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NDDN Rapport du Comité

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Processus d'acquisition et processus associés

Les freins et les contrepoids

Nous reconnaissons tout à fait qu’il y a un système de freins et de contrepoids en place qui régit le processus d’approvisionnement et que le ministère de la Défense nationale n’est pas livré à lui-même le moment venu de proposer des achats d’envergure. C’est donc le Conseil du Trésor qui, en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques, est autorisé à dicter la politique d’ approvisionnement. C’est cette même politique qui, à son tour, régit les approvisionnements ministériels. Travaux publics et Services gouvernementaux Canada est tenu d’assurer l’intégrité du processus d’approvisionnement. TPSGC, qui est l’organisme fournisseur du ministère de la Défense nationale depuis près de 70 ans, agit comme un centre d’autorité distinct en ce qui concerne la passation des marchés. Le ministère de la Défense nationale, en sa qualité de ministère responsable, veille à la définition des exigences opérationnelles ainsi qu’à la gestion quotidienne de ses acquisitions. Les deux sont secondés par Industrie Canada, qui administre la Politique des retombées industrielles et régionales, de concert avec les organismes régionaux : l’Agence de promotion économique du Canada atlantique, Diversification de l’économie de l’Ouest et l’Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international supervise les accords commerciaux qui encadrent l’approvisionnement au sein d’un régime de commerce international libéralisé. En revanche, les systèmes d’armes défensives et les mesures de soutien pour ces systèmes ne sont pas visés par l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) ni par l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

Dans la partie évaluation du processus d’approvisionnement, une fois que différentes entreprises ont présenté leurs soumissions, les aspects qui se rattachent au mérite technique, au prix et aux retombées industrielles et régionales dans les dossiers d’adjudication sont séparés de manière à ne pas avoir trop d’influence entre eux. Le ministère de la Défense nationale procède à l’évaluation technique, TPSGC étudie le prix et Industrie Canada examine le dossier d’adjudication. Après avoir été évalués, les trois volets sont réunis dans le but de déterminer l’entrepreneur qui présente la proposition la plus avantageuse au point de vue du mérite technique et du prix et qui est assortie d’un ensemble acceptable de retombées industrielles et régionales. L’entrepreneur qui est mécontent et qui considère que ce processus s’est déroulé injustement peut contester les résultats devant le Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE).

Cette séparation du pouvoir dans la passation des marchés a été jugée d’une importance capitale pour s’assurer que le processus soit non seulement équitable, mais également considéré équitable. Il y en a, cependant, qui déplorent l’absence, dans ces conditions, d’une voie hiérarchique claire, c’est-à-dire d’un particulier ou d’un organisme qui assume la responsabilité finale et qui puisse, par conséquent, être tenu directement responsable. Il est également important que l’industrie et le MDN utilisent des mesures du rendement claires et identiques pour trancher entre les concurrents. 

Bien que le Comité reconnaisse que le système actuel de division du processus d’ approvisionnement entre les ministères comporte d’excellents éléments, notamment le fait de servir de système de freins et de contrepoids entre les ministères, il comprend les raisons invoquées pour renoncer à un tel système, notamment les temps d’attente, une responsabilité ministérielle plus claire et un processus plus simple. Le Comité recommande donc :

  1. Que le gouvernement du Canada étudie des moyens de modifier le processus d’approvisionnement du ministère de la Défense nationale afin de réduire substantiellement les temps d’attente pour les grands projets d’immobilisations nécessaires à la sécurité nationale. Il devrait notamment se pencher sur l’opportunité d’un processus d’approvisionnement ministériel « maison » (c.-à-d. une agence d’approvisionnement pour le ministère de la Défense), d’un processus transparent et ouvert d’attribution des contrats à des fournisseurs exclusifs, le cas échéant, et d’un plus grand recours à des produits commerciaux lorsqu’ils conviennent.

Les perceptions

Même si nous convenons que la division des responsabilités est saine, il demeure que la population considère que l’industrie de la défense est trop étroitement liée au ministère en raison de la présence, parmi les lobbyistes, d‘anciens hauts gradés des FC. Nous ne suggérons pas d’interdire aux anciens membres des FC de travailler pour des firmes de lobbying qui défendent les intérêts du MDN ou pour des fournisseurs de ce dernier, mais nous craignons que l’image que se fait la population du processus d’approvisionnement soit tout à fait juste  Nous recommandons donc :

  1. Qu’au moment de l’attribution de grands projets d’immobilisations, le ministère de la Défense nationale expose clairement et publiquement les motifs pour lesquels certains entrepreneurs ont été préférés à d’autres, en se gardant évidemment de divulguer l’information confidentielle et classifiée.

L'ITAR

Une autre question qui a soulevé quelques inquiétudes est l’application de l’International Traffic in Arms Regulations (ITAR) aux États-Unis. Depuis les événements du 11 septembre, la principale pomme de discorde est l’application de plus en plus restrictive de l’ITAR par les exportateurs américains, en ce qui concerne l’accès des citoyens canadiens qui ont une autre nationalité. Le Départment d’État américain a commencé à limiter aux citoyens canadiens l’accès au matériel visé par l’ITAR et à en refuser l’accès aux citoyens canadiens qui ont une double nationalité avec un pays proscrit par les États-Unis. L’observation de ces restrictions irait à l’encontre de la Charte canadienne des droits et libertés et de la législation sur les droits de la personne, qui interdisent le traitement discriminatoire des citoyens canadiens, peu importe leur pays d’origine ou leur autre nationalité.

Des pourparlers entre le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI), le ministère de la Défense nationale et le Département d’État ont donné lieu à un accord selon lequel l’accès aux articles et aux services de défense exportés en vertu de l’ITAR sera accordé aux membres du personnel du MDN qui sont citoyens canadiens, y compris à ceux qui ont la double nationalité, qui ont un besoin de savoir et qui possèdent au moins la cote de sécurité de niveau secret. Le personnel du MDN englobe les membres des Forces canadiennes, les employés civils, les entrepreneurs intégrés ainsi que les employés d’autres ministères qui travaillent au sein du MDN.

Bien que nous soyons encouragés par cette première étape, nous croyons fermement qu’il faut en faire davantage afin de s’assurer que les droits des travailleurs canadiens sont protégés. L’accord devrait viser également tout citoyen canadien ou immigrant admis qui travaille pour le gouvernement ou pour l’industrie et qui possède les cotes de sécurité requises, telles qu’elles ont été déterminées par les normes et les procédures canadiennes.  Nous recommandons donc :

  1. Que le ministère de la Défense nationale et le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international poursuivent leurs discussions avec le Département d’État américain afin de mettre en place un système susceptible d’être considéré équitable pour tous les citoyens canadiens et les immigrants admis au Canada.

Les retombées industrielles et régionales

Nous ne cherchons pas ici à revoir l’ensemble du débat qui entoure les retombées industrielles et régionales; nous acceptons qu’elles fassent partie du processus d’approvisionnement et qu’elles soient favorables à nos intérêts économiques et industriels. Comme elles constituent un élément convenu de la façon de faire des affaires, il est important de les exploiter à notre avantage dans toute la mesure du possible.

Sur cette question, le Comité a entendu M. Ken Rowe, président et chef de la direction d’I.M.P. Group International Inc., qui a exprimé des inquiétudes au sujet des récentes pratiques de soutien en service (SES) des prochains aéronefs dont on fera l’acquisition.  Dont 4 aéronefs C-17 Globemaster, 17 aéronefs C-130J Hercules pour le transport aérien tactique et 16 hélicoptères de tonnage moyen-lourd Chinook CH-47. M. Rowe s’inquiétait des effets que les modifications récentes de la politique sur la prestation du SES auraient sur l’industrie aérospatiale canadienne. Il a fait valoir que la décision de confier directement aux constructeurs américains tout le soutien en service futur des aéronefs Hercules à voilure fixe et des hélicoptères Chinook causerait un tort considérable aux entreprises canadiennes capables d’offrir le même soutien[6]. Cette décision s’appuyait, évidemment, sur le nouveau principe de responsabilisation unique, qui rend l’entrepreneur responsable à la fois de la fourniture du matériel et de son fonctionnement à long terme, c’est-à-dire de la maintenance.

Le gouvernement était auparavant appelé à négocier séparément les contrats de licence pour l’ingénierie et les données – ce qui permettait aux entreprises canadiennes d’assurer un SES directement au MDN sans compter sur le fabricant. De l’avis de M. Rowe, cette pratique donnait la possibilité aux entreprises aérospatiales comme IMP et Spar de miser sur leurs capacités en matière de SES, de faire des affaires à l’étranger et de créer des milliers d’emplois dans différentes régions du pays.

Même si les fabricants d’équipement sont tenus d’indiquer la valeur en dollars de l’accord de contrepartie industrielle pour le secteur canadien, cette exigence ne sera pas aussi avantageuse, selon M. Row, que de laisser les entreprises canadiennes offrir un soutien de façon directe et autonome au MDN. Privées de cet avantage, les entreprises canadiennes spécialisées dans le SES auront plus de mal à soutenir la concurrence lorsqu’elles tenteront de décrocher des marchés à l’étranger [7].

Notre Comité prend au sérieux la mise en garde de M. Row. Il nous faudra toutefois un certain temps pour voir exactement de quelles façons ces questions se règleront.  Nous recommandons donc :

  1. Que le gouvernement continue d’évaluer la nouvelle pratique, en tenant compte de l’intention de soutenir, de promouvoir et d’améliorer les industries régionales canadiennes et leur participation.

Enfin, nous aimerions souligner à quel point nous apprécions le fait que la vérificatrice générale soit d’accord avec l’essentiel de la motion adoptée par le Comité le 1er mars 2007 et qu’elle ait accepté de vérifier les grands projets d’immobilisations, y compris le processus d’approvisionnement du ministère de la Défense nationale.

[6]
Comité permanent de la défense nationale, Témoignages, 17 avril 2007, p. 1-3.
[7]
Ibid.