos projets de recommandations mettent l'accent sur la mise au point d'une norme d'étiquetage rigoureuse et efficace. Nous voyons l'établissement d'un système volontariste comme un moyen de tester l'efficacité de la norme, de se donner suffisamment de temps pour travailler à l'élaboration d'un accord international, d'éviter des représailles commerciales pendant la période transitoire et d'appuyer les choix du consommateur, tout cela dans des limites de coût raisonnables.

+-

     À présent, madame la présidente, avec votre permission, je vais demander à Suzanne Hendricks de parler un peu plus des intérêts des consommateurs. Elle sera suivie par Peter Phillips, qui parlera des questions économiques, des conditions préalables et de certains aspects commerciaux.

+-

    La présidente: Merci.

    Madame Hendricks.

[Français]

+-

    Mme Suzanne Hendricks (vice-présidente, Comité de direction de projet sur la réglementation des aliments génétiquement modifiés, Comité consultatif canadien de la biotechnologie): Merci, madame la présidente.

    En voulant considérer le point de vue ou la perspective des consommateurs, notre comité s'est posé quelques questions et a voulu vraiment pouvoir cerner qu'elle était la nature de leurs revendications et quel était le fondement de ces revendications. Ayant dressé cette toile de fond, le comité s'est demandé dans quelle mesure l'étiquetage pouvait apporter une réponse satisfaisante à ces revendications, compte tenu de leur bien-fondé.

    Si on se tourne vers la nature des revendications des consommateurs, on voit que les consommateurs veulent essentiellement être en mesure de faire un choix qui respecte leurs valeurs et leurs croyances. Certains consommateurs veulent être en mesure de pouvoir bâtir leur alimentation à partir de produits qui ne contiennent pas d'OGM. Les consommateurs veulent également avoir accès à l'information nécessaire, y compris à l'étiquetage, afin d'établir leur choix. Je pense que Einsiedel, qui nous a préparé un rapport de recherches, a très bien élaboré cette information-là.

    Les consommateurs veulent également avoir accès à des produits qui ne contiennent pas d'OGM afin de pouvoir s'alimenter en fonction de leurs convictions. Ils considèrent que l'étiquetage est un mécanisme, une voie d'accès à ces produits. Enfin, on peut présumer que les consommateurs comptent pouvoir bénéficier de cette option à un coût raisonnable.

    On va se pencher maintenant sur les raisons qui ont amené les consommateurs à exiger ou à revendiquer l'étiquetage. Les consommateurs revendiquent, avant tout, une autonomie de choix pour de nombreuses raisons qui reflètent leurs convictions et leurs valeurs et qui ne sont pas nécessairement les mêmes pour tous les individus. Il existe donc une très grande variété de raisons. Je n'en ferai pas une énumération complète, mais je pense qu'il est important d'exposer la gamme de ces raisons.

    D'abord, certains craignent les effets potentiels à long terme des OGM, soit sur la santé, soit sur l'environnement. Ils craignent, par exemple, les allergies, un changement ou une diminution de la biodiversité ou la pollinisation à distance qu'on ne pourrait identifier. D'autres manifestent une opposition fondamentale à toute modification génétique. Certains invoquent des considérations d'ordre socio-économique, par exemple les effets sur les petits agriculteurs, que ce soit au Canada ou dans les pays en voie de développement. D'autres s'opposent à la concentration du pouvoir corporatif dans les industries qui développent ces produits. D'autres se posent des questions sur la plus-value de ces produits. D'autres encore se demandent quels sont les effets sur l'ensemble de l'économie canadienne. Enfin, d'autres évoquent avant tout des questions qu'on pourrait considérer d'ordre moral ou éthique. Par exemple, ils se demandent s'il y a distribution équitable des risques et des avantages de ces produits. Certains vont affirmer, par exemple, que les avantages des produits qui sont présentement sur le marché retombent avant tout sur les corporations qui ont développé ces produits, alors que les risques, s'il devait y en avoir, seraient partagés par l'ensemble de la population. Une autre de leurs préoccupations, c'est le respect du droit des peuples autochtones.

    Les consommateurs soutiennent donc qu'ils ont droit à l'information nécessaire afin de pouvoir prendre une décision en connaissance de cause. Ils ne demandent pas uniquement un étiquetage, ils demandent aussi de l'information.

Á  +-(1115)  

Plusieurs consommateurs reconnaissent très bien la complexité des enjeux et la nécessité d'être mieux informés afin de pouvoir prendre une décision.

    Les consommateurs, en réalité, respectent la diversité et reconnaissent qu'ils ne sont pas tous d'accord sur les mêmes points, et qu'ils ont des exigences différentes. Ils reconnaissent le besoin de permettre l'accès à des produits sans OGM à ceux qui le désirent et ce, même parmi les personnes qui n'ont pas d'objections à consommer des OGM. Ils disent qu'ils sont prêts à en consommer, mais ils croient aussi que les gens qui désirent s'abstenir doivent avoir la possibilité de s'abstenir.

    Les consommateurs, comme je l'ai déjà dit, considèrent l'étiquetage comme un élément essentiel à l'exercice de la liberté de choix. La plupart croient que cet étiquetage devrait être obligatoire. Je tiens à souligner le fait que cette demande reflète aussi une certaine perte de confiance à l'égard du système dans son ensemble, et vient appuyer un appel plus général à la transparence.

    Ayant exposé les revendications et le fondement des revendications des consommateurs, on peut ensuite se demander dans quelle mesure l'étiquetage peut répondre à ces besoins. M. Thompson, qui est également un des chercheurs sur lequel le comité s'est appuyé pour apporter ses recommandations, a souligné le fait suivant:

    

Un système qui ne permet pas aux consommateurs de s'alimenter en fonction de leurs convictions et valeurs compromet le principe d'autonomie et le respect de la diversité.

    Dans ce sens-là, le comité reconnaît que l'étiquetage est un outil qui permet aux consommateurs d'exercer un choix éclairé, mais il reconnaît également, d'une part, que l'étiquetage à lui seul ne suffit pas et que, d'autre part, l'étiquetage ne sera utile et ne pourra remplir son rôle que s'il est juste, non trompeur, compréhensible, vérifiable et, enfin, que s'il est adopté par un nombre raisonnable d'intervenants de la chaîne alimentaire.

    Le CCCB a donc insisté sur la nécessité de formuler un standard d'étiquetage rigoureux, comme l'a mentionné le docteur Naimark. Il a également insisté sur la nécessité d'en faire la promotion pour qu'il soit adopté à une certaine échelle. Le comité croit que l'étiquetage volontaire devrait permettre, dans un premier temps, de mettre le standard à l'épreuve et d'en mesurer la pertinence et l'efficacité. Il devrait également permettre de clairement identifier une gamme suffisante de produits qui ne contiennent pas d'OGM, offrant ainsi une option aux consommateurs un peu comme c'est le cas des produits que l'on dit biologiques. Si ces mesures devaient s'avérer inefficaces, le comité a suggéré que l'on considère alors un étiquetage obligatoire.

    Avant de clore ma brève présentation, je voudrais dire que puisque l'étiquetage n'est qu'un instrument permettant aux consommateurs de faire leurs choix, le comité a émis un nombre de recommandations qui visent à favoriser l'accès à l'information, la transparence, le développement de la recherche et à faciliter le dialogue et l'intégration des considérations d'ordre éthique et social dont je viens de parler, dans l'établissement de politiques concernant les OGM.

    Je demanderais maintenant à mon collègue Peter de vous parler d'autres aspects de la question.

Á  +-(1120)  

[Traduction]

+-

    Dr Peter Phillips (co-président, Comité de direction du projet sur la réglementation des aliments génétiquement modifiés, Comité consultatif canadien de la biotechnologie): Laissez-moi aborder trois choses liées à nos réflexions sur le choix d'un système d'étiquetage. Ma partie de l'exposé, qui durera peut-être trois minutes, va essayer de parler de ces trois domaines. L'étiquetage a une incidence sur notre régime commercial et notre capacité à commercialiser les aliments que nous produisons et consommons présentement, sur les organisations dans l'industrie nationale et sur le coût du système actuel lié à l'alimentation.

    Je pense qu'il est important de se souvenir que les aliments GM qui sont présentement sur le marché ont une zone de production très restreinte, représentant tout au plus trois ou quatre pays qui produisent des quantités commerciales exportées à grande échelle. Jusqu'à 80 % du commerce mondial de ces gammes de produits émanent de pays qui produisent des aliments génétiquement modifiés. Notre partenaire commercial individuel le plus important, les États-Unis, est l'un des pays produisant et consommant des aliments génétiquement modifiés.

    Nous sommes fortement intégrés dans la chaîne agro-alimentaire. La capacité à satisfaire nos consommateurs par la variété, le choix et les prix des aliments que nous avons actuellement dépend de notre possibilité d'accès et d'utilisation des marchés internationaux.

    Je pense que nos délibérations sur l'alimentation nous ont montré de manière concluante que l'étiquetage obligatoire, si nous continuons dans cette voie, pourrait donner lieu à des poursuites. Il serait vraisemblablement en butte à un refus qui influerait sur notre accès au marché et pourrait entraîner d'autres poursuites contre nous. Il compliquerait sans aucun doute nos relations avec notre principal partenaire commercial, les États-Unis. Il rendrait plus difficile l'accès de nos aliments sur leur marché et vice-versa, alors que nous essayons de satisfaire nos consommateurs même pendant les périodes où, en fait, nous ne produisons pas nous-mêmes une grande partie des aliments disponibles sur le marché.

    Très franchement, je ne crois pas que cela améliorerait la commercialisation de nos produits sur les marchés internationaux. Il n'y a pas de norme unique dans le monde sur laquelle vous pouvez vous appuyer. La mise en place d'un système d'étiquetage obligatoire au Canada, quel qu'il soit, ne répondrait pas ou ne correspondrait pas forcément aux besoins en matière d'accès aux autres marchés.

    L'étiquetage volontaire que nous avons envisagé serait probablement conforme aux lois internationales. Il en existe déjà de nombreux exemples. Il serait suffisamment souple pour permettre peut-être d'améliorer les efforts de commercialisation consentis par notre industrie agro-alimentaire au Canada.

    La deuxième question que nous avons examinée concerne ce que notre compte rendu appelle les «conditions préalables». J'aime appeler cela l'organisation de l'industrie nationale. Il existe un point qui doit être clarifié. Même si certains pays du monde déclarent qu'ils utilisent l'étiquetage, très peu de systèmes fonctionnent correctement. En fait, je suis moi-même à la source d'une grande partie de l'information.

    Les systèmes qui sont en place ne sont pas complets. Dans de nombreux cas, aucun élément GM n'est produit sur le marché local. Les produits GM sont bloqués à la frontière. Il est très facile de gérer un système lorsque vous n'avez pas de production nationale susceptible de se mélanger et de créer des complications sur le marché. Jusqu'à présent, aucun pays ayant proposé un système d'étiquetage ne produit de marchandises GM. Ce sont tous des produits importateurs. L'Australie a promulgué une loi, mais la seule récolte GM qu'elle produit est du coton, qui n'est pas consommé en quantité importante.

    La complexité de la modification d'un système national de commercialisation n'a jamais encore été examinée par personne. Les systèmes d'étiquetage ont eu jusqu'à présent la chance de ne s'adresser qu'à des marchés tiers où les produits n'étaient pas des produits GM. Il est très difficile de dire quels types de modifications seront nécessaires, jusqu'à ce que l'un de ces systèmes soit effectivement mis en place.

    Sur le marché canadien, nous avons un système de manutention en vrac et de transformation des aliments très complexe et, dans la plupart des cas, très efficace. Il est basé sur quelques critères contraires à la préservation de l'identité telle qu'elle pourrait être nécessaire pour gérer un système alimentaire. Nous avons de la manutention en vrac sur les fermes. Nous avons un système de manutention en vrac lors du transport et de l'entreposage. Notre système de vente en gros repose sur le principe du vrac. La plupart des opérations de transformation effectuées dans le monde sont extrêmement efficaces et utilisent des composantes de produits plutôt que des intrants dont l'identité a été préservée.

    Modifier le système ne sera pas simple. En fait, tous les changements mis en place jusqu'à présent, concernant la préservation de l'identité, ont été faits complètement en marge du système général. Un système à vocation spécifique a été créé. Nous ne sommes pas certains à ce moment précis de la nature des modifications qu'il faudrait apporter pour satisfaire aux exigences d'un système d'étiquetage obligatoire, dans un pays qui produit autant d'aliments génétiquement modifiés que le nôtre.

    La troisième question est celle du coût. Il existe de nombreux avis, mais très peu de preuves sur ce que pourra représenter la structure de coûts. Très franchement, le coût de promulgation, d'adoption et de contrôle du respect d'un règlement est assez simple à calculer. Il n'est peut-être pas insignifiant, mais il constitue seulement la partie émergée de l'iceberg. Le coût réel se situe au niveau de toutes les modifications que vous devez apporter à la chaîne d'approvisionnement pour qu'elle satisfasse aux normes de qualité qu'exige la réglementation.

    Des études effectuées en Amérique du Nord ont estimé que les coûts de préservation de l'identité se situaient quelque part entre 3 et 17 p. 100 du prix à la ferme. Il s'agit de systèmes de préservation de l'identité qui ont été mis en place dans un ou deux cas pour des organismes génétiquement modifiés mais, dans la plupart des cas, pour d'autres paramètres n'ayant rien à voir avec la modification génétique. Tous ces systèmes étaient des systèmes à faible volume et correspondaient dans de nombreux cas à des systèmes à vocation spécifique. Nous ne savons pas ce que sera le coût, d'une fois que vous commencerez à modifier le réseau de manutention des grains dans l'Ouest du Canada, par exemple, pour le transformer en système de préservation de l'identité.

Á  +-(1125)  

    Il y a eu quelques tentatives de détermination de la répercussion du coût de ce processus sur les consommateurs, dont je serais le premier à dire qu'elles ne sont probablement pas définitives. KPMG a réalisé quelques études à la fois en Australie et au Canada. Ces études estiment qu'il existe un coût ponctuel initial situé quelque part entre 3 et 6 p. 100 lors de l'adoption du système, puis un coût permanent allant de 1 à 3 p. 100, en vigueur tant que vous faites fonctionner le système. Cela se traduirait probablement par un coût hebdomadaire relativement faible mais, en termes de coûts annuels, la gestion d'un système de préservation de l'identité pourrait s'élever à 600 millions de dollars et plus.

    Pour exprimer notre point de vue, j'aimerais revenir au premier point : nous sommes d'avis que la meilleure façon de traiter les questions de santé et de sécurité publiques passe par un système de réglementation et par les dispositions d'étiquetage obligatoire qui sont déjà en place. Concernant les autres facteurs qui ne mettent pas en jeu un risque sanitaire connu que vous essayez de montrer du doigt, les coûts, les risques liés à l'accès aux marchés et les incertitudes relatives à la modification d'une chaîne d'approvisionnement très complexe et très étendue ne militent pas en faveur d'un système obligatoire à ce moment précis. Cela suggère que nous devrions essayer d'établir une norme acceptable et contrôlable, puis l'appliquer sur une base volontariste afin de voir comment elle évoluera sur le marché. Au cours de cette période, nous pensons qu'il est possible que ce système prenne de plus en plus d'ampleur à l'échelle nationale, s'il commence à fonctionner efficacement dans ce pays.

    Merci.

Á  +-(1130)  

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Nous allons procéder à la séance de questions émanant des membres du comité. Nous commencerons avec M. Merrifield.

+-

    M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Il s'agit en fait d'un thème auquel les Canadiennes et les Canadiens s'intéressent de plus en plus, je pense. Je me demande, tout d'abord, si vous pensez que l'opinion publique, au cours de la dernière décennie, s'est intéressée plutôt plus ou plutôt moins à vos travaux de recherche et aux résultats que vous avez pu obtenir jusqu'à présent.

+-

    Mme Suzanne Hendricks: Je dirais que les gens sont plus inquiets pour la bonne et simple raison que ce type de produits a fait son apparition de manière relativement récente. Nous avons affaire à une technologie plus complexe et plus difficile à comprendre. Une quantité importante d'information circule, mais celle-ci n'est pas toujours facile à saisir. Vous avez donc affaire à une sorte de changement mystérieux d'apparition relativement récente. Je pense que c'est la raison pour laquelle ces produits attirent plus l'attention du public que les autres. Et, dans le même temps, l'opinion publique a changé et exige par exemple plus de transparence en ce qui concerne les décisions prises par le gouvernement, y compris pour la réglementation en matière d'alimentation.

+-

    M. Rob Merrifield: La question est donc plus liée à la méfiance des consommateurs vis-à-vis d'un nouveau produit dont ils ne sont pas vraiment sûrs. C'est ce que vous sous-entendez, n'est-ce pas? Il ne s'agit ainsi pas forcément d'une question de santé.

+-

    Mme Suzanne Hendricks: Ce n'est pas une question de santé. Même si nous reconnaissons que certains consommateurs disent qu'ils sont inquiets des effets à long terme, nous ne considérons pas qu'il s'agit d'une question de santé. Pour ce qui concerne les questions de santé, l'étiquetage est déjà exigé à l'heure actuelle, comme par exemple dans le cas de la présence d'un allergène ou d'une modification importante de la valeur nutritionnelle. Il s'agit donc en partie d'une question de méfiance.

+-

    M. Rob Merrifield: Le problème serait donc peut-être davantage d'informer le public et de gagner sa confiance vis-à-vis des aspects sanitaires de la question. Si la majorité de l'opinion publique pense que les modifications génétiques peuvent entraîner des ennuis de santé, mais que ce n'est pas vraiment le cas, alors... Si c'est le cas et qu'il s'agit bien d'une question de santé, nous ne devrions pas seulement étiqueter ces produits, nous devrions les retirer de la vente. Mais dans le cas contraire, nous devrions informer le public et gagner sa confiance. Ne serait-ce pas une manière juste de procéder?

+-

    Dr Arnold Naimark: Je pense que votre conclusion est valable et le défi réel à relever est de trouver la meilleure manière d'informer le public d'une façon qui soit crédible, compréhensible, honnête et qui lui donne une base pour qu'il puisse évaluer les risques d'une manière qui soit suffisamment éloquente pour lui.

+-

    M. Rob Merrifield: Vous avez un groupe intéressant avec des points de vue sociaux, éthiques, juridiques, économiques et environnementaux. Comment allez-vous vous y prendre pour faire la synthèse de tout cela dans votre rapport final?

+-

    Dr Arnold Naimark: C'est intéressant. Nous avons dû prendre cette question en considération dès le départ, depuis la création de notre organisme. Je vais maintenant vous donner mon point de vue personnel, mais je pense que les membres de notre comité le partagent : je pense que nous pourrions continuer à travailler pour essayer d'arriver à un consensus sur tous les points mais, si pour arriver à un consensus, vous devez vous placer à un tel niveau de généralisation que tout le processus devient inutilisable pour les décideurs...

    C'est pourquoi, sur certaines questions, nous allons tenter de répondre à notre mandat en donnant les points de vue antagonistes, les avis opposés et les arguments de chacune des deux parties. Nous allons essayer de présenter les données relatives au débat de la manière la plus juste et la plus objective possible. Nous allons dire qu'une majorité des membres soutiennent le point de vue A, mais qu'il existe une minorité importante ou même un seul membre qui a un avis différent pour une raison que nous expliquerons. Nous pensons que cela sera plus utile aux décideurs que de dire que le comité est unanime sur tous les points. Je pense que nous devons offrir ce type de service à nos décideurs, afin qu'ils puissent juger par eux-mêmes quel argument est le plus convaincant.

Á  +-(1135)  

+-

    M. Rob Merrifield: Allez-vous juste mettre tous les points de vue sur la table?

+-

    Dr Arnold Naimark: Non. Il y a de nombreuses choses sur lesquelles nous allons avoir un avis unanime ou arriver à un consensus, mais il y en a certaines pour lesquelles cela ne sera pas le cas.

+-

    M. Rob Merrifield: Pour celles où vous ne parviendrez pas à un consensus, vous fournirez deux ou trois points de vue ou quelque chose comme ça, n'est-ce pas?

    Dr Arnold Naimark: En effet.

    M. Rob Merrifield: Très bien, cela semble juste.

    Dans certains pays au niveau international--et le marché est là où la question s'est posée en premier en réalité--il existe un étiquetage obligatoire ou des tentatives de mise en place d'un étiquetage obligatoire. Vous avez fait allusion à l'Australie. Si j'ai bien compris, vous avez dit que l'Australie n'exporte pas d'aliments génétiquement modifiés?

+-

    Dr Peter Phillips: Non, l'Australie n'a produit qu'un type de récoltes génétiquement modifiées et il s'agit d'une variété Bt de coton qu'elle exporte. Mais seule une quantité infime d'huile de graines de coton est utilisée dans l'alimentation humaine. La plupart de ce coton est bien entendu utilisé dans l'industrie de l'habillement. Donc, à ce moment précis, l'Australie n'a pas besoin d'effectuer de séparation des produits au sein de ses chaînes de production.

    Même si elle a approuvé la culture et l'utilisation d'une variété génétiquement modifiée, elle jouit d'un avantage que nous n'avons pas: elle ne mélange pas ses céréales à l'échelle nationale. Les céréales et les oléagineux que nous produisons au Canada viennent principalement de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba--les blés, les colzas canolas--et sont mélangés sans tenir compte de l'origine, non seulement pour augmenter l'efficience, mais aussi à des fins d'uniformité et de qualité, car vous ne voulez pas avoir de grandes variations de qualité, puis ils sont expédiés via l'un de nos trois ports ou envoyés aux États-Unis par la Soo Line. Nous avons quatre goulots d'étranglement au Canada.

    L'Australie, avec son système de gouvernements d'États, a la capacité d'exporter directement à partir de chaque État et a donc la possibilité de déclarer certaines zones comme étant exemptes d'organismes GM et de satisfaire ainsi le marché. Elle aura sans aucun doute beaucoup plus de facilité à respecter ses règlements nationaux en matière d'étiquetage que des pays comme le Canada et les États-Unis qui possèdent des chaînes d'approvisionnement intégrées.

+-

    La présidente: Merci, monsieur Merrifield.

    Je vais me tourner à présent vers M. Lunney. Je vous en prie.

+-

    M. James Lunney (Nanaimo--Alberni, Alliance canadienne): Je voudrais revenir sur certaines remarques formulées par le Dr Naimark lorsqu'il a commencé à discuter de l'étiquetage.

    Docteur Naimark, vous avez mentionné que l'étiquetage est déjà obligatoire. Vous avez indiqué que le comité cherchait à établir une norme raisonnable, des tests objectifs et un système d'étiquetage qui fonctionne vraiment.

    J'aimerais vous interroger sur la question du pourcentage. Le système d'étiquetage volontaire que vous recommandez, si je comprends bien, aurait une limite supérieure de 5 p. 100 pour la teneur en organismes GM, pour tenir compte de la dérive du pollen et ainsi de suite. Je crois comprendre que la norme européenne est de 1 p. 100. Pourriez-vous tout simplement nous expliquer comment cette norme fonctionnerait?

+-

    Dr Arnold Naimark: Nous n'avons pas encore établi de norme. Ce chiffre vient des études actuellement en cours avec l'Office des normes générales du Canada et le groupe s'occupant des produits alimentaires. Nous ne savons pas encore quelle est la meilleure norme et nous demandons que des études beaucoup plus approfondies soient menées pour déterminer ce que celle-ci devrait être. En d'autres termes, cette norme peut être 1, 3 ou 0,50 p. 100, nous ne le savons pas. La décision menant au choix de la norme doit être prise en se basant sur des résultats fiables, à savoir des preuves qu'à partir d'un certain pourcentage, certains effets commencent à pouvoir être quantifiés.

Á  +-(1140)  

+-

    M. James Lunney: Merci, monsieur le docteur Naimark. Je voudrais mentionner que certains témoins qui sont intervenus devant nous ont laissé entendre qu'il n'existait présentement pas de méthode scientifique permettant d'évaluer si la teneur est de 1 ou de 5 p. 100, ou représente un tout autre pourcentage. À l'heure actuelle, nous sommes seulement en mesure de vérifier si l'aliment contient des organismes GM ou non.

+-

    Dr Peter Phillips: Je pense qu'il existe des tests permettant d'obtenir le degré de spécificité que les gens demandent, même s'ils ne permettent peut-être pas d'effectuer des mesures précises pour des teneurs inférieures à 1 p. 100. Mais ces tests ne sont pas adaptés aux systèmes de marché que nous avons dans ce pays. Lorsque vous livrez des céréales, votre camion a un délai d'exécution d'environ 20 minutes. Vous ne pouvez pas attendre sept jours, le temps que le test soit effectué au terminal avec le degré de spécificité que vous demandez. Ces tests nécessitent l'intervention d'un technicien de laboratoire diplômé sachant faire fonctionner un appareil de PCR.

    Il existe un décalage entre la technologie existante et les exigences potentielles de certains marchés. C'est là que vous arrivez aux systèmes de préservation de l'identité, dans lesquels les gens court-circuitent les systèmes traditionnels. Ils achètent des céréales à la ferme et les livrent dans des caisses plutôt que par camion et via le réseau classique de manutention des grains.

    Alors en effet, il existe probablement des tests adaptés, mais leur coût est élevé. Dans de nombreux cas, les coûts dépassent la valeur du produit.

+-

    Dr Arnold Naimark: Pourrais-je juste mettre l'accent sur --

+-

    M. James Lunney: Pour optimiser le temps imparti, comme la durée de notre séance de questions est très limitée, je voudrais juste souligner le fait que la teneur en organismes GM des produits actuellement sur le marché est due à l'incorporation d'huiles au cours de leur processus de fabrication -- huile de canola, huile de maïs ou huile de soja. Seul un faible pourcentage de chaque composante est présent, mais lorsque vous additionnez toutes ces composantes, il est très difficile de s'y retrouver, comme nous le disions.

    Je voudrais aussi juste souligner un deuxième point. Si vous voulez avoir un système qui soit logique et qui fonctionne vraiment, comment le cultivateur de produits biologiques, qui est supposé être en concurrence avec le colza GM, par exemple, pour trouver sa place sur un marché à créneaux, va-t-il protéger sa récolte du pollen des récoltes GM, alors qu'il est entouré à 70 ou 80 % par celles-ci? Le colza GM a une pollinisation 20 fois plus efficace que le colza classique.

+-

    Dr Arnold Naimark: Je pense que la question soulevée ici est très importante. La solution n'est bien entendu pas liée à l'étiquetage au niveau de l'épicerie; elle relève des pratiques de gestion des exploitations agricoles et de l'établissement de zones tampons et dépend de l'étendue que celles-ci doivent avoir. Ce paramètre doit faire l'objet de tests. Vous pouvez décider quelle marge de sécurité vous devez adopter, en termes de zones tampons, pour vous protéger contre la dérive du pollen. Si vous avez affaire à une plante à la pollinisation particulièrement efficace, cette zone doit être plus étendue. C'est une question qui peut être résolue par une gestion appropriée sur le terrain plutôt que par un système d'étiquetage, quel qu'il soit.

+-

    M. James Lunney: N'êtes-vous pas d'accord que cela fait pencher la balance en faveur des personnes qui produisent des récoltes GM? Après quelques années, il n'y aura tout simplement plus de concurrence. Cela peut en fait avoir un rapport avec le fait de savoir si ce système est équitable et viable pour les personnes qui désirent avoir des produits qui ne sont pas GM.

+-

    Dr Arnold Naimark: Je vais laisser mon expert en commerce répondre à cette question.

+-

    Dr Peter Phillips: Deux points, rapidement. En ce qui concerne votre question sur les biais potentiels du système, il peut y en avoir aux yeux de certains. Il existe déjà des zones tampons différentielles. Les zones tampons sont plusieurs centaines de fois plus étendues pour le colza que pour le blé pour la raison que vous indiquiez.

    Une partie du système résulte du choix de l'industrie elle-même. La norme existant sur les produits biologiques autorise l'incorporation de 5 p. 100 d'éléments non issus de l'agriculture biologique. Ce n'est que récemment qu'il a été déterminé que cela n'inclurait peut-être aucun élément génétiquement modifié. Le système repose donc en partie sur la façon dont les industries choisiront de se définir elles-mêmes. Chaque industrie--l'industrie GM, l'industrie sans GM et l'industrie des produits biologiques--déterminera dans une certaine mesure sa propre capacité à fournir le produit sur le marché.

    Puis-je soulever un dernier point? Vous avez mentionné les huiles. Actuellement, parmi la trentaine de systèmes d'étiquetage en vigueur que nous avons répertoriés, aucun ne s'applique aux aliments hautement transformés. Je pense qu'il est important de garder cela en tête. Les aliments hautement transformés comprennent les huiles issues de la transformation du maïs, du colza canola et du soja, les produits féculents, les sucres. Tous ces produits sont exempts d'étiquetage en vertu de la loi. Ce sont les protéines décelables qui font l'objet de recherches. Dans ces cas, il n'y en a pas.

    Le seul pays qui ait même envisagé d'étendre les lois sur l'étiquetage à ces domaines est l'Union européenne. Il s'agit d'un mouvement vers un système de traçabilité, qui s'éloigne du système d'identification et de test.

+-

    La présidente: Merci, docteur Lunney.

    Monsieur Ménard.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard (Hochelaga--Maisonneuve, BQ): Merci.

    Si j'ai bien compris l'essentiel de votre présentation de ce matin, vous nous dites qu'il y aurait une zone de risque à s'engager dans un étiquetage obligatoire et vous ramenez cette réserve à un critère d'efficacité.

    Cependant, je n'ai pas très bien compris ce que signifiait l'efficacité dans votre esprit. Je voudrais faire une comparaison, et vous me direz si elle est rigoureuse ou pas. Peut-être ne l'est-elle pas. Il y a un an et demi, ce comité procédait à l'étude de l'étiquetage d'information sur les contenants de cigarettes. Il y avait beaucoup de réserves, particulièrement de la part des compagnies de tabac, qui parlaient d'expropriations et qui ont fait des contestations judiciaires. C'est sûr que le Canada était assez avant-gardiste à ce niveau-là. Il n'y avait pas beaucoup de pays dans le monde qui faisaient cela.

    Voici la question que je me pose. En tant que législateurs, il peut arriver qu'on se retrouve dans un club très sélect de pays qui ne font pas une pratique que l'on juge souhaitable, mais cela ne devrait pas nécessairement nous interdire d'aller de l'avant. Ceux qui réclament de l'information sur les produits génétiquement modifiés le font évidemment parce qu'ils ont la conviction que le consommateur a le droit de choisir, et non pas nécessairement parce que la santé du consommateur est en cause au premier chef.

    Mes deux questions sont les suivantes. Quand on parle du critère d'efficacité, à quoi fait-on allusion exactement? Jusqu'à quel point avons-nous pour rôle, comme législateurs, d'être avant-gardistes et d'avoir au centre de nos préoccupations l'intérêt du consommateur?

Á  +-(1145)  

[Traduction]

+-

    Dr Arnold Naimark: Je vais juste soulever rapidement un point. Nous n'avons pas utilisé le terme «efficience» en tant que tel. Notre conclusion principale est que nous avons encore beaucoup de travail pour mettre au point une norme objective, mesurable avec précision, contrôlable et vérifiable. C'est pourquoi nous n'avons pas utilisé le terme «efficience».

    L'autre point que je voulais soulever se trouve dans...

+-

    M. Réal Ménard: Il se trouve dans la version traduite, n'est-ce pas? Peut-être n'est-ce pas la bonne, mais...

+-

    Dr Arnold Naimark: Je vous prie d'accepter mes excuses sur ce point. Notre préoccupation ne porte pas tant sur l'efficience que sur la mise au point de la norme.

    L'autre point est que les analogies que nous utilisons doivent être utilisées avec beaucoup de précaution. Dans le cas du tabac, nous savons qu'il existe un risque spécifique en matière de santé. Nous disons qu'en ce qui concerne les aliments génétiquement modifiés ou tout aliment quel qu'il soit, s'il existe un risque pour la santé, c'est là que le système de réglementation doit entrer en jeu. Ce problème devrait être résolu directement par le biais de ce système de réglementation et le produit ne devrait même pas être mis sur le marché pour être étiqueté.

    Mais pour ce qui est de vos commentaires sur les autres sujets, les choix des consommateurs sont un thème très important, monsieur Ménard, et je demanderai à ma collègue Suzanne Hendricks de poursuivre sur ce sujet.

[Français]

+-

    Mme Suzanne Hendricks: Je voudrais revenir sur votre question concernant la nécessité d'être avant-gardiste. Notre approche est de dire que le Canada devrait être avant-gardiste en développant un standard qui soit rigoureux. Comme l'a souligné Peter Phillips, il n'y a pas de standard actuellement. C'est bien beau d'avoir une déclaration sur l'étiquetage, mais si on ne s'entend pas sur ce que signifie le terme «génétiquement modifié» et si on n'est pas capables de s'entendre sur le degré de tolérance qu'on va accepter pour donner telle ou telle appellation aux produits, à ce moment-là, l'étiquetage devient facilement trompeur ou non significatif.

    Pour nous, c'est être avant-gardiste que de tenter d'appuyer l'étiquetage sur un standard qui soit rigoureux.

+-

    M. Réal Ménard: Les fonctionnaires du ministère du Commerce international, lorsqu'ils se sont présentés au comité--vous pourrez de toute façon lire leurs témoignages, mais vous l'avez peut-être déjà fait--se sont évidemment déclarés très opposés à cela. Je ne sais pas jusqu'à quel point ça traduit la position ministérielle, mais les fonctionnaires étaient très opposés à un système d'étiquetage obligatoire parce que, disaient-ils, c'était incompatible avec nos obligations internationales. C'est un peu ce que vous avez vous-même soutenu plus tôt, docteur Phillips. Qui va prendre l'initiative d'établir cette norme internationale? Le Canada ratifie plein de traités au sujet desquels la communauté internationale n'est pas nécessairement unanime. Je travaille à un autre comité qui étudie la question des drogues, et la même question se pose. Le Canada s'est engagé à lutter pour réprimer l'usage des drogues illicites, mais ce ne sont pas tous les pays qui ont signé les conventions. Quel espoir de mobilisation au niveau de la communauté internationale avez-vous pour qu'on en arrive à une norme?

[Traduction]

+-

    Dr Peter Phillips: En fait, je pense que nous sommes à l'avant-garde de ce débat. Le point clé est notre tentative de détermination d'un système crédible. Les systèmes déjà en vigueur, de l'aveu-même des pays qui les font fonctionner, n'en sont, au mieux, qu'aux balbutiements. Dans de nombreux cas, ces systèmes ont certains points faibles qui font l'objet de débats internes. Dans la plupart des cas, ils sont respectés plus par espoir que dans les faits. Lorsqu'il s'agit de les faire respecter, les résultats montrent toutes sortes d'erreurs d'étiquetage.

    Vendre quelque chose que vous ne pouvez pas fournir est le pire des problèmes. Malheureusement, la plupart des systèmes d'étiquetage ont commencé en disant que tel ou tel produit serait étiqueté, sans avoir forcément interrogé les consommateurs pour savoir pourquoi ils voulaient cet étiquetage. Puis un système de contrôle a été imposé. Il existe donc un décalage entre ce que nous offrons et ce que les consommateurs attendent.

    Nous avons constaté cela dans le cadre de nombreuses enquêtes au Canada. Les consommateurs ne savent pas vraiment ce que sont les OGM. Donc, si vous commencez à étiqueter les OGM, certains consommateurs penseront que cela correspond à l'application de produits chimiques traditionnels à une récolte classique. Lorsqu'ils se rendront compte que ce n'est pas ce que signifie l'étiquette, seront-ils satisfaits?

Á  +-(1150)  

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Quand les fonctionnaires du Commerce international ou vous-même émettez des réserves sur le fait qu'il n'y a pas de norme sur laquelle tous s'entendent, on peut le comprendre, mais sentez-vous qu'il y a dans le débat une polarisation entre, d'un côté, les consommateurs qui revendiquent le droit de savoir ce qui va se retrouver ultimement dans leur assiette et, d'un autre côté, les entrepreneurs ou les gens issus de la mouvance économique qui craignent les coûts d'adaptation d'un régime comme celui-là? Est-ce qu'il n'y a pas un danger que des réalités profondément mercantiles, profondément économiques nous dictent nos actes et que ce soit la logique du marché qui prime sur l'intérêt du consommateur? Est-ce que ce piège n'existe pas? Je ne dis pas que ce ne sont pas vos motivations profondes, mais est-ce qu'on ne doit pas mettre cela dans la balance?

+-

    Mme Suzanne Hendricks: Il n'y a pas de doute qu'il y a polarisation. Vous avez entièrement raison de dire que le débat est très polarisé. Dans nos rencontres avec différents groupes qui nous ont fourni des commentaires sur notre rapport, nous avons fait notre possible pour tenter de dépolariser le débat et de bien comprendre la position de chacun.

    Cela dit, dans nos recommandations, le premier point que nous soulignons, c'est la nécessité d'aller de l'avant avec l'étiquetage. Donc, nous...

    M. Réal Ménard: Volontaire.

    Mme Suzanne Hendricks: Oui, volontaire, mais nous avons dit qu'il fallait absolument faire un pas. Il faut faire un pas qui soit bien réfléchi et il faut accepter de procéder d'une façon progressive, en espérant que cette façon de faire va réussir à fournir aux consommateurs un choix acceptable. Nous avons également dit que si cette avenue s'avérait insatisfaisante, il serait nécessaire de réévaluer cette position. Donc, tout ce que l'on suggère, c'est une approche fondée sur une certaine prudence et sur une certaine rigueur.

[Traduction]

+-

    La présidente: Merci, monsieur Ménard.

    Docteur Castonguay.

[Français]

+-

    M. Jeannot Castonguay (Madawaska--Restigouche, Lib.): Merci, madame la présidente.

    Je reviens sur un point dont on a discuté lors d'autres séances. C'est la fameuse question de s'entendre sur la définition des OGM. Encore une fois, vous ramenez cela dans le débat, et je suis d'accord avec vous que c'est peut-être le premier pas à franchir.

    Maintenant, qui doit s'occuper de réunir tous les intervenants afin qu'on s'entende finalement sur ce dont on parle? Si on ne sait pas de quoi on parle, c'est difficile d'aller plus loin. J'aimerais avoir votre point de vue sur la façon dont on pourrait arriver à s'entendre sur ce que sont au juste les OGM.

[Traduction]

+-

    Dr Arnold Naimark: Monsieur Castonguay, je dois dire que vous avez identifié l'un des principaux défis que nous avons décidé de relever au CCCB, à savoir essayer de créer un véhicule--instaurer une méthode de dialogue entre les intervenants--pour voir s'il nous est possible de rétrécir la diversité des points de vue. Nous collaborons actuellement avec les groupes d'intervenants de tous les secteurs, comprenant des ONG et autres, afin d'examiner un concept ou un outil que l'on appelle un spectre d'acceptabilité qui nous permettrait d'inciter les gens à nous indiquer quel est l'aspect d'un problème spécifique qui les touche, plutôt que de s'exprimer en termes génériques et que personne ne comprenne vraiment de quoi il s'agit. Nous voulons plutôt qu'ils définissent leurs termes pour voir où se situent les divergences et élaborer des mécanismes pouvant les gommer. Ce processus est en cours d'élaboration à l'heure qu'il est.

    J'aimerais également indiquer, pour répondre à ce que monsieur Ménard a dit, que nous ne sommes nullement opposés au fait que le Canada prêche l'exemple à certains égards. Mais nous sommes persuadés que la décision doit être prise en tenant compte de toutes les preuves et les impacts probables, et que le fait d'occuper la position de chef de file soit une décison calculée et non prise par inadvertance.

    La question de la définition est essentielle. Par exemple, nous entendons les gens demander ce qu'il y a de gênant à dire que quelque chose peut contenir des aliments GM ou des éléments GM. Et bien, nous utilisons déjà les mots «peut contenir», mais ils ont une histoire et par conséquent une signification spécifique sous-entendue. Nous avons l'habitude des étiquettes disant «peut contenir des cacahuètes ou des dérivés de cacahuètes», mais c'est parce que nous savons que les cacahuètes provoquent des allergies chez certaines personnes. Dans le cas des aliments GM, nous ne possédons pas cette information. Il n'y a aucun produit actuellement commercialisé connu comme étant allergénique en vertu d'une modification génétique. Donc, que voudrait dire «peut contenir»? Cela voudrait dire qu'il peut contenir un ingrédient alimentaire qui be comporte aucun risque pour la santé. Il nous faut toutefois dépasser les généralités et trouver le moyen d'étiqueter le produit d'une façon significative à laquelle le public puisse se fier.

    Je vais demander à Peter de faire quelques commentaires.

Á  +-(1155)  

+-

    Dr Peter Phillips: J'aimerais faire un commentaire rapide sur notre rôle de chef de file. En fait, je pense que nous assumons le rôle de chef de file dans ce domaine de deux différentes manières.

    Le premier point étant à ma connaissance, l'initiative du Conseil canadien de la distribution alimentaire--le conseil de l'épicerie--et de l'Office des normes générales du Canada pour développer une norme basée sur les avis des parties intéressées, qui est la seule à avoir été réalisée dans le monde entier. La plupart des autres initiatives consistent en des bureaucrates qui, après avoir consulté quelques personnes, établissent une norme technique et la promulguent. C'est la première initiative votée portant sur ce qui serait dictée par les normes en partant de la base. Je pense que cette initiative est unique et pourra avoir une influence considérable s'il est possible de l'établir en premier lieu au Canada, car elle implique les groupes tout à fait identiques à ceux des autres pays.

    Le deuxième point est que nous sommes les chefs de file à l'échelle internationale par le biais du Codex Alimentarius. Le Canada préside au comité qui participe à l'établissement d'une définition pour les OGM et d'une structure d'étiquetage qui serait acceptable en vertu de la loi de commerce international. Je pense que nous assumons le rôle de chef de file de deux façons très importantes.

[Français]

+-

    M. Jeannot Castonguay: Merci.

    Dans le rapport que vous allez présenter à la fin du mois, est-ce qu'on peut s'attendre à y retrouver une telle définition du jargon qu'on emploie de sorte qu'à partir de cela, on pourra bâtir de façon constructive?

    Encore une fois, madame la présidente, je dois dire que j'ai énormément de difficulté face à l'idée de commencer à mettre de l'étiquetage alors que tout le monde ne s'entend pas sur ce dont on parle. Ça devient quasiment, comme on dit chez nous, une situation où on met la charrue devant les boeufs.

[Traduction]

+-

    Dr Arnold Naimark: Eh bien, nous essaierons certainement d'intervenir à ce sujet, mais c'est quelque chose sur laquelle nous allons travailler en permanence. Ces types d'entente et de définition devront évoluer, car il vous faudra les tester sur le public afin de vérifier s'il en comprend bien la signification pour y apporter les modifications nécessaires. Mais votre point de vue est tout à fait judicieux. C'est un défi important et nous nous efforcerons à résoudre ce problème.

+-

    La présidente: Je vous remercie, docteur Castonguay.

    Madame Scherrer.

[Français]

+-

    Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Merci.

    Je n'avais pas de questions, mais votre dernier énoncé m'incite à poser des questions. J'ai l'impression que le débat porte beaucoup maintenant sur la façon de faire l'étiquetage. Si je reviens en arrière, j'ai d'abord le goût de vous demander ce que c'est que de l'étiquetage sur un produit. Est-ce que c'est la photo du blé d'inde? Est-ce que ce sont les ingrédients qu'il y a à l'intérieur? Est-ce que c'est le sucre? Est-ce que c'est la définition des ingrédients, ou est-ce que c'est un avertissement?

    Comme consommatrice, quand je fais mon épicerie et que je regarde la boîte de conserve, je ne lis rien, sauf que s'il y a un avertissement à l'avant, ça me stresse un peu. Par ailleurs, si le graphisme du produit est agréable, je vais le prendre.

    Alors, puisque l'étiquetage peut être n'importe quoi, qu'est ce que c'est que l'étiquetage?

    Deuxièmement, j'ai l'impression qu'on s'enfarge aussi sur le pourquoi de l'étiquetage. Pourquoi voudrait-on absolument inscrire may contain ou «peut contenir» sinon, selon moi, pour une seule et unique raison: parce qu'il y a un effet pervers sur la santé des citoyens. Dans mon esprit, ça devrait être le critère numéro un pour dire si oui ou non on fait l'étiquetage, c'est-à-dire si, effectivement, on est capable de garantir ou de dire...

    C'est la même histoire quand vous revenez avec les arachides. C'est vrai que lorsqu'on dit «peut contenir des arachides», on sait ce que des parcelles d'arachides peuvent avoir comme effets sur une personne qui est allergique aux arachides.

    On ne sait rien. On ne sait pas si, à long ou à court terme... Alors, l'étiquetage, dans mon esprit de consommatrice, veut nécessairement dire que je dois faire attention, que c'est dangereux. Actuellement, c'est la perception des gens: ça veut dire «attention». C'est un avertissement et non pas une mention pour dire que ça contient je ne sais quoi, ce avec quoi c'est fait ou comment ça a été fait. Actuellement, ce qui est dangereux selon moi, comme consommatrice, c'est que si c'est inscrit dessus «peut contenir moins de 1 p. 100 d'OGM», c'est un avertissement. Ce n'est pas un étiquetage, c'est un avertissement. Ce n'est pas du graphisme, ce n'est pas la vente d'un produit, c'est «danger». C'est ce que ça veut dire.

    Je trouve qu'on n'est pas rendu loin dans la définition des... [Note de la rédaction: inaudible]. Est-ce que vous recommandez quelque part qu'il y ait une campagne de perception ou de définition de ce que sont les fichus OGM et de ce que sont leurs effets? Tant et aussi longtemps que vous ne saurez pas quels effets ils peuvent avoir, je ne sais pas pourquoi on parle même de l'inscrire et de faire peur à tout le monde à ce sujet. Je n'en achèterai pas, moi. Pourtant, je suis ici et je suis bien renseignée. Je n'en achèterai pas et je ne sais pas ce que ça veut dire non plus.

  +-(1200)  

+-

    Mme Suzanne Hendricks: Les points que vous avez soulevés sont des points qui ont été soulevés lors des discussions, justement, sur toute la problématique de l'étiquetage. Donc, une des questions à laquelle on doit répondre, c'est: comment étiqueter? Certainement, l'embûche que constitue l'étiquetage qui peut être perçu comme un avertissement est très présent dans l'esprit des personnes qui tentent de se pencher sur la problématique. Soyez certaine que lorsqu'on va en arriver à une formule, ça va être une formule qui aura pour but d'éviter cette embûche.

    Il y a plusieurs éléments sur les étiquettes, et les façons dont les consommateurs ou les consommatrices consultent les étiquettes varient énormément. On le sait d'après les sondages. Quelques uns regardent religieusement les étiquettes, vont consulter la liste des ingrédients. Plusieurs vont le faire uniquement lors d'un premier achat. Une fois qu'ils ont l'information, ils ne regardent plus les étiquettes, etc.

    Il est possible de faire un étiquetage qui ne soit pas trompeur ou qui ne porte pas à une crainte ou a un rejet. Il est évident que quel que soit l'étiquetage vers lequel on se dirige, il va falloir prévoir une campagne d'information. Alors, que ce soit l'étiquetage nutritionnel, que ce soit le fait que les ingrédients sont mentionnés sur l'étiquette en ordre décroissant de proportion, il a fallu en informer le public pour que celui-ci soit en mesure d'utiliser cette information.

    La même chose va se produire. Quand on va avoir un étiquetage, il va falloir s'assurer que, parallèlement à l'étiquetage, on ait une campagne d'information quelconque. Vous nous illustrez très bien quels sont les motifs qui vous amènent à choisir un produit, à lire ou à rejeter l'étiquetage. Ce qu'on a tenté d'illustrer dans nos propos, c'est que, effectivement, les consommateurs ont des exigences bien différentes.

    Votre façon de magasiner vous est propre. Vous y avez droit; on le reconnaît. À côté de vous, votre voisin ou votre voisine se préoccupe, pour sa part, des OMG, pour diverses raisons qu'on a tenté d'énoncer. Alors, ce qui est intéressant, c'est que lorsqu'on fait des sondages d'opinion publique, généralement, même les consommateurs qui reconnaissent se sentir très à l'aise avec les OGM, parce qu'ils reconnaissent qu'on a un système d'évaluation qui est très bien rodé, nous disent qu'ils reconnaissent qu'il y en a qui ne sont pas aussi à l'aise qu'eux et qu'il faudrait donner à ces gens-là la possibilité de choisir selon leurs convictions.  Ça devient un peu une question de respect de l'autre, si je peux dire. On espère qu'un étiquetage volontaire va permettre, justement, d'offrir un certain choix sur le marché.

+-

    Mme Hélène Scherrer: En fait, mon intervention portait davantage sur le «comment». J'ai l'impression qu'on travaille beaucoup sur la façon d'étiqueter, mais qu'on n'a pas réglé le «pourquoi» de l'étiquetage avant. C'est comme si on avait sauté l'étape de se demander pourquoi on ferait l'étiquetage. Est-ce pour répondre aux droits des consommateurs?  Les consommateurs ont tous les droits du monde quand on entre dans ce domaine-là, mais pourquoi étiqueter? Parce qu'il y a un danger? Parce qu'on veut savoir?

    Je ne veux pas savoir le principe de culture d'à peu près tous les aliments que je mange. S'il faut qu'on me dise quelle sorte d'engrais, quelle sorte de mouche et quelle sorte de température ils utilisent, ça ne m'intéresse pas. Mais pourquoi étiquetterait-on les OGM de façon particulière, sinon parce qu'il y a possiblement, à long ou à moyen terme, un effet sur les consommateurs? Je trouve qu'on n'a pas réglé le «pourquoi», et on est rendu à faire le «comment».

[Traduction]

+-

    Dr Arnold Naimark: Vous venez juste de soulever une question qui, je pense est importante ou tout au moins déclenche un sujet qui nous porte particulièrement à coeur; à savoir, bon nombre des arguments qui soulèvent la question de l'étiquetage en ce qui concerne les aliments génétiquement modifiés s'applique à tous les aliments nouveaux, que ce soient des aliments biologiques ou autres. Nous devons tout d'abord poser une question d"ordre plus général--notamment, que voulons-nous savoir sur les aliments et les aliments nouveaux sur le marché, si ce sont des aliments génétiquement modifiés, organiques ou non--car certaines de ces questions s'appliquent aux deux.

    L'autre chose que nous devons garder aussi présente à l'esprit est non seulement la raison de l'étiquetage, mais dans le cas où nous décidons d'adopter l'étiquetage, comment étiqueter. Pourquoi comment, parce que nous ne devons pas oublier que pour beaucoup de segments de notre population, l'alphabétisation fonctionnelle est un problème. Pour cette partie de la population, une étiquette peut tout aussi bien être opaque, car ce n'est pas le moyen qu'elle utilise pour obtenir de l'information.

    Il nous faut donc réfléchir sur un choix éclairé d'un point de vue beaucoup plus large que le fait d'une simple étiquette sur un produit. Ce doit être un moyen d'informer les gens sur ce qui se trouve dans les aliments; ce doit être un moyen de mettre à profit les ressources d'information des ministères, des cliniques de santé, des professionnels des soins de santé, des diététiciens et autres.

    Nous avons beaucoup de travail à faire en amont de l'étiquetage comme en aval. Nous nous concentrons nos efforts en ce moment à assurer que nous faisons ce qui est nécessaire à l'établissement de normes appropriées, puis ensuite nous nous occuperons de la façon de le faire.

  +-(1205)  

+-

    La présidente: Je vous remercie, madame Scherrer.

    J'ai plusieurs questions que j'aimerais vous poser. Si vous arrivez à faire approuver et promulguer cette norme, et que c'est volontaire, avez-vous une idée du taux de conformité ou de volontarisme que vous allez obtenir de la part des conditionneurs ou des producteurs?

+-

    Dr Arnold Naimark: Nous ne savons pas quelles vont être les réactions des personnes qui vendent les produits dans des supermarchés et autres en ce qui concerne la rapidité d'adoption de l'étiquetage volontaire, car elles sont plus directement en contact avec le consommateur. Certaines études montrent déjà les préoccupations du public dans ce domaine, du point de vue de la façon dont les choix d'achat vont être affectés.

+-

    La présidente: Vous pensez donc que ces personnes répondront aux consommateurs qui le demandent, plutôt que de l'adopter pour eux-mêmes?

+-

    Dr Arnold Naimark: Je crois que les deux cas vont se présenter, car certains y verront un avantage. Quelques-uns diront qu'ils y trouvent un avantage considérable. Ils disposent d'un produit qu'ils peuvent décrire comme étant cultivé à l'aide de la biotechnologie moderne et de modification génétique, qui ont permis de cultiver ce produit d'une apparence magnifique en utilisant moins de pesticide ou d'herbicide qu'auparavant. Et si vous n'aimez ni les pesticides, ni les herbicides, cela devient un argument de vente.

+-

    La présidente: Donc vous dites dans le fond de laisser le choix au marché qui décidera par lui-même quelles sont les bases des intérêts fondamentaux économiques à étiqueter ou non.

+-

    Dr Arnold Naimark: Oui, et au bout du compte, les intérêts des consommateurs détermineront les intérêts économiques.

    L'autre commentaire que je veux faire a trait à la portée des lignes directrices. Par exemple, si un effort est fait dans le but d'établir une norme, qu'elle soit nationale ou internationale, et qu'il est dit qu'une bonne pratique est de réunir l'information qui va permettre au consommateur de savoir si le produit est conforme à la norme, vous n'avez pas de loi à édicter. Les lignes directrices seront effectives d'elle-mêmes. Nous avons remarqué cela dans d'autres domaines, comme des moratoires antérieurs sur certaines techniques génésiques qui ont été adoptées, alors que rien n'était stipulé par la loi.

+-

    La présidente: Certaines personnes les ont adoptées.

+-

    Dr Arnold Naimark: Eh bien, j'affirme qu'elles ont certainement eu un effet très important dans tout agence soutenue par le gouvernement.

    Je pense que l'établissement d'une norme nationale nous rendra plus forts et nous possédons de nombreux exemples d'autres produits pour lesquels les gens apprécient de pouvoir dire qu'ils sont conformes aux normes les plus élevées qui existent. Tous ces éléments devraient inciter les fabricants à donner leur acceptation, mais si ce n'est le cas, il nous faudra trouver une autre solution.

+-

    La présidente: D'accord, je vois que vous faites davantage confiance au marché que moi-même. Il me semble que le fait de demander à tout le monde de se mettre en conformité avec la norme, selon ses propres bénéfices pourrait prendre un temps infini.

    Maintenant je pense vous avoir entendu dire que dans certains de ces aliments modifiés génétiquement--prenons l'exemple d'une tomate--il n'existe pas dans le fond de différence mesurable dans le contenu et les ingrédients par rapport à ce que l'on y trouve généralement. Est-ce que j'ai bien compris?

+-

    Dr Arnold Naimark: Je ne pensais pas à des tomates. Je pensais à certains produits comme des huiles très raffinées de colza ou de soja.

  +-(1210)  

+-

    La présidente: Savez-vous ce qu'il en est d'une tomate, par exemple, car c'est quelque chose que nous pouvons tous comprendre?

+-

    Dr Arnold Naimark: Oui, je pense que vous pourriez trouver dans une plante entière ou un fruit ou un légume entier, des éléments qui contiennent des traces du matériel original de modification génétique, qui est l'ADN, ou la protéine pour laquelle l'ADN crée les codes. Vous pourriez en effet y trouver des traces.

+-

    La présidente: D'un point de vue nutritionnel, est-ce que cela revient exactement au même?

+-

    Dr Arnold Naimark: D'un point de vue nutritionel, je pense que çela revient certainement au même. Tous les principaux composés sont les mêmes que ceux d'une tomate normale. En fait, si la composition a vraiment changé, il est obligatoire maintenant de l'indiquer sur l'étiquette.

    Donc, je vous répondrai oui. Les tomates GM ont la même composition chimique, les mêmes ingrédients alimentaires, comme ceux que nous avons ici, bien que je ne pense pas que le Canada importe actuellement des tomates GM.

+-

    La présidente: Je m'y attends... pas vraiment d'un bon oeil, mais je prévois que ce jour va arriver.

+-

    Dr Arnold Naimark: Il y a également un autre point, madame la présidente, dont nous sommes conscients. Il est relié aux développements en matière de science et de technologie visant à modifier génétiquement une plante pour produire un changement spécifique, notamment, pour produire en fait un produit différent à beaucoup d'égards. Ce produit peut contenir un vaccin, des quantités accrues de vitamines ou tout autre différence spécifique souhaitée. Voici le domaine sur lequel nous allons devoir passer beaucoup de temps afin d'assurer qu'il n'y aucun danger pour la santé.

    À un certain moment il va nous falloir décider si les types de modifications apportées par le biais de que l'on appelle l'agriculture moléculaire doivent vraiment être réglementés de la même façon que les médicaments, plutôt que comme les aliments. Ce qui représente une gageure pour le système de réglementation et pour notre façon de procéder et cela nous arrive très rapidement.

+-

    La présidente: Je vous remercie.

    Monsieur Merrifield.

+-

    M. Rob Merrifield: Merci.

    J'aimerais revenir sur la différence entre le travail effectué par la Société royale et ce que vous faites. Pouvez-vous nous décrire les différences significatives? Je sais que la Société royale la étudié la question d'un point de vue scientifique. Il y a beaucoup de scientifiques dans votre groupe également. Pensez-vous que les résultats finaux vont aboutir à la même conclusion?

+-

    Dr Arnold Naimark: Je pourrais peut-être vous parler de cela, monsieur Merrifield. Lorsque nous avons pensé à notre projet portant sur les aliments GM, nous étions intéressés par trois domaines. L'un était la vocation scientifique: est-ce que nous nous maintenons au niveau de la science? Possédons-nous du personnel scientifque? Utilisons-nous la méthodologie adaptée pour élaborer une réglementation correcte? Le deuxième est la façon dont le système est organisé, géré et exploité. Et le troisième était la façon dont nous prenons en considération les préoccupations d'ordre social et éthique.

    Lorsqu'il a été décidé que la partie scientifique serait portée devant un groupe de spécialistes de la Société royale, nous participions à la mise en place des attributions de ce groupe. Nous avons soumis cette partie à la Société royale et notre rapport final contiendra les recommandations de la Société royale et les réactions de Santé Canada et d'autres agences gouvernementales en la matière.

    Ainsi nous nous sommes concentrés sur la façon dont le système fonctionne, sa transparence, la façon dont l'information est élaborée, quelle est l'information qui devrait être rendue disponible en ce qui concerne la façon dont le système est exploité, comment prendre en considération les questions importantes d'ordre social et éthique, telles que le choix éclairé du consommateur et l'équilibre entre la réglementation et la promotion. En d'autres termes, la Société royale et nous-mêmes avons travaillé parallèlement sur différents sujets.

    Notre travail s'est recoupé dans certains cas, lorsque nous avons chacun fait des commentaires sur les mêmes sujets. Par exemple, la Société royale a exprimé également sa préoccupation sur le développement du système dans l'avenir: que toutes les normes actuelles aient démontré que les produits actuellement sur le marché ne comportent aucun risque et respectent toutes les normes actuelles; ensuite, qu'en ce qui concerne l'étiquetage, elle a également tendance à encourager actuellement un système volontaire. Je ne voie aucun conflit important entre les recommandations de la Société royale et les nôtres. Ce qui ne signifie pas forcément que nous soutenons toutes les recommandations qui ont été faites dans la forme, mais nous avons vraiment jsuqu'à présent travaillé sur des voies parallèles mais toutefois complémentaires.

    Dans la prochaine quinzaine ou dans les prochains mois, nous allons essayer de fournir de plus amples renseignements sur le rapport de la Société royale et sur la façon dont il recoupe ce que nous disions de façon plus complète, maintenant que nous comprenons en quoi consiste le plan d'action du gouvernement en réponse au rapport de la Société royale.

  +-(1215)  

+-

    M. Rob Merrifield: Très bien. Juste pour passer devant--et je ne veux pas vous faire dire ce que vous ne voulez pas, mais vous pouvez probablement répondre à cette question assez facilement--ils ont préconisé l'étiquetage volontaire. Cet étiquetage a-t-il été approuvé à l'unanimité? Votre comité a-t-il été unanime à ce sujet?

+-

    Dr Arnold Naimark: Je ne sais pas s'il a remporté l'unanimité, peut-être pas, mais je pense que cela représente certainement l'opinion prépondérante de notre comité.

+-

    M. Rob Merrifield: D'accord. S'agissant des secteurs dont vous avez parlés, avez-vous effectué d'autres recherches spécifiques en tant que comité?

+-

    Dr Peter Phillips: Je suis peut-être en mesure de répondre à cela. Nous avons effectué plusieurs choses. Nous avons examiné l'environnement--académique, industriel, des ONG et des organisations internationales--pour savoir ce qui avait été fait pour déterminer les meilleures pratiques dans la gestion des systèmes de réglementation et des systèmes d'étiquetage. En tant que comité, c'est ce que nous avons fait. Nous avons également commandé plusieurs études, qui je crois ont été transmises au bureau d'études auquel nous avons fait allusion, l'une par le professeur Einsiedel de Calgary, une autre par les professeurs Hart et Chaitoo de Carleton et, je crois une par le professeur Thompson des États-Unis portant sur les questions éthiques.

    De même, certains d'entre nous vivent et travaillent actuellement dans cette région. Je fais de la recherche dans cette région, et j'ai pu communiquer au comité certaines parties de mon travail. Nous avons un accès assez large à tout ce qui se passe. La question est logique et essaie de déterminer certaines recommandations qui pourraient en découler.

+-

    M. Rob Merrifield: Y-a-t-il un élément de votre recherche que vous aimeriez nous faire partager?

+-

    Dr Peter Phillips: Je crois que nous les avons mis à votre disposition; si nous ne l'avons pas fait pour certaines choses, je pense que nous sommes sans aucun doute prédisposés à vous communiquer tout ce qui a un rapport même lointain avec la question de l'étiquetage. Certains des rapports que nous avons faits, s'éloignent manifestement de la question de l'étiquetage et étudient une myriade d'autres parties du système qui sont dignes d'intérêt, mais qui ne sont pas forcément pertinentes au comité.

+-

    La présidente: Je vous remercie, monsieur Merrifield.

    Monsieur Lunney.

+-

    M. James Lunney: Je vous remercie, madame la présidente.

    Pour en revenir à la définition des OGM et la confusion sur ce qu'est un OGM, la Société royale a donné une définition très succinte d'un OGM qui ne prête pas vraiment à confusion. Je pense qu'elle permet de définir, par-dessus tout, ce qu'un OGM n'est pas. Il ne s'agit certainement ni d'amélioration génétique traditionnelle, ni d'hybridation traditionnelle. Nous parlons présentement de l'introduction d'un nouveau gène, de la technique de l'ADNr. Elle est relativement facile à expliquer. Je pense que l'une des raisons de confusion est que l'industrie hésitait à l'expliquer au public. Lorsque vous parlez d'un organisme transgénique ou de l'introduction d'un gène étranger, les gens se sentent mal à l'aise. En fait, il s'agit là en vérité du cœur de la discussion. Soyons honnêtes.

    Il y a eu de graves problèmes relatifs aux produits GM. Par exemple, à la Chambre des communes nous avons reçu une question portant sur l'insuline génétiquement modifiée. Il y a eu plus de 460 accidents déclarés causés par les effets indésirables et huit décès. Les gens sont très alarmés par les chutes subites de sucre dans le sang, les comas, les troubles épileptiques, etc..

    En 1989, un produit GM est arrivé dans une gamme de produits diététiques. Il produisait un acide aminé que l'on appelle le tryptophane. On eut l'identifier maintenant à une protéine, n'est-ce pas? il y a eu des plaintes de muscles déformés et plus de 37 décès. Il s'agissant supposément d'un tryptophane identique, mais les scientifiques n'ont pas remarqué qu'il était accompagné d'une toxine, en raison de la nouveauté de la toxine. C'était un produit japonais.

    Il est vrai que le public a tendance à percevoir le concept dans le monde de la biotechnologie et faire confiance aux scientifiques. Vous n'avez pas besoin de demander d'où cela provient. C'est un de ces événements qui, je crois, a fait naître ce sentiment de méfiance.

    Pour le dossier, la Société royale a accepté d'approuver l'étiquetage volontaire à la condition que la série complète de leurs recommandations visant à réduire le risque d'incertitude et satisfaire le principe de précaution soit mise en œuvre. J'ai pu remarquer qu'à ce stade, tout ce qui aurait pu être fait pour satisfaire aux exigences ne l'a pas été.

    Je comprends que nous disposons de treize collèges agricoles dans ce pays. Ils sont tous subventionnés par les compagnies de biotechnologie. Certains scientifiques sont très préoccupés. Vous pouvez vous étonner de la pression qu'ils doivent supporter s'ils veulent en parler. Au cours de ces audiences, nous entendrons certains d'entre eux.

    Que seriez-vous prêt à faire pour encourager l'analyse indépendante, des études scientifiques indépendantes, pour augmenter la confiance du public dans ce domaine d'incertitude?

  +-(1220)  

+-

    Dr Arnold Naimark: Sur ce dernier point nous sommes tout à fait favorables à augmenter l'effectif des scientifiques qui travaillent dans le gouvernement et l'industrie par des scientifiques universitaires et d'autres scientifiques indépendants. Particulièrement pour les produits complexes à venir, nous allons avoir besoin de beaucoup plus de main-d'œuvre et de soutien pour être certains que nous possédons toutes les compétences nécessaires à l'évaluation de ces produits.

    Nous adhérons également complétement aux points de vue de la Société royale, comme quoi nous avons beaucoup à faire pour nous préparer à ce qui va arriver en matière d'innovations produites de façon biotechnologique.

    En outre, je pense qu'il faut être très attentif lorsqu'on parle de certains des événements ou des rapports néfastes que vous avez entendus. L'insuline produite par la technologie de l'ADN recombiné est un produit sans danger. Par contre il faut se préoccuper sérieusement du fait que l'utilisation de l'insuline modifiée génétiquement, en raison de son efficacité et autre, requiert des personnes correctement instruites et informées quant à son administration--sur la façon d'observer ses effets. Les nombreuses inquiétudes dont vous avez parlé relativement aux surdoses: lorsque certaines personnes deviennent hypoglycémiques et souffrent de tous les troubles du système nerveux central, en raison d'une information insuffisante sur la façon d'utiliser ce nouveau produit.

    Il s'agit là de certaines choses. Cela ne veut pas dire que nous n'entendrons pas parler de produits occasionnels, qu'ils soient issus de la biotechnologie ou de l'agriculture organique... Il y a des dangers partout et il nous faut rester vigilants.

    Il nous faut parler également de la compréhension. Nous comprenons ce que les termes «transgénique» et «ADN recombiné» veulent dire, mais ce que vous voulez dire par «organisme génétiquement modifié» est assez inquiétant. Je sais ce qu'est un organisme génétiquement modifié, mais cela signifie-t-il que l'huile que je consomme contient de l'ADN, de l'ADN recombiné ou une protéine qui en est issue? Ce n'est pas certain. Le végétal dont il est tiré en contient comme d'autres sortes de fruits. Je parle de cette confusion et non la confusion très spécifique dont vous parlez, qui elle est tout à fait fondée.

    Donc je pense que, somme toute, cette question est compliquée. Il nous faut prendre en compte toutes ces précautions, qu'elles proviennent de la Société royale, de groupes intéressés activistes à vocation sociale ou de scientifiques. Il est impossible d'exclure quoi que ce soit en raison de sa provenance. Toutes les idées doivent être examinées soigneusement, car nous ne pouvons nous permettre d'ignorer l'information ou les préoccupations. Il nous faut les évaluer. En outre, nous devons être particulièrement vigilants et rigoureux dans notre interprétation des cas.

+-

    La présidente: Merci, docteur Lunney.

    Madame Scherrer.

[Français]

+-

    Mme Hélène Scherrer: Merci, madame la présidente. J'ai une dernière question.

    Dans le dernier rapport que vous avez soumis, il est recommandé d'aller de l'avant avec des normes pour l'étiquetage, mais également d'aller de l'avant avec un étiquetage volontaire qui permettra, selon vos définitions, de tester la réponse du public et de tester également la pertinence d'un étiquetage. N'avez-vous pas l'impression qu'on risque de se tirer dans le pied en allant de l'avant avec un étiquetage volontaire, puisqu'à partir du moment où l'on donne un choix et qu'il y a une incertitude autour de cela, les gens ne l'utiliseront pas?

    Je rejoins Mme la présidente en disant que, moi aussi, je m'interroge à l'égard de la bonne volonté des marchands qui vont voir les bénéfices d'un étiquetage volontaire uniquement si cela se traduit effectivement en signe de piastres. En mettant de l'avant un système volontaire pour tester, pour voir la réponse du public, n'est-on pas en train de se tirer carrément dans le pied?

    J'ai l'impression, compte tenu de tout le contexte actuel qui fait peur, de la définition des termes et de toutes les incidences économiques qui sont liées actuellement à cela... Récemment encore, lorsqu'on a parlé aux gens du commerce international, ceux-ci nous disaient que les États-Unis boycottaient actuellement à peu près tout ce qu'il y a d'étiquetage volontaire au niveau des OGM parce que ce n'était pas bien défini et que cela n'avait pas une bonne réception. En mettant cela de l'avant, est-ce qu'on ne risque pas de se tirer dans le pied et de ne jamais finir par en arriver à un étiquetage obligatoire, puisque que le volontaire ne semble pas actuellement être sur la bonne voie pour assurer les résultats que l'on voudrait avoir?

  +-(1225)  

[Traduction]

+-

    Dr Peter Phillips: J'aimerais faire quelques rapides commentaires à ce sujet. Je pense que nous avons peut-être surestimé l'importance de l'inquiétude suscitée par cette question. Si vous demandez à brûle-pourpoint à des gens s'ils souhaitent l'étiquetage, 90 à 95 p. 100 de la population vous répondront oui. Le pays où vous vous trouvez n'a aucune importance, ils veulent tous des produits étiquetés.

    Si vous leur demandez ce qui les préoccupe au sujet des aliments et que vous leur dites que les OGM sont l'une des préoccupations, 45 à 50 p. 100 vous répondront oui, c'est un souci. Quel que soit le pays dans lequel vous vous trouvez, vous obtiendrez la même réponse. Si vous leur demandez ce qui les préoccupe en ce qui concerne les aliments, les OGM se situeront à la onzième place sur la liste, et peu importe que vous vous trouviez au Canada, en Grande-Bretagne ou aux États-Unis.

    Si vous leur demandez de quelle façon ils achètent leurs aliments, moins de 20 p. 100 de notre population lit réellement les étiquettes lorsqu'ils font leurs achats dans un magasin. Il leur faut moins de 20 minutes pour entrer et sortir du magasin, donc ils passent en vitesse. La plupart des étiquettes sont tellement petites que je dois enlever mes lunettes, même mes lunettes à doubles foyers ne sont pas assez grandes pour les lire.

    Aussi, je pense que nous devons ne pas perdre de vue qu'en plaçant une étiquette il n'est pas certain que vous soyez submergés de réponses. Vous allez apporter à tous ces gens qui se situent dans la catégorie des 20 p. 100 l'occasion d'avoir quelque chose qu'ils veulent représenté par leur habitudes d'achat.

    Ce qui ne veut pas dire que chaque produit dans chaque magasin dispose d'une double option, GM ou sans élément GM. Cela signifiera que dans chaque catégorie de produit, même s'il n'y a aucune différence de prix, il est probable qu'un élément sans élément GM sera activement commercialisé car il augmentera la rentabilité par mètre linéaire de rayon. C'est ce qu'ils recherchent; Ils n'ont pas nécessairement besoin d'une bonification pour que cela arrive.

    Donc je pense que vous allez remarquer que dans les principales catégories d'aliments dans lesquels se trouvent des éléments GM--et vous pouvez exclure le rayon entier des fruits frais, car il n'y en a encore aucun--dans tous ces cas, vous trouverez une occasion de laisser un choix au consommateur, ce qui va diminuer la tension qui entoure toute la question du débat relatif aux OGM.

+-

    Mme Hélène Scherrer: Pourquoi alors s'ennuyer avec l'étiquetage?

+-

    Dr Peter Phillips: Cependant, il ne s'agit que d'une partie de la population. Vous avez raison, une option est de l'ignorer, cependant il est maintenant possible d'étiqueter de façon positive à un coût relativement minime et permettant de satisfaire l'industrie. Cet étiquetage sera un précurseur du deuxième tour, qui surviendra lorsque vous obtenez un étiquetage positif, et nous ne sommes pas très éloignés du but.

    Nous l'avons déjà eu. La tomate Flavr Savr ne s'est jamais vendue sans une étiquette appropriée; la compagnie souhaitait obtenir la bonification. La pomme de terre NewLeaf ne s'est jamais vendue sans étiquette; elle a été étiquetée de façon proactive. Donc je pense que vous obtenez ce que l'industrie souhaite voir arriver car cela leur permet de profiter de la norme--comment étiqueter dans l'avenir de façon à éviter que ce ne soit fait de façon à représenter frauduleusement leur produit, quand celui-ci peut comporter des avantages qui sont importants aux yeux du consommateur et que ce dernier recherche sur le marché.

    Certes, je pense qu'il faut tester le terrain et le problème réside dans le fait que nous ne disposons que de la moitié des gammes de produits ou que de la moitié des options. S'il y en avait deux, vous pourriez alors vous rendre compte de la façon dont cela fonctionne. C'est de cela dont débat le Conseil canadien des normes, car ils essaient d'établir une norme qui serve à la fois à améliorer le rendement et à augmenter la qualité des produits.

[Français]

+-

    Mme Hélène Scherrer: Je me demande toujours pourquoi étiqueter si, finalement, la population qui est vraiment préoccupée par l'étiquetage ne représente qu'un très petit pourcentage. Il y a d'abord une première chose. La majorité des gens répondent n'importe quoi parce qu'ils ne savent pas ce que sont les OGM. Même les gens autour de la table ont de la difficulté à les définir. Ça me surprendrait beaucoup que la majorité des consommateurs à l'épicerie sachent de quoi on parle. Dans mon esprit, la majorité des gens ne regardent par vraiment chacune des boîtes de cette façon.

    On dit toujours que c'est dans l'intérêt des consommateurs. Quant à moi, ce n'est pas tout à fait vrai, ça non plus. L'industrie arrive par l'arrière avec son char d'assaut parce que, finalement, elle ne veut pas qu'il y en ait, car cela a un impact. Est-ce qu'on ne se trompe pas en essayant de dire que c'est la réaction du consommateur qu'on veut avoir? Le bogue dans l'étiquetage ne se trouve pas là. C'est l'industrie qui a des problèmes au niveau du commerce international.

    Je reviens encore à ma question sur l'étiquetage volontaire. Est-ce qu'on ne se tire pas dans le pied en mettant de l'avant l'étiquetage volontaire et en n'évaluant pas les bons critères en bout de ligne?

[Traduction]

+-

    Dr Peter Phillips: Si je pouvais faire un commentaire à ce sujet, je pense que vos collègues du ministère des affaires étrangères et du commerce international étaient plutôt préoccupés par le fait que les options d'étiquetage ne représentent qu'une petite partie du problème. La plus grande partie du monde aimerait avoir la possibilité de distinguer les produits disponibles sur le marché selon leur pays d'origine, et c'est un moyen de procéder à l'heure actuelle.

    Pratiquement toute chose que nous produisons comporte des risques. Nous sommes une nation commerçante, et nous ne désirons pas créer un précédent où nous aurions reconnu formellement le droit d'étiqueter de façon discriminatoire un produit selon son origine, ou basé sur autre chose que la santé et la sécurité, et les normes sur l'environnement. Un système volontaire n'entre pas dans ce jeu, car nous disposons d'une kyrielle de systèmes volontaires. Un système obligatoire le fait, pour parler franchement. Il permet de créer un précédent qui peut donner lieu à des recours, et qui génére des défis dans d'autres domaines de produits. Et je pense que c'est ce qui les préoccupe.

  +-(1230)  

+-

    La présidente: Je vous remercie, madame Scherrer.

    J'aimerais approfondir un peu le sujet. Je suis un peu perdue. Vous avez émis l'idée que vous alliez probablement recommander l'étiquetage volontaire dans votre rapport final, ce qui suppose que vous pensez que l'étiquetage est une bonne idée. En revanche, j'entends parler continuellement des préférences du consommateur, de ce que le consommateur veut savoir. C'est le Comité de la santé. Nous ne sommes pas chargés de satisfaire le consommateur et ce n'est pas réellement notre préoccupation majeure. Nous sommes intéressés par les questions de santé et de sécurité à long terme. Et je trouve que toute cette idée de préférence du consommateur nous éloigne quelque peu des questions qui nous intéressent vraiment.

    Je souhaite reparler de cette tomate qui a été génétiquement modifiée. Si en fait, elle semble être à peu près pareille ou même beaucoup plus belle, mais si elle est identique d'un point de vue nutritionnel, et si personne ne peut y trouver un problème relatif à la santé ou la salubrité, il n'y a donc aucun changement pour la personne qui la mange. C'est ce que les gens n'arrêtent pas de dire au sujet de ces éléments modifiés génétiquement. Si tel est le cas, pour quelle raison recommandez-vous dans votre autre récent article qu'une entreprise puisse avoir la possibilité de breveter cette forme de vie plus élevée? Si c'est la même chose, pourquoi doit-elle être brevetée?

    Je me soucie de la même chose que M. Ménard, en ce qui concerne l'ingérence dans les aliments que nous consommons de compagnies qui veulent contrôler le futur, contrôler l'approvisionnement, de la même façon que les compagnies multinationales de médicaments contrôlent le prix des produits pharmaceutiques--par le biais du système de brevetage.

    Il me semble que toute cette histoire des aliments qui comprennent des organismes modifiés génétiquement et de qui découvre comment les faire... Comment peuvent-ils déclarer que ces aliments sont identiques aux autres qui ne sont pas modifiés génétiquement et demander encore un brevet pour leur transformation? En d'autres termes, ils essaient d'apaiser les craintes de la population, mais ils tirent un profit maximal du brevetage de ces produits. Pouvez-vous m'expliquer cela?

+-

    Dr Arnold Naimark: Comme vous le savez bien, il existe toute sorte de brevets basés sur la transformation, la méthode de fabrication. Le produit que vous fabriquez peut ne pas être différent des autres qui sont sur le marché, mais votre procédé vous permet de le fabriquer à moindre coût, vous permet de fabriquer un produit qui est plus durable et par conséquent permet d'enrichir le contenu intellectuel, pour lequel vous souhaitez rentabiliser votre capital investi.

+-

    La présidente: Dans votre dernier article, recommandez-vous que le brevetage ne s'applique qu'au procédé de transformation? Est-ce que vous ne recommandez pas que la forme de vie plus élevée actuelle elle-même fasse l'objet d'un brevet? J'ai compris plutôt cela.

+-

    Dr Arnold Naimark: En effet, nous avons recommandé cette dernière solution.

+-

    La présidente: Oui, exactement. Il ne s'agit pas d'un procédé, mais d'un produit.

+-

    Dr Arnold Naimark: Je veux dire que c'est le produit qui est vendu sur le marché. À qui appartient le brevet du procédé ou de l'usine? Du point de vue du consommateur, la seule chose qu'il va décider est d'acheter le produit auprès de la compagnie A ou de la compagnie B.

    Ainsi ces ceux éléments fonctionnent réellement dans des différentes dimensions. Elles ne sont pas en conflit. Ils ne sont pas en conflit l'une avec l'autre. Vous pouvez dire que quelque chose est identique à autre chose, et a été soumis à tous les essais rigoureux de santé et de salubrité. Nous pouvons dire que cette tomate est correcte, d'un point de vue de la santé et de la salubrité. Je peux dire également, pour d'autres raisons ayant trait à la philosophie fondamentale de la propriété à la propriété intellectuelle et à la protection de la propriété intellectuelle, qu'il devrait exister un régime qui autorise le brevetage des végétaux entiers et des animaux. Il s'agit là de deux questions distinctes.

+-

    La présidente: Sont-elles reliées dans le monde économique?

+-

    Dr Arnold Naimark: Oui, parfois.

+-

    La présidente: Docteur Phillips.

  +-(1235)  

+-

    Dr Peter Phillips: Permettez-moi de vous rassurer sur le fait que vous n'allez pas voir la concentration de cette façon. Les industries de biotechnologie représentent à l'heure actuelle environ 3 à 4 p. 100 de la valeur ajoutée dans la chaîne alimentaire.

+-

    La présidente: Au Canada ou aux États-Unis?

+-

    Dr Peter Phillips: Mondialement... les États-Unis aussi. Ils sont très petits et pas très rentables. Leurs droits de propriété exclusifs sont extrêmement limités et dans la plupart des cas ils sont à rendement décroissant. Les principaux brevets sur lesquels les gens basent leurs portefeuilles vont expirer entre cinq et sept années. Ainsi, si vous commencez à développer un produit aujourd'hui, vous aurez tout le loisir de le commercialiser et de l'exploiter pendant cinq ans, dans beaucoup de ces cas.

    Donc, le souci que les Monsantos du monde vont contrôler la chaîne agroalimentaire est quelque peu excessif si l'on considère leur taille, leur importance et la position qu'ils occupent dans la chaîne d'approvisionnement. La concentration industrielle à l'extrémité des commerces de détail du système, sur les étagères du magasin sera beaucoup plus importante à long terme. Vous commencez à remarquer le développement de deux, trois ou quatre magasins au détail à succursales extrêmement grands et extrêmement puissants, un aux États-Unis et deux en Europe qui dominent l'accès aux étagères des magasin elles-même. L'importance de ces magasins va s'accentuer encore plus.

    Ainsi, le fait de posséder un petit gène qui est en concurrence avec des milliers d'autres constructions génétiques pour accéder au marché va devenir beaucoup moins important en ce qui concerne le consommateur que l'autre. Dans beaucoup de cas, bien que la durée de vie de ces technologies peut s'échelonner entre 18 ou 20 ans, en vertu de la protection des obtentions végétales, la durée de vie économique sera de trois à cinq ans, en raison du taux d'innovation tellement élevé qui fait que la valeur du plasme germinatif a été ramenée à zéro par l'introduction d'une nouvelle variété.

    Je pense que l'on a porté trop d'attention à ces grandes multinationales en raison de leur petit nombre et parce qu'elles paraissent importantes dans leur contexte, mais il ne faut pas oublier qu'elles font partie d'une minorité. La chaîne agroalimentaire est immense à l'échelle mondiale et ces multinationales ne vont pouvoir la dominer de la façon dont les compagnies pharmaceutiques dominent la chaîne pharmaceutique.

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    La présidente: Je vous remercie.

    Puis-je faire un commentaire? J'ai vu une annonce dans The Hill Times de cette semaine ou de la semaine dernière. De toutes façons, je l'ai remarquée hier lorsque je suis rentrée, et cette annonce indiquait qu'il était possible de télécharger d'Internet vos recommandations sur les brevets, et c'est ce que j'ai fait. J'ai été surprise de voir que la date d'échéance pour les réponses était fixée au 15 mars, c'est à dire ce vendredi.

    Il me semble que cela laisse au public vraiment peu de temps pour répondre, à moins que je n'ai manqué une annonce antérieure.

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    Dr Arnold Naimark: Nous avons laissé un délai de quatre mois pour les commentaires et nous avons inséré une note de rappel faisant savoir au public qu'il ne restait qu'une semaine d'ici la date limite, et qu'il était temps d'envoyer les commentaires, si cela n'avait pas encore été fait.

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    La présidente: Avez-vous passé une annonce il y a quatre mois dans The Hill Times, ou est-ce que vous n'avez pas passé d'annonce?

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    Dr Arnold Naimark: Je ne sais pas. Il faut que je demande ce que nous avons fait. Il se peut que The Hill Times l'ait remarqué quelque part.

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    La présidente: Je ne pense pas, cette annonce était payante; elle est encadrée.

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    Dr Arnold Naimark: Je vais devoir vérifier, madame la présidente. Je ne sais si nous avons passé une annonce en tout premier lieu, mais nous l'avons fait savoir à très grande échelle dans la première publication. En effet, nous pensons comme toujours qu'il est nécessaire de rappeler les dates limites au public.

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    La présidente: Je vous remercie.

    Docteur Lunney.

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    M. James Lunney: Comme l'a fait remarqué madame la présidente il y a quelques instants, je crois qu'il est tout à fait possible de dire que les Canadiens se sentent moins concernés, dans l'ensemble, par les répercussions du commerce international ou par un avantage de marketing industriel que par leur propre santé et sécurité ou celles de leurs enfants.

    Revenons-en à la question des équivalences en substance et de l'obtention d'un brevet sur les formes de vie; je pense qu'il en ressort quelque chose de très intéressant, comme le cas de l'onco-souris. Voici un produit d'ADNr, une légère modification du gène de la souris, qui produit maintenant le cancer chez tous ses descendants. Je suis certain qu'ils en sont tous reconnaissants, à propos, et les scientifiques veulent dire qu'il s'agit de quelque chose de complètement différent et par conséquent ils veulent le breveter... Néanmoins, en même temps, l'industrie essaie de baser l'acceptabilité de nombreux produits GM sur l'argument de l'équivalence en substances que ce changement génétique minime ne comporte aucun risque--et vous pouvez nous faire confiance, nous ne faisons pas n'importe quoi.

    Le fait est que dans le domaine de la génétique, beaucoup de choses sont encore inconnues et je pense que la plupart des scientifiques qui sont de bonne foi sont prêts à l'admettre. Par exemple, nous ne pouvons être certains que le même gène produise la même protéine dans un contexte cellulaire différent et ce, dans le même organisme. Nous ne savons pas ce qui active ou bloque les gènes. En outre, lorsque nous introduisons un nouveau gène dans des espèce étrangères, il est pratiquement impossible de prédire dans la plupart des cas, quels vont être les résultats. Il est impossible de prédire avec certitude la façon dont va réagir ce nouveau gène.

    J'ai parlé du cas du tryptophane un peu plus tôt. À partir d'autres sources naturelles, 99,6 p. 100 des équivalences du tryptophane ont été testées. En revanche, cette petite différence contenait énormément d'éléments toxiques qui ont rendu 1 500 personnes invalides et ont provoqué 37 décès.

    Étant donné que la Société royale a rejeté judicieusement l'argument de l'équivalence en substances, j'aimerais vous poser une question. Que pouvons-nous faire pour augmenter la confiance des consommateurs dans les essais de ces procédures qui sont destinées à l'alimentation humaine.

  -(1240)  

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    Dr Arnold Naimark: Je vous remercie.

    Je pense que la question relative à l'équivalence en substances est importante. La Société royale a souligné à juste raison, que l'équivalence en substances ne constitue pas une base suffisante pour l'approbation d'un produit. Santé Canada et l'Agence canadienne d'inspection des aliments ont répondu qu'ils n'utilisaient pas l'équivalence en substances comme un facteur d'approbation, mais plutôt comme un moyen de caractériser le produit afin d'identifier toutes les différences résiduelles qui devaient être recherchées. C'est précisément sur cette question que portent les débats actuellement.

    En ce qui concerne ce que vous avez dit sur le fait que certaines modifications génétiques sont nuisibles, vous avez certainement raison. Dans certains cas, comme celui de l'oncosouris de Harvard pour identifier le gène associé à une sensibilité accrue au cancer, l'animal a été développé et fabriqué délibérément pour étudier le cancer.

    C'est pourquoi nous avons dit, dans le cas des interventions transgéniques où une nouvelle substance est produite, qu'il s'agisse d'un vaccin dans une plante ou de la vitamine A dans le riz, ou de tout autre chose, c'est ce à quoi nous devons être doublement vigilant lors de l'évaluation de la salubrité et de la santé. Je pense qu'il est primordial de ne pas assumer que la modification génétique introduite ne comporte aucun risque en vertu des résultats en d'autres circonstances. Il est nécessaire de la soumettre à des essais expérimentaux sur plusieurs générations de récoltes afin de s'assurer de sa stabilité, puis il est nécessaire d'effectuer des essais d'alimentation et de tester l'allerginicité et la toxicité. En tout état de cause, nous voulons dire qu'il est impossible d'émettre des hypothèses sur le comportement des différents éléments, en se basant sur des données historiques.

    Je vous remercie.

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    La présidente: Je vous remercie, docteur Lunney.

    Je ne pense plus qu'il y ait des personnes désirant poser des questions, et j'aimerais vous remercier de votre présence. Nous allons suivre ce sujet avec intérêt. Je me demande si, une fois votre rapport final terminé, vous prévoyez donner une grande conférence de presse et passer sur Newsworld et tout ce genre de choses, ou allez-vous le présenter tranquillement à votre propre auditoire?

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    Dr Arnold Naimark: Non, nous en ferons une diffusion publique et nous nous rendrons disponibles sur les médias. Nous nous attendons à provoquer une grande attention, étant donné l'intérêt suscité par le rapport de la Société royale et notre rapport provisoire. Nous serons extrêmement heureux de revenir parler de ces sujets devant ce comité ou tout autre comité, si cela peut être utile.

    Nous désirons vous remercier, madame la présidente, ainsi que vos collègues pour l'intérêt que vous avez porté à nos travaux sur cette tâche importante. Il s'agit d'une question essentielle.

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    La présidente: Merci beaucoup.

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    Dr Arnold Naimark: Je vais laisser au greffier des exemplaires de mes observations préliminaires.

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    La présidente: Merci beaucoup.

    Je vous remercie, mesdames et messieurs. Cette séance est maintenant levée.