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HRPD Rapport du Comité

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PARTIE 3 -
L'AVENIR DU SYSTÈME DE NUMÉROS D'ASSURANCE SOCIALE :
CONSIDÉRATIONS STRATÉGIQUES

Le Comité a signalé, au début du présent rapport, que ses audiences sur le système de numéros d'assurance sociale ont soulevé plus de questions qu'elles n'ont permis d'en régler. Il s'est constamment heurté, tout au long de ses travaux, à la réalisation que la solution aux problèmes administratifs immédiats (abordés à la partie 2) dont le rapport du vérificateur général fait état ne s'attaque pas au problème central et fondamental du contexte dans lequel le système de NAS est utilisé. Nous n'avons pas tardé à comprendre que notre travail, en tant que parlementaires, consistait à déterminer dans quelle mesure le système a évolué et s'est éloigné du but initial. À maintes reprises, divers témoins ont réitéré l'importance fondamentale de clarifier l'objet du NAS.

Le débat élargi sur les politiques gouvernementales devrait donc viser à répondre aux questions suivantes :

    1. Faudrait-il revenir au but initial du NAS, qui était de servir de numéro d'identification des dossiers des programmes gouvernementaux? Si oui, serait-il possible de récupérer le système en donnant suite aux recommandations formulées ci-desssus ou devrait-on faire table rase et le remplacer par une nouvelle carte, comme une carte du millénaire fondée sur la technologie de pointe des « cartes à mémoire » munies d'une puce informatique, ou par un identificateur biométrique?

    2. Le moment est-il venu de reconnaître ce à quoi le NAS sert en réalité et de prendre des mesures pour le convertir en numéro personnel d'identification de chaque résident du Canada? L'adoption d'une telle carte peut-elle s'accompagner, pour protéger la vie privée de chacun, du recours au cryptage et à d'autres possibilités qu'offre la carte à puce?

Le Comité abonde vivement dans le sens de ce que certains témoins lui ont dit, à savoir que toute tentative de transformer le NAS en numéro national d'identification doit s'accompagner d'un vaste débat politique et d'un apport adéquat et approprié du grand public. La création d'un système national d'identification présente des problèmes de protection de la vie privée qu'il faut résoudre. La vie privée est trop fragile et les moyens d'en garantir la protection trop faibles, et susceptibles de le rester. Il faudrait compenser par des moyens techniques et légaux adéquats de sauvegarde la très forte tentation, autant pour le secteur public que privé, d'utiliser les données de tout système national d'identification à d'autres fins ou sans autorisation.

Nous croyons cependant nécessaire de donner aux citoyens l'occasion de peser les coûts et avantages de tout changement notable du NAS ou de son successeur, et d'en débattre publiquement. Il serait encore ici très tentant de détourner un système remanié de NAS ou une nouvelle carte de son objet initial. La dérive de la finalité, aiguillonnée par le besoin d'« efficacité », est un puissant argument. Sur le plan individuel, les citoyens ne comprennent pas bien ce qu'ils abandonnent. Le récent procès intenté, et gagné, par le commissaire à la protection de la vie privée pour empêcher la comparaison de données recueillies lorsque les Canadiens entrent ou sortent du pays aux demandes d'allocation d'assurance-chômage en a révélé des exemples. Compte tenu de ces considérations, le Comité recommande :

16. Que DRHC produise d'ici au 31 décembre 1999, un rapport exposant une série d'options, assorties de leur coût, pour améliorer le système de NAS ou le remplacer par un tout nouveau système de cartes. Ce rapport devrait évaluer la possibilité d'adopter au Canada un modèle administratif de NAS semblable au modèle de la banque Carrefour Belge (annexe D du présent rapport).

L'étude du NAS réalisée par le Comité a fait ressortir les inquiétudes globales qu'inspirent la technologie, la protection de la vie privée et la comparaison des données. Les témoins n'ont cessé, tout au long des audiences sur le NAS, de soulever ces grandes questions. Dans son rapport La vie privée : où se situe la frontière? déposé en avril 1997, l'ancien Comité permanent des droits de la personne et de la situation des personnes handicapées de la Chambre des communes traitait longuement et en profondeur de ces considérations de politique gouvernementale. L'aboutissement d'une étude intensive des incidences de l'évolution technologique sur les droits de la personne et de la protection de la vie privée, ce rapport amplifie et explique bon nombre d'inquiétudes que les membres du Comité ont commencé à ressentir, à mesure qu'ils examinaient la question plus restreinte de l'avenir du système de NAS.

De l'avis du Comité, le rapport intitulé La vie privée : où se situe la frontière? recense, examine, évalue et recommande des moyens de parer à ces questions, et ce dans un cadre mis au point au cours d'un très vaste processus de consultations et de débats publics. Étant donné la date à laquelle le rapport a été déposé, le gouvernement n'y a pas réagi. Par conséquent, le Comité :

17. Dans le respect de la législation existante, adopte les recommandations et prend acte des opinions dissidentes formulées dans le troisième rapport du Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes intitulé La vie privée : où se situe la frontière? déposé à la Chambre des communes le 27 avril 1997 (annexe E du présent rapport). Il sollicite, conformément à l'article 109 du Règlement, une réponse à ces recommandations.

En conclusion, le Comité se retrouve ainsi devant une série de questions qu'il n'a pas eu le temps d'examiner comme il l'aurait souhaité.

  • Comment les droits des citoyens à la vie privée seront-ils protégés si le NAS est « modernisé » ou « remplacé »?
  • Comment faire pour empêcher les comparaisons inappropriées de données?
  • Quelles sont les meilleures façons de protéger les citoyens de l'incidence croissante de vol d'identité?
  • Serons-nous prêts à satisfaire ceux qui, à mesure que le commerce électronique se répand, réclament pour chaque Canadien un identificateur sûr?
  • À mesure que la technologie se raffine et prend plus d'ampleur, faudrait-il accroître les pouvoirs du Commissaire fédéral à la protection de la vie privée pour lutter contre les intrusions dans la vie privée des Canadiens et, le cas échéant, quelle serait la portée de ces pouvoirs?
  • Quels coûts la protection de la vie privée entraînerait-elle?
  • Dans quelle mesure les Canadiens sont-ils disposés à faire les frais d'une technologie coûteuse pour assurer la protection de leur vie privée?
  • Comment équilibrons-nous le besoin d'accroître l'efficacité et les droits de chacun à la protection de la vie privée?
  • Comment parons-nous, de façon proactive, à la fraude et aux abus du système de NAS ainsi qu'aux autres formes de fraude relatives aux cartes?

Voilà un échantillon des grandes questions d'orientation auxquelles les gouvernements devront trouver réponse dans les années à venir. Impossible de répondre par oui ou non, ou par vrai ou faux, à aucune d'elles. Chacune suppose des compromis. Comme dans le débat public de portée générale sur la vie privée, les décisions fondamentales reposent ici sur un « consentement éclairé ». Pour prendre ces décisions, les politiciens et les Canadiens ont besoin de se renseigner et de discuter. Les décisions sur l'utilisation actuelle du NAS ont été trop souvent prises par défaut; c'est une chose que, inacceptable alors comme aujourd'hui, il faudrait éviter à l'avenir.