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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 31 octobre 2001

• 1715

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte et j'en profite pour souhaiter la bienvenue à tous ceux qui sont présents cet après- midi.

Nous avons le plaisir d'accueillir, de Canards Illimités Canada, Barry Turner, directeur des Affaires gouvernementales, et Brian Gray, directeur des Programmes de conservation.

Nous commencerons par entendre l'exposé, après quoi nous aurons une période de questions et de réponses.

Monsieur Turner, soyez le bienvenu.

M. Barry Turner (directeur, Affaires gouvernementales, Canards Illimités Canada): Monsieur le président, je vous remercie beaucoup. Nous vous sommes très reconnaissants de nous avoir invités à venir vous parler d'une question qui, à notre avis, a d'importantes répercussions environnementales, économiques et financières sur tout le pays.

Aujourd'hui, je porte deux chapeaux—j'en porte effectivement un que vous n'avez pas mentionné lorsque vous m'avez présenté. Je suis président de l'Association canadienne des ex-parlementaires. D'ailleurs, l'association vous accueillera tous les bras ouverts, soit parce que vous aurez pris votre retraite, soit parce qu'on vous aura mis à la retraite.

Le président: Nous ne sommes pas pressés.

M. Barry Turner: Je vous comprends.

Mon collègue, Brian Gray, va vous faire une présentation en PowerPoint. Elle dure 16 minutes environ, après quoi nous aurons tout le temps voulu pour discuter. Par souci de temps, je m'empresse donc de céder la parole à M. Gray.

M. Brian T. Gray (directeur des Programmes de conservation, Canards Illimités Canada): Je vous remercie. C'est un plaisir pour moi de vous rencontrer aujourd'hui, même si c'est l'Halloween.

Nous vous avons soumis une proposition plutôt détaillée et nous savons à quel point vous êtes tous très occupés. Je crois donc qu'il serait utile, avant de passer à des questions à son sujet, d'y jeter un coup d'oeil ensemble.

Voyons d'abord quels sont les principaux enjeux. Pourquoi sommes-nous réunis ici pour discuter de l'intégrité écologique du paysage agricole? À mon avis, plusieurs facteurs qui influent sur les paysages depuis un bon bout de temps déjà posent des problèmes environnementaux, entre autres la culture de sols peu fertiles ou très érodables, le drainage des zones humides, le surpâturage des pacages naturels et des zones ripariennes ou riveraines, la disparition des zones tampons le long des cours d'eau et en bordure des champs, de même qu'une trop forte utilisation d'engrais et de pesticides.

Il existe essentiellement cinq principaux enjeux qui, selon nous, justifient notre proposition ou en dictent le besoin pressant. Des coûts sont associés à tous ces enjeux. Certains des coûts sont quantifiables en termes économiques courants et certains ne le sont pas, mais il ne faudrait pas les ignorer pour autant.

Le premier enjeu est le travail des sols marginaux. La culture des sols marginaux n'est pas une pratique durable sur le plan écologique, pas plus d'ailleurs qu'elle ne l'est, selon moi, sur le plan économique. Elle entraîne un accroissement des charges en sédiments et en nutriments dans les cours d'eau environnants. Dans les prairies, dans les régions salines, elle cause une salinisation accrue des zones sèches contiguës. Vous vous trouvez donc, essentiellement, à étendre la marginalité à des sols qui en réalité sont bons.

Le deuxième grand enjeu est la perte de zones humides. Quand les zones humides sont drainées ou remplies, il y a perte de protection contre les inondations, du potentiel d'alimentation d'une nappe souterraine, de filtration et de purification de l'eau ainsi que des avantages associés sur le plan halieutique, faunique et humain.

Le troisième grand enjeu est la disparition des zones tampons le long des cours d'eau. Toute activité agricole qui réduit ces zones tampons ou a une influence sur elles nuit à l'habitat du poisson et de la faune, affecte la charge en nutriments et en sédiments des cours d'eau avoisinants et nuit particulièrement au débit des eaux de ruissellement. Tous ces facteurs affectent à tour de rôle la qualité et la quantité d'eau.

Le quatrième grand enjeu est la perte de diversité biologique. Sans phytocénose indigène, sans zones tampons le long des cours d'eau et en bordure des champs et sans zones humides, nous perdons de la diversité biologique et accroissons le nombre d'espèces en péril dans les paysages agricoles. Il faut que les espèces communes le demeurent. Nous ne voulons pas créer une industrie en expansion rapide, si vous me passez l'expression, des espèces menacées ou en péril.

Enfin, le dernier enjeu est le budget du Canada pour contrer les gaz à effet de serre et l'engagement qu'il a pris à cet égard. La conversion des prairies indigènes en terres cultivées, la culture excessive des terres marginales et le drainage des zones humides entraînent toutes la production de gaz à effet de serre et, par conséquent, d'un effet de serre.

Voilà qui nous amène à la proposition et à la raison pour laquelle nous sommes ici. Depuis pas mal de temps, nous croyons que les avantages que rapporte à la société la conversion des zones riveraines et des terres agricoles marginales en une couverture végétale permanente dépassent nettement le coût de la conversion. Je souligne qu'il est question des coûts et avantages pour la société, non pas pour le propriétaire de terres privées.

• 1720

Dans le passé, soit que les marchés commerciaux n'ont pas offert toute la gamme des services environnementaux, soit que ces services ont été mal évalués en termes de services économiques comparables ou de ressources créées par l'homme. En fait, on leur a accordé trop peu de poids dans les décisions stratégiques canadiennes. Nous espérons, en faisant la preuve des avantages nets associés à ce programme, pouvoir démontrer qu'il rapportera des avantages environnementaux à la société.

Qui devrait assumer la responsabilité du programme? C'est probablement là l'essentiel de notre proposition. Le programme est exécuté sur des terres agricoles, de sorte qu'il faut qu'Agriculture et Agroalimentaire Canada en fasse partie. Toutefois, c'est à partir de ce point que nous nous dissocions des tentatives déployées jusqu'ici en vue d'élaborer des programmes de couvre-sol.

À notre avis, il faut que les cinq RN, c'est-à-dire les cinq ministères fédéraux qui s'occupent de ressources naturelles, y participent. Il faut aussi que Ressources naturelles Canada y contribue. Il faut effectivement voir au stockage et aux émissions de carbone que nous venons tout juste de souligner. Il faut qu'Environnement Canada soit là pour s'occuper de l'intendance, de la biodiversité et des espèces en péril.

Le ministère des Pêches et des Océans préconise une gestion de l'habitat aquatique qui n'entraîne «aucune perte nette.» Il faut qu'il soit présent à la table pour aider à la conception du programme. Enfin, il faudrait que Santé Canada soit là parce que la santé humaine est en jeu. Nous savons tous trop bien, après les scandales de Walkerton et de North Battleford, que les terres et les pratiques agricoles ont d'importantes conséquences sur la santé humaine.

Il faut aussi que les contreparties provinciales de ces cinq ministères fédéraux soient présentes, ainsi que les organismes comme le nôtre et d'autres groupes qui défendent les intérêts des producteurs.

Il est essentiellement question de deux choses ici. Tout d'abord, il faut protéger et remettre en état les bandes de protection riveraines. Il s'agit des sols où entrent en contact l'eau et les systèmes aquatiques avec les systèmes des zones sèches. Il s'agit d'écosystèmes très complexes.

En fait de concept, nous parlons de transformer un système qui pourrait avoir l'air de ce que l'on voit sur la diapositive que voici pour qu'il ait l'air de celui sur la diapositive suivante. Pour vous donner un exemple concret, le système que voici est peut-être très utile au propriétaire de terres privées et il lui rapporte peut-être beaucoup d'argent, mais, selon moi, la société y perd.

Nous préconisons donc un système dans lequel le propriétaire foncier produit des avantages sociaux ainsi que des avantages pour lui-même, grâce aux économies de l'agriculture.

Deuxième point—nous insistons sur les prairies ici—, il faut offrir aux propriétaires fonciers des incitatifs qui les encourageront à transformer des terres agricoles marginales en cultures couvre-sol. Dans ces analyses, nous utilisons la définition de terres marginales d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. Nous prônons de changer le paysage de manière à obtenir quelque chose qui est à la fois bon pour l'agriculture et bon pour la société.

Au sujet de quelques points principaux que nous faisons ressortir dans la proposition, ces terres ont besoin d'être gérées de manière à accroître l'offre de biens et de services environnementaux. Le but ultime, la raison pour laquelle on le fait, est d'offrir des produits et services environnementaux. Nous pourrons y revenir plus en détail durant la période de questions et de réponses.

Il est question en fait de sécurisation à long terme, préférablement à perpétuité. Nous avons rencontré le personnel du ministère des Finances pour en discuter. J'en parlerai un peu plus longuement durant la période de questions et de réponses.

Si vous examinez les objectifs et que vous les définissez bien, nous laissons entendre qu'il ne faudrait pas utiliser ces terres à des fins agricoles, à moins que ces fins agricoles ne vous aident en réalité à atteindre l'objectif ultime sur le plan de l'environnement. Il arrive qu'il y ait correspondance.

Les analyses de cette proposition viennent essentiellement de deux sources. J'ai participé très activement à l'une d'entre elles et je suis coauteur du document. Nous avons élaboré une méthode d'analyse des instruments économiques dans le cadre des travaux du groupe de travail formé pour la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie qui a déposé son rapport en septembre.

Pour nos études de cas, nous nous sommes concentrés sur trois régions. Ainsi, nous avons examiné un bassin récepteur de la Saskatchewan et du Manitoba, un autre de l'Ontario, soit la rivière Grand, et le bassin de la rivière Mill, à l'Île-du-Prince-Édouard. Nous souhaitions nous faire une idée des coûts et avantages du programme. Notre groupe a fait tous les calculs relatifs aux terres au moyen des données existantes et en acquérant ses propres données.

Essentiellement, si vous examinez les deux sources de données, les études de cas approfondies nous ont donné le coût et les avantages estimatifs plutôt détaillés par aire unitaire par hectare. Les calculs relatifs aux terres nous ont fourni des prévisions des superficies en jeu, de leur emplacement et de ce qu'elles ont l'air. En combinant les deux, on peut faire une mise à l'échelle qui nous donne une idée du programme national, si programme national il doit y avoir.

• 1725

Ces tableaux se trouvaient tous dans les annexes. Nous parlons ici, pour cette proposition qui nous arrive tout juste des Prairies, de terres marginales. Vous vous demandez ce qui arrive au reste du Canada. Quatre-vingt pour cent de toutes les cultures agricoles s'effectuent dans les Prairies. Nous en saisissons donc la plus grande partie. Dans notre analyse, nous nous sommes rendu compte qu'environ 2,5 millions d'hectares de terres marginales étaient actuellement en culture. Nous en avons donc retiré la moitié.

Nous nous sommes également penchés sur les zones tampons le long des cours d'eau en évaluant la bande entière de zone qui se trouve dans des zones agricoles en culture. Nous en avons intégré la moitié dans le programme. La décision de n'en prendre que la moitié n'a rien de sorcier. Il est tout simplement facile de diviser en deux. Si vous dites ensuite qu'il en faut le double, il suffit de multiplier par deux. Cela vous donne une idée des superficies dont il est question.

Dans les Maritimes, au Québec et en Ontario, nos analyses révèlent que les avantages totaux du programme seraient de l'ordre de 198 $ par hectare, par année. Toutefois, des coûts sont associés à ces avantages et, dans les tableaux, les coûts sont ventilés par province ou par région: Maritimes, Québec et Ontario. Si vous examinez les avantages nets, le résultat final, voici les dollars par hectare et par année: dans les Maritimes, 108 $, au Québec, 115 $, et en Ontario, 67 $. À mon avis, l'idée mérite d'être creusée. Manifestement, ce n'est pas de l'argent lancé par les fenêtres.

Dans les provinces des Prairies, les avantages totaux par dollar par hectare par année sont de 68 $. Les coûts associés à ces avantages sont de 34 $ environ, de sorte que l'avantage net pour la société est de 34 $ par hectare par année, à condition de le faire sur la base d'un paiement annuel—ce que nous ne proposons pas de faire. Nous tenons simplement à ce que tout demeure très simple.

Si nous faisons une mise à l'échelle du pays, en retranchant la moitié de ce que nous avons évalué, il est question de 2,4 millions d'hectares environ, d'avantages de quelque 200 millions de dollars et de coûts de 103 millions de dollars approximativement. Donc, les avantages nets pour le gouvernement et pour la société seraient de l'ordre de 93 millions de dollars par année, à tout le moins. Ce sont là des évaluations prudentes, mais tout de même assez justes.

Quant aux incidences sur la politique, nos propres travaux nous ont appris qu'il s'agirait d'une initiative de la catégorie verte sous le régime de l'OMC. Elle cible des terres écologiquement fragiles. Le programme ne prône pas la conversion du fourrage. Nous tenons à être bien clairs sur ce point. Il n'est pas question de convertir ces terres à une autre utilisation agricole.

Nous croyons également que la protection de l'environnement et la durabilité à long terme de l'agriculture sont des objectifs gouvernementaux qui se complètent. C'est seulement qu'ils n'ont pas encore réussi à se rencontrer—voilà que cela devient possible. Nous croyons—comme le milieu agricole et agroalimentaire—qu'il faut que l'agriculture canadienne soit responsable sur le plan de l'environnement avant de passer à l'étape suivante. Cela fait certainement partie de l'image.

Dans le discours du Trône de janvier, le premier ministre a mentionné des normes élevées d'intendance environnementale dans le secteur agricole. La proposition cadre donc avec cet objectif. Plus récemment, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de l'agriculture ont élaboré un plan d'action nationale lorsqu'ils se sont rencontrés à Whitehorse. Je crois savoir, après m'être entretenu avec le sous-ministre aujourd'hui, que les dix provinces et un territoire ont accepté ce plan visant à faire du Canada un leader mondial en salubrité des aliments, en innovation et en protection de l'environnement. Le communiqué de presse émis à l'issue de la rencontre de Whitehorse précise que les ministres souhaitent accroître la performance environnementale du secteur grâce à l'adoption accélérée de pratiques agricoles écologiques. À notre avis, il s'agit-là d'un premier pas très concret de la part du gouvernement.

À l'annexe B, nous avons énuméré 15 ou 16 grands enjeux, c'est-à-dire les raisons pour lesquelles cette proposition pourrait réussir. Durant l'élaboration du programme au cours des dernières années, nous avons constaté que les hauts fonctionnaires ont tendance à s'arrêter aux raisons qui empêchent la réalisation d'un projet, surtout si le projet n'est pas d'eux. Il faut, au contraire, se concentrer sur la raison pour laquelle le projet pourrait porter fruit. Nous pouvons tabler sur 16 années d'expérience accumulées par le Département de l'agriculture des États-Unis dans le cadre de son programme de réserve de terres à des fins de conservation, qui est de nature similaire. Le Département a déjà vécu l'étude de trois projets de loi agricoles et il en est actuellement au quatrième. Il semble que le programme sera solide. Nous sommes donc en train de réinventer la roue.

• 1730

Le programme s'appuie sur le principe de l'inscription facultative, assortie de stimulants financiers et de l'absence de réglementation. Vous en trouverez le détail dans les annexes. L'accent est mis sur le retrait de terres en vue d'offrir des services environnementaux, plutôt qu'une technique en vue de réduire la planification sectorielle. Il n'y a pas de solution universelle. Pourtant, il faut avant tout viser la simplicité parce que plus le programme est détaillé, plus il y a d'options, plus les coûts administratifs sont élevés.

Il faudrait maximiser les avantages environnementaux par rapport au coût. C'est ce qu'a fait la loi agricole de 1996 des États-Unis—on y a élaboré une liste des valeurs accordées aux avantages environnementaux aux fins d'inscription, parce que ceux qui sont inscrits disposent d'une fois et demie le montant à distribuer dans le cadre de notre programme. La participation au programme a donc été très forte.

Il faut que les incitatifs versés soient adaptés aux marchés particuliers à la région. Il faut encourager la participation des organisations de protection de la faune comme la nôtre. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il faut décider des objectifs environnementaux que nous souhaitons attribuer à chaque secteur. Ils ne seront pas les mêmes à l'Île-du-Prince-Édouard et en Colombie-Britannique. Ils seront différents. Nous croyons que les organismes environnementaux comme le nôtre peuvent beaucoup contribuer à cette décision.

Il faudrait limiter les inscriptions par région, de manière à ne pas retirer de la production de grandes superficies. Dans le cadre du programme américain, le plafond est fixé au quart des terres d'un comté. On ne souhaite pas que tout le comté s'inscrive au programme, par crainte de perdre une partie de l'infrastructure rurale.

Il faudrait aussi régler le cas des terres importantes et sensibles sur le plan environnemental ou des terres marginalement productives. À nouveau, c'est la raison pour laquelle le GATT et l'OMC approuveraient ce programme. Il faudrait par ailleurs protéger les terres marginalement productives à perpétuité au moyen de paiements uniques. Je l'ai mentionné également tout à l'heure, et j'aimerais y revenir plus tard.

Il faut établir un lien entre les contrats d'inscription au programme et l'engagement qu'a pris le Canada dans le cadre du protocole de Kyoto. Nous estimons qu'il y a moyen pour l'industrie de contribuer à en payer le coût. Les membres de l'industrie avec lesquels je me suis entretenu s'y intéressent.

De plus, il faut établir un lien entre l'inscription au programme et l'avenir qu'entrevoient les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux pour l'agriculture. Nous en avons déjà parlé. Il faut regrouper les cinq ministères du gouvernement fédéral s'occupant des ressources naturelles ainsi que leurs contreparties provinciales en vue d'élaborer le programme.

Nous pourrions améliorer le financement et l'administration du programme en passant par les ONG. En tant qu'organisme, nous sommes tout à fait disposés à aider à exécuter le programme. Nous avons des bureaux dans toutes les provinces.

Toutefois, dans le cadre de la mise en oeuvre du programme, il faut avoir recours à une gestion adaptative. Il ne faudrait pas se laisser paralyser par la quête de la perfection. Nous ne pouvons pas nous payer le luxe d'attendre d'avoir la formule idéale pour lancer le programme. Il faut clairement définir nos objectifs, mettre le programme en branle, évaluer la réalisation des objectifs, puis peaufiner le programme en cours de route. Il faudrait entre autres faire en sorte qu'il n'accroisse pas la production et qu'il soit compatible avec les accords commerciaux comme l'ALENA et l'OMC.

Les recommandations que nous faisons aujourd'hui sont donc en réalité fort simples. Nous demandons deux choses. Nous estimons que les cinq ministères fédéraux chargés des ressources naturelles devraient concerter leur action en vue d'élaborer un programme incitatif national de conservation du couvert végétal qui tient compte des problèmes environnementaux et qui répond aux préoccupations des ministères. À notre avis, la proposition donne suite à toutes leurs grandes questions. En retour, Canard illimités aimerait travailler en partenariat avec ces ministères à l'élaboration d'un programme qui intègre ses suggestions.

Enfin, nous sommes disposés à contribuer d'importantes ressources financières à un programme qui appuie les concepts que nous vous avons exposés aujourd'hui.

Voilà qui met fin à notre exposé officiel. Nous en discuterons plus en détail avec vous avec grand plaisir.

Le président: Je vous remercie beaucoup. Cet exposé a été très complet.

Nous allons maintenant passer aux questions des députés. Nous disposons d'une demi-heure. Monsieur Epp, vous pouvez être le premier.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Je vous remercie. J'avoue mon ignorance. J'ai fait des études spécialisées en mathématiques et en physique. Je n'ai aucune idée de ce que signifie «riparien». Pouvez-vous m'en donner une définition?

M. Brian Grey: Les zones ripariennes ou riveraines sont le point de contact entre les zones sèches, où le sol est toujours sec, et la zone aquatique, où il y a de l'eau—une rivière, un marécage ou un lac. Il existe donc une zone de transition qui n'est pas toujours humide, mais qui n'est jamais tout à fait sèche. Il s'agit-là d'un écosystème très distinct.

M. Ken Epp: Je vous remercie. J'ai grandi sur une ferme en Saskatchewan, de sorte que je connais la plupart des termes employés—bien que je n'aie jamais entendu «riparien» auparavant. Bien sûr, on trouve un peu partout en Saskatchewan de ces zones où les terrains marécageux touchent les terres agricoles.

D'accord. Allons-y pour mes questions. Tout d'abord, comment déterminez-vous quelles terres il faut classer? Quels sont vos critères?

• 1735

M. Brian Gray: Pour ce qui est des terres marginales?

M. Ken Epp: L'une ou l'autre. Vous proposez de verser un paiement annuel aux producteurs.

M. Brian Gray: En réalité, ce n'est pas ce que nous proposons. Nous avons parlé d'un paiement annuel pour coucher tout cela en termes économiques, de manière à pouvoir obtenir le rapport coûts- avantages. En réalité, un investissement en capital au début serait la mesure la plus responsable que pourrait prendre un gouvernement.

Je vous en donne un exemple. Quand nous investissons dans de l'infrastructure, comme dans des ponts, des routes, des autoroutes ou des immeubles publics, l'investissement de capitaux se déprécie—au bout de 30 ans, il faut reconstruire la route ou le pont. Par contre, si nous investissons dans le programme, il est question d'un investissement de capital unique—des servitudes de conservation peut-être. Si nous le faisons une fois, il n'est pas nécessaire de réinvestir pendant des milliers d'années, puisque dame Nature s'en charge.

Nous pourrions donc demander que cela...

M. Ken Epp: Répondez directement à ma question, je vous prie. Je suis un fermier de la Saskatchewan. J'ai des terres que j'essaie d'exploiter pour gagner ma vie et j'ai aussi des terrains marécageux. Si vous déclarez que la zone riparienne se trouve dans les terres que vous souhaitez convertir, quels sont les critères? Ce que je veux savoir, tout d'abord, c'est comment vous décideriez de me choisir? Faudrait-il que je fasse une demande? Ensuite, comment m'indemniseriez-vous en tant que fermier propriétaire de la terre? Est-ce que je recevrais un paiement unique ou un paiement annuel?

M. Brian Gray: Tout d'abord, l'inscription au programme est facultative. Vous n'êtes pas obligé d'en faire partie si vous ne le souhaitez pas. Ensuite, il faut vous offrir un incitatif économique qui vous encouragera à vous inscrire au programme parce que les avantages de cette inscription seraient plus grands que le coût actuel de la terre. Il nous reste à décider si cela se ferait au moyen d'un paiement annuel ou d'un paiement unique sous forme de servitude. Le programme de conservation des États-Unis offre des paiements annuels.

Dans notre exemple, nous avons utilisé le taux de location moyen par hectare comme étant le loyer moyen. Nous supposons donc que le coût pourrait aussi être aussi élevé que la véritable location des terres sur une base annuelle. Voilà d'où vient cette idée de paiement annuel.

M. Ken Epp: D'accord. J'aimerais maintenant que nous parlions des diapositives où il y avait des chiffres. Je vous remercie de nous en remettre un imprimé, soit dit en passant, parce que nous, les vieux, avons du mal à voir d'aussi petits caractères aussi loin.

Je regarde la page intitulée «Coûts et bénéfices estimés d'un PICCV». Les données sont ventilées par région, soit les Maritimes, le Québec et l'Ontario. La feuille suivante concerne les Prairies. Ces avantages et ces coûts... J'aimerais vous demander de nous expliquer ces données. Par exemple, un des bénéfices est la réduction de 46 $ par hectare par année du coût des programmes. Comment en êtes-vous arrivé à ce chiffre de 46 $? Que représente-t-il? Quels coûts de programme est-on en train de réduire?

M. Brian Gray: Je tire ces chiffres d'un document plus important auquel j'ai travaillé.

M. Ken Epp: De quel genre de programmes s'agit-il? De programmes de subvention agricole actuels pour lesquels vous n'aurez plus à payer?

M. Brian Gray: Oui.

M. Ken Epp: D'accord. Je peux comprendre certains chiffres, mais comment en arrivez-vous à 37 $ pour les réductions d'émissions de gaz à effet de serre? Nous savons qu'un tel programme réduirait sans doute les émissions de gaz à effet de serre, parce qu'il n'y aurait plus de tracteurs, mais comment en arrivez-vous à 37 $ par hectare?

M. Brian Gray: C'est une bonne question. Techniquement, on mesure les réductions de gaz à effet de serre, ce qui comprend non seulement les réductions d'émissions, mais aussi le piégeage de carbone atmosphérique. Si l'on conjugue baisse de consommation de combustible fossile et piégeage de carbone, qui réduisent les concentrations de carbone atmosphérique, on obtient une nette diminution nette des gaz à effet de serre. Ces calculs ont été vérifiés par des économistes de trois des cinq ministères responsables des ressources naturelles, et certainement par ceux d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. Chaque tonne de carbone piégée équivaut donc à 10 $. C'est en grande partie ce qui nous mène au total de 37 $.

• 1740

M. Ken Epp: D'accord. Juste au-dessus, on lit que l'«augmentation de la chasse, de la pêche et des loisirs de plein air» représente 80 $ par hectare par année. Avez-vous soustrait de ce nombre, pour obtenir un résultat net, la quantité de combustible brûlé et les gaz à effet de serre émis...par tous ces touristes venus des villes vers la campagne pour observer la faune, pêcher, chasser et exercer leurs loisirs tels la motoneige, le VTT et tout et tout? Comment en arrivez-vous à ce résultat arbitraire de 80 $ par hectare par année?

Je suis vraiment confus. J'ai l'impression que vous avez simplement lancé des chiffres au hasard pour dresser un portrait positif. Vous arrivez à des bénéfices de 198 $, puis vous les ventilez. Le total des coûts varie de 90 $ à 131 $, selon la région, de sorte que vous en tirez un bénéfice net. Les montants me semblent arbitraires et fantaisistes.

M. Brian Gray: Je vois ce que vous voulez dire. M. Ken Belcher, Mme Cynthia Edwards et moi-même avons soumis ce document de 54 pages à la table ronde nationale. Les chiffres que vous voyez ici sont les valeurs économiques sur lesquelles se fonde la proposition. Elles ont été revues par divers économistes des universités et du gouvernement, qui en sont arrivés à la conclusion qu'il s'agissait des meilleures données connues. Ce sont des chiffres honnêtes et, que nous sachions, exacts. Nous en estimons la marge d'erreur à 10 p. 100, ce qui est très bon. Nous ne nous sommes pas trompés dans l'ordre de grandeur. Les chiffres ont été pesés et vérifiés. Tous conviennent de leur réalisme.

Pour être honnête, je ne suis pas préparé à entrer dans le détail des calculs de ce chiffre en particulier. Je ne peux vous dire à brûle-pourpoint comment exactement nous en sommes arrivés à 80 $.

M. Ken Epp: D'accord. Vous m'assurerez que 80 $ par hectare par année est un chiffre qui se défend. Si vous et moi pouvions nous asseoir pendant trois heures, vous finiriez par me convaincre de la qualité de l'évaluation des avantages?

M. Brian Gray: Récapitulons un peu. Lorsque nous avons préparé le document détaillé pour la table ronde, nous avions trois estimations de chacun de ces paramètres que nous avons expliquées en détail. Il y avait une valeur minimale, une valeur maximale et la valeur la plus réaliste. Nous avons choisi la plus réaliste dans tous les cas. Nous n'avons pas pris les valeurs les plus élevées, de sorte qu'elles ne sont pas exagérées.

Une grande partie de ces chiffres nous viennent des États- Unis, de régions semblables aux nôtres. Je présume que ce résultat précis nous vient du Nord-Est américain, d'études économiques réalisées dans le cadre de programmes de mise en réserve de terres cultivables. Les économistes ont donc étudié la situation de régions dotées de programmes semblables aux nôtres et ont tenté d'en estimer la valeur ajoutée par des activités d'observation, de pêche, de chasse et de loisirs.

M. Ken Epp: Passons au point suivant. Vous nous présentez un élément «Paiements aux producteurs», que je comprends très bien, et qui correspond à trois totaux différents pour les Maritimes, le Québec et l'Ontario. Ce sont les coûts de votre programme. On le voit bien.

Donc, lorsque je vous demande comment vous serez indemnisés, je m'attends que vous me répondiez que vous paierez les gens des Maritimes 87 $ par hectare par année pour tous les hectares proprement désignés, 80 $ au Québec et 129 $ en Ontario. Je ne parle pas du montant que vous offrez aux producteurs de l'Ouest, 32 $. Il y a une différence énorme entre les montants offerts à l'Ontario et ceux qui sont offerts aux Prairies. Au nom des Canadiens que je représente, j'aimerais vraiment que vous me justifiiez cette différence.

M. Brian Gray: Me permettez-vous de faire un commentaire tout de suite?

M. Ken Epp: Deuxièmement, ai-je raison de dire qu'il est clair qu'il s'agit d'un paiement par hectare par année?

M. Brian Gray: Je voudrais d'abord porter à votre attention le tableau A.1 de l'annexe qui présente essentiellement les paiements aux producteurs, comme nous l'avons dit.

Si nous recommencions ces calculs en fonction de chaque année, quel serait le point de départ logique d'un paiement annuel? Nous avons jugé raisonnable de commencer par le taux de location moyen par hectare par année. Ces chiffres découlent donc des taux de location moyens par hectare par année dans chacune des régions géographiques ou géopolitiques. Les économies de ces régions expliquent les variations des taux de location.

Nous présumons simplement que pour susciter un intérêt en Ontario, nous devrons offrir jusqu'à 129 $ par année, contre 32 $ environ pour stimuler le même intérêt dans les Prairies.

• 1745

M. Ken Epp: J'aimerais maintenant savoir comment vous pensez persuader les cultivateurs de participer au programme quand, même dans une année très ordinaire, malgré les bas prix actuels du grain, un agriculteur peut gagner de 100 à 150 $ par hectare par année. Les chiffres pourraient peut-être varier en fonction des dépenses, de l'endroit et ainsi de suite. Vous offrez aux cultivateurs des Prairies 79 $, montant que vous qualifiez de tout à fait viable. Pensez-vous vraiment pouvoir réussir?

M. Brian Gray: Nous offrons aux cultivateurs des Prairies 32 $ par hectare par année et non 79 $. Je ne sais pas d'où vous tenez ces 79 $.

M. Ken Epp: Dans votre présentation.

M. Brian Gray: Bon. Il y a deux choses à prendre en considération.

Sur la première partie de votre dernier commentaire portant sur notre étude de cas aux États-Unis, soit le programme de mise en réserve des terres cultivables, je vous rappelle qu'il y a 1,5 fois plus de producteurs désireux de participer à ce programme facultatif d'encouragement qu'il n'y a d'argent. Les États-Unis comptent en effet 34 millions d'acres inscrits à ce programme, qui leur coûte 1,7 milliard de dollars par année. C'est un programme très populaire. Nous ne pensons pas que les producteurs agricoles canadiens soient si différents de leurs voisins du Sud.

Je veux aussi souligner notre propre expérience pratique. Outre Agriculture et Agroalimentaire Canada, je ne crois pas qu'une autre organisation ait autant d'expérience des producteurs canadiens que nous.

Au cours des cinq dernières années, nous avons conclu des ententes de gestion avec 2 600 producteurs. De ces ententes, bon nombre portent sur la location de terres, le pâturage et d'autres formes d'aménagement des terres.

Nous savons, au moins, ce que beaucoup de producteurs feront...fournir des services écologiques, et nous savons combien nous avons dû leur offrir pour ce faire. Nous sommes confiants qu'ils participeront à ce programme.

M. Ken Epp: En avez-vous parlé aux cultivateurs directement?

M. Brian Gray: Oui. Nous ne pouvons pas nous entretenir avec chacun d'entre eux, mais nous faisons de notre mieux. La semaine dernière, justement, j'ai parlé à des représentants de l'APAS, l'Agricultural Producers Association of Saskatchewan. Vous la connaissez?

M. Ken Epp: Oui.

M. Brian Gray: Ce n'est pas le cas de la majorité des gens. Je me suis entretenu avec les membres du conseil la semaine dernière. J'avais eu la chance de rencontrer leur président plus tôt dans l'année. J'ai également donné une conférence à Brandon, sur l'invitation de l'Agriculture Renewal Alliance. Nous nous efforçons de passer le mot. Partout où je vais, le projet semble accueilli très favorablement.

M. Ken Epp: Je vous remercie, monsieur le président.

Le président: Très bien.

[Français]

Madame Bourgeois, la parole est à vous.

Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ): Merci, monsieur le président. Monsieur Gray, bonsoir.

Je connais un peu Canards Illimités Canada parce qu'il y a une section de Canards Illimités Canada dans ma circonscription.

Dans un premier temps, vous parlez dans votre document d'incitatifs économiques:

    Offrir aux propriétaires terriens des incitations économiques pour qu'ils convertissent leurs terres agricoles marginales en zones de couvert végétal permanent.

Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, nous fournir davantage de détails sur ces incitatifs économiques? Vous en avez déjà discuté quelque peu avec mon collègue, mais j'aimerais que vous nous en parliez davantage parce que j'imagine que lorsque vous parlez d'incitatifs économiques, il ne s'agit pas simplement de remettre de l'argent pour la protection. Il doit y avoir, j'imagine, autre chose que vous prévoyez.

J'ai une deuxième question. Je voudrais savoir si votre organisme a présenté cette proposition au Québec puisque votre organisme a des cellules qui oeuvrent au Québec. C'est une très belle proposition, mais est-ce que vous l'avez présentée au Québec?

Troisièmement, vous parlez dans votre document—c'est dommage qu'il ne soit pas paginé—des bénéfices que l'on peut retirer dans les Maritimes, au Québec et en Ontario d'un plan de conservation. Vous parlez, entre autres, de la réduction du traitement de l'eau, des inondations et de la pollution de l'air.

• 1750

À titre de députée du Québec, je demande depuis longtemps au Canada de limiter la pollution de l'air ou d'essayer de voir s'il ne serait pas possible d'en arriver à une entente avec les États-Unis sur cette question-là ainsi que sur la question des émissions de gaz à effet de serre. Vous parlez de bénéfices. Êtes-vous au courant de ce qui s'est passé dans le cas des érables au Québec?

Finalement, vous parlez, si je comprends bien, de protéger les zones riveraines. Vous n'êtes pas sans savoir qu'au niveau des aires marines de conservation, le Québec n'accepte pas qu'il y ait une ingérence fédérale dans un champ de compétence provinciale. Que pensez-vous de tout ça? Est-ce que vous avez prévu tous les petits accrochages qu'il pourrait y avoir avec le Québec?

Voilà mes quatre questions, monsieur le président. Je vous remercie.

[Traduction]

M. Brian Gray: Si je comprends bien, vous voulez d'abord savoir si nous prévoyons d'autres mesures que les incitatifs. Est-ce bien cela?

Mme Diane Bourgeois: Oui.

M. Brian Gray: Notre organisme met l'accent sur les programmes d'incitatifs volontaires, qui offrent aux participants une indemnité pour les avantages qu'ils procurent à la société.

Si je me fie aux discussions que j'ai eues avec les producteurs et à mon expérience de négociation avec des producteurs d'un bout à l'autre du pays, pas seulement au Québec, ils n'hésiteraient pas une seconde à s'inscrire au programme si les avantages qu'ils peuvent en retirer en dépassaient ou en égalisaient les coûts. Ils veulent demeurer maîtres de leurs terres. Ce sont leurs terres. Ils en sont très fiers et voudraient bien faire, mais ne le peuvent pas. Il nous faut donc leur offrir suffisamment d'incitatifs pour les convaincre, et c'est la responsabilité du gouvernement de ne pas les surpayer.

Parallèlement à cela, nous faisons toutes sortes d'autres choses. Nous aidons les cultivateurs à planifier leurs activités, nous favorisons le pâturage et contribuons au clôturage. Ainsi, nos activités profitent tant aux producteurs, à l'environnement, qu'à la société. C'est tout ce que je peux vraiment dire sur votre première question. Je ne vois pas ce que je pourrais...

[Français]

Mme Diane Bourgeois: Est-ce que je peux poursuivre là-dessus, monsieur le président?

Je veux tout simplement que vous me précisiez ce que vous entendez par stimulants économiques. Dans votre document, vous utilisez un autre terme. Maintenant vous nous parlez de stimulants. Comment est-ce que cela se traduit en réalité? Est-ce que ce sont des subventions? Est-ce que ce sont des salaires? Est-ce que ce sont des avantages qu'il y aurait en matière d'impôt? Qu'entendez-vous par stimulants économiques?

[Traduction]

M. Brian Gray: Je ne sais pas où, dans notre document, nous employons le terme «stimulants économiques», mais nous faisons référence aux paiements versés aux propriétaires privés pour les produits et services économiques qu'ils procurent à la société. Nous les payons pour le faire. Nous voulons dissocier cela de tout ce qui se passe sur la ferme. Ce n'est pas une subvention. Ce n'est pas non plus un mécanisme de réduction de la production agricole. C'est simplement une prise de conscience que, dans beaucoup de régions du Canada, l'eau potable vient de rivières coulant en zone agricole. Le milieu agricole veut que ses produits soient reconnus pour leur sécurité.

Qu'on le veuille ou non, notre eau potable vient de leurs terres agricoles. Tout le monde veut de l'eau salubre. Aussi, nous croyons que la société doit contribuer à préserver la qualité de ces terres pour obtenir de l'eau saine.

Prenons l'exemple de la ville de New York. Beaucoup de gens ne semblent pas savoir que les New Yorkais tirent leur eau potable directement des terres, des rivières, des lacs et des eaux souterraines. Ils ne disposent pas, pour l'alimentation en eau de la plus grande partie de la ville, d'une énorme infrastructure d'assainissement des eaux. Ils n'ont ni conduites, ni épurateurs.

Il y a 10 ans, la question s'est posée. Ils ont constaté la présence de traces de bactéries, de substances chimiques et de fertilisants dans l'eau. Ils avaient deux choix, soit investir dans l'infrastructure de base d'une usine de traitement des eaux pour la ville de New York, soit investir dans les terres et laisser Mère nature nettoyer l'eau comme elle l'a toujours fait.

• 1755

Les coûts des travaux d'immobilisations nécessaires pour construire une usine de traitement des eaux oscillaient entre 6 et 8 milliards de dollars. Ils se sont dit qu'ils pouvaient plutôt acheter les terres visées, obtenir les servitudes de conservation des terres qu'ils n'ont pas pu acheter, créer des pratiques agricoles écologiques dans ces zones, investir dans toutes ces activités pour finalement en arriver au même résultat. Ils ont dépensé un milliard de dollars. Aussi, je le répète, il ne s'agit pas de subvention. Nous payons les producteurs pour qu'ils nous fournissent les services. À New York, de pareilles mesures ont permis aux contribuables d'épargner 6 milliards de dollars.

Le président: Je vous remercie, madame Bourgeois.

Monsieur Cullen.

[Français]

Mme Diane Bourgeois: Je m'excuse, monsieur le président, mais il n'a pas répondu à toutes mes questions. J'ai posé quatre questions. Il n'a répondu qu'à une de mes questions.

[Traduction]

Le président: Je m'excuse, mais le temps file, et nous devons passer au prochain interlocuteur. Monsieur Cullen.

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président. Merci également aux témoins.

Je dois avouer que je trouve cette proposition fascinante et très intelligente. Qu'on le veuille ou non, beaucoup de terres agricoles du Canada ne génèrent qu'un faible rendement...

Une voix: Beaucoup, oui.

M. Roy Cullen: Beaucoup. Vous n'avez qu'à regarder les cultivateurs qui accumulent depuis 15 ans des pertes fiscales et essaient de convaincre le ministère du Revenu qu'ils s'attendent à réaliser des profits. Bien sûr, ils ont également un emploi en ville.

Je crois que cette proposition jette un regard complètement nouveau sur les terres agricoles marginales. Pensez à la concurrence internationale que nous devons livrer aux Américains et aux Européens pour ce qui est des subventions. Nous n'y arriverons jamais. Il faut en prendre acte.

De toute évidence, dans votre modèle, vous avez étudié les avantages et les coûts sociaux pour le secteur public. Je crois que vous avez déjà une bonne expérience également à l'échelle locale. Donc, pour ce qui est de susciter de l'intérêt, vous avez sans doute déjà négocié de nombreuses ententes. Est-ce juste?

M. Brian Gray: Oui.

M. Roy Cullen: D'après ce que je comprends, vous avez pris la définition de terre agricole marginale élaborée par Agriculture Canada ou je ne sais trop qui et l'avez utilisée dans votre modèle. Votre programme se déroulerait sur une base volontaire. D'après ce que vous nous dites, expérience et chiffres à l'appui, votre programme suscitera un grand intérêt. C'est ce que l'expérience des États-Unis montre également.

M. Brian Gray: Oui. Et comme nous visons des terres marginales, nous nous attendons à une participation importante, parce que nos évaluations des taux moyens de location nous semblent prudentes. En fait, nous croyons que ces taux sont un peu généreux pour les terres de classe ITC 6 ou ITC 7, les terres les moins productives.

M. Roy Cullen: En ce qui concerne les gaz à effet de serre, vous semblez nous dire que nous sommes doublement gagnants. Est-ce à dire que le programme augmente le nombre de puits de carbone?

M. Brian Gray: Oui.

M. Roy Cullen: Bon.

M. Epp a soulevé un point intéressant sur lequel j'aimerais ajouter un mot. Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais à qui profitent ces terres humides? Comme il l'a dit, il y a là-bas des gens qui conduisent des camions et créent des problèmes environnementaux uniques. Peut-être pouvez-vous nous en dire plus.

M. Brian Gray: Ceux à qui profitent les terres humides, les systèmes riverains ou les milieux secs sont d'abord et avant tout les amateurs de plein air, soit parce qu'ils en consomment les ressources, comme les chasseurs et les pêcheurs, soit parce que comme les férus d'ornithologie, de randonnée, de vélo ou de canot, ils les utilisent. Ce sont eux qui profiteront de ces endroits.

M. Roy Cullen: D'accord.

En affaires, les avantages et les coûts s'expriment par l'état des résultats et l'état de l'évolution de la situation financière. Je ne remets pas en question vos données sur les avantages et les coûts. Il me faudrait sans doute des heures et des mois pour en étudier le détail. Compte tenu de ce que vous nous avez dit, des gens avec qui vous avez discuté et de ceux qui ont vérifié vos valeurs, j'ai confiance en leur exactitude relative.

Certains avantages, toutefois, sont moins concrets. Certains se traduisent en argent, d'autres non. Avez-vous envisagé la chose sous cet angle? Par exemple, si vous prenez les réductions d'émission de gaz à effet de serre par rapport à l'observation accrue de la faune—et je sais qu'il existe des méthodes de calcul pour obtenir ce type de données—, on observe des coûts et des avantages en argent et d'autres, d'un autre ordre. Avez-vous regardé la situation de ce point de vue? Que concluez-vous?

• 1800

M. Brian Gray: Oui. En ce qui concerne l'objet de la question de M. Epp, à laquelle j'ai eu du mal à répondre, soit l'intensification des activités d'observation, de pêche, de chasse et de loisirs, il y a plein de valeurs estimatives concrètes et moins concrètes.

Nous avons pu estimer rigoureusement les données relatives au nombre de permis de pêche achetés, par exemple. Nous savons combien de permis de chasse ont été vendus. Nous savons combien le chasseur ou le pêcheur moyen dépense chaque année pour l'exercice de son loisir. Ce sont les coûts de base.

Les coûts plus accessoires englobent les dépenses qu'assumeraient les gens si une infrastructure était mise sur pied. Y iraient-ils? Combien seraient-ils prêts à payer? Fréquenteraient- ils une couette et café de la région? Achèteraient-ils un nouveau canot pour venir en faire ici? Voilà ce qu'on entend par coûts accessoires. En fait, nous n'avons pas pris en considération l'exemple du canot, mais nous avons tenu compte des déplacements, de l'argent dépensé en moyenne pendant le trajet en voiture...ce sont là quelques exemples de coûts un peu moins directs.

M. Roy Cullen: Ce sont les indicateurs approximatifs qu'on utilise pour faire de tels estimés.

Vous dites que votre organisme est prêt à faire une contribution financière importante. Pouvez-vous définir ce que vous entendez par «importante»?

M. Brian Gray: Bien sûr.

Notre organisme est administré par un conseil. Je ne peux donc rien promettre, mais je peux vous dire ce que je lui recommanderais et ce que je crois qu'il prendrait très au sérieux. S'il s'agissait d'une proposition semblable à celle-ci—plus la solution est écologique et durable possible contre un paiement annuel, mieux ce serait—, nous serions disposés ou, plutôt, je serais prêt à recommander à mon conseil de débloquer 10 millions de dollars par année pour lancer le programme.

Mon argument serait que, si le gouvernement est très sérieux dans cette affaire, nous ferions tout en notre pouvoir pour convaincre les États-Unis, le Congrès américain, d'augmenter l'aide financière prévue dans leur North American Wetlands Conservation Act. Ces montants sont acheminés chaque année vers le Canada, où ils sont administrés dans le cadre du Plan nord-américain de gestion de la sauvagine. Les crédits sont plafonnés à 45 millions de dollars. Pareil montant n'a été versé qu'une fois en dix ans. Nous pensons que, si le Canada commençait à investir dans cette conservation, nous pourrions amener les États-Unis à en faire autant. Ainsi, nous pourrions passer de 10 millions de dollars par année à 15 ou 20 millions peut-être par année.

M. Roy Cullen: Si je comprends bien, vous dites que votre proposition nécessitera, pour se concrétiser, la collaboration des provinces et des territoires et qu'il faudra prendre le temps de discuter et de négocier. Vous croyez que le gouvernement fédéral devrait prendre l'initiative, après quoi on pourrait peaufiner le programme et y faire participer les intervenants. Cherchez-vous à obtenir du financement du gouvernement fédéral à court terme, pour entreprendre un budget dès décembre prochain?

M. Brian Gray: Ce serait bien de pouvoir lancer notre programme l'année prochaine, au prochain exercice. De combien avons-nous besoin? Je ne le sais pas. Je recommanderais d'en prévoir suffisamment pour pouvoir avancer, mais nous ne finirons certainement pas tout en un an. C'est impossible. Je reviens à la gestion adaptative. Nous pourrions commencer par investir, par étudier les objectifs environnementaux, par les évaluer, puis nous nous adapterons au fur et à mesure. Je prévoirais au moins cinq ans pour mettre tout en branle.

M. Barry Turner: Monsieur Cullen, beaucoup d'entre vous seront peut-être étonnés d'apprendre que Canards Illimités Canada reçoit 25 millions de dollars par année du Congrès américain. Cela surprend énormément de gens.

Nous tirons beaucoup d'argent de Ducks Unlimited Inc. des États-Unis. Les aires de reproduction de la sauvagine d'Amérique du Nord se trouvent pour la plupart au Canada, mais les oiseaux passent l'hiver aux États-Unis. Il s'agit donc d'une ressource commune.

Le niveau de confiance des législateurs américains augmentera beaucoup pour ce qui est d'accroître leur soutien financier, comme M. Gray l'a mentionné, par l'intermédiaire du Plan nord-américain de gestion de la sauvagine, qui est une entreprise commune du Canada, des États-Unis et du Mexique, si le Canada multiplie ses efforts pour protéger l'habitat et le couvert végétal. Ils nous l'ont dit. Ils seront prêts à injecter davantage d'argent au nord de la frontière si ce gouvernement accentue ses mesures de protection.

Vous avez aussi parlé des provinces. L'agriculture est un domaine de compétence partagée, comme vous le savez tous très bien. Nous avons parlé de ce projet avec toutes les provinces, dont

[Français]

madame, la province de Québec. Nous avons rencontré le ministre de l'Environnement au Québec, M. André Boisclair. Canards Illimités Canada a un bureau à Québec. Nous avons aussi rencontré ses fonctionnaires. Je pense que le gouvernement du Québec croit qu'en principe notre initiative est bonne.

[Traduction]

Nous avons donc rencontré toutes les provinces, puisqu'il s'agit d'une compétence partagée. Cette initiative ne coûtera pas cher, si le gouvernement fédéral donne le ton, de concert avec les cinq ministères responsables des ressources naturelles—soit Environnement, Pêches et Océans, Ressources naturelles, Santé et Agriculture—et les provinces, et si Canards Illimités y investit également des ressources.

• 1805

Comme l'a dit M. Gray, nous ne sommes pas encore tout à fait prêts. Nous demandons deux choses pour l'instant, comme nous l'indiquons clairement dans notre résumé. D'abord, nous aimerions que le gouvernement et les cinq ministères responsables des ressources naturelles s'entendent sur l'élaboration d'un programme national.

Ensuite, nous aimerions que le gouvernement collabore avec Canards Illimités et d'autres partenaires écologistes. Les coûts initiaux seront sans doute peu élevés. Je ne sais pas si les chiffres fournis par M. Epp et ceux figurant sur nos diapositives—les coûts par acre, les coûts assumés par les propriétaires fonciers au cours des deux ou trois premières années—devront, à un moment donné, être revus. Nous verrons au fur et à mesure que nous avançons. Voilà pourquoi il faudrait opter pour la gestion adaptative. Les coûts seront peu élevés s'ils sont partagés entre le gouvernement fédéral, les provinces et Canards Illimités. Les avantages du point de vue de l'environnement seront, eux, énormes.

Le président: Merci, monsieur Cullen.

Au nom du comité, je tiens à vous remercier pour cet exposé fort détaillé. Nous devons nous aussi, bien entendu, tenir compte des exigences de M. Epp quand vient le temps d'analyser des chiffres et autres données. Toutefois, je peux vous dire que cet exposé était très détaillé. Il y a certaines choses que je savais déjà, mais vous avez soulevé des points qui étaient également fort intéressants.

Bien entendu, le comité ne peut qu'entendre votre exposé pour l'instant. Nous devrons l'examiner avant de faire une recommandation au ministre des Finances. Vous avez soulevé des points fort valables qui nous portent à réfléchir.

Merci beaucoup.

Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes.

• 1807




• 1813

Le président: Nous reprenons la séance. Je vous remercie d'être venus nous rencontrer cet après-midi—ou plutôt, ce soir. Je ne sais plus. Il est environ 18 heures.

Monsieur Woolford, il est bon...

M. Peter Woolford (vice-président, Analyse des politiques et relations gouvernementales, Conseil canadien du commerce de détail): Bonsoir, monsieur le président. À propos, nous ratons ce soir quelque chose de bien spécial.

Des voix: Oh, oh!

M. Peter Woolford: J'ai apporté des bonbons.

Le président: Vous avez apporté des bonbons. Merveilleux.

Nous allons maintenant entendre l'Association des brasseurs du Canada. J'espère qu'ils ont apporté, eux aussi, des bonbons.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Monsieur Morrison, bienvenue.

M. Sandy Morrison (président-directeur général, Association des brasseurs du Canada): Merci, monsieur le président. Malheureusement, je n'ai rien apporté.

Je tiens à vous remercier de nous donner l'occasion de comparaître devant vous.

Notre association représente 28 brasseries qui produisent plus de 99 p. 100 de la bière fabriquée au Canada. Nous comptons parmi nos membres les grandes brasseries nationales, les brasseurs régionaux et les micro-brasseries.

Notre industrie réclame depuis plus de 10 ans une réduction du droit d'accise à l'endroit des petites brasseries qui font face à des défis particuliers du fait qu'elles doivent livrer concurrence, dans un marché de plus en plus ouvert, à des entreprises étrangères qui bénéficient d'un traitement fiscal préférentiel. De façon plus précise, nous cherchons à obtenir une réduction de 60 p. 100 du taux d'accise sur les premiers 75 000 hectolitres de la production des brasseries canadiennes ne produisant pas plus de 300 000 hectolitres par année. Bien que nous réclamions un traitement spécial pour les petites brasseries, il est important que le comité sache que tous les membres de l'ABC appuient cette recommandation.

• 1815

Comme vous l'avez appris hier soir, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante appuie notre démarche. Elle sait à quel point les petites brasseries contribuent au bien-être économique de nombreuses petites collectivités au Canada.

Je suis accompagné de deux personnes qui sont bien placées pour parler de ce dossier: André Dion, président d'Unibroue de Chambly, au Québec, et président de l'Association des petites brasseries du Québec; et Howard Thompson, président de Creemore Springs Brewery Limited, située à Creemore, en Ontario, et président de l'Association des petites brasseries de l'Ontario.

J'invite d'abord M. Dion, et ensuite M. Thompson, à prendre la parole.

[Français]

M. André Dion (président d'Unibroue Inc.; Association des brasseurs du Canada): Je vous remercie, monsieur le président.

Je voudrais d'abord savoir si les membres du comité ont une copie de ce tableau entre les mains, car il est très important. Nous serons assez brefs, et ce tableau explique la situation.

Je voudrais d'abord vous situer dans le contexte mondial du domaine brassicole. Dans le monde, il y a 10 brasseries internationales qui contrôlent 65 p. 100 du marché mondial. Il est évident que les frontières entre les pays ont disparu. Nous sommes maintenant dans un domaine de mondialisation, et la concurrence que nous subissons, nous, les petites brasseries, ne vient pas nécessairement des brasseries canadiennes, mais de plus en plus des brasseries de l'étranger. Tous les gouvernements, et particulièrement le gouvernement canadien, ne peuvent désormais pas légiférer sans tenir compte de cette situation.

Je vous parle en tant que président de 19 petits brasseurs québécois et de 62 petits brasseurs artisanaux canadiens. Je vous offre en exemple la situation d'Unibroue. Vous avez devant vous un document qui brosse le tableau d'une situation bien particulière et qui va vous permettre de tout comprendre. S'il y en a qui n'ont pas le document, on peut leur en remettre un exemplaire. C'est un tableau qui compare la situation qu'Unibroue pourrait connaître si elle était installée à Boston, au Massachusetts, au lieu d'être installée dans la province de Québec, au Canada.

Unibroue exporte 30 p. 100 de sa production un peu partout dans le monde: en Chine, en Europe, en Australie, en Amérique du Sud. Cinquante pour cent de ses livraisons à l'exportation se font aux États-Unis. Unibroue a connu une croissance de ses exportations de l'ordre de 33 p. 100 par année depuis quatre ans. Tout ceci n'effraie pas Unibroue, évidemment. Unibroue remporte à peu près toutes les médailles qui existent dans le monde. Tout ceci n'effraie pas Unibroue pourvu qu'Unibroue ait les mêmes armes que les brasseurs étrangers pour se défendre.

Or, le Canada est un des rares pays industriels qui refusent jusqu'à maintenant d'accorder des privilèges, une équité ou une parité des droits d'accise aux petites brasseries, alors que la France, l'Allemagne, la Belgique et tout particulièrement le pays voisin, les États-Unis, accordent 60 p. 100 de réduction des droits d'accise à leurs petites brasseries.

Le tableau comparatif que vous avez devant vous, préparé à l'intention du ministre des Finances, M. Martin, décrit ce que seraient les conséquences si Unibroue devait décider de s'installer à Boston demain matin.

Unibroue a atteint un chiffre d'affaires de 21 400 000 $ pour une production de 6 500 000 litres. Le taux de droits d'accise au fédéral est de 28c. le litre. Unibroue a donc versé au fédéral, l'année dernière, la somme de 1 820 000 $. Si nous avions été à Boston, les droits auraient été de 9c. le litre. Unibroue aurait donc versé la somme 585 000 $.

Au niveau provincial, malgré une réduction des droits d'accise au Québec depuis quelques années, le Québec réclame 21,6c. le litre pour un montant total de 1 404 000 $. Ce sont les chiffres réels représentant les sommes qu'Unibroue a versées en l'an 2000. Si Unibroue avait été au située au Massachusetts, elle aurait versé 273 000 $, c'est-à-dire 4c. le litre. De plus, au provincial, il y a une surtaxe de 7,5 p. 100 qui s'applique à toutes les ventes effectuées dans les bars ou dans les restaurants. Donc, au total—il ne s'agit pas de projections, mais bien de montants réels—, Unibroue a dû verser 3 545 000 $ en droits d'accise l'année dernière, comparativement à un montant de 858 000 $ qu'Unibroue aurait eu à verser si elle avait été située à Boston, aux États-Unis, à quelques centaines de milles d'ici.

C'est donc ce point-là qui nous préoccupe particulièrement. Le ministre nous avait demandé de démontrer la différence par rapport à d'autres systèmes de taxation afin de voir s'il y avait un équilibre qui existait quelque part. Le tableau démontre bien la différence qui existe un peu partout.

• 1820

Je tiens à vous dire que la situation est tout à fait injuste et qu'elle devient de plus en plus intenable. Il y a des années que ça dure. Les gouvernements américains continuent toujours d'accorder ces mêmes avantages aux brasseries américaines, cela depuis une vingtaine d'années.

Au Québec, il y a à peine trois ans, il y avait 19 brasseries artisanales. Il en reste maintenant six. Cinq ont fait faillite, trois ont fermé leurs portes, deux ont été vendues et trois sont en difficulté temporaire—on l'espère tout au moins—avant d'agoniser. Il est donc urgent que des décisions se prennent immédiatement. La question que les gens nous posent de plus en plus, c'est de savoir pourquoi ils devraient continuer d'investir dans une telle situation au Canada, alors qu'il y aurait des avantages énormes à le faire s'ils étaient installés à Boston.

Nous ne demandons pas la charité, contrairement à ce que les gens peuvent penser, et nous ne demandons pas de subventions. Nous demandons tout simplement la parité avec ceux qui font désormais partie du champ de la concurrence et contre qui nous nous battons tous les jours.

Je vous remercie et je cède la parole à M. Thompson.

[Traduction]

Le président: Monsieur Thompson.

M. Howard Thompson (président-directeur général, Creemore Springs Brewery Limited, Association des brasseurs du Canada): Merci, André.

Comme l'a mentionné Sandy, je m'appelle Howard Thompson. Je suis le président de la Creemore Springs Brewery et de l'Association des petites brasseries de l'Ontario. Cela fait un peu plus de 11 ans que je travaille dans ce domaine.

La taxe d'accise représente pour les petites entreprises un fardeau très lourd. C'est essentiellement pour cette raison que demandons que le programme de la taxe d'accise soit modifié.

J'insiste sur l'expression «petites entreprises». Il y a des douzaines de petites entreprises au Canada qui connaissent beaucoup de succès. J'en connais une en particulier. Quelques partenaires se sont regroupés et ont investi un million de dollars dans l'achat de terrains, d'installations et de matériel. Ils ont créé une demande pour leur produit. Leur usine fonctionne à plein rendement, et leur chiffre d'affaires atteint entre 1,5 million et 2 millions de dollars. Ils emploient de 10 à 15 personnes. Cette performance représenterait, pour la plupart des petites entreprises, un succès énorme. Des profits seraient générés, et les actionnaires réaliseraient des bénéfices.

Or, ce n'est pas le cas de la petite brasserie. En fait, ce niveau de rendement ou la production de 7 000 hectolitres lui permet tout juste d'atteindre le seuil de rentabilité. Imaginez une situation où vous réalisez un chiffre d'affaires de 1,5 million ou 2 millions de dollars, où vous n'enregistrez aucun bénéfice net, et où vous devez quand même verser un peu plus de 200 000 $ en taxes d'accise au gouvernement fédéral.

Telle était la situation de Creemore Springs il y a 11 ans. Or, nous avons survécu et nous avons pris de l'expansion. Les effets de la taxe d'accise sont toutefois implacables. Cette année, notre chiffre d'affaires atteindra un peu plus de 10 millions de dollars. Nous employons maintenant 42 personnes et nous verserons plus de 800 000 $ en taxes d'accise au gouvernement fédéral. Pour situer les choses dans leur contexte, les droits d'accise sont plus élevés que les coûts de main-d'oeuvre. À 28 $ l'hectolitre, cette taxe entre en concurrence directe avec le capital qui est requis pour réinvestir dans la propriété, l'usine et l'équipement, et pour recruter plus de personnel.

Ce problème existe depuis des années. Il faut s'y attaquer dès maintenant, étant donné l'urgence de la situation. Je représente, par l'entremise de l'Association des petits brasseurs de l'Ontario, un certain nombre d'entreprises qui atteignent tout juste le seuil de rentabilité en Ontario. Ces entreprises devraient être prospères. Nous devrions entendre parler des brasseries régionales et communautaires qui sont performantes, parce qu'en vendant 7 000 hectolitres, ou pour 1,5 million de dollars de bière, elles auraient réussi à soutenir la concurrence dans un marché dominé par des géants. Or, elles ne font qu'atteindre le seuil de rentabilité.

Le gouvernement fédéral est le seul à ne pas reconnaître ce fait. Les provinces ont consenti un allégement des taxes à la consommation aux petites brasseries, tout comme l'ont fait les États-Unis. Nous demandons que le gouvernement fédéral fasse la même chose. Nous ne réclamons pas une exemption, parce que nous savons, au sein de l'industrie, que les taxes sont là pour rester. Ce que nous demandons, c'est que le gouvernement fédéral reconnaisse que les petites entreprises au sein de l'industrie brassicole sont distinctes et qu'elles devraient être taxées en conséquence. Nous sommes prêts à payer notre juste part. Toutefois, nous voulons que cette part soit juste.

Je tiens à vous remercier de m'avoir donné l'occasion de vous rencontrer ce soir.

Le président: Merci beaucoup. Je dois également vous dire que Paul Bonwick m'a demandé de vous saluer.

Nous allons maintenant entendre des représentants de la Coalition for the Elimination of Capital Taxes: Satya Poddar, directeur du service responsable de la politique de l'impôt, chez Ernst & Young; et David Penney, directeur général de la taxation, chez General Motors du Canada Inc. Bienvenue.

M. David Penney (directeur général de la taxation, General Motors du Canada Inc.; Coalition for the Elimination of Capital Taxes): Merci, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du comité des finances de la Chambre des communes.

• 1825

Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de comparaître devant vous dans le cadre de ces consultations prébudgétaires importantes. Comme vous l'avez mentionné, je m'appelle David Penney. J'occupe le poste de directeur général de la taxation chez General Motors. Je suis accompagné de M. Satya Poddar, directeur du service responsable de la politique de l'impôt chez Ernst & Young LLP.

Nous représentons aujourd'hui la coalition pour l'élimination de l'impôt sur le capital, qui regroupe d'importantes entreprises canadiennes des secteurs de la fabrication et des ressources. Elles s'inquiètent des effets néfastes qu'a sur les investissements, la formation de capital et la productivité, l'impôt sur le capital que prélèvent les gouvernements fédéral et provinciaux. Ces entreprises se sont regroupées en vue d'ajouter leur voix à l'appel général en faveur de l'élimination de l'impôt sur le capital au Canada.

Les effets néfastes de cet impôt se font sentir à plusieurs niveaux. Il décourage les investissements, réduit la productivité, nuit à la croissance de l'emploi, est inéquitable et frappe surtout quand les entreprises sont à leur plus faible. L'impôt sur le capital, de par sa nature, représente une taxe sur l'accumulation de capital. Il s'applique aux sommes d'argent qu'une entreprise investit dans l'achat de terrains, d'immeubles ou de matériel. De nombreux gouvernements provinciaux ont reconnu que l'impôt nuit à la création d'emplois et ont pris des mesures en vue de l'éliminer. Il est essentiel que le gouvernement fédéral suive leur exemple.

Les entreprises doivent verser de l'impôt sur le capital, peu importe leur rendement. Or, cet impôt empêche les entreprises de prendre les mesures qui s'imposent pour surmonter les difficultés en période de ralentissement économique, et les empêchent aussi de profiter pleinement de la situation quand il y a reprise économique.

Les entreprises doivent injecter plus de fonds dans leurs activités pour combler les manques à gagner qui surviennent quand l'économie tourne au ralenti. L'impôt sur le capital mine l'efficacité de cette mesure puisqu'il a pour effet de taxer ces injections de fonds. Il réduit les fonds disponibles à des fins d'investissement et, ce faisant, nuit à la concurrence internationale et à la création d'emplois. Tous ces facteurs ont un impact sur la relance de l'activité économique.

Fait inquiétant, l'impôt sur le capital représente, en période de ralentissement économique, une part plus importante des taxes professionnelles que perçoit le gouvernement. Or, le gouvernement doit prendre des mesures en vue d'aider les entreprises à croître et à investir dans l'avenir des Canadiens. L'impôt sur le capital s'applique peu importe le cycle économique. En fait, il décourage les investissements et nuit à la création d'emplois quand nous en avons particulièrement besoin. Le moment est venu de nous débarrasser de cet impôt néfaste.

On est de plus en plus conscient à l'échelle nationale, non seulement au sein du milieu des affaires, mais également au sein des gouvernements, de la nécessité d'éliminer l'impôt sur le capital. Le gouvernement fédéral a reconnu qu'il fallait réduire les taxes professionnelles. Il a donc pris des mesures concrètes en vue de réduire l'impôt des sociétés, et ce, dans le but d'accroître la compétitivité des entreprises canadiennes. Or, les réductions de l'impôt des sociétés qui ont été décrétées dans le passé ont surtout profité au secteur des services. Les entreprises à forte intensité de capital et les industries primaires qui emploient un grand nombre de Canadiens sont celles qui sont les plus touchées par l'impôt sur le capital. Cet impôt a été introduit au palier fédéral comme mesure de réduction du déficit. Or, le gouvernement n'a rien fait pour le réduire ou l'éliminer, bien que sa situation financière se soit nettement améliorée depuis son introduction.

Monsieur le président, vous avez déjà entendu bon nombre de ces arguments. Ce qui nous inquiète, toutefois, c'est le nouveau risque qui se présente à la frontière, alors que les investisseurs décident où placer leur argent. Nous voulons les encourager à considérer le Canada sous un oeil favorable. L'abolition de l'impôt fédéral sur le capital constituerait à cet égard un pas fort important.

Je vais maintenant céder la parole à mon collègue, qui va vous en dire plus sur les effets néfastes de l'impôt sur le capital, et vous expliquer pourquoi il est important que le gouvernement agisse sans délai.

M. Satya Poddar (directeur, Service responsable de la politique de l'impôt, Ernst & Young LLP.; Coalition for the Elimination of Capital Taxes): Monsieur le président, nous reprenons, à bien des égards, ce que vous avez déjà dit. Nous éviterons donc d'entrer dans les détails. Vous avez fait des déclarations, que nous appuyons dans une certaine mesure, sauf que j'aimerais vous parler d'un cas à titre d'exemple.

Hier soir, pendant que je préparais mon exposé en vue de la réunion du comité, j'ai reçu un appel d'un représentant d'une compagnie de télécommunication. Voilà la situation. Au cours des 10 à 15 dernières années, cette compagnie a perdu beaucoup d'argent. Elle affiche un manque à gagner de 1,1 milliard de dollars. Il s'agit d'un report de pertes qui a eu pour effet d'éliminer ses avoirs, de sorte qu'elle se retrouve avec un manque à gagner de 1,1 milliard de dollars. Elle a été obligée d'emprunter 3 milliards de dollars pour financer ses activités et ses pertes. On juge que l'entreprise possède, aux fins de l'impôt sur le capital, des créances au titre du capital de 3 milliards de dollars, moins le manque à gagner de 1,1 milliard de dollars. Sur ce 1,9 milliard de dollars, elle a versé entre 8 et 10 millions de dollars par année au titre de l'impôt sur le capital aux gouvernements fédéral et provincial. Elle n'a réalisé aucun bénéfice au cours des neuf ou dix dernières années. Elle a décidé de poursuivre ses activités, de chercher des débouchés au Canada, et elle doit continuer de verser cet impôt, sans dégrèvement aucun.

• 1830

Cette situation est vraiment préoccupante. Permettez-moi de m'étendre sur deux ou trois points qu'a soulevés David Penney.

D'abord, l'impôt sur le capital fait subir à l'économie des pertes énormes. Selon des études réalisées par le ministère des Finances, de tous les impôts qui existent au Canada ou ailleurs dans le monde, l'impôt sur le capital est le pire. Don Drummond, un ancien fonctionnaire du ministère des Finances, a rédigé un article à ce sujet dans le Financial Post. «Il a déclaré qu'il n'existe pire impôt que l'impôt sur le capital.»

Pourquoi cet impôt est-il mauvais? Chaque dollar prélevé au titre de l'impôt sur le capital entraîne une baisse de production de 6 à 7 $. Cela équivaut à une baisse de rendement de 17c. au titre de la TPS, par exemple; de 25c. environ au titre des cotisations sociales; de 50c. au titre de l'impôt sur le revenu et de 1,55 $ au titre de l'impôt sur les sociétés. Il y a donc une perte de rendement de 7 $ pour chaque dollar prélevé.

Donc, pourquoi les pertes sont-elles si élevées? Il y a quatre raisons: premièrement, l'impôt sur le capital est une taxe directe sur les investissements. Elle décourage donc ceux-ci. Deuxièmement, l'impôt sur le capital nuit aux investissements parce que les pays étrangers, nos partenaires commerciaux, n'imposent pas ce genre de taxe. Le Canada est le seul à le faire. Si vous voulez générer des recettes par le biais de l'impôt sur le revenu...les États-Unis prélèvent un tel impôt, le Canada aussi, et on peut établir une comparaison entre les deux, sauf que les États-Unis ne prélèvent pas d'impôt sur le capital comme nous le faisons.

Troisièmement, comme cet impôt ne dépend pas des bénéfices, il décourage la prise de risques. C'est comme si vous alliez au casino et qu'il n'y avait aucune récompense pour l'argent que vous y dépensez. Si le gouvernement n'assume pas une part des pertes, si l'impôt ne diminue pas quand vous perdez de l'argent, alors il a un impact négatif énorme sur la prise de risques.

Enfin, l'impôt sur le capital influe de façon négative sur les investissements entre les industries de capital, qui sont lourdement taxées, et les autres industries dont les besoins en capital sont moins grands. L'impôt sur le capital nuit au secteur manufacturier. Au cours des deux ou trois dernières décennies, les secteurs de la fabrication et des ressources ont bénéficié d'un traitement fiscal favorable en raison de la compétitivité qui existe à l'échelle mondiale.

Or, le gouvernement a maintenant uniformisé les règles du jeu pour ce qui est de l'impôt sur les sociétés, de sorte que le taux d'imposition sera le même pour toutes les entreprises. Toutefois, l'impôt sur le capital, lui, reste en place. Il impose un fardeau excessif aux secteurs de la fabrication et des ressources, où les besoins en capital sont énormes. Donc, en uniformisant les règles du jeu au chapitre de l'impôt des sociétés et en laissant l'impôt sur le capital en place, on défavorise le secteur de la fabrication et des ressources, et les gouvernements, à mon avis, ne veulent plus d'un tel système.

Je voudrais faire un dernier commentaire. La plupart des gens que vous avez rencontrés affirment être d'accords avec tout ce qui se dit, sauf qu'ils se demandent si le moment d'éliminer l'impôt sur le capital est bien choisi. Pourquoi ne l'est-il pas? Peut-être en raison de l'incidence sur les recettes. Monsieur le président, nous tenons à insister sur le fait que l'impôt sur le capital n'a rien à voir avec les recettes. L'incidence sur les recettes est modeste et peut être gérée au moyen de règles de transition adéquates. Il faut envoyer un message clair à la communauté. Il faut entreprendre une réforme du régime fiscal des sociétés au Canada, une réforme qui indique aux investisseurs que le Canada est un pays concurrentiel, un bon endroit où investir. Il faut également uniformiser les règles du jeu afin d'aider les industries à forte intensité de capital.

Il existe plusieurs façons de gérer l'incidence sur les recettes qu'entraînerait l'abolition de l'impôt sur le capital. Les recettes fédérales générées par l'impôt sur le capital totalisent moins de un milliard de dollars. Si l'on juge que ce montant est trop important dans les circonstances actuelles, on pourrait éliminer l'impôt progressivement sur quatre ou cinq ans. C'est faisable. On indiquera ainsi aux investisseurs que l'impôt n'existe plus, et ils planifieront leurs investissements en conséquence, même s'il faudra deux, trois ou quatre ans pour l'éliminer.

Parallèlement, on pourrait défalquer l'impôt des sociétés de l'impôt sur le capital. Il se s'agit pas d'une taxe double, mais d'une taxe minimale. Si l'impôt des sociétés que vous versez est élevé, vous ne devriez pas être obligé de verser de l'impôt sur le capital. En défalquant l'impôt des sociétés de l'impôt sur le capital, de l'impôt sur le revenu que vous payez habituellement, vous accordez un dégrèvement, du moins à court terme.

• 1835

Comme il existe différentes façons de s'attaquer à la question des recettes, celles-ci ne constituent pas un problème. Il faut entreprendre une réforme du régime fiscal et envoyer un message clair en cette période de ralentissement économique, pendant que les investisseurs s'affairent à décider où investir. C'est grâce à la croissance des investissements que nous relancerons l'activité économique.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup.

Et je suis d'accord avec vous.

Nous allons entendre M. Peter Woolford, du Conseil canadien du commerce du détail. Il ne s'est pas déguisé.

M. Peter Woolford: Oui. Je pensais que, sans mon déguisement, vous me prendriez un peu plus au sérieux.

Le président: C'est très bien.

[Français]

M. Peter Woolford: Merci, monsieur le président.

Nous sommes heureux d'avoir la chance d'exposer au comité le point de vue et les solutions préconisées par les détaillants du Canada. Nous n'avons pas préparé de présentation par écrit cette année parce que nous avons voulu suivre l'évolution de la situation de l'économie intérieure jusqu'à la dernière minute. J'ai donc travaillé en fin de semaine à préparer les commentaires que je vous livre ce soir. Nous avons ainsi les résultats complets jusqu'à la fin de la semaine dernière.

Nos remarques se basent sur l'expérience de nos membres et nous formulons des recommandations sur deux dossiers fiscaux, les taxes sur la main-d'oeuvre et la TPS.

[Traduction]

J'aimerais d'abord vous parler de l'expérience que vivent nos membres depuis le 11 septembre. Après avoir connu une forte croissance en l'an 2000, les ventes au détail ont chuté considérablement en 2001 pour atteindre environ 3 p. 100. Nous avons également noté une tendance à la baisse au cours des huit premiers mois de l'année. Donc, nous avons connu un début d'année moins bon qu'en 2001, et la situation s'est progressivement détériorée au cours des huit premiers mois.

Ce 3 p. 100 cache de très nombreuses variations, certains secteurs ayant affiché des ventes beaucoup plus élevées que d'autres.

[Français]

L'effet subit des attaques du 11 septembre a été une chute dramatique des revenus de tous les commerces dans tous les domaines. Les chiffres de septembre sont les plus mauvais qui aient jamais été compilés. Le troisième trimestre a été très difficile pour tous nos membres.

[Traduction]

J'aimerais maintenant vous en dire plus sur ce qui se passe au sein de l'industrie depuis le 11 septembre. J'en ai discuté avec le président et il m'a autorisé à dépasser un peu mon temps de parole. Il serait utile que le comité ait une idée précise de la situation qu'ont vécue les commerces de détail jusqu'à cette dernière fin de semaine.

D'après nos membres, les ventes ont augmenté assez rapidement pour atteindre le niveau relativement faible qui existait déjà avant le 11 septembre. Dans la plupart des cas, la situation est revenue à la normale moins d'une semaine après ces événements tragiques. Toutefois, certains de nos membres, et ils représentent une minorité importante, ont signalé que leurs ventes n'ont redémarré qu'en octobre, et qu'elles ont atteint à ce moment-là les faibles niveaux enregistrés avant le 11 septembre.

Cela nous porte à croire qu'en surface, les événements du 11 septembre représentaient une anomalie passagère. Toutefois, nos membres constatent que le comportement des consommateurs est très différente, puisqu'ils deviennent beaucoup plus prudents et ce, pour des raisons entièrement nouvelles. Voilà un des principaux messages que j'essaie de vous transmettre ce soir.

D'après ce que nos membres peuvent observer, il semble que nous soyons aujourd'hui confrontés à un nouveau phénomène, différent d'un ralentissement cyclique normal, ce qui inquiète passablement, si bien qu'ils éprouvent une certaine incertitude en matière de planification et de prévision.

Permettez-moi de vous présenter quelques-uns des éléments de ce nouveau phénomène. Tout d'abord, le type de reprise varie beaucoup. Le mouvement des marchandises a changé. On constate en effet que les ventes de biens indispensables, c'est-à-dire les produits de consommation qu'on vend habituellement dans la semaine, se maintiennent assez bien.

Par contre, les ventes de biens non essentiels reprennent beaucoup plus lentement, peu importe leur prix. En effet, ce ne sont pas seulement les ventes de marchandises haut de gamme qui n'avancent pas; nous constatons aussi, par exemple, que le marché de la musique a été durement frappé depuis le 11 septembre. Les effets se font ressentir à des niveaux de prix différents.

D'un autre côté, ce qui est surprenant, c'est que les ventes de produits de divertissement, comme les DVD et les écrans géants, se portent bien et continuent sur cette lancée. La seule conclusion à laquelle en arrivent nos membres, c'est que les Canadiens se replient, qu'ils font du cocooning, préférant peut-être se divertir à la maison plutôt que de voyager ou de se divertir à l'extérieur.

Nous constatons que les consommateurs fréquentent des commerces moins chers et qu'ils achètent des produits moins chers également. Les consommateurs canadiens se sont toujours préoccupés des prix, mais encore plus aujourd'hui. Ils achètent plus souvent des articles à rabais et en veulent pour leur argent.

• 1840

Nous constatons également que les consommateurs font la chasse aux aubaines. Habituellement, lorsqu'un consommateur entre dans un magasin, attiré peut-être par les rabais offerts, il achète aussi de la marchandise à plein prix. Or, nos membres constatent qu'aujourd'hui, le consommateur entre, achète la marchandise à rabais, puis s'en va.

La grande exception, ce sont les meubles et les appareils électroménagers, qui se vendent comme des petits pains. Nos membres ne savent pas vraiment pourquoi ce secteur du commerce de détail reste aussi fort, mais pensent que cela pourrait être relié au marché de l'habitation, qui demeure encore très fort aujourd'hui. La seule autre conclusion à laquelle ils en arrivent, c'est qu'il s'agit d'un phénomène non durable.

Les habitudes d'achat des consommateurs ont aussi changé. Par exemple, pour beaucoup de nos membres et dans de nombreux cas, la diminution du nombre de personnes qui entrent dans leur commerce se compte par dizaines. Pour d'autres, par contre, le panier de la ménagère, c'est-à-dire le montant que chaque consommateur dépense dans son commerce, est à la hausse. Cela veut dire que les consommateurs magasinent moins souvent, mais que quand ils le font, ils dépensent plus. Par ailleurs, les ventes sont en dents de scie. On peut enregistrer de bonnes ventes le jeudi et le vendredi, mais de faibles ventes durant la fin de semaine. La répartition de la consommation est donc très inégale.

Il semble également que la perte de confiance est évidente, mais qu'elle n'est pas directement attribuable à la situation économique actuelle. Nos membres nous signalent que les consommateurs, tout comme leurs associés, s'inquiètent ouvertement au sujet de leur propre confiance et de celle de leurs pairs. Consommateurs et associés font aussi preuve d'un comportement économique plus conservateur.

Quelles sont alors les conséquences d'un tel phénomène sur le commerce de détail? Nos membres pensent que les ventes pourraient bien se maintenir jusqu'à la fin de l'année mais, de toute évidence, les marges de profit et la rentabilité seront à la baisse. Nos membres continuent d'ouvrir leurs commerces, mais en raison de la baisse de rentabilité, les investissements finiront par se tarir à court terme. S'il y a baisse des ventes, peu importe leur volume, cela entraînera une diminution de l'emploi, du nombre de personnes et du nombre d'heures.

En ce qui concerne les activités frontalières, nos membres ont signalé de graves problèmes immédiatement après le 11 septembre, problèmes qui semblent toutefois avoir considérablement diminué. Cependant, nos membres s'inquiètent encore de la fiabilité de la chaîne d'approvisionnement, étant donné que nous entrons maintenant dans la période de l'année où l'activité est la plus intense pour le commerce de détail. Nos membres craignent notamment de ne recevoir leurs marchandises à temps pour la période des fêtes.

La plupart de nos membres estiment qu'ils gèrent leur stock comme il le faut et n'ont pas trop peur de perdre les pédales à ce sujet. Je sais que tout récemment, certains de nos membres ont entrepris de réduire les commandes qu'ils avaient faites auprès de leurs fournisseurs.

[Français]

Je veux maintenant parler de nos prévisions pour la période des Fêtes. Il est très difficile de prédire quels seront les résultats de la période des Fêtes à cause de ces événements inhabituels.

Nous nous trouvons en terrain inconnu. La confiance des consommateurs est la clé à ce chapitre. Le 11 septembre a provoqué des craintes beaucoup plus profondes que celles que l'on vit pendant une période normale de ralentissement. Les événements de politique internationale auront une importance très grande pour les clients.

De plus, il faut reconnaître qu'il serait de toute façon difficile de surpasser les résultats de l'an passé. Les ventes de l'an 2000 ont été très élevées. Il s'agissait pour nous d'un très grand défi à relever.

[Traduction]

Permettez-moi maintenant de passer aux conseils que nous voulons vous donner en matière de politique. Nous croyons que les gouvernements, le gouvernement fédéral en particulier, doivent se pencher sur deux questions: la confiance et le revenu disponible des consommateurs. Les mesures visant à améliorer la confiance des consommateurs doivent apaiser les craintes que nous avons mentionnées qui dépassent les craintes des Canadiens à propos de l'économie.

Tout ce que nous pouvons dire, monsieur le président, c'est qu'il est important pour les Canadiens de savoir que leur gouvernement comprend la situation, qu'il dispose d'un plan bien établi, qu'il sait ce qu'il doit faire, qu'il est préparé et qu'il va agir. En tant que détaillants, il est difficile pour nous d'aller plus loin, mais nous voulons essayer de vous exposer le défi auquel, nous le savons, nos dirigeants politiques sont confrontés à l'heure actuelle.

J'aimerais maintenant parler du soutien des revenus. On peut le faire de deux façons: en allégeant le fardeau fiscal, d'une part et en soutenant les emplois, d'autre part. J'aimerais vous souligner les différences entre le soutien et la création d'emplois. Je crois que dans les circonstances actuelles, il faut soutenir les emplois des Canadiens, car beaucoup pensent que leur emploi est quelque peu menacé.

Nous reconnaissons que la baisse des taux d'intérêt a une incidence positive sur les revenus personnels. La réduction de trois quarts de points, annoncée la semaine dernière, est une mesure très importante, puisque grâce à elle, de nombreux ménages canadiens disposeront de plus d'argent. Nous reconnaissons également les incidences positives des réductions de l'impôt sur le revenu annoncées par M. Martin lors de son exposé économique de l'an passé.

• 1845

Néanmoins, toute mesure que le gouvernement pourrait prendre pour mettre plus d'argent dans les poches des consommateurs sera quand même la bienvenue. Nos membres privilégient toutefois des mesures fiscales, plutôt que des dépenses, puisqu'elles permettent aux Canadiens la possibilité de faire des choix en matière de consommation. Nous préconisons aussi la mise en oeuvre de mesures continues et à long terme plutôt que des mesures ponctuelles et à court terme.

Finalement, en ce qui concerne le déficit, nos membres considèrent que les Canadiens ont fait personnellement d'énormes sacrifices économiques dans les années 90 pour rembourser les déficits du gouvernement, et en tant que détaillants, nous n'avons pas l'intention de revivre pareille situation. Nous n'allons pas appuyer des activités qui pourraient entraîner un autre déficit financier.

J'aimerais maintenant parler de deux domaines fiscaux en particulier, à commencer par les charges sociales. Il ne fait aucun doute que les charges sociales sont extrêmement nuisibles pour l'emploi, et je crois que M. Martin l'a publiquement avoué à plus d'une occasion. De toute évidence, s'il existe une marge de manoeuvre fiscale, c'est là qu'elle se trouve.

Le Conseil canadien du commerce de détail recommande fortement, en tant que membre de la coalition, l'instauration d'une exemption de base annuelle de 3 000 $ pour le programme d'assurance-emploi. Le comité de la Chambre sur le développement des ressources humaines appuie fortement cette recommandation. Cela permettrait d'augmenter le salaire réel des Canadiens, serait surtout à l'avantage des travailleurs à faible revenu et réduirait le coût de l'emploi.

Notre président a rencontré M. Martin la semaine dernière et ce dernier lui a fait savoir que notre recommandation était simplement trop coûteuse pour l'instant. Nous comprenons très bien la situation financière du gouvernement. M. Martin a promis d'examiner cette recommandation et nous a suggéré de trouver d'autres solutions à moindre coût.

Pour l'instant, notre coalition n'a pas encore mis la dernière main aux conseils que nous présenterons au ministre, mais une exemption de base annuelle de 3 000 $ pour les 2,3 millions de travailleurs âgés de moins de 25 ans est l'option que nous privilégions. Le coût de cette option équivaudrait à une réduction de la cotisation de moins de 5c., mais s'appliquerait à un groupe d'employés qui en a réellement besoin. Je sais que le comité est tout à fait conscient qu'au Canada, le taux de chômage chez les jeunes est le double de celui des adultes.

Je rappellerais au comité que s'il ne se passe rien au niveau des coûts de l'assurance-emploi, les Canadiens connaîtront le 1er janvier 2002 l'augmentation la plus importante des charges sociales depuis la récession, en raison de l'augmentation de 40 cents du RPC. Ce n'est pas le moment d'augmenter l'impôt sur le revenu.

Passons maintenant à la taxe sur les produits et services. Une réduction de la TPS serait la façon la plus rapide et la plus visible de remettre de l'argent aux Canadiens et, d'après l'analyse économétrique, c'est ce qui est le plus stimulant après les charges sociales. Nous ne sommes pas en faveur d'un répit à court terme ni d'une réduction visant à stimuler les ventes pendant la période des fêtes. Cela ne ferait que fausser profondément la structure des ventes, ce qui créerait d'énormes difficultés pour les détaillants au niveau de la planification, ainsi que des problèmes dans leurs relations avec les consommateurs au point de vente. Nous ne croyons pas que cela produirait une nouvelle demande supplémentaire nette. Nous ne ferions qu'acheter par anticipation et, au plan administratif, ce serait très difficile pour nos fournisseurs.

Nous nous opposons à une réduction visant des secteurs particuliers de marchandises où se limitant à un certain seuil monétaire, tous les achats de moins de x dollars, par exemple.

Selon nous, il ne faudrait pas avoir recours à ces mesures de politique économique pour essayer de rajuster les choix des Canadiens en matière d'achats.

Nous préférerions de loin une réduction permanente du taux de la TPS. Nous reconnaissons qu'une réduction d'un point permettrait aux consommateurs de récupérer près de 3,5 milliards de dollars, même si le coût pour le gouvernement serait quelque peu moindre.

Une injection aussi importante d'argent pourrait susciter la confiance et augmenter le revenu net des particuliers plus que stimuler ces derniers à acheter; nous croyons toutefois que cela présente des avantages très positifs à moyen et à long termes.

Si une réduction permanente n'est pas possible en ce moment pour des raisons financières et si le gouvernement envisage une mesure temporaire, nous l'encourageons alors à instaurer cette réduction pendant au moins six mois pour essayer de minimiser le problème de poussées soudaines en matière d'achats.

Nous allons transmettre le même message de restriction aux gouvernements provinciaux, tout en mettant l'accent sur les dépenses de consommation.

Monsieur le président, c'est ainsi que se termine notre déclaration liminaire. Nous nous ferons un plaisir de répondre aux questions.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Woolford.

Nous allons maintenant entendre les représentants des Manufacturiers et exportateurs du Canada, M. Jayson Myers, premier vice-président et économiste en chef, et John Allinotte, directeur de la fiscalité des entreprises, Dofasco Inc. Nous vous souhaitons la bienvenue.

[Français]

M. Jayson Myers (économiste en chef, Manufacturiers et exportateurs du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président.

• 1850

Mesdames et messieurs, je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de vous exposer comment les Manufacturiers et exportateurs du Canada voient l'économie après les événements du 11 septembre et quelles sont leurs recommandations relatives au budget fédéral.

Comme vous le savez, les activités des entreprises membres des Manufacturiers et exportateurs du Canada représentent 75 p. 100 des activités de l'ensemble du secteur de la production industrielle, 95 p. 100 de toutes les exportations et 90 p. 100 des activités en recherche et développement du secteur privé au Canada.

[Traduction]

Je suis sûr que vous êtes également conscients de l'importance du secteur manufacturier et du secteur de l'exportation pour l'économie canadienne. Le secteur manufacturier emploie 2,2 millions de Canadiens et un emploi sur trois dans notre pays dépend des exportations.

Bien des choses ont changé par suite des événements du 11 septembre. Le secteur manufacturier était déjà en récession. Juste avant l'été, j'ai remis à votre comité une analyse, mais à la fin de l'été, le secteur manufacturier était déjà en récession. À ce moment-là, on s'attendait à ce que la situation commence à s'améliorer très graduellement le reste de l'année où au quatrième trimestre de 2001, mais l'onde de choc des attaques terroristes va prolonger et aggraver la récession au sein de l'industrie canadienne.

La situation va empirer dans les secteurs clés déjà affaiblis avant le mois de septembre, comme le secteur de l'automobile, le secteur électronique et les secteurs de la transformation des richesses naturelles. Nous allons également assister à des revers dans les secteurs qui affichaient d'excellents résultats avant le 11 septembre dans le domaine de l'expédition et de la livraison, de la production et des emplois, des secteurs comme l'aérospatiale, les raffineries de pétrole et l'industrie de produits chimiques.

Trop d'incertitude règne aujourd'hui, si bien qu'il est difficile de faire des prédictions solides, mais si l'on s'en tient aux fermetures dans les secteurs de production, à la perte de contrats et aux mises à pied que nous avons déjà observées ces deux derniers mois, on peut s'attendre aujourd'hui à ce que les livraisons manufacturières tombent de 4,5 p. 100 en 2001 et qu'elles s'accompagnent d'une perte nette de 85 000 emplois dans ce secteur.

Étant donné que plus de 62 p. 100 de la production manufacturière est vendue aux États-Unis, c'est la situation du marché américain qui permettra de déterminer la gravité du ralentissement de l'industrie canadienne, ainsi que le moment où l'on pourra s'attendre à une reprise. Pour le secteur manufacturier, cette reprise ne devrait pas se produire avant 2003.

L'impact se fera sentir sur toute l'économie canadienne et aura des répercussions immédiates en matière de planification financière. Nous conseillons au gouvernement de faire preuve de prudence à cet égard. Selon nous, la croissance économique réelle atteindra en moyenne 1,2 p. 100 en 2001 et seulement 0,08 p. 100 en 2002. Nous ne connaissons pas encore l'impact des mises à pied déjà annoncées, et la plupart de celles-ci se produiront avant la fin de l'année.

Nous partons également de l'hypothèse qu'aucune autre perturbation économique ne sera causée par la guerre contre le terrorisme. Les perspectives sont assez sombres pour la plupart des manufacturiers aujourd'hui et il n'y a pas beaucoup de bonnes nouvelles dans ce secteur à l'heure actuelle.

La situation économique a également été aussi aggravée par les perturbations et les retards à la frontière canado-américaine. Étant donné que l'économie d'aujourd'hui est fortement intégrée, les entreprises dépendent du mouvement des personnes et de la livraison juste à temps des produits et services. Les perturbations dont nous sommes témoins à la frontière et aux aéroports entraînent non seulement des coûts supplémentaires, mais aussi la perte de contrats et la fermeture d'opérations de production. Cela menace également le potentiel à long terme du Canada d'attirer et de conserver des investissements, de jouir de l'exclusivité de produits et de disposer des chaînes de fabrication. Les perturbations à la frontière représentent la préoccupation numéro un pour nos membres depuis les événements du 11 septembre.

En tant que président de la Coalition pour une frontière sécuritaire et efficace sur le plan commercial, je dois dire que nous travaillons en étroite collaboration avec 40 autres groupes d'entreprises, ainsi qu'avec des fonctionnaires tant au Canada qu'aux États-Unis, pour faire en sorte que des mesures concrètes soient prises, ou le seront, le plus rapidement possible, en vue de renforcer la sécurité et d'accélérer le mouvement à faible risque des personnes et des produits et services à la frontière canadienne. Ces deux objectifs fort complémentaires soulignent le fait que la sécurité physique et économique de tous les Canadiens est en jeu. La Coalition va déposer demain l'énoncé de ses objectifs et nous allons nous assurer que cet énoncé sera déposé devant votre comité dès qu'il relèvera du domaine public.

• 1855

Tous ces événements sont à l'origine d'un sentiment profond et généralisé d'incertitude au sein de l'industrie canadienne, sentiment provoqué par des soucis accrus en matière de sécurité, par le ralentissement de l'économie et par les perturbations à la frontière; cela influe sur la confiance des consommateurs, des investisseurs et des entrepreneurs qui doivent se déplacer vu qu'ils dépendent de l'accès aux marchés internationaux, au marché américain en particulier, ainsi que sur la confiance de tous les Canadiens à propos de leur sécurité physique et économique.

Le budget de cette année fixera non seulement l'orientation de la politique financière du gouvernement, mais illustrera également de façon très importante la réaction du gouvernement face aux inquiétudes de nature économique et sécuritaire des Canadiens à la suite des attaques terroristes du 11 septembre.

Le budget devrait viser des objectifs à court et à long termes. L'objectif le plus immédiat consiste à soutenir et à instaurer la confiance. Pour cette raison, nous croyons que le budget devrait viser à renforcer la confiance des investisseurs en confirmant l'engagement pris par le gouvernement de ne pas retomber dans une situation déficitaire et d'établir un plan financier garantissant l'équilibre budgétaire. Ce plan devrait comprendre un examen complet des programmes de dépenses du gouvernement tout en poursuivant l'objectif de réduire, réaffecter et reporter les dépenses, afin d'atteindre les objectifs financiers à court terme.

Le budget doit également viser à renforcer la confiance des consommateurs et des entreprises. La façon la plus efficace de procéder à cet égard consiste à affirmer de nouveau que le gouvernement tiendra bon en ce qui concerne le plan de réduction des impôts personnels et des impôts des sociétés, y compris les réductions prévues des cotisations de l'assurance-emploi.

Le budget doit également prévoir des dépenses supplémentaires pour la sécurité, les douanes, l'immigration, l'aide au développement international, ainsi que pour l'engagement militaire pris par le Canada pour la guerre contre le terrorisme, afin d'assurer aux Canadiens que leur sécurité physique sera protégée. Pour renforcer la confiance des entreprises et des Canadiens dont le moyen d'existence dépend de l'accès au marché américain et à d'autres marchés internationaux, le budget doit également prévoir un personnel adéquat, améliorer les infrastructures et mettre en place de nouvelles technologies de contrôle sécuritaire et de gestion de données ainsi que des programmes de prédédouanement pour accélérer le mouvement à faible risque des personnes et des biens à la frontière canadienne.

La restauration de la confiance devrait être la priorité budgétaire la plus immédiate du gouvernement, mais nous estimons que le budget devrait aussi avoir un objectif à long terme clairement énoncé: se concentrer sur le potentiel innovateur et concurrentiel de l'économie canadienne. En fait, cet objectif est plus important aujourd'hui que jamais. Les entreprises devront être plus innovatrices et concurrentielles si elles veulent surmonter les défis actuels que pose notre économie et assurer leur croissance à long terme.

Il est en outre plus urgent que les gouvernements, d'un bout à l'autre du pays, poussent et accélèrent leurs réformes de la fiscalité et de la réglementation pour faire en sorte que le Canada continue d'attirer les entreprises qui veulent s'établir, investir, embaucher leur personnel et croître. Le gouvernement fédéral peut et devrait prendre immédiatement des mesures concrètes pour améliorer le contexte commercial à l'investissement et à l'innovation dans ce pays. Il s'agit de mesures qui n'exigent pas de nouvelles dépenses de grande envergure. Il s'agit de mesures qui devraient bel et bien améliorer la gestion de gouvernement en améliorant à la fois son efficience et son efficacité.

Plus précisément, nous croyons que le gouvernement devrait, premièrement, prendre de nouvelles mesures pour améliorer l'administration de la recherche scientifique et du système de crédit d'impôt pour le développement expérimental, en simplifiant ses règles et en assurant que les avantages du programme ne sont pas neutralisés lorsqu'ils sont appliqués aux résultats collectifs de grosses multinationales qui exercent des activités au Canada.

Deuxièmement, nous croyons qu'il est important que le gouvernement donne suite aux recommandations de ce comité et à son rapport unanime sur le recouvrement des coûts. Nous ne constatons aucun progrès relativement à cette question dans l'examen courant—et je dirais, interminable—du Conseil du Trésor. Pourtant les problèmes de la détérioration des normes de services et l'absence de contrôle et de responsabilités en ce qui a trait aux frais modérateurs demeurent et sont encore plus pressants que jamais en cette période de recul de l'économie.

Troisièmement, nous croyons que le gouvernement devrait entreprendre une étude exhaustive des règlements fédéraux pour s'assurer que les processus de réglementation du Canada favorisent l'innovation de la façon la plus efficiente, la plus efficace et la plus propice possible. Dans le cadre de cet examen, il faudrait s'attacher plus précisément à réduire les formalités administratives, à simplifier les règles, à réduire les coûts d'observation, à rationaliser les processus d'approbation des produits et à harmoniser le plus possible les procédés relatifs à l'observation le plus possible dans les diverses compétences fédérale, provinciale et internationale où il est possible de se fixer des objectifs communs en matière de réglementation.

Il y a aussi un certain nombre d'étapes que les MEC et ses membres estiment que le gouvernement devrait prendre le plus tôt possible pour améliorer et mettre en place au Canada un climat plus sain pour l'investissement et l'innovation. Nous croyons que ces mesures devraient être prises lorsque les conditions économiques seront bonnes et, comme le mentionnait M. Poddar, si certains changements apportés aux règles peuvent atténuer les répercussions sur les revenus, il faudrait alors leur accorder une priorité plus immédiate.

• 1900

En ce qui concerne les baisses d'impôt, dans nos recommandations portant sur le budget, voici les changements que nous proposons. M. Allinotte sera là pour répondre relativement à ces questions, pendant la période à votre disposition pour répondre à vos questions sur le sujet.

Nous appuyons entièrement les initiatives de la Coalition for the Elimination of Capital Taxes. Nous estimons que l'impôt sur le capital pénalise les entreprises qui investissent dans l'innovation et la productivité. Cette taxe ne rime tout simplement à rien et devrait être supprimée.

L'impôt des sociétés exigé des entreprises de fabrication et de transformation devrait être réduit à 17 p. 100, conformément aux réductions annoncées précédemment du taux général d'imposition des sociétés.

Il faudrait également prévoit une façon simple d'accélérer la dépréciation du matériel et de l'équipement de fabrication, par rapport à ce que prévoient les règles relatives à la DPA en vigueur.

Le gouvernement devrait prendre des dispositions pour éliminer l'impôt sur les intérêts, les dividendes et les redevances conclus entre le Canada et les États-Unis sur une base de réciprocité. Ces mesures permettraient de mettre en place un régime fiscal plus concurrentiel au Canada. Le climat des affaires prédisposerait davantage à investir dans des produits, des technologies, compétences et des processus nouveaux et améliorés.

Les MEC ont aussi fait un certain nombre de recommandations dans leur plan d'affaires pour l'innovation en vue de renforcer le potentiel innovateur du Canada. Nous concevons le défi de l'innovation d'un point de vue d'affaires stratégique. Nous insistons sur le fait que, alors que les investissements dans la recherche sont extrêmement importants, les avantages économiques de l'amélioration de la productivité et la croissance de l'emploi reposent sur la commercialisation de nouveaux produits et services, l'application de technologies nouvelles et améliorées et de nouvelles façons de faire des affaires.

Selon nous, les entreprises, les gouvernements de même que les établissements scolaires et financiers doivent travailler main dans la main pour atteindre un certain nombre d'objectifs prioritaires qui se rangent entre une meilleure gestion des entreprises et le développement des compétences en passant par le transfert de la recherche, le financement de l'innovation et le renforcement des capacités des petites et moyennes entreprises canadiennes.

Les MEC travaillent en étroite collaboration avec Industrie Canada, DRHC, les gouvernements provinciaux de même que les organisations scolaires et de recherche pour concevoir et mettre au point des mesures concrètes que toutes les parties peuvent prendre pour améliorer l'innovation au Canada. Presque tout ce qui doit être fait repose sur les résultats positifs des programmes existants, comme le Programme d'aide à la recherche industrielle du Conseil national de recherche, des mesures qui ont un effet déterminant pour l'industrie étant donné qu'elles sont aux prises avec des problèmes professionnels et internes réels.

Les MEC organisent à l'heure actuelle des séances de consultation d'un bout à l'autre du Canada à l'intention des manufacturiers et des partenaires en innovation. Nous ferons des recommandations plus précises au début de la nouvelle année.

L'intention n'est pas de recommander de nouveaux programmes importants de dépenses, mais de trouver comment les entreprises, le gouvernement, les écoles, les organismes de recherche et les établissements financiers pourront travailler en plus étroite collaboration pour renforcer les capacités de recherche et de commercialisation du Canada.

L'innovation, la productivité et la compétitivité représentent les principaux défis à long terme que doit relever l'économie et l'industrie canadiennes. Nous félicitons ce comité des efforts qu'il déploie pour attirer l'attention du gouvernement et de la population en général sur ces questions primordiales. Nous sommes impatients de continuer de travailler avec vous pour faire du Canada un lieu privilégié où les manufacturiers et les entreprises en général peuvent investir, innover, embaucher leur personnel, exporter et croître.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Myers.

Nous allons maintenant entendre M. William Gleberzon et M. Rolf Calhoun de l'Association canadienne des individus retraités. Bienvenue.

M. William Gleberzon (directeur exécutif associé, Canadian Association for the Fifty-Plus): Je suppose que nous sommes le pendant opposé de tous ces messieurs, puisque nous nous occupons de gens et de problèmes tout à fait différents.

Je remercie les membres du comité de nous permettre de nous adresser à eux ce soir.

Comme vous l'avez dit, je m'appelle William Gleberzon. Je suis le directeur exécutif associé de CARP, que nous appelons maintenant la Canadian Association for the Fifty-Plus. Je suis accompagné de M. Rolf Calhoun qui est le représentant de CARP ici à Ottawa.

Comme on nous a demandé de limiter notre exposé afin de permettre aux députés de poser des questions, je vais commencer par une brève description de CARP à l'intention de ceux qui ne savent pas qui nous sommes. Vous trouverez un mémoire plus étoffé dans le matériel qui a été remis aux membres du comité.

CARP, la Canadian Association for the Fifty-Plus, est la plus importante association nationale de Canadiens d'âge mûr de notre pays. Elle représente plus de 400 000 membres qui ont 50 ans et plus, qui sont retraités ou travaillent toujours.

Nous sommes un organisme sans but lucratif. CARP ne reçoit aucun fonds d'exploitation de quelque palier de gouvernement que ce soit par souci d'indépendance et de neutralité. Notre mission consiste à exprimer les préoccupations de Canadiens d'âge mûr et notre mandat, à faire des recommandations pratiques relativement aux questions que nous soulevons.

• 1905

Je vous fais remarquer que vous nous avez présentés comme l'Association canadienne des individus retraités et que nous avons changé ce descripteur. Pour être plus précis, étant donné que nos membres ont 50 ans et plus, notre association s'appelle la Canadian Association for the Fifty-Plus.

J'aimerais commencer en vous disant que nos membres s'inquiètent du fait que l'intérêt des personnes âgées n'occupe pas une place importante dans le programme du gouvernement fédéral et que cette priorité qui existe bel et bien risque de perdre encore de l'importance en raison des nouvelles dépenses que doit engager le Canada depuis le 11 septembre. Nous espérons que cela n'arrivera pas.

Bon nombre des problèmes que nos membres ont signalé à notre attention continuent de les préoccuper, malgré les événements du 11 septembre. Par conséquent, nous estimons qu'ils justifient que ce comité s'y intéresse, même en cette période stressante de la vie.

Nous avons signalé à l'attention du comité, par le passé, un grand nombre de ces problèmes et nous aimerions proposer ce que le comité, nous l'espérons, songera à recommander au ministre des Finances.

Ce qui préoccupe au plus haut point nos membres, ainsi que tous les députés, c'est le régime de soins de santé. Il semble que M. Martin n'augmentera pas le financement aux provinces et aux territoires pour les soins de santé. Nous l'invitons instamment à revenir sur sa décision. En s'abstenant de le faire, il favorise l'érosion grandissante de notre régime de soins de santé national, ce qui pourrait déboucher sur l'imposition de droits d'utilisation, sur une privatisation accrue et au bout du compte, sur la création d'un système à deux vitesses.

Pour les personnes qui sont à la retraite ou qui ont un revenu fixe ou faible, cela peut être un problème majeur, particulièrement alors qu'elles avancent en âge. L'ultime conséquence sera inévitablement l'éclatement des principes de la Loi sur la santé du Canada et de notre système unique de soins de santé, qui est reconnu comme l'un des principaux critères définissant le nationalisme canadien.

Nous avons présenté le même plaidoyer hier au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie qui se penche sur le régime des soins de santé au Canada, mais nous pensons qu'il est également opportun de tirer aussi la sonnette d'alarme devant une instance comme la vôtre.

Je dresserai très brièvement une liste des nombreuses questions que nous invitons le comité à examiner. Comme je l'ai dit, notre mémoire renferme une analyse plus détaillée.

Supplément de revenu garanti. Comme vous le savez, il s'agit d'un appoint à la Sécurité de vieillesse offerte aux personnes âgées à faible revenu. Nous recommandons une réforme en profondeur de tout le système du Supplément de revenu garanti ainsi que du système de retenues. Encore une fois, vous trouverez des suggestions et des recommandations dans notre mémoire.

En fait, nous pensons qu'il faut abaisser les retenues de 50 p. 100 pour les aligner sur le taux de retenue de 15 p. 100 applicable à la Sécurité de vieillesse. Je vous rappelle que les personnes âgées—qui sont plus d'un million—qui touchent la Sécurité de vieillesse et le Supplément de revenu garanti ont un revenu moyen de 12 648 $ par année. Tout ce qui est en sus est récupéré au taux de 50 p. 100.

Il faut également faire un meilleur travail de sensibilisation au sujet de ce programme, relever le seuil d'admissibilité et augmenter les versements. Nous avons avancé le même argument la semaine dernière devant le Comité permanent du développement des ressources humaines de la Chambre, mais encore une fois, nous jugeons bon de le réitérer ici.

En ce qui concerne la Sécurité de la vieillesse, nous recommandons, comme nous l'avons déjà fait dans le passé, de supprimer entièrement les retenues. Nous savons que le seuil de retenues grimpera graduellement, mais nous pensons que ce serait là un geste symbolique important. Cela permettrait aux personnes ayant des revenus de retraite élevés d'être imposées selon le taux d'impôt progressif en vigueur.

• 1910

Pour ce qui est des régimes d'épargne retraite, nous souhaitons que le gouvernement hausse le plafond des cotisations. Il est très important que ceux qui le peuvent puissent cotiser au- delà du plafond actuel de 13 500 $. La Coalition sur le revenu de retraite fera valoir le même argument demain, si je ne m'abuse, et nous appuyons sa démarche.

Je signale aussi qu'en ce qui a trait au FEER, Fonds enregistré de revenu de retraite, la réduction des taux d'intérêt de 2 p. 100 a eu une incidence marquée sur les personnes âgées ayant peu des revenus ou des revenus fixes. Le peu d'argent qu'elles avaient réussi à gagner grâce à leurs investissements a été réduit de moitié dans bien des cas, particulièrement pour ceux qui détenaient des certificats de placement garanti. Nous pensons que pour ce qui est du Fonds enregistré de revenu de retraite, le FEER, le taux obligatoire de retrait devrait être révisé et modifié pour s'aligner davantage sur les besoins des titulaires de cet instrument.

Il y a un autre domaine sur lequel je veux attirer votre attention, soit les fonds bloqués ou fonds de revenu viager. Ce sont des fonds disponibles pour les employés d'une société qui ont cotisé à un régime de pension et qui décident de partir. Ils sont autorisés à intégrer leurs fonds de pension dans leurs REER personnels. La réglementation fédérale sur les fonds de revenu viager pour les employés de sociétés relevant de la compétence du gouvernement fédéral n'a pas changé depuis deux ans. Nous recommandons fortement de les harmoniser avec les réformes les plus récentes apportées à la législation provinciale. Des changements importants sont survenus dans toutes les provinces, changements que le gouvernement fédéral n'a pas intégrés.

Il y a un autre domaine sur lequel nous souhaitons attirer votre attention, soit les préoccupations des Canadiens qui touchent des prestations de sécurité sociale des États-Unis, c'est-à-dire des Canadiens qui ont travaillé aux États-Unis et qui sont rentrés au Canada. Nous invitons instamment le gouvernement à reconsidérer le taux actuel de taxation de 85 p. 100 sur les prestations de sécurité sociale américaines versées à ces Canadiens et à le remplacer par un taux d'imposition plus progressif qui commence à 50 p. 100, ce qui est le seuil d'imposition en vigueur il y a quatre ans.

Nous recommandons aussi certaines réformes de l'impôt sur le revenu qui auraient une incidence considérable sur les personnes âgées, les aînées du Canada. Une initiative qui aurait un effet notable pour tout le monde serait de simplifier les formules d'impôt. On nous a dit que l'une d'elles renfermait une phrase qui faisait 42 pages, de sorte que j'estime qu'on devrait vraiment envisager de faire quelque chose. Les personnes ayant peu de revenus ne peuvent se permettre d'engager des fiscalistes pour remplir leur déclaration d'impôt. C'est un fardeau incroyable.

Nous recommandons que la cotisation des employés au Régime de pensions du Canada et au Régime de rentes du Québec soit exempte d'impôt. Nous recommandons également que les politiques d'impôt sur le revenu qui défavorisent les personnes âgées fassent l'objet de réforme; par exemple, je songe au niveau de revenu artificiellement élevé déterminé par le crédit d'impôt pour dividendes. Nous recommandons aussi d'harmoniser les conditions préalables à la rupture d'une union prévues dans les FEER et les pensions des employés avec le traitement accordé aux couples mariés pour ce qui est des REER et du RPC/RRQ.

Il y a autre chose qui nous préoccupe énormément, soit la situation des dispensateurs de soins non professionnels dans le système des soins de santé. Comme vous le savez, le système des soins de santé a connu une révolution en profondeur depuis 10 ans, passant des soins en établissement aux soins à domicile. La pierre angulaire de cette nouvelle version du régime est le soignant non professionnel, c'est-à-dire un membre de la famille ou une autre personne qui assure des soins à domicile pour des parents, des voisins et des amis.

J'attire votre attention sur les trois importants rapports que nous mentionnons dans notre mémoire. Le plus récent constitue le «carnet de notes» des soins à domicile au Canada. De façon générale, les soins à domicile n'obtiennent pas la note de passage à l'échelle du pays, en dépit de tout l'argent qui a été investi et de tous les changements survenus depuis cinq ou six ans.

• 1915

Pour améliorer le service névralgique qu'offrent les soignants non professionnels dans le nouveau régime de santé au Canada, nous recommandons au gouvernement fédéral d'adopter diverses politiques fiscales, entre autres celles qui figurent dans la documentation, plus précisément dans les rapports que j'ai mentionnés.

Il conviendrait d'augmenter le crédit d'impôt actuel accordé aux aidants naturels, qui s'élève à 450 $ par année environ et qui représente une somme minime que bon nombre d'entre eux paient de leurs propres poches.

Il faudrait également leur accorder une couverture élargie aux termes de l'assurance-emploi et du Régime de pensions du Canada. Environ 12 p. 100 des 500 000 à 800 000 aidants naturels doivent quitter leur travail pour assurer des soins à domicile à temps plein. Ce travail accompli, ils n'ont rien d'autre à leur actif qu'une dépendance vis-à-vis le supplément de revenu garanti, qui représente, comme je l'ai dit, une somme très peu élevée.

Nous estimons que les aidants naturels devraient recevoir une indemnisation directe.

À notre avis, il faut accroître le financement nécessaire à la concrétisation des autres recommandations figurant dans nos divers rapports et dans le dernier «carnet de notes» sur les soins à domicile.

Je voudrais maintenant parler du manque de logements locatifs abordables. Il existe au Canada une crise de logements locatifs abordables, une véritable pénurie. Dans la documentation que nous vous avons remise, vous trouverez un article intéressant intitulé «No Vacancy» dans notre magazine CARP News Fifty-Plus. Cette pénurie n'épargne aucune région du pays, y compris celle d'Ottawa. En fait, M. Calhoun prononcera d'ici deux semaines une allocution devant le Conseil sur le vieillissement à Ottawa au sujet des recommandations de CARP concernant la construction de logements locatifs.

Brièvement, nous souhaitons que votre comité recommande au ministre des Finances d'accroître le financement fédéral à long terme versé aux provinces afin qu'elles soient en mesure de fournir des subventions pour la construction de logements locatifs abordables. Nous recommandons également la création de crédits d'impôt, au lieu de se limiter simplement à des subventions à court terme. Nous préconisons de fournir aux provinces et territoires un financement destiné à des subventions pour logements locatifs à l'intention des Canadiens à revenu faible ou fixe. Il y a d'autres recommandations qui suivront sous peu lorsque nous rendrons public notre rapport sur le logement abordable.

La crise sévit maintenant et c'est maintenant qu'il faut agir. De nombreuses études ont déjà été effectuées. Dans notre bureau, je dirais que nous avons diverses études menées par différentes organisations qui font bien un pied de longueur sur les tablettes. Nous n'avons pas besoin d'études supplémentaires.

Permettez-moi de reprendre la déclaration de l'honorable Paul Martin, qui a dit ceci, en 1991, alors qu'il était dans l'opposition: «Tous les Canadiens ont droit à un logement décent, à un milieu de vie décent, à des prix abordables». À l'heure actuelle, il existe un vide en matière de politique et d'orientation fédérales. Seul le gouvernement national a les ressources financières pour réagir à l'ampleur des besoins qui existent au pays dans ce domaine. Ces propos, qui remontent à 1971, sont toujours d'actualité 10 ans plus tard.

Le manque de logements locatifs abordables a sans aucun doute joué dans le fait que le Canada est passé de la première à la troisième place dans le dernier rapport des Nations Unies sur la qualité de vie dans les pays du monde. Le premier ministre a reconnu que le gouvernement fédéral doit prendre des mesures positives pour lutter contre la pauvreté, ce qui englobe la l'accessibilité de logements abordables.

En conclusion, nous estimons que nos recommandations sont pratiques et réalisables, pour peu que le gouvernement décide de les mettre en oeuvre. Nous estimons qu'elles accorderont un traitement plus équitable à toutes les personnes âgées et assureront à celles qui subsistent à l'aide de revenu faible ou fixe un meilleur niveau de vie.

L'application de nos recommandations permettrait également aux personnes âgées d'augmenter leur pouvoir d'achat. En effet, les personnes âgées à faible revenu qui dépensent la plus grande partie de leur revenu à des achats de base—le loyer, par exemple—particulièrement dans un marché contracté, sont confrontées à un énorme problème. Une telle initiative stimulerait l'économie à un moment où les dépenses des consommateurs, qui sont le principal moteur de l'économie, sont plutôt mitigées.

Une partie des fonds que le gouvernement investira dans la réalisation de nos recommandations lui reviendront sous forme de taxes diverses. Nous croyons que nos propositions sont bénéfiques à toutes les parties.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Gleberzon.

Nous allons maintenant passer aux questions et réponses. Je vais accorder sept minutes à M. Epp et passer ensuite à M. Pillitteri et puis, je vous reviendrai.

M. Ken Epp: Merci, monsieur le président, et merci à tous nos témoins pour leurs exposés fort intéressants.

Le président: Pouvons-nous demander à M. Pillitteri de poser ses questions en premier? Est-ce d'accord?

M. Ken Epp: Bien sûr.

• 1920

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci. Je n'ai jamais demandé une telle faveur, monsieur le président, mais je dois partir.

Plus qu'une réponse à une question, je souhaite obtenir un commentaire. Soit dit en passant, monsieur Thompson, Paul Bonwick a demandé à un grand nombre d'entre nous de vous saluer. Vous avez énormément d'amis de ce côté-ci de la Chambre ce soir.

Dans les micro-brasseries, je crois savoir... Il y en a une dans ma circonscription de Niagara Falls. Outre cet entrepreneur, qui exploite une brasserie dans ma circonscription, on y produit aussi énormément de citernes. Ce secteur est présent dans tout le pays et il crée des emplois pour un nombre considérable de personnes. On y a acquis une expertise dans la fabrication afin de faire le produit.

Mais pour ce qui est de la fiscalité, à la lecture de votre exposé, je pense que l'industrie vinicole et l'industrie brassicole ne sont pas aux antipodes.

Dans notre secteur, deux groupes contrôlent 85 p. 100 du marché. Il y a un monopole avec la Régie des alcools, un monopole qui compte deux personnes, et ensuite, 85 p. 100 du marché est réparti entre quelques 80 groupes différents. En outre, quatre entreprises produisent quelque 20 millions d'hectolitres alors que les autres micro-brasseries—au nombre de 55—, n'en produisent que très peu. Ces entreprises emploient beaucoup de monde et non seulement pour ce qui est de la fabrication des produits nécessaires pour lancer ces entreprises. Elles touchent également les marchés locaux, non seulement sur le plan de la concurrence. Elles ont une résonnance sur la population des collectivités partout au pays. Souvent, elles mettent en marché un meilleur produit que les grandes entreprises. La raison en est qu'elles doivent être les meilleures pour être concurrentielles dans le secteur brassicole. C'est d'ailleurs la même chose dans d'autres secteurs, particulièrement le secteur vinicole.

Je suis tout à fait d'accord avec vous. D'ailleurs, j'en ai parlé longuement au ministre pour le convaincre de réduire cette taxe non seulement à 60 p. 100—ce que j'aimerais bien—mais 50 p. 100 pour les particuliers. Per capita, ces personnes emploient trois ou quatre fois plus de gens que l'industrie brassicole, qui en emploie moins.

En outre, j'estime qu'il devrait y avoir plus de fabricants de bières maison. Je n'aime pas qu'on les impose comme on imposerait les petites brasseries ou les petits établissements vinicoles. Cela dit, je souhaiterais qu'elles soient enregistrées pour que nous puissions voir quel est le véritable volume de leur production. Je crois savoir que lorsque certains permis sont délivrés, cela favorise la vente illégale. Je ne sais pas ce qu'il en est dans votre secteur, mais le mien certainement, on vend davantage de bières de fabrication bourgeoise que de bières légales dans certains endroits. Par conséquent, personnellement, j'aimerais que ces petites entités soient enregistrées pour connaître leur volume de production et pour qu'elles paient des droits minimes.

Êtes-vous d'accord avec moi? Que pensez-vous d'un tel système applicable aux fabricants de bière domestique? Notre but n'est pas d'imposer des gens qui ne peuvent se permettre d'acheter une caisse de douze ou de six bières. Mais je pense qu'il faut exercer un certain contrôle sur la bière de fabrication artisanale. Il faut que nous puissions pouvoir contrôler certaines choses que nous ne contrôlons pas à l'heure actuelle.

M. Howard Thompson: Je suis tout à fait d'accord avec vous. Chose certaine, les micro-brasseries emploient beaucoup de monde. Il y a un argument que j'ai oublié de faire valoir tout à l'heure soit que l'incidence de ce changement de la taxe d'accise sur les recettes du gouvernement fédéral est minime par rapport au revenu engendré par la taxe en général, simplement parce que ces micro-brasseries produisent peu de bière.

Par ailleurs, 97 p. 100 des brasseries au Canada sont de petite taille. Il s'ensuit qu'une telle initiative aurait un effet concret important pour un grand nombre d'entreprises.

• 1925

Pour ce qui est de la bière de fabrication domestique, nous savons qu'en Ontario, il se fait passablement de contrebande de vin et de bière. Notre position à cet égard n'a pas changé: si l'on peut aider à instaurer une industrie rentable et durable—et les petites brasseries représentent une telle industrie—cela contribue à une meilleure régie au sein de l'industrie. En effet, les gens portent attention à ce qui se passe, ils ont du succès et si les fabricants de bière domestique vont trop loin, cela sera plus apparent.

Je pense que vous avez raison: les gens devraient pouvoir être en mesure de fabriquer du vin ou de la bière chez eux. Je ne peux faire de commentaire sur le régime d'imposition qui devrait leur est appliqué. Ce n'est pas mon secteur. Sauf erreur, il existe des micro-brasseries qui participent à une industrie où le régime de distribution et de réglementation est axé vers les grandes entreprises. Ce que nous voulons, c'est assurer la reconnaissance de ces micro-brasseries au sein de l'industrie.

M. Gary Pillitteri: Je vous appuie totalement. Cependant, je ne veux pas toucher à la bière de fabrication domestique. En ce qui concerne ce qui est fabriqué à domicile, que ce soit du vin ou de la bière, je préfère m'abstenir. Toutes ces personnes qui s'inscrivent dans un registre, qui fournissent la levure et qui ont la bière le lendemain, voilà les personnes dont je parle et qui devraient être assujetties à un contrôle.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Pillitteri. J'ai été heureux de pouvoir vous rendre service.

Monsieur Cullen.

M. Roy Cullen: Merci beaucoup.

Je remercie tous les témoins. C'est vrai que Paul Bonwick m'a convaincu et ce, à l'aide de très bons arguments. D'ailleurs, j'y reviendrai dans un instant.

Monsieur Myers, vous avez parlé d'innovation. Le gouvernement s'intéresse au programme d'innovation d'Industrie Canada. Il semble que votre secteur mène à bien certaines initiatives et que vous pourrez faire rapport des résultats après le budget. Quelles mesures le gouvernement devrait-il prendre pour favoriser l'innovation?

Je ne sais pas si vous l'avez vu. Moi-même, je ne l'ai pas vu—je ne sais pas ce qu'il y a dedans, mais le gouvernement devrait-il considérer cela comme une priorité dans le budget qui doit être dévoilé au début de décembre? Vous n'avez pas eu la chance d'y réfléchir, je suppose.

M. Jayson Myers: Nous avons certainement cerné ce qui est prioritaire pour les membres. Je pense que l'objectif du programme d'innovation du gouvernement était de prendre certaines positions ou de recenser certaines mesures qui ne seraient pas nécessairement appliquées du jour au lendemain mais qui permettrait, en fait, de formuler ou de définir une stratégie en matière de promotion de l'innovation. Selon nous, cela va bien au-delà de la simple recherche et du développement mais concerne aussi la commercialisation et la stimulation réelle de la compétitivité des entreprises.

Je pense que nous avons une perspective de nos initiatives assez semblable à celle du gouvernement. En tant qu'association qui représente l'industrie dans tout le pays, nous sommes aussi dans une position unique pour pouvoir circonscrire les intérêts communs de l'industrie et les défis qu'elle devra relever, et pour commencer à rassembler non seulement des programmes et initiatives du gouvernement fédéral, mais aussi des initiatives provinciales—ce que nos organisations d'universitaires et de chercheurs et nos institutions financières font dans tout le pays—tout en entreprenant de dresser un programme de la manière dont les entreprises elles-mêmes pourront commencer à régler ces problèmes avec des mesures réelles, directes, sur place, dans le bureau de gestion.

Je ne vois pas ceci comme quelque chose qui vient après le fait. Je pense que c'est surtout une tentative pour commencer à rassembler ces initiatives et à faire qu'elles mettent un peu plus l'accent sur les préoccupations réelles des entreprises. Nos consultations sont vraiment axées là-dessus et ne visent pas à réinventer la roue en élaborant de nouveaux programmes, mais à trouver le moyen d'harmoniser ces programmes de manière à mieux les adapter à ce que font les entreprises et, aussi, d'autres administrations publiques.

• 1930

Nous avons collaboré étroitement avec Industrie Canada et DRHC dans la formulation de leurs stratégies.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Cullen. Je dois passer au suivant. Monsieur Epp, vous avez la parole.

M. Ken Epp: Merci beaucoup, monsieur le président.

J'aimerais d'abord m'adresser à la Coalition for the Elimination of Capital Taxes. Je suis très impressionné par l'unanimité que nous avons constatée dans cette série d'audiences du comité, puisque à peu près tous ceux qui sont venus représenter toutes sortes d'organisations d'entreprises ou de fabricants, ou qui ont des rapports avec eux, en ont fait un point à l'ordre du jour. Je pense qu'il y a un complot. C'est ce que je crois. C'est ma théorie: que vous avez décidé que tout le monde devrait venir nous bombarder d'arguments à ce propos.

J'ai une question à poser. Vous avez dit que ce serait probablement suffisant de procéder, disons, à une élimination progressive de la taxe sur cinq ans. Pourtant, certains témoins nous ont dit qu'en fait, si on pense à l'effet de stimulation qu'aurait cette mesure sur l'économie, la perte nette pour le gouvernement serait bien inférieure à ce milliard de dollars par année que rapporte cette taxe particulière. Vous avez même laissé entendre que ce pourrait être près de zéro, puisque cela pourrait stimuler l'économie au point d'y injecter au moins un milliard de dollars.

Avez-vous des faits pour étayer cette affirmation, puisque «vous êtes» la coalition et, probablement, l'organisation la plus pertinente pour représenter la coalition en matière d'impôt sur le capital ici? Que prévoyez-vous en fait de perte réelle pour le gouvernement? Et si c'est si peu, pourquoi ne dites-vous pas tout simplement «faisons-le et laissons tomber l'idée de l'élimination progressive sur cinq ans»?

M. Satya Poddar: Nous serions heureux que l'élimination soit immédiate. Pour ce qui est de la perte de revenu—si on en croit ces chiffres, que pour chaque dollar de recette fiscale vous perdez 7,00 $ de revenu—supposez qu'à l'échelle nationale, le gouvernement recueille 0,20 $ par dollar en taxes pour chaque dollar de production. Si les sept dollars de production qui sont perdus à cause des taxes étaient préservés grâce à l'élimination de l'impôt sur le capital, vous recevriez sept fois 0,20 $, soit 1,40 $. Pour chaque dollar de revenu d'impôt sur le capital auquel vous renoncez, vous auriez 1,40 $ en recettes fiscales supplémentaires à cause du supplément de production de 7,00 $.

Donc, si vous faites vraiment l'analyse selon un contexte dynamique, et si vous croyez les chiffres du ministère des Finances, vous pouvez avoir un coût du revenu net de zéro—ou même un chiffre positif, dans le sens où vous avez un gain plutôt qu'une perte de revenu.

M. Ken Epp: J'ai été étonné qu'en tant que coalition, vous n'ayez pas soutenu cette théorie un peu plus vigoureusement, parce que d'autres personnes l'ont fait.

M. Satya Poddar: Nous avons surtout essayé de nous faire l'écho des observations de notre président, alors j'ai pensé qu'assis sur le côté, il nous suffisait de dire «Nous sommes avec vous».

M. Ken Epp: J'ai des questions à poser au Conseil du commerce en détail. Tout d'abord, je le répète, je suis assez satisfait de certains aspects de votre présentation, en ce sens qu'elle ne le cède en rien à celles d'autres personnes. Les cotisations sociales tuent l'emploi—vous le dites bien. Vous suggérez cette exemption de 3 000 $ pour l'assurance emploi. Mais ce qui m'étonne vraiment, c'est que vous vous en preniez à la TPS, parce qu'il y a des économistes qui nous disent que la TPS—en fait, une taxe à la consommation, une taxe de vente—est une taxe plus efficace, c'est- à-dire qu'elle est moins nuisible à l'économie qu'un impôt sur le revenu. La plupart des autres favorisent une réduction de l'impôt sur le revenu: l'impôt personnel et l'impôt sur le revenu des sociétés. Vous, vous êtes de ceux, très rares, qui se disent favorables à une réduction de la TPS. Pourquoi cela?

M. Peter Woolford: Tout d'abord, c'est toujours agréable d'être innovateur, monsieur Epp, alors nous sommes ravis d'être à la tête du mouvement.

Je vous ferai remarquer que dans mes observations préliminaires, j'ai dit que nous accueillerions avec plaisir n'importe quelle mesure qui remettrait de l'argent dans les poches des consommateurs. Alors, certainement, quelle que soit la manière dont le gouvernement décide de s'y prendre pour le faire, nous l'appuierons.

Ce que nous avons fait, c'est que nous avons désigné la taxe sur les biens et services parce que c'est le domaine où, si un gouvernement veut prendre des mesures anticycliques, leurs effets sont visibles très rapidement dans le comportement des consommateurs et sur leur portefeuille. Ces effets se manifestent immédiatement après, avec chaque achat, et quand cet argent circule. De plus, puisque les consommateurs s'en rendent compte quand ils font leurs achats, nous pensons que c'est un meilleur incitatif.

• 1935

C'est pourquoi nous sommes allés en ce sens. Nous reconnaissons effectivement, comme je l'ai dit dans mes observations préliminaires, qu'une réduction d'un point est beaucoup actuellement.

M. Ken Epp: Une chose que vous avez dit ne pas appuyer, c'est que ce soit une mesure temporaire; ce devrait plutôt être une mesure à long terme. Cependant, je pense qu'en fait de stimulation immédiate de l'économie, si vous disiez aux consommateurs que la TPS prend 2 p. 100 de vacances, par exemple—«la TPS tombe à 5 p. 100 pour une période de, disons, six mois»—les gens se précipiteraient pour acheter des choses maintenant, parce qu'ils auraient un temps limité.

Est-ce que vous dites simplement «nous pensons à ce qui se passera dans six mois; nous ne voulons pas que l'économie freine à ce moment-là, lorsque la TPS remontera»—est-ce que c'est votre raison? Ou quelle seraient vos motifs?

M. Peter Woolford: C'est bien cela, monsieur Epp. Nous craignons qu'une réduction à court terme des taxes de vente comme celle-là ne provoque que des achats par anticipation. Comme je l'ai dit, nos membres craignent que la récession dure plus longtemps. Ils pensent que si vous ne faites cela que pour six mois ou moins, nous serions encore dans la phase profonde du cycle, et que lorsque cet incitatif disparaîtrait, après l'échéance, en fin de compte, nous subirions d'importantes pertes de ventes.

L'autre élément important cependant, qui, à mon avis, mérite d'être souligné, c'est que la TPS est une taxe sur la valeur ajoutée. Les détaillants sont habitués à ajuster leur taux de taxe et leur assiette fiscale au fur à mesure des changements de politique des ministres des Finances. Les autres partenaires de la chaîne d'approvisionnement—les grossistes, les importateurs, les fabricants—ne sont pas habitués à le faire et cela leur poserait beaucoup de difficultés. L'élimination de cette taxe pour une courte durée seulement provoquerait beaucoup de problèmes administratifs et d'inefficiences.

Ce que nous voulons, c'est faire comprendre que si le gouvernement souhaite réellement aller de l'avant avec une réduction temporaire de la taxe, il faut que ce soit pour une longue durée, pour avoir le temps de sortir de ces problèmes d'intensification du comportement et de coûts administratifs supplémentaires que cette mesure susciterait si elle n'était que de courte durée.

M. Ken Epp: Maintenant, j'aimerais parler un peu des brasseries. Je dois commencer par vous faire mes excuses. Je sais que cela peut paraître bizarre de quelqu'un qui a plus de 60 ans—et je suis content que M. Pilliterri soit parti—mais, de toute ma vie, je n'ai pas bu une seule goutte de bière. C'est tout simplement un choix que j'ai fait, et je l'ai maintenu. Ma femme dit que je suis très têtu.

Je pense que vous avez la vie facile. D'après mes calculs, et selon vos propos, vous avez pu persuader chaque adulte au Canada—moi compris—de boire 138 litres de bière par année. Il me semble que cela vous fait un revenu énorme. Je n'en sais pas grand chose, mais j'ai remarqué, dans les avions, que les gens de ma section qui achètent de la bière la payent 5,00 $, et c'est pour beaucoup moins qu'un litre.

Pourquoi vous plaindriez-vous du droit d'accise, que j'évalue à environ 0,30 $ le litre, d'après les chiffres que contient votre rapport? Est-ce que ce ne sont pas seulement—et je déteste le mot—que des jérémiades?

M. Sandy Morrison: Voulez-vous répondre à cela, en tant que propriétaire d'une microbrasserie, Howard, et André ensuite?

M. Howard Thompson: Bien sûr. Le Canada est un pays consommateur de bière. Il ne fait pas de doute que les gens du pays aiment à boire de la bière.

M. Sandy Morrison: Je n'en suis pas.

M. Howard Thompson: Je ne m'en excuserai pas. C'est une merveilleuse entreprise, et les petites brasseries représentent souvent des communautés qui sont hors des grands centres urbains. C'est un secteur à forte main-d'oeuvre. Nous employons beaucoup de gens. C'est aussi à forte teneur manufacturière, donc il y a beaucoup d'investissement.

Ce dont nous nous plaignons, c'est du fait que, oui, nous vendons beaucoup de bière par habitant au Canada, mais plus de 90 p. 100 de ces ventes se font par l'entremise de deux compagnies, d'excellentes compagnies canadiennes, et le taux des droits d'accise—en fait, la plupart des règlements et des situations fiscales qui touchent à l'alcool ou à la bière au pays—a été fixé d'après les activités de 13 grandes compagnies de l'industrie. Ce qui est apparu, c'est cette partie merveilleuse et distincte de l'industrie formée de petites entreprises, et le régime fiscal ne correspond tout simplement pas à la réalité des microentreprises de l'industrie de la bière.

M. Sandy Morrison: Ce que nous proposons, ici, c'est un allégement fiscal dont pourraient bénéficier 53 compagnies sur 57 mais qui, en fait, coûterait au Trésor moins de 2 p. 100 du droit d'accise. Ce sont ces petites compagnies que nous avons tenté de décrire, qui sont dans une situation critique—à cause des économies d'échelle, de la concurrence que leur font les produits importés de pays qui offrent ce genre d'incitatifs et de dégrèvement fiscal à leurs propres brasseurs et qui font une concurrence antiéconomique, en mettant nos microbrasseries dans une position vraiment désavantageuse.

• 1940

Ce que nous demandons est bien peu. Nos grandes compagnies l'appuient; elles ne demandent absolument pas d'allégement fiscal. C'est ciblé vers un très petit secteur qui représente 53 communautés de tout le pays et qui emploie beaucoup de gens et joue un rôle vital dans leur communauté et dans leurs provinces.

Je pense qu'André Dion, à Chambly, a fait une incroyable contribution à la communauté et dans la région qui l'entoure avec le développement d'Unibroue et ce qu'il a apporté à cette communauté. André, peut-être...

[Français]

M. André Dion: Je voudrais ajouter ceci. Au Canada, on boit en moyenne 71 litres de bière par année. Je vous ferai remarquer que dans certains pays, comme l'Allemagne, on boit 140 litres de bière par année. En Allemagne, il y a 2 135 brasseries, qui sont toutes des petites brasseries. Le plus gros brasseur allemand n'arrive qu'au 37e rang des brasseurs. Mais dans ce pays, on fait des bières de bonne qualité.

On remarque que dans les pays où on boit plus de bière, il y a moins de problèmes d'alcoolisme. On a des problèmes d'alcoolisme là où la vente des spiritueux est extrêmement élevée. Voyez ce qui se passe en Russie. Nous vendons maintenant nos produits en Russie. La Russie a connu de gros problèmes d'alcoolisme. Les jeunes adoptent maintenant la bière, et les grands dirigeants de la Russie considèrent qu'il s'agit d'une solution et préconisent que les jeunes boivent de la bière plutôt que des produits alcoolisés à 40 ou 45 p. 100.

Je voudrais vous faire remarquer que la bière existe depuis Jésus-Christ. Au Moyen-Âge, on recommandait même aux femmes enceintes de boire de la bière. Aujourd'hui, certaines compagnies ajoutent tellement de produits chimiques qu'on ne recommande plus aux femmes de boire de la bière. Il n'en demeure pas moins que la bière est un produit extrêmement intéressant pour l'ensemble du monde.

La moyenne nationale de consommation au Canada et aux États-Unis est comparable à la moyenne internationale. La compagnie Unibroue a adopté comme slogan: «Boire moins, boire mieux»; «Drink less, drink better». Voilà ce que nous disons à l'ensemble de nos clients un peu partout dans le monde.

Si nous devions un jour faire autre chose que de la bière, nous pourrions nous adapter. Mais la situation internationale est telle que vous voyez aujourd'hui sur les tablettes de tous les commerçants du Canada des bières importées. Il y en a beaucoup, comme la Corona, la Heineken, etc. Elles accaparent présentement 8 p. 100 du marché. Pourquoi? Parce qu'elles sont distribuées par des grands brasseurs qui contrôlent la distribution à l'intérieur du pays, et nous vivons une situation extrêmement décevante.

Depuis exactement huit ans, le gouvernement du Canada se plaint des Américains, affirmant qu'ils ne respectent pas les règles de l'ALENA en protégeant leurs petites brasseries. Le gouvernement américain répond toujours au gouvernement canadien de faire de même et de les laisser tranquilles. Depuis huit ans, nous espérons obtenir la parité des droits. Si les petites brasseries américaines payaient les mêmes taxes d'accise que nous, nous ne serions pas ici aujourd'hui. Nos situations sont complètement différentes, car pour eux, il n'y a plus de frontière. On peut voir Sam Adams vendre de la bière ici, à l'heure actuelle, et être extrêmement avantagé sur le plan fiscal, ses taux de taxe d'accise étant réduits de 60 p. 100. Il paye 9c. le litre comparativement à 28c. le litre. Il n'y a pas de frontière. Il faut se battre contre quelqu'un à un moment donné. À armes égales, nous sommes capables de nous battre. Vous avez fait un choix. J'ai aussi fait un choix, celui de fabriquer de la bière, et de la bonne bière.

[Traduction]

M. Ken Epp: Vous dites qu'une taxe de 0,30 $ représente 50 p. 100 du prix de gros de votre produit; c'est bien ce que vous dites? Parce que d'après vos chiffres sur la taxe...

[Français]

M. André Dion: Toutes les taxes, dans le domaine brassicole, représentent 58 p. 100 du prix de vente. Les taxes d'accise représentent 16 p. 100 du prix de vente, tandis qu'aux États-Unis, elles n'en représentent que 4 p. 100. Une petite brasserie installée au Canada paie quatre fois plus de droits d'accise qu'une petite brasserie installée aux États-Unis—je peux les nommer toutes—, à Boston et à New York, et cinq fois plus qu'une petite brasserie qui oeuvre en Californie. Nous devons nous battre contre ces brasseries. Il n'y a plus de frontière. Cela constitue un avantage pour eux, et nous disons que cela fait assez longtemps que nous attendons. S'il vous plaît, donnez-nous la parité. C'est tout ce que nous voulons.

[Traduction]

M. Ken Epp: Je vous remercie.

J'ai une question à poser à l'Association of Retired Persons. J'ai entendu, en tant que député, différentes personnes venues nous exposer leur situation, qui connaissaient de grandes difficultés à cause de la retraite. Ces gens-là n'ont pas assez de revenus. Ceux qui ont des REER trouvent que le taux d'impôt est tellement élevé qu'ils craignent de manquer de capital, et cela arrive à certains. Ils s'inquiètent de ce qu'il va arriver. Il y a beaucoup d'angoisse, à ce que j'entends.

Une chose que je suis assez étonné de ne jamais avoir entendu des groupes—peut-être est-ce que je prête l'oreille aux cinq personnes les moins pertinentes de ma circonscription, mais j'entends beaucoup de choses, surtout de veuves dont les revenus sont, très souvent, réduits de moitié au décès de leur époux. C'est probablement ce qui concerne les prestations de retraite du gouvernement, moins, bien entendu, la mince prestation de décès qui est versée si c'est sur le Régime de pension du Canada.

• 1945

Je me demande si vous avez quelque chose à dire à ce sujet particulier, au sujet de la retraite. Lorsque deux personnes vivent ensemble pendant 70 ans et l'une d'elle meurt, est-ce que ce revenu devrait être ajusté à ce qu'il en coûte réellement de tenir un appartement, ou quoi que ce soit d'autre?

M. William Gleberzon: La situation, aujourd'hui, c'est que la majorité des bénéficiaires du Supplément de revenu garanti sont des femmes âgées, et le taux de pauvreté dans ce groupe est parmi les plus haut du pays.

Maintenant, c'est beaucoup mieux qu'il y a, disons, 20 ans, grâce aux prestations de pension de l'État. Cela ne fait pas de doute.

Cependant, par exemple, le montant de base du Supplément de revenu garanti n'a pas été révisé depuis 15 ou 20 ans.

Alors ce que nous disons—et nous l'expliquons en détail dans notre mémoire—c'est qu'il faut entreprendre un examen fondamental d'envergure. Il s'agit de femmes qui ont choisi de rester au foyer. Elles sont d'une génération dont les femmes ne travaillaient pas, généralement, et dans leurs vieux jours, comme vous l'avez dit, lorsque leurs maris meurent, elles doivent subsister avec le minimum absolu.

Le seuil de faible revenu, au Canada, se situe à environ 17 000 $, et ici, il y a un grand pourcentage de femmes qui vivent avec, disons, seulement 12 500 $. Ceci nous préoccupe beaucoup, et nous avons fait plusieurs exposés à ce comité, à M. Martin, et à d'autres, sur la nécessité de changer cela et d'améliorer cette situation.

M. Ken Epp: Alors nous ne devons pas interpréter le fait que vous n'en ayez pas parlé cette année comme signifiant que le problème est maintenant résolu?

M. William Gleberzon: Oh, non.

M. Ken Epp: C'est seulement que vous aviez plusieurs autres problèmes.

M. William Gleberzon: C'est vraiment une question de temps. Nous avions peu de temps, donc nous ne pouvions pas parler de tout ce qui nous préoccupe. Mais si vous regardez notre mémoire, vous verrez à l'annexe 1 un important exposé sur la nécessité de rehausser le Supplément de revenu garanti et la manière dont cela peut être fait de manière équitable pour tout le monde.

Le président: Merci, monsieur Epp.

M. Ken Epp: Et merci à vous, monsieur le président.

Le président: Madame Bourgeois.

[Français]

Mme Diane Bourgeois: Merci, monsieur le président. Messieurs, bonsoir. Je vais essayer d'être brève.

Monsieur Dion, j'ai beaucoup apprécié votre présentation, ainsi que celle de M. Thompson. Si j'ai bien compris, vous vous appuyez mutuellement.

Vous avez parlé de 19 petits brasseurs québécois. Je ne sais pas si mes chiffres sont exacts. J'aimerais savoir combien il y en a en Ontario, puisque M. Morrison a parlé de 53 petites entreprises. J'aimerais aussi que vous me disiez brièvement pourquoi, d'après vous, le Canada refuse de vous accorder la parité au niveau de la taxe d'accise. J'aimerais aussi savoir si vous croyez que l'ALENA aura des répercussions encore plus graves pour vous. Cela termine les questions que je voulais vous poser.

Je voudrais maintenant poser une question à M. Penney.

Monsieur Penney, si je ne me trompe pas, vous travaillez pour General Motors. Je représente la circonscription de Terrebonne—Blainville. Dans notre comté, il y a une usine de General Motors qui doit cesser ses activités incessamment. Si j'ai bien compris, votre groupe, tout comme M. Poddar, défend la position voulant que les pires taxes qui puissent exister sont les taxes sur le capital et demande que vous soyez exemptés de ces taxes.

Je me fais l'avocat du diable. Vous avez reçu énormément de subventions. Compte tenu de ces subventions, n'est-il pas un petit peu normal que vous deviez payer des taxes sur le capital?

Je m'adresse maintenant à M. Myers, qui a parlé au nom des Manufacturiers et exportateurs.

• 1950

Premièrement, vos membres connaissent-ils des difficultés dans le domaine du bois d'oeuvre, de l'acier et de ses sous-produits?

Deuxièmement, je ne crois pas avoir de copie de votre mémoire. Pourriez-vous m'en faire parvenir une? Cela serait intéressant. J'imagine que, compte tenu des problèmes que vous vivez actuellement, l'ALENA pourrait vous causer des problèmes. J'aimerais que vous me fassiez part de vos impressions.

Finalement, je voudrais poser une question au représentant des personnes âgées. Vous avez parlé d'améliorer les conditions de vie des personnes du troisième âge. Selon vos estimations, combien y a-t-il, dans tout le Canada, de personnes du troisième âge qui vivent sous le seuil de la pauvreté actuellement?

Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Avec qui voulez-vous commencer?

Avec monsieur Dion.

[Français]

M. André Dion: Madame, il existe 20 petites brasseries régionales en Ontario, 20 dans l'Ouest du Canada, dont notre amie Big Rock qui appartient à M. Bob King dans la région de Calgary—et deux dans les Maritimes.

Je vois que vous représentez le comté où est située une belle brasserie régionale, Les Brasseurs du Nord—Boréale, qui est évidemment à nos côtés pour se battre pour sa survie, elle aussi.

Parlons maintenant de l'ALENA. Nous avons un problème depuis un bon bout de temps. L'ALENA a permis la libre circulation des biens. Dans les circonstances actuelles, cela est un peu catastrophique pour nous puisque nous ne pouvons pas nous défendre à armes égales avec les petites brasseries américaines.

Nous avons donc vérifié si le gouvernement canadien pouvait, lui aussi, accorder des privilèges spéciaux aux petites brasseries. M. Pettigrew, le ministre du Commerce international, nous a assurés que son ministère ne s'opposait d'aucune façon à ce que ces mêmes privilèges soient accordés aux petites brasseries canadiennes.

Nous n'avons donc pas peur de l'ALENA, car nous sommes capables de fabriquer des produits extrêmement avantageux par rapport à d'autres. Nous voulons pouvoir les vendre ou les fabriquer à des prix compétitifs en obtenant les avantages que les petites brasseries américaines ont et dont nous ne bénéficions pas à l'heure actuelle.

[Traduction]

Le président: Qui vient ensuite?

M. David Penney: Pour répondre à votre question sur les subventions, il est vrai que nous en avons eu dans le passé, en particulier au Québec, mais en échange, nous avons fait certains investissements et les avons maintenus conformément aux modalités et aux conditions liées aux subventions. Alors je ne pense pas ce paiement d'impôt sur le capital constitue en aucun cas une rétribution pour ces subventions. Les investissements ont été faits pour avoir droit à ces subventions.

Le problème, en ce qui concerne les taxes sur le capital, vient plus du fait qu'il décourage les investissements, du moins en ce qui concerne une multinationale comme General Motors. L'un des problèmes au sujet de la prise de décision relativement à l'emplacement des usines est qu'il faut être aussi bon que son concurrent. Notre concurrent, ce sont les États-Unis, et les États- Unis n'imposent pas de taxes sur le capital.

Là encore, ce que nous voulons dire, c'est que le Canada doit avoir un régime fiscal aussi avantageux que celui des États-Unis. Nous avons un problème structurel anormal en ce qui concerne l'impôt sur le capital, et c'est pourquoi nous voulons l'éliminer.

Le président: Qui d'autre voudrait commenter cela?

Monsieur Myers.

M. Jayson Myers: Oui, je voulais d'abord dire que je crois que notre mémoire a été distribué au comité. Nous nous assurerons que vous l'avez.

Je n'ai pas compris la première question. Est-ce qu'il s'agissait de l'industrie des produits du bois?

[Français]

Mme Diane Bourgeois: Nous savons qu'il y a beaucoup de problèmes dans les domaines du bois d'oeuvre, de l'acier et de ses sous-produits. Cela vous touche-t-il beaucoup et que comptez-vous faire?

[Traduction]

M. Jayson Myers: Il y a des problèmes avec ces industries. Tout d'abord, il y a des problèmes qui sont causés par le ralentissement de l'économie, et les producteurs de biens ont été particulièrement touchés. Ce n'est pas un marché, en ce moment, cependant, qui est uniquement touché par la baisse de la demande ces produits. Comme dans beaucoup d'autres secteurs, le problème est qu'il y a une telle surcapacité et une telle compétition que les prix sont poussés à la baisse, et dans certains secteurs, à cause des importations qui entrent au pays, les prix sont poussés à la baisse tandis que les coûts de l'entreprise montent. C'est pourquoi il y a de telle pressions sur le résultat net actuellement et pourquoi la restructuration revêt tellement d'importante. Certaines compagnies sont en mesure de se restructurer, d'autres ne le peuvent pas et font face à de grandes difficultés financières attribuables à la situation actuelle.

• 1955

Il y a un troisième groupe de problèmes, cependant, qui concernent les frontières. Il est certain que l'industrie du bois débité de résineux dans tout le Canada s'inquiète à juste titre de l'entrée en vigueur de droits à la frontière du Canada avec les États-Unis, ou d'autres pénalités, comme un droit anti-dumping, pour l'entrée de ce produit aux États-Unis. Les répercussions de tout ceci sur les producteurs de bois du Canada pourraient être, et seront, très graves. Cela touche à d'autres préoccupations que nous avons relativement à plusieurs conflits commerciaux avec les États-Unis qui sont devenus politisés, tandis que sont dressés de nouveaux obstacles au commerce et à l'accès à cet important marché.

Alors, oui, il y a un problème. Peut-être puis-je demander à John Allinotte de parler particulièrement de certains des problèmes commerciaux de l'industrie de l'acier.

M. John Allinotte (directeur, Coalition for the Elimination of Capital Taxes): Oui, nous n'en avons pas parlé dans notre mémoire, mais c'est avec plaisir que j'expliquerai au comité les répercussions des décisions récentes du Tribunal canadien du commerce extérieur. Il a décrété que l'industrie canadienne de l'acier n'avait pas subi de dommages en raison du dumping d'acier laminé à froid dans notre pays.

Le comité connaît très bien les règles d'application d'une loi, que ce soit une loi fiscale ou financière. En plus d'être mise en vigueur, elle doit être administrée de telle manière que son intention soit ressentie dans notre pays.

Ce que nous voyons, en ce qui concerne les lois commerciales que nous administrons ici, au Canada, et la décision la plus récente au sujet de l'acier laminé à froid qui est dumpé chez nous, c'est que c'est au détriment des producteurs d'acier canadiens. De fait, le Tribunal, pour prendre sa décision et soutenir les arguments selon lesquels il n'y pas eu de dumping, s'est fié sur nous, la compagnie qui m'emploie, parce que nous faisons des profits et que nous sommes l'une des rares compagnies d'acier qui soit rentable au pays. Nous n'avons pas subi de dommages.

Nos marges ont été réduites de 70 p. 100 parce que nous avons dû harmoniser nos prix avec ceux de l'acier qui entre au pays, et je peux vous dire, bien que le problème d'échange commercial ne relève peut-être pas du comité des finances, qu'il conviendrait de rappeler à vos collègues qu'une saine compagnie d'acier a fait beaucoup dans le passé pour le Canada et continuera de faire beaucoup dans l'avenir. Alors je vous remercie pour votre question.

Le président: Merci, madame Bourgeois.

Madame Leung.

Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je pense que vous avez tous présenté de solides arguments relativement à l'allégement fiscal. Nous avons tous entendu votre message clairement. Nous savons que nous faisons actuellement face à une hausse de la dépense nationale sur l'armée, la défense et la sécurité, en plus de notre engagement vers la santé et l'éducation. Supposons que nous acceptions certaines de vos recommandations mais que nos choix nous fassent replonger dans le déficit. J'ai entendu certains d'entre vous dire aussi que les Canadiens se sont sacrifiés pendant de nombreuses années pour sortir du déficit. Alors ceci m'intéresse. Y en a-t-il qui sont prêts à retomber dans le déficit? Il vous suffit de répondre par oui ou par non.

Le président: Un à la fois. Nous allons vous donner la parole à tour de rôle.

• 2000

Mme Sophia Leung: Oui, à tour de rôle.

J'aimerais connaître votre avis parce que certains de vos arguments sur les réductions d'impôt sont excellents. Je suis parfois d'accord avec vous, mais j'aimerais savoir quelles sont les autres conséquences.

M. Satya Poddar: Si je peux me permettre, il n'est pas tellement question de réduire les impôts que de corriger la structure fiscale.

L'impôt sur le capital n'a pas sa place. C'est une double imposition, un impôt sur une des ressources productives de l'économie, c'est-à-dire l'investissement. Pour répondre à la question, une taxe de cette nature peut coûter beaucoup plus cher que ce qu'elle rapporte au gouvernement. Ainsi, dans certains cas, qu'il y ait déficit ou non, les gouvernements doivent veiller à ce que le régime fiscal soit concurrentiel et rationnel, et je pense qu'on peut régler les questions de gestion des recettes sans se demander si le gouvernement du Canada peut se le permettre étant donné que le déficit est un problème important et que les coûts liés aux recettes sont énormes. Il faut choisir le moment...

Mme Sophia Leung: Mais je veux entendre...

M. Satya Poddar: ...mais envoyer un message clair aux investisseurs pour indiquer que cet impôt néfaste va disparaître.

Merci.

M. Jayson Myers: Je dirais d'abord que le gouvernement travaille à partir d'hypothèses de planification budgétaire qui tiennent compte des réductions fiscales qu'il a déjà promises. Je pense que c'est important d'y donner suite.

Ensuite, vous avez tout à fait raison de dire qu'il serait nécessaire de dépenser davantage dans d'autres secteurs. Les dépenses des programmes de soutien du revenu vont aussi augmenter et particulièrement celles de l'assurance-emploi avec la hausse des taux de chômage.

Je pense que nous convenons que toutes les réductions d'impôt sont importantes, mais je dirais du moins que l'ensemble de nos membres préféreraient qu'on reporte certaines de ces réductions jusqu'à ce que nous soyons sûrs que le budget n'est pas déficitaire.

Cela dit, il est aussi très important que le ministre des Finances examine les programmes de dépenses actuels parce que, dans bien des cas, je pense qu'on pourrait attendre que la situation économique se soit améliorée avant d'engager certaines dépenses importantes.

Le président: Monsieur Morrison.

M. Sandy Morrison: J'aimerais simplement faire remarquer que, dans notre industrie, sur chaque dollar de nos ventes au détail, 55c. sont versés en impôt.

C'est avec beaucoup de prudence que nous formulons cette demande qui s'applique à une très petite partie de notre industrie mais qui, tout en représentant une baisse de revenu très modeste pour le gouvernement, aurait un effet considérable pour assurer la viabilité économique des petites entreprises en activité dans le pays. Donc, c'est très raisonnable.

Nos grandes entreprises qui produisent plus de 90 p. 100 de la bière vendue au Canada ne demandent aucune réduction et je pense qu'elles sont en général très favorables aux mesures prises par le gouvernement pour éliminer le déficit et qu'elles ne voudraient pas qu'on se retrouve en déficit.

[Français]

M. André Dion: Je voudrais simplement poser une question à madame. Qui va payer pour les soldats, qui va payer pour la sécurité sociale, qui va payer pour la santé si les entreprises canadiennes doivent disparaître à cause d'un mauvais système de contributions fiscales, qui ne nous permet pas de tenir tête à la concurrence étrangère? La question est aussi là.

[Traduction]

Mme Sophia Leung: Je veux revenir sur ce que M. Myers a dit au sujet...

Le président: Je pense qu'il a posé une question.

J'imagine que vous avez eu la réponse. Elle est d'accord avec vous.

Mme Sophia Leung: Je vous ai posé une question.

Le président: Posez une dernière question.

Mme Sophia Leung: Vous avez exprimé des préoccupations au sujet des échanges transfrontaliers. Je suis très heureuse que la coalition s'intéresse à la question et que l'ADRC ait déjà pris l'initiative de s'attaquer au problème.

• 2005

Nous avons adopté récemment le projet de loi S-23 et je suis la secrétaire parlementaire de la question. Vous êtes probablement déjà au courant de la bonne nouvelle, et nous avons l'intention d'adopter beaucoup de nouveaux programmes pour accélérer le transport des produits et des personnes. D'ailleurs, notre ministre s'en va à Washington ce soir. Nous travaillons en collaboration avec vous depuis un bon moment et nous serions vraiment heureux que vous conjuguiez vos efforts aux nôtres avec les gens d'affaires.

Merci.

Le président: Merci.

M. Roy Cullen: Merci, monsieur le président.

Je sais qu'il se fait tard. Je ne vais pas vous soumettre toutes les questions que j'avais en tête. Je vais en poser quelques-unes, peut-être seulement pour la forme étant donné que le président et tout le monde veulent partir.

Monsieur Gleberzon, la liste que vous avez présentée est longue et se chiffre—d'après l'addition rapide que j'en ai faite—à plusieurs millions et peut-être à des milliards de dollars. Compte tenu de la capacité financière actuelle du gouvernement, si vous pouviez choisir un des éléments de la liste, quel serait-il? Ce serait intéressant de savoir.

Monsieur Penny, pour ce qui est de l'impôt sur le capital... [Note de la rédaction: Difficultés techniques]...il n'y a pas vraiment de justification générale, mais je crois comprendre qu'il rapporte environ un milliard de dollars par année. En fait, les provinces perçoivent à peu près trois ou quatre fois cette somme. Mais je pense qu'il est intéressant que vous disiez que le moment est peut-être bien choisi pour faire savoir, particulièrement pour ce qui est des échanges transfrontaliers, que l'impôt sur le capital devrait disparaître.

Si le gouvernement fédéral prenait l'initiative d'annoncer son élimination progressive, je ne suis pas sûr que les provinces emboîteraient le pas. Il serait important qu'elles le fassent, mais nous ne pouvons pas toujours les attendre. Je trouve que votre contribution au débat est intéressante.

Je vais devoir passer rapidement aux brasseries. Vous avez présenté des arguments solides. Au sujet de la concurrence, il y a différents éléments en cause: une micro-brasserie américaine prendra sa part de marché, les actionnaires s'attendent à un rendement raisonnable et les micro-brasseries canadiennes pourraient décider d'investir aux États-Unis plutôt qu'au Canada si la taxe d'accise est néfaste sur le plan concurrentiel. Pourriez- vous, messieurs Dion et Thompson, expliquer exactement quel est le problème auquel vous êtes confrontés en matière de concurrence.

M. Howard Thompson: Dans le mémoire qui a été présenté, nous comparons une micro-brasserie canadienne à une micro-brasserie américaine, en présumant que chacune d'entre elles exporterait 10 p. 100 de son produit. M. Dion peut expliquer ce qui se passe dans la réalité étant donné qu'il s'occupe beaucoup d'exportation.

On montre très clairement qu'une brasserie canadienne paiera 27 et presque 28 $ l'hectolitre en taxe d'accise alors que la brasserie américaine paiera 11 $ l'hectolitre. C'est une différence de 16 $ l'hectolitre dont le micro-brasseur américain peut profiter pour être plus concurrentiel sur le marché dans son pays et dans le nôtre. Nous n'avons pas droit au même traitement.

M. Roy Cullen: [Note de la rédaction: Inaudible]

M. Howard Thompson: Tout à fait. Parmi les produits importés en Ontario, 15 viennent de micro-brasseurs américains qui profiteraient de l'allégement de la taxe d'accise américaine.

M. Roy Cullen: C'est ce que vous indique la part de marché occupée par les micro-brasseurs américains au Québec et en Ontario.

M. Howard Thompson: Tout à fait.

M. Sandy Morrison: Les importations ont en général plus que doublé depuis 10 ans, tandis que la part de marché des micro- brasseurs canadiens n'a essentiellement pas progressé. Un micro- brasseur américain peut, sur le plan fiscal, se battre à armes égales au Canada, tandis qu'un micro-brasseur canadien qui vend son produit aux États-Unis doit payer près de trois fois plus de taxes que son concurrent américain.

On s'est demandé si l'ALENA n'était pas en cause. L'ALENA ne pose pas de problème mais les Américains ne le respectent pas. Ils appliquent des dispositions fiscales discriminatoires pour favoriser leurs micro-brasseurs et pénaliser les brasseurs canadiens. C'est la raison pour laquelle nous demandons d'équilibrer la situation.

M. Roy Cullen: Merci.

• 2010

Le président: Madame Bennett.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Je voulais simplement poser une question aux témoins de l'ACIR. Vous regroupez 4 000 membres. De quelle façon les politiques sont-elles élaborées au sein de votre association? Les recommandations tiennent-elles compte des différences de sexe, étant donné que deux hommes sont venus témoigner ce soir?

Au sujet du crédit aux aidants naturels, l'Association nationale de la femme et du droit a dit être préoccupée par le fait que bien souvent les soins sont fournis par les femmes mais que le crédit d'impôt est versé à l'homme. L'association a demandé s'il n'était pas possible de s'assurer que le montant de 450 $ ou l'augmentation demandée est vraiment versée aux personnes qui fournissent les soins.

Même si vous vous vantez de ne pas recevoir de fonds d'exploitation du gouvernement, je constate que chacune de vos conférences est bien financée par Environnement Canada, Industrie Canada et Santé Canada. Je sais qu'il ne s'agit pas d'un budget de fonctionnement, mais le document d'information semble un peu trompeur, peut-être, à ce sujet.

M. William Gleberzon: Vous avez posé une question au sujet de notre mode de fonctionnement. Nous comptons 400 000 membres, et je peux vous dire qu'une grande proportion d'entre eux nous font part de leurs préoccupations. Toutes les préoccupations...

Mme Carolyn Bennett: Savez-vous dans quelle proportion vos membres ont accès à Internet?

M. William Gleberzon: Quelle proportion? Non, mais je sais qu'environ 18 p. 100 des personnes âgées ont accès à Internet. Je ne connais pas le pourcentage de nos membres qui y ont accès, mais la communication ne se fait pas seulement par Internet, mais par téléphone, lettres et fax. Seulement une partie des échanges se font par Internet, même si c'est très long de répondre aux courriels.

De toute façon, nous réagissons. Nous faisons écho à ce que les gens nous ont dit dans l'ensemble du pays. Toutes les questions que j'ai exposées—et M. Cullen m'a demandé de les classer par ordre de priorité—sont préoccupantes d'après ce que les gens nous ont dit.

Encore hier, comme j'ai travaillé pendant la fin de semaine et les deux jours précédents et que je n'avais pas eu l'occasion de lire mon courrier électronique, j'ai eu à répondre à 70 courriels, ce qui n'est pas rare, envoyés par des gens sur différents sujets. Ce sont les problèmes dont ils nous font part, et nous vous exposons ce qu'ils nous ont dit.

S'il fallait que je les classe par ordre de priorité, la question du supplément de revenu garanti serait en tête de liste. C'est très important pour beaucoup de gens. Ensuite viendraient le logement abordable et les aidants naturels. Pour ce qui est des aidants naturels—pour répondre en partie à ce que M. Cullen a demandé—beaucoup de nos propositions ne vont rien coûter au gouvernement. Par exemple, pour ce qui est des gens qui doivent quitter leur emploi et n'ont pas droit à l'assurance-emploi ou aux prestations du RPC, nous demandons seulement, aux fins du RPC, de leur offrir la même protection que celle que reçoit une mère qui a un enfant. Pendant les sept premières années, elle ne cotise pas, et nous demandons que les mêmes dispositions soient prises afin de permettre aux gens de contribuer au régime pour qu'à la retraite ils reçoivent des prestations du RPC qui en tiennent compte. Ce n'est pas vraiment une dépense.

J'essaie de répondre aux deux questions en même temps.

Pour ce qui est du fonds de fonctionnement, comme vous l'avez dit, nous n'en recevons pas. Nous recevons—et c'est nouveau—des subventions de divers ministères qui s'adressent à nous. Nous pensons que c'est nécessaire pour les soins à domicile ou l'environnement. Nous recevons aussi des subventions du secteur privé. Nous ne sommes pas difficiles. Nous acceptons l'argent qu'on nous offre parce que nous croyons en faire bon usage.

Vous avez demandé comment nous pouvons garantir que les crédits d'impôt sont versés à ceux à qui ils s'adressent. Pour beaucoup d'aidants naturels, le crédit d'impôt ne changera rien parce qu'ils n'ont aucun revenu. Les soins dispensés par les aidants naturels coûtent beaucoup moins cher que ceux offerts par les établissements. Pourquoi? Parce que 80 p. 100 des dépenses des établissements sont attribuables aux coûts de main-d'oeuvre. On ne paie pas les aidants naturels pour le travail qu'ils fournissent 24 heures par jour, sept jours par semaine, tant que c'est nécessaire.

• 2015

Nous disons qu'il faut une meilleure équité. Et si on pense à plus long terme, quand les aidants naturels ont fini de dispenser les soins nécessaires—ce qui peut représenter cinq ou dix ans dans le cas d'un adulte malade—ils ne peuvent plus trouver d'emploi et ont épuisé leurs économies.

Comme M. Epp l'a dit, leur mari—ce peut être un mari ou une femme... Il reste que 80 p. 100 des aidants naturels sont des femmes et qu'il y a toujours environ 43 p. 100 des femmes âgées qui vivent dans la pauvreté.

Le président: Monsieur Penney.

M. David Penney: J'aimerais répondre.

Monsieur Cullen, vous avez parlé des provinces. Le gouvernement fédéral voudrait que les provinces prennent certaines initiatives au sujet de l'impôt sur le capital.

J'aimerais vous faire remarquer que le gouvernement de la Colombie-Britannique a réduit son impôt sur le capital qui sera éliminé d'ici 2002, l'Alberta a aboli complètement l'impôt sur le capital et l'Ontario a accru le seuil à partir duquel il s'applique. Le ministre des Finances de l'Ontario, M. Flaherty, a qualifié l'impôt sur le capital en Ontario de tueur d'emplois. La province s'est engagée aussi à l'éliminer.

Les provinces ont donc pris des initiatives. Nous demandons au gouvernement fédéral d'éliminer l'impôt sur le capital pour les mêmes raisons.

Le président: Merci beaucoup.

Je vais profiter de ce mot de la fin, si vous me le permettez, pour vous exposer certaines réflexions que j'ai faites au cours des quelques semaines et mois pendant lesquels nous avons consulté les Canadiens et vous indiquer certains des éléments qui recueillent déjà l'accord de tous ceux réunis autour de la table.

Ce qui est certain, c'est que nous allons transmettre certains messages avec insistance. D'abord, nous ne voulons pas nous retrouver en déficit. Nous devons prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter le déficit, parce que nous savons quel est son impact sur les consommateurs et les entreprises. Cela se passe de commentaire.

Nous voulons maintenir le plan de réduction des impôts de 100 milliards de dollars—c'est fondamental pour nous—et le transfert fédéral aux provinces qui figure dans l'énoncé d'octobre 2000 pour ce qui est des soins de santé et de l'éducation.

Le comité est aussi fermement résolu à appuyer les initiatives du gouvernement en matière de sécurité nationale. Nous avons constaté que, dans l'ensemble du pays, les Canadiens ont besoin de retrouver un sentiment de sécurité. Une économie ne peut pas bien fonctionner si les particuliers et les entreprises ne se sentent pas en sécurité. C'est très important.

Nous sommes très conscients du fait que, selon la façon dont l'économie va évoluer, il se peut que nous ayons à envisager de réduire, reporter ou réaffecter certaines des dépenses prévues pour procéder à d'autres dépenses. C'est une forte possibilité. Nous allons peut-être avoir à faire d'importants compromis de ce genre.

Il s'agit là de problèmes immédiats. Je ne veux pas que les gens partent d'ici en pensant que nous nous préoccupons seulement des problèmes immédiats qui découle des événements du 11 septembre. À long terme, je tiens à préciser clairement que notre comité est déterminé à favoriser la croissance.

Cela veut dire que nous allons recommander des politiques qui visent à améliorer la productivité de notre pays et le niveau de vie des Canadiens, parce que nous sommes bien conscients des défis que nous avons à relever sur ces deux plans. Cela rejoint les questions que beaucoup d'entre vous ont soulevées, comme l'impôt sur le capital et les problèmes des micro-brasseries.

• 2020

Nous en sommes très conscients et nous allons tout faire pour assurer le succès des entreprises et des particuliers canadiens.

Vous pouvez être assurés que notre comité veille à ce que le Canada continue d'être ou devienne une terre d'avenir. C'est ce qui va attirer les gens, les rendre prospères et nous assurer la qualité de vie à laquelle nous avons tous été habitués.

Je tiens à vous signaler qu'il a été grandement question, au cours de nos déplacements, des rapports que nous entretenons avec les États-Unis d'Amérique, ce qui est nouveau. Les événements du 11 septembre nous ont en quelque sorte amenés à redéfinir ces rapports. Ils ont mis en évidence certaines situations, comme le fait que nos camions sont arrêtés à la frontière... Ils nous ont également fait comprendre à quel point nos économies sont intégrées. Je m'attends à ce que ces questions fassent l'objet d'un débat dans les années à venir, un débat qui, d'ailleurs, s'impose.

Que l'on parle d'intégration nord-américaine ou de développement d'une communauté nord-américaine, ces questions fondamentales devront être débattues. Les Canadiens, dans les années à venir, seront appelés à privilégier la convergence et l'harmonisation dans un certain nombre de domaines, que ce soit l'énergie et l'environnement, la mobilité et la main-d'oeuvre, la concurrence du régime fiscal, le commerce électronique, la propriété intellectuelle, la sécurité ou l'immigration. Nous devrons tenir un débat national sur toutes ces questions, un débat qui profitera aux Canadiens et auquel nous ne pouvons tout simplement pas échapper.

Je vous remercie donc de votre contribution, et je vous signale que nous allons recommuniquer très bientôt avec vous pour que vous nous aidiez à comprendre certains des grands enjeux en cause. Il ne faut pas aborder ceux-ci avec crainte et appréhension, mais avec lucidité et clairvoyance, parce que ce débat doit avoir lieu. Il nous sera très utile et il nous permettra, à bien des égards, de définir le genre d'avenir que nous voulons pour notre pays.

Merci de votre attention.

La séance est levée.

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