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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 14 mars 1996

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LA COMMISSION DES RELATIONS DE TRAVAIL DANS LA FONCTION PUBLIQUE

LA LOI SUR LES RELATIONS DE TRAVAIL AU PARLEMENT

LA LOI CONCERNANT LA COMMERCIALISATION DES SERVICESDE NAVIGATION AÉRIENNE CIVILE

    Projet de loi C-20. Adoption des motions de présentationet de première lecture 679

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

L'ÉTIQUETAGE DES CONTENANTS DE BOISSONS ALCOOLISÉES

LA SOCIÉTÉ DISTINCTE

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA TAXE SUR LE CARBURANT

QUESTIONS AU FEUILLETON

QUESTION DE PRIVILÈGE

MOTION PORTANT QUE LE DÉBAT NE SOIT PLUS AJOURNÉ

    Adoption de la motion par 121 voix contre 76 680

LE COMMUNIQUÉ DU DÉPUTÉ DE CHARLESBOURG

    Reprise de l'étude de la motion, de l'amendementet du sous-amendement 681
    Adoption de la motion 681
    M. White (North Vancouver) 681
    M. Speaker (Lethbridge) 695
    M. Leroux (Shefford) 697

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE BUDGET

LA TRAGÉDIE DE L'ÉCOLE PRIMAIRE DE DUNBLANE

LA JUSTICE

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 704

LA COLLINE DU PARLEMENT

LA COMMUNAUTÉ IRLANDAISE AU CANADA

LES COMMUNICATIONS

LA TRAGÉDIE DE L'ÉCOLE DE DUNBLANE

LES TROUBLES D'APPRENTISSAGE

LE TEMPLE DE LA RENOMMÉE DE L'INDUSTRIE MINIÈRE CANADIENNE

LA RÉFORME DE L'ASSURANCE-CHÔMAGE

    M. Leroux (Shefford) 705

LES PENSIONS

    M. White (North Vancouver) 706

LE TRAVAIL DES ENFANTS

LE COMMERCE INTERPROVINCIAL

LES RÉCLAMATIONS TERRITORIALES DES NISGA'A

CUBA

LES AFFAIRES INDIENNES

LA CONFÉRENCE DES PARLEMENTAIRES DE LA RÉGION ARCTIQUE

DUNBLANE, EN ÉCOSSE

QUESTIONS ORALES

LA SCIENCE ET LA TECHNOLOGIQUE

LA COMMISSION KREVER

    M. Hill (Macleod) 709
    M. Hill (Macleod) 710
    M. Hill (Macleod) 710

LA CONVENTION FISCALE CANADO-AMÉRICAINE

LES AFFAIRES INDIENNES

LES ÉDIFICES GOUVERNEMENTAUX

LA CHINE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 712
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 712

M. TRAN TRIEU QUAN

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 712
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 712
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 712
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 712

LE COMMERCE INTERNATIONAL

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 713

LE TERRORISME

    Mme Stewart (Brant) 713

LE LOGEMENT SOCIAL

LES MARCHÉS DE L'ÉTAT

L'IMMIGRATION

LES DROITS DE LA PERSONNE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 715

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

LE COMMERCE INTERNATIONAL

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PRÉSENCE À LA TRIBUNE

QUESTION DE PRIVILÈGE

LE COMMUNIQUÉ DU DÉPUTÉ DE CHARLESBOURG

    Reprise de l'étude de la motion 716
    M. Hill (Macleod) 738
    Mme Dalphond-Guiral 746

679


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 14 mars 1996


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 15 pétitions présentées au cours de la première session.

* * *

[Français]

LA COMMISSION DES RELATIONS DE TRAVAIL DANS LA FONCTION PUBLIQUE

M. Paul DeVillers (secrétaire parlementaire du président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 32(2) du Règlement, et conformément à l'article 114 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, des exemplaires du 28e rapport annuel de la Commission des relations de travail dans la fonction publique.

Conformément au paragraphe 32(5) du Règlement, ce rapport est renvoyé d'office au Comité permanent des opérations gouvernementales.

* * *

[Traduction]

LA LOI SUR LES RELATIONS DE TRAVAIL AU PARLEMENT

M. Paul DeVillers (secrétaire parlementaire du président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 32(2) du Règlement et à l'article 84 de la Loi sur les relations de travail au Parlement, je souhaite déposer, dans les deux langues officielles, le neuvième rapport annuel sur l'application de la loi par la Commission des relations de travail dans la Fonction publique.

Ce rapport est également renvoyé en permanence au Comité permanent des opérations gouvernementales.

* * *

LA LOI CONCERNANT LA COMMERCIALISATION DES SERVICES DE NAVIGATION AÉRIENNE CIVILE

L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-20, une loi concernant la commercialisation des services de navigation aérienne civile.

-Monsieur le Président, conformément au paragraphe 73(1) du Règlement, le gouvernement souhaite que ce projet de loi soit renvoyé à un comité avant qu'il ne soit lu pour la deuxième fois.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et il est renvoyé à un comité.)

* * *

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je voudrais présenter deux pétitions.

La première porte sur la famille. Les pétitionnaires veulent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que la gestion d'un foyer et le soin d'enfants d'âge préscolaire représentent une profession honorable qui n'est pas reconnue à sa juste valeur dans notre société.

Les pétitionnaires demandent donc humblement au Parlement de prendre des mesures pour éliminer la discrimination fiscale contre les familles qui décident de s'occuper, à la maison, d'enfants d'âge préscolaire, de personnes handicapées, de malades chroniques et de personnes âgées.

L'ÉTIQUETAGE DES CONTENANTS DE BOISSONS ALCOOLISÉES

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, la seconde pétition vient de Sarnia, en Ontario.

Les pétitionnaires désirent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que la consommation de boissons alcoolisées peut entraîner des problèmes de santé ou diminuer les capacités d'une personne. Ils tiennent plus précisément à signaler qu'il est possible de prévenir totalement le syndrome d'alcoolisme foetal, ainsi que d'autres anomalies à la naissance qui sont liées à la consommation d'alcool en évitant de prendre de l'alcool pendant la grossesse.

Les pétitionnaires demandent donc au Parlement d'adopter une mesure législative rendant obligatoire l'apposition sur les contenants de boissons alcoolisées d'étiquettes mettant en garde les consommateurs contre les risques pour la santé associés à la consommation d'alcool.


680

LA SOCIÉTÉ DISTINCTE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, je tiens à présenter deux pétitions au nom de mes électeurs.

La première demande au Parlement de garantir l'égalité de toutes les provinces en refusant de désigner une province comme société distincte, si cela a pour conséquence de conférer à cette province un statut ou des pouvoirs spéciaux dont ne jouissent pas toutes les autres provinces.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, la seconde pétition fait partie d'une série de pétitions que beaucoup de députés reçoivent.

Les pétitionnaires disent qu'il est inutile de modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne pour y insérer l'expression «orientation sexuelle» et ils demandent au Parlement de n'apporter au Code des droits de la personne, à la Loi canadienne sur les droits de la personne ou à la Charte canadienne des droits et libertés aucune modification accordant un statut spécial aux relations entre personnes de même sexe.

Je voudrais déposer ces deux pétitions.

(1010)

LA TAXE SUR LE CARBURANT

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de présenter une pétition signée par des gens qui s'opposent aux augmentations de la taxe sur l'essence. Ils ont constaté avec plaisir que le gouvernement a écouté les gens et ne l'a pas augmentée.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le Président: Toutes les questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

* * *

QUESTION DE PRIVILÈGE

MOTION PORTANT QUE LE DÉBAT NE SOIT PLUS AJOURNÉ

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je propose:

Que, relativement à l'étude de la motion du député d'Okanagan-Similkameen-Merritt concernant le renvoi d'une question au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, le débat ne soit plus ajourné.
Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le Président: Convoquez les députés.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 10)

POUR

Députés
Alcock
Allmand
Anderson
Arseneault
Assadourian
Augustine
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bélanger
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Bodnar
Bonin
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Calder
Campbell
Cauchon
Chan
Clancy
Collenette
Comuzzi
Crawford
Culbert
DeVillers
Dingwall
Discepola
Duhamel
Dupuy
Easter
English
Fewchuk
Finestone
Flis
Fontana
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Gerrard
Godfrey
Goodale
Graham
Gray (Windsor West/Ouest)
Grose
Guarnieri
Harb
Harvard
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Jackson
Jordan
Karygiannis
Keyes
Kirkby
Knutson
Lastewka
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Loney
MacDonald
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Marleau
McCormick
McGuire
McKinnon
McTeague
McWhinney
Mifflin
Milliken
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
Nault
O'Brien
O'Reilly
Pagtakhan
Parrish
Patry
Peric
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Reed
Regan
Richardson
Ringuette-Maltais
Robichaud
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Serré
Shepherd
Speller
St. Denis
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Torsney
Ur
Vanclief
Verran
Volpe
Wappel
Whelan
Wood
Young
Zed-121


681

CONTRE

Députés
Althouse
Asselin
Bachand
Bélisle
Bellehumeur
Benoit
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bhaduria
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brien
Canuel
Chatters
Chrétien (Frontenac)
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
de Savoye
Debien
Deshaies
Dubé
Duceppe
Dumas
Duncan
Epp
Fillion
Forseth
Frazer
Gagnon (Québec)
Gilmour
Godin
Gouk
Grubel
Guimond
Hanger
Hart
Hermanson
Hill (Macleod)
Hoeppner
Jacob
Jennings
Johnston
Lalonde
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest/Sud-Ouest)
McLaughlin
Ménard
Mercier
Meredith
Morrison
Nunez
Paré
Picard (Drummond)
Pomerleau
Ramsay
Ringma
Rocheleau
Sauvageau
Solomon
Speaker
Strahl
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Venne
White (North Vancouver) -76

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

nil/aucun

(1055)

Le Président: Je déclare la motion adoptée.

LE COMMUNIQUÉ DU DÉPUTÉ DE CHARLESBOURG

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 13 mars, de la motion, de l'amendement et du sous-amendement.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, si vous le demandez, vous constaterez qu'il y a consentement unanime en ce qui concerne la motion suivante. Je propose:

Que, nonobstant tout article du Règlement et tout ordre spécial, à la fin du débat relatif à la motion de M. Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt), ou au plus tard à 23 heures, tous les votes par appel nominal soient réputés avoir été demandés et différés jusqu'au lundi 18 mars 1996, à 18 h 30, et que, au cours du débat sur ladite motion, la Présidence n'accepte aucune motion dilatoire ou appel de quorum après 15 heures.
Le Président: La Chambre consent-elle à l'unanimité à ce que le député présente sa motion?

Des voix: D'accord.

Le Président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

M. Szabo: Monsieur le Président, hier, à la fin des travaux, la députée de Rimouski venait juste de conclure son intervention à la Chambre. Je me demande s'il est possible de lui poser des questions ou d'ajouter des commentaires.

Le Président: La députée a mis fin à ses remarques. Comme nous venons d'adopter une motion portant que le débat ne soit plus ajourné, il n'y aura donc ni questions ni commentaires.

(1100)

Pour l'information de tous, toutes les interventions seront maintenant d'une durée de vingt minutes. Elles ne seront suivies d'aucune question et d'aucun commentaire. Si les députés désirent partager leur temps de parole, je leur demanderais de bien vouloir en informer la présidence au début de leur intervention.

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec un autre membre du Parti réformiste.

Le 12 mars, quand mon collègue, le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt a pris la parole à la Chambre pour soulever la question de privilège au sujet du député de Charlesbourg, le Président a dit que la Chambre était saisie d'une des questions les plus graves qu'elle ait eues à résoudre durant la 35e législature. Il a ajouté que la question était tellement grave que cela n'avait pas d'importance que quelques mois aient passé depuis la date de l'incident dont nous discutons et qu'il fallait se pencher immédiatement sur ces accusations.

Plus tard au cours de cette même journée, nous avons assisté à un échange bref mais animé entre deux députés. Notre Président a alors pris la parole pour déclarer que nous allions tous avoir la possibilité de parler. Je le répète, en reprenant les paroles mêmes du Président: «Mes chers collègues, ceci est un des plus graves débats que nous ayons eus ici en Chambre. Nous aurons tous la chance de parler ici en Chambre. Nous sommes Canadiens, nous sommes démocrates et vous aurez la chance de parler.»

Pour tous les députés qui écoutaient le Président prononcer ces paroles sous leurs yeux, il n'y avait aucun doute qu'il jugeait la situation vraiment grave et qu'il tenait à ce que nous ayons la chance de prendre la parole dans ce débat.


682

Honnêtement, je peux dire que je n'avais jamais vu notre Président avoir l'air si perturbé par les événements et que je n'avais jamais entendu autant d'émotion dans sa voix. La seule fois où j'ai entendu notre Président parler d'une voix aussi sévère et presque colérique a été durant ce débat.

En outre, le fait que les échanges aient été aussi émotifs entre les députés de tous les partis ne peut laisser aucun doute aux observateurs sur le fait que c'est vraiment un sujet grave dont nous discutons actuellement. C'est évident que beaucoup de députés veulent s'exprimer, quoique j'aie remarqué que les députés conservateurs n'ont encore manifesté aucun intérêt.

Certains députés veulent avoir la chance de parler pour faire part du point de vue de leurs électeurs, tandis que d'autres le souhaitent aussi ardemment, mais c'est pour faire part du point de vue de leur parti, comme ils ont l'habitude de le faire, en utilisant les discours tout faits que leur fournissent les doreurs d'images des étages supérieurs.

En mon for intérieur, je me suis dit que c'était probablement pour cette raison que le gouvernement voulait ajourner le débat dès le premier jour. J'ai remarqué que, quand le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt a présenté sa motion, le gouvernement a semblé être pris par surprise. Il a semblé craindre de donner suite à cette affaire et de permettre aux députés d'en débattre sur-le-champ.

Nous avons vu le whip du gouvernement s'affairer entre les banquettes ministérielles pour vérifier ce que ses députés allaient dire spontanément. Il s'est assuré qu'aucun d'entre eux n'embarrasserait le gouvernement par ses propos ou ne s'inscrirait en faux contre ses instructions.

Il n'en demeure pas moins que les Canadiens veulent un débat sur cette affaire, un débat public et entier. Ils veulent que toutes les facettes de l'affaire soient explorées à la Chambre dont ils peuvent au moins observer et lire les délibérations, s'ils ne peuvent les regarder.

Notre Président a dit que nous aurions tous l'occasion de parler. Je vais répéter ses paroles parce qu'elles sont importantes. Les voici: «Mes chers collègues, ceci est l'un des plus graves débats que nous ayons eus ici en Chambre. Nous aurons tous la chance de parler ici en Chambre.»

Mais qu'arrive-t-il, en fait? Le gouvernement décide de nous ôter le droit d'entendre le point de vue de chacun. Il invoque une sorte de clôture en n'ajournant plus le débat. Pour les députés qui ne comprennent pas ce que cela veut dire, je vais expliquer ce dont il s'agit. Cela veut dire que nous devons fournir des orateurs sans interruption. S'il n'y a personne pour prendre la parole immédiatement après qu'un député s'est assis, le débat prendra fin.

Est-ce raisonnable? C'est un peu comme si on adoptait une loi prévoyant que les gens peuvent tondre leur pelouse n'importe quand, mais une seule personne à la fois et en commençant immédiatement; lorsque la dernière personne aura fini, s'il n'y a personne pour lui succéder, il faudra arrêter de tondre la pelouse.

(1105)

Il est évident que les gens ne vont pas rester debout toute la nuit pour utiliser leur tondeuse les uns après les autres. Tôt ou tard, quelqu'un dira: «Il est trop tard, cette loi est déraisonnable. Nous allons tous nous coucher et nous tondrons la pelouse demain matin.»

Voilà exactement la situation que crée cette motion. J'ai eu la chance de faire partie de ceux qui ont pu prendre la parole à ce sujet. Cependant, il viendra un moment où il ne sera pas raisonnable de demander aux députés de rester jusqu'aux petites heures du matin pour que nous ayons l'occasion de parler. Ce serait injuste et peu pratique.

En fin de compte, le résultat de ce débat était connu avant même qu'il ne commence, tout comme le résultat des débats sur les projets de loi est déterminé à l'avance en cette Chambre. Le gouvernement gagne toujours.

Il en coûte plus de 125 000 $ l'heure pour assurer le bon fonctionnement de cette Chambre, mais celle-ci ne respecte pas la volonté de la population. Elle adopte des projets de loi en fonction de ce que désirent les partis et surtout le parti au pouvoir. Tous les débats, questions, déclarations et travaux de comités associés à cette motion, ou à toute autre mesure législative, changent rarement les choses. Je suis convaincu qu'il en sera de même dans le présent cas.

Les libéraux feront exactement ce qu'ils veulent à l'égard de cette motion, la plus sérieuse jamais présentée à la 35e législature. Ils obtiendront gain de cause à la fin. Ils reformuleront la motion pour la vider de son contenu afin qu'elle n'ait pas le même sens qu'au début et ils pourront ainsi la faire passer à la Chambre et la renvoyer au comité où ils contrôlent le résultat final. La première étape de ce processus fut l'amendement de la motion du député d'Okanagan-Similkameen-Merritt. L'étape suivante fut la clôture imposée au débat. La troisième sera probablement le renvoi de la motion à un comité.

Ils ont insulté la population du Canada en retranchant, de la motion du député, tous les mots avant le mot «que» et tous les mots après le mot «que».

Une voix: Voilà ce qu'ils ont fait.

M. White (North Vancouver): Voilà ce qu'ils ont fait, comme le dit le député. Ils n'ont laissé que le mot «que». C'est tout à fait ridicule. C'est une grave insulte à la population du Canada. Les libéraux ont supprimé tous les mots avant le mot «que» et tous les mots après le mot «que», et ils les ont remplacés par leur propre interprétation, ce qui signifie que la motion a perdu tout son sens. Leur opinion c'est que le geste du député de Charlesbourg peut paraître offensant pour le Parlement, mais qu'on devrait simplement le considérer comme tel et non le qualifier de sédition.

La population du Canada se moque pas mal que le geste du député de Charlesbourg soit offensant pour le Parlement. Par contre, eux se jugent offensés. Ils veulent que l'on parle de cette question. Ils veulent que l'on en débatte et ils veulent voir ce que l'on a à dire.


683

Ils voudraient que tous les députés aient l'occasion de prendre la parole et de déclarer ce qu'ils pensent de la motion.

Le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt a déposé cette motion à la Chambre parce qu'il estime que la population du Canada a été offensée. Nos électeurs nous ont dit qu'ils voulaient que l'on traite de cette question. Et ils veulent que nous en traitions sérieusement. Comme notre Président le disait, c'est grave. Lui-même considère cela grave. Toutefois, de toute évidence, le gouvernement ne pense pas de même. Il nous a pratiquement mis dans une position de défiance à l'égard des propos du Président en nous obligeant à terminer le débat dans un temps très limité.

Tous les députés du Parti réformiste qui ont parlé, l'ont fait parce que la représentation de leurs électeurs l'exigeait. C'est un principe que les députés d'en face sont sans doute incapables de respecter, vu qu'ils ne sont que les laquais du whip. C'est une notion qui leur est tout à fait étrangère. Ils sont tellement loin de nous qu'ils pourraient être étrangers.

Mais les temps changent. Nous sommes à l'ère de l'information et les contribuables, ceux qui paient la facture pour administrer cet endroit, ne vont pas tolérer ce genre de choses beaucoup plus longtemps. Ils estiment qu'il est temps que nous commencions à les représenter de façon convenable. Ils ne vont pas être heureux que l'on mettre fin au débat sur cette motion.

(1110)

J'aime bien citer un ancien politicien célèbre lorsque je parle de choses comme ces attaques contre la démocratie. Je voudrais le citer non parce que je l'admire, mais parce qu'il représente la politique d'autrefois, les vieux partis et la vieille façon de faire que la population du Canada déteste tellement.

Ce parlementaire, c'est Edmund Burke. Je suis sûr que tout le monde a entendu parler de lui. En 1774, il disait: «Votre représentant vous doit, non seulement son travail, mais également son jugement. Et il vous trahit plutôt que vous servir s'il sacrifie son jugement à votre opinion.» Naturellement, la déclaration deM. Burke remonte à plus de 220 ans, ce qui est pas mal loin de l'ère de l'information. Les gens étaient peu instruits et il aurait probablement été vrai de dire qu'un député n'aurait pas rendu service à ses électeurs en sacrifiant son jugement à leur opinion.

Nous sommes à l'ère de l'information et les gens sont bien informés sur des choses comme la motion dont la Chambre est saisie en ce moment. Ils ont eu l'occasion de lire le communiqué publié par le député de Charlesbourg, car il a été envoyé par télécopieur dans tous les coins du pays, grâce aux outils que nous procure l'ère de l'information.

En réaction, des gens de partout au Canada ont fait part aux députés de leur opinion au sujet de ce communiqué en utilisant le télécopieur, le réseau Internet et le courrier électronique, ainsi que la poste, le téléphone ou tout autre moyen à la disposition des électeurs. Les choses ont bien changé depuis 1774, quand M. Burke a prononcé son discours.

De nos jours, les électeurs s'intéressent vraiment à ce qui se passe ici et sont en mesure de suivre les délibérations à la Chambre en lisant la copie imprimée du hansard, en en prenant connaissance sur l'Internet ou en regardant tout simplement nos travaux à la télévision. Ils ont le droit d'être bien représentés dans cette enceinte et de voir ce qui s'y passe.

Dans les années 90, alors que les gens sont bien instruits et bien informés, je pense qu'il convient de modifier la citation deM. Burke. J'aimerais que les membres actuels de la classe politique disent: «Votre représentant ne doit pas seulement travailler pour vous, il doit aussi s'engager à vous sensibiliser à toutes les affaires du gouvernement qui vous touchent pour que vous puissiez être informés et lui faire part du point de vue que vous voulez qu'il défende.»

Au cas où des députés se poseraient des questions, Edmund Burke a perdu son siège lors des élections qui ont suivi ce célèbre discours. Même s'il y a 220 ans de cela, il n'était pas rentable d'insulter ses électeurs à l'époque, et c'est encore vrai de nos jours.

Le problème, c'est que, même si, dans le cadre de ce débat, tous les députés acceptaient d'écouter et de représenter les électeurs qui communiquent avec eux par télécopieur, téléphone ou lettre et décidaient de souscrire à la motion du député d'Okanagan-Similkameen-Merritt dans sa version actuelle, sans en changer un iota, car elle reflète la vérité, puis de l'examiner, ils ne pourraient pas le faire, puisque le whip du Parti libéral dit aux ministériels qu'ils doivent suivre la politique du parti.

Imaginons simplement qu'ils décident de l'appuyer. Le problème, c'est que, pour en arriver à ce stade, il faut remettre en question ce vieux système qui confère autant de pouvoirs aux whips. Les gens en apprennent de plus en plus sur les procédures de la Chambre en s'intéressant beaucoup à ce débat, car, pour les gens, il est aussi important que pour notre Président et tout le reste su monde.

Ce débat attire l'attention de tout le pays. C'est une question grave. Lorsque les gens regardent, écoutent et comprennent ce que nous disons, ils commencent alors à saisir ce qui se passe ici quand nous votons. Les pressions vont être de plus en plus fortes pour apporter au système des modifications qui se font attendre depuis trop longtemps et qui s'imposent en cette ère de l'information qui est la nôtre.

Je recommande aux députés une comédie qui passait à la télévision sur le Women's Network, tous les dimanches soirs, l'année dernière. Cette émission, intitulée «No Job for a Lady», montrait le lot d'une nouvelle députée en Angleterre.

(1115)

Bien que l'émission soit drôle, elle brosse également un portrait assez juste de ce qui se passe au Parlement du Royaume-Uni et à celui du Canada aussi. Ses auteurs ont manifestement une bonne connaissance des rouages de la Chambre des communes et n'ont aucune difficulté à montrer aux téléspectateurs que les séances de comité et les voyages aux frais de la princesse ont très peu d'utilité, si ce n'est de tenir les députés occupés entre des votes organisés


684

d'avance, dont nous connaissons déjà le résultat avant même d'entrer à la Chambre.

Mon collègue de Swift Current-Maple Creek-Assiniboia a été très éloquent à ce sujet dans un discours qu'il a prononcé l'année dernière et dont je cite un extrait consigné dans le hansard: «Mes collègues des deux côtés de la Chambre savent aussi bien que moi et le reste du pays que tout ce que nous pouvons dire d'un projet de loi n'a aucune importance.» Cette situation pourrait tout aussi facilement s'appliquer à une motion. «Les décisions sont prises par une douzaine de personnes environ et tous les débats du monde n'y changeront rien. Même si les députés de l'arrière-ban du gouvernement et de l'opposition viennent ici en grand nombre, les ministres, les gens que l'on espère influencer, sont rarement ici, sauf pendant la période des questions.»

Il est dommage que ce que nous disons au sujet de cette motion aura peu d'importance en fin de compte parce que quelques personnes de l'autre côté, peut-être une seule personne, ont déjà décidé de ce qui adviendrait de cette motion. La décision a déjà été prise. Au moment où nous poursuivons ce débat pour le reste de la journée, peut-être toute la soirée, qui sait, la décision a déjà été prise. À la fin du débat, lorsque nous voterons lundi ou, si le vote est reporté, mardi, mercredi ou jeudi, la volonté de cette personne ou des quelques personnes qui dirigent tout sera considérée comme la volonté de la Chambre.

La population est de plus en plus consciente du fait que les délibérations que nous tenons ont très peu de rapport avec l'ordre des choses en général. En effet, les contribuables, ceux qui paient nos salaires, s'intéressent de très près à ce qui se passe ici. Ils vont exercer des pressions pour faire changer le système, de sorte que nous commencions vraiment à refléter la volonté de la population.

Les preuves sont là. Les démocraties parlementaires de par le monde trouvent des moyens de s'adapter à l'ère de l'information. Les 30 années d'expérience que possède le premier ministre de l'ancien régime ne vaudront rien d'ici quelques années, étant donné le changement radical auquel nous devrons faire face.

En Nouvelle-Zélande, dont je suis originaire, on a adopté en 1993 la loi sur les référendums à l'initiative des citoyens. On nous avait toujours dit qu'initiative et référendum étaient incompatibles avec un régime de démocratie parlementaire. Ce n'était pas le cas. Le problème, c'était le manque de volonté politique.

Nous sommes les maîtres dans cette enceinte. Nous pouvons faire ce que nous voulons. Si nous avions la volonté politique nécessaire pour appuyer la motion du député d'Okanagan-Similkameen-Merritt, si nous avions la volonté politique nécessaire pour nous montrer indépendants et, en particulier, si ces députés d'en face avaient la volonté politique nécessaire pour faire preuve d'indépendance à l'égard de cette motion, la plus importante de la 35e législature, nous verrions un tout autre résultat que celui qui nous attend, tout le monde le sait, lundi.

En Nouvelle-Zélande où l'on a adopté une loi sur les initiatives et les référendums, la population peut désormais influer sur les travaux au Parlement. Plusieurs pétitions portant sur de telles initiatives ont obtenu le nombre de signatures suffisant pour exiger la tenue d'un référendum.

Au lieu de tenir un référendum coûteux pour les contribuables chaque fois que le cas se présentait, le gouvernement de la Nouvelle-Zélande a proposé l'adoption d'une loi allant dans le sens de la volonté de la population. Quel puissant outil! Il n'a même pas eu à tenir un référendum. Le simple fait que les citoyens aient le pouvoir de recueillir les signatures nécessaires à la tenue d'un référendum a suffi à amener le gouvernement à se plier à leur volonté. Nous en avons sérieusement besoin ici. Dieu sait que nous en besoin dans cette enceinte.

Pour l'heure, le premier ministre peut encore contraindre ses députés à suivre la ligne du parti au mépris des souhaits exprimés par les électeurs canadiens. Beaucoup d'entre eux recevront des lettres après qu'ils auront voter lundi ou mardi. Les gens surveilleront leurs gestes. Les gens sauront qu'ils ont éliminé tous les mots précédant et suivant le mot «que». Ils le sauront. Ils le liront dans les journaux. Ils en entendront parler à la télévision. Ils l'auront constaté pendant ce débat. Ils peuvent le lire dans le hansard. Après quoi ils enverront des lettres ou des télécopies et feront des appels téléphoniques. Le message va passer.

(1120)

Les temps changent. Aux prochaines élections, la question d'une véritable représentation démocratique revêtira une importance que l'on ne saurait soupçonner aujourd'hui. Ce sera le thème des années 1990. L'ère de l'information modifiera la Chambre de bien des façons que l'on ne saurait imaginer aujourd'hui. Les députés qui sont à la Chambre depuis 20 ou 30 ans n'en reviendront pas des changements qui se produiront d'ici cinq, six ou sept ans. Ils seront dans l'embarras.

Peu à peu, la véritable démocratie gagne du terrain. Il faut espérer que bientôt tous les députés seront libres de bâtir un Canada qui répond aux voeux de la population qui paie les factures en acquittant des impôts.

Il n'est pas étonnant que les contribuables aient si peu de respect pour les députés. Ils voient bien que la Chambre adopte bien peu de mesures qui satisfont leurs besoins. Ils ont tôt fait de nous qualifier de goinfres. L'appellation est bien méritée.

Aux prochaines élections, les grandes personnalités politiques subiront un revers dont elles n'ont pas la moindre idée aujourd'hui. À l'avenir, quand une motion comme celle du député d'Okanagan-Similkameen-Merritt sera présentée à la Chambre, on aura l'occasion de regarder la vérité en face, de voir les ministériels se lever un à un et représenter vraiment leurs électeurs. Ils se prononceront au nom de leurs électeurs, au lieu d'attendre que le whip du gouvernement examine le libellé et donne ses instructions sur ce qu'il convient de dire ou de ne pas dire. Quelle sorte de démocratie est-ce


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cela? Toutefois, les chose changent et je blâme le gouvernement de n'avoir pas tenu sa promesse du livre rouge, lui qui a promis de gouverner avec plus de transparence, de laisser les députés représenter vraiment leurs électeurs et de commencer de tenir des votes libres à la Chambre.

Ce qui s'est passé depuis deux jours est ridicule. Au sujet de cette motion, ils se sont tous prononcés de la même manière. C'est ridicule. N'importe quel être intelligent voit bien que tout est organisé d'avance. Ils ne tiennent pas compte de la volonté des électeurs. Il est temps que certains des ministériels aient le cran de se lever pour faire ce qui doit être fait.

J'invite les députés, au moment de voter sur cette motion capitale, à se lever et à représenter vraiment leurs électeurs.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, nous avons dans ma circonscription une longue tradition liée aux forces régulières et aux forces de réserve de l'armée canadienne. Comme j'ai reçu plusieurs communications de mes électeurs à propos de cette question, il m'a paru important d'intervenir à la Chambre pour exprimer mon opinion au nom des habitants de Mississauga-Sud.

Je rappelle à mes électeurs, et aux autres personnes concernées par cette question, que le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt a présenté une motion qui s'énonce ainsi:

Attendu que le député de Charlesbourg, agissant en tant que porte-parole du Bloc québécois en matière de défense, et appuyé par le chef de l'époque de la loyale opposition de Sa Majesté, a publié un communiqué sur le papier à en-tête du bureau du chef de l'opposition officielle le 26 octobre 1995, avant le référendum au Québec, invitant les membres francophones des Forces canadiennes à se joindre aux forces militaires du Québec dans l'éventualité où le «oui» l'emporterait sur la question de la séparation du reste du Canada;
Que, de l'avis de cette Chambre, cette action de l'honorable député de Charlesbourg et du chef de l'époque de l'opposition officielle devrait être considérée comme séditieuse et offensante pour la Chambre et constitue un outrage au Parlement et, par conséquent, la Chambre devrait confier la question à l'examen du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
(1125)

Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes a par la suite proposé une motion d'amendement. Cette motion propose essentiellement de modifier la motion principale pour que la question du communiqué du député de Charlesbourg, publié le 26 octobre 1995, et concernant les membres des Forces armées canadiennes, soit renvoyée au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

En apparence, la motion initiale et la motion d'amendement proposée par le gouvernement demandent la même chose, à savoir qu'une question ayant trait à la diffusion d'un communiqué concernant les Forces armées canadiennes et à toutes ses ramifications, soit renvoyée au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Il y a cependant entre la motion des réformistes et la motion du gouvernement une différence toute simple qui reflète un principe de droit tellement fondamental que personne ne saurait mal le comprendre. Il s'agit du principe voulant que l'accusé soit présumé innocent jusqu'à ce que sa culpabilité ait été démontrée.

Tout le monde ici qui est au courant de la question a une opinion à ce sujet, mais la motion des réformistes présume que l'accusé est coupable jusqu'à ce qu'on ait démontré son innocence. La motion du gouvernement, elle, présume que l'accusé est innocent jusqu'à ce qu'on ait démontré sa culpabilité. Voilà pourquoi la question devrait être renvoyée au comité.

La députée de Rimouski-Témiscouata a soulevé le même problème hier à la Chambre lorsqu'elle a de nouveau accusé le gouvernement de complicité avec le Parti réformiste à cet égard. Or, il n'en est rien, tout simplement à cause du principe du droit voulant que quelqu'un soit innocent jusqu'à ce qu'on ait démontré sa culpabilité. Voilà la seule différence entre les deux motions. Elles proposent cependant toutes deux que la question soit renvoyée au comité permanent où on pourra l'examiner comme il convient.

Le député de Vancouver Quadra, qui est un grand érudit en la matière et qui a conseillé de nombreux gouvernements, étrangers, canadiens ou provinciaux, a déploré les divagations qu'on entend à la Chambre sur une foule de détails où se mêlent les allégations, les suppositions et les accusations, dont aucune, dans le cours du débat, n'a à être prouvée. Il a fait remarquer que ce n'était pas l'endroit qui convenait pour faire une analyse et un travail qui doit revenir à un comité ou à une autre instance. La Chambre se transforme en tribunal irrégulier; c'est l'expression qui a été employée. Selon le député de Vancouver Quadra toujours, le débat ne va nulle part, le dialogue ne va nulle part, et nous n'avons pas les ressources pour examiner cette question. C'est un cirque.

Tous les députés seront d'accord pour dire que la meilleure solution est de renvoyer l'affaire au comité pour étude. Tous les faits seront exposés, et des recommandations fondées sur des faits et non sur l'enflure verbale seront faites à la Chambre.

La députée bloquiste de Mercier a également pris la parole hier. Un point a retenu mon attention, celui de la date du communiqué. Si j'ai bien compris, la députée a laissé entendre que la publication même du communiqué ne faisait pas problème.

(1130)

Tout le monde le sait, le communiqué a été publié le 26 octobre, à un moment crucial, quelques jours avant le référendum du 30. Il a paru à un moment stratégique. Il disait que presque immédiatement, si le oui l'emportait, les militaires canadiens francophones seraient invités à se joindre à un Québec séparé. Cela va à l'encontre de la question référendaire elle-même.

La question disait essentiellement que le Québec, après avoir fait une offre au gouvernement du Canada, demanderait à être reconnu


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comme un État indépendant, souverain. L'offre n'a pas été faite, et elle n'a toujours pas été présentée au gouvernement canadien.

Certains ont laissé entendre à la Chambre que le communiqué avait fait l'objet d'un vote et avait été approuvé par l'ensemble des députés bloquistes. J'ignore si ces faits sont exacts, mais ce sont des faits de ce genre qui seront mis au jour lorsque le comité se penchera sur la question.

Le problème, c'est que la députée de Mercier n'a pas reconnu qu'il y avait, entre le 26 et le 30 octobre, une période critique qui aurait eu une influence. En ce qui me concerne, cela constitue de l'arrogance de la part du Bloc pour ce qui a trait au référendum.

Le député de North Vancouver a fait un discours interminable. Je me suis demandé pourquoi il était si fâché. Je crois comprendre le sentiment de frustration que lui inspire la démocratie. Je comprends qu'il se sente frustré en tant que député de l'arrière-ban. Toutefois, je ne crois ni n'accepte un seul instant que les députés n'ont aucune influence sur ce qui se passe ici.

D'après le député de North Vancouver, les libéraux arriveront à leurs fins; ils ont vidé la motion de son contenu. Je le répète, la motion proposée par le Parti réformiste disait essentiellement que le député est coupable. Nous devons établir s'il est innocent. La motion libérale dit qu'il s'agit d'une allégation qu'il faut étayer, que nous allons prendre une décision en fonction de toute la preuve et non des beaux discours de députés qui ne font que jouer pour la galerie afin d'empêcher que des faits soient mis au jour.

M. Grubel: Délibérément?

M. Hart: Personne ne sera jamais accusé.

M. Szabo: C'est intéressant de lire aujourd'hui dans les journaux que les réformistes se plaignent de tout ces derniers temps. Tout est lentement en train de s'écrouler pour eux. Il en est qui pleurent dans ce caucus. Ils ne savent plus quoi faire pour redresser leur bilan.

Toutefois, le député de North Vancouver estime que les décisions qui sont prises ici le sont machinalement. Je ne suis pas du tout d'accord. Et je peux fournir des exemples précis. Le député n'ignore pas que la Chambre a examiné le projet de loi C-7, réglementant certaines drogues et autres substances. Ce projet de loi a été à l'étude pendant près de 18 mois. Au comité, 70 amendements importants lui ont été apportés, ce qui a eu essentiellement pour effet d'en modifier l'esprit.

Les initiatives parlementaires en sont un autre exemple. Les députés réformistes savent que 11 projets de loi d'initiative parlementaire avaient franchi l'étape de la deuxième lecture au moment de la prorogation. Bien que les réformistes aient voté contre la proposition, cela n'a pas empêché le gouvernement de voter en faveur d'une motion visant à rétablir les projets de loi d'initiative parlementaire qui avaient franchi l'étape de la deuxième lecture ou l'étape du rapport au moment de la prorogation et à les inscrire au Feuilleton à la même étape du processus législatif où ils en étaient rendus au moment de la prorogation. Cette mesure s'applique même à mon projet de loi C-204, où je propose d'inscrire une mise en garde sur les contenants de boissons alcoolisées. Ce projet de loi revêt beaucoup d'importance pour moi et pour de nombreux autres députés. C'est moi qui ai eu l'occasion de présenter cette mesure législative à la Chambre, pas le gouvernement. Je connais bien des députés qui ont profité, eux aussi, de cette occasion qui leur était offerte. Onze projets de loi sont donc encore à l'étude aujourd'hui, parce que les simples députés ont enfin eu l'occasion de les remettre à l'étude.

(1135)

Même si le député de North Vancouver a du mal à accepter la démocratie, il devrait se rendre compte que le gouvernement n'agit pas en fonction de la volonté d'une poignée de gens. Aux dernières élections, la population du Canada a porté un jugement sur le programme que lui proposait chacun des partis politiques. Ces partis ont pris des engagements envers les Canadiens et certains de leurs membres ont été élus à Chambre, grâce à une majorité des voix, pour remplir leur mandat.

Les députés réformistes nous disent que nous avons tort de tenir les promesses que nous avons faites. Je m'insurge contre une telle idée. Malheureusement, le Parti réformiste est déçu de la démocratie. À mon avis, il faut préserver la démocratie à la Chambre des communes, de même que les principes de la justice, surtout le principe qui veut qu'une personne soit innocente jusqu'à preuve du contraire.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, effectivement, le moment est extrêmement grave. Je crois que, dans toute l'histoire du parlementarisme canadien, c'est sans doute la semaine la plus importante que l'on ait vécue. Non pas pour ce qui s'est dit dans un communiqué émanant d'un député du Bloc québécois, non pas pour ce qui s'est dit relativement à l'armée canadienne à l'extérieur de ses murs, mais bel et bien à cause des éléments, à cause des commentaires et des discours qui ont été prononcés ici en cette Chambre.

Il ne faut pas se le cacher, ce qui est en jeu avec la motion présentée par le Parti réformiste et amendée par le gouvernement, c'est le droit de parole d'un député, c'est la liberté d'expression d'un député légitimement élu, c'est la démocratie.

C'est la première fois, à ma connaissance, qu'un comité parlementaire va se pencher sur une déclaration qu'un député a faite à l'extérieur de la Chambre. Je sais que, par le passé, les comités parlementaires ont déjà étudié le comportement de certains députés, certaines déclarations que des députés avaient faites en Chambre, à l'intérieur des murs de cette enceinte. Mais il est ici question d'un communiqué émis par le député de Charlesbourg à l'extérieur de la Chambre. Qu'on me dise que le communiqué porte l'en-tête du bureau du chef de l'opposition, c'est courant; le gouvernement le fait, le gouvernement annonce toutes sortes de programmes en utilisant l'argent des taxes et des impôts des contribuables sur du papier à en-tête. Ils en font de la politique, avec les taxes et les impôts des contribuables. Cela fait partie de l'emploi, de la job, en bon québécois, d'un député de faire connaître son point de vue.


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Dans ce cas-ci, étant donné qu'il s'agit d'un Québécois, étant donné que c'était pour expliquer certaines choses relativement au débat sur la souveraineté du Québec, là, c'est différent et les députés trouvent cela épouvantable.

(1140)

Je pense que le Parlement a franchi un pas très dangereux qui porte atteinte à des droits reconnus. Le Parlement, par des discours réformistes et ministériels, veut politiser en quelque sorte le Code criminel pour des fins partisanes et antidémocratiques.

Si la définition du mot «sédition» que l'on retrouve dans le Code criminel, à l'heure actuelle, aux articles 59 et 62, n'est pas assez précise ou pas assez claire, si elle ne couvre pas tous les éléments, ce que je doute, car je pense très sincèrement que le Code criminel répond aux questions que des personnes peuvent se poser relativement à des gestes posés par des personnes de l'extérieur pour soulever les personnes dans l'armée contre l'autorité.

Je pense que le Code criminel est clair, mais si les réformistes ou les libéraux pensent qu'il n'est pas clair, ce n'est pas par une motion de ce genre qu'il aurait fallu que le gouvernement ou le Parti réformiste procède, mais par un projet de loi privé ou ministériel dans lequel on ajouterait des définitions, dans lequel on couvrirait certains éléments que le Code criminel, dit-on, ne couvre pas à l'heure actuelle.

Ce n'est pas en faisant un procès d'intention comme on veut le faire, ni en faisant un procès d'opinion politique comme les libéraux et les réformistes veulent le faire sur le dos d'un député légitimement élu.

On m'avait dit: «En politique, tu vas en entendre de toutes sortes. Tu vas en voir de toutes les couleurs.» Mais je ne pensais pas qu'on s'abaisserait à vouloir interpréter le Code criminel à des fins partisanes et politiques. Le Code criminel est une loi extrêmement importante dans ce pays, et je pense qu'à l'heure actuelle, on veut l'utiliser à des fins politiques.

Pourquoi ce communiqué, qui a été émis le 26 octobre 1995, du jour au lendemain, fait-il l'objet d'une question de privilège en cette Chambre au mois de mars 1996? Je ne vous apprendrai pas que des élections partielles se tiendront sous peu, et le Parti réformiste, ne pouvant pas compter sur leur performance en Chambre ou sur leur performance en général, s'est dit: «Pour marquer des points, il faut faire de la politique sur le dos des Québécois. Ça va prendre, ça. Il y aura une élection partielle en Ontario. Au Québec, notre chat est mort, mais en Ontario et à Terre-Neuve, il y a des élections partielles qui s'en viennent; ça va prendre, ça. On va faire de la politique sur le dos des Québécois».

Ils font de la politique sur le dos du député de Charlesbourg, parce qu'ils l'ont pris par hasard. C'est vraiment un hasard, parce que tous les députés du Bloc québécois ont fait de telles déclarations, de tels communiqués. On a pris le député de Charlesbourg pour faire le procès des députés du Bloc québécois et de tout le mouvement souverainiste. Ça, c'est un peu grave.

Je sais que les réformistes ont vu qu'ils manquaient carrément le bateau. Ils ont modifié un peu leur approche par rapport à la question de privilège qu'ils avaient déposée au tout début, et les commentaires qu'ils en ont fait par la suite. Maintenant, ce n'est plus vrai, ils n'accusent pas. Ce n'est plus vrai qu'ils font des accusations gratuites.

Cependant, je vais vous lire une déclaration du 12 mars 1996 faite par le député réformiste de Nanaïmo-Cowichan qui dit ceci: «[. . .] permettez-moi d'abord de rappeler que j'ai passé 35 ans dans l'armée-donc c'est quelqu'un qui connaît les règles-où l'on considérait que l'infraction la plus grave était la sédition ou la mutinerie qui se produisait à l'intérieur de ses rangs. Lorsque cette infraction est provoquée par une autorité extérieure, notamment un parlementaire, elle est plus grave encore.»

Ils ont beau se faufiler aujourd'hui, ils ont beau dire que ce n'est pas ce qu'ils voulaient dire, mais c'est clair, c'est noir sur blanc, on accuse les bloquistes, un député bloquiste, le mouvement souverainiste dans son ensemble, de sédition. Et cela, c'est extrêmement grave.

Pourquoi, finalement, l'accuse-t-on, nous accuse-t-on, nous, souverainistes, de cela?

(1145)

Je vais vous lire le passage du communiqué, et je pense que vous allez tirer vous-mêmes des conclusions. C'est un communiqué comme on en voit dans tous les bureaux de députés, un communiqué qui ne fait pas exception, anodin même, et qu'on dit à titre d'information, parce que la population veut savoir ce qui arrivera dans tel ou tel domaine. Ici, le domaine en question est l'armée canadienne.

Au lendemain d'un oui, dit-il [. . .]
Pas aujourd'hui, là, pas immédiatement, indépendamment de ce qui arrivera, le. . .

Au lendemain d'un oui, dit-il, le Québec devra créer immédiatement un ministère de la Défense, un embryon d'état-major et offrir à tous les militaires québécois servant dans les forces canadiennes la possibilité d'intégrer les forces québécoises en «conservant leur grade, ancienneté, solde et fonds de retraite de façon à assurer une meilleure transition».
Est-ce cela, soulever des gens de l'armée pour une sédition, pour une révolte face à leur autorité? Non. En dernier lieu, parce qu'on parle de loyauté, est-ce que c'est ce sur quoi les réformistes et les libéraux accrochent aujourd'hui? On finit le communiqué en disant:

[. . .] Toute cette expertise ne disparaîtra pas avec l'accession du Québec à la souveraineté et, personnellement, je pense que les militaires québécois respecteront la décision de la population et transféreront leur loyauté au nouveau pays, dont ils assureront la sécurité.
Est-ce cela, de la sédition? Est-ce cela, encourager les gens de l'armée à se révolter? Non. Les souverainistes, les Québécois et les Québécoises disent aux gens de l'armée: «Le lendemain d'un oui, on vous ouvre les bras. Si vous voulez venir travailler pour le pays du Québec, si vous voulez venir pour la sécurité des Québécois et des Québécoises, on est prêts à vous recevoir, à vous engager dans un Québec souverain.»


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Si les militaires désirent rester au Canada, ils ont le choix de rester dans l'armée canadienne. On ne fait pas de pression indûment. Quelle en est la logique? Pourquoi également est-que, tout d'un coup, ce communiqué apparaît du jour au lendemain épouvantable, alors que je n'apprendrai rien à personne en disant que ça fait des années, au Québec, qu'on parle de ça?

Des livres, des programmes, toutes sortes de choses ont été écrites au Québec relativement au projet souverainiste et démontrant notre vision, ce que nous voulions faire dans un Québec souverain, notamment relativement aux engagements que le Canada avait envers des pays étrangers. On l'a toujours dit, avant le référendum, pendant le référendum, et on va le dire encore aujourd'hui-ce n'est pas l'intimidation du gouvernement qui va nous faire peur-, on va continuer à expliquer ce que nous, les Québécois, entendons faire pour l'armée comme pour tout autre sujet.

Les députés du Bloc ont envoyé différentes informations dans leur comté, pratiquement à chaque maison au cours du référendum et avant le référendum. Il y a le programme du Parti québécois et également celui du Bloc québécois, intitulé: Document de réflexion des idées pour gagner, datant du mois d'avril 1995. Le programme du Parti québécois, lui, date de 1993, et tout est très clair: le Québec aura une armée. Le Québec, en tant que pays responsable, respectera les engagements vis-à-vis d'organismes internationaux comme l'OTAN. Ce n'est pas nouveau mais, du jour au lendemain, oups, les réformistes se réveillent et nous parlent de cela parce que, semble-t-il, c'est payant de faire de la politique sur le dos des Québécois.

Les réformistes disent: «Écoutez, on a un premier ministre qui, toute sa vie, a fait de la politique sur le dos des Québécois et il a été élu en 1993. Pourquoi n'essaierait-on pas d'en faire, nous, de la politique sur le dos des Québécois? On va essayer ça et peut-être que ça sera rentable». Ça ne le sera pas, ni pour les réformistes, ni pour le Parti libéral, ni pour la démocratie.

(1150)

Je vais vous dire pourquoi. Parce que contrairement aux bonnes vieilles années, le Québec est représenté en cette Chambre, le Québec a élu démocratiquement des députés pour les défendre. Et on ne se laissera pas faire. Ce n'est pas vrai qu'on va laisser le champ libre aux réformistes et au gouvernement pour dire toutes sortes de choses mensongères. Ce n'est pas vrai. On va rétablir la vérité, comme on l'a fait pendant toute la période référendaire et comme on continuera à le faire.

Je pense que je viens de toucher une corde sensible. Le fait que les Québécois et les Québécoises, en octobre 1993, ont fait confiance à un contingent de députés québécois pour défendre leurs intérêts, je pense que c'est important. J'en profite pour remercier les gens de mon comté de Berthier-Montcalm pour le mandat qu'ils m'ont donné.

Aujourd'hui, on se rend encore compte qu'il est important d'avoir des gens qui se tiennent debout en cette Chambre pour défendre les intérêts du Québec, parce qu'ils veulent nous passer toutes sortes de choses. Il est temps qu'on se lève, il est temps de dire: «Vous faites fausse route. Ce n'est pas cela, la démocratie. Ce n'est pas ce que nos ancêtres ont bâti au cours des ans.» Il est temps de démontrer le véritable chemin.

Finalement, au sujet de la motion présentée par les réformistes, qui est plus longue que l'amendement du gouvernement, il est sûr qu'on en disait beaucoup, il est sûr qu'on accusait de façon claire le député de Charlesbourg d'avoir fait des déclarations considérées par les réformistes comme séditieuses et offensantes. Mais au moins, ils avaient le mérite d'être clairs. Les réformistes ont au moins le mérite de dire ce qu'ils pensent. Je ne peux pas en dire autant des libéraux, très malheureusement. La motion qui est présentée a été amendée par le Parti libéral; je qualifie cet amendement-là d'hypocrite. Finalement, on prend tout l'historique de la motion, mais on enlève ce qui ne fait pas notre affaire. On ne parle pas de sédition, on ne parle pas d'offense, mais on renvoie tout simplement le communiqué devant un comité de la Chambre pour qu'on l'étudie. Étudier quoi, si ce n'est le communiqué en lui-même, si ce n'est que la déclaration du député en elle-même?

C'est un amendement que je ne trouve pas clair, qui camoufle quelque chose, parce qu'ils ne disent pas la vérité. Ils auraient pu agir de façon très claire devant la population et dire: «On trouve inadmissible ce que le député de Charlesbourg, ce que les bloquistes ont fait et on veut que ce soit examiné par un comité de la Chambre.» Est-ce que cela aurait pu se vendre politiquement? J'en doute.

Je doute que les électeurs et électrices, surtout du Québec, auraient acheté une formulation semblable. Les libéraux étant capables véritablement d'exposer leur point de vue sur un point soulevé par les réformistes ont décidé tout simplement de camoufler cela par un petit amendement.

À ce stade-ci de ma réflexion, je me pose plusieurs questions. Pourquoi renvoyer le communiqué au comité de la Chambre? Pourquoi pas, tant qu'à y être, faire examiner le programme du Bloc québécois? Pourquoi pas, tant qu'à y être, faire examiner le programme du gouvernement du Québec? Pourquoi pas, tant qu'à y être, référer à ce comité de la Chambre tous les communiqués que chacun des députés bloquistes a émis dans le passé ou va émettre dans le futur? Tant qu'à y être, pourquoi ne pas étudier tout cela? Pourquoi ne pas demander, tant qu'à y être-on est bien partis-à la Chambre de censurer les déclarations que nous allons faire ici? Pourquoi ne pas former un comité parlementaire de censure? On aurait une sorte de grand comité de sages qui décideraient, dans leur grande sagesse, ce qui se dit et ce qui ne se dit pas, ce que les députés du Québec peuvent faire et ce qu'ils ne peuvent pas faire.

(1155)

C'est ça, l'objectif de toute la mise en scène des réformistes et des libéraux. Ce sont de vrais frères siamois sur toute la ligne à ce sujet: deux corps, une seule tête. Mais je ne vous dirai pas l'intelligence qu'il y a dans cette tête-là.


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Je pense très sincèrement que la façon dont on procède présentement est dangereuse en se référant à un communiqué d'un député pour se faire réviser et se faire étudier par ses pairs.

Finalement, on se réfère à un communiqué d'un homme politique exprimant des idées politiques à un comité parlementaire pour étude. Quel sera le résultat, sachant que les personnes qui étudieront la déclaration contenue dans le communiqué par des libéraux et des réformistes qui vont former la grande majorité des individus qui vont étudier toute cette question?

On connaît déjà le résultat: les accusateurs seront les juges, en grande majorité. Dans quel pays vivons-nous? Où s'en va-t-on? Il faut s'interroger.

Ceux et celles qui condamnent non seulement le député de Charlesbourg mais tout le mouvement souverainiste-et ça, c'est vrai parce qu'on a entendu toutes sortes de choses en cette Chambre-c'est de tout le mouvement souverainiste qu'ils veulent faire le procès, et ça, malgré que deux juristes, un juge de paix du Québec et un de l'Ontario, ont jugé que la déclaration contenue dans le communiqué du député de Charlesbourg n'était rien de plus qu'une offre d'emploi. Malgré cela, les parlementaires de cette Chambre ont décidé d'aller à l'encontre de la décision des juristes et de poursuivre dans cette démarche politique. Et ça, c'est dangereux.

Je vais vous avouer quelque chose: ce que le député de Charlesbourg a dit, je l'ai dit moi-même dans mon comté. Tous les autres députés du Bloc québécois l'ont dit, autant aux fonctionnaires fédéraux, autant aux gens qui travaillent à Postes Canada, au Centre d'emploi du Canada, au détachement de la GRC à Joliette. Je leur ai dit: «Ce sera plaisant, vous allez maintenant venir travailler dans un Québec souverain, le lendemain d'un oui.» Ce sont des déclarations qui étaient normales. La population s'interroge: «Qu'est-ce qui va advenir de notre emploi? Qu'est-ce qui va nous arriver le lendemain d'un oui?»

C'est normal qu'on donne des précisions, comme les fédéralistes l'ont fait lorsqu'elles ont dit aux personnes âgées: «Si vous votez oui, vous allez perdre votre pension.» Il fallait qu'on réponde à des arguments semblables et dire: «Voyons donc, on vous fait peur pour rien au sujet de votre pension. Le lendemain du référendum, le lendemain d'un oui, au lieu que votre chèque provienne d'Ottawa, il proviendra du Québec. Ce sont avec nos taxes et nos impôts qu'on vous paie cette pension.»

C'est la même chose pour les gens de l'armée, il fallait les rassurer, car ils s'interrogeaient. Lorsqu'on me dit qu'avec un communiqué on a influencé les gens de l'armée, qu'on les a incités, je pense que c'est de manquer de confiance envers les gens qui travaillent pour l'armée. Je pense que c'est même une insulte à leur égard, compte tenu que si on examine un petit peu attentivement les résultats du référendum, on va se rendre compte que, dans l'armée canadienne, les Québécois et Québécoises, francophones et anglophones qui y travaillent ont voté dans une proportion à peu près équivalente au résultat national au Québec.

Donc, il y en a des souverainistes, à peu près 50 p. 100, dans l'armée canadienne, et il y en a également 50 p. 100 qui ne le sont pas.

(1200)

Si le fait d'informer la population des lendemains d'un oui à la souveraineté est un crime, je plaide coupable. Si de rassurer la population face aux aberrations des fédéraux est un crime, je plaide également coupable. Si de défendre les intérêts des gens de mon comté, les intérêts du Québec et le projet souverainiste est un crime, je plaide également coupable.

Si d'inviter la population en général-et je terminerai ainsi-au respect d'une décision démocratique et de leur demander, au lendemain d'un oui, de transférer leur loyauté et leur amour au nouveau pays, un pays qui s'appellerait le Québec, est un crime, je plaide également coupable. Je plaide coupable d'être un démocrate.

[Traduction]

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Madame la Présidente, comme la plupart des députés qui ont participé au débat, aujourd'hui et hier, je trouve que cette question est très grave. Sa gravité n'a échappé à personne à la Chambre, et nous ressentons tous la même chose.

La question dont nous avons discuté ces derniers jours est aussi extrêmement chargée d'émotion. Elle l'est en ce qui me concerne. Elle l'est pour les membres des Forces canadiennes. Elle l'est pour chaque Canadien.

Je voudrais féliciter la présidence du leadership dont elle a fait preuve en reconnaissant immédiatement la gravité de la question.

Ce débat est bien plus qu'un débat sur la conduite du député de Charlesbourg. C'est bien plus qu'un débat sur l'ancien chef de l'opposition officielle. C'est bien plus qu'un débat sur le caucus séparatiste à la Chambre. C'est un débat sur le Canada.

Je suis un fédéraliste. J'aime mon pays. Ce n'est pas seulement une partie de ce que nous appelons le Canada qui fait de notre pays ce qu'il est; c'est l'ensemble de toutes ses composantes. Ce sont toutes les provinces. C'est l'ensemble de sa population. C'est chaque citoyen. Ce sont chaque homme, chaque femme et chaque enfant d'un océan à l'autre qui font du Canada ce qu'il est. Si je puis me permettre d'utiliser l'expression, je dirais que le Canada forme vraiment une société distincte.

Cinq fois dans ma vie j'ai eu le privilège de prêter un serment d'allégeance envers la Souveraine du Canada. La première fois, j'avais 17 ans. C'était à Calgary, en Alberta, lorsque je me suis joint aux forces armées. Je fouillais dans mes choses hier, en réfléchissant au débat qui se tient à la Chambre, et j'ai sorti de vieux papiers pour voir si je pourrais mettre la main sur le serment d'allégeance que j'ai prêté en entrant dans les forces armées. Je l'ai trouvé. Il dit ceci:

Moi, James A. Hart, jure que je serai fidèle et porterai une sincère allégeance à Sa Majesté la reine Elizabeth II, à ses héritiers et à ses successeurs, conformément à la loi. Et que Dieu me soit en aide.


690

Ce serment a été signé le 12 avril 1973, par moi-même et par l'officier certificateur du centre de recrutement des Forces canadiennes à Calgary, en Alberta.

Ce fut un jour important dans ma vie. Tous les membres des Forces canadiennes, qu'ils soient anglophones ou francophones, prêtent le même serment d'allégeance aujourd'hui. C'est important. Par ce serment, ils s'engagent à respecter les lois du Canada.

(1205)

Quand j'étais dans la marine, j'ai servi sur trois destroyers canadiens sur la côte ouest du Canada et j'ai travaillé avec des francophones. J'ai travaillé côte à côte avec des Québécois. Chacun de ces jeunes gens qui ont servi sur ces navires avait une très importante tâche à remplir pour la souveraineté canadienne. Ils ne s'identifiaient pas comme francophones du Québec ou de l'Alberta. Ils disaient qu'ils étaient fiers d'être Canadiens.

Une voix: Tout était en anglais.

M. Hart: Le député fait erreur. Ces marins parlaient français à bord des navires et servaient en compagnie d'anglophones comme membres d'une équipe au service du Canada.

Je me suis demandé à maintes reprises, depuis quelques jours et les quelques mois qui se sont écoulés depuis le référendum, ce que ces jeunes Canadiens auraient pensé d'un tel communiqué. Ces jeunes Canadiens auraient sans doute trouvé le communiqué insultant pour eux.

Depuis cinq mois, j'ai entendu des Canadiens d'un océan à l'autre dire qu'ils trouvaient ce communiqué insultant, car il franchissait une ligne à ne pas franchir. Il incitait les membres des Forces canadiennes à débattre de la sécession d'une province. Ces derniers ne devraient pas être entraînés dans un tel débat. Ils ont prêté allégeance au Canada tout entier, et non à une partie seulement.

Ces derniers jours, un certain nombre de questions ont été posées à la Chambre sur ma motion. Celle-ci représente le point de vue des Canadiens qui m'ont consulté pendant quelque cinq mois à ce sujet.

Je ne suis pas avocat. Je suis un simple citoyen. Je ne pratique pas le droit et ne l'ai jamais pratiqué. Je suis un citoyen ordinaire. Avec les ressources à ma disposition, j'ai recueilli les sentiments des Canadiens, que ceux-ci m'ont communiqués par lettre, téléphone, télécopieur, et je les ai intégrés à la motion que j'ai présentée à la Chambre et que le Président de la Chambre a jugée recevable et fondée sur des présomptions suffisantes.

S'il y a quelque chose qui cloche dans cette motion, ce n'est ni son libellé ni son esprit, mais plutôt l'interprétation qu'en font certains députés, qui se seraient opposés à toute motion traçant une ligne pour les Canadiens et disant clairement: «Si vous franchissez cette ligne, ce sera une erreur de votre part.» C'est cela que je tentais de faire. J'estime que c'était là l'objet de la motion.

Les libéraux tentent d'écarter l'accusation initiale de comportement séditieux et insultant. Parlons-en pendant quelques instants. On m'accuse à la Chambre d'avoir jugé et condamné d'avance le député de Charlesbourg. Rien n'est plus loin de la vérité. Dans les observations que j'ai faites en présentant la motion, j'ai dit que le député allait avoir l'occasion de se défendre devant un tribunal.

Si vous allez à l'extérieur de ces murs sacrés et si vous vous adressez à la police, on vous dira que la première chose à faire, lorsqu'un crime est commis et qu'il y a un suspect, c'est de porter une accusation. C'est précisément ce que j'ai fait à la Chambre. J'ai porté une accusation.

(1210)

Comment être sûr que les libéraux tiendront compte du but précis visé par ma motion? Il n'y pas de moyen d'en être sûr. Les libéraux s'inquiètent de la dimension politique de la question. Ils craignent tellement d'offenser quelqu'un au Québec qu'ils sont prêts à pousser sous le tapis les aspects criminels possibles de la question et à faire passer la politique en premier. Ils s'efforcent une fois de plus de faire prévaloir le statu quo. La rectitude politique est la seule chose qui les préoccupe.

Comment, nous, les Canadiens, faisons-nous nos lois? Comment décidons-nous ce qui est bien et ce qui est mal dans notre société? La réponse est simple, c'est ce que les Canadiens trouvent moralement acceptable qui détermine la frontière entre le bien et le mal. Nous parlons ici de ce qui est acceptable, que ce soit dans le Code criminel ou en matière d'accusations de meurtre ou de vol. La limite, c'est ce que les Canadiens jugent moralement acceptable. C'est là que se situe la frontière et, si vous transgressez cette frontière, vous vous exposez à des accusations. C'est exactement ce que nous faisons ici. Si la Chambre des communes, où nous sommes venus représenter nos électeurs, ne nous le permet pas, pourquoi y venons-nous?

Le but visé par ma motion est clair. Elle demande à la Chambre des communes de décider si le geste du député de Charlesbourg allait trop loin. C'est ce que je demande. Il fallait porter une accusation parce qu'il n'y a pas moyen d'agir sans cela. C'est la même chose dans la société lorsqu'un policier rencontre le suspect d'un crime. Il ne peut rien faire à moins qu'il y ait une accusation.

C'est ce que j'ai fait. Je me suis servi des moyens et des ressources offerts à un député pour soulever la question et la soumettre à un débat là où elle doit être débattue, c'est-à-dire sur la tribune la plus ouverte au Canada, celle où tous les coins du Canada, sans exception, sont représentés, le Parlement du Canada, le plus haut tribunal du pays. Nous devrions tous nous préoccuper de l'intégrité de la Chambre des communes. Nous devrions tous nous demander si le geste qui a été posé est acceptable.

Hier, j'ai offert à tous les partis à la Chambre de collaborer pour aller au fond de l'affaire, mais j'ai découvert que les libéraux voulaient émasculer la motion, la charcuter et la banaliser. Ma motion a été réduite en pièces par le whip libéral et c'est honteux


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pour la Chambre des communes. C'est honteux pour les hommes et les femmes qui font partie des forces armées et pour tous les Canadiens.

Les Canadiens n'obtiennent pas ce qu'ils voulaient. Ils voulaient tirer la ligne pour s'assurer que, s'il y a menace de sécession de nouveau, les membres des Forces canadiennes ne seront pas traînés dans ce débat.

Ce n'est pas la même chose que les employés du bureau de poste, que les employés d'une société d'État. Les membres des forces armées sont différents. Pourquoi? Parce qu'ils ont prêté un serment d'allégeance à leur pays et ont juré de donner leur vie pour leur pays s'il le faut.

Je voudrais maintenant parler de ce que le gouvernement libéral a fait avec cette affaire. En tant que simple député de l'opposition, membre du troisième parti, j'ai pris l'initiative de faire quelque chose qui aurait dû être fait par le gouvernement libéral du Canada, qui a fermé les yeux sur cette affaire et n'a rien fait à ce sujet. Il dit qu'il a fait quelque chose.

(1215)

Le ministre de la Défense nationale a dit à maintes reprises dans la presse parlée et écrite que c'était un geste scandaleux, que les Canadiens devraient être outrés par ce communiqué. Il a dit que c'était tout à fait déplacé. Il est allé jusqu'à dire que le député de Charlesbourg devrait être démis de ses fonctions de porte-parole de l'opposition officielle en matière de défense. Il a également dit qu'il consulterait le ministre de la Justice ainsi que le juge-avocat général des Forces armées canadiennes. Il a dit tout cela et nous n'avons rien entendu d'autre par la suite.

Qu'avons-nous entendu de la part du ministre de la Défense nationale? Absolument rien. Pas un mot. Le gouvernement dit maintenant que le juge-avocat général a publié un rapport. Les Canadiens attendent de savoir ce que contient le rapport. Or, voilà qu'on refuse carrément de leur en divulguer le contenu.

Le juge-avocat général a une double fonction au Canada. Sa fonction principale est d'administrer le système de justice militaire et d'en assurer le bon fonctionnement, mais il est également le conseiller juridique de l'équipe dirigeante du ministère de la Défense nationale et du ministre de la Défense.

C'est pourquoi le juge-avocat général ne peut pas divulguer le rapport qu'on lui a commandé. Étant l'avocat du ministre de la Défense nationale, il trahirait un secret s'il en dévoilait le contenu. Le double rôle du juge-avocat général ne porte pas chance aux Canadiens.

Voilà une situation regrettable. Si le juge-avocat général est arrivé à la conclusion qu'il n'y a pas lieu de porter des accusations, les Canadiens se demanderont naturellement ce qui peut empêcher la divulgation du rapport. Selon eux, il n'y aurait aucun problème et il serait tout naturel de rendre le rapport public et de montrer qu'on n'a rien trouvé d'incriminant. Je suppose qu'on ne le fera pas à moins de fortes pressions.

Je voudrais revenir brièvement à la question du chef d'accusation. Si un agent de police arrivait sur les lieux d'un crime, un meurtre par exemple, et qu'il détenait un suspect, accuserait-il ce dernier de meurtre ou l'accuserait-il d'avoir utilisé indûment un instrument contondant, un oreiller ou une pierre, ou encore l'accuserait-il, conformément à la loi actuelle, d'avoir mal entreposé son arme à feu? Je suppose que l'individu serait accusé de meurtre. D'autres chefs d'accusation pourraient être portés, mais on ne perdrait pas de vue le chef principal. Il n'y a qu'ici qu'on agit de la sorte.

Chaque député et les Canadiens qui nous écoutent doivent se demander si le député de Charlesbourg a commis un acte offensant pour eux. Chaque député devrait ensuite faire ce qu'il doit, c'est-à-dire voter contre l'amendement proposé par le gouvernement et appuyer ma motion dans sa forme initiale.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Madame la Présidente, hier j'ai réprimandé devant la Chambre le chef de l'opposition pour ce qu'il a dit en réaction à la question dont est saisie la Chambre. Sa façon de voir était déraisonnable. Ce qu'il a dit n'était pas conforme aux faits et je l'ai fait remarquer. Aujourd'hui, je suis malheureusement obligé de recommencer. La différence est que ce que le député vient de faire est encore peut-être pire que ce que nous avons entendu hier.

(1220)

Le député a l'audace de nous dire aujourd'hui que sa motion est juste bien qu'il sache pertinemment que les faits ne sont pas exacts. Par exemple, il dit dans sa motion: «invitant tous les membres francophones des Forces canadiennes», etc. J'ai lu le communiqué et ces mots ne s'y trouvent pas, et le député a dit en privé qu'il sait que ces mots ne s'y trouvent pas. Pourtant, il demande aujourd'hui à la Chambre d'adopter la motion qui, il le sait, n'est pas exacte. Il agit de façon aussi mal, sinon pire, que les autres car il sait pertinemment que ce qu'il fait n'est pas bien.

M. Breitkreuz (Yorkton-Melville): Que disait le communiqué?

M. Boudria: Le communiqué a été lu à la Chambre.

M. Breitkreuz (Yorkton-Melville): Lisez-le.

M. Boudria: Les députés savent que le communiqué ne me plaît pas. Il n'aurait jamais dû être publié. Le député n'aurait jamais dû le faire. Nous le savons. Le Président a déjà décidé que la question de privilège paraissait fondée à première vue et que l'affaire pourrait être renvoyée au comité parlementaire à condition de présenter la motion appropriée. Mais qu'est-il arrivé? Au lieu de présenter la motion appropriée habituelle, le député a décidé de présenter cette


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motion en forme de diatribe dont la Chambre est saisie. Pourquoi a-t-il fait cela au lieu de présenter la motion habituelle?

M. Hart: Parce que le gouvernement ne fait rien.

M. Boudria: Plein d'autres affaires ont été renvoyées au comité des privilèges. Je n'ai jamais vu une motion comme celle-ci. Il n'y a que les réformistes pour gâcher une question qui, autrement, n'aurait pas posé de problèmes.

On voit dans leurs interventions d'hier que le député et le chef de son parti étaient prêts à sacrifier la justice sur l'autel de la propagande réformiste. Je n'aime pas ce que le Bloc québécois a dit dans le communiqué, mais ce qu'est en train de faire le Parti réformiste est tout aussi terrible, sinon pire.

M. Hart: Où étiez-vous? Vous n'avez rien fait.

M. Boudria: Le député peut crier jusqu'à s'égosiller, ça ne change rien aux faits. Au début de l'intervention qu'il a faite plus tôt aujourd'hui, il a dit qu'il était un Canadien ordinaire qui représentait ses électeurs à la Chambre. Moi aussi.

M. Strahl: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je ne crois pas qu'il y ait quorum. Pourriez-vous vérifier qu'il y a quorum?

Après le compte:

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Nous avons le quorum.

M. Boudria: Je voulais simplement vérifier rapidement ce qu'il adviendrait de la motion du député, selon la procédure, si nous n'avions pas le quorum.

Une voix: Où est-il dans le moment? Il est parti.

M. Boudria: Il se pourrait que la question soit rayée du Feuilleton tout simplement. J'ai remarqué que le député ne semble pas être en mesure, actuellement, de signaler l'absence du quorum. De toute façon, je vais poursuivre mes observations pendant qu'il se fait semoncer vertement par son whip.

Revenons-en à la motion dont la Chambre est saisie. Voici ce dont nous débattons. Un député a publié un certain communiqué de presse. Le choix de certains mots de ce communiqué ne me plaît pas et ne plaît certainement pas au député qui a fait valoir qu'il était fondé, à première vue, de soulever la question de privilège à cet égard. Le Président a ensuite rendu une décision en déclarant que la question de privilège était bel et bien fondée à première vue. Tous ces éléments sont établis.

L'objet du débat actuel n'est donc pas de déterminer si la question de privilège paraît fondée, c'est déjà fait. Le Président a invité le député à présenter la motion habituelle de renvoi au comité. Je ne devrais peut-être pas employer le mot «invité». Il indiquait qu'il était prêt à accepter la motion habituelle. Techniquement, je pense que c'est le terme approprié. La motion appropriée n'a jamais été rédigée. À sa place, on a eu une motion qui contient des inexactitudes de faits, ce que le député lui-même a reconnu.

(1225)

La motion contient également dans le corps, pas dans le préambule, un verdict de culpabilité et cela n'est pas normal. Hier, un amendement a été proposé par mon collègue, pour que l'on renvoie le sujet à un comité de la façon habituelle, mais en éliminant de la motion le verdict de culpabilité, simplement parce que c'est inacceptable. Même si la motion était acceptable, ce qui n'est pas le cas, la Chambre ne peut certainement pas se substituer à une cour de justice pour connaître des affaires criminelles. C'est une affaire qui relève des tribunaux.

Je vois que le député est maintenant en mesure de demander le quorum. C'est ma façon de dire sans faire allusion à l'absence ou à la présence de députés.

Le député d'en face fait maintenant preuve de son expertise en matière de procédure en comparant la motion d'aujourd'hui à un article d'initiative parlementaire à mon nom, choisi pour faire l'objet d'un vote, visant le député de Lethbridge. Je vais lui expliquer cela brièvement de sorte qu'il puisse comprendre.

M. O'Brien: Allez lentement, Don.

M. Boudria: C'est ce que je vais essayer de faire.

Le sujet en question, s'il avait été présenté sous forme de motion, c'est-à-dire autrement que sous la forme d'une question de privilège, ce qui était possible et est encore possible, aurait fait l'objet d'un débat à la Chambre. La motion pour renvoyer le sujet au comité parlementaire est arrivée plus tard, après que le Président eut indiqué qu'il était prêt à recevoir la motion habituelle. La motion habituelle est différente. Le député peut écouter attentivement et nous lui expliquerons tout cela un peu plus tard.

Revenons à la question à l'étude à la Chambre aujourd'hui. Il s'agit de savoir si oui ou non il est approprié de mentionner dans la motion un verdict de culpabilité comme le faisait le député.

M. Strahl: Vous ne voulez pas intervenir contre les séparatistes, mais vous êtes prêts à vous attaquer au député de Lethbridge parce qu'il fait son travail.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Pourrions-nous avoir un peu d'ordre, s'il vous plaît?

M. Boudria: Madame la Présidente, je pense que tout cela fait partie de la nouvelle façon de faire de la politique.

Comme je le disais avant d'être si grossièrement interrompu par le député d'en face, la Chambre doit déterminer si oui ou non la motion dans sa forme actuelle est acceptable. Elle ne l'est pas. J'ai fait ressortir les inexactitudes factuelles du préambule; dans le corps du texte lui-même, il faut aussi noter le verdict de culpabilité visant quelqu'un. Tout ceci n'est pas conforme à la procédure. La motion n'est pas antiréglementaire, mais elle est mal formulée.

En outre, la motion contient une accusation criminelle. Cette Chambre ne devrait jamais traiter de questions portant sur des infractions criminelles et je crois qu'elle n'acceptera pas de le faire. Ces questions relèvent plutôt de la compétence des tribunaux. Je pense que dans le cas d'une accusation semblable, une personne


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doit déposer une dénonciation auprès d'un tribunal, probablement en vertu des lois de la province où le communiqué a été publié ou, si le communiqué a été publié dans plusieurs provinces, il faudrait déposer une dénonciation dans toutes les provinces en cause. Qui sait. De toute façon, ce n'est pas la question dont nous sommes saisis aujourd'hui.

La question est de savoir non pas si la Chambre devrait se transformer en tribunal pénal, mais plutôt si nous devrions renvoyer la question au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

(1230)

Madame la Présidente se souviendra que j'avais indiqué, la première fois que nous avons discuté de cette question de privilège, que la tâche du comité, dont j'ai l'honneur de faire partie, est d'examiner les questions touchant la procédure et les affaires de la Chambre, mais aussi certains autres points comme les questions de privilège. On fait parfois appel au comité à cette fin, mais pas souvent.

Le dernier cas dont je me souvienne s'est produit vers 1992, alors qu'une question a été présentée à ce comité. Si je peux rafraîchir la mémoire de la Présidente, le cas était celui d'une personne qui avait témoigné devant un comité parlementaire et avait utilisé un enregistrement vidéo produit par Radio-Canada durant sa déposition.

Le producteur de Radio Canada avait jugé bon d'appeler cette personne et de la menacer de poursuites judiciaires parce qu'elle avait utilisé cet enregistrement sans autorisation, comme si c'était nécessaire lorsque l'on comparaît devant un comité parlementaire. Le Président avait jugé que la question de privilège paraissait fondée à première vue et le comité fut saisi de l'affaire. C'est le cas le plus récent qui me vienne à l'esprit.

Bien que le cas présent soit très différent, le comité parlementaire en serait pareillement saisi et on lui présenterait des preuves. Quel genre de preuves? Ça pourrait être une variété de choses.

Il paraît que les versions française et anglaise de ce communiqué ne sont même pas identiques. Il y a des différences dans le choix des mots. Connaissant moi-même les deux langues, j'ai lu les deux versions et je les trouve différentes. Le communiqué a plus de mordant dans l'une des langues. Selon moi, la version anglaise a plus de mordant que la version française.

Le comité pourra examiner tout cela. Il pourra entendre des témoins; non pas pour déterminer s'il y a eu délit criminel, parce que ce n'est pas à nous de le faire, mais pour déterminer si les présomptions sont suffisantes pour juger qu'il y a effectivement eu outrage au Parlement. C'est ça la question. Je trouve dommage d'avoir à le dire si directement, mais même les réformistes le comprendront. Confions donc la question au comité.

Il est dit dans la motion que la question doit être confiée à l'examen du comité, et pourtant, après deux jours de débat, personne ne semble très intéressé à la renvoyer au comité, même si c'est cela qui a été demandé.

Nous, et je parle en mon nom propre et au nom de mon collègue le secrétaire parlementaire, avons proposé un amendement qui supprimerait les mots offensants et donnerait une forme plus traditionnelle à une motion de ce genre. Devinez ce qu'a fait le Parti réformiste? Il a proposé un nouvel amendement, faisant allusion dans la motion à un délit criminel, bien que sachant pertinemment que le comité ne peut entendre une affaire de ce genre.

Quelle est la gravité de cette affaire? Le Parlement est plus important que nous tous. Il était là bien avant moi, même si je suis ici depuis très longtemps. Il sera là longtemps après moi, longtemps après les réformistes, longtemps après les bloquistes. Ce que nous devons à cet endroit, à cette institution et à ce pays, c'est de faire preuve de justice, et non pas du genre d'opportunisme dont nous avons été témoins ces deux derniers jours.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Madame la Présidente, ce débat est triste pour les Canadiens et Canadiennes et triste pour les Québécois et Québécoises. Pourquoi? Parce qu'il illustre avec une clarté aveuglante l'incompréhension d'un fait majeur, incontournable qui est à la base de ce conflit.

C'est qu'il y a au Québec un peuple différent, distinct, qui a tenu un référendum, le 30 octobre, qui a presque donné un résultat majoritaire, avec une participation de 94 p. 100 de la population.

(1235)

Ce référendum était à propos de la souveraineté de ce peuple. Mais ce référendum était à propos de la souveraineté de ce peuple en partenariat, en proposition de partenariat économique et politique avec le Canada.

Les Québécois, face à l'impossibilité de régler la question constitutionnelle pendante, urgemment pendante depuis plus de 30 ans, cherchent une solution. Ils sont presque 50 p. 100-je pense même qu'aujourd'hui, ils sont plus de 50 p. 100-à savoir que la solution ne viendra pas de «réformettes» à l'intérieur du Canada. Je pense qu'il y a une majorité de Canadiens qui pensent également qu'il faudra qu'il y ait, dans ce pays, un leadership courageux pour regarder la situation comme elle est.

Pour éclairer un peu les lanternes, je veux dire que cette question de la préparation d'un Québec souverain à se donner une défense, quelle qu'en soit l'organisation, est inscrite dans l'offre de partenariat. On y parle de la proposition qui a été convenue pour participer à l'OTAN, à NORAD et être un pays digne de ce nom. Le débat et la préparation à ce sujet se tiennent depuis longtemps.

J'ai, à titre de conseillère au programme du Parti québécois, participé à des colloques organisés par des universitaires et auxquels ont participé des professeurs fédéralistes, royalistes mêmes,


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du Collège militaire royal de Saint-Jean, sur la souveraineté et la défense. C'est un sujet qui s'est discuté. C'est un sujet que, de façon responsable, nous devions traiter, nous devons traiter. Alors, il y a eu des colloques, des débats, des discussions, des questions aussi.

Les soldats et les officiers québécois qui voyaient ce référendum se passer, qui voyaient les sondages, se demandaient: «Mais qu'adviendra-t-il de nous?» Et certains ont eu des raisons d'être inquiétés. ll y a eu des articles dans les journaux d'éminents professeurs qui disaient que la souveraineté du Québec devrait permettre au Québec, pour remplir ses obligations internationales, de se doter de tel type d'armée, tel type de défense.

Dans le programme du Parti québécois, les informations relatives à la souveraineté et au référendum comportaient des dispositions à cet égard. Le député de Charlesbourg, critique en matière de défense, se faisait demander ce qu'il arriverait des soldats et de l'armée, ce qu'il arriverait des Québécois qui sont soldats ou officiers de l'armée et il se faisait demander s'ils auraient des emplois, où, quand et comment.

Il était tout à fait naturel, normal, responsable qu'il dise ce qu'il pensait qui se passerait et qu'il dise ce qu'il savait qui se passerait. En aucun moment il n'y a eu, et c'est vrai dans toutes les discussions auxquelles j'ai participé, aucune manifestation, mais encore moins d'intention, que la volonté était d'en appeler à la loyauté aussi longtemps que le référendum ne serait pas voté par une majorité de Québécois et de Québécoises

Alors, c'est en toute responsabilité que nous nous sommes préparés. Et c'était au su de tout le monde, ce n'était pas caché. C'était clair dans tous les documents qui étaient disponibles. Si ce fait apparaissait séditieux, pourquoi n'a-t-il pas été soulevé avant?

(1240)

C'est parfaitement incompréhensible, c'est parfaitement incohérent, sauf si l'intention n'est pas de rassurer, sauf si l'intention n'est pas de dire la vérité. C'est parfaitement incohérent, illogique. C'est parfaitement dangereux, parce que cela soulève des passions. C'est parfaitement dangereux, sauf si l'intention que l'on a est de ne pas de respecter le peuple québécois et ses choix démocratiques.

La leçon, l'information principale de ce débat c'est que cette préparation du peuple québécois, au vu et au su de tous, à sa souveraineté, que cette préparation, même si nous sommes élus clairement sur des bases connues, n'est pas acceptée en cette Chambre.

J'ai beaucoup regretté-je ne parlerai pas de la motion du Parti réformiste-j'ai dit et je vais répéter que quant à moi c'est un appel à l'intolérance, c'est leur refus de comprendre la situation dans laquelle se trouve le Canada. Et c'est peut-être davantage encore une manifestation d'indignation parce qu'ils ne forment pas l'opposition officielle. Mais quelle opposition officielle seraient-ils? Et quelle proposition font-ils aux Canadiens? Celle de comprendre la situation québécoise? Celle d'aider à sortir de cette situation qui a des effets importants sociaux, économiques, politiques, et de laquelle, nous, nous voulons nous sortir? Non.

Peut-être que cette motion n'a qu'un objectif, celui de préparer la prochaine campagne électorale qui devrait se faire en cassant du sucre sur le dos des Québécoises et des Québécois, sur le dos du Québec.

Cela ne me surprend pas du Parti réformiste. Cela me déçoit mais ne me surprend pas. Mais là où je suis surprise et déçue, c'est quand j'ai vu le Parti libéral, le gouvernement au pouvoir, responsable, en charge des destinées du Canada, aujourd'hui céder à la tentation, à son tour, de casser du sucre sur le dos du Québec.

S'il y avait eu le moindre doute quant à la capacité de mise en accusation. . . Si le Parti libéral vote aujourd'hui sur cette proposition, cela veut dire qu'il prétend qu'il y a dans ce geste-là quelque chose qui pourrait mettre en accusation, autrement il n'y aura pas d'enquête. C'est donc dire que le Parti libéral prétend qu'il peut y en avoir. Même s'il ne veut pas qu'il y ait dans l'acte une accusation, il prétend, parce qu'il veut porter la cause au comité, qu'il peut y en avoir une.

Le parti au pouvoir, à son tour, fait preuve d'une volonté de casser du sucre sur le dos du Québec, de ne pas reconnaître la situation existante.

(1245)

J'ai regretté vivement qu'il ne classe pas l'affaire. S'il y avait eu le moindre doute tout de suite après le référendum, est-ce que ce grand parti aurait attendu quatre mois pour soulever quelque chose d'aussi important, qui fait que toutes affaires cessantes, on ne fait que cela à la Chambre des communes?

Ce grand parti serait donc indigne de la confiance que les Canadiens mettent en lui? Je pense que les libéraux, le parti au pouvoir s'est trompé. Mais quand on s'est trompé, il n'est jamais trop tard pour se rétracter.

La félonie du député de Charlesbourg, sa félonie potentielle suivant le parti au pouvoir, je vous avertis et je vous le dis, nous en sommes tous coupables. Si, quels que soient les moyens pris, vous vouliez faire en sorte que nous ne soyons plus ici, d'autres après nous seront élus avec des majorités augmentées, d'autres félons. Parce que la seule félonie a été de vouloir se préparer un pays démocratiquement en pensant que, bien sûr, les Canadiens seraient tristes, nous le comprenons, mais qu'ils accepteraient démocratiquement aussi que le Québec devienne maître de sa destinée, qu'ils accepteraient de négocier un partenariat, et forcément que dans ce partenariat l'on parlera, comme le Canada le fait avec les États-Unis, de l'organisation de la défense du continent.

Pour organiser la défense et pour participer aux missions de paix, oui, il y a un besoin d'un moyen de défense. Que les Québécois se soient préparés à cela, il n'y avait rien là d'irresponsable et d'anormal. Si ce qui est responsable et normal repose sur la démocratie, sur la condition expresse de la démocratie, si cela est de la félonie, si c'est potentiellement séditieux, bien, c'est la souveraineté qui est potentiellement séditieuse, la souveraineté démocratique.


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Ce débat devrait au moins permettre de mettre en lumière d'une façon éclatante que nous sommes les représentants du peuple québécois, du peuple québécois qui cherche sa souveraineté, qui a cherché des accommodements et qui n'en a pas trouvés, qui veut garder un lien.

Ce peuple québécois, jamais il abandonnera la conscience qu'il est lui-même. Et si en face on n'est pas capable d'accepter que nous soyons des députés souverainistes qui respectent le Canada. . . Nous respectons le Canada, nous respectons ce pays parce que nous voulons en avoir un, et nous voulons qu'il soit respecté. Mais si on n'est pas capable de reconnaître que nous sommes ce peuple, le Canada se ménage une période floue, difficile, confuse, pour ne pas dire le moins.

(1250)

Nous comprenons que le vote du 30 octobre a été un choc. Pensez que, pour nous également, il en fut un. Et considérez que s'il avait tenu de nous, nous ne serions pas ici aujourd'hui. Nous préférerions être en train de négocier avec le Canada, nous préparer enfin à pouvoir nous occuper de façon sérieuse de l'organisation économique, sociale, politique et culturelle, de la stabilité et de l'avenir, des problèmes importants pour tout le monde.

Je fais un appel. Je sais que je parle au nom de tous les Québécoises et Québécois. Il faut que ce Parlement soit capable d'accepter la situation dans laquelle se déroule l'histoire à ce moment-ci. Nous sommes un peuple, nous continuons à chercher notre souveraineté. Nous allons le faire; nous allons nous organiser. Nous respectons le Canada, mais nous nous attendons qu'on nous respecte comme peuple. Et toute volonté de nous écraser, de nous empêcher, de nous faire taire, d'élargir-comme la proposition des réformistes le fait-juste pour nous le sens de sédition va nous entraîner très loin de la responsabilité première de ce Parlement, qui a la charge sérieuse et grave de préparer l'avenir, de comprendre les situations, de comprendre que ce peuple ne se dissoudra pas dans l'atmos-phère, de vivre avec, de le respecter.

Je souhaite vivement que ce débat, au lieu de nous précipiter dans une incompréhension encore plus grande, dans une colère encore plus grande, dans une intolérance accrue, nous permette au moins de dire: «N'espérez pas que nous disparaissions dans l'atmosphère; vous vous trompez. Si vous vous débarrassez de nous, il y en aura d'autres après nous.»

[Traduction]

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Madame la Présidente, dans mes observations d'aujourd'hui, je vais soulever deux points fondamentaux, soit l'objet de la motion dont nous sommes saisis et les conséquences de cette motion pour l'avenir.

La députée de Mercier a déclaré très clairement que le Bloc québécois avait l'intention de faire tout en son pouvoir pour séparer le Québec du reste du Canada. Les bloquistes entendent le faire dans le cadre de ce qu'ils appellent un processus démocratique et un débat ouvert. Cela semble bien beau.

Cependant, nous devons examiner la motion dans ce contexte. Que faisons-nous au juste aujourd'hui? Nous menons, à titre de Parti réformiste, un débat sur une question que mon collègue, le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt, a soulevée clairement à la Chambre. Il a déclaré qu'il s'agissait de savoir si le député de Charlesbourg avait bel et bien offensé le Parlement et si, de l'avis de la Chambre, ce député était coupable de sédition.

(1255)

Il faut poser cette question à la Chambre pour qu'on puisse traverser ce pont. Nous savons tous qu'un autre référendum se prépare au Québec. On le planifie. C'est le calme avant la tempête. Quand la tempête va-t-elle se produire? Peut-être en juin, en septembre ou peut-être tôt en 1997.

Nous savons qu'en plus de tout cela, il y aura très probablement des élections provinciales au Québec. Il est également très probable qu'on tienne des élections fédérales au Canada durant toute cette période.

Je crois qu'avant que nous soyons frappés par les tempêtes électorales, que nous soyons confrontés à toutes sortes de déclarations et actions marquées au coin de la confrontation et de la partisanerie, nous avons une période de calme durant laquelle nous pouvons examiner certaines questions qui vont se poser à ce moment-là. Nous soulevons une question de base très importante. Il s'agit de savoir si un député de la Chambre s'est placé dans une situation où il a violé les privilèges des autres députés ou s'est comporté de façon offensante. Au Parti réformiste, nous croyons que ces actions étaient offensantes.

C'est au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre qu'il revient de décider si on devrait les considérer comme séditieuses ou non. Si la réponse est oui et si ni le Règlement de la Chambre ni la législation canadienne ne nous apportent une réponse convenable à ce sujet, le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre peut recommander la façon de traiter ce type de situation à l'avenir. Des questions connexes pourraient peut-être se poser dans le cadre d'un grand débat qui aura lieu dans 6 à 12 mois au sujet de l'avenir de nos frontières.

On a déjà soulevé d'autres questions dans le cadre des débats qu'on a tenus le 23 octobre 1995 et avant. Le vice-premier ministre Bernard Landry s'est mis en rapport avec des diplomates étrangers pour essayer d'obtenir leur appui en faveur de la reconnaissance immédiate de la souveraineté du Québec au cas où les Québécois se prononceraient pour le «oui».

Le premier ministre Parizeau a déclaré que le Trésor québécois et sa caisse de retraite avaient mis de côté des milliards de dollars pour défendre la monnaie du Québec. Il s'agit maintenant de savoir si ces gens ont le droit de faire ce type de déclarations. Ont-ils le droit de prendre ces engagements au sein du Canada? S'agit-il d'actes de sédition? D'autres situations semblables vont se produire au sujet des frontières, de l'utilisation de la monnaie, des pensions et de la dette du pays. Il y a beaucoup d'autres questions qu'on devra


696

aborder dans le cadre du débat qui nous attend. Nous devons les examiner maintenant.

Qu'est-ce qui s'est produit dans le cas qui nous intéresse? Le député de Charlesbourg, avec l'approbation du caucus du Bloc québécois, a décidé d'envoyer un communiqué aux membres des Forces canadiennes. Il ne s'agissait aucunement d'une réaction instinctive ou d'un geste inconsidéré. La lettre avait été bien pensée. Elle s'inscrivait dans le cadre de la campagne et avait été approuvée par une organisation qui se proclame l'opposition officielle, une organisation qui constitue un élément important du Parlement élu démocratiquement. Il fut décidé d'envoyer le communiqué aux membres des Forces canadiennes afin de les inciter à quitter l'armée canadienne et à former ce qui devait devenir l'armée québécoise. On leur promettait de les protéger le cas échéant.

Or, de quel droit le député a-t-il agi de la sorte? Nous ne croyons absolument pas qu'il possédait ce droit. Nous estimons que cet acte avait toutes les apparences d'une sédition. C'était un acte qui visait à démanteler le Canada puisqu'il se ramenait à dire que l'armée canadienne allait être fractionnée par ce qu'on pourrait appeler en quelque sorte un ennemi de notre pays.

(1300)

Qu'adviendrait-il si quelque autre pays essayait d'en faire autant? Qu'adviendrait-il si quelque pays étranger au continent nord-américain demandait à nos militaires de quitter les rangs de notre armée et d'aller grossir ceux de l'autre camp? En cas de conflit, que penserions-nous de ce genre de situation? Ce serait tout à fait inacceptable.

Il importe que nous allions de l'avant et que cette affaire soit renvoyée sans plus tarder au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. On en a déjà trop débattu. J'espère que tôt dans la session, soit d'ici fin avril ou début mai, nous pourrons régler cette affaire au sein du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

Il s'agirait ensuite de renvoyer l'affaire à la Chambre, accompagnée d'une recommandation qui concerne non seulement le cas présent mais également, je l'espère, les autres implications qui en découlent. Pour le reste, nous verrons à prendre la mesure qui s'impose en juin, en septembre ou au début de l'année 1997.

Le comité à qui nous renvoyons cette affaire a la lourde responsabilité de décider du sort du Canada de demain et des modalités de règlement de ce genre d'affaires.

Le Parti réformiste du Canada a présenté aux Canadiens un document de travail. Nous y mentionnons 20 conditions. Nous demandons ensuite aux Canadiens d'en ajouter d'autres s'ils les jugent à-propos.

Il est temps d'examiner cette question au moment où une partie du pays, en l'occurrence le Québec, déclare vouloir quitter le Canada. Si cela se produit, si un vote démocratique a lieu, il faudrait déterminer les conditions régissant cette séparation.

La députée de Mercier a dit que le Parti réformiste ralentit le processus et que nous essayons de marquer des points politiques dans la discussion d'aujourd'hui en énonçant ces 20 conditions.

Rien n'est plus loin de la vérité. Ce n'est absolument pas vrai. Nous croyons qu'il faut régler le différend d'une manière très démocratique. Il faut énoncer les conditions régissant la tenue de ces négociations. Cela incombe au gouvernement fédéral. À l'heure actuelle, nous avons entendu peu de choses au sujet des conditions. À croire que le problème disparaîtra.

La députée de Mercier a dit tout à l'heure qu'il ne disparaîtra pas et que, si les députés actuels du Bloc québécois disparaissent et ne sont pas réélus au Parlement, un nouveau groupe, quelque part, reprendra la cause de la séparation du Québec. Je suis certain que c'est vrai. Environ 30 p. 100 des Québécois étaient très attachés à cette cause de la séparation, peu importe les conséquences économiques, sociales ou politiques. Ils veulent faire pression pour avoir leurs frontières et protéger une culture qui, selon eux, survivra dans ces conditions d'isolement.

À mon point de vue, je ne suis pas sûr que cela puisse se produire dans ce nouveau monde de la technologie et des communications, un nouveau monde d'ouverture dans lequel nous nous engageons économiquement et socialement, de concert avec la communauté mondiale. C'est une des raisons pour lesquelles je n'approuve pas la notion de séparation, même en faisant abstraction du puissant argument selon lequel le Canada doit demeurer uni en raison du grand avenir qui l'attend.

(1305)

L'autre point sur lequel on est revenu concernant le député qui a signé le communiqué au nom du chef de l'opposition officielle, aujourd'hui premier ministre du Québec, M. Bouchard, c'était de savoir si la motion que nous avons déposée à la Chambre pour demander s'il y avait eu sédition limitait la liberté de parole du député. Quelles sont les limites à la liberté de parole au Parlement ou au Canada? Avons-nous le droit de préconiser l'éclatement de notre pays sans subir la moindre sanction ou conséquence?

Nous élisons des gens démocratiquement. Nous discutons diverses questions. Nous nous mettons d'accord. Je suis certain que la Chambre s'opposerait, si jamais un vote était pris sur la séparation du Québec. Dans ce contexte, la motivation du député était-elle correcte? Serait-elle conforme à la définition de la liberté de parole?

Le député a déclaré aux membres des Forces canadiennes: «Si vous voulez quitter le Canada, vous pourrez servir dans les forces québécoises.» Celui qui parle ainsi ne s'attaque-t-il pas à l'intégrité


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de notre pays? N'existe-t-il pas de sanctions pour de telles choses? C'est la principale question à laquelle il faut répondre.

Tout pays doit avoir des règles pour préserver son intégrité. Il y a des limites à ce qu'on peut dire ou faire. Le député n'a pas seulement fait une déclaration, il a invité les membres des Forces canadiennes à quitter leur emploi pour se joindre à l'armée du Québec. Ce faisant, il a délibérément miné l'intégrité de notre pays.

Pouvons-nous accepter cela? Je ne le pense pas. Si nous voulons être tolérants et compréhensifs les uns envers les autres sur le plan de la culture, de l'identité ethnique, des attitudes religieuses, des principes sociaux et de diverses idéologies où nous collaborons et laissons toutes ces forces s'exercer dans notre société, c'est très bien. Toutefois, quand un groupe ou un individu brise l'intégrité ou la menace délibérément, pouvons-nous l'accepter? Que deviendra notre pays, si nous laissons ses pires ennemis faire cela?

Supposons, par exemple, que nous soyons encore en guerre froide contre la Russie. Laisserions-nous les Russes entrer et s'emparer d'une partie de notre armée? Les laisserions-nous s'emparer d'une partie de nos ressources naturelles? Nous dirions: «Bien. Allez-y, faites ce que vous voulez. Il n'y a pas de problème.» Qu'arriverait-il alors à l'intégrité de notre pays?

Il doit y avoir des règles pour protéger ce que nous faisons. C'est pourquoi nous renvoyons la question au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Ce comité peut examiner ces questions et établir des règles claires. Il doit y avoir des règles sur ce genre d'attitude. Si le député a enfreint les règles en place, au nom de son caucus, il doit en assumer les conséquences. C'est la responsabilité que le député de Charlesbourg devra assumer. Je crois qu'il doit accepter la situation telle qu'elle est.

Que va-t-il se passer maintenant? Le Parlement a le pouvoir de se saisir de la question. Beauchesne est clair. C'est aussi ce que disent les règles de la Chambre.

Nous devons examiner tous les aspects de la question et éviter de nous en tenir au seul communiqué et de nous borner à demander si c'est un document acceptable ou non ou si le député a eu tort de le publier. Nous pouvons étudier cette affaire sans nous en tenir strictement au communiqué même et voir si les actes du député relèvent de la sédition. Nous pouvons essayer de voir si les règles parlementaires et les lois de notre pays sont adéquates, face à des situations comme celle-là. Nous pouvons examiner d'autres actes de députés de cette assemblée qui constituent non seulement un outrage au Parlement, mais aussi un acte de sédition.

(1310)

Nous pouvons examiner toutes ces choses au comité et présenter un rapport complet qui fera la fierté de notre pays et en préservera l'intégrité.

[Français]

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Madame la Présidente, nous sommes devant un cas qui a été soulevé suite à une motion du Parti réformiste. On a le droit de se demander ce qui se passe en cette Chambre.

On discute de cette question depuis deux jours et pendant ce temps-là, il y a des choses importantes dont il faut discuter au Canada, et pendant ce temps-là aussi, le déficit aura augmenté de 280 millions de dollars. Je pense que dans cette Chambre, on aurait beaucoup d'autres choses à régler plutôt que de discuter d'un document que je qualifie d'offre d'emploi aux militaires québécois qui servent actuellement au Canada.

Dans la motion déposée par le Parti réformiste, on parle des militaires francophones. Or, dans le document, il est clairement dit que cela s'adressait aux Québécois. Lundi soir dernier, le premier ministre du Québec, M. Lucien Bouchard, rencontrait à Montréal les représentants de la communauté anglophone et leur tendait la main. Ce document-là est tout à fait dans le même sens. Il s'adresse aux Québécois, aux Québécois qui le voudront bien.

Je veux immédiatement, si vous me le permettez, prendre le document et le regarder avec vous, parce qu'il y a des choses importantes là-dedans qu'il faut regarder ici.

Ce document a été traduit dans les deux langues officielles du Canada, et on se rappellera qu'il a été diffusé le 26 octobre de l'an passé, il y a donc à peu près quatre mois. Cela fait déjà quatre mois que ce document a été diffusé, et Dieu soit loué, ce n'est pas le Parti réformiste qui forme le gouvernement du Canada parce qu'il leur a fallu quatre mois pour réagir à un document que je qualifie d'offre d'emploi.

Si vous me le permettez, j'aimerais regarder certaines parties de ce document avec vous et les commenter. À la page 2, on y lit:

M. Jacob estime que le Québec a besoin d'une force de défense, notamment pour surveiller et intervenir sur son territoire [. . .]
On parle du territoire du Québec, pays éventuel à ce moment-là, le 26 octobre. Le référendum a eu lieu le 30 octobre pour ceux qui ne s'en rappellent pas. Le député disait dans son document que nous aurions à élaborer certaines politiques. Il n'y a même pas un mot là-dedans qui dit que les militaires devraient voter oui au référendum. Dans ce document, il n'a jamais incité les militaires du Québec-et ce document a été diffusé au Québec-donc, jamais il n'a été question de leur demander de voter oui au référendum.

(1315)

Vous savez, sur les bases, on peut penser qu'autour du 25 ou 26 octobre ça devait parler de politique, parce que les militaires ont le droit de vote. Ils ont le droit de vote, ils ont le droit d'être éclairés sur ce qui se passe à ce moment-là. Il y avait un référendum. Je pense que le Parti réformiste ne sait pas ce qu'est un référendum et ce que cela engageait pour l'avenir.

Si le référendum avait été gagné, le Québec était sur la voie de devenir un pays souverain. Or, à ce moment-là on avait proposé un partenariat avec le reste du Canada, bien sûr, et il était bien indiqué qu'après une année de discussions avec le reste du Canada, le Québec était en droit de se déclarer souverain.


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Qu'est-ce qu'on aurait fait au Canada avec le surplus de militaires? Actuellement, je fais partie du Comité de la défense nationale, et nous sommes en train d'étudier les diminutions. Nous réduisons le nombre de militaires dans les Forces armées canadiennes.

Le Québec fournit à peu près 24 p. 100 du budget de la défense nationale. On ne reçoit pas 24 p. 100, on reçoit beaucoup moins que cela, mais on le fournit à même nos taxes. À ce moment-là, je pense qu'il était normal que le porte-parole du Bloc québécois rétablisse les faits. Le député de Charlesbourg est le porte-parole du Bloc québécois, il l'est encore aujourd'hui, et je pense que cela faisait partie de l'information que l'on doit donner à nos citoyens du Québec qui sont dans les Forces armées canadiennes de leur dire que, advenant. . . Il ne dit pas que le oui va gagner, il ne leur demande pas de voter oui, mais advenant que le oui soit gagnant au Québec, il y aurait une armée qui se constituerait au Québec et que c'est bien normal que les militaires qui sont formés et qui ont envie de le faire se joignent aux forces du Québec.

S'il y a de ces militaires qui souhaitent rester dans les Forces armées canadiennes après qu'un référendum soit gagné, ils le feront. C'est tellement incroyable ce que l'on a à discuter aujourd'hui, que le porte-parole pour le Parti réformiste, le porte-parole en matière de défense à cette époque-là, député de Saanich-Les Îles-du-Golfe, député de la Colombie-Britannique, interrogé sur le sujet disait:

[Traduction]

«Mais le député réformiste Jack Frazer a dit: «Le communiqué de Jacob a été mal interprété. Je ne pense pas qu'on puisse parler d'incitation à la mutinerie. Nous devons reconnaître le fait qu'il y a en ce moment, dans les Forces canadiennes, des militaires qui sont en faveur de la séparation. Du point de vue canadien, ils devraient renoncer à leur engagement envers nous et prêter allégeance au Québec. Si la séparation s'était faite, c'est ce qui se serait passé.»»

[Français]

Le député que je viens de citer a fait partie des forces canadiennes de l'aviation pendant plusieurs années, et c'est un de mes collègues que je respecte beaucoup. Cela a été dit le 4 novembre, donc après le référendum et après cette déclaration, et je pense que le député avait tout à fait raison de dire ce qu'il disait.

Voyez-vous, les députés du Parti réformiste ont peut-être l'impression que lorsque les Québécois font un référendum sur la souveraineté du Québec, ce n'est que pour essayer de négocier un petit peu plus pour nous.

(1320)

Mais ce n'est plus cela du tout. Prenons mon cas personnel et le cas de la plupart de mes collègues. Nous sommes venus au monde au Canada, j'ai été Canadien et le suis encore, mais de coeur j'ai été Canadien, j'ai grandi dans ce pays. Même que dans un concert, lorsque j'étais Petit Chanteur de Granby, j'ai chanté le ô Canada. À cette époque cela avait du sens pour moi. J'ai vieilli, j'ai mûri.

Il y a eu un premier référendum au Québec, j'ai voté oui. À ce moment-là je voulais donner un pouvoir de négocier à mon premier ministre René Lévesque. À ce moment-là je croyais qu'il était peut-être encore possible pour le Québec de survivre comme peuple, comme entité dans ce pays. J'ai continué à réfléchir sur la question, j'ai continué à réfléchir là-dessus. Je me suis aperçu et je m'aperçois encore que ce n'est plus possible.

Il y a dans ce pays-ci deux pays. C'est cela qu'il faut comprendre. Le député de Charlesbourg, lorsqu'il a fait sa déclaration, était parfaitement en droit de le faire. Nous étions en période référendaire et c'était important à ce moment-là que nous renseignions, que nous expliquions des choses aux gens.

Si vous me le permettez, j'ai ici un document qui résume les différentes positions, sur le plan militaire, d'un Québec qui serait devenu souverain. Vous comprendrez avec moi que ces documents ont été préparés avant le référendum. Quand on se prépare pour un grand événement, c'est normal que l'on ait des documents.

Dans une partie de ce document, qui est un document du Bloc québécois, on disait: «Sans nécessairement créer une armée de taille importante, le Québec pourrait néanmoins mettre en place une politique de défense cohérente qui correspondrait directement à ses besoins.»

Je fais partie du Comité de la défense nationale du Canada. C'est la même chose. On essaie d'avoir une politique de défense qui réponde à nos besoins et à nos aspirations. Si on regardait de plus près, nos jeunes militaires-car ils ont voté au dernier référendum, les militaires habitant le Québec-sur les bases et dans leurs alentours, ils ont voté à peu près comme ailleurs. C'est vrai qu'il y a sûrement dans les forces armées des jeunes et des personnes qui sont enclins à voter oui à un référendum. Ils ne sont pas tous souverainistes mais il y en a. Moi je dirais qu'il y en a probablement autant que dans les autres couches de la société, que dans d'autres milieux.

Cela ne veut pas dire que ces gens sont des traîtres, pas du tout. Au moment où on se parle, ils ont prêté serment et ils respectent leur serment. Ils font les tâches qu'on leur demande d'accomplir; ils les remplissent dignement.

Ils les font dignement et très souvent ils sont obligés de se battre pour maintenir leur langue, leur culture. Les francophones qui sont dans les forces armées sont obligés de se battre tous les jours pour parler leur langue.

Le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt, celui qui a présenté la motion, avait l'air de penser et de dire que dans les forces armées canadiennes c'est le bilinguisme total et parfait. J'ai ici une citation de ce député. En 1994, on a fait la refonte et on a fait des propositions au gouvernement. Un comité mixte de la Chambre et du Sénat est allé un peu partout au Canada pour voir ce qu'il y avait à faire et ensuite présenter des recommandations au gouvernement.

Or, le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt, lors de sa visite au Québec, a été très frustré. Il y a un document ici qui dit: «French only briefing angers MP.» C'est un texte tiré d'un journal de l'époque, le 18 mai 1994. Le député d'Okanagan était frustré parce que la période d'enseignement ou d'instruction à une base du


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Québec avait été faite en français, et ce pauvre député, qui ne comprend pas le français-il y avait de la traduction en anglais-était frustré. Cela l'a frustré. Alors, le député nous dit:

(1325)

[Traduction]

«Les membres anglophones du comité ont eu droit à des services d'interprétation simultanée pendant la séance d'information, mais c'était là une piètre consolation pour Hart. Parions que si la situation avait été inversée, on aurait crié au scandale.»

[Français]

J'ai fait le tour du pays et nous avons accepté, à plusieurs endroits, que les explications soient faites par des militaires qui ne parlaient pas français et cela ne nous frustrait pas du tout, au contraire, cela ne nous surprenait pas du tout.

Je ne veux pas dire qu'il ne se fait pas des efforts. Il s'en fait des efforts, sauf qu'il faut être conséquent quand on dit des choses dans cette Chambre. Le député, à ce moment-là, avait été surpris de voir qu'il y avait du français dans les forces et que sur une base militaire francophone du Québec, on s'adressait aux invités en français. Cela l'a surpris. Probablement qu'il ne connaissait pas la Loi sur les langues officielles à ce moment-là, il était jeune député.

Je pense que c'est important de dire les choses comme elles sont. Le Québec, s'il devenait souverain, s'était donné comme objectifs-et je vais vous les lire parce que c'est tellement la même chose que les objectifs que l'on entend ici: «[. . .s'assurer que l'engagement du Québec en faveur de l'instauration d'une paix durable et de la reconnaissance du droit international comme fondement des relations entre les nations se traduira par des gestes concrets qui susciteront l'adhésion de tous les citoyens et citoyennes du Québec.»

Il y avait également des points. On se proposait: «Un Québec souverain prendra des engagements concrets à cet égard, utilisés en priorité, une fois la période de transition suivant l'indépendance terminée; s'opposer à tout recours à la force comme solution aux différends entre les nations;-je pense que cela va de soi ici au Canada-devenir membre actif de l'Organisation des Nations Unies; devenir membre actif de l'Organisation des États Américains, l'OEA, et participer à son oeuvre de construction; participer aux forces de maintien de la paix de l'ONU;-selon nos moyens, madame la Présidente-maintenir son engagement auprès de l'OTAN, l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, et NORAD.» Et caetera.

Donc, il est clair et certain que le document visé ici par la motion du député du Parti réformiste est un document que j'ai qualifié d'une offre d'emploi. Le but de ce document était de sécuriser les gens des Forces armées canadiennes, les jeunes garçons et filles québécois qui font partie des forces canadiennes, de les sécuriser et de leur dire que oui, peut-être que le Québec, à ce moment-là, deviendrait souverain, mais oui, qu'ils auraient une place dans les forces, et oui, qu'ils auraient une carrière dans les forces du Québec.

C'est pour cela que je vous demande, madame la Présidente, de considérer ce document pour ce qu'il est, une offre d'emploi et une mise au point.

[Traduction]

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir participer au débat de la motion. Comme le gouvernement a décidé de limiter le débat, tous les députés à la Chambre n'auront malheureusement pas la chance d'exprimer leur opinion sur une question dont la présidence a dit qu'elle était la plus grave qu'on ait soulevée depuis le début de la 35e législature. C'est honteux, et le gouvernement libéral qui a présenté la motion de clôture devrait vraiment en avoir honte. Les téléspectateurs qui suivent le débat ne s'y tromperont pas en voyant dans l'initiative des libéraux un effort pour étouffer un véritable débat sur le sujet.

(1330)

Je crois que je peux dire que, dans ce débat, les libéraux et les bloquistes n'ont vraiment pas dit toute la vérité. Ils n'étaient pas disposés à aborder le point capital de la motion initiale. La présidence a pourtant jugé qu'il était justifié de saisir la Chambre de cette question de privilège qui paraissait fondée à première vue et que tous les députés devraient avoir la possibilité d'en discuter. Or, ils n'étaient pas disposés à parler de la motion.

Je rappelle que les libéraux ont supprimé tous les mots avant le mot «Que» dans la motion initiale et tous les mots après le mot «Que» de la motion présentée par le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt. Autrement dit, ils ont complètement émasculé la motion et l'ont dénuée de sens à ce stade-ci. Comme je l'ai déjà dit, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre ne peut presque rien faire avec ce qui en reste.

Le Parlement du Canada est vraiment le coeur du pays. Il constitue un de ses organes les plus vitaux, et la vie et l'orientation du pays tout entier sont ou devraient être représentées ici à la Chambre. Je sais que nous discutons de la motion d'amendement, mais la motion initiale, après le préambule, s'énonce ainsi:

Que, de l'avis de cette Chambre, cette action de l'honorable député de Charlesbourg et du chef de l'époque de l'opposition officielle devrait être considérée comme séditieuse et offensante pour la Chambre et constitue un outrage au Parlement et, par conséquent, la Chambre devrait confier la question à l'examen du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
Le Parlement est comme un organisme vivant qui peut supporter toutes sortes d'épreuves et de coups durs et des maladies de tous genres. Cependant, quand quelque chose le frappe au coeur, dans l'intention d'en saper l'autorité, le Parlement doit réagir comme n'importe quel autre organisme. Il doit se défendre.

Il existe peut-être des désaccords, et même de profonds désaccords, à la Chambre entre les députés des différents partis. Nous reconnaissons tous que cela est inhérent à tout bon débat. Cela équivaut aux douleurs de croissance d'une société robuste et en


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bonne santé. Toutefois, lorsqu'un député élu à la Chambre des communes se fixe comme objectif de s'attaquer au coeur même de notre institution et de profiter des privilèges de la Chambre pour atteindre cet objectif, la Chambre se doit de réagir. Elle doit riposter contre ce député, comme le ferait toute personne qui se sentirait attaquée. Cette accusation est différente des accusations de nature plus politique. Celle-ci est beaucoup plus grave.

Comme le Président l'a reconnu, notre motion originale visait à clarifier les choses et à faire aboutir toute cette affaire. Il ne s'agissait pas simplement de dénoncer une mesure prise par un député qui agissait avec opportunisme politique pour faire avancer sa cause. Nous voulions montrer que l'action pouvait être considérée comme séditieuse et que la Chambre pourrait vouloir la considérer comme telle, si nous avions la chance d'examiner toute l'affaire en comité.

Je veux revoir quelques-unes des questions logiques que la motion originale nous amenait à nous poser, à propos de ce que le député de Charlesbourg a dit et fait. Permettez-moi de vous lire un extrait de ce communiqué controversé: «Un Québec souverainiste aura besoin de tous les militaires québécois servant actuellement dans les forces canadiennes. Le Québec a besoin d'une force de défense pour surveiller et intervenir sur son territoire, participer à des missions de paix internationales et répondre aux besoins locaux. Le Québec aura besoin de tous les militaires actuels québécois. Au lendemain d'un oui, le Québec devra créer immédiatement un ministère de la Défense, un embryon d'état-major et offrir à tous les militaires québécois servant dans les forces canadiennes, la possibilité d'intégrer les forces québécoises en conservant leur grande, ancienneté, solde et fonds de retraite.»

L'objet du communiqué est clair, mais quels sont les éléments du communiqué et les gestes posés que nous devons examiner pour déterminer si l'action est séditieuse ou non? Je vais lancer quelques idées.

Premièrement, je crois que la date de diffusion de ce communiqué est des plus importantes. Autrement dit, cela montrerait que le document existait bel et bien, qu'il n'était pas simplement le fait d'une vantardise. Il sortirait au moment opportun afin d'avoir le maximum d'impact et le choix du moment révélerait les mobiles véritables de son auteur. Il fallait qu'il soit publié à un moment tel qu'il nuise le plus possible à l'État et accentue la probabilité que les militaires désertent les Forces armées canadiennes et appuient un nouveau régime.

(1335)

C'est ainsi que le député de Charlesbourg a envoyé son document aux bases des forces armées le 26 octobre, soit quelques jours avant le référendum critique du 30 octobre. L'enthousiasme était alors presque à son comble parmi les séparatistes et ce fut une semaine explosive dans l'histoire du Canada et du Québec. Bien sûr, il ne pouvait y avoir de meilleur moment pour faire appel aux sentiments des membres séparatistes des forces armées que quelques jours à peine avant une victoire possible aux urnes du Québec.

Ensuite, il faut tenir compte ici de la position d'autorité du député. Si le député n'était pas membre d'un parti reconnu, s'il avait été indépendant et n'avait pas une influence largement reconnue, son communiqué aurait eu moins d'impact à la Chambre des communes. Un communiqué appelant à la sédition aurait alors été en un sens pris moins au sérieux.

Or, le député fait partie de l'opposition officielle. Cinquante-deux autres députés et lui ont pour seul objectif de sortir le Québec de la Confédération. C'est déjà tout un défi pour la Chambre, et l'intention du député était évidemment conforme à l'objectif de tous les autres députés de son parti.

Je rappelle à la Chambre que le député est le porte-parole du Bloc québécois en matière de défense. En tant que tel, il a une envergure spéciale à la Chambre et un devoir à remplir au cours de la période des questions et aux comités permanents. Il dispose d'une enveloppe-recherche et il bénéficie de tous les privilèges accordés à un porte-parole de l'opposition.

Je rappelle à la Chambre que le député de Charlesbourg fait partie du Comité permanent de la défense nationale. En fait, il était le vice-président de ce comité, la voix du Bloc québécois auprès des Forces armées canadiennes. Il est la vois du Bloc auprès de tous les Canadiens pour ce qui est de la politique militaire du mouvement séparatiste.

En tant que membre de ce comité, il a accès à de l'information privilégiée, une connaissance immédiate, la chance de visiter les installations qui le renseignent sur les points forts et les faiblesses de l'effectif militaire canadien. Le fait d'être membre du Comité de la défense lui permet aussi de faire la connaissance de gens importants au sein des Forces canadiennes et même, s'il le voulait, de semer les germes du séparatisme au sein même de l'effectif de la défense du Canada.

C'est un affront singulier à la Chambre et à chacun des Canadiens qu'un député ait profité de son poste et même de renseignements militaires privilégiés donnés par la Chambre pour tenter de retourner l'establishment militaire contre le coeur même du pays.

Il est intéressant de voir que le député a dit que, au lendemain d'un oui, le Québec devrait créer immédiatement un ministère de la Défense. D'où viendrait le personnel du quartier-général de ce ministère de la Défense nationale du Québec? Qui commanderait les forces armées? Qui organiserait ces forces? Les seules personnes ayant la compétence voulue sont maintenant au service des Forces canadiennes. A-t-on envoyé à la haute direction un autre communiqué disant: «Mettons ces forces armées sur pied dès demain.»

Une autre importante indication des motifs de l'auteur du communiqué nous est donnée par le papier utilisé pour ce dernier. Il s'agit du papier à correspondance officielle du chef de l'opposition, et non du sien. Le chef de l'opposition était alors M. Lucien


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Bouchard, un nom très bien connu et respecté au Québec. On le sait, M. Bouchard est devenu le premier ministre du Québec.

L'utilisation du papier à en-tête du chef de l'opposition a conféré de la légitimité, du poids politique au communiqué. Ce dernier a profité de l'avantage considérable de la popularité publique du chef de l'opposition. On pouvait donc s'attendre à ce qu'il soit mieux accueilli par le personnel des forces de langue française que s'il avait été rédigé sur le papier à en-tête du député.

Les destinataires du communiqué sont aussi un élément révélateur. Le communiqué n'a pas été adressé à tout le personnel des forces armées au Canada, mais seulement à quelques groupes triés sur le volet pour un effet maximal. Il a été envoyé aux forces francophones en Bosnie et à l'école militaire de Kingston où un grand nombre de Québécois étaient en formation.

Ce n'était pas seulement un simple appel aux sentiments. C'était un appel très sérieux, assorti de la garantie du maintien du salaire, de l'ancienneté et des avantages sociaux, soigneusement rédigé pour soulever le sentiment nationaliste. Le message a été rédigé pour atteindre son objectif. Si le camp fédéraliste avait perdu le référendum, cet objectif aurait peut-être été atteint. Qui sait quelles conséquences désastreuses cela aurait pu avoir pour les Forces canadiennes et la population du Canada?

(1340)

Je signale que le communiqué du député exhortait les recrues potentielles de l'armée du Québec à être prêtes à intervenir sur son territoire. Je ne sais pas ce que cela signifie, mais une invitation à intervenir sur le territoire de ce qui n'est pas encore officiellement un pays, c'est une proposition très inquiétante.

Ce communiqué a été publié à un moment soigneusement choisi, il a été rédigé de façon autorisée et il a été envoyé aux personnes les plus susceptibles de faire défection. Le chef du Bloc québécois a tout fait, sauf signer lui-même le document. Pourquoi ne l'a-t-il pas signé? Il était écrit sur son papier à en-tête. Il a été envoyé en vue de recruter sa propre armée. Je pense qu'il ne l'a pas signé parce qu'il savait ce qui risquait fort de se produire; il savait qu'il allait probablement être sur la sellette pour une question de sédition Son laquais, le député de Charlesbourg, l'a signé pour lui.

C'est exactement cela qui s'est produit. Le communiqué était rédigé sur son papier à en-tête, et il ne l'a même pas signé. Il aurait dû y apposer sa signature s'il avait l'audace de le publier. Le moins qu'il aurait pu faire, c'est de le signer. Il ne l'a pas fait parce qu'il savait que nous discuterions de cette question à la Chambre et que, même s'il n'avait pas à faire face aux lâches libéraux de l'autre côté, il aurait à faire face au Parti réformiste.

Nous avons proposé que cette question soit renvoyée, pour examen, au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Nous avons porté une accusation et nous voulons que le comité l'examine. Il s'agit d'un processus juridique dont la Chambre des communes devrait se prévaloir. Le commentaire 28 de la sixième édition de Beauchesne renvoie à une décision rendue par la présidence en 1959. Il y est question de ce processus, et l'auteur y dit ceci:

Les membres de la Chambre des communes, comme tous les autres citoyens, ont le droit d'être considérés innocents tant qu'ils n'ont pas été trouvés coupables, et comme tous les autres citoyens ils doivent faire l'objet d'une accusation avant de subir un procès devant les tribunaux. Le Parlement est un tribunal en ce qui concerne ses propres privilèges et sa dignité, ainsi que les privilèges de ses membres.
Le Parlement est un tribunal. Une accusation est d'abord portée, puis elle est examinée. Cela m'amène à parler de l'amendement qu'a présenté le gouvernement libéral pour vider de tout son sens la motion du Parti réformiste.

Supposons que quelqu'un vole une banque. Il se fait prendre, et l'on voudrait porter des accusations. Que fait-on? Est-ce que l'on dit simplement que l'on porte une accusation parce qu'il manque de l'argent et que l'on veut organiser une rencontre pour en discuter? Bien sûr que non. On présente des preuves, on détermine si les soupçons paraissent fondés, puis on accuse l'individu pour vol de banque.

En l'occurrence, nous accusons le député de sédition. Nous l'avons accusé de quelque chose. Nous ne pouvons pas tout simplement nous réunir pour discuter. Nous l'avions accusé, mais les libéraux ont complètement neutralisé la motion en s'entendant pour enlever tous les mots qui précèdent le mot «que» et tous les mots qui suivent le mot «que». Ils soutiennent que c'est suffisant ainsi et que nous en parlerons en comité.

Notez bien ce que je vous dis: la question sera bien renvoyée à un comité, mais nous n'en entendrons jamais plus parler. On fera disparaître la motion en l'envoyant se perdre dans les limbes d'un comité qui pourra utiliser tous les recours que lui offre la procédure afin qu'elle n'en sorte plus jamais.

L'affaire aurait dû être débattue à la Chambre des communes. La clôture n'aurait pas dû être invoquée. La Chambre des communes aurait dû consacrer à la question tout le temps nécessaire pour arriver à une conclusion.

Ce n'est pas la première fois à la Chambre que les libéraux montrent qu'ils ont peur de s'attaquer à ces questions délicates. Les vice-présidents des comités ont été élus récemment. Après ces élections, des députés libéraux m'ont dit que cela leur répugnait, mais qu'ils devaient voter pour le Bloc québécois à la présidence. Pourquoi? Parce que c'est ce que leur whip leur a dit de faire.

Ma mère me demandait parfois ce je ferais si quelqu'un me demandait de me jeter d'une falaise. Je me demande parfois si nous assisterions à une folle course des lemmings si le whip laissait échapper des paroles malheureuses. Ils iraient tous se jeter dans l'Outaouais ou se noyer dans le canal. Nous nous heurtons constamment à de telles attitudes lorsqu'ils ne veulent pas faire face aux problèmes.

(1345)

C'est la troisième année consécutive que nous voyons un séparatiste à la vice-présidence du comité de la citoyenneté. Le vice-président du comité du patrimoine canadien sera aussi un séparatiste. C'est normal ici. Mais cela ne l'est plus lorsque nous sortons d'Ottawa. J'espère que mes vis-à-vis se rendent compte que,


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lorsqu'ils parlent à leurs électeurs, ce genre de situation ne les aide pas. Ils devraient s'occuper des problèmes plutôt que de les camoufler.

De passage à Vancouver, le premier ministre a dit: «Le Bloc m'enrage. J'aimerais voir les bloquistes ailleurs. J'aimerais voir le chef réformiste siéger comme chef de l'opposition officielle.» Que dit-il lorsqu'il est à Ottawa ou, pire encore, lorsqu'il va dans la circonscription où il a été élu? Il dit: «Vous savez, je ne voulais pas vraiment dire cela. Ce n'était qu'une réflexion et je ne veux pas en parler.» À un bout d'un pays, il dit quelque chose et, à l'autre bout du pays, il dit quelque chose d'autre. Il en a été question dans les journaux, et les habitants de la Colombie-Britannique ont entendu ce commentaire à maintes reprises. Ils en ont assez de tout cela.

Les libéraux ne veulent pas régler la question. Je devrais leur décerner mon prix annuel qui va à ceux qui prouvent que la réalité dépasse la fiction. En fait, ce n'est pas un prix annuel. Je pourrais décerner ce prix quotidiennement à la Chambre parce que les ministériels ne se penchent pas sur les questions importantes qui devraient être réglées, tant sur le plan de la procédure que sur le plan de l'unité nationale. Leur idée d'une campagne pour l'unité nationale est un effort concerté pour donner un drapeau. J'aime le drapeau canadien, mais juste le fait de penser que tout leur plan pour l'unité nationale se résume à cela est assez pour me donner la nausée.

Que dire de la gravité des allégations de sédition que nous avons faites? À quel genre de ressources militaires les Québécois auraient-ils accès sur leur propre territoire? Les ressources ne manquent pas au Québec. Le Royal 22e Régiment est basé au camp Valcartier. Il y a deux escadrons de CF-18 comptant 37 avions. Il y a 22 CF-18 de plus entreposés dans la région de Montréal. Environ la moitié de la partie la plus utile de notre force aérienne est à Montréal. Il y a certainement suffisamment de ressources au Québec pour créer une force armée assez puissante.

Beaucoup des bâtiments de notre force navale ont des équipages francophones très compétents. Quatre des douze nouveaux bâtiments de défense côtière en construction seront basés à Québec. Il y a au Québec un dépôt d'approvisionnement contenant pour 100 millions de dollars de matériel militaire, le plus gros dépôt du genre au Canada. Il y a donc certainement une présence militaire importante au Québec. Autrement dit, c'est une menace réelle. Les séparatistes pourraient bâtir une armée rapidement s'ils pouvaient avoir le personnel et le matériel des Forces canadiennes.

Voici ce que le général MacKenzie a dit à ce sujet: «Ce n'est qu'au Canada qu'on peut poser un tel geste impunément. Dans certains pays, les gens auraient été exécutés ou jetés en prison pour avoir fait cela. Au Canada, ce genre de comportement passe inaperçu et pourrait même finir par être oublié. Je suis stupéfait de constater que cet événement ait fait si peu de bruit. Si j'avais été à la tête des forces armées, lorsque le communiqué a été publié, j'en aurais aussitôt fait une copie, je me serais envolé vers Ottawa pour aller faire valoir au ministre que cette affaire dépassait la compétence des forces armées et qu'elle constituait une question nationale sérieuse.»

L'affaire est grave et exige la tenue d'un débat national d'envergure. Or, le gouvernement actuel, fidèle à lui-même, se contente de l'oublier parce qu'elle pourrait le placer dans l'embarras.

Si le gouvernement libéral n'accepte pas que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre soit saisi de cette affaire, il montrera qu'il ne défend pas notre pays. Ce sera comme s'il disait aux loyaux Canadiens qui travaillent dans les Forces canadiennes: «Nous nous contentons d'espérer que la chose ne se reproduira pas. Nous n'adopterons pas de règles pour nous assurer que cela ne se répète pas. Nous n'enverrons pas de directives au personnel militaire sur la façon d'agir en pareille situation à l'avenir. Nous ne dirons pas à la Chambre des communes comment agir à l'endroit des députés qui utiliseraient leurs privilèges parlementaires pour faire valoir leurs idées séditieuses. Nous continuerons d'ignorer l'incident en espérant qu'il tombera dans l'oubli.» Cette même attitude nous a conduits très près de la défaite au dernier référendum au Québec.

Nous ne pouvons pas ignorer cette affaire et espérer qu'elle se résorbera d'elle-même. Nous devons prendre les mesures que la Chambre jugera indiquées et agir en conséquence.

J'invite tous les députés à rejeter l'amendement qu'a proposé le gouvernement et à revenir à l'amendement original qu'a présenté le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt.

(1350)

Le communiqué dont nous discutons aujourd'hui est une attaque contre le coeur même de notre pays et un défi à notre rôle de parlementaires. C'est pourquoi nous devons, tous et chacun, voter en faveur de la motion originale et rejeter la proposition d'amendement.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Madame la Présidente, vous savez, je pense que je n'arriverai jamais à m'habituer à la quantité absolument incroyable d'insanités et d'invraisemblances que les députés du Parti réformiste arrivent à proférer chaque jour. Mais là, je dois admettre que, ces trois derniers jours, ils ont atteint des sommets jusque là inégalés.

Ils se sont emparés d'une procédure prévue dans les règlements de la Chambre pour transformer ses travaux en une immense mascarade. C'est malheureux, parce que la gravité des accusations portées contre mon collègue de Charlesbourg aurait dû commander un débat plus sérieux. Mais on voit nos amis du Parti réformiste, depuis trois jours, se payer un véritable «party» avec ça. Ils en profitent pour faire le procès du député de Charlesbourg, pour faire le procès de l'ancien chef du Bloc québécois, pour faire le procès du Bloc québécois et, même, pour en venir à s'interroger sur la légitimité de la présence en cette Chambre du Bloc québécois. Je rappellerais à mes collègues du Parti réformiste que nous avons été dûment élus

703

par nos concitoyens et concitoyennes dans chacune de nos circonscriptions.

Je disais donc qu'on s'est emparé d'une procédure de la Chambre et cette procédure n'a été appliquée jusqu'à présent qu'à trois reprises. L'une des fois où cette procédure a été appliquée, c'est contre Louis Riel, et je pense que c'est lourd de signification. Louis Riel a été suspendu par cette Chambre, on a suspendu son droit de siéger et, plusieurs années plus tard, sous le dernier gouvernement conservateur, on a reconnu Louis Riel comme étant l'un des fondateurs du Canada. Un jugement peu conséquent de la part de cette Chambre. Louis Riel, on s'en souviendra, a été accusé de trahison et pendu.

Cependant, dans le cas de mon collègue de Charlesbourg, deux plaintes portées au criminel contre lui se sont vues déboutées. Elles n'ont pas eu de suite sur le plan judiciaire. D'ailleurs, le chef du Parti réformiste admettait candidement hier qu'il n'y avait aucun fondement légal pour porter des accusations de sédition à l'endroit de mon collègue de Charlesbourg.

Alors, de quoi veut-on l'accuser, s'il n'est pas coupable de sédition? Est-ce que, comme le soulignait mon collègue de Laurier-Sainte-Marie, on veut simplement l'accuser de délit d'opinion? Est-ce un nouveau délit, au Canada, que d'avoir des opinions différentes? Est-ce maintenant illégal d'avoir des opinions différentes de celles de la majorité gouvernementale ou encore, Dieu merci, d'avoir des opinions différentes de nos amis assis ici à gauche et qui, pourtant, sont très à droite?

Nous avons entendu nos amis du Parti réformiste se plaindre. Nous avons entendu leurs larmoiements depuis trois jours, parce qu'ils ne forment pas l'opposition officielle, parce qu'ils n'ont pas été élus aux vice-présidences de comités. Nous avons entendu leurs larmoiements pendant trois jours. Mais s'ils veulent devenir l'opposition officielle, ils n'ont qu'à battre les candidats du Bloc québécois et du Parti libéral lors des six élections partielles qui auront lieu le 25 mars prochain. Qu'ils viennent au Québec parler de sédition, qu'ils viennent au Québec parler de partition, qu'ils viennent au Québec parler d'opposition officielle plutôt que de tenter de camoufler le tout sous un débat économique. Qu'ils viennent nous parler de tout ça et on verra s'ils se mériteront le statut d'opposition officielle.

Il y a des questions importantes qui se discutent dans ce Parlement ou qui devraient se discuter dans ce Parlement, par exemple la réforme de l'assurance-chômage. Il y a des gens qui ont besoin qu'on travaille et qu'on discute de cette réforme en cette Chambre. Mais non, les députés réformistes ont détourné les travaux de cette Chambre par cette motion absolument ridicule.

On devrait parler du budget. Ils prétendent être très préoccupés par les questions financières. Mais non, ils ne veulent pas parler de budget, ils veulent parler de sédition, alors que leur chef admettait candidement, comme je le signalais, qu'il n'y avait aucune base légale pour la sédition.

(1355)

Il est étrange qu'ils choisissent ce moment-ci, quatre mois après les faits, justement pendant le débat sur la réforme de l'assurance-chômage, pendant le débat sur le budget, pour nous amener cette question sur la prétendue sédition de mon collègue de Charlesbourg. Ce qui est malheureux dans tout cela, c'est de voir nos collègues libéraux s'associer à cette manoeuvre disgracieuse de la part de nos collègues du Parti réformiste.

J'entendais le whip du gouvernement nous dire: «Quand quelque chose est mal fait, on le remplace, on le recommence.» C'est admettre qu'il y a quelque fondement là-dedans. Quand quelque chose est mal fait, on le recommence, bien sûr, mais quand quelque chose est ridicule, on l'ignore tout simplement et le gouvernement a refusé de l'ignorer. Il s'est associé à cela: il est donc coupable par association.

Regardons le communiqué de mon collègue de Charlesbourg. Il n'a jamais appelé à la désertion, il n'a jamais appelé à la rébellion ou à la révolte. Il a simplement dit qu'advenant la souveraineté du Québec, les militaires québécois actuellement membres des Forces armées canadiennes se verraient offrir la possibilité de joindre les forces armées du Québec. Y a-t-il là matière à sédition, à rébellion, à désertion? Pas du tout, d'aucune façon.

Mon collègue de Charlesbourg, dans son communiqué, parlait de la participation du Québec à des missions de paix, parlait de sa participation à l'OTAN, reconnaissant là que le Québec respecterait ses engagements internationaux. Il nous parlait du respect des exigences démocratiques, du respect des droits civils et humains. Est-ce là un comportement inacceptable? Mais non. Il s'agit là d'un comportement responsable de la part du député de Charlesbourg.

Monsieur le Président, je vois que vous m'indiquez que mon temps de parole est écoulé. . .

Le Président: Pas du tout, mon cher collègue. Il vous reste encore 12 minutes de discours, mais comme il est 14 heures, nous allons commencer les déclarations des députés et c'est vous qui prendrez la parole après la période des questions.

______________________________________________


703

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Français]

LE BUDGET

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le Président, comme nous l'avons vu la semaine dernière, les réactions au budget présenté par notre ministre des Finances ont été nombreuses et, dans l'ensemble, enthousiastes. Au nombre des réactions positives qu'a soulevées ce troisième budget de notre gouvernement, permettez-moi de vous citer la ministre déléguée de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie du Québec.

Dans un communiqué de presse émis vendredi dernier, Mme Rita Dionne-Marsolais a déclaré, et je la cite: «[. . .accueillir favorablement la création du programme de partenariat technologique du


704

Canada, qui vient de prendre le relais du PPIMD, duquel le fédéral se retirait progressivement depuis quelques années.»

Nous sommes heureux de constater qu'enfin, des ministres du gouvernement péquiste mettent de côté nos différends constitutionnels et reconnaissent à leur juste valeur les interventions du gouvernement libéral en matière de recherche et développement pour le Québec.

* * *

LA TRAGÉDIE DE L'ÉCOLE PRIMAIRE DE DUNBLANE

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, dans une école primaire de Dunblane, dans le centre de l'Écosse, Thomas Hamilton, armé de quatre pistolets, a tué hier 16 enfants âgés de cinq et six ans et une enseignante, avant de se donner la mort. Ce fanatique des armes à feu a surgi dans le gymnase où se trouvaient 29 élèves et a tiré dans tous les sens pendant deux à trois minutes.

Ce massacre d'innocentes victimes nous plonge dans un état de consternation, de stupeur et de dégoût. Comment un individu peut-il faucher 17 vies humaines en les abattant de sang-froid? Nous sommes bouleversés et notre esprit a du mal à assimiler une si horrible réalité. L'indignation nous envahit.

J'aimerais, en mon nom personnel et au nom de tous les députés de cette Chambre, exprimer mes plus sincères condoléances aux familles des victimes, aux employés de l'école primaire de Dunblane et à toute la population de cette ville d'Écosse.

* * *

[Traduction]

LA JUSTICE

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, je joins bien sûr ma voix à celle de ma collègue sur ce qu'elle vient de dire.

Au cours du dernier congé, j'ai prêté assistance à deux familles de Calgary qui devaient assister à l'audience d'une commission de libération conditionnelle concernant un homme qui avait agressé sexuellement leurs enfants régulièrement sur une période de quatre ans.

La Commission nationale des libérations conditionnelles a accordé deux heures à cet agresseur de jeunes enfants, tandis que les parents des victimes ne pouvaient pas ouvrir la bouche. Malgré tout, l'homme n'a pas obtenu sa libération conditionnelle. Tant que nos lois ne seront pas changées, nos enfants ne seront pas en sécurité.

Je crois à la compassion, mais il faut quand même assumer ses responsabilités. Nous avons une responsabilité envers les victimes, qui ne sont pas en mesure de se défendre. Nous avons la responsabilité de protéger nos enfants et de faire en sorte que les petits Canadiens ne courent pas de danger.

Le gouvernement devrait accorder la priorité à la sécurité de nos enfants. Il y a deux ans, j'ai demandé au solliciteur général du Canada de créer un registre des agresseurs sexuels et des pédophiles. Rien n'a été fait en deux ans. Quand le solliciteur général se joindra-t-il à nous dans notre lutte pour assurer la sécurité de nos enfants? Quand donnera-t-il son appui à ces petites victimes, à ces enfants innocents?

Créons ce registre qui nous a été promis.

* * *

LA COLLINE DU PARLEMENT

M. Vic Althouse (Mackenzie, NPD): Monsieur le Président, la nouvelle ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a hérité d'un véritable gâchis sur la colline.

Les architectes qui ont évalué les réparations actuellement en cours à la Tour de la Paix avaient prévu qu'il en coûterait 2,5 millions de dollars. Les entreprises qui ont présenté une soumission en ont demandé la moitié pour obtenir le contrat. Maintenant, des mois plus tard, elles obtiennent un ordre de modification pour 1,2 million supplémentaire, ce qui double la soumission originale et porte presque le coût des travaux à la somme prévue à l'origine.

Entre-temps, des employés des entreprises chargées des travaux ont harcelé une ingénieur, Mme Anne Rainey, en dehors des lieux de travail. M. Ray Wolf et les maçons qui travaillaient pour lui se sont retirés du projet en signe de protestation. Même si le contrat du ministère des Travaux publics comporte une disposition interdisant les pratiques discriminatoires, l'ancien ministre n'a rien fait pour régler la situation.

Ce harcèlement semble avoir été accepté, puisque ces mêmes entreprises ont obtenu un nouveau contrat pour des travaux à la tour et à la Chambre des communes elle-même.

Les Canadiens étaient passablement irrités par l'attitude de l'ancien ministre. On peut espérer que son remplaçant corrigera cette injustice.

* * *

LA COMMUNAUTÉ IRLANDAISE AU CANADA

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, à Saint John, au Nouveau-Brunswick, la ville la plus irlandaise du Canada, on célèbre son héritage irlandais.

L'année dernière a marqué le début de trois années commémoratives du 150e anniversaire de la grande famine en Irlande. Plus de 150 000 immigrants irlandais sont arrivés à Saint John entre 1815 et 1880. Nombre de ces immigrants ont été placés en quarantaine sur l'île Partridge qui fait maintenant partie des sites historiques nationaux.

Aujourd'hui, je veux rendre hommage à la communauté irlandaise à Saint John et dans tout le Canada.

J'invite tous les Canadiens à marquer sur leur calendrier la période du 27 juin au 3 juillet 1997, lorsque se tiendra la plus grande cérémonie commémorative publique de la grande famine en Irlande à Saint John, au Nouveau-Brunswick.

«When Irish hearts are laughing all the world is bright and gay, and when Irish eyes are smiling they will steal your heart away.»

Après avoir suivi ce débat à la Chambre, je souhaiterais que nous soyons tous Irlandais.


705

LES COMMUNICATIONS

Mme Jean Augustine (Etobicoke-Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, une bonne nouvelle. Etobicoke a maintenant un site web sur le réseau Internet.

Ce site donnera libre accès au réseau aux jeunes, aux groupes communautaires, aux petites entreprises ou à quiconque a des problèmes d'accès au réseau.

La commission scolaire d'Etobicoke, en partenariat avec le Comité mixte d'aide à l'adaptation de l'industrie de cette ville, a mis en place ce site pour permettre aux gens de comprendre comment naviguer sur l'Internet et leur ouvrir de nouveaux débouchés dans un monde des affaires hautement compétitif.

L'accès à l'Internet devient impératif dans ce monde technologique en rapide évolution. Le site Internet favorisera le développement économique au sein du marché mondial multimédia.

Grâce au site Internet d'Etobicoke-Lakeshore, nous créons des emplois et favorisons l'accès aux connaissances pour toute la communauté.

* * *

[Français]

LA TRAGÉDIE DE L'ÉCOLE DE DUNBLANE

M. Denis Paradis (Brome-Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec stupéfaction et horreur que le monde entier a pris connaissance de l'abominable tragédie de Dunblane, en Écosse. Un individu a ouvert le feu sur un groupe d'écoliers, tuant 16 enfants et leur professeur et en blessant 16 autres.

Cette tragédie inqualifiable nous choque et nous blesse au plus profond de nos coeurs. Nous nous sentons impuissants lorsque survient un tel déferlement de violence. Par-delà la douleur qui nous assaille, il nous faut, à titre de parlementaires, travailler encore plus fort à la construction d'une société pacifique et non violente. Il nous faut redoubler d'efforts pour assurer la protection et l'éducation de nos enfants.

(1405)

À partir de Brome-Missisquoi, ce sont toutes les Canadiennes et tous les Canadiens qui se joignent à nous aujourd'hui afin d'offrir à nos compatriotes écossais le témoignage sincère de notre appui dans cette épreuve qu'ils traversent.

* * *

LES TROUBLES D'APPRENTISSAGE

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais souligner que le mois de mars est le mois des troubles d'apprentissage. Cette année est spéciale, puisque l'Association canadienne pour les troubles d'apprentissage célèbre son 25e anniversaire.

Je porte aujourd'hui l'épinglette qui commémore cet événement en l'honneur de tous les Canadiens et les Canadiennes atteints de troubles d'apprentissage, et de tous les gens et les organismes qui les appuient.

[Traduction]

En tant qu'éducateur, je porte cette épinglette avec fierté et avec honneur. Je pense que quiconque doit avoir le droit et le privilège de profiter de ce qui rend notre société riche et vibrante, la possibilité d'apprendre.

[Français]

J'applaudis cet organisme pour leur excellent travail et leur dévouement.

[Traduction]

Je félicite tous les membres de leur volonté de promouvoir l'apprentissage et l'égalité d'accès parmi tous les Canadiens.

* * *

LE TEMPLE DE LA RENOMMÉE DE L'INDUSTRIE MINIÈRE CANADIENNE

M. Brent St. Denis (Algoma, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'informer mes collègues qu'Elliot Lake, en Ontario, dans la circonscription d'Algoma que je représente, est maintenant le site du Temple de la renommée de l'industrie minière canadienne.

Récemment, huit nouveaux Canadiens ont été nommés à ce Temple de la renommée: Edmund Horne, Noah Timmins, William Wright, Donald Hogarth, Lloyd Pigeon, Joseph Hirshhorn, Paul Penna et Robert Haullbauer. Ils ont été choisis pour ce qu'ils ont réalisé dans le domaine de la prospection, de la mise en valeur, de la technologie ou de la gestion des mines, ainsi que pour leur contribution à l'exploitation minière et au Canada.

Leur vie recoupe toute l'histoire de l'industrie minière de notre pays qui a commencé avec l'exploitation des Mines Bruce, dans ma circonscription également, et s'est poursuivie dans tout le Canada, y compris à Elliot Lake, que l'on connaissait autrefois comme la capitale mondiale de l'uranium.

Nous pouvons tous nous enorgueillir des réalisations de ces huit personnes et de ces autres pionniers qui ont posé les jalons du développement et du succès économique de tant de collectivités minières canadiennes. Ils nous rappellent que l'industrie minière a été importante dans le passé et mérite notre appui pour l'avenir.

Je remercie en particulier l'Association minière du Canada, Fred Mann et la ville d'Elliot Lake de leurs efforts qui ont conduit à la création de ce Temple de la renommée dans le nord de l'Ontario.

* * *

[Français]

LA RÉFORME DE L'ASSURANCE-CHÔMAGE

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, les audiences publiques du comité parlementaire chargé d'étudier le


706

projet de réforme de l'assurance-chômage, rebaptisé projet de loi C-12, sont amorcées.

Le gouvernement fédéral ne cotise plus un sou à la Caisse de l'assurance-chômage depuis 1990 et devrait remettre les fonds de ce programmes aux provinces, qui sont le plus en mesure de répondre aux besoins de leur population.

Pourquoi Ottawa ne remettrait-il pas la gestion de ce programme aux provinces qui le désirent?

Les travailleurs et les employeurs paient plus de 18 milliards de dollars annuellement pour une assurance contre une éventuelle période de chômage. Dans le contexte actuel d'austérité, il est inadmissible que le gouvernement fédéral puise directement dans cette caisse pour bien faire paraître ses écritures comptables, tout en démantelant systématiquement son régime.

Le Bloc québécois s'y oppose.

* * *

[Traduction]

LES PENSIONS

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, ce qui suit est un extrait d'une lettre qui a paru dans le Sun de Vancouver:

Monsieur le ministre des Finances,
Je suis heureux d'apprendre que vous sollicitez la participation des Canadiens à la réforme du RPC. Voici mes suggestions.
Le RPC devrait commencer à 55 ans, et non à 67 ans, comme vous le proposez, et devrait être versé à tous ceux qui ont travaillé plus de six ans avant 1994; le RPC devrait être versé immédiatement après que la personne quitte son emploi ou est congédiée.
Le RPC devrait être totalement indexé, et je serais prêt à payer des primes plus élevées pour cet avantage.
Toutefois, je voudrais que quelqu'un d'autre verse 4 $ pour chaque dollar que je verse moi-même au RPC.
Et, monsieur le Ministre, je vous demanderais de faire en sorte que mon droit à pension augmente au rythme de deux fois le taux maximum permis légalement à toutes les autres personnes de ce pays.
Je comprends que ces demandes peuvent paraître gourmandes et injustifiées, mais, si elles sont assez bonnes pour vous et vos collègues parlementaires, elles sont certainement assez bonnes pour moi.
Recevez, monsieur le Ministre, l'assurance de ma plus haute considération.
Dr Philip Alderman
Vancouver-Ouest

* * *

LE TRAVAIL DES ENFANTS

M. Murray Calder (Wellington-Grey-Dufferin-Simcoe, Lib.): Monsieur le Président, le travail des enfants n'est pas l'apanage du Sud-Est de l'Asie. Malgré nos efforts dans le domaine du maintien de la paix, une telle pratique existe en Haïti.

Le Star de Toronto publiait récemment un article sur les enfants qui travaillent dans des conditions proches de l'esclavage à Haïti. On y faisait état des sévices, de la violence morale et des agressions sexuelles qu'y subissent chaque jour jusqu'à 300 000 enfants.

Le problème semble à première vue insurmontable, mais des groupes de ma circonscription, comme le St. Andrew's HEARTS de Fergus, s'occupent d'une école, d'un orphelinat et d'un programme d'alimentation à Cap-Haïtien afin de permettre à un petit nombre d'enfants d'échapper au cycle de la pauvreté.

(1410)

J'ai été heureux d'apprendre que le Canada appuie une initiative mondiale de l'Organisation internationale du travail pour mettre fin au travail des enfants et que, chaque jour, l'ACDI consacre un million de son budget à des programmes qui visent à répondre aux besoins des enfants. J'encourage le gouvernement du Canada à se préoccuper des besoins des enfants de Haïti.

* * *

[Français]

LE COMMERCE INTERPROVINCIAL

M. Bernard Patry (Pierrefonds-Dollard, Lib.): Monsieur le Président, au terme d'une conférence sur le commerce interprovincial, les ministres représentant les gouvernements fédéral et provinciaux semblent s'être mis d'accord pour ouvrir le marché des achats publics à l'ensemble des entreprises canadiennes.

La ministre québécoise déléguée à l'Industrie et au Commerce, Mme Rita Dionne-Marsolais, estime à 100 milliards de dollars par année la valeur du marché des achats publics. La Chambre de commerce du Canada, quant à elle, évalue que 1,9 millions d'emplois, dont 470 000 au Québec, sont directement reliés à cet important marché. La ministre, qui était visiblement satisfaite lors de son retour de la conférence, pense qu'à moins d'imprévus, l'entente sera en vigueur en 1997.

Nous sommes heureux de constater que le gouvernement du Québec a décidé de participer à cette conférence et qu'il est disposé à signer cette entente sur la libéralisation du commerce interprovincial. Voici une preuve que le Québec a tout à gagner à faire partie du Canada.

* * *

[Traduction]

LES RÉCLAMATIONS TERRITORIALES DES NISGA'A

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, l'accord de principe conclu avec les Nisga'a entraîne le Canada sur une voie dans laquelle l'égalité des autochtones et des autres Canadiens n'est plus une réalité.

Les bureaucrates et les politiciens ont fait aux autochtones une offre de dédommagement beaucoup trop généreuse. Le dédommagement devrait porter sur la perte en ce qui concerne les intérêts des autochtones, comme les tribunaux l'ont déjà établi, et se limiter aux droits des autochtones de chasser, de trapper, de pêcher et de trouver de la subsistance. Cela n'inclut pas les intérêts dans les terres ou les ressources, ni le droit prioritaire de se lancer dans des activités commerciales.


707

Tout cela s'est fait à huis clos. Les bureaucrates ont eu leur mot à dire, à l'instar des politiciens ministériels. C'est maintenant le tour des habitants de la Colombie-Britannique. On doit entendre leurs voix dans le cadre d'un référendum provincial et on ne devrait pas signer l'entente conclue avec les Nisga'a tant que le gouvernement provincial n'aura pas obtenu son mandat à la suite des prochaines élections provinciales.

* * *

CUBA

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce, Lib.): Monsieur le Président, la loi américaine ayant pour objectif de punir Cuba et ceux qui traitent avec ce pays est un autre exemple d'iniquité et d'incohérence de la part des États-Unis dans des situations de ce genre.

Les États-Unis poursuivent la même politique qui a pour objet d'isoler et de punir Cuba même si la guerre froide est terminée. L'Union soviétique a cessé d'exister et Cuba ne constitue en aucune façon une menace militaire pour les États-Unis.

Comment les Américains peuvent-ils justifier une politique de ce genre lorsque, en même temps, ils lèchent les bottes de la Chine et du Viêt-nam qui sont tous deux des pays communistes et ont une bien plus mauvaise réputation sur le chapitre du respect des droits de la personne.

Il est vraiment déplorable que deux avions américains aient été abattus. Les deux côtés prétendent être dans leur droit. C'est donc la cour internationale qui devrait trancher la question et il ne devrait pas être question de représailles unilatérales.

La loi américaine actuelle punit ceux qui ne le méritent pas et elle ne fait qu'envenimer les choses.

* * *

[Français]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, le 3 avril 1995, je questionnais le ministre des Affaires indiennes sur les négociations avec le conseil de bande de Kanesatake concernant le projet de casino. Je voulais qu'il informe le conseil de bande que ce projet relève de la compétence du Québec. Le point de vue du ministre était, et je cite: «Monsieur le Président, ce qui est clair, c'est que cette question ne relève pas de la compétence du Québec.»

Or, le 26 février 1996, la Cour suprême du Canada a clairement indiqué que les bandes indiennes ne peuvent exploiter des jeux de hasard sans obtenir un permis de la province ou sans conclure une entente avec elle. Cette fois, ce n'est pas la version d'un député du Bloc québécois, c'est la Cour suprême du Canada qui vient contredire l'affirmation du ministre des Affaires indiennes en confirmant la juridiction et les compétences des provinces en matière de jeux de hasard.

L'arrogance et l'absence de jugement du ministre reflètent bien la faiblesse de ce système fédéraliste.

(1415)

[Traduction]

LA CONFÉRENCE DES PARLEMENTAIRES DE LA RÉGION ARCTIQUE

Mme Jean Payne (St. John's-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, la première Conférence des parlementaires de la région arctique s'est tenue à Reykjavik. Lors de la conférence, on s'est entendu pour former le comité permanent. Le Canada a été invité à en devenir membre et il a accepté.

Aujourd'hui, le Canada est l'hôte de la deuxième Conférence des parlementaires de la région arctique, qui a lieu à Yellowknife, dans les Territoires du Nord-Ouest. M. Clifford Lincoln en est le président et Karen Kraft Sloan dirige la délégation canadienne. Plus de 100 délégués. . .

Le Président: Je rappelle à la députée de ne pas désigner ses collègues par leur nom, mais par leur circonscription ou leur titre.

Mme Payne: Merci, monsieur le Président. Plus de 100 délégués et observateurs participent à la conférence de cette semaine. Ils sont venus des pays circumpolaires, le Danemark, la Finlande, l'Islande, la Norvège, la Russie et la Suède, et comprennent des représentants de leurs peuples autochtones.

La conférence offre aux gouvernements de l'Arctique une tribune pour échanger des renseignements et des idées et pour avoir un bon aperçu des problèmes et des perspectives qui existent dans l'Arctique. Elle servira de réunion préparatoire à une conférence des ministres qui aura lieu la semaine prochaine, à Inuvik.

Je voudrais souhaiter aux membres de cette conférence beaucoup de chance dans leur quête d'un monde assaini.

* * *

DUNBLANE, EN ÉCOSSE

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, aucune parole ne peut décrire ce qui s'est passé hier dans la petite ville tranquille de Dunblane, en Écosse.

La nouvelle du meurtre de 16 jeunes enfants et d'un professeur qui se livraient innocemment à leurs activités scolaires est presque incroyable. Elle nous déchire le coeur, nous incite à nous demander sans cesse pourquoi, puis nous laisse avec un immense sentiment d'horreur, de tristesse et de profond vide. Elle nous donne également une énorme envie de tendre la main aux gens de cette localité, dans l'espoir que nous pourrons un peu les soutenir dans leur douleur inconsolable et leur perte irremplaçable.

Je le dis aux habitants de Dunblane, au nom de tous les Canadiens, nos pensées et nos prières vous accompagnent.

> 708


708

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA SCIENCE ET LA TECHNOLOGIQUE

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement a enfin annoncé la création d'un fonds technologique promis il y a plus de deux ans. Il était temps. Le gouvernement annonce dans son budget que la somme de 150 millions de dollars sera disponible en 1996-1997 pour financer des projets admis au programme Partenariat technologique Canada. Mais le ministre de l'Industrie n'a pas tout dit.

Le ministre reconnaît-il que le montant réel disponible pour financer des nouveaux projets en 1996-1997 est de 85 millions de dollars et non pas de 150 millions, puisque déjà 65 millions de dollars sont engagés dans un autre programme consacré à l'industrie de la défense, le PPIMD?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, je ne sais pas si l'honorable député a remarqué cette allégation dans le Globe and Mail ou bien s'il a lu une traduction dans un autre journal, mais ce n'est pas correct.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, je ne sais pas si le ministre pourrait nous expliquer ce qu'il y a de «pas correct». Ce serait intéressant de l'entendre. Ce serait intéressant qu'il nous dise ce qu'il y a de «pas correct» dans ce que je viens de dire. On est prêt à l'écouter.

Peut-il s'engager, d'ailleurs, à s'assurer que la somme de 150 millions de dollars sera entièrement disponible pour financer de nouveaux projets et non pas pour augmenter les chiffres en promettant de l'argent déjà engagé par son gouvernement?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, il y a une portion des fonds qui ont été annoncés qui, c'est vrai, était déjà engagée pour les entreprises, dont l'ancien programme PPIMD. C'est très peu.

Il comprend très bien, je crois, qu'avec un programme tel que Partenariat tehcnologique Canada, avec les projets que nous appuyons, cela prendra du temps pour dépenser l'argent dans les entreprises. C'est pourquoi les entreprises, surtout les entreprises de Montréal qui ont de l'expérience dans le secteur aérospatial et de la défense qui ont eu recours plusieurs fois à l'ancien programme PPIMD, des firmes comme Pratt & Whitney, Bombardier, Spar et CAE, ont chaleureusement accepté et accueilli le nouveau programme.

(1420)

Je crois que lui et son collègue, qui ont très souvent posé des questions sur la reconversion militaire, seront très heureux de la création de ce programme de partenariat-non pas de subvention mais de partenariat-non seulement dans les secteurs de l'aérospatiale et de la défense, mais aussi dans les secteurs des technologies environnementales.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, dans un premier temps, le ministre nous dit que ce n'est pas correct, que c'est inexact. Dans un deuxième temps, il reconnaît, il vient de me le dire encore, que c'est exact et il dit que c'est très peu. Soixante-cinq millions sur 150 millions, ça fait près de 40 p. 100, et 40 p. 100, c'est très peu pour eux. C'est curieux. De plus, dans son rapport, le vérificateur recommandait aussi une plus grande transparence dans les activités de science et technologie du gouvernement.

Le ministre reconnaît-il que cette recommandation a été balayée sous le tapis, puisqu'il abolit le Conseil consultatif national des sciences et de la technologie, qui publiait des rapports publics, lui, et le remplace par un simple conseil consultatif de 12 personnes nommées par le premier ministre et qui se rapportent au premier ministre seulement?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, cette question est très importante. Bien sûr, les conseils que reçoit le gouvernement dans le domaine des sciences soulèvent la controverse.

Le gouvernement précédent a aboli le Conseil des Sciences du Canada, qui prodiguait des conseils et rédigeait des rapports dans le domaine scientifique. Le député parle du CCNST, qui a, lui aussi, publié d'excellents rapports. Certains diraient même que la politique canadienne à l'égard des sciences était bonne à une chose: rédiger des rapports.

Au lieu de mettre l'accent sur la rédaction de rapports, nous avons proposé de créer un très petit conseil réunissant certains des grands esprits scientifiques du Canada, qui centreraient leurs efforts non pas sur la rédaction de rapports, mais sur des rencontres avec les ministres au Comité de la politique du développement économique, et qui conseilleraient directement le premier ministre, de sorte que ceux qui prennent des décisions seraient renseignés à fond par ceux qui s'intéressent le plus aux résultats et seraient donc en mesure d'élaborer la meilleure politique possible.

Cette approche n'est pas axée sur la rédaction de rapports. Elle exige un changement d'attitude et une modification des pratiques gouvernementales. À mon avis, il faudra voir si ce but est atteint. J'invite le député et le reste de la communauté scientifique, qui continueront certainement à nous communiquer leurs opinions par les moyens qui sont à leur disposition, à faire en sorte que nous


709

assistions vraiment à un changement d'attitude, à mesure que nous élaborerons la nouvelle politique scientifique canadienne.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie. Depuis deux ans, l'industrie du matériel de la défense presse le gouvernement de mettre sur pied un fonds destiné à la reconversion militaire pour sauver les 10 000 emplois menacés dans cette industrie au Québec. Or, les fonctionnaires du nouveau fonds, baptisé Partenariat technologique Canada, nous ont informés qu'aucun fonds spécifique, aucun fonds dédié, n'était réservé à la reconversion dans le cadre du nouveau programme.

Le ministre peut-il nous dire si son nouveau programme, Partenariat technologique Canada, assurera l'appui nécessaire aux 30 entreprises québécoises qui ont un besoin urgent de l'aide gouvernementale vers la reconversion industrielle?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, c'est une question à laquelle le député a consacré des efforts énergiques et constructifs depuis deux ans.

À cause de la façon dont nous avons structuré ce fonds, je ne suis sûrement pas en mesure aujourd'hui d'affirmer à quelles entreprises il bénéficiera, ni quelle proportion de l'aide sera affectée à un secteur industriel particulier. Nous procédons d'une manière très différente en structurant ce fonds.

Par exemple, nous allons former un comité consultatif comprenant des membres du secteur privé, dont le rôle sera essentiellement de nous permettre d'établir des prévisions dans les domaines scientifiques où le gouvernement devrait allouer ses ressources. Le comité représentera aussi un mécanisme que nous utiliserons pour examiner la façon dont l'aide sera distribuée et pour déterminer quels secteurs offriront le plus grand avantage technologique pour le Canada.

Le député conviendra sûrement que, si nous pouvions avoir plus d'argent pour ce fonds, nous trouverions d'excellentes façons de le dépenser.

(1425)

Toutefois, les ressources sont rares et il faut absolument les allouer d'une manière bien centrée et stratégique. Nous allons nous efforcer de le faire, mais le député peut croire que, en établissant ce fonds, nous remplissons deux promesses importantes de notre livre rouge. Premièrement, nous dotons le Canada d'un programme de reconversion des industries militaires et, deuxièmement, nous finançons le domaine des technologies environnementales.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, s'il y a un programme pour la reconversion, qu'il le dise clairement parce que vu d'ici, il semble laisser tomber les industries qui ont besoin de l'aide gouvernementale. Je lui demande de se rappeler qu'en 1994, un rapport financier notamment par Industrie Canada, la CSN, la FTQ, la ville de Montréal, le ministère de l'Industrie et du Commerce du Québec et la Communauté urbaine de Montréal évaluait à 55 millions de dollars les besoins pour la reconversion militaire.

Le ministre peut-il s'engager, comme il le réclamait lorsqu'il était dans l'opposition, à rendre disponibles ces sommes d'argent pour la reconversion des industries militaires, tel que recommandé dans une étude financée par son propre ministère? Et ça s'appelle de la cohérence.

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, on en a également besoin pour la stratégie. Effectivement, il nous est nécessaire de trouver les meilleurs moyens de dépenser l'argent, lequel est très difficile à trouver dans la situation financière actuelle.

Je dois également dire à ce député que dans le secteur de la défense, comme il le sait très bien, depuis l'élection de ce gouvernement, avec le fonds PPIMD, presque toutes les subventions sous l'égide du PPIMD étaient dirigées aux applications civiles. Deuxièmememt, je veux lui rappeler qu'il est nécessaire que les entreprises fassent les changements appropriés pour pouvoir trouver de nouveaux marchés. La plupart des entreprises, même au Québec, l'ont déjà fait. Même au Québec, même à Montréal, où j'étais ce matin devant la chambre de commerce, ils sont prêts à trouver d'autres entreprises dans d'autres secteurs, non pas seulement en défense, pour recevoir l'aide de Partenariat technologique Canada.

* * *

[Traduction]

LA COMMISSION KREVER

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, l'enquête a coûté 14 millions de dollars, mais le juge Krever croit maintenant savoir pourquoi le système canadien d'approvisionnement en sang a fait défaut, pourquoi des Canadiens innocents sont morts et qui sont les responsables.

Toutefois, au lieu de se réjouir des conclusions de Krever avec les familles des victimes, voici que le gouvernement veut suspendre cette enquête.

Quel est au juste le mobile de ce camouflage politique maladroit? De quoi a donc peur le ministre de la Santé? Pourquoi ne met-il tout simplement pas fin aux poursuites judiciaires et à l'ingérence politique et ne laisse-t-il pas parler Krever?

L'hon. David Dingwall (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, il y a des adjectifs pour qualifier le genre de question que pose le député.

Des voix: Par exemple?

M. Dingwall: Monsieur le Président, je voudrais poursuivre, avec le consentement unanime de la Chambre.


710

Comme c'est déjà arrivé plusieurs fois à la Chambre, le député pose une question dont les prémisses sont fausses. Le député sait pertinemment pourquoi le gouvernement fédéral a saisi les tribunaux. Ce n'est pas que le gouvernement cherche à bloquer les conclusions de l'éminent juge, mais bien que le procureur général du Canada, comme il l'a dit, a le devoir de faire respecter les principes de l'équité procédurale et de la justice naturelle.

En outre, je ne crois pas que le député d'en face rende service à lui-même, à son parti ou même aux Canadiens de tout le pays en faisant des allégations aussi fausses.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, le ministre veut remplacer complètement l'enquête Krever par sa propre tribune sur le sang contaminé. Le groupe de l'hépatite C n'a pas été invité. Le groupe de Janet Connors n'a pas été invité. La Société canadienne du sida n'a pas été invitée. Qui a été invité? Les copains du ministre. Ses amis. Quelle farce! On tente manifestement de faire oublier à la population que le gouvernement essaie de bâillonner la commission.

(1430)

Ma question est bien simple: Krever sait. Pourquoi ne pas le laisser parler?

L'hon. David Dingwall (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, ce n'est pas en faisant de beaux discours que le député d'en face va réussir à faire valoir sa cause.

Le député n'ignore pas, et cela, depuis quelque temps déjà, que la commission Krever a présenté un rapport provisoire comportant 43 recommandations, dont sept s'appliquaient à Santé Canada. Nous avons donné suite à la lettre aussi bien qu'à l'esprit de ces recommandations.

Nous avons annoncé au début de la semaine que nous allions essayer d'entreprendre des consultations auprès des provinces et de tous les intervenants.

Je trouve plutôt triste que le député d'en face, qui était de ceux qui, tant ici qu'à l'extérieur de la Chambre, nous engageaient à agir, essaie, maintenant que nous agissons, de politiser une question qui est très grave.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, voyons ce qui se passe dans d'autres pays.

Le Japon a un tout nouveau ministre de la Santé. Le gouvernement de ce pays a immédiatement présenté des excuses publiques aux personnes qui avaient été affectées par le scandale japonais du sang contaminé. En France, les responsables sont en prison.

Qu'arrive-t-il au Canada? Nous avons des démêlés juridiques. La vérité n'intéresse pas le gouvernement. Le gouvernement n'oblige pas les responsables à répondre de leurs actes. Le gouvernement protège ses amis en étouffant la justice.

Le Japon et la France font honte au gouvernement libéral. Le ministre de la Santé va-t-il conseiller à son collègue, le ministre de la Justice, de mettre fin aux disputes juridiques et va-t-il laisser parler le juge Krever?

L'hon. David Dingwall (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, retrait sur trois prises. Encore une fois, le député dénature les faits et donne une fausse idée de la réalité. Le député sait pertinemment ce qui se passe.

Le procureur général du Canada a dit maintes fois qu'il avait le devoir de s'assurer que cette enquête respecte les principes de l'équité procédurale et de la justice naturelle.

Aucun membre du gouvernement, ni le procureur général, ni l'ancienne ministre de la Santé, ni moi-même n'avons jamais essayé d'empêcher le juge Krever d'en arriver à ses propres conclusions.

Le député connaît la vérité. Je voudrais bien qu'il la dise pour une fois.

* * *

[Français]

LA CONVENTION FISCALE CANADO-AMÉRICAINE

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Hier, le secrétaire d'État aux institutions financières internationales a reconnu que la nouvelle convention fiscale canado-américaine pénalisait les Canadiens et les Québécois bénéficiaires de pensions américaines et que le ministre des Finances discuterait avec son vis-à-vis américain, M. Rubin.

Alors que des retraités à bas revenu ont vu leur pension fondre de 25 p. 100, sans possibilité de récupération, quelle sera la nature concrète des propositions que le ministre a l'intention de présenter à son homologue américain?

[Traduction]

M. Barry R. Campbell (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Le ministre va aborder ce dossier avec son homologue américain. Nous sommes bien au fait du problème qui se pose et du nombre de Canadiens qui sont touchés. Nous examinerons des solutions appropriées avec nos homologues américains, dans l'intérêt des Canadiens concernés.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, le secrétaire d'État nous a déjà répondu cela hier. Ce qu'on veut savoir, c'est ce que le ministre des Finances va proposer pour régler le problème.


711

Le ministre-ou la personne qui va pouvoir répondre-s'engage-t-il à prendre des mesures fiscales adéquates pour compenser les dizaines de milliers de Québécois et de Canadiens si jamais les Américains ne répondent pas positivement à sa demande?

(1435)

[Traduction]

M. Barry R. Campbell (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, c'est une question que nous négocierons avec les Américains plutôt qu'avec le député d'en face.

Je tiens à lui assurer, au nom de tous les Canadiens, que nous trouverons des solutions. La convention fiscale visait à prévenir la double imposition. Nous allons nous attaquer à ce problème, et bientôt, avec nos homologues américains.

* * *

LES AFFAIRES INDIENNES

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, la date de la signature par les trois parties de l'entente conclue avec les Nisga'a, maintenant prévue pour le 22 mars, a fait l'objet d'une fuite alors que le gouvernement de la Colombie-Britannique en était aux premiers stades des prétendues audiences publiques.

Le ministre des Affaires indiennes, qui connaissait évidemment la date, n'a pourtant rien dit, pour que le simulacre d'audiences puisse avoir lieu en Colombie-Britannique. Ces négociations ont été caractérisées par une manipulation du public bien orchestrée.

Pourquoi le ministre a-t-il laissé soumettre les gens de Colombie-Britannique à ce simulacre d'audiences, alors qu'il accélérait le processus à leur insu?

[Français]

M. Bernard Patry (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Décidément, il n'y a rien de secret dans tout cela. Cela fait 20 ans que le gouvernement du Canada négocie avec la nation nisga'a. Si on parle de secrets, je ne sais pas où ils sont.

[Traduction]

Il existait une entente de principe avec les gouvernements du Canada et avec les Nisga'a de la Colombie-Britannique, que ces derniers sont prêts à signer. Nous espérons qu'elle sera effectivement signée.

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, des gens de Colombie-Britannique qui étaient payés pour savoir ce qui se passait aux négociations n'ont pas reconnu un seul paragraphe ni une seule phrase dans cette entente.

En répondant à mes questions antérieures, le ministre a continué à perpétuer les mythes voulant que l'entente n'accorde pas aux Nisga'a de pêcherie commerciale jouissant d'une protection constitutionnelle et qu'elle mette fin à l'exonération de taxes dont bénéficient les Nisga'a. Par ailleurs, le ministre n'a pas répondu à ma question sur la possibilité de confier un rôle au vérificateur général dans cette entente.

Le ministre aura-t-il l'obligeance de dire toute la vérité à la Chambre en répondant à mes questions et de nous dire également pourquoi il hésite à charger le vérificateur général de contrôler les dépenses de deniers publics exigées par l'entente?

[Français]

M. Bernard Patry (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, au sujet de sa question complémentaire, je répondrai à l'honorable député qu'il y a eu plus de 200 consultations publiques. Et s'il y a eu 200 consultations publiques, je crois que c'est nettement suffisant et que maintenant on doit procéder.

* * *

LES ÉDIFICES GOUVERNEMENTAUX

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre des Travaux publics.

Demain, un appel d'offres sera lancé en vue de loger des bureaux de Revenu Canada qui se trouvent actuellement à Hull, rue Sacré-Coeur. Outre l'édifice actuel situé au Québec, quatre édifices situés en Ontario pourraient répondre aux critères de l'appel d'offres.

La ministre peut-elle nous expliquer pourquoi on a recours à un appel d'offres lorsqu'il s'agit de bureaux situés à Hull, alors que ce n'est pas le cas habituellement pour les bureaux situés à Ottawa, comme en font foi les exemples suivants: celui du 191, rue Laurier qui loge Revenu Canada; celui du 234, rue Laurier qui loge la Défense nationale; et celui du 340, rue Laurier qui loge les bureaux du solliciteur général?

L'hon. Diane Marleau (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, nous nous efforçons d'avoir des processus ouverts et équitables. C'est de cette façon que nous allons procéder, et c'est de cette façon que notre gouvernement a procédé depuis qu'on est ici. C'est seulement la bonne façon d'agir.

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, encore une fois, c'est une politique de deux poids, deux mesures. On accorde à l'Ontario un contrat de blindés sans appel d'offres, alors que les entreprises québécoises doivent soumissionner pour un contrat d'hélicoptères.

Au moment où le gouvernement demande aux plus démunis de faire encore un effort supplémentaire pour l'aider à régler son déficit, comment la ministre peut-elle se payer le luxe d'un déménagement coûteux de 800 fonctionnaires, sinon parce que sa seule intention est de les faire passer du Québec à l'Ontario?


712

(1440)

[Traduction]

L'hon. Diane Marleau (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, que les députés d'en face soient d'accord avec nous ou non, le fait est que nous essayons toujours d'obtenir le maximum pour notre argent.

Nous avons mis en place un processus très ouvert et transparent qui assure l'égalité d'accès à toutes les régions et à toutes les entreprises de l'ensemble du pays. Les appels d'offres sont publiés et les soumissions sont évaluées en fonction de leur qualité. C'est ainsi que les choses doivent se passer, et c'est ainsi qu'elles continueront de se passer.

* * *

LA CHINE

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Le monde entier retient son souffle tandis que la Chine fait étalage de sa puissance au large des côtes de Taiwan, mais il semble que la Chine achète de la technologie militaire au Canada. Le ministre est-il disposé à nous dire jusqu'à quel point il approuve les efforts que font le Canada ou les entreprises canadiennes pour vendre la technologie, notamment militaire, à la Chine?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, notre politique, depuis 1993, consiste à donner l'approbation ministérielle au cas par cas pour les transferts ou exportations de matériel non létal et non offensif.

Je puis dire au député, pour montrer à quel point notre examen est rigoureux, que nos ventes de matériel militaire ont atteint le chiffre faramineux de 10 000 $ en 1994. Je crois qu'il s'agissait de combinaisons de lutte contre les incendies.

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, il n'existe rien de tel que de la technologie militaire non offensive. Le matériel de détection de sous-marins que les Chinois ont acheté à une entreprise canadienne peut difficilement être rangé dans la catégorie des vêtements.

Un document portant la mention «Pour citoyens canadiens seulement» donne des directives établies par les Affaires étrangères pour intensifier les relations militaires bilatérales avec la Chine. Quand ont eu lieu les dernières rencontres entre des fonctionnaires du MDN et des représentants de l'Armée populaire de libération? Le gouvernement cherche-t-il toujours à intensifier ses relations militaires avec la Chine en ce moment, vu la situation qui existe au Moyen-Orient?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, nous pourrions commencer par une petite leçon de géographie. Aux dernières nouvelles, la Chine se trouvait en Asie. Elle a peut-être changé de place au cours des dernières 24 heures pendant mon voyage en avion, mais j'espère que non.

M. Morrison: Répondez donc à la question.

M. Grubel: Il n'a pas de notes d'information là-dessus.

M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre): Si le Parti réformiste veut une réponse, je vais me faire un plaisir de lui en donner une. Je vais laisser à ce parti le loisir de mener les discussions de politique de son caucus. Il se débrouille fort bien, ces jours-ci.

Si le député avait pris connaissance du document qui a été rendu public, il saurait que l'objet de cet engagement est d'établir des relations avec l'armée populaire de Chine et d'amorcer des discussions sur le maintien de la paix et la sécurité régionale, par exemple, afin d'éviter des situations comme celles qui se présentent aujourd'hui.

Je puis assurer au député que c'est la politique que nous suivons et qu'elle est périodiquement revue. Si nous avions l'impression que ces initiatives risquaient de mener à des menaces graves, nous réviserions certainement notre politique.

* * *

[Français]

M. TRAN TRIEU QUAN

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Interrogé par un journaliste le 4 février dernier pour savoir s'il entendait intervenir pour la libération de M. Tran Trieu Quan, le ministre désigné, Pierre Pettigrew, a répondu qu'il ne pouvait intervenir auprès du gouvernement vietnamien n'étant pas au courant du dossier.

(1445)

Le ministre des Affaires étrangères peut-il nous dire pourquoi, le 9 février, soit exactement cinq jours plus tard, le ministre Pettigrew a refusé de rencontrer des représentants de la famille et du groupe d'appui de M. Tran qui voulaient alors l'informer de la situation?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, la raison est simple. J'avais une réunion avec la famille de Mme Tran et aussi j'avais une réunion avec les ambassadeurs du Vietnam et j'ai présenté en même temps une lettre déclarant l'intérêt du Canada de protéger les droits de M. Tran.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, c'est dommage que M. Pettigrew n'ait pas été invité à la rencontre, il aurait eu l'air moins fou.

Comme l'a déjà fait la Belgique, est-ce que le gouvernement, pour ramener le Vietnam à la raison, est prêt à adopter la même attitude et menacer le Vietnam de sanctions, si le citoyen canadien n'est pas libéré, et ce, dans les plus brefs délais?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, nous savons ce que la députée essaie de faire. Il y a un événement qui aura lieu dans deux semaines, et elle essaie d'y apporter sa contribution. Évidemment, nous n'aurions pas pensé que le Bloc recourrait à des tactiques comme celle-là. Il est bien au-dessus de cela.


713

Pour ce qui est de la responsabilité de représenter les Canadiens à l'étranger, je veux qu'il soit bien clair que les services consulaires relèvent du ministre des Affaires étrangères. C'est pour cette raison que j'ai rencontré la famille Tran. C'est pour cette raison que j'ai communiqué directement avec l'ambassadeur du Viêt-nam. C'est pour cette raison que, à l'instar de mes prédécesseurs, nous avons entrepris expressément des démarches auprès du gouvernement vietnamien.

Nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour que M. Tran ait pleinement accès aux services consulaires. Lorsque le processus d'appel sera terminé, nous veillerons à faire toutes les démarches nécessaires pour obtenir sa libération, comme nous l'avons dit dans la lettre. Nous prendrons les mesures qui s'imposent, et je puis donner à la députée l'assurance que nous continuerons de travailler fort et efficacement dans ce dossier.

* * *

LE COMMERCE INTERNATIONAL

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, la loi Helms-Burton aux États-Unis préoccupe vivement les Canadiens. Étant donné que le gouvernement est bien déterminé à assurer la primauté du droit international et que nous sommes fermement résolus à protéger le droit fondamental des Canadiens de circuler et de commercer librement dans le monde entier, le ministre des Affaires étrangères peut-il informer la Chambre sur les dernières mesures qu'il a prises pour empêcher la mise en application de cette loi américaine?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je tiens d'abord à dire que l'opposition à la loi Helms-Burton est menée de front par plusieurs membres du gouvernement et non par un seul ministre. Le ministre du Commerce international s'occupe activement du dossier; certainement, le premier ministre aussi.

Ainsi, lorsqu'il participait au sommet en Égypte, le premier ministre a rencontré hier le président de l'Union européenne pour obtenir expressément son appui et sa collaboration dans la lutte contre cette importante loi. Nous rencontrerons aussi le commissaire au commerce, sir Leon Britton, lors de son passage dans la capitale, lundi. Le ministre du Commerce international a par ailleurs écrit une lettre à son homologue, M. Kantor, pour l'informer de la procédure que nous avons intentée en vertu de l'ALENA. Nous prendrons des mesures en vertu de l'ALENA.

Nous ferons tout notre possible pour faire comprendre que nous n'acceptons pas les prémisses de la loi Helms-Burton ni les mesures qui y sont prévues.

* * *

LE TERRORISME

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, il est bon de voir que le premier ministre travaille autant en Égypte, mais je trouve paradoxal qu'il doive se rendre dans ce pays pour apprendre que des organismes de charité canadiens soutenaient le terrorisme, alors que le Parti réformiste a soulevé cette question à la Chambre il y a presque un an. À l'époque, le gouvernement a cru que c'était une farce. Ce n'est que maintenant qu'il se rend compte que ce n'en est pas une.

Ma question s'adresse à la ministre du Revenu. La ministre peut-elle donner l'assurance à la Chambre que ses collaborateurs se sont déjà mis en relation avec la GRC et le SCRS pour déterminer quelles organisations terroristes établies au Canada ont le statut d'organisme de charité, ou s'agit-il d'un autre exemple où le gouvernement n'est qu'un tigre de papier?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Revenu national, Lib.): Oui, monsieur le Président, je puis confirmer que certains de mes collaborateurs sont en rapport avec le personnel du ministère du Solliciteur général et celui du ministère des Affaires étrangères.

Nous prenons cette question très au sérieux. Nous voulons trouver les bonnes stratégies afin de garantir que les organismes de charité que nous finançons ne sont pas liées, de quelque façon que ce soit, à des organisations terroristes.

(1450)

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, je trouve intéressant que la ministre parle du personnel des ministères, alors que ma question porte sur les personnes qui sont vraiment au fait, les employés de la GRC et du SCRS.

Depuis sa création en 1984, le SCRS s'est appuyé sur une définition prévue par la loi et selon laquelle le terrorisme est considéré étant toute activité utilisant la violence grave contre des personnes ou des biens dans le but d'atteindre un objectif politique. Comme la Chambre a déjà défini ce qu'est le terrorisme, je voudrais demander au solliciteur général si le gouvernement est prêt à utiliser cette définition dans sa loi sur le financement d'activités terroristes, que les organismes en cause prétendent ou non recueillir des fonds à des fins humanitaires.

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la définition énoncée par la députée figure dans une loi adoptée par le Parlement. Cette définition a résisté aux diverses interprétations qu'en ont faites les tribunaux. Je ne doute pas qu'elle nous sera fort utile dans notre travail de mise à jour de nos lois et nous permettra de régler ce grave problème du terrorisme.

J'ajouterai que tous les ministères concernés travaillent de concert pour trouver une solution à ce problème. La députée ne devrait pas avoir de doutes à cet égard.

* * *

[Français]

LE LOGEMENT SOCIAL

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre responsable de la Société canadienne d'hypothèques et de logement.


714

Le gouvernement fédéral, après avoir sous-financé au cours des sept dernières années le logement social au Québec, entend maintenant se retirer de ce domaine.

Depuis 1987, le Québec n'a jamais obtenu plus de 19 p. 100 des dépenses de la SCHL. Le manque à gagner annuel moyen s'élève à 122 millions pour le Québec, soit au total plus de 854 millions.

La ministre peut-elle nous dire si elle envisage accompagner ce retrait d'un transfert de points d'impôt, du moins dans le cas du Québec, qui assume déjà ses responsabilités en matière de logement social?

L'hon. Diane Marleau (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, ce que j'aimerais, c'est que les Québécois ou la députée décident qu'est-ce qu'ils veulent. Une minute, ils nous disent: «Transférez-nous les responsabilités.» Maintenant, dans le budget, nous leur disons que nous allons leur transférer l'argent et les responsabilités. Que voulez-vous de plus?

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais demander à la ministre où est l'argent.

Maintenant que le gouvernement fédéral se retire du logement social, on peut conclure que l'injustice faite au Québec, dénoncée alors par les libéraux québécois-Mme la députée de Saint-Henri-Westmount s'en souvient certainement-ne sera jamais réparée.

Compte tenu que les programmes fédéraux n'ont jamais été adaptés aux besoins spécifiques du Québec et compte tenu que le Québec assume depuis fort longtemps ses responsabilités dans ce domaine, la ministre a-t-elle l'intention de continuer à imposer des normes fédérales dans le domaine du logement social?

L'hon. Diane Marleau (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, j'ai eu une conversation avec le ministre responsable du Québec qui m'a dit être très intéressé par notre proposition. Nous proposons transférer les sommes d'argent que nous dépensons aujourd'hui dans le domaine du logement social et les normes seront les suivantes: nous voulons nous assurer que les sommes seront affectées au logement et qu'elles soient canalisées vers les ménages à moindre revenu.

Il faut dire qu'à ce point-ci nous dépensons un montant d'environ 350 millions de dollars au Québec. Alors s'ils le veulent, c'est ça.

* * *

[Traduction]

LES MARCHÉS DE L'ÉTAT

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, le ministère des Travaux publics a récemment accordé un contrat de 35 millions de dollars pour l'entretien de 12 navires à Fenco MacLaren, une entreprise québécoise qui n'a même pas de chantier maritime. Pourtant, la soumission de Halifax Shipyard était la plus basse et la meilleure du côté technique. Cette entreprise avait été recommandée par le ministère de la Défense nationale, mais elle n'a pas été retenue. De toute évidence, le gouvernement fait passer le favoritisme régional avant l'intérêt des contribuables canadiens.

(1455)

La ministre des Travaux publics pourrait-elle expliquer à la Chambre comment il se fait qu'une entreprise qui n'a même pas de chantier maritime et dont la soumission dépassait de 1 million de dollars celle de Halifax Shipyard a obtenu ce contrat en dépit des souhaits exprimés par le ministère de la Défense nationale?

L'hon. Diane Marleau (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai expliqué tout à l'heure dans l'autre langue officielle du Canada, le ministère des Travaux publics possède un processus très ouvert d'attribution des contrats.

Le contrat dont on parle a été accordé à Fenco MacLaren. Le siège social de Fenco MacLaren se trouve à Nepean. Selon mes dernières informations, il n'y a pas de chantier maritime à Nepean. Les travaux seront effectués à Halifax et à Vancouver, comme il se doit.

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, Fenco MacLaren Inc. est une filiale en propriété exclusive de SNC-Lavalin, qui a son siège au Québec.

Nous nous souvenons tous du contrat des CF-18 et de l'Agence spatiale canadienne, et c'est maintenant au tour de l'entretien de navires. Il n'est pas étonnant que beaucoup de questions sur l'attribution de ce contrat demeurent sans réponses et que cela ait amené un examen sérieux du processus d'attribution des contrats du ministère.

Le Comité permanent des opérations gouvernementales examine actuellement les processus et les procédures du gouvernement en matière d'attribution de contrats. La ministre accepterait-elle de soumettre l'attribution de ce contrat à un examen par le Comité permanent des opérations gouvernementales?

L'hon. Diane Marleau (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, les comités permanents, m'a-t-on dit, sont maîtres de leurs travaux. Ils sont libres de décider ce qu'ils feront et ne feront pas. Ni mon ministère ni moi ne pouvons nous ingérer dans leurs travaux. Cependant, nous pouvons collaborer.

Dire que Fenco MacLaren appartient en partie à quelqu'un du Québec, cela ne fait que démontrer à quel point le pays fonctionne bien. Nous parlons d'une entreprise ayant son siège en Ontario, d'une autre ayant son siège au Québec et de travaux qui seront effectués et sur la côte ouest et sur la côte est.

* * *

L'IMMIGRATION

M. Jim Peterson (Willowdale, Lib.): Monsieur le Président, Konrads Kalejs aurait participé à l'exécution de 27 000 juifs. Il a été expulsé des États-Unis en 1988 et, depuis 1994, il est entré deux fois au Canada et a passé la majeure partie de son temps ici. Enfin, en septembre dernier, le procès en vue de son expulsion a été fixé au mois de février, mais il a maintenant été reporté au mois de mai.


715

Les habitants de Willowdale, avec Rhonda Greenberg à leur tête, le Congrès juif canadien, dirigé par Bernie Farber, et beaucoup d'autres encore ont critiqué la façon dont nous traitons cette affaire.

Ma question s'adresse à la ministre de l'Immigration: comment explique-t-elle qu'on tarde tant à régler le problème que pose la présence au Canada de ce présumé criminel de guerre nazi? Nous pourrions certainement faire mieux.

[Français]

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je veux d'abord dire que le Canada n'est pas, ne sera pas et ne deviendra pas une terre de refuge pour les criminels de guerre. C'est très clair. Nous nous sommes engagés envers les Canadiens et la communauté internationale à agir envers les crimes de guerre en tant que tels.

Je comprends que le député de Willowdale soit préoccupé par les délais dans les cas qui nous concernent, et je le suis aussi. Je peux l'assurer que nous allons regarder de près la situation en ce qui concerne les délais et tenter de l'améliorer. Cela étant dit, je pense qu'il faut comprendre que ces dossiers sont d'une très grande complexité sur le plan juridique, que la documentation est énorme dans ces dossiers-là et qu'il faut que les fonctionnaires du ministère soient très bien préparés avant de faire enquête.

Mais encore une fois, je peux assurer le député de Willowdale que nous allons agir avec célérité dans ce dossier.

* * *

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Voulant éviter tout ennui avec la Chine, le gouvernement thaïlandais a arrêté et détenu deux membres d'Amnistie Internationale, dont une citoyenne canadienne, qui tentaient de tenir une conférence de presse pour faire connaître un rapport sur les graves violations des droits de la personne en Chine.

(1500)

Puisque le rapport que voulaient diffuser les membres d'Amnistie internationale conclut que les réformes économiques en Chine ne sont pas accompagnées de réformes en matière de droits de la personne, le ministre ne voit-il pas là la preuve concrète de l'échec de la politique de son gouvernement à l'égard des droits de la personne et de la démocratie? N'est-ce pas là la preuve qu'Équipe Canada, plus communément connue sous le nom de Team Canada, ne s'est jamais vraiment préoccupée des droits de la personne?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Non, monsieur le Président. C'est la mauvaise conclusion à tirer.

Nous avons exprimé notre profonde préoccupation au sujet des violations des droits de la personne et nous prenons des mesures concrètes à cet égard. L'initiative la plus importante que nous avons prise était juste avant Noël. Il y a eu un sérieux dialogue entre des représentants canadiens, y compris le commissaire canadien aux droits de la personne, et leurs homologues chinois. Ce dialogue nous a permis de discuter d'un certain nombre de ces questions et d'obtenir des résultats concrets.

Nous ne pouvons pas changer du jour au lendemain des pratiques qui existent depuis des temps immémoriaux, mais nous pouvons engager un dialogue actif. En même temps, nous investissons, par l'intermédiaire de l'ACDI, dans d'importants programmes pour aider à mettre en place de meilleurs systèmes judiciaires et à assurer une meilleure protection aux femmes en Chine. Nous pouvons, de cette façon, contribuer de façon très positive à améliorer le respect des droits de la personne dans ce pays.

* * *

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

Un rapport du cabinet d'experts-conseils en gestion Deloitte & Touche fait état d'un manque scandaleux de planification et de budgétisation à la Commission canadienne du blé. Cette information a fait l'objet d'une fuite dans le public.

Le ministre va-t-il finir par informer correctement les agriculteurs au sujet des problèmes de commercialisation que connaît la Commission canadienne du blé ou ces agriculteurs devront-ils attendre de nouvelles fuites pour connaître la vérité?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le député fait sans doute référence au rapport dont parlait hier son collègue du Parti réformiste. Cette étude remonte apparemment à 1992.

Le fait que la commission elle-même ait commandé cette étude montre l'importance qu'elle accorde à certaines questions et sa volonté d'y trouver une solution. La Commission canadienne du blé m'a informé qu'elle a, depuis, donné suite aux recommandations du rapport.

* * *

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, les néo-démocrates et les agriculteurs canadiens craignent que le gouvernement fédéral n'ait pas réagi assez énergiquement aux mesures récentes adoptées par le Congrès américain.

Le ministre sait que l'abandon de la loi américaine sur l'agriculture pourrait faire revenir les niveaux de subvention du maïs à 7 $. Le prix garanti du blé est de 9 $. Le gouvernement américain a réduit de 20 p. 100 les droits de pâturage sur les terres de l'État, créant ainsi une nouvelle subvention aux producteurs de boeuf.


716

Le ministre peut-il donner aux producteurs canadiens l'assurance qu'il conteste énergiquement ces violations par les États-Unis de nos accords commerciaux?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement canadien porte toujours un vif intérêt aux décisions des États-Unis concernant leur politique agricole et, fidèle à ses responsabilités, il veille à ce que les politiques internationales n'empiètent pas sur les droits et les intérêts commerciaux du Canada.

Les États-Unis ont pris certains engagements devant l'Organisation mondiale du commerce relativement aux autres accords commerciaux bilatéraux et régionaux. Le gouvernement canadien sera extrêmement vigilant et veillera ce que les États-Unis et les autres partenaires commerciaux du Canada respectent l'esprit et la lettre de leurs obligations en vertu de ces accords internationaux.

Le Président: Ceci met un terme à la période des questions.

* * *

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, question fort embêtante pour le leader en Chambre du gouvernement: Quel sera le menu législatif au cours des jours qui viennent?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est un grand plaisir pour moi de donner des informations pour les jours qui viennent. Sa question a un sens sûrement très politique aujourd'hui.

[Traduction]

Demain, ce sera une journée d'opposition. Lundi, nous avons l'intention de poursuivre le débat sur le budget. La semaine dernière, j'avais dit que nous aurions le débat sur le budget mardi, mais si nous n'arrivons pas aujourd'hui aux initiatives ministérielles, comme il semble que ce sera le cas, nous aurons donc une journée d'opposition mardi. Mercredi, ce sera aussi une journée d'opposition.

(1505)

Jeudi, nous avons l'intention de discuter de projets de loi. Je consulterai mes collègues d'en face à ce sujet au début de la semaine prochaine. Toutefois, je peux dire tout de suite à la Chambre que les mesures à traiter en priorité sont le projet de loi C-3 sur les négociations collectives dans l'industrie du nucléaire, le projet de loi C-10 sur le pouvoir d'emprunt, et le projet de loi C-14 sur les transports.

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PRÉSENCE À LA TRIBUNE

M. Peter Milliken (Kingston et les Îles, Lib.): Monsieur le Président, plusieurs députés se sont informés au sujet de la présence à la tribune d'un groupe de 45 élèves-officiers. . .

[Français]

-du Collège militaire royal du Canada de Kingston, qui sont ici avec leur professeur, Yvon Gagnon. Ils sont ici à titre de membres d'une classe qui étudie le gouvernement canadien.

[Traduction]

Il ne faut pas les confondre avec les 24 cadets de l'air du 792 Wing Squadron, qui sont venus d'Iroquois Falls et qui sont également présents à la tribune.

Des voix: Bravo!

Le Président: Je suis content que le député signale ce fait à la Chambre. Nous nous interrogions tous à ce sujet.

* * *

[Français]

QUESTION DE PRIVILÈGE

LE COMMUNIQUÉ DU DÉPUTÉ DE CHARLESBOURG

La Chambre reprend l'étude de la motion, de l'amendement et du sous-amendement.

Le Président: Le député de Verchères a la parole. Il vous reste 12 minutes, cher collègue.

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, lorsque j'ai été interrompu par la période des questions, je disais que le communiqué de presse de mon collègue de Charlesbourg était tout à fait responsable puisqu'il faisait état d'un certain nombre de valeurs que nous partageons avec nos concitoyennes et concitoyens du Canada. Comme par exemple la volonté de participer à des missions de paix, comme la volonté de continuer à faire partie de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, comme la volonté de respecter les exigences démocratiques, de respecter les droits civils et humains.

Il n'y a là rien de répréhensible. Je reprends les termes du communiqué de mon collègue de Charlesbourg où il disait tout simplement:

Au lendemain d'un oui [. . .]
Il faut faire attention, ce n'est pas «le lendemain d'un oui», mais «au lendemain d'un oui», au moment où la souveraineté serait effectivement réalisée, on offrirait. . .

[. . .] à tous les militaires québécois servant dans les forces canadiennes la possibilité d'intégrer les forces québécoises [. . .]
Il n'y a là, comme je le signalais, aucun appel à la désertion, aucun appel à la rébellion, aucun appel à la révolte. C'était au contraire un communiqué qui donnait l'heure juste sur ce que le gouvernement d'un Québec souverain entendait faire en regard de sa politique de défense.


717

Les militaires ne vivent pas sur une autre planète. Ils ont vécu, comme tous les autres citoyens et citoyennes du Québec, la campagne référendaire. Comme plusieurs fonctionnaires fédéraux, ils se sont interrogés sur le sort qui leur serait réservé dans l'éventualité où le Québec deviendrait un État souverain.

Le communiqué de mon collègue de Charlesbourg a tout simplement voulu répondre aux préoccupations et aux appréhensions légitimes des Québécois et Québécoises qui sont membres des Forces armées canadiennes.

À ce stade-ci, j'aimerais préciser que le communiqué parle «d'offrir à tous les militaires québécois», et non pas comme le laisse entendre la motion insidieuse du Parti réformiste, «les militaires francophones québécois». Il s'agit des militaires québécois dans leur ensemble.

Qu'est-ce qui peut amener un Québécois ou une Québécoise à vouloir joindre les Forces armées canadiennes? Certains vont faire le choix de s'enrôler pour l'aventure, pour les voyages. D'autres vont choisir de s'enrôler avec un profond sens du devoir, avec la conviction intime qu'ils pourraient être appelés un jour à devoir défendre et à protéger notre liberté, nos valeurs démocratiques, mais également leurs biens, leurs proches, leurs familles.

(1510)

Ces Québécoises et Québécois qui décident de joindre les Forces armées canadiennes, où se trouvent leurs biens? Où se trouvent leurs proches et leur famille? Au Québec, monsieur le Président.

Mais dans le régime constitutionnel actuel, comment pouvoir défendre nos biens, nos proches, nos parents qui habitent le Québec? Comment pouvoir défendre le Québec, sinon en joignant les rangs des Forces armées canadiennes?

S'ils souhaitent pouvoir défendre indirectement le Québec en joignant les Forces armées canadiennes, ils ne sont pas pour autant déloyaux envers le Canada. S'ils sont pour le Québec, cela ne veut pas dire qu'ils sont contre le Canada.

J'ai été moi-même officier des Forces armées canadiennes, et je suis en mesure de vous dire, puisque j'ai obtenu ma libération honorable des forces canadiennes avec le grade de lieutenant de marine au moment de mon élection, que je n'ai pas quitté les forces canadiennes par principe ou par conviction que je ne devais plus être membre des forces canadiennes parce que j'étais maintenant député du Bloc québécois à la Chambre des communes. J'ai simplement quitté parce que je n'avais plus le temps de poursuivre mon engagement au sein des forces canadiennes.

J'ai été à même de constater qu'au sein des Forces armées canadiennes on retrouve une espèce de microcosme, une espèce de modèle réduit de la société québécoise dans son ensemble. On retrouve presque autant de souverainistes dans les Forces armées canadiennes que de fédéralistes. Et il n'y a pas là de raison de penser que les gens qui sont souverainistes au sein des Forces armées canadiennes sont pour autant déloyaux au Canada ou qu'ils sont opposés au Canada ou qu'éventuellement, comme le laissent entendre nos collègues du Parti réformiste, qu'ils souhaiteraient prendre les armes que leur fournissent les Forces armées canadiennes pour se retourner et se révolter contre le Canada. C'est complètement ridicule.

Ce n'est un secret pour personne que les francophones au sein des Forces armées canadiennes ont été trop souvent victimes de discrimination et de mépris. On entend encore aujourd'hui nos concitoyennes et concitoyens un peu plus âgés du reste du Canada véhiculer la rumeur, l'idée selon laquelle les francophones, durant la Seconde Guerre mondiale, n'auraient pas voulu se battre. En dépit de la trahison du gouvernement fédéral de l'époque, en 1942, qui a imposé la conscription par un référendum, alors qu'il avait promis de ne pas imposer la conscription, par un référendum où le Québec s'est retrouvé encore une fois isolé par rapport au reste du Canada, en dépit de cette trahison, de nombreux Québécois et Québécoises ont joint les rangs des forces canadiennes à l'époque, de l'armée, de la marine et de l'aviation canadienne, combattant sur tous les théâtres d'opération.

Il y avait des Québécois à Hong Kong au moment de la terrible intervention japonaise et certains ont passé le reste de la guerre dans les camps d'internement.

Les Fusiliers Mont-Royal étaient présents sur les plages de Dieppe. Ils ont été fauchés sur les plages de Dieppe lors de cette terrible intervention dont on a dit que les Britanniques étaient prêts à se battre jusqu'à la dernière goutte de sang canadien. Le Régiment de Maisonneuve était sur les plages de Normandie au moment du débarquement. Le 22e Régiment était à Monte Cassino, en Italie, au cours de la meurtrière bataille qui s'y est déroulée.

Les Québécoises et les Québécois ont fait preuve de loyauté à l'égard du Canada au sein des forces canadiennes. Ils ont prouvé leur loyauté tout au long de ces années. Ce qui n'empêche pas que certains, un très grand nombre, partagent l'intime conviction que le Québec devrait devenir un jour un pays souverain. Et lorsque le Québec sera devenu un pays souverain, il ne faudrait pas se surprendre que ces Québécoises et Québécois, après qu'on leur eût offert la possibilité de joindre les rangs des forces armées québécoises, décident, sans pour autant avoir quelque ressentiment à l'égard du Canada, sans pour autant manifester quelque mépris ou quelque mauvais sentiment à l'égard du Canada, de joindre les rangs des forces armées québécoises. Il n'y a là absolument rien d'étonnant.

(1515)

Nos amis du Parti réformiste ont voulu déclencher, par ce débat, une espèce de tempête dans un verre d'eau, un débat tout à fait inapproprié, inadéquat. Comme je le signalais au tout début du débat, ils se sont servis, ils se sont approprié les règles de la Chambre pour réussir à détourner les débats réguliers de cette Chambre, pour tenter de faire le procès du Bloc québécois et le procès de mon collègue de Charlesbourg.

Après que les députés du parti gouvernemental se soient associés, se soient fait les complices du Parti réformiste au moment du vote, on va probablement renvoyer cette question au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre. Là, Dieu sait comment sera traité ce banal communiqué de mon collègue de Charlesbourg, qui avait simplement pour objet d'expliquer à nos concitoyennes et concitoyens du Québec qui font partie des Forces armées canadiennes ce que les souverainistes avaient en tête, dans l'éventualité de la


718

souveraineté, en matière de défense nationale, et ce qu'ils avaient en tête quant à la possibilité, pour eux et pour elles, de joindre les rangs des forces canadiennes.

Alors, quel traitement sera donné à ce communiqué? Aucune règle n'a été déterminée ou présentée dans ce débat sur la façon dont on traiterait ce communiqué. Allons-nous convoquer mon collègue de Charlesbourg devant ce comité pour, en quelque sorte, faire son procès? Allons-nous rééditer la malheureuse expérience de Louis Riel à l'exception que, bien sûr, mon collègue de Charlesbourg ne pourra être reconnu coupable par les tribunaux canadiens puisque, tout bonnement, notre collègue, le chef du Parti réformiste, admettait qu'il n'y avait aucune base légale pour des poursuites au criminel.

Mais ce comité se transformera en espèce de tribunal fantoche devant lequel sera probablement appelé à comparaître mon collègue de Charlesbourg pour expliquer ses gestes, pour se disculper d'avoir tout simplement voulu, dans un débat démocratique, informer nos concitoyennes et concitoyens membres des Forces armées canadiennes, de ce que les souverainistes avaient en tête pour eux.

Il est tout à fait inacceptable, dans un pays démocratique comme le nôtre, ou dans un pays qui se prétend démocratique-parce que là, je dois malheureusement m'interroger lorsque le chef du Parti réformiste dit qu'on est en train de définir, en cette Chambre, une nouvelle forme de sédition, mais cette nouvelle forme de sédition, n'est-ce pas là un procès d'opinion qu'on est en train de faire? Alors, dans un pays démocratique comme le Canada, il est normal que dans un débat, lors d'un référendum, nous fassions part à l'ensemble de la population, y compris aux membres des Forces armées canadiennes, des enjeux d'un éventuel oui au référendum.

Il fallait que les gens, nos concitoyennes et concitoyens du Québec, puissent savoir quels étaient les conséquences, les avantages et les retombées possibles d'un éventuel oui au référendum. Le projet demeure. Avec le vote à peu près nul que nous avons obtenu le 30 octobre dernier, il est bien évident que la question n'est pas encore réglée et que nous aurons éventuellement à revenir une autre fois pour consulter la population du Québec. Monsieur le Président, vous pouvez être certain qu'encore une fois, nous ouvrirons tout grand notre jeu, comme le demande le parti gouvernemental, et que nous expliquerons à l'ensemble de la population, y compris aux militaires, ce que nous avons en tête, ce que notre projet implique pour eux.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui à propos d'une question extrêmement importante, la motion concernant l'outrage au Parlement.

En tant que député élu, je prends mon travail et cette institution très au sérieux. Un représentant élu est justement une personne élue pour représenter ses électeurs. Le gouvernement a abandonné son principe démocratique fondamental au profit de l'opportunisme politique.

(1520)

Il a été établi que le député de Charlesbourg, un membre du Comité de la défense, a publié un communiqué sur le papier à en-tête du bureau du chef de l'opposition officielle le 26 octobre 1995 pour inviter les membres francophones des Forces canadiennes à se joindre aux forces militaires du Québec dans l'éventualité où le oui l'emporterait au référendum.

La motion présentée à l'origine par les réformistes demandait qu'il soit reconnu que, de l'avis de la Chambre, cette action soit considérée comme séditieuse et offensante et comme un outrage au Parlement.

La question n'est pas de savoir si l'action du député a été offensante pour le public. Or, à en juger par le nombre de lettres et d'appels téléphoniques que j'ai reçus, elle a été sans aucun doute considérée comme offensante pour le public. La question n'est pas de savoir si l'action du député est séditieuse au sens des articles 53, 59 ou 62 du Code criminel. La question est plutôt de savoir si, de l'avis de la Chambre, l'action du député devrait être considérée comme séditieuse et offensante.

En permettant l'étude de cette motion dans sa forme originale, la Chambre va non seulement déterminer si un député doit faire l'objet de mesures disciplinaires pour avoir commis une action offensante pour la Chambre et pour les Canadiens, mais elle va aussi établir, à la suite d'un examen effectué par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, des lignes directrices à l'intention de tous les députés pour délimiter ce que leurs électeurs estiment être une conduite acceptable ou inacceptable dans le fait de demander aux membres des Forces canadiennes de briser les rangs et de se joindre, dans ce cas, aux forces militaires du Québec.

Ces lignes directrices préciseront ce qui est une conduite acceptable et une conduite inacceptable. Cela protégera les députés du Bloc, leurs électeurs et leur province, de même que tous les autres Canadiens.

L'absence de lignes directrices de ce genre laisse la porte grande ouverte à d'autres erreurs comme celle-ci. Il est important pour nous tous de nous assurer que la loi énonce aussi clairement que possible de telles lignes directrices.

C'est une question difficile. La politique des libéraux, lorsqu'il faut prendre une décision difficile, est de ne rien décider du tout. Leur mot d'ordre, qui est d'ignorer le problème en pensant qu'il disparaîtra, a non seulement aliéné les Canadiens, mais a bien failli nous coûter notre pays. Les Canadiens s'attendent à ce que leur gouvernement les écoute et prenne les mesures nécessaires pour répondre à leurs préoccupations. Le gouvernement a prouvé à maintes reprises que les voeux de son électorat ne l'intéressaient pas. Il suit son propre mandat, bien souvent diamétralement opposé aux desiderata des électeurs et de la majorité des Canadiens.

Dans le cas présent, il a fermé les yeux sur la déclaration que le député de Charlesbourg a faite sur le papier à en-tête de M. Bouchard. Le député de Charlesbourg a publié un communiqué invitant les Québécois membres des Forces canadiennes à quitter leur poste pour se joindre aux forces armées du Québec. Certains voient dans ce geste un outrage au Parlement.

On s'est demandé s'il s'agissait de sédition. Les tribunaux ont décidé que, d'après le Code criminel du Canada, ces gestes ne sont pas séditieux. La définition est très claire: pour qu'il y ait sédition, il faut qu'il y ait violence contre l'État.


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Nous demandons cependant à la Chambre que la nature séditieuse de ce geste soit étudiée par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre et qu'elle fasse l'objet d'une décision. Nous ne cherchons pas à limiter le droit de parole. Nous ne faisons pas la chasse aux sorcières dans l'espoir de débarrasser la Chambre des députés bloquistes. Nous réclamons des régles de conduite claires pour les parlementaires.

Les députés d'en face étaient tout à fait disposés à ce que ce même comité élabore des règles de conduite et fixe des pénalités à l'intention des députés. Maintenant, du fait que la question est controversée et qu'elle suscite une vive inquiétude parmi les Canadiens, ils refusent de prendre position et de permettre qu'on règle l'affaire. Nous avons été élus ici pour prendre des décisions difficiles; prenons-les.

Mon grand-père est né à Nicolet, au Québec, près de Trois-Rivières, en 1867, année où le Canada est devenu un pays. Il croyait à la démocratie et accordait grand prix à la liberté et aux possibilités qu'offrait le Canada.

(1525)

Pendant les 105 ans qu'il a passés sur la terre, mon grand-père n'aurait jamais toléré le geste du député de Charlesbourg, pas plus que mes électeurs de Végréville ne le tolèrent aujourd'hui. Ils m'ont demandé à maintes reprises pourquoi le gouvernement libéral n'avait pas réglée cette question à la Chambre. Comment puis-je répondre? Le gouvernement refuse de faire face aux problèmes. Une fois de plus, c'est au Parti réformiste qu'il incombe de faire le travail du gouvernement.

Le gouvernement illustre bien ce qui ne va pas dans la politique de nos jours. Il a atteint le même niveau d'arrogance, de cupidité et de pratiques antidémocratiques que son prédécesseur. Au cours des dernières élections, les Canadiens ont exprimé clairement que les pratiques politiques du passé ne sauraient être tolérées plus longtemps. Pourtant, le gouvernement continue le même style de politique. Il est évident que c'est un gouvernement qui a la mémoire aussi faible que ses initiatives.

Les Canadiens sont reconnus dans le monde entier pour leur patience, leur tolérance et leur compréhension. Toutefois, même ces vertus ont une limite. Il vient un moment où cela suffit et où il faut prendre position. Ce moment est venu.

Les Canadiens ont été furieux lorsque le Bloc québécois est devenu l'opposition officielle de Sa Majesté. Le fait qu'un parti politique dont le mandat est de détruire le pays puisse siéger à la Chambre des communes était déjà grave, mais qu'on lui confie en plus le statut d'opposition officielle, c'était, pour beaucoup de Canadiens, l'équivalent d'une trahison.

Un gouvernement responsable aurait écouté ces craintes et aurait répondu en définissant clairement le rôle de l'opposition officielle. Un rôle destiné à protéger les intérêts des Canadiens contre un gouvernement irresponsable, un rôle de gouvernement en puissance. Mais pas le gouvernement actuel. Il était heureux d'avoir une opposition officielle séparatiste plutôt qu'une opposition qui serait responsable auprès des Canadiens.

Le Bloc a prêté serment et a promis de remplir son rôle d'opposition officielle, pas d'en abuser. Quelques mois plus tard, celui qui était alors le chef de l'opposition officielle a commencé à faire des visites officielles dans des pays étrangers. Au cours de ces visites, aux frais du contribuable canadien, il sollicitait la reconnaissance d'un Québec souverain. De toute évidence, c'était un abus du poste de chef de l'opposition et ce n'était pas dans l'intérêt des Canadiens.

Un gouvernement responsable aurait demandé une enquête sur l'utilisation de l'argent des contribuables et de l'influence parlementaire. Mais pas ce gouvernement. Il n'a aucun respect pour l'argent durement gagné des Canadiens. En fait, il nous a traités de tous les noms et a refusé d'agir. Le chef de l'opposition a utilisé l'influence de son poste pour livrer une guerre verbale au Canada, de façon à promouvoir son objectif de séparation. Un gouvernement responsable aurait défini très clairement les conséquences, les termes et les conditions d'une séparation et il aurait abordé les autres questions importantes pour tous les Canadiens du pays. Ce n'est pas ce que ce gouvernement a fait. Il s'est laissé entraîner dans le programme séparatiste. Son inaction a été presque fatale pour ce pays qui nous tient tant à coeur.

Maintenant, le gouvernement refuse de contester ou de punir les gestes du député de Charlesbourg, qui sont survenus durant la campagne référendaire. Un député de la loyale opposition de Sa Majesté, membre du Comité permanent de la défense nationale, a abusé des privilèges de son poste d'élu pour encourager les membres des Forces canadiennes à briser les rangs pour venir se joindre aux forces armées du Québec.

Un gouvernement responsable aurait présenté une motion pour renvoyer cette question au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, afin que le mot «sédition» soit défini d'une manière conforme à la volonté des Canadiens. Au lieu de cela, le gouvernement a délayé le contenu de la motion du Parti réformiste.

On a dit que le gouvernement avait trouvé le communiqué scandaleux et révoltant. Il l'est. En fait, le whip en chef du gouvernement, qui a pris la parole un peu plus tôt, a qualifié l'incident de «mutinerie». Le whip en chef du gouvernement à la Chambre a parlé de mutinerie. On pourrait penser que de telles paroles entraîneraient des sanctions. Pas du tout.

(1530)

Le même whip du gouvernement a menacé d'amener le leader parlementaire du Parti réformiste à la barre de la Chambre des communes parce qu'il avait prétendument tenté de faire pression auprès du Président de la Chambre pour que ce dernier nomme le Parti réformiste à titre d'opposition officielle. Il est évident que le whip du gouvernement considère qu'une opposition loyale est plus menaçante qu'une opposition déloyale. Il semble que le Parti réformiste, dont le mandat est centré sur la restauration du pays, soit considéré comme un ennemi du gouvernement digne de mesures disciplinaires. C'est bien triste.


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Le gouvernement préfère un parti séparatiste comme opposition loyale. Pourquoi? Parce qu'il craint le Parti réformiste. Nous constituons une menace. Pourquoi? Parce que nous voulons habiliter les Canadiens, parce que nous voulons rendre des comptes directement à nos électeurs. Ce sont là les principes fondamentaux de la démocratie et d'un gouvernement responsable.

Le premier ministre et les autres libéraux ont parfois donné leur version de la démocratie. Aujourd'hui encore, le député de Mississauga-Sud a parlé de pratiquer la démocratie et a déclaré que mon collègue, le député de Vancouver-Nord, était déçu de la démocratie. Rien n'est plus faux.

Ce qui nous frustre, mon collègue et moi, c'est justement qu'il n'existe aucune démocratie à la Chambre. De même, il n'existe aucune véritable démocratie qui fonctionne dans notre pays et les Canadiens le savent. Nous avons plutôt une dictature élue. C'est parce que nous n'avons pas une démocratie véritable que le gouvernement peut passer sous silence des enjeux aussi importants que celui dont il est question ici aujourd'hui.

J'aimerais toucher un mot des points de vue contraires qu'expriment les députés à la Chambre, notamment les libéraux, à propos de ce qu'est la démocratie, comparativement à ce que pensent les Canadiens. Il y a 295 fauteuils à la Chambre des communes. À qui sont ces fauteuils?

Prenons, par exemple, un fauteuil du côté du gouvernement. À qui appartient-il? Il y a des députés à la Chambre, y compris le premier ministre, qui ont déjà dit que le fauteuil appartient au député qui l'occupe. En d'autres occasions, le premier ministre a dit que les fauteuils ministériels de la Chambre lui appartenaient tous, à lui, le premier ministre. Il se trouve toujours des députés, dont les réformistes, pour croire que les fauteuils de la Chambre des communes appartiennent aux électeurs de la circonscription que représente le député qui l'occupe.

J'aimerais m'entendre une minute ou deux sur l'idée que ce fauteuil de la Chambre des communes appartient au député. Dernièrement, à un populaire talk-show radiophonique de Toronto, on interviewait un député libéral. Ce député libéral passe pour être un des parlementaires les plus démocrates de la Chambre. Il lui est arrivé d'aller à l'encontre de la ligne dure adoptée par son gouvernement.

Une réformiste s'est proposée pour appeler à ce talk-show et le féliciter pour son geste. Pendant qu'elle attendait son tour, on posa une question à ce député. La question était la suivante: «Si vos électeurs vous demandaient de voter pour la peine de mort, le feriez-vous?» Le député se contenta de tourner autour du pot.

Quand ce fut son tour, notre réformiste était furieuse, elle avait changé d'avis au sujet de ce député. Elle lui a demandé, non pas une fois, non pas deux fois, mais bien quatre fois s'il voterait selon les souhaits de ses électeurs dans le cas où la Chambre des communes tiendrait un vote sur la peine de mort.

(1535)

La quatrième fois, elle a formulé la question comme ceci: «Si 100 p. 100 de vos électeurs indiquaient dans un sondage ou une étude qu'ils sont en faveur de la peine capitale, voteriez-vous selon leurs désirs si un vote à ce sujet était tenu à la Chambre des communes?» Le député a répondu qu'il voterait selon sa conscience. De toute évidence, dans ce cas-là, ce député estime que le siège lui appartient.

Depuis que je suis à la Chambre, notre premier ministre a dit qu'il était fier d'avoir le courage de voter contrairement aux désirs de ses électeurs sur les questions de l'avortement et de la peine capitale. Y a-t-il une raison d'être fier de voter contrairement aux désirs d'une majorité d'électeurs sur ces questions? Je ne le crois pas. Dans ce cas-là, le premier ministre estimait que le siège qu'il occupe à la Chambre des communes lui appartient.

L'autre point de vue, celui qui prédomine dans le Parti libéral, c'est que les sièges à la Chambre des communes appartiennent au premier ministre. Prenons, à titre d'exemple, le projet de loi C-68 sur le contrôle des armes à feu. À la deuxième lecture, certains députés libéraux ont accédé aux désirs de leurs électeurs; ils s'étaient renseignés et ont voté contre le projet de loi. Comment ont-ils été récompensés pour avoir fait le travail qu'ils sont censés faire ici, à la Chambre? Le premier ministre les a punis et les a expulsés de comités.

Puis, le premier ministre a dit publiquement qu'il punirait tout député de son parti qui voterait encore une fois contre un projet de loi d'initiative gouvernementale, en refusant de signer sa déclaration de candidature. Cela signifie que sa carrière politique serait terminée. C'est la menace qu'il a faite publiquement. Est-ce là la démocratie? Dans ce cas-ci, il est clair que le premier ministre dit: «Tous les sièges du côté ministériel m'appartiennent, à moi, le premier ministre, et si vous ne faites pas ce que je vous dis de faire, vous serez exclus du caucus.» Peut-on parler de démocratie? Cela n'a rien à voir avec la démocratie. C'est purement et simplement une dictature élue.

Certains d'entre nous ont un point de vue tout à fait différent. Ils croient que la Chambre des communes appartient aux Canadiens. Chaque siège est la propriété des gens qui ont élu un député pour les représenter. Pour faire en sorte que les sièges à la Chambre n'appartiennent plus au premier ministre ni aux députés individuellement, le Parti réformiste a présenté plusieurs mesures législatives. Si on les avait adoptées, ces sièges appartiendraient aux Canadiens et non aux députés ou au premier ministre.

Par exemple, la députée de Beaver River a présenté le projet de loi C-210, qui prévoyait la révocation des députés et qui aurait donné le pouvoir aux électeurs de licencier leur député entre deux élections. D'un côté, le premier ministre peut dire: «Si vous ne suivez pas la ligne du parti, si vous ne votez pas comme je vous dis de voter, je ne signerai pas votre déclaration de candidature et votre carrière sera terminée.» D'un autre côté, les électeurs peuvent dire: «Si vous ne faites pas ce que la majorité d'entre nous souhaitent, nous allons vous flanquer à la porte avant les prochaines élections.» Ainsi, ces sièges appartiennent aux électeurs de la circonscription.


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La députée de Mission-Coquitlam a présenté la motion no 89 réclamant des votes plus libres à la Chambre des communes. Si on l'avait adoptée, on pourrait alors tenir à la Chambre des communes des votes plus libres. C'est un changement très simple auquel on a procédé en Grande-Bretagne il y a des décennies. Le rejet d'un projet de loi d'initiative ministérielle n'entraînerait pas automatiquement la chute du gouvernement. Cela donne ainsi la possibilité aux députés ministériels de voter selon les souhaits de leurs électeurs. Si un projet de loi est rejeté, il faut alors adopter une motion distincte de défiance pour que le gouvernement tombe. On donne ainsi le pouvoir aux gens plutôt qu'aux députés et, en particulier, au premier ministre, le chef du parti.

La députée de Mission-Coquitlam a présenté la motion no 459, qui aurait conduit à la mise en place d'un Sénat élu pour remplacer le Sénat actuel fondé sur des nominations partisanes. Le député de Kootenay-Est a présenté pour sa part le projet de loi C-365 qui prévoyait un Sénat élu.

(1540)

De nombreuses motions dont les réformistes ont saisi la Chambre auraient permis le recours à des référendums sur des questions importantes comme la peine capitale, l'avortement et le suicide avec l'aide d'un médecin. Pour qu'ils ne soient pas trop coûteux, on aurait tenu ces référendums en même temps que les élections fédérales. On avait ainsi donné ces sièges à la Chambre des communes directement aux électeurs.

Dans tous les cas, le gouvernement s'est prononcé contre ces projets de loi. Il a rejeté les modifications qui auraient enlevé le contrôle de ces sièges aux députés et plus particulièrement au premier ministre, pour le remettre plutôt aux électeurs.

Il est tellement regrettable que ces modifications, que les libéraux avaient pourtant promises, ne se soient pas matérialisées. En fait, les ministériels ont voté contre ces mesures. Nous ne serions pas dans la situation difficile actuelle dont nous discutons maintenant, si on avait apporté ces modifications démocratiques. J'encourage le gouvernement à procéder à ces modifications, même si je sais qu'il n'en fera rien.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Monsieur le Président, je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole sur cette motion du Parti réformiste.

En partant, je voudrais citer un ouvrage pour mon collègue, ouvrage fort connu au Québec, et probablement au Canada anglais également, sauf par le Parti réformiste, c'est un dictionnaire. Dans ce dictionnaire, nous pouvons trouver une définition qu'il me fera plaisir de citer à mon collègue. Ça fonctionne comme un annuaire téléphonique, c'est très simple; sous «sédition», on trouve: «révolte concertée contre l'autorité publique».

La motion dont on nous a fait part est une motion qui concerne la sédition. Est-ce que vous pouvez me dire, chers collègues, par votre entremise monsieur le Président, à quel moment a-t-on assisté, je répète, à une révolte concertée contre l'autorité publique? Notre chef disait que si jamais quelqu'un voulait trahir sa nation, le meilleur choix ne serait pas sûrement pas d'envoyer sa décision par fax à l'ensemble des médias nationaux. Ce n'est pas le meilleur endroit pour garder un secret d'État.

Mais il y a un autre mot très important dans ce dictionnaire qui est le mot «démocratie». On nous demande de trouver une définition au mot «démocratie». Les réformistes nous disent que les méchants séparatistes ont été élus démocratiquement par une population. Mais que veut dire le mot démocratie? Est-ce qu'on se doit, ici en cette Chambre, de trouver une définition du mot démocratie? Je leur annonce qu'une définition existe et elle se lit comme suit: «doctrine politique d'après laquelle la souveraineté doit appartenir à l'ensemble des citoyens; organisation politique (souvent, la république) dans laquelle les citoyens exercent cette souveraineté; c'est le choix de leurs représentants par les citoyens».

Si la population du Québec a choisi d'élire 54 députés souverainistes à l'époque, députés qui avaient comme mission première de défendre la souveraineté du Québec, ce n'était pas un secret non plus. Peut-être, comme mes collègues l'ont dit hier à la période des questions et comme ils l'ont dit ouvertement, ce sont les 53 députés du Bloc qu'on devrait accuser de sédition. Ce sont les 53 députés du Bloc qu'on devrait accuser de trahison, parce que c'est qu'ils pensent vraiment.

La motion est un truc déposé à la Chambre des communes pour lui faire perdre son temps et pour expliquer une chose. Laquelle? Que les 53 députés du Bloc, selon les députés réformistes, ne sont pas des gens démocratiquement élus. Pour prouver cela, c'est simple, on va redéfinir les mots «sédition», «démocratie», et on va redéfinir les règles de l'opposition officielle, on va redéfinir les travaux de la Chambre; on va redéfinir tout cela. Ça, c'est démocratique, messieurs et mesdames du Parti réformiste? Je leur dis que c'est peut-être un léger accroc à la démocratie.

Comment toute cette histoire a-t-elle commencé? D'abord, on est arrivés et quelques personnes loufoques ont eu la brillante idée de nous poursuivre pour 500 milliards de dollars. Je vous avoue que, personnellement, quand j'ai vu le compte, j'ai regardé dans mon livret de banque et j'avais quelques problèmes, n'est-ce pas, alors je l'ai mis de côté. Heureusement, on a laissé tomber cette folie-là.

(1545)

Par la suite, le Parti réformiste a demandé au Gouverneur général de démettre le premier ministre de ses fonctions, faisant fi de la démocratie. Le chef du parti qui fait élire le plus de députés devient premier ministre, et c'est ainsi depuis 1867. Mais cela non plus, ce n'était pas correct; alors, le Parti réformiste a dit: «C'est simple, on change la définition, on change la démocratie et on fait cela.»

Ensuite, ils ont dit: «Ce n'est peut-être pas assez démoniaque, on va demander au Président qu'il nous désigne comme opposition


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officielle; le principe du nombre qui fonctionne depuis toujours ne doit pas être bon parce qu'on n'est pas l'opposition officielle. On change les Règlements.» Il n'y a rien de trop beau. Il n'y a rien de trop beau pour la classe ouvrière. Donc, faisant fi de la démocratie, on demande un changement aux Règlements. Une chance que vous avez respecté les règles, comme vous le faites toujours, monsieur le Président; c'est donc resté tel quel.

Par la suite, le Parti réformiste, un très grand parti démocratique, publie un document en 20 points, exprimant comment et pourquoi, en 20 points clairs, ils sont antidémocratiques. Tant qu'à faire, c'est aussi bien de le démontrer clairement.

D'abord, ils disent: «Nous sommes pour la partition»; geste antidémocratique. De plus, ils disent: «Les territoires autochtones situés au Québec, dans le Canada, vont pouvoir rester canadiens», faisant fi encore une fois de la démocratie. Et à la fin, que disent-ils? On n'a pas pensé, nous, à présenter une motion aussi ridicule, mais ils disent: «Si cela ne fonctionne pas, on va envoyer l'armée.» Ce n'est pas nous qui écrivons cela, c'est eux. Qui parle de révolte appréhendée? Qui parle de l'armée dans un document public? Vous auriez peut-être pu, vous aussi, le garder un peu plus secret, mais non, ils ont fait une conférence de presse. Ce sont les réformistes.

Là, on change. En plus, on dit: «Sédition, ça ne fait pas notre affaire.» Il y a bel et bien un dictionnaire qui explique ce qu'est la sédition en en donnant la définition, mais ce n'est pas correct. Le Parti réformiste propose donc un changement-ce serait peut-être une bonne motion à proposer la semaine prochaine-dans laquelle on va définir la sédition comme étant un crime d'opinion: vous êtes souverainistes, c'est une opinion que vous émettez; on vient de changer la définition qu'on retrouve dans les dictionnaires, et là, on va pouvoir accuser tout le monde. Ce sera bien plus simple. Que c'est beau.

Est-ce que le Parti réformiste veut succéder au cirque Barnum & Bailey? C'est une question qu'on peut se poser, parce qu'on dirait qu'ils s'entraînent pour ça. Quand vont-ils cesser de faire les clowns et respecter le décorum ici, à la Chambre des communes? Nous sommes à même de penser que peut-être, la semaine prochaine, ils présenteront en cette Chambre une motion demandant l'abolition de l'hiver pour l'année prochaine. À ce moment-là, on poursuivra dans le même ordre d'idées du sérieux dont ils font preuve.

De plus, un député réformiste a déposé, la semaine dernière, une motion. Je cite ici un article de Joël-Denis Bellavance paru dans le quotidien Le Soleil du 13 mars, qui dit ceci: «Vendredi dernier, un député réformiste a déposé une motion qui stipule ceci: [. . .] avant de consulter les Canadiens, les députés et les sénateurs à Ottawa devraient d'abord déterminer, à la suite d'un vote libre-un free vote, il n'y a rien de trop beau-si la question qui a été posée aux électeurs par la province sécessionniste-qui doit être la nôtre-était simple et directe. Un vote majoritaire des parlementaires forcerait ensuite le gouvernement fédéral à organiser un référendum national. . .» Donc, on oublie la démocratie, ce qui fait partie des règles du jeu chez eux, et on fait un référendum national. Il n'y a rien de trop beau. Je poursuis la citation de l'article: «[. . .pour définir le mandat de négocier les conditions de la séparation. Si une majorité de Canadiens accordaient un tel mandat au gouvernement fédéral-pour cela, on n'a pas besoin d'appeler Jojo Savard, ça va être fait-ce dernier n'entamerait des négociations qu'avec l'ensemble des circonscriptions électorales du Québec ayant endossé le projet souverainiste. Les autres circonscriptions continueraient à faire partie du Canada.» Quel beau respect de la démocratie.

De plus, on ajoute que pour être respecté, il faudrait inscrire que le Québec deviendrait un État indépendant. La province cesserait de faire partie du Canada. Si vous voulez nous déménager, envoyez-nous dans les pays chauds. Et ça continue: «Les Québécois n'auraient plus de représentants au Sénat et à la Chambre des communes. Ils perdraient leur citoyenneté canadienne et leur passeport canadien. Enfin, ils perdraient leur droit d'entrer et de circuler librement au Canada [. . .]»

Je vous annonce que les États-Unis sont un pays souverain et que vous avez droit d'y aller sans problème.

Nous voyons par cet exemple, multiplié jour après jour, comment un parti qui manque de sérieux peut faire perdre la confiance de la population face à ses représentants. Ils ont été élus démocratiquement et nous les respectons pour cela. Nous avons été élus démocratiquement et ils se doivent de nous respecter pour cela.

(1550)

Ils ont peut-être un programme politique, on ne le sait pas, mais ils ont été élus pour le défendre, et nous en avons un aussi. Pourquoi ne pas nous attaquer aux vrais problèmes au lieu d'arrêter les travaux de la Chambre, d'entraver volontairement les travaux de la Chambre pour des questions d'information? On a informé les militaires d'un geste. Ils nous ont informés qu'ils allaient envoyer l'armée advenant un oui, dans un document en 20 points. A-t-on le droit, nous aussi, d'informer nos gens? Je pense bien que oui, cela fait partie de la société, maintenant avec les moyens d'information, d'informer les gens.

Ils ont affirmé leur déception de ne pas avoir obtenu le statut d'opposition officielle. Les citoyens qui observent les débats perçoivent clairement le petit jeu des députés du Parti réformiste. C'est selon moi une perte de temps, comme je l'ai dit tout à l'heure, et par cette action les réformistes veulent empêcher le peuple du Québec de s'exprimer par l'entremise de ses représentants démocratiquement élus. «Démocratiquement» c'est écrit là-dedans aussi.

J'avise donc le chef du Parti réformiste que nous sommes conscients que leur tentative de museler le Bloc n'a pas d'autre but que de faire taire le Québec en entier, parce que nous sommes leurs représentants. Je vous assure que le Bloc québécois ne se taira pas et que le peuple du Québec ne se laissera pas intimider par la motion du député d'Okanagan, motion insidieuse soit dit en passant. Il parle là-dedans des «Québécois francophones»; je lui ai demandé de me montrer dans le communiqué de presse envoyé par le député de Charlesbourg à quel endroit on pouvait lire «Québécois francophones». Il m'a dit: «Nulle part.»


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Je lui ai donc dit un mot-on n'a pas le droit de le dire en Chambre parce qu'on n'a pas le droit de dire mentir-parce qu'il avait fait cela et il m'a répondu: «Oui, je le sais, ce n'est pas grave, on passe pareil.»

Donc, consciemment on pose des gestes qui vont à l'encontre de la démocratie. Les députés du Parti réformiste devraient être gênés par le manque de sérieux, le manque de professionnalisme dont ils font preuve face à l'ensemble des travaux de la Chambre.

Je le rappelle: demander au gouverneur général de démettre le premier ministre, je pense qu'on n'a jamais vu cela, du moins je l'espère; demander au Président de faire fi des règlements et de leur donner l'opposition officielle; et peut-être demander qu'on abolisse l'hiver l'année prochaine.

Ce que je perçois en plus, dans cette stratégie bien capricieuse, il me semble que de la part du Parti réformiste c'est un manque de préparation, un manque de fond évident sur l'ensemble des dossiers bien plus primordiaux à traiter pour les citoyens, probablement aussi pour les citoyens de leurs comtés.

Je vois dans l'attitude du Parti réformiste un acte volontaire pour retarder la 35e législature. Les précédents dans cette Chambre, sur Riel, Rose et McGreevy indiquent clairement que seule une poursuite devant les tribunaux peut justifier une mise en accusation aussi sérieuse. Mais voilà, dans le cas de mon collègue, le député de Charlesbourg, la cour a déjà statué que la demande de poursuites devant les tribunaux était inacceptable, et pas une fois, deux, une fois au Québec et une autre en Ontario.

Le député de Charlesbourg, dans son communiqué ne tentait que de rassurer de façon légitime les membres des Forces armées canadiennes, comme cela avait été fait avec les fonctionnaires fédéraux. Les membres des Forces armées avaient le droit, eux aussi, d'être informés des conséquences d'un oui au référendum. Le député de Charlesbourg a rempli un devoir, c'est-à-dire informé une partie de la population face à des inquiétudes légitimes de leur part. Voilà selon moi le but du communiqué du 26 octobre 1995.

Si le Parti réformiste veut utiliser cette motion pour augmenter sa crédibilité dans le reste du Canada, ou auprès de sa clientèle, il se trompe. Il ne fait qu'entacher sa propre réputation de parti de bouffons.

Le député de Charlesbourg, encore une fois, n'a fait qu'informer les membres des Forces armées canadiennes, et les Québécois et Québécoises dans les Forces armées canadiennes, de la position du gouvernement du Québec dans le cas d'une victoire du oui. Le gouvernement du Québec ayant fait connaître ses orientations en matière de défense, à cette époque, par son projet de loi sur l'avenir du Québec, était clair. Le député de Charlesbourg a cru bon, de façon pertinente et légitime, de soumettre ces orientations aux membres des Forces armées canadiennes.

Permettez-moi de citer l'article 17 du projet de loi sur l'avenir du Québec, qui a été écrit bien avant le 25 octobre. On aurait pu faire une motion pour accuser tout le monde au Québec de sédition et de haute trahison, parce qu'on disait clairement ceci-y a-t-il quelque chose de plus épouvantable-:

Le gouvernement prend les mesures nécessaires pour que le Québec continue de participer aux alliances de défense dont le Canada est membre. Cette participation doit cependant être compatible avec la volonté du Québec d'accorder la priorité au maintien de la paix dans le monde sous l'égide de l'Organisation des Nations Unies.
(1555)

Cela ne se fera pas nécessairement avec des pleurs. On va prendre des gens, on va prendre des hommes, des femmes qui sont déjà dans l'armée, on va les incorporer à la nouvelle armée québécoise puis on va leur faire faire cela. C'était écrit dans l'article 17. On va vous en envoyer de l'information, vous allez voir c'est quoi le projet de souverainiste.

Le communiqué du député de Charlesbourg ne dépassait pas le cadre interprétatif de cette affirmation.

Je trouve ce débat dangereux, et je voudrais demander aux réformistes de cesser de donner à cette Chambre cette image de cirque. Les réformistes pourraient être, quant à eux, soupçonnés de tentative volontaire pour diminuer la crédibilité de cette Chambre. Cela pourrait faire l'objet d'une motion.

Plusieurs militaires québécois sont souverainistes, ce n'est pas un péché mortel. Il y a plusieurs soldats québécois qui seraient heureux dans un Québec souverain d'être membres d'une armée québécoise. Il y en a à peu près 50 p. 100 qui ont voté oui, et 50 p. 100 qui ont voté non.

Je pourrais mentionner que si les réformistes veulent nous accuser de tous les maux, ils devraient observer de près la situation des militaires francophones, ainsi que de leur famille dans le reste du Canada. Je peux vous rappeler un cas et même vous citer un nom: Maryse Villeneuve, conjointe d'un militaire basé à Moose-Jaw, en Saskatchewan qui, devant tellement de frustrations, a déposé cinq plaintes au commissaire aux langues officielles concernant un non respect de la Loi sur les langues officielles.

Le commissaire aux langues officielles a retenu les cinq plaintes comme étant assez valables pour faire preuve d'une enquête. Il y a eu enquête sur les cinq plaintes et ensuite on a fait une autre enquête comparant les services offerts aux francophones à Moose-Jaw en Saskatchewan et ceux offerts aux anglophones sur la base de Bagotville.

Je pourrais en faire 52 copies pour vous en faire part, parce qu'il n'y a à peu près aucun service offert aux militaires francophones à Moose-Jaw, suite à l'enquête des cinq plaintes, contrairement à l'ensemble des services et au respect de la Loi sur les langues officielles qui est démontré au Québec sur la base de Bagotville.

Les Anglais qui pratiquent. . .


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Une voix: La Loi 101.

M. Sauvageau: Il n'est pas question de la Loi 101 là-dedans. Venez au Québec et vous allez voir que nous les respectons nos minorités. Et cela, je suis prêt à le garantir devant tout le monde dans cette Chambre.

La Loi 101, pour ceux qui ne sont jamais venus au Québec, pour ceux qui proposent des motions nous accusant de faire de la sédition, pour ceux et celles sur qui on enquête parce qu'il y a un non-respect des langues officielles, pour ceux et celles qui ne daignent même pas avoir un quotidien francophone dans leur province, c'est une honte, beaucoup plus que la Loi 101. C'est cela que l'on devrait aussi souligner à cette Chambre.

Le gouvernement québécois disait en plus, dans un atelier, un document qui a été rendu public et qui est daté du 7 avril 1995, et je cite: «Le 7 avril 1995»-vous auriez dû faire votre motion il y a un an, si vous aviez voulu faire quelque chose d'intelligent-«Sans nécessairement créer une armée de taille importante, le Québec pourrait néanmoins mettre en place une politique de défense cohérente qui correspondrait directement à ses besoins.» On le voit ici, cela ne date pas d'hier. On l'a écrit dans le projet de loi sur la souveraineté du Québec, on l'a écrit dans un document de travail qui a été publié au mois d'avril 1995, et en plus de ça, si on veut accuser des gens de sédition, je pourrais vous nommer un autre nom.

C'est un professeur d'études stratégiques à l'ancien Collège militaire de Saint-Jean, et c'est un rapport qu'il a déposé devant la Commission de Montréal sur l'avenir du Québec. On parle d'un professeur qui travaillait pour les Forces armées canadiennes et qui était payé par le gouvernement canadien. Quel séditieux, vous allez voir.

Le titre de cet article: «La voie d'avenir pour une politique de défense d'un Québec souverain.» Il travaille pour l'armée canadienne. Est-ce qu'on le pend au Pied-du-courant le 24 juin lui aussi?

«Advenant l'accession à la souveraineté, il serait nécessaire que le Québec envisage la conception et la mise en oeuvre d'une politique de défense.» À quoi celle-ci pourrait-elle bien ressembler? «Le mandat d'une force armée québécoise, que celle-ci soit autonome ou associée au reste du Canada, pourrait être orienté en fonction de deux axes complémentaires: la surveillance territoriale et l'ordre public d'une part, les opérations de maintien et d'imposition de la paix, d'autre part.»

(1600)

Un professeur d'études stratégiques du Collège militaire de Saint-Jean ose écrire un document faisant part de la peut-être possibilité d'un Québec souverain. Ouppelaï! Il était pas mal «stiff» ce gars-là, hein? Il n'y avait rien de trop beau. Mais il ne s'est pas fait accuser de trahison, de sédition, de lèse-majesté ou de je ne sais quoi.

Cependant, c'était une réalité au Québec. On ne s'est pas réveillés le 28 octobre, on s'est réveillés bien avant. La possibilité que le Québec devienne un pays souverain était réelle. Est-ce qu'on informe les gens face à cette réalité? Est-ce qu'on leur dit tout simplement, comme les collègues réformistes l'ont dit: «Si vous respectez la démocratie, on va vous envoyer l'armée»? Non. Nous sommes civilisés et nous disons: «Écoutez, si jamais ça se passait, voilà ce qui arriverait». Comme on a dit aux fonctionnaires fédéraux: «On va signer une entente pour vous incorporer à la nouvelle fonction publique québécoise».

On a également dit aux gens qui reçoivent des prestations pour personnes âgées: «On va continuer à vous rendre vos prestations de personnes âgées». On a également dit aux retraités de l'État fédéral: «On va continuer à vous rendre votre pension». Pas parce qu'on est plus riches, mais parce que cet argent est dans des fonds, des fonds qui existent et appartiennent à ceux et à celles qui ont déposé leur argent là-dedans. Ce n'est pas un péché mortel. Je vous avertis tout de suite, il va y avoir un autre référendum, alors préparez-vous psychologiquement.

En terminant, ce que je voudrais dire, parce que j'en avais beaucoup à dire là-dessus, c'est que si les réformistes veulent faire une demande d'emploi au Cirque du Soleil, il me fera plaisir de leur fournir, premièrement, le formulaire de demande d'emploi, et deuxièmement, d'aller le porter.

[Traduction]

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans ce débat pour exprimer les inquiétudes de mes électeurs à l'égard de la question soulevée par mon collègue, le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt.

Aujourd'hui, le débat consiste à déterminer si les observations du député de Charlesbourg et les actions du chef de l'opposition de l'époque devraient être considérées comme séditieuses et offensantes pour la Chambre, si elles constituent un outrage au Parlement et si la question devrait être renvoyée au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre pour qu'il détermine les mesures à prendre.

Les allégations sont très graves. Comme le Président lui-même l'a déclaré, la question est l'une des plus graves dont nous avons été saisis au cours de cette 35e législature. Nous ne pouvons procéder à la légère.

Hier, quand mon collègue a présenté sa motion, certains députés bloquistes riaient et chahutaient. Ils ont vu cette motion comme une distraction. Mes électeurs et moi-même sommes d'avis que les observations du député étaient séditieuses et offensantes, et, par conséquent, qu'elles constituaient un outrage au Parlement, ainsi qu'une violation du Code criminel.

On s'est maintes fois demandé à la Chambre si les tribunaux avaient rendu un jugement sur cette question. À mon avis, on s'est trompé en déclarant que les tribunaux avaient déclaré que cela ne constituait pas une violation du Code criminel. La justice ontarienne n'a pas encore rendu de décision à cet égard et, au Québec, un litige se poursuit, parce que la Couronne a refusé le verdict et interjeté appel.


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J'ai aussi été très troublé par les observations que les députés bloquistes ont faites hier et aujourd'hui. Ils ont tenté de traiter la question à la légère. Ils ont soutenu que le communiqué n'était qu'un document d'information envoyé aux soldats québécois dans les forces armées. Des soldats québécois, ça n'existe pas. Il y a des soldats canadiens; tous nos soldats sont canadiens.

(1605)

J'ai entendu dire que c'était exactement comme si on disait aux athlètes québécois que, une fois le Québec indépendant, ils seraient invités à représenter le Québec aux championnats d'athlétisme, ou aux artistes québécois que, une fois le Québec indépendant, ils seraient invités à représenter le Québec plutôt que le Canada. Ce raisonnement n'est tout simplement pas acceptable.

La situation est complètement différente. Chacun des membres des Forces canadiennes a dû prêter le serment solennel de défendre le Canada et de lui rester loyal. Voilà la différence. Je n'ai jamais entendu dire que des athlètes où que ce soit aient eu à prêter le serment solennel de représenter leur province ou leur pays à des championnats d'athlétisme.

Je crois que la plupart des Canadiens trouvent très choquant de voir les députés séparatistes du Bloc Québécois constituer la loyale opposition de Sa Majesté à la Chambre. Cela ne veut pas dire que les députés de ce parti n'ont pas le droit démocratique de siéger ici. Les Québécois ont le droit de choisir qui ils veulent pour les représenter ici à la Chambre.

Il ne s'ensuit cependant pas que les bloquistes ont le droit de siéger ici en qualité de loyale opposition de Sa Majesté ni qu'ils devraient le faire. Je trouve cela parfaitement ridicule et je suis très déçu que le gouvernement invoque des points de droit, des précédents et des articles du Règlement pour laisser cela continuer. Les Canadiens de partout trouvent cela révoltant et le Canada est l'objet de risée dans une bonne partie du monde parce qu'il laisse perdurer une situation aussi ridicule.

Le député de Charlesbourg pensait-il vraiment que les militaires canadiens, les hommes et les femmes qui ont prêté serment d'allégeance et promis de défendre le Canada, allaient prendre les armes contre le Canada pour renforcer une victoire du oui après le référendum? Pensait-il vraiment que les gestes qu'il posait n'allaient pas contrarier les Canadiens de toutes les régions du pays, tant les anglophones que les francophones, au Québec et ailleurs au pays? J'ai du mal à croire que le député soit assez naïf pour penser cela.

Les gestes qu'ont posés le député de Charlesbourg et l'ex-chef de la loyale opposition de Sa Majesté montrent à quel point il est ridicule de prétendre que le Bloc québécois représente l'opposition officielle et les intérêts de tous les Canadiens, et non seulement les intérêts des séparatistes du Québec. Il faut vraiment être idiot pour croire que le Bloc représente des intérêts autres que les intérêts des séparatistes du Québec.

Comme le signalait Lewis MacKenzie, général à la retraite, il n'y a qu'au Canada qu'un tel geste est toléré. J'ai l'impression, et tout le monde en conviendra probablement, que dans certains pays, les personnes reconnues coupables de tels gestes sont exécutées et tout au moins jetées en prison. Au Canada, on préfère fermer les yeux en espérant que la crise passe. C'est le voeu le plus cher du gouvernement.

Depuis quatre mois, les Canadiens espèrent que le gouvernement prendra des mesures pour sévir. Nous avons beaucoup attendu. Pendant ce temps, les gens ont réclamé de plus en plus fort que des mesures soient prises. Comme le gouvernement a refusé d'agir, nous avons été obligés de faire le nécessaire en tant que troisième parti à la Chambre des communes.

L'attitude des dirigeants du gouvernement, et en particulier du chef de l'armée canadienne, est tout simplement scandaleuse. Ma foi, je ne peux pas comprendre pourquoi les forces policières, les forces militaires, les tribunaux et les ministres se sont dégonflés et n'ont pas réagi devant ce qui apparaît clairement comme un acte de sédition ou tout au moins une incitation à la mutinerie, deux infractions qui entraînent une peine possible de 14 ans d'emprisonnement.

On peut citer tous les dictionnaires que l'on veut; cela n'a rien à voir avec la question. Dans le Code criminel, la sédition et l'incitation à la mutinerie sont très clairement définies. Il est bien évident que l'action du député constitue une infraction au Code criminel. Je crois comprendre que le ministre de la Défense a, à l'époque, consulté le ministère de la Justice à ce sujet et s'est fait dire par un avocat qu'il n'y avait pas matière à poursuite. Par conséquent, aucune mesure n'a été prise.

(1610)

Cet incident laisse planer un sérieux doute sur la loyauté des membres des Forces armées canadiennes qui sont chargées de défendre la souveraineté du Canada. À ce propos, je voudrais citer un article de Diane Francis qui est paru dans l'édition du 25 novembre du Financial Post et qui dit ceci: «Selon la rumeur, les séparatistes auraient obtenu des serments d'allégeance d'officiers sympathiques à leur cause et impatients de former une armée rivale.»

Le député bloquiste qui a pris la parole avant moi a dit que nous étions fous de penser qu'il n'y avait pas de séparatistes ou de membres des Forces canadiennes déloyaux prêts à prendre les armes contre le Canada. Il est condamnable de jeter une ombre sur les Forces canadiennes que je respecte tant et qui ont une excellente réputation partout dans le monde en raison du travail qu'elles ont effectué au nom de tous les Canadiens.

Selon certains reportages, il y avait un problème avec les officiers subalternes. Encore une fois, Diane Francis a écrit, dans un article paru dans l'édition du 2 mars du Financial Post, que la moitié des cadets du Collège militaire de Kingston avaient fait leurs bagages et étaient prêts à retourner au Québec pour se joindre à la nouvelle armée de cette province si le oui l'emportait.


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Qu'est-ce que le ministre a répondu à cela? Le ministre a déclaré dans une entrevue avec Diane Francis qu'il ne pouvait intervenir directement parce que cela causerait des problèmes au sein de l'armée, déjà démoralisée par le scandale de la Somalie. C'est ridicule. C'est sa responsabilité d'intervenir et de résoudre rapidement et définitivement ce qui peut être un problème de loyauté dans les Forces canadiennes.

C'est assez incroyable qu'une telle chose se soit produite. Si c'était arrivé aux États-Unis, je ne doute pas que les militaires américains et le ministre de la Défense des États-Unis ne seraient pas restés inactifs. C'est une question sérieuse. Nous nous trouvons dans l'obligation, envers les Canadiens, de considérer cette déclaration d'un député comme séditieuse et de la faire examiner par le Comité des affaires de la Chambre afin de déterminer quelles mesures devraient être prises.

Nous devons également extirper les séparatistes des Forces canadiennes parce que la loyauté est essentielle au sein de l'armée d'un pays. Si l'armée n'est pas loyale envers le Canada, nous sommes dans de beaux draps.

C'est triste que le gouvernement n'ait pas fait preuve de leader-ship en cette matière. Il a fallu qu'un simple citoyen de Montréal, Brent Tyler, ait le courage de porter cette question devant les tribunaux, malheureusement sans succès jusqu'à maintenant. Mais ce n'est pas fini. Nous souhaitons tous sincèrement que les tribunaux se penchent sérieusement sur la question et qu'ils la tranchent d'une manière juste et raisonnable.

Diane Francis, la journaliste que j'ai citée plus tôt, a saisi la GRC de la question parce que cela lui tenait beaucoup à coeur. Elle a demandé à la GRC de faire quelque chose. La GRC lui a répondu que l'affaire avait été renvoyée à sa section juridique, qui en discuterait avec le ministère de la Justice. De plus, elle a dit que l'enquête serait longue. Nous avons attendu et attendu. Il semble que la question ait été abandonnée. Nous savons tous pourquoi. C'est parce que l'apaisement des séparatistes semble être la réplique des libéraux au séparatisme.

L'apaisement n'a jamais donné de résultats où que ce soit dans le monde, et il n'en donnera pas plus avec les séparatistes au Canada. Nous tentons d'apaiser les séparatistes depuis trente ans et, le 30 octobre, nous sommes venus à un cheveu de perdre notre pays. Cette stratégie ne fonctionne pas. Elle ne donnera aucun résultat, et je ne l'appuierai pas.

J'ai reçu quantité de lettres et d'appels de la part de mes électeurs à ce sujet et j'ai eu nombre d'entretiens avec eux à cet égard. Il importe de transmettre le point de vue des Canadiens ordinaires à la Chambre. Les Canadiens devraient pouvoir lire dans le hansard comment la Chambre a réglé cette grave question.

(1615)

Il n'y a pas que mes électeurs qui sont de cet avis. Hier le réseau de nouvelles national Broadcast News a fait un sondage auprès de la population. La question était la suivante: un député du Bloc québécois devrait-il être réprimandé par le Parlement parce qu'il a invité les militaires à passer dans les rangs d'une armée québécoise indépendante après le référendum? Au total, 1 112 personnes ont répondu oui. Seulement 66 répondants ont dit non. Quatre-vingt-quatorze pour cent des répondants étaient d'avis que ce député devrait être réprimandé et tenu responsable du geste qu'il a posé. Ce n'était certainement pas simplement une offre d'emploi aux membres des Forces canadiennes.

Des électeurs de ma circonscription, Mme Maureen Bizon etM. Robert Johnson, ont communiqué avec mon bureau au cours des derniers jours pour dire à quel point ils étaient outrés par cette affaire. Ils disaient que, comme le gouvernement nous voulait pas soulever cette question, nous devrions faire quelque chose. Mme Bizon disait que je devrais pousser le ministre de la Justice à porter des accusations contre les députés qui ont fait cette déclaration dans leur communiqué. Elle ajoutait que ces députés devraient au moins être accusés de sédition ou d'incitation à la mutinerie. À tout le moins, elle voulait une enquête sérieuse et approfondie sur toutes ces allégations. C'est la réaction typique des nombreux électeurs qui m'ont téléphoné ou interpellé dans la rue pour me parler de cette affaire.

La liste n'a pas de fin. Les Canadiens de partout considèrent que c'est une affaire très grave. Cependant, je voulais citer cette personne en particulier parce que je trouvais que son opinion était assez représentative de l'opinion de l'ensemble des Canadiens.

Les remarques faites par le député de Charlesbourg et par l'ancien chef de l'opposition sont considérées comme séditieuses et offensantes par les Canadiens ordinaires. L'inaction de la police, des autorités militaires et du gouvernement est considérée comme déplorable par ces mêmes Canadiens.

La question est maintenant de déterminer ce que nous allons faire à ce sujet. Les Canadiens ont commencé par demander au gouvernement de faire quelque chose. Ils ont ensuite demandé aux tribunaux de faire quelque chose. Leurs efforts ayant été vains, ils demandent maintenant à notre parti de faire quelque chose. Allons-nous simplement balayer cette affaire sous le tapis ou la camoufler comme le gouvernement essaie encore de faire? Ces méchants réformistes enflamment le mouvement séparatiste.

Devons-nous tirer le rideau sur cette affaire comme nous l'avons déjà fait sur bien d'autres, comme nous l'avons fait pour d'autres groupes raciaux du Canada qui enfreignent ouvertement le Code criminel du Canada? Il ne faut pas que nous les tenions responsables de leurs gestes sinon nous enflammerions les séparatistes ou d'autres groupes raciaux, et cela, simplement au nom de la rectitude politique.

Avons-nous déjà eu à nous interroger sur les militaires en Alberta? Devons-nous craindre qu'ils soient recrutés pour faire partie d'une armée albertaine? Je ne crois pas qu'il y ait beaucoup de chances que cela se produise.

La chose qui me préoccupe le plus c'est que la majorité des Canadiens qui vivent dans les circonscriptions de nos vis-à-vis pensent probablement comme nous. Cependant, au cours du débat,


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nous avons entendu maintes et maintes fois parler du haut niveau de démocratie de la Chambre des communes et de la grande liberté dont jouissent les députés pour exprimer les préoccupations de leurs électeurs.

Il semble que nos vis-à-vis n'aient pas le courage de parler au nom de leurs électeurs sur cette question. Ils préfèrent se réfugier derrière la procédure et les précédents de la Chambre. Ils nous laissent parler de cette question dont ils ne peuvent pas parler tout simplement parce que leur parti ne veut pas. Il est vraiment malheureux qu'ils ne puissent pas parler au nom des électeurs de leurs circonscriptions et que le gouvernement adopte une attitude si détachée et un tel laisser-faire devant les séparatistes qui incitent les Forces canadiennes à la mutinerie.

(1620)

Je me souviens très bien, l'an dernier, lorsque l'affaire est sortie dans tous les journaux du Canada, les députés d'en face s'agitaient en tous sens et s'élevaient contre le communiqué, ils criaient que c'était terrible, qu'il fallait faire quelque chose, qu'il fallait arrêter les séparatistes de défier ainsi ouvertement les forces armées.

Que s'est-il passé? Rien n'a été fait. Pourquoi le Cabinet n'a-t-il pris aucune mesure? Pourquoi n'a-t-il pas réagi? Pourquoi, dans ce cas comme dans tant d'autres dont nous avons été témoins, le gouvernement appuie simplement les séparatistes dans ce qu'ils font dans les comités et dans cette enceinte?

Jusqu'à ce que nous soulevions cette question, le gouvernement avait l'intention bien arrêtée d'utiliser sa majorité au Comité de la justice pour faire élire ce député que nous accusons ici au poste de vice-président du Comité permanent de la défense nationale. Si cela n'équivaut pas à aider les séparatistes à séparer le Québec du Canada, je me demande bien ce que c'est. La même méthode a été employée récemment dans tous les comités permanents de la Chambre.

Je crois que la seule solution satisfaisante dans le cas présent est de déposer les accusations que nous avons formulées et de les renvoyer, avec la motion que nous avons déposée, au comité permanent pour qu'il les examine et recommande les mesures à prendre.

Contrairement au whip du gouvernement, je considère que la question est beaucoup plus grave qu'un simple acte impulsif d'un député qu'il ne suffit d'en saisir le comité, de réprimander légèrement l'auteur, de lui dire que ce qu'il a fait est mal puis d'oublier toute l'affaire en ne prenant aucune autre mesure.

Nous devons réagir de façon très sérieuse. Nous devons envisager l'expulsion du député de la Chambre des communes. Nous devons envisager d'obtenir qu'il soit inculpé en vertu du Code criminel du Canada pour son acte.

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, avant d'en arriver à l'essentiel de mon discours, vous me permettrez de réagir à plusieurs affirmations faites par le député réformiste. Pour l'avoir écouté dire tout ce qu'il a dit pendant 20 minutes, je considère qu'il mériterait presque un prix, parce qu'il y avait beaucoup de choses là-dedans qui étaient tout d'abord inexactes et, deuxièmement, un peu difficiles à entendre et qui démontraient un manque de sensibilité et également un manque de vision. Tout cela provient de gens qui se disent vouloir être un parti national et qui disent vouloir régler un jour la crise constitutionnelle dans laquelle nous sommes.

Une des choses qui m'a fait réagir le plus, c'est quand il a parlé de la loyauté. Il a parlé des soldats québécois actuellement au sein des forces armées. Il a dit qu'il n'existait pas de soldats québécois, mais il y a des gens qui sont québécois et qui font partie des Forces armées canadiennes. Ces gens sont des Québécois, selon moi, avant d'être des militaires. Il a dit que ces gens devaient toute leur loyauté aux Forces armées canadiennes.

Ça voudrait dire que cela passe même avant la démocratie, parce que ce qu'on dit, ce qu'on propose et ce que tout le monde sait, c'est que si un jour le Québec accède à la souveraineté-et je suis convaincu que cela va arriver-à ce moment-là, ça aura été fait à la suite d'un processus très démocratique, très ouvert, et ça sera basé sur un appui majoritaire de la population.

C'est après un oui démocratique des Québécois que l'on invite les gens à respecter le choix de l'ensemble de la population et qu'on veut mettre en place le système que tout pays normal se donne, y compris une force militaire qui participera aux missions de paix à travers le monde.

(1625)

Il ne faut pas se conter de peurs là, l'armée canadienne ne défend pas nécessairement l'intégrité du territoire canadien. Elle participe aux missions de paix. S'il y avait un problème et que l'intégrité du territoire canadien était contestée, je doute fortement que notre armée serait suffisamment efficace pour répondre aux besoins, et ça, on le sait tous. Donc, notre armée participe surtout pour intervenir comme acteur au niveau du rétablissement, ou de l'établissement selon le cas, de la paix dans le monde.

Pour revenir au député réformiste et à ce qu'il disait, c'est que ces gens-là étaient des soldats qui devaient être loyaux aux Forces armées canadiennes avant d'être des démocrates. C'est assez surprenant pour des gens qui viennent se faire élire dans un Parlement où le Canada vit depuis toujours, depuis la Confédération, sous un régime démocratique, qui est une des valeurs les plus profondes de ce pays, et qui est, jusqu'à un certain point, la fierté de tout le monde.

Par ses propos, il remet en cause les principes mêmes de la démocratie. C'est très inquiétant pour quelqu'un qui siège au Parlement du Canada, de remettre en cause, de façon indirecte, tous les fondements de notre démocratie.

Évidemment, il a cité abondamment son gourou intellectuel, une personne qui l'alimente en termes de contenu, de pensée politique, Mme Diane Francis. Je crois que c'est elle qui a réveillé les réformistes sur ce sujet. Il faut se rappeler, au cas où les députés


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réformistes ne s'en souviendraient pas, qu'on est rendus au milieu du mois de mars. Le communiqué en question a été fait au mois d'octobre, quelques jours avant le référendum. Subitement, ils se sont réveillés, cette semaine ou vers la fin de la semaine dernière, à la suite de quelques articles de Mme Francis qui trouvait cette situation scandaleuse. Ils sont partis en peur là-dessus.

Cela m'amène à vous dire que je trouve très déplorable que cela se passe à l'heure où on vit des problèmes majeurs en ce qui a trait à l'emploi, alors que tous se demandent encore si c'est de cette façon qu'on doit gérer nos finances publiques, quels choix on doit faire, comment les faire, comment s'assurer que tout le monde puisse s'en sortir le mieux possible, particulièrement les plus démunis, pour pouvoir traverser la crise financière actuelle. Les gens se posent beaucoup de questions, ont beaucoup de préoccupations.

Mes électeurs, peut-être pas ceux de certains collègues réformistes ou de quelques collègues libéraux, se préoccupent davantage de cela. Je me demande comment je pourrai leur expliquer en fin de semaine que le Parlement a perdu toute la semaine à discuter d'une motion, tout d'abord des réformistes, ensuite du gouvernement, à discuter d'un cas de sédition d'un député du Bloc québécois, alors que de nombreux problèmes ravagent nos comtés et qu'on doit s'attaquer à cela.

On y a déjà consacré deux journées de travaux parlementaires, c'est la deuxième journée, en plus de l'énergie que cela a nécessitée dans tous les partis, c'est assez scandaleux. Et là-dessus, le gouvernement a des reproches à se faire parce qu'on aurait très bien arrêter, rejeter la motion du Parti réformiste et ça se serait arrêté là. Mais non, le gouvernement étant un peu pris, à court d'imagination, peut-être à court de projets législatifs, je ne sais trop, a décidé de présenter un amendement pour que cette situation soit renvoyée à un comité, mais j'y reviendrai plus tard.

Je veux vous dire que je trouve cela tout à fait ridicule que nous perdions autant de temps sur quelque chose d'aussi insignifiant, parce que c'est insignifiant comme tel, ce geste-là, les proportions que cela a pris, ça n'a aucun sens. On va revenir à l'essentiel de la question dans quelques instants.

Je voudrais rappeler aux gens que c'est peut-être aussi une tentative du Parti réformiste pour maquiller tout le désordre au sein de leur caucus à l'heure actuelle. On sait que quelques-uns de leurs collègues contestent le fait que ces gens-là prennent des positions beaucoup trop radicales. On ne les voit pas beaucoup depuis quelques jours.

Au moment où l'attention pourrait se porter sur les positions politiques de ce parti, on fait de la diversion en attirant l'attention sur autre chose. C'est classique, ce n'est pas une méthode nouvelle, ils n'ont rien inventé. Je crois que c'est une de leurs motivations, mais l'autre, qui est probablement beaucoup plus grande, c'est que depuis octobre 1993, ces gens-là n'ont jamais accepté, et on revient à la démocratie, que nous formions l'opposition officielle, que nous ayons été choisis en plus grand nombre qu'eux pour siéger dans ce Parlement. Respectant les règles et la tradition de notre système parlementaire, nous nous voyons accordé le privilège d'être l'opposition officielle, parce que les électeurs avaient fait ce choix-là.

(1630)

Et là, à chacune des occasions qui se présentent à eux, par des moyens détournés, par des moyens directs et indirects, ils essaient chaque fois de contester cela. C'est ça, l'objectif, parce que, évidemment, nous sommes nez à nez présentement en nombre de députés, ce qui changera dans quelques jours, mais il est sûr que s'ils pouvaient expulser un de nos députés, ce serait l'idéal. C'est peut-être la seule façon pour eux d'accéder à l'opposition officielle, parce que je suis convaincu que le résultat des élections partielles démontrera encore une fois que les réformistes font partie d'un courant qui ne répond pas du tout, certainement pas au Québec et je ne crois pas non plus qu'ils représentent une majorité de Canadiens où il y a des gens beaucoup plus modérés que cela.

Cependant, leurs voix trouve des échos par des personnes qui sont dans des médias, qui abusent de leur pouvoir dans ces cas, comme Mme Francis, pour donner un peu de tribune à ce genre de geste qui ne contribue en rien à améliorer la situation politique actuelle.

Revenons aux faits comme tels. Que s'est-il passé? À quelques jours du référendum, pour revenir dans le contexte, une campagne intense, un débat démocratique vigoureux, une campagne très serrée et nous sommes à quelques jours du résultat. Je me souviens que dans la campagne et même lors de la précampagne les gens nous demandaient; «Qu'allez-vous faire après un oui? Dites-le-nous?» Il y avait également eu des commissions où on avait consulté la population au Québec. Nous y avons participé et les députés d'en face auraient également dû y participer, ce qui leur aurait probablement fait du bien.

On a entendu les gens demander; «Quels seraient les lendemains d'un oui?» Alors tout au long de la campagne, nous avons dû rencontrer des groupes pour leur expliquer quel était notre vision du Québec après un oui.

Alors quelques jours avant le référendum, mon collègue, le député de Charlesbourg, envoie un communiqué dont je vous lis le titre; «Un Québec souverain aura besoin de tous les militaires québécois actuellement au sein des Forces armées canadiennes, estime M. Jacob, député de Charlesbourg.» Dans un premier paragraphe, il parle de la taille de l'armée, est-ce que le Québec aura besoin de maintenir une telle taille; il parle des missions internationales par la suite, du coût, du fonctionnement, du nombre de militaires requis, il revient de nouveau sur les missions internationales et fait un appel aux soldats québécois pour les inviter à respecter la décision démocratique des Québécois et les inviter à joindre, si tel était le résultat, une éventuelle armée québécoise. Il parlait également qu'il y aura un maintien de leurs conditions de travail et de ces choses-là.

Cela me paraît être un geste responsable que de faire connaître à des gens qui étaient également des électeurs-parce que cela a été envoyé au Québec-qui avaient droit de vote dans ce processus démocratique de choisir l'avenir du peuple québécois, quel serait leur sort au lendemain d'un oui. C'est essentiellement ce qu'a fait mon collègue.


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Mais après quelques mois, on s'en prend au fondement de ce geste en disant qu'il y a de la sédition, que c'est une incitation au soulèvement. Je vais vous donner la définition exacte du dictionnaire, en français, de la sédition. On parle d'une révolte concertée contre l'autorité publique. Une révolte concertée.

J'ai relu le communiqué deux fois cet après-midi pour essayer de voir en quoi cela pouvait soulever une révolte concertée contre l'autorité publique, alors qu'on demande aux gens de respecter la décision démocratique en les informant de ce qui les attend après, après un oui, dans le cas où le scénario choisi démocratiquement aurait été un oui.

Il n'y a absolument rien qui est un soulèvement potentiel. Si vous, monsieur le Président, souhaitiez organiser une révolte, est-ce que votre première démarche serait d'aviser tous les médias que vous êtes en train de créer un soulèvement en le faisant savoir publiquement aux gens? Cela n'a pas de sens. Il me semble qu'il y a une façon élémentaire de le faire.

Peut-être que la façon dont on fait de la stratégie politique réformiste serait leur façon de procéder. Mais, en général, ce ne serait certainement pas la façon avec laquelle les gens s'y prendraient.

Que les députés réformistes aient de la difficulté à faire de l'analyse politique, à avoir un haut sens des responsabilités, à bien comprendre la démocratie, on finit par s'y habituer quand on est ici depuis deux ans et demi.

(1635)

Là où cela se complique, c'est que le gouvernement, dans un élan de panique cette semaine, cède un peu à cette argumentation, et au lieu de terminer cette histoire une fois pour toutes, décide d'embarquer et de cautionner cette démarche. Il faut se rappeler la motion initiale des réformistes, qui accusait mon collègue de sédition, etc., et qui voulait régler son compte, finalement, a été remplacée par un amendement présenté par le gouvernement pour faire en sorte qu'un comité de la Chambre étudie cette situation.

Mais il n'y a rien à étudier. Absolument rien. C'est quoi l'intérêt de faire ça? Qu'est-ce qu'on veut faire? Quel objectif poursuit-on? On se trouve, de cette façon-là, à cautionner la démarche du Parti réformiste, et c'est très surprenant.

Je me rappelle la première et la deuxième sessions parlementaires auxquelles on a assisté, mais particulièrement la première, où le premier ministre et les ministres, à tour de rôle, se levaient pour vanter la démocratie canadienne, qu'on était le plus bel exemple de démocratie, puisque le Parlement acceptait d'avoir des souverainistes au sein de son Parlement, et que c'était un bel exemple de la fierté canadienne et des valeurs démocratiques.

Aujourd'hui, par leur geste, finalement, ils nous acceptent ici, mais ce n'est pas certain qu'ils nous tolèrent si on ne fait pas la promotion d'idées ou de projets politiques qui ne correspondent pas à leurs intérêts.

Avec la démocratie, il y a la liberté d'expression et la liberté d'opinion, et c'est clair, ça a toujours été clair que nous défendons un projet politique qui vise à faire en sorte que le Québec devienne un pays souverain, un partenaire. On veut être partenaire, parce qu'il y a beaucoup de secteurs dans lesquels on a des intérêts mutuels, et c'est certainement là où on va en arriver, parce que le bon sens va finir par triompher. Et d'un autre côté, on n'a même pas le choix. Mais tout cela a perdu son sens pour les libéraux depuis quelques jours avec ce virement majeur. Quand on parle de virage, c'en est tout un. Eux qui nous disaient être des profonds démocrates, ils remettent en cause, parce qu'ils veulent laisser l'enquête se faire, la présence d'un député souverainiste dans cette enceinte.

Moi, comme député de la même formation, comme collègue du député de Charlesbourg, je me sens aussi visé et attaqué par cette procédure, parce que qu'est-ce qui nous dit qu'un jour, on n'émettra pas une opinion, nous, dans notre comté, et qu'on ne voudra pas nous juger là-dessus parce que ce serait potentiellement séditieux.

Finalement, ce que l'on nous reproche, c'est d'être des souverainistes et séditieux. C'est un peu cela. C'est un peu cela, parce que le député de Charlesbourg n'avait quand même pas organisé, dans son comté, un soulèvement populaire, recruté des gens qui étaient armés jusqu'aux dents et qui s'apprêtaient à venir faire un coup d'État à Ottawa. Il émettait une analyse sur ce qui arriverait le lendemain d'un oui. Donc, il s'exprimait de façon démocratique avec les moyens qui nous sont attribués comme parlementaires pour le faire. Ça, c'est inquiétant.

J'ai aussi lu la définition, dans le dictionnaire anglais, du mot «sédition», et j'ai compris ce qui avait peut-être amené nos collègues réformistes à en faire une exagération. En anglais, c'est:

[Traduction]

«Conduite ou discours qui incite à la rébellion ou à troubler l'ordre public.»

[Français]

Évidemment, il y a les mots au début «conduct or speech», «conduite ou discours»-mais il faut lire toute la phrase, et c'est là le problème-«qui incite à la rébellion.» Il aurait fallu un effort supplémentaire de nos collègues réformistes pour aller chercher le mot «rébellion» qui peut être synonyme de révolte ou autre chose. À ma connaissance, ce n'est pas du tout ce qu'a fait mon collègue de Charlesbourg. Là, il y a un problème. Soit qu'il y a un problème parce qu'on a de la difficulté à avoir de la rigueur et de l'ardeur au travail chez les réformistes, soit qu'on a de la difficulté à comprendre les mots. Je dirais que c'est un mélange des deux.

Je vais y revenir encore une fois. Ce n'est pas si étonnant que cela, on sait toute la difficulté qu'ils ont à comprendre la réalité actuelle. Mais que les collègues libéraux, dont le député de Kingston et les Îles qui est ici présentement et qui écoute assidûment, que des députés comme lui cautionnent cette démarche-là, c'est surprenant. J'inclus aussi tous ses collègues parce qu'on s'attendrait d'eux à plus de sérieux, à beaucoup plus de sérieux.


730

(1640)

Je voudrais aussi rappeler que nous avons été élus avec tout près de 50 p. 100 des votes au Québec. Le député réformiste qui a parlé avant moi a fait une très grosse affirmation. Il a d'abord fait référence à un vox pop de CTV-un vox pop veut dire qu'on demande aux gens ce qu'ils pensent d'une question-et il a dit qu'il était convaincu que, dans tous les comtés du Canada, les citoyens n'acceptaient pas un tel geste et que c'était scandaleux. Ce n'est pas le bon qualificatif, je ne me rappelle plus exactement celui qu'il a employé, mais ça ressemblait à ça. Il a ajouté que, dans tous les comtés, les citoyens canadiens n'acceptaient pas cela.

Je dois constater que, dans son discours, il a déjà exclu le Québec du Canada. Je l'invite à venir dans mon comté, en fin de semaine ou la fin de semaine prochaine, et on pourra regarder avec des électeurs de mon comté s'ils partagent majoritairement son opinion. Ça me fera plaisir de le faire.

Je l'invite à venir débattre de cette question dans mon comté, Témiscamingue. Je vais lui envoyer une carte, les coordonnées, on pourra avoir de bonnes discussions et on verra ce que la majorité des citoyens de mon comté en pensent.

Il a mentionné cela deux fois dans ce discours, parce que je crois l'entendre bourdonner et me dire que j'ai mal interprété son discours. Il a dit cela deux fois et il a employé l'expression «all Canadians». C'est fort, ça, que tous les Canadiens l'appuieraient dans ses propos. Jusqu'à preuve du contraire, j'en suis encore un et je ne l'appuie pas. En ce sens, mon collègue ici présent non plus, ainsi que mes autres collègues, j'en suis convaincu. Même nos électeurs et beaucoup de fédéralistes au Québec n'acceptent pas cette interprétation.

Pour conclure, parce qu'il me reste une minute ou deux, j'aimerais seulement dire que je suis très déçu du Parti libéral et du gouvernement. Il fait en sorte qu'on a évité d'importants débats cette semaine, qui est la semaine suivant le budget fédéral, un budget dans lequel ce gouvernement a annoncé ses intentions, a concrétisé ses coupures aux provinces dans les transferts sociaux, a concrétisé ses coupures à l'assurance-chômage, deux choses qui préoccupent beaucoup les gens au Québec et au Canada.

On aurait eu l'occasion d'en débattre plus à fond, de façon à améliorer les réformes que ces gens veulent faire, même si, dans certains cas, on souhaiterait qu'ils les retirent, à tout le moins qu'ils se montrent sensibles à nos arguments pour faire en sorte que, dans leur volonté d'aller de l'avant, ils s'ajustent au moins à une réalité, qui est celle que des citoyens écoperont durement de la réforme.

Mais non, le Parlement trouve le moyen de gaspiller deux jours de ressources, de débats, environ une semaine d'énergie, sur quelque chose qui n'aurait même pas dû mériter d'être débattu plus longtemps que quelques minutes. Je vais avoir de la difficulté à expliquer cela à mes électeurs, qui sont très cyniques par rapport au fonctionnement de la politique, qui nous disent souvent, et je suis sûr que le député de Kingston et les Îles sera d'accord, que nos institutions sont un petit peu désuètes.

Et on en a une belle illustration cette semaine. Oui, je m'exprime là-dessus et je prends 20 minutes de ce débat, parce qu'il aurait quand même lieu pour débattre toute la journée là-dessus. Donc, c'est pour cela que je m'exprime, mais ça me déçoit et ça peut nous rendre encore plus convaincus que la seule façon qu'on pourra modifier profondément les institutions, c'est le jour où les Québécois décideront de se prendre en main et de s'adapter à des institutions beaucoup plus modernes. Ça forcera aussi les Canadiens à ajuster leurs institutions à ce qu'ils voudront avoir.

D'ici là, je souhaite que tout le monde retrouve un peu de calme dans le débat actuel. Le débat est relativement calme au Québec, mais à l'extérieur du Québec, il y a des gens, et je conclus là-dessus, qui tentent d'inciter d'autres gens à réagir très fortement, à être très négatif. Ces gens cherchent à se faire du capital politique sur le dos du Québec, et c'est malsain. Je dis à tous ces gens: «Soyez très vigilants dans ce que vous faites, ça a beaucoup de conséquences». Quand je dis cela, je m'adresse surtout au gouvernement, parce que je ne m'attends pas à beaucoup plus du Parti réformiste.

[Traduction]

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, le débat que nous avons aujourd'hui est intéressant. Je me souviens avoir été confronté, quand j'étais dans les ordres à ce qu'on appellait la morale de situation. C'était un moyen par lequel, en tournant les mots et en considérant les choses un peu différemment, on pouvait justifier rationnellement des actes comme un meurtre avec préméditation.

(1645)

Le débat que nous avons aujourd'hui m'inquiète à cause l'utilisation très désinvolte que l'on fait des mots et de l'utilisation très vague que l'on fait des définitions. Nous sommes en train de parler de la façon dont nous pouvons préserver notre démocratie. La base de notre démocratie, c'est la primauté du droit.

Je ne suis pas particulièrement intéressé par une conception de la loi, comme celle de l'inspecteur Javert dans Les Misérables, de Victor Hugo. Toutefois, à moins que nous ne prenions au sérieux la loi, les droits et privilèges que nous avons, la façon de nous conduire, nous allons user le tissu de la démocratie. Si nous, à la Chambre, qui sommes chargés d'adopter des lois, ne prenons pas ces choses au sérieux, comment pouvons-nous nous attendre à ce que les jeunes de la rue qui se décarcassent pour essayer de s'en sortir le fassent?

L'affaire dont nous sommes saisis devrait être examinée par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre afin de déterminer si l'action du député est un outrage au Parlement et si elle est offensante pour le Parlement.

Ce serait une erreur de ne pas examiner l'accusation qui a été portée, de ne pas y donner suite. Si elle n'est pas fondée, si la personne n'a rien fait de déplacé, il faut prononcer le non-lieu. C'est une protection à laquelle nous avons tous droit en vertu de la loi.


731

Il y a deux raisons majeures de faire enquête sur cette question. Toutefois, avant de les expliquer, je veux bien faire comprendre les antécédents de l'affaire dont nous sommes saisis aujourd'hui à la Chambre.

Le 26 octobre 1995, le député de Charlesbourg a envoyé un message par télécopieur à toutes les bases des Forces canadiennes au Québec, sur du papier à en-tête du chef du Bloc québécois de l'époque, Lucien Bouchard. Le message dit notamment qu'au lendemain d'un oui, le Québec devra créer immédiatement un ministère de la Défense, un embryon d'état-major et offrir à tous les militaires québécois servant dans les forces canadiennes, la possibilité d'intégrer les forces québécoises.

Le communiqué concluait ainsi:

. . . je pense que les militaires québécois respecteront la décision de la population et transféreront leur loyauté au nouveau pays dont ils assureront la sécurité.
Voilà vraiment le noeud de l'affaire-à savoir s'ils transféreront leur loyauté. Ce communiqué a été envoyé au nom du chef de l'opposition officielle à la Chambre des communes. Voilà ce que considère comme offensant, et c'est cela que j'aimerais qu'on examine.

La réaction du gouvernement fédéral au communiqué du député est venue six jours après le vote référendaire. Le ministre de la Défense aurait dit ce qui suit, selon un article du Toronto Star du 7 novembre 1995: «Je suis perplexe à l'idée qu'on fasse appel aux membres des forces armées canadiennes pour qu'ils se joignent à une hypothétique armée étrangère. Je trouve la proposition un peu choquante.»

L'article disait aussi que le ministre de la Défense avait demandé au juge-avocat général des forces armées de formuler un avis juridique sur la question de savoir si ce communiqué du député de Charlesbourg n'enfreint pas les règles.

Depuis la publication de cet article, les Canadiens n'ont plus entendu une seule déclaration officielle du gouvernement à ce sujet. Le gouvernement n'a pris aucune mesure contre le député. Il ne lui a même pas demandé de s'excuser.

(1650)

Cela m'amène à parler de la première grande raison pour laquelle je pense que mon collègue a tout à fait raison de demander que l'acte commis par le député de Charlesbourg le 26 octobre 1995, y compris l'accusation de sédition, soit examiné par le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre.

Depuis le référendum, j'ai beaucoup voyagé dans ma circonscription et à travers tout le pays. J'ai écouté beaucoup de Canadiens qui sont extrêmement troublés et fâchés par le comportement du député, et par le fait qu'il ait pu faire une telle chose sans que rien ne lui arrive. Ils sont convaincus que ce qu'il a fait est mal.

Le sondage officieux fait qu'a cité mon collègue prouve que je ne suis pas la voix qui prêche dans le désert puisque 94 p. 100 des 1 170 personnes interrogées ont dit qu'il fallait faire quelque chose. Bien que ce ne soit pas un sondage scientifique, le nombre de personnes interrogées est beaucoup plus élevé que pour de nombreux sondage dont les résultats servent à prendre d'importantes décisions.

Ces accusations sont très graves. On nous a donné de nombreuses définitions du mot «sédition». On a cité de nombreux dictionnaires. Pour ma part, j'aimerais citer le Code criminel qui, à l'alinéa 62(1)b), décrit ainsi la sédition et les peines qu'elle entraîne:

Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de cinq ans quiconque, volontairement: a) soit entrave ou diminue la fidélité ou la discipline d'un membre d'une force, ou influence sa fidélité ou discipline;
Il n'est pas question de révolte. Il est question d'influencer et, selon mon jugement, c'est exactement ce qui s'est passé. voici la suite de la disposition:

b) soit publie, rédige, émet, fait circuler ou distribue un écrit qui conseille, recommande ou encourage, chez un membre d'une force, l'insubordination, la déloyauté, la mutinerie ou le refus de servir; soit conseille, recommande, encourage ou, de quelque manière, provoque, chez un membre d'une force, l'insubordination, la déloyauté, la mutinerie ou le refus de servir.
Le paragraphe 2 définit ce qu'est une force:

2) Au présent article, «membre d'une force» désigne, selon le cas:
a) un membre des Forces canadiennes;
b) un membre des forces navales, des forces de l'armée ou des forces aériennes d'un État étranger qui sont légitimement présentes au Canada.
Cette description donnée par la loi est incroyablement claire.

Je mentionne ces dispositions du Code criminel pour montrer tout d'abord à quel point les Canadiens prennent la situation au sérieux et pour les porter à l'attention du Bloc québécois, qui citerait n'importe quel dictionnaire pour jeter son propre éclairage sur la situation. La définition qui nous intéresse est celle de la loi, celle de notre Code criminel.

Les Canadiens sont troublés par la situation, mais les gestes de ce député les exaspèrent davantage à cause de l'inertie du Parlement. L'inaction du Parlement est inexcusable. Les gens sont scandalisés de voir que le gouvernement n'a pas fait enquête. Ils ne comprennent pas pourquoi le gouvernement fédéral refuse de reconnaître l'importance de cette affaire.

Le comportement du député est-il acceptable de la part d'un parlementaire? Les Canadiens méritent une réponse à cette question. Voilà ce que nous demandons. Les gens craignent que le gouvernement ne soit en train d'occulter l'incident. En décembre 1995, j'ai lu un article de journal qui disait: «Selon certaines sources à Ottawa, le gouvernement, qui craint de transformer Bouchard et Jacob en martyrs, a silencieusement décidé. . .»

(1655)

Le président suppléant (M. Kilger): J'hésite toujours à interrompre un député dans un débat de cette importance, mais il importe de rappeler que nous devons respecter les règlements parlementaires, nos propres règlements, et que nous ne devons pas mentionner ou identifier un député par son nom, mais seulement par le nom de sa circonscription ou de son portefeuille. Même dans le contexte d'une citation, d'une publication ou autre, à la Chambre nous ne pouvons pas faire indirectement ce qui est interdit directement.


732

Au lieu de mentionner le nom d'un député, nous devons mentionner sa circonscription. Je demande la collaboration du député qui avait la parole. Il ne l'avait probablement pas fait exprès, mais néanmoins, en raison de l'importance de ce débat, je pense que nous devons faire preuve de beaucoup de respect les uns pour les autres et observer toutes les règles et procédures de cette Chambre.

M. Mayfield: Monsieur le Président, je vous remercie de votre intervention. Mon intention n'était certainement pas de manquer de respect. Cependant, je vous prie de m'excuser. Je vais donc répéter la citation: «Selon certaines sources à Ottawa, le gouvernement, qui craint de transformer Bouchard et» le député de Charlesbourg «en martyrs, a silencieusement décidé de laisser tomber la question.» Cette citation est extraite du Toronto Star du 18 décembre de l'an dernier.

Est-ce exact? Est-ce bien ce que le gouvernement a fait? Est-ce que c'est la raison de l'absence d'action? Quelle est exactement la position du gouvernement à ce sujet? Nous n'avons entendu aucune position. Nous n'avons vu aucune action. Les Canadiens veulent savoir. Les Canadiens ne méritent pas qu'on leur coupe la parole en imposant la clôture à ce débat.

Le Président lui-même disait, il y a deux jours:

La Chambre est saisie aujourd'hui d'une des questions les plus graves que nous ayons eu à résoudre durant la 35e législature [. . .] J'estime que nous n'avons rien à gagner en reportant à une date ultérieure l'étude de cette question. [. . .]
Je pense que les accusations portées contre un des nôtres sont tellement graves que la Chambre devrait se pencher sur celles-ci immédiatement.
Le Président a même assuré les députés qu'ils auraient l'occasion de parler de cette grave question. Je pense que je parle pour les députés de mon caucus lorsque je dis que je suis offensé par cette motion de clôture.

Si cette question est si grave, alors pourquoi les libéraux veulent-ils terminer ce débat? Est-ce qu'ils veulent que l'on représente les intérêts des Canadiens? Leur geste est scandaleux. Il s'agit d'une attitude élitiste et antidémocratique. Elle empêche le débat des représentants élus de la population, laquelle s'inquiète beaucoup de cela.

Les Canadiens veulent que l'on débatte de cette question. Ils veulent des réponses aux questions soulevées par le communiqué. N'essayons pas d'étouffer cette question et les voix des Canadiens. Ils méritent de savoir, ils ont le droit de savoir si le comportement de ce député était un outrage au Parlement, s'il était offensant pour le Parlement. Pour une fois, laissons les Canadiens se faire entendre et poursuivons ce débat historique tant qu'on ne connaîtra pas tous les tenants et aboutissants de cette affaire, même si je sais qu'il n'en sera rien.

Le ministre de la Défense a déclaré qu'il y a certaines choses qu'on fait et qu'on ne fait pas dans la vie publique. Je suis parfaitement d'accord avec lui. C'est pourquoi nous devons renvoyer cette question au comité, pour qu'il fasse enquête et pour que nous puissions savoir si un tel comportement de la part du député est acceptable de la part d'un représentant public. Par-dessus tout, c'est dans l'intérêt des Canadiens. Prenons au sérieux ce que nos électeurs nous disent. Faisons en sorte de clarifier cette question au Parlement pour nous et pour tous les Canadiens.

Avant de terminer, je dois mentionner la raison la plus importante pour laquelle on doit examiner les actions de ce député. C'est une question de principe. À partir des arguments que je viens de donner à la Chambre, on peut voir que la question de privilège de mon collègue n'est pas une attaque personnelle. Il n'a pas pris ces mesures pour tenter de discréditer les membres de sa famille ou son parti.

(1700)

Ce qui importe, c'est que les Canadiens ont vu un député commettre une erreur, si c'est mieux d'employer ce terme. Nous en faisons tous. À la Chambre et partout ailleurs, la vie est une série d'erreurs. Nous disons des choses que nous ne devrions pas dire, faisons des choses que nous ne devrions pas faire et parfois, nous agissons sans savoir que nos actions sont répréhensibles. Cependant, en fin de compte, monsieur le Président, nos actions conduisent à des sanctions et à titre de Président de la Chambre, il vous incombe de les appliquer équitablement.

Les Canadiens ont le sentiment que le député de Charlesbourg a commis une erreur. Le Parlement ne fait rien pour remédier à la situation. Il ne vérifie même pas si l'accusation est fondée. Je serais outré si on lançait ces accusations, si on m'accusait de quoi que ce soit sans que je n'aie aucun recours ni aucune façon de me disculper.

Si nous étudions cette question et la renvoyons au comité, à titre de question d'outrage devant être examinée par le comité, nous disons au moins aux Canadiens que leurs dirigeants sont traités de la même façon que tous les autres Canadiens devant la loi. Nous leur disons que les politiciens subissent les conséquences d'actions inappropriées et illégales, que les principes d'égalité s'appliquent tout le temps, même lorsqu'ils ne profitent pas aux membres de la classe politique ou à l'élite. Agissons de façon honorable et renvoyons cette question au comité aux fins d'enquête. Il faut faire en sorte que le comité soit saisi de toute la question dans son ensemble telle qu'elle est vraiment.

M. Peter Milliken (Kingston et les Îles, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre part à ce débat. Il a soulevé plusieurs points très sérieux que la Chambre voudra examiner avant la tenue du vote sur la motion. Quand je parle de la motion, je ne parle pas seulement de la motion telle qu'elle a été proposée, mais également de tous ses amendements. Nous débattons actuellement un sous-amendement de la motion principale.

Il est intéressant de s'arrêter aux termes employés dans la motion originale et l'amendement que le gouvernement a proposé, amendement qui est plein de bon sens et qui, s'il est adopté, clarifiera la situation pour tout le monde. Naturellement, les réformistes ne partageront pas mon avis, mais il est dans leur intérêt de prêter une oreille attentive à mes propos, car l'enjeu est important.

La motion principale veut que la Chambre tranche la question d'avance, qu'il soit établi qu'il y a eu bel et bien sédition et que le


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cas du député de Charlesbourg soit renvoyé au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

S'il s'agit de déterminer s'il y a eu sédition ou non, et j'estime que ce sera au comité d'en décider, pourquoi la Chambre devrait-elle exprimer son avis sur la conduite du député de Charlesbourg avant que le comité n'entreprenne son étude? Si cette motion était adoptée, elle serait considérée comme l'avis de la Chambre, et puis ça se terminerait là, l'affaire ne serait pas soumise à l'étude du comité.

Le renvoi au comité a pour but d'offrir au député de Charlesbourg l'occasion de présenter sa version des faits. Le comité tient une audience. Le comité entend des témoins et examine des éléments de preuve. Le comité sert de tribunal. Lorsqu'il tranche la question, il présente à la Chambre un rapport qu'elle peut accepter ou rejeter. La question pourrait également être renvoyée de nouveau au comité pour étude ultérieure, ou accompagnée de directives pour que le comité fasse certaines choses ou présente un certain genre de rapport. Le fait est que la Chambre est maître de cette procédure. Elle renvoie la question au comité, qui l'examine. Le comité agit comme une sorte de juge, bien que la Chambre conserve le droit de différer d'opinion avec le comité. C'est comme un droit d'appel.

Les députés d'en face semblent n'avoir pas compris. Le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt, qui a proposé la motion, a passé trois ou quatre mois à étudier la question de façon très détaillée avant de se présenter à la Chambre. Il a omis la référence à un cas remontant à l'époque de Jacques 1er que mon collègue de Vancouver Quadra a soulevée l'autre jour. J'aurais pensé que, après quatre ou cinq mois, le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt aurait réuni tous les précédents qui puissent exister, mais non. Néanmoins, malgré toute cette recherche, il a présenté une motion qui, en réalité, condamnait le député de Charlesbourg avant que celui-ci n'ait pu expliquer son point de vue devant quelques-uns de ses collègues. C'est priver le député de ses droits élémentaires.

(1705)

Je sais que le Parti réformiste a de la difficulté avec les questions d'ordre public. Je suis heureux de voir que la députée de Calgary-Sud-Est est présente. Je sais qu'elle est encore toute pâle à la suite du traitement qu'elle a reçu hier, lors de la réunion de son caucus. J'ai lu tout cela dans la presse de ce matin. Nous l'entendrons peut-être, plus tard ce soir, prononcer un discours sur le sujet et nous expliquer ce qu'est l'ordre public.

Je sais que le député de Calgary-Centre s'est envolé du nid à cause du traitement que lui ont réservé les collègues de son caucus hier. Je soupçonne le député de Calgary-Ouest de ne pas avoir participé à la réunion de son caucus. S'il était intelligent, il s'en serait bien gardé. S'il était encore plus intelligent, il adhérerait au Parti libéral.

Les députés en question sont traités ainsi, parce qu'ils ont une idée du respect et de l'ordre qui ne correspond pas à celle de leurs collègues. On est en droit de se demander si les députés réformistes ne sont pas fouettés aux réunions de leur caucus. En effet, certains de leurs collègues semblent apprécier cette pratique et voudraient même rétablir la peine du fouet dans le Code criminel. Parler de sédition ne correspond pas automatiquement à parler du fouet. J'espère que c'est clair pour les réformistes, parce que je sais à quel point ils tiennent à cette forme de châtiment, convaincus que cela donnerait de bons résultats.

Dans ce cas-ci, nous devons accorder aux gens le droit de se défendre. C'est un principe de notre droit criminel que j'espère ne pas avoir à répéter trop souvent aux gens d'en face. C'est un principe que nous devons observer à la Chambre, en examinant les faits de cette affaire. D'après moi, la bonne procédure consiste à renvoyer cette question au comité, qui entendra des témoins et qui décidera s'il y a eu sédition ou non.

Le sous-amendement proposé à l'amendement du gouvernement a pour objet de rétablir certains mots. Ils ont modifié la motion, l'affaiblissant un peu, mais ils veulent rétablir l'aspect séditieux. Je ne peux dire à la Chambre à quel point je m'oppose à cet amendement.

À mon avis, la Comité de la procédure et des affaires de la Chambre est la structure idéale qui rendra une décision sur les questions dont la Chambre est saisie par suite de cette motion. Toute la question devrait être renvoyée au comité pour qu'il l'examine sans que la Chambre exprime son opinion sur les mérites ou les inconvénients de l'affaire. C'est un argument qui semble avoir complètement échappé aux gens d'en face.

J'ai essayé d'apporter des clarifications. Certains de mes collègues sont intervenus dans le même but. J'espère que c'est clair maintenant. Nous allons rejeter le sous-amendement. Nous voterons en faveur de l'amendement. Une fois que la motion sera amendée, je l'appuierai.

Je sais que la question inquiète les députés bloquistes. Ils se sont rendu compte qu'un de leurs collègues pourraient éprouver des difficultés si le comité arrivait à une conclusion contraire à ses intérêts. C'est le comité qui doit trancher la question.

Je refuse à tout prix de débattre les mérites et les inconvénients de cette affaire à la Chambre. Je suis tout à fait disposé, puisque je suis membre de ce comité, à attendre l'exposé des faits aux comités et à me former une opinion après en avoir pris connaissance. Je vais donner au député de Charlesbourg le bénéfice du doute, comme le ferait tout juge du droit et des faits au Canada, comme vous le feriez vous-même, monsieur le Président, si vous siégiez à ce comité, et comme le ferait n'importe quel député si le comité présente un rapport à la Chambre.

C'est là la question qu'il faut trancher, et c'est au comité qu'il appartient de le faire, pas à la Chambre. Je ne vais donc pas discuter du fond de l'affaire ni même parler des dispositions législatives sur la sédition. Je vais m'en tenir à la procédure qui s'impose à la Chambre si nous voulons traiter avec justice un de nos collègues en lui donnant le bénéfice du doute à propos de ce qui a pu se passer. Nous devons agir de cette manière. Le député a droit au bénéfice du


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doute raisonnable comme tous ceux qui sont sous le coup d'une accusation.

Je voudrais revenir sur certaines observations qu'ont faites des députés d'en face cet après-midi sur une question qui leur tient à coeur, y compris la députée de Calgary-Sud-Est, et c'est la question de la clôture. Les députés ont dit que, en limitant le débat aujourd'hui, nous restreignions le droit des Canadiens de se renseigner sur cette affaire importante.

Normalement, je me suis opposé à la clôture par le passé, et c'est encore ce que je fais le plus souvent aujourd'hui. Mais le gouvernement actuel y a eu rarement recours, et seulement lorsque cela s'imposait de toute évidence. Dans ce cas-ci, il n'y a pas lieu de prolonger le débat, puisqu'il s'agit uniquement de renvoyer la question pour étude à un comité. On aura une autre occasion de discuter de cette question lorsque le comité fera rapport à la Chambre.

(1710)

Les députés d'en face peuvent tempêter tant qu'ils veulent à propos de la limite imposée au débat aujourd'hui, mais le fait est que, un jour, plus tard, en supposant que la motion soit adoptée, le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre déposera un rapport à la Chambre et quelqu'un en proposera l'adoption, ce qui déclenchera un autre débat à la Chambre.

Il y a beaucoup d'occasions d'en discuter. On en aura amplement l'occasion lors des audiences du comité. Si les députés veulent aller exprimer leurs points de vue au comité, le président et les membres du comité de la procédure et des affaires de la Chambre leur permettront de se faire entendre. Si la question leur tient tant à coeur et s'ils pensent pouvoir apporter un témoignage au comité, les députés pourront sûrement s'y faire entendre et je suis convaincu qu'ils voudront le faire.

Il ne s'agit pas d'une motion à propos de laquelle il est déraisonnable d'imposer la clôture, étant donné tout le temps que nous avons déjà consacré à la question. Je tiens à faire remarquer que lorsqu'on impose la clôture en vertu de l'article 57 du Règlement, la Chambre peut continuer de siéger jusqu'à 23 heures. Vous vous rappellerez, monsieur le Président, qu'il y a deux semaines à peine, nous avons entendu les députés d'en face dire tout le mal qu'ils pensaient de la clôture.

Le lundi 4 mars, le gouvernement a imposé la clôture au débat d'une motion permettant de rétablir certains projets de loi. Je constate que certains députés d'en face ont fait rétablir certains de leurs propres projets de loi sous l'égide de cette merveilleuse motion.

M. Duhamel: Même s'ils l'avaient critiquée.

M. Milliken: Ils trouvaient qu'il ne s'était rien produit de pire depuis je ne me rappelle plus quoi. Ils étaient tout simplement consternés de voir que le gouvernement puisse prendre une telle mesure; pourtant, quand ils ont eu l'occasion de présenter à nouveau leurs mesures d'initiative parlementaire, ils ont pris la parole et ont brandi leur projet de loi en disant: «Nous voulons qu'il soit rétabli à l'étape où en était son étude à la prorogation.» S'ils avaient tenu à leurs principes, ils auraient dit: «Nous présentons simplement notre projet de loi en première lecture et nous le laisserons franchir toutes les étapes de son étude. Nous irons au comité pour demander que cette mesure puisse faire l'objet d'un vote, et nous courrons la chance de la soumettre au tirage pour qu'elle puisse figurer sur la liste selon un ordre des priorités.» Ce n'est toutefois pas ainsi qu'ils ont procédé. Dès qu'ils ont vu l'ouverture qui leur était offerte par un gouvernement libéral généreux et bienfaisant, ils se sont empressés d'en profiter.

Revenons au débat qui a eu lieu le lundi 4 mars. Je me souviens de certains discours qui ont été prononcés ce jour-là parce que j'ai été abondamment cité. J'ai bien aimé ce débat. Je ne citerai pas des extraits de mon discours, mais plutôt des discours de certains de mes collègues d'en face.

Le député de Calgary-Centre a prononcé un discours merveilleux. Comme on peut le voir à la page 214 du hansard, il a déclaré:

Cette façon d'agir est antidémocratique, très autocratique même. Le recours à la clôture, que nous venons de voter, viole la liberté de parole à la Chambre, la liberté que nous avons d'exposer nos pensées et nos points de vue ouvertement. Limiter la durée du débat, c'est bâillonner les parlementaires. Nous autorisons un premier ministre élu librement et démocratiquement à agir en dictateur en le laissant procéder de cette façon.
Que s'est-il produit le 4 mars? À quelle heure la Chambre a-t-elle ajourné, parce qu'il n'y avait plus d'orateurs désireux de participer au débat sur la motion à l'étude? J'ai le compte rendu de cette séance et, ma foi, on peut voir que la séance a été levée à 19 h 25, après la tenue de certains votes.

M. Duhamel: Ce n'est pas possible.

M. Milliken: Oui. La sonnerie a retenti pendant 30 minutes, puis nous avons tenu deux votes. Autrement dit, le débat a pris fin à 18 h 40. Naturellement, nous n'avons pas débattu de cette motion pendant toute la journée. Au cours de l'après-midi, nous avons abordé une autre question. Nous avons discutons de l'approbation d'un rapport de comité jusque vers 18 h 15 ou 18 h 20. Ensuite, il y a eu un bref débat, au cours duquel deux députés sont intervenus. Puis, la sonnerie a retenti pendant 30 minutes et nous avons tenu deux votes.

Nous aurions pu poursuivre le débat jusqu'à 23 heures, mais nous nous sommes arrêtés à 19 h 30. Pourquoi? Parce que les réformistes ne semblaient pas contre cette idée. Ils ont apparemment été privés de leur droit de parole, d'après le député de Calgary-Centre et ancien whip du Parti réformiste, mais, lorsque est venu pour eux le temps de poursuivre, ils ont étrangement manqué d'intervenants. Est-ce parce qu'il était tellement tard? Ne veulent-ils pas prendre la parole le soir? Que font-ils le soir? Pourquoi n'étaient-ils pas présents? J'étais ici. J'étais prêt à siéger jusqu'à 23 heures, mais pas les députés d'en face. Où étaient-ils? N'étaient-ils pas à Ottawa? Peut-être étaient-ils encore chez eux, à Calgary. Je ne sais pas où ils étaient.


735

Permettez-moi de citer officiellement ici autre chose qui a été dit juste avant que la sonnerie ne se fasse entendre, à 16 h 40. Je sais que le député de Capilano-Howe Sound était au nombre de ceux qui ont pris la parole ce jour-là. Je pourrais le citer aussi. Je le voudrais bien, mais il me faudra trouver le temps.

(1715)

Permettez-moi de citer cette autre allocution du député de Kootenay-Est, cet intervenant réformiste des plus pieux. Il a une voix très grave et il sait se montrer convaincant. Je sais que des députés s'emballent lorsqu'ils entendent le député de Kootenay-Est. Si j'étais resté à la Chambre jusqu'à la fin de son allocution, je suis sûr que j'aurais été moi-même transporté.

Il a dit ceci: «C'est une bien triste façon d'entreprendre la deuxième session de la 35e législature». En fait, je me souviens que j'ai failli pleurer en entendant ces mots. Il a ajouté: «On ne peut qu'espérer que les Canadiens non seulement porteront attention, mais se parleront également entre eux pour se dire que c'est toujours la même histoire et qu'il n'y a pas de différence entre les libéraux et les conservateurs». C'est tout un poète.

Il a encore dit ceci, comme on peut le lire à la page 270 du hansard:

Je prétends que le gouvernement fait preuve d'un mépris absolu et total à l'égard de la population canadienne quand je vois la façon dont il conduit ses affaires avec cette toute première motion de cette deuxième session de la législature.
Hier, le même député a pontifié comme jamais lorsque le leader parlementaire adjoint est venu donné avis de la clôture du débat dont il est maintenant question, soit l'avis de la motion de clôture que nous avons adoptée plus tôt aujourd'hui.

Le député de Kootenay-Est a été interrompu pendant son discours. Comme on peut le lire à la page 666 du compte rendu des débats, il était au beau milieu de son discours quand le leader du gouvernement à la Chambre l'a interrompu pour déposer un avis de clôture. Du coup, le pauvre député de Kootenay-Est en a presque piqué une crise. Il a dit: «Monsieur le Président, c'est absolument scandaleux.» C'est ce qu'il a dit. Je l'ai vu à la télévision. Il était tout simplement hors de lui. Or, regardez l'heure qu'il est.

Monsieur le Président, je sais que vous êtes prêt à rester ici jusqu'à 23 heures et je le suis aussi. J'ai bien hâte d'entendre les discours des députés réformistes jusque tard dans la soirée. S'ils prétendent que leurs droits ont été foulés au pied, que leurs droits de s'exprimer sur cette question ont été limités, je tiens à m'assurer qu'ils profiteront pleinement du temps qui leur est alloué et qu'ils se rendront jusqu'à 23 heures pour exprimer leurs points de vue.

S'ils n'étaient pas prêts à utiliser tout le temps qui leur a été alloué pour la motion qui a tant soulevé leur indignation le 4 mars, je n'ose penser au peu de temps qu'ils consacreront à celle d'aujourd'hui. En fait, je suis prêt à parier qu'ils arrêteront vers 18 h 40 aujourd'hui. Savez-vous pourquoi? Parce qu'à 18 h 30, nous ne pouvons pas revenir aux initiatives ministérielles qui sont à l'ordre du jour normal d'aujourd'hui. Passé 18 h 30, ils sauront que tout le temps réservé normalement au débat aura été épuisé et que le reste sera du temps supplémentaire consacré à la motion de clôture.

Je ne pense pas qu'ils aient assez de députés pour soutenir le débat de toute façon parce que, je vous le donne en mille, les députés de ce parti ne pensent pas que c'est important et sont donc tous partis à la maison. C'est ça qui va arriver, à mon avis. Je ne dis pas qu'ils ne sont pas ici à la Chambre, mais je pense qu'ils sont tout simplement partis à la maison. Je ne les blâme pas, mais certains d'entre nous doivent rester pour faire notre devoir demain.

Des voix: Oh, oh!

M. Milliken: Les députés d'en face rient, mais, évidemment, ils ne se rendent pas compte que je serai ici demain pour la journée. C'est une journée de travail pour le député de Kingston et les Îles et il sera là, monsieur le Président, comme vous aussi, je pense.

M. Bryden: Je serai là aussi.

M. Milliken: Mon collègue, le député de Hamilton-Wentworth, va passer la journée ici lui aussi. Je m'attends à ce que quelques députés du Parti réformiste soient présents, mais la plupart d'entre eux se fichent de ce débat comme de leur première chemise et ils sont rentrés chez eux.

Je sais que l'ouest du Canada est un endroit attrayant, mais s'ils estimaient cette motion si mauvaise, pourquoi ne sont-ils pas rester ici jusqu'à 23 heures pour en discuter? Pourquoi n'expriment-ils pas leur indignation et leurs inquiétudes? Je sais pourquoi: c'est parce qu'ils ne sont ni indignés ni inquiets. Nous avons droit ici à bien des larmes de crocodile.

Voyons la liste des députés du Parti réformiste qui, le lundi 4 mars, ont exprimé leur vive indignation parce que le gouvernement imposait la clôture. Il y a le député de Calgary-Centre, que j'ai eu le plaisir de citer. Le député de Capilano-Howe Sound, qui a fait un merveilleux discours. Il y citait essentiellement mes paroles ainsi que celles du député de Glengarry-Prescott-Russell et de la députée de Halifax. Il avait une série de citations extraordinaire. En fait, nous avons écrit le gros de son discours pour lui.

Le député d'Edmonton-Sud-Ouest était ici et il a prononcé un merveilleux discours. Le député de Lisgar-Marquette a pris la parole. Le député de Lethbridge nous a charmés avec ses déclarations. Celui de Prince George-Bulkley Valley a longuement parlé, puis, comme je l'ai mentionné, le député de Kootenay-Est a clos le débat quatre heures et demie avant la limite prévue.

(1720)

Ils avaient amplement de temps pour s'exprimer. Sept d'entre eux ont pris la parole. Chacun disposait d'un maximum de 20 minutes. . .


736

M. Duhamel: Sept sur cinquante-deux. Même pas 14 p. 100.

M. Milliken: Ils ont tous exprimé leur indignation. Le député de Saint-Boniface sait que, lorsque le gouvernement précédent nous imposait la clôture et limitait notre temps de parole, nous utilisions tout le temps dont nous disposions parce que beaucoup de nos députés étaient préoccupés et tenaient à être entendus. Apparemment, le problème n'est pas là aujourd'hui. Ils hurlent que le gouvernement fait quelque chose qu'il ne devrait pas. Cependant, lorsqu'il est temps de présenter leur point de vue en long et en large, ils semblent perdre intérêt et le débat tourne court.

M. Duhamel: Moins de 15 p. 100.

M. Milliken: Comme le dit mon collègue, moins de 15 p. 100 d'entre eux ont pris la parole. Les députés d'en face aiment bien fulminer et tempêter contre le gouvernement en lui reprochant de faire quelque chose qu'il ne devrait pas faire. Pourtant, le gouvernement ne fait que les aider à se sortir d'un mauvais pas.

Si nous n'avions pas imposé la clôture, les réformistes auraient l'air de renoncer au débat s'ils abandonnaient après quatre ou cinq interventions, ce qu'ils préféreraient faire. Nous avons imposé la clôture pour leur donner la chance de vociférer contre le gouvernement, de dire qu'il est horrible de leur faire ça et que, pour cette raison, ils se tairont et laisseront le gouvernement faire à sa guise. C'est ce qu'ils font. Ils l'ont fait auparavant et ils le refont aujourd'hui.

Nous attendons avec impatience 18 h 35 ou 18 h 40, car je prévois que les députés réformistes en auront tout à coup assez dit sur la question, la motion sera mise aux voix et la Chambre s'ajournera à demain.

Je regrette que mes vis-à-vis adoptent une attitude aussi arrogante. J'espère que les Canadiens, qui regarderont certainement leur montre à 18 h 30, comprendront que toutes les sornettes que nous avons entendues hier et aujourd'hui n'étaient que larmes de crocodile et radotage.

M. Gouk: Monsieur le Président, je demande le consentement unanime de la Chambre pour que nous puissions poser des questions ou faire des observations au député qui vient de parler, si ce dernier est d'accord.

Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: Non.

[Français]

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Monsieur le Président, l'honorable collègue du Parti réformiste qui a pris la parole avant moi demandait: «What are the motivations of the government?» J'aimerais orienter mon discours là-dessus. La motion déposée en Chambre par le Parti réformiste et l'amendement du Parti libéral ont tous deux quelque chose de profondément bizarre dans le contexte politique actuel. On se rappellera, après le référendum, des engagements de M. Bouchard: «Nous allons cesser, disait-il, pendant un certain temps, de nous concentrer sur le référendum pour nous concentrer sur la remise en ordre des finances publiques du Québec.»

Or, depuis cette déclaration de M. Bouchard, bizarrement, nous assistons à une suite ininterrompue de déclarations et de prises de position des fédéralistes qui ont toutes pour but, semble-t-il, de ramener le débat référendaire à l'ordre du jour et de mettre le Québec à sa place. On vient de parler pendant deux jours sur une motion que nous n'avons pas présentée en Chambre, et qui ramène encore le débat référendaire ou le sujet référendaire en Chambre. La motion dont nous traitons aujourd'hui n'est en fait que la dernière de cette longue liste de déclarations et de prises de position.

Pourquoi tant de bizarreries dans cette stratégie qui semble se développer depuis quelques mois? Peut-être-et c'est peut-être une réponse à donner au Parti réformiste-que le résultat serré du référendum n'a pas encore été digéré.

On se souviendra que le premier ministre, tout de suite après le référendum, probablement en guise de stratégie de dernière minute, déposait en Chambre en fin de session une motion et un projet de loi, la motion sur la reconnaissance de la société distincte et le projet de loi sur le droit de veto. La motion n'engage bien sûr ni le gouvernement, ni ses successeurs, ni les tribunaux, et le droit de veto est révocable en tout temps, comme tout projet de loi. Les deux items étaient conformes, bien sûr, à la pensée du premier ministre qui nous le disait lui-même en Chambre: «Tout le monde knows that I am French when I speak English, je n'ai pas besoin de marquer ça dans la Constitution.»

Les Québécois ont perçu ces deux choses-là comme étant ce qu'elles sont, des écrans de fumée, des coquilles vides de sens.

(1725)

C'est pour cela que l'option souverainiste continue de monter dans les sondages malgré les stratégies, et que de plus en plus de gens, au Québec et au Canada, sont maintenant convaincus que la souveraineté du Québec est inévitable.

Pourquoi les souverainistes pensent-ils cela? Parce qu'ils sont convaincus des paroles de M. Bourassa, «le statu quo serait la pire des solutions pour le Québec», et ce qu'on leur offre, c'est le statu quo. Parce qu'ils se souviennent également des promesses deM. Trudeau, «nous mettons nos sièges en jeu pour qu'il y ait du changement», et qu'ils savent pertinemment qu'ils ne peuvent se fier à des promesses comme celles-là.

Mais si le premier ministre n'a pas tiré de leçon du référendum, le peuple canadien, lui, l'a fait, plaçant les libéraux dans l'obligation de revoir de façon désordonnée leur stratégie.

[Traduction]

Les Canadiens ont compris ce qui se passait. Tout le monde sait maintenant que le premier ministre du Canada et le chef du Parti conservateur ne parlent plus pour le Québec. Ils ont tous deux perdu


737

le référendum dans leur propre circonscription. Comment un homme peut-il promettre quelque chose pour le Québec lorsqu'il ne peut même pas donner de garantie pour sa propre circonscription?

Avant le référendum, le premier ministre a demandé l'appui de ses troupes, de ses alliés au Québec, ce qui est compréhensible, de ses opposants à la Chambre, du Parti conservateur, et même du Parti réformiste, dont il s'était moqué pendant environ deux ans. Cependant, tout le monde sait que, si un homme a besoin d'être appuyé, c'est parce qu'il est en train de tomber.

Il fallait cacher autant que possible la faiblesse du premier ministre. Il fallait trouver un bouc émissaire pour expliquer le résultat inattendu du référendum. M. Ouellet, qui était alors ministre des Affaires étrangères, a pointé du doigt M. Daniel Johnson, au Québec, en disant: «Nous avons failli perdre le référendum parce que cet homme n'a pas témoigné un attachement profond pour le Canada.» Je tiens à rappeler aux gens et particulièrement à mes collègues du Parti réformiste que M. Ouellet n'est jamais venu au Québec durant la campagne référendaire et n'a même pas voté. Voilà la profondeur de son attachement pour le Canada.

[Français]

Voyant que toute cette stratégie ne le menait strictement nulle part, le premier ministre organise donc un remaniement ministériel. Il nous offre, pour régler le problème, semble-t-il, parce que tout cela fait partie d'une stratégie, un nouveau ministre des Affaires intergouvernementales, M. Stéphane Dion, l'actuel candidat libéral dans Saint-Laurent-Cartierville. Qui est cet homme? Un partisan de la ligne dure, celui qui ne cesse de parler du plan B. C'est l'homme qui nous dit, et ce sont ses mots; «Je m'en viens changer la réalité»-rien de moins-«je serai l'architecte de la grande reconstruction nationale.»

C'est le même homme qui disait, avant le référendum, on s'en souvient, qu'il ne fallait rien promettre au Québec car, selon un modèle mathématique infaillible, il était impensable que les souverainistes recueillent plus de 42 p. 100 du vote. C'est cet homme qui sera le stratège du gouvernement. Alors on comprend pourquoi la stratégie cafouille un peu.

C'est également le même homme qui disait, à Toronto, avant le débat référendaire, et les Québécois vont s'en souvenir; «Plus on va faire mal aux Québécois, plus l'appui à la souveraineté va diminuer.»

S'il est élu dans Saint-Laurent-Cartierville, c'est la première fois de toute l'histoire que nous aurons un député québécois, payé par les Québécois pour défendre les intérêts des Québécois, qui s'en vient à Ottawa pour faire mal au Québec.

Que le premier ministre de ce pays ait choisi cet homme en tant que responsable du dossier de la grande réconciliation nationale, alors qu'il affiche déjà un tel mépris pour ceux qu'il doit représenter relève de la plus haute fantaisie et démontre à quel point le premier ministre n'a aucune idée de réconciliation en tête, malgré tous les beaux discours du trône.

Des choses comme celles-là ne peuvent arriver qu'au Québec. On ne verra jamais un député de la Colombie-Britannique se faire élire sur la promesse qu'il va faire souffrir l'Ouest du pays, mais on voit cela au Québec. On voit cela parce que chaque fois que des députés québécois sont élus en Chambre, sur les grands partis politiques, et qu'ils ont à choisir entre les intérêts d'Ottawa et les intérêts du Québec, ils choisiront toujours les intérêts d'Ottawa contre ceux du Québec. Le plus bel exemple de cela, on l'a eu en Chambre tout récemment quand notre collègue de Sherbrooke a tenté de s'allier au Parti réformiste. Lui qui est un député québécois, payé pour défendre les intérêts des Québécois, a tenté de s'allier à nos amis réformistes pour faire perdre le statut d'opposition officielle au Bloc québécois, le seul parti en cette Chambre qui défend véritablement les intérêts du Québec. Comme si tout ça ne suffisait pas dans toute la série des décisions et des prises de position, j'en nommerai quelques-unes qui sont venues par la suite.

(1730)

Avant la motion que nous avons aujourd'hui, nous avons eu toute une suite de déclarations complètement farfelues de ceux qui sont dans le sillage du premier ministre. M. Trudeau a bien sûr sorti un fameux texte, J'accuse, et je vous rappelle que ce ne sont pas les souverainistes qui répondent à ces objections, mais des fédéralistes du Québec. C'est M. Bourassa qui a répondu à M. Trudeau en disant: «Si M. Trudeau s'est opposé si vertement à Meech, c'est peut-être parce qu'il n'était pas très heureux à l'idée de devoir admettre qu'il avait fait une erreur en 1981 et en 1982.» C'est également M. Johnson qui répond à M. Trudeau: «M. Trudeau a sans doute oublié son opposition à Meech et à Charlottetown. Et avec ce qu'il a fait en 1982, on devrait oublier M. Trudeau.»

Le ministre des Affaires indiennes a également fait des déclarations passablement incendiaires, déclarations que je ne répéterai pas en cette Chambre. Qui lui répond? Ce ne sont pas des souverainistes qui lui ont répondu, c'est le chef de l'Assemblée des Premières nations lui-même, M. Mercredi, et je le cite: «Le ministre des Affaires indiennes ne parle pas au nom des autochtones. Alors, quand il soulève la possibilité de violence», parce que c'est ce dont il était question, «et de représailles de la part des gens, je le désapprouve. Il devrait se mêler de ses affaires, c'est-à-dire remplir ses obligations envers les autochtones. Il ne devrait pas se prendre pour un leader indien. Il n'en est pas un.»

Il y a également eu les déclarations du ministre des Transports, dans le cas de Mirabel, parce qu'on a le dossier de Mirabel sur les bras actuellement, qui nous disait ceci, je cite tout simplement quelques mots: «L'abandon graduel de Mirabel par l'organisme des transports de Montréal est une conséquence du séparatisme, qui a causé le déclin économique de la ville.» Dans ce cas-ci, c'est notre ami Mordecai Richler qui lui répond dans un texte qu'on retrouve dans «Oh Canada! Oh Quebec!». Mordecai Richler dit ceci:


738

[Traduction]

«Une fois la construction de la voie maritime du Saint-Laurent terminée, le déclin de Montréal était inévitable.»

[Français]

Parce c'est là qu'a commencé le déclin de Montréal. Finalement, on a également eu les déclarations de M. Dion, déclarations tout à fait bizarres, «que la souveraineté du Québec pourrait faire exploser l'Afrique, exploser l'Asie et mettre à mal l'Europe». Dans ce cas-là, personne ne lui a répondu. Ça ne méritait pas de réponse.

En bout de piste, on arrive à la motion dont on débat aujourd'hui depuis deux jours et demi et à l'amendement du Parti libéral. Bien sûr, tous mes collègues ont fait le tour de cette question et l'ont analysée dans tous les sens. On a sorti les dictionnaires, étant donné la gravité des mots, et on a fait le tour de la question sur laquelle, je pense maintenant, les gens seront capables de voter.

Tout ce que j'aimerais dire en terminant, c'est qu'avant de voter pour ou contre cette motion et cet amendement, les députés devront remettre les choses en perspective. Premièrement, ce qu'on retrouve dans ce texte, dans ce communiqué de presse, est une vision souverainiste. Or, nous sommes un parti souverainiste. Deuxièmement, ce n'est pas une déclaration qui a été faite comme ça, sans y penser; nous avons réfléchi avant de la faire, et nous sommes tous, du Bloc québécois, solidaires de notre collègue de Charlesbourg.

Troisièmement, notre plate-forme électorale était et est toujours bien claire: elle est, premièrement, de défendre les intérêts du Québec, et deuxièmement, toute aussi claire, de faire la promotion de la souveraineté. Nous croyons fermement, même si ce n'est pas l'opinion de tout le monde ici en cette Chambre, que la souveraineté du Québec est définitivement, après 40 ans de débat, la seule solution et pour le Québec et pour le Canada.

Quatrièmement, j'aimerais que mes collègues se rendent compte que nous sommes élus en cette Chambre, c'est-à-dire que nous sommes passés à travers une élection avec cette plate-forme électorale et que nous sommes élus pour faire ce pour quoi nous avons été élus. J'aimerais que mes collègues se rappellent également que nous avons toujours respecté tous les Règlements de la Chambre et tous les règlements qui nous sont imposés en tant que citoyens. Je pense que personne en cette Chambre ne peut nier ce fait.

(1735)

Finalement, j'aimerais qu'on tienne compte du fait que la lettre de mon collègue de Charlesbourg informe les citoyens québécois actuellement membres de l'armée canadienne de ce qui leur serait offert dans un Québec souverain. Contrairement à ce que certaines personnes du Parti réformiste pensent-peut-être pas tout le monde, mais j'ai entendu au moins deux fois le mot appel aux armes alors qu'il n'y a aucun appel à la violence là-dedans-il s'agit d'une information réfléchie, mûrie, transmise à des gens qui vont voter sur notre programme politique. Et à sa face même, il n'y a rien à discuter là-dedans.

J'aimerais qu'on réfléchisse au fait que traîner notre collègue devant un comité pour étudier les circonstances de cette chose, c'est organiser un procès d'intention, parce qu'il n'y a rien dans ce document qui porte à croire que ça devrait être amené sur un comité. Si cette décision est prise, il y aura un prix politique à payer pour ça. Les Québécois savent pertinemment, qu'ils soient fédéralistes ou souverainistes, que la décision de se donner eux-mêmes un destin, un avenir, leur appartient complètement et non à un comité de la Chambre des communes.

[Traduction]

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais parler, ce soir, d'une lettre que j'ai reçue de l'ancienne infirmière de mon cabinet qui m'a secondé durant mes premières années de pratique comme médecin. C'est une femme chevronnée et une bonne amie. Elle est aussi une personne modérée dont j'admire les conseils et les idées. Je voudrais citer un extrait de sa lettre:

Grant, j'en ai plus qu'assez de voir qu'on laisse des hommes et des femmes qui siègent au Parlement prendre tous les moyens possibles pour promouvoir la souveraineté. S'ils commettent des actes répréhensibles, ils devraient être accusés de trahison.
Cette opinion est celle d'une femme modérée et aimable, une Canadienne typique. Les réformistes ont déposé l'accusation sur le bureau.

Je voudrais également citer un récent éditorial de Peter Stockland qui a paru dans le Sun de Calgary:

Quelles que soient les disputes internes qui agitent le Parti réformiste, nous trouvons encourageant de constater que ses députés savent reconnaître le véritable ennemi.
Les députés réformistes en ont fait la preuve hier en se démenant furieusement pour empêcher le député du Bloc québécois, M. Jean-Marc Jacob de. . .
Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. C'est la seconde fois au cours de la dernière heure que nous entendons des citations se rapportant à l'important sujet dont la Chambre est saisie. Je demanderais respectueusement à tous les députés qui participent à cet important débat de faire preuve de compréhension et de coopération.

L'explication la plus concise que je puisse donner est de dire que les députés ne peuvent pas faire indirectement ce qu'il leur est interdit de faire directement. Je crois que nous savons tous, à cette étape-ci de la 35e législature, qu'il n'est pas permis de nommer un député par son nom. Nous devons toujours l'appeler par le nom de sa circonscription ou, dans le cas d'un ministre, par le nom du ministère dont il est titulaire.

Je compte sur la coopération de tous pour respecter la règle parlementaire dans le débat actuel comme nous l'avons fait depuis le début de la 35e législature.

M. Hill (Macleod): Monsieur le Président, je vous remercie de me l'avoir rappelé et je vous présente mes excuses.


739

Les députés réformistes en ont fait la preuve hier en se démenant furieusement pour empêcher. . .
. . .le député de Charlesbourg. . .

de se voir confier un poste clé au sein du Comité de la défense de la Chambre des communes. On sait bien sûr que ce député est ce coquin de séparatiste qui, au cours de la campagne référendaire de l'an dernier, a envoyé une lettre aux militaires canadiens francophones pour les inviter à se joindre à l'armée du Québec, advenant l'indépendance.
C'est scandaleux que le Bloc ait présenté sa candidature au poste de vice-président du comité,
mais il y a pire: les libéraux du comité étaient prêts à accepter cette grossière insulte faite à tous les membres ou anciens membres des forces armées de notre pays.
(1740)

Voici maintenant une observation presque antiparlementaire. Je la changerai donc. «Ce n'est que grâce à l'opposition très ferme des réformistes que le député a été forcé de retirer son nom.» Il a effectivement retiré son nom. «Malgré cela, le poste a été comblé par un autre député bloquiste, toujours avec la collaboration des libéraux.»

«Ayant toutefois gagné la moitié de la bataille, le député réformiste d'Okanagan-Similkameen-Merritt, de Colombie-Britannique, a montré sa détermination à continuer le combat contre de telles infamies séparatistes. Ce député réformiste a présenté une motion aux Communes pour demander une enquête sur le comportement du député de Charlesbourg, qualifié de séditieux et d'offensant et d'outrage au Parlement.»

«D'autres magouilles libérales ont empêché que cette motion fasse l'objet d'un débat complet, mais les réformistes ne voulaient pas laisser passer cela.» Selon l'éditorial, «C'est une bonne chose pour lui et pour le parti qui appuie son initiative.»

«C'est difficile de nos jours de faire la part des choses dans tout ce que les réformistes ont à dire sur les questions économiques et sociales, compte tenu des longues dissensions qui couvaient entre ses factions de droite et du centre, qui sont finalement sorties au grand jour cette semaine.»

«Cependant, même les plus impliqués dans ce conflit reconnaissent que leurs différences se régleront au congrès général du parti, en juin, sous la forme d'une politique finale. Pour le moment, il suffit de savoir que les réformistes sont unis quand il le faut, pour s'opposer aux ennemis du Canada.»

Ce petit éditorial résume bien la raison d'être de notre présence ici, aujourd'hui, et la raison pour laquelle je prends la parole aujourd'hui sur cette question. Je veux parler du ton du débat sur la souveraineté. Le Bloc et ses cousins du PQ ont dit, à leur décharge, que ce débat devait être tout à fait démocratique, qu'ils seraient directs dans leur approche à l'égard de la souveraineté, qu'ils exposeraient les faits tels qu'ils sont.

Je voudrais attirer l'attention des Canadiens sur deux choses importantes qui ne vont pas dans ces déclarations. La première, le référendum sur la souveraineté était censé être suivi d'une tentative de réconciliation entre les souverainistes et le reste du Canada. Le délai était d'environ un an. Si des relations nouvelles avec le Canada ne pouvaient être établies, alors ce serait la séparation.

J'ai suivi le débat sur la souveraineté et cette position a été réaffirmée encore et encore. J'ai expressément demandé à mes collègues du Bloc de m'expliquer comment on pourrait exiger des diplomates au Canada qu'ils acceptent immédiatement un Québec souverain au cas où le oui l'emporterait au référendum. Qu'est-ce que cela a à voir avec des négociations? Qu'est-ce que cela a à voir avec une question honnête? Il n'était pas question de négociations ni de question honnête.

Pour ce qui est d'inviter les membres francophones des Forces canadiennes à joindre les forces militaires du Québec, c'est ce que le député de Charlesbourg a dit. Peu m'importe comment on présente les choses, c'est ce qui est dit dans la lettre, c'est clair, net et précis. «Au lendemain», le jour suivant. Qu'est-ce que cela a à voir avec les négociations? Qu'est-ce que cela a à voir avec un processus d'une durée d'un an pour voir si le Canada et le Québec peuvent s'entendre sur de nouvelles relations? Rien, absolument rien.

(1745)

Le Canada est un pays tolérant. Le Canada est un pays qui tolère pratiquement tout. Je voudrais maintenant en venir à un incident précis que je considère tout à fait malhonnête de la part du camp souverainiste.

[Français]

J'ai ici un graphique paru dans le magazine L'Actualité du 15 mai 1991, et qui montre les gagnants et les perdants de la Confédération, chaque province qui y gagne et chaque province qui y perd. Dans ce graphique, que les députés du Bloc québécois peuvent regarder, nous constatons que trois provinces donnent de l'argent; la Colombie-Britannique, l'Alberta et l'Ontario. Les autres provinces ont reçu de l'argent dans la Confédération. Le Québec a reçu per capita 304 $. Ce graphique est très, très clair. Il est paru dans le magazine L'Actualité. . .

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): J'hésite à interrompre de nouveau le député. Je sais qu'il cite un article, ce qui est très bien, mais je ne pense pas que nous voulions encourager quiconque à présenter un article en le brandissant. Je demanderais au député de simplement citer le texte normalement, comme toute autre source.

[Français]

M. Hill (Macleod): Monsieur le Président, c'est bien. Les trois provinces qui donnent de l'argent sont identifiées par une couleur différente de celle des autres provinces, rouge, très clair. Le montant qu'elles donnent est indiqué entre parenthèses. C'est très clair. J'ai ici un manuel scolaire du Québec. Le graphique dont la source est L'Actualité du 15 mai 1991 se retrouve dans ce manuel scolaire.

Dans ce graphique, un nouveau texte montre simplement la péréquation par habitant en 1990. Les trois provinces de l'autre graphique, qui sont les «donneurs» de la Confédération, ne sont maintenant pas identifiées par la couleur. Il y a un changement au


740

graphique. Pourquoi? Pour que les jeunes du Québec croient que le Québec, maintenant, est le moins favori de la Confédération? C'est faux. Ce n'est pas possible d'avoir un débat si l'information n'est pas exacte, n'est pas honnête.

Pour chaque député du Bloc québécois, il est nécessaire d'avoir un débat honnête et ce n'est pas un débat honnête si l'information n'est pas exacte. J'ai téléphoné au ministre de l'Éducation du Québec pour lui dire que l'information était erronée. C'est possible. La réponse; zéro. La même réponse pour les éditeurs de ce manuel. Court-circuit pour les jeunes. C'est faux.

(1750)

[Traduction]

Si nous voulons avoir un débat sur la souveraineté, l'information dont nous discutons doit être exacte et honnête. Je ne peux accepter un débat malhonnête à la Chambre.

Quelle est la position des libéraux au sujet de la sédition? Pourquoi ne pas prendre rapidement des mesures à cet égard? Se pourrait-il que les libéraux préfèrent éviter un débat portant directement sur cette question? J'espère qu'il n'en est rien. Y a-t-il eu des cas où des députés ministériels ont favorisé le Bloc au détriment du Parti réformiste? Permettez-moi d'en citer quelques-uns.

Nous avons demandé de chanter l'hymne national dans cette enceinte. C'était trop délicat. Comme le Règlement prévoit que la vice-présidence des comités peut être assumée par un député de l'opposition, et non pas de l'opposition officielle, nous avons demandé de pouvoir le faire. C'était trop délicat. Voyons maintenant la vérité sur les programmes sociaux.

L'autre jour à la Chambre, le ministre des Finances a dit que le Parti réformiste réduirait de 11 milliards de dollars le budget des soins de santé. Cette déclaration est tout à fait fausse et inexacte. J'invite tous les Canadiens à consulter notre budget du contribuable; ils constateront que les réductions que les réformistes proposent à l'égard du programme qui est leur priorité numéro un sont de l'ordre de 800 millions de dollars. Comment le ministre des Finances a-t-il pu, à partir de cela, arriver à un montant de 11 milliards de dollars?

Mes collègues libéraux réduiront de 4,3 milliards de dollars les paiements versés aux provinces au titre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Le Parti réformiste réduirait ce même transfert de 1,5 milliard de dollars, et c'est lui qu'on accuse de pratiquer la politique de la terre brûlée. C'est triste, mais la population canadienne finira bien par apprendre la vérité.

Les députés bloquistes ont été élus démocratiquement à la Chambre. Ils sont arrivés là selon les voies démocratiques du Canada. Je puis dire que, individuellement, j'aime les députés du Bloc. Je parle avec eux. Ce sont des hommes et des femmes bien. Je pense toutefois que leurs idées sont complètement erronées et je vais défendre cela vigoureusement. Mais je n'ai rien contre aucun d'eux personnellement.

Les mêmes voies démocratiques qui leur ont permis d'être élus à la Chambre les obligeront aussi à quitter celle-ci. Je les invite à être honnêtes dans leurs discours, à dire exactement le fond de leur pensée. Lorsque les Canadiens iront aux urnes, ils devront quitter cet endroit en tant que séparatistes. J'espère que certains d'entre eux resteront et qu'ils se rallieront en tant que Canadiens.

Je terminerai eninvitant les libéraux à ne pas diluer cette motion et en invitant les simples députés du Parti libéral à prendre fait et cause pour le Canada. Si le fait d'inciter les militaires à changer d'allégeance n'équivaut pas à de la sédition, qu'est-ce alors?

M. Gouk: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement pour demander le consentement unanime de la Chambre afin d'annuler les articles 78 et 57 du Règlement.

(1755)

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre a entendu la demande du député de Kootenay-Ouest-Revelstoke. Y a-t-il consentement unanime.

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, quand j'ai été élu à la Chambre des communes, jamais je n'aurais cru devoir intervenir sur une motion comme celle-là. On m'a appris à l'école ce que ça voulait dire la sédition, ce que ça signifiait, et la gravité qu'il y avait là-dedans.

Le Parti réformiste a déposé une motion qui, selon moi, n'a aucun fondement, ne repose sur aucune réalité, mais a des effets négatifs dangereux, parce qu'elle remet en question le droit à des débats démocratiques.

On peut se dire que le Parti réformiste a peut-être déposé cette motion à cause de sa mauvaise connaissance du Québec, parce que, finalement, c'est un très mauvais choix politique qu'un parti s'attaque au caractère démocratique des décisions qui sont prises au Québec. Ce n'est certainement pas de cette façon-là qu'ils vont aller chercher de l'appui au Québec. Tous les Québécois sont conscients que le débat démocratique qui s'est tenu lors du référendum à l'automne 1995 a été fait correctement, avec des adversaires sévères et rudes, mais ça a été un débat clair.

Je crois que les Québécois et les Québécoises ont pu faire un choix, en pleine connaissance de cause, des différentes questions en jeu. Il y avait des questions sur ce qui arriverait aux fonctionnaires fédéraux et quel sera leur avenir. Le comité du oui a répondu à ces questions en disant quelles garanties il pouvait leur donner, quelles situations ils vivraient dans le futur. Il y avait des questions semblables posées par les militaires. Le comité du oui a répondu à ces questions et celui du non a répondu à ces questions. Il n'y a pas là du tout matière à sédition.

D'ailleurs, au Québec, personne ne s'est offusqué de cette déclaration. Cela n'a pas soulevé de passions. On n'a pas dit qu'on était en train de renverser l'État canadien. On a fait un choix clair et net au Québec depuis plusieurs années, depuis au moins 25, 30 ou 35 ans que le mouvement souverainiste existe, c'est que cela se ferait de façon démocratique.

En 1980, on a accepté et vécu avec les résultats; 40 p. 100 de la population avait voté oui. M. Lévesque, qui était le chef de file du


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mouvement souverainiste, a tout simplement dit: «À la prochaine.» On a enregistré le résultat. On a essayé de modifier des choses dans le système fédéral, on a appuyé le Parti conservateur au Québec dans le cadre du beau risque pour modifier la Constitution, cela n'a pas fonctionné. Les Québécois ont fait le choix d'élire une opposition officielle souverainiste à Ottawa et ils ont élu un gouvernement souverainiste à Québec.

Les traditions que l'on connaît sont des traditions démocratiques, des traditions qui font qu'on a confiance en la position des gens et on va continuer à faire confiance aux gens dans le futur.

Je n'en veux pas aux réformistes. Dans un sens, on voit qu'il y a une méconnaissance flagrante du Québec dans cette motion. Je pourrais juste leur dire que cela devrait leur servir de leçon dans le futur, parce que s'ils répètent cela une fois ou deux autres fois, eh bien. . . C'est à se demander ce que sont les objectifs qu'ils visent. Est-ce que c'est une clientèle qu'ils ont besoin d'augmenter chez eux? Pour quelle raison présentent-ils ce genre de motion quand il n'y a pas de fond à la question elle-même?

Par contre, là où j'en ai, c'est contre le gouvernement actuel, le Parti libéral du Canada, qui appuie le fond de la question, le fond de la motion proposée, en présentant un amendement cosmétique, un amendement qui n'empêche absolument pas que le député concerné qui, quant à moi, ne peut d'aucune façon être accusé de sédition, soit traduit devant le comité. Le Parti libéral ne dit nulle part qu'il ne veut pas que ce soit renvoyé au comité. Il enlève la partie qui n'a pas nécessairement d'effet réel.

Dans ce sens-là, le Parti libéral du Canada, de par sa tradition, du fait qu'il a gouverné le Canada pendant plusieurs années depuis que la Confédération canadienne existe, ce parti-là est très coupable dans la décision qu'il prend.

(1800)

Il aurait dû rejeter de façon claire, nette et franche dès le début que c'était une proposition farfelue, inacceptable, qui ne correspondait à aucune réalité. Et je suis certain que le Parti libéral du Canada aura à payer le prix politique de cela dans l'avenir.

Il y a également des effets je dirais peut-être subliminaux ou un peu pervers de cette proposition. On pourrait penser, en tant que députés du Bloc, que c'est une façon de conditionner l'avenir. On va faire la vie dure à quelqu'un qui a fait une déclaration très correcte, pour s'assurer qu'à l'avenir, quand il y aura un prochain débat sur la question nationale, ils soient tous sur leur crainte, qu'ils se retiennent, qu'ils fassent toujours très attention d'être certain que ce qu'ils disent ne pourra pas être taxé de sédition.

Vous pouvez être certain que chez nous, au Québec, cela ne prendra pas, d'aucune façon. Aucun député du Bloc ne sortira d'ici avec un complexe de culpabilité ou ne pensera qu'il ne devrait pas dire certaines choses sur l'avenir du Québec. On s'est battu depuis 25, 30 ou 35 ans, 5 ans, 10 ans ou quelques années, dans le cas des plus jeunes, pour être certain qu'on pourrait toujours choisir notre avenir en toute connaissance de cause. On a fait des électeurs du Québec des électeurs intelligents, des électeurs qui ont une fine connaissance du phénomène politique et qui font des choix en conséquence. Et vous pouvez être sûr qu'on va continuer à faire cela. Quand plus de 90 p. 100 de la population vote lors d'un référendum, il n'est pas question de dire qu'il y a eu là des menaces inacceptables.

Ce que les réformistes sous-entendent et que les libéraux appuient dans cette proposition pourrait vouloir dire que, dans six mois, si un député bloquiste fait une déclaration sur les sous-marins; Est-ce que c'est une déclaration séditieuse? Est-ce qu'il est en train de tenter que l'armée ou la marine se soulèvent contre le Canada? C'est tout à fait farfelu. Quand on voudra récupérer des points d'impôt, est-ce que ce sera une façon de briser le Canada? Ils existent depuis 30 ou 35 ans, c'est M. Duplessis qui les a obtenus de façon démocratique, et on vit avec cela.

En ce qui concerne la Loi sur la santé, si le Québec faisait des choix différents de ce que le gouvernement fédéral veut imposer comme normes nationales, est-ce que ce serait de la sédition de faire cela parce que, à ce moment-là, on ne respecterait pas la volonté du gouvernement fédéral? Il n'y a pas de fin à cela. Il faut absolument que cette motion soit battue clairement. Sinon, les partis qui auront voté en faveur porteront leur choix comme étant une façon de diminuer la qualité du débat démocratique au Canada. Je pense que cela est inacceptable et que cela n'est pas voulu ni par les Québécois ni par les Canadiens en général. Parce s'il y a quelque chose qui fait un système politique fort, c'est la qualité de sa démocratie. C'est ce qui fait qu'on respecte les choix et qu'on accepte les résultats obtenus.

Au référendum de 1995, le oui a obtenu 49,4 p. 100 du vote. Si on n'avait pas eu un système démocratique très fort, n'y aurait-il pas eu des tendances, quand on regarde comment l'indépendance de plusieurs pays s'est faite dans le monde, à dire que le résultat n'était pas fiable, que tous les choix n'étaient pas pertinents? Non, ce n'est pas ce qu'on a fait. On a tous eu une attitude d'acceptation des résultats, et je pense que les Québécois ont bien montré la qualité de leur choix démocratique et la volonté d'avoir une vie démocratique intéressante.

Je trouve également que, dans cette motion, et je dois faire part d'une expérience personnelle, on est très loin du genre de contact que je peux avoir eu avec les Canadiens.

L'année passé, par exemple, je suis allé donner une conférence au Club Rotary à Edmonton. On a eu un échange avec des gens qui étaient des fédéralistes, des Canadiens convaincus, des gens qui croyaient dans l'avenir du pays. On a eu des échanges très francs sur notre vision et sur la leur. On a parlé, probablement même de la question de l'armée. Mais personne parmi les Canadiens qui étaient là n'a dit que j'étais séditieux parce que je disais que le Québec, par la suite, respecterait les accords internationaux, aurait une petite armée et s'assurerait que les gens qui ont développé une expertise dans l'armée puissent continuer de le faire au sein de l'armée du Québec s'ils en avaient la volonté. On n'a pas, nulle part, demandé que l'armée se soulève contre le gouvernement canadien. On est dans la grande romance.


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(1805)

Il faut quand même faire attention à quelque chose là-dedans. Il ne faut pas que ça se répète. Au fond, c'est un peu de la manipulation d'informations que de monter en épingle des situations comme celles-là. Il y a un vieux principe qui dit que, à force de répéter quelque chose qui n'est pas vrai, on peut finir par faire croire à des gens que c'est vrai. Dans ce sens, le Parlement devrait lancer un message clair. Il devrait aussi être lancé par tous les députés du Parlement qui regardent une situation comme celle-là et qui, de fait, prennent connaissance du communiqué.

Et on peut parler en termes de droit. En termes de droit, pour que quelque chose nous soit reproché, il faut que ça ait eu un effet quelque part. En avez-vous vu un, militaire francophone du Québec, qui s'est levé et qui a décidé qu'il voulait soutenir le gouvernement du Québec? Je ne sais pas pourquoi il aurait fait ça, parce que le gouvernement a accepté le résultat tel qu'il est. Donc, il n'y a aucun fondement à la proposition sur la table. C'est assez étonnant.

Si c'était devant un juge, comme on l'a d'ailleurs fait au civil, je pense que le juge aurait dit qu'il n'y a pas matière à un tel jugement. Je pense que c'est ce que la Chambre devrait également porter comme jugement. On est un peu un grand jury ici, par rapport à cette situation, et on se fera accuser de ne pas avoir fait notre travail comme du monde si on prête le flanc à cela. C'est dans ce sens que l'amendement des libéraux m'apparaît très fade. Il faut utiliser un vocabulaire qui soit parlementaire, mais c'est une position, disons, mi-chair, mi-poisson.

Une voix: Vous avez dit «sage» ou «page»?

M. Crête: J'ai dit «fade».

Le président suppléant (M. Kilger): Je comprends que tout le monde veut, à un certain moment, participer au débat, mais j'espère qu'on le fera d'une façon très parlementaire.

M. Crête: Monsieur le Président, je suis bien conscient que votre commentaire ne s'adressait pas nécessairement à moi et je vais continuer le débat de la façon la plus adéquate possible.

Il y a aussi le précédent, dans l'utilisation de cette clause du Règlement. C'est une utilisation très inadéquate, parce que quand on crie au loup, la fois suivante, si jamais il y avait une vraie situation, elle ne serait pas défendable. En étant conscient de l'importance de l'article invoqué, de la cause invoquée, on se rend compte que la clause concernée, l'accusation est importante, mais le fond de la cause, le contenu de la partie de la Couronne est terriblement faible. D'ailleurs, l'argumentation que les réformistes ont faite n'a à peu près pas porté là-dessus. Ils ont débattu de toutes sortes d'autres choses qui ont trait à leur perception du Québec, mais il n'y a pas vraiment de fond dans cette situation.

Donc, je pense qu'il sera important qu'on se sorte de ce débat, du moment qu'on aura complété la liste des orateurs, qu'on passe à autre chose, qu'on se remette au travail sur des éléments qui concernent vraiment les Québécois et les Canadiens et qui vont faire que les gens sentiront que nous sommes des politiciens et des politiciennes qui font leur travail. De plus, nous nous donnerons une chance d'augmenter notre taux de popularité. Vous pouvez être sûr que ce n'est pas une proposition comme celle du Parti réformiste qui fera remonter le pourcentage de la cote de popularité des politiciens canadiens, qui se situe à 4 p. 100. Il faut qu'on démontre du sérieux. Il faut qu'on indique qu'on est prêts à parler des vraies choses.

Vous savez, mardi, on avait prévu une journée de l'opposition sur la réforme de l'assurance-chômage. J'étais très fier que ça se fasse. Qu'on prenne n'importe quelle décision en bout de ligne à ce sujet, au moins on parlait d'une chose à laquelle tout le monde est sensibilisé, de laquelle les gens nous parlent à chaque coin de rue dans nos villages. C'est une préoccupation constante qu'ils ont.

Est-ce que quelqu'un au Canada, sauf le Parti réformiste, s'est préoccupé au sujet d'une tentative séditieuse menée par un député de la Chambre des communes? Je n'ai pas entendu parler de ça nulle part. Personne n'a eu cette impression. Personne n'a crié au soulèvement possible. Ça n'a existé que dans l'esprit de certaines personnes et je pense qu'il est grand temps qu'on se sorte de ce débat.

Ce qui est également important là-dedans, c'est de voir que ce sont de vieux comportements, qu'on retrouve aussi dans un livre qui s'appelle Portrait du colonisé, où le colonisateur dans une société cherche souvent à mettre l'autre en situation de culpabilité, en situation de pénalité.

(1810)

On a fait cela dans les pays d'Afrique pendant la période de colonisation en disant que c'était la faute des Africains si le développement ne fonctionnait pas, que c'était à eux de voir pourquoi cela n'avait pas fonctionné. C'était dans leur pratique.

Il y a déjà un premier ministre du Canada, M. Pierre Trudeau, qui a dit que les Québécois, ce n'était pas sûr qu'ils pouvaient assumer correctement la démocratie de leur pays parce que ça leur prenait un gouvernement grand-frère à côté, un autre Parlement qui assurerait que l'avenir se ferait correctement. Ce sont de vieux trucs et, présentement, c'est le même truc qui est utilisé. Il est proposé par un parti d'opposition, mais il est également appuyé par le gouvernement quand il dit qu'il ne veut qu'amender la proposition et que ce soit renvoyé au comité.

Il ne faut pas oublier qu'en bout de ligne, ce qui est remis en question là-dedans, c'est la réputation d'un député de la Chambre des communes, de quelqu'un qui a fait sa job en pleine connaissance, avec la meilleur bonne foi, avec la volonté d'informer ses concitoyens sur les réalités du moment. Mettons-nous tout cela dans la tête, chacun de nous. Essayons de voir s'il n'y aurait pas une déclaration dans laquelle on a essayé d'informer les gens, de les convaincre d'une idée qui aurait pu être interprétée d'une façon ou d'une autre si on s'était mis hargneusement à trouver une explication, à savoir que cela n'était pas légal, que c'était un comportement inacceptable.

Si la Chambre adopte l'amendement des libéraux et si elle adopte la motion du Parti réformiste, eh bien, elle n'aura pas démontré suffisamment de respect envers le parlementaire concerné par la situation, parce que la gravité de l'accusation nécessite que la personne ne soit pas soumise à ce type de mise en accusation qu'à moins qu'il y ait certitude et fondement. Et présentement, personne ne nous a convaincus, d'aucune façon, qu'il y avait vraiment une cause dans la situation actuelle.


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En conclusion, je dirais qu'il y a sûrement aussi là-dedans un sentiment de malaise. Beaucoup de gens au Canada voient que le Québec est en marche vers son avenir et essaient de trouver une façon de l'arrêter. C'est un peu comme lorsqu'un adolescent devient adulte. Il veut quitter la maison, il veut voler de ses propres ailes, et les parents ont une réaction un peu craintive. En premier, ils essaient de contrôler son comportement par des arguments, et éventuellement par des menaces, telles «on ne t'aidera plus», etc.

Dans le cas présent, le Canada se rend compte que le Québec est décidé à assumer sa souveraineté et qu'il va le faire au cours des prochaines années. Et là, c'est comme une réaction un peu agressive qui vise à pénaliser. On en revient toujours à la vision du colonisé et du colonisateur; pénaliser, c'est un autre des trucs. Mais cela ne prendra pas, parce que le peuple québécois est rendu à un niveau de maturité politique qui dépasse ces situations. Il est au-dessus de ces situations.

Présentement, au Québec, on est en train de travailler très fort à ce qu'il y ait une réconciliation entre les anglophones, les francophones et les allophones pour s'assurer que le projet qu'on n'a pas réussi à mener à terme la dernière fois obtiendra une majorité suffisante la prochaine fois pour être réalisé. On aura pris deux, trois ou quatre ans de plus pour le réaliser, mais on aura eu les assises, on sera allé chercher les gens sur des arguments de fond. Et c'est ce qu'on souhaite.

Je pense que si les députés dans la Chambre ici veulent vraiment faire leur travail en tant que Canadiens qui croient au fédéralisme canadien, ce n'est pas par des mesures comme celles-là, des mesures qui vont provoquer beaucoup plus une réaction contraire au Québec, qu'ils vont réussir à faire leur travail. Qu'ils nous prouvent que le Canada peut se développer. Qu'ils nous prouvent qu'il pourrait y avoir une façon de faire différente dans le pays. Qu'ils nous prouvent que les Québécois pourraient avoir le contrôle sur leur développement pour être reconnus comme peuple, et là, les députés qui croient au fédéralisme canadien feront vraiment la preuve de ce qu'ils ont à apporter, soit qu'ils peuvent convaincre les Québécois que c'est le meilleur choix, et beaucoup plus que par des mesures négatives comme cette motion.

Donc, sans que ce soit au bout de cette motion que se décidera l'avenir du Québec, c'est quand même un des éléments que les Québécois mettront dans leur carquois. Rappelons-nous la période de la conscription.

(1815)

On peut se souvenir de 1982 avec la nuit des longs couteaux. On peut mettre cet événement dans la liste, c'en est un de plus. Si la Chambre fait un procès d'intention à un de ses députés qui a agi de bonne foi, on le mettra dans notre bagage et cela s'ajoutera au passif du Canada. Cela fera un élément de plus qui fera que les Québécois, en fin de compte, feront le choix d'être souverains, feront le choix de s'assumer comme peuple. Ils feront aussi le choix d'avoir un État démocratique dans lequel il n'y aura pas de geste comme le dépôt de cette motion, comme on l'a vu en cette Chambre.

[Traduction]

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, j'aurais aimé qu'il y ait des questions et observations. Au lieu de prononcer un discours, j'aurais bien aimé répondre à quelques observations formulées aujourd'hui par des députés.

Le député qui a pris la parole précédemment a dit que nous tentons d'empêcher le Québec de réaliser son avenir et que les Québécois ont atteint un niveau de maturité tel qu'ils ont presque pris la bonne décision. C'est comme s'il avait dit que les séparatistes persistaient à demander aux Québécois s'ils étaient mûrs pour la séparation mais que ceux-ci continuaient de donner la mauvaise réponse. Les séparatistes cependant continuaient de leur poser la question jusqu'à ce qu'ils obtiennent la bonne réponse.

Le député parle des Québécois comme s'ils avaient presque atteint le niveau de maturité nécessaire pour prendre la bonne décision. C'est la première fois que j'entends quelqu'un qui prétend représenter le Québec dire des électeurs québécois, qui ont envoyé le Bloc québécois ici à tort ou à raison, qu'ils n'ont pas la maturité voulue. En somme, le député les avertit qu'ils devront répondre correctement la prochaine fois. C'est très intéressant.

La question ici n'est pas de savoir si le Bloc québécois a posé une question vague concernant l'avenir des fonctionnaires dans un Québec indépendant, si jamais cela devait se produire. Les bloquistes n'ont pas dit: «Si, après un vote affirmatif au référendum et après avoir négocié avec le Canada pendant un an, comme nous avons promis de le faire, nous ne parvenons pas à une entente et si nous mettons le processus d'accession à l'indépendance en branle et que nous la réalisions, voilà ce que nous prévoyons faire au sujet des forces armées. Voilà les débouchés que nous entendons offrir aux Québécois qui ont une formation militaire et qui désireront faire partie des forces militaires d'un nouveau Québec. Voilà ce que nous entendons faire.»

Ce n'est pas ce que disait la lettre. Mon collègue de Macleod l'a dit bien clairement plus tôt aujourd'hui. La lettre ne concernait pas la situation qui prévaudrait après la séparation ou après la période de négociation, mais le lendemain même du vote.

Les séparatistes ont demandé ce qui suit à la population du Québec: «Nous vous demandons la permission de négocier pendant une période d'un an les modalités d'une nouvelle entente avec le Canada. Si nous ne parvenons pas à conclure une entente, nous envisagerons la souveraineté.» Ce n'est pas ce que dit la lettre.

Nous n'avons pas entendu d'explications de la part de l'auteur de la lettre. Il n'a pas dit: «Vous m'avez mal compris», ou encore «Je me suis mal exprimé dans la lettre. Voilà ce que je voulais vraiment dire.» La lettre était claire et sans ambiguïté. Elle disait: «Nous voulons que vous renonciez dès le lendemain à vos liens avec le Canada et que vous prêtiez serment d'allégeance au Québec.» Cela comporte des implications inquiétantes.

Plusieurs fois, les bloquistes ont a dit: «Nous allons unilatéralement prendre certaines décisions. Si vous ne faîtes pas ce que nous voulons que vous fassiez, nous n'allons pas assumer notre part de la


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dette». C'était là l'une des réelles menaces proférées par les membres de ce parti.

J'espère que les Québécois réfléchiront aux personnes qu'ils ont envoyées à Ottawa pour les représenter. Les députés du Bloc québécois disent qu'ils sont ici pour représenter les gens qui les ont envoyés ici, c'est-à-dire la majorité des Québécois. Le fait qu'ils aient ait dit que leur seul but était de représenter les rêves de séparation et de souveraineté du Québec est intéressant. Si c'est le cas et s'ils ont deux-tiers des sièges au Québec, alors que seuls 49 p. 100 des Québécois les appuient, peut-être les bloquistes sont-ils trop nombreux ici. J'espère que les Québécois prendront note de ce débat et que les habitants des circonscriptions où des élections partielles sont prévues, reconsidéreront les personnes qui devraient les représenter et défendre les véritables intérêts du Québec: ceux qui veulent les séparer du Canada par un tas de fausses promesses comme leur dire qu'ils auront toujours tous les avantages de la citoyenneté canadienne tout en habitant un pays indépendant, ou ceux qui viennent ici et reprochent leur manque de maturité à ceux qui n'ont pas obtenu les résultats escomptés au référendum. Je crois qu'ils font plutôt référence au manque de maturité de ceux qui les ont délégués ici à Ottawa.

(1820)

Les députés disent que cette motion est exagérée, qu'elle est hors de proportion et qu'aucune action n'a été commise qui exigerait que le député fasse l'objet d'un blâme. Une telle chose s'est-elle produite avant, voire récemment? A-t-il été déjà question à la Chambre d'outrage au Parlement?

C'est arrivé en février dernier, au début de la session. Le député de Glengarry-Prescott-Russell, le whip en chef du gouvernement, croyait qu'il se passait des choses au Parlement qui méritaient qu'on porte des accusations d'outrage au Parlement. Rappelons que le député du Bloc québécois a écrit aux militaires pour déclarer que, le lendemain du référendum, on attendait d'eux qu'ils prêtent allégeance au Québec, qu'ils l'appuient et qu'ils le protègent.

Comparons maintenant cela à ce que le gouvernement croit être un motif raisonnable pour porter des accusations d'outrage à la Chambre. Les libéraux disent que le député de Lethbridge avait eu l'audace de demander les opinions des électeurs du Canada et de faire part ensuite de ces opinions au Président de la Chambre. Comment peut-on oser agir de façon ouvertement démocratique en exprimant les opinions des électeurs à la Chambre? Comme c'est honteux! C'est du moins l'opinion des libéraux qui disent que c'est dégoûtant que le Parti réformiste ait demandé l'opinion des Canadiens. À quel point les libéraux croyaient-ils que c'était répréhensible? Ils croyaient que c'était très grave.

Dans notre motion, nous demandons que cette affaire soit soumise au comité pour examen. Nous avons précisé que nous voulions que l'affaire soit renvoyée au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, afin de voir si ce comité jugerait qu'il y a effectivement un problème exigeant que des mesures soient prises. Quelqu'un prétend que des membres des forces armées canadiennes devraient prêter allégeance à un nouveau groupe avant même que sa région soit séparée du Canada!

Le député du Parti libéral laissait entendre que ce que le Parti réformiste avait fait était tellement répréhensible que l'affaire ne devait même pas être soumise à un comité. que le député devrait être sommé de comparaître à la barre de la Chambre. Sans la moindre audience, le sommer de comparaître à la barre pour être admonesté par la Présidence. Je pense que les libéraux ont des priorités bien étranges.

Un de mes collègues a mentionné aujourd'hui, en détail, certaines des choses que les libéraux ont faites pour montrer qu'ils s'étaient ralliés au Bloc Québécois. Pourquoi être surpris qu'ils estiment qu'il soit pire pour nous de demander aux Canadiens leur opinion, que pour le Bloc Québécois de demander à certains membres des forces armées canadiennes de prêter allégeance à un autre gouvernement que celui du Canada?

Nous avons entendu un beau petit sketch à la «Mutt and Jeff», un peu plus tôt aujourd'hui, lorsque le député de Kingston-et-les-Îles a pris la parole et fait son petit cinéma avec un de ses collègues. Il parlait de la clôture et des raisons pour lesquelles nous nous plaignons tellement lorsqu'on l'invoque.

Je désire rappeler au député que son parti, lorsqu'il était de ce côté-ci de la Chambre, faisait exactement la même chose lorsque les conservateurs invoquaient la clôture. Pourtant, le gouvernement y a déjà eu recours trois fois plus que les conservateurs et nous n'en sommes encore qu'à la moitié du mandat douteux des libéraux. Je ne vais même pas prendre la peine d'expliquer pourquoi j'ai dit douteux. Les libéraux savent quelles promesses ils ont faites, et ils savent ce qu'est la réalité.

Une voix: Oh, oh.

M. Gouk: Je vois que «Jeff» est de retour. Je ne sais pas où est «Mutt», mais je suis sûr que «Jeff» va reprendre son sketch sans son partenaire.

Il n'y a pas longtemps, je demandais le consentement unanime de la Chambre pour supprimer les articles 78 et 57 du Règlement de la Chambre. Je suppose que cela a soulevé quelque émoi et que la gent libérale a rappliqué fissa. Ils sont arrivés de partout en criant: «Non, non, c'est impossible.»

(1825)

Pour les Canadiens qui regardent ce débat, ce que je demandais par consentement unanime, la suppression des articles 78 et 57 du Règlement, aurait dû faire plaisir au député de Kingston-et-les-îles. Je demandais la suppression les motions permettant d'invoquer la clôture. Les libéraux disent que le Parti réformiste se monte pour rien, qu'il n'est même pas prêt à produire suffisamment d'orateurs pour continuer le débat. Alors pourquoi cette objection lorsque nous demandons de retirer la clôture? Parce qu'ils savent qu'une partie de ce dont nous parlons touche à la démocratie dans cette Chambre.

C'est peut-être idiot de notre part de déclarer, malgré les quolibets de ces députés, que nous sommes préoccupés par le processus démocratique de la Chambre. Or, selon le processus démocratique de la Chambre, le député peut disposer de son temps comme bon lui semble, comme tout un chacun. Mais voilà que les libéraux viennent y mettre leur grain de sel. Le député de Kingston-et-les-Îles a


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affirmé que le débat ne mènerait nulle part, que les libéraux allaient y mettre un terme. Ce faisant, le député s'est peinturé dans le coin, comme on dit. Il ne peut pas intervenir, car ce serait prolonger le débat au-delà du point où les libéraux ont prédit qu'il allait tourner court.

Il ne sert à rien de prolonger le débat, si les libéraux font la sourde oreille ou passent leur temps à dénaturer nos propos. Nous avons exposé notre point de vue qui est on ne peut plus clair. Les libéraux s'emparent de toutes les informations qui parviennent à la Chambre et s'emploient ensuite à les présenter à la population sous un jour défavorable. C'est précisément ce qu'ils ont fait quand ils ont commencé à laisser entendre que c'était plus grave de solliciter l'avis des Canadiens que de demander à nos soldats de prêter le serment d'allégeance à quelqu'un d'autre que le gouvernement au service duquel ils sont.

Pour quelle raison avons-nous déposer cette motion? Nous avons déposé cette motion parce que les Canadiens des quatre coins du pays ont réclamé cette intervention. Bien avant que cette affaire ne soit soulevée, je me suis trouvé dans la position peu enviable de devoir faire face à des électeurs de ma circonscription qui m'ont tenu à peu près ce langage: «Comme se fait-il que les bloquistes ne sont pas accusés de trahison? Comment peut-on accepter un Parlement où les deniers publics servent à admettre à cette Chambre démocratique des gens qui se répandent en injures contre le pays qui les rémunère? Leur ancien chef, maintenant qu'il a touché sa pension du Canada, n'a de cesse de promouvoir la cause de la séparation.» Comment puis-je expliquer à ces gens que c'est parce que nous sommes des démocrates que nous permettons à ces gens. . .

M. Duhamel: Parlons-en des pensions.

M. Gouk: Tiens donc, le député veut parler des pensions. Je sais qu'il va se jeter sur l'assiette au beurre. Cinquante-et-un ou cinquante-deux députés ici n'en feront rien, mais il va certes le faire. S'il veut parler des pensions, je serai heureux d'aborder longuement cette question avec lui.

Je dis à mes électeurs que, tant que notre Chambre sera démocratique, nous permettrons aux bloquistes de faire part de leur point de vue. Nous n'avons jamais essayé de présenter une motion se rapprochant ne serait-ce qu'un petit peu de celle-ci pour simplement reprocher aux bloquistes d'exprimer leur avis à la Chambre. Cette action est allée beaucoup plus loin.

Comme je l'ai dit au départ, si le Bloc avait simplement dit que dans un Québec indépendant, il y aurait des possibilités offertes aux militaires, nous ne saisirions pas la Chambre de cette motion. Cependant, les bloquistes ont fondamentalement prôné la désertion des militaires canadiens en leur demandant de prêter allégeance à quelqu'un d'autre que la Couronne à laquelle ils avaient prêté allégeance au départ. Les faits sont très clairs. Nous avons la lettre. Il ne s'agit pas d'une observation qu'un membre du Bloc aurait faite et qu'une autre personne aurait rapportée. Il est question d'une lettre en provenance de la Chambre.

Cela exige une enquête. Contrairement aux libéraux, nous ne disons pas qu'il faut passer outre à l'enquête, qu'il faut condamner le député avant que quiconque ait examiné cette question, comme ils voulaient le faire, car nous avons demandé aux Canadiens leur opinion. Nous voulons simplement qu'on enquête là-dessus et ce, de façon ouverte. Nous croyons que les actions du député de Charlesbourg posent de graves problèmes.

(1830)

Nous pensons que ces actions doivent être considérées comme séditieuses, mais nous n'avons jamais affirmé que c'était un acte de sédition. Nous avons dit plutôt que, selon nous, on devrait considérer cela comme de la sédition, et nous croyons certes que c'est un outrage à la Chambre.

En tant que tel, nous considérons qu'il s'agit d'un outrage au Parlement. Ainsi, nous demandons qu'un comité permanent de la Chambre examine toute cette question.

Des voix: Oh, oh.

M. Gouk: Nous entendons toutes sortes de personnes parler de l'autre côté. Il sera intéressant de voir si ces gens vont intervenir et traiter eux-mêmes de cette question ou s'ils veulent simplement, comme je l'ai dit tout à l'heure, continuer à utiliser le temps d'autres députés. Je le répète, les libéraux ont une bien étrange notion de la démocratie.

Le président suppléant (M. Kilger): Peut-être est-ce en raison de la distance, mais je vois plus d'un député en train de parler. Pour éviter toute confusion, j'accorde la parole au député de Kootenay-Ouest-Revelstoke.

M. Gouk: Monsieur le Président, pendant un instant, j'ai cru que le duo Mutt and Jeff s'était transformé en trio ou en quatuor. Ils ne m'ont pas donné le texte de mes répliques, mais ils semblent savoir les leurs par coeur.

Mais assez à ce sujet. Maintenant que les Canadiens peuvent entendre les députés, je suis convaincu qu'ils commenceront à exprimer leur opinion. S'ils ont de véritables idées, je suis sûr qu'ils nous en feront part. Sinon, j'imagine qu'ils continueront d'essayer d'enterrer ceux qui ont la parole.

La motion est importante parce qu'elle traduit ce que nous disent les Canadiens de tout le pays. Lorsque je parlais avec des gens qui défendaient le droit des bloquistes d'exprimer leur opinion à la Chambre, je leur disais qu'ils en avaient effectivement le droit. Cependant, avec cette lettre, le Bloc est allé trop loin.

Il y a des gens qui pensent qu'une telle motion aurait dû être présentée il y a déjà longtemps. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il y avait là une zone d'ombre. Nous avons donné aux bloquistes le bénéfice du doute. Cependant, avec cette lettre aux militaires, ils ont passé les bornes. Il faut prendre des mesures. La population canadienne l'exige et les libéraux devraient être en faveur de soumettre la question à un examen et de prendre les mesures qui s'imposent.

Beaucoup de libéraux ne veulent pas qu'on porte l'affaire devant le comité, mais préféreraient qu'on la mette seulement en veilleuse, comme cela se produit avec les questions controversées. Soumettons l'affaire à un comité puis discutons-en à nouveau à la Chambre

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et prenons les mesures appropriées. Ne nous contentons pas de la renvoyer à un comité qui l'oubliera immédiatement et pour toujours. Il faut se pencher sur cette question et il faut le faire dans les formes.

Si nos vis-à-vis-qui sont calmes pour l'instant, je me demande comment cela se peut-ont un argument à faire valoir, j'aimerais qu'ils le fassent. S'ils ont quelque chose d'intelligent à dire, qu'ils le disent. Je m'en voudrais de rater la seule fois où cela s'est produit.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, si je me réfère aux propos tenus dans cette Chambre par bon nombre des députés du troisième parti, j'ai l'honneur de vous informer que vous avez devant vous une ennemie du Canada. Sauf que je me pose une question, et je suis sûre que vous vous la posez aussi; Où sont les véritables ennemis du Canada? Serait-ce, par hasard, celle qui ose croire en la souveraineté du Québec et qui respecte les règles de la démocratie, ou serait-ce ceux qui ne se gênent pas pour fouler au pied la démocratie, parce que c'est bien de démocratie qu'il s'agit?

La motion présentée par le Parti réformiste concernant le communiqué de presse de mon collègue de Charlesbourg est, en fait, une révocation de la liberté d'expression, premier accroc à la mise au rancart de la démocratie.

Cette motion dépasse de très loin les propos tenus dans le communiqué dont il est question. Le débat sur la présumée intention séditieuse de ce communiqué ne peut raisonnablement s'appuyer sur des articles de loi qui définissent ce qu'est la sédition, et peut encore moins raisonnablement s'appuyer sur les principes démocratiques que nous connaissons tous et que j'espère que nous respectons presque tous.

(1835)

L'article 59 du Code criminel définit l'intention séditieuse de la façon suivante: «. . .est présumé avoir une intention séditieuse, quiconque, selon le cas, enseigne ou préconise, publie ou fait circuler un écrit qui préconise l'usage, sans l'autorité des lois, de la force comme moyen d'opérer un changement du gouvernement au Canada.» C'est tout un programme.

De plus, à l'article 62 de ce même Code criminel, on traite de la sédition relativement aux forces militaires, à savoir qu'«encourager les militaires à l'insubordination, la déloyauté, la mutinerie ou le refus de servir est un acte de sédition».

Or, à sa face même, le communiqué de presse, vous en conviendrez, ne contient rien de tel. Aucun passage de ce communiqué ne peut justifier que cette question fasse l'objet d'un tel débat, et qu'en plus, elle soit référée au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

Le communiqué du député de Charlesbourg n'avait pour seul but que d'informer les militaires sur l'après-référendum advenant une victoire du oui, tout comme plusieurs communiqués de presse au cours de la campagne référendaire ont été émis concernant les fonctionnaires fédéraux.

De plus, la création d'une armée québécoise après l'accession du Québec à la souveraineté fait partie de l'argumentation du Bloc québécois, de celle du Parti québécois et a même été abordée par des spécialistes des questions militaires dans les grands quotidiens, notamment par M. Charles-Philippe David dans le journal La Presse.

Par ailleurs, les tentatives d'un avocat montréalais, Me Tyler, d'intenter des recours devant des cours du Québec et de l'Ontario se sont soldées par des échecs. Selon les tribunaux, rien dans ce communiqué ne donne ouverture à une accusation de sédition.

Nous pouvons donc être à même de se demander quelle est la véritable intention du Parti réformiste en présentant cette motion. Est-ce vraiment le respect de la loi qui motive le Parti réformiste? Je ne le crois pas.

À la lumière des interventions des réformistes entendues dans cette Chambre au cours des derniers jours sur cette question, il est de plus en plus clair, aux yeux des Québécois et des Canadiens de bon sens, qu'à travers cette comédie, c'est le procès du Bloc québécois et du projet souverainiste que l'on veut faire. À preuve, les propos tenus hier par le député de Kootenay-Est: «L'activité séditieuse du Bloc est inacceptable. Ce parti atteint la limite tolérable. Il n'est pas permis d'aller plus loin. Certains Canadiens considèrent ceux qui voudraient retirer le Québec du Canada comme des ennemis du Canada.» Il y en a beaucoup, monsieur le Président, si on se fie à ce discours. Le député continue: «Je suis un de ces Canadiens, et je prends la parole en leur nom.»

L'objet profond de ce débat est donc celui de la liberté d'expression. Pour le Parti réformiste, les propos tenus par les souverainistes du Québec sont dans leur essence même des propos séditieux, je dirais même que l'existence même des souverainistes est pour eux une forme de sédition, d'où la présente motion. Plutôt que de participer d'une façon démocratique à la question de la souveraineté du Québec, ils préfèrent remettre en question ce droit fondamental qu'est la liberté d'expression.

Le débat référendaire d'octobre 1995 s'est tenu dans un climat démocratique exemplaire. En aucun temps, au Québec, le camp du oui ou le camp du non n'a cherché à nier à l'autre le droit de débattre de son option et chacun des camps a pu informer les citoyens sur ses positions.

Ainsi, en amenant cette motion, les réformistes veulent punir le député de Charlesbourg de s'être exprimé sur l'option qu'il défend. Son seul crime est de ne pas avoir la même vision que les libéraux et les réformistes sur l'avenir du Canada. Cette motion a donc pour effet de nier le droit à la libre expression des députés du Bloc québécois et par le fait même, celui des citoyens du Québec qui appuient la souveraineté du Québec.

Il est donc inquiétant qu'en cette Chambre, faisant partie de cette institution hautement démocratique qu'est le Parlement du Canada, on remette ainsi en question la liberté de parole, la liberté de défendre une position dans un cadre démocratique reconnu par l'ensemble des citoyens.

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Par leur amendement, les libéraux, de leur côté, préfèrent jouer à l'autruche en référant la question au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, plutôt que de défendre les principes démocratiques qui guident nos débats en société.

Cette stratégie ferait-elle partie du plan D, E ou F? Autrement, pourquoi menacer ceux et celles qui utilisent leur droit à la parole pour promouvoir la souveraineté de les traduire devant un comité pour les juger sur la légalité de leurs propos? Malgré les menaces de partition et autres propos incendiaires tenus par M. Stéphane Dion, jamais dénoncés d'ailleurs par le Parti libéral fédéral, et encore moins par le Parti réformiste, nous osons croire que ce Parlement va refuser de cautionner une motion qui sape de façon insensée le respect de la démocratie.

Il me semble que cette attaque sans précédent contre la liberté d'expression aurait mérité que les libéraux laissent de côté leur partisanerie et leurs plans alphabétiques pour défendre avec vigueur, comme nous le faisons, les fondements mêmes de nos règles démocratiques.

Le comportement du gouvernement libéral est inquiétant dans une société qui par ailleurs se targue d'être la championne des droits de la personne. En effet, si l'on suit la logique du Parti réformiste, toutes les personnes qui ont discuté de la création d'une armée québécoise dans un Québec souverain au cours de la campagne référendaire mériteraient d'être accusées de sédition. Ceci ne viserait pas seulement tous les députés du Bloc mais aussi les journalistes qui ont discuté et écrit sur ce sujet, et pourquoi pas ceux qui ont eu le culot de les lire ou de les regarder à la télévision.

L'interprétation que donne le Parti réformiste à la liberté d'expression ne met pas seulement en danger le droit de parole des souverainistes, mais aussi celui des Canadiens qui s'opposent d'une manière ou d'une autre à certaines politiques gouvernementales ou à certaines positions du Parti réformiste.

La motion présentée par le Parti réformiste n'est pas sans nous rappeler de sombres épisodes de l'histoire où la démocratie a été foulée. Qu'il suffise de rappeler le Chili de Pinochet, la Grèce des colonels ou encore l'Espagne de Franco.

Je voterai donc contre la motion du Parti réformiste, contre l'amendement des libéraux et contre le sous-amendement des réformistes.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'ordre adopté aujourd'hui, le sous-amendement est mis au voix et le vote par appel nominal demandé est reporté à 18 h 30, le lundi 18 mars.

La Chambre s'ajourne à 10 heures demain.

(La séance est levée à 18 h 43.)