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JUST Rapport du Comité

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ANNEXE A

STANDING COMMITTEE
ON JUSTICE
AND HUMAN RIGTHS

HOUSE OF COMMONS

CHAMBRE DES COMMUNES

CANADA

COMITÉ PERMANENT
DE LA JUSTICE ET
DES DROITS DE LA PERSONNE

EXAMEN DES DISPOSITIONS DU CODE CRIMINEL
CONCERNANT LES TROUBLES MENTAUX

DOCUMENT DE RÉFLEXION

OBJET

Pour faire suite aux modifications apportées à la loi en 1991, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes procède actuellement à une étude détaillée des dispositions du Code criminel concernant les troubles mentaux.

Afin de mener à bien cette étude, le Comité cherche à obtenir l’avis des organisations non gouvernementales, des représentants des provinces et des territoires, des commissions d’examen et du public au sujet des dispositions et de l’application des mesures adoptées par le Parlement en 1992 en ce qui concerne les troubles mentaux. Le présent document vise à orienter la réflexion des participants.

CONTEXTE

Le Code criminel du Canada a toujours prescrit qu’une personne ne saurait être tenue criminellement responsable d’un acte si son état mental au moment où elle a commis cet acte la rendait « incapable d’en apprécier » la nature et la gravité et de se rendre compte qu’elle se conduisait mal. À partir du principe de la common law selon lequel une condamnation suppose non seulement un acte répréhensible mais également un esprit coupable, le Code criminel de 1892 permettait à une personne atteinte « d’imbécillité naturelle ou de maladie mentale » d’invoquer la « défense fondée sur l’aliénation mentale ». La loi établissait toutefois que la personne était présumée légalement saine d’esprit jusqu’à preuve du contraire et que, en cas d’acquittement pour cause d’aliénation mentale, elle devait être gardée en détention selon le « bon plaisir » du lieutenant-gouverneur. Les personnes jugées inaptes à subir leur procès pour cause de troubles mentaux étaient également détenues en vertu d’un mandat du lieutenant-gouverneur. Dans une large mesure, les dispositions initiales du Code criminel concernant les troubles mentaux sont demeurées les mêmes jusqu’aux modifications de 1991 qui font l’objet du présent examen.

En 1975, lorsqu’elle s’est penchée sur la façon dont le système de justice pénale traitait les accusés atteints de troubles mentaux, la Commission de réforme du droit a constaté qu’il y avait énormément de confusion dans l’application de la loi, confusion découlant en partie de « l’absence d’une politique sociale claire envers le malade mental ». Dans son document de travail et dans son rapport, la Commission a aussi remis en question un système axé sur la détention plutôt que sur le traitement et entraînant l’incarcération des accusés atteints de troubles mentaux pour de plus longues périodes que les accusés « sains d’esprit ». Dans son rapport, elle a également critiqué l’utilisation de mandats du lieutenant-gouverneur qui confiaient effectivement le sort des personnes acquittées souffrant de troubles mentaux aux membres du Cabinet ou au procureur général de la province concernée, sans obligation légale pour ces derniers de suivre les recommandations des commissions d’examen existantes.

En 1985, dans son projet sur le désordre mental, le ministère de la Justice a recensé des lacunes précises du Code criminel et recommandé des modifications visant à faire concorder la loi avec la Charte canadienne des droits et libertés. En particulier, dans le rapport final, le ministère a mis en cause l’équité de la détention pour une période indéterminée des personnes jugées inaptes à subir leur procès, et ce en l’absence de preuves prima facie fournies par la Couronne à leur encontre. Il a également remis en question la détention automatique des personnes acquittées souffrant de troubles mentaux, même en l’absence de preuves qu’elles constituaient un danger pour la société.

En 1986, le gouvernement fédéral a diffusé un projet de réforme qui a fait l’objet de vastes consultations avec les provinces ainsi qu’avec des organismes et des particuliers des secteurs public et privé. Toutefois, l’impulsion qui a finalement enclenché la réforme administrative a été la décision rendue en 1991 par la Cour suprême du Canada dans l’affaire R. c. Swain : la Cour a alors jugé inconstitutionnelles la loi et les pratiques de common law en matière de défense fondée sur l’aliénation mentale. En particulier, la Cour a jugé que le paragraphe 542(2) du Code criminel, ordonnant la détention de personnes acquittées pour cause d’aliénation mentale, était contraire aux articles 7 et 9 de la Charte et non justifié par l’article premier. Considérant que la libération de toutes les personnes alors détenues en vertu d’un mandat du lieutenant-gouverneur pourrait poser un danger pour le public, la Cour a décrété une période de validité temporaire de six mois, qui a par la suite été prolongée afin de permettre au Parlement d’adopter une loi corrective.

PROJET DE LOI C-30

La mesure corrective, le projet de loi C-30, est entrée en vigueur en 1992, mais un certain nombre de dispositions plus controversées n’ont pas encore été promulguées. Par suite des modifications créant une nouvelle Partie XX.1 du Code criminel, les expressions « imbécillité naturelle » et « maladie mentale » ont été remplacées par l’expression « troubles mentaux ». Au lieu d’un verdict de « non-culpabilité pour cause d’aliénation mentale », on peut maintenant rendre un verdict de « non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux ». Et une telle conclusion n’entraîne pas automatiquement la détention. Au lieu de cela, le tribunal a le choix d’ordonner des mesures appropriées ou de laisser la commission d’examen prendre la décision. Dans l’un et l’autre cas, il y a obligation d’imposer la décision la moins privative de liberté, compte tenu de la nécessité de protéger le public, de l’état mental de l’accusé et de sa réinsertion sociale éventuelle. Les lieutenants-gouverneurs en conseil n’ont plus de rôle à jouer dans les procédures criminelles touchant des accusés inaptes ou atteints de troubles mentaux.

Par suite d’amendements au projet de loi C-30, on a défini les critères permettant de déterminer si un accusé est « inapte à subir son procès » et accordé aux tribunaux des pouvoirs limités d’ordonner un traitement involontaire afin de le rendre apte à le subir. En outre, les tribunaux sont maintenant obligés de revoir tous les deux ans le dossier d’un accusé jugé inapte afin de déterminer s’il existe des raisons valables de considérer la personne comme apte à subir son procès. Dans le cas contraire, l’accusé a droit à un acquittement.

On a décidé de reporter la promulgation d’un certain nombre d’amendements au projet de loi C-30, y compris les dispositions concernant la détention maximale qui limiterait le temps de détention d’un accusé jugé inapte ou souffrant de troubles mentaux. Les dispositions sur les « accusés dangereux souffrant de troubles mentaux » (ADTM) n’ont pas non plus été promulguées. Inspirées du régime des « délinquants dangereux » du Code criminel, les dispositions sur les ADTM devaient permettre aux tribunaux, dans des cas spéciaux, de porter la détention maximale à la détention à vie. D’autres articles inopérants permettraient aux tribunaux d’ordonner qu’un contrevenant purge au moins une partie de sa peine dans un centre de soins si la personne souffre de troubles mentaux « en phase aiguë » au moment de sa condamnation.

Compte tenu de la compétence des provinces dans les instances civiles touchant la santé mentale et des répercussions financières de mise en œuvre de certains articles inopérants, la promulgation de ceux-ci demeure controversée. Entre-temps, il faut noter que les dispositions actuellement en vigueur sur les troubles mentaux viennent d’être confirmées par la Cour suprême du Canada, même s’il demeure possible d’enfermer quelqu’un pour une période indéterminée. En ce qui touche l’administration concrète des nouvelles dispositions visant les troubles mentaux, on a mis en cause la pertinence des pouvoirs de la commission d’examen. En outre, il faudra peut-être régler quelques questions connexes qui n’ont pas traitées dans le projet de loi C-30. En 1991, lors des audiences du Comité sur le projet de loi, on a recommandé que la défense de l’automatisme utilisée en common law soit codifiée afin d’autoriser des ordonnances de surveillance dans des cas appropriés. Par ailleurs, le critère de la common law quant à l’aptitude à subir un procès a fait l’objet de critiques, et on a attaqué récemment le critère ou la définition des « troubles mentaux » en common law.

QUESTIONS À EXAMINER

Le Comité aimerait connaître votre point de vue sur les questions suivantes. Cette liste n’est pas exhaustive et les participants sont encouragés à faire connaître leurs points de vue sur d’autres éléments qu’ils considèrent pertinents.

 Considérez-vous comme adéquate l’application par les tribunaux de la défense fondée sur les troubles mentaux que prévoit l’article 16 du Code criminel, ou devrait‑on, à votre avis, la restreindre ou l’élargir au moyen de modifications?
 Est-il, selon vous, nécessaire de clarifier ou d’élargir la définition et/ou les critères établissant l’aptitude à subir un procès? Dans l’affirmative, avez-vous des recommandations à faire?
 Bien que le ministre de la Justice ait fait circuler en 1993 des propositions de modifications qui auraient codifié l’automatisme, la défense continue d’être régie par la common law. À votre avis, devrait-on définir l’automatisme dans le Code criminel? À l’heure actuelle, un verdict d’automatisme sans aliénation mentale entraîne un acquittement complet, même pour les accusations les plus graves. Selon vous, cela est-il approprié, ou les tribunaux devaient-ils avoir le pouvoir d’imposer des ordonnances de surveillance dans certains cas d’automatisme sans aliénation mentale?
 Le Code criminel donne aux commissions d’examen le pouvoir de déterminer si un accusé est apte à subir son procès. Une commission d’examen peut également ordonner qu’on garde en détention un accusé atteint de troubles mentaux, ou le libérer sous certaines conditions. Les commissions devraient-elles, d’après vous, également pouvoir ordonner une évaluation avant la tenue d’une audition d’examen? Les commissions d’examen devraient-elles pouvoir libérer totalement un accusé inapte?
 Devrait-on, à votre avis, promulguer les dispositions concernant les plafonds de détention? Dans l’affirmative, est-il, selon vous, nécessaire de modifier auparavant dans votre juridiction la législation existante en matière de santé mentale?
 Si on promulguait les dispositions concernant les plafonds de détention, serait-il nécessaire ou utile de promulguer en même temps les dispositions sur les « accusés dangereux atteints de troubles mentaux »?
 Connaissez-vous le nombre d’accusés atteints de troubles mentaux qui font l’objet à l’heure actuelle d’ordonnances de surveillance dans votre juridiction?
 Devrait-on, à votre avis, promulguer les dispositions touchant les « ordonnances de détention dans un hôpital »? Pouvez-vous fournir au Comité des renseignements sur la disponibilité ou le caractère adéquat du traitement des contrevenants atteints de troubles mentaux dans les institutions fédérales et/ou provinciales de votre juridiction?

DÉCEMBRE 2001