FAIT Rapport du Comité
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A. Rectifier les problèmes dimage
1. Améliorer limage du Canada en Europe
Il devient de plus en plus évident que la perception quont les Européens du Canada pose un obstacle sérieux à la promotion de lindustrie canadienne dans lUE. Notre mission denquête en Europe confirme que le Canada jouit là-bas dune image extrêmement favorable. À létranger, le Canada évoque des parcs et des réserves naturelles, des attractions touristiques comme les chutes Niagara, un peuple pacifique, démocratique et tolérant et une économie essentiellement dépendante des ressources naturelles. Même si la beauté de notre pays est bien réelle et digne dêtre promue et quelle suscite une bonne volonté inestimable, elle fait oublier que, dans larène économique, le Canada ne dépend plus exclusivement de ses ressources naturelles. En fait, quelque 70 % de nos exportations sont aujourdhui des produits industriels. Pour la première fois dans lhistoire, comme la fait remarquer au Sous-comité un haut fonctionnaire de lambassade du Canada à Paris, il y a un certain équilibre dans notre économie entre les industries à base de ressources et les autres secteurs industriels. Dans un certain nombre de domaines de haute technologie (p. ex. laccès rapide à lInternet, laccès à large bande), le Canada est devenu un fer de lance.
Limage surannée du Canada a pourtant la vie dure. En 1997, le Conference Board du Canada a constaté que le milieu des affaires des deux côtés de lAtlantique souffrait dun grave « déficit dinformation » au sujet des marchés des uns et des autres. Une enquête privée menée auprès de cadres européens pour le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international en 1998 a révélé des failles et des inexactitudes dans la connaissance quon a du Canada à létranger. En France, le Sous-comité a pris connaissance dun sondage qui révèle quon a limpression là-bas dune absence totale d«industries de pointe» au Canada. Les problèmes dimage discernés dans les années 1990 semblent donc subsister.
Le fait est que les Européens ont une idée dépassée de léconomie canadienne et que le Canada ne figure pas sur la carte de la plupart des entreprises de lUE. M. Keyes déclare : « Nous sommes perçus comme un satellite des États-Unis. Lattention est surtout centrée sur les États-Unis, dont nous constituons une sorte de prolongement vers le nord et qui de toutes façons peuvent servir de porte daccès au Canada. Ils ne pouvaient pas identifier de produits, dentreprises ou de services canadiens pouvant savérer indispensables dans le contexte européen. » En Europe, nous avons même constaté que nos grandes sociétés de haute technologie passaient pour appartenir à des Américains. Comme les Européens ont largement limpression que nous sommes dominés par les États-Unis, le Canada aurait peut-être intérêt à se différencier de son voisin du sud.
Pourquoi le Canada nest-il toujours pas perçu à létranger comme un important fabricant de produits industriels et de haute technologie avancés? Faisons-nous le nécessaire pour que les entreprises européennes aient aisément accès à une information exacte à notre sujet? Le Sous-comité a entendu des opinions contradictoires à ce sujet. M. Keyes est convaincu quil ne manque pas dinformation au sujet du Canada et quil y en a même trop. M. Clarke convient que, sans égard à la quantité d'information, les gens des deux côtés de lAtlantique se connaissent assez mal. Pour sa part, Charles Barrett (vice-président, Recherches sur les entreprises, Conference Board du Canada) prétend quon manque des deux côtés dinformations à jour et ciblées sur les marchés de lautre. En France, le Sous-comité a entendu dire que les entreprises françaises manquaient dinformation sur le Canada et que même lentreprise française bien connue Alcatel (qui a acheté Newbridge Networks de Kanata en 2000) navait pas dabord perçu le Canada comme un marché de haute technologie.
Le Sous-comité ne peut que conclure que limage stéréotypée du Canada nuit à ses perspectives commerciales. Compte tenu de la concurrence farouche à léchelle mondiale, il sagit pour le Canada de tirer parti de son image « naturelle » positive et de son avantage comparatif sur le plan des ressources naturelles tout en promouvant de façon plus efficace ses produits, ses services et ses entreprises sur le marché européen. Il peut y arriver en modernisant son image comme société dynamique et ouverte dotée dune technologie de pointe (p. ex. technologie de linformation, télécommunications, aérospatiale et électronique), une société capable de répondre aux besoins des entreprises européennes et dêtre un partenaire clé pour les entreprises européennes dans le cadre de coentreprises en Europe et dinvestissements au Canada comme porte daccès à lALENA.
Nous devons mieux faire connaître le Canada aux Européens et les sensibiliser davantage à la « marque Canada ». Nous devons rehausser le profil global du Canada en Europe comme moyen de faire valoir nos intérêts stratégiques. En vue de présenter un portrait plus exact et plus actuel du Canada aux Européens, nous recommandons :
Recommandation 2 :
Que le gouvernement fédéral déploie, dans le cadre dune campagne dinformation, des efforts mieux concertés pour faire savoir directement et efficacement aux décideurs européens que la structure de léconomie canadienne est en évolution rapide. Les Européens doivent savoir que le Canada est devenu, dune économie essentiellement axée sur ses ressources naturelles, une économie comportant un grand nombre dindustries modernes à base de savoir.
Recommandation 3 :
Que cette stratégie de modernisation de la « marque Canada » visant à projeter à létranger limage dun leader mondial de la nouvelle économie table davantage sur les entreprises européennes qui ont du succès au Canada; les entreprises canadiennes qui ont une présence appréciable en Europe; les visites de journalistes, notamment ceux de journaux et de revues spécialisés; les échanges détudiants; la projection dimages de la nouvelle réalité canadienne dans les aéroports; et le drapeau canadien.
Des témoins au Canada comme en Europe se demandaient si les efforts de promotion touristique axés sur la beauté naturelle du Canada nallaient pas à lencontre de limage que nous souhaitons projeter dun pays spécialisé dans la haute technologie, la fabrication de pointe et lélectronique. Il semblerait que nous ayons presque trop bien réussi à nous présenter comme un beau pays aux grands espaces au détriment de notre image de fournisseur de biens et de services de haute technologie. Il en résulte peut-être que les entreprises européennes évitent les fournisseurs canadiens et que de nombreux investisseurs européens préfèrent les États-Unis au Canada. Pour remédier à ce problème, le Sous-comité recommande :
Recommandation 4 :
Que, de concert avec les provinces, on réévalue et modifie au besoin les campagnes de promotion touristique en Europe en vue de diffuser de linformation sur la transformation rapide de la structure économique du Canada et sur le style de vie et la qualité de vie des travailleurs du savoir canadiens. On devrait envisager de mieux faire ressortir les villes canadiennes comme destination daffaires et dagrément.
LUE souffre dun problème dimage analogue auprès des entreprises canadiennes, lesquelles ne sintéressent guère à ce qui est pourtant la deuxième économie du monde. Les explications de cette attitude varient, mais il y a lieu de croire que leffet dentraînement des États-Unis sur le Canada (surtout dans le contexte du boom économique prolongé des années 1990) a toujours constitué pour les entreprises canadiennes une bonne raison de rester axées sur les États-Unis. Il se peut aussi que les commerçants et les investisseurs ne songent pas à lEurope parce quils ont depuis longtemps limpression « que les marchés européens sont difficiles à pénétrer, vieux jeu, protectionnistes, bureaucratiques, hérissés dobstacles ». Il ressort en tout cas des témoignages que le Sous-comité a reçus en Europe que les entreprises canadiennes perçoivent ces marchés comme difficiles à pénétrer.
M. Keyes estime quil incombe au gouvernement canadien et à lUE de contrer ces perceptions, faute de quoi les entreprises iront simplanter ailleurs. En plus de se renseigner sur les divers marchés nationaux européens, les entreprises canadiennes devraient peut-être suivre de plus près les politiques et les pratiques de lUE de manière à pouvoir dresser des stratégies axées sur un marché de plus en plus intégré. Il sagirait donc de mieux faire connaître lUE au Canada. Le Sous-comité a entendu dire que, si les grandes sociétés multinationales canadiennes semblaient comprendre lUE et y être bien représentées, les petites entreprises, en revanche, en connaissaient mal la raison dêtre et les politiques. Pour redresser la situation, nous recommandons :
Recommandation 5 :
Que le gouvernement fédéral examine les besoins des entreprises canadiennes, en particulier des petites et moyennes entreprises, en matière dinformations exactes et à jour sur les marchés individuels des pays membres de lUE et sur les politiques et les pratiques de lUE. Il faudrait prendre des mesures pour répondre aux besoins dinformation constatés.
B. La promotion du commerce et de linvestissement avec lEurope
Le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer pour ce qui est de fournir aux entreprises et aux investisseurs linformation dont ils ont besoin pour prendre leurs décisions et dencourager le commerce et linvestissement. Ces responsabilités revêtent une importance particulière en Europe où 55 % des clients des missions européennes du MAECI sont des nouveaux venus sur le marché. Il sagit là du pourcentage le plus élevé de tous les marchés étrangers et cest beaucoup plus que ce que le Ministère avait dabord prévu. Le sondage mené pour le Ministère en 1999 auprès de 2 000 entreprises pour mesurer leur niveau de satisfaction à légard de nos délégués commerciaux a révélé que les répondantes étaient en majorité de petites et moyennes entreprises et quun grand nombre dentre elles sétaient taillé une place de choix sur le marché américain avant de sintéresser à lEurope, à lAsie et à lAmérique latine.
Même si 81 % des entreprises sondées étaient satisfaites du Service des délégués commerciaux, certains témoins du Sous-comité ont déclaré que les ressources affectées par le gouvernement fédéral aux activités de promotion en Europe étaient peut-être devenues insuffisantes. M. Paterson, par exemple : « certains représentants commerciaux en Europe ne savent plus où donner de la tête. Ils sont submergés par les demandes daide des entreprises. Cest un des problèmes auxquels le Ministère est confronté dans la gestion de ses ressources : répondre aux demandes de renseignements sur les possibilités de partenariats et la situation dans les marchés en pleine croissance ».
Le budget européen du MAECI est malheureusement en nette régression depuis quelques années. Entre 1994-1995 et 2000-2001, le budget du Programme de développement du commerce international est passé de 5,4 à 1,9 million de dollars et celui du Programme de développement des marchés dexportation de 1,7 à 1,0 million de dollars. Les compressions budgétaires du gouvernement fédéral au cours des années 1990 se sont soldées par une forte diminution des fonds consacrés par le Ministère à la promotion directe du commerce (foires commerciales, missions commerciales, appui aux entreprises canadiennes dans le cadre du Programme de développement des marchés dexportation). Au dire de M. Keyes, cette réduction a nettement nui à la présence et à la visibilité du Canada ainsi qu'à la capacité des missions canadiennes à fournir de linformation et à faire connaître les débouchés commerciaux. En Europe, le message était à peu près le même, à savoir que les compressions budgétaires ont été contre-productives et quil fallait augmenter les ressources financières.
En réponse aux compressions, le MAECI a élaboré une stratégie dorientation de ses efforts de promotion du commerce et de linvestissement transatlantiques. M. Clarke fait remarquer que le nombre de délégués commerciaux en poste à létranger a baissé au cours des années 1990 et quils ont été remplacés par des agents commerciaux engagés localement qui coûtent beaucoup moins cher. À léchelle mondiale, le nombre des employés du MAECI affectés à la promotion du commerce et de linvestissement est donc demeuré à peu près constant. En Europe, le nombre demployés sest en fait accru, passant de 137 employés en 1990 à 175 en 2000. Le Comité a appris que 27 % des délégués commerciaux et des agents commerciaux engagés sur place étaient en poste en Europe. Selon M. Clarke, les ressources du Ministère en Europe correspondent à un « équilibre décent », la représentation étant excellente dans les centres commerciaux de lEurope occidentale et bonne presque partout en Europe de lEst.
La stratégie dont le gouvernement sest doté pour augmenter le commerce et linvestissement avec lUE se ramène essentiellement à un plan daffaire conçu pour repérer les produits et les débouchés intéressants en Europe. On insiste de plus en plus dans les ambassades sur le partage des coûts avec le secteur privé et sur la concentration des efforts promotionnels sur les services essentiels à forte valeur ajoutée (p. ex. renseignements exacts sur les marchés locaux et les débouchés sérieux, avis et conseils sur la façon de faire des affaires sur les marchés européens et résolution de problèmes par opposition aux services de logistique). M. Paterson a informé le Sous-comité que, pour offrir la plus grande valeur ajoutée, il faut que le MAECI acquière une bonne connaissance de léconomie locale, en particulier les secteurs de haute technologie, et trouve des partenaires pour les nouveaux venus canadiens sur le marché européen. Il convient également de mentionner que, aux fins commerciales, 12 secteurs prioritaires ont été identifiés par les partenaires du MAECI au sein dÉquipe Canada Inc., dont font partie les ministères et les organismes qui sintéressent au commerce. Le gros des fonds est maintenant affecté aux secteurs prioritaires sur les marchés prioritaires.
Même si les représentants du MAECI cités estiment que leur ministère fonctionne bien en termes opérationnels, le Sous-comité craint que le déséquilibre entre les besoins et les ressources ne nuise à lefficacité des activités de promotion de linvestissement et du commerce. En Europe, les fonctionnaires dambassade regrettaient de ne pas disposer des ressources humaines et(ou) financières nécessaires pour exploiter pleinement le potentiel de la région en matière de commerce et dinvestissement. Les fonctionnaires du Ministère à Ottawa ont également affirmé que des ressources supplémentaires seraient les bienvenues. Lancien délégué commercial principal du gouvernement fédéral a même déclaré au Sous-comité quil serait bon que le gouvernement augmente la quantité de ressources consacrées à la promotion directe du commerce (en particulier dans les secteurs de forte croissance comme les technologies de linformation, la biotechnologie et lenvironnement) comme il sy est engagé dans le discours du Trône doctobre 1999.
La participation aux foires commerciales sectorielles en Europe et lengagement dagents chargés de solliciter des investissements étrangers directs en Europe (conseillers en investissement) sont deux activités dont le budget doit être augmenté en priorité. Le MAECI estime vital de participer à toutes les grandes activités et foires commerciales internationales en Europe puisque la majorité des échanges commerciaux européens ont lieu à ces endroits. Comme lUE est un marché intégré, chaque ambassade devrait disposer de fonds suffisants pour participer aux foires commerciales; les fonds ne devraient pas être affectés exclusivement aux ambassades des pays où se tiennent la majorité des foires commerciales. Le Sous-comité a également entendu déclarer combien il importait que les fonctionnaires dambassade se rendent dans les régions des pays où ils sont affectés et rendent visite à un plus grand nombre de PME afin de susciter des investissements. Comme nous estimons avantageux daugmenter sensiblement les ressources consacrées à la promotion commerciale directe et au développement des investissements, nous recommandons :
Recommandation 6 :
Que le gouvernement fédéral accroisse le budget du MAECI pour la promotion directe de linvestissement et du commerce en Europe. Ces ressources accrues devraient servir à élargir la participation canadienne aux foires commerciales européennes en vue daméliorer limage du Canada et de renforcer sa présence dans les milieux daffaires européens ainsi quà élargir et à intensifier la recherche dinvestissements partout en Europe.
Un certain nombre de témoins en Europe ont parlé du peu dintérêt des entreprises canadiennes, notamment des PME, à brasser des affaires en Europe. On nous a dit que, sil était de mise que le gouvernement fédéral encourage les entreprises à faire leur entrée sur le marché européen, il létait moins quil subventionne leur participation aux foires commerciales. Le Sous-comité a également appris que les normes de conception, les normes de qualité, les normes environnementales et diverses autres normes de produits et de services pouvaient être plus élevées outre-mer. Il faut donc sattacher en priorité à renforcer la capacité des petites entreprises au Canada, en particulier, à commercer et à investir sur le marché européen. En Europe, on nous a dit craindre que les PME canadiennes ne soient trop souvent mal préparées pour le marché européen très concurrentiel et les nombreux créneaux commerciaux intéressants quil offre. Une fois là-bas, elles sont trop promptes à se replier sur lAmérique du Nord dès que les résultats commencent à fléchir.
Nous sommes davis que le gouvernement du Canada devrait faire mieux dans le domaine de la promotion des exportations. Les fonctionnaires dambassade nous ont dit, ce qui est révélateur, quils perdaient souvent leur temps à la promotion des exportations et que, étant donné leurs ressources limitées, ils sattachaient plutôt à attirer des investissements au Canada, activité souvent plus rentable. Il faut faire davantage au Canada pour stimuler lintérêt des petites entreprises pour le marché européen, les préparer pleinement à la tâche et, une fois quelles sont établies outre-mer, suivre leur évolution. Le Sous-comité recommande donc :
Recommandation 7 :
Que le gouvernement du Canada se consacre à nouveau au pays à intéresser les petites et moyennes entreprises aux marchés européens, à mieux préparer les entreprises qui souvrent à lEurope aux possibilités dexportations vers le vieux continent et à les suivre une fois quelles sont établies outre-mer. Il faudrait affecter plus de ressources humaines et financières à ces objectifs.
Enfin, des témoins en Europe ont dit au Sous-comité que les services à lexportation du gouvernement du Canada souffraient de double emploi avec ceux des provinces, dun manque dintégration avec les associations dentreprises nationales (p. ex. Chambre de commerce, Alliance des manufacturiers et des exportateurs) et dun manque de ressources humaines ayant des compétences du secteur privé. Pour remédier à ces déficiences perçues, nous recommandons :
Recommandation 8 :
Que le gouvernement fédéral examine et modifie ses activités et ses ressources de promotion des exportations afin de sassurer que ses activités complémentent celles des provinces, que des liens plus étroits soient établis avec les associations dentreprises canadiennes et que des agents étrangers ayant des compétences du secteur privé soient recrutés pour aider à ouvrir les marchés européens aux entreprises canadiennes.
Côté investissement, il peut être assez difficile dattirer les investisseurs européens au Canada, étant donné la puissance et le potentiel de léconomie américaine ainsi que la concurrence farouche que se livrent certains États et municipalités américains pour appâter les investisseurs étrangers. Il importe de montrer que le marché canadien est dynamique et concurrentiel, quil constitue un environnement attrayant et prometteur pour linvestissement.
Le MAECI a dit au Sous-comité quil attachait beaucoup dimportance à la promotion en Europe de la «marque Canada» en matière dinvestissement. Le message destiné aux investisseurs européens en puissance est que le Canada est un lieu privilégié pour les entreprises désireuses daccéder au marché de lALENA. Notre pays présente pour avantages des conditions macro-économiques favorables, des coûts souvent inférieurs aux coûts américains, un roulement de la main-duvre moindre qu'aux États-Unis (loyauté des employés plus grande), des programmes sociaux intéressants pour les investisseurs européens et une société moins procédurière. Le message à communiquer aux investisseurs potentiels est certes positif. En Allemagne, on a mentionné au Sous-comité limportance de garder en place les bonnes assises économiques afin de préserver ces avantages pour les investisseurs.
Pour stimuler linvestissement européen au Canada, le MAECI a lancé en Europe un programme dynamique auquel participent conseillers en investissement, ambassadeurs du Canada, chefs de mission en Europe et délégués commerciaux. Au lieu de mener une vaste campagne dinformation afin dattirer chez nous des investissements, on préfère cibler certains investisseurs, par exemple, les entreprises qui s'approvisionnent à l'échelle internationale. Le nombre dappels dentreprises a plus que doublé au cours des cinq dernières années. Le Sous-comité a constaté que cette approche était appréciée en Europe.
Le gouvernement fédéral mène également un programme de jumelage avec des pays prioritaires dans le cadre duquel les sous-ministres appellent des entreprises de tel ou tel pays une fois lan et cherchent à régler leurs préoccupations en matière dinvestissement à un niveau supérieur. Le programme, administré par Partenaires pour linvestissement Canada (initiative conjointe du MAECI et dIndustrie Canada), a été répété dans la plupart des pays qui sont de grands partenaires du Canada en matière dinvestissement et a donné lieu à des résultats tangibles (plus de 2 milliards de dollars en nouveaux investissements dentreprises suédoises comme Ericsson, Astra, et Stora).
À Bruxelles, le Sous-comité sest fait dire par un haut fonctionnaire du Haut-commissariat du Canada à Londres que les mandats du MAECI en matière de commerce et dinvestissement sont de nature très différente et que le gouvernement fédéral avait essentiellement chargé le Service des délégués commerciaux dun nouveau mandat de promotion des investissements. Cependant, aucun mécanisme global ne sous-tend la promotion des investissements. Le discours du Trône doctobre 1999 faisait allusion au lancement possible dÉquipe Canada Investissement, initiative devant permettre à un large éventail de ministères et dorganismes fédéraux, à dautres gouvernements au Canada et au secteur privé de stimuler et de promouvoir linvestissement étranger (remplaçant ainsi le programme Partenaires pour linvestissement au Canada).
Nous croyons quÉquipe Canada Inc. aurait dû depuis longtemps comporter un tel volet. Il importe de coordonner les efforts fédéraux et provinciaux pour attirer des investissements en Amérique du Nord, établissant ainsi une relation complémentaire entre les deux niveaux de gouvernement. En outre, le Sous-comité a entendu parler en Europe de la nécessité de consacrer des ressources du MAECI au Canada au service «après-investissement». Comme 60 % des investissements proviennent dentreprises qui ont déjà investi au Canada, on estimait quil fallait faire davantage pour encourager et faciliter ces investissements supplémentaires. Nous recommandons donc :
Recommandation 9 :
Quune Équipe Canada Investissement, intégrant les ressources des ministères et organismes fédéraux concernés, dautres gouvernements au Canada et du secteur privé, et chargée de promouvoir linvestissement étranger, soit établie le plus tôt possible. Il faudrait également élaborer une stratégie nationale visant à attirer des investissements dEurope et dailleurs en veillant à éliminer les chevauchements et le double emploi entre les divers niveaux de gouvernement. Dans le cadre de cette stratégie, il faudrait sattacher aussi à encourager les entreprises étrangères déjà établies à réinvestir au Canada et à leur faciliter la chose.
Enfin, le projet denvoyer une mission de promotion du commerce et de linvestissement dÉquipe Canada en Europe a avorté en faveur dune mission de recherche de nouveaux débouchés en Chine. Nous déplorons cette décision et nous espérons que lEurope pourra être de nouveau considérée comme une destination prioritaire dÉquipe Canada. À cette fin, nous sommes heureux de lengagement du gouvernement dans le discours du Trône de janvier 2001 à envoyer en Europe une mission de promotion de linvestissement dÉquipe Canada. Il serait par ailleurs des plus avantageux que cette mission cherche en priorité à élargir les relations commerciales transatlantiques. Le Sous-comité recommande donc :
Recommandation 10 :
Que le gouvernement fédéral ne ménage aucun effort pour que lEurope redevienne une destination prioritaire des missions dÉquipe Canada et pour que la promotion du commerce et la promotion de linvestissement soient conçues comme des objectifs clés de ces missions.
C. Le libre-échange avec lEurope
On est fondé à dire que, au niveau officiel, la relation transatlantique entre le Canada et lEurope a cruellement besoin dêtre relancée. Comme la déclaré au Sous-comité à Bruxelles Pascal Lamy (commissaire au commerce de lUE), la bonne nouvelle au sujet de la relation, cest quil ne semble pas y avoir de problème majeur, mais la mauvaise nouvelle, cest que le potentiel de rapprochement na jamais été réalisé et quil reste beaucoup à faire. Dautres témoins à Bruxelles ont fait écho à ces observations. Rod Abbott (directeur général du commerce, Commission européenne) estime quil faudrait relancer les efforts pour améliorer les relations entre le Canada et lUE, mais il nest pas certain que le libre-échange soit la solution. Un député européen allemand a déclaré que le Canada était un pays important pour lEurope et quil fallait redéfinir la relation bilatérale au cours des cinq à dix prochaines années. Pour sa part, James Bartleman (ambassadeur du Canada auprès de lUE) a insisté sur le besoin dune «potion magique» pour modifier la psychologie transatlantique actuelle.
Nous croyons que cette « potion magique » pourrait bien prendre la forme dun ou de plusieurs accords de libre-échange avec lEurope. Depuis que le Canada a donné son appui en 1948 au concept dune Communauté de lAtlantique nord dans le cadre de lOTAN, le libre-échange avec lEurope est le Saint-Graal des relations commerciales transatlantiques. À lautomne de 1994, le ministre canadien du Commerce international a prononcé plusieurs discours en faveur dun accord de libre-échange canado-européen. Reprenant cette idée dans le discours quil a prononcé au Sénat français en décembre 1994, le premier ministre a préconisé de joindre les régimes commerciaux de lALENA et de lUE dans une Zone de libre-échange transatlantique. Il a réitéré cette proposition dans un discours quil a prononcé à Londres en octobre 1997.
Depuis lors, le Canada a abandonné lidée dun accord UE-ALENA en faveur dun accord bilatéral entre le Canada et lUE. Pendant le sommet Canada-UE de décembre 1999, on a donné aux partisans dun accord global de libre-échange entre le Canada et lUE un certain espoir quant à la réalisation de ce projet. À ce sommet, le commissaire au commerce de lUE, Pascal Lamy, a dit aux autorités canadiennes que, même si lUE préférait conclure des accords de libre-échange avec des économies moins développées que le Canada9 et que certains États membres de lUE (peut-être la France et lEspagne) pouvaient avoir de fortes réserves, il serait prêt à étudier une solide analyse de rentabilité en faveur dun accord de libre-échange.
Plusieurs arguments militent en faveur dun accord de libre-échange avec lEurope. Dabord, selon les fonctionnaires du MAECI, le Canada compte parmi les huit entités géographiques (avec lAustralie, Hong Kong/Chine, le Japon, la République de Corée, la Nouvelle-Zélande, Singapour et les États-Unis) qui nont pas daccord commercial préférentiel avec lUE. Labsence dun tel accord nuit sans aucun doute au Canada étant donné que le commerce tend à se faire avec des pays qui bénéficient du traitement favorable.
Deuxième argument, le libre-échange entraîne labaissement des barrières tarifaires aussi bien que des barrières non tarifaires, lesquelles savèrent difficiles à supprimer. En modifiant la dynamique de notre relation, un accord de libre-échange permettrait de faire plus facilement des progrès en matière de barrières commerciales.
Un troisième argument fait valoir lélan psychologique quun accord de libre-échange donnerait à la relation commerciale transatlantique. Tout comme lAccord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis a stimulé lintérêt des milieux daffaires canadiens pour les États-Unis, le Sous-comité a souvent entendu déclarer pendant son séjour en Europe quun accord entre le Canada et lUE améliorerait sensiblement la visibilité du Canada en Europe et quil conduirait à une augmentation considérable des échanges avec les pays membres. En outre, les accords de libre-échange transforment habituellement la perspective des entreprises sur linvestissement. Lorsque le Sous-comité leur a demandé ce quils pensaient dun tel accord de libre-échange, un groupe de participants à une table ronde de lindustrie et du gouvernement allemands ont déclaré à lunanimité quils étaient en faveur.
Pendant ses audiences, le Sous-comité a toutefois détecté un certain scepticisme sur les chances de réalisation dun tel accord. On nous a informés que, mis à part les États nordiques plus libéraux de lUE, lidée dun pacte de libre-échange suscitait peu denthousiasme en Europe. Le Canada nest pas perçu dans certains milieux comme un pays assez important pour justifier la dépense de temps et dargent nécessaire. Selon M. Abbott, par ailleurs, les bureaux de lUE à Bruxelles nont pas la capacité administrative pour se charger de négociations bilatérales avec le Canada, surtout à un moment où lattention est mobilisée par une nouvelle initiative multilatérale de libéralisation des échanges à lOMC.
En termes plus concrets, les vues initiales de la Commission européenne à ce sujet sont que, comme les droits de douane entre les pays développés sont déjà peu élevés, il ny a peut-être pas beaucoup à gagner à un accord de libre-échange avec un pays comme le Canada. Il importe en revanche de travailler à lélimination des obstacles non tarifaires, ce qui peut mieux se faire de toute façon dans un contexte multilatéral.
Kathleen Macmillan (présidente, International Trade Policy Consultants Inc.) partage cette opinion. Selon elle, le libre-échange napporterait pas de grands avantages économiques et ne donnerait quune longueur davance temporaire sur les autres partenaires commerciaux non alignés de lUE. Elle fait remarquer que les véritables obstacles au commerce transatlantique sont dordre réglementaire et que le Canada ne réussirait pas mieux que dautres à les faire sauter. Enfin, elle soutient quil y aurait peu à gagner en matière dinvestissements parce quil y a relativement peu dobstacles de ce côté. Pour attirer davantage dinvestissements, il faudrait des solutions canadiennes.
Mesurer la réaction des milieux daffaires européens à une éventuelle entente commerciale bilatérale est une autre histoire. Le Sous-comité a entendu dire que certains milieux ny étaient pas favorables, mais il nous semble prématuré de considérer que ce sentiment reflète la position du monde des affaires. En tout cas, les participants à la table ronde de Berlin nous ont donné lieu de croire que les chefs dentreprise et dautres décideurs européens commençaient à jeter sur le libre-échange un regard plus favorable.
Une grande question dans ce débat est de savoir si les Européens sont intéressés par des négociations de libre-échange (bilatérales ou plurilatérales) en agriculture. Le secteur agricole européen demeure très protégé et dépendant de subventions à lexportation et de généreuses mesures de soutien. Il faudrait apporter à la politique agricole européenne des changements immédiats qui ne seraient pas politiquement populaires. Toute libéralisation du commerce agricole serait probablement modeste (si elle se fait de façon bilatérale) ou résulterait de négociations multilatérales qui pourraient obliger à des compromis dans dautres domaines chers aux Européens. Cependant, un accord de libre-échange assorti dun progrès modeste en agriculture vaudrait considérablement mieux que pas daccord du tout, dautant que lagriculture compte pour moins de 10 % du commerce bilatéral total.
Comme il a été dit, il semble que lUE hésite à négocier des accords de libre-échange avec des pays développés extérieurs à lEurope comme le Canada, préférant le faire avec dautres pays pour des raisons stratégiques, géographiques. À la question de savoir pourquoi lEurope a entrepris de négocier un accord de libre-échange avec le Mexique et non avec le Canada, M. Lamy a répondu que la part de lUE dans le marché mexicain avait diminué sensiblement après la mise en uvre de lALENA en 1995 et que, comme le commerce bilatéral intéresse les biens beaucoup plus que les services, cétait un accord relativement facile à conclure. En fait, les relations entre le Mexique et lUE sont différentes des relations entre le Canada et lUE dans la mesure où le niveau tarifaire moyen dans le commerce de lUE avec le Mexique est considérablement plus élevé (environ cinq fois plus) que dans le commerce de lUE avec le Canada et que les liens entre lUE et le Canada en sont à un stade beaucoup plus avancé. En outre, les entreprises européennes voient dans le Mexique un tremplin pour accéder aux marchés dAmérique centrale et dAmérique du Sud et il existe entre les secteurs agricoles mexicain et européen une certaine complémentarité qui nexiste tout simplement pas entre le Canada et lUE. Enfin, M. Lamy se demande si, en négociant un accord sur les services, le Canada ne violerait pas les règles de lALENA sauf que, comme on la fait remarquer au Sous-comité, on ne le saura vraiment quune fois les négociations amorcées.
Compte tenu de ces points de vue, pour que le Canada parvienne à conclure un accord commercial bilatéral, il faudra probablement que les Canadiens intéressent les Européens à la question et leur fassent la preuve que le libre-échange leur apporterait des avantages. Le MAECI achève une étude macro-économique sur les effets de lélimination des droits de douane sur le commerce de marchandises entre le Canada et lUE. Bien quil faille examiner plus à fond les impacts des barrières non tarifaires et dautres questions comme linvestissement, le commerce des services et les règles dorigine, les résultats initiaux de létude sur lélimination des droits de douane sont positifs10. Pour sa part, M. Lamy a noté quil lui fallait constater un avantage économique et politique clair au libre-échange avec le Canada avant daller de lavant.
Le Comité est davis que lidée dun accord de libre-échange mérite plus ample examen si cela pouvait améliorer laccès aux marchés et accroître les échanges entre le Canada et lEurope. Létude que le MAECI achève doit être rendue publique aussitôt que possible, puis étendue aux effets dune libéralisation des barrières non tarifaires. Les résultats de lanalyse de rentabilité complète devraient ensuite être publiés et discutés avec les Européens et les entreprises canadiennes à la moindre occasion. Pour sa part, M. Lamy a informé le Sous-comité que lanalyse de rentabilité canadienne offrirait à la Commission européenne un point de départ pour lélaboration de la sienne. Le Sous-comité recommande :
Recommandation 11 :
Le Canada entretient de solides relations commerciales avec les pays de lAssociation européenne de libre-échange (AELE), en loccurrence la Suisse, la Norvège, lIslande et le Liechtenstein. Le commerce bidirectionnel sest élevé à environ 7,2 milliards de dollars en 2000, dont 1,3 milliard pour les exportations canadiennes. Il importe également de signaler que les entreprises des pays de lAELE ont investi pour 4,6 milliards de dollars dans léconomie canadienne en 1999, notamment dans les secteurs des finances, de lassurance, des produits chimiques, de la transformation du poisson et de lexploitation gazière et pétrolière.
Les négociations entreprises pour conclure un accord de libre-échange avec lAELE il sagirait pour le Canada de sa première entente transatlantique ont été entamées en octobre 1998. Trois faits regrettables se sont produits depuis. Premièrement, la couverture de laccord a diminué par rapport aux intentions originales11. Le texte de laccord encore en négociation porte principalement sur lélimination des droits de douane industriels12, un peu sur la libéralisation de lagriculture ainsi que sur une coopération nouvelle à légard de la facilitation du commerce et de la concurrence. Si un accord bilatéral est signé, il sera par conséquent de la « première génération », sans engagements nouveaux dans les domaines des services, de linvestissement, des marchés publics ou de la propriété intellectuelle13.
Deuxièmement, bien que le cadre dun accord continue dexister, les négociations ont été rompues en mai 2000, principalement sur la question du traitement des navires et des produits marins industriels. Immédiatement avant cette séance de négociations, lindustrie canadienne de la construction navale avait décidé de retirer son appui au compromis consistant à éliminer graduellement le droit de douane canadien sur les produits susmentionnés en échange de la cessation immédiate du programme de subventions directes de 9 % de la Norvège. Lindustrie canadienne prétendait à ce moment que cet arrangement penchait encore en faveur de la Norvège étant donné que les constructeurs de navires norvégiens disposeraient encore de certaines formes de protection en dehors du programme de subventions susmentionné. Depuis ce temps (décembre 2000), la Norvège a accepté déliminer ses subventions directes sauf que le Sous-comité a appris quelle avait également signé un certain nombre de contrats de construction navale bénéficiant de trois années de subventions (en vertu de lancien programme) tout juste avant la fin de lannée.
Du point de vue de la Norvège, cependant, un accord Canada-AELE sans libéralisation de la construction navale serait peu intéressant sur le plan économique. Pour faire avancer les négociations, la Norvège a déposé en mars une proposition destinée à donner plus de flexibilité au Canada pour éliminer graduellement les droits de douane applicables aux navires et aux produits marins industriels.
Une dernière complication est survenue le 5 avril avec la publication du rapport dun groupe de travail industriel sur la construction navale canadienne. Une des recommandations clés consistait à « résister aux demandes des autres pays de changer les dispositions de la politique canadienne de construction navale jusquà ce que lindustrie canadienne soit capable de surmonter les effets à long terme des politiques de subventionnement et des prix inéquitables des autres pays ». Ce rapport empêche maintenant de réaliser des progrès sur le front du libre-échange européen, mais les deux parties réfléchissent à la meilleure façon de faire avancer les négociations. Aucune date na encore été fixée pour la prochaine série de négociations.
Le Sous-comité est déçu des rapports actuels du Canada avec lAELE et espère que lépineuse question de la construction navale pourra être réglée dune manière ou dune autre. Nous croyons que laboutissement des négociations revêtirait une grande valeur symbolique et comme la noté William Rossier (le secrétaire général de lAELE), lUE verrait cela dun très bon il. Nous sommes conscients que le libre-échange avec lAELE est en soi digne dintérêt, mais nous croyons quil pourrait en plus constituer un point dentrée valable dans notre quête du libre-échange avec lEurope. En conséquence, le Comité recommande :
Recommandation 12 :
Que le gouvernement fédéral se voue de nouveau à la conclusion dès que possible dune entente de libre-échange « de première génération » avec lAssociation européenne de libre-échange, puis amorce dautres négociations dans le but de conclure un accord plus large, « de seconde génération », dici la fin décembre 2002.
D. Avancer sur le front de lOMC
Alors que le Canada met beaucoup laccent sur la libéralisation du commerce bilatéral, tout en gardant une optique multilatérale, lUE se concentre carrément sur le lancement dun nouveau cycle global de libéralisation du commerce multilatéral à lOrganisation mondiale du commerce (OMC) à Genève. Il ne fait aucun doute, comme M. Abbott la fait remarquer au Comité, que lOMC mène à une « libéralisation commerciale avec effet maximal ». Bon nombre des problèmes qui entravent la relation bilatérale entre le Canada et lUE pourraient se régler avec le lancement dune nouvelle ronde de négociations. Bien que les négociations sur le « programme incorporé » aient commencé (c.-à-d. lagriculture et les services), il faudra vraisemblablement élargir les négociations pour réaliser de véritables progrès dans ces deux domaines.
Or, il nest pas certain du tout en ce moment quun nouveau cycle sera entrepris cette année. Il reste des divergences dopinion considérables entre les principaux acteurs et linefficacité de lOMC à prendre des décisions est notoire. On ne sentend donc pas encore sur un programme de négociation dun cadre réaliste qui réponde aux besoins des membres de lOMC14. Même si la décision daller de lavant était acceptée officiellement à Doha au Qatar (le lieu de la Quatrième conférence ministérielle de lOMC) en novembre, les négociations dureraient des années.
Quels sont les principaux obstacles à la mise en marche de nouvelles négociations? Le premier écueil est labsence dune entente au sein des pays de la Quadrilatérale (le Canada, les États-Unis, lUE et le Japon) sur un programme de base réaliste. Linstallation de la nouvelle administration américaine a certes retardé les choses. Labsence dune autorité de promotion du commerce pour le président américain (c.-à-d. la procédure accélérée) et le fait que le Congrès ne penche pas en faveur du libre-échange ont suscité de lincertitude concernant la position précise des États-Unis en prévision de la nouvelle ronde. Comme M. Abbott la fait remarquer au Sous-comité, de nombreux pays sengageraient dans une nouvelle série de négociations sils percevaient un signal positif de la part des Américains.
La relation entre lUE et les États-Unis est critique. À Genève, le Sous-comité a appris que même si les rapports personnels entre le représentant au commerce des États-Unis et le commissaire au commerce de lUE étaient favorables, des divergences de vues persistaient quant à lampleur du programme de négociation. Les Européens continuent de réclamer un cycle de négociations complet, incorporant par exemple la concurrence, linvestissement et le développement durable. Comme la fait remarquer Carlo Trojan (ambassadeur de la Commission européenne auprès de lOMC), un cycle de négociations complet est la meilleure formule pour réaliser laccès au marché. Si lOMC ne parvient pas à réaliser un cycle complet, a-t-il insisté, il perdra sa pertinence. Pour leur part, les Américains envisagent un programme de négociation limité mais dune portée quand même assez vaste. Ils hésitent à inclure des questions comme la concurrence et linvestissement. Comme lOMC souhaite prendre une décision au sujet de la nouvelle ronde dici le milieu de lété, il est urgent dencourager les deux parties à se rapprocher.
Laccord des pays de la Quadrilatérale sur un programme de négociation de base pourrait amener dautres pays développés et en développement à graviter autour de ce programme, mais pour lancer une nouvelle ronde avec réalisme, il faudra pouvoir bien répondre aux doléances des pays en développement. Le plan en quatre points de Mike Moore (directeur général de lOMC) à savoir amélioration de laccès au marché, souplesse dans lapplication des obligations de lOMC, plus grande participation aux décisions de lOMC, aide technique reliée au commerce na pas suscité la confiance nécessaire, étant donné que la plupart des pays développés ne sont pas prêts à offrir de nouvelles ouvertures de marché importantes ni à faire preuve de souplesse sur la mise en uvre en dehors des nouvelles négociations. Ils essaient plutôt de montrer que ces aspects seront réglés dans la prochaine ronde.
Sergio Marchi (ambassadeur canadien à lOMC) a dit aux membres du Sous-comité que les pays en développement ont maintenant « une voix puissante à la table » et quils sont plus unis que les pays développés. Un grand nombre entretiennent toutes sortes de préoccupations au sujet de la mise en uvre. Par exemple, ils nont pas encore fini de digérer les obligations découlant de lancienne ronde de lOMC (lUruguay Round) et, dun autre côté, ils nont pas encore réalisé laccès au marché qui leur avait été promis (p. ex. dans les textiles). Le fait que leurs attentes vis-à-vis la ronde précédente de libéralisation du commerce nont pas été réalisées les fait hésiter à prendre de nouveaux engagements aujourdhui.
Mais tout nest pas négatif sur ce front. Selon M. Lamy, la plupart des pays en développement ont compris que labsence dune nouvelle ronde serait pire que les inconvénients de celle-ci, étant donné que laccélération prévue des arrangements régionaux ne tiendrait pas nécessairement compte deux et que le non-traitement des enjeux sur la table de lOMC engendre des hostilités commerciales (comme en agriculture). Les pays en développement sont les plus grands bénéficiaires dun système commercial multilatéral réglementé. Autre point positif : ces pays ne constituent pas un groupe tout à fait homogène; même le petit nombre de pays de ce groupe qui affichent une ligne dure ne sont pas opposés uniformément sur chaque point. Selon un fonctionnaire canadien haut placé à Genève, limportant sera dintégrer la question de la mise en uvre dans le Cadre du Qatar et de rendre la prochaine ronde déterminante pour le développement.
Le Sous-comité est conscient quil faut éviter limpression que lOMC a de nouveau échoué dans sa tentative de lancer une nouvelle ronde (comme ce fut le cas durant les préparatifs de Seattle). Il conclut donc à lurgence de mettre en branle un nouveau programme de négociation. Nous espérons que le Canada pourra contribuer à combler le fossé pour ce qui est des divergences de vues au sein de la Quadrilatérale et de la volonté des pays en développement de souscrire à un cadre de négociation. Nous recommandons par conséquent :
Recommandation 13 :
Que le gouvernement du Canada accélère ses efforts visant à obtenir un consensus, au sein du groupe de pays constituant la Quadrilatérale et entre pays développés et en développement, à propos dun ordre du jour, élargi mais gérable, des prochaines négociations portant sur la libéralisation du commerce multilatéral organisées sous légide de lOMC.
Trois autres préoccupations au sujet de lOMC ont été portées à notre attention à Genève. La première est la nécessité de rendre la prise de décisions plus efficace dans cette organisation. En ce moment, les décisions sont prises par consensus entre les pays membres et sont ensuite ratifiées par les Parlements. Dans ce modèle de consensus, plusieurs témoins en Europe ont fait remarquer que la prise des décisions est incroyablement lente. Une fois une décision prise, toutefois, chacun est tenu de la respecter et il est presque impossible de la renverser ce qui donne aux décisions une forte légitimité. Comme la fait remarquer Andrew Stoler (directeur général adjoint de lOMC), lOMC est lorganisation internationale qui met le plus laccent sur la souveraineté des pays. M. Moore a fait écho à ce sentiment, faisant observer que « lOMC est emprisonnée par sa culture » et que « personne na le vote et tout le monde a le veto ».
Selon M. Trojan, le consensus nest pas une formule à privilégier pour rendre une organisation efficace. Linstitution devrait être davantage motivée par lurgence de la gestion et marier le besoin de transparence et dinclusion avec celui dune prise de décisions efficace. Conscient de la difficulté de changer le système, il sest toutefois déclaré en faveur détablir un petit organe de décision représentatif au sein de lorganisation. Une des raisons de léchec des négociations de Seattle en novembre 1999 était le sentiment, pour de nombreux pays en développement, dêtre exclus des négociations de fond. On pourrait simplifier le processus de décision en ayant un groupe de coordination représentatif comme le G-20 au sein de lOMC qui communiquerait bien avec les autres pays. Le Sous-comité recommande :
Recommandation 14 :
Que le Canada, en collaboration avec les pays ayant les mêmes visées que lui, comme ceux représentés par lUnion européenne, encourage les membres de lOrganisation mondiale du commerce à créer un mode de prise de décisions plus efficient au sein de lOMC tout en respectant la souveraineté des divers pays, les impératifs de transparence et le besoin de créer un consensus au sein de linstitution.
Deuxièmement, le besoin dune meilleure coordination stratégique entre les institutions internationales comme lOMC, la Banque mondiale, le FMI, lOIT et dautres organisations multilatérales et régionales sur le commerce international et le développement a été porté à notre attention. Les ambassadeurs des États-Unis et de lUnion européenne à lOMC étaient tous deux davis que lon nessaie pas assez de coordonner ces organisations internationales. M. Moore a mis au défi les parlementaires dêtre vigilants à légard des institutions mondiales et de réclamer leur restructuration. Plusieurs témoins ont remis en question lutilité de certaines institutions, réclamant dautres mesures pour rationaliser le réseau existant. Le Comité est daccord avec ces deux points et recommande :
Recommandation 15 :
Que le Canada lance avec détermination une campagne mondiale visant à examiner en profondeur les organismes mondiaux uvrant dans le domaine du commerce et du développement afin détablir un réseau plus efficace, plus homogène et plus efficient. Lorsque ces institutions nauront plus de raison dêtre, elles devraient être démantelées.
En dernier lieu, le Sous-comité a été frappé dentendre un certain nombre dambassadeurs à lOMC dire à quel point il est important de rationaliser le mécanisme de règlement des différends à Genève. Il faut redoubler defforts pour éviter les litiges et contrer la tendance, encore faible mais croissante, au non-respect des décisions de lOMC (p. ex. laffaire des hormones bovines du Canada contre lUE). Il importe aussi dexaminer la possibilité de verser un dédommagement comme solution de rechange aux représailles. Nous recommandons par conséquent :
Recommandation 16 :
Que le gouvernement du Canada encourage les États membres de lOMC à entreprendre un examen complet des possibilités daccroître lefficience du mécanisme actuel de règlement des conflits. Il faudrait notamment analyser avec soin la nécessité détablir des limites de temps en matière de respect des règles de lOMC et lutilité daccorder une priorité plus élevée au dédommagement, par opposition aux représailles, comme mode de règlement des conflits.
E. Renforcer les liens transatlantiques officiels
Le Canada entretient avec lUnion européenne des liens divers, comprenant à la fois des initiatives gouvernementales et un projet du secteur privé financé par le gouvernement. Le principal instrument bilatéral régissant les relations économiques est lAccord cadre de coopération commerciale et économique de 1976, qui a donné naissance à un certain nombre de comités consultatifs. En 1990, une Déclaration transatlantique a également été signée. Plus récemment, la Déclaration politique et le Plan daction communs de 1996 ont établi des objectifs délargissement des relations bilatérales, et des ententes sont intervenues dans divers domaines : la coopération douanière, léquivalence vétérinaire, le droit de la concurrence et la reconnaissance mutuelle des vérifications de conformité des produits réglementés. Les liens officiels permanents consistent en un sommet semestriel auquel participent le premier ministre, le ministre des Affaires étrangères et le ministre du Commerce international, ainsi quen un comité mixte de coopération qui se réunit une fois par année. Ce comité comprend un sous-comité du commerce et de linvestissement qui se réunit une fois ou deux par année.
Des témoins ont dit au Comité que les efforts visant à resserrer les liens commerciaux entre lUE et le Canada navaient pas toujours été couronnés de succès dans le passé, mais certaines initiatives bilatérales récentes semblent plus prometteuses. Il sagit notamment de lInitiative commerciale Canada-Union européenne (ICCUE), de la mise sur pied dune table ronde Canada-Europe (TRCE) et du programme Traverser lAtlantique.
LICCUE a été lancée en décembre 1998 pour officialiser le volet commercial du Plan daction commun, lobjectif premier étant daccroître laccès aux marchés (à savoir laccès des sociétés canadiennes au marché de lUE) et la coopération économique bilatérale. Ses objectifs concernent un certain nombre de domaines, dont la coopération en matière de réglementation, les services, les marchés publics, la propriété intellectuelle, la concurrence, la coopération culturelle, les contacts entre entreprises, et le commerce électronique. Elle encourage aussi les consultations régulières sur les questions traitant du commerce multilatéral. Mais étant donné les obligations de la nation la plus favorisée auxquelles le Canada et lUE sont assujettis par exemple, nous ne pouvons pas négocier bilatéralement des concessions tarifaires avec lUE sans accorder les mêmes conditions à tous les membres de lOMC , lICCUE ne saurait servir dinstrument de libéralisation accrue du commerce15. Par son envergure, lICCUE ressemble à linitiative de commerce bilatéral conclue entre lUE et les États-Unis (le partenariat économique translantique).
Mais lICCUE a quand même donné des résultats, bien que limités. LAccord Canada-UE sur lapplication de la législation de la concurrence a été signé en juin 1999. La TRCE, formée dentreprises canadiennes et européennes, sest réunie deux fois, et elle poursuit ses efforts pour recruter plus de membres. Les discussions bilatérales sur les exportations de vins et dalcools ont donné des débouchés européens pour les vins de glace et les autres vins de qualité certifiée canadiens. La mise en uvre de lAccord de reconnaissance mutuelle Canada-UE sur la vérification de la conformité16 se poursuit, même si les progrès sont lents. La création du Groupe de travail sur lavancement des équivalences pourrait mener à lharmonisation des normes dans certains domaines. Et si le dossier de laccord de reconnaissance mutuelle sur les services professionnels progressait, cela serait certainement utile, de même que la poursuite du dialogue sur les enjeux biotechnologiques.
La principale critique contre lICCUE que le Sous-comité a entendue en Europe est quelle nest active que dans certains secteurs. Et selon Claude Carrière (directeur général, Politique commerciale générale, MAECI), les questions examinées par lICCUE sont complexes et nécessitent un dialogue transatlantique continu. Par exemple, la mise en uvre des accords sectoriels de reconnaissance mutuelle (ARM) peut mobiliser beaucoup de ressources et prendre du temps. Souvent, le problème tient au fait que les systèmes de réglementation des deux côtés de lAtlantique sont différents. C'est ainsi, comme le note M. Carrière, que les résultats se feront attendre au début. Par ailleurs, une collaboration plus étroite devrait prévenir les irritants dans les relations commerciales bilatérales.
Nous croyons que des efforts devraient être faits pour réduire les obstacles et faciliter laccès aux marchés européens, tout en continuant de rechercher un accord de libre-échange. Il faut poursuivre la négociation dARM au niveau Canada-UE, pour élargir lapplication des normes de reconnaissance mutuelle. Il y aurait lieu de trouver dautres mécanismes pour la facilitation des formalités douanières et de meilleurs mécanismes bilatéraux devraient être établis pour régler les problèmes commerciaux. Selon M. Keyes, les obstacles non tarifaires (comme les exigences et normes techniques complexes) doivent être examinés en permanence puisquils sont plus cruciaux pour le commerce que les droits de douane. Le Sous-comité recommande donc :
Recommandation 17 :
Que le gouvernement fédéral redouble defforts pour élargir les relations bilatérales Canada-UE. Dans le cadre de lInitiative commerciale Canada-Union européenne, diverses mesures pourraient être prises : négocier des accords de reconnaissance mutuelle dans un plus grand nombre de secteurs industriels, poursuivre les efforts de facilitation du commerce, établir de meilleurs mécanismes bilatéraux pour prévenir les irritants commerciaux. Il y aurait lieu denvisager la création dun groupe bilatéral dépendant de lICCUE qui serait chargé dexaminer systématiquement les obstacles au commerce Canada-UE découlant des normes réglementaires.
La table ronde Canada-Europe est un autre lien bilatéral récent. Elle a été créée en juin 1999 avec laide du MAECI et de la Commission de lUE. Il sagit essentiellement dun groupe consultatif de gens daffaires des deux côtés de lAtlantique désireux de développer et resserrer les liens transatlantiques et de faire profiter tant lUE que le Canada de leurs vues sur le commerce et linvestissement. À long terme, la TRCE espère devenir le principal promoteur de la libéralisation du commerce entre le Canada et lUE.
La table ronde est née de linitiative de plusieurs entreprises canadiennes et européennes installées à Bruxelles, dont lintention était de favoriser un dialogue dentreprise à entreprise entre le Canada et lUE, à la suite de léchec des discussions en vue de « trilatéraliser » le Transatlantic Business Dialogue EU-UE. Roy MacLaren, ancien ministre du Commerce international, vient daccepter la coprésidence canadienne de la TRCE, qui compte maintenant un directeur exécutif canadien à temps partiel (André Bouchard).
Jusquici, la table ronde a été une réplique assez modeste du Transatlantic Business Dialogue entre les EU et l'UE. Deux réunions ont été tenues depuis les débuts, mais les progrès ont été plutôt lents et les participants tant canadiens queuropéens commencent à peine à sattaquer aux défis du recrutement et du financement. Cela est regrettable, car les commentaires entendus en Europe vont dans le sens que des pressions accrues doivent être exercées par les entreprises sur les décideurs pour que les dossiers progressent, quil sagisse des ARM, de la facilitation du commerce, et ainsi de suite.
Pour que la table ronde réussisse à promouvoir les intérêts stratégiques et, au bout du compte, la libéralisation du commerce, il faut absolument encourager une plus grande participation du secteur privé des deux côtés de lAtlantique. Jayson Myers (premier vice-président et économiste en chef, Alliance des manufacturiers et exportateurs du Canada) croit qu'il vaudrait la peine que la table ronde tente détablir une relation officielle entre entreprises canadiennes faisant des affaires en Europe et entreprises européennes faisant des affaires au Canada, pour discuter des problèmes et des possibilités de commerce et dinvestissement et pour établir des contacts personnels.
Jusquà présent, la table ronde sest surtout adressée aux grandes entreprises. Mais il est important que les PME puissent y participer activement, étant donné leur rôle de plus en plus important dans les relations économiques transatlantiques. On pourrait ainsi envisager dabaisser les frais dadhésion de 6 000 dollars américains, qui risquent de décourager les petites entreprises.
Enfin, dans le mémoire remis au Sous-comité en mai 2001, la TRCE réclame un financement accru de ses activités en 2002 et en 2003. Nous croyons que le gouvernement fédéral peut jouer un rôle utile pour maintenir la table ronde sur sa lancée. Le Sous-comité recommande donc :
Recommandation 18 :
Que le gouvernement fédéral augmente sa contribution financière et encourage activement les entrepreneurs à participer à la table ronde Canada-Europe (TRCE). Il devrait également recommander à la TRCE de revoir sa formule de droits dadhésion afin de favoriser une plus grande participation des petites et moyennes entreprises.
Le programme Traverser lAtlantique est un autre mécanisme bilatéral qui tente de créer des débouchés commerciaux pour les petites entreprises. Cette initiative englobe une série de programmes conçus pour aider les exportateurs novices, particulièrement dans le secteur de la haute technologie, à pénétrer le marché européen. Lidée est damener les gens daffaires qui ont réussi à percer le marché à communiquer leurs connaissances aux nouveaux exportateurs au chapitre de la préparation de lentreprise, au moyen dune formule appelée « café-carrefour ».
Divers mécanismes bilatéraux lient le Canada à certains pays européens (plans daction avec la France, le Royaume-Uni, lItalie), en plus de commissions économiques avec des pays non membres de lUE, comme la Russie et lUkraine. Ces dernières amènent les hauts fonctionnaires et ministres du Commerce à se réunir régulièrement.
En conclusion, les déclarations dintention entre le Canada et lUE ont souvent donné peu de résultats concrets dans le passé. À notre avis, lICCUE est une version améliorée de ces mécanismes bilatéraux, mais son rythme de travail doit saccélérer. Les témoignages reçus par le Sous-comité indiquent une volonté de voir le gouvernement fédéral relancer les relations commerciales entre le Canada et lUE.
F. Réduire les barrières commerciales européennes
Dans lensemble, le Canada jouit dune relation commerciale fort acceptable, sans être spectaculaire, avec lUE. Le commerce bilatéral des biens et services entre le Canada et lUnion européenne dépasse les 60 milliards de dollars. Malgré un accès relativement favorable au marché européen, comme dans toute relation commerciale denvergure la nôtre est ponctuée de difficultés. Ainsi, avec les obstacles tarifaires et non tarifaires de lUE, il est parfois difficile de faire des affaires en Europe.
Si la plupart des échanges se font librement, il ne fait aucun doute que les entreprises canadiennes se sont heurtées à de véritables barrières en Europe, notamment pour le calcul des droits de douane, les règles douanières, létiquetage, lhomologation, les règles sanitaires et phytosanitaires, la réglementation, la structure des réseaux de distribution. Ces obstacles peuvent freiner lentrée de nos entreprises sur le marché européen et même en dissuader certaines de tenter leur chance. Le Sous-comité a déjà recommandé que le gouvernement fédéral accorde une priorité à lexamen de ces obstacles.
Nos relations économiques bilatérales sont dune telle ampleur quil ne faut pas sétonner de lexistence de certains irritants. Ces dernières années, les relations commerciales Canada-UE ont continué dêtre marquées par des frictions de longue date, mineures certes, mais néanmoins importantes, concernant les barrières tarifaires et non tarifaires qui frappent des produits comme le vin, le bois duvre, le poisson et les fruits de mer, le buf élevé aux hormones de croissance, le blé, les produits transgéniques comme le canola. Dautres différends, concernant des produits comme lamiante, les produits pharmaceutiques et lautomobile, ont été réglés récemment dans le cadre de lOMC.
Bon nombre de ces dossiers progressent lentement parce quon ne parvient pas à lancer un nouveau cycle de négociations commerciales multilatérales et que les progrès bilatéraux souffrent à la fois dun manque de volonté politique et des réalités politiques du secteur agricole de lUE (voir plus loin). Le malheur, cest que certains de ces dossiers commerciaux sont restés en plan pendant longtemps et que les efforts déployés pour trouver des solutions ont sans doute empêché les responsables gouvernementaux de se consacrer à un objectif plus noble, à savoir lamélioration des relations commerciales dans leur ensemble.
Lattention accordée à ces différends relativement mineurs occulte les relations économiques généralement positives que nous entretenons avec lUE. Dans certains cas, cependant, il faut dire que ces irritants font ou ont fait lobjet dun examen rigoureux. Dans plusieurs cas on peut penser aux normes réglementaires , le Canada et lUE travaillent de concert à régler ces problèmes. Le système de règlement des différends de lOrganisation mondiale du commerce (OMC) est un autre moyen pour supprimer ces irritants. En bout de ligne, il est essentiel dexplorer les deux options : se doter de mécanismes bilatéraux efficaces pour régler les différends ou recourir à ceux de lOMC.
Le Sous-comité pense comme M. Paterson quil serait de loin préférable que la question des barrières commerciales ne nuise pas à lexploitation de débouchés en matière de commerce et dinvestissement. Celui-ci estime quil faut mettre davantage laccent sur le commerce et linvestissement dans la nouvelle économie, à savoir le secteur des technologies de pointe, où il existe peu de barrières au commerce, sauf peut-être pour les normes du matériel de télécommunications dont on souhaite la normalisation à léchelle de lEurope. Les politiques européennes dans des domaines comme le commerce électronique, le commerce des services, la déréglementation et la privatisation, la propriété intellectuelle et les règles de concurrence sont déterminantes pour les perspectives de croissance des entreprises canadiennes de haute technologie sur le marché de lUE.
Il ny a rien détonnant à ce que le secteur agricole et agroalimentaire ait donné lieu à un nombre disproportionné de différends commerciaux entre le Canada et lUE. Depuis une bonne quarantaine dannées, lagriculture est une pomme de discorde dans les négociations commerciales. Par exemple, les négociations multilatérales du cycle dUruguay qui ont donné naissance à lOMC contenaient relativement moins de concessions sur lagriculture que dans les autres secteurs.
Néanmoins, le Canada a connu plusieurs succès en UE. Seuls trois pays, dont le Canada, ont un accord sur les normes vétérinaires avec lUE, qui réglemente le commerce des animaux, du poisson et des produits du poisson. Laccord prévoit des mécanismes permettant la reconnaissance de mesures sanitaires équivalentes entre le Canada et lUE en vue de faciliter les échanges commerciaux. En outre, le Canada exporte de fortes quantités de viande de bison et de cheval en UE, ainsi que des légumes, comme les graines de lentille et de moutarde (dont celles qui entre dans la fabrication de la moutarde de Dijon).
Dans les relations Canada-UE, les irritants du commerce agricole ont essentiellement trois sources : la politique agricole commune (PAC) de lUE, la préoccupation de longue date des Européens en matière de sécurité alimentaire (due à une série de catastrophes sanitaires), ainsi que les irritants commerciaux habituels.
La politique agricole commune (PAC) de lUE et la protection quelle assure aux producteurs agricoles européens constituent pour le Canada une préoccupation capitale en matière de commerce bilatéral. En subventionnant la production agricole, la PAC a permis à lEurope, autrefois un importateur net daliments, de devenir un important exportateur net17. Le droit de douane agricole moyen de lUE est quatre fois plus élevé que celui du Canada, et les prix de soutien élevés et le réseau de subventions font des agriculteurs de lUE les plus subventionnés du monde.
La PAC, par son utilisation de subventions liées à la production, entraîne une surproduction des produits agricoles de base. Cette production excédentaire est achetée au prix dintervention de lUE, qui est beaucoup plus élevé que les prix mondiaux. LUE subventionne ensuite lexportation de ces produits, ce qui permet de les vendre à des prix compétitifs sur les marchés mondiaux. Cela tend à faire baisser les prix mondiaux et à restreindre laccès des producteurs canadiens aux tiers marchés. Selon Mike Gifford (conseiller commercial spécial auprès du sous-ministre dAgriculture et Agroalimentaire Canada), lUE versait au moins 85 % des subventions à lexportation des produits agricoles dans le monde. Les barrières tarifaires conventionnelles, ainsi que les mesures de soutien internes et la réglementation adoptée, restreignent laccès du Canada au marché agricole européen. De point de vue du Sous-comité, la PAC est une barrière commerciale coûteuse.
Déjà, lAgenda 2000 de lUE a fait diminuer légèrement les mesures de soutien des prix agricoles et na pas éliminé les subventions directes liées à la production18. Le gouvernement canadien est davis quil faut continuer de presser lUE à réformer la PAC, mais des témoins de lUE et dailleurs, dont le commissaire au commerce de lUE, Pascal Lamy, ont dit au Sous-comité que lUE elle-même subissait déjà des pressions de lextérieur et de lintérieur pour quelle réforme la PAC, et que cette réforme sans doute substantielle est inévitable.
Le Sous-comité a appris que bien des Européens se demandent pourquoi les agriculteurs et non dautres groupes devraient être subventionnés à ce point. Toutefois, les plus fortes pressions viendront probablement de lélargissement prévu de lUE. Ainsi, quelque 15 à 20 % du PIB de la Pologne est généré par le secteur agricole qui emploie aussi 25 % de la population (contre 3 % en Allemagne). Si la PAC est étendue sans changement au reste de lEurope orientale qui est relativement peu développée, comme certains candidats à lélargissement lexigent, elle fera monter le pourcentage de la population dans le secteur agricole. Cela aura ensuite pour effet de gruger plus de la moitié du budget que lUE consacre actuellement à la PAC, une contrainte inadmissible pour elle. De plus, les finances de la France, qui est le pays le plus favorable à la PAC, sont serrées. Il est donc peu probable que celle-ci, ou tout autre membre de lUE à ce compte, appuie une augmentation du budget de la PAC.
De lextérieur, lOMC et la perspective dune nouvelle ronde continueront dexercer de fortes pressions sur la PAC. En 2003, la « disposition de paix » prévue dans lAccord de lOMC sur lagriculture sera échue et les subventions de lUE pourront être contestées. Toutefois, des témoins ont dit au Sous-comité quun tel stimulant pourrait être utile, mais que la lourdeur du mécanisme de règlement des différends de lOMC en limitait lutilité.
La PAC sera modifiée. LAgenda 2000 doit être revu en 2002. Le commissaire à lagriculture, Franz Fischler, a indiqué quil sattend que dautres modifications devront être apportées aux niveaux de soutien, après cet examen à mi-terme, à moins dune remontée importante des prix. Le commissaire au commerce de lUE, Pascal Lamy, a dit au Sous-comité quil ne prévoit aucune difficulté à engager lUE à réduire ses subventions à lexportation et son soutien intérieur et à améliorer laccès à son marché. Au cours des audiences quil a tenues en Europe, le Sous-comité sest souvent fait dire que le scénario le plus probable ne prévoit aucun changement net dans le financement, mais un soutien du revenu des agriculteurs plutôt que des prix, donc un « découplage » des subventions à la production qui faussera moins les échanges commerciaux.
Cela sinscrit dans loptique de lUE qui sest faite le champion de la multifonctionnalité. Cette approche met laccent sur les avantages non économiques de lagriculture (p. ex. les loisirs, la préservation dun paysage rural agréable, le tourisme, le maintien du mode de vie rural, lécologie), ce qui permettrait à lUE de changer ses subventions en soutien à lenvironnement, à la préservation des paysages et aux régions. Les témoins de la Commission de lUE ont dit au Sous-comité que ce changement devrait fausser moins les échanges commerciaux, mais la multifonctionnalité est considérée par certains comme un moyen pour lEurope de continuer à justifier des mesures importantes de protection et de subvention à lexportation. Le Sous-comité est davis que le Canada, par lentremise de lOMC, devrait continuer dexercer des pressions sur lUE pour sassurer que la multifonctionnalité nest pas un prétexte au protectionnisme. Nous recommandons par conséquent :
Recommandation 19 :
Que le gouvernement du Canada veille à ce que toute aide assurée par lUE pour préserver la multifonctionnalité de lagriculture ne soit pas de nature à fausser les échanges commerciaux. Le gouvernement devrait, de concert avec lUE, élaborer une définition internationale du principe de la multifonctionnalité.
Il faut donc se demander à quel rythme se produira la prochaine réforme de la PAC puisque le contexte politique régissant lagriculture en Europe est extrêmement sensible et complexe. Selon M. Gifford, il est raisonnable denvisager lhorizon de 2002-2003. Entre-temps, il ne faut pas sattendre à dautres interventions, des élections étant prévues en France et en Allemagne, les deux principaux membres de lUE.
Le simple jeu de léconomie et les pressions de lextérieur sont des facteurs importants, mais on est loin dune réforme en profondeur de la PAC. Même si elle est souvent considérée en termes purement économiques, la PAC est dune importance vitale, sur les plans tant économique que culturel, pour lUE (surtout pour la France qui, avec lAllemagne, constitue le noyau de lUE). Le Sous-comité a appris que, dans la structure actuelle de la PAC, la France reçoit plus dargent de Bruxelles quelle nen donne. Lambassadrice des É.-U. à lOMC, Rita Hayes, a indiqué quil vaut mieux sattacher à pousser lUE à changer de cap.
Le Sous-comité est daccord avec cette évaluation : la réforme de la PAC est inévitable, mais le Canada devrait faire pression pour sassurer que la réforme répond autant que possible à ses préoccupations. La conjoncture actuelle est très favorable pour le Canada (et lUE). Comme M. Lamy la dit au Sous-comité, la réflexion en cours sur la PAC en Europe et lélargissement de lUE lui permettra dopérer plus facilement des changements, vraisemblablement dans le cadre de négociations multilatérales sur le commerce.
Daprès les témoignages recueillis au Canada et en Europe, le Sous-comité est davis que les négociations permanentes de lOMC sur lagriculture, jumelées à une nouvelle ronde de pourparlers de lOMC, constituent pour le Canada le meilleur moyen dinfluencer positivement la réforme de la PAC. Plusieurs témoins ont répété que la meilleure façon de progresser en matière dagriculture, cétait sans doute de tenir une ronde de négociations multipartite qui, en multipliant les possibilités dententes, facilitera la conclusion dun accord sur lagriculture. Malgré cette perspective favorable la réforme agricole prendra du temps et nécessitera une grande diligence.
Lors des négociations sur lagriculture, le Canada sest associé à des pays comme les États-Unis et des membres du Groupe de Cairns des pays exportateurs de produits agricoles pour exhorter les Européens à apporter des changements substantiels dans trois domaines fondamentaux : éliminer les subventions à lexportation, améliorer considérablement les conditions daccès à leur marché, et réduire sensiblement ou éliminer les mesures internes de soutien de la production qui faussent les échanges (les subventions à la production). Le Canada a aussi réclamé le plafonnement de toutes les formes de soutien interne19. Le Sous-comité appuie sans réserve ces grands objectifs de négociation. Nous espérons que les changements qui seront négociés contribueront à uniformiser les règles du jeu pour les producteurs agricoles canadiens et quils leur seront utiles. Le Sous-comité recommande par conséquent :
Recommandation 20 :
Que, dans le cadre des négociations de lOMC relatives à lagriculture, le Canada ne sécarte pas trop, sur le fond, de son objectif premier à ces négociations, qui consiste a) à obtenir que lUE cesse de subventionner ses exportations de produits agricoles; b) à accroître considérablement laccès des producteurs agricoles du Canada au marché européen et c) à obtenir que les subventions à la production pratiquées par lUE ne soient pas de nature à fausser les échanges commerciaux.
Les craintes que suscite la sécurité des aliments constituent lun des plus importants défis que doivent relever les producteurs canadiens cherchant à vendre des produits sur le marché de lUE . Pour les Européens, les catastrophes dans ce secteur se sont suivies les unes après les autres au cours de la dernière décennie. À la suite des échecs du système réglementaire de lUE, de la maladie de la vache folle (EBS) à la récente épidémie de fièvre aphteuse, les citoyens sont dorénavant extrêmement craintifs et ne font plus confiance au système de réglementation de leur propre pays. Comme le directeur général de lOMC, Mike Moore, la précisé en toute franchise aux membres du Sous-comité (ainsi que beaucoup dautres témoins), les consommateurs européens ont tout simplement perdu toute confiance en leur gouvernement pour tout ce qui touche la sécurité des aliments. En raison de cela et de la très grande inquiétude des citoyens européens à légard de leur approvisionnement alimentaire, tous les produits, du buf aux hormones aux aliments génétiquement modifiés (OGM), sont vus du même oeil.
Pour tenter de corriger déventuelles lacunes dans le contrôle de la sécurité alimentaire, rétablir la confiance et protéger la santé du public, lUE applique de plus en plus le principe de précaution dans la formulation des décisions réglementaires de lUnion20. Du point de vue de notre pays, le « principe de précaution », en vertu duquel on devrait interdire un produit risquant dêtre nocif (même si les données scientifiques ne sont pas concluantes), devient un obstacle au commerce. Le Canada est plutôt en faveur dune évaluation des produits à chaque étape de leur utilisation, mais au moyen dun processus davantage axé sur des données scientifiques.
Bien que le Sous-comité reconnaisse que le principe de précaution simpose à chaque étape de processus danalyse du risque, il convient que les décisions réglementaires dans ce domaine doivent demeurer fondées sur une évaluation scientifique du risque. Lapproche de précaution ne devrait pas être appliquée à létape de lévaluation du risque comme mesure de protection supplémentaire et sans nécessairement chercher à obtenir dabord une évaluation scientifique. On craint que lemploi indu de cette approche nait contribué à paralyser lapprobation des produits alimentaires transgéniques en Europe.
Toutefois, après des entretiens avec des représentants et des gens daffaires de lUE ainsi quavec nos ambassadeurs à létranger, le Sous-comité est pessimiste quant à nos chances de faire progresser le dossier de la sécurité alimentaire. On a répété à de nombreuses reprises au Sous-comité que la réalité politique imposée par un public craintif avait rendu presque impossible la modification du processus dapprobation afin de le fonder sur les études scientifiques requises.
Le fait que le public lie dorénavant sécurité alimentaire et les OGM a considérablement nui aux exportations canadiennes de produits alimentaires dans plusieurs secteurs, le plus notable étant le canola génétiquement modifié21. Les exportations canadiennes de ce produit en Europe, qui avaient été approuvées par la Commission européenne, sont maintenant victimes de linquiétude du public, de la forte résistance des consommateurs et des producteurs, et de la capacité dune minorité de membres de lUE de bloquer lapprobation réglementaire de nouvelles variétés génétiquement améliorées de produits agricoles. Ces facteurs ont imposé un moratoire de fait sur lapprobation dOGM dans la zone UE.
Dans un effort pour débloquer le processus dapprobation et rétablir la confiance du public à légard des OGM, la Commission européenne a proposé en juillet 2000 une stratégie qui prévoyait une nouvelle loi sur lapprobation des OGM pour lUE. Cette mesure a été officiellement approuvée par le Parlement européen le 14 février 2001, puis renvoyée aux États membres qui ont 18 mois pour transformer cette directive en loi nationale. Toutefois, dans les 24 heures suivant son approbation, les États membres récalcitrants ont exigé de nouvelles concessions comme des modifications au régime détiquetage des OGM de lUE et un système de traçabilité des OGM qui nécessiterait des documents spéciaux pour les expéditions vers lUE de céréales et oléagineux GM. Au mieux, le régime dapprobation des OGM de lUE ne sera pas approuvé avant lautomne 2002.
En 1995, les exportations canadiennes de canola génétiquement modifié ont culminé à 425 millions de dollars. Vu la situation actuelle de la réglementation en Europe, les exportations canadiennes de canola vers lUE sont effectivement éliminées depuis 1997. Le gouvernement fédéral est évidemment sensible aux pertes subies par les producteurs canadiens de canola.
La position du gouvernement du Canada, corroborée par plusieurs rapports scientifiques de la Commission européenne, est que le canola produit au Canada ne présente aucun risque pour la santé ou lenvironnement. Toutefois, comme un témoin la signalé, les décisions prises sont actuellement fondées pour 80% sur les perceptions et pour 20% sur des données scientifiques, ce qui fait quil est on ne peut plus difficile de défendre lexcellente position du Canada dans ce dossier. Par conséquent, comme M. Lamy la signalé au Sous-comité, le problème des OGM est davantage politique que technique.
Des progrès en matière détiquetage pourraient ultérieurement contribuer beaucoup à la solution de ces problèmes. Toutefois, même cette question se révélera litigieuse. En raison de la mauvaise réputation des OGM, les producteurs européens craignent que létiquetage de leurs produits nentraîne chez les consommateurs un mouvement de ressac qui ruinerait leurs marques. Des groupes comme Greenpeace, qui combattent les OGM, ont plus de crédibilité que les gouvernements européens sur les questions écologiques et pourraient donc renforcer lopposition aux OGM. De plus, dans plusieurs régions de lEurope, les gens sopposent pour des raisons idéologiques aux OGM, par exemple aux plantes résistantes aux herbicides.
Le Canada a engagé un dialogue sur cette question avec la Commission européenne au niveau technique et réglementaire (entre scientifiques et spécialistes), dans le but ultime daméliorer la compatibilité de nos systèmes dapprobation respectifs. Le gouvernement fédéral continuera de chercher à ouvrir le marché dexportation pour le canola GM canadien, bien que M. Carrière ait laissé entendre quil faudra du temps pour y arriver. Quant aux aspects positifs, on a bien souligné au Sous-comité que les Européens commencent à discuter des OGM : des attitudes plus réceptives commencent à émerger au Parlement européen et certains groupes de la société européenne, comme les milieux daffaires allemands, sont favorables à une modification du processus dapprobation des aliments pour le rendre davantage scientifique.
À propos de cette question, Don Knoerr (coprésident du Groupe de consultations sectorielles sur le commerce extérieur agriculture, aliments et boissons) a signalé quil fallait harmoniser la réaction internationale (c.-à-d. ce que font les autre pays) et la réaction nationale, qui est en train de se développer. Il faut établir des définitions des produits génétiquement modifiés (GM) ou produits de la biotechnologie, des règles en matière détiquetage et une procédure réaliste, efficace et scientifique pour déterminer les risques liés à lutilisation de la biotechnologie moderne.
Comme un témoin du secteur agroalimentaire de lUE la souligné, les progrès dans ce secteur seraient certainement facilités si lUE ne connaissait pas une autre catastrophe alimentaire au cours de la prochaine décennie. Cependant, le Canada devrait continuer à militer en faveur de ladoption de normes internationales dans ce domaine. À long terme, la solution logique consiste à fixer des normes scientifiques que tous les pays peuvent accepter. Le Sous-comité recommande :
Recommandation 21 :
Que le gouvernement du Canada uvre avec diligence au sein de la communauté internationale pour parvenir à une entente sur les définitions des produits génétiquement modifiés (GM) ou transgéniques, sur des normes scientifiques de production de ces produits acceptables par tous les pays et sur les règles détiquetage requises.
Le Sous-comité reconnaît que ce qui distingue surtout le Canada et lUE concernant le principe de précaution tient à léchec du régime réglementaire de cette dernière. Comme M. Lamy la indiqué au Sous-comité, les Européens sont notamment contre les OGM, contrairement au Canada. Pourtant, ils ont eu tendance à dénigrer nos méthodes de production dans certains cas et à justifier ainsi limposition de restrictions au commerce. Le défaut de reconnaître les normes canadiennes est un problème tant politique que scientifique; il demeure toutefois vital que le Canada et lUE poursuivent le dialogue. Afin de favoriser la compréhension, ce dialogue devrait comporter des échanges réguliers entre des représentants des ministères qui ne soccupent pas de commerce, tels ceux de lEnvironnement, du Travail et de lIndustrie. Le Sous-comité est daccord avec Mme Macmillan : Le Canada doit mieux défendre ses excellentes normes en matière de santé, de sécurité et denvironnement et dans les domaines techniques auprès des décideurs européens.
Recommandation 22 :
Que le gouvernement du Canada, en concertation avec les provinces, saisisse toutes les occasions délargir la coopération entre le Canada et lUE aux fins de lélaboration de la politique régissant la réglementation dans les domaines de la santé, de la sécurité et de lenvironnement ainsi que dans les domaines techniques, et dinformer les décideurs européens et, au besoin, le grand public de lexpérience du Canada en matière de réglementation. Ces efforts devraient passer par les missions du Canada à létranger, les associations industrielles actives en Europe et la participation du Canada aux organisations internationales chargées de létude, de létablissement et du contrôle des normes.
Comme il a été signalé, le Canada et lEurope ne partagent pas le même point de vue sur la biotechnologie et lapplication de lapproche de précaution. Il semble y avoir des différences dans leurs façons dinterpréter cette approche. La récente publication par lUE dun document sur la question (« Communication de la Commission sur le recours aux principes de précaution »), sans jeter de lumière sur certains aspects importants (p. ex. assurer un niveau zéro de risque et déterminer le niveau adéquat de protection), donne néanmoins aux deux camps loccasion de préciser le sens et lapplication de lapproche de précaution et de chercher à sentendre sur ces points. Cela savèrera particulièrement important alors que les deux parties se préparent pour le Sommet de lOMC au Qatar, où on sattend que le principe de précaution soit vivement débattu22. Nous recommandons :
Recommandation 23 :
Que le Canada et lUnion européenne cherchent à convenir du sens à donner à lapproche de précaution et de la façon de lappliquer à la réglementation. Fondamentalement, il faudrait en convenir dans un contexte multilatéral.
En 1989, lUE a pris une décision fort contestée : elle a interdit le traitement du bétail aux hormones de croissance ainsi que limportation du buf ainsi traité, dénotant ainsi le peu de confiance que les Européens portent à leur régime de réglementation. Le Canada, comme les États-Unis, sest toujours opposé à cette interdiction, parce quil ne croit pas quelle soit fondée scientifiquement. Le gouvernement fédéral croit que cette interdiction constitue ainsi une barrière non tarifaire injustifiée au commerce. En outre, lorganisme international qui établit les normes de sécurité alimentaire (Codex Alimentarius) a souscrit à linnocuité des hormones de croissance.
Le Canada et les États-Unis ont contesté linterdiction des importations du buf hormoné et obtenu gain de cause auprès de lOMC. Après que des consultations directes avec lUnion européenne aient échoué, le Canada a demandé que le différend soit soumis à un groupe spécial de lOMC en 1996. Les rapports présentés par le groupe spécial (août 1997) et par lorgane dappel de lOMC (janvier 1998), mis sur pied pour instruire lappel de la décision du groupe spécial, étaient favorables aux intérêts canadiens. Toutefois, lUnion européenne nayant pas respecté la décision de lOMC par la modification de ses règlements, le gouvernement du Canada a été forcé de prendre des mesures de représailles contre elle. Ces mesures des tarifs de 11,3 millions de dollars sur le buf, le porc, les concombres et les marinades dEurope ont été approuvées par lOMC en juillet 1999. LUnion européenne continue de prétendre que son interdiction est fondée en science et nest pas une mesure protectionniste, vu que, selon elle, partage lOMC dont la décision faisait une critique de son processus dévaluation et indiquait que sa position était fondée en science.
En mai 2000, la Commission européenne annonçait son intention que, dici un an, elle rendrait permanente linterdiction temporaire sur une hormone de croissance du buf; elle maintiendrait également une interdiction provisoire sur cinq autres hormones. Cette décision a été prise après quun comité scientifique consultatif de lUE ait réaffirmé son opinion de lan dernier. Selon M. Lamy, linterdiction na rien à voir avec le protectionnisme, mais est plutôt liée à la crainte du risque de lUE. En Europe, plusieurs témoins ont dit au Sous-comité que, dans lesprit de la population, la question des hormones bovines est liée à limage négative qui est associée à la maladie de la vache folle. Par conséquent, lUE préfère se voir imposer des tarifs plutôt que de lever linterdiction.
Dans ses relations avec lUE, le Canada est aussi confronté à plusieurs problèmes plus traditionnels daccès au marché européen, dont certains ont déjà été mentionnés. Parmi les plus litigieux, deux ont trait, selon le Canada, aux barrières non tarifaires sur le vin et le bois duvre résineux.
Jusquà très récemment, laccès des vins canadiens au marché européen a été très limité. Les échanges ont été extrêmement inégaux, le Canada important pour 545 millions de dollars de vins européens en 2000 et nos exportations se limitant à 350 000 $ à peine. Historiquement, il a été difficile de faire entrer les vins de qualité canadiens sur le marché européen, alors que lUE a eu facilement accès au marché canadien sans avoir eu à négocier dententes spéciales. Dans la recherche dune solution à ce différend bilatéral, le Canada sest toujours fixé comme objectif principal dobtenir un accès sûr et prévisible au marché européen pour ses vins de qualité. Roger Rangolph (président du Canadian Wine Institute) a dit au Sous-comité, au printemps 2000, que les producteurs de vins canadiens pourraient exporter quelque 20 millions de dollars de produits du vin par an en Europe si le marché était ouvert; les recettes proviendraient en grande partie de la vente du vin de glace.
Heureusement, laccès au marché européen du vin sest beaucoup amélioré. En avril 2001, le Canada a atteint son objectif de longue date : convaincre lUnion européenne de permettre (par la voie dune dérogation ou dune exemption) la vente du vin de glace canadien, joyau et principal produit dexportation de lindustrie canadienne du vin, sur le marché européen. (Le Canada est le premier producteur mondial de vin de glace.) Selon les déclarations faites par des représentants du MAECI dans le National Post, il a été convenu de lever linterdiction de 20 ans après que le Canada eût pris une série de mesures de contrôle de la qualité relativement au taux de sucre et dacidité du vin23.
La dérogation de lUE vise également les importations de vins de qualité certifiée de deux provinces canadiennes (Ontario et Colombie-Britannique) dont les processus de certification (et la législation sy rapportant) respectent ou dépassent les normes de lUE. Aujourdhui, les vins canadiens désignés de qualité peuvent entrer sur le marché européen, nétant limité que par la demande pour ces produits.
En échange, le Canada a aussi accepté de discuter avec lUE de tous les points de litige concernant les vins et les spiritueux, y compris la question de lutilisation dindicateurs géographiques (lUE veut que le Canada impose à ses producteurs de vins de ne plus utiliser certaines appellations dorigine de lUE, tels le champagne, le porto et le sherry, ce que lindustrie canadienne a maintenant accepté de faire), des appellations descriptives et de la structure des sociétés des alcools provinciales. Ces discussions se poursuivent.
Pour empêcher lintroduction en Europe du nématode du pin, lUE insiste, depuis juillet 1993, pour que tout le bois duvre résineux exporté du Canada, à lexception du cèdre, soit traité à la chaleur. Ce règlement a éliminé dans les faits les exportations canadiennes de ce produit en augmentant considérablement les coûts de production des entreprises canadiennes. Avant 1993, le Canada exportait pour environ 400 millions de dollars par an de bois non traité en Europe. À compter du 1er octobre 2001, cette interdiction a été élargie aux matériaux demballage en bois (du Canada, des États-Unis, de la Chine et du Japon); comme la plupart des produits manufacturés peuvent être emballés dans des produits du bois, les estimations indiquent que la mesure pourrait toucher jusquà 70 % des exportations canadiennes vers lUE. La Commission sest engagée sur son honneur à appliquer linterdiction de manière proportionnelle et avec prudence, en échange de rapports canadiens sur la progression vers la conformité du Canada. Le MAECI attend une réponse à sa lettre dans laquelle il explique ce quil comprend de cet engagement et il propose un échange officiel de lettres pour préciser comment les mesures seront progressivement appliquées.
Le Canada a tenu des consultations poussées avec lUnion européenne à cet égard. Selon Claudio Valle, (directeur, Obstacles techniques et Réglementation, MAECI), le Canada a fait valoir que, après une très longue période dessai 350 ans déchanges commerciaux , on a relevé peu deffet, si ce nest aucun, dans les forêts européennes, démontrant ainsi clairement que cette petite bestiole ne se déplace pas à moins dêtre transportée dans des conditions essentiellement idéales de chaleur élevée, etc. On assiste jusquà maintenant à une bataille de scientifiques.
Le Canada continue de croire quil est devenu victime dune réglementation trop exigeante du bois duvre résineux non traité visant à contrôler le nématode du pin. Le gouvernement canadien sest constamment opposé à cette réglementation, en soutenant que le risque de transmission du parasite aux forêts européennes est minuscule.
Le Canada songe actuellement à contester linterdiction européenne. Selon M. Valle, le Canada a averti les Européens quil souhaitait un règlement à lamiable, mais que si une entente nest pas possible, il est convaincu que la science est en sa faveur. Les pourparlers se poursuivent mais rien ne semble progresser. Il se peut que le Canada doive sadresser à lOMC pour obtenir essentiellement un règlement à cet égard.
G. Composer avec lélargissement de lUE
Comme nous lavons indiqué plus haut, lélargissement de lUE dans cette décennie pourra faire passer à 30 le nombre de pays membres. Outre les 15 membres actuels, il y a maintenant au moins une douzaine de candidats possibles.
Malgré les contraintes déjà mentionnées que cela exercera sur le budget de lUnion européenne (à cause de la politique agricole commune), lélargissement de lUE pour englober des pays de lEurope centrale et orientale devrait ouvrir certains débouchés aux entreprises canadiennes et rendre plus prévisible et stable lenvironnement commercial de ces pays. Ainsi, le Canada a commencé à faire du commerce avec certains pays de la région et, comme la fait observer Martin Rice (directeur exécutif du Conseil canadien du porc), certains secteurs (dont celui du porc) croient que ce commerce peut sintensifier. Ces pays auront aussi besoin daide pour rendre leurs économies conformes aux critères de lUE, ce qui créera, pour les entreprises canadiennes des débouchés en investissement et en technologie de lenvironnement. En outre, les taux consolidés des tarifs extérieurs communs de lUE sont dans bien des cas plus faibles que ceux que doivent payer ces nouveaux adhérents. Dans ces cas, laccession des pays à lUE pourrait ouvrir plus grand le marché aux entreprises canadiennes.
En outre, lélargissement offre aux pays dEurope centrale et orientale la possibilité daugmenter le revenu de la population, faisant ainsi de la région un marché plus intéressant pour les investisseurs et les exportateurs canadiens. Comme John Murray (conseiller, Banque du Canada) lindiquait au Sous-comité, « il se peut quon assiste à de légers détournements commerciaux au fur et à mesure que les nouveaux adhérents intégreront lUnion européenne, mais cela encouragera peut-être ces derniers à se développer plus rapidement Or cela est à lavantage de tout le monde, car si ces pays senrichissent, ils seront en mesure dacheter davantage de nos produits. Encore une fois, cette nouvelle donne pourrait être à lavantage de tout le monde».
La croissance escomptée de lUE par ladhésion de ces pays pourrait aussi avoir des conséquences économiques nuisibles pour le Canada. Alors que le Canada a toujours appuyé le processus dintégration européenne comme moyen de favoriser la stabilité et la prospérité économique, des élargissements antérieurs ont malheureusement eu pour résultat décarter certaines exportations canadiennes destinées à lEurope. Autrement dit, lélargissement de lUE a privé le Canada de certains échanges et entraîné un déplacement de lactivité économique, laccès bilatéral dont le Canada jouissait auparavant se modifiant.
Il pourrait en être de même de tout nouvel élargissement de lUE : les tarifs sur certaines de nos exportations seront augmentés, ce qui réduira laccès aux marchés dont jouissaient nos produits. Dans ces cas, le Canada est autorisé à négocier une compensation pour la perte de ces marchés. Cela se fait selon les règles actuelles de lOMC daprès les niveaux déchange de produits donnés au cours des trois ans précédant laccession dun pays. Mais la négociation dune compensation pour cause délargissement sest avérée longue et ardue par le passé. En outre, une compensation sous forme dun accès accru peut concerner un autre produit, ou même un secteur entièrement différent de celui où le déplacement des échanges sest produit.
Il est extrêmement important que le Canada veille à ce que lélargissement ne nuise pas de façon générale à ses intérêts économiques. On espère que lexpansion de lUE ne se soldera pas par une diminution nette de laccès du marché européen aux produits canadiens.
Le gouvernement du Canada étudie actuellement les répercussions économiques possibles de lélargissement de lUE sur les intérêts du pays en matière de commerce et dinvestissement. De lopinion du Sous-comité, les fonctionnaires fédéraux devraient analyser les élargissements antérieurs pour voir quelles leçons en tirer. Le gouvernement devrait aussi élaborer une stratégie efficace face à lélargissement prochain de lUE, stratégie qui comprendrait déventuelles mesures propres à resserrer les liens commerciaux avec les pays dEurope centrale afin de compenser la réorientation des échanges occasionnée par lélargissement. Nous recommandons donc :
Recommandation 24 :
Que le gouvernement fédéral rende public toute évaluation éventuelle des effets probables de lélargissement de lUE sur léconomie canadienne. À la lumière de cette évaluation, le gouvernement devrait formuler une stratégie initiale efficace pour faire face à lélargissement à venir. Il devrait aussi étudier la question dune éventuelle indemnisation de laccès perdu et fournir aux entreprises canadiennes de linformation à jour et ciblée sur le marché européen élargi.
Réagir aux coûts possibles de lélargissement demeure la considération politique officielle la plus cruciale, mais le Sous-comité aimerait sarrêter à une autre préoccupation qui a été soulevée au cours des audiences. Selon M. Paterson, il faut voir à renforcer la protection des droits de propriété intellectuelle dans les pays de lEurope centrale et orientale car la question peut opposer un grand obstacle au commerce avec ces pays. Les droits de propriété intellectuelle nexistent pas ou ne sont pas respectés dans nombre des pays en question, pourtant les entreprises qui y font affaire ne veulent pas simplement donner les idées qui leur ont permis délaborer leurs produits. Pour aider à renforcer la protection des droits de propriété intellectuelle dans cette région du monde, le Sous-comité recommande :
Recommandation 25 :
Afin de contribuer efficacement à renforcer les relations économiques bilatérales entre les pays de lEurope centrale et orientale et le Canada tout en aidant notre secteur de haute technologie, que le gouvernement fédéral, par des organismes multilatéraux, encourage et aide ces pays à établir et surtout à appliquer des droits de propriété intellectuelle dans la région.