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HAFF Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON PROCEDURE AND HOUSE AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA PROCÉDURE ET DES AFFAIRES DE LA CHAMBRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 24 novembre 1999

• 1541

[Traduction]

Le président (M. Derek Kee (Scarborough—Rouge River, Lib.)): Il y a quorum, chers collègues. Nous poursuivons notre étude du projet de loi C-2, la Loi électorale du Canada.

Nous sommes ravis d'accueillir un témoin aujourd'hui. Je crois comprendre que le leader du gouvernement à la Chambre se joindra à nous dès que le témoin aura terminé sa présentation ou peu de temps après.

Nous allons passer à notre témoin, Mme Manon Tremblay, professeure agrégée de sciences politiques à l'Université d'Ottawa.

[Français]

Soyez la bienvenue.

[Traduction]

Nous demandons habituellement à nos témoins de faire une présentation d'une dizaine de minutes suivie d'une période de questions de la part des députés. Si cela vous satisfait, vous convient, pouvez commencer votre exposé.

[Français]

Mme Manon Tremblay (professeure agrégée, directrice du Centre de recherches sur Femmes et politique, Université d'Ottawa): Merci, monsieur le président. J'espère pouvoir respecter le délai de 10 minutes que vous m'avez accordé. Vous savez que nous, les professeurs d'université, parlons toujours beaucoup.

Je tiens d'abord à remercier la présidence ainsi que les membres de ce comité d'avoir accepté de m'entendre aujourd'hui pour leur faire part de mes réactions face au projet de loi C-2, Loi concernant l'élection des députés à la Chambre des communes.

Mon intervention portera sur la légitimité et l'importance d'accroître le nombre de femmes en politique canadienne et, pour cela, d'adopter des mesures favorisant leur élection.

Je me prononce ici en ma qualité de professeure agrégée de sciences politiques à l'Université d'Ottawa et de directrice du Centre de recherche sur Femmes et politique de la même institution.

Je débuterai mon intervention en brossant à grands traits un tableau de la représentation parlementaire des femmes dans le monde, en y mettant le Canada en perspective. J'aborderai ensuite certains des arguments qui justifient l'accroissement du nombre de femmes en politique et certaines des mesures disponibles pour atteindre cet objectif. Finalement, je commenterai la proposition faite par Mme la députée de Longueuil, Caroline St-Hilaire, d'inclure dans la Loi électorale du Canada un incitatif financier pour les partis politiques faisant élire davantage de femmes.

L'idée que je veux défendre ici est la suivante: le Canada doit être à la hauteur de l'avant-gardisme de sa Charte des droits et libertés en matière d'égalité des sexes et adopter des mesures en vue de favoriser l'élection de femmes à la Chambre des communes.

Un élément qui a marqué la vie politique internationale au cours des 50 dernières années a été l'élargissement de la démocratie sous la forme de la constitution de parlements. Pourtant, comme l'indique le tableau 1 qui figure dans mon mémoire, cette démocratisation de la vie politique s'est faite à l'insu des femmes. Les statistiques les plus récentes dont on dispose, soit celles de 1997, ont été tirées d'une étude de l'Union interparlementaire et indiquent qu'il y a en moyenne, dans les chambres basses des 200 parlements qui ont fait l'objet de l'étude, 11,7 p. 100 de femmes parlementaires. D'aucuns soutiendront qu'avec une députation féminine de l'ordre de 20 p. 100, la performance du Canada n'est pas si mauvaise. De fait, cette moyenne mondiale est réduite par la prise en compte de moult pays qui, bien souvent, ne brillent pas par leur respect des droits démocratiques. En réalité, le Canada fait piètre figure à côté des pays nordiques, qui sont de véritables leaders mondiaux en matière de représentation politique des femmes. La Norvège n'est pas très loin d'atteindre la parité femmes-hommes au Storting. En d'autres mots, les pays qui affichent les plus hauts taux de députation féminine sont souvent des leaders démocratiques.

• 1545

Les femmes sont sous-représentées en politique, soit, mais pourquoi devraient-elles y être en plus grand nombre? Bien d'autres collectivités sont aussi exclues de la gouverne politique, dont les personnes vivant avec un handicap et celles qui désavantagées économiquement. Pourrait-on arguer qu'obtempérer aux demandes des femmes risque d'ouvrir la porte à une liste pratiquement infinie de critères à partir desquels pourrait être revendiquée une représentation parlementaire? Pourtant, les femmes ne constituent pas une minorité comme les autres; elles sont l'une des deux composantes de l'espèce humaine et, en cela, transcendent toute catégorisation sociale. En outre, c'est là une simple question de justice et d'égalité. Puisque les femmes composent la moitié de la population, il est normal qu'elles soient un peu moins absentes des places de pouvoir. Un plus grand nombre de femmes dans les institutions politiques contribuerait aussi à la légitimité du système politique. Les démocraties représentatives reposent sur l'idée qu'aucun groupe ne devrait être exclu de la gouverne de façon aussi manifeste. Or, l'inégalité criante des femmes et des hommes dans les postes de pouvoir nous incite à croire que les règles actuelles du jeu politique favorisent certains profils au détriment d'autres. D'ailleurs, parions qu'un Parlement plus diversifié constituerait une partie de la solution à la crise de représentation que connaît actuellement la gouverne politique.

Je vous présenterai quelques stratégies pour accroître le nombre de femmes en politique, qui se regroupent essentiellement en deux grandes catégories.

D'abord, il y a les mesures établies par la législation nationale, ce dont on parle maintenant. Ces mesures visent à assurer qu'une proportion des sièges remportés par un parti au terme d'une compétition électorale revienne à des femmes. Il existe différentes stratégies à cette fin.

Il y a également les mesures établies par les partis politiques. Ce sont des mesures adoptées volontairement par les partis afin d'inciter les femmes à poser leur candidature à une élection. La proposition dont il est question ici se situe à mi-chemin entre ces deux grandes catégories de stratégies.

Ce sont les mesures volontaires et incitatives qui offrent les meilleures garanties de succès. En effet, sans une réelle volonté des partis politiques de favoriser l'élection de femmes, la proportion des députées au Parlement ne changera pas. Cette volonté doit être stimulée par des incitatifs de l'État. À cet égard, le Canada dispose d'un puissant outil: la Charte canadienne des droits et libertés.

Mme la députée de Longueuil, Caroline St-Hilaire, propose d'inclure dans la Loi électorale du Canada un incitatif financier pour les partis politiques faisant élire davantage de femmes. Comme vous le savez déjà, sa proposition vise à accorder à un parti politique enregistré le remboursement d'une partie de ses dépenses d'élection lorsqu'au moins 30 p. 100 des candidats élus de ce parti sont des femmes.

Cette mesure législative, quoique minimale, serait un premier incitatif en vue d'encourager les partis à présenter des femmes dans des circonscriptions où leurs chances d'élection sont réelles. D'aucuns argueront que cette mesure est antidémocratique et qu'elle intègre une inégalité entre les candidatures d'un même parti, certaines devenant plus payantes que d'autres. Cette mesure temporaire ne vise qu'à redresser une inégalité de fait parmi les candidatures qui, depuis toujours, agit au détriment des femmes.

Mes recherches démontrent que certaines composantes des partis politiques résistent toujours à la venue de femmes en politique. Ces composantes réfractaires à la venue de femmes en politique soutiennent que les femmes seraient des candidates moins compétitives que les hommes ou que l'électorat ne voudrait pas des femmes. Ce sont là des préjugés qui ne résistent pas à l'étude empirique des faits.

D'autres arguent aussi que la seule compétence compte. À cela je réponds qu'il faut s'interroger sur la compétence. Les critères qui définissent à l'heure actuelle la compétence correspondent davantage à la socialisation et aux expériences masculines qu'à la socialisation et aux expériences des femmes.

Malheureusement, les préjugés ont souvent le dessus sur les faits. Aussi, outre l'éducation, des mesures législatives pour inciter les partis à choisir des femmes dans des circonscriptions où leurs chances d'élection sont réelles constituent des stratégies de première ligne, quoique partielles, pour accroître le nombre de femmes à la Chambre des communes.

Qui plus est, dans le contexte canadien, une telle mesure législative revêt une signification particulière, puisqu'au-delà des mots, elle constitue un engagement réel de l'État en matière d'égalité des sexes au plan politique. En effet, nul besoin de rappeler que le paragraphe 15(1) de la Charte énonce le principe de l'égalité des personnes devant la loi et leur droit d'être traitées par celle-ci sans discrimination.

• 1550

L'article 28 de la Charte stipule que les droits et libertés énoncés dans la Charte s'appliquent également aux femmes et aux hommes. Mais, ce qui est bien plus intéressant, c'est que le paragraphe 15(2) énonce la compatibilité du principe de l'égalité des personnes devant la loi et de la mise en vigueur de mesures d'action positive. Qui plus est, la Cour suprême a déjà signifié que les garanties d'égalité de la Charte visaient à alléger les désavantages. Or, la faible présence des femmes au sein des instances décisionnelles laisse croire que les femmes désireuses de se porter candidates souffrent de nombreux désavantages. Les recherches ont largement documenté ce fait, d'où l'impératif d'adopter des mesures pour favoriser l'élection de femmes, mesures qui ne peuvent être interprétées comme antidémocratiques et inégalitaires.

En effet, à moins de déclarer la Charte, notamment son paragraphe 15(2), antidémocratique, de telles mesures législatives sont tout à fait acceptables dans une société démocratique. Qui plus est, ces mesures sont compatibles avec le principe de l'égalité des sexes, du moins avec une lecture nuancée de ce principe qui tienne compte de l'état des rapports sociaux.

Les mesures législatives temporaires—et j'insiste sur le mot «temporaires»—pour rétablir l'équilibre entre les sexes sont souvent décriées comme allant à l'encontre de l'égalité des sexes puisqu'elles traitent de façons différentes les femmes et les hommes. Pourtant, traiter tout le monde de la même façon alors même que tous et toutes ne sont pas égaux dans les faits est trompeur. C'est là faire le jeu de l'idéologie. Une lecture plus fine de l'égalité, qui est d'ailleurs sous-jacente au paragraphe 15(2) de la Charte, veut plutôt qu'il faille passer par un traitement différent et adapté pour atteindre l'égalité. Agir autrement revient à reproduire l'inégalité sous une apparence d'égalité.

En conclusion, je ne peux que recommander au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre d'appuyer la proposition d'inclure dans la Loi électorale du Canada un incitatif financier pour les partis politiques faisant élire davantage de femmes.

Il s'agit d'une mesure essentielle, quoique insuffisante, je le répète, pour favoriser l'avènement d'un Parlement plus inclusif et représentatif de la diversité sociale.

Je vous remercie de votre attention.

[Traduction]

Le président: Je vous remercie.

Nous passerons maintenant aux questions, et nous commencerons par M. White. Vous avez cinq minutes.

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Je vous remercie.

Madame Tremblay, êtes-vous la personne qui reçoit des subventions du Conseil de recherches en sciences humaines pour envoyer des questionnaires aux députés à propos de la représentation des femmes en politique?

[Français]

Mme Manon Tremblay: Oui, et je suis très fière d'affirmer que le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada finance régulièrement mes travaux depuis ma maîtrise en 1985. L'obtention de ces bourses est la preuve de l'excellence de mes travaux puisqu'il y a une vive concurrence en vue de les obtenir.

[Traduction]

M. Ted White: J'ai rédigé deux articles sur vos subventions dans la chronique que je signe dans mon journal local. À la suite de ces deux articles, j'ai reçu des centaines d'appels téléphoniques et de lettres dénonçant ce sondage comme un gaspillage total d'argent et un sondage intéressé qui n'a rien à voir avec la volonté des électeurs.

• 1555

J'aimerais vous demander si vous connaissez le type de système électoral qui existe en Norvège? Vous avez parlé de la Norvège et de la représentation des femmes dans ce pays. Connaissez-vous le genre de système électoral qui y existe?

[Français]

Mme Manon Tremblay: Je distingue deux questions dans votre intervention. Il est évident que je considère que mes travaux sont essentiels. Quant à savoir si mes pairs reconnaissent également ce fait, je soulignerai que ces subventions sont attribuées sur la base du mérite. Je suis très fière également de dire que je me classe habituellement dans le premier décile lors de l'attribution de ces subventions. Je n'ai rien à dire de plus à ce sujet.

Dans les pays nordiques, il existe un système électoral proportionnel, ainsi qu'une culture politique d'égalité des sexes. Le Canada peut établir certains rapprochements et voir les pays nordiques comme un modèle à cet égard.

Je complète ma réponse en vous disant qu'il faut s'enlever de la tête cette idée que le système proportionnel est obligatoirement favorable aux femmes. Le système électoral proportionnel peut favoriser l'élection de femmes, certes, mais c'est une volonté des partis d'augmenter le nombre de femmes qui constitue le véritable ingrédient.

Je prends l'exemple de la Grande-Bretagne, qui a le même système électoral que nous. Je ne parle pas de l'Écosse, mais bien de la Grande-Bretagne. En 1997, lors des dernières élections, le Parti travailliste, qui a pris le pouvoir, avait adopté des mesures d'action positive à l'interne, et la représentation des femmes a doublé, passant de 9 à près de 20 p. 100, cela dans un système majoritaire, mais avec une volonté des partis d'accroître le nombre de femmes. De fait, il n'y a pratiquement pas de candidates conservatrices qui ont été élues. Ce sont surtout des candidates travaillistes qui ont été élues.

[Traduction]

M. Ted White: Vous pouvez prétendre que le système proportionnel n'a rien à voir avec cela, mais le fait est que partout dans le monde où le système électoral comporte un élément proportionnel, la représentation des femmes est beaucoup plus forte. En fait, l'élément proportionnel a beaucoup plus d'importance que tout ce que vous pouvez utiliser comme exemple. Vous avez utilisé l'exemple du gouvernement britannique où la représentation des femmes au sein du Parti travailliste est passée de 9 p. 100 à 20 p. 100. Ici, nous avons déjà dépassé ce pourcentage de 20 p. 100, donc ce n'est pas un très bon exemple à utiliser.

J'irais jusqu'à dire en fait que vous insultez les électeurs de notre pays avec vos propositions. Vous êtes en train de les priver de leur liberté de choisir le candidat qui les représentera au niveau de l'association de circonscription. Vous n'avez pas compris non plus la raison d'être de tout cet exercice. Nous sommes ici pour représenter nos électeurs. Le fait d'avoir ici 100 p. 100 de femmes ou 100 p. 100 d'hommes n'a pas d'importance. Si nous faisons notre travail correctement, alors nous représentons nos électeurs correctement. Je maintiens que ce que vous voulez, c'est l'égalité des résultats pour un exercice qui devrait favoriser l'égalité des chances.

[Français]

Mme Manon Tremblay: Je suis désolée, mais la liberté de choix des électeurs est un argument que je n'accepte pas. À l'heure actuelle, ce sont d'abord et avant tout les partis politiques, par leurs investitures—j'en aurais long à dire là-dessus—, qui offrent à l'électorat un éventail de candidats, mais très peu de candidates. Ce n'est pas un choix pur puisqu'on fait déjà une sélection au niveau des partis politiques. C'est précisément la raison pour laquelle je veux intervenir au niveau des partis politiques.

Par ailleurs, je ne voudrais pas dépasser la proposition qui a été faite ici. Il y a un important travail à faire au niveau des investitures. On sait très bien qu'il y a à l'heure actuelle très peu d'investitures au niveau canadien et que lorsqu'il y en a, ce sont le plus souvent des investitures «backées», comme on dit, où on achète des votes. À l'heure actuelle, notre système démocratique repose sur un achat de votes lors des investitures. Je ne crois pas que ce soit cela, la démocratie.

La représentation politique peut être interprétée de bien des façons. Mes recherches permettent de croire que la présence et les idées ne sont pas deux composantes distinctes l'une de l'autre.

• 1600

Ainsi, le corps que vous occupez a une incidence sur vos idées parce que le fait d'être un homme ou une femme—je pourrais même faire allusion à la couleur de votre peau—constitue un filtre lors de vos interactions avec la société et structure un certain nombre d'expériences.

Mes recherches m'ont permis de très bien démontrer que les femmes et les hommes en Chambre n'ont pas du tout les mêmes positions, notamment lorsqu'il est question de les positionner sur un axe gauche-droite, libéralisme-conservatisme, peu importe leur parti politique. De façon générale, les femmes et les hommes adoptent des positions distinctes.

Vous me parlez du rôle de représentation, soit, mais je souligne que ce rôle de représentation peut être interprété de bien des façons.

[Traduction]

Le président: Je vous remercie.

M. Ted White: Me reste-t-il du temps?

Le président: Non.

M. Ted White: Très bien, j'attendrai le deuxième tour.

Le président: Très bien.

[Français]

Madame Dalphond-Guiral.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Avant de poser ma question à Mme Tremblay, je peux vous dire, en réponse aux commentaires de mon collègue du Parti réformiste, que je suis ravie d'avoir eu affaire, en 1993, à deux beaux jeunes hommes à qui j'ai fait la lutte. J'en ai déduit que les gens de Laval-Centre préféraient probablement les vieilles dames aux jeunes hommes. Je peux également vous dire que j'ai gagné une investiture où je faisais face à des militants qui étaient des hommes. On a fait une dure bataille et, dans ce contexte-ci, je suis très contente de le souligner à mon collègue.

Cela dit, je vais revenir à Laval, cet endroit extraordinaire où trois députées féminines ont été élues, dont deux du Bloc québécois et une du Parti libéral.

À la dernière élection, en 1997, le premier ministre du Canada s'est prévalu—c'est une prérogative de tous les chefs de parti et il y en a certains qui le font plus facilement que d'autres—du droit de nommer d'office des femmes candidates. Ce fut le cas à Laval, où trois femmes candidates se sont présentées aux élections, ce qui est très bien. Il y en a une qui a remporté la victoire, ce que je suis en mesure de vous dire puisque c'est de notoriété publique, dans un comté gagnant. En plaçant des femmes dans des comtés gagnants, on peut favoriser l'élection de femmes.

Bien sûr, on peut avoir recours à des incitatifs financiers qui, je suis d'accord avec vous, ne devraient être que des mesures temporaires. J'aimerais connaître l'importance que vous pourriez donner, dans un pays comme le Canada, qui est très diversifié et où l'on retrouve des façons de voir très différentes, à un éventuel système proportionnel en vue d'accroître la représentation des femmes.

J'aimerais également entendre votre point de vue sur la réflexion suivante. Il est extrêmement difficile de trouver des femmes qui acceptent d'aller en politique. Je ne crois pas que ce soit parce que nous sommes paresseuses ou pas articulées, mais je me demande si la dévalorisation actuelle des gens qui acceptent des responsabilités politiques ne contribue pas à ce que des femmes très bien préparées, très bien scolarisées, gagnant très bien leur vie et reconnues dans leur milieu professionnel hésitent et refusent finalement d'aller en politique. Je vous ai posé une longue question, mais ce sera la seule.

Mme Manon Tremblay: J'ai pu distinguer deux questions dans votre intervention.

L'argument le plus fréquemment avancé contre la proportionnelle est probablement celui de l'instabilité gouvernementale. Dans le cas du Canada, on argue également qu'une proportionnelle donnerait lieu à un pays éclaté, le système majoritaire permettant une plus grande unification. Depuis 1993, c'est un argument qui est moins juste parce que, comme on le sait, nous sommes témoins d'un morcellement du pays en termes de château fort.

• 1605

De mon côté, je suis davantage favorable à un système mixte comme celui qu'on a adopté en Écosse dernièrement. D'une part, on conserverait un système majoritaire uninominal à un tour; d'autre part, il y aurait l'élection d'une autre chambre à la proportionnelle. Cela nous permettrait de conserver un élément de continuité avec notre histoire, mais aussi de corriger certains écarts manifestes entre le nombre de votes et le nombre de sièges.

La proportionnelle pure, comme je le disais tout à l'heure, n'est pas la garantie d'une forte présence de femmes. Voyez le cas d'Israël. Donc, une proportionnelle n'est pas une garantie. Cela dit, il y a une formule qui permettrait d'assurer une représentation 50-50 au moyen d'une proportionnelle, et c'est ce qu'on appelle le système de zipping. Sur une liste fermée, dont on ne peut déplacer l'ordre des noms, certains partis politiques de par le monde ont proposé d'inscrire un homme et une femme, un homme et une femme, etc. ou l'inverse, soit une femme et un homme, etc. S'il y a quatre députés d'élus pour ce parti dans une circonscription, il y aura nécessairement deux hommes et deux femmes.

Je vais m'arrêter là-dessus pour ce qui est de la proportionnelle, mais je dois vous dire qu'on n'a pas besoin d'aller très loin. Voyez la proposition qui avait été faite par la Commission d'établissement du Nunavut, celle d'avoir des circonscriptions binominales—un homme et une femme—dans le cadre d'un système majoritaire.

Il y a donc un certain nombre de formules qui nous sont tout à fait accessibles. Il nous reste maintenant à les envisager. Bien sûr, c'est une autre question.

Comment inciter des femmes à aller en politique? Cette question est intéressante. Comme tous les sondages le montrent, nous sommes dans un contexte général qui est de moins en moins favorable à la gouverne politique: la critique sociale, le cynisme et ainsi de suite. Dans la conclusion de mon dernier livre, Des femmes au Parlement, je suggérais notamment qu'il y ait très tôt, peut-être même au primaire ou au début du secondaire, des cours sur la citoyenneté pour inciter les jeunes à s'intéresser à la chose publique. À l'heure actuelle, on a l'impression que les gens ne s'intéressent guère à la chose publique. Il faut les amener à s'intéresser à la chose publique. Certains partis politiques travaillent d'arrache-pied à mettre sur pied des ateliers et des séances de formation. Je pense notamment au Nouveau Parti démocratique, qui couvre les frais de garde lors des investitures. C'est une mesure intéressante.

Il y a une panoplie de mesures qui devraient être envisagées et qui sont accessibles. Il n'est pas nécessaire remuer mer et monde, car c'est relativement accessible. Mais avant tout cela, il y a un ingrédient fondamental: la volonté des partis politiques d'augmenter le nombre de femmes. S'il n'y a pas cela, ça ne donne rien d'essayer d'augmenter le nombre de femmes. Il faut que les leaders politiques soient convaincus de l'importance d'augmenter le nombre de femmes et d'avoir une gouverne qui soit moins déséquilibrée qu'à l'heure actuelle en termes de genres.

[Traduction]

Le président: Monsieur Solomon.

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Merci beaucoup.

Je représente le Nouveau Parti démocratique, et je viens de la Saskatchewan. La section provinciale de notre parti et notre parti fédéral ont prévu des mesures incitatives destinées à encourager et à recruter des candidates, et ces mesures ont fonctionné assez bien. Notre caucus fédéral compte 40 p. 100 de femmes députées, et j'estime que c'est un pas dans la bonne direction.

Nous constatons, toutefois, que les fonds que nous offrons pour les dépenses de candidature, par exemple les obligations familiales et des objectifs électoraux, ne semblent pas encourager autant de femmes que nous le souhaiterions à présenter leur candidature—et j'apprécie les commentaires que vous avez faits à ce sujet tout à l'heure.

• 1610

Avez-vous des mesures incitatives particulières à proposer que nous pourrions ajouter à cette loi électorale pour encourager un plus grand nombre de femmes à se porter candidate?

[Français]

Mme Manon Tremblay: Dans ma réponse, je vais reprendre en partie la réponse donnée précédemment à Mme la députée.

Il y a plusieurs mesures qui peuvent être envisagées. Notamment, je sais qu'au Nouveau Parti démocratique, il y a carrément des comités pour rechercher des candidatures féminines. Cette mesure pourrait être étendue. Il pourrait également y avoir, à l'intérieur des partis, des listes permanentes de candidates potentielles.

Vous savez qu'on ne se présente pas en politique du jour au lendemain. Pour se présenter en politique, il faut avoir un réseau. Bien des femmes m'ont dit: «Oui, on est venu me chercher, mais l'organisation n'était pas derrière moi.» J'ai parlé tout à l'heure d'éducation et d'ateliers de formation pour les femmes. Je dirais qu'il y a aussi une éducation des hommes à faire dans les partis politiques. Il faut les sensibiliser, pas tous mais certains d'entre eux, à l'importance d'avoir une gouverne politique qui soit moins déséquilibrée, qui soit plus équilibrée et plus diversifiée en termes de représentation des genres.

[Traduction]

M. John Solomon: Je voulais parler des incitatifs financiers, mademoiselle Tremblay. Croyez-vous que l'argent du contribuable devrait servir à financer les partis qui réussissent à recruter un certain nombre de femmes prêtes à se porter candidates aux élections fédérales? Quels seraient ces pourcentages? Par exemple, à l'heure actuelle, un parti reçoit un remboursement de 22,5 p. 100 sur les dépenses électorales générales. Si on fixait par exemple un seuil de 30 p. 100 de candidates et une échelle graduée jusqu'à 50 p. 100, est-ce que vous augmenteriez le remboursement accordé aux partis en fonction de ce pourcentage? Ou existerait-il une autre forme quelconque de barème qui permettrait de rembourser les coûts liés aux obligations familiales, que ce soit pour un enfant, un frère ou une soeur, ou un parent?

[Français]

Mme Manon Tremblay: Je dirais qu'il y a ici deux mouvements. D'une part, il y a des politiques de redistribution de l'État via le remboursement prévu par la Loi électorale et peut-être aussi des mesures fiscales. Je pense qu'il serait plus difficile de convaincre l'opinion publique d'accepter les mesures fiscales aux individus.

Pourquoi ne pas passer par un organisme comme Condition féminine Canada, par exemple, pour mettre sur pied des programmes? D'ailleurs, cela existe. Au Québec, ce genre de truc a été mis sur pied. Il y a un programme de séances de leadership financées par l'État québécois. Elles sont financées par l'État et sont sous le couvert du Conseil du statut de la femme, je crois, mais je dis cela sous toute réserve. Je ne suis pas certaine que ce soit le Conseil du statut de la femme, mais il y a des programmes de leadership financés par l'État. C'est le premier mouvement.

Pour ce qui est du deuxième mouvement, je vais revenir à une recommandation de la Commission Lortie, une recommandation faite par Janine Brodie dans son étude publiée dans le volume VI du rapport de la Commission Lortie, qui disait que là où le bât blesse, c'est au niveau des investitures. Une investiture gagnante peut coûter très cher. La recommandation était de limiter les dépenses électorales lors des investitures. Si ma mémoire est bonne, on recommandait de les limiter à 5 000 $. Déjà on élargirait le nombre de femmes pouvant se présenter.

[Traduction]

M. John Solomon: J'ai une dernière observation, si vous me le permettez, monsieur le président.

Il y a maintenant 26 ans que je recrute des candidats et candidates tant au niveau provincial que fédéral. Le plus grave problème à l'heure actuelle en politique c'est qu'il s'agit d'un domaine qui n'attire pas beaucoup de femmes.

• 1615

Deuxièmement, il est très rare que des femmes qui ont des enfants à la maison veulent faire de la politique au niveau fédéral, surtout celles qui viennent de l'Ouest, parce qu'il nous faut environ sept heures pour venir ici et sept pour rentrer chez nous, ou peut-être plus dans le cas des circonscriptions rurales. Toutes ces personnes que j'ai essayé de recruter et qui auraient été d'excellents députés mais qui n'ont jamais accepté de se porter candidat ont invoqué les raisons que je viens de citer, c'est-à-dire les obligations familiales et les déplacements. Qui veut avoir sans cesse à se déplacer? Qui veut aller à Ottawa? Ottawa n'est pas l'endroit le plus dynamique au monde où vivre. Je sais que cela choque beaucoup de députés d'Ottawa, mais il y a d'autres régions du pays où les gens préfèrent vraiment vivre.

Donc il y a une foule de problèmes, et je ne suis pas sûr que des incitatifs financiers permettent de les résoudre. Nous devrions peut-être envisager une toute nouvelle façon d'aborder cette question, que ce soit de prévoir un service spécial de bonnes d'enfants à Ottawa pour s'occuper des familles et les aider, ou des fournisseurs de soins dans la circonscription, ou des services de counselling pour aider le partenaire masculin à faire face à ce nouveau style de vie et à encourager l'autre partenaire à se porter candidate. C'est un problème vraiment complexe.

Je suis ici à cette table parce que deux très excellentes candidates que j'ai tâché de persuader de se présenter aux élections ne l'ont pas fait. Je leur ai offert l'appui de mon organisation. Il n'y avait aucun problème d'argent, parce que nous avions les fonds nécessaires et que nous leur avions donné l'appui de l'organisation. Je leur ai essentiellement garanti l'investiture, et elles ont répondu: «Cela ne nous intéresse tout simplement pas.» C'est donc l'une des nombreuses raisons pour lesquelles je suis ici.

Je ne sais pas si vous voulez faire des commentaires à ce sujet. C'est vraiment une énorme difficulté. Il est énormément difficile pour nous d'essayer de recruter un plus grand nombre de femmes disposées à se porter candidate pour notre parti, et peut-être pour d'autres partis également.

[Français]

Mme Manon Tremblay: J'ai trois commentaires à faire au sujet de votre dernière intervention.

Vous savez que dans mes recherches, j'éprouve toujours un grand plaisir à interroger des femmes et des hommes politiques. Je me rappelle une femme politique qui m'avait dit un jour: «Vous savez, le problème des femmes en politique est qu'elles n'ont pas de femme à la maison.» Il y a des phrases comme celle-là qui s'impriment dans votre mémoire de façon absolument fantastique. Je ne l'ai jamais oubliée, celle-là.

Deuxièmement, et j'insiste sur ce point, la mesure proposée ici est une mesure parmi d'autres. Je suis assez d'accord avec vous qu'on doit se demander si c'est suffisant et si on ne devrait pas envisager d'autres stratégies. Rien n'empêche qu'on envisage d'autres stratégies. Cette stratégie n'est pas négative, mais, comme je l'ai dit dans ma présentation, elle est assurément insuffisante et minimale, et elle doit être combinée à d'autres stratégies.

Troisièmement, dans la conclusion de mon dernier livre, Des femmes au Parlement, je suggérais, pour les femmes et hommes politiques qui ont de jeunes enfants à la maison, des formes de subvention pour les aider à suppléer à leur absence ou à s'acquitter de leurs responsabilités familiales. On sait très bien que quand le père est à Ottawa pendant cinq jours, concrètement, cela signifie beaucoup plus d'ouvrage pour l'autre personne. Cela signifie non seulement plus d'ouvrage, mais souvent un recul dans sa carrière, ce qui n'est pas monnayable.

Je proposais carrément à cet égard une sorte d'avantage social pour les parlementaires. Cela ferait partie des avantages sociaux de leur emploi que d'avoir droit à ces subventions, qui seraient, bien sûr, des mesures palliatives, des mesures probablement insuffisantes, mais qui contribueraient néanmoins à l'atteinte d'un objectif plus vaste.

Je justifiais ce type de mesure qui, j'en suis consciente, risquerait d'être très mal reçu par l'opinion publique, par le fait que les gens en politique, quoi qu'on en dise, consacrent une partie de leur vie au service de leur pays et devraient donc avoir droit à ce type de compensation pour les conséquences négatives qu'ils doivent subir dans leur vie privée.

• 1620

[Traduction]

M. John Solomon: Je vous remercie.

Le président: Monsieur Solomon, votre président a toujours voulu savoir le prétexte sous lequel vous êtes ici à Ottawa, vous avez été élu.

M. John Solomon: C'est l'un de mes prétextes.

Le président: Mais vous avez terminé vos remarques en disant que vous vouliez faire une brève observation qui s'est transformée en une longue observation après quoi vous avez demandé une réponse.

M. John Solomon: Je vous suis très reconnaissant de votre grande coopération, monsieur le président.

Le président: Je me montre trop coopératif. Les collègues me font les gros yeux.

Je vais accorder la parole à M. Richardson puis à M. Harvey, pour cinq minutes chacun.

M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Mademoiselle Tremblay, je tiens à vous remercier d'être venue ici aujourd'hui et de nous avoir présenté votre exposé.

Au cours des 25 dernières années, on a beaucoup discuté de la place des femmes en politique. À l'époque où j'ai fait mes études à l'Université d'Ottawa, elles n'y songeaient même pas.

Tout ce que je peux dire, c'est que s'il y a une pénurie de femmes ici, dans le domaine de la politique municipale, leur nombre est à la hausse, car dans ce milieu les femmes peuvent travailler au niveau communautaire en tant que conseillère municipale ou maire, et peuvent apporter une contribution, ou elles peuvent siéger au conseil d'administration d'un hôpital ou à un conseil scolaire en tant que présidente ou membre. C'est sans doute un travail qui leur apporte une satisfaction immédiate ou un sentiment immédiat d'insuffisance lorsque les choses vont mal; elles se sentent donc plus à l'aise dans la politique municipale parce qu'elle porte sur des questions plus terre-à-terre.

Dans les petites provinces, comme l'Île-du-Prince-Édouard jusqu'à un certain point, la situation est probablement semblable. Cette province répondrait à ces critères, ce qui n'est pas le cas de bien d'autres provinces à cause de leur taille.

J'ai l'impression que les femmes veulent consacrer leur temps à leur collectivité et qu'elles veulent la faire profiter de leur savoir, de leurs antécédents et de leurs aptitudes personnelles. Il se trouve qu'il s'agit d'une collectivité dont elles sont proches. C'est mon impression. Il s'agit de leur port d'attache, où se trouve la famille.

Lorsque vous venez à Ottawa, il faut beaucoup de temps pour s'y rendre et beaucoup de temps pour s'en retourner. Je sais qu'il faut sept heures à M. Solomon pour faire le trajet. J'habite à Stratford en Ontario. Je ne peux pas faire le trajet en moins de six heures et je fais l'aller-retour en voiture.

Je pense simplement que cette hésitation à quitter son port d'attache pour faire de la politique provinciale ou fédérale pourrait être liée à des questions de distance et de temps—et la distance impose des contraintes de temps qui obligent la personne en question à renoncer à se déplacer.

Personnellement, j'aimerais qu'il y ait plus de femmes en politique parce que je suis souvent impressionné par la contribution qu'apportent les femmes avec lesquelles je travaille. Mais je regretterais cette théorie de l'impératif territorial, avancée dans le livre Le singe nu il y a des années. Vous pourriez dire que je fais fausse route ici. Je ne fais que relater ma propre expérience.

[Français]

Mme Manon Tremblay: Monsieur le député, je ne sais pas si vous vous trompez, mais je vais vous faire part de ma lecture des faits.

D'abord, je ne sais pas si c'est le cas dans les autres provinces, mais au Québec, il y a 10 p. 100 de mairesses à l'heure actuelle et 20 p. 100 de députées. En fait, il y a 25 p. 100 de femmes députées à l'Assemblée nationale et 20 p. 100 de femmes députées à Ottawa.

Combien?

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Vingt-trois pour cent.

Mme Manon Tremblay: Donc, cette idée que l'on entend fréquemment voulant que les femmes soient plus attirées par le municipal ne résiste pas à une observation statistique des faits. En proportion, il n'y a pas plus de femmes mairesses qu'il n'y a de femmes députées. En fait, au Québec, il y en a moins; il y en a 10 p. 100, alors qu'il y a 20 p. 100 de femmes députées à Québec et à Ottawa.

• 1625

Secundo, les études américaines—je souhaite vivement faire un jour une telle étude—ne montrent pas de lien entre la proximité de la circonscription électorale et l'élection de femmes au Parlement.

Prenons la question autrement. Selon votre logique, on dirait que les femmes seraient plus présentes dans les circonscriptions électorales entourant le Parlement ou on pourrait s'attendre à ce qu'il y ait plus de femmes dans les circonscriptions électorales autour d'Ottawa. Ce n'est pas le cas.

Troisièmement, je suis loin d'être certaine de cela, mais supposons que les femmes sont plus intéressées par les questions sociales, les questions de collectivité et de communauté, etc. C'est peut-être le cas. Ce sont des thématiques qu'elles peuvent traiter également à Ottawa et dans les provinces.

Je me permets de dire que je ne suis pas convaincue.

[Traduction]

M. John Richardson: Je n'ai pas de statistiques ou d'études à ce sujet, simplement des observations, surtout dans ma région.

[Français]

Mme Manon Tremblay: Je me permets de compléter. L'observation intuitive des faits est absolument fondamentale; c'est de là que partent les recherches. C'est de l'observation intuitive des faits qu'émanent les recherches. Donc, vos observations sont extrêmement importantes.

M. John Richardson: Je suis bien d'accord.

Le président: Monsieur Harvey.

M. André Harvey (Chicoutimi, PC): Je voudrais féliciter Mme Tremblay pour ses travaux de recherche. Je suis persuadé que si les conseils subventionnaires l'ont aidée dans ses recherches, c'est parce que les travaux en question méritaient d'être soutenus. Donc, je tiens à la féliciter.

Sur la question des femmes, j'ai l'impression qu'on nage un peu dans l'irréel, monsieur le président. Je regarde mes collègues ici: Mme Parrish, Mme Catterall, Mme Dalphond-Guiral. Nous sommes tous des êtres humains. Pourquoi vouloir mathématiquement et budgétairement tout mettre en oeuvre pour forcer des femmes à alimenter des quotas de participation dans un domaine quelconque, qu'il s'appelle la politique ou autre chose? J'ai l'impression que c'est une contrainte artificielle.

J'écoutais attentivement les interventions de mes collègues. Cela m'apparaît artificiel. Les individus doivent faire des choix. Je trouve malsain qu'on essaie, de façon très discrétionnaire, d'encourager des femmes à s'orienter vers tel secteur plutôt que vers tel autre. J'ai beaucoup d'amies femmes qui oeuvrent dans toutes les vocations, toutes les professions; c'est un choix personnel.

Vous avez parlé des investitures. J'ai fait plusieurs campagnes électorales à différents niveaux. L'investiture est un défi accessible aux deux sexes. Par contre, c'est un défi qu'il faut choisir indépendamment des attraits financiers.

J'ai une seule petite question à vous poser. Vous avez parlé d'achat de votes lors des investitures, monsieur le président. J'aimerais avoir plus de détails là-dessus. J'aimerais que Mme Tremblay nous dise ce que cela veut dire lors d'une assemblée d'investiture.

Par exemple, sur le plan politique, quand vous avez 1 500 membres en règle dans une association, les gens ne s'achètent pas. Il suffit de motiver les gens à aller voter. C'est ce que je comprends, à moins qu'il se passe des choses que je n'ai jamais vues. Cela peut arriver. On ne peut pas tout voir dans la vie. Les gens votent pour le candidat ou la candidate qu'ils veulent, on fait le décompte des votes et c'est fini. On se présente par la suite à l'élection générale.

J'aimerais avoir des explications sur l'achat des votes. Je n'ai pas vu cela souvent. En tout cas, à Chicoutimi, je n'ai pas vu cela souvent. On se bat pour vendre des cartes de membre avant les assemblées de mise en candidature. Après cela, on se bat pour amener les gens à voter et ensuite on assume nos responsabilités; on gagne ou on perd. Il n'y a pas d'achat de votes.

Mme Manon Tremblay: J'aurais bien des réactions par rapport au préambule de votre intervention. Vous disiez notamment que les investitures étaient accessibles aux deux sexes. Je n'en suis pas certaine.

• 1630

Il y a également l'idée de forcer... Je ne pense pas avoir prononcé le mot «quota» jusqu'à maintenant dans ma présentation. Vous postuliez que les choix dans la société étaient absolument libres. Je n'en suis pas certaine. Dans la mesure où les femmes et les hommes sont encore socialisés selon des cursus ségrégués, je ne suis pas certaine....

M. André Harvey: Je ne comprends pas. Pouvez-vous me dire ce que signifient vos derniers mots?

Mme Manon Tremblay: Je vous dirai simplement que les femmes et les hommes ne connaissent pas la même socialisation. Encore récemment, je lisais un rapport concernant l'insertion de femmes dans des métiers non traditionnels, les métiers qui sont habituellement les plus payants. Vous pouvez être assuré que la lecture d'un dossier comme celui-là n'incite pas beaucoup de femmes à aller vers ces métiers.

Pour ce qui est de la question des choix, je dis que ce choix n'est pas absolument libre dans le contexte d'une société qui socialise ses individus. Certes, nous sommes tous des êtres humains, mais ces êtres humains sont socialisés de façons différentes.

Je vais vous remémorer une phrase célèbre de Simone de Beauvoir: «On ne naît pas femme, on le devient». Cette phrase l'a rendue célèbre, tout comme Sartre a été rendu célèbre par sa phrase: «L'enfer, c'est les autres». Je pense que c'est encore vrai. Il y a eu énormément de changements au cours des dernières années, mais il reste que la socialisation demeure ségréguée. Il ne faut pas nier qu'il y a eu des changements, mais regardez tous les chiffres.

Encore la semaine dernière, je regardais quelques chiffres concernant l'accès des femmes aux universités. Les femmes ne sont pas dans les domaines de l'informatique, des mathématiques, des sciences pures. Elles ne sont pas dans les domaines de l'avenir. Certes, elles sont moins absentes qu'autrefois, mais elles ne seront certainement pas là pour relever les défis de demain.

Pour ce qui est de l'achat des votes, vous avez dit qu'avant une investiture, il fallait se presser pour vendre des cartes. Les témoignages que j'ai eus à cet effet étaient les suivants: «Écoutez...».

M. André Harvey: J'ai dit qu'il fallait vendre des cartes.

Mme Manon Tremblay: Oui, il faut vendre des cartes.

M. André Harvey: Il y a des dates limites.

Mme Manon Tremblay: Bien sûr, et les normes varient beaucoup selon les partis politiques. Il y a certains politiques où on peut presque vendre des cartes la veille, et c'est à cela que je faisais allusion. Ce que je dis, je ne suis pas la première à le dire. Regardez notamment les travaux du professeur Carty en Colombie-Britannique, qui a travaillé énormément à la question des investitures. Lui aussi soulève énormément de questions sur la démocratie des campagnes d'investiture.

Cela dit, il faut faire attention. C'est comme les statistiques. Il faut probablement dépasser l'étude de cas et aller au niveau général. Je ne remets pas en doute ici l'investiture de chacun des individus; je parle de façon générale. Certains universitaires ont questionné le processus de sélection des candidatures. C'est ce que je voulais dire.

M. André Harvey: Merci.

[Traduction]

Le président: Je cède maintenant la parole à Mme Parrish, suivie de M. White.

Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.): Je vais quitter le domaine de la philosophie et revenir à la réalité pure et dure.

Je suis tout à fait d'accord avec vous lorsque vous dites que les processus d'investiture qui sont strictement contrôlés par les partis sont uniques, c'est le moins qu'on puisse dire.

Voici où je veux en venir. Je crois comprendre, d'après ce qu'indiquent la plupart des politicologues, que 90 p. 100 de vos suffrages sont exprimés en fonction de votre parti, de votre chef, et ainsi de suite. Donc si l'on revient au début en disant: «Très bien, comment recrutons-nous le candidat?», c'est-à-dire le processus d'investiture dont vous parlez, c'est là où la capacité de recueillir des fonds devient importante. Dans le cas de ma mise en candidature, 15 500 Libéraux m'ont appuyé, et mon investiture m'a coûté 42 000 $.

Supposons que personne n'achète de carte de membre dans tout ce processus; il faut quand même procéder à trois envois postaux, expliquer comment fonctionne un vote préférentiel, prévoir des rafraîchissements pour les militants. C'est un processus extrêmement coûteux.

Sur ce montant de 42 000 $, je dirais que 37 000 $ provenaient de mes fonds familiaux. Si j'avais été l'un de mes adversaires, un homme, ayant des liens avec toutes sortes d'organisations professionnelles et ainsi de suite, je pense que j'aurais dépensé l'argent des autres.

• 1635

Revenons à cette notion. J'accepte de moins en moins bien cette idée d'accorder une prime aux gens s'ils arrivent à faire élire un plus grand nombre de femmes. Cela ne va pas régler le problème. Je pense que le problème se situe au niveau des mises en candidature. J'aimerais simplement que vous le confirmiez. J'aimerais que vous me donniez votre opinion éclairée, si vous n'êtes pas d'accord avec moi, sur la façon dont nous pourrions régler ce problème particulier.

[Français]

Mme Manon Tremblay: Madame la députée, je suis absolument d'accord avec vous. Je répète ce que j'ai dit tout à l'heure à M. Solomon. Il s'agit d'une mesure parmi d'autres. Je dirais que vous témoignez de ce que mes études démontrent: le problème, ce sont les investitures, d'où la recommandation de la professeure Brodie, dans le cadre des travaux de la Commission Lortie, de limiter les dépenses d'investiture à 5 000 $. Vous avez parlé de 37 000 $ pour votre investiture. Combien de femmes au Canada peuvent se payer cela? Bien sûr, on pourrait me dire: Combien d'hommes peuvent se payer cela?

[Traduction]

Mme Carolyn Parrish: Je ne pourrais pas me le permettre.

[Français]

Mme Manon Tremblay: Bien sûr.

[Traduction]

Mme Carolyn Parrish: L'hypothèque sur ma maison ne cesse d'augmenter avec mes années de mariage. Je suis étonnée que mon mari reste avec moi. Après 32 ans, je ne peux pas en former un nouveau.

[Français]

Mme Manon Tremblay: On pourrait aussi se demander combien d'hommes peuvent se payer cela, sauf que, statistiquement, les hommes sont plus riches que les femmes. Je ne dis pas chaque homme est plus riche que chaque femme. Je dis que, statistiquement, de façon générale, les hommes ont plus d'argent que les femmes. Les femmes ont plus de chances d'être pauvres, ont moins de chances d'avoir cet argent pour l'investiture, pour tisser un réseau, pour asseoir des fidélités partisanes, si vous préférez. Si le terme «achat de votes» vous choque, disons «fixer des fidélités».

[Traduction]

Mme Carolyn Parrish: J'aimerais ajouter à l'intention de M. Harvey que si je me présentais à votre porte et que je vous vendais une carte de membre—j'en ai vendu 3 800—, je pense qu'il y a une obligation morale de votre part de voter pour moi lorsque vous allez au congrès. Donc je ne pense pas qu'il s'agisse d'achat de votes; c'est plutôt une façon de subventionner des membres, si certaines personnes s'adonnent à ce genre de pratique—mais je ne crois pas que les Libéraux agissent de cette façon.

Je pense que dans de tels cas, lorsque les sommes d'argent deviennent importantes et les chiffres deviennent importants, les gens qui ont de bons contacts... J'ai fait de la politique municipale, donc j'avais de solides partisans, mais les personnes qui sont toujours restées à la maison ou qui ont exercé une profession très simple n'ont pas accès au soutien dont bénéficient ceux qui ont passé beaucoup de temps dans le monde des affaires.

Vous avez parlé d'une limite de 5 000 $. Nous avons établi un montant donné de dépenses pour chaque circonscription, en fonction des électeurs dans la circonscription. Si, comme certaines femmes du Parti libéral semblent le proposer—vous avez parlé d'une limite de 15 p. 100—, 15 p. 100 des dépenses électorales admissibles pourraient être consacrées à l'investiture, à votre avis, cela est-il équitable?

[Français]

Mme Manon Tremblay: Je dirai que la situation serait assurément meilleure qu'à l'heure actuelle. Je ne dis pas que la situation serait idéale, mais que les conditions de la compétition à l'investiture, parce que c'est de cela qu'on parle, seraient certainement ramenées à des mesures plus modestes et donc plus accessibles à tout le monde.

[Traduction]

Le président: Madame Tremblay, j'aimerais poursuivre sur cette question. Il est clair que certains collègues de la Chambre des communes—peut-être de nombreux collègues de la Chambre des communes, nous n'en sommes pas sûrs—aimeraient instaurer des mesures pour favoriser et accroître la représentation des femmes à la Chambre des communes. Je n'y ai aucune objection. Nous tâchons de remédier à une situation qui existe depuis 5 000 ans.

Nous semblons nous diriger dans la bonne voie. Certains députés aimeraient que l'on établisse des lois qui accorderaient la préférence aux femmes en ce qui concerne la mise en candidature, à un certain stade dans le système électoral. Normalement, nos lois ne nous autorisent pas à agir ainsi. Elles ne nous autoriseraient pas normalement à favoriser les membres d'un sexe plutôt que l'autre.

• 1640

Notre Constitution nous permet de le faire si les femmes, ou les membres de l'un ou l'autre sexe, étaient défavorisés. Tout au long de ces audiences, j'ai espéré entendre une définition ou une énumération de certains de ces désavantages. Être défavorisé, ce n'est pas la même chose qu'être sous-représenté. Les femmes sont sous-représentées dans l'équipe de hockey des Canadiens de Montréal; je ne suis pas vraiment sûr qu'elles soient défavorisées. On pourrait soutenir que les hommes sont sous-représentés dans le domaine des soins infirmiers; je ne suis pas si sûr qu'ils soient défavorisés.

Vous avez abordé l'un des désavantages possibles lorsque vous avez parlé des ressources financières des femmes. Mais avez-vous une brève liste des désavantages qui existent dans la société canadienne et qui touchent particulièrement les Canadiennes, qui pourrait nous être nous être utile dans le cadre de notre travail et que nous pourrions rendre publique? Je pense que nous en avons besoin. Si nous décidons de prendre des mesures à cet égard, nous aimerions que ces désavantages soient clairement indiqués.

[Français]

Mme Manon Tremblay: Votre question fait allusion au chapitre 1 du livre Que font-elles en politique?, que j'avais publié en 1995. J'avais eu le grand plaisir d'interroger les députées du Québec, tant à Québec qu'à Ottawa. Je résume, pour la gouverne des membres du comité, les trois grands types d'obstacles auxquels se heurtent les femmes.

Il y a d'abord les obstacles dits de nature structurelle, lesquels ont trait à la socialisation. Comme je le mentionnais tout à l'heure, les femmes et les hommes sont encore socialisés de façons différentes. Je ne dis pas que c'est négatif en soi, sauf qu'à l'heure actuelle, la socialisation des femmes ne les incite guère—bien que je doive apporter une nuance et préciser qu'on les incite certainement plus qu'autrefois—à envisager la politique comme étant quelque chose de possible pour elles. Il y a donc des obstacles au niveau structurel, au niveau de la socialisation.

Deuxièmement, il y a des obstacles de nature situationnelle. On fait ici allusion aux rôles sociaux selon le sexe. Encore là, les choses ont changé au cours des dernières années, mais il appert, comme le démontrent toutes les statistiques, y compris celles de Statistique Canada, que ce sont encore les femmes qui ont la responsabilité première des enfants et, si je puis dire, de la gestion quotidienne de la famille. Une femme qui veut aller en politique doit se tisser un réseau et s'engager dans un parti politique. Si elle a une famille et un travail à l'extérieur du foyer, le fait de militer représente pour elle carrément une troisième journée de travail.

Finalement, il y a des obstacles fort importants qu'on qualifie de systémiques et qui relèvent du système politique en tant que tel. Il s'agit d'abord d'obstacles liés aux règles du jeu électoral. Je l'ai déjà dit, mais je vous répéterai que dans notre système politique, c'est d'abord et avant tout la volonté des partis qui importe. Notre système électoral de type uninominal a cette caractéristique de faire en sorte qu'une seule personne portant les couleurs d'un même parti politique se présente dans une circonscription électorale. Il n'y en a qu'une, et non pas quatre ou cinq, comme c'est le cas dans certains types de systèmes proportionnels.

Comme le montrent très clairement mes recherches, les élites politiques locales ont en tête un certain modèle du candidat gagnant. C'est ce que les études britanniques, notamment celles de Pippa Norris et de Joni Lovenduski, appellent l'homo politicus, c'est-à-dire ce modèle tout à fait informel, présenté comme neutre, de candidat gagnant. Si l'on veut comprendre les caractéristiques de cet homo politicus, on n'a qu'à regarder la composition de la Chambre.

• 1645

Bien que je vienne de parler de notre système électoral, je faisais bien sûr également allusion aux partis politiques. J'ai insisté tout à l'heure sur l'importance de tenir des ateliers et d'offrir de la formation aux femmes intéressées à faire le saut en politique. On pourrait appeler cela des ateliers de leadership. Je reste convaincue qu'il faut parallèlement faire de l'éducation auprès de ceux qui siègent actuellement dans nos institutions parlementaires et qui occupent la plupart des banquettes, ainsi qu'au niveau de la plupart des sièges de pouvoir dans les partis politiques, au niveau des circonscriptions électorales, là où sont choisis les candidats et candidates.

De nombreuses femmes qui ont répondu aux questionnaires que j'ai compilés ou à mes questions lors d'entrevues m'ont dit avoir entendu des choses absolument incroyables de la part de certaines élites politiques. Il y a donc certainement encore quelque chose à faire à ce niveau-là.

Il existe d'autres obstacles, bien qu'ils ne soient probablement pas très pertinents dans le cas du Canada, notamment quant à la durée des mandats électoraux. Comme vous le savez, aux États-Unis, certains élus peuvent rester en poste presque ad vitam aeternam. Lorsqu'on limite la durée des mandats, on libère évidemment des places et on permet de nouvelles entrées. Je lisais récemment que les résultats de cette stratégie n'étaient pas aussi concluants qu'on l'aurait cru il y a 10 ans, mais il demeure qu'il s'agit d'un obstacle.

Bref, il existe des obstacles au niveau de la socialisation, des obstacles liés aux rôles sociaux des sexes et des obstacles de type systémique liés à notre système électoral, particulièrement en raison de son caractère uninominal et de la dynamique des partis politiques en tant que tels.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup. C'était pratiquement un mini-cours condensé de Sciences politiques 201. Mais merci beaucoup.

Monsieur White, vous avez cinq minutes.

M. Ted White: Je vous remercie.

Madame Tremblay, pour poursuivre la discussion là où nous l'avons laissée, indépendamment du fait que vous avez rédigé certains ouvrages et que d'après mes calculs vous ayez reçu au moins 270 000 $ des contribuables pour vos enquêtes, je ne crois pas que vous ayez cerné de façon satisfaisante la complexité de la situation.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Monsieur le président...

Des voix: Oh, oh!

M. Stéphane Bergeron: C'est épouvantable!

[Traduction]

Le président: Je vais laisser M. White continuer. Mme Tremblay est professeur d'université. Elle est habituée aux échanges de vue sur le campus, et je suis sûr qu'elle peut répondre à des questions difficiles.

Nous devons toutefois éviter de personnaliser le débat, mais poursuivez, monsieur White.

M. Ted White: Je vous remercie.

Je pense qu'il est tout à fait approprié dans le cadre de la discussion en cours de parler d'obligation de rendre compte. En ce qui concerne la complexité de la situation, vous avez par exemple mentionné les relations. Vous avez utilisé la phrase «le problème pour les femmes, c'est qu'elles n'ont pas de femme à la maison.»

J'aimerais commencer par préciser quelque chose que je considère important. Cela se rapporte au reste de mes observations ici.

J'ai vendu une entreprise qui marchait très bien et ma femme et moi-même avons pris notre retraite, quatre ans avant que je devienne député. Ma femme m'a dit qu'elle n'aimait pas rester à la maison et qu'elle voulait aller travailler, ce qu'elle a fait. Pendant quatre ans, j'ai fait la cuisine et je me suis occupé de tous les travaux ménagers. Chaque soir, lorsque ma femme rentrait à la maison, le souper était prêt. Donc, j'ai tout à fait l'habitude d'exercer cet autre rôle aussi.

Lorsque je suis devenu député, ma femme a commencé à travailler dans mon bureau. Elle n'est pas rémunérée et travaille à titre gracieux depuis six ans, mais elle est présente tous les jours. Elle fait ce travail avec beaucoup d'enthousiasme. Aucun de nous deux n'a jamais éprouvé un sentiment de rejet, et nous avons une excellente relation. C'est pourquoi je pense que l'une des questions les plus complexes dont il faille discuter est celle des relations.

L'autre soir, nous avons entendu un témoin dire qu'elle ne pouvait pas se porter candidate parce que son mari ne l'avait jamais soutenue. C'est un problème auquel se heurtent les membres des deux sexes.

La deuxième question est liée au processus d'investiture, et on en a déjà discuté. Vous avez critiqué de façon assez catégorique le processus. Je tiens à dire publiquement, pour que vous en teniez compte dans vos autres recommandations, que, au Parti réformiste, le chef du parti ne peut pas s'ingérer dans le processus d'investiture. L'acte constitutif du Parti réformiste stipule clairement que le chef ne peut pas faire de mise en candidature. Les candidats doivent être choisis par l'association de circonscription et le chef ne peut pas refuser de signer les papiers de mise en candidature.

À toutes les assemblées d'investiture auxquelles j'ai assisté dans la région de Vancouver, il y avait au moins cinq candidats, et la concurrence est vive; c'est difficile. Les femmes qui ont remporté l'investiture et qui font partie de notre caucus à Ottawa ont gagné la bataille mais sans recevoir d'avantages particuliers.

• 1650

La troisième question est celle des obligations familiales. Je vous ai entendu dire que les femmes sont désavantagées du fait qu'elles doivent rester chez elles et s'occuper des enfants. Eh bien, ce n'est pas un désavantage; ce devrait être une joie pour les femmes d'être en mesure de rester chez elles pour s'occuper de leurs enfants. C'est une question de choix. Si une femme estime que ses enfants constituent un inconvénient dans sa vie, c'est encore une fois un problème relationnel, à mon avis.

Je me demande si vous avez examiné la question du rapport entre les régions urbaines et rurales. Si l'on prend le cas des femmes qui ont été élues au Parlement, il est un fait qu'un plus grand nombre ont été élues dans des circonscriptions urbaines plutôt que rurales. Il y a sans doute de bonnes raisons à cela, mais je ne les connais pas. Vous pourrez peut-être éclairer ma lanterne car vous avez peut-être examiné la question.

Enfin, je pense que le système électoral est à lui seul le facteur qui est le plus déterminant. Vous n'avez pas semblé en tenir compte, mais si l'on considère les pays que l'on peut citer en exemple, ils sont en général plus petits que le nôtre. Certains ont une densité démographique supérieure à la nôtre, mais il y a un élément proportionnel. C'est pourquoi il va sans dire qu'un plus grand nombre de femmes sont représentées.

À mon avis, tout ce bricolage financier à l'égard du système ne donnera aucun résultat. L'essentiel, à mon sens, c'est une refonte du système électoral proprement dit.

[Français]

Mme Manon Tremblay: Je vous remercie. J'ai noté huit points.

J'aimerais d'abord remercier le député White d'avoir fait le total des subventions que j'ai reçues. J'avoue que je ne l'avais jamais fait et que je dois me rendre compte que j'ai obtenu plus d'un quart de million de dollars pour mes recherches. Je suis probablement l'une des professeurs les plus subventionnés dans mon domaine, et la raison en est probablement l'excellence de mes recherches.

Deuxièmement, j'aimerais préciser à M. le député que ce n'est pas moi qui ai dit que le problème des femmes en politique était qu'elles n'avaient pas de femme à la maison. C'est une députée qui m'a confié cette pensée et je l'ai citée ici parce que je trouvais qu'elle cristallisait et synthétisait le problème de façon magnifique. C'est uniquement sur cette base que je l'ai ici citée.

Troisièmement, j'insisterai sur la nécessité de dépersonnaliser le débat. Votre réaction rejoint celle de moult de mes étudiants masculins et de nombreuses étudiantes lorsque j'ai le grand bonheur de donner mon cours «Les femmes et la politique». Ils me disent: «Ah, mon chum et moi, ou ma blonde et moi, on a atteint un équilibre fantastique dans notre couple.» Je ne peux que leur dire bravo. Bravo, si c'est le cas pour vous, mais, statistiquement, ça ne semble pas être le cas. Le partage ne semble pas être aussi harmonieux, du moins selon les statistiques.

Vous avez souligné le problème d'appui du conjoint. Vous avez raison de dire que des hommes qui entrent en politique n'ont pas l'appui de leur conjointe. Mais encore là, mes études m'ont permis de démontrer qu'un homme peut aller en politique sans l'appui de sa conjointe. Bien sûr, ce sera difficile pour lui, mais pour une femme, ça devient carrément infernal. Encore là, bien sûr, je me base sur les témoignages que j'ai reçus. Je n'ai jamais été en politique. Je ne fais pas de politique, sinon parfois à l'université, mais uniquement là. Autrement, je ne fais pas de politique.

J'ai lu les règles internes du Parti réformiste régissant les investitures, tout comme j'ai lu celles de tous les autres partis politiques pour les fins de la recherche que je mène à l'heure actuelle en vue de la publication d'un livre qui devrait paraître au milieu de la prochaine année. Vous y retrouverez une analyse des investitures en vue de l'élection de 1997. À moins que je ne me trompe—malheureusement, l'article de la loi m'échappe—, la Loi électorale autorise le chef d'un parti politique à refuser un candidat choisi lors d'une investiture. C'est dans la Loi électorale; ce n'est pas dans les règles internes du parti.

• 1655

Bien sûr, à l'intérieur d'un parti, il peut y avoir une règle à cet effet, mais ultimement, la Loi électorale autorise un chef de parti à ne pas endosser une candidature. Cela se trouve dans la Loi électorale. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de règle interne qui aille contre cette mesure dans les partis politiques. D'accord?

Il faut également, comme je le disais à propos du point 3, dépersonnaliser le débat. C'est une vieille critique qu'on fait parfois, selon laquelle certaines idées associées au mouvement des femmes seraient injustes et auraient pour but de dénigrer les femmes au foyer. Je ne remets absolument pas ce rôle en question. Quant aux nombreuses femmes qui peuvent s'épanouir dans ce rôle, je ne peux que m'en montrer heureuse pour elles.

Vous avez également dit que plus de femmes avaient été élues dans des circonscriptions rurales que dans des circonscriptions urbaines. Écoutez, cela justifierait une autre étude, parce que toutes les études démontrent jusqu'ici que les femmes sont, au contraire, plus souvent élues dans des circonscriptions urbaines, en raison notamment de la composition cosmopolite du milieu urbain. Les idées qui circulent en milieu urbain sont plus larges qu'en milieu rural. Ce n'est pas moi qui le soutiens. Toutes les études sur la culture politique en font état.

Tout à l'heure, dans ma réponse à une des questions, notamment à celle de Mme la députée, il me semble avoir insisté sur les limites du système proportionnel. Si je n'ai pas été claire, je me répète. Le système proportionnel ne garantit pas l'élection de femmes. À mon humble avis, ce qui me semble être l'ingrédient majeur ou premier, c'est la volonté des partis politiques d'augmenter le nombre de femmes dans leurs rangs. Cela dit, le système électoral peut certes aider, à certaines conditions.

[Traduction]

Le président: Monsieur Bergeron, aviez-vous des questions à poser?

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Oui, bien sûr.

Merci beaucoup, madame Tremblay, d'avoir accepté de comparaître devant ce comité pour nous faire part de votre expérience, et toutes mes félicitations pour être demeurée si calme. Je vais tenter de m'inspirer de votre attitude, parce qu'il m'aurait été très difficile, pour ma part, de demeurer aussi calme devant des attaques aussi insidieuses et inappropriées dans le contexte d'une séance de comité.

Nous appelons des témoins à comparaître devant nous pour que nous puissions nous inspirer de leur expérience et des suggestions qu'ils nous font. Je pense qu'il est tout à fait inapproprié d'agir de façon odieuse et insultante, comme on l'a fait il y a quelques minutes. Je tiens à m'excuser auprès de vous au nom du comité pour ce qui s'est passé il y a quelques instants.

Un certain nombre de propositions ont été avancées. Il semble y avoir une ouverture du côté du gouvernement pour que des mesures soient mises en place afin de favoriser l'entrée de femmes en politique. Je tiens tout de suite à apporter une précision relativement à ce que mon collègue Harvey disait tout à l'heure. Il a dit que c'était pour forcer la venue de femmes en politique. Je tiens à réitérer que ce n'est pas pour forcer la venue de femmes en politique mais bien pour faciliter, favoriser, encourager la venue de femmes en politique.

On nous sert toujours, comme objection, des comparaisons un peu oiseuses, un peu fallacieuses quant à moi, avec la situation qui prévaut dans d'autres professions. On parlait tout à l'heure des joueurs du club de hockey Canadien ou des jardinières d'enfants, pour illustrer les catégories ou les métiers non traditionnellement réservés aux hommes ou non traditionnellement réservés aux femmes.

J'ai fait une intervention devant ce comité, il y a déjà quelques jours, dans laquelle je disais que, fondamentalement, il fallait être aveugle pour ne pas reconnaître que les structures sociales et politiques dans lesquelles nous évoluons actuellement ont été conçues, au cours des siècles dernier, par des hommes et pour des hommes. Ce sont des structures patriarcales.

Il ne faut pas s'attendre à ce que ces structures changent d'elles-mêmes. Ultimement, ce sont des femmes élues à la tête de l'État qui procéderont aux changements législatifs nécessaires pour qu'on puisse par la suite favoriser la venue d'hommes dans des métiers traditionnellement réservés aux femmes, et la venue de femmes dans des métiers traditionnellement réservés aux hommes, étant entendu que, généralement, les métiers traditionnellement réservés aux femmes sont moins bien rémunérés que les métiers traditionnellement réservés aux hommes.

• 1700

Cela dit, j'en reviens à l'objet fondamental de la proposition qui nous est soumise, quoique votre présentation aujourd'hui m'aura amené à réfléchir sur un certain nombre d'autres choses. Nous sommes présentement à étudier la Loi électorale, mais il faudra examiner un jour si d'autres lois ne devraient pas être amendées. Je présume que la présence de femmes en cette Chambre pourrait faciliter l'amendement de lois pour permettre un certain nombre de changements avantageux pour la cause des femmes, notamment la Loi sur le Parlement, afin d'autoriser une allocation particulière pour les parlementaires qui ont de jeunes enfants.

Pour revenir à l'objet fondamental de notre débat, soit les propositions que nous avons sous les yeux, vous disiez qu'elles constituaient des mesures minimales. J'imagine que c'est ce à quoi vous faites allusion lorsque vous parlez de donner un incitatif financier aux partis politiques qui encouragent la venue de femmes en politique. Vous pouvez être certaine que, si un jour on adoptait une telle mesure, le Parti réformiste changerait sa constitution de façon à pouvoir également permettre la venue de femmes en politique.

On a parlé du choix offert aux électeurs. À entendre certains intervenants, il faut laisser aux électeurs le choix de décider quel candidat ou quelle candidate sera ultimement leur représentante ou leur représentant à la Chambre des communes ou à l'Assemblée nationale.

Je reviens sur un point qu'a soulevé il n'y a pas si longtemps mon collègue André Harvey. Les études prouvent qu'ultimement, le candidat ou la candidate a peu à voir avec le choix de l'électeur. C'est en fait essentiellement le parti politique, le leader, les idées, les grands idéaux qui sont défendus par le parti politique qui vont déterminer le choix de l'électeur ou de l'électrice. Conséquemment, il faut s'assurer que celui ou celle qui va porter les couleurs de ce parti politique puisse faire en sorte d'éliminer un certain nombre de distorsions.

Par rapport à cela, un témoin qui a comparu devant nous nous a demandé pourquoi on ne donnait pas un incitatif financier à la candidate plutôt qu'au parti politique. Est-ce que la réponse n'est pas que, si nous voulons que les partis politiques fassent que des femmes soient leurs porte-étendards dans les circonscriptions qui considèrent acquises, c'est aux partis politiques qu'il faut donner ces incitatifs et non aux femmes elles-mêmes? Je vous invite à élaborer là-dessus.

Je me permettrai une parenthèse en terminant, monsieur le président. Tout pays évolué finance la recherche dans le but d'assurer son avenir. Le genre de commentaire que nous avons entendu tout à l'heure, selon lequel les chercheurs seraient trop subventionnés, m'apparaît tout à fait inapproprié de la part d'un parti politique qui pense un jour former le gouvernement et faire en sorte que le Canada puisse affronter le monde moderne auquel nous sommes confrontés. Je vous remercie beaucoup.

Mme Manon Tremblay: Merci, monsieur le député.

Pourquoi ne pas donner cette somme d'argent aux candidates plutôt qu'aux partis? J'y vois une raison simple: c'est que notre but est d'améliorer la démocratie. Donner cet argent directement aux candidates me semble problématique en termes de conflits d'intérêts. Qu'on le veuille ou non, on se fait élire au nom d'un parti et il revient aux partis, selon mon raisonnement, de placer des femmes... Je reprends le mot «placer» parce qu'on me dira que je parle de parachuter des candidates. Je veux dire simplement qu'il faut confier à des candidates des circonscriptions qu'on estime gagnantes dans les mêmes proportions qu'à des hommes.

Puisque la logique de notre système électoral fonctionne sur la base des partis, je pense que c'est aux partis de recevoir cet argent et non aux candidates.

[Traduction]

Le président: C'est bien.

Je tiens à remercier sincèrement notre témoins. Nous nous sommes offert le luxe de passer une heure et demie avec une témoin très experte en la matière, ce qui nous a permis d'aborder toutes les questions pertinentes sous des angles divers. Cette discussion a été très utile, pas seulement pour le débat d'aujourd'hui, mais également aux fins du compte rendu des délibérations, au cas où quelqu'un veuille le consulter par la suite. Je remercie sincèrement notre témoin.

• 1705

Nous passons maintenant au témoin suivant, si les collègues n'y voient pas d'inconvénient.

Merci, madame Tremblay.

La présidence va faire une pause de 30 secondes pour permettre au ministre de s'installer.

• 1706




• 1708

Le président: Nous reprenons la séance.

L'honorable leader du gouvernement à la Chambre est parmi nous.

Vous avez sans doute une allocution liminaire à faire, monsieur Boudria.

Je tiens simplement à signaler aux collègues que nous allons prévoir 45 minutes pour cette discussion. Nous verrons au fur et à mesure, mais la présidence appliquera de façon plus stricte la règle des cinq minutes par intervenant. Nous savons tous comment les choses se passent et il est donc inutile de faire un long préambule avant de poser ses questions.

M. Stéphane Bergeron: Nous ne faisons jamais ça.

Des voix: Oh, oh!

Le président: J'espère que les rires seront enregistrés.

Monsieur le ministre, je vous invite à faire vos remarques liminaires.

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes): Merci, monsieur le président. Je suis très heureux de comparaître à nouveau devant le comité, car c'est la troisième fois. Je ne sais pas si c'est un record pour des ministres qui viennent défendre leur projet de loi, mais je ne dois pas en être loin.

M. Stéphane Bergeron: C'est parce que nous vous aimons bien.

M. Don Boudria: Je l'ai fait avec plaisir. Je tiens à remercier les membres du comité de leur patience pour l'étude d'un projet de loi de toute évidence très complexe. Je sais que vous avez travaillé d'arrache-pied. Cela vous a pris pas mal de temps, ce qui se comprend, et je vous remercie de votre effort.

[Français]

Vous me permettrez également de vous féliciter pour le témoin que vous aviez choisi d'entendre un peu plus tôt aujourd'hui. J'ai eu le plaisir, il y a quelques jours, de me présenter devant une salle de classe dirigée par la professeure Tremblay, et j'ai été fort impressionné.

Depuis notre dernière rencontre, monsieur le président, j'ai fait une tournée pancanadienne de certaines universités et j'ai aussi eu des rencontres avec plusieurs personnes des médias d'information de qui j'ai entendu des propos assez intéressants.

• 1710

[Traduction]

Monsieur le président, je voudrais faire suite à certaines questions qui ont été soulevées devant le comité depuis ma dernière comparution du 3 novembre, après quoi je répondrai volontiers à vos questions. Je vous apporte même la genèse des amendements que je propose au comité, en partie du moins. Je suis en train de mettre la touche finale à l'un d'entre eux, en espérant que cela répondra à une demande formulée par M. Solomon. Nous avons été à même de répondre à bon nombre d'observations faites par le président et d'autres membres du comité, à propos du manque de clarté d'une disposition particulière.

J'ai également pu résoudre un problème qui avait été porté à mon attention par les journalistes, et à ce sujet je tiens à remercier tout particulièrement Mme Barbara Yaffe de Vancouver, qui m'a signalé la chose. J'y reviendrai dans un instant.

Vous devez tous savoir que de nombreuses consultations ont eu lieu avant le dépôt du projet de loi le 7 juin dernier et sa nouvelle présentation le 14 juin. Au cours des consultations qui ont suivi, j'ai réussi à obtenir d'autres renseignements et d'autres avis, surtout de la part des journalistes de la presse écrite, au sujet de la disposition d'interdiction de publicité et de publication des résultats de sondages.

Nous savons tous que, dans l'Ouest canadien surtout, mais aussi dans d'autres régions, les gens tiennent absolument à ne pas être informés des résultats du vote dans le reste du pays lorsqu'ils se présentent au bureau de vote le jour des élections. Depuis toujours, c'est quelque chose de très important pour nous.

Aux termes d'un projet de loi d'initiative parlementaire proposé par un ancien député de Vancouver, il y a désormais des heures de scrutin uniformes, ou pratiquement uniformes dans toutes les régions du pays, pour essayer d'éviter dans la mesure du possible des fuites à ce sujet. C'est donc une chose qui a semblé très importante, surtout pour les Canadiens de l'Ouest, mais également pour les autres Canadiens. Autrement dit, lorsqu'ils vont voter, ils doivent se présenter aux urnes sans être influencés par les résultats déjà disponibles dans d'autres régions du pays.

Dans le projet de loi à l'étude, il est prévu une période d'interdiction de 48 heures pour la publication des résultats de sondages d'opinion, la publicité faite par les partis ou les tiers, et la publicité par les candidats. Je voudrais proposer au comité l'amendement suivant. J'en ai discuté à titre officieux avec certains membres du comité ces derniers jours, et j'en ai aussi discuté avec des responsables de l'Association des journaux canadiens hier soir, pour savoir ce qu'ils en pensent. J'aimerais proposer au comité de réduire de 48 heures à 24 heures la période d'interdiction, ce qui permettrait sans doute d'atteindre les mêmes buts, ou du moins la plupart d'entre eux.

En d'autres termes, au lieu d'appliquer une période d'interdiction à compter du samedi soir, celle-ci débuterait le dimanche soir. Cela permettrait, surtout pour la presse écrite, de publier un nouveau sondage d'opinion le dimanche. Cela permettrait de faire de la publicité à la télévision le dimanche, soit la veille des élections. On pourrait aussi faire paraître des annonces dans les journaux, etc. Le dimanche à minuit, bien entendu—c'est-à-dire le jour des élections, puisque la journée commence à minuit—, il n'y aurait plus de publicité pendant la journée. Les tiers, les partis politiques, les candidats et autres ne pourraient plus faire passer de message publicitaire, et il serait interdit de publier les résultats d'un nouveau sondage ce jour-là.

Il existe un nouveau phénomène entourant les sondages, je veux parler de toute cette affaire des sondages faits à la sortie de l'isoloir. S'il est choquant de connaître les résultats du scrutin le soir des élections, avant même d'avoir été voté, ce système de sondage fait à la sortie de l'isoloir doit être au moins aussi choquant. De l'avis de certains, c'est encore pire, car il ne repose sur aucune donnée scientifique, il s'agit de résultats prélevés à une heure précise du jour où un groupe d'âge donné va voter et les résultats ne sont donc pas vraiment représentatifs, etc.

• 1715

Ce que je veux dire, c'est que la publication des résultats de ces sondages faits à la sortie ou à l'entrée de l'isoloir—car on peut en fait préciser dans le projet de loi qu'un sondage à la sortie de l'isoloir n'est pas autorisé, mais plutôt que de demander à une personne pour qui elle a voté lorsqu'elle sort du bureau de scrutin, on peut lui demander pour qui elle compte voter avant qu'elle n'y entre. Sur le plan technique, on pourrait ainsi contourner la loi. Cela serait absurde.

La seule façon logique de procéder, à mon avis, c'est de prévoir une interdiction totale le jour des élections, et non la veille, de façon à ce que ce soit acceptable pour la majorité des gens.

La mesure était valable de toute façon, mais je pense qu'on obtiendra pratiquement les mêmes résultats en abrégeant la période d'interdiction. Cela permettrait sans nul doute d'atteindre en grande partie les mêmes objectifs, sans toutefois priver les gens de pouvoir faire de la publicité dans les médias et de toucher les fonds découlant de cette publicité, car il va sans dire que les journaux ne sont pas des institutions philanthropiques. Ils appartiennent en général à des gens d'affaires qui tirent des recettes de cette publicité. Et notamment pendant une campagne électorale, cela représente une source de revenu pour eux.

Je suis donc prêt à proposer cet amendement, monsieur le président. Je répondrai évidemment plus tard aux questions à ce sujet et sur d'autres points également.

[Français]

J'aimerais maintenant vous parler du dossier des frais de garde d'enfants. Certains témoins qui ont comparu devant vous—je fais ici allusion particulièrement à l'association des regroupements de femmes—, ont suggéré que les dépenses des candidats incluent également les frais de garde des personnes qui sont à la charge du candidat, par exemple les frais de garde d'un conjoint malade.

Comme vous le savez, j'ai déjà indiqué aux membres de ce comité que je prévoyais proposer que les frais de garde des enfants soient inclus. Je proposerai d'ajouter à la liste des dépenses admissibles les frais de garde des personnes à charge. Je pense que ce serait plus inclusif et que ce serait probablement une meilleure façon de faire; c'est ce que je proposerai, l'objectif, bien sûr, étant d'alléger le fardeau financier des personnes qui souhaitent se présenter comme candidats.

Je voudrais indiquer, encore une fois, que c'est une mesure qui s'applique aux hommes et aux femmes également. Mais l'effet n'est pas le même.

Je pense que dans la plupart des cas, ceux qui ont des personnes à charge sont des femmes. Ce n'est peut-être encore qu'un petit incitatif—je ne prétendrai pas que c'en est un grand—, mais c'en est un qui peut encourager un peu les femmes à se porter candidates.

[Traduction]

En ce qui concerne le nombre de copies de la liste préliminaire, certains membres du comité ont demandé qu'Élections Canada soit tenu de fournir à chaque candidat une copie papier et une copie électronique de la liste préliminaire des électeurs. En outre, un candidat devrait recevoir jusqu'à quatre copies papier supplémentaires sur demande. Cela paraît raisonnable. Il n'y a rien de mal à cela, évidemment. J'accepterais volontiers cette suggestion. Notre objectif étant d'améliorer le système, je suis prêt à proposer les amendements dont je viens de parler.

Par ailleurs, M. Solomon a soulevé la question des répondants, ce qui m'a posé quelques problèmes. Je veux trouver une solution et j'en trouverai une. Si elle n'est pas prête à temps lorsque le comité présentera son rapport, je pourrai proposer l'amendement à l'étape du rapport. J'essaie en tout cas de donner suite à cette demande.

Il convient de signaler que lors d'élections fédérales, toutefois, et contrairement aux élections provinciales dans certains cas, un électeur n'est pas tenu de présenter de pièce d'identité s'il ou elle figure déjà sur la liste électorale.

Nous ne parlons donc pas de... Pour reprendre l'exemple de M. Solomon, celui du gars qui descend de son tracteur pour aller voter et oublie ses papiers d'identité. S'il figure sur la liste électorale, cela ne fera aucune différence, à moins évidemment que le scrutateur estime que cette personne agit de façon frauduleuse ou essaie de voter deux fois. C'est déjà prévu dans la loi. En général, toutefois, il n'est pas nécessaire de se munir de pièce d'identité pour aller voter, et il n'est donc pas...

Pour avoir vraiment besoin d'un répondant ou quelque chose de ce genre, la personne devrait se trouver simultanément dans les deux situations délicates suivantes. Premièrement, il ou elle se présente au bureau de scrutin et constate que son nom ne figure pas sur la liste électorale et, deuxièmement, il ou elle sort son porte-monnaie pour trouver la pièce d'identité, mais n'en a pas non plus. Ce n'est que lorsque ces deux conditions sont réunies qu'il faudrait en fait avoir besoin d'un répondant.

• 1720

Je suis en train d'envisager un éventuel amendement qui permettrait de faire la chose suivante. Le scrutateur... Il existe dans le règlement actuel une disposition selon laquelle le scrutateur peut demander à une personne de fournir des pièces d'identité. Nous sommes en train d'examiner la question pour voir si des pièces d'identité ou, à la place, le fait de connaître la personne ou quelque chose de ce genre... Souvent, surtout dans les régions rurales, on peut se trouver dans une situation absurde où le scrutateur va dire: «Bonjour, monsieur Jones. Vous venez voter. Oh, vous ne figurez pas sur la liste électorale, monsieur Jones. Les règlements étant ce qu'ils sont, montrez-moi une pièce d'identité pour que je puisse vous permettre de voter. Vous avez oublié votre pièce d'identité? Désolé, monsieur Jones, je sais que vous êtes M. Jones, mais je ne peux pas vous permettre de voter.»

Je crois que c'est à cela que vous faites allusion.

M. John Solomon: C'est précisément cela.

M. Don Boudria: Nous pouvons proposer un amendement pour y remédier. Si tel est l'objectif recherché, nous allons examiner la question et essayer de résoudre le problème, pour éviter le genre de situation absurde dont je viens de parler, et qui pourrait fort bien se produire si nous ne prenons pas les mesures qui s'imposent. La Loi électorale a évidemment pour objectif de permettre à un maximum d'électeurs de voter, à condition qu'ils exercent ce droit en bonne et due forme et dans la légalité. Aucun obstacle ne devrait les empêcher de le faire.

J'ai dans un classeur les autres amendements. Je pourrais vous les présenter brièvement. Certains d'entre eux sont de nature assez technique—cela me prendra cinq ou six minutes. Tout dépend des membres du comité, monsieur le président. Je m'en remets à vous.

Le président: Étant donné que ces amendement sont de votre initiative, monsieur le ministre, ce serait sans doute une bonne idée de les examiner rapidement.

M. Don Boudria: Je vais le faire très rapidement. Tout d'abord, je vais proposer un amendement visant à modifier les plafonds de dépenses des candidats en fonction de la liste électorale révisée. Puisqu'il existe maintenant une liste permanente, il n'y a plus de seuil—le 28e jour ou autre, je ne suis pas certain—où le nombre de personnes inscrites ce jour-là constitue la base sur laquelle calculer les dépenses autorisées pour la campagne électorale. Cela se fait maintenant d'après la liste électorale permanente, où il manque parfois des noms. Si les gens ont oublié quelques quartiers et qu'un certain nombre d'électeurs n'ont pas été ajoutés à la liste, le candidat ne pourra pas dépenser le montant supplémentaire correspondant.

Je propose donc un amendement en vertu duquel on se fondera sur la liste révisée au septième jour précédant les élections, sous réserve que cette nouvelle liste présente une augmentation du plafond. De toute évidence, s'il y a diminution... Il est impossible de retirer les pancartes installées dans les pelouses des gens et de les rendre au fournisseur si l'on a perdu des électeurs. Cela ne s'appliquera que si le montant augmente. C'était à mon avis une lacune et cette mesure aurait dû être prévue dès le début. Quelques rajustements s'imposent.

Il faut également permettre aux députés d'utiliser la liste électorale pour aller chercher des contributions, recruter des membres pour le parti politique, etc. La plupart des gens pensent sans doute que la liste permet ce genre de choses à l'heure actuelle, car la liste sur papier qui existait auparavant le faisait. Toutefois, cette interprétation n'est pas claire du tout et je pense que nous devrions l'inclure dans la loi.

Il va falloir adopter un amendement, dont j'ai parlé plus tôt, pour permettre aux électeurs qui sont physiquement en danger de fournir leur ancienne adresse. Je pense ici à la possibilité de permettre aux refuges pour femmes battues de ne pas divulguer leur adresse. Cela vise à protéger la victime, comme vous vous en doutez. À proprement parler, cette mesure ne s'appliquera pas exclusivement aux refuges pour femmes battues, mais l'objectif est pratiquement toujours le même.

Je tiens à proposer un amendement pour permettre aux électeurs handicapés de voter à partir de chez eux avec l'aide d'un fonctionnaire électoral. L'électeur handicapé qui vote chez lui pourra marquer un X sur le bulletin de vote—jusque-là, ça va et ce n'est sans doute pas trop difficile. Toutefois, il devra signer l'enveloppe extérieure. Bien souvent, si ces personnes peuvent signer l'enveloppe extérieure, c'est qu'elles peuvent sans doute se rendre au bureau de scrutin et voter de toute façon. C'est leur déficience qui les empêche de le faire. Nous allons donc prévoir que, lorsque ce genre de problème se pose, les fonctionnaires électoraux soient autorisés à signer comme témoin à la place. Le comité jugera sans doute cette mesure souhaitable.

• 1725

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Un ou deux officiers?

Mme Isabelle Mondou (Bureau du Conseil privé): Un officier d'élection.

M. Don Boudria: Un officier.

Mme Isabelle Mondou: Plus un témoin choisi par l'électeur.

M. Don Boudria: Un officier et un témoin. Quand vous allez voir les amendements, ce sera indiqué.

M. André Harvey: Un témoin à la table ou un témoin de l'extérieur?

Mme Isabelle Mondou: Un témoin de l'électeur.

[Traduction]

M. Don Boudria: Il y a aussi la précision sur la question de la garde des enfants et des personnes à charge.

Il y a aussi quelques modifications techniques. L'une précise que l'interdiction de publier les résultats d'un sondage électoral le jour des élections ne s'applique qu'à un nouveau sondage. Par exemple, si un journal publie un article mentionnant un sondage remontant à trois mois, il est évident qu'on ne doit pas l'interdire. Il s'agit de l'information normale. Donc, c'est une précision. C'est bien entendu, mais je pense qu'il était important de le préciser.

Nous préciserons que quand on parle de sondages le jour des élections, il ne s'agit pas simplement de sondages concernant les intentions de vote. Ils comprennent les sondages faits à l'entrée et à la sortie de l'isoloir.

Il y a aussi quelques modifications destinées à uniformiser le texte, par exemple quand on parle de bureau électoral par opposition au bureau d'inscription.

Il y a aussi la question sur laquelle vous avez attiré notre attention durant l'étude du projet de loi, monsieur le président, à moins que ce ne soit M. White. Il s'agissait de la citoyenneté canadienne. Une personne qui devient citoyenne canadienne est habile à voter dès sa naturalisation. Toutefois, une personne qui a la citoyenneté n'a pas nécessairement le droit de vote. Par exemple, cette personne peut avoir 17 ans et n'a donc pas nécessairement le droit de vote.

Merci donc, monsieur White, de nous avoir signalé cela. Nous avons rectifié le texte, et j'espère que l'amendement vous satisfait.

Il est question aussi de prépondérance des probabilités plutôt que de choses qui sont à la safisfaction du directeur du scrutin. Apparemment, c'est un terme plus objectif sur le plan juridique.

Il y a aussi une précision pour les militaires. C'était prévu dans la première ébauche du projet de loi, mais pour une raison quelconque on l'a oublié dans la deuxième. C'était une simple omission, donc il faut rétablir cela. Ce sont les représentants des Forces armées canadiennes eux-mêmes qui nous ont signalé la disparition de ce passage entre la première et la deuxième ébauche du texte.

Nous voulons aussi proposer un amendement concernant les pancartes et affiches électorales. Naturellement, personne n'a le droit d'enlever ou de saccager les pancartes et affiches électorales. Toutefois, les gens qui travaillent pour la ville veulent avoir des garanties. Si quelqu'un plaque une affiche électorale sur un panneau de signalisation, on doit pouvoir l'enlever ce panneau dans l'intérêt de la sécurité publique sans risquer d'être poursuivi. L'amendement le précise.

Pour ce qui est du plafond de dépenses des tiers, c'est le comité qui nous a signalé qu'en cas d'élections partielles, on ne savait pas si la limite de 3 000 $ s'appliquait à chaque élection ou à toutes les élections ensemble. Naturellement, il s'agit de chaque élection. Par exemple, s'il y a quatre élections partielles, le plafond serait de 12 000 $ et non pas 3 000 $. C'était l'intention au départ, mais peut-être n'avait-elle pas été exprimée assez clairement. J'ai donc proposé un amendement pour clarifier le texte.

Il y avait aussi la disposition prévoyant la vérification du rapport financier de la caisse de fiducie d'un parti politique. C'était prévu dans la première ébauche du projet de loi, mais là encore ce texte a disparu pour une raison quelconque dans la deuxième ébauche. Il va être rétabli.

Une précision concernant la période d'interdiction... Non, cela a disparu parce que... Il s'agissait des 48 heures, mais on a retiré cela.

Il y a aussi plusieurs amendements de forme concernant l'harmonisation des deux langues.

Je suis désolé d'avoir pris plusieurs minutes pour parcourir tout cela. Nous vous distribuerons ces textes en temps utile, mais je souhaitais parcourir rapidement ces divers amendements pour que tout le monde sache de quoi il s'agissait.

Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre.

Monsieur White, vous avez cinq minutes, et comme je l'ai déjà dit, nous allons respecter rigoureusement ce temps de parole.

M. Ted White: Très bien, merci.

Monsieur le ministre, je suis heureux de pouvoir vous poser plus de questions ici qu'à la Chambre. Je ne sais pas si vous avez lu l'article de Mme Yaffe à propos de la Loi électorale, mais elle n'est pas très flatteuse. Je peux vous en faire parvenir un exemplaire si vous le souhaitez.

M. Don Boudria: Oh, je l'ai.

M. Ted White: Bon.

Vous feriez bien de prendre un stylo car j'ai pas mal de questions à vous poser.

J'ai déjà discuté avec vous de la règle des 50 candidats. Comme vous pouvez le constater en lisant les comptes rendus, tous les partis qui ont comparu à notre comité ont dit qu'ils étaient d'accord pour 12 candidats simplement. Cela leur semble plus logique parce qu'il s'agit de la Chambre, et la plupart d'entre eux ont aussi souligné que les électeurs voulaient savoir pour qui ils votaient. Si un candidat de Vancouver se présente comme indépendant mais qu'il est en fait lié à un candidat de Calgary du même parti, le nom de ce parti devrait figurer sur le bulletin. J'aimerais que vous nous expliquiez pourquoi vous refusez ce nombre de 12.

• 1730

Le candidat doit actuellement faire un dépôt de 1 000 $. De nombreux témoins ont dit qu'ils trouvaient cette somme trop élevée. Pourriez-vous nous dire pourquoi nous ne pourrions pas ramener cela à une somme moins lourde, de 250 $ ou quelque chose comme cela?

M. Don Boudria: Ils ont dit que c'était trop?

M. Ted White: Ils ont dit que 1 000 $, c'était trop.

Pour ce qui est des frais de garde d'enfant, des frais des fournisseurs de soins, j'imagine que c'est simplement pour la durée de la campagne électorale. Ou est-ce que c'est quelque chose de permanent?

En ce qui concerne le vote électronique, le directeur général des élections nous a là encore demandé de prévoir dans le projet de loi une disposition lui permettant d'enquêter sur les technologies électroniques, les nouvelles technologies. Vous m'avez dit que vous alliez en discuter avec lui, et j'aimerais donc savoir où vous en êtes à ce sujet.

Quand on déclenche des élections partielles, que pensez-vous de l'idée de dire que le scrutin doit avoir lieu dans les six mois, que l'élection ne doit pas simplement être annoncée, mais que le scrutin doit avoir lieu dans les six mois qui suivent.

De nombreux témoins ont parlé de dates fixes pour les élections, et j'aimerais avoir votre avis à ce propos.

Enfin, il y a les dépenses de tiers. Si l'on fait quelques calculs en prenant pour exemple le Parti libéral, si vous présentez 301 candidats, qui ont chacun 60 000 $ à dépenser, et que vous ajoutez à cela la part des dépenses du Parti libéral, vous obtenez quelque chose comme 30 millions de dollars. Donc c'est peut-être la limite...

M. Don Boudria: Excusez-moi. Je ne comprends pas d'où vous sortez ces 30 millions de dollars.

M. Ted White: Le parti lui-même peut dépenser jusqu'à 12 millions, en fonction de son allocation de temps de radiodiffusion etc. Les candidats ont 60 000 $ chacun... ce qui fait environ 18 millions. Si vous additionnez les deux, cela veut dire qu'un parti peut dépenser jusqu'à 30 millions de dollars lors d'une campagne électorale.

Prenons simplement un chiffre de 20 millions de dollars. Ce n'est pas tellement le montant, mais une question de principe. Dans le cas des tiers, vous limitez les dépenses à 150 000 $. J'aimerais vous demander si vous trouvez que c'est équitable. Vous avez dit qu'il fallait avoir une attitude équitable en matière de dépenses des tiers. Je ne trouve pas que ce soit très juste d'autoriser les tiers à dépenser 150 000 $ alors que le parti dispose de pratiquement de 30 millions de dollars.

M. Don Boudria: Je vais commencer par la question des 50 candidats. Notre régime parlementaire part du principe qu'un groupe de candidats sera reconnu en tant que parti politique s'il constitue ce que l'on considère d'une manière générale comme l'embryon d'une volonté politique cohérente. C'est pour cela que deux personnes ne peuvent pas vraiment constituer un parti politique, enfin, je ne pense pas. C'est une des raisons pour lesquelles nous faisons appel de la décision. Deux personnes, ce n'est pas valable à notre avis. Il peut s'agir d'un couple, de deux personnes qui discutent dans un bar ou même qui se bagarrent dans un bar, mais ce n'est pas un parti politique, pas deux personnes.

Nous pensons que le nombre que nous avons ici est valable. Nous ne faisons pas appel des autres dispositions de la décision rendue par le juge Malloy concernant la liquidation des actifs, etc. Nous n'y touchons pas. C'est la seule chose dont nous faisons appel. D'autre part, j'hésiterais beaucoup à modifier le montant actuel alors qu'il y a un appel devant les tribunaux. Je pense que beaucoup d'entre nous considèrent qu'effectivement deux n'est pas un nombre acceptable, mais c'est la décision du juge Malloy. Je n'ai pas encore trouvé beaucoup de parlementaires qui estimaient que deux personnes suffisaient pour faire un parti politique.

C'est ce que j'ai dit au comité lors de ma première comparution quand j'ai expliqué que nous ne voulions pas modifier ce chiffre tant que l'affaire était en appel. Est-ce que le bon nombre, c'est 50, ou 40? Est-ce qu'il faudrait que ce soit 60? N'oubliez pas qu'il y a 301 circonscriptions. Si vous regardez les régions électorales, parfois il y en a quatre, parfois, cinq... À vous d'utiliser la définition que vous souhaitez. Le Québec a 75 députés, l'Ontario en a plus de 100. Si vous dites qu'il y a cinq régions, vous allez avoir quoi pour la plus petite, la Colombie-Britannique, 30 ou 32 sièges? Même si vous incluez un groupe de candidats en tant que groupe d'une région, vous êtes loin de deux. Cela ne marche pas.

• 1735

De toute façon, même en partant de cette définition reposant sur deux candidats, il faudrait partir du principe que si 100 p. 100 de ces candidats—autrement dit, deux sur deux—étaient élus à la Chambre des communes, ils constitueraient un parti politique dès leur arrivée à la Chambre. Mais ils n'y parviendraient même pas. C'est pour cela que ce chiffre de deux ne marche pas.

Je représente un parti politique qui a réussi assez brillamment au cours de ce siècle à la Chambre des communes, mais nous n'élisons pas 100 p. 100 de nos candidats. Quand nous réussissons à en faire élire 60 p. 100, nous sommes plutôt contents. Cela nous donne une majorité de 175 ou 180 sièges environ. C'est assez confortable, ce genre de majorité, quand on a fait élire 60 ou 55 p. 100 de ses candidats. C'est pour cela que, si l'on prend des chiffres très faibles, pour obtenir le résultat final qui est la création d'un parti politique, il faudrait partir du principe que 100 p. 100 de vos candidats seraient élus.

Pour ce qui est de cette question du dépôt de 1 000 $ qui serait trop élevé, on ne m'en a jamais parlé. Ce n'était pas dans le rapport du comité. Cela ne figurait pas non plus dans le rapport de la Commission Lortie. Il n'en a pas été question. Peut-être certains témoins en ont-ils parlé au comité, mais je crois que d'autres personnes ont dit que ce chiffre de 1 000 $ était au contraire trop faible. Je proposerais qu'on le maintienne. En outre, les tribunaux ont approuvé ce montant, comme vous le savez, dans une décision qui ne m'enthousiasme pas beaucoup, celle du juge...

Une voix: La décision Figueroa.

M. Don Boudria: La décision Figueroa du juge Malloy n'a pas remis en question ce montant de 1 000 $ alors qu'elle proposait que deux candidats suffisent pour constituer un parti politique.

Pour ce qui est d'avoir des dates fixes pour les élections, cela n'a rien à voir avec mon mandat. Si nous devons modifier... Nous avons une date fixe pour l'instant, c'est-à-dire un délai de cinq ans à partir des précédentes élections. C'est prévu par la Constitution. Ce qui se passe au Canada, comme nous le savons tous, c'est que traditionnellement il y a des élections tous les quatre ans environ, ce n'est pas quelque chose qui est prévu par la Constitution, mais c'est une convention. On n'attend pas la dernière limite pour lancer des élections parce que cela donnerait l'impression qu'on veut vraiment s'accrocher au pouvoir jusqu'à la dernière minute. Il y a donc cette convention, mais il y a aussi un texte qui fixe une limite de cinq ans.

Pour ce qui est de modifier les règles des élections partielles, là encore cela ne figurait pas dans le rapport du comité et il n'en a même pas été question lors des précédentes fois où je suis venu. Je dois donc dire que, pour l'instant du moins, je ne serais pas prêt à modifier cela.

Vous me demandez pourquoi je ne réponds pas à la question concernant la possibilité d'adopter sur le vote électronique. Pour adopter le vote électronique... il y a tout ce qui concerne l'éducation du public, etc., et nous pensons que cela englobe ces questions, mais la loi ne prévoit pas l'utilisation du vote électronique.

Dois-je rappeler à tous les membres de ce comité que quand le directeur général des élections, en s'appuyant seulement sur ce qui figurait dans la loi, a fait quelque chose qui sortait un peu de l'ordinaire—et je trouve que cela ne sortait pas vraiment beaucoup de l'ordinaire—c'est-à-dire qu'il a entrepris un programme national d'éducation sur le fonctionnement de la démocratie, par exemple la Déclaration universelle des Nations Unies sur les droits de l'enfant ou le vote des jeunes sur les questions qui les concernent, ce directeur général des élections a été critiqué à la Chambre pour avoir agi de la sorte.

En fait, quelqu'un est même allé dire que cela profitait au gouvernement. Naturellement, il n'y a jamais eu le moindre argument à l'appui de cette affirmation, mais tout de même quand on place le directeur général des élections dans ce genre de situation, je pense qu'on ne lui facilite pas les choses.

• 1740

De toute façon, il n'y a pas de proposition concrète de ce genre pour l'instant, il est simplement question que le directeur général des élections puisse la question. Je pense qu'en vertu de son mandat d'instruction du public et de ses divers mandats administratifs, il a certainement toute latitude pour examiner sur cette question, mais pas vraiment pour utiliser l'électronique pour une élection réelle. On ne nous a pas montré comment cela se ferait. Je suggérerais que votre comité étudie la question, et que quand nous aurons... Je ne dis pas non à cette proposition, mais il faut que nous ayons quelque chose de concret à étudier.

Pour ce qui est des dépenses des tiers, nous connaissons tous la décision Libman de 1997, où la Cour suprême a évoqué le rôle des tiers dans des élections à l'occasion d'une déclaration sur la place des tiers dans un référendum. Dans la décision Libman de la Cour suprême, on lit à la page 601:

    Tout en reconnaissant leur droit de participer au processus électoral,

—«leur droit» signifiant le droit des tiers—

    les individus et les groupes indépendants ne peuvent être assujettis aux mêmes règles financières que les candidats, candidates ou partis politiques et se voir allouer le même plafond de dépenses. Bien que leur voix soit importante, ce sont les candidats, candidates ou partis politiques qui se font élire.

C'est donc ce que dit la Cour suprême dans l'affaire Libman. Elle ajoute:

    La limite financière permise aux indépendants doit donc être plus basse que celle imposée aux candidats, candidates ou partis politiques.

La cour est donc très claire: ce n'est pas que les limites imposées au tiers «doivent» être inférieures ou supérieures ou «devraient peut-être» être inférieures ou supérieures, mais «qu'elles doivent donc être plus basses que celles imposées aux candidats, candidates ou partis politiques».

Il n'y a donc aucun doute.

La cour ajoute, à propos de la décision de la Cour d'appel de l'Alberta dans l'affaire Somerville—souvenez-vous que la limite précédente pour les publicités de tiers était de 1 000 $. Cette limite a été déclarée inconstitutionnelle par la deuxième décision Somerville, et il n'a jamais été fait appel de ce jugement.

La Cour suprême, dans l'affaire Libman, dit encore—et il s'agit maintenant de la page 619, monsieur le président:

    Dans la décision Somerville c. Canada (procureur général), précité, la Cour d'appel d'Alberta a déclaré inconstitutionnelles ces dispositions. Avec égard, nous avons déjà souligné que nous ne pouvions retenir le point de vue de la Cour d'appel de l'Alberta en raison de notre désaccord avec sa conclusion quant à la légitimité de l'objectif de ces dispositions.

Alors, la Cour suprême nous dit qu'une limite de 1 000 $ est acceptable. Or, si nous la multiplions par 150, cette limite doit être à tout le moins tout aussi acceptable. Je dirais donc qu'elle serait sans doute 150 fois plus acceptable, si je peux m'exprimer ainsi.

Enfin, n'oubliez pas que le candidat ou la candidate, que ce soit moi ou n'importe quel autre des députés autour de cette table, a le droit de dépenser environ 60 000 $ pour sa campagne électorale; ce montant comprend le loyer que nous payons pour nos locaux, nos frais de téléphone, le salaire que nous versons au concierge, le toner que nous achetons pour la photocopieuse, les pancartes, les affiches et tout le reste—ce sont là autant de dépenses électorales.

Dans le cas des tiers, les dépenses électorales ne comprennent que la publicité. Pourquoi? Parce qu'ils ne présentent pas de candidats. On ne peut évidemment pas calculer les dépenses de leurs candidats—ils n'en ont pas. S'ils en avaient, ils ne seraient pas considéré comme un tiers. Ils seraient considéré comme un candidat. C'est pourquoi les règles s'appliquent uniquement à la publicité qu'ils achètent et à rien d'autre.

Nous parlons ici du montant que les tiers peuvent consacrer à la publicité électorale comparativement au montant que les partis politiques peuvent dépenser. Encore là, si le parti politique présente à la fin de son annonce une amorce disant: «Dans Glengarry-Prescott-Russel, votez pour Don Boudria», le montant afférent est imputable aux dépenses du candidat. Si l'amorce dit: «Votez Libéral», le montant n'est pas imputé aux dépenses des candidats dans les différentes circonscriptions. Si toutefois le nom du candidat figure sur l'amorce finale, une partie du coût de l'annonce doit être ajoutée à nos dépenses. Là encore, les tiers n'ont pas à s'inquiéter de cette règle. Tout ce qui compte dans leur cas, c'est le coût total de leur publicité.

• 1745

Enfin, si nous revenons à la décision Libman, la cour a dit qu'il peut y avoir plusieurs tiers qui s'opposent à un candidat ou qui émettent une opinion. Il n'y a pas de règle interdisant qu'il y ait plus d'un tiers dans chaque circonscription.

Ainsi, ceux de ma circonscription qui diraient: «Votez pour Don Boudria» feraient normalement partie de mes militants. Il est assez difficile d'imaginer que mon adversaire puisse émettre des communiqués de presse et poser des affiches où il dirait: «Ne votez pas pour moi, votez plutôt pour Don Boudria». Ainsi, il peut y avoir plus d'un tiers dans chacune des circonscriptions, si bien qu'il peut y avoir une multitude de tiers qui se prononcent pour ou contre un candidat.

Dans la décision Libman, si vous me permettez d'y revenir, la Cour suprême dit encore ceci:

    La limite financière doit donc être plus basse que celle imposée aux candidats, candidates ou partis politiques. Autrement, en raison de leur nombre, l'influence de leurs dépenses sur un des candidats, candidates ou partis politiques au détriment des autres pourrait être démesurée.

En d'autres termes, il pourrait y en avoir quinzaine qui diraient: «Votez contre Don Boudria», mais il n'y aurait généralement qu'un seul groupe de militants appuyant la candidature de Don Boudria.

Le président: Merci, monsieur le ministre.

M. Don Boudria: Je sais que la réponse était longue.

Le président: J'espère que les collègues y verront une explication assez concise relativement aux questions soulevées par M. White. J'estime qu'il est utile que ces propos donnés en explications soient consignés au compte rendu.

Nous passons à M. Bergeron pour cinq minutes, s'il a des questions.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Merci beaucoup, monsieur le ministre, d'être parmi nous pour une troisième fois. Vous savez que nous éprouvons toujours du plaisir à vous avoir parmi nous.

Sur la question du nouveau délai d'interdiction pour les publicités, les sondages et ainsi de suite, peut-être auriez-vous pu vous éviter quelques questions si vous aviez pris la peine de consulter tous les membres du comité autour de cette table, mais il n'en demeure pas moins que j'aimerais vous poser simplement une courte question.

Si l'interdiction est maintenant de 24 heures, quelle garantie avons-nous qu'un candidat pourra répondre à une annonce manifestement fausse publiée le dimanche, faisant une accusation contre un candidat ou un autre, ou à un sondage manifestement faux, compte tenu du fait qu'il ne peut pas y avoir de publicité le lendemain?

Quant aux frais de garde pour les enfants et personnes à charge, est-ce qu'ils incluent les frais de garde d'un papa ou d'une maman qui a l'habitude de faire garder son enfant en dehors de la période électorale?

Pour ce qui est du vote à la maison, vous nous parlez d'un officier électoral, plus un témoin. Lorsque nous avons reçu l'ex-directeur général des Élections du Québec et le directeur général des Élections de l'Ontario, on nous a plutôt dit qu'il serait approprié qu'il y ait un scrutateur et un greffier pour assurer l'indépendance du processus. Je voudrais savoir comment vous réagiriez à une telle proposition.

Ensuite, je dois dire que je suis plutôt d'accord avec mon ami Ted White, ce qui arrive peu souvent, concernant l'obligation de tenir une élection complémentaire dans les six mois. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

Concernant les dépenses des tiers lors des élections complémentaires, vous faisiez allusion tout à l'heure au fait que, lorsqu'on parle de 3 000 $, ce n'est pas 3 000 $ au total pour les quatre élections complémentaires, mais bien 3 000 $ pour chacune des élections complémentaires. Est-ce que la somme totale de 150 000 $ pour l'ensemble des circonscriptions s'applique dans un cas comme celui-là?

Je constate que dans la liste d'amendements que vous nous avez présentée, il n'y a rien concernant les fiducies des candidats. Vous aviez pourtant manifesté une certaine ouverture à l'idée d'apporter quelques amendements à cet égard. J'aimerais savoir où vous en êtes là-dessus.

Je sais que vous avez eu l'occasion de parler avec Caroline St-Hilaire au sujet de sa proposition portant sur les incitatifs financiers pour encourager la venue de femmes en politique. Vous n'avez pas fait mention de quoi que ce soit à cet égard. J'aimerais savoir si, tant est que vous n'en proposez pas, vous seriez d'accord sur la proposition formulée par Mme St-Hilaire.

En tout dernier lieu, je vais poser deux petites questions très rapides. Avez-vous changé d'idée sur la question de la nomination des directeurs du scrutin et sur la possibilité d'apporter quelques amendements à la question du financement des partis politiques?

M. Don Boudria: Pouvez-vous élaborer sur le financement des partis politiques? Que voulez-vous dire au juste?

M. Stéphane Bergeron: Imposer éventuellement un plafond maximal qui pourrait être relativement élevé, et éventuellement changer les dispositions actuelles concernant les sources de financement possibles.

• 1750

M. Don Boudria: Je vais commencer par le premier dossier, celui des blackouts, c'est-à-dire la période d'interdiction. S'il y a sondage le dimanche, il n'en demeure pas moins que le lendemain... Premièrement, l'obligation de publier la méthodologie du sondage demeure. Donc, la veille de l'élection, quelqu'un publie un sondage, ainsi que sa méthodologie. En fait, il n'y a pas de méthodologie. Donc, il doit dire que son sondage a été fait sans méthodologie. Bien sûr, cela permet aux autres journaux—on parle d'un journal, mais on pourrait aussi parler d'un réseau de télévision—de dénoncer cette pratique le lendemain. D'ailleurs, c'est arrivé à la dernière élection. Un sondage non valable avait été fait par un journal, et ces gens ont fait rire d'eux le lendemain dans les autres journaux. On disait: Cela n'a pas de bon sens, cela fait hamburger, ce n'est pas sérieux, etc.

On a encore la possibilité de le faire, puisque le lendemain matin, c'est encore tout frais dans la mémoire des gens: ce qui a été fait la veille est sans valeur. Rien de cela ne change. Tout ce qui change, c'est que le 48 est remplacé par le 24.

M. Stéphane Bergeron: Mais dans le cas d'une affirmation fausse?

M. Don Boudria: C'est la même chose; les règles demeurent les mêmes.

M. Stéphane Bergeron: Il n'y a pas possibilité de réplique pour un candidat.

M. Don Boudria: Non, mais il n'en avait déjà pas auparavant. On avait auparavant 48 heures. Supposons que le samedi soir à 11 h 30, on dit qu'Eleni Bakopanos est une personne malhonnête. Ce serait épouvantable, bien sûr, et malhonnête en soi de dire cela. Auparavant, il n'y avait pas de mesure prévoyant une période supplémentaire d'annonce pour permettre à une personne qui sentait qu'on avait raconté des mensonges à son endroit de répliquer.

M. Stéphane Bergeron: Mais elle pouvait faire une déclaration dans les journaux le lendemain.

M. Don Boudria: Oui, c'est permis de faire une déclaration.

M. Stéphane Bergeron: Mais le lundi, c'est trop tard.

M. Don Boudria: Non, il est encore permis de faire une déclaration, d'émettre un communiqué. Tout cela est encore permis.

Au sujet des frais de garde—et je regrette de ne pas avoir répondu à cette question quand M. White me l'a posée tout à l'heure—, ils s'appliquent pendant la période de la campagne électorale, et on parle de frais de garde additionnels. Il faut être prudent. Il ne faudrait pas que le fait d'être candidat devienne pour quelqu'un une façon de se faire subventionner ses frais de garde. Je pense que les Canadiens diraient: Nous n'avons pas accès à cela, pourquoi vous? Il ne s'agit pas d'offrir un avantage à quelqu'un.

[Traduction]

M. John Solomon: Ce serait bien d'avoir un programme national de services de garderie.

M. Don Boudria: Oui, bien entendu, et quand les provinces se seront mises d'accord avec nous pour que cela se fasse, je suis sûr que nous pourrons mettre le programme sur pied. Étant donné l'influence énorme qu'exercent les premiers ministres provinciaux néo-démocrates, cela se fera sans doute assez rapidement.

M. John Solomon: Vous pourriez rétablir tous les fonds que vous avez coupés.

M. Don Boudria: Oh, oh. Je crois que nous nous écartons quelque peu de notre propos.

[Français]

Pour ce qui est de l'article sur le vote à la maison, est-ce qu'on peut savoir ce qu'on voulait dire là-dessus? Ou peut-être pourrais-je demander à Me Mondou d'élaborer, si vous me le permettez.

Maître Mondou.

Mme Isabelle Mondou: Je pense que la question est de savoir pourquoi il y a un témoin et non deux agents d'élection. C'est un peu parallèle à l'article 155 de la loi, qui permet à un électeur qui a besoin d'aide pour voter au bureau de scrutin de se faire aider par un ami. C'est la même idée qui est reprise ici.

M. Don Boudria: Si quelqu'un se présente au bureau de scrutin le jour de l'élection et est incapable de voter par lui-même, il a l'aide d'un agent d'élection et d'un témoin. La disposition prévoit la même procédure quand les gens votent à la maison. C'est tout.

S'il y a des objections à cette formule, je suis disposé à les entendre.

M. Stéphane Bergeron: L'ancien directeur général des élections du Québec et le directeur général des élections de l'Ontario nous ont dit que chez eux, on avait plutôt un scrutateur et un greffier. Cela assure une certaine indépendance au processus, ce qui n'est pas nécessairement le cas ici. Si je ne m'abuse, l'article 155 est beaucoup plus large et permet non pas la présence d'une personne, mais peut-être de plus d'une personne.

Mme Isabelle Mondou: Le nouvel article 155 prévoit seulement un ami, en fait.

M. Don Boudria: Je vais lire la disposition:

    155. (1) L'électeur qui a besoin d'aide pour voter peut être accompagné à l'isoloir d'un ami ou d'un parent...

—pas des deux—

    ...qui l'aide à marquer son bulletin de vote.

• 1755

M. Stéphane Bergeron: Est-ce que cet ami ou ce parent pourrait aider, par exemple, dans une résidence?

M. Don Boudria: Non, absolument pas. C'est précisé au paragraphe (2). Cela avait déjà été discuté. C'est pour qu'une personne ayant de l'influence ne puisse pas faire voter tout le monde. Autrement, il pourrait y avoir corruption. C'est pourquoi il y a interdiction:

    (2) Il est interdit d'aider à titre d'ami plus d'un électeur à marquer son bulletin de vote.

M. Stéphane Bergeron: Mais pas le parent?

Mme Isabelle Mondou: Un à la fois.

M. Don Boudria: Il est interdit...

Mme Isabelle Mondou: Pour la famille, il y a une limite.

M. Don Boudria: Écoutez, on parle d'un parent. Je n'ai pas 14 mères; je n'en ai qu'une. Le problème se présente beaucoup moins souvent dans le cas d'un parent que dans celui d'un ami. Une personne pourrait avoir beaucoup d'amis. Par exemple, une personne qui voudrait influencer le vote, disons dans une maison de gens souffrant d'un handicap, dans une maison de personnes âgées ou dans un foyer de groupe, pourrait décider que tous les gens qui demeurent là sont ses amis et les emmener voter de son bord un à la fois. C'est pour éviter que ce soit source de corruption qu'il n'est pas permis d'aider plus d'une personne.

M. Stéphane Bergeron: Donc, l'idée d'avoir deux officiers d'élection ne vous sourirait pas plus qu'il ne le faut?

M. Don Boudria: Ce pourrait être changé.

M. Stéphane Bergeron: D'accord.

M. Don Boudria: Je n'y vois pas d'objection.

M. Stéphane Bergeron: Je vous laisse continuer votre réponse.

M. Don Boudria: D'accord. Pour ce qui est des fiducies de candidats, on y travaille toujours. J'espère présenter cela à l'étape du rapport. Je n'ai pas encore fini d'y travailler.

Pour ce qui est des directeurs du scrutin, comme je l'ai dit en Chambre, le système qu'on a existe dans six provinces ainsi qu'au Parlement du Canada. Je le pense bon. La Commission Lortie le pensait bon.

M. Stéphane Bergeron: Mais elle avait quelques réserves. Je vous ai lu un passage où elle disait qu'il fallait que ce soit indépendant du gouvernement, et on sait pertinemment que le système qui existe actuellement n'est pas tout à fait indépendant du gouvernement.

M. Don Boudria: Eh bien, je pense que le processus est sain. Par exemple, il existe des mesures très sévères pour retirer quelqu'un de cette fonction. C'est très compliqué. C'est pour éviter qu'un gouvernement veuille, pour toutes sortes de raisons, changer tous les directeurs à chaque élection ou quelque chose du genre.

Comme vous le savez sans doute, après qu'un directeur de scrutin est nommé, il ou elle est là jusqu'au prochain remaniement de la carte dans sa circonscription ou encore jusqu'à sa retraite ou son décès. Ces gens sont nommés en permanence, à peu près comme un juge, pour assurer justement leur indépendance. La façon de les choisir est totalement différente de la façon de choisir un juge, quand on y pense. Leur qualification est inamovible. Donc, effectivement, il est impossible de les démettre sauf pour une raison très grave. Comme je vous l'ai dit, depuis que je suis ministre responsable, je pense qu'on en a démis deux.

Mme Isabelle Mondou: Même pas.

M. Don Boudria: Techniquement, on ne les a pas démis. On les a approchés et on leur a dit...

M. Stéphane Bergeron: De prendre leur retraite.

M. Don Boudria: Non. On leur a dit qu'on avait l'intention de prendre des mesures parce qu'ils n'avaient pas bien fait leur travail. Il y même eu un cas où l'officier d'élection avait disparu; il fallait bien faire quelque chose. D'ailleurs, ce n'était même pas un député de mon parti; c'en était un du vôtre. Personne ne le trouvait. Il a fallu prendre des mesures. On a finalement réussi à la retrouver. On lui a dit qu'elle ne demeurait plus dans la circonscription, que c'était assez et que si elle ne démissionnait pas, on allait prendre les mesures qui s'imposaient. C'est d'ailleurs avec l'appui du député qu'on lui avait retiré son mandat.

Il s'est produit un autre cas semblable ailleurs au pays et cela a été la même chose. On a simplement averti la personne de se retirer. Cela fait donc deux personnes sur 301. Il ne faut pas prétendre, comme certains l'ont dit, qu'à chaque élection, on change le président d'élection. Celui de ma circonscription a été nommé par les conservateurs en 1988.

Un député: C'en était probablement un bon.

M. Don Boudria: Oui, elle est fantastique. cette dame, nonobstant ceux qui l'ont nommée. Elle fait un très bon travail. Quand il y a eu un remaniement de la carte électorale en 1997...

M. Stéphane Bergeron: Ce n'est pas toujours le cas.

M. Don Boudria: Je n'ai aucune intention de changer... Était-ce en 1997 ou en 1993? Entre 1993 et 1997, pour les élections de 1997.

M. Stéphane Bergeron: C'est cela.

M. Don Boudria: Il y a eu un remaniement de la carte et ma circonscription a été remaniée comme l'ont été, je pense, toutes les autres du pays, sauf deux ou trois. Personnellement, je n'ai eu aucune intention de recommander qu'on se débarrasse de cette personne qui avait fait un si bon travail. D'ailleurs, c'est toujours elle qui est en poste et elle sera là tant qu'elle fera un bon travail. J'espère qu'elle continuera pendant encore plusieurs années. Je lui souhaite bonne santé parce que nous avons besoin d'elle.

• 1800

Au sujet du plafond pour les dons, cela n'avait été recommandé ni par la Commission Lortie ni par le comité parlementaire. Quand vous parlez d'un plafond pour les dons, vous pensez seulement aux dons individuels. Vous ne pensez pas à un plafond qui s'appliquerait aux fonds que peut recevoir un parti. Il s'agit de la contribution d'un individu à une formation politique au cours d'une année.

M. Stéphane Bergeron: Il y a deux choses, monsieur le ministre. Il y a d'abord la source et il y a ensuite le plafond. On pourrait établir, par exemple, que, quelle que soit la source, un individu ne pourrait pas contribuer plus de tel montant, et une société ne pourrait pas contribuer plus de tel montant à un parti politique ou à un candidat.

M. Don Boudria: Il n'y a aucune limite de ce genre, sauf que toute contribution au-dessus de 200 $ devra être rendue publique, comme vous le savez. Les contributions qui sont rendues publiques sont jugées publiquement. Tous peuvent voir si M. Bergeron, Mme Dalphond-Guiral, M. Boudria ou M. Solomon a reçu de l'argent d'un tel ou d'une telle pour financer sa campagne électorale. Le système est transparent. Je pense qu'il est aussi imputable, surtout quand on pense à ce qu'on veut faire quant aux fiducies. Je pense que cela va encore améliorer le système afin qu'il soit possible de voir très clairement qui a donné quoi et à qui.

Maintenant, quant à bannir les contributions qui ne proviennent pas d'individus, cela présente très peu d'avantages. Lortie avait dit qu'il était tellement facile de contourner une telle disposition que cela n'aurait pas de sens. Il ne l'a peut-être pas dit dans ces mots-là, mais c'est à peu près ce que cela voulait dire.

On sait ce qui se passe aujourd'hui. Au lieu que ce soit la société qui contribue une somme de 1000 $, c'est le président qui contribue 500 $, la vice-présidente, 300 $ et la secrétaire, 200 $, ce qui revient au même. La seule différence, c'est que le système est moins transparent au lieu de l'être davantage. On ne sait plus de qui l'argent provient réellement. Il provient de gens aux noms obscurs au lieu de venir de GM, de Ford ou de je ne sais qui encore.

M. Stéphane Bergeron: Sauf que c'est illégal, monsieur le ministre. Les gens qui font ce genre de choses savent qu'ils commettent un acte illégal et qu'ils peuvent être poursuivis pour avoir commis cet acte illégal.

M. Don Boudria: Lortie avait également dit qu'on épuiserait rapidement les fonds des formations politiques si on faisait cela. Ce n'est pas au coeur du débat, mais c'est un autre point qu'avait fait valoir Lortie.

Vous savez également que les fonds qui sont transférés d'une association de circonscription à un parti, d'un parti à une association de circonscription ou de la ristourne du candidat à une association de circonscription sont maintenant inclus dans le projet de loi. Rien de cela n'y était auparavant. On inclut donc des éléments pour augmenter la transparence, éléments que je qualifierais d'importants.

Parlons du dossier de l'incitatif pour recruter un plus grand nombre de femmes candidates. Bien sûr, j'ai décrit quelques petites mesures que je ne qualifierais pas d'importantes, mais même ce que demande Mme St-Hilaire dans son projet de loi n'est pas une mesure importante. Elle suppose que, si on dit aux partis qu'ils toucheront une ristourne quand ils présenteront suffisamment de femmes dans des circonscriptions gagnantes, ils en nommeront effectivement plus et les femmes gagneront plus souvent. Tel est le principe qui s'appliquerait.

Il y avait une autre mesure, que j'avais proposée au comité, et ce serait de recruter un plus grand nombre de candidates. C'est une autre possibilité. Ces mesure, jusqu'à maintenant, n'ont pas beaucoup d'appui. Les députés ne sont pas tous en faveur de cela, loin de là. Je poursuis mes consultations, mais en ce moment, cette initiative ne jouit pas de beaucoup d'appui. Au moins deux des partis politiques autour de cette table se sont prononcés carrément contre ces deux initiatives. Ce n'est la fin du monde et cela ne veut pas dire que c'est impossible à mettre en oeuvre, mais il est quand même important de noter que deux des cinq partis n'en veulent pas.

Dans la population, c'est un peu la même chose. Il est loin d'y avoir un consensus favorable. En tout cas, je continue à en parler. J'ai fait des discours un peu partout. Je tente de solliciter des appuis où je peux en trouver. Merci de m'en offrir, si c'est ce que vous êtes en train de faire. On verra si on peut obtenir suffisamment d'appui pour implanter le projet. Si c'est le cas, j'inclurai cela à l'étape du rapport. Cela peut fonctionner, mais cela n'offrira pas un gros avantage.

• 1805

Le président: Merci.

Monsieur Harvey.

M. André Harvey: Comme tout le monde, je remercie le ministre de sa disponibilité. Il ne fait pas mentir la réputation qu'il a d'être toujours disponible pour les activités de la Chambre depuis au-delà de 30 ans.

En ce qui concerne le financement, j'aimerais souligner au ministre qu'il y a des ouvertures intéressantes. On ne pourra pas amorcer et régler une réforme du financement des partis politiques nationaux dans le cadre de ce comité-ci parce qu'on aurait besoin de plusieurs autres mois de travail, mais des ouvertures intéressantes ont été faites.

On a souligné à plusieurs reprises que les Canadiens semblaient prêts à accepter que leur gouvernement national assume une partie importante du financement des campagnes électorales, parce que cela sauvegarderait son image d'honnêteté et effacerait cette impression d'intentions un peu occultes des gros organismes qui subventionnent les partis, soit les compagnies, les banques, les syndicats, etc. Je pense donc que notre comité devrait envisager de se pencher sur cette question au cours des prochaines années.

Concernant la question de faire preuve d'un peu plus d'objectivité dans la nomination des directeurs du scrutin, on pourrait avoir une façon un peu plus rationnelle et un peu moins partisane de nommer ces gens. Je ne dis pas que les gens qui sont nommés ne font pas un bon travail, monsieur le ministre. J'ai posé la question directement au directeur général des élections. Je lui ai demandé si c'était un élément essentiel de ses recommandations. À moins que je ne me trompe, le directeur général des élections, M. Kingsley, m'a dit que c'était un élément essentiel de ses recommandations et qu'il souhaitait que le directeur du scrutin soit nommé selon les normes les plus strictes qu'on trouve dans les entreprises et dans toutes nos activités.

M. Stéphane Bergeron: Cette fois, vous aviez bien compris.

M. André Harvey: Monsieur Bergeron, on fait notre possible pour comprendre, mais on n'y arrive pas toujours, n'est-ce pas?

Concernant l'embargo sur toutes les activités de sondage, je pense qu'il y aurait lieu de «scraper» ça et de ne pas s'en occuper. Je vais revérifier, monsieur le ministre, mais on a bien examiné l'impact de la publication des sondages et il nous a semblé que cet impact était quasi nul sur les intentions de vote. Je me réserve le droit de réétudier cela.

Concernant la publicité et les interventions des tiers dans les campagnes électorales, vous maintenez votre position, si j'ai bien compris, monsieur le ministre. Vous voulez encadrer cela financièrement, tant au niveau des circonscriptions qu'au niveau de la campagne nationale. Vous savez que nous ne favorisons pas cette chose. On va réétudier cela. On va relire à plusieurs reprises votre témoignage de ce soir et on va essayer d'analyser cela.

Sur la question d'encourager les femmes à participer à la vie politique, on a eu une bonne discussion cet après-midi, lors du beau témoignage de Mme Manon Tremblay. On a eu des échanges intéressants entre nous. Si j'ai bien compris, vous retirez votre intention de favoriser...

M. Don Boudria: J'étudie toujours cette question.

M. André Harvey: Je vous remercie, monsieur le président. Si le ministre veut réagir, libre à lui.

M. Don Boudria: Oui, j'aimerais bien. Au sujet des fonds publics, bien sûr, les partis politiques sont remboursés de 22,5 p. 100 de leurs dépenses admissibles par le gouvernement après l'élection. Les sondages sont exclus, mais les partis sont remboursés de 22,5 p. 100 de leurs autres dépenses en général. Secundo, les candidats sont remboursés d'environ 50 p. 100 de leurs dépenses. Donc, 50 p. 100 des dépenses du candidat et 22,5 p. 100 des dépenses des partis sont remboursées.

Il ne faut pas que ce soit payé uniquement par les contribuables. Il pourrait arriver qu'un parti politique n'ait aucun appui des électeurs, mais puisse quand même se faire rembourser au complet. Tel est le danger.

• 1810

C'est un peu le problème qu'on a rencontré il y a quelques années. Comment s'appelait le groupe qui rebondissait un peu partout? Le Parti de la loi naturelle. Les membres de ce parti avaient trouvé une façon d'extorquer les contribuables en prétendant être un parti politique. Ils profitaient de la générosité de la ristourne. Il faut faire attention de ne pas créer des situations comme celle-là. Si un parti politique a tellement peu d'appui du public que personne ne veut contribuer à sa cause, il est possible que ce parti ne mérite pas d'être appuyé par qui que ce soit, y compris les contribuables.

Je n'irais pas aussi loin que M. Ted White, qui nous a dit, si j'ai bien compris son témoignage d'il y a quelques jours—il a peut-être même un projet de loi en Chambre—que les contribuables ne devaient pas du tout contribuer à la ristourne électorale. Je pense qu'il y a une position mitoyenne. Est-ce que la formule qu'on a actuellement, soit 50 p. 100 pour les candidats et 22,5 p. 100 pour les partis, est la bonne? Est-ce qu'il y aurait lieu de la modifier? Monsieur le président, je vous invite à faire une réflexion à long terme là-dessus, mais sans retarder l'adoption du projet de loi. C'est un choix de société qu'on peut faire à un moment donné.

M. André Harvey: Je veux préciser au ministre qu'un parti qui n'a aucune valeur ne pourra pas recueillir des fonds. La meilleure formule est celle des crédits. Le parti qui est insignifiant ne pourra pas recueillir de fonds.

M. Don Boudria: Quand j'ai parlé des fonds publics, je n'ai même pas parlé du crédit d'impôt qui existe en plus des deux formules que je viens de décrire.

Maintenant, pour ce qui est des directeurs du scrutin, si je ne me trompe pas, M. Warren Bailie, lorsqu'il est venu témoigner devant vous, vous a dit que s'il devait embaucher des directeurs du scrutin par la méthode qui est préconisée par certains, il lui faudrait doubler son personnel, qui est actuellement de 19 personnes. Il lui faudrait embaucher 19 personnes de plus. Ce serait 19 personnes pour l'Ontario seulement. Les circonscriptions sont identiques aux niveaux fédéral et provincial. S'il en faut 19 pour l'Ontario seulement, il en faudrait sûrement 50 au niveau national.

M. Stéphane Bergeron: Deux.

M. Don Boudria: Écoutez, il y a là quelque chose de pas correct. Quand il en faut 19 pour une province, deux ne suffisent certainement pas au niveau national. C'est mathématiquement impossible. Quand il en faut 19 au niveau provincial, il en faut à peu près 50 au niveau national. Je vous invite à faire le calcul. Les circonscriptions sont identiques en Ontario et au fédéral. Elles ont souvent le même personnel. Je pense qu'une bureaucratie de cette taille est injustifiable.

En ce qui a trait aux tiers, je vous invite à y réfléchir. C'est à vous de décider si vous êtes toujours en faveur de cela ou si vous êtes contre. Je sais que quand on avait présenté le projet de loi au début, le leader de votre parti en Chambre avait dit qu'il y était favorable. Ensuite, l'officiel du parti qui est venu comparaître devant votre comité a dit qu'il était contre. Bien sûr, on ne peut pas être à la fois pour et contre. En tout cas, je vous invite à y réfléchir et à consulter le jugement Libman. J'en ai des exemplaires et je peux vous en fournir, particulièrement les pages pertinentes, pour vous aider dans cette réflexion. Je pense que ce que la Cour suprême nous a dit dans ce jugement est pas mal important.

Je ne sais pas si j'ai répondu à toutes les questions. Je pense que oui.

M. André Harvey: Sur l'incitatif.

M. Don Boudria: Sur l'incitatif pour les femmes, comme je l'ai dit tout à l'heure, nous ne sommes pas encore fixés dans ce dossier. Je ne dis pas encore non. J'attends de voir s'il y a consensus à ce sujet. S'il n'y a pas d'appui à cette mesure, je ne vais certainement pas l'adopter.

[Traduction]

Le président: Monsieur le ministre, je sais que vous avez eu une longue journée. C'est le cas de la plupart d'entre nous, et la journée n'est pas encore terminée.

M. Don Boudria: En effet, j'ai eu une rencontre avec vous à 7 h 15 ce matin.

Le président: C'est juste. Il est maintenant 18 h 15, et je me demande combien il vous reste de temps encore. M. Solomon avait une question à poser.

M. John Solomon: Je voudrais avoir ma part du temps de parole. J'ai plusieurs questions auxquelles je voudrais obtenir réponse.

Le président: D'accord. M. Solomon a au moins une question.

Une voix: Nous n'avons pas beaucoup de temps.

M. John Solomon: Eh bien, le ministre peut rester et les autres peuvent partir. Cela m'est égal.

Le président: D'accord.

Je me demande seulement s'il y a une raison qui vous obligerait à partir et dont nous ne serions pas au courant.

M. Don Boudria: Non, à part le fait que je suis presque au bout de mon rouleau, tout va bien.

Le président: Très bien. Nous allons donc passer à M. Solomon.

M. John Solomon: J'apprécie ce qui a été fait du côté des répondants ruraux. Le problème ne touche pas des milliers de personnes, mais il n'est quand même pas sans importance dans un régime démocratique.

• 1815

J'ai plusieurs questions à vous poser. La première concerne la nécessité d'éviter des élections partielles coûteuses en cas de partage des voix. Pourquoi avez-vous supprimé la règle selon laquelle le directeur du scrutin ne votait pas aux élections? À mon avis, si le directeur du scrutin pouvait départager les voix, nous pourrions économiser les dizaines de milliers de dollars qu'il nous en coûte pour tenir une élection partielle chaque fois qu'il y a partage, le cas échéant.

Deuxièmement, monsieur le ministre, la méthodologie utilisée pour un sondage ne pourrait-elle pas être publiée en même temps que les résultats du sondage, au lieu que ce soit dans un délai de 24 heures?

M. Don Boudria: C'est le cas à l'heure actuelle, mais je vais vous expliquer ce qu'il en est.

M. John Solomon: Très bien. Troisièmement, bien des gens estiment qu'il faudrait ajouter l'occupation à la liste des électeurs. Si nous avons le nom et l'adresse, pourquoi ne pas inclure l'occupation? Le projet de loi dit que seul un député peut se servir des listes d'électeurs à des fins de communication, et précise que les candidats peuvent aussi s'en servir pendant les élections fédérales. Il serait donc très utile d'inclure l'occupation. J'aimerais aussi que les numéros de téléphone figurent sur la liste, mais je comprends que cela soulève des problèmes sur le plan de la protection de la vie privée, alors je ne me lancerai pas dans cet argument-là.

La quatrième question concerne les contributions faites par des sociétés à numéro. Y aurait-il moyen de rendre cela plus transparent? Par exemple, quand un société à numéro fait une contribution, il serait important d'avoir, non pas seulement le numéro de la société, mais le nom et l'adresse de son président ou du chef de la direction, pour que nous sachions qui sont ces gens.

Par ailleurs, je ne pense pas que le projet de loi propose une solution satisfaisante pour ce qui est de l'heure de fermeture des bureaux de scrutin en Saskatchewan, et j'aurais un amendement à proposer à cet égard.

M. Don Boudria: Nous n'avons toujours pas réglé ce problème?

M. John Solomon: Nous n'avons toujours pas réglé ce problème, et j'aimerais proposer qu'on ajoute ce qui suit à la l'alinéa 128a):

    Sauf pour les bureaux de scrutin de la Saskatchewan où contrairement à ce qui se passe dans les autres fuseaux horaires, on reste à l'heure normale du Centre au lieu de passer à l'heure avancée et où les heures de vote le jour du scrutin sont de 7 h 30 à 10 h 30.

Je sais que le projet de loi prévoit que le directeur général des élections peut décider d'adapter les heures de vote dans ce cas-là, mais pourquoi ne pas simplement le dire dans la loi pour que les gens de la Saskatchewan sachent à quoi s'en tenir, au lieu qu'ils soient soumis à une décision arbitraire qui pourrait être prise ou ne pas être prise par le directeur général des élections et qui toucherait l'ensemble de la province? J'aimerais que vous vous penchiez là-dessus, parce que nous avons déjà mis la Saskatchewan dans le pétrin à cause de cela, et j'essaie de vous offrir une solution très claire pour rétablir les choses. Je vous invite donc à étudier cette solution.

J'ai une autre question visant à éclaircir ce que vous avez dit dans votre exposé. Vous avez parlé de la période d'interdiction concernant les résultats de sondage qui serait ramenée à 24 heures. Je vous demanderais de me dire si donc l'interdiction entre en vigueur à minuit le samedi ou à minuit le dimanche.

M. Don Boudria: Le dimanche.

M. John Solomon: Il ne s'agit donc pas de 24 heures. Est-ce que c'est 24 heures avant le jour du scrutin ou avant la fermeture des bureaux de scrutin?

Une voix: Avant la fermeture des bureaux de scrutin.

M. Michael Peirce (directeur des Services juridiques, Législation et planification parlementaires, Bureau du Conseil privé): Cela fait un peu moins de 24 heures.

M. John Solomon: Ainsi, il n'y a pas vraiment d'interdiction. Chacun est libre de faire comme il veut. Tout ce qui est interdit c'est de publier les résultats du sondage, c'est-à-dire les résultats des élections le jour du scrutin. Pourquoi ne pas alors supprimer les périodes d'interdiction, permettre à tout le monde de voter de 8 heures à 20 heures, pour que la situation soit claire?

Le dernier point que je voudrais aborder, si vous le permettez, c'est la controverse que soulèvent dans le fuseau horaire du Pacifique, et plus particulièrement dans la région de Vancouver, les heures de vote de 7 h à 19 heures. La controverse tient au fait que, même si on vous accorde trois heures pour aller voter, il est parfois difficile de se rendre au bureau de scrutin, et quiconque a essayé de se déplacer à Vancouver aux heures de pointe le sait bien. Certains proposent que les heures devraient être de 7 h 30 à 19 h 30 plutôt que de 7 h à 19 heures. Je vous demanderais d'étudier aussi cette proposition.

M. Don Boudria: Très bien. Au sujet du partage des voix, je ne dis pas qu'il est impossible qu'il y en ait, mais que c'est presque impossible qu'il y en ait.

M. John Solomon: Nous avons eu un partage des voix en Saskatchewan l'automne dernier.

M. Don Boudria: C'est bien possible, mais au niveau fédéral, la dernière fois où il y a eu partage des voix, c'était en 1962. Il s'agissait des candidats Martineau et Tom Lefebvre. M. Martineau avait été élu grâce au vote du directeur du scrutin, par un vote donc, parce qu'il était le député sortant. La situation aurait été bien plus difficile s'il n'y avait pas eu de député sortant. C'est donc le député sortant qui a été élu par le vote du directeur du scrutin.

• 1820

J'avais les chiffres la dernière fois. Je crois qu'il est arrivé à six reprises qu'il y ait partage des voix depuis les débuts de la Confédération au Canada. Dans deux cas, les voix ont été départagées par un recomptage, si bien qu'il y a eu partage quatre fois seulement. Chaque fois qu'il y a des élections, 300 personnes se voient refuser le droit de voter parce qu'elles sont directeurs du scrutin. Multipliez ces 300 personnes par le nombre d'élections que nous avons eues depuis la Confédération; nous en avons eu une trentaine depuis la Confédération. Est-il normal d'empêcher 9 000 personnes de voter parce qu'il y a eu partage des voix deux fois?

M. John Solomon: Sur combien de millions? Sans doute 175 millions sur ces 10 années, ou à peu près, si l'on utilise vos chiffres. Le fait est qu'il faut qu'il y ait une certaine neutralité à ce niveau-là aussi jusqu'au jour du scrutin.

M. Don Boudria: Le droit de voter est garanti par la charte qui se trouve incluse dans la Constitution. Nous ne croyons pas que cette règle résisterait à une contestation en vertu de la charte. Bien entendu...

M. John Solomon: [Note de la rédaction: Inaudible]

M. Don Boudria: Non, mais enfin, il convient de noter... Vous avez invoqué le cas de la Saskatchewan. Le juge n'a-t-il pas ordonné la tenue d'une nouvelle élection?

M. John Solomon: Non, pas pour ce cas-là, pas pour le cas de partage des voix.

M. Don Boudria: Non?

Le cas de Maurizio Bevilacqua est le cas le plus récent de quasi-partage des voix que nous avons eu à la Chambre des communes. Cela s'est produit en 1988. Un type du nom de O'Brien, un Conservateur, a été déclaré élu et a siégé à la Chambre des communes avant que l'on ne déclare qu'il n'avait pas été élu finalement. Il a même fait un discours. C'est un type qui n'était même pas député et dont on retrouve les propos dans le hansard. Allez voir cela.

M. O'Brien a lancé une série de recomptages, et le tout a duré environ un an et demi. Les tribunaux ont fini par rejeter tout ce qui avait été fait et ont dit qu'il faudrait tenir une nouvelle élection. Il a fallu presque deux ans pour que Maurizio Bevilacqua puisse prendre sa place à la Chambre des communes. Il pourrait vous dire combien il lui en a coûté. Mettons qu'il a dépensé 250 000 $ pour les recomptages, les frais d'avocat, etc., sans compter les deux élections. Est-ce normal qu'on dépense autant d'argent pour assurer le respect du processus démocratique en cas de partage des voix?

N'est-il pas plus normal de tenir une élection partielle deux semaines plus tard ou une semaine ou encore quelques jours plus tard? Les candidats ont tous leur bureau de campagne, tout est là—, les téléphones sont branchés, tout est déjà installé. N'est-il pas plus efficient de procéder ainsi pour le cas où cela se produirait une fois tous les 30 ans ou tous les 40 ans? Il me semble que c'est plus raisonnable de faire comme cela en cas de partage des voix que de faire comme ce qui est proposé. En tout cas, chacun a droit à son opinion.

Pour ce qui est de publier la méthodologie, j'espère que le libellé dit bien ce que je crois qu'il dit. Le libellé précise—et Mme Mondou pourrait peut-être me donner l'article, si elle le veut bien—que la méthodologie doit être publiée en même temps. S'il est fait mention du délai de 24 heures, c'est que pendant les 24 premières heures où on publie les résultats d'un sondage, il faut publier en même temps la méthodologie utilisée pour le sondage.

Ce paragraphe dit:

    326.(1) Pendant la période électorale, la personne qui est la première à diffuser les résultats d'un sondage électoral—sauf le sondage régi par l'article 327—[...] au cours des 24 heures qui suivent doivent fournir, avec les résultats, les renseignements suivants [...].

En d'autres termes, pendant ces 24 premières heures, chaque fois que vous vous référez au sondage, vous devez publier la méthodologie. Vous ne pouvez pas publier la méthodologie 24 heures plus tard en disant: «À propos, vous savez, le sondage que nous avons publié dans le journal d'hiver? C'était un de ces sondages bidons qui ne signifie rien.» Bien entendu, ce serait probablement pire que s'il n'y avait pas de règle du tout, si c'était interprété ainsi. Ce n'est certainement pas l'intention.

Comme vous le savez, nous avons débattu en comité de la nécessité d'indiquer dans les renseignements l'occupation et il n'y a pas grand monde qui soit pour. J'en ai parlé aux responsables au Commissariat à la protection de la vie privée et pour eux le seul critère est la nécessité d'un tel renseignement pour la tenue d'élections. Franchement, je ne vois comment je pourrais en montrer la nécessité. Avant de publier des renseignements personnels, il faut satisfaire au critère de la nécessité. Si c'est nécessaire, c'est nécessaire. Mais en l'occurrence comment cela peut-il être nécessaire? Il est difficile de démontrer qu'il faut savoir si John Smith est aide-serveur ou ministre pour pouvoir l'identifier. Dans le cas de Don Boudria, il a été les deux à un moment ou à un autre de sa vie.

• 1825

Désormais les adresses des sociétés à numéro seront indiquées. Le saviez-vous? C'est un changement que nous avons apporté dans le contexte des contributions.

M. John Solomon: Pourquoi ne pouvons-nous avoir le nom et l'adresse de la personne?

Mme Isabelle Mondou: Le numéro peut être le nom de la société.

M. John Solomon: Comme vous le savez, généralement les sociétés à numéro sont des cabinets d'avocats. Comme quelqu'un l'a déjà dit, 99 p. 100 des sociétés à numéro donnent comme leur adresse à un cabinet d'avocats.

Mme Isabelle Mondou: C'est leur nom.

M. John Solomon: Et le nom de la personne qui est responsable de cette société? C'est plus transparent qu'un cabinet d'avocats.

Mme Isabelle Mondou: C'est un renseignement public.

M. Don Boudria: Oui, si vous avez la société à numéro et son adresse, les noms de ses responsables sont enregistrés ici à la Bibliothèque du Parlement.

M. John Solomon: Est-ce que ce sera désormais publié? C'est ce que vous dites?

Mme Isabelle Mondou: Non.

M. John Solomon: Exactement. Rendons tout transparent. On peut faire toutes ces recherches, c'est possible, mais pourquoi?

M. Don Boudria: Est-ce que vous proposez qu'il devrait y avoir le nom d'un administrateur de la société en plus du nom de la société et son adresse?

M. John Solomon: Le nom de la société, oui... Je m'excuse, le nom...

M. Don Boudria: Parfois il n'y a pas de nom.

M. John Solomon: ... du chef de la direction ou du président. Peu importe lequel des deux mais un nom devrait être associé à la société par opposition à un nom de cabinet d'avocats auquel 6 000 sociétés...

M. Don Boudria: Laissez-moi y réfléchir. A priori, je ne suis pas contre. Si cela facilite l'identification et la transparence, il me semble...

Si c'était la règle pour les sociétés à numéro, s'appliquerait-elle aussi aux sociétés dont la dénomination n'est pas numérique?

M. John Solomon: Bien sûr.

M. Don Boudria: Qu'une société s'appelle 1234 Canada Inc. ou qu'elle s'appelle ABC Canada Inc., cela ne fait pas beaucoup de différence.

M. John Solomon: Ou CIBC, oui. Peu importe, que cela soit la même chose pour tout le monde.

M. Don Boudria: Donc quand ce n'est pas une personne, il faut qu'un administrateur soit identifié.

M. John Solomon: Ce serait parfait.

M. Don Boudria: Nous y réfléchirons.

M. John Solomon: Je vise particulièrement les sociétés à numéro parce qu'on sait où est la CIBC, on sait où est John Deere et on sait où sont toutes ces sociétés. Par contre on ne sait pas où trouver la société 15799332 Inc.

Une voix: [Note de la rédaction: Inaudible]

M. John Solomon: Exactement, ou de qui il s'agit.

M. Don Boudria: Très bien.

En ce qui concerne l'heure normale, je pense que c'est à la demande du directeur général des élections que la chose a été formulée ainsi, mais je peux vérifier. En passant, c'est formulé de cette façon notamment parce que l'heure normale relève des provinces au Canada et non pas du gouvernement fédéral. Il y a quelques années, il y a eu la fois où Terre-Neuve a changé d'heure. Je ne sais pas si vous êtes au courant. Les provinces peuvent prendre une telle décision et l'une l'a fait. L'expérience a échoué et on est revenu à l'heure originelle. Ces dispositions permettent au directeur général des élections d'apporter les ajustements nécessaires sans en demander la permission au Parlement.

M. John Solomon: C'est toujours là à l'article 129, et bien que j'aie soulevé la question avec le directeur général des élections, il n'y est toujours pas question de la Saskatchewan. Il a dit que les heures indiquées s'appliquent à l'heure normale, et c'est très bien. Tout ce que je dis, c'est que les bureaux de scrutin en Saskatchewan sont ouverts en fonction de l'heure normale du Centre et non pas de l'heure du Centre. Pourrait-on fixer des heures précises pour cette province? Je pense que cela réglerait le problème. Les heures d'ouverture commençant à 8 h 30, prévues à l'article 128, demeurent inchangées en ce qui concerne l'heure normale, mais lorsqu'il s'agit de l'heure avancée que vous ne voulez pas... Si c'est le cas en Saskatchewan, on peut respecter ces heures. Tout y est prévu. Je pense qu'il faut que ce soit expressément à l'intention de la Saskatchewan.

M. Don Boudria: Je ne m'y oppose pas. Nous allons communiquer avec le directeur général des élections pour vérifier et apporter les précisions que vous demandez.

M. John Solomon: Non, excusez-moi. J'aimerais voir un amendement à cet effet, Don.

M. Don Boudria: Je regrette, je ne peux pas...

M. John Solomon: Il faut prévoir la situation de la Saskatchewan pendant l'heure avancée. Je pense que mon libellé prévoit presque tout.

M. Don Boudria: Veuillez nous en fournir copie et nous allons vérifier.

M. John Solomon: Merci.

M. Don Boudria: Au sujet de la période d'interdiction, je regrette, j'ai oublié votre question. Vous vouliez précisément...

M. John Solomon: Je pense que vous avez déjà apporté les précisions nécessaires.

M. Don Boudria: Très bien, c'est fait.

En ce qui concerne les trois heures de congé, à une certaine époque, c'était quatre heures. Comme vous le savez, on a ramené ça à trois.

Mme Isabelle Mondou: Avec les horaires décalés.

M. Don Boudria: Avec les horaires décalés actuels, nous savons que si nous changeons l'heure dans une partie du pays, cela se répercute jusqu'à l'autre bout du pays, entraînant le risque que le vote se déroule très tard la nuit à l'autre bout. Cela pourrait créer de grands inconvénients.

• 1830

Je vais y repenser, mais la période a été négociée avec les provinces à l'origine. Rappelez-vous qu'il y a un prix à payer. Si vous avez une heure uniforme et que vous la changez à un bout du pays, manifestement l'uniformité provoquera des modifications dans toutes les autres régions; sinon ce ne serait pas uniforme.

M. John Solomon: Non. Cela ne fait qu'ajouter une autre demi-heure en Colombie-Britannique. Cela signifie que les électeurs de l'est du Canada vont devoir attendre exactement une demi-heure de plus pour connaître les résultats.

M. Don Boudria: Non, c'est le contraire.

M. John Solomon: Si vous changez l'heure à Vancouver et que l'heure de fermeture des bureaux devient 19 h 30 plutôt que 19 h 00...

M. Don Boudria: Cela signifie qu'il faut une période d'interdiction d'une demi-heure en Colombie-Britannique ou alors on doit faire fermer tous les bureaux de scrutin ailleurs au pays une demi-heure plus tard.

M. John Solomon: Je comprends les répercussions de cet amendement. Il faudrait des amendements corrélatifs visant la période d'interdiction.

M. Don Boudria: Voilà ce que je dis.

M. John Solomon: Ce ne serait pas une grosse affaire, n'est-ce pas...

M. Don Boudria: À quelle heure va-t-on maintenant fermer les bureaux à Terre-Neuve?

M. John Solomon: ... quitte à supprimer la période d'interdiction. C'est ce que l'on devrait faire de toute façon, selon moi.

M. Don Boudria: Il est à présent 21 h 30 à Terre-Neuve. Si on modifie l'horaire d'une demi-heure, il y aura des bureaux de scrutin qui fermeront à...

Mme Isabelle Mondou: L'heure de l'Est est...

M. Don Boudria: L'heure de l'Est de 9...

Mme Isabelle Mondou: C'est le Québec.

M. Don Boudria: Très bien. Au Québec et en Ontario, il est actuellement 21 h 30. Autrement dit, les bureaux de scrutin fermeraient à 22 heures, et il faudrait ajouter à cela une heure ou une heure et demie pour le dépouillement. Chaque fois qu'on change l'heure, cela a des répercussions. Je pense que cela perturberait beaucoup le système.

Soit dit en passant, les trois heures peuvent être accordées au début ou à la fin de la journée. Cela fait une différence, même si tout le monde n'en est pas conscient. Cela ne veut pas dire que l'employeur est tenu d'accorder trois heures. Cela veut dire que la personne doit avoir trois heures pour voter.

Autrement dit, quelqu'un peut commencer sa journée de travail à 11 heures et travailler jusqu'à 19 heures. Si les trois heures sont prévues le matin, l'employeur n'est pas tenu de laisser du temps libre à l'employé. La loi ne l'y oblige pas. Elle ne stipule pas que l'employeur doit accorder trois heures de temps libre à la fin de la journée. La personne qui va voter doit avoir trois heures à sa disposition pour se rendre au bureau de scrutin. Les trois heures doivent être consécutives. Autrement dit, l'employeur ne peut pas dire à la personne qu'elle a une heure pendant le déjeuner et lui accorder ensuite une heure à la fin de la journée et une dans la matinée. Cela ne fonctionne pas. Il faut que ce soit trois heures de suite.

M. John Solomon: Merci.

Le président: Très bien. Pour la dernière question, sous réserve de ce qu'ajoutera le ministre, M. White a une question à poser au sujet des bureaux de scrutin dans les établissements correctionnels provinciaux. Voulez-vous poser votre question?

M. Ted White: Oui. C'est une question tout à fait impartiale, monsieur le ministre. Cela pourrait être compliqué et vous avez peut-être les moyens voulus de résoudre le problème. En tout cas, ni moi ni les autres membres du comité n'en ont les moyens. Je veux parler des articles 255 et 256 du projet de loi.

Hier, nous avons entendu le témoignage de M. Gerald Chipeur, avocat. Il a fait des remarques sur la sécurité et le milieu peu rassurant que constitue une prison. Dans ces articles du projet de loi, il est question d'installer un bureau de scrutin dans la prison et d'avoir sur place un citoyen canadien qui représente un parti enregistré pendant que le vote se déroule.

D'après M. Chipeur, dans l'intérêt de la sécurité de tous les intéressés, il vaudrait mieux que les prisonniers votent par correspondance uniquement. Nous avons inclus dans la loi des dispositions visant à protéger comme il se doit les femmes qui demeurent dans des refuges ou d'autres personnes susceptibles d'être en danger. M. Chipeur, avocat qui travaille continuellement aux côtés de criminels, a dit qu'il est terriblement intimidant, même pour lui, de se trouver dans un milieu carcéral. Le risque d'être en danger est minime, mais il estime qu'il n'est pas normal de soumettre qui que ce soit à ce genre de chose et que nous devrions envisager de prévoir le vote par correspondance pour les prisonniers.

Je vous demande donc très respectueusement d'envisager cette question. C'est un problème grave qui mérite réflexion.

M. Don Boudria: D'après mes renseignements, aucun problème n'a été signalé au directeur général des élections. Je le vérifierai à nouveau. S'il y a eu des problèmes de cet ordre, je suis tout disposé à me pencher sur la question, mais s'il n'y a jamais eu de plainte à ce sujet, ce serait peut-être inutile. Nous sommes tout à fait disposés à vérifier auprès du directeur général des élections pour établir si une telle mesure s'impose.

• 1835

M. Ted White: Comme je l'ai dit en toute bonne foi, c'est une question tout à fait objective.

M. Don Boudria: Bien sûr.

M. Ted White: Il me semble que c'est un problème qui mérite notre attention. Si le directeur général des élections est convaincu qu'il n'y a aucun danger et que tout se passe pour le mieux...

M. Don Boudria: Il n'a jamais signalé de danger, mais ce n'est pas une raison de ne pas examiner cette question, et c'est ce que nous ferons.

M. Ted White: Merci beaucoup.

Le président: Voulez-vous ajouter quelque chose, monsieur le ministre?

M. Don Boudria: Je tiens à remercier à nouveau tous les membres du comité pour leur travail. Ce n'est pas une mince tâche. Ce projet de loi est long et tout le monde y a travaillé très fort.

On me dit qu'il y a eu des propositions très utiles de la part de tous. Cela nous a permis d'améliorer le projet de loi. Bien entendu, même auparavant, les députés ont aussi travaillé très fort à préparer le rapport du comité parlementaire, qui est le fondement de ce projet de loi. Là aussi, tous ont fait un excellent travail.

Par votre intermédiaire, monsieur le président, je voudrais aussi exprimer ma reconnaissance à tous les témoins qui ont comparu devant votre comité. Ils nous ont aidés à produire une loi qui sera, nous l'espérons, meilleure, afin d'assurer la libre participation du plus grand nombre possible de Canadiens aux élections démocratiques. Je suis très satisfait de la contribution de tout le groupe.

Merci.

Le président: Merci, monsieur le ministre.

Il est maintenant 18 h 37, la séance est levée jusqu'à demain matin où nous commencerons l'étude article par article. Nous allons peut-être commencer un peu après 10 heures parce qu'à cette heure-là votre président sera peut-être à la Chambre pour s'occuper des affaires courantes. Si les collègues sont d'accord, ce sera pour environ 10 h 15.

Merci.

La séance est levée.