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CIIT Rapport du Comité

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Rapport sur le voyage du comité au Brésil
Opinion supplémentaire du NPD
Peter Julian, député
(23 septembre 2009)

« Une nation ne peut  prospérer longtemps si elle favorise uniquement ses membres déjà prospères »
-Barack Obama

LE COMMERCE ÉQUITABLE SELON LE NPD

Le NPD réaffirme son engagement à l’égard d’une politique de commerce équitable. Par commerce équitable, nous voulons dire de nouvelles règles et ententes commerciales ayant pour but de promouvoir les pratiques durables, la création d'emplois locaux et les conditions de travail saines, tout en nous permettant de gérer l'approvisionnement en marchandises, de promouvoir les droits démocratiques à l'étranger et de maintenir notre souveraineté démocratique au pays. La justice sociale fait partie intégrante des pratiques commerciales équitables. Le commerce équitable repose sur des entreprises locales qui investissent dans leur communauté et contribuent à y maintenir la vie économique et sociale. Les droits des travailleurs et les droits environnementaux comptent parmi les valeurs fondamentales de ces entreprises, et grâce à eux, les travailleurs et les consommateurs peuvent faire des choix durables.

Dans la négociation d'accords commerciaux et la recherche de nouvelles relations commerciales avec d'autres pays, le Canada ne peut dissocier les droits de la personne, les droits des travailleurs et l'environnement des questions commerciales.

  • Comment promouvoir le commerce équitable :
    • Les nouveaux accords commerciaux doivent encourager activement l’amélioration des conditions sociales, environnementales et de travail et ne pas simplement minimiser les dommages causés par le commerce inéquitable.
    • Les politiques fédérales et provinciales des marchés publics doivent stimuler les industries canadiennes en permettant aux gouvernements d’accorder aux fournisseurs canadiens la priorité sur les multinationales étrangères.
    • Il faut reconnaître que les offices de gestion de l’offre et les organismes de vente à guichet unique comme la Commission canadienne du blé peuvent grandement contribuer à remplacer des produits importés par des produits canadiens.
    • Il faut maintenir et encourager les initiatives locales, communautaires et individuelles visant l’achat de produits locaux et de produits importés issus du commerce équitable.
  • Pourquoi le commerce équitable et non pas le libre-échange?
    • Les politiques en matière de commerce équitable protègent l'environnement en favorisant l'utilisation de biens produits à l'échelle nationale et locale (en réduisant le transport, on consomme moins de carburant, ce qui réduit les émissions de gaz à effet de serre) et en faisant la promotion de méthodes soucieuses de l'environnement auprès de producteurs qui exportent des marchandises au Canada. Les politiques relatives au libre-échange sont exactement le contraire de cela. Même celles élaborées en tenant compte de l'environnement font peu pour empêcher les multinationales de polluer sans vergogne. Par exemple, l'accord parallèle de l'ALENA portant sur l'environnement s'est avéré dans une large mesure inapplicable, surtout lorsqu'on le compare à d'autres mesures de protection prévues pour l'industrie et les investisseurs.
    • Le commerce équitable favoriserait la création d'emplois de meilleure qualité au Canada. Des règles de concurrence loyale et des normes de travail plus sévères permettraient aux entreprises canadiennes d'être sur un pied d'égalité avec nos partenaires commerciaux et de ralentir le nivellement vers le bas à l'échelle internationale qui a entraîné la perte d'emplois dans le secteur manufacturier canadien.  Les règles du libre-échange, par contre, nuisent à la qualité des emplois au Canada. Depuis 1989, la plupart des familles canadiennes ont vu diminuer leur revenu réel rajusté en fonction de l’inflation.
    • Le commerce équitable permet également de protéger les droits des travailleurs en favorisant la création de coopératives de travailleurs et de syndicats. Tout comme pour l’accord parallèle de l’ALENA sur l’environnement, il est impossible de mettre en pratique celui sur le travail, ce qui permet aux industries prêtes à violer les droits des travailleurs de transférer des emplois du Canada à l’étranger.  Les politiques de commerce équitable qui favorisent la création de coopératives de travailleurs et de syndicats et encouragent également la fixation de prix équitables, permettraient de protéger les travailleurs dans les pays en développement qui, autrement, seraient exploités. Ainsi, les producteurs canadiens n'auraient plus d'incitatifs pour exporter des emplois.
    • Des règles pour le commerce équitable protégeront aussi les sociétés et les droits de la personne partout dans le monde.  Certains ont prédit qu’un libre-échange sans freins serait bon pour les droits de la personne, mais nous n’avons encore rien vu.  Par contre, des conflits entre les populations locales et des multinationales dans des pays comme le Pérou (avec lequel le Canada met en œuvre un accord de libre-échange) ont tourné à la violence.  Une politique de commerce équitable destinée à bénéficier à toutes les parties peut protéger les plus vulnérables contre les abus des droits de la personne.

LE CANADA ET LE BRÉSIL : LA VOIE ÉQUITABLE VERS L’AVENIR

Les néo-démocrates reconnaissent qu’il est important d’étendre les relations économiques et coopératives avec le Brésil. Il faut toutefois les étendre de façon à favoriser une croissance durable, la création de bons emplois et le développement. Les relations commerciales que le Canada entretient avec le Brésil devraient tendre vers un équilibre entre un commerce bilatéral et pragmatique visant des créneaux précis dans les domaines des ressources naturelles, de l’agriculture, des sciences et de la technologie et une stratégie à plus long terme visant le développement d’un commerce équitable avec le Mercosur (le Marché commun du cône sud).  Cette stratégie à plus long terme aurait également l’avantage connexe d’inclure, outre celle du Brésil, la participation de l’Uruguay, du Paraguay, de l’Argentine et du Venezuela.

Sous l’ancien président George W. Bush, la politique commerciale américaine considérait le Mercosur comme une menace.  En comparaison, la politique canadienne devrait plutôt appuyer les priorités de Mercosur visant le développement dans le cône sud d’un marché commun régional offrant une sécurité commerciale et un bon soutien à ses membres. Le modèle et les objectifs de Mercosur contiennent des éléments de commerce équitable qui valent la peine d’être repris, notamment en ce qui concerne la reconnaissance d’une dimension sociale du commerce incluant la réduction de la pauvreté et la nécessité de promouvoir une intégration graduelle et durable de secteurs économiques clés afin de bâtir des économies à plus grande valeur ajoutée.

Comme l’a indiqué M. Piragibe dos Santos Tarragô, représentant adjoint du Brésil à l’ONU à l’occasion du lancement de la Journée internationale de la solidarité humaine :

« Mercosur a fait des merveilles pour réduire la pauvreté. En Argentine, le niveau de pauvreté est passé de 54 p. 100 à la fin de 2002 à 31 p. 100 au premier semestre de 2006. En Uruguay, il est passé de 32 p. 100 en 2003 à 30 p. 100 en 2005. Au Brésil, ce chiffre est passé de 28 p. 100 en 2003 à 23 p. 100 en 2005. De plus, le revenu de la moitié la plus pauvre des Brésiliens a augmenté deux fois plus vite que celui des 10 p. 100 les plus riches. » [Traduction]
 
http://www.un.org/esa/socdev/social/documents/BRAZIL.pdf

Contrairement au Mercosur, dans les trois pays membres de l’ALENA, l’augmentation des activités commerciales et des investissements a été accompagnée d’une hausse de la pauvreté. Depuis la mise en œuvre de l’Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, en 1989, les deux tiers des ménages canadiens ont vu leur revenu réel diminuer. La part du revenu total des 20 p. 100 les plus riches de la population approche maintenant 50 p. 100, ce qui laisse une part de plus en plus petite à leurs concitoyens. Il ne fait aucun doute que des accords de libre-échange comme l’ALENA ne profitent qu'aux riches. Depuis la signature de l'Accord et de l'ALENA, les Canadiens les plus pauvres ont vu leur revenu diminuer au point de perdre l'équivalent d'un mois et demi de salaire.  La situation est encore plus grave au Mexique et aux États-Unis. Plus de 97 p. 100 des nouveaux investissements effectués au Canada en vertu de l’ALENA n’étaient pas destinés à une véritable activité économique, mais plutôt à l’acquisition d’entreprises canadiennes par des multinationales étrangères.  Même si l’ALENA a facilité les mouvements de capitaux étrangers, les familles de travailleurs n’en ont pas récolté les bénéfices. Plutôt que la richesse et les nouveaux emplois à temps plein promis, les Canadiens ont constaté une érosion des emplois permanents et une tendance aux emplois temporaires et à temps partiel.  Les avantages sociaux et les fonds de pension disparaissent alors que les conditions de travail se dégradent. Les familles de travailleurs sont aux prises avec des dettes écrasantes, davantage de stress et une plus grande instabilité.

Au bout du compte, le soi-disant modèle de libre-échange rejette le commerce équitable et durable.  Grâce à la déréglementation et aux pouvoirs accrus accordés aux grandes sociétés au détriment de gouvernements démocratiquement élus, ce modèle permet à une poignée de puissantes sociétés de prendre le contrôle des échanges commerciaux bilatéraux, ce qui provoque une distorsion du marché. Le modèle de libre-échange porte donc mal son nom, car il trahit en fait l’essence même du libre-échange, les échanges commerciaux réalisés en vertu de ce modèle n’étant ni équitables ni libres.  Le modèle de l’ALENA s’est révélé remarquablement efficace pour favoriser et enraciner la domination politique et économique de grandes multinationales. Ce modèle est actuellement au cœur des initiatives d’élaboration d’accords bilatéraux de libre-échange.

Une nouvelle politique commerciale fondée sur un commerce équitable multilatéral ferait du Canada un chef de file sur la scène internationale plutôt qu’un suiveur aveugle d’un modèle commercial du 20e siècle éculé, désuet et inefficace.  Ce serait l’occasion rêvée d’entreprendre, encore une fois, un projet bien canadien : la reconnaissance de cet important lien entre la justice socio-économique et toutes les sphères de la politique gouvernementale.

C’est une nouvelle politique commerciale équitable, démocratique et progressiste de ce genre que le Canada devrait chercher à élaborer avec le Brésil, le Mercosur et nos partenaires d’Amérique latine.