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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HUMAN RESOURCES DEVELOPMENT AND THE STATUS OF PERSONS WITH DISABILITIES

COMITÉ PERMANENT DU DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 23 mars 2000

• 1106

[Traduction]

Le président (M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)): Nous allons commencer, et je vais demander aux caméras de sortir. Je vais présenter nos témoins dans un instant. Comme vous le savez, cette séance est télévisée, mais je dois demander aux cameramen de sortir.

Chers collègues, j'ai quelques informations à vous communiquer avant de commencer. Nous avons tous reçu les rapports de 1991 et 1994 que nous avions demandés. Comme vous le savez, après notre séance de mardi, outre mes demandes d'information habituelles, j'ai écrit officiellement au nom du comité et nous avons maintenant reçu les rapports. J'espère que chacun les a.

Toutes nos excuses aux témoins. M'en remettant à votre indulgence, je vais expédier ces quelques affaires maintenant parce qu'il est parfois difficile de le faire en fin de séance. Vous comprenez.

Chers collègues, pour ce qui est de la semaine prochaine et de la semaine d'ensuite, nous avons des listes de témoins, comme vous le savez, et je vous ai dit que je m'en occuperais de mon mieux. De toute évidence, tout dépend si les témoins sont libres, ce genre de choses. Pour le moment, voici ce que j'ai pu confirmer.

Mardi prochain, à l'heure habituelle, nous entendrons John Reid, le commissaire à l'information du Canada; Bruce Phillips, le commissaire à la protection de la vie privée du Canada; Ekos; ainsi que Conseils et Vérification Canada, pour la même séance.

Jeudi, nous recevrons les représentants régionaux de DRHC, tout particulièrement, Danielle Vincent, sous-ministre adjoint responsable de la région du Québec; et Suzette Perrault, directrice générale, centre-ville, Québec. Cette séance aura lieu dans huit jours, à l'heure habituelle.

Le mardi suivant, soit le 4, nous entendrons l'honorable Lucienne Robillard et les fonctionnaires du Conseil du Trésor.

Voilà où nous en sommes pour ce qui est des confirmations.

Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous nous réunissons aujourd'hui pour l'étude des subventions et contributions de DRHC. Nos témoins sont Denis Desautels, vérificateur général du Canada; Maria Barrados, vérificatrice générale adjointe, Direction des opérations de vérification; Theresa Duk, directrice principale, Direction des opérations de vérification; et Henno Moenting, directeur principal, Direction des opérations de vérification.

Nous vous souhaitons la bienvenue à tous. Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir accepté notre invitation. Encore une fois, toutes mes excuses à M. Desautels; je sais que nous avons modifié la date plusieurs fois. Vous devez savoir qu'il y a eu des votes hors de l'ordinaire à la Chambre des communes et diverses situations expliquant que nous avons dû reporter ou abréger nos séances. Nous vous savons gré de votre patience, et nous sommes heureux de vous voir des nôtres aujourd'hui. Je crois savoir que vous avez une déclaration préliminaire à nous faire.

• 1110

M. L. Denis Desautels (vérificateur général du Canada, Bureau du vérificateur général du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président. C'est un plaisir pour mes collègues et moi que de rencontrer votre comité aujourd'hui pour discuter de la gestion des subventions et des contributions et de notre vérification à DRHC. Les questions qu'a soulevées la vérification interne à DRHC ont fait l'objet d'un débat et d'une controverse sans précédent au cours des dernières semaines. Pour ma part, je me réjouis d'avoir l'occasion d'en discuter avec les membres du comité.

Maints programmes gouvernementaux ayant des objectifs différents recourent aux subventions et aux contributions pour effectuer des paiements. Certains servent à effectuer des paiements législatifs comme les prestations de la sécurité de la vieillesse; d'autres bénéficient d'un grand pouvoir discrétionnaire comme les programmes de formation et d'expérience de travail. En 1998-1999, les programmes discrétionnaires représentaient des dépenses d'environ 17 milliards de dollars dans l'ensemble du gouvernement, dont 17 p. 100 ont été effectuées par DRHC.

Je ne peux m'empêcher de ressentir une certaine frustration quant à la façon dont le gouvernement gère les subventions et les contributions en général. Nos travaux de vérification dans divers ministères depuis 1977 ont révélé des lacunes persistantes; nous avons constaté notamment des problèmes de conformité aux autorisations, des faiblesses dans la conception des programmes et leur contrôle, l'insuffisance des mesures du rendement et le manque d'information communiquée à ce sujet. Les mêmes problèmes surgissent chaque fois que nous vérifions des programmes de subventions et de contributions. Les récentes vérifications internes de DRHC vont dans le même sens.

La gestion adéquate des subventions et des contributions est un volet essentiel d'une bonne administration publique au gouvernement fédéral. Des fonds publics importants sont en cause et ceux-ci devraient être dépensés avec le plus grand soin. Ce soin ne peut être exercé que si la gestion du rendement et des finances est adéquate, c'est-à-dire notamment s'il y a des niveaux de contrôle appropriés.

[Français]

Monsieur le président, la récente vérification interne à DRHC a révélé de graves lacunes dans la gestion des subventions et des contributions, y compris de nombreuses faiblesses en matière de contrôle. C'est une façon inacceptable, selon moi, de dépenser les fonds publics. Des sommes importantes ont été dépensées sans contrôle approprié. Il est donc difficile de savoir si ces fonds ont été utilisés aux fins prévues, s'ils ont été dépensés de façon judicieuse et s'ils ont produit les résultats souhaités.

DRHC est un ministère complexe, de grande taille, où la prise de décisions à l'égard des programmes est décentralisée. Ceci, à dessein, laisse un grand pouvoir discrétionnaire à la gestion pour décider des personnes admissibles et des montants à accorder, et pour déterminer si le rendement correspond aux attentes et si des paiements doivent être faits. Dans un système aussi décentralisé que DRHC, il est essentiel d'avoir un cadre de contrôle solide, des mécanismes appropriés pour vérifier le respect de ce cadre ainsi que des obligations redditionnelles claires pour l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire.

Au cours de la dernière décennie, le Bureau de vérification interne de DRHC a signalé des lacunes importantes dans la gestion des subventions et des contributions. Ainsi, dans son rapport de vérification de 1991 portant sur d'importantes contributions faites au titre des programmes d'emploi, le bureau indiquait que les pratiques de surveillance ne permettaient pas une protection adéquate contre le mauvais usage des fonds publics. En 1994, un suivi de cette vérification a révélé que les contrôles et la surveillance continuaient d'être négligés, même dans les grands projets complexes.

[Traduction]

En 1998, le Bureau de la vérification interne du ministère a effectué une vérification des subventions et des contributions au titre de la stratégie du poisson de fond de l'Atlantique. Nous nous sommes appuyés sur ces travaux de vérification pour préparer le chapitre sur la stratégie que nous avons publié dans le rapport d'avril 1999. Nous avons conclu qu'il y avait manque de rigueur dans l'évaluation des demandes de contribution et dans la conclusion des ententes, ainsi qu'une surveillance insuffisante de la part du ministère.

Comme il l'a indiqué dans ses plans de 1998, le Bureau de la vérification interne poursuit sa vérification des programmes de subventions et des contributions en vigueur. La vérification interne des subventions et des contributions de DRHC en 1999 portait sur des programmes de sept directions, qui représentaient des dépenses d'environ un milliard de dollars. Il s'agissait de la plus importante et de la plus vaste des vérifications de subventions et de contributions réalisées par le Bureau de la vérification interne. Compte tenu des restrictions que peuvent imposer la portée de la vérification et l'échantillon examiné, les résultats sont clairs et crédibles.

• 1115

À mon avis, on ne peut que louer le Bureau de la vérification interne pour son travail. La vérification interne joue un rôle important dans les ministères. Elle fournit aux sous-ministres l'assurance que leurs programmes sont bien gérés et recommande des mesures correctrices dans les secteurs où des faiblesses sont relevées.

La vérification interne peut aussi jouer un rôle important dans notre travail. Chaque fois que nous le pouvons, nous nous appuyons sur les travaux de la vérification interne et nous veillons à ce qu'il n'y ait pas de chevauchement entre les travaux respectifs. Nous avons utilisé ou cité des rapports de vérification interne dans nos travaux à DRHC. Cela nous a permit d'élargir la portée de notre vérification et de fournir au Parlement un tableau plus complet de la situation.

Il y a eu de nombreuses références au plan d'action préparé par le ministère pour corriger les lacunes décelées par le Bureau de la vérification interne, et à la lettre que j'ai fait parvenir au sous-ministre au sujet de ce plan. Je crois qu'il s'agit d'un plan de mesures très complet pour corriger les problèmes de contrôle immédiats qui ont été cernés. Le plan prévoit aussi des mesures à plus long terme pour renforcer l'approche.

Au cours de notre propre vérification de DRHC, nous comptons évaluer les progrès réalisés par le ministère dans la mise en oeuvre de ce plan.

[Français]

En réponse à une demande du Comité permanent des comptes publics, j'ai décrit, en juin dernier, mes plans de vérification des subventions et des contributions dans certains ministères. Ces plans font partie d'une stratégie de vérification échelonnée de ce type de programmes à l'échelle gouvernementale. Lors de nos récentes discussions avec le président du Comité permanent des comptes publics, nous avons confirmé que nos plans de vérification demeuraient les mêmes.

Nous avons l'intention de communiquer, en octobre prochain, les résultats de notre vérification de certains programmes de subventions et de contributions de Développement des ressources humaines Canada. En octobre et en décembre, nous communiquerons les résultats de nos vérifications de subventions et contributions d'autres ministères et organismes. Quant aux résultats de notre vérification de portée gouvernementale des subventions et des contributions, nous en rendrons compte à l'automne 2001.

La stratégie qui sous-tend notre plan de vérification de DRHC est d'éviter de faire double emploi avec les travaux déjà réalisés et les travaux en cours. Nous nous appuierons donc sur les travaux réalisés et traiterons de questions qui n'ont pas été abordées par le Bureau de la vérification interne. Par exemple, celui-ci a examiné la documentation se trouvant dans les dossiers, mais il ne s'est pas penché sur des questions comme la conception des programmes, les critères d'admissibilité ou les résultats obtenus. Ce sont des aspects que nous examinerons.

[Traduction]

Notre vérification s'attachera, en premier lieu, à déterminer la mesure dans laquelle nous pouvons utiliser les travaux du Bureau de la vérification interne et nous fier au système de suivi du rendement établi par le ministère; en deuxième lieu, à évaluer les progrès réalisés par DRHC dans la mise en oeuvre de son plan d'action correctif; en troisième lieu, à évaluer la conformité aux autorisations financières comme la Loi sur la gestion des finances publiques et les politiques du Conseil du Trésor; en quatrième lieu, à évaluer le caractère adéquat du cadre de contrôle de gestion, par exemple, qui est responsable de quoi, comment les principales décisions sont prises, la capacité d'assurer la prestation des programmes et les contrôles en place; enfin, nous évaluerons la mesure des résultats et la façon dont ils sont communiqués.

Nous utiliserons une combinaison de méthodes pour atteindre ces objectifs. En outre, nous effectuerons des travaux de vérification à l'égard de quatre programmes distincts, dont le Fond transitoire pour la création d'emplois.

Dans le cadre de notre prochaine vérification des subventions et des contributions, de portée gouvernementale, et de notre vérification actuelle de DRHC, nous nous pencherons sur des questions plus vastes. Nous tâcherons par exemple de savoir pourquoi les problèmes décelés perdurent et pourquoi les pratiques de gestion des subventions et des contributions sont aussi faibles.

J'espère que l'incidence combinée des mesures prises par les ministères et l'exécution de nos plans de vérification donneront lieu à une meilleure gestion des subventions et des contributions dans l'ensemble de l'administration fédérale.

Dans le chapitre de mon rapport de décembre 1998, intitulé «Les subventions et les contributions: certains programmes d'Industrie Canada et du ministère du Patrimoine canadien», j'ai indiqué que nous élaborerions un cadre de gestion des programmes de subventions et de contributions qui, nous l'espérons, aidera les gestionnaires dans leur travail. Nous avons présenté ce cadre aux gestionnaires des ministères, dans le cadre d'un projet pilote.

J'espère réellement que tout ce débat public incitera les responsables à réexaminer la conception, l'exécution et l'efficacité de ces programmes. En outre, j'insiste sur l'importance d'examiner la façon dont le risque est géré dans le contexte de toute initiative de restructuration ou de refonte. Il serait contre-productif que les changements nécessaires entraînent un resserrement excessif du système et une bureaucratie trop lourde. DRHC doit livrer un éventail de programmes variés et complexes. Il faudra trouver un équilibre entre la nécessité de répondre aux besoins des bénéficiaires, d'assurer des contrôles adéquats, d'évaluer les risques et d'offrir des résultats aux contribuables. Il se peut qu'on soit aller trop loin dans une direction. Il faut rajuster le tir.

• 1120

J'espère aussi que cette controverse n'a pas suscité de réaction négative à l'égard de la vérification interne ou de l'évaluation dans l'administration fédérale. Cela serait très malheureux. Au contraire, j'espère qu'il pourra en ressortir des choses positives. J'espère que le gouvernement pourra enfin arriver à assurer la gestion fondamentale des programmes de subventions et de contributions dans toute l'administration fédérale, qu'il fera des progrès en instituant de saines pratiques de gestion des risques et qu'il examinera l'efficacité de ces programmes.

Monsieur le président, voilà qui met fin à ma déclaration d'ouverture. Je serais heureux de répondre à toutes vos questions et à celles des membres du comité.

Le président: Merci, monsieur Desautels. Nous apprécions votre témoignage au plus haut point. Vos collègues n'ont rien à ajouter?

M. Denis Desautels: Non.

Le président: Merci.

Chers collègues, nous allons passer aux questions dans un instant. Mais si vous le permettez, j'aimerais d'abord signaler la présence de l'honorable David MacDonald, qui est maintenant à l'université Concordia. Il est accompagné d'étudiants de la School of Community and Public Affairs de Concordia. Ce sont des étudiants du niveau supérieur qui font une étude sur le Parlement.

Au nom du comité permanent, je tiens à vous dire, David, que souhaiter la bienvenue, à vous, David, et bien sûr aux étudiants.

[Français]

Vous être les bienvenus.

[Traduction]

Des voix: Bravo!

Le président: Chers collègues, comme d'habitude, j'ai une longue liste. Pour vous en donner une idée, je vais vous en lire une bonne partie. Encore une fois, je tâcherai d'être juste. Je vais modifier la liste que j'ai si je vois qu'un côté prend trop de temps.

J'ai sur ma liste: Maurice Vellacott, Rey Pagtakhan, Paul Crête, Bryon Wilfert, Jean Dubé, Judi Longfield, Pat Martin, Judy Sgro et Bonnie Brown, et nous poursuivrons à partir de là. J'ai d'autres noms sur ma liste, mais je ne les ai pas mentionnés.

M. Maurice Vellacott (Wanuskewin, Réf.): Je suis très heureux que le comité puisse vous entendre, monsieur Desautels, Maria, Theresa et Henno. Je sais que vous n'êtes pas des témoins hostiles, que vous parlerez donc franchement. J'ai été à même par le passé de voir comment vous effectuez vos vérifications et tout le reste. Vous êtes très objectifs, et je vous en suis vivement reconnaissant aujourd'hui.

Pour en arriver à ma question, simplement, vous mentionnez explicitement dans votre mémoire l'irritation que vous causent les lacunes persistantes qui ont été relevées par ces vérifications à DRHC et à EIC. C'est un peu toujours la même vieille histoire. Comme vous êtes au courant depuis longtemps de la faiblesse des contrôles administratifs et de la mauvaise gestion des projets à DRHC et à EIC, pourquoi, à votre avis, ce ministère éprouve-t-il des difficultés administratives aussi persistantes et aussi graves?

M. Denis Desautels: Eh bien, monsieur le président, j'espère que je serai mieux à même de répondre à cette question une fois que nous aurons terminé le travail que nous effectuons en ce moment. Néanmoins, comme je l'ai dit, les difficultés qui ont été relevées par le bureau de la vérification interne sont très semblables à celles dont nous avons fait état lorsque nous avons vérifié le programme LSPA, et aux difficultés que nous avons notées également dans les autres ministères que nous avons vérifiés récemment, notamment Patrimoine canadien et Industrie Canada.

Pour ce qui est de DRHC lui-même, les raisons précises sont difficiles à cerner. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, cependant, l'un des facteurs qui, à mon avis, a contribué à cet état de choses est l'importance exagérée—si je puis dire—que l'on a accordée au service à la clientèle au détriment peut-être de certains contrôles administratifs essentiels et des dossiers qu'il faut établir pour s'assurer que l'on a à tout le moins respecté les quelques règles administratives élémentaires qui sont en place. Donc, dans une certaine mesure, je pense que c'est attribuable à ce déplacement vers le service à la clientèle au détriment des nécessités administratives. Je pense qu'il y a un équilibre à rétablir dans une certaine mesure.

• 1125

M. Maurice Vellacott: Si vous me permettez d'intervenir, monsieur Desautels, cela expliquerait en quelque sorte cette dernière vérification interne, mais c'est plutôt le caractère historique qui m'intéresse, 1991 et 1994, de certains problèmes que vous avez mentionnés. Cette nouvelle mentalité qui consiste à assouplir les règles et à expédier les choses, ce genre de comportements, je crois savoir que c'est assez récent, cela remonte aux quelques dernières années, et pas aussi loin que 1991 ou 1994. C'est ce que j'essaie de déterminer ici: Pourquoi? La situation est-elle différente dans les autres ministères, ou est-ce plus grave à DRHC ou EIC, ce relâchement persistant de la fonction administrative?

Le président: Je comprends que nous sommes en début de séance, mais je tiens à rappeler à mes collègues et aux témoins qu'il y a un président ici.

M. Denis Desautels: Monsieur le président, cette tendance à la décentralisation existe depuis le milieu des années 90 à peu près, ça ne remonte donc pas seulement aux dernières années. Dans la foulée de la restructuration du ministère et de la compression des effectifs, on s'est mis à donner plus d'autorité au personnel de première ligne. Ce n'est donc rien de très neuf.

Mais je ne veux pas non plus verser dans le simplisme. Cela n'est qu'un facteur parmi d'autres. Chose certaine, comme je l'ai dit, certains problèmes ont été relevés bien avant cela, dès le début des années 90 et même avant. Les causes de tous ces problèmes sont très profondes, et elles ne sont pas totalement étrangères au fait que les responsables sont obligés de distribuer l'argent rapidement. Cela a toujours fait problème. Mais de manière générale, à mon avis, on n'a tout simplement pas accordé suffisamment d'importance à la saine gestion des dépenses gouvernementales lorsqu'il s'agit de subventions et de contributions.

M. Maurice Vellacott: J'aimerais maintenant savoir s'il existe des incitatifs en ce moment qui encouragent les ministères à respecter les lignes directrices du Conseil du Trésor. Existe-t-il des mesures d'encouragement ou des règles qui obligent les ministères à respecter les lignes directrices du Conseil du Trésor? Autrement dit, sont-ils obligés de respecter les lignes directrices du Conseil du Trésor, ou est-ce facultatif?

M. Denis Desautels: Les lignes directrices du Conseil du Trésor sont importantes. Je dirais même qu'il serait bon que le comité examine cette question: Dans quelle mesure le Conseil du Trésor doit-il faire plus qu'émettre des lignes directrices? Dans quelle mesure le Conseil du Trésor doit-il dicter les modalités et conditions d'un certain programme, et dans quelle mesure doit-il s'assurer par après que les ministères ont bel et bien respecté les modalités et conditions des programmes dont ils ont la charge?

M. Maurice Vellacott: Que fait maintenant le Conseil du Trésor? S'assure-t-il que ces règles sont respectées, ou se contente-t-il d'envoyer des notes établissant les lignes directrices, et ce, sans avoir de mécanismes lui permettant de faire respecter ces règles?

M. Denis Desautels: Le Conseil du Trésor a aujourd'hui pour principe de donner le plus possible d'autorité aux ministères, de décentraliser le plus possible, d'émettre des lignes directrices et de s'attendre à ce que les ministères respectent ces lignes directrices de leur propre chef.

M. Maurice Vellacott: Peut-il imposer des sanctions à un ministère qui contrevient manifestement à la Loi sur la gestion des finances publiques? Peut-il imposer des sanctions? Quelles mesures peut-il prendre à l'égard des ministères dont on sait qu'ils contreviennent ou contreviennent fréquemment à cette loi?

M. Denis Desautels: Je crois que le Conseil du Trésor dispose de certains instruments dont il peut se servir pour obliger les ministères à respecter les modalités et conditions qui ont été arrêtées, mais il n'y a plus recours depuis quelque temps.

Le président: Maurice, avez-vous terminé?

M. Maurice Vellacott: En fait, donc, vous me dites qu'il n'a pas vraiment d'autorité. Il peut recourir à la persuasion ou à autre chose, mais le Conseil du Trésor ne peut pas vraiment recourir à des blâmes ou à des règles pour faire respecter ces lignes directrices.

M. Denis Desautels: Le Conseil du Trésor dispose de l'autorité, des instruments et du mandat voulus pour faire respecter certaines modalités et conditions. Il lui appartient de faire usage de cette autorité et de ces instruments.

Le président: Maurice, ce sera votre dernière question.

M. Maurice Vellacott: Si depuis 1991 et 1994 on constate les mêmes choses, j'en conclus—et vous me direz si vous êtes de mon avis—que le Conseil du Trésor ne se sert pas des moyens qu'il a puisqu'à chaque vérification on constate les mêmes lacunes et les mêmes problèmes. Ma conclusion est-elle justifiée? Est-ce une affirmation objective?

• 1130

M. Denis Desautels: Je crois que l'on se trouve ici devant une question un peu plus vaste à propos de laquelle, comme je l'ai déjà dit, je serais heureux que les parlementaires tiennent une discussion.

La question porte en fait sur le rôle du Conseil du Trésor ou du Secrétariat du Conseil du Trésor par rapport à tel ou tel programme. Comment le Conseil du Trésor s'acquitte-t-il de sa tâche dans l'établissement des modalités et conditions de chaque programme de subventions et de contributions? Les modalités et conditions proposées sont-elles systématiquement examinés et critiquées par le Conseil du Trésor? Les programmes sont-ils conformes aux modalités et conditions approuvées du Conseil du Trésor?

Je crois qu'il y a suffisamment de matière ici pour lancer une discussion sur certaines de ces questions et cela profiterait non seulement à DRHC mais aussi à toute l'administration des subventions et contributions dans le secteur public.

Le président: Rey Pagtakhan, Paul Crête, Bryon Wilfert et Jean Dubé.

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie de votre exposé, monsieur le vérificateur général.

Je suis très rassuré d'apprendre que d'après votre bureau le plan en six points est un plan très complet de mesures correctives. On espère évidemment que les problèmes que vous avez signalés et qui sont revenus en 1991 et 1994 ainsi que dans d'autres ministères, comme l'absence de diligence raisonnable et de surveillance, disparaîtront après votre vérification ou seront à tout le moins corrigés dans une large mesure.

Ma question porte sur la qualité du contrôle de gestion. Le greffier du Conseil privé a témoigné ici mardi dernier. Je ne sais pas très bien quel est le rôle véritable du greffier du Conseil privé dans la gestion de la fonction publique fédérale. Comme le temps a manqué, je n'ai pas pu poser la question. Quel est d'après vous le rôle du greffier du Conseil privé dans le système de contrôle de gestion?

M. Denis Desautels: C'est je crois une question d'orientation. Dans quelle mesure le gouvernement fédéral souhaite-t-il une administration centralisée ou décentralisée avec délégation de pouvoirs aux sous-ministres?

Lorsqu'il s'agit d'un grand ministère comme DRHC et d'autres, on parle de grandes organisations. À mon avis, il faut les traiter en adultes. Il faut leur donner des objectifs à atteindre et mesurer leur rendement en conséquence sans tomber dans la microgestion.

C'est donc une question d'idéologie. Certaines organisations préfèrent un contrôle plus serré mais je crois que lorsqu'il s'agit de grandes organisations gouvernementales, il faut donner suffisamment de pouvoir à ceux qui gèrent les programmes tout en les obligeant à rendre des comptes.

M. Rey Pagtakhan: Il y a 4 200 employés au ministère; d'après vous, est-ce suffisant pour un ministère doté d'un si gros budget et d'un grand nombre de programmes?

M. Denis Desautels: Je ne pense pas pouvoir répondre à cette question. Vous avez raison, c'est un ministère immense. Il est très difficile de dire s'il y a ou non pénurie de personnel ou si le ministère dispose des ressources qu'il faut. Mais grâce aux travaux que nous entreprenons, j'espère que nous pourrons jeter plus de lumière sur la question de la capacité de l'organisation de remplir son mandat.

C'est un problème que nous rencontrons dans un nombre croissant de ministères, où il est difficile de faire concorder la capacité du ministère et son aptitude à faire ce que l'on attend de lui. C'est une question légitime, mais je ne suis pas en mesure aujourd'hui de vous répondre avec plus de précision. Après la présente vérification, j'espère pouvoir mieux vous répondre.

Le président: Très brièvement.

M. Rey Pagtakhan: En ce qui concerne les directives ou lignes directrices du Conseil du Trésor et les lignes directrices du ministère, quelle est la distinction entre les deux, d'abord? Je sais que les lignes directrices sont plus souples.

M. Denis Desautels: Maria, voulez-vous répondre à la question?

• 1135

Mme Maria Barrados (vérificatrice générale adjointe, Direction générale des opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Je pense qu'on fait un emploi assez lâche de la terminologie. On a essayé d'établir une distinction entre ce qui doit être fait et ce qui est conseillé. Le Conseil du Trésor a essayé de réduire le nombre de prescriptions pour favoriser plutôt les directives sur les bonnes pratiques, dans l'espoir que celles-ci seront adoptées et suivies. Le vocabulaire n'est pas aussi uniforme qu'il pourrait l'être.

[Français]

Le président: Paul Crête.

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur Desautels, je vous remercie d'être venu ici aujourd'hui. Vous dites dans votre document, dont je cite un extrait, que le problème est grave:

    Des sommes importantes ont été dépensées sans contrôles appropriés. Il est donc difficile de savoir si ces fonds ont été utilisés aux fins prévues, s'ils ont été dépensés de façon judicieuse ou s'ils ont produit les résultats souhaités.

J'ai personnellement qualifié la situation de cancer au ministère du Développement des ressources humaines.

À votre avis, monsieur Desautels, est-ce que la flexibilité dont l'ancien sous-ministre nous a parlé mardi passé n'est pas de fait un laissez-faire qui a mené directement au cafouillis administratif qu'on a devant nous et à l'utilisation partisane des fonds qui a pu en résulter?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, nous avons l'intention, comme je l'indiquais un peu plus tôt, d'examiner lors de notre vérification dans quelle mesure il y avait des directives claires et des critères bien connus de tous avant qu'on approuve les demandes d'aide. Lorsque nous aurons complété notre travail et évalué la situation pour voir s'il y avait à ce moment-là trop de flexibilité ou même un manque de clarté dans la façon dont les dossiers étaient gérés, nous serons mieux disposés à répondre à cette question. Pour l'instant, monsieur le président, je ne suis pas en mesure de répondre avec plus de précision à la question de M. Crête. En octobre prochain, lorsque j'aurai complété le travail, je pourrai probablement mieux décrire la façon dont les programmes ont été administrés et vous dire s'il y avait suffisamment de clarté dans la définition des critères.

M. Paul Crête: Vous avez souligné dans votre document que le Fonds transitoire pour la création d'emplois était un des programmes qui méritaient d'être étudiés de façon approfondie pour vérifier ces faits.

M. Denis Desautels: Monsieur le président, c'est exact. Nous avons inclus ce programme dans notre programme de travail.

M. Paul Crête: J'aimerais vous poser une autre question au sujet des vérifications de 1991 et 1994 dont on a eu copie. Vous apparaît-il qu'on fait preuve d'ignorance inexcusable lorsqu'un sous-ministre en titre nous dit qu'il n'avait pas été mis au courant des résultats de ces vérifications-là lors de son entrée en fonction, alors que la première évaluation de la vérification de 1994 porte sur les recommandations de 1991, dont la première traitait des contributions, et qu'on nous dit précisément que cette recommandation n'a pas été jugée satisfaisante?

Est-ce qu'il vous apparaît acceptable que le sous-ministre ou les ministres n'aient pas été mis au courant de l'état de la situation? Nous célébrerons bientôt le 10e anniversaire du mauvais fonctionnement de ces systèmes.

[Traduction]

Le président: Maria Barrados.

Mme Maria Barrados: Monsieur le président, DRHC a un comité de vérification et d'évaluation présidé par le sous-ministre adjoint. Celui-ci représente le sous-ministre. Toute l'information sur la vérification et les plans de vérification passe par ce comité. Notre bureau y est représenté à titre d'observateur. L'information passe par là. La documentation aussi. Il revient au sous-ministre d'informer le ministre.

[Français]

M. Paul Crête: Je vais répéter ma question. Trouvez-vous acceptable que le sous-ministre en titre du plus grand ministère du gouvernement fédéral n'ait pas été informé des résultats des deux vérifications internes? Est-ce qu'on ne peut pas voir là les conséquences qu'on relève dans une nouvelle vérification pour l'exercice 1999-2000, où l'on nous montre le même laxisme que lors des précédentes vérifications?

[Traduction]

Mme Maria Barrados: Monsieur le président, notre bureau estime que la vérification et l'évaluation internes sont des tâches très importantes qui apportent beaucoup. Nous nous attendons à ce que les résultats de ces rapports soient communiqués à ces comités au moyen de ces mécanismes et soient transmis au sous-ministre.

[Français]

M. Paul Crête: Vous reconnaissez donc qu'il aurait normalement fallu que le sous-ministre soit mis au courant de cette situation.

• 1140

[Traduction]

Mme Maria Barrados: Je m'attends à ce que le sous-ministre soit informé.

[Français]

M. Paul Crête: Monsieur Desautels, j'ai cru comprendre que vous alliez mener une enquête plus approfondie. On comprend qu'une vérification interne et une vérification sur l'ensemble du ministère ne sont pas du même ordre. Est-ce que vous excluez au départ le fait que vous pourriez recommander qu'il y ait une enquête publique et indépendante sur la question, étant donné qu'à trois reprises, le ministère a fait l'objet de vérifications internes et n'a pas donné suite aux recommandations?

Dans votre présentation, vous dites qu'il sera important de corriger la situation cette fois-ci. Est-ce que vous excluez la possibilité qu'on demande la tenue d'une enquête publique indépendante à la suite des conclusions que vous aurez tirées, particulièrement quant à l'évaluation de programmes comme le Fonds transitoire pour la création d'emplois?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, nous n'excluons aucune possibilité quant aux recommandations qui vont découler de notre vérification. Par contre, je dois vous dire tout de suite qu'il est très rare que nous recommandions la tenue d'enquêtes publiques. Il s'agit habituellement d'une décision qui appartient aux parlementaires. Notre rapport sera déposé auprès du Parlement et il contiendra les recommandations appropriées. Rien n'est exclu pour l'instant, mais je dois attendre d'examiner ce que renfermeront nos dossiers.

M. Paul Crête: Par l'entremise du président, j'aimerais vous demander si nous ne sommes pas devant une situation qui exige des solutions très particulières et très exceptionnelles parce qu'on n'a pas mis en oeuvre les recommandations formulées dans les vérifications de 1991 et de 1994. Quelles mesures de contrôle nous proposeriez-vous afin de nous assurer que la prochaine fois, dans cinq ans, on ne se retrouvera pas face à la même situation, malgré les recommandations que vous aurez formulées et un accroissement de la vérification interne? Vous avez dit vous-même que la vérification interne avait été très bien faite et que le problème ne se posait pas à ce niveau. Il faut s'assurer qu'on donne suite aux recommandations qui sont contenues dans ces vérifications.

M. Denis Desautels: Monsieur le président, je suis d'accord avec M. Crête pour dire que c'est une situation exceptionnelle qui exige des remèdes exceptionnels.

Le plan de travail qui a été présenté a suscité une réaction exceptionnelle, et je souhaiterais que les ministères réagissent de cette façon chaque fois que nous leur présentons un rapport de vérification.

Les ressources qui seront consacrées à ce plan d'action du ministère m'apparaissent de nature exceptionnelle. Nous nous assurerons qu'il puisse aller de l'avant, réaliser son plan d'action, obtenir des résultats et corriger les lacunes qui ont été relevées tant par la vérification interne que par nous.

Oui, c'est une situation exceptionnelle qui exige des remèdes exceptionnels. Selon moi, le plan d'action tombe dans cette catégorie, et nous allons nous assurer qu'il est mis en oeuvre correctement.

M. Paul Crête: Monsieur Desautels, on a vécu d'une façon très particulière la mise en oeuvre du Fonds transitoire pour la création d'emplois. Par exemple, au Québec, 54 p. 100 des sommes ont été utilisées pendant la période électorale, sur un horizon total de trois ans. Est-ce que vous envisagez de formuler des recommandations à court terme, avant la prochaine période électorale, afin qu'on ne vive pas la même situation, qu'on puisse s'assurer qu'il n'y aura pas une utilisation partisane d'un programme gouvernemental et que les fonds publics soient dépensés au bénéfice de l'ensemble des citoyens?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, il va sans dire que notre examen portera entre autres sur les renseignements qu'on recueille dans le cadre de ce genre de programmes. Selon moi, la transparence est le premier remède. Les pratiques seront grandement améliorées et plus saines si tous les renseignements relatifs aux dépenses sont clairs et suffisamment détaillés, et si l'on tient compte du facteur temps et de données géographiques. Je mise donc sur la transparence et la bonne information. Nous formulerons des recommandations en ce sens.

M. Paul Crête: Monsieur le président...

[Traduction]

Le président: Très brièvement.

[Français]

M. Paul Crête: Lorsque vous vérifierez les critères du programme du Fonds transitoire pour la création d'emplois, déterminerez-vous si une directive a effectivement été transmise à tous les députés afin qu'ils sachent que certaines régions où le taux de chômage était inférieur à 12 p. 100, mais où il y avait des poches de haut taux de chômage, étaient admissibles à ce programme? Est-ce que vous vous pencherez là-dessus dans l'optique de la transparence dont vous venez de parler?

M. Denis Desautels: Une des premières choses que nous allons faire, monsieur le président, consistera à relever les critères qui ont été utilisés dans la gestion du programme et dont nous nous servirons par la suite dans le cadre de notre travail. Nous évaluerons ces critères sur le plan de la clarté et sur le plan de la transparence.

• 1145

[Traduction]

Le président: Je vais lire toute la liste parce que je vois des députés qui commencent à s'impatienter: Bryon Wilfert, Jean Dubé, Judi Longfield, Libby Davies, Judy Sgro, Bonnie Brown, Phil Mayfield, Paul Crête et Larry McCormick. J'ai déjà inscrit Maurice Vellacott et Rey Pagtakhan pour le deuxième tour. Je rappelle aux membres remplaçants qu'il y a 18 membres au comité, et non 16, ce qui est la raison pour laquelle nous procédons ainsi.

Bryon Wilfert.

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je remercie le vérificateur général d'être venu. Je trouve ses propos toujours très éclairants.

Je dirai d'abord au vérificateur général, par votre intermédiaire, monsieur le président, que je suis de son avis en ce qui concerne la vérification de DRHC et les lacunes constatées et que c'est certainement une façon tout à fait inacceptable de dépenser les fonds publics.

Cela dit, vous avez dit que les quelque 17 milliards de dollars consacrés aux programmes discrétionnaires s'appliquent aussi à d'autres ministères. Est-il justifié de dire, dans ce cas, que ces problèmes sont de nature systémique et que comme DRHC n'est qu'une composante de ces programmes discrétionnaires, il faudrait essayer de voir—je sais que le comité n'en a pas le pouvoir, mais nous pouvons sûrement le recommander—à ce que le plan d'action en six points proposé au ministère, que vous avez déjà commenté, évalué et appuyé, soit appliqué partout où des sommes discrétionnaires sont dépensées?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, je pense qu'il est trop tôt pour en arriver à cette conclusion. Je pense que le plan d'action en six points de DRHC est tout à fait adapté à la situation du ministère et aux genres de programmes qu'il gère. Les programmes de subventions et contributions peuvent être très différents d'un ministère à l'autre. Chacun comporte ses risques à cause de la nature du programme. Cela signifie donc que même si l'on peut peut-être transposer l'acquis d'un endroit à un autre, il est sans doute un peu prématuré de l'affirmer.

Je rappelle au comité qu'à la suite de notre vérification des subventions et contributions dans deux autres ministères, nous avons élaboré un cadre de gestion des subventions et contributions. Nous avons mis ce cadre à la disposition d'un certain nombre de ministères pour que l'on fasse des essais sur le terrain et la réaction a été très positive. Les ministères tiennent beaucoup à utiliser cet outil. Bien sûr, ce qui s'est passé à DRHC les a certainement aiguillonnés, mais je compte beaucoup sur cela et sur la collaboration des ministères pour le perfectionnement d'un outil qui nous donnera quelque chose d'utile non seulement à DRHC mais dans toute l'administration.

M. Bryon Wilfert: Vous nous dites donc que l'intérêt manifesté pour les enseignements que nous avons tirés se répand.

Si c'est le cas, j'aimerais revenir sur la question du Conseil du Trésor. Vous avez dit dans votre conclusion que vous essayez de corriger l'équilibre entre la prestation des programmes et la nécessité de répondre aux besoins des bénéficiaires, d'une part, et d'assurer des contrôles administratifs adéquats, d'autre part. Nous semblons avoir délaissé les directives obligatoires du Conseil du Trésor en faveur de lignes directrices, qui sont davantage des conseils. Faut-il revenir à cela et n'est-ce pas là une des mesures de contrôle qui pourraient éviter que ces problèmes se reproduisent, dans ce ministère ou ailleurs.

Le président: Si vous le pouvez, monsieur Desautels, essayez d'être bref.

• 1150

M. Denis Desautels: Monsieur le président, je pense qu'il faut corriger l'équilibre, mais j'ai également dit dans ma déclaration liminaire qu'il ne faut pas revenir à une époque de tracasseries administratives. Je pense qu'il y a des solutions à ce problème. Je pense qu'il faut instaurer une saine gestion du risque pour ce genre de programmes. Je pense que c'est faisable. Il est en fait possible de conserver l'objectif de donner de bons services à la clientèle tout en respectant les objectifs de la Loi sur la gestion des finances publiques.

Le président: Je donne maintenant la parole à Jean Dubé puis à Judi Longfield.

[Français]

M. Jean Dubé (Madawaska—Restigouche, PC): Je remercie M. Desautels et son équipe pour leur présentation.

Monsieur Desautels, vous dites au paragraphe 3 de votre présentation:

    Je ne peux m'empêcher de ressentir une certaine frustration quant à la façon dont le gouvernement gère les subventions et les contributions en général.

Vous comprendrez qu'en tant que députés et contribuables, nous sommes aussi frustrés de voir la façon dont le gouvernement gère nos fonds.

On a vu les étudiants ici tout à l'heure. Les étudiants demandent de l'argent pour avoir de meilleurs outils de travail, les ministres de la Santé des provinces canadiennes demandent plus d'argent pour la santé et on voit ce qui se passe ici, à Ottawa. On manque d'argent pour la santé alors qu'il y a de la mauvaise gestion ici, à Ottawa.

Je pense que c'est Mme Barrados qui a répondu à la question sur le comité de vérification du ministère. Madame Barrados, j'aimerais savoir qui, de votre bureau, a siégé à ce comité avec les gens du ministère du Développement des ressources humaines.

[Traduction]

Mme Maria Barrados: Monsieur le président, je suis actuellement la représentante du bureau qui siège à titre d'observateur à ce comité. S'il ne m'est pas possible de m'y rendre, un des responsables de la vérification ici présents ira à ma place.

[Français]

M. Jean Dubé: Il y a certainement eu plusieurs réunions, peut-être une trentaine, pour produire un rapport comme celui-là. M. Martin, qui a comparu ici la semaine passée, disait qu'il y avait eu environ 30 réunions. Avez-vous assisté à 30 réunions du comité de vérification?

[Traduction]

Mme Maria Barrados: Je ne sais pas exactement à quoi faisait allusion M. Martin, monsieur le président. J'ai pris mes fonctions en octobre et la première réunion où je suis allée ce mois-là est celle où il a été question de l'avant-projet de ce rapport. Je crois savoir qu'il y avait eu des discussions à propos de cette vérification lors de la réunion du mois de juin, à laquelle malheureusement aucun membre de mon bureau n'est allé, et qu'il y avait eu d'autres discussions, mais qui portaient davantage sur la planification. M. Martin parlait sans doute d'autres réunions au ministère.

[Français]

M. Jean Dubé: Avec-vous une liste des personnes qui ont assisté aux réunions que vous avez eues avec le ministère?

[Traduction]

Mme Maria Barrados: Monsieur le président, nous avons le compte rendu complet des réunions du comité de vérification et d'évaluation qui indique toujours les présences.

[Français]

M. Jean Dubé: Sur ces documents qui indiquent les noms des personnes qui étaient présentes, avez-vous déjà vu le nom de la sous-ministre Claire Morris?

[Traduction]

Mme Maria Barrados: Monsieur le président, dans la période pendant laquelle j'ai siégé au comité comme observatrice, c'est-à- dire depuis octobre, le nom de Mme Morris ne figurait pas comme membre du comité. Celui-ci était présidé par le sous-ministre délégué, M. Jim Lahey. Plus tôt, lorsque Mme Morris était sous- ministre déléguée, elle était la présidente du comité et y était à ce titre.

Le président: Monsieur Dubé.

M. Jean Dubé: J'essaie de comprendre ce qui s'est passé au ministère à propos des subventions et contributions. Comme beaucoup des membres du comité, je pense que nous voulons régler le problème et que c'est urgent. Comme M. Crête l'a dit il y a quelques instants, il faut des mesures exceptionnelles. Mais je pense qu'il n'y a pas que DRHC qui soit touché; je pense que c'est généralisé dans tous les ministères.

Monsieur Desautels, j'ai vu votre travail et vous avez fait de l'excellent travail dans ces vérifications, mais je me demande si vous disposez des ressources nécessaires. Je sais que la situation est urgente. On parle ici de milliards de dollars de l'argent des contribuables. Je sais que vous allez comparaître à nouveau en octobre sur le sujet, peut-être même après les prochaines élections, et cela ne donnera pas aux contribuables le temps d'examiner ce qui s'est passé et d'arriver à des conclusions. Disposez-vous des ressources nécessaires pour procéder aux vérifications que vous estimez nécessaires actuellement?

• 1155

M. Denis Desautels: Monsieur le président, la question m'a déjà été posée. Notre situation est très serrée. Pour faire ce que nous estimons devoir être fait à DRHC, il faut évidemment libérer des ressources ailleurs. Nous avons réussi à trouver le personnel nécessaire.

Nous avons maintenant une équipe d'employés chevronnés pour faire le travail qui doit être fait dans ce ministère. Nous avons un programme très détaillé de ce que nous allons examiner et du temps que cela va prendre. Nous sommes prêts à le faire. Coûte que coûte, nous avons réussi à trouver les ressources nécessaires. Même si la situation est serrée, je n'ai pas jugé nécessaire de présenter une demande spéciale au Parlement. Je pense que notre rapport sera très complet.

M. Jean Dubé: Vous avez libéré des ressources ailleurs pour vous concentrer sur DRHC. Comme je l'ai dit au début, il y a sans doute d'autres ministères subventionnaires qui devraient faire l'objet d'une vérification. Je pense au ministère de l'Industrie et à celui du Patrimoine. Estimez-vous que d'autres ministères pourraient être dans la même situation que DRHC et qu'ils ne disposeraient pas des ressources nécessaires pour procéder aux vérifications?

Le président: En ma qualité de président, si vous me le permettez, je tiens à dire que nous sommes très intéressés par le Comité d'évaluation et de vérification. Il me semble qu'un comité comme celui-là, chargé des évaluations et qui participe de près aux vérifications, joue le rôle déterminant dans tout le processus, dans un ministère aussi grand que celui-ci. Jean Dubé vient de vous poser des questions sur le sujet.

Votre participation à ce comité, qui s'occupe en fait de vérification interne... Je m'interroge en fait à propos du «circuit» et à propos de votre indépendance. Voilà que vous évaluez actuellement les vérifications internes; pourtant, vous êtes dans le circuit de la vérification interne, non pas dans l'exécution de la vérification mais vous participez à la décision de ce qui doit faire l'objet de la vérification interne et de la façon dont cela doit être fait. Pourriez-vous nous en parler davantage?

M. Denis Desautels: Comme Mme Barrados l'a dit, nous sommes des observateurs à ce comité et nous ne participons pas aux décisions prises par le comité sur ce qui doit faire ou non l'objet d'une vérification. DRHC n'est pas le seul ministère où nous jouons ce rôle. Si nous procédons ainsi, c'est pour être le mieux informés que possible sur ce que fait la vérification interne.

Dans notre travail, nous comptons sur le travail de la vérification interne dans le plus grand nombre de ministères possible. Si nous pouvons coordonner notre activité dans une certaine mesure avec le programme de travail de la vérification interne, il nous est possible de mieux couvrir l'ensemble des opérations de l'administration. Il est très rentable d'établir ce genre de lien avec les ministères. Je pense que nous restons quand même autonomes, puisque nous sommes là comme observateurs. S'ils préfèrent que nous n'y soyons pas, pour discuter de certaines choses sans nous, nous quittons la réunion. C'est une façon de procéder qui a été très avantageuse et qui n'est pas propre à DRHC.

Le président: Il y a une similitude de culture entre vos vérificateurs et les autres. Je sais que ce n'est pas les mêmes et que le point de vue est différent. Ils doivent appartenir à votre ou vos professions. Quand vous êtes là comme observateurs, donnez- vous des conseils officiels ou officieux à diverses étapes de la vérification interne: à la conception, pendant l'exécution ou lorsque l'on connaît les résultats? Ces conseils prennent-ils parfois la forme de négociations?

• 1200

M. Denis Desautels: Monsieur le président, nous sommes présents au comité, là où les programmes de travail sont discutés. Nous ne participons pas à l'élaboration des plans de travail détaillés pour telle ou telle vérification.

Il peut y avoir des exceptions à cela, comme je l'ai mentionné ce matin à propos du programme de la LSPA. Nous avons conclu une entente avec DRHC. Si les vérifications internes examinent cela, nous pouvons travailler ensemble, parce qu'il faut que du travail plus détaillé soit fait, ce qui nous permettra de faire des observations de plus haut niveau sur la conduite de ce programme. La vérification de la LSPA, qui a fait l'objet d'un rapport en 1999, je crois, était le fruit d'un travail conjoint entre nos bureaux et le bureau de la vérification interne de DRHC.

Le président: Merci beaucoup.

Judi Longfield, Libby Davies, Judy Sgro et Bonnie Brown.

Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je veux faire écho à certaines des préoccupations exprimées par le député d'en face. Enfin, 23 ans de problèmes à répétition dans le dossier de subventions et contributions, c'est grave. Le problème qui existe aujourd'hui à DRHC n'est sûrement pas apparu du jour au lendemain. Les évaluations de 1991 et 1994 ont décelé des lacunes graves. C'est le cas de la LSPA, comme vous l'avez dit.

Je suis curieuse. Quand vous avez préparé vos notes dans les Comptes publics du Canada, vous n'avez pas parlé des insuffisances administratives à DRHC. Pourquoi cela n'a-t-il pas été signalé?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, je veux m'assurer que Mme Longfield parle bien de notre avis sur les états financiers du Canada.

Mme Judi Longfield: Oui.

M. Denis Desautels: L'avis que nous donnons à propos des états financiers du Canada porte sur la présentation équitable des dépenses du gouvernement canadien, de ses recettes fiscales, de son actif et de son passif. Dans certains programmes de dépenses, il peut y avoir des inquiétudes sur le contrôle interne qui a été exercé. En bout de ligne, si cela ne modifie en rien la justesse des chiffres donnés, nous pouvons conclure que les états financiers sont exprimés correctement.

L'avis que nous avons donné sur les états financiers du Canada porte sur une série d'objectifs différents plutôt que les problèmes administratifs dont nous parlons aujourd'hui.

Mme Judi Longfield: Merci. C'est plus clair pour moi.

Par ailleurs, avez-vous des préoccupations concernant les pratiques administratives de programmes assurés en vertu du transfert de la responsabilité pour la main-d'oeuvre, par exemple? Cette responsabilité a été déléguée à des tierces parties, les provinces, alors qu'il s'agit d'argent du gouvernement fédéral. Qui est chargé d'examiner cela? Une grande partie de l'argent de DRH est dépensé par des tierces parties.

Mme Maria Barrados: Monsieur le président, nous venons de terminer une vérification sur les nouveaux arrangements de gouvernance et nous parlons de deux genres différents: ceux qui se font en partenariat et ceux qui sont délégués intégralement. Dans le cas de ceux qui sont délégués, il n'y a aucun lien de dépendance avec le gouvernement. Il y a beaucoup d'arrangements de partenariat à DRHC.

En général, ce qui nous préoccupe, c'est que le gouvernement ne pose par systématiquement les mêmes questions lorsqu'il demande des comptes. Sur la clarté des responsabilités, la transparence et les rapports destinés au Parlement. Nous avons donc cette préoccupation d'ordre général. Cela varie selon le genre de partenariat, quels éléments il comporte, ce qui marche bien et ce qui ne marche pas.

Le président: Soyez brève, Judi.

Mme Judi Longfield: Avez-vous fait des recommandations précises aux divers ministères sur la façon dont ils pourraient apaiser vos préoccupations?

Mme Maria Barrados: Nous venons de terminer nos rencontres avec le Comité des comptes publics en compagnie du Conseil du Trésor. Nous recommandons que le gouvernement mette en place ce cadre et que le Conseil du Trésor travaille là-dessus pour s'assurer que ces points sont couverts. Et le Conseil du Trésor a accepté.

• 1205

Le président: Libby Davies, Judy Sgro, Bonnie Brown, Phil Mayfield et John Godfrey.

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Merci, monsieur le président. Tout d'abord, merci beaucoup d'être venus aujourd'hui. Excusez-moi d'être arrivée en retard, mais j'étais à un autre comité.

J'ai deux questions. La première est une question d'ordre général à propos du rôle du Bureau du vérificateur général et des mécanismes de reddition de comptes; la seconde est plus précise et porte sur votre travail à DRHC. Un certain nombre de membres du comité et vous-même avez dit qu'il s'agit d'un problème systémique qui ne touche pas uniquement ce ministère mais qui existe ailleurs depuis plus de 21 ans dans le secteur des subventions et contributions.

Vous êtes autonome, mais disposez-vous de mécanismes d'intervention lorsque vos recommandations restent lettre morte? Vous avez parlé du cadre de gestion du rendement que vous êtes en train de préparer à la suite des problèmes systémiques que vous avez relevés. Pouvez-vous le relier à quelque chose? Y a-t-il un mécanisme qui vous permet de dire à DRHC ou à un autre ministère qu'il n'a pas respecté le cadre de gestion et qu'il y aura des conséquences quant à la manière dont les fonds sont accordés par le Conseil du Trésor? Quel lien y a-t-il, si vous arrivez à comprendre où je veux en venir? Vous avez dit éprouver de la frustration; tout le monde est frustré. Tous ces travaux ont été réalisés, quantité de choses indiquent qu'il y a de très graves problèmes et pourtant, on n'arrive pas encore à apporter les changements nécessaires, après 20 ans.

C'est ma première question et elle rejoint celle de M. Crête. Sommes-nous au point où il nous faut une enquête publique indépendante? Vous avez dit que c'est quelque chose de très rare. Votre bureau peut-il en faire la recommandation lorsqu'il estime que son travail est resté trop longtemps lettre morte?

C'est ma première question.

M. Denis Desautels: Merci.

Notre bureau ne peut pas forcer les ministères à mettre en oeuvre nos recommandations. Notre pouvoir, notre influence se trouve dans les rapports que nous présentons au Parlement. Si ces rapports sont suffisamment clairs et analysent bien les problèmes, nous espérons que le Parlement partagera notre avis et exercera des pressions sur le gouvernement pour qu'il fasse les changements nécessaires. Mais on ne peut pas aller plus loin. De fait, nous n'avons aucun pouvoir pour forcer les ministères à appliquer nos recommandations, pas plus que nous ne pouvons sanctionner les ministères s'ils ne les appliquent pas. Les pouvoirs de sanction appartiennent strictement au gouvernement.

Mme Libby Davies: Qu'est-ce que va faire votre cadre de gestion du rendement? Ça semble vouloir dire que vous mettez en place quelque chose qui établira des critères de rendement et de gestion, et pour moi cela semble sous-entendre que s'il n'est pas respecté, il y aura des conséquences. Quelles seront les conséquences s'il n'est pas respecté?

M. Denis Desautels: Les conséquences du non-respect du cadre, s'il est adopté comme outil général, dans toute l'administration, devront être déterminées par les gestionnaires de l'administration eux-mêmes, ou les sous-ministres et leurs supérieurs. Notre objectif dans la création de cet outil est de faire accepter de façon générale les critères de gestion des subventions et contributions dans le monde moderne, dans l'administration moderne; s'ils sont acceptés de façon générale, cela permettra de juger le rendement en fonction d'un ensemble fondamental de critères.

Mme Libby Davies: Voyez-vous cela comme une grave lacune dans ce genre de cadre de gestion du rendement, que pour le travail que vous faites, au bout du compte, ce genre de sanctions n'existent pas? Dans un certain sens, cela existe par l'intermédiaire du Parlement, mais regardez-nous aujourd'hui. Voyez dans quel fouillis nous sommes.

Il me semble donc qu'il s'agit d'une très grave question de politique gouvernementale, c'est-à-dire que nous devons réellement nous assurer que cette responsabilité existe, grâce au travail de votre bureau, ainsi que du point de vue du Conseil du Trésor et de l'application de la Loi sur la gestion des finances publiques. Nous avons ces supposés freins et contrepoids, mais s'ils ne fonctionnent pas ou s'ils n'existent même pas, l'affaire est très grave.

• 1210

M. Denis Desautels: Après neuf années au poste de vérificateur général, je pense pouvoir dire que nous avons eu un bon soutien de la part des comités permanents dans l'examen d'un certain nombre de questions. Comme vous le savez, nous travaillons en plus étroite collaboration avec le Comité permanent des comptes publics et chaque fois que ce comité a étudié l'un de nos chapitres, l'un de nos rapports, et qu'il a ensuite déposé ses propres rapports à la Chambre, on a pu habituellement remarquer une réponse très positive du gouvernement aux recommandations du comité. Je crois donc que les comités permanents peuvent à n'en pas douter influencer la façon dont le gouvernement finit par administrer ses programmes.

Mme Libby Davies: J'ai une brève question à poser.

En ce qui concerne le travail que vous avez entrepris à ce ministère, l'une des questions qui nous préoccupent est de savoir s'il existe des règles ou non régissant le versement de certaines subventions et contributions.

Il y a deux jours, l'ancien sous-ministre nous a dit qu'il n'y avait pas vraiment de règles régissant le Fonds transitoire pour la création d'emplois. La ministre a dit à la Chambre quelque chose qui était assez différent. Je tiens à ce que les règles soient claires, qu'elles soient transparentes et qu'elles soient appliquées de façon équitable et uniforme. Si ce n'est pas le cas, s'il y a des variations énormes dans les différentes régions du pays quant au rôle joué par les députés, quant à la façon dont les décisions sont prises et quant à l'influence politique dans ces décisions, eh bien c'est une question très grave.

J'aimerais savoir si dans le travail que vous allez entreprendre, vous examinerez réellement le processus de prise de décision pour voir premièrement si des règles existent et deuxièmement, si on les respecte et si on les applique d'une manière inégale d'une région à l'autre du pays. Examinerez-vous ces aspects de la question?

M. Denis Desautels: Nous examinerons au cours de notre vérification la façon dont on a précisé, exposé, les règles ou les conditions fixées pour chacun des programmes que nous étudierons, et dans quelle mesure on les a suivis pour approuver des projets. Nous examinerons donc certainement cette question, car elle me préoccupe beaucoup personnellement. Nous vérifierons également d'une manière générale la façon dont la Loi sur la gestion des finances publiques a été respectée, car cette loi vise certains objectifs particuliers, est fondée sur des principes donnés, et nous voulons nous assurer qu'on a respecté ces principes de la loi.

Le président: Judy Sgro, Bonnie Brown, Philip Mayfield, John Godfrey, Paul Crête et Larry McCormick.

Mme Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je vous remercie, monsieur Desautels, de nous faire part de ces renseignements ce matin.

Je vous ai entendu dire dans votre exposé que ces problèmes remontent à 1977; ils ne sont donc certainement pas apparus au cours des deux dernières années. Est-ce un problème inhérent au ministère? Le ministère est-il trop grand, et avez-vous déjà envisagé de dire dans une recommandation qu'il faudrait peut-être le scinder en plusieurs autres ministères?

M. Denis Desautels: Nous ne formulons pas de recommandations portant sur l'organisation du gouvernement. Nous estimons que c'est une question de politique gouvernementale et nous ne nous en mêlons donc pas.

S'il existe dans un ministère des problèmes de contrôle dans la gestion qui pourraient avoir un lien avec des questions organisationnelles, nous pouvons envisager cela, mais le modèle fondamental suivi par le gouvernement dans sa structure organisationnelle est une question de politique, à notre avis.

Mme Judy Sgro: Ne faites-vous pas de suivi, après avoir présenté votre rapport, ne demandez-vous pas que des gestionnaires vous écrivent, ou écriraient-ils au Conseil du Trésor plutôt qu'à vous?

M. Denis Desautels: Nous faisons un suivi systématique après chaque rapport que nous présentons à la Chambre. Deux ans après le dépôt d'un rapport, nous réexaminons la situation pour voir dans quelle mesure on a fait des progrès dans la mise en oeuvre de nos recommandations ou dans la solution des problèmes que nous avons signalés, et nous faisons rapport de ces suivis dans un chapitre type chaque année dans le cadre de notre rapport annuel à la Chambre.

Mme Judy Sgro: Dans le cours normal des choses, est-il possible au comité de s'assurer qu'on a mis en oeuvre vos recommandations?

• 1215

M. Denis Desautels: Je peux répondre certainement oui. Nous sommes heureux, par exemple, lorsque des comités demandent à un ministère de présenter un plan d'action, avec dates et responsabilités, et de faire parvenir régulièrement au comité permanent un rapport ou des informations. Le Comité des comptes publics l'a fait avec beaucoup de succès. D'après moi, n'importe quel comité peut le faire, et je pense que cela fonctionne bien.

Mme Judy Sgro: Lorsque vous formulez des recommandations au sujet de DRHC—je suis nouvelle ici et je ne suis donc pas certaine de la façon dont les choses fonctionnent—, vous recommandez différentes choses, ainsi que des rapports en octobre et même trimestriellement. Recommandez-vous que ces rapports passent par le comité responsable de DRHC pour qu'il puisse faire le suivi?

M. Denis Desautels: C'est au comité qu'il incombe de prendre cette décision, mais je pense qu'il serait très normal que le comité demande à être informé régulièrement des progrès réalisés dans l'exécution des plans d'action.

Mme Judy Sgro: J'ai une dernière question à poser.

Le président: Je vous en prie.

Mme Judy Sgro: Pour ce qui est du plan en six points que DRHC vient de commencer à mettre à exécution, vous l'approuvez et vous estimez qu'il permettra peut-être une fois pour toutes de résoudre certains des problèmes de ce ministère.

M. Denis Desautels: Nous avons exprimé publiquement notre appui au programme en six points et nous pensons qu'il permettra de résoudre les problèmes immédiats auxquels DRHC fait face. Nous en surveillerons les progrès dans le cadre de notre vérification en cours et nous en rendrons compte dans le cadre de notre rapport d'octobre.

Le président: Merci.

Je me permets de vous signaler, Judy, qu'avant votre arrivée à notre comité, nous avons effectué une étude concernant les numéros d'assurance sociale et c'était une étude assez approfondie. Nous l'avons effectuée dans le cadre d'un suivi du rapport du vérificateur général. Il me semble qu'un comité permanent comme le nôtre peut à vrai dire consacrer plus de temps que celui des comptes publics à des questions très spécifiques de cette nature. Je pense donc que vous avez tout à fait raison.

Mme Judy Sgro: Mais est-il possible, au moyen d'une recommandation ou d'une motion, si un comité ou le président d'un comité le juge bon, d'obtenir que ces rapports soient présentés directement au comité pour qu'il les analyse et formule d'autres recommandations au besoin?

Le président: Le comité permanent peut faire un suivi de n'importe quel élément des rapports du vérificateur général et nous aurions donc certainement le pouvoir de le faire.

Mme Judy Sgro: Merci.

Le président: Bonnie Brown, qui sera suivie de Phil Mayfield, John Godfrey, Paul Crête et Larry McCormick.

Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.): Merci, monsieur le président, et je vous remercie, monsieur le vérificateur général, d'être venu témoigner.

Vous et d'autres avez identifié cette tendance à passer d'un système plutôt strict et plein de formalités administratives à un système axé davantage sur le service. Je me demande si, pendant la même période, on n'essayait pas à DRHC de conclure plus de partenariats avec le secteur privé plutôt qu'avec le secteur sans but lucratif et le secteur institutionnel. Il me semble qu'il y a 20 ans, c'était des groupes de cette nature qui étaient nos partenaires. Êtes-vous de cet avis, ou vous souvenez-vous de l'époque où l'on a suggéré de faire participer davantage le secteur privé à nos programmes de subventions et contributions?

M. Denis Desautels: Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il y a une tendance vers la diversification des modes de prestation des services, et cela peut inclure non seulement le secteur privé mais d'autres paliers de gouvernement. Un programme de cette nature comporte beaucoup d'avantages, mais il est aussi un peu plus compliqué.

Mme Bonnie Brown: Le facteur de risque est plus élevé.

M. Denis Desautels: Pas nécessairement. Si ces programmes, ces efforts conjoints, sont bien négociés, je pense qu'on pourrait vraiment avoir une meilleure reddition de comptes qu'auparavant. Il faut plus de planification préalable et de négociations du partage des responsabilités, mais si l'on procède comme il se doit, on peut obtenir des résultats très satisfaisants.

Mme Bonnie Brown: Il semble que parmi les cas mis au jour parce qu'ils soulèvent de très graves questions, des questions si graves qu'on a demandé à la police d'intervenir, il s'agit de partenariats avec le secteur privé, plutôt qu'avec des institutions ou des organismes sans but lucratif, au moins d'après ce qui a été révélé jusqu'ici. Lorsque vous ferez votre étude cette année, je me demande si vous ne pourriez pas essayer d'obtenir des chiffres afin de pouvoir donner une opinion à ce sujet dans votre rapport de l'automne.

• 1220

M. Denis Desautels: Nous allons certainement y penser, nous tiendrons compte des mécanismes de prestation utilisés et nous verrons s'il y a un lien entre les difficultés rencontrées et le mode de prestation de services utilisé.

Mme Bonnie Brown: J'ai d'autres préoccupations. Il est question ici de 17 milliards de dollars de subventions et de contributions et nous voulons nous assurer que ces sommes sont bien administrées, mais il y aura bientôt près de 15 milliards de dollars dans le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux (TCSPS). Il y a également beaucoup d'argent prévu dans les accords sur le développement du marché du travail. Quel degré de coopération obtenez-vous des provinces quand vous cherchez à savoir exactement comment l'argent a été dépensé? Rencontrez-vous le vérificateur général des différentes provinces pour parler de ces questions? Certains d'entre nous ont de très graves préoccupations au sujet de certaines provinces en particulier et de ce qu'elles font de notre argent. Que pensez-vous de la situation actuelle à cet égard?

M. Denis Desautels: C'est toujours une question épineuse. Nous nous attendions à ce que lorsque le gouvernement fédéral transférerait aux provinces des programmes comme ceux du développement du marché du travail, il négocierait avec les provinces des dispositions relatives à une vérification appropriée. Il l'a fait et ces programmes comportent des dispositions concernant la vérification, mais je ne pense pas que le gouvernement fédéral ait pu obtenir les informations ou l'assurance qu'il aurait vraiment aimé avoir. Nous devons donc travailler encore à l'amélioration de cet aspect des programmes. Je pense que le type de vérifications qui pourraient être faites seraient plus limitées qu'on le voudrait, de sorte qu'il y a encore du travail à faire à cet égard.

Le président: Phil Mayfield, John Godfrey, Paul Crête et Larry McCormick.

M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Merci, monsieur le président.

J'ai eu une conversation intéressante. Nous discutions des difficultés rencontrées à DRHC et on m'a dit que le problème venait du fait que dans les bureaux locaux, au moins, vers la fin de 1995, on avait une somme énorme d'argent à distribuer. Il y avait eu des réductions d'effectifs pouvant aller jusqu'à 50 p. 100 et le personnel ne parvenait pas à atteindre ses objectifs. Les gestionnaires d'Ottawa ont alors dit que non seulement il fallait faire fi de la Loi sur la gestion des finances publiques et des bulletins, mais qu'il fallait emballer ces documents dans une boîte et s'en débarrasser. Un cartable de deux ou trois pouces d'épaisseur devait les remplacer. C'est ce qu'on m'a dit.

Il y a eu pour conséquences...

Mme Bonnie Brown: Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je doute vraiment de la valeur de témoignages fondés sur des anecdotes et des ouï-dire. Nous aurions tous des histoires à raconter.

M. Philip Mayfield: Je veux parler des vérifications.

Le président: Allez-y.

Mme Bonnie Brown: Oui, parler des vérifications, mais les témoignages fondés sur des anecdotes entendues pendant des conversations n'ont pas leur place.

M. Philip Mayfield: J'en parlerai comme bon me semble.

Le président: Allez-y, Phil Mayfield.

M. Philip Mayfield: Je veux d'abord savoir si vous croyez à cela, car vous mentionnez dans votre rapport de 1998 des problèmes de conformité aux autorisations prévues dans les programmes, des faiblesses dans la conception des programmes et leur contrôle, et vous constatez l'insuffisance des mesures du rendement ainsi que des problèmes relatifs aux rapports demandés. La tâche énorme à accomplir et la compression des effectifs disponibles, en plus des objectifs qui continuaient d'être imposés, tous ces éléments conjugués imposaient un stress énorme aux personnes responsables. En ce qui concerne les vérifications, je veux savoir si ces renseignements sont plausibles.

• 1225

Deuxièmement, en ce qui concerne les vérifications, dans votre déclaration de ce matin, monsieur Desautels, vous accordez quand même assez de crédit au bureau de la vérification interne, en le félicitant de son travail. Je me demande s'il est possible dans le cadre des vérifications de déceler un revirement radical dans l'administration des politiques et comment cela serait signalé. J'ai entendu Mme Barrados dire qu'elle comptait que les informations se rendent jusqu'au sous-ministre.

Le problème réside-t-il vraiment dans l'absence de mesures de contrôle financier ou est-il plus fondamental encore? Le problème venait-il du fait qu'il y avait une tâche énorme à accomplir, qu'on était déterminé à l'accomplir, qu'on a commis des erreurs et que c'est là où on a fait fausse route? Quelles sont vos observations là-dessus?

Le président: Vous devrez être très bref, parce que la question était très longue.

M. Denis Desautels: Merci, monsieur le président.

Dans le cadre de notre vérification, nous examinerons la façon dont le personnel de DRHC a interprété ses responsabilités en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques et d'autres directives applicables aux programmes administrés. Nous voulons nous assurer qu'il n'y a pas de confusion et que l'on comprend bien généralement en quoi consistent ces responsabilités.

Je ne suis pas au courant de l'incident dont M. Mayfield parle. S'il y a eu une certaine confusion de la part du personnel, nous essaierons de le déterminer dans le cours de notre travail.

M. Mayfield a parlé de la vérification interne et il a demandé si le mandat de ces vérificateurs ou l'envergure de la vérification leur permettait de déterminer si une telle situation existait. À mon avis, c'est bien le cas. Je pense qu'en l'occurrence, il aurait été tout à fait normal de s'attendre à ce que les auteurs de la vérification interne le mentionnent dans leur rapport. Ils n'ont pas hésité de signaler d'autres problèmes et si l'on avait nettement fait fi de la Loi sur la gestion des finances publiques, ils l'auraient probablement dit dans leurs recommandations ou dans leurs conclusions.

Le président: Phil, je vous demande d'être bref.

M. Philip Mayfield: Merci beaucoup.

Cette réponse m'amène à l'étape suivante, c'est-à-dire la possibilité d'ajouter des mesures de contrôle de la gestion financière. Plus un budget est gros, plus les coûts sont élevés. Pensez-vous que cela puisse faire partie du problème, c'est-à-dire qu'il n'y ait pas suffisamment de mesures de contrôle de la gestion financière, qu'il faut investir davantage dans cette fonction? Comment pourrait-on appliquer ces contrôles de façon sélective pour accomplir la tâche nécessaire? Je vais m'en tenir à cela pour l'instant.

M. Denis Desautels: La direction du ministère doit prendre la bonne décision, c'est-à-dire qu'elle doit déterminer s'il y a lieu ou non d'investir un peu plus dans certaines de ces fonctions de soutien. Je crois que les administrateurs reconnaissent eux-mêmes qu'ils ont peut-être fait des compressions trop importantes dans certaines de ces fonctions et que c'est peut-être l'un des facteurs qui ont contribué au problème dont nous discutons aujourd'hui.

Je crois fermement qu'il y a des limites aux réductions d'effectifs que l'on peut se permettre. On doit s'assurer de maintenir une certaine capacité de base pour administrer les programmes avec une diligence raisonnable et un contrôle rigoureux. On ne peut pas administrer des programmes de cette nature sur pilote automatique. Il faut un certain niveau de gestion, et il s'agit de déterminer ce niveau. Il est certain qu'un investissement approprié rapporte à long terme car on fait moins d'erreurs, et si l'on fait moins d'erreurs, on disposera probablement de plus d'argent à distribuer en subventions aux personnes qui comptent sur elles.

Le président: John Godfrey, Paul Crête, Larry McCormick, Maurice Vellacott, Rey Pagtakhan, Jean Dubé.

M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): J'ai deux questions à poser. La première concerne l'évaluation des risques et de la gestion des risques que vous avez faite pour l'ensemble des opérations gouvernementales. L'autre porte sur ce que j'appellerais les facteurs persistants invoqués pour expliquer ce qui semble faire problème à DRH depuis 1977.

• 1230

Dans le contexte très vaste de l'ensemble des opérations gouvernementales, si vous deviez attribuer un ordre de grandeur à ce problème des subventions et des contributions, où le situeriez- vous dans le cadre de DRH ou de l'appareil gouvernemental tout entier? Pouvez-vous nous citer quatre cas qui soient pires encore, qu'il s'agisse des sommes d'argent en cause ou des lacunes? Si vous n'y voyez pas d'inconvénients, vous pourriez me chuchoter la réponse à l'oreille au lieu d'en faire part à l'opposition...

J'ai aussi une question corollaire: vous dites qu'il y a des problèmes de ce genre au ministère depuis 1977. Croyez-vous, dans l'optique de l'évaluation des risques, que la situation va en fait en s'améliorant ou en empirant? Quel est notre rendement à ce chapitre? Êtes-vous en mesure d'en juger?

Mon autre question porte en fait sur ces facteurs persistants qu'on invoque pour expliquer le problème, et dont M. Mayfield parlait. Il y a par exemple l'insuffisance des ressources. Si je me reporte au rapport de 1994, je peux y lire que l'insuffisance des ressources a souvent été invoquée pour expliquer le manque de surveillance des projets, mais j'y lis également que le temps qu'on aurait pu consacrer à la surveillance n'a pas été utilisé à bon escient. Serait-ce là un nouveau facteur, ou s'agit-il simplement d'un facteur persistant?

Enfin, je veux revenir à ce qu'a dit Bonnie Brown au sujet des risques que comportent les partenariats. Ainsi, dans le résumé de 1991, on parle de l'insuffisance de la tenue de dossiers par les employeurs-promoteurs, qui fait en sorte qu'il est difficile de concilier les montants. Il me semble que c'est là un problème qui revient sans cesse.

J'aimerais connaître votre réaction à ces deux observations.

Le président: Monsieur Desautels, c'était là une autre longue question.

M. Denis Desautels: Monsieur le président, la première question concernait notre évaluation globale des risques. Quel est l'ordre de grandeur du problème des subventions et des contributions? À mon avis, le problème est au haut de notre liste de préoccupations. Je ne dirai pas qu'il est au premier rang, ni au deuxième, ni au troisième, mais il me semble qu'il s'agit d'un problème très grave et qu'il est d'autant plus grave qu'il est persistant. Les montants en cause sont considérables et le risque que ces montants seront dépensés sans que l'objectif escompté ne soit atteint est élevé.

Monsieur le président, la situation va-t-elle en s'améliorant ou en empirant? Là encore, je serai plus en mesure de répondre à cette question quand nous aurons terminé cette nouvelle série de vérifications. Nous craignons que, loin de s'améliorer, la situation a peut-être un peu empiré. C'est ce que nous tenterons de déterminer au cours de cette nouvelle série de vérifications.

Enfin, quant à cette idée que ce soit les ressources qui fassent problème, je crois que c'est possible, mais si les ressources affectées à ce secteur d'activité sont insuffisantes, c'est peut-être que le secteur n'a pas l'importance qu'il devrait avoir dans la planification. Je crois que le problème tient davantage au fait qu'on n'apprécie pas l'importance de certaines de ces questions comme on le devrait. Si la priorité qu'on y accorde n'est pas assez élevée, ce ne sera pas bien fait. En outre, on n'accordera pas au secteur d'activité la part voulue du budget total. On peut donc dire que, dans une certaine mesure, il s'agit plutôt d'une question de culture que d'un problème de ressources.

Le dernier point concerne les risques que comportent les partenariats. Je m'en tiens à la réponse que j'ai donnée tout à l'heure à Mme Brown. J'estime que, si les accords conclus avec les partenaires sont bien pensés et qu'on consacre suffisamment d'efforts à ces accords, on peut obtenir un résultat tout à fait satisfaisant. Si on ne fait pas bien les choses, les risques sont bien plus élevés qu'ils ne le seraient si le ministère gérait lui- même le programme.

Le président: John, je crois que vous avez le temps de faire une observation, mais pas de poser une question.

Très bien. Paul Crête, suivi de Larry McCormick.

[Français]

M. Paul Crête: Monsieur Desautels, vous dites dans vos documents que vous allez mener les travaux de vérification sur le Fonds transitoire pour la création d'emplois. Allez-vous étudier le phénomène de la concentration de l'octroi de subventions pendant la période électorale de 1997, soit sur des cas particuliers, soit par échantillonnage?

• 1235

Ces cas particuliers auxquels vous vous arrêteriez pourraient-ils être, par exemple, celui de la société Placeteco, qui a fait l'objet de reportages télévisés incriminants, le cas de la subvention de Rosemont qui est allée à la circonscription de Saint-Maurice, les sujets qui sont sous enquête policière et plus particulièrement les événements dans la circonscription de Saint-Maurice?

Est-ce que cette vérification que vous allez faire sur le Fonds transitoire pour la création d'emplois pourrait aller jusqu'à des études précises faites par échantillonnage ou par identification de cas?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, nous avons l'intention de faire un échantillonnage aléatoire. En principe, tous les projets ayant droit à contribution retenus au cours de la période en question pourront faire partie de l'échantillon.

Pour l'instant, nous ne visons pas une région en particulier. Nous allons faire cet échantillonnage à partir d'une base uniforme. Il se peut que certains types d'octrois requièrent une attention particulière et, de fait, nous allons nous réserver la possibilité de faire un échantillonnage distinct parmi certains de ces types, mais encore là, de façon très objective, sans nous concentrer sur une région du pays ou sur l'autre.

M. Paul Crête: Si votre premier échantillon, par exemple, vous faisait constater que des phénomènes sont associés au bureau du premier ministre, à la circonscription du premier ministre ou à d'autres circonscriptions, est-ce que cela pourrait vous amener à pousser l'étude dans ce sens-là?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, nous allons examiner les projets sélectionnés pour faire partie de notre échantillon de la même façon, quelle que soit la circonscription dans laquelle ils se trouvent. Donc, nous n'allons pas faire de détours et nous n'allons rien éviter non plus. Ce que nous allons choisir, nous allons l'examiner peu importe la région du pays ou la circonscription où cela se trouve.

M. Paul Crête: Tout à l'heure, vous avez expliqué à M. Godfrey ce qu'il fallait faire pour que les choses changent vraiment. Dans le rapport de 1994, qui fait l'évaluation des recommandations de 1991, j'en ai relevé huit dont on dit à peu près la même chose, à savoir qu'elles n'avaient pas été mises en oeuvre de façon satisfaisante. C'est à peu près mot pour mot ce qui est dit de chacune de ces huit recommandations principales.

Ne vous apparaît-il pas évident qu'il n'y aura pas de solution tant qu'une volonté politique ne sera pas clairement exprimée de corriger la situation? N'est-il pas très étonnant que, dans le même ministère où on récupère 705 millions de dollars à même le fonds d'assurance-emploi, sévisse d'un autre côté un affreux laxisme dans la gestion des subventions? Comment peut-on expliquer ce mode deux poids, deux mesures à l'intérieur du même ministère?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, si par le passé il n'y a pas eu de volonté de corriger la situation, je pense que tous les problèmes qu'a vécus le ministère au cours des dernières semaines ont peut-être changé les choses. J'ai l'impression qu'il y a maintenant une volonté réelle de corriger les problèmes repérés au moment de la dernière vérification interne, qui reprend certains des problèmes et des recommandations précédents.

Donc, selon moi, en tout cas, il y a une volonté de corriger les lacunes administratives identifiées lors de la vérification interne. Cependant, je souhaiterais que les choses aillent plus loin et qu'on s'interroge sur la structure des programmes mis en place, les buts qu'ils visaient et la façon dont ils sont réellement gérés, de même que les critères qui servent à la prise de décision.

En fait, il est nécessaire d'aller au-delà des corrections apportées aux procédés administratifs et de s'interroger maintenant sur l'architecture même des programmes mis en place.

[Traduction]

Le président: Larry McCormick.

M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox and Addington, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je suis ravi que nous accueillons ici le Bureau du vérificateur général, puisqu'il a une excellente réputation comme organisme indépendant qui vérifie tous les aspects de tous les ministères.

• 1240

Nous avons entendu parler de ces vérifications précédentes qui ont été faites en 1991 et en 1994 et qui étaient, si je ne m'abuse, des vérifications internes de DRHC. Au même moment environ, le Bureau du vérificateur général a fait une vérification des programmes de subventions et de contributions de Patrimoine canadien et Industrie Canada. C'est peut-être à cause de la taille de DRHC, mais je me demande et vous demande pourquoi vous ne vous êtes pas intéressés plus à fond à DRHC, à ses subventions et contributions, avant ce moment-ci.

M. Denis Desautels: La vérification que nous allons entreprendre ne sera pas la première que nous aurons faite à DRHC. Comme vous le savez, nous avons récemment fait un rapport sur le programme LSPA, qui est un programme de DRHC, et nous avons, par le passé, effectué des études assez détaillées d'autres programmes de DRHC, comme le compte d'AE bien entendu, que nous vérifions à intervalles réguliers.

Nous avions déterminé que DRHC, comme je l'ai dit tout à l'heure, je crois, était un des ministères que nous voulions étudier dans le cadre de cet examen pluriannuel des subventions et des contributions à l'échelle du gouvernement tout entier. C'est là la plan d'action que nous avons déposé devant le Comité des comptes publics et c'est le plan que nous avons l'intention de suivre.

M. Larry McCormick: Très bien.

Merci, monsieur le président.

Par ailleurs, quand votre bureau décide de la configuration de ses vérifications, je me demande si vous les configurez de façon assez complète pour qu'elles permettent de repérer la moindre ingérence politique. Serait-ce quelque chose qui apparaîtrait aussitôt aux yeux de tous ceux qui liraient le rapport de vérification?

M. Denis Desautels: Il est généralement très difficile de déceler les cas d'ingérence politique dans un dossier. Nous sommes toujours à l'affût du moindre signe qui pourrait donner à penser qu'il y aurait quelque chose de trouble dans un dossier, et quand nous faisons notre travail, nous n'écartons rien au départ, bien sûr, et nous incluons cet aspect-là.

Par contre, je ne voudrais pas qu'on s'y méprenne, car pour en arriver à voir clair dans chaque cas, il faudrait recourir à une enquête policière, si bien qu'il est pratiquement impossible d'en avoir la certitude absolue. Nous restons toutefois à l'affût du moindre signe et, si nous décelons quelque chose, nous en prenons note et nous en tenons compte.

M. Larry McCormick: Monsieur le président, le vérificateur général a tout de même dit qu'il a l'impression qu'à DRHC, on est vraiment déterminé, peut-être plus qu'on ne l'était auparavant, à faire la lumière sur certaines de ces situations et à assurer une meilleure prestation des programmes et aussi une plus grande responsabilisation. Je veux simplement lui demander s'il peut nous donner des précisions à ce sujet.

Voici ma dernière question: Il semble que vous allez faire un travail de vérification sur quatre programmes en particulier, notamment le programme transitoire de création d'emplois. Je voulais simplement savoir quels sont les autres programmes que vous avez choisis et savoir si vous avez pris une décision à ce sujet.

M. Denis Desautels: La détermination de DRHC ne fait aucun doute. Étant donné ce qu'ils vivent ces derniers temps, je ne pense pas qu'ils veuillent repasser par là. Il est donc très évident qu'ils sont déterminés de manière générale à régler ces problèmes et à être en mesure d'en donner la preuve, et j'espère bien qu'ils y arriveront. J'espère que, quand nous aurons terminé notre vérification, nous pourrons vous dire qu'ils ont effectivement atteint cet objectif.

Pour ce qui est des programmes que nous avons choisis, il y a bien sûr le Fonds transitoire pour la création d'emplois, qui a maintenant un nouveau nom: le Fonds du Canada pour la création d'emplois. Nous avons aussi choisi les programmes suivants: Jeunes stagiaires Canada, Programme de partenariats pour le développement social et Initiatives de partenariats sectoriels.

M. Larry McCormick: Merci beaucoup.

Le président: Pourriez-vous nous dire, monsieur Desautels, comment vous en êtes venus à choisir ces programmes-là?

M. Denis Desautels: Vous voulez bien répondre à cette question, madame Barrados?

Mme Maria Barrados: Nous avons tout d'abord décidé qu'il nous faudrait examiner des programmes en particulier pour pouvoir répondre à beaucoup des questions que posaient les députés sur la façon dont les décisions sont prises et la façon dont les projets sont approuvés.

Nous nous sommes fondés sur le rapport de vérification interne pour choisir, parmi les programmes qui avaient été vérifiés, trois programmes où, d'après nous, le risque semblait être le plus élevé, où il y avait un problème de gestion des subventions et des contributions. C'est ainsi que nous avons choisi les trois premiers programmes.

• 1245

Puis, nous avons demandé au ministère de nous en proposer un quatrième où il pensait avoir fait un assez bon travail pour ce qui est de gérer les subventions et les contributions. C'est ainsi que nous avons choisi le quatrième programme.

Le président: Merci beaucoup.

Suivront Maurice Vellacott, Rey Pagtakhan, Jean Dubé, Libby Davies et Phil Mayfield. Nous en sommes manifestement au deuxième tour maintenant, chers collègues. Nous allons tâcher de garder un bon rythme.

Maurice Vellacott.

M. Maurice Vellacott: Monsieur Desautels, ma question porte sur le rôle des députés dans le choix et l'approbation des projets pouvant faire l'objet de subventions et de contributions. Je voudrais qu'en votre qualité de vérificateur professionnel, vous nous donniez votre avis réfléchi sur toute cette question du rôle des députés dans le choix et l'approbation des projets.

D'un côté, nous avons ce député bien en vue qui, d'après les propos qui lui sont attribués, aurait dit en haussant les épaules: «Plus je peux obtenir d'argent pour ma circonscription, mieux je fais mon travail de député. C'est ainsi que je suis perçu, et c'est bon que je puisse obtenir plus d'argent pour ma circonscription.» D'un point de vue plus professionnel ou extérieur, celui du secteur privé, on pourrait considérer qu'il y a là conflit d'intérêts. Je me demande si vous pourriez vous prononcer et nous donner votre avis réfléchi en tant que professionnel de ce qui serait bien du point de vue de la vérification. Est-ce bien de dire que plus d'argent je réussis à obtenir, mieux je fais mon travail de député, ou y aurait-il peut-être un conflit d'intérêts à ce que les députés aient un rôle aussi important dans le choix et l'approbation des projets?

Le président: Monsieur Desautels et chers collègues, je vous demande des questions et des réponses brèves.

M. Denis Desautels: C'est là une question corsée dont nous pourrions discuter longtemps.

Le président: Une réponse corsée et brève.

M. Denis Desautels: D'autres ont déjà parlé du rôle des députés dans le choix des projets. Je vous invite à vous reporter à une entrevue qu'a donnée M. Donald Savoie, car ce qu'il y dit rejoint généralement ce que je pense.

Accorder aux députés un rôle trop grand dans la prise de décision tend à brouiller la répartition des rôles et des responsabilités. Selon le modèle traditionnel, les gouvernements sont là pour gouverner et les députés sont là pour leur demander des comptes, mais quand les députés se mettent à participer à la prise de décision, la relation entre les deux peut se trouver brouillée.

Le président: Il faut passer à d'autres.

Maurice, Phil aura droit à une autre question pour votre parti.

Rey Pagtakhan, puis Jean Dubé.

M. Rey Pagtakhan: Merci, monsieur le président.

Je suppose que la vérification terminée en 1994 vise l'exercice 1993-1994?

Mme Maria Barrados: Nous devrons vous revenir pour vous dire sur quelle période exactement la vérification de 1994 a porté.

M. Rey Pagtakhan: Elle portait sur l'exercice précédent, n'est-ce pas?

Mme Maria Barrados: Les vérifications portent toujours sur une période antérieure, mais je ne suis pas sûre de la période qui était visée. Nous devrons vous revenir là-dessus.

M. Rey Pagtakhan: Il s'agirait donc en fait d'une vérification de ce qu'a fait l'ancien gouvernement conservateur. Je tenais à le préciser.

M. Larry McCormick: Merci, monsieur Baker.

M. Rey Pagtakhan: Deuxièmement, quel est le ministère qui gère le mieux ces subventions et contributions?

M. Denis Desautels: Il existe des modèles au gouvernement fédéral pour la gestion des subventions et des contributions. Celui qu'appliquent les conseils subventionnaires est vraiment exemplaire à mon avis. J'estime qu'il fonctionne bien pour le secteur d'activité propre à ces conseils. Je ne pense pas qu'il puisse être appliqué à bon escient à tous les types de programmes de subventions, car dans certains cas, le délai serait trop long, mais il pourrait être appliqué à plus de programmes qui sont gérés par les ministères. Le modèle des conseils subventionnaires offre des principes utiles à mon avis.

M. Rey Pagtakhan: De quels codes d'utilisateur s'agit-il? Il est question dans le plan d'action en six points de suspendre des codes d'utilisateur d'ici février, précisant que le nombre de ces codes du système financier sera réduire de 193 à 30—une réduction de 85 p. 100. Tous les utilisateurs n'auront plus qu'un code actif. C'est à la rubrique Sécurité du système financier. Pouvez-vous nous expliquer de quels codes d'utilisateur il s'agit et comment l'existence d'un si grand nombre de codes par le passé pouvait constituer éventuellement une source de problèmes au niveau du contrôle par la gestion de la sécurité financière?

M. Denis Desautels: Mme Duk voudra bien répondre à cette question.

• 1250

Mme Theresa Duk (directrice principale, Direction des opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): On a constaté au cours de la vérification interne qu'il y avait un problème au niveau des mots de passe qui donnent accès au système financier. On a constaté que certains avaient un accès injustifié aux systèmes financiers. On a mis de l'ordre dans ce dossier.

M. Rey Pagtakhan: A-t-on au cours de la vérification relevé le fait que certains des problèmes découlaient de l'utilisation d'un trop grand nombre—que trop de personnes possédaient ce code d'utilisateur?

Mme Theresa Duk: Je ne pense pas qu'il y ait de lien direct. Je pense qu'il vous faudra poser la question au représentant du ministère car je n'ai pas les détails.

Le président: Très bien.

Jean Dubé.

M. Jean Dubé: Je partage l'opinion du vérificateur général en ce qui concerne la question de John Godfrey. Moi aussi je crains que les choses vont s'empirant dans l'administration et dans ce ministère.

Pour revenir à ma question, nous nous penchons sur cette situation depuis sept semaines. Il en est question partout dans les médias. Nous avons abordé le sujet à la période des questions à tous les jours. Mais au fond, ne s'agit-il pas de souplesse et de lignes directrices?

Nous examinons les circonscriptions qui ont touché du financement dans le cadre du FTCE. Écoutez, ma circonscription a touché des fonds de ce programme, a touché de l'argent du Fonds transitoire pour la création d'emplois, mais elle était admissible. Il y a plus de 20 p. 100 de chômage dans ma circonscription. D'autres circonscriptions au Canada se sont qualifiées, comme celle de la ministre où les chiffres ne le justifient pas. Ne pensez-vous pas que les lignes directrices—les règlements—du FTCE, après la réforme de l'assurance-emploi n'étaient pas suffisamment stricts et se prêtaient à une ingérence politique?

M. Denis Desautels: Je ne peux ni en convenir ni en disconvenir car c'est quelque chose que nous allons examiner. Manifestement, les règles d'admissibilité, les conditions qu'il fallait réunir, etc., seront au centre de notre examen. Je pourrai donc faire rapport au comité et à la Chambre en octobre d'une façon beaucoup plus précise.

Le président: Parfait.

Jean Dubé.

M. Jean Dubé: Pour revenir aux différents rapports de 1991 et de 1994—et on peut remonter à 1997 lorsque M. Trudeau était au pouvoir, ces mêmes problèmes existaient alors.

Le président: M. Trudeau n'était pas au pouvoir en 1997, mais il était présent en esprit.

M. Jean Dubé: Excusez-moi, je voulais dire 1977. La situation existe depuis longtemps. Nous voici en l'an 2000 et nous avons les mêmes problèmes. Après toutes ces années, ne convenez-vous pas comme moi que dans la plupart des cas, les règles n'étaient pas suffisamment strictes?

Monsieur le Président de la Chambre, monsieur le président...

Le président: M. le Président de la Chambre, c'est parfait.

M. Jean Dubé: ... Je viens d'entendre mes collègues libéraux dire que peut-être a-t-on versé trop d'argent à la région de l'Atlantique. Est-ce possible? Mais je reviens à M. Desautels.

Le président: Monsieur Desautels. Mesdames et messieurs.

M. Denis Desautels: Je pense que M. Dubé mentionnait que la souplesse était la question principale. Comme je l'ai dit, c'est quelque chose que nous allons examiner dans le cadre de notre étude de ces quatre programmes et tout particulièrement du Fonds transitoire pour la création d'emplois puisque c'est ce programme qui semble avoir attiré le plus d'attention.

Quant à savoir si c'est le même problème qui remonte à 1977, nous allons également tenter d'élucider ce point dans notre rapport. Nous allons résumer toutes les subventions et contributions et fournir à la Chambre des commentaires d'ordre général sur les liens communs et les facteurs persistants qui ont provoqué ces problèmes.

Le président: Nous avons Libby Davies, Phil Mayfield, Paul Crête, John Godfrey et puis leur président.

Mme Libby Davies: Merci.

J'aimerais revenir à la question posée par M. Dubé, mais d'un angle un peu différent. Il a mentionné les règles flexibles, et vous avez dit que vous examineriez cela. Mais en fait, cela nous amène à nous demander comment vous réussissez à faire votre travail.

Je ne voudrais pas vous forcer à jouer le rôle d'un détective privé, mais quand vous cherchez à déterminer ce qui s'est vraiment passé, c'est une véritable enquête. Comme vous l'avez dit, il est peu probable que l'on trouve dans les dossiers des traces d'une ingérence politique quelconque, et par conséquent, il faut trouver d'autres moyens pour déterminer ce qui s'est produit.

• 1255

Comme tous les ministères, DRHC a établi une véritable culture. On pourrait penser que la tâche des gestionnaires est de protéger leur ministère. Dans ces conditions, comment votre bureau va-t-il au fond des choses? Comment trouvez-vous d'autres sources d'information? Par exemple, est-ce que vous parlez aux syndicats?

Nous savons que les problèmes tiennent aux énormes coupures qui ont été faites dans ce ministère, pour ne pas parler du reste de la fonction publique. Je suis certaine que cela a des répercussions administratives lorsque les employés essayent de tenir à jour tous les dossiers. Mais si l'on va plus loin, si l'on considère une ingérence politique possible, quels sont les mécanismes ou les protections que vous offrez aux gens de ce ministère qui possèdent des informations mais qui n'osent pas les révéler? Est-ce que cela est confidentiel? Est-ce que vous donnez suite quand des employés du ministère vous donnent des indices, ou même des députés? Je suis curieuse de savoir comment vous procédez à ces investigations.

Le président: Madame Barrados.

Mme Marie Barrados: Je serai très brève. Effectivement, nous essayons de faire toutes ces choses-là. Nous allons sur place, nous parlons aux gens; nous parlons au plus grand nombre de gens possible et, à moins qu'un enquête criminelle ne soit en cours, nous protégeons l'identité de nos interlocuteurs et ce qu'ils nous disent est confidentiel.

Le président: Philip Mayfield, Paul Crête, John Godfrey puis le président.

M. Philip Mayfield: Merci, monsieur le président.

Au paragraphe 27.2 du chapitre 27 de votre rapport de 1998, on trouve, en abrégé, une énorme masse d'information. Par exemple, à propos de la vérification de la gestion des subventions et contributions au cours des 20 dernières années, et à propos de certains problèmes, vous mentionnez que ces problèmes surgissent lorsque les décideurs ne suivent pas les règles qui régissent les dépenses en matière de subventions et de contributions ou encore lorsque les pratiques de gestion ne sont pas suffisamment fermes.

Quand vous dites que certains décideurs ont enfreint ces règles, à qui pensez-vous? Qui était responsable des pratiques de gestion auxquelles vous faites allusion?

Le président: Monsieur Desautels.

M. Denis Desautels: Il incombe à chaque ministère de dépenser à bon escient les fonds mis à sa disposition. Ils doivent donc mettre en place une structure de gestion qui permette aux décideurs en matière de dépenses de savoir exactement comment ces décisions doivent être prises et comment ces programmes doivent être gérés.

En plus des responsabilités du ministère, le secrétariat du Conseil du Trésor ou le Conseil du Trésor lui-même doivent intervenir dans la mesure où ils doivent approuver les dépenses. Ils sont responsables de la gestion des crédits et, à ce titre, ils doivent négocier avec chaque ministère les modalités et conditions de chaque programme. Ils peuvent fixer certaines modalités et conditions auxquelles le programme doit se conformer. C'est ensuite au ministère de mettre en place la structure de gestion appropriée pour respecter, non seulement les modalités et conditions du Conseil du Trésor, mais également toutes les exigences de la LGFP.

C'est donc une structure à paliers multiples, mais c'est assez décentralisé. En fin de compte, nous devons insister pour que chaque ministère soit responsable de la gestion de ses dépenses.

Le président: Paul Crête.

M. Philip Mayfield: Vous me permettez de demander très vite une précision?

Le président: Si c'est une simple observation.

M. Philip Mayfield: Est-ce que vous voulez dire que la responsabilité est stratifiée, si bien que le Conseil du Trésor assume une certaine responsabilité, en plus du ministère? C'est bien ce que vous m'avez répondu?

Le président: Une réponse très courte.

M. Denis Desautels: Comme je l'ai dit plus tôt, il serait bon de remettre en question le rôle du Conseil du Trésor en ce qui concerne les programmes de subventions et contributions de tout le gouvernement. Il faut que le Conseil du Trésor fournisse les règles de base que les ministères doivent ensuite suivre. Ce travail est d'ailleurs en cours, mais il faut s'assurer que les règles sont plus claires qu'elles ne l'étaient par le passé, et également que le Conseil du Trésor et les ministères s'accordent parfaitement sur ce qui constitue les termes et conditions de chaque programme.

• 1300

Le président: Voilà des détails très utiles, car le président du Conseil du Trésor doit comparaître devant notre comité.

Monsieur Desautels, vous avez autre chose à dire? Non?

Paul Crête puis John Godfrey.

[Français]

M. Paul Crête: Au point où en est rendu votre processus de vérification et étant donné qu'il est prévu dans les procédures que vous pouvez transmettre aux autorités policières les cas qui nécessiteraient une enquête de leur part, s'est-il présenté de tels cas depuis le début de vos travaux ou si ces derniers ne sont pas suffisamment avancés pour que cela se soit produit?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, nous ne sommes pas encore assez avancés dans cette vérification pour qu'il ait été possible de trouver de tels cas, mais si nous en trouvions, effectivement nous les transmettrions aux autorités policières.

M. Paul Crête: J'aimerais vous poser une autre question. On a beaucoup parlé de volonté politique. Je reviens au ministère qui a été capable de récupérer 705 millions de dollars de la caisse de l'assurance-emploi. Vous aviez déjà fait le constat qu'il y avait eu des problèmes d'affectation de personnel qui avaient donné lieu à la crise du numéro d'assurance sociale, dont on a pris connaissance particulièrement l'année dernière, à la suite notamment de votre demande d'intervention de la part du Comité du développement des ressources humaines.

Est-ce que vos études vont vous permettre de juger si, à cause d'une volonté politique ou administrative, on aurait affecté des ressources plus grandes à d'autres vocations du ministère plutôt qu'à celle des contributions et des subventions? Est-ce que, par exemple, l'attribution d'un quota ou d'un objectif de récupération de l'argent de la caisse de l'assurance-emploi aurait pu conduire à l'affectation d'un plus nombreux personnel à cette tâche, causant une insuffisance de personnel pour d'autres programmes?

Est-ce que cela fera l'objet de votre rapport qui doit être déposé d'ici deux semaines sur les services locaux dans les centres d'emploi du Canada? Est-ce qu'un point du rapport intérimaire portera là-dessus?

Le président: Monsieur Desautels.

M. Denis Desautels: Monsieur le président, le rapport que nous allons produire dans deux semaines ne traitera pas de la question soulevée par M. Crête. Je ne suis pas en mesure aujourd'hui de vous dire exactement jusqu'où on pourra traiter de cette question dans le rapport que nous allons publier au mois d'octobre.

La question de la capacité d'une organisation de livrer la marchandise est un point qui nous préoccupe, et je dois trouver une façon de donner un peu d'indications sur l'étendue de ce problème. Je ne fais pas trop de promesses, monsieur le président, mais nous allons nous pencher sur cette question de la capacité.

[Traduction]

Le président: John Godfrey.

M. John Godfrey: J'ai une question très courte à l'intention de Mme Barrados au sujet des quatre programmes choisis que vous allez examiner.

Pour commencer, il nous serait utile de savoir précisément quel programme a été cité par le ministère comme un exemple de bonne pratique.

Deuxièmement, les programmes qui ne figurent pas sur la liste, c'est-à-dire ceux que vous avez décidé de ne pas examiner d'une façon aussi approfondie pour l'instant, comme l'apprentissage et l'alphabétisation ou encore les relations autochtones, est-ce que cela veut dire qu'ils ne sont pas aussi problématiques, ou bien est-ce simplement qu'ils ont été étudiés moins à fond parce qu'on a préféré... Je pense au Fonds transitoire pour la création d'emplois...

Le président: Monsieur Desautels ou madame Barrados.

Mme Maria Barrados: Le programme suggéré par le ministère pour ses bonnes pratiques est le Projet de partenariat.

En ce qui concerne nos choix, nous nous sommes sentis obligés de choisir le Fonds transitoire pour la création d'emplois à cause du nombre de questions qu'on nous posait et qu'on posait à la Chambre à ce sujet. Nous avons donc pensé que nous n'avions pas vraiment le choix. Quant aux deux autres, nous ne les avons pas choisis parce qu'il n'y avait pas de problèmes dans les autres domaines. Il est certain que des problèmes existent dans le contexte des Autochtones et des programmes destinés aux Autochtones, mais nous avons d'autres équipes de vérification qui examinent les subventions et contributions aux Autochtones et nous avons jugé que ces questions étaient suffisamment examinées ailleurs dans notre bureau.

Je ne peux pas vous dire que les autres n'ont pas de problèmes. Ce sont les choix qui s'offraient à nous. Nous avons cherché la diversité, essayé de trouver une gamme de programmes, quelque chose qui comprenne des subventions et des contributions. Nous avons voulu certains exemples au ministère même et d'autres dans les régions.

• 1305

Le président: Merci beaucoup.

Avant de terminer, j'aimerais poser une question à M. Desautels; nous devrons bientôt rédiger notre rapport final, et je me demande si vous envisageriez, le cas échéant, de revenir pour nous donner votre opinion sur le plan d'action. Pensez-vous que cela pourrait être utile?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, si les membres du comité souhaitent que nous revenions, nous le ferons avec plaisir, pour discuter de cette question ou d'autres questions.

Le président: Judy Sgro. Est-ce que c'est une bonne idée?

Mme Judy Sgro: Je tiens à dire que nous ne voudrions pas, dans 20 ans d'ici, que nos successeurs, consultant des rapports de vérification, se disent: «Seigneur, vous n'êtes pas retournés jusqu'en 1999, vous êtes retournés en arrière jusqu'en 1977.» Je n'ai pas proposé de motion, mais est-ce que nous n'allons pas recommander, non seulement que le vérificateur revienne pour discuter des rapports trimestriels, mais également qu'on maintienne un contact permanent pendant toute la phase d'application?

Le président: C'est une question dont nous devons discuter entre nous.

Monsieur Desautels, voilà maintenant deux heures que vous êtes ici; est-ce que vous avez quelque chose à ajouter ou des conseils d'ordre général à nous donner?

M. Denis Desautels: Monsieur le président, j'aimerais effectivement vous donner un conseil. Je suis responsable devant la Chambre et devant les députés, mais il y a un certain nombre de questions que j'aimerais beaucoup voir ce comité ou d'autres comités approfondir, et j'en ai déjà mentionné certaines ce matin.

Par exemple, j'ai mentionné la possibilité de remettre en question le rôle du Secrétariat du Conseil du Trésor en ce qui concerne certains programmes de subventions et de contributions. À mon avis, cela offre des perspectives intéressantes et mérite l'attention du Parlement.

Toute la question des rapports au Parlement, l'information sur les programmes de subventions et de contributions, tout cela mérite également d'être approfondi. Tout ce qui a trait aux informations communiquées au Parlement sur les programmes de subventions et de contributions, informations qui lui permettent de mieux exercer ses responsabilités, à la fois au moment d'approuver les budgets et également lorsqu'il examine les résultats obtenus par les ministères. Voilà un autre domaine.

En troisième lieu, il y aurait peut-être l'efficacité des programmes. Est-ce que l'efficacité des programmes de subventions et de contributions est évaluée systématiquement? Est-ce qu'on utilise vraiment les résultats de ces évaluations? Par exemple, quand le Fonds transitoire pour la création d'emplois est devenu le Fonds du Canada pour la création d'emplois, est-ce qu'on s'est servi de l'évaluation qui existait à l'époque pour l'élaboration du nouveau programme? Voilà un troisième domaine qui mériterait d'être étudié.

Il y a un quatrième domaine, qui découle de ce que j'ai dit tout à l'heure au sujet du Conseil du Trésor. En effet, en plus des programmes spécifiques, il faudrait que le Secrétariat du Conseil du Trésor fournisse des directives suffisantes au sujet des subventions et contributions d'une façon générale. Comme je l'ai dit, nous allons collaborer avec le Secrétariat à l'élaboration de ce cadre, mais je pense qu'il doit également mettre à jour ses propres directives aux ministères. À cet égard, les conseils du comité lui seraient peut-être utiles.

Voilà donc les quatre observations que je vous offre en conclusion.

Le président: Et qui sont très utiles.

Avant de vous remercier—je le fais avant, car dès que je vous aurai remercié, les membres du comité vont disparaître—je rappelle à mes collègues que notre prochaine réunion aura lieu mardi et que nous recevrons John Reid, le commissaire à l'information; Bruce Phillips, le commissaire à la protection de la vie privée; Ekos ainsi que Conseils et Vérification Canada. Ensuite, dans une semaine, nous aurons les représentantes de DRHC, région du Québec, notamment Danielle Vincent et Suzette Perrault.

Libby, j'ai ici d'autres dates que je peux vous donner. Vous n'étiez pas là quand je les ai annoncées.

J'aimerais remercier nos témoins: Denis Desautels, vérificateur général du Canada; Maria Barrados, vérificatrice générale adjointe, Direction générale des opérations de vérification; Theresa Duk, directrice principale, direction générale des opérations de vérification; Henno Moenting, directeur principal, Opérations de vérification. Je vous remercie tous, et en particulier M. Moenting, pour son excellente contribution.

La séance est levée jusqu'à mardi, à notre heure régulière, c'est-à-dire 11 heures.