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SECU Rapport du Comité

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La Commission des libérations conditionnelles du Canada et les circonstances entourant la mort d’une jeune femme

Introduction

Le 22 janvier 2020, Marylène Levesque, une femme de 22 ans, a été violemment assassinée dans une chambre d’hôtel située dans le district de Sainte-Foy, à Québec. Plus tard la même journée, Eustachio Gallese a avoué avoir commis le meurtre. Au moment du meurtre prémédité de Mme Levesque, M. Gallese purgeait une peine pour le meurtre au deuxième degré de sa femme, Chantale Deschênes, commis en 2004. M. Gallese avait obtenu une semi-liberté par la Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC) en mars 2019, soit plusieurs mois avant le meurtre de Mme Levesque. Il résidait à la Maison Painchaud, un centre résidentiel communautaire. Le 27 février 2020, M. Gallese a plaidé coupable à l’accusation de meurtre au premier degré de Mme Levesque et, le même jour, il a été condamné à une peine d’emprisonnement à perpétuité, sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans.

À la lumière de cette tragédie, la Chambre des communes a adopté la motion suivante le 5 février 2020 :

Que la Chambre : a) condamne la décision de la Commission des libérations conditionnelles du Canada qui a mené à la mort d’une jeune femme par un détenu alors qu’il était en semi-liberté en janvier de cette année; et b) donne instruction au Comité permanent de la sécurité publique et nationale de tenir des audiences sur cette affaire, y compris d’examiner les changements apportés par le gouvernement en 2017 au processus de nomination de la Commission, en vue de recommander des mesures à prendre pour veiller à ce qu’une tragédie de ce genre ne se reproduise plus jamais[1].

Avant la prorogation du Parlement le 18 août 2020, le Comité a tenu deux réunions à ce sujet : une le 10 mars et une le 12 mars 2020. Le 8 octobre 2020, le Comité a adopté la motion suivante :

Que, conformément au paragraphe 108 (2) du Règlement, le Comité entreprenne une étude de la Commission des libérations conditionnelles et des circonstances qui ont mené au décès d’une jeune femme, et que les témoignages et la documentation reçus par le Comité pendant la première session du 43e Parlement sur ce sujet soient pris en considération par le comité au cours de la session en cours[2].

À travers l’étude, entre le 10 mars 2020 et le 14 juin 2021, le Comité a entendu 18 témoins et tenu sept réunions aux fins de l’étude.

Le présent rapport contient quatre sections visant à décrire les faits liés à cet événement et à résumer les témoignages entendus :

  • 1) Introduction
  • 2) Chronologie des événements
  • 3) Description de la preuve
  • 4) Conclusion

Tous les membres du Comité tiennent à exprimer leurs sincères condoléances à la famille et aux amis de Marylène Levesque. La commissaire Anne Kelly du Service correctionnel du Canada (SCC) et la présidente de la CLCC Jennifer Oades leur ont aussi offert leurs condoléances lors de leur témoignage[3]. Cette tragédie a mis en lumière des préoccupations concernant les systèmes correctionnel, de libération conditionnelle et de justice, et les conditions des travailleurs du sexe au Canada. Le présent rapport vise à reconnaître ces préoccupations et à y répondre en formulant des recommandations, en plus de celles formulées par le Comité d’enquête conjointe quant aux changements nécessaires pour éviter de futures tragédies.

Chronologie des événements

  • 21 octobre 2004 – Eustachio Gallese assassine Chantale Deschênes[4].
  • 16 décembre 2006 – Eustachio Gallese est reconnu coupable de meurtre au second degré et condamné à la prison à perpétuité, sans possibilité de libération conditionnelle avant une période de 15 ans[5].
  • 26 mars 2019 – La CLCC octroie une semi-liberté à Eustachio Gallese.
  • 19 septembre 2019 – La semi-liberté d’Eustachio Gallese est prolongée par la CLCC pour une période de six mois, et sa demande de libération conditionnelle totale est refusée.
  • 22 janvier 2020 – Eustachio Gallese assassine Marylène Levesque
  • 3 février 2020 – La CLCC et le Service correctionnel du Canada (SCC) forment un Comité d’enquête nationale conjointe pour mener une enquête indépendante sur l’incident.
  • 27 février 2020 – Eustachio Gallese plaide coupable à une accusation de meurtre au premier degré relativement à la mort de Marylène Levesque et est condamné à la prison à perpétuité, sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans.
  • 21 janvier 2021 – La CLCC et le SCC présentent le rapport du Comité d’enquête nationale conjointe au Comité permanent de la sécurité publique et nationale.

Description de la preuve

1.      Décision de libérer Eustachio Gallese et de maintenir sa semi-liberté

La CLCC et le SCC ont tous les deux joué un rôle dans l’octroi de la semi-liberté de M. Gallese, même si leurs rôles sont distincts. D’ailleurs, Catherine Latimer, directrice exécutive de la Société John Howard du Canada, a précisé que la responsabilité était partagée entre la CLCC et le SCC. Voici son explication :

SCC est responsable de préparer les prisonniers pour leur libération conditionnelle, habituellement par l’entremise de plans correctionnels, et d’assurer le respect des conditions lorsqu’ils sont dans la collectivité, ce qui est établi par la Commission des libérations conditionnelles.
[…]
La Commission des libérations conditionnelles du Canada décide quand les gens devraient être libérés s’ils sont admissibles, quelles conditions s’appliquent à leur libération et si les libérations conditionnelles devraient être révoquées. Ce sont les décideurs. Ils dépendent énormément de SCC pour ce qui est des facteurs qu’ils doivent prendre en considération dans la prise de décisions[6].

Mary Campbell, ancienne directrice générale de la Direction générale des affaires correctionnelles et de la justice pénale de Sécurité publique Canada, a affirmé ceci :

La Commission des libérations conditionnelles du Canada est responsable de la prise de décisions, un point c’est tout. Une fois qu’elle a pris une décision au sujet d’un cas, celui-ci est transféré au Service correctionnel du Canada qui en assure la surveillance et la gestion, mais si quelque chose commence à dérailler ou si des changements s’imposent, il faut renvoyer le dossier à la Commission des libérations conditionnelles. La Commission n’a aucun rôle à jouer lorsque la personne se trouve dans la collectivité sous une telle surveillance. La Commission se fie aux renseignements que le Service correctionnel du Canada lui fournit. C’est fondamental pour bien comprendre l’affaire qui nous occupe[7].

Jennifer Oades, présidente de la CLCC, et Anne Kelly, commissaire du SCC, ont toutes les deux souligné que la sécurité du public est le critère primordial pour leurs organisations en ce qui concerne la gestion des délinquants, conformément à la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition[8].

Une semi-liberté est initialement accordée à Eustachio Gallese le 26 mars 2019. Lorsque cette semi-liberté lui a été accordée, la CLCC lui a imposé de nombreuses conditions, notamment « [i]nformer son agent de libération conditionnelle immédiatement de toutes ses fréquentations ou relations intimes avec les femmes (sexuelles et non sexuelles)[9] ». Le rapport du comité d’enquête explique que pendant qu’il était en semi-liberté, M. Gallese « [a fréquenté un] salon de massage pour fins sexuelles à plus d’une occasion, dont trois autorisées par son équipe de gestion de cas[10] ». Le rapport du comité d’enquête indique que ces visites « étai[en]t un facteur de risque contributif concernant l’incident étant donné les antécédents de violence conjugale du délinquant[11] ».

La décision de l’équipe de gestion de cas d’autoriser M. Gallese à fréquenter un salon de massage à des fins sexuelles a été critiquée par plusieurs témoins. En effet, Dave Blackburn, un ancien commissaire de la CLCC, a affirmé qu’il n’avait « jamais vu l’utilisation d’une telle stratégie pendant toute [s]a carrière[12] » et ne comprenait pas comment elle « aurait pu représenter une perspective de réinsertion sociale[13] ». Cette décision a également été dénoncée par Mme Kelly, qui a exprimé ceci :

Je veux être claire: le Service correctionnel du Canada n’approuve aucunement que les délinquants aient recours à des services sexuels. Travaillant au Service depuis 37 ans, je peux sans équivoque attester le fait que, en tant qu’organisation, nous n’appuyons absolument pas cela dans le cadre de la gestion des délinquants. Je me suis prononcée clairement à ce sujet dans l’ensemble de mon organisation.
Immédiatement après cet incident tragique, j’ai ordonné un examen à l’échelle nationale de toutes les stratégies de surveillance dans la collectivité pour veiller à ce qu’elles soient judicieuses, appropriées et conformes aux politiques et à ce qu’elles contribuent à assurer la sécurité du public[14].

Au moment de rendre leur décision initiale d’accorder une semi-liberté à M. Gallese, les commissaires de la CLCC ont pris en compte une longue liste de facteurs, y compris les observations formulées lors de l’audience, un rapport indiquant que les sorties sans escorte précédemment effectuées par M. Gallese s’étaient déroulées sans problème, le soutien de sa famille, ses antécédents criminels ainsi que l’achèvement d’un programme correctionnel, des résultats négatifs à des tests de dépistage, des évaluations du risque de récidive et des évaluations psychologiques, entre autres[15]. Lorsqu’elle expliquait le fonctionnement du processus décisionnel de la CLCC, Mme Oades a cité l’article 102 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, qui prévoit ceci :

La Commission et les commissions provinciales peuvent autoriser la libération conditionnelle si elles sont d’avis qu’une récidive du délinquant avant l’expiration légale de la peine qu’il purge ne présentera pas un risque inacceptable pour la société et que cette libération contribuera à la protection de celle-ci en favorisant sa réinsertion sociale en tant que citoyen respectueux des lois[16].

Le 19 septembre 2019, la CLCC a tenu une audience pour déterminer si la semi-liberté de M. Gallese devait être prolongée et si on devait lui accorder une libération conditionnelle totale. Sa demande de libération conditionnelle totale a été rejetée, mais sa semi-liberté a été prolongée par la CLCC. Selon le rapport du comité d’enquête, la fréquentation de salons de massage par M. Gallese « a longuement été discutée[17] » lors de l’audience, et les commissaires de la CLCC « ont interdit formellement toute fréquentation de ce type d’établissement et ont noté qu’ils comptaient sur l’équipe de gestion de cas qu’elle s’assure que ces activités ne se reproduisent plus[18] ».

Le rapport du comité d’enquête indique ce qui suit concernant les commissaires de la CLCC qui ont décidé de refuser la demande de libération totale de M. Gallese et de poursuivre sa semi-liberté :

[L]a Commission des libérations conditionnelles du Canada avait à sa disposition toutes les informations pertinentes et disponibles au moment des audiences, permettant une prise de décision judicieuse, et que celles-ci étaient de qualité. Le comité d’enquête n’a constaté aucune lacune par rapport à la conformité aux lois et aux politiques de la Commission des libérations conditionnelles du Canada ayant eu une incidence sur la prise de décision des commissaires[19].

Le rapport du comité d’enquête a toutefois souligné que la décision rendue par la CLCC le 19 septembre 2019 n’a pas reflété « l’intégralité de ce qui avait été dit à l’audience[20] ». Mme Oades a affirmé que des formations continues sur la rédaction de décisions seront offertes aux commissaires de la CLCC pour corriger la situation[21].

Malgré la conclusion du comité d’enquête, selon laquelle la CLCC n’a commis aucune erreur, deux témoins ont critiqué ou remis en question la décision de la CLCC de prolonger la semi-liberté de M. Gallese, tandis que d’autres ont soutenu qu’il s’agissait d’une décision adéquate et éclairée. Dave Blackburn, un ancien commissaire de la CLCC, a affirmé que la décision témoignait « à la fois d’un manque d’expérience et d’un manque de jugement[22] » par les deux commissaires de la Commission. Il a déclaré ceci :

À mon avis, on aurait dû révoquer immédiatement la semi-liberté, le temps que le Service correctionnel soumette plus d’informations sur cette stratégie. Ainsi, on aurait pu bien évaluer le risque. On aurait aussi pu assigner à résidence M. Gallese, en lui donnant seulement la permission d’aller travailler[23].

Un autre ancien commissaire de la CLCC, Michel Lafrenière, a également laissé entendre que les décideurs dans ce dossier n’avaient pas assez d’expérience.

Au moment où est survenu l’événement tragique qui nous réunit ici aujourd’hui, il n’y avait pas suffisamment de commissaires expérimentés à la Commission des libérations conditionnelles du Canada, l’obligeant à faire siéger des commissaires peu expérimentés dans des cas lourds, comme celui de M. Gallese. J’ai noté que, dans la première décision, les commissaires avaient 8 mois d’expérience et, dans la deuxième, 14 mois. C’est peu au regard de cas aussi complexes[24].

Pour sa part, Mary Campbell, une ancienne directrice générale du SCC, a plutôt appuyé les décisions prises par la commission des libérations conditionnelles, en affirmant que « [c]’est l’une des meilleures décisions que j’ai lues, et sachez que j’en ai lu pas mal[25] ». Elle a ensuite ajouté ceci :

Deux ans plus tard et environ 800 kilomètres plus loin, je suppose qu’on aurait peut-être pris une décision différente. Cependant, une fois de plus, la loi et les faits ont vraiment justifié la décision qui a été prise ce jour-là, et la Commission n’a pas manqué de tenir compte de la gravité de la situation.
[…]
Nous nous demandons comment les choses auraient pu être différentes ou qui aurait pu faire quelque chose de différent ou de mieux, mais, à mon avis, le problème en l’occurrence, ce ne sont pas ces deux décisions; c’est plutôt la surveillance de M. Gallese[26].

En ce qui concerne le moment où M. Gallese a obtenu une semi-liberté, Mme Oades a expliqué au Comité que la CLCC « ne [peut] pas accélérer le processus[27] ». Elle a souligné que la loi « fournit un cadre aux décisions des commissaires[28] », auquel s’ajoutent des outils d’évaluation des risques conçus par des experts de partout dans le monde[29].

2.      Surveillance d’Eustachio Gallese dans la communauté

Une fois qu’ils ont obtenu une libération conditionnelle, les délinquants continuent de purger leur sentence sous la surveillance du SCC dans la communauté tout en étant assujettis à des conditions, ce que Mme Kelly a qualifié d’important, « puisque les recherches montrent constamment qu’un processus de mise en liberté graduelle, structurée et surveillée constitue un moyen efficace de favoriser une réinsertion sociale sécuritaire et réussie[30] ». Le document 2019 Aperçu statistique : Le système correctionnel et la mise en liberté sous condition note en effet que « [l]e taux de récidive avec violence durant les périodes de mise en semi-liberté de ressort fédéral a été très bas au cours des cinq derniers exercices, s’établissant en moyenne à 0,2 %[31] ».

Après avoir obtenu sa semi-liberté, M. Gallese résidait à la Maison Painchaud, un centre résidentiel communautaire situé dans le district de Sainte-Foy de la ville de Québec. Une surveillance directe était exercée par un superviseur clinique embauché par l’établissement, et non par un agent de libération conditionnelle du SCC[32]. Le criminologue Philippe Bensimon a expliqué au Comité qu’il existe deux types de maisons de transition pour les délinquants en liberté conditionnelle : les centres résidentiels communautaires (CRC), comme la Maison Painchaud où résidait M. Gallese, qui sont « des maisons de transition provinciales ayant un contrat avec le fédéral[33] », et les centres correctionnels communautaires (CCC) qui « ont du personnel fédéral, c’est-à-dire des agents de libération conditionnelle fédéraux[34] » et qui sont « des maisons de transition très structurées avec un couvre-feu[35] ».

David Henry, criminologue et directeur général, Association des services de réhabilitation sociale du Québec, a précisé ceci :

Le succès des maisons de transition en matière de réinsertion sociale est indéniable. Une étude menée en 2014 par une étudiante de l’École de criminologie de l’Université de Montréal établit le taux de récidive, avec ou sans violence, à 1,25 % en cours de séjour[36].

Au sujet des CCC, M. Bensimon s’est dit d’avis que « [l]eur spécialité est de travailler avec des délinquants sexuels, des membres du crime organisé et des gens qui nécessitent un encadrement serré, ce que vous n’avez pas dans un CRC[37] ». Il a affirmé que selon lui, il n’y a pas suffisamment de CCC et qu’on avait décidé de placer M. Gallese dans un CRC « parce qu’il n’y a justement pas assez de centres correctionnels communautaires[38] », en plus de laisser entendre que « c’est une question monétaire[39] » parce que ça « coûte moins cher d’envoyer un détenu dans un CRC que dans un CCC[40] ».

M. George Myette, directeur exécutif de la 7th Step Society of Canada, a affirmé ceci : « Je ne crois pas que la surveillance par une tierce partie des personnes en liberté conditionnelle pose un risque indu pour la collectivité si les protocoles adéquats sont respectés et que la communication est claire entre tous ceux concernés[41]. »

David Neufeld, vice-président national et vice-président régional au sein de la Communauté de Service correctionnel Canada et la Commission des libérations conditionnelles du Canada (Ouest), Syndicat des employé-e-s de la Sécurité et de la Justice, a précisé ceci :

Concernant les ressources communautaires et la gestion des risques dans la communauté, il est absolument essentiel que nous établissions des partenariats avec divers organismes. Nous pouvons ainsi y diriger les délinquants qui ont besoin d'aide pour gérer les déficiences cognitives ou les facteurs qui déclenchent leur comportement criminel, afin qu'ils obtiennent l'aide dont ils ont besoin[42].

Dans le rapport du comité d’enquête, il est expliqué que la surveillance directe de M. Gallese au centre résidentiel communautaire Maison Painchaud était effectuée par un intervenant clinique, et que M. Gallese « avait confirmé à l’intervenant clinique [a]voir fréquenté un salon de massage[43] », et que « [o]utre la fréquence mensuelle approuvée par son équipe de gestion de cas, Gallese avait admis aux enquêteurs de police s’y être rendu parfois plusieurs fois par semaine[44] ». Le rapport d’enquête contient la conclusion suivante :

[L]a fréquentation par Gallese d’un salon de massage pour fins sexuelles lui avait permis de rencontrer la victime. La corrélation entre la fréquentation de tels lieux et cette rencontre qui s’était conclue par une relation sexuelle et affective, était un facteur de risque contributif concernant l’incident[45].

Le rapport a aussi souligné des « lacunes[46] » concernant la vérification des contacts avec les tiers par l’intervenant afin de faire des vérifications concernant les activités de M. Gallese[47].

Certains témoins ont affirmé que selon eux, la surveillance dans la collectivité qu’a reçu M. Gallese était problématique. Mary Campbell a d’ailleurs dit qu’« il y avait des lacunes dans la surveillance au sein de la collectivité; si ces failles avaient été corrigées, cette tragédie aurait pu être évitée[48] ».

En ce qui concerne les conclusions du rapport d’enquête, Mme Kelly a affirmé ceci :

J’ai travaillé comme agente de probation et comme agente de libération conditionnelle. Il est clair qu’il est absolument essentiel de corroborer ce que le délinquant dit. Il y a eu des manquements significatifs dans ce cas-ci[49].

George Myette, directeur exécutif de la 7th Step Society of Canada, a déclaré ceci :

Je peux seulement affirmer que même si, à bien des égards, prédire le comportement humain n’est pas une science exacte, il est improbable que cela se reproduise si on a recours à une évaluation, à une préparation et à une surveillance adéquates, de même qu’à un suivi s’appuyant sur des communications claires[50].

3.      Rapport du Comité d’enquête nationale conjointe

La CLCC et le SCC ont formé un comité d’enquête conjointe le 3 février 2020 afin de mener une enquête sur les décisions et les actions effectuées par les employés de la CLCC et du SCC relativement au meurtre tragique de Marylène Levesque. Le rapport du comité d’enquête conjointe a relevé plusieurs préoccupations concernant la surveillance de M. Gallese en collectivité effectuée par le SCC et ses partenaires. Le comité a formulé cinq recommandations à l’intention du SCC et aucune à l’intention de la CLCC.

De nombreux problèmes ont été relevés dans le rapport du comité d’enquête relativement à la surveillance de M. Gallese dans la collectivité par son équipe de gestion de cas, notamment :

  • l’incapacité de l’équipe de gestion de cas à évaluer adéquatement l’existence de signes précurseurs et de mettre en place des interventions pour gérer le risque;
  • la collecte de renseignements insuffisante au dossier de M. Gallese;
  • la décision d’autoriser M. Gallese à fréquenter un salon de massage à des fins sexuelles et l’omission de reconnaître le risque que ça imposait et d’intervenir;
  • le défaut de l’intervenant de vérifier auprès de tiers les renseignements fournis par M. Gallese;
  • la surveillance insuffisante des délinquants par le personnel de la Maison Painchaud et l’omission de cerner les risques élevés lors de conférences de gestion de cas;
  • la confusion entourant les rôles et les responsabilités du personnel des centres résidentiels communautaires et du SCC relativement à la surveillance des détenus dans la collectivité et les lacunes au chapitre des communications entre les deux organisations[51].

Le rapport d’enquête contient cinq recommandations à l’intention du SCC, dont :

  • des changements à la politique sur la collecte de renseignements liée à la gestion des délinquants pour s’assurer que tous les documents pertinents sont transmis;
  • des modifications aux politiques de gestion de la surveillance dans la collectivité afin de prévoir un mécanisme de contrôle de la qualité des contacts avec le réseau de tiers;
  • l’ajout d’une formation spécifique sur la violence conjugale à la formation initiale et au perfectionnement des agents de libération conditionnelle;
  • l’élaboration d’un nouvel instrument de conférence de cas; et
  • le retrait de la composante de surveillance directe accordée au centre résidentiel communautaire Maison Painchaud, pour être reprise par le SCC, ainsi que la révision des modèles de service offerts par les autres centres résidentiels communautaires présentement responsables de la surveillance directe des délinquants[52].

Le comité d’enquête conjointe n’a formulé aucune recommandation relative à la CLCC.

La présidente Oades a indiqué que des comités ont été constitués par le passé, en 2008 ou 2009 et 2012[53]. À l’égard du processus, elle a précisé ceci :

Lorsque quelque chose ne tourne pas rond, nous voulons savoir ce qui se passe et vérifier si nous pouvons faire quelque chose pour améliorer la situation.
[…]
Nous tentons de faire appel à des personnes qui connaissent nos activités et qui peuvent nous donner des conseils indépendants sur les choses qui ont mal tourné et sur les améliorations que nous pouvons apporter[54].

Suite à certaines questions sur les qualifications des membres de l’équipe du comité d’enquête et sur la composition de cette équipe, Mme Kelly et Mme Oades ont affirmé que les coprésidents de l’enquête étaient des professeurs de criminologie n’ayant aucun lien avec la CLCC ou le SCC, et qu’ils étaient soutenus par un enquêteur national du SCC, qui est un ancien directeur régional; par une autre personne du SCC qui était directrice adjointe des opérations; et par un employé de la CLCC[55].

Michel Lafrenière s’est dit préoccupé du fait que le comité d’enquête ne soit pas considéré comme étant suffisamment indépendant des organismes sur lesquels il devait enquêter :

Le problème que pose ce type d’enquêtes, c’est la perception du public. Elles donnent l’impression d’être des enquêtes uniquement internes, qui ne visent qu’à enquêter sur l’organisation. Je verrais d’un bon œil qu’il y ait aussi une enquête externe, ne serait-ce que pour rassurer la population et pour montrer que l’enquête est faite en toute indépendance.
Je ne critique pas le travail qui a été fait, je critique plutôt la perception à cet égard[56].

En réponse aux conclusions du rapport du comité d’enquête, Mme Kelly a expliqué que le SCC avait pris certaines mesures, comme :

  • « le renforcement de nos processus et de nos politiques en matière de collecte de renseignements[57] »;
  • la révision de la politique du SCC sur la surveillance dans la collectivité et l’élaboration d’un gabarit pour encadrer la réévaluation du risque que présentent les délinquants, incluant les contacts avec les tiers, qui doivent faire l’objet de discussions lors des conférences de cas[58];
  • la prise des mesures pour « adopter un seul modèle de surveillance dans la collectivité pour les délinquants sous responsabilité fédérale[59] »;
  • que la Maison Painchaud ne superviserait plus de délinquants fédéraux et que les contrats conclus avec des centres résidentiels communautaires au Québec seraient examinés « dans le but de ramener sous la responsabilité du Service [SCC] toutes les fonctions liées à la surveillance directe des délinquants sous responsabilité fédérale[60] ».

Elle a expliqué que le SCC avait élaboré un « plan d’action » afin de mettre en œuvre les recommandations du rapport du comité d’enquête[61].

Afin de pallier le manque de personnel responsable de la surveillance des délinquants dans la collectivité, Philippe Bensimon recommande que l’on « quadruple les agents de libération conditionnelle du fédéral dans la communauté et qu’ils aillent rencontrer les détenus dans les maisons provinciales[62] ».

4.      Processus de nomination, composition et structure de la commission des libérations conditionnelles du Canada

Le Comité a été informé que les commissaires de la CLCC sont nommés en postes à temps plein ou à temps partiel pour une durée déterminée. Mme Campbell a expliqué que les commissaires sont nommés pour un mandat fixe de trois ou cinq ans, et que certains voient leur mandat renouvelé alors que d’autres, non[63]. Elle a d’ailleurs déclaré ceci :

En effet, la loi exige que sa composition soit à l’image de la collectivité. Cela signifie différentes origines ethniques, différentes races, différentes identités sexuelles, différentes expériences de vie, et le tout se fait à l’échelle régionale. Les commissaires sont affectés à une région donnée[64].

Elle a affirmé que dans certains cas, le mandat d’un commissaire prend fin parce que la CLCC doit refléter la diversité de chaque région[65]. Mme Oades a précisé que les commissaires ont « des bagages variés : ils ont de l’expérience en criminologie, en droit, en services correctionnels, en éducation, en psychologie, en travail social et dans le secteur privé, pour n’en nommer que quelques-uns[66] », en plus d’ajouter ceci :

Ces dernières années, la Commission des libérations conditionnelles a apporté des changements à ses effectifs pour mieux refléter la diversité de la population canadienne : 53 % de ses employés sont des femmes, 7 % sont issus de minorités visibles et 12 % sont des Autochtones. Quelque 95 % des commissaires détiennent un diplôme universitaire, 64 % ont une expérience directe dans le domaine de la justice pénale, et 32 % ont une expérience directe dans le domaine des services correctionnels et de la mise en liberté sous condition[67].

Des témoins se sont dits préoccupés par la composition, le processus de nomination et la charge de travail de la CLCC. D’ailleurs, M. Bensimon a expliqué que le nombre de commissaires affectés aux cas de meurtre a diminué au fil du temps et a recommandé de rétablir le nombre de trois commissaires pour chaque cas de meurtre[68].

M. Lafrenière a affirmé que la CLCC « [e]st à peu près la seule organisation qui est incapable de garder ses membres les plus expérimentés et qui se voit constamment imposer de nouveaux commissaires, comme si elle était dotée d’une porte tournante ou de postes avec siège éjectable[69] ». Il a précisé que sa propre nomination n’a pas été renouvelée en 2018 et a signalé ses préoccupations à l’égard du taux de roulement parmi les commissaires et des répercussions de celui-ci sur le niveau d’expérience des commissaires :

Je vais maintenant vous parler de ce qui s’est passé un peu plus récemment. De 2015 à 2017, aucun mandat de commissaire n’a été renouvelé, ce qui a provoqué un manque de commissaires et une importante surcharge de travail, au point où la sécurité du public a parfois été mise en danger. Par la suite, en 2017-2018, il y a eu une arrivée massive de nouveaux commissaires. La Commission des libérations conditionnelles du Canada possède, bien entendu, un bon plan de formation pour les nouveaux commissaires : elle se déroule deux semaines à Ottawa et trois semaines dans les régions. Toutefois, cela demeure une formation de base, la suite s’acquérant au moyen d’une formation continue au fil des ans et par l’expérience acquise au quotidien. Je sais par expérience que cela prend entre 18 et 24 mois avant qu’un commissaire se sente à l’aise avec le système et devienne autonome. Pendant cette période, les nouveaux commissaires sont normalement encadrés, jumelés avec des commissaires cumulant 5, 10, 15, et même 20 ans d’expérience[70].

La présidente Oades a présenté le processus de sélection des commissaires :

Le processus pour devenir un commissaire de la Commission des libérations conditionnelles est ouvert à tous les Canadiens. Il est fondé sur le mérite. Il y a un processus de sélection, un examen écrit, des entrevues et des vérifications des références.
Je peux dire avec certitude que les noms que je transmets au ministre aux fins d'examen sont tous hautement qualifiés pour devenir d'excellents commissaires de la Commission des libérations conditionnelles.
[…]
Ensuite, leurs vice-présidents régionaux respectifs, d'autres commissaires expérimentés de la Commission des libérations conditionnelles et des formateurs font du mentorat auprès d'eux, et les encadrent. Absolument aucun commissaire ne se voit confier de responsabilités décisionnelles avant d'avoir terminé sa formation et d'avoir la pleine confiance de son vice-président régional[71].

Mme Oades a en outre affirmé que les changements à la composition de la CLCC sont fréquents :

[À] chaque changement de gouvernement, la composition de la Commission des libérations conditionnelles change beaucoup.
Pour ce qui est de l’expérience, il y a un roulement régulier. C’est en partie parce que la loi prévoit des nominations de trois ans. Il faut près de six mois à une année avant qu’un commissaire soit tout à fait prêt à se prononcer dans l’ensemble des dossiers. Il y en a de toutes les sortes.
Il est vraiment exceptionnel qu’une personne possède 10 ans d’expérience en tant que commissaire. Ce n’est pas une carrière. Ce sont des nominations de trois à cinq ans, et il y a donc un roulement constant. J’ai 21 nominations qui prendront fin cette année. Certaines personnes voudront reconduire la leur, et d’autres, non, et je vais recruter de nouveaux commissaires[72].

Mme Oades a aussi précisé que les commissaires ont « une charge de travail complète[73] » et a dit souhaiter voir une augmentation du nombre de commissaires passer de 78 (nombre de commissaires en poste en mars 2020) à 90[74].

5.      Formation offerte par la Commission des libérations conditionnelles du Canada et le Service correctionnel du Canada

Même si les employés du SCC et des CRC respectaient leurs qualifications et leurs exigences respectives en matière de formation, des écarts importants ont été cernés au niveau de la qualité de la formation requise pour les intervenants cliniques des centres résidentiels communautaires par rapport aux agents de libération conditionnelle du SCC, et aucune formation récente ou continue en matière de violence conjugale n’était offerte aux intervenants du SCC[75].

Selon les conclusions du rapport d’enquête, la surveillance directe des délinquants par le CRC Maison Painchaud n’était pas du même niveau que celle effectuée par le SCC. Les intervenants du CRC recevaient moins de formation et ne bénéficiaient pas du même niveau de supervision clinique que les agents de libération conditionnelle[76].

En ce qui concerne la CLCC, le comité d’enquête affirme dans son rapport que les commissaires ont respecté la loi et les politiques au moment de prendre leurs décisions et disposaient des renseignements et de la formation nécessaires pour prendre des décisions éclairées.

Le comité d’enquête a constaté que, dans son ensemble, la Commission des libérations conditionnelles du Canada avait à sa disposition toutes les informations pertinentes et disponibles au moment des audiences, permettant une prise de décision judicieuse, et que celles-ci étaient de qualité. Le comité d’enquête n’a constaté aucune lacune par rapport à la conformité aux lois et aux politiques de la Commission des libérations conditionnelles du Canada ayant eu une incidence sur la prise de décision des commissaires. Le comité d’enquête a constaté que les commissaires ayant pris part aux décisions de mise en liberté sous condition les 26 mars 2019 et 19 septembre 2019 étaient conformes à toutes exigences de formation de la Commission des libérations conditionnelles du Canada et disposaient d’un niveau de connaissance nécessaire pour exécuter leurs tâches. Le comité d’enquête est d’avis que le plan de formation de la Commission des libérations conditionnelles du Canada pour les nouveaux commissaires était complet et bien structuré[77].

Des témoins ont abordé les processus pour former et superviser les nouveaux commissaires de la CLCC et les agents de libération conditionnelle du SCC et ont proposé des améliorations à ces processus. Des témoins ont aussi évoqué des moyens d’améliorer la formation continue offerte aux commissaires de la CLCC.

5.1    Formation offerte par la Commission des libérations conditionnelles du Canada

En ce qui concerne la formation offerte aux nouveaux commissaires de la CLCC, Mme Oades a affirmé qu’il faut compter « près de six mois à une année avant qu’un commissaire soit tout à fait prêt à se prononcer dans l’ensemble des dossiers[78] ». Sylvie Blanchet a décrit en détail la formation suivie par les nouveaux commissaires :

Les commissaires passent tous quelques semaines dans la région pour comprendre ce que sera leur travail. Ils observent les audiences. Ils rencontrent les autres membres de la Commission et le personnel. Ils viennent au bureau national. Nous y faisons venir des experts sur les délinquantes, les condamnés à perpétuité, les délinquants sexuels, les délinquants violents et nous leur présentons notre cadre d’évaluation des risques. Ils apprennent comment fonctionne l’évaluation des risques. Ils retournent dans les bureaux communautaires à travers le pays et y poursuivent leur formation.
Une fois cette formation initiale de cinq à six semaines terminée, le vice-président détermine s’ils peuvent ou non commencer à voter sur des cas spécifiques. Au début, on peut leur confier des cas de semi-liberté, mais pas de cas plus difficiles. C’est un processus progressif. Ils sont jumelés au vice-président ou à un autre commissaire qui a de l’expérience.
En dehors de cela, nous avons une formation continue. Des aînés nous donnent une formation intensive axée sur les Autochtones. Habituellement, pour les commissaires francophones, cela se fait à Montréal, et dans l’[o]uest pour les autres. Pendant trois jours, avec les communautés autochtones, les commissaires apprennent à connaître la notion des déplacements, les répercussions qu’ont sur la communauté ces déplacements et les arrêtés importants, comme ceux de Gladue et de Twins, en fonction desquels ils seront appelés à prendre des décisions.
Ensuite, il y a une formation régionale continue. Martin [van Ginhoven] est le directeur général régional et son bureau est responsable de cela, avec la vice-présidence.
Il arrive que des membres du personnel de Service correctionnel du Canada viennent nous parler des programmes. Nous visitons des maisons de transition. Nous rencontrons des membres de la Société John Howard. Nous avons aussi notre formation annuelle, qui consiste en une semaine intensive sur l’évaluation des risques à l’intention des commissaires. La formation est continuelle.
Si, à un moment donné, un vice-président nous dit qu’un commissaire a des préoccupations concernant un autre type de délinquant ou qu’il y a de la difficulté à prendre une décision, nous nous réunissons avec l’équipe et nous le faisons venir[79].

Mme Oades a également mis l’accent sur le rôle de surveillance des vice-présidents :

Essentiellement, aux termes de la loi, les vice-présidents doivent veiller à ce que les commissaires dans leur région soient bien formés et respectent le code de conduite de la Commission. Ils sont responsables de leur mentorat et de leur encadrement afin de garantir qu’ils prennent toutes les décisions nécessaires. Ils sont responsables de l’évaluation annuelle que nous faisons de tous les commissaires. Les vice-présidents peuvent observer ou au moins écouter certaines audiences. La première vice-présidente et moi recevons toutes les deux ces évaluations pour les examiner[80].

Dans son rapport, le comité d’enquête affirme que les commissaires de la CLCC impliqués dans les décisions liées à la libération de M. Gallese avaient tous suivi la formation requise[81].

Le rapport d’enquête ne contient aucune recommandation à l’intention de la CLCC[82]. Cependant, il contient ceci :

Quant à la décision rendue le 19 septembre 2019 et finalisée le 20 septembre 2019, le [Comité d’enquête] a constaté une disparité importante entre la décision qui a été partagée verbalement au délinquant à l’audience et celle écrite. La décision écrite contenait un résumé de plusieurs éléments pertinents. Cependant, les informations portant sur les permissions accordées à Gallese par l’équipe de gestion de cas de fréquenter des salons de massage pour fins sexuelles, ainsi que l’interdiction explicite des commissaires de fréquenter à l’avenir ces dits salons, tel qu’exprimée lors de l’audience, n’y apparaissent pas clairement. À la lecture uniquement de la décision écrite, celle-ci pourrait porter à confusion, car elle ne reflète pas l’intégralité de ce qui avait été dit à l’audience[83].

Dans son témoignage, Mme Oades a décrit les conclusions liées à la CLCC et les mesures prises pour y donner suite :

Le Comité d’enquête a conclu que les commissaires qui ont pris ces décisions avaient le niveau de connaissances nécessaire pour accomplir leurs tâches et répondaient à toutes les exigences de formation de la Commission; que notre plan de formation pour les nouveaux commissaires est bien structuré et complet; que les commissaires ont correctement appliqué la loi et ont clairement expliqué les raisons de leurs décisions, conformément à la politique de la CLCC; que les commissaires ont pleinement appliqué le Cadre d’évaluation du risque, comme stipulé dans la politique, dans les décisions prises en mars et en septembre 2019; que la CLCC disposait de tous les renseignements pertinents et disponibles pour prendre des décisions judicieuses; que les commissaires ont respecté la loi et les politiques relatives à la prise de décisions; et que la décision écrite de septembre 2019 n’a pas entièrement reflété ce qui s’est passé lors de l’audience, bien que cette divergence n’a pas été considérée comme un facteur ayant contribué au décès de Mme Lévesque.
Dans ce cas, il est important de noter que le rapport reconnaît que les commissaires ont explicitement interdit au délinquant de visiter des salons de massage à des fins sexuelles. Bien qu’il n’y ait pas eu de recommandations pour la Commission, dans un souci d’amélioration continue et de prise de décisions de qualité, la Commission a offert des séances de recyclage sur la rédaction de décisions[84].

5.2    Formation offerte par le Service correctionnel du Canada et le centre résidentiel communautaire Maison Painchaud

Mme Kelly a expliqué que les agents de libération conditionnelle reçoivent 4,5 semaines de formation et peuvent suivre jusqu’à cinq journées de perfectionnement professionnel continu par année, et que l’accent est « beaucoup [mis] sur l’évaluation du risque[85] ». Toutefois, selon le rapport du comité d’enquête, la formation offerte aux intervenants du CRC n’était pas comparable à celle offerte aux agents de libération conditionnelle[86].

Le rapport du comité d’enquête mentionne qu’une formation spécifique sur la violence conjugale ne fait pas partie intégrante de l’apprentissage des employés du SCC[87], et recommande donc qu’une telle formation soit offerte[88]. Cette formation sera abordée plus en détail à la section « Violence envers les femmes et les travailleuses du sexe ».

Selon le rapport du comité d’enquête, la formation reçue par les intervenants du CRC n’était pas comparable à celle offerte aux agents de libération conditionnelle[89], et cette « disparité des exigences de formation » a été un facteur dans la détermination que la surveillance de M. Gallese « ne répondait pas aux exigences minimales d’une gestion de cas adéquate[90] ».

6.      Droits des victimes

Dans le cadre de l’étude sur la CLCC et les circonstances entourant la mort d’une jeune femme, le Comité a entendu des témoignages soulevant certaines inquiétudes par rapport aux droits des victimes dans le contexte du système correctionnel et des libérations conditionnelles.

Les considérations relatives aux droits des victimes font partie intégrante du droit canadien depuis le 23 avril 2015, lorsque la Loi sur la Charte des droits des victimes a reçu la sanction royale[91]. L’entrée en vigueur de cette loi a notamment permis d’octroyer aux victimes[92] d’actes criminels certains droits, comme le droit à l’information, à la protection, à la participation ainsi que le droit de présenter une demande de dédommagement, qui sont tous inscrits dans la Charte canadienne des droits des victimes (CCDV).

Selon le témoignage de Nancy Roy, une avocate qui défend les droits des victimes, l’arrivée de la CCDV n’a pas forcément engendré l’amélioration du traitement des victimes et de leurs familles. Ces dernières « sont peu informé[e]s des dangers[93] » et trop souvent « réduites au silence[94] ». Mme Roy a également fait état des circonstances lourdes en émotions auxquelles sont confrontées les victimes d’actes criminels et leurs familles :

Ces personnes [les victimes et leurs familles] doivent traverser le choc, le deuil et la médiatisation du drame qui les afflige, et elles n’y sont guère préparées. Un long processus judiciaire, souvent inconnu, s’ensuit. Ce processus arrive souvent quelques mois, voire quelques années, après le drame, et il vient les appauvrir, car la grande majorité doit assumer les frais liés au processus judiciaire.
Viennent ensuite la condamnation et l’incarcération de la personne qui a arraché un être cher à la famille et aux proches[95].

Selon Mme Roy, il est maintenant devenu indispensable que le processus judiciaire bénéficie d’une meilleure compréhension de « la portée de certains droits énoncés dans la Charte canadienne des droits des victimes[96] ».

Mme Roy a soulevé plusieurs préoccupations relatives aux droits des victimes lors de son témoignage, notamment l’absence d’une participation significative des victimes et de la communication d’information avec elles tout au long du processus judiciaire.

Selon Mme Roy, c’est son expérience avec la CLCC qui lui a permis de constater que les droits des victimes dans le processus du système correctionnel et des libérations conditionnelles demeurent très limités. Mme Roy a raconté ceci :

Quand j’accompagne des familles à la Commission des libérations conditionnelles du Canada, dont certaines depuis plusieurs dizaines d’années, je constate que, le seul droit qu’elles ont, c’est de lire une déclaration au commissaire. Souvent, cette déclaration est donnée au détenu. Cependant, ces familles n’ont pas le droit de poser des questions aux commissaires, elles n’ont pas le droit de donner une opinion et elles ont l’impression que leur présence n’est pas considérée. Elle l’est sûrement, mais je pense que les commissaires n’ont pas reçu de formation pertinente sur les enjeux de la violence et sur les conséquences des crimes sur ces familles[97].

À cet égard, Mme Roy recommande d’accorder une plus grande importance à la formation pertinente des commissaires de la CLCC quant aux enjeux de la violence et sur les conséquences que les crimes violents imposent aux familles des victimes[98].

Pour Mme Campbell, ce sont les limites législatives qui restreignent le rôle que jouent les victimes et leurs familles dans le contexte des audiences de libération conditionnelle. C’est pourquoi Mme Campbell a témoigné de l’importance d’apporter des modifications législatives afin de permettre une plus grande participation des victimes lors des audiences de libération conditionnelle :

Le rôle de la victime consiste à expliquer le préjudice subi et toute préoccupation qu’elle peut avoir au sujet de la sécurité. Son intervention ne vise pas à influencer la décision proprement dite. Cela s’apparente aux déclarations que font les victimes lors de la déclaration de la peine[99].

Mme Roy est d’avis qu’il faudrait « penser davantage aux proches des victimes, les consulter et entendre ce qu’ils ont à dire sur les répercussions du crime[100] ». D’après son témoignage :

[I]l va falloir que le système judiciaire au grand complet se tourne vers le droit de ces victimes et des potentielles victimes, qu’il ne faut jamais oublier. Que ce soit à l’échelon du système correctionnel ou à celui des libérations conditionnelles, ces personnes doivent être mieux considérées. Nous nous sommes dotés de la Charte canadienne des droits des victimes, mais malheureusement, pour la plupart des droits, comme le droit au dédommagement, on ne sait pas du tout à qui on peut s’adresser[101].

Au cours de leur témoignage respectif, Mme Roy et Mme Campbell ont proposé d’incorporer des séances de formation pour les commissaires de la CLCC et les employés du SCC.

Pour sa part, M. David Henry est d’avis qu’il ne faut pas sauter aux conclusions à l’égard du CRC Maison Painchaud:

Comme vous l’avez dit, c’est un cas très particulier. Or, il n’est pas toujours possible de généraliser à partir d’un cas très particulier. Cela fait 53 ans que la Maison Painchaud existe. Vous pouvez imaginer les milliers de résidants qui ont été hébergés et encadrés par la Maison Painchaud au cours de ces 53 années. À ma connaissance, en 53 ans, une seule personne a commis un meurtre pendant son séjour à la maison de transition: Eustachio Gallese[102].

Selon Mme Roy et Mme Campbell, des séances de formations devraient porter sur les effets néfastes engendrés par certains crimes violents à l’égard de la défense des droits des victimes. À cet effet, Mme Roy a relevé ceci :

À mon avis, les commissaires n’avaient pas les connaissances ni la formation adéquate pour déceler les signes avant-coureurs d’une violence pourtant annoncée. La formation sur le cycle de la violence et l’expertise des organismes auraient très bien pu servir à cette décision ou à la formation des commissaires[103].

Pour sa part, Mme Campbell a souligné l’importance de la recommandation d’offrir plus de formation sur la violence :

J’ai été choquée de lire dans le rapport que l’agent de libération conditionnelle n’avait pas de formation portant expressément sur la violence conjugale. Je pense que la recommandation est très solide et devrait être adoptée non seulement par Service correctionnel du Canada et les agents de libération conditionnelle, mais aussi par la Commission des libérations conditionnelles et ses membres.
L’éducation doit être à la fois initiale et permanente[104].

Finalement, afin de protéger les victimes, Mme Roy a suggéré qu’au lieu de miser sur une surveillance accrue du système de libération conditionnelle, on accorde une attention plus soutenue à l’évaluation des risques avant de procéder à une remise en liberté. Elle a décrit le problème ainsi :

Le problème se situe justement avant la libération, soit lors de l’analyse des risques. Cela prend une formation et des compétences professionnelles adéquates pour déceler les dangers potentiels. Je recommande donc certains changements urgents.
Premièrement, les décisions doivent être prises exclusivement en fonction de la protection des victimes ou des potentielles victimes lorsqu’il y a un doute ou une possibilité de préjudice ou de récidive.
Deuxièmement, il faut une plus grande formation des commissaires et des intervenants en matière de violence faite aux femmes, notamment en ce qui a trait aux cycles de la violence et aux effets sur les ressources du milieu. Il faut exiger, comme le fait le Barreau du Québec, dont je suis membre, et d’autres ordres professionnels, un nombre d’heures minimal de formation continue[105].

7.      Violence envers les femmes et les travailleurs du sexe

Des témoins ont souligné au Comité le rôle que le manque de considération à l’égard de la sécurité des femmes, et plus particulièrement les travailleuses du sexe, peut avoir joué dans les circonstances qui ont mené au décès de Mme Levesque. Ils ont aussi proposé des moyens d’améliorer la formation offerte afin d’aider les commissaires de la CLCC et les agents de libération conditionnelle à mieux comprendre les différents types de violence et les répercussions de la violence envers les femmes et les travailleurs du sexe. Des témoins ont également souligné la nécessité de consulter des femmes et des travailleurs du sexe dans le cadre de l’élaboration de cette formation.

De nombreux témoins ont abordé la question de la criminalisation du travail du sexe au Canada et ont avancé que la législation en vigueur contribue à mettre les travailleurs du sexe à risque, ou du moins pourraient l’avoir fait dans ce cas particulier.

7.1    Considération de la sécurité des femmes et des travailleurs du sexe

Selon Sandra Wesley, directrice générale, Stella, l’amie de Maimie, la violence envers les femmes n’est pas prise en considération adéquatement dans le système de justice pénale :

La violence contre les femmes est un phénomène qui est particulièrement malmené à chaque étape du système de justice pénale. Nous sommes solidaires d’un grand nombre de demandes des femmes qui subissent la violence de leur partenaire intime, le système de justice pénale n’étant tout simplement pas en mesure d’y répondre. Beaucoup d’hommes sont violents envers les femmes et seulement envers les femmes, et cela n’est pas pris en compte[106].

En ce qui concerne la décision d’autoriser M. Gallese à fréquenter des travailleurs du sexe, Mme Wesley a dit croire que la sécurité des femmes n’avait pas été adéquatement prise en compte :

La décision était principalement fondée sur son comportement avec les autres détenus en prison. Nous savons que les hommes qui sont violents envers les femmes, et uniquement envers elles dans un contexte intime et sexuel ont tendance à bien se comporter avec les hommes. Cela ne donne donc aucune idée de leur risque de récidive[107].

M. Myette a par ailleurs affirmé ceci : « [O]ù il est question de violence conjugale, doit être examiné encore plus minutieusement que toute autre forme de meurtre[108]. »

Mme Wesley a ajouté qu’on avait particulièrement ignoré les travailleurs du sexe dans cette situation :

Il semble assez clair que cet homme représentait un risque particulièrement élevé. Or, il a été jugé acceptable d’exposer les travailleurs du sexe à ce risque, alors que les autres femmes ne devaient pas être en présence de cet homme[109].

Mme Wesley a dit que la décision de la CLCC concernant M. Gallese « ne tenait aucunement compte de la vie des travailleuses du sexe[110] ». Elle a ajouté

[j]e dirais même que les objections de la Commission entourant l’achat de services sexuels par cet individu découlaient d’une impression générale que le travail du sexe est déplorable, et non du fait que les travailleuses du sexe sont des femmes qui pourraient être en danger si elles interagissent avec lui[111].

7.2    Formation concernant la violence envers les femmes et les travailleurs du sexe

Certains témoins ont affirmé qu’une formation accrue sur la violence envers les femmes, la violence conjugale et la violence envers les travailleurs du sexe était nécessaire pour les commissaires de la CLCC et les agents de libération conditionnelle. Le rapport du comité d’enquête contient la recommandation suivante :

Puisqu’une formation spécifique sur la violence conjugale, qui se veut essentielle à une bonne gestion du risque, ne fait pas partie intégrante de l’apprentissage des agents de libération conditionnelle, le comité d’enquête recommande au Service correctionnel Canada qu’une formation axée sur la violence conjugale soit intégrée dans le cadre de la Formation initiale des agents de libération conditionnelle (FIALC) ainsi qu’offerte pendant le Perfectionnement continu des agents de libération conditionnelle (PCALC)[112].

Voici les propos de Mme Campbell à ce sujet :

Les agents de libération conditionnelle vous diront qu’ils assument déjà une charge de travail beaucoup trop élevée, qu’ils manquent de temps et qu’ils ont énormément de rapports à rédiger. Ici encore, je pense que c’est un fait dont les parlementaires doivent tenir compte. Les agents disposent-ils des ressources nécessaires pour accomplir adéquatement leur travail? Nous savons qu’une part infime du budget de Service correctionnel du Canada, soit moins de 5 %, est affectée au côté communautaire, ce que je considère tragique. Il faut offrir plus de formation, particulièrement au sujet de la violence conjugale.
À dire vrai, si j’étais vous, je convoquerais de nouveau Service correctionnel du Canada dans quelques mois pour lui demander ce qui a été fait, si de la formation est offerte, ce qui a été mis en œuvre et quels sont ses plans afin de voir ce qu’il en est et le talonner à ce sujet[113].

Mme Josianne Grenier a ajouté qu’il est essentiel de prévoir une formation portant spécifiquement sur les travailleuses du sexe[114].

Lors de son témoignage devant le Comité à la suite de la publication du rapport du comité d’enquête, Mme Kelly a dit ceci :

Le Service va aussi mettre en œuvre une nouvelle formation sur la violence dans les relations intimes. Elle s’ajoutera à la formation actuelle sur l’évaluation du risque de violence conjugale et sera obligatoire pour tous les agents de libération conditionnelle et leurs superviseurs, afin de les assister dans l’évaluation et la gestion du risque que présentent les délinquants[115].

Mme Wesley a affirmé que son groupe est soulagé que l’on prévoie offrir une formation sur la violence conjugale aux agents de libération conditionnelle, mais a toutefois émis les réserves suivantes :

[C]ela ne règle pas les situations comme celle de Marylène Levesque, une travailleuse du sexe qui a été assassinée au travail, donc pas dans le contexte d’une relation avec un partenaire intime. Nous pensons que cela devrait être inclus. Quand j’ai entendu parler de cette formation, la première chose que j’ai pensée, c’est qu’évidemment, encore une fois, ils vont parler de nous sans jamais nous consulter sur ce qui devrait être dit dans cette formation et sur la façon dont cela devrait être mis en œuvre.
Je pense que cela dépasse la formation. Nous avons besoin de véritables changements de politique. Nous devons revoir les raisons pour lesquelles nous incarcérons les gens, ce que nous faisons avec eux pendant leur incarcération, la façon dont nous identifions ceux qui ne peuvent pas être réadaptés, et les conditions que nous pouvons leur imposer[116].

7.3    Criminalisation du travail du sexe

Mme Grenier et Mme Wesley ont toutes les deux abordé des questions plus larges entourant le travail du sexe et la protection des travailleurs du sexe mises en lumière par cette affaire. Elles ont souligné la nécessité de légaliser le travail du sexe au Canada. Mme Grenier a décrit l’importance d’assurer la sécurité de toutes les travailleuses du sexe :

Le meurtre de Marylène Levesque a été fortement médiatisé, d’abord parce qu’elle était une très belle blonde aux yeux bleus, mais aussi parce qu’il y avait un meurtrier et de potentielles lacunes institutionnelles qui sautaient aux yeux. Il y a cependant au Canada beaucoup de meurtres de travailleuses du sexe, qu’elles soient autochtones, racisées, trans ou en situation de pauvreté, qui ne reçoivent pas la même attention et pour lesquels on se donne peut-être moins la peine de chercher des responsables. Cela nous indique clairement qu’il y a forcément d’autres facteurs à évaluer si on est soucieux d’assurer la sécurité de toutes les travailleuses. L’un de ces facteurs est la loi qui encadre la prostitution, car force est de constater qu’elle n’atteint pas son objectif, qui est de protéger ces personnes[117].

Selon Mme Wesley, ce cas précis découle directement de la criminalisation du travail du sexe :

Dans le cas de Marylène Levesque, de nombreux éléments de l’histoire sont très manifestement attribuables à la criminalisation du travail du sexe. Prenons le fait que cet homme avait été le client d’un salon de massage à plusieurs reprises, et qu’on lui en avait interdit l’accès parce qu’il était violent. À ce moment, le salon de massage était dans l’impossibilité d’appeler la police ou la Commission des libérations conditionnelles étant donné que le travail du sexe est criminalisé. Appeler la police pour dénoncer un client violent signifie généralement que des personnes sont arrêtées, que d’autres perdent leur source de revenus, et que nos milieux de travail font l’objet d’une répression policière accrue. En tant que travailleurs du sexe, nous ne pouvons pas faire appel aux autorités. Si le salon de massage avait pu communiquer avec les services de police ou l’agent de libération conditionnelle la première fois que le délinquant a été violent à l’égard d’un travailleur du sexe, celui-ci aurait été renvoyé en prison et n’aurait pas eu l’occasion d’intensifier ses actes de violence jusqu’à l’assassinat de Marylène Levesque[118].

Mme Grenier a abordé d’autres raisons qui rendent la criminalisation du travail du sexe dangereuse pour les travailleuses du sexe :

La criminalisation des clients, premièrement, n’a absolument pas mis fin à la demande, pas plus qu’elle ne l’a diminuée, d’ailleurs. À vrai dire, elle met les travailleuses du sexe en danger, parce que les clients apeurés vont souvent les emmener dans des endroits plus isolés, où il n’y a pas d’aide disponible et d’où il est plus difficile de s’enfuir, au besoin. Cela les empêche aussi de prendre le temps de trier les clients avant de monter dans une voiture, parce que ceux-ci sont plus pressés.
À cela s’ajoute le fait que la Loi n’est pas souvent appliquée. Au Québec, par exemple, seulement 233 clients ont été accusés depuis 2014, ce qui revient à moins de 40 clients par année. On ne peut pas dire que cela ait un effet positif. Cela ne fait qu’empêcher les travailleuses du sexe d’augmenter leurs facteurs de protection.
C’est la même chose pour la criminalisation des tierces personnes qui pourraient tirer profit du travail du sexe. C’est d’ailleurs un aspect de la Loi qui a été déclaré inconstitutionnel par un juge ontarien, il y a moins d’un an[119].

Elle a ajouté ceci :

Par exemple, si Marylène avait pu recevoir son client au salon en présence d’une tierce personne à l’affût de la situation, on peut croire qu’elle n’aurait pas eu le temps de recevoir les 30 coups de couteau qui ont mené à sa mort, peu importe le passé de l’individu ou ses conditions de libération[120].

Mme Wesley a également déclaré :

Absolument rien n’indique qu’il y ait eu une quelconque réadaptation dans cette affaire. Je sais qu’il semble y avoir un désir de transformer la mort de la travailleuse du sexe en une sorte d’accusation du système de justice pénale, et d’avoir une approche plus répressive et punitive. Les travailleuses du sexe ne préconisent pas cela.
Nous sommes contre les approches carcérales et punitives, même pour les personnes qui nous font subir des actes de violence. Nous croyons à la réadaptation, non pas à tout prix, mais d’une manière constructive, intelligente et résolue, pour réduire au minimum l’incarcération et pour arriver finalement à un point où nous réduisons considérablement le nombre de crimes commis et la quantité de violence qui existe dans notre collectivité. Nous savons que la punition n’est pas la solution.
S’il vous plaît, n’utilisez pas nos morts et la violence que nous subissons pour faire avancer un programme visant à augmenter notre incarcération dans notre collectivité[121].

Mme Campbell a affirmé que, selon elle, le danger découlant de la législation actuelle entourant le travail du sexe doit être examiné. Elle a dit ceci :

Vous avez entendu d’excellents témoignages de deux travailleuses du sexe qui ont, selon moi, formulé des observations très utiles sur la manière dont les lois actuelles en matière de travail du sexe mettent réellement en danger un grand nombre de travailleuses. J’espère que vous et vos collègues du Comité de la justice vous pencherez sur les lois actuelles. Les observations que ces femmes ont faites étaient vraiment utiles[122].

8.      Programmes correctionnels et réhabilitation

Le Comité a entendu plusieurs témoignages portant sur la réadaptation des détenus et l’importance pour la sécurité du public d’offrir des programmes qui favorisent la réhabilitation progressive des délinquants dans les établissements correctionnels.

8.1    Préparer les détenus à l’aide de programmes de réhabilitation et de libération graduelle

M. Henry a souligné l’importance de la libération conditionnelle dans la réadaptation du délinquant :

Je pense que la libération conditionnelle est une mesure de réhabilitation sociale essentielle. Le fait d’offrir à quelqu’un une libération conditionnelle, de l’encadrement et de la supervision dans la communauté assure justement la sécurité de nos communautés. En effet, on peut évaluer la personne quand elle sort de détention et voir comment elle évolue dans la communauté. Si jamais elle se désorganise, si elle ne respecte pas son plan d’intervention, si elle ne s’implique pas dans sa réinsertion sociale, il est toujours possible de suspendre la libération conditionnelle.
La libération conditionnelle permet de protéger nos communautés. D’ailleurs, les statistiques sont assez éloquentes. Le risque de récidive d’une personne à qui l’on accorde une libération conditionnelle est moindre que celui d’une personne à qui l’on accorde une libération d’office, soit aux deux tiers de sa peine. Pour sa part, le risque de récidive d’une personne libérée d’office est moindre que celui d’une personne qui est maintenue en incarcération jusqu’à la toute fin de sa peine[123].

Selon le témoignage de M. Myette, la situation de M. Gallese est un exemple concret du manque de soutien accordé aux détenus avant leur libération. Il faudrait donc améliorer les programmes de réhabilitation et prévoir un processus plus graduel avant la libération des détenus :

Selon moi, il y a des mesures de sauvegarde qui peuvent être incluses ici, sans compter une libération plus graduelle.
Puisque j’ai été en établissement, je peux vous dire d’expérience que j’ai cru que mes problèmes étaient réglés dès que j’ai franchi le pas de la porte. C’est une fausse conception très courante chez nombre de délinquants, car leurs problèmes ne sont pas réglés. La vie vous frappe de plein fouet et beaucoup des difficultés que vous aviez avant votre emprisonnement sont toujours là.
[…]
[J]e crois que la préparation avant la libération est très importante. Il n’est pas seulement question des programmes du SCC offerts en établissement. J’estime que d’être exposé à la collectivité est vraiment un facteur clé[124].

Pour sa part, Mme Wesley a témoigné des lacunes évidentes au niveau de la réadaptation et de l’évaluation du risque dans le cas de M. Gallese[125]. Selon cette dernière :

[L]es premières erreurs dans cette affaire remontent à la toute première fois que cet homme a été arrêté pour violence contre des femmes et à chaque fois par la suite. D’après ce que nous avons vu dans le dossier, il a essentiellement été entreposé dans une prison pendant 15 ans, puis libéré sans aucune véritable réhabilitation. Nous ne croyons pas en une approche carcérale punitive. Nous croyons en une réhabilitation sérieuse et efficace et en la nécessité de trouver des moyens de veiller à ce qu’une personne qui a été incarcérée se trouve dans une situation différente le jour de sa sortie[126].

Selon M. Myette, une libération conditionnelle plus graduelle et une meilleure préparation des détenus purgeant de longues peines en vue d’un retour en collectivité pourraient bénéficier à plusieurs autres détenus :

[D]ans un établissement, surtout s’il s’agit de détenus purgeant une peine d’emprisonnement à perpétuité, les personnes deviennent en fait dépendantes. Leurs points de référence sont dans l’établissement. Le type de programmes dont ils bénéficient à peu d’importance s’ils n’ont pas de contact avec le monde extérieur. Cela ne veut pas dire que les problèmes qu’ils avaient au départ se sont réglés simplement parce qu’ils ont passé 10, 15, voire 20 ans, dans certains cas, dans un établissement. La véritable préparation a lieu quand la personne passe graduellement d’un établissement à sécurité maximale, où la majorité des peines d’emprisonnement à perpétuité commencent, à un établissement à sécurité minimale. La dernière période, surtout dans un établissement à sécurité minimale, est celle de l’exposition à la collectivité et à des bénévoles qui viennent pour l’aider à entreprendre son développement. C’est une question fondamentale, surtout si la personne a déjà eu des problèmes liés aux relations interpersonnelles. Évidemment, si la personne a un problème de dépendance, elle doit y remédier, ce qui fait que le processus doit commencer bien avant qu’elle puisse obtenir sa libération[127].

Lors de son témoignage, Mme Wesley a également soulevé certaines inquiétudes quant aux effets négatifs que cet incident pourrait avoir sur les futures libérations conditionnelles de personnes faisant partie de groupes marginalisés :

Je crains fort que l’une des conséquences de cette mesure soit de rendre plus difficile la libération conditionnelle des détenus. Nous savons que la majorité des personnes qui tentent d’obtenir une libération conditionnelle sont en prison à cause de la pauvreté, du colonialisme et du racisme. Nous savons que les Autochtones sont surreprésentés et que les Noirs sont surreprésentés. Est-ce que les actions de cet homme blanc vont conduire à des incarcérations plus problématiques pour les Noirs et les Autochtones? Cela nous inquiète beaucoup.
Nous avons besoin d’une véritable réforme, et pas seulement d’une formation et de déclarations contre l’industrie du sexe[128].

8.2    Formation des agents de libération conditionnelle

Plusieurs témoignages ont souligné l’importance du travail des agents de libération conditionnelle et des programmes de réhabilitation dans le processus de réinsertion des délinquants dans la société. Selon David Neufeld, il faut « veiller à consacrer du temps à ces délinquants et les rencontrer afin de les comprendre, de connaître leurs antécédents, de savoir ce qui les a poussés vers la criminalité et ce qu’il faut faire pour qu’ils ne récidivent pas[129] ».

Les témoignages de Stanley Stapleton, président national, Syndicat des employé-e-s de la Sécurité et de la justice, et de M. Neufeld ont illustré comment les agents de libération conditionnelle fédéraux sont souvent surchargés et comment les recommandations qu’ils formulent ne sont pas toujours prises en compte. Ces témoignages démontrent comment ces lacunes compromettent la sécurité de toute la société canadienne.

M. Stapleton a affirmé ceci à ce sujet :

Il ne fait aucun doute que les agents de libération conditionnelle fédéraux qui travaillent directement auprès des délinquants pendant leur incarcération jouent un rôle essentiel en présentant des recommandations sur les conditions de mise en liberté du délinquant, mais ce ne sont que des recommandations, en fin de compte. Cela dit, les agents de libération conditionnelle jouent un rôle essentiel dans la préparation des délinquants et la promotion de la sécurité publique, mais on n’en tient malheureusement pas toujours compte. On pourrait penser que les agents de libération conditionnelle ont plus de temps pour évaluer soigneusement les antécédents et la situation des délinquants violents, ceux qui ont commis un homicide, comme l’assassinat d’un conjoint. Ce n’est pas le cas. Dans les établissements correctionnels fédéraux, la charge de travail est extrêmement lourde, et on ne fait aucune distinction selon la complexité du dossier ou du passé violent du délinquant[130].

M. David Neufeld a exprimé ceci :

Il y a quelques années, les services communautaires de consultation psychologique offerts aux délinquants ont été parmi les services les plus touchés par les compressions. Comme vous pouvez l’imaginer, dans les cas très complexes qui nécessitent une intervention psychologique, nos besoins ne se limitent pas aux contacts importants avec les agents de libération conditionnelle et les agents de programmes correctionnels qui offrent des programmes aux délinquants dans la communauté. Nous avons d’autres besoins, notamment l’accès à des programmes de traitement de la toxicomanie en pavillon de ressourcement.
Ces éléments ont été supprimés en raison des nécessaires réductions de budget. Ces éléments sont absolument essentiels pour nos plans d’intervention en général et pour offrir aux délinquants l’aide dont ils ont besoin lorsqu’ils retournent dans la collectivité.
Essentiellement, par rapport aux activités du Service correctionnel du Canada, nous comprenons que les gens peuvent changer et que nous avons la responsabilité de gérer les risques et l’obligation d’en rendre compte. Cependant, nous avons besoin de ces ressources pour faire un suivi rigoureux afin de savoir comment le délinquant utilise son temps dans la collectivité, peu importe la durée de son séjour et l’endroit où il habite — à côté de chez vous, de chez moi, de vos amis ou de votre famille —, veiller à ce qu’il reçoive l’aide dont il a besoin, savoir précisément ce qu’il fait, comment il utilise son temps et, évidemment, veiller à ce qu’il ne retombe pas dans ses schèmes de comportement criminel antérieurs[131].

Selon le témoignage de Mme Wesley, ce ne sont pas seulement les programmes de réhabilitation des détenus qu’il faudrait corriger; il faudrait également revoir les politiques des programmes de réhabilitation afin qu’elles appuient davantage le travail des agents de libération conditionnelle. D’après ce témoin, il serait souhaitable d’inclure dans les politiques « les raisons pour lesquelles nous incarcérons les gens, ce que nous faisons avec eux pendant leur incarcération, la façon dont nous identifions ceux qui ne peuvent pas être réadaptés, et les conditions que nous pouvons leur imposer[132] ».

Conclusion

Le meurtre aberrant de Marylène Levesque, une jeune femme dynamique de 22 ans, par un meurtrier condamné en semi-liberté au moment du meurtre, a révélé des lacunes entourant la gestion des délinquants dans la communauté par le système de justice pénale. Des témoins ont fait part de leurs préoccupations concernant la CLCC, la surveillance des délinquants dans la communauté par le SCC, la violence envers les femmes et les travailleuses du sexe et la réhabilitation des délinquants.


[1]              Chambre des communes, Journaux, 5 février 2020.

[2]              Chambre des communes, Comité permanent de la sécurité publique et nationale (SECU), Procès-verbal, 8 octobre 2020.

[3]              SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1535 (Mme Anne Kelly, commissaire, Service correctionnel du Canada); SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1540 (Mme Jennifer Oades, présidente, Commission des libérations conditionnelles du Canada).

[4]              Gallese c. R., 2009 QCCA 1071 (CanLII).

[5]              Gallese c. R., 2009 QCCA 1071 (CanLII).

[6]              SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0905 (Mme Catherine Latimer, directrice exécutive, Société John Howard du Canada).

[7]              SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 1710 (Mme Mary E. Campbell, à titre personnel).

[8]              SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 0845 (Mme Jennifer Oades) et 0855 (Mme Anne Kelly). Voir aussi Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20, art. 3.1 et 100.1.

[9]              Eustachio Gallese, Commission des libérations conditionnelles du Canada – Décision de l’audience – semi-liberté-pré-libératoire, 26 mars 2019, p. 2.

[10]            Service correctionnel du Canada et Commission des libérations conditionnelles du Canada, Comité d’enquête nationale conjointe Service correctionnel Canada–Commission des libérations conditionnelles du Canada sur la mise en liberté et la surveillance d’un délinquant en semi-liberté accusé d’un incident grave survenu à Sainte-Foy, Québec, le 23 janvier 2020 (Rapport du comité d’enquête), p. 4.

[11]            Rapport du comité d’enquête, p. 4.

[12]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0855 (M. Dave Blackburn, ancien commissaire à la Commission des libérations conditionnelles du Canada, à titre personnel).

[13]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0855 (M. Dave Blackburn).

[14]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1535 (Mme Anne Kelly).

[15]            Eustachio Gallese, Commission des libérations conditionnelles du Canada – Décision de l’audience – semi-liberté-pré-libératoire, 26 mars 2019, pp. 3-7.

[16]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 0930 (Mme Jennifer Oades); Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20, art. 102.

[17]            Rapport du comité d’enquête, p. 26.

[18]            Rapport du comité d’enquête, p. 26.

[19]            Rapport du comité d’enquête, p. 9.

[20]            Rapport du comité d’enquête, p. 101.

[21]            SECU, Témoignages, 2e session, 43législation, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1540 (Mme Jennifer Oades).

[22]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0915 (M. Dave Blackburn).

[23]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0915 (M. Dave Blackburn).

[24]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1615 (M. Michel Lafrenière, avocat à la retraite, à titre personnel).

[25]            SECU, Témoignages, 2session, 43législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1710 (Mme Mary E. Campbell).

[26]            SECU, Témoignages, 2session, 43législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1710 (Mme Mary E. Campbell).

[27]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 0910 (Mme Jennifer Oades).

[28]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 0905 (Mme Jennifer Oades).

[29]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 0905 (Mme Jennifer Oades).

[30]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 0900 (Mme Anne Kelly).

[32]            Voir : SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 0930 (Mme Anne Kelly).

[33]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0935 (M. Philippe Bensimon, criminologue, à titre personnel).

[34]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0935 (M. Philippe Bensimon).

[35]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0935 (M. Philippe Bensimon).

[36]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1705 (M. David Henry, criminologue et directeur général, Association des services de réhabilitation sociale du Québec).

[37]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0935 (M. Philippe Bensimon).

[38]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0850 (M. Philippe Bensimon).

[39]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0850 (M. Philippe Bensimon).

[40]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 1015 (M. Philippe Bensimon).

[41]            SECU, Témoignages, 2e session 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1610 (M. George Myette, directeur exécutif, 7th Step Society of Canada).

[42]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1725 (M. David Neufeld, vice‑président national et vice-président régional, Communauté de Service correctionnel Canada et la Commission des libérations conditionnelles du Canada (Ouest), Syndicat des employées de la Sécurité et de la Justice).

[43]            Rapport du comité d’enquête, p. 40.

[44]            Rapport du comité d’enquête, p. 40.

[45]            Rapport du comité d’enquête, p. 40.

[46]            Rapport du comité d’enquête, p. 74.

[47]            Rapport du comité d’enquête, p. 74.

[48]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1715 (Mme Mary E. Campbell).

[49]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1600, (Mme Anne Kelly).

[50]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1610 (M. George Myette).

[51]            Voir : Rapport du comité d’enquête.

[52]            Rapport du comité d’enquête, pp. 4-7.

[53]            SECU, Témoignages, 43e législature, 2e session, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1635-1640 (Mme Jennifer Oades).

[54]            SECU, Témoignages, 43e législature, 2e session, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1640 (Mme Jennifer Oades).

[55]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1710 (Mme Anne Kelly); SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1710 (Mme Jennifer Oades).

[56]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1700 (M. Michel Lafrenière).

[57]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1540 (Mme Anne Kelly).

[58]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1540 (Mme Anne Kelly).

[59]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1535 (Mme Anne Kelly).

[60]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1535 (Mme Anne Kelly).

[61]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1535 (Mme Anne Kelly). Voir : Service correctionnel du Canada, Plan d’action de la gestion, 18 janvier 2021.

[62]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0920 (M. Philippe Bensimon).

[63]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1735 (Mme Mary E. Campbell).

[64]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1735 (Mme Mary E. Campbell).

[65]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1735 (Mme Mary E. Campbell).

[66]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 0850 (Mme Jennifer Oades).

[67]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2021, 0850 (Mme Jennifer Oades).

[68]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 5, 12 mars 2020, 0955 (M. Philippe Bensimon).

[69]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1615 (M. Michel Lafrenière).

[70]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1615 (M. Michel Lafrenière).

[71]            SECU, Témoignages, 2e session, 43législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 0850 (Mme Jennifer Oades).

[72]            SECU, Témoignages, 2e session, 43législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 1015 (Mme Jennifer Oades).

[73]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 1035 (Mme Jennifer Oades).

[74]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 0915 (Mme Jennifer Oades).

[75]            Rapport du comité d’enquête, p. 80.

[76]            Rapport du comité d’enquête, p. 91.

[77]            Rapport du comité d’enquête, p. 9.

[78]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 1015 (Mme Jennifer Oades).

[79]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, (Mme Sylvie Blanchet, première vice-présidente, Commission des libérations conditionnelles du Canada).

[80]            SECU, Témoignages, 1resession, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 0950 (Mme Jennifer Oades). Le paragraphe 150(2) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition stipule que « [l]e vice-président rend compte au président de la conduite professionnelle des membres affectés à la section dont il a la charge, de leur formation et de la qualité de leurs décisions ».

[81]            Rapport du comité d’enquête, p. 116.

[82]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1540 (Mme Jennifer Oades).

[83]            Rapport du comité d’enquête, p. 101.

[84]            SECU, Témoignages, 2e session, 43législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1540 (Mme Jennifer Oades).

[85]            SECU, Témoignages, 1re session, 43e législature, Réunion 4, 10 mars 2020, 1005 (Mme Anne Kelly).

[86]            Rapport du comité d’enquête, p. 6.

[87]            Rapport du comité d’enquête, p. 6.

[88]            Rapport du comité d’enquête, p. 6.

[89]            Rapport du comité d’enquête, p. 7.

[90]            Rapport du comité d’enquête, p. 7.

[91]            La majorité des dispositions et modifications de la Loi sur la Charte des droits des victimes, y compris de la création de la Charte canadienne des droits des victimes (CCDV) et les modifications de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC), du Code criminel, de la Loi sur la preuve au Canada et de la Loi sur l’assurance-emploi, sont entrées en vigueur le 23 juillet 2015. Le reste des modifications apportées à la LSCMLC sont entrées en vigueur le 1er juin 2016 par décret en conseil.

[92]            Une victime est définie par l’article 2 de la Charte canadienne des droits des victimes (CCDV) comme étant un « particulier qui a subi des dommages – matériels, corporels ou moraux – ou des pertes économiques par suite de la perpétration ou prétendue perpétration d’une infraction ». Lorsqu’une victime est décédée ou incapable d’agir pour son propre compte, il est permis aux proches de la victime d’agir au nom de cette dernière aux fins de la CCDV. Il est permis, à l’article 3 de la CCDV, que l’époux de la victime, la personne qui vivait en union de fait avec la victime depuis au moins un an au moment de l’acte criminel, un parent ou une personne à la charge de la victime, ou quiconque ayant la garde de la victime ou d’une personne à la charge de la victime, de représenter la victime dans ses recours au titre de la CCDV.

[93]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1720 (Mme Nancy Roy, avocate-conseil et administratrice de conseil d’administration, à titre personnel).

[94]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1730 (Mme Nancy Roy).

[95]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1720 (Mme Nancy Roy).

[96]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1720 (Mme Nancy Roy).

[97]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1755 (Mme Nancy Roy).

[98]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1720 (Mme Nancy Roy).

[99]            SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1805 (Mme Mary E. Campbell).

[100]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1720 (Mme Nancy Roy).

[101]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1800 (Mme Nancy Roy).

[102]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1735 (M. David Henry).

[103]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1720 (Mme Nancy Roy).

[104]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1755 (Mme Mary E. Campbell).

[105]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1725 (Mme Nancy Roy).

[106]          SECU, Témoignages, 2session, 43législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1640 (Mme Sandra Wesley, directrice générale, Stella, l’amie de Maimie).

[107]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1625 (Mme Sandra Wesley).

[108]          SECU, Témoignages, 2e session, 43re législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1630 (M. George Myette).

[109]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1625 (Mme Sandra Wesley).

[110]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1625 (Mme Sandra Wesley).

[111]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1625 (Mme Sandra Wesley).

[112]          Rapport du comité d’enquête, pp. 85-86.

[113]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1755 (Mme Mary E. Campbell).

[114]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1645 (Mme Josianne Grenier, adjointe au développement, Projet Intervention Prostitution Québec Inc.).

[115]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 13, 25 janvier 2021, 1540 (Mme Anne Kelly).

[116]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1640 (Mme Sandra Wesley).

[117]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1610 (Mme Josianne Grenier).

[118]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1615 (Mme Sandra Wesley).

[119]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1610 (Mme Josianne Grenier).

[120]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1615 (Mme Josianne Grenier).

[121]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1655 (Mme Sandra Wesley).

[122]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1740 (Mme Mary E. Campbell).

[123]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1730 (M. David Henry).

[124]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1630 (M. George Myette).

[125]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1625 (Mme Sandra Wesley).

[126]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1640 (Mme Sandra Wesley).

[127]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 23, 14 avril 2021, 1630 (M. George Myette).

[128]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1640 (Mme Sandra Wesley).

[129]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1720 (M. David Neufeld).

[130]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1710 (M. Stanley Stapleton, Président national, Syndicat des employé-e-s de la Sécurité et de la justice).

[131]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1725 (M. David Neufeld).

[132]          SECU, Témoignages, 2e session, 43e législature, Réunion 14, 1er février 2021, 1640 (Mme Sandra Wesley).