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PACC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON PUBLIC ACCOUNTS

COMITÉ PERMANENT DES COMPTES PUBLICS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 13 avril 2000

• 1533

[Traduction]

Le président (M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne)): Bonjour, mesdames et messieurs. Je déclare la séance ouverte, conformément à l'alinéa 108(3)e) du Règlement, étude du rapport du vérificateur général du Canada d'avril 2000.

Nos témoins de cet après-midi représentent le Bureau du vérificateur général: M. Denis Desautels, vérificateur général du Canada; Mme Sheila Fraser, sous-vérificatrice générale; Mme Maria Barrados, vérificatrice générale adjointe; M. Richard Flageole, vérificateur général adjoint; M. Shahid Minto, vérificateur général adjoint. Nous avons donc beaucoup de monde cet après-midi.

Monsieur Desautels, nous vous cédons la parole pour votre déclaration liminaire.

M. L. Denis Desautels (vérificateur général du Canada): Merci, monsieur le président.

Mes collègues et moi-même sommes heureux d'avoir l'occasion de rencontrer le comité pour discuter du récent rapport et des lettres de priorités que nous vous avons envoyées.

Tout d'abord, une note positive: comme l'indiquent les chapitres 1 et 2, nous avons constaté une certaine amélioration de la qualité des services offerts aux Canadiens par le gouvernement fédéral. Bien que des nouveaux défis s'imposent dans un contexte postdéficitaire, nous mentionnons dans le chapitre 8 que le programme de gestion de la dette du Canada est une activité bien gérée dans l'ensemble. C'est une bonne nouvelle, parce que les coûts liés au service de la dette publique absorbent environ le quart des recettes du gouvernement, soit près de 42 milliards de dollars par année.

Toutefois, le rapport souligne aussi les problèmes importants que nous avions signalés, il y a dix ans. L'Immigration, les services de la GRC, l'enseignement offert aux enfants indiens vivant dans les réserves et la gestion des ressources humaines dans la fonction publique comptent parmi les secteurs qui nécessitent l'attention immédiate du Parlement.

Je suis conscient que le comité ne peut étudier tous les sujets soulevés dans le rapport d'avril, donc j'ai préparé une liste des priorités proposées, dans l'ordre selon lequel elles sont présentées dans le rapport. J'espère que cette liste sera utile au comité pour la préparation d'un plan d'audiences.

• 1535

[Français]

Monsieur le président, dans le chapitre 3, nous concluons qu'il y a de graves lacunes dans le Programme canadien d'immigration, notamment dans le volet économique, qui vise à recruter des travailleurs qualifiés et des gens d'affaires.

Les bureaux d'immigration à l'étranger ne suffisent pas à la tâche, les contrôles visant à protéger la santé et la sécurité des Canadiens sont insuffisants et Citoyenneté et Immigration Canada est très vulnérable à la fraude et à l'abus. De plus, le ministère s'expose à des critiques concernant la qualité et l'uniformité de ses décisions.

Les lacunes que nous avons constatées limitent notre capacité de bénéficier au maximum des talents et de l'expertise que les immigrants apportent à notre main-d'oeuvre et des avantages économiques et sociaux qu'offre l'immigration. Ces lacunes compromettent aussi gravement le niveau de protection des Canadiens qui était prévu par la Loi sur l'immigration.

Il y a lieu de s'interroger sérieusement à savoir si Citoyenneté et Immigration Canada a la capacité requise pour atteindre les niveaux annuels d'immigration établis par le gouvernement.

Les employés responsables du traitement des demandes d'immigration dans les bureaux à l'étranger sont très inquiets de la situation actuelle. Je partage leur inquiétude.

Jeudi dernier, la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a déposé le projet de loi C-31 en vue de modifier la Loi sur l'immigration et a annoncé d'autres mesures en vue de combler les lacunes mentionnées dans notre chapitre. Bien que le projet de loi permette de répondre à certaines de nos préoccupations, par exemple une protection accrue contre les demandes frauduleuses, la plupart des problèmes que nous avons constatés ne sont pas liés directement à la Loi sur l'immigration. Le ministère doit encore s'attaquer énergiquement à ces problèmes de longue date.

Dans le chapitre 4, j'attire votre attention sur un autre sujet important, soit l'enseignement offert aux enfants indiens vivant dans les réserves.

Affaires indiennes et du Nord Canada a la responsabilité de veiller à ce que ces enfants reçoivent un enseignement comparable à celui qui est offert aux autres enfants canadiens, et cela sans négliger leurs besoins culturels. Malheureusement, le niveau de scolarisation des élèves indiens ne s'améliore toujours pas.

Le ministère doit également régler d'autres questions importantes, notamment la définition de son rôle en matière d'éducation, l'élaboration et l'utilisation de mesures de rendement adéquates et l'amélioration de son rendement opérationnel.

Cette situation est complexe et nécessite une solution rapide. L'urgence augmentera à mesure que les exigences s'accentueront en matière d'éducation par suite de l'accroissement de la population dans les réserves, des changements technologiques et de la modification des programmes provinciaux d'enseignement, sur lesquels se fie le ministère.

[Traduction]

Le chapitre 6 porte sur d'importants problèmes liés au traitement des demandes de crédits d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental. Les sociétés demandent environ 2 milliards de dollars de crédits d'impôt chaque année dans le cadre de ce programme administré par l'Agence des douanes et du revenu du Canada.

L'absence de clarté quant aux projets de RS&DE admissibles s'est traduite par des manques d'uniformité dans le traitement des demandes et par un certain nombre de demandes non résolues, remontant jusqu'à 1985. Ces demandes représentent des centaines de millions de dollars en crédits d'impôt.

Depuis la création du programme de RS&DE, il y a des désaccords entre demandeurs et administrateurs, ainsi qu'entre administrateurs. Il faut au plus tôt adopter des règles plus claires afin que le programme soit exécuté et administré avec efficacité et efficience.

Nous avons également constaté que le programme a un faible taux de rentabilité. Selon une évaluation réalisée par le gouvernement, le programme a causé une augmentation nette du revenu réel de 20 millions à 55 millions de dollars.

Les corps de police au pays, les tribunaux, les commissions de libération conditionnelle, les agents des douanes et de l'immigration et les employeurs ont un besoin vital des services nationaux offerts par la GRC, tels que les services de laboratoire et les casiers judiciaires. La sécurité de tous les Canadiens dépend de la rapidité d'accès à ces services de même que de leur exactitude et de leur accessibilité. Cependant, dans le chapitre 7, nous concluons que les services de la GRC ne répondent pas toujours aux besoins des usagers.

Il y a d'importants retards dans la communication des analyses de l'ADN ainsi que des arriérés dans l'introduction des empreintes digitales et des casiers judiciaires dans le Centre d'information de la police canadienne—le CIPC—un système qui fournit aux responsables de l'application de la loi des informations essentielles, en ligne, 24 heures sur 24. L'an dernier, le CIPC était inaccessible 11 p. 100 du temps.

Il est essentiel que la haute direction de la GRC respecte ses engagements d'éliminer l'arriéré dont font état un grand nombre de services et d'améliorer son efficience.

• 1540

Dans le chapitre 9, nous nous penchons de nouveau sur les problèmes de longue date liés à la gestion des ressources humaines dans la fonction publique. Il est urgent de simplifier, de rationaliser et de renforcer le régime actuel de gestion des ressources humaines et de clarifier les rôles et les responsabilités dans les domaines où la gestion est partagée entre les sous-ministres, la Commission de la fonction publique et le Conseil du Trésor.

Au cours de cette période de plus de 30 ans, de nombreuses autres études ont fait valoir la nécessité de changements administratifs, législatifs et structurels. Pourtant, quelques-uns des problèmes les plus importants ne sont toujours pas réglés. Le cadre actuel qui régit la gestion des ressources humaines dans le noyau de la fonction publique est dépassé et indûment complexe. Les systèmes administratifs sont lourds, coûteux et désuets. La dotation dans la fonction publique est une source importante de frustration tant pour les gestionnaires que pour les employés. Le système, axé sur les règles, est inefficient.

Des changements en profondeur s'imposent. Le gouvernement et la Commission de la fonction publique doivent simplifier l'actuel cadre législatif et administratif de gestion des ressources humaines. Ils doivent également inciter le Parlement à apporter les changements nécessaires.

La gestion des ressources humaines dans le secteur public fédéral touche de nombreux intervenants, plusieurs lois et un éventail de questions complexes. Étant donné sa responsabilité de surveillance de l'administration publique au sein du gouvernement fédéral, le CCP est bien placé pour examiner les questions soulevées dans le chapitre 9. Une étude du chapitre menée par le comité supposerait probablement plusieurs audiences.

Il est important de résoudre ces problèmes maintenant, alors que la fonction publique fait face à d'importants défis en matière de ressources humaines et à un marché du travail de plus en plus concurrentiel.

Monsieur le président, j'espère que tous les chapitres du rapport d'avril vous intéresseront et, comme toujours, il nous fera plaisir de travailler avec le comité au cours des prochains mois. Monsieur le président, j'ai terminé ma déclaration liminaire. Nous serons heureux de répondre aux questions des membres du comité.

Le président: Merci, monsieur Desautels. Nous remarquons que vous avez dit «au cours des prochains mois», mais nous avons l'intention de ne plus être ici à la fin juin, si bien que nous avons beaucoup de travail à faire d'ici là.

Monsieur Mayfield, huit minutes, s'il vous plaît.

M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

Le document présenté par M. Desautels représente certainement deux semaines de travail, au moins.

J'aimerais poser au vérificateur général une question au sujet de la situation qu'il soulève à propos des enfants indiens vivant dans les réserves. Si je me souviens bien, j'ai lu dans une déclaration précédente que ces services d'éducation représentent près d'un milliard de dollars par an, sans compter les coûts des bâtiments ou de l'entretien. Je ne me suis jamais intéressé jusqu'ici aux coûts de l'éducation. En faisant des calculs, cela représente près de 8 500 $ par enfant. Ce coût est-il comparable avec d'autres coûts d'éducation? Savez-vous combien il en coûte à d'autres commissions scolaires et d'autres groupes d'offrir des services d'éducation aux enfants, monsieur?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, il serait possible de faire des comparaisons avec diverses commissions scolaires, mais nous ne l'avons pas fait. Une des raisons, c'est parce que les circonstances dans lesquelles ces écoles autochtones fonctionnent sont fort différentes de la plupart de celles des commissions scolaires que nous connaissons, dans les zones urbaines notamment. Beaucoup de ces commissions scolaires se trouvent dans des endroits très éloignés du pays, d'accès difficile. Le nombre d'élèves dans certaines de ces écoles est très peu élevé, si bien que le coût par élève va évidemment être plus élevé que le coût que l'on retrouverait dans une commission scolaire locale. Comme nous avons pensé que les données n'étaient pas vraiment comparables, nous n'avons pas fait ce genre de comparaisons.

• 1545

M. Philip Mayfield: Je connais un peu la difficulté que cela représente. En ce qui concerne les problèmes des écoles dans les réserves, je remarque que dans l'arrondissement scolaire où je vis, il existe toutes sortes de mécanismes permettant de s'occuper du système d'éducation. Il y a non seulement les enseignants, mais aussi l'administration et les inspecteurs. Il semble qu'il y ait tout un système pour assurer l'éducation.

Lorsque je parle des problèmes dans les réserves toutefois, le ministère des Affaires indiennes me dit fréquemment que c'est aux personnes des réserves que revient la responsabilité d'administrer les fonds comme il se doit. Ce système pose-t-il des problèmes, d'après vous? Avez-vous des recommandations à faire pour les régler?

M. Denis Desautels: Je crois que le chapitre fait ressortir ce dilemme. La situation est la suivante: le ministère a donné aux Premières nations la responsabilité des services et les Premières nations ont donc assumé une responsabilité de plus en plus grande pour ces divers programmes. Pour l'éducation, c'est la même chose. Les Premières nations ont assumé beaucoup plus de responsabilité pour l'administration de ces programmes au sein de leurs conseils tribaux.

En vertu de la Loi sur les Indiens, le ministère, par ailleurs, est toujours responsable de ces programmes. Par conséquent, il doit assumer ses responsabilités. Quel rôle est le sien? Est-il simplement un organisme de financement qui transfère des fonds aux Premières nations et qui, par la suite, n'assume plus aucune responsabilité, ou est-il toujours responsable des résultats atteints grâce à ces fonds? Techniquement, c'est la dernière hypothèse qui est la bonne. En vertu de la loi, c'est le ministre qui est responsable.

À l'heure actuelle, le ministère n'est pas trop sûr de son rôle. En fait, il se dirige de plus en plus sur le chemin du transfert des responsabilités et n'a pas conservé beaucoup de capacité pour évaluer l'efficience ou l'efficacité de ces programmes.

M. Philip Mayfield: Je suis sûr que vous comprenez que j'essaie en fait d'établir certains des paramètres du problème comme vous-même et votre personnel les ont envisagés.

J'aimerais soulever un autre point à ce sujet. Les parents dans les réserves sont frustrés de voir ce qui se passe dans leurs écoles et du fait que rien ne semble se passer pour leurs enfants. Dans certains cas, ils ont eu la possibilité de retirer leurs enfants d'une école dans la réserve pour les mettre dans l'école publique. Cela crée souvent... je ne dirais pas un problème, mais certainement une situation où la commission scolaire doit alors fournir des ressources, des autobus et des enseignants pour les enfants supplémentaires, etc.

Le personnel scolaire et le système scolaire public, me disent que parfois, si pas fréquemment, ils ne reçoivent pas les fonds auxquels ils s'attendent pour la fourniture de ces services. Les gens se plaignent alors du fait que les enfants indiens bénéficient d'un double financement et le problème n'est pas réglé. Avez-vous décelé ces problèmes dans le cadre de votre vérification? Si oui, qu'avez-vous à dire à leur sujet? Il serait bon que je puisse lire la partie de votre rapport à ce sujet.

M. Denis Desautels: Oui, il y a une section dans le chapitre, à partir du paragraphe 4.69, qui traite du financement et de certaines questions qui y sont reliées ainsi que des différends qui peuvent surgir en divers endroits. Ce que nous disons, c'est que le ministère doit avoir un peu plus d'information à ce sujet. À l'heure actuelle, il n'a pas nécessairement fait le suivi étant donné, et je le répète, qu'il considère que ce sont les Premières nations qui sont responsables à partir du moment où elles reçoivent les fonds.

Nous abordons donc ce problème, comme je l'ai indiqué plus tôt. Selon nous, le ministère devrait mieux saisir la nature de ces problèmes.

• 1550

M. Philip Mayfield: Ce qui est malheureux dans toute cette affaire, c'est que, comme vous l'indiquez, il va probablement falloir attendre 20 ans avant de rattraper les retards et avant que les enfants indiens ne reçoivent une éducation équivalente à celle des enfants non indiens. Je me demande si d'après vous, il n'y aurait peut-être pas un moyen d'accélérer le processus, afin qu'il ne dure pas toute une génération d'enfants. Il est très malheureux, à mon avis, que tant de personnes dans les réserves n'aient pas encore reçu d'éducation, alors que beaucoup d'entre elles aimeraient tant la recevoir. À votre avis, le comité pourrait-il travailler avec le ministère des Affaires indiennes pour régler ce problème dans les meilleurs délais?

M. Denis Desautels: Nous n'offrons pas de solutions magiques dans notre chapitre. Nous reconnaissons que c'est un problème très complexe et qu'il n'existe pas une solution miracle applicable à l'échelle du pays. On recense plus de 600 Premières nations dont la culture et les usages sont différents. Le ministère doit avoir la volonté de combler cette lacune beaucoup plus rapidement, mais il doit le faire de manière très souple, tout en tenant compte des différences entre les diverses Premières nations du pays.

Il faudrait véritablement commencer par arriver à comprendre plus clairement le véritable rôle du ministère par rapport à l'éducation dans le contexte actuel du transfert des responsabilités.

M. Philip Mayfield: Merci, monsieur.

Le président: Merci, monsieur Desautels.

Merci, monsieur Mayfield.

[Français]

Monsieur Sauvageau, s'il vous plaît.

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur Desautels, messieurs, mesdames, bonjour. Soyez les bienvenus.

Monsieur Desautels, vous deviez vous sentir un peu comme un politicien mercredi dernier, quand vous avez fait votre conférence de presse. Vous ne saviez pas ce que les journalistes allaient en retenir, et je crois que vous devez avoir été un peu surpris. Vous avez fait une belle prestation, mais, à la grande surprise de tous les partis, les journalistes en ont retenu des points qui étaient intéressants, mais que nous n'avions pas soulevés lors de votre présentation à huis clos. Je parle de la GRC.

Les priorités que vous suggérez au comité sont le dossier de l'immigration, les affaires autochtones, la recherche et développement, et la GRC, qui vient en quatrième lieu. Compte tenu de l'intérêt médiatique, pensez-vous qu'on devrait étudier en priorité l'immigration et la GRC étant donné qu'il s'agit de deux sujets de «sécurité nationale», si je puis dire? Étant donné le traitement médiatique, estimez-vous qu'il y des modifications à faire à ce que vous avez écrit?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, dans la lettre que nous avons envoyée au comité, nous suggérons l'étude de quatre chapitres, dont le chapitre 7 sur la GRC. Cependant, comme je l'ai dit plus tôt, dans la lettre, nous les nommons dans l'ordre dans lequel ils sont apparus dans le rapport.

M. Benoît Sauvageau: Très bien.

M. Denis Desautels: Nous n'avons pas fait de choix en vous écrivant. Nous vous en recommandons quatre, mais vous pourrez les étudier dans l'ordre dans lequel vous voudrez bien les étudier.

M. Benoît Sauvageau: J'avais écrit les chiffres et je viens de remarquer qu'on parle de l'ordre croissant. Je vous remercie. Je n'avais pas porté attention à cela.

Je recommence. Selon vous, l'immigration et la GRC devraient-elles être les deux sujets étudiés en priorité étant donné qu'ils sont liés à la sécurité nationale?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, il est sûr que le chapitre sur l'immigration est très important. La situation que nous avons décrite dans notre rapport est très sérieuse et mérite qu'on s'y attaque le plus rapidement possible.

Nous avons tous constaté que la ministre avait annoncé des changements importants, et je pense qu'il serait utile de voir dans quelle mesure ces changements vont combler les lacunes signalées dans le chapitre. On pourrait avoir une discussion intéressante là-dessus à un moment propice, car on est sur le point de mettre en oeuvre de nouvelles initiatives. Donc, le chapitre sur l'immigration est un chapitre important et, étant donné ce qui se passe, le plus rapidement vous l'étudierez, le mieux ce sera.

• 1555

M. Benoît Sauvageau: Je fais un lien entre les ressources humaines et l'immigration. Si je me souviens bien, vous avez déjà déposé un rapport sur les fonctionnaires fédéraux qui travaillent à l'extérieur. Vous disiez qu'ils étaient souvent sous-rémunérés, qu'ils ne restaient pas longtemps dans l'appareil public et qu'ils allaient travailler dans différentes compagnies du secteur privé dans le domaine des relations internationales. Lorsque nous ferons l'étude des ressources humaines, devrons-nous faire le lien entre les ressources humaines et les ressources humaines à l'étranger?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, le chapitre 9, qui parle de la gestion des ressources humaines, ne concerne pas uniquement les gens qui travaillent pour le gouvernement canadien au pays. Il concerne l'ensemble de la fonction publique, tant au pays qu'à l'étranger.

M. Benoît Sauvageau: Très bien, parce qu'il y a une problématique à l'étranger, n'est-ce pas? Est-ce que je me trompe ou s'il y a une problématique singulière reliée aux fonctionnaires canadiens qui sont à l'étranger, que vous avez déjà étudiée, si je ne m'abuse?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, si ma mémoire est fidèle, nous avons fait rapport il y a quelque temps de l'entente qu'il y a entre le gouvernement et les agents travaillant à l'étranger pour les Affaires étrangères et de la façon dont ces gens étaient rémunérés. Il y a eu des discussions là-dessus au niveau gouvernemental, et entre les syndicats et le gouvernement. Donc, c'est une question qui est toujours d'actualité. D'ailleurs, on a vu dernièrement dans les médias des articles qui traitaient des tensions qu'il y a actuellement entre ce groupe d'employés et le gouvernement.

M. Benoît Sauvageau: Compte tenu du fait que des questions sur l'immigration vont devoir être posées lors de ces discussions, je n'irai pas dans le détail et dans le fond du sujet. Je vous remercie beaucoup. Je pense que vous avez raison quant aux sujets de sécurité nationale. Cela va orienter notre comité directeur. Merci beaucoup.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Sauvageau.

[Français]

Madame Jennings, s'il vous plaît.

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur Desautels, merci beaucoup de votre présentation. Je vais vous poser des questions sur un des chapitres, celui qui concerne l'immigration. Les questions que je veux vous poser concernent un aspect, soit le pouvoir discrétionnaire dont jouissent beaucoup de fonctionnaires de l'immigration ici, au Canada, et à l'extérieur, dans les bureaux de l'immigration.

Vous semblez dire que, premièrement, ces gens-là n'ont pas la formation nécessaire pour bien rendre des décisions en vertu de leur pouvoir discrétionnaire, que, deuxièmement, il n'y a pas suffisamment de ressources humaines, et que, troisièmement, ces gens semblent avoir une psychologie collective qui fait qu'ils ont peur de rendre des décisions négatives parce que la loi permet des demandes de révision devant la Cour fédérale.

Je trouve que c'est un gros morceau, monsieur Desautels. Une grande partie du travail des députés qui représentent des circonscriptions de grands centres urbains, dont la population est d'origine ethnoculturelle, a justement trait à l'immigration. Des familles viennent nous voir. Elles ont invité un parent de l'étranger à venir les visiter, et l'agent de la section des visas dans le pays d'origine a dit que la personne n'était pas un vrai visiteur et a donc refusé sa demande. À ce moment-là, la famille vient nous voir et nous donne toute la documentation. Nous recevons une autorisation de la personne qui a fait la demande de visa de visiteur, par exemple en Iran, au Pakistan ou en Afghanistan. Selon nous, la personne est un vrai visiteur. À ce moment-là, nous demandons à la personne de demander à la ministre d'émettre un visa ministériel. Il arrive parfois que la ministre le fait, et la personne vient et part.

• 1600

Quand nous voyons de ces cas à répétition dans certains pays, nous nous disons qu'ou bien les personnes qui ont la responsabilité et le pouvoir discrétionnaire d'émettre un visa de visiteur ou non sont des incompétents, ou bien elles n'ont pas la formation nécessaire.

Êtes-vous satisfait de la réponse que vous avez reçue du ministère de l'Immigration sur ce problème que vous avez souligné dans votre rapport? Quant à moi, je ne suis pas tout à fait satisfaite de sa réponse.

M. Denis Desautels: Je vais demander à M. Flageole de répondre à votre question.

Mme Marlene Jennings: Parfait.

M. Richard Flageole (vérificateur général adjoint, Bureau du vérificateur général du Canada): Je pense que vous exposez très bien la problématique d'ensemble du processus. Le résultat final de tout cela est une décision. Ces gens-là sont là pour rendre une décision. Il y a beaucoup de facteurs qui ont un impact sur la qualité de cette décision.

Dans notre chapitre, nous soulevons des questions sérieuses quant à la qualité des décisions. Nous mentionnons entre autres que les agents n'ont pas toute la formation nécessaire pour prendre ces décisions et qu'ils n'ont pas les outils, les moyens et le temps nécessaires pour le faire. Nous nous inquiétons particulièrement de l'absence d'un mécanisme de surveillance de la qualité des décisions.

Nous avons noté des différences au niveau de l'uniformité des décisions et nous le mentionnons dans le chapitre. Nous avons noté des différences très importantes entre les taux d'acceptation de différents agents qui, en théorie, traitent des cas similaires. Avec un grand échantillon, on s'attendrait à ce qu'il y uniformité à cet égard.

L'autre point que vous avez mentionné est très important. Nous avons mentionné dans le chapitre que nous avions fait un sondage de tous les employés du ministère. La question des recours judiciaires a fortement ressorti de tout cela. Ce qui nous inquiète particulièrement, c'est l'impact que cela peut avoir sur l'attitude et le comportement des agents. Je pense que ces gens sont inquiets de tout cela aujourd'hui. Plusieurs nous ont mentionné que l'objectif du programme était maintenant d'essayer de justifier un refus au lieu de choisir un immigrant qui rencontre nos exigences. C'est très inquiétant.

Mme Marlene Jennings: Puis-je vous interrompre?

En ce qui concerne cette inquiétude devant le fait que le système semble maintenant organisé de façon à justifier les décisions devant des tribunaux plutôt que de façon à rendre de bonnes décisions fondées sur des critères objectifs, avez-vous pu faire un échantillonnage pour voir quelle proportion des décisions concernant des demandes d'immigration faisait l'objet d'un appel, que ce soit dans la classe des immigrants économiques ou dans la classe famille?

Selon mon expérience, il faut parfois juste un ou deux appels pour que, dans un organisme, on adopte une attitude visant à justifier ses décisions plutôt qu'à rendre des décisions justes. Cela ne colle pas nécessairement à la réalité. Logiquement, si les demandes viennent de l'extérieur, cela veut dire que la majorité de ces personnes dont la demande est refusée n'ont ni les moyens ni la possibilité d'en appeler de la décision. Cela est plus facile pour les gens qui sont déjà ici grâce à un visa de visiteur ou grâce à un visa de travail temporaire, qui ont fait une demande en vue de devenir immigrants reçus et dont la demande est refusée. Pour ces gens, il est beaucoup plus facile d'en appeler d'un refus que pour des gens de l'extérieur. Je me demande si cette attitude ou cette peur des employés correspond à la réalité. Autrement dit, est-ce que c'est justifié?

• 1605

M. Richard Flageole: Monsieur le président, dans le chapitre, au paragraphe 3.40, nous n'avons pas de chiffres précis, mais nous mentionnons que le nombre de recours judiciaires augmente de façon importante depuis quelques années. Nous n'avons pas examiné des cas ou fait des analyses pour voir si les décisions étaient justifiées ou non à ce niveau.

Est-ce que la réponse du ministère nous satisfait? Encore là, il y a beaucoup de facteurs qui ont une influence sur la qualité de la décision. La ministre a annoncé dans la dernière semaine des initiatives pour redresser beaucoup de ces éléments. On nous dit qu'on va améliorer la formation, les outils et les systèmes informatiques. C'est en améliorant l'ensemble de tous ces éléments qu'on va améliorer la qualité des décisions à la fin.

Mme Marlene Jennings: Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Jennings.

[Traduction]

Monsieur Mayfield s'il vous plaît. Nous en sommes au deuxième tour, mais comme je crois que nous en avons le temps, nous allons vous accorder six minutes cette fois-ci.

M. Philip Mayfield: Merci beaucoup; j'en aurai peut-être besoin, peut-être non, je ne sais pas; nous verrons bien.

En examinant la déclaration que vous avez faite aujourd'hui à propos de certains des problèmes que vous avez rencontrés, je vois que lorsque vous parlez de la gestion des ressources humaines, vous dites: «le système, axé sur les règles, est inefficient.» J'essaie de me mettre à la place de ces gestionnaires et d'imaginer ce que c'est que de travailler dans ce genre de milieu.

Lorsque l'on parle aux fonctionnaires des divers ministères, il semble qu'ils n'aient pas la liberté de prendre les décisions qu'ils sont censés prendre. S'ils prennent la mauvaise décision, quelqu'un va interjeter appel. Rien n'est défini. Il semble y avoir très peu de satisfaction et le processus semble devenir très compliqué et presque solidifié.

Peut-on vous demander ou demander aux représentants qui vous accompagnent, monsieur Desautels, s'il s'agit peut-être d'un problème plus général qu'un manque d'argent ou qu'un excès d'argent, qu'un manque de personnel ou qu'un manque d'organisation? S'agit-il d'un problème de culture dans notre bureaucratie où il faudrait en fait permettre la prise de décisions?

Doit-on pouvoir accepter que parfois il faut dire non, que parfois une décision ne peut pas faire l'objet d'un appel, même s'il semble que nous perdions beaucoup de temps à cause de ce processus d'appel? Bien sûr, ce n'est pas une perte de temps. Si vous n'obtenez pas satisfaction, vous essayez à deux ou trois reprises et au bout du compte, vous obtenez ce que voulez, j'imagine.

Ce qui me préoccupe, c'est que notre système semble être très encombré par un processus qui n'en finit jamais. Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet, ou bien, cela ne relève-t-il pas de la compétence d'un vérificateur?

M. Denis Desautels: Bien sûr, nous pouvons faire des observations à ce sujet. Mme Barrados et moi-même avons eu beaucoup de discussions à cet égard. Je vais commencer très rapidement avant de demander à Mme Barrados de compléter ma réponse.

Le régime actuel est le résultat d'une accumulation de pratiques—toutes adoptées avec de bonnes intentions—et de certaines lois, adoptées par le Parlement, avec de bonnes intentions également. La somme de tout ceci finit par donner un régime assez lourd si bien qu'il est difficile pour ceux qui doivent prendre des décisions de gestion de le faire aussi rapidement qu'ils le souhaiteraient. Par conséquent, c'est à cause de toute cette accumulation que nous avons un régime qui est, comme nous le disons, axé sur les règles.

Je vais demander à Mme Barrados de parler un peu plus des causes de la situation actuelle.

Mme Maria Barrados (vérificatrice générale adjointe, Bureau du vérificateur général du Canada): Monsieur le président, cette question peut nous amener à expliquer toutes les complexités, ce qui prendrait probablement beaucoup plus de temps que celui dont nous disposons, mais je vais essayer d'être brève.

Les questions que nous soulevons dans le chapitre ne sont pas véritablement des questions d'argent. Il s'agit beaucoup plus de questions de systèmes et d'organisations et effectivement, des questions de culture y sont reliées.

• 1610

Ce que nous disons, c'est qu'il est véritablement très important aujourd'hui, compte tenu des pressions auxquelles sont confrontés la fonction publique et, dans un plus grand contexte, le marché du travail, de prendre des mesures assez affirmées pour rationaliser tout le régime de gestion des ressources humaines. Cela ne veut pas dire toutefois que qu'il n'est pas important de conserver beaucoup des traditions que l'on y retrouve.

Nous ne voudrions rien faire qui donne à penser que nous ne tenons pas à protéger les droits des employés. Le système du mérite peut être valable s'il est correctement appliqué. La notion des valeurs de la fonction publique et d'une fonction publique indépendante du processus politique—ce sont d'excellents principes mais, comme l'a dit le vérificateur général nous avons créé ce système qui est trop lourd et trop axé sur les règles pour répondre à ce que nous attendons de lui, soit respecter ces valeurs tout en mettant en place des gens compétents, capables de s'acquitter des fonctions que tous les Canadiens s'attendent à les voir remplir.

M. Philip Mayfield: À ce propos, je ne voudrais pas que vous pensiez que je critique qui que soit; ce dont je parle ici, c'est du système qui est en place. Mais il me semble que lorsque, l'on rencontre des gens qui ont des fonctions à remplir, parfois, ils ne se sentent pas tout à fait libres de s'acquitter de ces fonctions comme ils l'entendent et comme on le voudrait. Ils ne sont jamais sûrs d'être vraiment en charge des choses, s'ils relèvent de quelqu'un d'autre, ou si on ne fera pas appel de leurs décisions devant quelqu'un d'autre. Cela semble un tel fouillis que si j'étais dans ce genre de situation, je préférerais encore aller pêcher, ce qui est assez naturel, de toute façon, dans la région d'où je viens: quand on a des problèmes, on part à la pêche.

Lorsque nous cherchons des gens pour remplir une fonction, il n'y a pas que l'argent qui les intéresse; ils cherchent une situation dans laquelle s'investir, qui leur donne satisfaction, qui soit gratifiante et à laquelle ils peuvent s'identifier. Il me semble que, comme vous le dites, quelqu'un doit prendre l'initiative. J'aimerais savoir si ce que j'envisage a au moins un peu de bon sens. Je me demande si le Comité des comptes publics, à votre avis, serait l'organe indiqué pour entamer le débat sur ces questions, non seulement entre nous, mais avec divers représentants des ministères; peut-être pourrions-nous aussi parler de l'enveloppe budgétaire pour voir ce qui pourrait être changé.

Mme Maria Barrados: Il y a beaucoup de gens très bien, dans la fonction publique, qui font du bon travail. Cependant, ce qu'on veut faire comprendre, dans ce chapitre, c'est que le système de gestion des ressources humaines—le recrutement, la dotation, la classification, le système de rémunération et l'élimination des employés au besoin—est tout simplement trop lourd, trop lent, inefficient, trop axé sur les règles.

Tout comme le vérificateur général l'a dit dans ses remarques préliminaires, je pense que le Comité des comptes publics est tout désigné pour traiter de ces questions d'administration publique, parce qu'il y a de nombreux intervenants: il y a la Commission de la fonction publique, le Conseil du Trésor, le Conseil privé. Le greffier du Conseil privé joue un rôle de direction, et aussi les sous-ministres. Tout cela fait un grand complexe d'intervenants importants, puis il y a tout un groupe d'intervenants de moindre envergure dont chacun a un rôle à jouer. Je pense que c'est un excellent sujet de débat.

M. Philip Mayfield: Monsieur le président, avant d'en terminer avec cette question, j'aimerais vous dire, ainsi qu'au comité, que si vous et le sous-comité n'en avez pas encore parlé, il me semble que cela vaudrait bien la peine de réfléchir à la manière dont vous pourriez préciser ceci, en tant que projet pour notre comité.

Le président: Nous apprécions votre suggestion, monsieur Mayfield, et nous ne manquerons pas d'y réfléchir. Vous n'êtes pas le seul, puisque le vérificateur général s'est, lui aussi, dit intéressé à ce que nous examinions la question. C'est donc possible, et j'espère que nous le ferons.

Madame Jennings.

Mme Marlene Jennings: Merci, monsieur le président.

Je voudrais revenir à la question de l'augmentation des cas portés devant la cour. Permettez-moi d'expliquer très brièvement pourquoi cela me préoccupe. Vous n'avez présenté ici aucune statistique—comme un graphique qui illustre le nombre de cas ou de demandes, de requêtes qui ont été faites en 1990, combien de contestations, etc. Ainsi, nous pourrions voir s'il y a véritablement une augmentation, d'après la hausse du nombre de demandes. Nous pourrions voir, par exemple, qu'il y a 10 ans, 10 p. 100 des rejets de demandes ont été contestés, et qu'aujourd'hui c'est encore 10 p. 100, mais ce serait tout de même plus de cas portés devant les tribunaux, parce que le nombre de demandes a augmenté.

Je m'en soucie, parce qu'avant d'entrer en politique, j'occupais un poste où je travaillais en collaboration avec un tribunal administratif. Nous recevions des plaintes et menions des enquêtes publiques à leur sujet. Lorsque le système a été modifié, pour passer du pouvoir de recommandation au pouvoir d'imposition de sanctions, ça a été un grand changement. D'un seul coup, dans la communauté, les gens disaient mon Dieu, il y a plus de cas portés devant les tribunaux, etc., alors que les statistiques démontraient que ce n'était pas le cas. La différence était que les conclusions étaient devenues exécutoires, alors qu'avant, elles n'avaient qu'un pouvoir de recommandation.

• 1615

Alors ce qui me préoccupe, c'est de savoir si la perception qu'ont les fonctionnaires du ministère de l'Immigration est réellement fondée sur des faits. Deuxièmement, même si c'est le cas, il y a le fait que vous avez vous-même souligné, qu'ils n'ont pas reçu une formation appropriée pour exercer convenablement des pouvoirs discrétionnaires. Cela pose un problème. Il n'y a pas d'uniformité dans les décisions rendues sur des cas où on se serait attendu, étant donné leur grande fréquence, à voir une espèce d'uniformité.

À mes yeux, cela justifie que des tribunaux annulent les décisions rendues. La direction et les employés devraient admettre qu'il y a un problème et qu'il faut le régler—le problème vient de notre côté, et nous devons trouver les outils pour le régler, plutôt que d'adopter une attitude défensive et dire que plus de cas sont portés devant les tribunaux.

Donc, si c'est possible, si ces statistiques existent, j'aimerais bien les recevoir pour savoir si c'est fondé sur des faits. Deuxièmement, il est très possible que ce le soit, mais si c'est vraiment attribuable aux très graves lacunes que vous avez vous-même relevées—le manque de formation appropriée, le manque d'uniformité dans les décisions alors qu'on s'attendrait au contraire, dans le domaine où les employés exercent des pouvoirs discrétionnaires—cela tendrait à justifier ces recours aux tribunaux.

M. Richard Flageole: Nous n'avons pas les chiffres exacts. Je suis sûr que vous pourriez les obtenir du ministère, ou nous pourrions aussi le faire.

Dans l'ensemble, il n'y a pas tant de cas que ça en instance. Ce que nous disons, je le répète, dans le paragraphe 3.40, c'est que ce nombre a augmenté ces dernières années, mais nous ne savons pas quel pourcentage des demandes ils représentaient auparavant. Nous pouvons certainement obtenir cette information.

Si vous permettez une observation, à la fin du paragraphe 3.88, là où nous parlons du cadre de surveillance de la qualité des décisions, je pense que le message est assez clair qu'il est nécessaire d'améliorer l'information, les outils et la surveillance des décisions. En conclusion, nous disons que cela favorisera la cohérence et la légitimité du processus et contribuera à la prise de décisions éclairées, bien fondées et documentées. C'est vraiment la clé: cela aura une incidence aussi sur le nombre de cas qui seront portés devant la Cour fédérale ou le nombre de cas qu'elle pourrait rejeter.

Mme Marlene Jennings: Merci.

Monsieur le président, j'ai terminé. Merci.

Le président: Merci, madame Jennings. Tout le monde va si vite et est si courtois, aujourd'hui.

Monsieur Mayfield.

M. Philip Mayfield: Je n'étais pas tout à fait prêt, mais tant pis.

Je regardais les commentaires que vous avez faits sur la recherche scientifique et le développement expérimental, monsieur Desautels. Au paragraphe 6.60, vous parlez du manque d'uniformité dans l'évaluation des demandes non résolues qui datent de 1995. Est-ce qu'il y en a qui datent d'avant 1985, ou est-ce que vous n'êtes pas allé plus loin dans cette vérification?

M. Denis Desautels: Je demanderai à M. Minto de vous répondre.

M. Shahid Minto (vérificateur général adjoint, Bureau du vérificateur général du Canada): Monsieur le président, le programme actuel a été lancé en 1985, et il ne remonte pas plus loin.

M. Philip Mayfield: Je vois.

Je pense qu'il existe une règle qui s'appelle quelque chose comme «la disposition de l'équité», selon laquelle avant telle ou telle date, on ne compte pas les gens dont il faut traiter à part en raison de circonstances inhabituelles. Connaissez-vous cette disposition?

• 1620

M. Shahid Minto: Oui, nous la connaissons très bien. Le ministère prévoit des dispositions d'équité, si c'est ainsi que vous voulez les appeler. C'est pour, lorsqu'un contribuable est aux prises avec une situation inhabituelle—par exemple, un membre de la famille est malade ou il y a eu un incendie dans l'entreprise—et qu'il ne peut pas faire sa déclaration de revenus et payer ses impôts, il est exempté des intérêts et des pénalités, et des dispositions d'échelonnement sont prévues pour le versement des impôts. C'est cela les dispositions d'équité, et elles ne s'appliquent pas seulement à ce programme-ci, mais à tous les autres programmes.

M. Philip Mayfield: Je pense à une situation où un groupe d'employés avait été contraint par l'employeur de signer une renonciation à leur remboursement d'impôt, et tout cela avec la bénédiction de Revenu Canada à l'époque. Quelqu'un a tout de même réussi à faire changer d'idée à ces employés. Est-ce le genre de manque d'uniformité auquel vous faites allusion?

M. Shahid Minto: Non, pas du tout. Ce dont vous parlez me paraît presque un acte frauduleux.

Dans ce chapitre, nous parlons plutôt de manque d'uniformité dans la manière dont Revenu Canada a évalué les demandes reçues qui concernaient les activités de recherche scientifiques et de développement expérimental. Je vous demande de vous reporter au paragraphe 30 du 6e chapitre. On y lit que, dans certains cas, le bureau des services fiscaux a refusé la demande parce que le projet ou les dépenses étaient mal documentés. Dans d'autres cas, les vérificateurs et les conseillers scientifiques ont aidé le contribuable à reformuler sa demande pour qu'il soit admissible. C'est-à-dire que parfois, des gens ont reçu une lettre type disant désolés, votre documentation ne suffit pas; reprenez-la. Dans d'autres cas, il y avait des employés qui passaient jusqu'à mille heures à aider les gens à reformuler leurs demandes.

Ensuite, dans les quatre paragraphes suivants, nous vous donnons des exemples précis de manque d'uniformité notés. Certaines personnes ont obtenu un deuxième examen scientifique. La plupart des demandeurs ne savaient même pas que c'était possible. Certains ont eu droit à deux évaluations, et d'autres même à quatre. C'est cela, le manque d'uniformité dont nous parlons.

M. Philip Mayfield: Pour mettre les choses au clair, monsieur Minto, je ne parlais pas de fraude. Je parlais d'un programme où il semble que les gens changent d'opinion sur l'à propos d'un projet scientifique. Je n'essaie pas, ici, de viser les problèmes d'uniformité. J'essaie seulement de comprendre si c'est la nature des problèmes dont vous avez fait allusion dans vos observations aujourd'hui.

M. Denis Desautels: Monsieur le président, je pense que ce qu'ont dit certaines personnes, et c'est peut-être la même chose dont parle M. Mayfield, c'est que les mécanismes d'abri fiscal ont été conçus autour de la recherche scientifique, dont beaucoup de projets ont été rejetés puis réévalués par Revenu Canada, et au bout du compte beaucoup des gens qui avaient investi dans ces mécanismes ont été forcés de rembourser à Revenu Canada ce qui représentait pour eux des sommes importantes. Il y a eu certains de ces cas qui ont été très bien documentés. Mais ce n'est pas cela dont nous parlons dans ce chapitre.

M. Philip Mayfield: C'est l'éclaircissement que je demandais. Merci beaucoup.

Le président: Merci, monsieur Mayfield.

Monsieur Lee, vous avez des questions à poser, je crois.

M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Merci.

À propos des procédures d'immigration, je sais très bien de quoi vous parlez, en ce qui concerne l'uniformité et la qualité des décisions. C'est une observation très utile, particulièrement alors que la Chambre entame l'étude d'un nouveau projet de loi sur l'immigration, dont découleront de nouvelles règles relatives à l'immigration et, peut-être, une refonte du modèle actuel. Je ne doute pas que la nouvelle loi renfermera de nouvelles mesures d'efficience administrative. Du moins, c'est ainsi que je vois les choses.

La question que je voudrais poser concerne les aspects moins rigides, dont il y aura probablement toujours dans les programmes d'immigration. Je parle de la possibilité que, même si vous avez un modèle parfait, un système parfait, en vertu de notre règle de droit—et c'est ainsi dans beaucoup de pays—il y a toujours la possibilité de faire appel d'une décision administrative ou d'une décision de type quasi judiciaire, de recourir à une intervention judiciaire conformément à la loi, suivie d'un appel de la décision judiciaire. Ces appels sont parfois fondés sur les dispositions de la loi administrative, parfois de l'acte législatif, et d'autres fois de la charte. M. Mayfield a parlé de processus. Une tonne de processus pourraient s'ajouter.

• 1625

Je serais curieux de savoir comment votre bureau pourrait formuler un jugement sur ces démarches procédurales supplémentaires. Vous pourriez dans certains cas les juger abjectement inefficientes et coûteuses, alors que quelqu'un d'autre, voyant les choses sous l'angle de la loi et de la charte, trouverait que c'est la meilleure décision qu'on ait jamais prise de toute l'histoire de la Loi sur l'immigration. Même s'il a fallu 25 millions de dollars pour la formuler et que tout cela a ralenti le traitement de milliers de demandes, c'est la meilleure décision qui ait pu être prise pour monsieur tout le monde. Je présume qu'en voyant cela, vous diriez, mon Dieu, c'est absolument inacceptable, c'est le pire investissement des deniers publics qu'on ait jamais vu; voyez toute cette inefficience et ces retards. Pourtant, sous l'angle de la règle de droit, nous avons tapé en plein dans le mille. Alors, tandis que le vérificateur général fait la tête, le citoyen fait la fête. Où vous situez-vous dans tout cela?

Le président: Ce n'est pas le genre de question que vous entendez d'habitude, monsieur Desautels.

M. Derek Lee: Pardonnez-moi, est-ce que je me suis égaré?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, nous n'oserions surtout pas prétendre en savoir plus que les tribunaux, c'est certain, et nous ne portons aucun jugement là-dessus. Nous ne sommes pas revenus sur des décisions pour les analyser à nouveau en vue de déterminer si, oui ou non, les bons jugements avaient été rendus même s'ils n'avaient fait l'objet d'aucune contestation. Nous n'avons donc pas remis en question le jugement des personnes qui ont pris ces décisions.

Cependant, nous nous sommes entretenus avec beaucoup de personnes qui prennent ce genre de décisions. Nous avons rendu visite à de nombreux bureaux d'immigration du monde entier et avons observé de nous-mêmes leur mode de fonctionnement. Nous leur avons parlé et nous avons même effectué un sondage parmi eux pour qu'ils puissent nous dire ce qu'ils en pensaient vraiment. Ce sont eux qui disent que dans le contexte où ils travaillent, ils ne sont pas sûrs de toujours prendre les bonnes décisions.

Nous n'essayons pas de dire que nous remettons en question leurs décisions, ni que nous en savons plus que les tribunaux. Bien au contraire. Je pense qu'il est utile de vous informer, les députés, de la façon dont se font les choses ailleurs. Les gens à qui nous avons parlé sont très dévoués. Ils travaillent fort, mais, ils le disent eux-mêmes, leurs conditions de travail sont très éprouvantes. Ils ne disent pas cela pour se plaindre ou pour essayer d'améliorer leur sort. Nous avons pu nous-mêmes l'observer, et c'était très évident. Je pense donc que ce genre de rétroaction est utile. Je crois que la haute direction du ministère est tout à fait d'accord. Ils pensent que notre conclusion est assez dure, mais ils l'acceptent. Ils trouvent que nous avons bien cerné la situation.

Le président: Une très courte question, monsieur Lee.

M. Derek Lee: C'est à propos de la question conceptuelle des recours en appel des décisions administratives ou quasi judiciaires. Dans un dossier normal d'immigration, il peut y avoir en moyenne trois, quatre, cinq, six ou même une douzaine de décisions qui ont été prises à la lumière de critères divers. Avez- vous, en tant que vérificateur général, formulé ou commenté la possibilité d'un mécanisme d'appel suffisamment efficient—autrement dit, quelque chose qui prévoirait que personne, ici, ne peut prendre de décisions qui ne puissent être contestées, mais si c'est une décision administrative, nous pensons qu'à des fins d'efficience, on ne devrait avoir droit qu'à un seul recours en appel et c'est tout, et au-delà de ça ce ne pourrait être que sur autorisation? Cela vous est-il arrivé, que ce soit à l'étude d'un dossier d'immigration ou dans vos autres travaux pour le compte du gouvernement, de vous sentir poussé à concevoir un mécanisme d'efficience de la gestion des recours en appel?

• 1630

Le président: Monsieur Desautels.

M. Denis Desautels: Je demanderai à M. Flageole de répondre à cette question.

M. Richard Flageole: Monsieur le président, nous n'avons rien dit de précis sur la manière dont ils devraient s'y prendre.

Je devrais cependant préciser, pour clarifier les choses, qu'au contraire de la catégorie de la famille, aucun mécanisme d'appel n'existe pour les décisions qui se rapportent aux immigrants de la composante économique. On ne peut que demander un examen judiciaire à la Cour fédérale, ce qui signifie qu'elle devra reprendre les audiences au début, tandis que pour la catégorie de la famille, il existe un mécanisme d'appel.

Je pense que ce que nous voulions surtout faire comprendre, ici, c'est qu'il est impératif que le ministère fasse en sorte d'avoir les outils et les moyens nécessaires pour que les décisions de ses agents soient des décisions de qualité et qu'elles présentent un degré raisonnable d'uniformité. Il y aura toujours une part de jugement. Je ne pense pas que les agents puissent toujours viser juste. C'est l'essentiel du message que nous voulions transmettre.

Je crois que la loi déposée la semaine dernière propose qu'il faille obtenir une permission pour s'adresser à la Cour fédérale. C'est nouveau, comme mécanisme.

Mais nous insistons encore sur la nécessité pour le ministère de s'assurer d'optimiser la qualité et l'uniformité des décisions qui sont prises en son nom.

Le président: Merci, monsieur Lee.

Madame Jennings, veuillez être brève.

Mme Marlene Jennings: Êtes-vous satisfaits de la réponse du ministère de l'Immigration sur la question médicale, en ce qui concerne les contrôles médicaux?

Lorsque j'ai lu dans votre rapport, par exemple, que les exigences relatives aux maladies infectieuses avaient été établies il y a 40 ans, je vous assure que j'ai eu peine à le croire. Alors que les ministères de la Santé et de l'Immigration et les provinces essaient de s'entendre sur les tests qui devraient être utilisés pour déterminer si une personne peut être admise au Canada, nous appliquons encore des critères fixés il y a 40 ans. Il y a de nos jours des maladies infectieuses qui n'existaient même pas il y a 40 ans.

Êtes-vous satisfaits de la réponse du ministère de l'Immigration?

Le président: Parlez-vous de la maladie, qui n'existait pas, ou du test?

Mme Marlene Jennings: Dans certains cas, la maladie—à notre connaissance—n'existait pas.

Le président: Monsieur Desautels.

M. Denis Desautels: Monsieur Flageole, pourriez-vous donner une réponse?

M. Richard Flageole: Monsieur le président, la réponse est que oui, nous sommes satisfaits de la réponse du ministère. Cependant, nous avions reçu la même réponse il y a 10 ans, alors...

Mme Marlene Jennings: Bon, je vous interromps tout de suite.

M. Richard Flageole: La réponse sur papier...

Mme Marlene Jennings: Si vous avez reçu exactement la même réponse il y a 10 ans et que rien n'a changé, comment pouvez-vous, aujourd'hui, dire qu'oui, vous êtes satisfaits de la réponse que vous recevez maintenant? C'est exactement la même qu'il y a 10 ans, et rien n'a changé depuis.

M. Richard Flageole: La réponse qu'ils donnent maintenant, c'est qu'ils sont d'accord et qu'ils prendront une décision. Je crois que le ministre a annoncé publiquement que cette décision sera annoncée d'ici à l'automne, alors je le répète, nous verrons bien. Nous attendons une décision sur les critères médicaux d'admissibilité.

Mme Marlene Jennings: J'aimerais que vous nous signaliez si vous n'entendez pas parler de cette décision.

Le président: L'espoir est éternel, madame Jennings.

Mme Marlene Jennings: Je suis de nature optimiste.

Le président: Je le vois bien.

J'ai moi-même quelques questions à poser, monsieur Desautels, au sujet de votre chapitre sur l'éducation dans les réserves.

J'ai été choqué d'apprendre, premièrement, que 20 p. 100 des enfants d'âge scolaire qui vivent dans les réserves ne fréquentent pas l'école; qu'il y a un taux d'échec de 70 p. 100—donc que seulement 30 p. 100 des élèves obtiennent un diplôme; qu'il en coûte, dans certains cas, 65 000 $ par élève ayant des besoins particuliers; et que le ministère a des ententes qui, parfois—je crois que vous avez cité un cas—sont expirées depuis huit ans: l'une d'elle est venue à échéance en 1992 et n'a pas encore été renouvelée.

• 1635

Prenons ce coût de 65 000 $ par élève ayant des besoins particuliers: est-ce que ce sont des coûts légitimes, ou est-ce qu'il n'y a pas quelqu'un qui gonfle les chiffres quelque part?

Mme Sheila Fraser (sous-vérificatrice générale, Bureau du vérificateur général du Canada): Monsieur le président, nous n'avons pas approfondi cette question particulière. Ce sont des données que nous avons reçues du ministère. Nous n'avons pas approfondi ce dossier particulier...

Le président: Parce que vous n'avez pas autorité pour aller dans la réserve faire cette vérification.

Mais est-ce que le ministère n'a pas posé de questions sur ces coûts?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, nous pourrions demander à M. Wilson, si vous voulez, de venir répondre à cette question.

Le président: Monsieur Wilson, voulez-vous prendre place là, s'il vous plaît?

On dirait que vous êtes plus nombreux que nous. Nous allons à nous sentir intimidés.

Des voix: Oh, oh!

M. Grant Wilson (directeur principal, Opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Nous prévoyons toujours des réserves, monsieur le président.

Monsieur le président, les 65 000 $ dont il est question ne sont qu'un exemple du genre de coûts qu'entraînent les besoins particuliers. Par exemple, nous avons indiqué que dans une certaine région, les coûts annuels s'élèvent à 581 $ par élève. Dans la région dont il est question, les besoins particuliers coûtent entre 2 000 $ à 65 000 $ par élève. Ce que nous cherchions à souligner, ici, ce n'est pas que 65 000 $, c'est beaucoup ou peu, mais plutôt que le ministère n'a pas prévu de mécanisme pour s'assurer que les besoins particuliers des élèves sont satisfaits. Des fonds sont alloués, mais le ministère ne peut offrir aucune assurance que les besoins spéciaux qu'ils visent sont satisfaits.

Le président: Donc, le ministère était tout près à dépenser 65 000 $ par élève mais n'a pas songé à dire «C'est beaucoup d'argent. Est-ce vraiment ce dont les élèves ont besoin?». Le ministère n'a pas posé la question...

M. Grant Wilson: Monsieur le président, c'est en fait une indication de nos préoccupations générales en ce qui concerne le rôle du ministère relativement aux Premières nations. Le ministère ne sait pas, par exemple, combien les Premières nations dépensent réellement sur l'éducation. Il ne sait pas non plus...

Le président: Vous n'avez pas répondu à ma question, monsieur Wilson. À votre connaissance, le ministère n'a pas posé la question à la réserve. Il n'a pas dit: «C'est beaucoup d'argent, est-ce vraiment ce qu'il faut?».

M. Grant Wilson: Nous n'avons jamais demandé au ministère s'il a posé cette question, mais nous savions qu'il ne disposait d'aucun mécanisme lui permettant de s'assurer que cet argent est effectivement affecté aux fins pour lesquelles il est versé.

Le président: Donc, vous ne vous êtes pas donné la peine de poser la question parce que vous connaissiez la réponse, et cette réponse c'est que non, le ministère n'a rien demandé.

Et qu'en est-il de l'absence d'entente?

Mme Marlene Jennings: Je voudrais faire une objection, monsieur le président. Je ne crois pas que ce soit ce que le témoin a dit.

Le président: Non, je ne fais que...

Mme Marlene Jennings: Je pense bien que ce que le témoin a dit, c'est qu'ils n'ont pas posé la question au ministère, donc qu'ils ne peuvent absolument pas savoir si le ministère a posé la question aux réserves. Cependant, je suppose que là où vous vouliez en venir, c'est que même si le ministère avait posé la question, il ne dispose pas de mécanisme approprié pour pouvoir déterminer si la réponse qu'il reçoit est conforme à la réalité.

Le président: Oui, c'est bien ce que j'en ai déduit, madame Jennings. Il ne fait pas de doute que j'ai tiré mes propres conclusions.

Pour en revenir à l'absence d'entente, la dernière est venue à échéance en 1992. Rien n'est arrivé depuis. Personne ne s'est fait taper sur les doigts. Personne n'a posé la question: ne devons-nous pas renouveler cette entente...

M. Grant Wilson: Monsieur le président, le ministère était d'avis qu'il valait mieux conclure une entente plus exhaustive à l'échéance de celle-là. Des négociations sont en cours depuis 1992 en vue d'établir une entente raisonnable—comment cela s'appelle-t- il?—un accord-cadre. Nous nous en préoccupons, bien entendu, et nous recommandons que des ententes soient conclues avec les Premières nations pour répondre aux besoins particuliers de chacune d'elles.

Le président: Eh bien, c'est parfait, mais il semble bien qu'il n'y ait pas d'accord... Le ministère trouve donc qu'il vaut mieux qu'il n'y ait pas d'entente pendant huit ans, plutôt que l'ancienne entente. Je n'y connais pas grand-chose, mais est-ce que ce sont ces ententes qui régissent les flux de fonds?

M. Grant Wilson: Eh bien, monsieur le président, ces ententes sont une espèce de sous-élément. Les fonds qui sont versés aux Premières nations découlent d'accords de contribution, qui sont ces accords de transfert financiers, ces contributions dont nous avons parlé l'année dernière.

Le président: Oui, nous en avons déjà parlé...

M. Grant Wilson: Oui.

Le président: Et je n'en suis pas non plus satisfait.

À propos de la R-D expérimentale, au paragraphe 639, on dit dans ce cas précis:

    Lorsqu'il a présenté cette demande, le contribuable a mal documenté les travaux scientifiques et les dépenses connexes. Un bureau des services fiscaux a consacré plus de 10 000 heures à la vérification et a dépensé 300 000 $ pour obtenir un rapport scientifique.

Est-ce que c'était surtout pour combler les lacunes de la demande, monsieur Minto, ou monsieur Desautels?

• 1640

M. Shahid Minto: Monsieur le président, ce dossier était piètrement documenté, et le contribuable modifiait continuellement ses données...

Le président: Il modifiait ses données.

M. Shahid Minto: Il présentait des éléments nouveaux ou différents, alors il a fallu consacrer beaucoup de temps à rassembler les éléments de la demande. Beaucoup de temps a été consacré à la vérification, mais aussi à la reformulation de la demande.

La présidente: C'est donc un nouveau service qu'offre Revenu Canada?

M. Shahid Minto: Je pense que Revenu Canada a toujours été prêt à aider les contribuables.

Le président: C'est très généreux de sa part.

Vous savez que j'avais un cabinet comptable avant d'entrer en politique, et je ne me rappelle pas avoir jamais vu que Revenu Canada avait passé 10 000 heures à aider quiconque, ou dépensé 300 000 $ en frais de consultation, etc.

Donc, le sous-traitant a demandé le crédit d'impôt, n'est-ce pas?

M. Shahid Minto: Oui.

Le président: Puis il a vendu le travail au titulaire du contrat qui, conformément à la règle—et je sais, cette règle a changé depuis—a lui aussi fait une demande de crédit d'impôt?

M. Shahid Minto: Oui.

Le président: Vous avez bien dit qu'à cause de la confidentialité des dossiers, même si les agents de Revenu Canada ont vérifié les activités du sous-traitant, qu'ils ont jugé la demande légitime et que toute l'information voulue se trouvait dans le dossier et qu'ils ont accordé le crédit d'impôt demandé, quand est venu le moment d'examiner la demande du titulaire du contrat, qui n'avait pas le dossier du sous-traitant—et qui avait estimé ou, à ce que je comprends, généreusement surestimé le montant admissible au crédit d'impôt—parce qu'aucune donnée dans son dossier ne pouvait indiquer combien pouvait être admissible, les agents de Revenu Canada en ont fait une estimation. Est-ce bien cela?

M. Shahid Minto: Monsieur le président, en fait, c'est le contribuable qui a fait l'estimation, pas Revenu Canada.

Le président: Donc, le contribuable a fait les calculs et a déclaré avoir droit à un crédit d'impôt d'un tel montant. C'était une estimation un peu généreuse, peut-être?

M. Shahid Minto: Monsieur le président, selon les dossiers du contribuable, et comme nous le faisons remarquer dans le chapitre, Revenu Canada avait une bonne idée de ce que devrait être ce montant.

Le président: D'après la vérification du sous-traitant?

M. Shahid Minto: Et d'autres travaux de vérification faits dans le domaine.

Le président: Mais ils n'ont pas pu appliquer ces chiffres là?

M. Shahid Minto: Non, les vérificateurs de Revenu Canada ont pu les appliquer, et avoir une certaine idée, non pas du montant exact, mais de l'ordre de grandeur des coûts.

Le problème, en fait, c'est que c'est ce qu'ils ont pu corroborer d'après les documents fournis par le contribuable et ses déclarations, mais ils n'ont pas pu se fonder, pour le reste du montant qui a été accordé, sur une vérification des déclarations.

Le président: Sans vérification des déclarations par les vérificateurs dont les signatures...

M. Shahid Minto: Il y a eu en fait deux volets. Les montants qui ont finalement été approuvés représentaient presque le double de ce que les contribuables pouvaient corroborer dans leur documentation.

Le président: Est-ce que cette recherche, pour laquelle nous avons accordé des crédits d'impôt au sous-traitant et au titulaire du contrat, est devenue du domaine public et a été vendue, puis a généré toutes sortes d'activités économiques?

M. Shahid Minto: Monsieur le président, c'était deux contribuables. Je n'ai jamais dit que c'était un titulaire de contrat et un sous-traitant.

Le président: C'est moi qui les ai appelés ainsi, pour simplifier les choses. C'est ma terminologie. J'ai un esprit très pratique.

M. Shahid Minto: Monsieur le président, vous pourrez comprendre que bien que vous ayez tous les droits de poser des questions, l'article 241 de la Loi de l'impôt sur le revenu ne nous permet de vous fournir que certaines informations.

Le président: Oui.

M. Shahid Minto: Nous avons accès à l'information; nous la connaissons. Mais si je vous la donne, cela pourrait contribuer à identifier le contribuable, et vous savez bien que la Chambre et ce comité s'efforcent depuis très longtemps de protéger la confidentialité des données des contribuables. Alors peut-être pourrais-je vous demander de repenser à votre question.

Le président: D'accord.

Monsieur Desautels, êtes-vous d'accord avec M. Minto, qui fait appel de la protection de l'article 241?

M. Denis Desautels: Oui, monsieur le président.

Le président: D'accord, nous respectons votre opinion et laissons cela.

Est-ce qu'il y a d'autres questions? J'en ai tout un éventail, mais je préfère attendre les audiences pour les poser.

• 1645

Comme il n'y a plus de questions, avant de lever la séance, et puisqu'il semble que nous ne puissions pas avoir de réunion du comité de direction en l'absence de quorum, nous avons prévu une réunion le mardi 2 mai au sujet du Budget principal des dépenses du Bureau du vérificateur général du Canada. Cette séance sera suivie d'une réunion du comité de direction, où nous discuterons de la lettre que nous a remise le vérificateur général.

Le jeudi 4 mai, nous avons prévu l'examen des projets de rapport sur les chapitres du rapport de 1999 qui a été déposé en décembre dernier, et la semaine suivante est aussi réservée à un projet de rapport. Le greffier me dit que, même s'il y a une réunion du comité de direction le 2 mai et le compte rendu au comité principal le 4 mai, il aura assez de temps pour convoquer les témoins. Puisque nous n'avons environ que quatre questions à examiner—le vérificateur général en a recommandé cinq—je proposerais à ce moment-là de traiter des quatre questions et de laisser l'étude du régime de gestion des ressources humaines pour notre retour en septembre, puisque d'après le vérificateur général, l'examen de ce chapitre nécessiterait probablement plus d'une réunion. Je présume, monsieur Desautels, que nous pouvons espérer avoir notre rapport à notre retour, en septembre?

M. Denis Desautels: Au début d'octobre.

Le président: Nous devons recevoir un autre rapport au début d'octobre, alors pour les deux ou trois prochaines réunions, si la Chambre n'est pas dissoute...

Devons-nous reconstituer les réunions du comité en septembre, monsieur le greffier?

Le greffier du comité: Une nouvelle liste sera présentée à la Chambre, et il se pourrait qu'il y ait des changements.

Le président: Il pourrait donc falloir deux ou trois semaines avant que les comités puissent se mettre au travail.

Monsieur Sauvageau.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Monsieur Desautels, en octobre, vous ferez bel et bien rapport sur DRHC, n'est-ce pas?

M. Denis Desautels: Entre autres, monsieur le président. En octobre, nous allons faire rapport sur DRHC, mais nous aurons aussi d'autres chapitres à vous remettre à ce moment-là.

M. Benoît Sauvageau: Que vous êtes gentil.

[Traduction]

Le président: Le greffier dressera une liste provisoire des témoins sur ces quatre chapitres, puis nous laisserons la question de la gestion des ressources humaines pour l'automne, mais tout ceci ne pourra être confirmé qu'à la réunion du comité de direction qui doit avoir lieu le 2 mai.

Est-ce qu'il y a d'autres questions?

Une voix: Non.

Le président: La séance est levée.