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HAFF Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON PROCEDURE AND HOUSE AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA PROCÉDURE ET DES AFFAIRES DE LA CHAMBRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 15 novembre 1999

• 1901

[Traduction]

Le président (M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.)): Nous avons le quorum, je déclare la séance ouverte.

Chers collègues, nous poursuivons notre étude du projet de loi C-2, la Loi électorale du Canada. Ce soir nous entendrons trois groupes de témoins: le Congrès du travail du Canada, la Fédération des contribuables canadiens et la National Firearms Association.

Je souhaite la bienvenue à nos témoins et je les remercie de leur participation. Nous sommes anxieux de vous entendre.

La procédure qui semble satisfaisante et que nous suivons depuis un certain temps est la suivante: nous demandons à chaque groupe de faire un exposé d'environ dix minutes pour passer ensuite à une sorte de table ronde de questions et de réponses.

Si cela vous convient, je suivrai l'ordre indiqué sur l'avis en commençant par le Congrès du travail du Canada, suivi de la Fédération des contribuables canadiens puis de la National Firearms Association.

Les représentants du Congrès du travail sont Nancy Riche et Pat Kerwin. L'un ou l'autre, je vous en prie.

Mme Nancy Riche (secrétaire-trésorière, Congrès du travail du Canada): C'est moi qui commencerai mais je demanderai certainement à Pat de compléter mon intervention. Comme nous en avons décidé en chemin, il y a des sujets qui nous tiennent plus à coeur comme je suis certaine qu'il en va de même pour tous les Canadiens qui suivent cette question. J'essaierai donc d'en faire brièvement le tour et Pat ajoutera aussi son mot. Pat est le directeur national du Service de l'action politique du CTC.

Je ne voulais pas commencer par ça mais je crains de devoir le faire: participer à un débat sur la représentation proportionnelle, voire sur une date fixe pour les élections nous intéresse au plus haut point. Cependant, vu les délais, votre comité n'a probablement pas le temps d'en traiter. Commencer un exposé par vous suggérer de créer un autre comité me gêne un peu mais il faudrait qu'un comité de la Chambre soit chargé de tenir des audiences et de mener des études sur des questions aussi importantes que la représentation proportionnelle et un calendrier fixe pour les élections.

J'aimerais également qu'un plus grand nombre de Canadiens y participent car l'objectif primordial d'une loi électorale est de faire jouer à plein la démocratie et que tout un chacun—à quelques exemptions près—puisse voter, être candidat, être membre d'un parti, bref, puisse faire toutes les choses que nous faisons actuellement. Nous pensons donc qu'un changement aussi important que de passer du scrutin majoritaire à un tour à la représentation proportionnelle mérite à coup sûr un plus large débat.

Les inconvénients d'une liste électorale permanente nous inquiètent beaucoup. Je sais que Pat voudra certainement vous en toucher deux mots car il nous a signalé que lors des dernières élections en Ontario il y avait eu des fraudes invraisemblables, en particulier à Ottawa, au niveau des logements pour étudiants et des foyers collectifs. Dans un des lieux où il s'est rendu, 12 cartes d'électeur avaient été envoyées et aucune des personnes concernées n'y habitait plus. Il faut donc examiner cette question et nous recommandons qu'Élections Canada fasse un recensement dans tous les bureaux de scrutin où il y a un roulement élevé de résidents. Dans certains cas c'est tout à fait clair—par exemple pour les étudiants, les foyers—mais dans d'autres ce ne l'est pas autant et nous n'avons pas encore de version définitive de ce qu'on devrait entendre par roulement élevé ou comment détecter ce genre de problème.

• 1905

Pour ce qui est du critère des 15 p. 100 pour les remboursements, nous suggérons son élimination et le remboursement total quel que soit le pourcentage de voix.

Nous convenons avec le Parti libertaire que le droit de 1 000 $ est beaucoup trop élevé pour les candidats. C'est comme si on disait que 1 000 $ c'est facile à trouver. Croyez-moi, je sais que ce n'est pas vrai. C'est comme si vous disiez qu'il est facile aux assistés sociaux ou aux chômeurs de trouver facilement 1 000 $ ou des partisans qui peuvent leur donner 1 000 $. Ce dépôt devrait être réglé à 200 $ et le seuil de remboursement de 15 p. 100 éliminé.

Pat pourra revenir sur certains autres points mais je tiens à vous dire quelques mots sur l'accès aux médias. Cela fait longtemps que j'estime que c'est un des aspects les plus injustes de la Loi électorale. Suggérer que parce que vous avez obtenu un certain pourcentage de voix lors de l'élection précédente vous autorise un nombre de minutes de diffusion supérieure au parti qui n'a pas atteint ce pourcentage est totalement injuste. Lorsque le parti au pouvoir déclenche des élections il reconnaît que nous sommes tous de nouveau égaux, que nous sommes tous en lice et que ce sont les meilleurs candidats que seront élus quelle que soit la participation. Suggérer que le parti qui lors de l'élection précédente a obtenu le pourcentage le plus élevé bénéficie d'un temps d'antenne supérieur est à mes yeux une forme de discrimination totale envers les autres partis.

En fait cela ne marche pas. En 1993, bien entendu, c'est le Parti conservateur qui doit avoir eu le plus grand nombre de minutes ce qui n'a pas eu, en fin de compte, le résultat escompté sur les élections. C'est l'inverse qui s'est produit pour le Parti réformiste qui a probablement eu moins de minutes mais qui s'est retrouvé avec plus de candidats élus. Je crois vraiment qu'il faut examiner cette question.

Lorsque les petits partis en parlent, ils disent que l'arbitre indépendant accorde toujours quelques minutes de plus aux petits partis, donc la règle n'est pas appliquée à la lettre. Je pense que c'est important.

À propos de cette volonté affirmée de voir plus de femmes se présenter aux élections, nous pensons qu'il y a de nombreuses manières d'aider les femmes à entrer dans la politique, une des moindres étant de comprendre comment vivent les femmes et quel genre de travail elles font. Si nous faisions un sondage, je suis sûre que nous constaterions que la majorité des hommes élus étaient généralement des professionnels—des avocats, des médecins, des enseignants, etc. Très souvent les femmes ne sont pas dans cette catégorie. D'une manière générale, elles gagnent moins bien leur vie. Nous nous retrouvons donc dans la situation suivante: c'est le groupe ou le sexe dans notre société qui a le plus de responsabilités au foyer, qui s'occupe des enfants et des parents âgés qui est probablement le plus mal payé. Décider de se présenter à des élections dans ces circonstances n'est pas facile. Il faudrait peut-être prévoir des dépenses pour garde d'enfants ou de parents âgés. Si le seuil de 15 p. 100 est supprimé pour le remboursement des frais ce sera déjà un progrès.

Au Parti néo-démocrate—et vous savez probablement que j'ai quelques liens avec ce parti—nous avons déjà depuis longtemps un fonds et d'autres partis ont suivi notre exemple. Nous avons le fonds Agnes MacPhail et je crois que les Libéraux ont un autre fonds, le fonds Judy LaMarsh. Chaque parti a donc reconnu que pour se présenter à des élections il y avait un certain nombre d'obstacles pour les femmes que ne connaissent pas les hommes. Il faudrait que votre comité étudie ce genre de problèmes.

Un simple remboursement ne réglerait pas tous les problèmes. Il resterait celui des mises en candidature. Nous pourrions faire tout ce que je viens de suggérer et, les partis pourraient se vanter de faire tout ce qu'il faut mais les grosses machines électorales continueraient à fonctionner et ce sont les hommes qui continueront à être nommés candidats car même si les partis jurent de leur bonne foi, ce n'est pas comme ça dans la réalité.

J'espère ne pas avoir abusé. Pat peut maintenant vous parler de certains autres points.

Oh, avant, il faudrait que je dise un mot sur les tiers, surtout étant assise à côté de mon ami de la National Firearms Association. Nous recommandons une interdiction totale, je dis bien totale, de financement par des tiers en ce qui concerne les organisations. Nous sommes prêts à accepter que les particuliers qui défendent une cause particulière puissent dépenser jusqu'à 500 $.

• 1910

Au moment du débat sur le libre-échange, un seul parti lors des élections de 1988 était favorable au libre-échange. Les deux autres partis y étaient opposés. Pendant la période d'interdiction de publicité de 24 heures, un tiers parti, sauf erreur, et peu importe, le Free Trade Alliance for Jobs—je me souviens que Tom d'Aquino et Peter Lougheed en étaient les coprésidents—a publié des pleines pages de publicité dans tous les journaux du pays. Il était trop tard pour réfuter son message. En fait, cette campagne profitait de manière à peine voilée à un parti en particulier.

Si des organisations ou des groupes veulent participer à des élections, il y a une chose qu'on appelle les partis. Vous pouvez participer à l'effort électoral d'un parti; vous pouvez former un parti. La National Citizens' Coalition pourrait très bien devenir le parti de la National Citizens' Coalition. Nous avons dans notre pays une procédure qui légitimise la participation des partis aux élections. Les candidats qui appartiennent à ces partis, je suppose certains indépendants, peuvent se présenter. Si des tiers veulent participer à l'effort du parti qui soutient leur position, ils ont toutes sortes de manières de le faire; il n'y a pas de limite. Je sais que vous suggérez 150 000 $, mais dans le cas de la National Citizens' Coalition... Je ne devrais pas toujours la prendre en exemple; je pourrais prendre comme exemple la National Firearms Association. Chaque chapitre de cette association pourrait dépenser 150 000 $ et nous pourrions...

Une voix: Vous avez vos AAAF; vous êtes dans votre droit.

Mme Nancy Riche: Il faudrait parler du contrôle des armes à feu avant la fin de la soirée.

En fait chaque chapitre pourrait dépenser 150 000 $ et on pourrait se retrouver avec des montagnes d'argent qui finiraient par biaiser tout le système. Nous recommanderons donc une interdiction absolue de publicité par des tiers.

M. Pat Kerwin (directeur, Service de l'action politique, Congrès du travail du Canada): Il y a un certain nombre d'autres éléments importants.

À propos des partis politiques, le Parti communiste a demandé son avis à la Cour suprême et nous recommandons que cet avis selon lequel un parti puisse faire inscrire son nom sur les bulletins de vote à condition d'avoir un minimum de deux candidats, soit respecté. J'ai d'ailleurs trouvé le Parti communiste très raisonnable sur ce plan puisqu'il est prêt à accepter un seuil un peu plus élevé. Nous appuyons également la proposition de M. White d'un minimum de 12 candidats sous une bannière pour avoir le statut de parti enregistré et admissible à du temps d'antenne, etc.

C'est dans la logique de notre philosophie que Nancy vous a énoncée, à savoir que si vous voulez participer au jeu politique, le chemin devrait vous être ouvert, il devrait y avoir un minimum d'obstacles à la formation d'un parti tout en respectant un certain nombre de règles de financement.

Pour finir, il y a cette question qui a été je sais abordée par nombre de vos témoins, celle des critères de contribution. Beaucoup, pour résumer, préconisent le modèle québécois. C'est une initiative dont nous serions disposés à discuter avec tout comité créé par le Parlement. Ce n'est pas ce que nous préconisons aujourd'hui. Nos membres québécois trouvent la loi québécoise tout à fait acceptable. Nos membres à l'extérieur du Québec préfèrent un mode de participation plus direct mais c'est un sujet dont nous serions tout à fait disposés à discuter. Ce qui nous inquiétait, je crois c'est le risque d'adopter une loi tout à fait raisonnable à première vue mais qu'immédiatement après cette adoption chaque parti politique essaie de trouver le moyen de la contourner pour accéder aux ressources nécessaires pour gagner sa campagne. Je sais qu'il en a donc été question à plusieurs reprises.

Nous signalons un certain nombre de problèmes techniques comme par exemple pour les élections partielles. La stupidité ce soir c'est qu'en Ontario les bureaux restent ouverts jusqu'à 21 h 30 parce qu'il y a une autre élection partielle en Saskatchewan. Ça me paraît un peu ridicule. Les bureaux devraient être ouverts de 8 h 30 à 20 h 30 pour les élections partielles où que vous habitiez.

Merci.

Le président: Merci.

Nous passons maintenant à la Fédération des contribuables canadiens, monsieur Robinson.

M. Walter Robinson (directeur fédéral, Fédération des contribuables canadiens): Bonsoir, monsieur le président, mesdames et messieurs. Je suis très honoré de comparaître ce soir en ma qualité de directeur fédéral de la FCC devant votre comité.

[Français]

Bien que ma présentation devant vous ce soir soit uniquement en anglais, j'essaierai de répondre à vos questions dans la langue de votre choix.

[Traduction]

Nous vous ferons parvenir au cours de la semaine une analyse critique détaillée du projet de loi C-2 exposant nos objections à un certain nombre des articles proposés dans cette mesure. Je limiterais ce soir mes remarques au problème de limites de dépenses des groupes de citoyens et des groupes de défense des citoyens, à l'accréditation des partis politiques, aux remboursements électoraux et aux problèmes nouveaux que laisse sans réponse le projet de loi C-2.

Permettez-moi de faire une digression. Je trouve personnellement l'expression «tiers parti» péjorative et offensante. La participation au processus électoral est essentielle et tout aussi importante pour ceux qui inscrivent leur nom sur un bulletin de vote que pour ceux qui choisissent de promouvoir ou de s'opposer à des partis ou à des candidats par tous les moyens légaux possibles. Des élections qui engagent la nation dans des débats de politique publique dynamiques et passionnés sont assurément le signe d'une saine démocratie. En effet, un tel engagement des citoyens tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de notre système parlementaire est essentiel si nous voulons préserver et renforcer nos traditions démocratiques. Les changements proposés dans ce projet de loi concernant la publicité par des groupes de citoyens et des groupes de défense des citoyens, soit les articles 349 à 362, sont contraires à cette éthique démocratique et au lieu de renforcer le corps politique, ne font que l'affaiblir.

• 1915

Pour résumer, les limites de dépenses imposées aux groupes de citoyens et aux groupes de défense des citoyens sont le résultat des révisions de 1974 à la loi électorale, fondé sur l'opinion des députés de l'époque et des spécialistes selon lesquels la participation aux campagnes électorales devrait être limitée aux partis et aux candidats officiels.

Était-il possible de trouver mieux comme opinion contentieuse, offensante et arrogante du processus démocratique. Vingt-cinq ans plus tard et après de nombreuses interventions des tribunaux, ce gouvernement, encore une fois, essaie d'étouffer la participation démocratique aux campagnes électorales par les groupes de défense des citoyens, les syndicats, les chambres de commerce et autres, jusqu'au club de la section locale 4-H ou l'association de quartier locale.

Soyons clair: bien qu'un plafond de dépenses de 150 000 $ pour les groupes de citoyens et de défense de citoyens puisse paraître généreux, cela ne fait que 498,34 $ par circonscription quand on divise cette somme par les 301 circonscriptions du pays. Dans des communautés comme Montréal, Toronto, Ottawa, Vancouver, voire Red Deer, un groupe local ne peut même pas acheter un quart de page de publicité dans l'hebdomadaire communautaire pour ce misérable montant. En revanche, un parti politique qui maximise son plafond de dépenses national de 62 c. par électeur et dépense le plafond autorisé dans les 301 circonscriptions pourrait dépenser près de 25 millions de dollars comparativement au plafond de 150 000 $ imposé aux citoyens et aux groupes de défense de citoyens. Où est la justice?

L'argument principal de limites de dépenses imposées aux acteurs extraparlementaires est que l'utilisation de leurs ressources pourrait influencer les électeurs. Contrairement aux architectes de cette proposition de loi, nous ne croyons pas que les électeurs sont stupides et les dernières expériences montrent que des dépenses excessives n'influencent pas nécessairement les intentions de vote. Pendant la campagne électorale de 1988, les partisans du libre-échange ont largement plus dépensé que les opposants à cet accord et pourtant une majorité de Canadiens a voté pour les partis politiques s'opposant à l'ALE.

En 1992, le camp du oui pour l'Accord de Charlottetown a dépensé largement plus que le camp du non à treize contre un. Pourtant le camp du non a quand même prévalu dans une majorité de provinces et l'accord a été rejeté. En 1993 le Parti conservateur fédéral et ses candidats ont dépensé quelque 20 millions de dollars qui lui ont permis d'enlever brillamment deux sièges. Et un peu plus tôt cette année, les syndicats et d'autres groupes ont dépensé des millions de dollars pour essayer de se débarrasser du gouvernement Harris. Résultat, M. Harris et son parti ont été réélus à une plus grande majorité que pour leur première victoire en 1995. Aucune recherche crédible sur cette planète ne permet d'affirmer que c'est le parti de l'argent qui gagne les élections. C'est plutôt le contraire qui se produit comme le démontre les dernières expériences au Canada.

Il reste cependant incontestable que la publicité coûte de l'argent et les dispositions limitant la participation extraparlementaire au processus électoral s'apparentent à une véritable censure. Si des limites doivent être appliquées, elles devraient être analogues à celles qui s'appliquent aux partis et aux candidats. Ou bien, si vous devez limiter quelque chose, limitez les contributions et non pas les dépenses.

En plus, les règles de déclaration et de divulgation contenues dans cet article du projet de loi C-2 garantissent que la politique est le domaine exclusif des riches et des bien-en-cour, étant donné la batterie d'avocats et de comptables qui sera nécessaire pour satisfaire toutes les dispositions de déclaration et de divulgation. En effet, ce document, le projet de loi C-2, d'une manière globale, peut-être considéré comme un énorme obstacle à toute participation intelligente des citoyens au processus électoral.

Pour les élections de la Colombie-Britannique en 1996, nous avons dû retenir les services à plein temps d'un avocat simplement pour veiller à ne pas enfreindre les dispositions de la Loi électorale provinciale dont beaucoup se retrouvent dans les propositions de modification du projet de loi C-2. De simples citoyens ou de plus petits groupes moins bien financés peuvent ne pas avoir les ressources à leur disposition pour retenir une telle aide professionnelle, démontrant encore une fois que cette loi limite la participation au lieu de l'encourager.

Passons à l'article 370, l'article des critères d'admissibilité au statut de parti. Nous estimons que le critère de 50 candidats consacre la structure actuelle des partis et étouffe la participation d'autres voix au processus électoral. C'est sur ce point que je suis d'accord avec mes collègues du CTC. De plus, ces critères sont incompatibles avec ceux nécessaires pour avoir le statut de parti officiel à la Chambre des communes. Nous proposons que ce chiffre soit réduit à 12 pour être compatible ave les critères aujourd'hui en vigueur à la Chambre.

Même si selon certains, l'abaissement de ce seuil pourrait ouvrir la porte à une multiplication des partis et sans doute à des partis marginaux promouvant parfois des vues extrêmes, ces partis ont le droit d'être entendus. Et, encore une fois, nous faisons toute confiance à l'électorat pour distinguer les partis et les candidats sérieux de ceux qui ne le sont pas. Il suffit de citer l'exemple de la Nouvelle Zélande ou de l'Allemagne où il peut y avoir plus de 35 noms de candidats ou de partis inscrits sur le bulletin de vote sans que les électeurs se plaignent d'un trop grand choix ou d'une trop grande complexité. Ils font des choix démocratiques fondamentaux.

Passons maintenant à la question du remboursement des candidats. Le système fiscal contient déjà des dispositions généreuses pour ceux qui souhaitent apporter leur contribution à des partis politiques et/ou de campagnes politiques. D'ailleurs, nous avons toujours été frappés et intrigués par le fait que le système fiscal autorise un crédit fiscal de 75 p. 100 pour une contribution politique de 100 $ alors que la même somme donnée à Centraide ou au service local de Sida ou au chapitre local de la Société du cancer correspond généreusement à un crédit d'impôt de 17 p. 100. Or le gouvernement souhaite à l'article 560, majorer le seuil à 200 $ pour le crédit d'impôt à 75 p. 100.

• 1920

Je me demande si certains des membres du comité ici présents ce soir en comprennent l'ironie. Nous donnons plus d'importance au système politique qu'aux activités philanthropiques dans notre pays.

Par-dessus le marché, les remboursements électoraux représentent un autre obstacle à une participation accrue et significative au processus électoral. Une analyse de la FCC révèle qu'après les élections fédérales de 1997 1 672 candidats ont déposé des déclarations et un nombre record d'entre eux, 801 pour être précis, remplissaient les critères de remboursement de frais de campagne. En fait, les contribuables ont déboursé plus de 16,5 millions de dollars pour rembourser ces 801 candidats, la subvention moyenne étant de 20 600 $. Cela représente une augmentation de 11 p. 100 par rapport à 1993 alors que 714 candidats heureux et malheureux se sont vus rembourser 14,8 millions de dollars par les contribuables pour une moyenne de 20 800 $.

L'argument à la défense de ces subventions et de ces remboursements est qu'ils sont nécessaires pour aider ceux qui ne pourraient pas autrement se permettre de se présenter, laissant la politique, encore une fois, aux seuls riches. Encore une fois, c'est le contraire qui est en fait vrai. En 1993, sur les 714 candidats qui ont été remboursés 710 s'étaient présentés sous la bannière d'un des cinq principaux partis—le Parti libéral, le Parti réformiste, le Bloc québécois, le NPD ou le PC—et en 1997 seuls deux candidats sur les 801 ayant été remboursés n'étaient pas membres de ces cinq partis principaux.

Cette pratique encourage aussi les candidats à accumuler des déficits, sachant que les remboursements financés par les contribuables replaceront leur campagne dans le noir. Dans la législature actuelle, 123 de vos collègues ont enregistré des déficits en 1997. Ces remboursements récompensent l'irresponsabilité financière et permettent de constituer d'énormes trésors de guerre pour les campagnes qui ne font pas de déficits, biaisant encore une fois les règles pour le prochain cycle électoral.

Nous croyons que cette pratique de remboursement des candidats et des partis devrait cesser étant donné le traitement fiscal déjà très généreux offert aux acteurs politiques.

À propos d'autres questions, les articles 24 et 183, nous croyons que le directeur général des élections devrait avoir le pouvoir de recruter et de nommer des présidents de scrutin et agents de bulletins de vote spéciaux par opposition à la pratique actuelle qui encourage le clientélisme dans le système électoral.

De plus, ce comité devrait penser à des mécanismes ou a des articles dans cette loi—encore une fois, en accord avec mes collègues du CTC—qui permettent au directeur général des élections d'étudier les mérites d'autres systèmes de scrutin, tels que la représentation proportionnelle, la proportionnelle mixte, le transfert des bulletins, etc. De telles recherches pourraient s'avérer de grande valeur si le Parlement souhaitait consulter les Canadiens sur une réforme de notre système archaïque de scrutin majoritaire à un tour.

Pour finir, nous sommes profondément déçus par le manque d'enthousiasme pour l'utilisation de nouvelles technologies pour faciliter les procédures du scrutin ou pour accroître la participation des électeurs. Alors que nous sommes au seuil d'un nouveau siècle, nous sommes toujours attachés à un système enraciné dans des traditions de vote des XIXe et XXe siècles. Ce comité devrait se faire un devoir de réfléchir au recours aux nouvelles technologies de scrutin.

Monsieur le président, nous croyons qu'il y a grand-place à l'amélioration dans cette loi et nous soumettons nos idées à votre considération.

Les limites de dépenses des groupes de citoyens et des groupes de défense des citoyens telles qu'elles sont actuellement envisagées, et la limitation de la participation du plus vaste éventail de partis politiques possibles, desservent un électorat déjà sceptique vis-à-vis des institutions de gouvernement du Canada.

Permettez-moi de conclure en citant des propos appropriés du célèbre romancier et dissident russe Alexandre Solzhenitsyn qui, en passant, a gagné le prix Nobel de la littérature en 1970. Il y a trente ans aujourd'hui, le 15 novembre 1969, Solzhenitsyn envoyait une lettre à l'Union des écrivains de Moscou dans laquelle il disait:

    Il est temps de se souvenir que la première chose à laquelle nous appartenons est l'humanité. Et l'humanité n'est séparée du monde animal que par la pensée et l'expression qui devraient être naturellement libres. Si elles sont enchaînées, nous redevenons des animaux.

Monsieur le président, traitons les électeurs comme des êtres humains intelligents et non pas comme des animaux. Faisons confiance à leur jugement et à leur capacité de choisir et n'oublions pas que la légitimité du gouvernement repose sur le vote de 19 millions d'électeurs canadiens. Laissons-les s'exprimer à voix haute, librement et aussi souvent qu'ils le désirent.

[Français]

Merci de votre attention ce soir. J'attends vos questions avec impatience.

[Traduction]

Le président: Je tiens à vous remercier infiniment de cet exposé. Je ne peux m'empêcher de signaler que vous avez respecté les dix minutes et que vous avez été très succinct. Vous pouvez revenir faire un exposé devant n'importe lequel des comités dont je suis membre quand vous voudrez.

M. Walter Robinson: Merci, monsieur le président.

Le président: Nous passons maintenant à M. Hinter. M. Hinter est le coordonnateur de la National Firearms Association. Monsieur Hinter.

M. Jim Hinter (coordonnateur, National Firearms Association): Bonsoir, monsieur le président, mesdames et messieurs. Je vous remercie de nous avoir invités à venir vous parler ce soir. Il est toujours agréable de venir à Ottawa pour éprouver ce froid vent du Nord alors qu'il faisait 15 degrés à Calgary quand je suis parti.

• 1925

Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.): Dehors, il neige.

M. Jim Hinter: Magnifique.

Avant de commencer, j'aimerais vous brosser un petit tableau de la National Firearms Association du Canada. Nous sommes un organisme canadien et nous avons des membres d'un océan à l'autre. Aujourd'hui nous comptons plus de 100 000 membres ayant payé leur cotisation et ce chiffre continue à progresser. Cette année, nos effectifs ont déjà grossi de 15 p. 100.

Lorsque j'ai consulté le projet de loi C-2, je me suis dit, après avoir lu certains des renseignements que j'avais reçus, imagine ce que peut être vivre dans un pays où une personne peut être accusée de crime et lourdement pénalisée sans procès simplement pour avoir exprimé son opinion. Je me suis dit que cela ressemblait à une de ces dictatures du tiers monde dont nous entendons à l'occasion parler aux nouvelles. Mais c'est arrivé ici au Canada, plus précisément en Colombie-Britannique, à un comptable. À mes yeux, c'est la démonstration sine qua non de ce qui pourrait arriver avec les règles de dépenses des tiers partis proposées dans le projet de loi C-2—ou de la loi bâillon comme on l'appelle communément.

La National Firearms Association ne croit pas que le gouvernement ait pour rôle de limiter le droit des Canadiens ou des groupes de Canadiens d'exprimer leurs propres opinions. Le faire, véritablement, ne ferait qu'accroître dans tout le pays la méfiance à l'égard de l'omniprésence du gouvernement. Je trouve tout à fait regrettable que des parlementaires—bien qu'il s'en trouve naturellement aucun ici au comité—estiment que des citoyens soient tellement incapables de penser par eux-mêmes qu'ils se laisseraient influencer par une campagne publicitaire menée par une organisation ou une entreprise quelconque.

L'Accord de Charlottetown témoigne bien du fait que des gens refusent de se laisser influencer par la publicité. Les experts dans tout le pays avaient dit aux Canadiens à la radio, à la télévision, dans des éditoriaux et dans des messages publicitaires que le pays n'allait pas survivre à une défaite du oui. Les partisans du oui ont dépensé treize fois plus que ceux du camp opposé. Les citoyens ont attentivement examiné la question et ont voté non. Le Canada a survécu; les gens avaient raison.

La véritable question qui se pose ici, à moi et à notre organisation, c'est le choix qu'il faut faire entre d'une part laisser le gouvernement décider à la place des gens parce qu'il sait bien mieux qu'eux comment ils devraient vivre leurs vies ou d'autre part laisser les gens décider pour eux-mêmes. La population canadienne est ici le véritable enjeu. On pourrait laisser adopter une loi comme celle-là sans sourciller. On pourrait voir la population faire ce qu'elle a souvent fait, soit renverser le gouvernement. Elle l'a déjà fait et cela se verra encore. Mais en examinant ce projet de loi, nous y trouvons des dispositions similaires à celles qui ont déjà été rejetées au Québec et en Alberta ainsi que d'autres dont des tribunaux de la Colombie sont en ce moment même saisis.

On a l'impression que les gouvernements cherchent plus à adopter des lois qui restreignent la liberté qu'ont les Canadiens d'exprimer véritablement et publiquement leur opinion au cours d'une campagne électorale.

Pour donner satisfaction à mon ami, nous parlerons très brièvement de la question des armes à feu.

Le gouvernement fédéral prétend que les sondages d'opinion montrent un vaste appui pour la nouvelle loi sur le contrôle des armes à feu. Si tel était le cas, ni le Parti libéral fédéral ni le gouvernement fédéral n'aurait à redouter une contestation judiciaire de cette mesure législative ou un jugement de l'opinion publique.

La National Firearms Association estime que le critère déterminant de la validité de toute mesure législative, c'est, d'abord et avant tout, la réponse à la question de savoir si elle permet d'atteindre un objectif que recherchent vraiment les citoyens canadiens? Deuxièmement, peut-elle permettre de réaliser ces objectifs dans le cadre des paramètres financiers annoncés? Troisièmement, permet-elle véritablement d'atteindre les résultats visés? Nous estimons que la nouvelle loi sur les armes à feu ne respecte aucun de ces critères. Nous avons proposé une solution de rechange, et nous n'allons pas nous contenter de mettre à l'épreuve le gouvernement du jour pendant les seules campagnes électorales fédérales. La loi est truffée de lacunes. Elle ne résistera pas à aucun des critères.

Le projet de loi C-2 contient plusieurs lacunes. Je me contenterai de ne parler que d'un aspect secondaire, soit les dépenses des tiers parties. Il y en a d'autres. Nous représentons plus de 100 000 membres répartis dans tout le pays. Si nous devions imprimer et distribuer des exemplaires d'un guide des électeurs dans tout le pays, à nos membres seulement, nous dépasserions rapidement la limite de dépenses prévues dans le projet de loi. Si nous publions ce même guide des électeurs dans notre magazine mensuel, il serait considéré comme du contenu rédactionnel. Il ne faut pas chercher à tortiller, d'après les avis juridiques que nous avons obtenus—nous en avons obtenus trois d'avocats distincts—notre magazine échappent à la réglementation. En fait, toute organisation publiant une publication régulière échapperait également à cette loi.

• 1930

Si le gouvernement et le Parlement, toutefois, décidaient que notre magazine n'échappait pas à la loi, alors on peut imaginer que tout magazine, tout journal et tout radiodiffuseur au Canada pourrait être assujetti aux mêmes dispositions de cette loi et être contraint de ne pas dépenser plus de 150 000 $ soit 3 000 $ par circonscription. Leur limite serait vraisemblablement établie en fonction du coût, de la longueur de colonne et du temps d'antenne, de publicité similaire.

Remarquez que certains éditorialistes et certains animateurs de tribune radiophonique du pays—et peut-être même leurs lecteurs et leurs auditeurs—pourraient se réjouir que pour une fois on ne leur parle pas d'élections. Je doute que ce soit là l'intention véritable du projet de loi C-2, mais si cette mesure législative s'applique à un aspect des médias, elle s'applique à tous. À moins que la censure de tous les médias canadiens pendant une campagne électorale soit l'objectif visé par cette mesure législative, elle ne peut atteindre l'objectif annoncé.

Je dirais en outre que malgré la grande détermination de générations d'éditorialistes, mêmes les meilleurs éditoriaux n'influent pas sur le résultat des élections. En 1993, puis à nouveau en 1997, la chaîne Sun Media avait appuyé le Parti progressiste conservateur fédéral, pourtant on ne constate pas la présence d'un Parti conservateur fédéral au Canada. Il est sans doute décevant pour les éditorialistes de ne pas se voir aussi puissants qu'ils se l'imaginent.

Une voix: Tout comme nous.

M. Jim Hinter: La démocratie est un régime gouvernemental où la confiance dans le peuple, les électeurs doit primer.

En tant que politiciens, il peut arriver que vous ayez l'impression que vos décisions révéleront plus de clairvoyance et de profondeur, mais si vous n'arrivez pas à vous assurer l'appui de la population lors des élections, c'est encore elle qui a raison.

S'il faut choisir entre faire confiance à la population ou faire confiance à un gouvernement omniprésent, nous ferons confiance aux gens, et nous croyons que la plupart des Canadiens pensent de même.

Comment se fait-il que ceux qui proposent de restreindre les dépenses des tiers parties dans le projet de loi C-2 semblent faire davantage confiance au gouvernement omniprésent qu'à la population?

Merci.

Le président: Merci, monsieur Hinter.

Nous allons maintenant passer aux questions. Commençons, comme d'habitude, par l'opposition officielle, pour des questions de cinq minutes. Monsieur White.

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Merci, monsieur le président.

Ma première question s'adresse à vous, Nancy, parce que vous avez parlé de la liste électorale électronique et des problèmes qui vous semblent exister. Notamment, vous avez donné l'exemple d'une résidence pour étudiants où une douzaine d'entre eux ont reçu des cartes alors qu'ils n'habitaient plus là. Vous avez dit qu'il vaudrait mieux procéder par recensement comme autrefois.

Pour ce qui est du recensement, ne pensez-vous pas qu'il soit également possible qu'il y ait là beaucoup de fraude? On n'a pas vraiment besoin de présenter une pièce d'identité. On n'a même pas besoin de prouver qu'on vit à l'endroit où l'on se trouve quand le recenseur passe. Ne reconnaissez-vous pas qu'il y a là aussi un problème en ce qui concerne le recensement?

Mme Nancy Riche: J'inviterai Pat à répondre.

M. Pat Kerwin: Oui, le recensement ordinaire peut poser certains problèmes, mais les problèmes en Ontario étaient très aigus. Littéralement, on ne pouvait même pas retirer le nom de personne qui n'était plus là parce que selon la loi cette personne doit demander à ce qu'on retire son nom de la liste et que cette personne n'était plus là.

D'autres témoins qui ont comparu ici ont dit qu'il n'y aura pas de problème. Nous estimons qu'étant donné que la période électorale est relativement courte, nous devrions aller sur place nous assurer qu'il n'y a pas de problème plutôt que d'essayer de savoir dans les trois dernières semaines précédant les élections si tel immeuble ou tel ensemble immobilier compte beaucoup de résidents.

Dans le cas mentionné, il y avait 12 noms sur la liste et absolument aucune de ces personnes ne vivait encore là. Alors le responsable de cet immeuble aurait facilement pu prendre les 12 cartes et s'assurer que ses amis les utilisaient pour aller voter, étant donné que la personne au bureau de vote les aurait utilisées pour voter.

Ce que nous voulons, c'est que les listes fonctionnent bien et je ne suis pas convaincu que ce soit le cas.

M. Ted White: Je vous demanderais instamment, comme je l'ai demandé à d'autres groupes qui sont venus nous exposer leurs inquiétudes au sujet de la liste électorale électronique, de vous adresser à Jean-Pierre Kingsley et à lui en parler. Il sait qu'il y a eu des problèmes en Ontario. Je pense qu'il a confiance qu'on a réglé ces problèmes. Il a le pouvoir discrétionnaire d'examiner les recensements quand il l'estime nécessaire, et c'est pourquoi je vous prierais vraiment de communiquer avec lui à ce propos.

• 1935

J'aimerais faire deux ou trois observations au sujet des exposés.

Au Congrès du Travail du Canada, je recommanderais fortement de tenir compte de l'autre témoignage où il a été question des dépenses des tiers partis. De l'avis du Parti réformiste, les élections sont pour les électeurs et non pas pour les partis.

Je sais que c'est une vision légèrement différente de celle du gouvernement. Nous n'estimons pas en fait qu'il doit y avoir la moindre restriction à la publicité des tiers partis. Nous ne craignons pas que le Congrès du Travail du Canada dépense beaucoup d'argent pour tenter de nous battre. Nous croyons en fait que si dans cet endroit on respectait la volonté des électeurs et que les députés votaient comme le leur indiquent leurs électeurs, vous n'auriez plus rien à faire ici parce que nous ferions ce que les gens souhaitent et qu'il n'y aurait pas de dépenses de tiers partis.

Je vous invite à examiner la question sous un angle légèrement différent. Si les élections sont là pour les électeurs plutôt que pour les partis, il doit y avoir des dépenses engagées par les tiers partis, car le gouvernement dispose d'un avantage considérable. Non seulement sait-il la date où il déclenchera des élections, mais comme l'a bien dit M. Robinson, il peut facilement dépenser 20 millions de dollars, ce qui lui donne un avantage considérable sur les petits partis et les particuliers qui veulent être candidats.

C'est pourquoi nous sommes d'accord avec vous sur des éléments comme le dépôt des candidats, qui à notre avis devrait être moindre, et l'assouplissement des règles concernant les petits partis.

Quand on pense par exemple à la règle des 12 candidats, ou à une règle des 50 candidats, nous estimons que le nom du parti devrait figurer sur le bulletin de vote dans l'intérêt des électeurs et non pas du parti. Je sais que le gouvernement estime que c'est plutôt avantageux pour le parti, mais nous estimons que c'est plutôt avantageux pour les électeurs, qui peuvent ainsi voir pour qui ils votent.

Il y a de nombreux points sur lesquels nous sommes d'accord, et je pense que si nous pouvions en discuter un peu plus, vous pourriez être d'accord en ce qui concerne les dépenses des tiers partis.

Mme Nancy Riche: Je vais être bien franche: nous ne le serions pas.

Ce n'est pas parce que je comparais ici entre la Canadian Taxpayers Federation et la National Firearms Association, avec son magasine Point Blank, que nous allons changer d'avis. Je suis en désaccord total avec vous.

Les élections sont là pour les électeurs. C'est vrai. Mais les gens qui dirigent nos partis et le groupe des armes à feu et le groupe des contribuables peuvent dépenser des millions au cours d'une campagne électorale pour amener les gens à changer d'opinion, pour décider ce qu'ils vont faire. Puis, au moment des élections, le Parti réformiste peut porter leur étendard. Vous savez, si les Réformistes ont le courage de leurs opinions et acceptent la possession d'armes à feu partout au pays, qu'ils viennent le dire et alors le lobby des armes à feu aura un parti pour le représenter.

Nous au Congrès nous ne dépensons pas des millions de dollars en publicité de tiers. Non, nous ne le faisons pas. Nous donnons de l'argent au parti que nous appuyons.

J'encouragerais le lobby des armes à feu à financer le Parti réformiste. Qui d'autre? Vous pouvez donner de l'argent aux Réformistes. Peut-être formerez vous un gouvernement, vous monsieur à ma droite et vous monsieur à ma gauche.

Mais vous le donnez au parti. Bien sûr les partis sont pour les électeurs, mais chaque électeur ne se présente pas. On décide de devenir candidat pour un parti donné.

Je n'élis pas l'association des armes à feu. Je vote pour un parti. Je ne vais pas voter pour le parti qui appuie les principes que défend cette organisation.

M. Jim Hinter: Encore un peu plus et je vais me sentir blessé.

Mme Nancy Riche: C'est la vie. Il ne va pas voter pour mon parti non plus. C'est ainsi. C'est donnant-donnant. Nous annulons mutuellement nos bulletins de vote.

Mais je ne serai pas d'accord avec vous en ce qui concerne les tiers partis.

M. Gar Knustson (Elgin—Middlesex—London, Lib.): Je croyais que le Parti néo-démocrate s'opposait à notre Loi sur le contrôle des armes à feu.

Mme Nancy Riche: Je ne parle pas au nom du parti. Vous n'avez pas lu mon article dans le Ottawa Citizen à ce moment-là et j'étais présidente du parti.

M. Ted White: Monsieur le président, puis-je céder une partie de mon temps de parole à mon collègue.

Le président: Non, c'est terminé. Vous avez bel et bien eu cinq minutes—presque six.

Nous allons donner la parole à M. Bergeron pour un deuxième tour.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): J'ai pris bonne note des différentes présentations, notamment de celle du CTC, concernant le vote électronique. Vous avez soulevé de nouvelles préoccupations qui s'ajoutent à celles que j'avais déjà concernant le vote électronique.

Par ailleurs, je me surprends toujours d'entendre les différentes formations en faveur de l'abolition de quelque plafond que ce soit pour les dépenses des tiers invoquer les jugements des tribunaux, alors que les jugements des tribunaux reconnaissent eux-mêmes qu'il y a nécessité d'imposer ce plafond de dépenses pour les tiers. On va même jusqu'à dire que ce plafond de dépenses devra être en deçà de celui des partis politiques.

Dans ce sens, j'accueille également avec une certaine ouverture les recommandations du CTC sur le plafonnement des dépenses des tiers, d'autant plus que je retrouve là l'esprit de la Loi sur le financement populaire des partis politiques au Québec, qui prévoit que seuls les individus pourront éventuellement investir dans une campagne électorale.

• 1940

J'étais plutôt ouvert à l'idée de permettre aux tiers de participer à la campagne, mais en limitant de façon très claire et très précise le plafond des dépenses permises, mais j'accueille avec beaucoup d'ouverture l'idée de ne permettre aucune dépenses des tiers et de permettre simplement à des individus de participer au processus électoral, en vertu des mêmes motifs qui ont amené le Québec à adopter la Loi sur le financement populaire des partis politiques.

Cela m'amène à la question que j'aimerais vous poser. Vous indiquez, dans le cadre de ce débat sur le financement populaire des partis politiques, que, d'une part, vous appuyez le plafonnement des contributions aux partis politiques et que, d'autre part, vous croyez que seuls les individus devraient contribuer au financement des partis politiques. Vous dites que le CTC est prêt à entamer un dialogue public sur la possibilité de se diriger vers un régime qui comporte des éléments du modèle québécois. Vous signalez que vos membres du Québec sont assez satisfaits de la loi de leur province, mais qu'à l'extérieur du Québec, on souhaite une participation plus directe.

J'aimerais qu'on définisse plus clairement ce qu'on entend par une participation plus directe ainsi que par un régime qui comporterait certains éléments du modèle québécois au chapitre des contributions aux partis politiques.

[Traduction]

M. Pat Kerwin: Pour ce qui est d'une participation plus directe, à l'extérieur du Québec, un certain nombre de nos syndicats locaux sont effectivement affiliés directement à un parti; ils lui versent des droits d'adhésion, contrairement à ce qui se fait au Québec. C'est là une participation beaucoup plus directe. On envoie des délégués aux congrès à titre de syndicats locaux affiliés aux partis, par exemple. Ce modèle hors-Québec est suivi à différents endroits. C'est le meilleur exemple de la participation plus directe.

Nous tenons à entamer ces discussions très soigneusement, parce que l'une des préoccupations que nous avons tient au fait que le gouvernement, le Parlement, pourrait adopter une loi qui semble bien bonne en théorie, mais j'estime qu'aussitôt tous les partis politiques vont alors chercher le moyen de contourner la loi, si elle est trop stricte ou trop intransigeante. Je travaille dans le milieu politique depuis longtemps, et je sais que les partis disent toujours avoir besoin de dépenser. Ils s'adressent à ceux qui peuvent recueillir des fonds.

Nous devons donc nous montrer très prudents. C'est pourquoi nous évoquons dans un autre passage de notre mémoire la possibilité d'un soutien public des partis, peut-être selon le modèle du Nouveau-Brunswick, où l'on donne tant par voix que le parti a obtenue. Nous devons agir sans précipitation et ne pas nous contenter de dire qu'il est bon que personne d'autre ne verse de contributions sauf les particuliers, pour s'apercevoir ensuite que des politiciens viennent dire «Je dois me faire réélire. Comment vais-je m'y prendre?» Puis, donc, si on le fait en douce, personne ne s'en apercevra. Or, en Italie c'est ce qu'ils ont fait et ils se trouvent en prison.

Mme Nancy Riche: J'aimerais prendre la parole.

Il est bien certain que le CTC verse beaucoup d'argent à notre parti politique, le Nouveau Parti démocratique, selon les règles de la loi, et qu'il y détache des gens ou fournit d'autres moyens. Mais cela est encore très loin des contributions que des sociétés versent aux autres partis—on est très loin du compte. Nous ne leur arrivons pas à la cheville. Sur la scène fédérale, pour ce qui est du Nouveau Parti démocratique, nous n'acceptons pas de contributions des sociétés; nous n'acceptons que des contributions de particuliers et du monde syndical. Et nous épargnons nos fonds pendant la période électorale pour effectivement donner au parti.

Il est vraiment temps qu'on examine le vaste appui public aux élections. Je ne pense pas que nous nous rapprochions le moins du monde des États-Unis, mais nous pourrions nous orienter dans cette voie. Si nous permettions que la publicité des tiers partis soit sans limite, comme M. White et les deux messieurs qui comparaissent ici ce soir le demandent, nous nous dirigerions vers une société où l'on pourrait acheter des voix. Ce n'est pas ce que nous visons. Ce n'est pas ainsi que nous pensons au Canada.

Je peux me montrer aussi radicale que vous l'êtes, messieurs, en ce qui concerne la publicité des tiers partis, alors vous n'avez pas à hocher la tête. J'ai entendu ce soir des observations outrées sur la publicité des tiers partis, toutes reposant sur le fait que malheureusement, pour une raison ou pour une autre, nous ne faisons pas confiance aux candidats ou aux partis qui se présentent. D'une façon ou d'une autre, nous, le groupe des armes à feu ou le groupe des contribuables, nous devons nous organiser et dépenser des millions de dollars, parce que les partis et les candidats...

Écoutez, si vous voulez devenir député, présentez-vous. Formez le Parti de la fédération des contribuables, formez le Parti des armes à feu, et soyez du nombre, comme tous les gens qui sont assis ici et qui ont eu le cran et le courage de se présenter.

Des voix: Bravo!

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Madame Riche, je réitère que je suis tout à fait d'accord avec vous quant à la question de la limitation des contributions des tierces parties. J'estime, un peu comme l'indique le jugement de la cour, que si on doit, pour le bien de notre régime, établir une plafond de dépenses pour les partis politiques qui sont directement engagés dans le processus ainsi que pour les candidats et candidates qui mettent leur tête sur le billot, on devrait à plus forte raison imposer à celles et ceux qui n'ont aucune imputabilité devant la population un plafond de dépenses qui soit en deçà de celui des partis et des candidats.

• 1945

Je vous ramène à la question que je vous ai posée. Vous me dites que le CTC est prêt à entamer un dialogue public sur la possibilité de se diriger vers un régime qui comporte des éléments du modèle québécois. J'aimerais que vous soyez plus explicite au sujet de ces éléments du modèle québécois que vous souhaitez intégrer au modèle canadien.

[Traduction]

Mme Nancy Riche: Nous avons notre propre perspective. Bien sûr, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec nous dit constamment que nous avons tort de nous lier à un parti politique donné, et qu'à chacune des élections nous devrions examiner où se situe chaque parti.

L'autre point, ce sont les contributions. On impose une limite aux contributions des particuliers. Elles ne peuvent venir que de résidents du Québec, et il s'agit d'individus, et non de sociétés et d'organisations. Encore là, certains de nos membres disent que comme nous donnons en tant qu'organisation, cela accaparerait beaucoup d'argent. Je pense que cela force les partis à aller s'adresser aux particuliers pour les convaincre de contribuer. On fait davantage appel aux particuliers, à l'électeur qui vote. Ils paient de leur poche et appuient leur parti.

Je rappelle ce que Pat a dit: il y a toujours des échappatoires. Si vous dites que c'est une contribution individuelle de 1 000 $, est-ce qu'une société ne verse pas 1 000 $ à chacun de ses employés pour qu'il le verse au parti de leur choix. Je ne sais pas. J'ignore si on a évalué le modèle québécois sous cet angle. Mais je suis d'accord.

Nous n'en sommes pas là. Je pense qu'on pourra peut-être en discuter au Manitoba dans un avenir rapproché. Le premier ministre en a déjà parlé auparavant.

Cela nous rapproche de notre objectif. L'État devrait financer les élections. J'ai employé le mot «État» parce que je savais que le Parti réformiste aimerait l'entendre dire.

Des voix: Oh, oh!

Mme Nancy Riche: Je pense sincèrement que les élections devraient être financées par les fonds publics. Je le crois.

Le président: Merci, monsieur Bergeron.

Madame Parrish, vous avez cinq minutes.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: J'aimerais simplement faire un commentaire.

[Traduction]

Le président: Je regrette; nous en sommes à 8 minutes et 28 secondes. Je crois que nous avons été assez généreux.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Je voudrais simplement préciser qu'à la page 5 de la version française du mémoire du CTC, on fait allusion au scrutateur, alors que je crois qu'on devrait plutôt faire allusion au directeur du scrutin. Je voulais simplement apporter cette précision, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Merci.

Madame Parrish.

Mme Carolyn Parrish: Tant que je ne suis pas complètement exclus, je vais céder ma place à M. Knutson.

Le président: Nous vous accorderons du temps plus tard; c'est bien.

Mme Carolyn Parrish: Pas beaucoup plus tard, bientôt.

Le président: Monsieur Knutson, vous avez cinq minutes.

M. Gar Knutson: Merci.

Mme Riche préférerait que toutes les élections soient financées par des fonds publics. Monsieur Robinson, je crois que vous préféreriez que les élections soient entièrement financées par des fonds privés, sans remboursement d'impôt ni aucune autre forme d'allégement fiscal.

Mme Carolyn Parrish: Et ils posséderont la terre.

M. Walter Robinson: Outre le commentaire éloquent de valeur de Mme Parrish, auquel je reviendrai dans un instant, monsieur Knutson...

M. Gar Knutson: Non, ne les comptez pas sur mon temps de parole!

Des voix: Oh, oh!

M. Walter Robinson: Il ne fait aucun doute que la démocratie est un exercice douloureux et fastidieux et que l'État a pour rôle de garantir l'infrastructure du processus électoral, mais c'est un exercice nécessaire, compte tenu du temps qui nous est imparti. Il ne fait aucun doute que l'État a un rôle dans le financement de l'infrastructure des élections.

M. Gar Knutson: Ce n'était qu'une question préliminaire, alors...

M. Walter Robinson: Permettez-moi de poursuivre, si je peux, étant donné que c'est moi qui avait la parole.

Le fait est, comme nous l'avons dit dans notre exposé, que les remboursements servent à maintenir en place les cinq partis établis. Il n'encourage pas la participation d'autres partis. L'expérience des deux dernières élections et des élections précédentes le montre clairement.

M. Gar Knutson: Ce que je voulais dire, c'est que s'il n'y avait pas de remboursement d'impôt, proposeriez-vous qu'il n'y ait pas de limite aux dépenses des campagnes électorales? Pensez-vous qu'il devrait y avoir des limites à certaines dépenses?

M. Walter Robinson: En principe, non, je ne crois pas qu'il y ait lieu d'imposer des limites à quelques dépenses que ce soit, car comme nous l'avons constaté eu égard aux sommes dépensées, les électeurs ne sont pas stupides. Les campagnes menées rondement, les campagnes publicitaires de millions de dollars et le fait le CTC verse des millions ou des centaines de milliers de dollars à un parti politique sont des choses qu'il y a lieu de revoir. Elles ne sont pas claires et irréprochables dans ce contexte.

J'aimerais bien avoir les fonds dont dispose le CTC pour les dépenser lors des campagnes électorales. Ce serait très intéressant.

M. Gar Knutson: Vous ne pensez donc pas qu'il y ait lieu d'imposer la moindre limite?

M. Walter Robinson: S'il doit y en avoir, il faut les appliquer également.

Voici un exemple. Dans une circonscription torontoise, il pourrait y avoir des candidats de quatre grands partis. Il y a là une base militaire. Je tiens à répondre à votre question, parce qu'il est important d'expliquer ce point. Il pourrait y avoir là quatre candidats qui appuieraient tous la présence d'armes nucléaires à la base militaire, toutefois l'association communautaire locale n'en voudrait pas. C'est un exemple hypothétique, mais la chose pourrait se produire. L'association communautaire locale, selon la loi, ne peut dépenser plus de 3 000 $, ce qui peut lui permettre d'acheter quatre annonces d'un quart de page ou un tirage de 15 000 dépliants à distribuer dans une circonscription comptant peut-être 100 000 électeurs, ou quatre politiques, mis ensemble, pourraient dépenser plus de 320 000 $.

• 1950

On ne joue pas à égalité. Si l'on applique des limites aux tiers partis, je vous dirai d'accord, si vous, la fédération des contribuables, voulez agir dans cette circonscription, voici la limite de dépenses que chacun des autres candidats est tenu de respecter.

M. Gar Knutson: Ce que je vous demande c'est si vous voulez ou non qu'il y ait des limites?

M. Walter Robinson: Si nous vivions dans un monde idéal, nous ne voudrions pas de limites, mais nous croyons savoir que vous et le processus électoral, allez probablement en imposer, et nous estimons donc qu'elles devraient être appliquées également.

M. Gar Knutson: Très bien.

Il est bien certain, comme je le disais dans mon exposé, que dans un pays comme le nôtre, qui compte 19 millions d'électeurs, un pays qui par sa superficie arrive au second rang des plus grands pays du monde, il faut dépenser pour communiquer avec les gens et faire passer son message.

A-t-on pu établir que l'argent dépensé a une incidence sur la façon dont les gens votent?

M. Walter Robinson: Pas au niveau provincial ni national. Nous venons tout juste de vous en citer un exemple. Nous avons fait des recherches dans des études universitaires pour voir si des dépenses de tel montant, dans une société ouverte et démocratique—et ne vous méprenez pas, car ce projet de loi contient d'excellentes dispositions—n'avaient pas d'incidence sur les résultats.

M. Gar Knutson: Par exemple, lors des dernières élections, quand on dépensait de l'argent dans les circonscriptions de Halifax pour dire aux gens de ne pas voter pour Geoff Regan, c'était en pensant qu'on allait ainsi influencer aucun des électeurs.

M. Walter Robinson: Nous n'avons pas dépensé d'argent au cours des dernières élections dans une circonscription de Halifax. Vous devez vous tromper avec une autre organisation, je tenais à le préciser.

M. Gar Knutson: C'était à propos de la pension. N'est-ce-pas votre organisation qui a fait paraître des annonces...

M. Walter Robinson: Non, ce n'était pas nous. Nous n'avons pas fait paraître la moindre annonce au cours de la dernière campagne électorale fédérale, car nous n'avions pas de directeur fédéral.

Mme Nancy Riche: C'était le National Citizens' Coalition.

M. Gar Knutson: Je vois.

Permettez-moi alors de vous demander...

M. Walter Robinson: Cela dit, la capacité qu'on a d'inscrire un point à l'ordre du jour, de communiquer un point de vue, relève de la liberté d'expression qui est garantie dans la Constitution. À moins que vous puissiez me démontrer que l'exercice de la liberté d'expression va à l'encontre de la liberté d'expression de quelqu'un d'autre qui elle aussi est garantie en vertu de la Charte—la propagande haineuse, par exemple, ou quelque chose de ce genre—cette liberté ne doit pas être restreinte.

M. Gar Knutson: C'est un point de vue qui se défend.

Permettez-moi de revenir aux dépenses, si j'ai encore le temps pour une dernière question.

S'il n'y a pas de limites de dépenses, et que Mme Dole aux États-Unis dit qu'elle se retire de la course à la présidence des États-Unis parce qu'elle n'a pas suffisamment d'argent pour faire campagne—non pas parce qu'elle pense que ses idées ne sont pas assez bonnes ou qu'elle n'a pas vraiment quelque chose à offrir—est-ce que cela ne vous trouble pas de penser que la même chose pourrait finir par se produire chez nous s'il n'y a pas de limites de dépenses?

M. Walter Robinson: Absolument pas, parce que si c'était le cas, le Bloc québécois et le Parti réformiste ne siégeraient pas au Parlement aujourd'hui. Ils diraient qu'étant donné que tout l'argent est entre les mains des partis établis, nous ne sommes pas en mesure de faire connaître nos idées et de convaincre la population de leur mérite. Cet argument est trompeur.

M. Gar Knutson: Écoutez, le Parti réformiste et le Bloc ont fait campagne dans un système qui prévoyait des limites des dépenses.

M. Walter Robinson: Oui, effectivement, mais ils n'avaient pas d'argent, ils n'avaient aucun avantage qui se rattache à l'exercice d'un mandat, et aucun temps d'antenne gratuit dont parle Mme Riche, ce qui est un aspect fondamentalement choquant de la Loi sur les élections. Nous croyons que si vous...

Les campagnes électorales servent à communiquer des idées. Les gens seront convaincus de vos idées si vous arrivez à les faire connaître.

Il ne fait aucun doute, comme je l'ai dit dans mon exposé, que dans un pays comme le nôtre où 19 millions d'électeurs sont dispersés sur la deuxième masse continentale en importance d'un pays de la planète, vous devez dépenser de l'argent pour communiquer avec la population, simplement pour faire connaître vos idées. Mais ici encore, tout semble indiquer... Cela va en fait à l'encontre de l'opinion selon laquelle plus il y a d'argent, plus on influence les résultats. En fait, ce n'est pas en dépensant plus d'argent qu'on achète plus de sièges, et M. Herron a d'ailleurs ri lorsque j'ai raconté l'histoire du Parti conservateur lors des élections de 1993. La population n'était pas contre les idées qu'il présentait mais les idées qu'il présentait n'ont pas convaincu la population. Ce sont les idées de votre parti qui l'ont convaincue.

Le président: Je vous remercie. Je ne crois pas que M. Herron ait vraiment ri. Quoiqu'il en soit, nous accorderons la parole à M. Herron pendant cinq minutes, et il sera ensuite suivi de Mme Wasylycia-Leis.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Je tiens à remercier les témoins des exposés qu'ils nous ont présentés.

Ce que nous tachons de faire, en fin de compte, c'est d'étoffer un projet de loi dont certains aspects donnent lieu à des opinions divergentes.

L'un des aspects qui a suscité un important débat, c'est les contributions externes ou de tiers. J'aimerais aborder le débat sur les armes à feu, l'ancien projet de loi C-68, maintenant la Loi sur les armes à feu.

• 1955

Au cours d'une campagne, les préoccupations des gens varient. Certains peuvent être préoccupés par l'enseignement postsecondaire, d'autres par l'ampleur de la dette nationale, comme dans mon cas. Il y a peut-être aussi certaines questions locales en ce qui concerne l'environnement, comme on le constate dans la circonscription de Windsor—St. Clair, au sujet des polluants transfrontaliers.

Donc, dans un cas comme celui de l'enregistrement des armes à feu, le débat semble avoir été axé sur le fait, surtout ici en Ontario, que si vous êtes contre l'enregistrement des armes à feu, alors vous êtes contre le contrôle des armes à feu et vous ne voulez pas empêcher l'utilisation criminelle des armes à feu.

Là où je veux en venir, c'est que sans la participation d'une tierce partie, comme dans votre cas, capable de dire que l'enregistrement d'armes d'épaule pour les chasseurs de chevreuil, de canards et les agriculteurs, est une mesure tout à fait différente des mesures qui empêcheraient l'utilisation criminelle des armes à feu—par exemple, des sanctions minimales sévères pour l'utilisation criminelle d'une arme à feu lors de la perpétration d'un crime—parce que les candidats risquent de ne pas s'y retrouver lorsqu'ils doivent s'occuper de neuf ou dix dossiers différents, et une question peut être laissée de côté.

Ma question est la suivante, si nous limitions les contributions de tiers, croyez-vous que cela vous empêcherait en fait de pouvoir parler d'un dossier qui vous tient à coeur?

M. Jim Hinter: Je pense que oui. Vous l'avez exprimé très clairement.

Au risque d'étonner mon collègue ici et probablement certains des autres membres du comité, notre organisation est en fait en train de proposer une série de mesures législatives concernant les armes à feu qui seraient plus énergiques que celles prévues par le projet de loi C-68 de M. Rock. Nous en avons remis des exemplaires à chaque député. Nous en avons aussi remis des exemplaires à chaque sénateur et aux membres des médias. J'ai un exemplaire à vous remettre que vous pourrez apporter chez vous.

Mme Nancy Riche: J'en veux un moi aussi.

M. Jim Hinter: Maintenant, pour ce qui est de faire connaître cette question, parce qu'elle a fait l'objet d'une certaine étude... Ce que je veux dire, c'est que si nous votions immédiatement et formellement en faveur ou non du contrôle des armes à feu, il vaudrait mieux que tout le monde ici présent lève la main.

Mme Nancy Riche: Dans quel sens, oui ou non?

M. Jim Hinter: Oui, que l'on devrait exercer le contrôle des armes à feu parce que c'est la chose logique à faire. Si vous êtes contre le contrôle des armes à feu, en fait ce que vous vous trouvez à dire c'est que vous voulez qu'un jeune de 14 ans aille à l'école, ivre, avec une arme chargée dans sa poche. L'issue pourrait être tragique.

Ce n'est absolument pas ce que nous voulons. Il est important de transmettre ce message, parce que c'est une question qui prête facilement à confusion.

Mme Nancy Riche: Excusez-moi, mais je dois intervenir. Puis-je intervenir? Nous sommes les témoins, après tout.

Écoutez, cette discussion semble se concentrer sur le fait que ces organisations n'ont l'occasion de faire connaître leur message que durant une campagne électorale. Or il n'existe absolument pas de restrictions. Vous pouvez dépenser des milliards de dollars. Personne, dans ce pays, ne vous privera de votre liberté d'expression d'ici aux prochaines élections.

C'est ce que nous faisons. Nous n'avons pas arrêté un instant notre campagne sur l'assurance-chômage et sur les agissements du gouvernement fédéral à cet égard. Nous n'arrêterons pas cette campagne. Nous n'attendrons pas que les prochaines élections soient déclenchées pour donner plein d'argent au NPD ou pour publier des annonces sur l'assurance-chômage.

Les occasions ne manquent pas. Vous essayez de laisser entendre que vos mains sont liées parce que vous ne pouvez pas dépenser des millions de dollars durant une campagne électorale. C'est totalement faux.

M. John Herron: Je suppose que le deuxième exemple que j'aimerais utiliser, monsieur le président, concerne les élections de 1988, et c'est un exemple qu'on a beaucoup cité. Bien des gens considéraient que ces élections pouvaient se traduire en deux mots—libre-échange.

C'est effectivement vrai, en grande partie. Vous vous souvenez sans doute des débats qui se sont déroulés. Le premier ministre de l'époque est sorti perdant du débat sur le libre-échange. Ce qui s'est passé, c'est que le public a commencé à suivre la question et à se demander qui est ce type, ce Turner? Qui sera son ministre des Finances, ou son ministre de la Santé? Au bout du compte, le public est arrivé à la conclusion que les Libéraux n'étaient pas prêts à gouverner non plus.

Si j'examine la situation qui existe en 99, je suis en mesure de dire que nos échanges commerciaux avec les Américains s'élèvent à l'heure actuelle à environ 260 milliards de dollars par année. Avant 1988, nos échanges commerciaux avec les Américains étaient d'environ 80 milliards de dollars par année.

• 2000

Mme Nancy Riche: S'agit-il d'aide à la publicité par des tiers?

M. John Herron: L'argument que je veux faire valoir, c'est qu'il est possible que la publicité faite par des tiers lors de cette campagne électorale a commencé à sensibiliser le public au débat même sur le commerce. Le Canada est un pays dynamique, axé sur les exportations. Si le pays était sorti perdant de ce débat, si nous avions voté contre le libre-échange à l'époque...

Mme Nancy Riche: Les Libéraux l'ont appuyé, une fois élus.

M. John Herron: Exactement.

Mme Nancy Riche: Cela ne fait aucune différence. Les deux partis l'ont appuyé.

M. John Herron: Mais le fait de le lier aux Américains aurait beaucoup nui à la compétitivité de notre pays.

Je suis en fait persuadé que les Canadiens sont capables de voter de façon éclairée. Je crois que le dynamisme que nous constatons dans notre économie à l'heure actuelle est attribuable en grande partie au fait qu'ils aient été exposés à l'intervention de tiers à cette époque. Sans le libre-échange, je ne crois pas que nous connaîtrions la période de croissance sans précédent qui existe aujourd'hui.

Je suppose que ma question s'adresse à la Fédération des contribuables canadiens. À votre avis, s'agit-il d'un exemple très net du rôle très positif qu'à joué l'intervention de tiers?

Mme Nancy Riche: Non, pas selon votre mémoire.

M. Walter Robinson: Non, je ne dirais pas qu'elle est positive ou négative. Les gens ont présenté une position et les Canadiens ont pris une décision en conséquence. Je tiens encore une fois à signaler que, oui, le gouvernement a peut-être été réélu, mais une majorité de Canadiens ont voté pour les deux partis qui s'opposaient à l'accord. Le fait est que l'intervention de tiers n'a pas influencé l'issue du vote.

[Français]

Permettez-moi de préciser à l'intention de M. Bergeron qu'en adoptant le modèle québécois et en diminuant le rôle de groupes comme le nôtre ou celui de la National Firearms Association, on accomplit exactement la même chose qu'au niveau des syndicats. Un contribuable devrait avoir le droit de donner de l'argent à un parti politique ou à un groupe qui joue un rôle bien défini face à un enjeu qui fait l'objet d'un débat public.

[Traduction]

Lorsque vous dites à la population qu'elle peut uniquement donner de l'argent aux partis politiques, vous êtes en train de dire aux citoyens qu'ils doivent appuyer un parti politique, qu'ils doivent donner de l'argent, que c'est la seule façon dont ils peuvent agir dans le cadre du processus démocratique. C'est faux, parce que les gens appuieront des groupes qui ne soutiennent pas des partis politiques, comme le nôtre. Je ne suis pas membre d'un parti politique, ni mon collègue, ni aucun membre de notre conseil d'administration. Mais les gens veulent défendre certaines questions ou s'opposer à certaines questions. C'est leur droit.

Une des choses qu'a répétées Mme Riche m'indispose, c'est lorsqu'elle dit «si cette question vous tient tant à coeur, alors portez-vous candidat.» C'est complètement ridicule. Depuis quand cet endroit est-il l'unique autorité? Depuis quand les 301 membres élus et les 108 membres non élus de l'autre endroit sont-ils les seuls à pouvoir orienter le discours public de ce pays?

Je défie tout député ici présent de dire que si un électeur n'est pas d'accord avec vous, il devrait inscrire son nom sur le bulletin de vote et faire campagne contre vous. Vous n'oseriez jamais dire pareille chose, et vous ne devriez jamais dire pareille chose à quelqu'un qui diffère d'opinion avec vous. Ils ont droit à leur opinion. Vous pouvez en débattre avec passion. Vous pouvez convenir de ne pas être d'accord. Mais dire que si vous n'êtes pas content, mettez votre nom sur un bulletin de vote... Les gens ont le droit de rester à l'écart du système parlementaire si c'est ce qu'ils veulent, et d'exercer leur droit de vote tel qu'il est garanti par la Constitution. Il est choquant de dire de pareilles choses, et je n'aimerais pas que de telles choses soient publiées dans les bulletins que les députés envoient aux électeurs de leur circonscription. Vos électeurs ne manqueraient pas de se retourner contre vous. C'est tout à fait choquant.

Mme Nancy Riche: Je suis désolée que vous soyez choqué. Pardonnez-moi, mais la publicité faite par des tiers pendant une campagne électorale consiste à participer au système parlementaire. Vous n'êtes pas à l'écart, donc ne prétendez pas que vous vous tenez à l'écart du système. C'est de la foutaise, et vous le savez.

Le président: D'accord, le niveau des invectives monte.

J'aimerais maintenant passer à Mme Wasylycia-Leis, mais je vais donner à M. Hinter l'occasion d'une dernière intervention avant que nous passions à la prochaine question.

M. Jim Hinter: Il me semble qu'une chose que l'on est en train de perdre de vue ici c'est que sur les millions de dollars qu'on nous accorde, et compte tenu du pouvoir que possède la National Firearms Association, je vous respecte autant que vous me respectez. Merci. Mais le fait est qu'on oublie que l'argent que nous utilisons provient des dollars après impôt dont nous font don de simples Canadiens qui choisissent de faire ce qu'ils font.

À titre d'exemple, nous venons de faire un sondage auprès de nos membres. Parmi ceux qui ont participé au sondage, 52 p. 100 appartiennent déjà à un parti politique fédéral, et 53 p. 100 d'entre eux se sont joints à notre organisation à des fins de sensibilisation publique et d'action politique. Ils utilisent leurs dollars après impôt, tandis que les partis politiques utilisent l'argent du contribuable efficacement, parce qu'un don est fait et qu'une remise est accordée.

• 2005

L'Association des armes à feu en Australie a en fait formé un parti politique. Il s'agit du Australia Shooters' Party, et il commence à faire sentir son influence.

Mme Nancy Riche: Je pensais que c'était des boissons.

M. Jim Hinter: Peut-être dans votre parti.

Le résultat essentiel, c'est que si les Canadiens dépensent des dollars après impôt et ne demandent rien au gouvernement—nous ne demandons pas un sou et nous ne recevons rien...

Mme Nancy Riche: Nous non plus.

M. Jim Hinter: ...c'est qu'il s'agit essentiellement d'une question de liberté, c'est-à-dire la liberté des Canadiens de dépenser leur argent comme bon leur semble.

Le président: Très bien, je vous remercie.

Nous passons maintenant à Mme Wasylycia-Leis pour un tour de cinq minutes.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Je vous remercie.

J'aimerais poursuivre sur cette question de publicité faite par des tiers parce que je ne comprends toujours pas exactement la position de l'Association des armes à feu et de l'Association des contribuables. Vous semblez dire tous deux que vous vous opposez à ce qu'on limite la publicité faite par des tiers parce que les électeurs ne sont pas stupides—je crois que ce sont les mots que vous avez utilisés—et que des sommes importantes n'influencent pas les électeurs. Selon ce raisonnement, il me semble qu'alors, vous seriez tout à fait contre la publicité faite par des tiers. Pourquoi auriez-vous besoin de ce genre de latitude pour dépenser ce dont vous avez besoin pour faire connaître votre point de vue? Si on se fie à ce raisonnement, ces associations ne manqueraient pas d'appuyer des restrictions et des limites totales imposées à la publicité par des tiers. C'est ma première question.

Mon autre question porte sur le même sujet, et elle s'adresse à Nancy, du Congrès du travail du Canada, qui, je pense, a très bien exprimé ce que cela signifie pour la démocratie, que cela permet de créer des règles du jeu équitables qui permettent à l'ensemble des Canadiens de participer au processus électoral, afin que les électeurs soient au coeur du processus et que notre système tienne réellement compte de notre système de partis et cherche à l'améliorer et non à le détruire.

Le projet de loi prévoit à l'heure actuelle uniquement des limites pour la publicité faite par des tiers. Il n'élimine pas, comme vous le réclamez, l'ensemble de la publicité faite par des tiers. Donc, la question que je vous pose, Nancy, c'est pouvons- nous nous accommoder de cette mesure. Est-elle réalisable ou risque-t-elle de créer d'énormes problèmes à long terme compte tenu de la façon dont elle est formulée?

M. Walter Robinson: Je vous remercie de votre question, madame Wawylycia-Leis.

Si je suis votre raisonnement jusqu'au bout—et c'est probablement le genre de raisonnement que l'on étudie en première année d'université lorsqu'on parle de la théorie du terrain glissant—alors personne ne devrait faire de publicité et nous devrions simplement déclencher les élections demain. Personne ne devrait faire de la publicité parce que cela n'influence pas le résultat des élections.

Mme Judy Wasylycia-Leis: C'est vous qui avez dit n'avoir pas besoin de faire de la publicité parce que vous n'essayez pas d'influencer les électeurs. Donc, expliquez-moi votre raisonnement.

M. Walter Robinson: Alors laissez-moi terminer.

Si vous allez suivre ce raisonnement jusqu'au bout, les parties ne devraient pas participer au processus non plus. Ce que nous voulons dire...

Mme Judy Wasylycia-Leis: Nous parlons de partis politiques qui sont au coeur du système électoral.

M. Walter Robinson: J'ai une opinion fondamentalement différente. Ce sont les électeurs qui sont au coeur du système électoral. C'est là où nous divergeons fondamentalement d'opinion.

Une voix: Bravo, bravo.

M. Walter Robinson: Je veux aussi aborder la question que vous avez posée à Nancy, parce qu'il s'agit d'une question extrêmement importante aussi. Mais le problème ici, c'est qu'il me paraît simpliste de demander pourquoi je suis contre les limites si je vous ai dit que la publicité n'a pas d'influence.

Je suis contre les limites, parce que pour faire connaître votre message, pour rendre l'information disponible afin que les électeurs puissent choisir entre tel et tel candidat, c'est comme aller au supermarché. Vous n'avez pas simplement une boîte de céréales, vous en avez toute une variété. L'emballage n'influence pas vraiment votre décision, mais cette décision vous appartient dans une société libre et démocratique. C'est un choix qui vous est garanti par la Constitution.

Pour aborder la question que vous avez posée à Nancy, parce qu'elle est extrêmement importante—M. Boudria, lorsqu'il a déposé son projet de loi en juin dernier avant la prorogation de la Chambre, a dit qu'il s'agissait d'un projet de loi, juste, accessible et transparent. J'ai ses commentaires ici.

Comment est-il juste qu'un parti politique puisse dépenser 62c. par électeur—avec 19,6 millions d'électeurs, il peut dépenser 12 millions de dollars à l'échelle nationale—et puisse alors dépenser, en moyenne, 60 000 $ de plus par circonscription, en fonction d'une moyenne de 65 000 électeurs par circonscription si vous prenez le chiffre de 19 millions divisé par 301? Vous obtenez 2,07 $ pour les 15 000 premiers électeurs, 1,04 $ pour les prochains 10 000 électeurs, et 52c. de plus pour chaque électeur successif par la suite. Comment ce parti politique peut-il alors dire que dans ce contexte, c'est-à-dire cette somme approximative de 25 millions de dollars que chaque parti politique peut dépenser, cela revient à environ 96c. le vote, puis on arrive aux limites de dépenses des tiers et on dit à un individu qu'il ne peut dépenser que 5c. par électeur? C'est ni plus ni moins que de la censure. Je ne peux pas acheter une annonce d'un quart de page dans un journal à Red Deer... Je ne parle pas de Toronto, de Vancouver ou de Montréal. Red Deer est une petite circonscription urbaine et rurale typique que l'on retrouve un peu partout dans notre pays et dans bien des circonscriptions de l'Est. Cette forme d'exclusion est ni plus ni moins que de la censure, et c'est inacceptable.

• 2010

M. Jim Hinter: J'aimerais aborder cette question.

Un des aspects qui a été abordé par certains des groupes précédents qui ont comparu devant vous concernent la date des élections. Les seules personnes au Canada qui peuvent savoir quand des élections auront lieu sont le premier ministre et le gouvernement en place. Les organisations en vertu des dispositions concernant les dépenses faites par des tiers... Les médias vont faire des suppositions et les partis de l'opposition vont faire de la recherche en espérant que leurs calculs sont bons. Nous faisons de la recherche pour déterminer quand des élections auront lieu. Mais le fait est que vous pourriez être en train de faire quelque chose, des élections pourraient être déclenchées et, bingo, vous pourriez vous trouvez à avoir dépassé les limites, même si ce n'était pas votre intention. C'est assez simple. Ce que je veux dire, c'est que vous pourriez être en train de faire une campagne de sensibilisation sur une question en particulier qui pourrait être considérée comme visée par cette disposition.

Donc sans avoir une structure quelconque, même si vous vouliez envisager des limites de dépenses durant une campagne, il faudrait alors demander qu'on précise la date des élections. C'est une question qu'il faudrait peut-être examiner car j'estime que c'est un aspect important du processus démocratique.

Nous avons eu un cas lors des élections par exemple au Manitoba où l'inondation a touché une partie de la circonscription. Je voyage beaucoup dans de petites localités de l'ouest du Canada qui ne se trouvent probablement même pas sur la carte, en fait la plupart de ces localités ne s'y trouvent pas—de petites localités comme Senlak en Saskatchewan qui n'indiquent pas le chiffre exact de leur population de manière à pouvoir avoir une école, ou Morse—des localités qui comptent très peu de gens. J'ai voyagé partout dans les régions rurales de la Saskatchewan, et lorsque j'arrive à Ottawa, on me demande s'il y a vraiment une crise agricole. De toute évidence, le message n'est pas transmis.

Il faut donc qu'il y ait un processus de sensibilisation pour permettre aux électeurs de faire des choix éclairés. Si vous êtes préoccupés par... Si nous nous trompons, si nous nous trompons complètement et si Walter se trompe, ou que tout autre tierce partie se trompe, nous irons nous frapper la tête contre le mur. Peut-être nous sentirons-nous bien pendant un instant. Mais si nous avons raison, ne faudrait-il pas, dans une société démocratique, faire connaître cette opinion fondée?

Et enfin, c'est que dans ce genre de processus, lorsque vous commencez par établir une limite... Malheureusement avec les gouvernements, il semble que lorsque vous avez une limite et que vous commencez à éliminer un droit, tous les autres droits risquent d'y passer par la suite.

À l'heure actuelle, nous avons un certain nombre de problèmes de ce genre dans notre pays, et en voici un. Si vous n'utilisez pas les services de la bonne compagnie d'antennes parabolique, la GRC peut la saisir. Vous pouvez obtenir une amende de 5 000 $ si votre signal ne provient pas de la bonne compagnie. C'est un problème qui est étroitement lié à ce genre de situations. Mais il faudrait établir la date des élections car autrement vous pourriez vous trouver dans une situation où vous dépassez les limites.

Mme Nancy Riche: Vous avez demandé si nous pouvions accepter une limite de 150 000 $. Je pense qu'il faut faire très attention ici quand on parle de droits—qu'est-ce qui est un droit et qu'est- ce qui n'est pas un droit. En ce qui concerne la limite de 150 000 $, il n'est pas clair qu'il s'agit d'une limite de 150 000 $ pour chaque entreprise, ou entité définie en tant qu'organisation au pays, pour chaque section locale de la Fédération des contribuables canadiens, selon la définition d'organisation. Car il ne s'agit plus de 150 000 $. C'est la raison pour laquelle cela nous préoccupe beaucoup parce que ce n'est pas clair. Nous nous trouvons alors à parler de millions de dollars.

Je commence vraiment à m'inquiéter lorsque d'une façon ou d'une autre, la capacité de dépenser des millions de dollars dans le cadre d'une campagne électorale devient un droit de la personne alors qu'en fait les droits de la personne dans notre pays sont beaucoup plus que cela. Le droit de quelqu'un de se coucher le soir avec l'estomac plein est beaucoup plus important que ce dont nous parlons ici. Donc, ne nous laissons pas emporter... Que je sache, la publicité faite par des tiers ne fait pas partie de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

• 2015

Cependant, il est vraiment important de déclarer qu'il ne s'agit pas d'une violation de la liberté d'expression, que chaque jour qui précède la campagne électorale, vous pouvez dépenser 150 000 $. Je soupçonne que vous avez dû dépenser pas mal d'argent dans toutes ces petites localités rurales du Canada pour qu'elles appuient votre position concernant le contrôle des armes à feu. Et je n'y ai absolument aucune objection. Vous avez tout à fait le droit de le faire.

Puis, nous déclenchons des élections, et ce n'est plus la même chose. Appuyez le parti qui vous a appuyé. Versez-leur des contributions, dans les limites qui sont imposées. Et c'est tout à fait logique. Cela permet d'égaliser les choses.

M. Jim Hinter: Nancy, est-ce que le CTC serait prêt à accepter une limite de 150 000 $ dans le cas de contributions à un parti politique?

Mme Nancy Riche: Nous ne parlons pas de contributions à un parti politique. Nous avons nos limites concernant les contributions aux partis politiques. Elles sont prévues par la loi et nous les respectons. Ce n'est pas ce dont nous parlons. Nous parlons de la publicité faite par des tiers sans aucune limite de dépenses. Nous parlons d'un système électoral qui élit des gens qui appartiennent à des partis qui forment le Parlement. Nous appuyons ce système. Peut-être que vous, vous ne l'appuyez pas. Je n'en ai aucune idée, parce que ce soir, je n'ai pas entendu tellement de manifestations d'appui envers le gouvernement, les partis politiques ou quoi que ce soit d'autre. Tout ce dont j'ai entendu parler, c'est qu'on vous appuie pour que vous puissiez faire connaître votre message et que vous puissiez dépenser des millions de dollars à le faire. Je suis prête à appuyer le candidat qui représente un parti. C'est de ça qu'il s'agit.

Le président: Très bien...

Mme Nancy Riche: Désolée.

Le président: Il y a beaucoup de bonnes réponses. Simplement pour apporter une précision, les limites prévues par la loi s'appliquent aux dépenses, pas à la liberté d'expression—pour ce que ça vaut.

Mme Nancy Riche: Je n'ai jamais entendu parler d'une telle limite.

Le président: Par ailleurs, M. Robinson a indiqué plus tôt qu'une tierce partie n'aurait pas les moyens de mettre une annonce d'un quart de page dans un journal de Red Deer. La vie à cet endroit doit être extrêmement chère. La limite par circonscription proposée dans ce projet de loi est de 3 000 $. Bien sûr, ce que M. Robinson a fait aux fins de la discussion, c'est de diviser la limite nationale de 150 000 $ par le nombre de circonscriptions pour arriver au montant de 491 $. Même avec 490 $, je pourrais acheter une annonce d'assez bonne taille dans mon journal local à Scarborough. Mais nous comprenons son argument et ses calculs.

M. Walter Robinson: Pour l'information du comité, nous vous soumettrons une étude demain qui indique que c'est en fait inexact en ce qui concerne votre circonscription.

Le président: Qu'est-ce qui est inexact?

M. Walter Robinson: Que vous pouvez acheter une annonce d'un quart de page dans un quotidien à Scarborough. Nous vous remettrons cette information demain. Nous l'avons dans notre bureau.

Le président: Oui, je peux acheter une annonce d'un quart de page pour 491 $. Vous croyez que c'est impossible?

M. Walter Robinson: D'après nos recherches, c'est impossible, et nous avons téléphoné à des éditeurs de journaux un peu partout au pays.

Le président: Dans ce cas-ci, c'est donc l'inflation qui est l'ennemi.

M. Walter Robinson: Une annonce d'une page coûte 15 000 $.

Le président: Je vais maintenant donner la parole à M. Anders, pour cinq minutes.

Mme Carolyn Parrish: Monsieur le président, j'ai une question de procédure. Les partis d'opposition ont eu deux tours de questions.

Le président: Vous mettez en doute les calculs mathématiques du président. Monsieur Anders, cinq minutes, puis madame Parrish, cinq minutes.

Monsieur Anders, s'il vous plaît.

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Ma question s'adresse à mes amis du Congrès du travail du Canada. Encourageriez-vous les Témoins de Jéhovah, les Huttérites ou les Mennonites à présenter des candidats à des postes politiques s'ils sont insatisfaits de la position du gouvernement?

Mme Nancy Riche: Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, Rob, comme vous aimez bien le faire.

Ce que j'ai dit, c'est que les gens qui vont prendre part au processus politique—si leur religion le leur permet—peuvent présenter le candidat de leur choix ou choisir le parti qui leur plaît. Quand j'ai répondu à M. Robinson, je ne parlais pas d'un organisme religieux, mais plutôt de la Fédération des contribuables canadiens. Ce n'est pas tout à fait la même chose. Aucun des groupes religieux que vous avez mentionnés n'est venu ici réclamer de montants illimités pour faire de la publicité à titre de tiers. Il faut éviter la confusion.

M. Rob Anders: Mademoiselle Riche, je dirais que...

Mme Nancy Riche: Je préfère madame.

M. Rob Anders: Madame Riche, je ne crois pas que les Témoins de Jéhovah, les Huttérites ou les Mennonites voudraient se présenter aux élections, pas plus qu'ils estiment que le Parlement est la seule tribune au Canada ou qu'ils devraient être obligés d'en faire partie.

• 2020

En outre, je connais des Témoins de Jéhovah qui sont offensés de ce que l'argent de leurs impôts serve à financer le Parlement. J'estime qu'ils ont parfaitement le droit d'être exemptés de financer le Parlement par leurs impôts. C'est leur choix, cela devrait être leur choix; ils ne devraient pas être obligés de financer cette institution comme c'est présentement le cas. Certains voudraient qu'ils prennent une part encore plus grande aux frais, mais ce serait à mon avis une violation des droits de la personne.

Pour ce qui est de l'aide à un parti qui vous appuie, madame Riche, durant la campagne électorale qui a opposé Bob Rae et Mike Harris en Ontario, certains syndicats ont choisi de financer d'autres partis que le Nouveau parti démocratique, car ils estimaient que Bob Rae ne les représentait pas. Savez-vous combien les syndicats de l'Ontario ont dépensé collectivement, dans cette campagne, comparativement à ce qu'a dépensé le Nouveau parti démocratique pour la réélection de Bob Rae?

Mme Nancy Riche: Non.

M. Rob Anders: D'accord. Pourrait-on supposer que les syndicats de l'Ontario et d'autres partis du pays ont collectivement dépensé plus de 150 000 $ contre Bob Rae, dans cette élection?

Mme Nancy Riche: Je n'en sais rien.

M. Rob Anders: Vous savez probablement...

Mme Nancy Riche: Je ne m'occupe pas des campagnes électorales provinciales; je n'en sais franchement rien.

M. Rob Anders: Monsieur Kerwin, connaissez-vous la réponse à cette question?

M. Pat Kerwin: Par votre question, vous nous avez probablement regroupé toute la gamme des candidats. Je puis probablement dire que je connais la réponse, dans l'ensemble.

M. Rob Anders: On pourrait dire que les syndicats ontariens ont probablement dépensé collectivement plus de 150 000 $...

Mme Nancy Riche: Où voulez-vous en venir—que nous devrions à cause de cela exprimer une opinion différente ce soir?

M. Rob Anders: Non, ce que je dis, c'est que mêmes les syndicats, qui ont longtemps été affiliés au Nouveau parti démocratique, peuvent parfois s'opposer à un parti élu au Parlement.

M. Nancy Riche: Tout à fait.

M. Rob Anders: Qu'il s'agisse d'un syndicat ou d'un groupe tiers qui ne soit pas un parti politique, s'il peut arriver que le Congrès du travail du Canada, qu'un syndicat ou qu'un groupe de syndicats de l'Ontario s'opposent à un gouvernement néo-démocrate ou au Parti néo-démocrate, ce serait une erreur grave que d'accepter la limite qu'imposera ce projet de loi puisque dans ce cas, le Congrès du travail du Canada et les syndicats seront tenus de dépenser leur argent par le truchement du NPD.

Il arrivera sans doute que vous ne soyez pas d'accord avec un gouvernement néo-démocrate ou que vous vous opposiez à certaines mesures prises par ce parti. Il y aura également des cas où ces syndicats décideront, seuls ou avec d'autres, de dépenser plus de 150 000 $. Je ne comprends pas pourquoi vous voulez être directement associés au NPD, pieds et poings liés, tant qu'il y aura des syndicats au Canada, pour faire valoir vos arguments auprès des électeurs.

Mme Nancy Riche: Ce n'est pas la seule... Vous pouvez voir les choses sous cet angle. Vous pouvez vous y opposer. Effectivement, nous pouvons nous opposer à un gouvernement néo-démocrate, et dans ce cas, nous ferions ce dont nous avons discuté toute la soirée. Nous pourrions nous rallier à un autre parti—je ne parle pas au nom des syndicats de l'Ontario, mais en mon nom propre, c'est donc mon opinion et celle du CTC—ou nous pourrions ne rien faire du tout durant l'élection. Nous pourrions également créer un nouveau parti. Je peux vous assurer que c'est une solution qui a été débattue en long et en large en Ontario, qui l'est encore, car nous ne pensions pas que les autres partis étaient—mais à la Chambre, je ne suis pas certaine...

Il y a à la Chambre des communes certains partis que les syndicats, dans leur ensemble, en tant que quantité collective qui prend des décisions, n'appuieraient jamais, au grand jamais... vous savez de quoi je parle. Mais nous avons parlé de la possibilité de créer un nouveau parti, un parti travailliste.

Cela correspond exactement à ce que j'ai dit ce soir, c'est-à-dire que je m'oppose à la publicité par des tiers. Nous recommandons qu'aucune allocation ne soit prévue à cette fin. Dire qu'à un moment donné nous voudrions faire une telle publicité et que je pourrais être d'accord dans ce cas avec une mesure à laquelle je m'oppose, cela va tout à fait à l'encontre de notre position à ce sujet. Cela devrait être interdit à tout le monde, y compris aux syndicats.

Le président: Je ne peux vous laisser poser d'autres questions, puisque vous avez déjà eu six minutes et demie. Nous allons continuer notre tour de table, pour être juste envers nos autres collègues.

Madame Parrish, cinq minutes.

• 2025

Mme Carolyn Parrish: Je vais être aussi brève que possible.

Tout d'abord, avant même de poser ma question, je tiens à faire savoir que je préconise un abaissement des limites pour tout le monde. Lors des dernières élections, j'ai dépensé 16 000 $, il y a eu des affiches pendant sept jours et j'ai obtenu 68 p. 100 des voix. Dans ma ville, nous avons un maire qui n'a jamais fait de campagne électorale de sa vie après avoir été élue pour la première fois, il y a 25 ans. Elle recueille néanmoins 91 p. 100 des suffrages, même si elle n'a jamais distribué de brochure, jamais fait de commentaires, ni frappé à une seule porte.

Je suis donc d'accord avec vous, Nancy, si vous me permettez de vous appeler Nancy. Tous les autres partis disposent de 365 jours et de trois ou quatre ans entre les élections. Ils peuvent, s'ils le veulent, consacrer des millions de dollars à leur publicité.

Je veux pousser le raisonnement un peu plus loin. Les limites de dépenses dont nous parlons portent uniquement sur la publicité. Rien n'empêche ces groupes d'envoyer des armées de gens frapper aux portes. Ils peuvent faire tout ce qu'ils veulent. Cette limite ne s'applique qu'à la publicité.

Nos plafonds sont beaucoup plus rigoureux. Dans mes dépenses de campagne électorale, je dois tenir compte du coût des hot dogs que j'achète pour les gens qui distribuent mes brochures. Parlons-en donc un instant. Je ne peux pas dépenser de façon illimitée. Mon plafond est bien moins élevé que ce que bien des gens souhaiteraient consacrer à la publicité.

Pour ma part, je trouve que cette loi n'a rien de mauvais. Je le dis publiquement, je souhaiterais que tous les plafonds soient rabaissés. Je suis prête à pratiquer ce que je prêche.

Également, j'ai déjà été présidente d'un conseil scolaire. Des groupes tiers, comme nous les appelions, ou des groupes d'intérêt...

Je sais que vous vous préoccupez des impôts, mais c'est votre intérêt.

Vous vous préoccupez de la question des armes à feu.

[Note de la rédaction: Inaudible]

Mme Nancy Riche: ...

Mme Carolyn Parrish: Oui, je sais. Vous faites de l'excellent travail. Je suis presque tentée de me convertir au NPD, alors vous faites mieux de m'avoir à l'oeil.

Des voix: Oh, oh!

Mme Carolyn Parrish: De toute façon, voici ce qui me fascine au sujet des groupes d'intérêt. Comme tous les partis, nous devons établir une plate-forme électorale qui porte sur un large éventail d'enjeux. Les groupes d'intérêt peuvent ensuite venir s'attaquer à l'un des éléments de cette plate-forme. On peut avoir 60 groupes d'intérêt qui s'attaquent à 60 éléments. Chacun de ces groupes dépense pour cela des sommes énormes et nous tournons tous en rond.

Une voix: Et alors?

Mme Carolyn Parrish: Oui, et alors? Ce que je dis, c'est que c'est exactement ce que font ces groupes dans les 365 jours et les trois ans entre les élections.

M. Hinter a dit que, de toute façon, cela ne donne pas grand- chose de faire de la publicité. Je cite ce qu'il a dit.

Vous avez dit que les gens pouvaient voter non, et j'ai trouvé que c'était un peu gros. En votant non au référendum, les gens ont envoyé M. Mulroney sur les roses.

Ce qui m'inquiète, également, c'est que la vérité est souvent victime de la publicité. Aucun règlement n'exige de n'imprimer que des vérités. En exagérant un peu, on peut déclarer que le taux d'approbation des mesures de contrôle des armes à feu est de 81 p. 100, mais on peut rabaisser ce chiffre à 67 p. 100 au moyen de quelques demi-vérités.

J'avais une question à poser. Vous avez dit que votre organisation compte 100 000 membres au Canada. Je sais que votre organisation subit également une forte influence américaine par le truchement des associations de chasseurs et de pêcheurs et d'autres groupes qui sont plus ou moins affiliés à vous. Je connais quelqu'un qui travaille pour l'une de ces associations de pêcheurs. Cette association reçoit ses instructions, ses budgets et l'argent qu'elle dépense des États-Unis, où il y a une bien plus grande armée de gens.

Si l'on n'établissait pas de plafond à environ 3 000 $, qu'est-ce qui empêcherait des groupes américains d'infiltrer ces organisations et de s'attaquer à un tout petit pays comme le Canada, qui ne compte que 30 000 millions d'habitants—contre 300 millions de l'autre côté de la frontière?

M. Jim Hinter: Je suis content que vous posiez cette question.

Mme Carolyn Parrish: Je savais que cela vous ferait plaisir.

M. Jim Hinter: L'autre jour, nous avons fait une petite enquête auprès de nos membres. Parmi nos 100 000 membres au Canada, combien sont américains, d'après vous? Devinez.

Mme Carolyn Parrish: Non, non, non. Parlons des associations nord-américaines dans le domaine des armes à feu.

M. Jim Hinter: Notre organisation, celle que je connais le mieux, compte 28 membres américains. Il ne s'agit dans aucun des cas d'entreprises. Nous ne recevons aucun financement de quelque organisme américain que ce soit. En fait, de par ses statuts, la National Rifle Association des États-Unis ne peut avoir aucune activité à l'extérieur des États continentaux américains, d'Hawaii et de l'Alaska.

Mme Carolyn Parrish: D'accord, mais permettez-moi de vous interrompre, puisque l'Association des chasseurs et des pêcheurs des États-Unis est plus ou moins affiliée à celle du Canada. Cette association a les mêmes objectifs que vous, dans une certaine mesure. Qu'est-ce qui empêcherait l'association américaine de prendre une partie de ses fonds des États-Unis pour investir cet argent dans notre régime électoral?

M. Jim Hinter: Ce qui les en empêcherait, ce sont d'abord les statuts de la NRA aux États-Unis. Je suis membre de la NRA. J'en suis membre parce qu'elle produit un excellent magazine. Je n'ai aucun droit de vote sur les activités de la NRA, pas plus que je peux voter aux élections de cette organisation.

Mme Carolyn Parrish: Pouvez-vous lui donner de l'argent?

M. Jim Hinter: Je pourrais si je le voulais.

• 2030

Mme Carolyn Parrish: Et l'argent qui sert à payer vos magazines, n'est-il pas versé au fonds général de l'organisation, aux États-Unis?

M. Jim Hinter: L'abonnement est de 35 $ dollars canadiens par année. Pour cette somme, l'organisation doit expédier le magazine d'un bout à l'autre du pays. Compte tenu des coûts de publication, je doute qu'elle lui reste plus qu'un ou deux dollars.

Mme Carolyn Parrish: Mais vous parlez de votre organisme à vous. Je vous demande d'examiner les choses de façon plus générale. Croyez-vous qu'il soit possible pour des gens de même opinion, des Américains et des Canadiens, et des organismes de même opinion de tracer une ligne un peu floue entre la destination des fonds et qui...

M. Jim Hinter: Peut-être, et cela s'est déjà fait ailleurs. Rappelez-vous de l'époque Pearson; bon nombre de conseillers venaient des États-Unis pour consulter les gouvernements fédéraux, travailler avec eux et les aider à être élus.

Mme Carolyn Parrish: Vous estimez donc que c'est possible?

M. Jim Hinter: Tout est possible, absolument tout.

Mme Carolyn Parrish: Non, Walter, ne vous excitez pas. Je ne vous ai pas posé de question et je ne souhaite pas connaître votre réponse.

M. Jim Hinter: Pauvre Walter.

M. Walter Robinson: J'ai signalé au président que j'aimerais intervenir.

M. Jim Hinter: C'est le privilège de l'intervenant, je suppose.

Vous soulevez un argument intéressant, mais dans les faits, la plupart des organisations américaines... Par exemple, Ted Nugent des États-Unis applique à l'heure actuelle un vaste boycott du Canada. Il refuse de dépenser ne serait-ce qu'un dollar au Canada. Il ne veut pas venir y faire de tournée. C'est une ancienne vedette du rock-and-roll, et il dirige un groupe appelé Ted Nugent's United Sportsmen of America, je crois.

Mme Nancy Riche: Et il boycotte le Canada?

M. Jim Hinter: Oui.

Mme Carolyn Parrish: Ô rage, Ô désespoir!

Mme Nancy Riche: Oh, mon Dieu!

M. Jim Hinter: Mais je dois avouer qu'à cause de son boycott, bon nombre de pourvoyeurs canadiens sont privés de l'argent des touristes américains. Cela peut donc nuire. Dans bien des cas, peut-être, les effets sont plus négatifs qu'autre chose.

Mme Carolyn Parrish: Monsieur le président, permettez-moi de conclure mes remarques en disant que dans des activités antérieures, j'ai déjà été très inquiète de ce qu'on permettait à des groupes d'intérêt de recevoir de l'argent et de s'attaquer à certains éléments bien précis d'une plate-forme électorale en cent.

J'estime donc que c'est une bonne mesure législative. Je souhaiterais que tous les plafonds de dépenses soient rabaissés et, pour ma part, je pourrais très bien m'en tirer avec un plafond beaucoup plus faible. C'est un début. C'est une bonne mesure législative. Elle me pose quelques difficultés, mais pas dans ce domaine.

Je dois avouer que la discussion de ce soir a été très stimulante. Nos témoins ont fait de l'excellent travail. J'ai bien aimé cette discussion.

Le président: D'accord. D'autres ont sans doute encore des questions à poser. J'ai une question à poser à M. Robinson.

Vous préconisez l'abolition des plafonds de dépenses ou des plafonds pour les tiers qui équivalent à ceux imposés aux candidats. Dans le scénario suivant, et il s'agit d'une hypothèse, votre point de vue l'emporterait-il? Supposons que je me présente encore une fois aux élections dans ma circonscription. Supposons qu'au fil des ans, cinq ou six personnes bien nanties aient développé une forte aversion en mon endroit.

M. Rob Anders: C'est facile à imaginer.

Le président: Cela pourrait bien arriver, comme l'a fait remarquer M. Anders.

Supposons que je me présente aux prochaines élections comme candidat libéral et que chacune de ces personnes décide de lutter contre moi, et que chacune d'elles investit 50 000 $ en publicité, pour dire aux gens: «Ne votez pas pour M. Lee, c'est un idiot et nous pouvons le prouver», par exemple. Si ces six personnes investissent 50 000 $ chacune, qu'elles posent des affiches, qu'elles achètent des panneaux publicitaires, du temps d'onde à la radio, etc., cela signifie qu'elles investissent 300 000 $ contre moi dans cette course.

En ma qualité de candidat, je peux dépenser mes 50 000 $. Les candidats des autres partis dépenseront également leurs 50 000 $. Ne croyez-vous que c'est un peu injuste, pour un candidat? Cela pourrait arriver à n'importe lequel d'entre eux. Des groupes d'intérêt particulier, ou des tiers, comme nous les appelons, pourraient simplement conjuguer leurs efforts—ou dans ce cas-ci agir seuls—pour ou contre un candidat, alors que chaque candidat a son propre plafond de dépenses. Ne trouvez-vous pas que c'est un peu injuste?

M. Walter Robinson: C'est une très bonne question, monsieur le président, et je vous remercie de me l'avoir posée, car cela me donnera l'occasion de réagir à certaines des observations de Mme Parrish.

Des voix: Oh, oh!

• 2035

M. Walter Robinson: Pour répondre à votre question, si j'examine les déclarations de dépenses de la dernière élection, on a fini par vous rembourser un surplus. D'après Élections Canada, vous vous trouvez à la case départ doté d'au moins 29 000 $ dans le compte en banque de l'association de circonscription. Selon votre hypothèse, vous apprenez que ces cinq personnes bien nanties vous détestent—et après vous avoir rencontré ce soir, monsieur Lee, je dois dire que je n'ai rien contre vous—et veulent vous éliminer de la course.

Il s'agit d'un concours entre les idées et les enjeux, et vous aurez pour vous défendre les mesures pour lesquelles vous avez voté et les services que vous avez offerts à vos commettants. Vous avez également eu l'avantage, au cours des quatre dernières années, de pouvoir envoyer à vos commettants des bulletins parlementaires, aux frais des contribuables.

Pour répondre à l'une des remarques de Mme Parrish, rien n'empêche la publication de mensonges dans un bulletin parlementaire. En fait, dans un tel bulletin, vous informez vos commettants, comme vous en avez le droit et la responsabilité à titre de parlementaire, de toutes les bonnes choses que votre gouvernement a fait—je pourrais mettre en doute la véracité de ces renseignements—ainsi que la position que vous avez adoptée en votant sur certaines questions. Tous ces renseignements sont présentés de façon non partisane, car d'après le Règlement du Parlement, vous ne pouvez pas apposer le logo libéral sur ces bulletins. Il vous est interdit d'y écrire que Jean Chrétien est le meilleur premier ministre depuis l'invention du fil à couper le beurre et que vous détestez Preston Manning. C'est interdit.

Vous allez donc devoir vous présenter sous votre meilleur jour. Je prétends donc, monsieur Lee, que vous avez déjà une bonne longueur d'avance par rapport aux autres candidats, qui mènent peut-être contre vous une campagne bien financée.

Notre argument, c'est que les électeurs ne sont pas stupides. Ils l'ont prouvé lors du référendum de Charlottetown et à l'élection sur le libre-échange.

Votre scénario correspond exactement à la situation que vous avez mentionnée dans le cas de l'élection en Ontario, où les syndicats voulaient se débarrasser d'un ministre. Ils ont défait l'ancien ministre de l'Éducation, M. Johnson, dans la circonscription provinciale de Don Valley-Est ou Ouest, qui correspond à la circonscription fédérale. C'était davantage une réaction de colère. Comme vous le diront les Conservateurs, s'ils ont perdu l'élection dans cette circonscription, ce n'est pas à cause de la publicité.

En fin de compte, vous savez qu'il faut que ceux qui appuient se rendent aux urnes. Je ne suis donc pas d'accord avec votre hypothèse puisque vous pouvez vous fonder sur ce que vous avez fait par le passé, sur les avantages payés par les contribuables dont vous jouissez déjà comme député élu, des avantages qui, d'après certains experts en sciences politiques, comme M. Stanbury de l'Université de la Colombie-Britannique, entre autres, représentent un pourcentage de 3 à 6 p. 100. Je ne suis donc pas d'accord avec votre scénario.

Le président: Dans ce cas, si vous poussez la logique jusque là, cela s'appliquerait également à un candidat non élu, comme par exemple mon opposant du NPD, dans ma circonscription, qui n'était pas député et qui n'aurait donc pas profité de tous les avantages que vous avez mentionnés. Logiquement...

M. Walter Robinson: Cela montre précisément pourquoi il faut abolir les remboursements de contribuables.

Le président: Mais d'après votre raisonnement, les candidats qui ne sont pas déjà députés sont privés de tous ces avantages que vous avez mentionnés. Le candidat du NPD se retrouve donc tout seul, avec son plafond de 50 000 $, s'il peut obtenir cette somme, et six personnes qui en auraient les moyens pourraient faire contre lui une campagne de publicité et de salissage de 300 000 $. Que pensez-vous de ce scénario?

M. Walter Robinson: Le candidat néo-démocrate sera jugé selon sa valeur et celle de la plate-forme de son parti, et il devra faire face à la musique comme il le peut.

J'ajouterai que Mmes Riche et Parrish ont dit que notre groupe pouvait dépenser des millions avant une élection. C'est également le cas des gouvernements—et ils le font. Ils le font de façon insultante et arrogante. Si cela jouait sur les résultats, Mike Harris aurait dû obtenir 95 p. 100 des intentions de vote avant la dernière élection provinciale et Glen Clark, avant qu'il démissionne, aurait eu un taux de popularité d'environ 110 p. 100, car en Colombie-Britannique, comme M. White le sait bien, le directeur général des élections est presque considéré comme un ministre.

Ce que les candidats doivent faire valoir, ce sont leurs valeurs. Les campagnes se fondent sur des idées. C'est à vous de communiquer ces idées à la population, mais la population portera sur elles son propre jugement. Nous sommes convaincus que les électeurs jouissent de discernement. Ils l'ont également démontré dans d'autres parties du monde. Nous aimerions que le gouvernement et votre comité examinent ce qui se fait dans d'autres pays, en Nouvelle-Zélande, par exemple, où 35 partis figurent au bulletin de vote, ce qui n'empêche pas les gens de faire la distinction entre les candidats frivoles et les candidats sérieux. Quelles que soient les campagnes de publicité pour ou contre un candidat, cela ne change rien à la valeur du candidat.

Le président: D'accord. Merci.

Mme Nancy Riche: Je dois dire que le témoin présente un bon plaidoyer contre la publicité par des tiers.

Le président: Votre président a un petit problème. Généralement, le président ne pose pas lui-même beaucoup de questions avant que les députés n'aient épuisé les leurs. Je sais que M. Hinter a signalé qu'il avait quelque chose à dire. Dans ce cas, je vous demanderais d'être bref, car je souhaite donner la parole aux députés qui ont d'autres questions à poser.

M. Jim Hinter: Notre organisation a fait l'objet d'une campagne massive de publicité négative au sujet de la Loi sur le contrôle des armes à feu. Je dois dire que vous nous avez fait le plus grand bien en nous unissant.

• 2040

Le président: Quand vous dites «vous», de qui s'agit-il?

M. Jim Hinter: Du gouvernement de l'époque.

Le président: D'accord.

M. Jim Hinter: Si j'étais candidat à une élection et que six groupes importants décidaient de dépenser 50 000 $ chacun contre moi, je profiterais probablement de mon rôle de victime. Voyez ce qui en est aux États-Unis; on a constaté que les campagnes d'attaque ne donnent pas de résultats. Elles on en fait l'effet inverse.

Mme Nancy Riche: Je ne sais pas si Dukakis serait d'accord avec vous.

M. Jim Hinter: Il n'est pas ici pour le dire.

Mme Nancy Riche: Il n'est pas ici, mais il a été défait.

M. Jim Hinter: Vous avez parlé d'Elizabeth Dole.

Le président: Êtes-vous prêt à nous donner une garantie écrite à ce sujet?

M. Jim Hinter: À quel sujet?

Le président: Sur le fait que les campagnes négatives n'ont pas d'effet.

Mme Nancy Riche: Je déteste la publicité négative.

Le président: De toute façon, merci.

M. Jim Hinter: Mais les Canadiens aiment bien ce genre de publicité.

Mme Nancy Riche: Pas du tout.

Le président: Nous allons maintenant donner la parole à M. Kerwin, pour 20 secondes.

M. Pat Kerwin: M. Casey avait raison, lorsqu'il a dit qu'il pouvait bien ne pas y avoir de plafond pour les candidats s'il n'y en pas pour la publicité par des tiers.

On peut en voir les résultats aux États-Unis, dans ces énormes campagnes. En fait, les campagnes électorales sont beaucoup plus brèves au Canada. Cela me plaît. Aux États-Unis—la Commission Lortie a fait la comparaison—les candidats déjà en place jouissent d'un énorme avantage et peuvent obtenir beaucoup d'argent. À cause de ce système, les gens finissent par décrocher. Ils ne votent pas.

Le président: Je suis prêt à recevoir une seule question d'un député, n'importe lequel.

Mme Nancy Riche: Votre comité pourra-t-il continuer à siéger si tous les députés libéraux partent?

Une voix: Je me posais la même question.

M. Walter Robinson: C'est de cette façon que la Chambre fonctionne.

Le président: Je vais laisser M. White poser une question.

M. Ted White: Merci. Ma question s'adresse à Walter.

Je ne suis pas d'accord lorsque le gouvernement dit que l'arrêt Libman peut justifier cette mesure. Je ne crois pas que ce soit la bonne façon de procéder que de fonder une telle décision sur une affaire axée sur le référendum, au Québec. Je suis certain que si cette loi est adoptée, elle sera abolie ensuite.

Le gouvernement ne s'y est pas pris de la bonne façon. Il aurait mieux valu qu'il essaie de s'entendre avec des groupes comme le vôtre sur la position que vous devriez adopter. Permettez-moi d'examiner cette question. J'estime qu'inévitablement, les plafonds de dépenses des candidats seront abolis. Je ne dis pas que cette idée est bonne ou mauvaise, mais cela finira par se faire. Ces plafonds seront abolis progressivement et il n'y en aura plus. J'aurais préféré pressentir des groupes comme le vôtre pour voir comment nous pourrions gérer ces choses-là.

J'aimerais revenir à votre idée au sujet des dépenses dans les circonscriptions. Vous dites que chaque candidat peut dépenser 60 000 $, supposons, et que s'il y a cinq candidats, cela représente un total de 300 000 $. Croyez-vous que chaque groupe d'intérêt devrait pouvoir dépenser 300 000 $, ou que de ces groupes, le premier arrivé pourrait dépenser 300 000 $? La somme pourrait-elle être répartie? C'est une question très complexe. Comment cela serait-il organisé?

M. Walter Robinson: Je ne dis pas que s'il y a quatre candidats à Scarborough—Rouge River, par exemple, et que chacun d'entre eux a un plafond de 65 000 $, soit un total de 260 000 $, ils devraient pouvoir dépenser 360 000 $. Ce que je dis, c'est que si l'on veut imposer ces plafonds, il faudrait que nous soyons traités comme des candidats. N'oubliez pas que nos tribunaux ont déclaré que les plafonds peuvent être justifiés dans une certaine mesure. C'est l'opinion qu'ont exprimée les tribunaux. C'est pourquoi je demande à ce que nous soyons traités comme des candidats et qu'on nous accorde un plafond de 65 000 $, par exemple, dans la circonscription.

M. Ted White: Quel que soit le nombre de candidats, ou le nombre sera-t-il limité? C'est ce que je veux savoir. S'il y a déjà cinq candidats et que vous vous joignez au groupe avec vos 60 000 $, que Jim en fasse autant et que le CTC décide de se joindre à la bataille, également avec ses 60 000 $, est-ce que...

M. Walter Robinson: Il leur est permis de dépenser cette somme. Vous voulez savoir si le nombre des candidats pourrait être augmenté à l'infini?

M. Ted White: Pourra-t-on établir un plafond équivalent au montant dont dispose les cinq autres candidats, ou pourrait-il y avoir un nombre illimité de groupes d'intérêts qui puissent dépenser 60 000 $?

M. Walter Robinson: Le nombre des groupes d'intérêts, qu'il s'agisse de groupes d'intérêts spéciaux ou d'intérêts communs, seraient illimités.

M. Ted White: D'accord.

Le président: Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: À ce sujet, Dieu nous protège si nous en arrivons jamais à une société dans laquelle les candidats, les partis politiques et les tiers peuvent dépenser sans limite pour faire de la publicité.

Ce dont nous devons discuter ce soir, c'est comment nous pouvons mettre en place des règles équitables qui attirent en politique et au Parlement davantage de représentants de la diversité canadienne, car il existe là de toute évidence un déséquilibre.

• 2045

J'ai une question à poser à Nancy, puisqu'elle en a parlé au début de son intervention. Comment pouvons-nous, dans cette loi ou dans d'autres mesures visant à réformer la Loi électorale, voir à ce que davantage de femmes participent à la vie politique, afin que le Parlement représente mieux la diversité de la population canadienne et pour éviter ce qu'a mentionné M. White?

Mme Nancy Riche: Dans le cas des femmes, nous disons dans notre mémoire qu'il faut faire des efforts s'il existe des obstacles qui empêchent les femmes de se présenter aux élections—nous croyons que c'est le cas. Que l'on soit d'accord ou non, dans les faits, il est plus facile à un homme de se présenter aux élections, puisque dans la société actuelle, ce sont encore les femmes qui sont chargées des soins aux enfants et aux personnes âgées ainsi que de l'entretien du foyer. À Ottawa, un certain nombre d'hommes mariés louent des chambres-salon pendant que leurs femmes s'occupent du foyer et des enfants chez eux, dans leur circonscription.

Je ne dis pas que quiconque dans cette salle prétend qu'il devrait en être ainsi. Mais si nous admettons qu'il y a certains obstacles pour les femmes qui veulent se présenter, alors nous devons les identifier et les faire disparaître. Si l'un de ces obstacles est le dépôt de 1 000 $—et on peut facilement faire des recherches pour découvrir si c'est le cas—faisons-le disparaître. Si nous trouvons que la garde d'enfants constitue un des obstacles, alors trouvons une façon de payer pour la garde d'enfants.

Évidemment—puisque tout un chacun a pu dire son petit mot ici ce soir—si le gouvernement adoptait un programme national de garde d'enfants, nous n'aurions plus besoin de nous en inquiéter. Et comme le démontre les statistiques, il ne faut surtout pas oublier les soins prodigués aux aînés, qui deviennent de plus en plus la responsabilité des femmes.

Faisons donc sauter les obstacles. Une partie du problème lorsqu'il s'agit d'encourager les femmes à se porter candidates, lorsqu'on dit qu'on les veut comme candidates, qu'elles doivent équilibrer le nombre de candidatures, c'est qu'il y a un tas de femmes qui ne veulent absolument rien savoir de vous, les gars, n'est-ce-pas? Il y a tout plein de femmes qui se disent: «Qu'est-ce que j'irais faire dans cette galère?»

Peut-être faudrait-il envisager un genre de Parlement différent. On pourrait peut-être commencer avec des campagnes financées en totalité grâce aux fonds publics. Pas besoin de se mesurer à un gars qui a des centaines de milliers de dollars pour sa campagne. Toute le monde a le même montant; le gouvernement fournirait le même montant d'argent pour chaque personne posant sa candidature et on interdirait la publicité aux tierces parties. Je crois qu'à ce moment-là on pourrait dire qu'il y a égalité.

Si les partis s'engageaient fermement à cet égard, parce qu'après tout ça commence avec... je crois que beaucoup de partis ont déjà prévu quelque chose au niveau des fonds, mais je ne crois pas qu'un parti, quel qu'il soit, sauf le Parti néo-démocrate, ait adopté des politiques d'action positive. Ayant participé à ce genre de choses, je me dois de vous dire que l'action positive n'est pas facile. Il n'est pas facile d'effectuer ce genre d'investiture; nous faisons cela au niveau des investitures. Si chaque parti s'engageait à cela, je crois que nous constaterions une certaine différence.

Cependant, les choses doivent se faire ouvertement. À l'heure actuelle, je ne crois pas que ce soit le cas. Judy connaît mieux la situation que moi. Je ne crois pas que cet endroit soit très accueillant pour les femmes. J'ai participé à suffisamment de dîners de la tribune de la presse.

Le président: Monsieur Anders.

M. Rob Anders: Une partie du débat ce soir a tourné autour des fonds dépensés pendant la période du bref et des fonds dépensés avant le dépôt du bref ou même avant cela. Dans le cas des syndicats qui ont fait campagne contre le NPD en Ontario lors de cette élection provinciale à propos de laquelle je posais mes questions tout à l'heure, ont-ils choisi de dépenser le gros de leurs fonds pendant la période où le bref était en vigueur?

Mme Nancy Riche: Je suis ici pour parler du niveau fédéral. Franchement, je ne le sais tout simplement pas. Je n'ai pas été mêlée à cette histoire. Pat le saurait peut-être.

M. Rob Anders: Monsieur Kerwin, le savez-vous?

Mme Nancy Riche: Je ne suis pas sûre qu'on ait dépensé beaucoup d'argent.

M. Pat Kerwin: Quand j'ai répondu à votre question en disant oui la dernière fois, il s'agissait de publicité faite par des tiers. Je parlais de gens qui sont allés en chercher d'autres pour travailler en faveur d'un candidat autre que le candidat néo- démocrate. Ils sont allés appuyer les candidats des autres partis. Ils travaillaient à l'intérieur du système partisan, mais pas pour les Néo-démocrates. Donc, pour ce qui est de l'argent, j'ai dit la dernière fois... les 150 000 $, j'étais d'accord pour dire que c'est à peu près le montant qui avait été dépensé. Je ne voulais pas dire que cet argent avait été dépensé comme s'il s'agissait d'un tiers. Peut-être une certaine partie l'a-t-elle été. Il est évident que ce que vous voulez dire c'est que les personnes veulent faire de la publicité plus pointue.

M. Rob Anders: Mais vous...

Mme Nancy Riche: Écoutez, Rob... monsieur Anders. Même si je disais oui, qu'ils ont dépensé des millions de dollars et qu'ils ont fait tout cela, vous voulez en venir à quoi?

M. Rob Anders: Là où je veux en venir...

Mme Nancy Riche: Nous avons présenté notre point de vue dans ce mémoire. Ce n'est pas parce que certains syndicats auraient fait quelque chose lors d'une élection provinciale que je vais changer d'idée et me mettre d'accord avec vous et vos idées sur la publicité émanant de tierces parties.

M. Rob Anders: Là où je veux en venir, madame Riche, c'est que les syndicats, les tierces parties, les partis politiques, nous tous qui participons à ce processus électoral, choisissons de dépenser notre argent pendant la période qui précède le plus immédiatement le jour du scrutin, c'est-à-dire le jour E moins quelque chose, disons moins sept jours—le jour E moins sept—peut- être le jour E moins deux, peut-être le jour E moins deux semaines. Mais nous savons tous que les gens sont attentifs en période électorale et que la période la plus cruciale, ce sont ces quelques semaines précédant immédiatement le jour du scrutin, quand les électeurs sont attentifs, qu'ils veulent entendre parler des vraies questions, qu'ils sont particulièrement attentifs aux questions de l'heure et quand l'électeur indécis, l'électeur qui, contrairement à vous et à moi, n'a pas encore fixé son choix, va ouvrir grand les oreilles afin de décider pour qui il va voter le jour du scrutin.

• 2050

Mme Nancy Riche: J'espère que l'électeur écoutera les partis, pas la Fédération des contribuables.

M. Rob Anders: Je crois que vous avouerez, madame Riche, que même les syndicats croient que c'est une période de temps très utile, que c'est le moment où la liberté de parole prend le plus de valeur et que c'est alors qu'il est le plus important de pouvoir dire ce que vous avez à dire et communiquer avec les électeurs. Restreindre cette liberté pendant cette période de temps, c'est y porter atteinte gravement et censurer la liberté de parole.

Mme Nancy Riche: Personne ne porte atteinte à la liberté de parole d'autrui. Il n'y a personne qui porte atteinte au droit démocratique de voter. Contrairement à M. Robinson, là-bas, nous ne croyons pas que la démocratie soit quelque chose de douloureux ou d'ennuyeux; à notre avis, c'est quelque chose de pas mal du tout. Chacun de nos 2, 4 millions de membres votent comme il l'entend. Beaucoup de nos membres ne votent pas pour le parti que nous leur proposons, et nous devons nous y faire.

Nous ne jouons pas le jeu de la publicité indépendante pendant une campagne électorale. Nous ne le faisons tout simplement pas. Nous prenons l'argent que nous avons économisé pendant la période... Et il s'agit d'un montant important, pas autant qu'auparavant, mais c'est quand même beaucoup et ce pourrait même être... Juste pour votre gouverne, nous prélevons deux sous par mois sur les cotisations de chaque membre du CTC pour les envoyer au Parti néo-démocrate du pays. Il s'agit de deux sous par membre par mois: faites le calcul. Nous avons 2,3 millions de membres.

Lorsque le bref est émis, nous remettons l'argent au parti parce que nous avons pris une décision et c'est ce que je propose aux autres de faire. Nous croyons au système. Si nous n'appuyions aucun parti, nous pourrions dépenser ces millions en publicité indépendante. Pourquoi? Nous appuyons un parti donné et nous croyons que les gens devraient... Nous faisons aussi une contribution au parti en libérant des gens qui vont travailler à cette campagne tout comme vous avez des gens qui travaillent à votre campagne—et tout cela à l'intérieur des limites fixées par la loi.

Oui, je crois au jour E moins sept. C'est absolument crucial. C'est à ce moment-là que je veux entendre ce qu'a à dire mon parti et ce qu'a à dire le Parti réformiste. Je ne veux pas entendre la Fédération des contribuables me dire de voter pour les Réformistes; je veux entendre Preston Manning me dire pourquoi je devrais voter pour les Réformistes. Je veux entendre Jean Chrétien ou le candidat de ma circonscription me dire pourquoi moi je devrais voter Libéral. C'est certainement crucial et c'est à ce moment-là que je veux entendre ce qu'ont à dire les partis et je ne suis pas du tout intéressée par ce qu'a à dire le groupe qui promeut les armes à feu, merci beaucoup. Je veux entendre ce qu'ont à dire les partis politiques.

Je ne vais pas voter pour lui. Il n'a pas de comptes à rendre. Il n'a rien. Je vote pour un candidat qui représente un parti politique. Au jour E moins sept, il est essentiel, que diable, que je sache quelle est la position des partis sur les questions qui me préoccupent. Ce ne sont pas les tiers qui vont me donner ces renseignements; ce sont les partis eux-mêmes.

Le président: Parfait.

Mme Nancy Riche: Peu m'importe ce que vous dites, Rob, je voterai toujours NPD.

Des voix: Oh, oh!

Le président: On est toujours en cheminement vers sa conversion.

Je suis maintenant disposé à mettre fin à la réunion, puisqu'il ne semble plus y avoir de questions.

Je tiens à remercier les trois groupes de témoins et les gens qui les ont accompagnés. Ce fut une soirée très intéressante. Nous avons fait le tour de la question et nous vous remercions beaucoup de votre participation.

La séance est levée.