Le programme quotidien / Prière

Prière et Charte canadienne des droits et libertés

Débats, p. 12928-12929

Contexte

Le 19 juin 1990, M. Howard Crosby (Halifax-Ouest) invoque le Règlement au sujet de la prière quotidienne qui précède les travaux de la Chambre. Il met alors en relief un jugement de la Cour suprême du Canada qui, à son avis, aurait statué que la récitation de prières dans les écoles va à l’encontre de la Charte canadienne des droits et libertés. À la lumière de ce jugement, M. Crosby demande au Président de déterminer si la prière récitée en Chambre viole les dispositions de la Charte et, le cas échéant, de ne plus procéder à sa lecture. D’autres députés interviennent également à ce sujet[1]. Le Président rend sa décision sur-le-champ. Celle-ci est reproduite intégralement ci-dessous.

Décision de la présidence

M. le Président : Le député a soulevé un point concernant l’article 30(1) suivant du Règlement :

[Le Président] donne lecture de la prière, chaque jour de séance, avant que la Chambre entame ses travaux.

Il s’agit évidemment d’un article du Règlement qui me lie en tant que Président. Il s’agit également d’un article qui existe, non pas depuis peu, mais depuis des générations. Le député demande que je prenne une décision sur la question de savoir si cet article porte atteinte aux dispositions de la Charte des droits ou leur est contraire.

Premièrement, il ne m’appartient pas, en tant que Président, de faire ce genre de déclaration, car ma compétence ne me permet ni ne me demande de prendre des décisions concernant les lois de notre pays. En tant que Président, je suis habilité à prendre des décisions au sujet des règles de procédure que cette Chambre a adoptées et auxquelles elle est assujettie.

Je me vois donc obligé de dire au député que quelles que soient ses préoccupations et peut-être aussi celles d’autres personnes, je ne puis faire des observations sur la question de savoir si la règle qui nous impose de faire une prière chaque jour de séance contrevient ou non aux dispositions de la Charte des droits.

Ce que j’en pense personnellement importe très peu, à ce moment-ci, car ce que vous me demandez tous, c’est d’interpréter le Règlement de cette Chambre, et non de vous faire part de mes points de vue personnels sur l’à-propos de faire une prière. Je dois m’abstenir de me prononcer, que je sois tenté ou non de faire des commentaires à ce propos.

Toutefois, si les députés veulent modifier la forme de la prière ou s’ils me demandent, à cette fin, de décréter qu’il n’y aura plus de prière, je vous signale que ce n’est pas à moi de le faire. C’est aux députés qu’incombe cette tâche. Je suis d’ailleurs sûr que si la question était éventuellement débattue, les membres de cette Chambre tiendraient compte des sensibilités et des sentiments de la grande majorité des Canadiens.

C’est probablement sur cela qu’à mon avis, nous devrions mettre un terme à cette discussion, sauf que je signalerais aux députés, dont un bon nombre m’ont accompagné lors de cérémonies officielles ou à des occasions moins officielles, à des dîners, par exemple [qu’ils] se souviendront que je leur ai toujours demandé de se joindre à moi pour le bénédicité. Ils se rappelleront aussi que, bien qu’étant de foi chrétienne, j’ai toujours manifesté beaucoup de respect pour les opinions des autres et que j’ai toujours commencé le bénédicité de la même façon, c’est-à-dire de manière à ce que la grande majorité d’entre nous puissent se joindre à moi, avec respect et gratitude. Je dis toujours : « Seigneur, dont nous sommes tous les enfants… ». Cela me semble une formule susceptible de convenir à tous. Je vous le signale pour que vous y réfléchissiez.

F0301-f

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1990-06-19

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[1] Débats, 19 juin 1990, p. 12927-12928.