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RAPPORT DISSIDENT ADJOINT AU RAPPORT SUR LES QUESTIONS RELATIVES À LA VIE PRIVÉE PRÉSENTÉ PAR LE COMITÉ PERMANENT DES DROITS DE LA PERSONNE ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES


Le Parti réformiste considère essentiel que le gouvernement fédéral participe au débat de plus en plus nourri que suscite l'impact de la technologie moderne sur le droit à la vie privée, et il a été heureux de contribuer à l'examen que le Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées a récemment fait de la question.

Le Comité a ainsi fourni aux Canadiens une occasion importante de participer au débat public. Toutefois, le Parti réformiste ne peut que se dissocier du rapport final que le Comité a produit à l'issue de cette étude parce qu'il ne fait pas une place suffisante à la diversité des opinions que les Canadiens de l'ensemble du pays ont sur la question.

Beaucoup de Canadiens jugent important de se doter d'une réglementation ou d'une loi qui tienne compte des intérêts concurrents que cette question complexe touche. De nombreux groupes, dont Industrie Canada, ont recommandé une approche «concertée» dans le domaines où le gouvernement et d'autres parties intéressées se partagent la compétence. Une telle approche ferait probablement appel à une certaine mesure d'auto-réglementation de la part des entreprises qui utilisent des renseignements personnels.

Au lieu de cela, le gouvernement a retenu, comme à son habitude, l'approche la plus simpliste et la plus sévère et a choisi de recommander de conférer tous les pouvoirs au gouvernement fédéral et, plus particulièrement, au Commissariat à la protection de la vie privée, dont il accroît ainsi considérablement le rôle et le champ de compétence au mépris apparent de ce que cela coûtera ou de l'efficience du processus que cela implique.

La Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) remplit déjà, semble-t-il, beaucoup des fonctions que l'on propose de confier dorénavant au Commissariat, mais le gouvernement a choisi de ne tenir compte ni de l'expérience dont elle pourrait le faire bénéficier, ni du rôle qu'elle pourrait jouer dans l'élaboration d'une réglementation.

Selon le gouvernement, le droit à la vie privée est sans rapport avec les droits que protège la CCDP parce qu'il n'est pas un lieu de discrimination au sens conventionnel de ce terme.

Par contre, si le gouvernement éliminait cette restriction de la définition des droits protégés par la CCDP, cette dernière pourrait alors s'attaquer à des violations bien réelles et actuelles des droits des citoyens. Cela permettrait de donner une suite plus équitable aux violations du droit à la vie privée. Et si le droit à la vie privée est un «droit inaliénable de la personne», comme le gouvernement le soutient, sa protection pourrait aussi relever du Commissariat.

Une autre des recommandations du Comité pourrait avoir des conséquences graves sur la délimitation des champs de compétence constitutionnelle des gouvernements fédéral et provinciaux. Faisant preuve d'un autoritarisme sans précédent en matière de protection du droit à la vie privée, le Comité a recommandé qu'à l'avenir, le fédéral ne partage plus ses données qu'avec les gouvernements provinciaux qui apporteront à leurs lois en matière de protection de la vie privée des modifications approuvées par le gouvernement fédéral, ce qui élargira considérablement le champ d'application de lois et de règlements conçus pour s'appliquer au gouvernement fédéral et aux organismes sous réglementation fédérale.

On ne peut que douter de la volonté du gouvernement fédéral de protéger vraiment le droit à la vie privée quant on sait qu'il refuse de respecter les droits de propriété. Après avoir pendant des années résisté aux pressions et refusé d'examiner la question des droits de propriété, pourquoi se dit-il tout à coup disposé à se charger exclusivement d'un droit connexe, le droit à la vie privée?

Plusieurs projets de loi trahissent un «fluage de la réglementation» et le mépris du gouvernement pour les droits de propriété et le droit à la vie privée.

En effet, le projet de loi C-68 affaiblit considérablement la protection des Canadiens contre la perquisition et les saisies, ce qui facilite aux agents de police l'accès à la propriété privée.

Le projet de loi C-71 autorise lui aussi la perquisition et les saisies sans mandat. Si ces deux mesures protègent encore les logements jusqu'à un certain point, le projet de loi C-76, Loi sur la sûreté des produits liés à l'eau potable va encore plus loin, aussi incroyable que cela puisse paraître. Cette mesure, qui réglemente l'embouteillage de l'eau potable, comporte des dispositions qui permettent même d'entrer sans mandat dans le logis d'un citoyen. Petit à petit, le gouvernement abandonne les droits et libertés historiques des Canadiens tout en essayant de s'arroger le droit de tout décider sous prétexte que des problèmes nouveaux et complexes, plus difficiles à cerner, le préoccupent.

Certains membres du gouvernement actuel accueillent par ailleurs avec sympathie les idées extrémistes avancées dans certains cénacles, prétendument au nom des droits des enfants. Ces idées, notamment l'abrogation de l'article 43 ou la primauté des droits des enfants sur ceux des parents, menacent la protection accordée aux enfants et aux familles jusque dans le sanctuaire privé qu'est le foyer familial. De telles atteintes aux droits pourraient détruire des institutions et une hiérarchie des relations humaines que les Canadiens tiennent pour acquises depuis longtemps.

Les atteintes à la vie privée que de plus en plus de mesures libérales rendent possibles envoient un message qui contredit les recommandations faites par le Comité à l'égard de l'éventail très restreint de sujets qu'il a examinés. Elles portent à croire que le gouvernement n'a pas de philosophie fondamentale intégrée qui tienne compte des priorités des Canadiens et traduise le respect dont ils s'attendent à ce que l'on fasse preuve à l'égard de leurs droits.

Le Parti réformiste se réjouit de voir le gouvernement participer au débat public sur les questions relatives à la protection de la vie privée. Il tient cependant à rappeler que le débat public vise à informer le gouvernement des opinions et des craintes des Canadiens.

À la lecture du rapport remis par les membres ministériels du Comité, cependant, le Parti réformiste recommande de laisser aux particuliers et aux entreprises la liberté et la responsabilité d'élaborer et d'appliquer des normes et des mesures qui répondent aux attentes des Canadiens.

Nous recommandons de reconsidérer la proposition fort singulière consistant à élargir considérablement le mandat du Commissariat à la protection de la vie privée afin d'en faire l'autorité réglementante en la matière.

Enfin, nous exprimons des réserves sur l'empressement avec lequel le rapport final a été produit, alors que le Comité aurait dû permettre un examen plus approfondi des propositions du gouvernement et de leurs conséquences. Le Parti réformiste espère que la consultation publique proposée dans les recommandations aboutira à des mesures qui répondront aux voeux et aux attentes du plus grand nombre possible de Canadiens.


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