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FOPO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FISHERIES AND OCEANS

COMITÉ PERMANENT DES PÊCHES ET DES OCÉANS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 4 novembre 1999

• 0904

[Traduction]

Le président (M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.)): La séance est ouverte. Nous allons nous pencher aujourd'hui sur les problèmes de la pêche de la côte Ouest. Nos témoins sont des membres du Comité sur la crise du saumon sockeye, de la Colombie-Britannique; de la British Columbia Fisheries Survival Coalition; et Dennis Streifel, ministre des Pêches de la Colombie-Britannique.

Je vous souhaite la bienvenue à tous. Ce matin, nous allons pouvoir consacrer un peu plus de temps que d'habitude aux exposés parce que vous êtes assez nombreux.

Qui souhaite commencer?

Mme Christine Hunt (Comité sur la crise du saumon sockeye de la rivière Fraser): Je présiderai cette partie du groupe de témoins, et nous allons commencer avec l'honorable Dennis Streifel.

• 0905

L'hon. Dennis Streifel (ministre des Pêches, province de la Colombie-Britannique): Merci beaucoup et bonjour, chers collègues.

Je m'appelle Dennis Streifel et je suis ministre des Pêches de la Colombie-Britannique. Je suis accompagné de citoyens de la Colombie-Britannique qui sont confrontés à une crise économique et sociale suite à l'effondrement de la remonte de saumon rouge du fleuve Fraser, cette année.

La crise est particulièrement difficile cette année, comme vous pourrez le voir quand je vous aurai donné le contexte. C'est en effet la troisième ou quatrième année de suite que l'accès économique est limité ou nul à la pêche du saumon sur la côte de la Colombie-Britannique, alors que c'est une activité qui garantit traditionnellement à la province une valeur économique de l'ordre de 0,5 milliard de dollars. Mon exposé pourrait donc s'intituler: Une pêche incertaine et un avenir incertain.

Tout d'abord, l'an dernier et l'année précédente, les pêcheurs côtiers de la Colombie-Britannique, suite à la négociation du Traité sur le saumon du Pacifique et à d'autres initiatives, ont participé avec le ministère des Pêches et Océans à la mise en oeuvre d'une politique de conservation du saumon coho, qui est menacé. Dans ce contexte, la pêche de ce saumon a été presque totalement interdite l'an dernier et pendant les années précédentes.

Cette année, l'effondrement de la pêche au saumon rouge du Fraser a aggravé la situation. La collectivité des pêcheurs a enregistré ses résultats économiques les plus faibles de toute l'histoire de la remonte du saumon du Fraser, qui est traditionnellement considérée comme la plus grosse remonte de saumon au monde.

La modification spectaculaire des objectifs de conservation dans le secteur de la pêche, conjuguée à la mise en oeuvre accélérée de certaines politiques économiques, a débouché sur un accès extrêmement limité à la pêche et, dans certains cas, à un accès complètement nul. Après plusieurs années de restrictions, un moratoire a été imposé en 1998 pour le saumon coho, autrefois très abondant, et on a fermé la pêche au saumon rouge du Fraser.

Je vais vous donner quelques statistiques concernant la pêche au saumon rouge. On estime que l'effondrement de la pêche au saumon rouge du Fraser a touché quelque 2 500 emplois et causé une perte de revenus de 133 millions de dollars, ce qui comprenait 48 millions de dollars pour la pêche commerciale, 48 millions supplémentaires pour le secteur de la transformation, 10 à 20 millions pour la pêche sportive et 18 millions pour la pêche autochtone. Cette année, près de 35 p. 100 de la flotte commerciale n'a pas pêché et l'interruption des approvisionnements risque de pénaliser pour longtemps la Colombie-Britannique sur des marchés d'exportation comme le Japon.

Nous vous avons remis un document intitulé La pêche du saumon rouge du Fraser en 1999: une année perdue, qui est le rapport d'une étude commandée par le gouvernement provincial.

L'effondrement de la pêche au saumon rouge n'est qu'un épisode d'une série d'événements qui ont causé la dévastation de la pêche et d'énormes difficultés économiques. Depuis 1990, on estime que la Colombie-Britannique a perdu quelque 13 000 emplois de pêcheurs. Près de 50 p. 100 du secteur de la pêche sont disparus de l'emploi direct et indirect. La contribution économique, c'est-à-dire la valeur globale de la pêche, a également chuté d'une crête de 306 millions de dollars en 1997 à un creux estimé à 45 millions de dollars en 1999.

L'industrie de l'élevage du saumon, dont la valeur se situe entre 250 millions et 300 millions de dollars aujourd'hui, dépasse de loin la pêche commerciale sur les côtes de la Colombie-Britannique.

Aucune région ne saurait subir une chute aussi brutale de son assise économique sans en être profondément perturbée. Dire que les collectivités locales sont en période de transition et de changement serait en deçà de la vérité, et les perspectives pour bon nombre de communautés, notamment des Premières nations, restent désespérément sombres. Les collectivités locales font face à des changements déchirants. On estime que les difficultés et la dévastation causées dans les collectivités côtières amènent celles-ci à dépasser les moyennes provinciales pour ce qui est des suicides et des décès reliés à l'alcool. Je parle de collectivités comme Kyuquot, Ahoushat, Alert Bay et Sointula. Le changement pour l'ensemble de la province est profond et semble aujourd'hui durable et permanent, ce qui augure fort mal de l'avenir.

Il faut bien comprendre qu'il y a actuellement en Colombie-Britannique une crise profonde de la pêche au saumon et qu'il est important d'y réagir de manière adéquate. Une intervention législative n'est pas possible...

Le président: Monsieur le ministre, pourriez-vous parler un peu plus lentement parce que les interprètes ont du mal à vous suivre. Nous vous donnerons quelques minutes de plus.

M. Dennis Streifel: Merci beaucoup.

Les collectivités locales de la Colombie-Britannique souffrent beaucoup—ce qui n'est un secret pour personne—et cela touche aussi bien les collectivités autochtones que non autochtones. La crise n'épargne personne et elle s'aggrave.

Le Comité sur la crise du saumon sockeye est une coalition d'intérêts divers et multiples. L'existence de ce comité prouve que les habitants de la province sont unis pour réagir à l'adversité causée par l'effondrement de la pêche au saumon.

• 0910

Nous souhaitons trois choses: que l'on reconnaisse l'existence de cette crise, que l'on réagisse en dégageant des crédits d'urgence et en offrant une aide immédiate, et que les gouvernements collaborent avec les pêcheurs pour prendre les meilleurs dispositions possibles pour le court terme et le long terme. Ce que nous cherchons, au fond, c'est une stratégie, une vision, pour faire face à la situation que connaissent les pêcheurs côtiers de la Colombie-Britannique.

Ces demandes ne sont pas déraisonnables. Bien des collectivités les ont déjà formulées. Collectivités et pêcheurs ont vu l'avenir et savent qu'ils doivent s'armer de courage. Dans Fishing for Direction, un autre rapport que je vais vous remettre, les collectivités de la province nous ont dit qu'elles ont besoin d'une aide d'urgence et aussi d'une aide à long terme. Elles ont besoin de formation professionnelle, de perfectionnement des compétences, de projets de création d'emplois durables, d'activités de soutien des plans d'activité, de crédits pour les petites entreprises, de développement d'infrastructures, d'aide en marketing et d'assistance technique.

Il est indispensable que les gouvernements réagissent positivement à ce que leur disent les collectivités et les populations. C'est en effet le rôle fondamental d'un gouvernement: voir et comprendre les difficultés causées par des changements spectaculaires—surtout des changements de politiques. Il est essentiel d'offrir des secours à court terme et à long terme et d'engager un processus assurant la participation de toutes les parties concernées par ce changement de politiques.

La crise de la pêche est une crise fédérale appelant une solution fédérale puisque la gestion de la pêche relève de la compétence fédérale.

En juin de l'an dernier, nous avons annoncé un programme de transition de 400 millions de dollars et un programme d'indemnisation des pêcheurs désirant quitter ce secteur. Comme on n'a utilisé que 182 millions de dollars de cette somme jusqu'à présent, j'ai la conviction que beaucoup des choses dont nous avons besoin pourraient être financées à même le solde.

Comparons brièvement les dépenses par personne consacrées à la crise de la pêche sur la côte Est et sur la côte Ouest. Depuis 1996, on a dépensé 66 000 $ par travailleur sur la côte Est contre 46 000 $ par travailleur sur la côte Ouest, ce qui fait une différence de 20 000 $.

Ce qu'on oublie dans tout ça, c'est que, même si le gouvernement fédéral a dégagé des fonds pour aider les gens à quitter le secteur de la pêche, on a oublié ceux qui ne peuvent pas en sortir parce qu'ils ne sont pas admissibles à l'aide offerte. On a oublié ceux qui ne sont pas fermement établis dans une activité de pêche limitée qui reste ou devient une activité de transition. On a oublié ceux qui croient qu'il y aura encore de la pêche à l'avenir et qui veulent rester dans ce secteur pour pouvoir reprendre leur activité, bien que de manière différente—c'est-à-dire une activité d'avenir que les pêcheurs eux-mêmes auront contribué à structurer.

Les autres personnes que l'on a oubliées—et qui ne sont pas mentionnées dans mes notes—sont les habitants des collectivités éloignées de la Colombie-Britannique. Parfois, ces personnes n'ont aucun autre choix économique. L'un des rapports remis au gouvernement fédéral et au ministère des Pêches et Océans par le commissaire à la protection des emplois de la Colombie-Britannique montre très clairement que bon nombre de ces collectivités éloignées n'ont jamais eu d'autre activité économique que la pêche et n'en auront au fond jamais d'autre car elles n'ont aucune autre possibilité.

Pour ne pas vous faire perdre de temps, laissez-moi vous dire que certaines des mesures de secours immédiates et provisoires nécessaires sont des choses telles que le remboursement des droits de permis, un programme redéfini de rachat des permis, un programme de recouvrement des dépenses d'avant-saison, des programmes de soutien du revenu et plus d'argent pour étendre l'admissibilité aux prestations d'AE et aux programmes de formation. À combien s'élèverait la facture? D'autres que moi vont l'indiquer dans leurs exposés.

Ce que nous voulons, ce n'est pas un salaire pour l'inactivité de gens qui n'ont peut-être eu aucune possibilité de pêcher cette année. Ce que nous voulons, c'est assurer la survie d'individus, de familles et de collectivités. Je parle de gens qui se suicident, de gens qui perdent leur foyer et leur avenir. Il nous faut offrir un pont vers l'avenir à cette communauté de pêcheurs. Il nous faut appuyer ces collectivités côtières pour qu'elles réussissent à s'en sortir et pour que les gens de la Colombie-Britannique puissent continuer de vivre dans les collectivités où ils sont nés et où ils ont tout leur passé.

Comme j'aimerais laisser du temps aux autres témoins, je vais en rester là et vous remercier de m'avoir accordé votre attention aujourd'hui. Sachez bien que je me joins aux autres résidents de la Colombie-Britannique et que nous faisons cause commune face à cette crise.

Merci.

Le président: Merci, monsieur le ministre.

Je pourrais peut-être préciser aux membres du comité que le ministre avait préparé une présentation très complète. Lorsqu'elle aura été traduite, nous la remettrons à tous les membres du comité.

Il y a là beaucoup d'information, monsieur le ministre. Merci.

Christine.

Mme Christine Hunt: Merci.

M. Probert nous a généreusement donné trois de ses minutes et nous allons donc...

Le président: Ne vous inquiétez pas des minutes. Prenez le temps qu'il vous faut.

Mme Christine Hunt: C'est donc le chef John Henderson, de la bande de Campbell River, qui va maintenant prendre la parole.

Le chef John Henderson (Comité sur la crise du saumon sockeye de la rivière Fraser): Bonjour.

• 0915

Je m'appelle John Henderson et je suis le chef de notre bande de Campbell River. Je représente un grand nombre de membres des Premières nations ainsi que des collectivités non autochtones qui font partie de notre communauté. Je représente la bande indienne de Campbell River et je suis coprésident de A-telay Fisheries Association. Le Comité du Sommet des Premières nations m'a élu pour exposer le point de vue des Premières nations devant votre comité. Je suis aussi coprésident du conseil de district de Kwakiutl, qui représente 10 tribus.

Comme vous pouvez le voir, je représente beaucoup de gens qui sont actifs dans le secteur de la pêche, autant des Autochtones que des non-Autochtones, ce qui s'explique par le fait que nous vivons dans une région urbaine où il y a eu beaucoup de contacts entre les communautés. Je représente donc les deux côtés.

Au nom de tous nos pêcheurs, je vous demande de faire preuve de respect à leur égard quand vous prendrez une décision quelconque à l'égard de leur demande d'aide. Je connais bien les difficultés auxquelles ils font face. En fait, j'aimerais vous faire comprendre vraiment ce qu'est notre communauté. Depuis que je suis ici... J'ai reçu hier soir un appel téléphonique d'une de nos tribus voisines qui m'apprenait qu'il y avait eu un autre suicide. Il devient de plus en plus évident que cette période est cruciale.

Je me trouvais déjà ici l'an dernier à la même époque pour vous parler de la même chose. Nous n'avons obtenu aucune réponse. Nous n'avons pas eu d'aide. Notre situation n'a pas changé. J'étais venu à Ottawa l'an dernier à peu près à la même époque pour solliciter de l'aide et je ne vois vraiment pas ce que nous pouvons faire à partir de maintenant. La situation est fort triste.

Je tiens à faire preuve de respect à l'égard de tous les gens que je représente. Nous avons ici au bout de la table M. Dan Edwards, à l'égard de qui j'ai énormément de respect. Il fait une grève de la faim et il n'a pas mangé depuis 10 jours. Il essaie de trouver le moyen d'amener le gouvernement à la table.

Cette situation n'a que trop duré, aussi bien pour les pêcheurs côtiers que pour les Premières nations.

J'aurais beaucoup de mal à tout vous dire en très peu de temps, ou en trois minutes, comme l'a dit Christine, mais la réalité est que nous avons besoin d'une aide immédiate. Personne n'a eu de revenu depuis le 1er juin. Or, nous sommes maintenant en novembre. Ça fait quatre mois que nous travaillons d'arrache-pied sur ce problème, sans aucun résultat.

Je vais vous dire ce qu'un de nos membres a dit à l'une de nos réunions. Il a dit simplement ceci: «Je vais prendre ma famille sur mon bateau et je vais aller aussi loin que possible dans l'océan et laisser brûler toute mon essence. Peut-être que ça donnera quelque chose. Peut-être que je serai alors traité comme un citoyen canadien.»

Je vous dis ça parce que les immigrants qui sont arrivés sur nos côtes ont été mieux traités que nous. Je vous dis ça du fond du coeur parce que c'est ce que nous pensons. Quand on voit les sommes qui ont été dépensées pour ces gens...

La semaine dernière, il y a eu une réunion où près de 110 pêcheurs sont venus me parler. Ils m'ont dit que ce n'est qu'une question de temps avant qu'ils passent à la désobéissance civile et qu'ils prennent les choses en main car mes efforts n'ont strictement rien donné. J'ai été placé dans cette position parce que j'ai voulu négocier de bonne foi avec le gouvernement du Canada et avec la province de la Colombie-Britannique.

• 0920

Vous ne pouvez pas faire fi de la gravité de cette situation pour moi-même et pour ma famille. Je viens d'une très grande famille. Nous avons été élevés au bord de l'eau et nous continuons de pêcher aujourd'hui. Je viens d'une famille de 16 enfants et sept de mes frères travaillent dans le secteur de la pêche. Vous pouvez donc voir que cette activité est très importante pour moi et pour notre village. Il y a 85 familles dans notre village et je peux vous dire qu'il y a un pêcheur dans chaque famille. Cette situation touche donc tout le monde dans notre communauté.

Je crois qu'il est important pour vous de vous attaquer franchement au problème, tout en étant respectueux des gens que je représente—et qui sont très nombreux. On me demande toujours qui je représente. Eh bien, je peux dire que je représente pratiquement toutes les collectivités autochtones de la province. Je suis leur porte-parole. J'ai été élu à ce poste par un comité permanent, durant l'été, parce que j'avais exprimé vigoureusement mon opinion au sujet des choses que nous devrions faire, nonobstant nos différences de couleur.

Tous les secteurs de la pêche sont représentés ici. Vous avez devant vous une coalition qui comprend un élément autochtone. Mais ce n'est pas ça qui est important. Ce qui est important, c'est que vous sachiez bien qu'il faut faire quelque chose, qu'il faut prendre des mesures pour l'avenir, qu'il faut donner une aide immédiate. Nous ne sommes pas prêts à tout laisser tomber parce que c'est une question beaucoup trop importante.

Il y a plusieurs choses que j'aimerais aborder devant vous parce que notre ministre des Pêches et Océans ne s'en est pas occupé. Je lui ai écrit le 18 octobre et je vous lirai dans un instant la réponse qu'il m'a envoyée. Ce n'est pas grand-chose. Voici ce que je disais:

    Les pêcheurs commerciaux de la Première nation demandent au gouvernement de la Colombie-Britannique et au gouvernement fédéral du Canada de s'attaquer sérieusement à leurs préoccupations, étant donné la situation difficile que connaît notre réserve, et en faisant preuve de respect à l'égard des Premières nations.

    Le chef et le conseil de la bande indienne de Campbell River, au nom des pêcheurs commerciaux des Premières nations, demandent au ministère des Pêches et Océans, à la province de la Colombie-Britannique et au gouvernement fédéral canadien de résoudre ces problèmes le plus vite possible.

    Le besoin d'une aide immédiate est particulièrement vif pour moi-même en ce moment, puisque je suis à la fois chef de notre village et représentant des pêcheurs commerciaux de la Première nation.

    Il me semble que les gouvernements de ce pays ne prennent pas cette crise aussi sérieusement qu'ils le devraient.

    Les Premières nations ont fait preuve de beaucoup de patience jusqu'à maintenant [...]

Je dis cela parce que c'est vrai. Je voulais des réponses et il n'a même pas daigné me prendre au sérieux. Vous comprendrez que c'est extrêmement frustrant pour moi d'être obligé de revenir ici un an après, pratiquement jour pour jour, parce que strictement rien n'a été fait.

Voici la réponse qu'il m'a envoyée:

    Au nom de l'honorable Herb Dhaliwal, ministre des Pêches et Océans, je vous remercie de votre lettre du 18 octobre 1999.

C'est tout.

Vous comprenez ce que je ressens? Voilà la situation dans laquelle... J'ai relu toutes sortes de correspondance de nos tribus voisines qui se demandent s'il n'est pas temps d'intenter des poursuites contre le gouvernement fédéral. Je m'adresse à vous aujourd'hui pour essayer de régler le problème sans devoir aller jusque-là.

Si on compare ce qui se fait sur la côte Est et sur la côte Ouest, on a du mal à garder son calme. Personne ne veut que la situation de la côte Ouest se dégrade autant mais, si on ne fait pas quelque chose très vite, c'est ce qui va arriver. À ce moment-là, ce sera la guerre.

Merci.

• 0925

Le président: Je vous remercie sincèrement de votre franchise, chef Henderson. J'aime bien les positions claires.

Je suis sûr qu'il y a des représentants du ministre dans cette salle qui ne manqueront pas de relire votre lettre du 18 octobre. Je suppose qu'il vous a juste envoyé un accusé de réception et qu'il vous répondra plus tard de manière plus complète.

Christine.

Mme Christine Hunt: Merci. Nous allons maintenant donner la parole à M. Dan Edwards.

M. Dan Edwards (Comité sur la crise du saumon sockeye de la rivière Fraser): Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie de nous avoir invités à traiter devant vous de la situation qui règne sur la côte Ouest.

Comme l'a dit John, je fais la grève de la faim depuis 10 jours et je ne serai donc peut-être pas aussi cohérent que normalement. Je n'ai d'habitude aucun mal à m'exprimer mais c'est la deuxième fois que je fais cela en un mois. J'ai déjà fait une grève de la faim pendant huit jours mais j'avais arrêté parce que nous avions eu l'impression que les choses commençaient à bouger. Nous nous étions trompés.

Je voudrais vous parler du processus. Depuis le 9 août, des groupes comprenant jusqu'à 35 organisations différentes se réunissent en Colombie-Britannique pour essayer de faire face à l'effondrement de la pêche au saumon rouge du Fraser, sans compter tous les autres problèmes qui en découlent. Nous avons voulu réfléchir à ce qui risquait d'arriver si nous ne recevions pas des secours d'urgence pour faire face à l'effondrement de cette pêche au saumon rouge qui fait que les pêcheurs de la côte sud de la Colombie-Britannique ont perdu 98 p. 100 de leurs revenus.

Après un mois et demi de réunions avec des ministres et des bureaucrates, nous avons conclu que nous faisions face à un mur d'incompréhension. Je crois au processus démocratique mais, quand nous avons tiré cette conclusion, ma fille et Vivian Narcisse, qui est l'épouse de Hardy Narcisse, le coprésident autochtone, ont commencé une grève de la faim. Vous savez, on ne prend de mesure aussi désespérée que lorsqu'on n'a plus aucun autre moyen de se faire entendre.

Nous avons réclamé un processus d'action. C'est assez simple. Dans la documentation que j'ai remise au comité, vous verrez un document parlant de processus. C'est un document de négociation qui a été préparé par une excellente personne de processus de la Colombie-Britannique qui voulait nous aider. Nous avons demandé aux gouvernements provincial et fédéral de s'asseoir avec nous. Nous avons demandé une discussion en vertu de l'accord Canada-Colombie-Britannique qui a déjà été ratifié par le premier ministre du Canada et le premier ministre de la Colombie-Britannique. Ce processus amènerait tout le monde à la même table pour essayer de faire face au problème dans un esprit de coopération et de collaboration. Voilà ce que nous voulons mais que nous n'avons pas. Nous n'avons pas de tribune pour discuter d'une politique, nous n'avons pas de lieu pour traiter de ce genre de problème. Nous demandons qu'une telle tribune soit créée.

Les solutions que nous réclamons exigent que l'on s'entende d'abord sur un processus. Lancez le processus correctement puis attaquez-vous aux besoins immédiats. Dans notre documentation, nous avons classé ces besoins au chapitre des «Secours d'urgence», lequel constitue aussi une ébauche. C'est une ébauche parce qu'il faut qu'il y ait d'abord un processus pour que les deux gouvernements examinent attentivement les intérêts en cause. Je veux parler ici des intérêts des Premières nations, du fait de la pêche alimentaire et du fait du remplacement et de la distribution de poisson en vertu de l'article 35, et du fait aussi de l'indemnisation pour les dépenses assumées et des programmes de la SPA. Beaucoup de gens ont perdu beaucoup d'argent dans certains des programmes de la SPA lorsqu'ils ont demandé des permis mais n'ont jamais obtenu aucun revenu.

Dans la pêche commerciale, il y a des dépenses d'avant-saison et des dépenses de saison. Cette année, ces dépenses ont été très élevées parce que certaines personnes se sont équipées parce qu'elles pensaient qu'il y aurait de la pêche, ce qui n'a pas été le cas.

Nous réclamons aussi plus de flexibilité. Il y a des choses qu'il faut négocier avec les gouvernements. C'est comme cela que nous devons agir. Cela doit se faire de manière à ce que les personnes touchées se trouvent à la table, pour qu'elles puissent dire aux gouvernements qui travaillent avec elles quels sont les besoins réels des collectivités. Sinon, rien ne se fera. Je le sais parce que j'ai dirigé un bureau d'adaptation de la main-d'oeuvre à Uclulet, en Colombie-Britannique, où j'ai pu constater qu'il est difficile de passer à l'action.

Il nous faut du soutien du revenu, des secours d'urgence et de l'adaptation de l'AE. Comme l'a dit John, certaines personnes n'ont strictement aucun revenu depuis le 1er juin. Rien, zéro, mais elles ont effectué des dépenses parce qu'elles espéraient pouvoir pêcher.

Il y a des prêts garantis à faible taux d'intérêt, des prêts de diversification, des mécanismes de retraite anticipée, des mécanismes de restructuration et des ajustements fiscaux. La pêche sportive a besoin d'aide, surtout dans la région du Fraser. Il faut de l'aide pour les infrastructures communautaires. En plus de cela, il faut un plan à long terme exhaustif une fois qu'on aura réglé les problèmes immédiats. Il nous faut collaborer dans le cadre de l'accord Colombie-Britannique-Canada pour élaborer une stratégie exhaustive et formuler une vision à long terme pour la pêche en Colombie-Britannique.

• 0930

Voilà ce que nous demandons. C'est très simple. Il ne devrait pas être nécessaire de faire une grève de la faim et de ne pas manger pendant 10 jours, et pendant huit jours avant ça, pour pouvoir communiquer ce message de façon à lancer le processus, mais c'est ce qui se passe.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup.

Madame Hunt.

Mme Christine Hunt: Merci, Dan.

Nous allons maintenant entendre John Sutcliffe, du syndicat United Fishermen and Allied Workers Union.

M. John Sutcliffe (Comité sur la crise du saumon sockeye de la rivière Fraser):Merci, monsieur le président, de nous avoir invités à témoigner.

La catastrophe de cette année était complètement imprévue. Bien que le programme de restructuration de la flotte, c'est-à-dire le programme de 400 millions de dollars que vous connaissez tous et dont beaucoup d'entre nous sommes venus vous parler l'an dernier, avait été conçu pour faire face à la récession prévue des activités de pêche, l'événement de cette année nous a pris complètement par surprise.

La remonte de 8,3 millions de saumons qui avait été prévue avait été enregistrée avant même que le programme de restructuration de la flotte n'ait été conçu. Je le sais parce que ce chiffre figurait dans notre documentation lorsque je participais aux négociations des parties prenantes sur le traité Canada-États-Unis. C'était le chiffre que nous utilisions lorsque nous envisagions un accord de partage avec les Américains.

La remonte de 3 millions avait donc été totalement imprévue. Avec les chiffres prévus de remonte de saumons rouges et roses du Fraser, chiffres qui ont été invalidés aussi à cause des problèmes du saumon rouge, on obtenait 73 p. 100 de la valeur totale de la pêche du saumon, 90 p. 100 pour les détenteurs de permis du sud, et environ 100 p. 100, on l'a constaté ensuite, pour beaucoup d'entre eux.

Ce qu'il faut comprendre, c'est que cela nous a pris complètement par surprise. Les programmes qui avaient été mis sur pied dans le cadre du programme de restructuration de 400 millions de dollars ne tenaient pas compte des événements de cette saison.

La difficulté à laquelle font face les pêcheurs et leurs familles, avec le programme de restructuration, le type de restructuration qui s'imposera à cause des départs obligatoires du fait de la crise de cette année, est qu'il y aura précisément une restructuration que nous ne voulons pas. Le programme nous posait déjà problème à l'origine mais les problèmes vont être tellement amplifiés par la situation dans laquelle se trouvent les pêcheurs que nous allons nous retrouver avec une infrastructure de pêche terriblement endommagée, peut-être irréversiblement, sur la côte ouest de la province. En effet, les éléments les plus capitalisés de l'industrie parviendront à survivre face aux dispositions actuelles de rachat de permis du programme de restructuration, mais l'économie particulière des participants et des collectivités de la pêche, dont nous avons particulièrement besoin, surtout dans l'économie locale d'aujourd'hui, disparaîtra ou sera pour toujours endommagée.

Ce sont là des remarques d'ordre très général mais elles sont absolument cruciales. L'événement imprévu, le dommage causé à l'infrastructure de l'industrie si cette crise n'est pas traitée comme une crise distincte de la restructuration, qui était fondée sur un type différent de récession dans l'industrie, éliminera pour toujours les opportunités dont nous avons besoin pour préserver une économie côtière fondée sur la pêche.

Dans le contexte des nouvelles opportunités offertes par le marché global, et dans le contexte des préoccupations environnementales et de la pêche sélective, nous perdrons l'infrastructure qui nous est nécessaire pour faire ce qu'il faudrait.

Voilà les remarques d'ordre très général, mais absolument cruciales, que je voulais faire.

Le président: Avant de passer au témoin suivant, pourriez-vous préciser un peu, monsieur Sutcliffe, ce que vous voulez dire au sujet de l'infrastructure?

M. John Sutcliffe: La situation individuelle des pêcheurs dans certains secteurs de la flotte signifie que les industries de soutien, qu'il s'agisse des vendeurs de filets, des fournisseurs de carburant, des sociétés de taxi et de toutes les autres activités nécessaires pour la diversification des petites collectivités, seront pénalisées. Nous avons par exemple Love Electronics, à Prince Rupert, l'une des plus anciennes firmes d'électronique de la région, qui doit vendre des t-shirts pour survivre.

• 0935

Quoi qu'il en soit, il n'est pas nécessaire d'aller dans tous ces détails. Qu'il suffise de dire que tout cela est menacé. Avec la restructuration, les gens qui participeraient normalement à l'économie côtière diversifiée que nous souhaitons devront mettre la clé sous la porte, à moins que certaines mesures ne soient prises immédiatement. Le type d'économie de pêche diversifiée, à valeur ajoutée et de petite échelle qui est le mieux à même de tirer parti de notre extraordinaire ressource qu'est le saumon disparaîtra purement et simplement.

Cela est relié à une critique que nous avons formulée devant votre comité dans le passé au sujet du programme de restructuration. Nous allons nous retrouver avec une industrie qui ne pourra plus faire que ce qu'elle a fait pendant 100 ans... c'est à dire produire du poisson au plus bas coût unitaire possible pour faire concurrence sur les marchés mondiaux uniquement en fonction du prix, avec un produit ne parvenant plus à dégager le type de valeur ou de part du marché qui serait utile pour l'économie de la province. Certes, ce sera un produit utile pour un petit nombre d'entités, mais celles-ci ne comprendront aucunement celles qui seraient nécessaires pour assurer l'avenir de l'économie côtière et de la pêche. Le fait que les petits producteurs, les indépendants, seront incapables de survivre à la crise et aux offres de rachat causera un tort irréparable à notre industrie de la pêche.

Je tiens à ce que les membres du comité saisissent bien la gravité de la situation à laquelle nous faisons face aujourd'hui dans nos collectivités côtières.

Le président: Merci, monsieur Sutcliffe.

Madame Hunt.

Mme Christine Hunt: Merci. Le ministre Streifel a quelques informations à donner qui concordent avec ce que vient de dire M. Sutcliffe.

Le président: Pourrait-il les donner un peu plus tard, pendant la période des questions?

Mme Christine Hunt: D'accord.

Le président: Je vais en prendre note.

Mme Christine Hunt: Avant de donner la parole à Bruce Probert, j'aimerais conclure cette partie de notre témoignage.

Le président: Allez-y.

Mme Christine Hunt: Je veux parler de l'impact social sur nos collectivités, impact qui ne se limite pas aux collectivités autochtones où, comme vous le savez, le taux de suicide est pourtant beaucoup plus élevé que dans les communautés non autochtones.

Il y a quelques années, lorsqu'on a commencé à ressentir les effets du plan Mifflin, ma seule collectivité a perdu trois jeunes hommes qui se sont suicidés. Ce matin, au petit déjeuner, le chef Henderson m'a dit qu'il y avait eu un autre suicide dans notre collectivité. Le problème est que cela devient souvent une vague et que l'on se retrouve au bout de quelques semaines avec d'autres suicides. Nous essayons de nous y préparer parce que nous savons que nous n'avons pas encore vu le pire de ce que la saison passée causera à nos collectivités et à leurs membres.

Nos gens sont démoralisés. Ils ne peuvent plus subvenir aux besoins de leur famille, si ce n'est en ayant recours au bien-être social. Ce n'est pas ce qu'ils veulent. Ils veulent travailler.

Je tiens à vous dire que je suis très inquiète de voir ce qui se passe dans notre collectivité, et je sais que le chef Henderson l'est tout autant que moi. En parlant à nos frères du Nord, aux Tsimshian, aux Haida, aux Heiltsuk et aux autres, je sais qu'il y a eu un grand nombre de suicides ces dernières années, des suicides de jeunes hommes qui étaient tous prêts à devenir pêcheurs et pour qui tout espoir a disparu lorsque ce but est devenu hors d'atteinte. Voilà ce qui m'inquiète et ce dont je voulais parler.

Je donne maintenant la parole à Bruce Probert.

• 0940

M. Bruce Probert (témoignage à titre personnel): Bonjour. Merci de me donner la parole.

J'aimerais apporter une précision avant de commencer. On a indiqué dans la liste que je représente la British Columbia Fisheries Survival Coalition mais je ne la représente pas. Je suis membre de l'UFAWU, qui est le syndicat des pêcheurs de la Colombie-Britannique. Je suis membre aussi de la coalition sur la crise et je suis président du Comité des normes et de la formation professionnelle du Conseil canadien des pêcheurs professionnels.

Je suis ici pour représenter ma famille et mes amis, ainsi que les autres familles au sein desquelles j'ai vécu toute ma vie en faisant de la pêche sur le fleuve Fraser. Dans ma famille, ma mère pêche, mon frère pêche, mon père pêche, et ma soeur pêche. Toute notre famille vit de la pêche. C'est ce que nous faisons depuis toujours. Nous sommes la troisième génération de pêcheurs dans notre famille et je suis ici pour représenter non seulement les membres de ma famille mais aussi la plupart des autres pêcheurs de la côte parce que nous sommes tous dans la même situation et nous avons tous le même avis.

Je voudrais commencer en soulignant la disparité évidente qu'il y a entre la côte Est et la côte Ouest, en tout cas à nos yeux. Quand les stocks de morue de la côte Est se sont effondrés, on a tout de suite trouvé 1,2 milliard de dollars pour un programme de LSPA. Quand les nôtres se sont effondrés, on n'a rien trouvé.

Je veux dire aussi que le gouvernement fédéral avait l'an dernier un programme en vertu duquel, si l'on n'activait pas son permis, on obtenait 6 500 $ pour couvrir les dépenses que l'on aurait pu assumer pour préparer sa saison. Cette année, nous nous étions préparés à pêcher un surplus de 5 millions de dollars qui n'est pas arrivé et nous n'avons pas eu un sou.

Je veux dire aussi que ce problème ou cette crise peut être en grande mesure attribué directement au MPO. Sa gestion a été catastrophique. Cette saison—je suis sûr que personne ne l'a encore mentionné—600 000 saumons coho excédentaires par rapport aux besoins d'échappée ont fait la remonte. Le MPO n'a même pas su qu'il y avait tous ces poissons supplémentaires. Or, cela fait 6 millions de dollars de poisson que nous n'avons pas été autorisés à pêcher à cause de la gestion désastreuse du MPO. Le poisson était là mais nous n'avions pas le droit de le pêcher, alors qu'il n'y avait pas de problème avec le saumon coho au moment de la remonte.

À mes yeux, le grand problème est que le MPO fait preuve de négligence coupable. Il n'écoute jamais ce que les pêcheurs ont à dire, alors qu'ils ont passé toute leur vie à pêcher le long de la côte. Ce qu'ils ont à dire n'a aucune importance dans l'élaboration des programmes du ministère ou dans sa gestion de la pêche. Le ministère n'a de comptes à rendre à personne. Personne ne perd son emploi quand nous ne pêchons pas et que tous les poissons excédentaires vont pourrir sur la grève. Personne d'autre que nous ne paie les pots cassés et je peux vous dire que ça ne nous plaît pas, ni à moi, ni à d'autres.

Il est intéressant de constater que ça fait sept ans qu'on a lancé la Stratégie des pêches autochtones dont un élément a été les ventes pilotes. Depuis le début des ventes pilotes, je crois que c'était en 1992, nous avons eu trois rapports faisant état de saumon inexistant et de menaces pour les stocks de saumon. Il y a eu deux rapports de Peter Pearse et un de John Fraser, qui fut autrefois ministre des Pêches. Ce n'est donc pas un problème récent. Ça fait sept ans que ça dure mais la situation ne cesse d'empirer. Tout le monde fait l'autruche et c'est nous qui en payons le prix.

Je veux dire aussi que, la saison passée, le MPO pensait que les stocks étaient en tellement mauvais état qu'il a fermé une partie de la pêche alimentaire autochtone, et qu'il n'y a pas eu non plus de pêche commerciale autochtone cette année, à ma connaissance. Mais la bande Cheam, de la région de Chilliwack, au nord du secteur où je pêche, qui est Fort Langley, a finalement dit: «Nous allons pêcher quand même; le poisson est là, nous allons le prendre», et elle a mis le MPO au défi de l'arrêter. Il a fallu deux semaines pour que le MPO commence à remonter les filets et à confisquer les bateaux et les camions, ce qu'il aurait pu faire dès le premier jour.

Une autre chose que je veux souligner, c'est que la décision Marshall de la côte Est est très intéressante. Je lisais dans le National Post il y a environ une semaine que la seule manière équitable d'appliquer la décision Marshall serait de racheter les permis des pêcheurs non autochtones et de les transférer à des pêcheurs autochtones pour que ceux-ci puissent monter une pêche commerciale.

• 0945

Sur la côte Ouest, c'est ce que nous appelons la solution industrielle. Nous réclamons ça depuis le premier jour de mise en oeuvre de la Stratégie des pêches autochtones, il y a sept ans, mais rien n'a été fait. Il y a toujours une pêche séparée qui continue, avec des règles séparées, sans limite de mailles pour assurer la conservation du coho, ni sans aucune autre des mesures de conservation qui s'appliquent à la pêche commerciale.

Il est évident que nous n'avons aucune importance aux yeux des détenteurs du pouvoir à Ottawa. Il nous semble simplement que le gouvernement a décidé que, si nous ne pouvons pas pêcher, nous mourrons de faim, nous disparaîtrons et nous ne causerons plus de problèmes à personne. Je dois cependant vous dire que la côte Ouest est maintenant un vrai baril de poudre. En effet, les pêcheurs de la région ont constaté que c'est la violence, sur la côte Est, qui a produit des résultats. Nous avons entrepris des pourparlers, nous sommes allés à des réunions, nous avons essayé de faire appliquer la solution industrielle sur la côte Ouest mais rien n'y a fait.

Sur la côte Est, après un mois de manifestations violentes—boom, 500 millions de dollars et la solution industrielle. Comment se fait-il que ça ne fonctionne pas pour la côte Ouest? C'est ça que j'aimerais savoir.

Le désespoir est difficile à décrire. Je vous dis que je veux un avenir pour ma famille mais que je n'en ai plus. Il me semble que tout cela est le résultat de la gestion catastrophique du gouvernement, c'est-à-dire du MPO. Il nous semble que nous comptons pour rien et c'est très frustrant.

Cette saison, je n'ai pas pêché un seul saumon rouge pour nourrir ma famille ou mes amis. Mon revenu brut était de 100 $ hier, et j'ai dû demander à quelqu'un de pêcher pour moi aujourd'hui parce que je suis venu témoigner devant vous.

Je ne pense pas que vous compreniez la catastrophe que peut causer le fait d'avoir un investissement de 150 000 $ dans un bateau et un permis, du matériel de 30 000 $, des primes d'assurance à payer, des droits de permis, du carburant, etc., et de ne pas pouvoir pêcher. C'est pour ça que nous sommes ici. Nous avons besoin d'aide, et nous en avons besoin d'urgence. Je vous demande de communiquer d'urgence ce message à vos ministres ou à ceux qui peuvent agir. Nous avons désespérément besoin d'aide.

Merci beaucoup.

Le président: Merci, monsieur Probert.

Nous allons maintenant passer aux questions. Nous devrons passer à autre chose à environ 10 h 45. Vers la fin de la réunion, j'aimerais poser la question suivante à quiconque pourra y répondre: Quelle serait pour vous la solution rapide à ce problème? D'ici là, nous allons entreprendre le débat avec les autres membres du comité.

Bill.

M. Bill Gilmour (Nanaimo—Alberni, Réf.): Merci, monsieur le président. Je remercie tous les témoins d'être venus aujourd'hui, notamment Bruce, pour son témoignage passionné. Ce qu'il a dit aura beaucoup de poids dans nos délibérations.

Je tends à partager votre opinion qu'il s'agit d'une gestion catastrophique du MPO, tout simplement parce que l'Alaska vient d'enregistrer sa deuxième meilleure pêche de saumon rouge de tous les temps, avec 208 millions d'individus.

Ma circonscription englobe Nanaimo, Alberni, Tofino, Ucluelet et Bamfield, ce qui veut dire qu'il y a beaucoup de pêcheurs. Alberni a connu une bonne remonte de sockeye cette année. Le poisson de l'Alaska, le poisson d'Alberni et le poisson du Fraser vivent tous dans la même eau. Donc, à mon avis, l'effondrement du saumon rouge du Fraser est un phénomène causé par l'homme.

• 0950

Dire que c'était une catastrophe naturelle imprévisible est un peu simpliste. Il y a quatre ans, en 1995, on disait déjà qu'il y avait de la surpêche dans le Fraser, du fait de la SPA, de la pêche alimentaire et de la pêche commerciale. Rétrospectivement, on peut bien voir que cette catastrophe ne demandait qu'à arriver.

Le moment où elle se produit est particulièrement bon. Je sais que cela ne vous aide absolument pas mais nous nous penchons actuellement sur la décision Marshall, de la côte Est. Or, on peut remonter sept ans en arrière et voir une situation similaire à ce qui se passait sur la côte Est. Nous avons les exemples directement sous les yeux. Si nous ne traitons pas correctement la côte Est, nous nous retrouverons exactement dans la même situation.

Bruce, quel est le problème? Est-ce que c'est de la mauvaise gestion du MPO, trop de pêcheurs, les ventes pilotes ou la SPA? À qui attribuer le blâme?

M. Bruce Probert: La question est tellement énorme que c'est difficile à dire. J'essaie de synthétiser le plus possible, mais ce n'est pas évident.

Pour ce qui est de la SPA, à mon avis, les ventes pilotes ont marqué le début de l'effondrement de nos stocks. Si on examine les registres d'avant, on voit que les stocks se reconstituaient après l'imposition des ventes pilotes de la SPA. Il y a une stratégie beaucoup plus large en jeu.

Les ventes illégales se sont multipliées, même cette année, malgré la crise du sockeye. Je parlais l'autre jour à un ami chez Costco qui me disait qu'il venait d'acheter six saumons sockeye à un pêcheur autochtone de Chilliwack pour 6 $ pièce. Il les lui avait achetés à lui parce qu'il savait que je ne pouvais pas lui en vendre puisque je ne pouvais pas pêcher. Voilà la réalité. C'est effrayant!

Si le MPO n'applique pas la loi, il n'y a plus aucun espoir pour le saumon, à mon avis. Le MPO ferme les yeux sur tous les abus qui sont commis, sans compter que les pêcheurs eux-mêmes ont fort peu eu leur mot à dire sur le processus.

J'ai fait partie du Conseil consultatif du fleuve Fraser et j'ai eu l'occasion de discuter avec le type du MPO. Je lui ai dit de rayer mon nom de chaque liste parce que j'avais passé sept ans dans ce genre d'organisme et que, depuis tout ce temps, aucune de mes recommandations ou des recommandations du groupe n'avait été mise en oeuvre. Je n'ai plus l'intention de perdre mon temps à participer à des réunions de ce genre si c'est ce que ça donne.

Voilà la réalité et c'est tout ce que je peux vous dire. Quelqu'un d'autre pourra peut-être vous donner d'autres précisions.

Le président: Je sais que nous devrons aller au coeur du problème mais ma difficulté est que nous n'avons probablement qu'une heure à notre disposition. Je dois reconnaître que je ne réalisais pas, avant de vous entendre, l'ampleur du problème. Toutefois, si nous n'avons qu'une heure, j'aimerais qu'on la consacre plus à ce qu'on peut faire plutôt qu'à ce qui s'est passé.

Madame Hunt.

Mme Christine Hunt: Je tiens cependant à dire que la difficulté que pose le fait qu'il y ait deux groupes aujourd'hui est qu'on va parler de choses qui ne sont pas comparables. Ce n'est pas pour cela que nous sommes ici aujourd'hui.

M. Probert a des objectifs différents des nôtres, et je pense que le comité doit le savoir. Le ministre Streifel aimerait dire quelques mots, puis John Henderson.

Le président: Monsieur le ministre.

M. Dennis Streifel: Merci, président.

Je tiens à déclarer publiquement que je me dissocie des remarques de Bruce Probert. Je ne veux pas engager un débat sur le fait de savoir s'il a tort ou raison. Je tiens simplement à dire que je ne partage pas son opinion. Ce n'est pas pour cela que nous sommes ici. Il y a des gens qui meurent de faim, qui perdent leur maison et qui se suicident et, à mon avis, cela n'a strictement rien à voir avec le fait que quelqu'un ait pu acheter ou non six saumons sockeye dans un magasin Costco.

Le président: Monsieur Henderson, puis nous reviendrons à M. Gilmour.

• 0955

Le chef John Henderson: Je partage l'avis du ministre Streifel. J'ai dit dans mon exposé que je n'étais pas ici pour faire une distinction entre les Autochtones et les non-Autochtones. Je pense que le problème est trop grave pour que l'on s'engage maintenant dans une tactique de diviser pour conquérir. Nous sommes ici pour atteindre un objectif commun qui est la résolution du problème actuel et l'obtention d'une aide immédiate. Je sais qu'il y a des différences dans les régimes de permis qui ont été mis sur pied par les gouvernements, mais de l'eau a coulé sous les ponts depuis ce temps-là. Nous savons qu'il faut corriger le problème, ce n'est pas cela qui fait l'objet du débat. Nous sommes ici pour nos concitoyens.

Merci.

Le président: Monsieur Gilmour.

M. Bill Gilmour: D'accord. Nous savons cependant, par exemple, qu'il y a 100 000 boîtes de poisson en conserve qui se sont vendues cet été. C'est ça le problème.

Ministre Streifel, nous avons entendu hier des représentants de DRHC qui nous ont parlé d'un certain nombre de programmes qui pourraient être invoqués. En parlant de création d'emplois et de retraite anticipée, voici ce qu'on nous a dit:

    L'objectif de la retraite anticipée est d'aider les pêcheurs et les travailleurs des usines de poisson entre les âges de 55 ans et de 64 ans à prendre leur retraite de la pêche. Cela se fait en partenariat avec les provinces dans le cadre d'une entente en vertu de laquelle le gouvernement fédéral fournirait 70 p. 100 des fonds, et la province, 30 p. 100. Terre-Neuve, l'Île-du-Prince-Édouard, la Nouvelle-Écosse, le Québec et le Nouveau-Brunswick ont signé leurs ententes respectives. Jusqu'à présent, le gouvernement de la Colombie-Britannique n'a pas signé.

Voilà donc 20 millions de dollars qui attendent sur les tablettes depuis juin dernier. Pourquoi est-ce que votre gouvernement ne participe pas au programme de rachat des permis Pourquoi faites-vous blocage lorsque le gouvernement fédéral fait cette proposition?

M. Dennis Streifel: Encore une fois, Bill, je m'élève contre votre affirmation que je n'ai pas accepté de programme de retraite anticipée pour faire face à cette crise. Le programme de retraite anticipée a été annoncé suite aux mécanismes de permis locaux du plan Mifflin et, je suppose, pour faire face à la crise du coho et à d'autres problèmes, pas à l'effondrement des stocks de sockeye du Fraser.

Si vous voulez engager un débat sur les chiffres, j'ai pris contact avec mes homologues des provinces maritimes et je n'ai pu trouver nulle part de contributions en espèces de 30 p. 100 à ce programme. Personne ne m'a mis sous les yeux un programme expliquant comment fonctionne la retraite anticipée. Qui peut en bénéficier? Pour quel montant? Comment cela se compare-t-il aux programmes provinciaux de soutien du revenu? Quel est l'effet sur le RPC? Est-on obligé de racheter les prestations de RPC à cause de la retraite anticipée? Quels sont les effets sur les autres programmes de retraite qui peuvent exister, notamment sur les ressources personnelles des REER? Je n'ai trouvé aucune explication à ce sujet dans aucun document. Tout ce que j'entends, c'est une litanie pour la retraite anticipée.

Les chiffres que nous avons reçus du MPO nous portent à penser que le montant nécessaire pourrait actuellement se situer entre 20 et 23 millions de dollars pour financer un programme de retraite anticipée. S'il y a 20 millions de dollars dans la cagnotte, qu'on le fasse! N'essayez pas de troubler la situation en mélangeant cela avec une situation de crise qui n'a pas été prévue, qui n'a pas été comprise et dont on n'a pas saisi la profondeur du désespoir qu'elle allait causer. La retraite anticipée ne saurait remplacer les mesures nécessaires pour résoudre la crise. Que l'on mette donc ce programme en vigueur si l'argent est là.

M. Bill Gilmour: Le fait est que c'est un programme parmi d'autres. C'est souvent la même histoire—des grosses larmes de crocodile dans l'Ouest. Or, voici un programme qui vaut pour l'Est et pour l'Ouest. Il fonctionne dans l'Est mais on n'en profite pas dans l'Ouest parce que votre gouvernement refuse d'embarquer. C'est bien beau de venir ici réclamer de l'argent pour des programmes mais vous devez bien comprendre que vous êtes un élément du problème. Cela me semble parfaitement clair.

M. Dennis Streifel: À titre de représentant de la Colombie-Britannique, je dois dire que je m'étonne de vous entendre suggérer que... si nous avions pu avoir notre part des crédits de 3,5 à 5 milliards de dollars de la LSPA des quatre ou cinq dernières années, je mettrais volontiers 30 p. 100 sur la table pour un programme de retraite anticipée. Nous n'avons tout simplement pas l'argent.

Les sommes dépensées par habitant en Colombie-Britannique ne sont que les deux tiers de ce qu'elles sont sur la côte Est et nous pourrions avoir d'autres programmes mais c'est vous qui troublez la question. Je demande au comité et aux députés de se concentrer sur la crise à laquelle nous sommes confrontés. Je pense que c'est ça qui serait extrêmement utile pour les résidents de la Colombie-Britannique. Vous savez, ce sont des citoyens canadiens aussi et, ce qu'ils demandent, c'est un minimum d'égalité entre les deux côtes, et un minimum de respect pour la situation désespérée à laquelle ils sont confrontés.

• 1000

Je ne suis pas venu ici pour dire si je pense ou non que le problème est dû à la mauvaise gestion du MPO. Je suis venu ici pour débattre et demander respectueusement un certain soutien aux citoyens de la Colombie-Britannique qui sont en situation de crise et de désespoir.

Le président: Monsieur Bernier.

[Français]

M. Yvan Bernier (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, BQ): Malheureusement, je m'exprime très mal en anglais.

[Traduction]

Je ne suis pas parfaitement bilingue donc...

[Français]

Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, de me donner la parole. Je remercie les témoins d'être ici. Je regrette l'inconvénient que constitue l'utilisation de la technologie, qui nous permet par ailleurs de nous exprimer dans les deux langues officielles.

Je vais, moi aussi, essayer d'être bref. Je voudrais traiter de l'essentiel de votre message de ce matin. Je pense que c'est aussi la première fois qu'il m'est offert de voir et de saisir l'importance de la crise que vit la Colombie-Britannique cette année.

Je représente une circonscription de l'Est québécois, la Gaspésie, et je vis donc sur le bord de l'eau. Je n'étais pas informé de la gravité du problème que vous vivez chez vous.

Sans vouloir faire de bataille politique, monsieur le ministre des Pêches, je voudrais souligner que le Comité permanent des pêches, du temps où M. George Baker en était le président, avait effectué des voyages tant sur la côte ouest que sur la côte est. Un des problèmes qui nous avaient frappés, et dont nous avions parlé dans notre rapport, c'est que sur les deux côtes du Canada, les pêcheurs et les industriels nous signalaient un problème de gestion à Pêches et Océans.

Attention, nous ne pointions du doigt aucune couleur de gouvernement, et l'opinion était unanime. Donc, les gens sont maintenant assez à l'aise pour dire qu'il y a quelque chose à faire à Pêches et Océans. Je suis d'accord avec vous. Nous n'essaierons pas ce matin de faire le procès du ministère, mais plutôt de voir ce qui peut être fait.

Même si je ne suis pas parfaitement bilingue, j'ai pris de l'avance et lu ce que je crois être votre document du 4 novembre. J'ai pris quelques notes et j'aimerais que vous me précisiez les points suivants.

Tout d'abord, si je comprends bien, votre groupe s'attend ce matin à trois choses. Premièrement, vous voulez que le gouvernement canadien ou le comité permanent reconnaisse qu'il existe un état de crise. J'en prends acte. Vous souhaitez de plus qu'un programme d'urgence et d'aide soit rapidement établi. Enfin, vous souhaitez qu'un calendrier de travail, auquel participeraient le palier fédéral, le palier provincial et peut-être même le palier municipal de vos régions, soit mis au point. C'est ce que je comprends. Vous me direz tout à l'heure si ma compréhension est la bonne.

Puis-je poser toutes mes questions à la fois, monsieur le président? Le ministre veut-il prendre des notes, étant donné que son document n'était pas paginé?

[Traduction]

Le président: Pourrions-nous d'abord obtenir une réponse à votre première remarque? C'est essentiellement cela que vous dites, monsieur le ministre et les autres?

M. Dennis Streifel: Tout à fait, et je vous demande d'excuser mon unilinguisme.

Le président: Pas du tout.

M. Dennis Streifel: Je connais un peu l'histoire de la pêche au saumon en Gaspésie et des problèmes qu'elle a connus. Vous avez cependant tout à fait exprimé l'essence du problème.

J'ai lu les rapports du Comité permanent sur le MPO pour la côte Est et pour la côte Ouest. Je les connais bien. Il serait opportun d'entreprendre un débat là-dessus et sur l'action du MPO sur chaque côte, aux étapes deux et trois de notre proposition, c'est-à-dire dans le cadre d'initiatives à moyen et à long terme. Dans l'immédiat, toutefois, notre but est d'aider des familles et des collectivités à survivre.

Le président: Merci.

Bien, soyons donc précis. Yvan.

• 1005

[Français]

M. Yvan Bernier: Certains points que vous soulevez permettraient de fournir une aide immédiate. Ce sont des choses que nous avions observées lors de nos derniers voyages dans l'Ouest. Mais vous pouvez en ajouter.

Lorsque vous parlez de

[Traduction]

«programmes de droits de permis»

[Français]

vous faites allusion aux droits qui sont perçus par rapport au programme de pêches. Je pense que c'est 50 millions de dollars. C'était le cadeau de M. Tobin avant son départ; chacun devait payer un droit pour son permis de pêche. J'imagine que c'est de cela que vous voulez parler. Vous voulez que le gouvernement fédéral, puisque les entrées de fonds des pêcheurs ont été de zéro, rembourse les droits qui ont été versés cette année.

En deuxième lieu, vous parlez de

[Traduction]

«recouvrement des dépenses d'avant-saison»,

[Français]

ce qui signifie le remboursement des dépenses faites par les pêcheurs.

Je n'ai malheureusement pas une idée précise du coût que cela peut représenter. J'en ai une bonne idée en ce qui concerne la côte gaspésienne, cependant. Peut-être pourriez-vous, pour venir en aide au comité, nous fournir une approximation de ces dépenses qui doivent être faites au début d'une saison.

Vous dites ensuite souhaiter qu'il y ait un programme de soutien du revenu et vous parlez d'élargir l'admissibilité aux prestations de l'assurance-emploi. Est-ce que cela veut dire que ces gens ont déjà accumulé un certain nombre d'heures? Je voudrais que vous précisiez le sens de la demande qui pourrait être faite à ce sujet.

De plus, monsieur le président, il y a quelque chose d'innovateur dans le document ministériel, une chose que je n'ai vue nulle part ailleurs, et c'est le

[Traduction]

«programmes d'assurance des prises»,

[Français]

ce qui signifie une assurance sur les prises. Personnellement, j'ai déjà eu connaissance de quelque chose de semblable au Québec. J'éprouve certaines réticences mais, parce que c'est totalement nouveau, j'aimerais qu'on ait la chance d'en discuter. J'imagine qu'il s'agit de quelque chose à plus long terme.

[Traduction]

Le président: Nous vous donnerons le temps voulu, monsieur Bernier.

Qui veut répondre? Monsieur Streifel.

M. Dennis Streifel: Merci. Je vais répondre à la question touchant le programme d'assurance des prises. Les pêcheurs qui sont avec moi savent qu'ils doivent assumer des dépenses d'équipement et des dépenses d'avant-saison. Je suppose que celles-ci seraient couvertes.

Un programme d'assurance des prises serait similaire aux programmes d'assurance agricole qui permettent de souscrire une assurance pour les récoltes attendues. Lorsque ces récoltes ne se matérialisent pas, l'agriculteur recouvre simplement certaines dépenses, ce qui lui permet de subvenir aux besoins de sa famille jusqu'à la prochaine récolte. Voilà une description simple de ce que pourrait être un programme d'assurance des prises.

Je vais laisser à Dan le soin de répondre à la question concernant les dépenses d'équipement et les dépenses d'avant-saison, qu'il pourra peut-être chiffrer.

M. Dan Edwards: Je vais essayer.

Plus de 757 formulaires de secours d'urgence ont été renvoyés à notre bureau d'Ucluelet au cours des deux derniers mois par des pêcheurs, des débardeurs et des détenteurs de permis qui ont tenté de ventiler leurs dépenses, leurs emprunts, etc. Ils ont aussi donné des chiffres sur les dépenses qu'ils ont dû assumer pour se préparer à la saison de pêche et cela a montré, par exemple, qu'il faut dépenser près de 34 000 $ rien que pour préparer un bateau de pêche à la senne.

Pour ce qui est de petits bateaux de pêche, les dépenses supplémentaires assumées cette année afin de se préparer à pêcher—comme je l'ai fait moi-même—sont de l'ordre de 15 000 $ de plus que ce qui avait été attribué à cette fin l'an dernier. C'est un chiffre général mais c'est à peu près ce qu'il en coûte pour un pêcheur qui a voulu se préparer pour une pêche qui ne s'est pas matérialisée cette année.

Comme l'a dit Bruce, il y a toutes sortes d'autres dépenses qu'il faut prendre en considération, comme les primes d'assurance, la préparation des bateaux, les réparations, etc.

Le président: Quelqu'un d'autre? Monsieur Probert?

M. Bruce Probert: Oui, je vais répondre à cette question. Mais je tiens d'abord à préciser quelque chose.

Je regrette que M. Streifel ait tenu à se dissocier de mes remarques. Mon objectif n'est certainement pas de détourner l'attention du comité de notre but fondamental, qui est d'obtenir une aide pour faire face à une catastrophe. C'est essentiellement pour cela que nous sommes ici. Je suis heureux que nous parlions de la crise elle-même plutôt que de...

• 1010

Je crois en ce que j'ai dit et, si nous en avions le temps, j'aimerais donner plus de détails. J'espère toutefois que nous allons pouvoir discuter d'un programme de soutien du revenu car c'est de cela que les pêcheurs ont besoin.

J'ai rempli moi-même les formulaires de secours d'urgence et j'en ai eu pour environ... dans mon cas, c'est un peu différent parce que j'ai ouvert une poissonnerie il y a trois ans. J'avais acheté un local commercial, j'avais obtenu un permis d'affaires et je pensais avoir des clients. J'ai une liste de plus de 350 personnes qui m'achètent du saumon. L'année passée, évidemment, je n'ai pas pu leur en fournir et j'ai donc probablement perdu non seulement tout le revenu de ma pêche mais aussi tout ce que j'avais investi dans cette poissonnerie.

De ce fait, j'assume aujourd'hui une dette de 1 500 $ par mois pour cette propriété. Je dois aussi continuer de payer pour mon bateau et j'estime avoir perdu jusqu'à présent environ 20 000 $, rien que pour commencer, puisque j'exploite deux entreprises directement reliées à la pêche.

Comme propriétaire de bateau, je pense que c'est de l'ordre de 7 000 $ à 8 000 $ au minimum, sans compter la main-d'oeuvre.

Le président: Merci, monsieur Probert.

Monsieur Henderson.

Le chef John Henderson: Merci.

Comme Dan vient de le dire, il est important de comprendre qu'il y a un problème qui concerne les droits de permis, les primes d'assurance, le quayage, et l'entreposage de l'équipement.

Vous ne le savez peut-être pas mais il faut payer pour tout ça, même quand on ne peut pas pêcher. Ce sont des dépenses que l'on doit assumer année après année.

Il y a beaucoup de pêcheurs qui sont liés à de grandes entreprises parce que ce sont elles maintenant qui peuvent acheter. Nous empruntons de l'argent, nous nous endettons de plus en plus et nous appartiendrons bientôt tous à de grandes entreprises. C'est la réalité. Sinon, comment pourrons-nous...? Nous ne pouvons plus nous financer.

La différence qu'il y a entre une collectivité autochtone et les autres est que nous ne pouvons pas nous adresser à une banque pour obtenir une hypothèque. Nous avons donc plus de mal à nous financer. Nous sommes obligés d'avoir des relations avec les grandes entreprises et celles-ci finissent par posséder à la fois le bateau et le permis. Voilà ce qui arrive au cours des années. Si nous n'obtenons pas d'aide cette fois, il ne restera plus aucun pêcheur autochtone car nous ne pourrons plus obtenir de capital. Si c'est ce qu'on voulait pour nous faire sortir de ce secteur, ça a fort bien marché.

Le président: Merci, chef Henderson.

Très rapidement, Yvan, après quoi nous passerons à Sarkis.

[Français]

M. Yvan Bernier: Dans votre document, vous parlez d'un programme de soutien du revenu et vous parlez aussi d'augmenter l'admissibilité à l'assurance-emploi. Avez-vous en tête un modèle de programme qui nous permettrait de faire des suggestions rapides à la nouvelle ministre des Ressources humaines du Canada?

[Traduction]

M. Denis Streifel: Pour ce qui est d'un programme de soutien du revenu, je pourrais faire quelques suggestions. Il pourrait s'agir tout simplement d'un programme de prêts pour aider les pêcheurs jusqu'à la prochaine campagne de pêche ou jusqu'à ce qu'on ait établi une nouvelle stratégie pour la pêche.

Si je comprends bien ce que disent mes amis, ils veulent tout simplement avoir la possibilité de redéfinir ce secteur pour lui donner un avenir. Cette possibilité n'a jamais été offerte aux pêcheurs côtiers de la Colombie-Britannique bien qu'elle ait été proposée dans l'entente bilatérale entre la province et Ottawa—je parle du document que j'ai déposé sur la pêche au saumon du Pacifique. On y trouve là une proposition de processus de discussion pour définir l'avenir de la pêche afin que les décisions ne soient pas prises sans tenir compte des collectivités locales.

• 1015

Pour ce qui est de l'admissibilité à l'assurance-emploi, les pêcheurs pourraient vous expliquer mieux que moi comment les changements apportés aux règles d'admissibilité ont touché les travailleurs saisonniers et les travailleurs dont le gagne-pain dépend de décisions prises par d'autres.

Comme tous les Canadiens, nous cotisons au régime d'assurance-emploi et, quand les règles changent et que la saison de pêche ne répond pas aux attentes, on constate qu'on n'est plus admissible à l'assurance-emploi et on est finalement obligé de s'en remettre au bien-être social.

La majeure partie de l'excédent accumulé dans le régime d'assurance-emploi l'a été à l'époque où la Colombie-Britannique était la seule province avec une économie florissante. À ce moment-là, pendant les années 90, le reste du pays était en pleine récession, et cela touchait évidemment le gouvernement fédéral aussi, et c'est l'économie florissante de la Colombie-Britannique qui a contribué à regarnir les coffres.

Il est temps de rendre un partie de cet argent à la Colombie-Britannique. Nous traversons actuellement une période catastrophique pour des raisons qui échappent totalement à notre contrôle. Comme nous avons des relations traditionnelles avec les marchés asiatiques, la crise asiatique a fortement pénalisé nos industries de base, comme la forêt. Aujourd'hui, nous subissons en plus cette crise du sockeye du Fraser.

Je ne sais pas si les membres du comité comprennent bien ce qui arrive dans une relation commerciale quand on ne peut plus approvisionner les clients, c'est-à-dire, dans le cas présent, leur vendre du poisson. Ils trouvent d'autres fournisseurs. Certes, le poisson va revenir, comme cela est déjà arrivé par le passé, et nous allons essayer de retrouver nos clients mais cela va nous coûter très cher. Voilà le problème d'avenir auquel nous devrons faire face.

Nous avons donc besoin d'une aide temporaire jusqu'à ce que nous puissions nous rétablir sur les marchés. Personne ici ne demande qu'on lui donne un salaire pour rester inactif. Ce que nous voulons, c'est collaborer, notamment avec le MPO et le gouvernement fédéral, pour mettre sur pied des programmes d'avenir qui permettront aux pêcheurs de recouvrer leur autonomie économique et de se remettre au travail. Avant d'arriver là, cependant, nous avons besoin d'une aide d'urgence pour que les pêcheurs soient encore là, dans leurs collectivités, lorsque la pêche pourra reprendre.

Le président: Monsieur Probert, pour une brève réponse, après quoi nous passerons à M. Assadourian.

M. Bruce Probert: Ce qui est le plus important à l'heure actuelle, d'après moi, c'est que nous puissions couvrir les dépenses que nous avons assumées. C'est la principale raison pour laquelle je suis ici.

Je peux peut-être préciser que j'ai tenté de me recycler comme machiniste dans l'industrie du cinéma. J'ai eu en tout 21 jours de travail l'an dernier. Ce n'est donc pas vraiment la solution.

Le président: Dan, vous vouliez intervenir?

M. Dan Edwards: Je voudrais faire une brève remarque au sujet de l'AE.

Dans notre mémoire, au paragraphe intitulé «Soutien du revenu—Adaptation d'urgence de l'AE», on peut lire ceci:

    Les membres d'équipage, les débardeurs et d'autres directement associés au secteur de la pêche sont touchés par la crise. Le régime d'AE devrait être ajusté pour tenir compte de l'incertitude prévue pour la prochaine saison et ne devrait pas être saisonnier.

Il y a une note disant ceci:

    Cela serait similaire aux programmes offerts pendant la tempête de verglas, les inondations du Manitoba, l'aquaculture du Nouveau-Brunswick en 1998. L'Alaska en 1997-1998.

Il y a donc plusieurs programmes que l'on pourrait examiner, du Canada et des États-Unis, pour assouplir le système. Bon nombre de pêcheurs, de marins, etc., n'ont même pas obtenu assez de semaines pour être admissibles cette année. Face à une catastrophe naturelle, la flexibilité...

J'estime que c'est une catastrophe naturelle. Je ne blâme personne pour ce qui est arrivé. Je ne cherche pas de coupables. Il y a manifestement eu un effondrement des stocks cette année. Pour l'avenir, nous devrions essayer de trouver les causes mais, dans l'immédiat, il y a une crise à laquelle il faut faire face.

Le président: Bien.

Comme nous avons six témoins, chaque tour prend un peu plus de temps que d'habitude. Allez-y, chef Henderson.

Le chef John Henderson: Merci.

Comme vous le savez probablement, il faut avoir travaillé pour être admissible à l'AE. Vous le savez tous. Évidemment, si nous ne sommes jamais allés pêcher, nous ne pouvons pas être admissibles.

Comment faire pour que nous soyons admissibles? Faut-il changer les critères? Faudrait-il accorder un paiement qui serait considéré comme un salaire pour que l'on puisse être admissible à un programme quelconque? On peut bien concevoir tous les programmes possibles mais, si les critères nous y rendent inadmissibles, cela ne nous sert à rien.

La réalité est qu'il faut changer les choses ou prévoir une forme de soutien du revenu pour que nous soyons admissibles au programme. C'est cela que nous voulons dire. Personne ne veut dire directement que nous avons besoin d'un paiement en espèces pour que nous soyons admissibles au programme car, actuellement, nous ne le sommes pas. En 1998, on a payé 10 500 $ et 6 500 $ aux pêcheurs au filet maillant pour qu'ils restent chez eux et ne se mettent pas à pêcher. Mais cela ne nous sert à rien aujourd'hui. Il y avait aussi sur chacun de ces bateaux six personnes qui n'ont reçu aucune aide. La situation est donc plus complexe qu'il n'y paraît.

• 1020

Nous sommes venus ici pour vous demander de l'aide. Dans les documents qui vous ont été remis, il y a des rapports où l'on parle des prises moyennes—de ce que nous aurions pris si nous avions pu pêcher. La prise moyenne brute de chaque pêcheur à la senne aurait été d'environ 110 000 $. Pour les pêcheurs au filet maillant, elle aurait été de 25 000 $. Pour les pêcheurs à la traîne, de 50 000 $. Voilà quel aurait été notre revenu, que nous aurions dû partager avec les membres d'équipage. Cela aurait été notre salaire. Peut-être que nous pourrions être admissibles à de nouveaux programmes de formation? Actuellement, ce n'est pas le cas. Notre question est donc celle-ci: Que devons-nous faire? Faudrait-il changer les critères ou les politiques?

Le président: Je dois préciser, chef Henderson, qu'il faudrait changer la loi pour changer les critères. Je connais très bien la loi de l'AE. Pour le moment, vous souhaitez plutôt une mesure spéciale pour faire face à un problème ponctuel. Il ne faut pas tourner autour du pot, c'est la réalité. Je connais très bien l'assurance-emploi.

Monsieur Assadourian.

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Merci beaucoup.

Bienvenue à nouveau devant ce comité.

J'ai quatre questions à poser, monsieur le président. Premièrement, quelqu'un pourrait-il nous parler de la situation de l'offre et de la demande dans le secteur de la pêche? Il y a un an et demi, j'ai vu à la télévision un documentaire dans lequel on disait qu'il avait des tonnes de poisson congelé dans les entrepôts de la Colombie-Britannique. Quelle incidence cela a-t-il sur la pêche, globalement?

Deuxièmement, quelle est l'incidence des changements climatiques sur la pêche? J'entends beaucoup parler de mauvaise gestion du MPO mais je suis sûr que vous avez entendu dire que les changements climatiques ont une incidence sur la pêche et sur notre mode de vie.

Troisièmement, M. Probert nous a dit qu'il y avait eu trois générations de pêcheurs dans sa famille. En Ontario, au Québec et ailleurs, bien des choses ont changé. Je suis sûr que c'est la même chose en Colombie-Britannique. Dans ma famille, nous étions agriculteurs. Il n'y a plus d'agriculture. Des membres de ma famille ont aussi travaillé dans une aciérie. Il n'y a plus d'acier. Les choses ont changé. La vie continue. Y a-t-il un plan quelconque de diversification pour aider les pêcheurs à sortir de ce secteur? Fait-on quelque chose pour diversifier l'activité économique?

Quatrièmement, y a-t-il des activités quelconques de R-D pour veiller à ce que les pêcheurs obtiennent les meilleures informations possibles de façon à bien faire leur travail?

Cinquièmement, y a-t-il des choses qui se font en aquaculture? Est-ce que cela pourrait remplacer la pêche traditionnelle?

Voilà mes quatre ou cinq questions. Merci.

Le président: Madame Hunt, voulez-vous commencer?

Mme Christine Hunt: Je vais d'abord demander à John Sutcliffe de répondre à plusieurs d'entre elles.

M. John Sutcliffe: Je ne saisis pas bien ce que vous voulez dire en ce qui concerne l'offre et la demande. Pour ce qui est du saumon, il n'y a pas d'inventaire, ce qui inquiète beaucoup les sociétés de transformation. Elles ont perdu de la place sur les étagères. Elles achètent beaucoup de poisson en Alaska. Cette année, il est arrivé un demi-million de caisses de poisson d'Alaska à Prince Rupert mais cela n'a pas protégé la place des transformateurs sur les étagères de magasins alors que, comme vous l'avez dit, c'est un élément critique. C'est l'une des répercussions du problème de cette année.

M. Sarkis Assadourian: Voulez-vous dire, monsieur Sutcliffe, qu'il y a un excédent de millions de tonnes de poisson congelé en entrepôt?

M. John Sutcliffe: Non, on n'a pas d'inventaire. Il n'y a pas d'excédent. Je dis en fait que nos transformateurs ont tellement peu d'inventaire qu'ils achètent de grandes quantités de saumon de l'Alaska pour leurs conserveries de Colombie-Britannique afin d'essayer de satisfaire leurs clients.

• 1025

De la place sur les étagères? Il n'y a pas de stocks de poisson congelé.

M. Sarkis Assadourian: C'était un documentaire qui est passé sur CBC ou CTV il y a environ un an.

M. John Sutcliffe: C'était peut-être le cas à l'époque mais il faut savoir que les inventaires de produits congelés ne sont pas éternels. Il n'y a pas d'inventaire de saumon en conserve.

Pour ce qui est des changements climatiques, c'est un problème réel. Beaucoup de gens supposent, même s'il n'y a pas encore de consensus à ce sujet—mais je crois qu'on y arrive peu à peu—que le problème de cette année est sans doute relié, dans une certaine mesure, à cette question et aux facteurs de survie des océans.

Le problème à ce sujet est que nous n'en savons rien, et le MPO non plus. Il ne s'agit pas simplement d'une crise économique mais aussi d'une crise biologique. C'était totalement imprévu. Les raisons du phénomène sont encore inconnues et il nous appartient de les découvrir. Comment pourrons-nous gérer la pêche l'an prochain avec un tel résultat cette année?

Les changements climatiques restent une hypothèse. Il y a eu une grosse conférence à ce sujet il y a une semaine, à Simon Fraser. C'est juste une hypothèse, bien que l'on ait beaucoup de données à l'échelle globale qui tendent à la confirmer. Dire cependant, comme certains le font, que la Colombie-Britannique est trop au sud pour que le saumon y survive n'est pas crédible. Il suffit de voir la remonte du quinnat, ou saumon rose comme l'appelle en Californie, et les prises records de cette année.

Il y a donc beaucoup de choses que nous ne connaissons pas encore mais qu'il nous appartient d'apprendre. Quant aux annonceurs de catastrophes pour les stocks de saumon de la Colombie-Britannique... Ce ne sont que des spéculations. Certes, il y a des phénomènes que nous ne comprenons pas encore mais je pense que les scénarios catastrophes sont complètement injustifiés puisqu'on constate que les stocks de saumon sont très abondants même au sud de la Colombie-Britannique.

M. Sarkis Assadourian: En Californie, cependant, on emmène les gens en haute mer pour la pêche au saumon. Comment cela se fait-il? Il doit y avoir un facteur environnemental en jeu?

M. John Sutcliffe: C'est peut-être du saumon sauvage. À Sacramento, on a fait beaucoup de recherche sur l'habitat du saumon. Peut-être qu'il y a eu aussi des changements quant aux facteurs de survie des océans. Quoi qu'il en soit, ils ont eu des prises records.

J'ai oublié votre troisième question.

M. Sarkis Assadourian: La diversification.

M. Dennis Streifel: Je voudrais d'abord ajouter mes remarques à celle de mon collègue et ami, John Sutcliffe.

Le caractère cyclique de la remonte du saumon du Fraser n'est pas inusité. Cela n'a rien d'exceptionnel mais ne doit pas nous détourner de la crise à laquelle nous faisons face.

Vous verrez dans mon mémoire des chiffres sur la remonte du saumon du Fraser et sur les prises commerciales depuis 1962. En 1964, par exemple, 1,8 million de saumons ont remonté le Fraser. Cette année, 3,5 millions. En 1964, les prises commerciales étaient 11 fois celles de cette année.

Le poisson n'est donc pas disparu à jamais. Il y a eu un événement exceptionnel, que l'on ne connaît pas encore, et qui était peut-être relié à El Ni«o ou à d'autres facteurs océaniques. C'est évidemment une question que l'on devrait étudier attentivement mais elle ne devrait pas détourner notre attention de la nécessité d'intervenir face à une crise exceptionnelle. Il nous appartient de découvrir le problème qui s'est posé dans le fleuve ou ailleurs.

Pour ce qui est d'un plan d'avenir, cela fait évidemment partie de notre témoignage d'aujourd'hui. Nous voulons assurer notre avenir. Aidez-nous à résoudre la crise actuelle, au moment où cela ne coûtera relativement pas très cher, et travaillez avec le MPO et le gouvernement fédéral pour dresser des plans d'avenir.

Nous avons perdu près de la moitié des permis de pêche qui existaient il y a une génération sur les côtes de la Colombie-Britannique. Nous n'avons pas réglé la crise, celle-ci s'est en fait aggravée, et nous n'avons pas réglé le problème de la capacité de pêche.

Lors d'une réunion à laquelle j'ai participé à Québec avec mes collègues des autres provinces, nous nous sommes penchés sur le vrai problème de la capacité de la flotte de pêche, et pas seulement sur le nombre de participants ou le nombre de permis, question qui est importante pour l'avenir.

• 1030

Pour ce qui est de la R-D et de l'aquaculture, la Colombie-Britannique et le Canada sont dans une situation assez particulière. Il y a en effet en Colombie-Britannique cinq espèces de saumon commercial, pas seulement une, qui ont des caractéristiques différentes du point de vue de la taille, du nombre et de la valeur.

En fait, nous avons annoncé une politique de l'aquaculture qui est destinée à bâtir dans la province une industrie durable de l'aquaculture, mais cela ne saurait remplacer une stratégie pour le saumon sauvage ni la priorité que le gouvernement attache au saumon sauvage. Pour nous, le saumon sauvage a toujours et aura toujours plus de valeur que l'aquaculture. Nous sommes conscients des difficultés que l'aquaculture du saumon a pu connaître ailleurs au Canada et dans le monde. Le gouvernement provincial a décidé de lancer une initiative, avec des crédits relativement satisfaisants, pour développer de nouvelles technologies d'aquaculture du saumon.

En outre, pour nous attaquer aux problèmes du changement climatique et de la R-D, nous avons mis sur pied Fisheries Renewal British Columbia, avec un budget de 30 millions de dollars pour trois ans, dans le but de formuler des stratégies de transition et de diversification. Au cours des trois dernières années, la Colombie-Britannique a investi plus de 400 millions de dollars dans la restauration des habitats afin de préparer la pêche de demain, mais il n'y aura pas de pêche s'il n'y a plus de participants.

Je voudrais vous dire ce qui se passe quand on établit une nouvelle pêcherie dans une communauté, et ce sera un exemple très modeste. À Massett, sur les îles de la Reine-Charlotte, où il y a aujourd'hui fort peu de pêche commerciale du saumon, et même pas du tout, nous avons établi une pêcherie du poisson-castor, ou requin bourbeux. Nous avons un marché en Europe et des marchés pour les sous-produits des carcasses.

Avec seulement 27 bateaux pratiquant cette pêche, pour des rendements modestes—je pense que c'était 30 ¢ la livre pour les pêcheurs—on a vu cette collectivité s'équiper immédiatement. L'épicerie locale a dû recruter un nouveau commis pour s'occuper des gens qui venaient faire de l'épicerie avant de partir pêcher. Quand les gens ont obtenu leur paie, ils en ont profité localement. Le bar a dû recruter un nouvel employé.

Voilà ce qu'on perd quand on ne règle pas les problèmes d'infrastructure. Ce n'est pas simplement une question de filets, d'hameçons et d'équipement des bateaux de pêche. C'est aussi une question d'infrastructure sociale et commerciale. La collectivité locale a une épicerie, elle a un magasin d'articles sportifs qui ne vend plus rien parce que l'industrie de la pêche sportive a perdu 200 millions de dollars l'an dernier. Si on perd cette infrastructure, il n'y aura plus aucune raison pour le Canada d'appuyer les citoyens des collectivités côtières car celles-ci n'auront plus rien. Ce sera le cycle classique prospérité-débâcle des mines d'or qui disparaissent.

Le président: Monsieur le ministre, nous allons rapidement manquer de temps.

Monsieur Probert, pour une réponse rapide.

M. Bruce Probert: Je vais essayer d'être aussi rapide que possible. Vous parlez de diversification et c'est précisément ce que j'ai essayé de faire. C'est pour cela que j'ai tenté de me recycler et d'obtenir un autre revenu. Comme je l'ai dit, cela m'a donné 21 jours de travail. Ce n'est pas ça qui va me sauver.

Je voudrais aussi préciser quelques faits. Mon père a 78 ans, ma mère 63. Ils pêchent encore. Avez-vous quelque chose d'autre à leur proposer? Il y a maintenant un système de permis régional sur la côte Ouest, ce qui veut dire qu'il y a trois secteurs géographiques différents où l'on peut pêcher. Dans un secteur, le secteur D, on m'a dit que l'âge moyen des pêcheurs est de 55 ans.

Avec les programmes du gouvernement, il y a des indemnités de retraite anticipée pour amener les gens à sortir du secteur quand ils n'y sont plus nécessaires et qu'ils ont payé leurs taxes et tout le reste. Je ne comprends pas cette logique—bien que le MPO ait mal géré les stocks, les bureaucrates gardent leur emploi mais moi, je suis obligé d'en trouver un autre. Je ne saisis pas cette logique. Voilà ma réponse.

Le président: Monsieur Assadourian.

M. Sarkis Assadourian: Une brève question: Pourquoi pensez-vous que les gens devraient prendre une retraite anticipée? Votre père a 78 ans et il continue de pêcher.

M. Bruce Probert: Je ne parle pas de lui. Je parle des gens qui font partie de cette moyenne de 55 ans. Quel recyclage va-t-on pouvoir leur donner pour qu'ils retrouvent un emploi?

M. Sarkis Assadourian: Est-ce que vous ne disiez pas que votre père de 78 ans continue de pêcher? Et votre mère de 63 ans? Pourquoi les autres devraient-ils prendre une retraite anticipée? Pourquoi ne dites-vous pas plutôt à votre père de profiter de sa retraite, de profiter de la vie, de profiter de sa famille?

M. Bruce Probert: Parce qu'il mourra s'il arrête de pêcher. C'est toute sa vie. Il a pêché toute sa vie et si vous lui dites de s'asseoir dans un fauteuil roulant...

M. Sarkis Assadourian: Je ne parle pas de fauteuil roulant.

• 1035

Le président: Pourriez-vous vous adresser au président?

M. Bruce Probert: Veuillez m'excuser.

Le président: Je pense que nous avons compris.

Monsieur Stoffer.

M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Pour répondre à la question de Sarkis, les pêcheurs de 55 ans de la côte est ont obtenu un programme de retraite anticipée. Voilà ce que M. Probert voulait dire.

M. Sarkis Assadourian: Je ne dis pas...

M. Peter Stoffer: Je trouve quand même très intéressant, monsieur le président, qu'un député libéral vienne parler de diversification et de faire autre chose mais sans parler de l'argent qui devrait aller avec. C'est toujours étonnant.

Vous savez, monsieur le président, nous avons produit un rapport sur la côte Ouest—nous en avons produit deux, que je trouvais très intéressants et très utiles. Malheureusement, le MPO a fait totalement fi des recommandations que le comité avait formulées à l'unanimité. Depuis lors, la côte Ouest est confrontée à l'un des pires traités de tous les temps, le Traité sur le saumon du Pacifique. J'espère que cette crise signale sa mise à mort définitive et qu'on va recommencer à partir de zéro—pour un traité qui sera bénéfique à la Colombie-Britannique.

Deuxièmement, il y avait eu avant cela l'infâme plan Mifflin. D'un seul coup, on a eu ce nouveau traité et il a fallu payer 100 000 $ pour obtenir un permis. Qui en avait les moyens?

Pour votre information, monsieur Probert, le comité s'est rendu à Sointula où il a vu un pêcheur, sa femme et ses trois enfants pleurer littéralement devant le microphone. Nous comprenons donc fort bien les conséquences de la crise pour les pêcheurs et leurs familles, aussi bien dans les communautés autochtones que dans les communautés non autochtones.

Je voudrais poser quelques questions, notamment à M. Streifel. Quel a été l'effet du Traité sur le saumon du Pacifique pour la Colombie-Britannique? Deuxièmement, la prise de possession des stocks de poisson par les grandes entreprises a été causée en grande mesure sur la côte Est par un programme de quotas individuels transférables et de quotas d'entreprises. Je sais que Jimmy Pattison possède aujourd'hui 37 p. 100 des stocks de poisson. Qui sait combien Galen Weston en possède aussi?

Voilà l'une des choses qui ont vraiment causé un tort considérable aux pêcheurs commerciaux, surtout aux pêcheurs indépendants des petites collectivités côtières, autochtones et non autochtones. Quelqu'un peut-il donc répondre à cette question—l'effet de la prise de contrôle des stocks de poisson aux dépens des pêcheurs individuels et de leurs familles.

Merci.

Le président: Qui veut commencer? Madame Hunt?

Mme Christine Hunt: Je crois savoir que Jimmy Pattison a racheté Galen Weston, ce qui en fait maintenant le roi là-bas. Cela a causé du tort aux collectivités autochtones car nous ne pouvons pas utiliser nos maisons des réserves pour obtenir des hypothèques. Beaucoup de pêcheurs sont donc obligés de travailler pour les entreprises. Avec le plan Mifflin, les Autochtones ont été les premiers à être renvoyés par les entreprises. Le chef Henderson y a fait allusion tout à l'heure—ceux qui restent dans ce secteur sont liés aux entreprises par des liens plus forts que le mariage. Il y a une grande entreprise locale qui les possède corps et âme. Il ne semble y avoir aucun moyen d'en sortir... J'ai moi-même un permis de pêche au hareng et je suis mariée à une grande entreprise. J'ai un accord de cinq ans avec elle. Je ne peux rien y faire pour le changer. Au bout de cinq ans, la société le récupérera. Je n'ai pas d'autre solution.

Beaucoup de pêcheurs commerciaux, surtout dans la communauté de John et dans ma propre collectivité, travaillent pour les entreprises. Quand il y a eu la crise de la côte Est, M. Pattison a dit à ses cadres de dire aux pêcheurs autochtones qu'ils n'étaient pas censés utiliser ses bateaux pour aller faire de la pêche alimentaire. Aujourd'hui, nous pratiquons la pêche alimentaire, sociale et rituelle. Nous ne vendons pas le poisson que nous pêchons. Nous le mettons au congélateur, au fumoir et dans des boîtes de conserve pour l'hiver.

Elle est rapidement revenue sur cet ordre, quand elle a vu les conséquences politiques, mais c'est un gros problème pour nous que d'être mariés à ces entreprises. Elles nous possèdent corps et âme.

Le président: Monsieur le ministre.

M. Dennis Streifel: Merci beaucoup. Je voudrais d'abord parler des effets du traité.

Il s'agit d'un accord à long terme, de 10 et de 12 ans, avec les États-Unis. Pour la côte nord de la Colombie-Britannique, où les pêcheurs de l'Alaska ont fait des prises records avec un droit de pêche illimité dans les stocks de la Colombie-Britannique, nous n'avons eu que peu ou pas de participation à la pêche.

• 1040

Comme me l'expliquait un pêcheur de la côte Nord, au sujet du réseau de la Skeena, le revenu moyen des pêcheurs de cette région a été légèrement inférieur à 10 000 $, cette année, et ça été la meilleure année de tous les temps. Les gens se réjouissaient d'avoir gagné 10 000 $, alors que les pêcheurs de l'Alaska profitaient des stocks abondants qui remontaient dans les eaux canadiennes. Le traité n'a eu quasiment aucun effet positif sur la côte Nord.

Au risque de me faire massacrer par certains de mes collègues, l'État de Washington n'a pas eu non plus de résultats extraordinaires avec les stocks du Fraser cette année, à cause de la crise mais, à long terme, le traité représentera un cadeau sans précédent pour les pêcheurs de l'État de Washington. Lorsque les stocks seront en bonne santé et que la pêche sera normale, ils pourront exploiter nos stocks à des niveaux sans précédent.

La contrepartie, pour répondre à la question du député, c'est que le Canada n'a aucune possibilité d'exploiter les stocks américains. Peut-être que Dan Edwards aurait des détails locaux à vous donner à ce sujet.

Le président: Vous pouvez répondre, Dan, mais je ne voudrais pas consacrer trop de temps au Traité sur le saumon du Pacifique car ce n'est pas vraiment le problème dont nous sommes saisis.

M. Dan Edwards: En fait, j'allais changer un peu de sujet...

Le président: Merci.

M. Dan Edwards: ... et passer du traité à la question des grandes sociétés, qui est un élément de la crise.

Nous avons cherché partout dans le monde la manière de diversifier notre économie de pêche. Il y a par exemple en Alaska plusieurs programmes avec une banque d'État, des processus de banque fédérale de permis et des processus de propriétaire-exploitant. Voilà les options aux grandes sociétés. Si on ne prévoit pas d'options, on va se retrouver avec une seule personne—ce sera Jimmy Pattison—qui possédera pratiquement tout le poisson de la Colombie-Britannique, dans une entreprise intégrée verticalement.

C'est comme cela que la situation évoluera si le gouvernement n'intervient pas avec les parties prenantes pour formuler d'autres politiques, afin de préserver une économie diversifiée et des flottes diversifiées. Il y en a déjà beaucoup, actuellement, mais—je vais le répéter—nous avons besoin d'un processus de discussion avec les gouvernements fédéral et provincial pour faire le travail. Actuellement, nous ne l'avons pas et c'est pour ça que nous sommes ici.

Nous avons besoin du processus à court terme, pour régler les questions d'urgence, mais c'est aussi relié à la stabilité à long terme de l'industrie. Si nous n'obtenons pas ça... C'est pour ça qu'on parle de ces problèmes de rachat de permis. C'est tellement brutal. Suite à la saison catastrophique de cette année, où les gens n'ont pas eu de revenus ni aucune forme d'aide, on va constater bientôt un système de rachat automatique car les gens seront tellement dans la misère que le gouvernement pourra racheter les permis—et il s'agira dans la plupart des cas de permis de petites collectivités—à vil prix.

Comme l'a dit John Sutcliffe, on arrive au bout. On a déjà vu ça dans le secteur de la forêt, dans les années 50, et on est sur le point de laisser la même chose se reproduire dans le secteur de la pêche parce que nos gouvernements n'ont aucune autre solution à proposer. Il faut que ça change.

Le président: Merci.

Une dernière question, Peter?

M. Peter Stoffer: Je voulais juste dire à Bruce que ce n'était pas 1,2 milliard de dollars mais 4,2 milliards depuis 1988 pour transformer la pêche de la côte Est. Comparez cela à ce que reçoit la Colombie-Britannique, vous verrez la différence.

M. Bruce Probert: Vous pouvez comprendre notre frustration. Les gens sont très mécontents.

Le président: Y a-t-il d'autres questions?

Monsieur Matthews.

M. Bill Matthews (Burin—St. George's, Lib.): Je ne sais pas si j'ai une question à poser mais je voudrais faire une remarque, monsieur le président.

Pour être tout à fait franc avec vous, je suis complètement abasourdi de voir qu'on ne semble pas proposer de solution. Cela fait près de deux ans que je fais partie de ce comité. Pour une raison que j'ignore, on ne semble pas être capable de s'attaquer sérieusement au problème. C'était juste une remarque.

Puisque je viens de la côte Est, je peux vous dire que la pêche n'y est pas encore complètement restructurée. Cela n'a pas été un succès total mais on a quand même au moins commencé à s'attaquer au problème et on a obtenu certains résultats. Le retrait des licences et la retraite anticipée étaient volontaires, pas obligatoires.

Il me semble qu'on ne réussit pas à saisir le problème. Je veux me faire l'écho du président. À mon avis, il va falloir prendre des mesures spéciales dans ce cas, et je songe en disant cela à vos remarques sur l'assurance-emploi. Je pense qu'il va falloir prendre une initiative spéciale. J'ai l'impression que toutes les parties concernées n'ont pas encore réussi à prendre le problème à bras-le-corps.

• 1045

Considérant tout le temps que j'ai passé au sein de ce comité, sachez bien que je comprends parfaitement vos réactions. Si cela arrivait dans ma région, je me sentirais aussi frustré que vous.

Cela dit, monsieur le président, je ne comprends vraiment pas pourquoi nous en sommes encore là aujourd'hui et pourquoi ce problème n'a pas été réglé.

Le président: Merci, monsieur Matthews.

Monsieur le ministre.

M. Dennis Streifel: Je serai très bref, monsieur Matthews.

Vous trouverez dans la documentation que je vous ai remise un rapport Ogilvy-Renault qui a été au centre des négociations de 1998 sur le Traité sur le saumon du Pacifique. Vous y verrez un paragraphe dans lequel le Canada remet en question la validité d'un appui aux collectivités côtières de la Colombie-Britannique. Ce paragraphe, du ministère des Affaires étrangères, contient cette phrase: «Si nous avons une politique d'appui aux collectivités côtières, il faudra qu'elles aient accès au poisson—au poisson américain».

Comme nous n'avons pas obtenu l'accès à ce poisson, notre politique est-elle maintenant de renoncer à appuyer les collectivités côtières, notamment de la Colombie-Britannique? Voilà le coeur du problème. Il n'y a pas de politique fédérale d'appui égal aux citoyens de la Colombie-Britannique, par rapport aux citoyens de Terre-Neuve ou de la Nouvelle-Écosse, pour leur permettre de rester dans leurs collectivités.

Dans certains cas, par exemple dans celui du chef John Henderson, les familles n'ont jamais vécu ailleurs. Il y a là 10 000 à 12 000 ans d'histoire et le Canada se demande maintenant si cette personne et sa famille devraient avoir le droit de vivre dans la collectivité qu'elles ont choisie. Si c'est le cas, le Canada peut aussi bien raser leurs maisons, les mettre sur une péniche, les jeter dans le port de Vancouver ou le port de Victoria, les mettre au bien-être social et au moins dire franchement que c'est ça son projet.

Sinon, acceptons d'aider ces collectivités. Offrons-leur un pont pour l'avenir. Mettons-les au travail—ne les aidons pas à rester chômeurs—aidons-les à trouver une activité.

Le président: Monsieur Matthews.

M. Bill Matthews: Mais laquelle? C'est ça la question.

Je ne sais pas s'il y a dans l'Ouest le même problème que dans l'Est. Chez nous, les stocks se sont effondrés. Vous n'avez pas ce problème.

Une voix: Il vient juste d'admettre...

M. Bill Matthews: Vous avez étudié l'habitat et vous avez vu des résultats très encourageants...

Le président: Il faut reconnaître que c'est ce le cas cette année sur le Fraser.

Des voix: Oui.

M. Bill Matthews: Quoi?

Le président: Je pense que les témoins viennent de nous dire qu'il y a eu un effondrement des stocks cette année sur le Fraser.

M. Bill Matthews: Oui, il y a eu un effondrement.

Ma question est donc celle-ci: Que voulez-vous que les gens fassent?

M. Dennis Streifel: C'est une bonne question parce que, si l'on en juge d'après les recommandations passées du comité permanent, d'après le travail effectué par notre commissaire à la protection de l'emploi et par un entrepreneur, Gordon Gislason, il faut admettre que certaines collectivités n'ont absolument aucune autre option que la pêche.

Mais nous pouvons pêcher. Nous pouvons diversifier la pêche. Nous pouvons participer à une pêche artificielle, que ce soit l'aquaculture ou de nouvelles formes de pêche de poisson sauvage. Nous pouvons respecter notre engagement de pêche sélective et de changement de l'équipement pour pouvoir pêcher prudemment les stocks abondants tout en préservant les stocks faibles. Nous pouvons pratiquer différents types de pêche.

Nous avons toutefois besoin des ressources et de l'engagement nécessaires pour cela, et c'est le thème fondamental de notre témoignage. Ce n'est pas: «Faites-nous un chèque pour que nous puissions rentrer à la maison contents». Nous vous demandons tout simplement de nous aider en participant à la transformation de la pêche, ce qui est un objectif parfaitement réaliste. Il est possible d'y arriver pour assurer une certaine stabilité économique à ces collectivités éloignées.

Le président: Nous allons passer à autre chose.

Vous aviez une autre remarque à formuler, monsieur Bernier. Vous vous demandiez quels sont les groupes représentés par chacun des témoins?

[Français]

M. Yvan Bernier: Oui, c'est cela. J'avais aussi d'autres questions, mais j'aimerais savoir qui est chacun de vous. M. le ministre est assez facile à situer. J'ai compris que M. John Henderson était un chef autochtone. Par contre, je ne connaissais pas l'emploi de Mme Christine Hunt ou l'organisme qu'elle représentait. Peut-être suis-je arrivé un peu en retard tout à l'heure. J'ai compris que M. Bruce Probert était pêcheur. Je voudrais donc savoir ce que M. Dan Edwards et Mme Christine Hunt représentent dans leur communauté, de même que M. Sutcliffe.

[Traduction]

Le président: Monsieur Edwards.

M. Dan Edwards: Je suis directeur général de la West Coast Sustainability Association, qui est une organisation autochtone et non autochtone de la côte ouest de l'île de Vancouver. Je suis ici parce que je participe à la coordination du travail du Comité sur la crise du saumon sockeye depuis deux mois et demi.

Le président: Madame Hunt.

• 1050

Mme Christine Hunt: Je suis première vice-présidente de la Fraternité autochtone de Colombie-Britannique, qui représente les pêcheurs commerciaux autochtones. Je fais partie de plusieurs conseils industriels. Je suis aussi conseillère autochtone spéciale du ministre Streifel.

M. John Sutcliffe: Je suis membre du personnel du syndicat United Fishermen and Allied Workers Union, des TCA. En outre, je suis secrétaire-trésorier du Conseil canadien des pêcheurs professionnels.

Mon rôle est d'appuyer les pêcheurs indépendants, les détenteurs de permis et les petits pêcheurs. Dans ce contexte, j'ai participé aux travaux de la Commission du saumon et de nombreux conseils consultatifs. Christine et moi reviennent juste d'une réunion du Conseil du code de conduite canadien.

Je représente donc le syndicat au sein de ce comité que nous appuyons vigoureusement et auquel nous participons depuis le premier jour.

Le président: Merci, monsieur Sutcliffe.

Monsieur Provenzano.

M. Carmen Provenzano (Sault Ste. Marie, Lib.): J'ai une seule question à poser. Comme mon collègue, M. Matthews, j'essaie de cerner le problème. On semble être toujours incapable de trouver une solution.

Le ministre a produit quelques statistiques reflétant son opinion sur la nature cyclique de la pêche.

Ai-je bien compris que, selon vous, la pêche sur le Fraser, cette année, a été deux fois et demie à trois fois plus volumineuse que pendant l'effondrement de 1964?

M. Dennis Streifel: Je vais préciser. En 1964, on attendait une remonte de 1,6 million et on en a eu 1,8. Avec cette remonte, il y a eu 11 fois plus d'activité commerciale que cette année. Ce qui est différent, cette année, c'est qu'on attendait plus de 8 millions de poissons et qu'on en a eu environ 3,5 millions.

Pour 1964, c'était donc la remonte attendue. Pour cette année, cela n'a pas été le cas. Le décompte du saumoneau et le frai depuis 1995 permettaient de penser qu'il y aurait une grosse remonte cette année. Cela n'a pas été le cas. De ce fait, les pêcheurs, qui s'attendaient à pouvoir pêcher, ont assumé toutes sortes de dépenses pour se préparer à une saison qui n'est pas arrivée.

Je ne veux pas sous-estimer la gravité de la crise. Je veux simplement dire que...

M. Carmen Provenzano: Revenons à vos statistiques. En 1964, la remonte attendue et la remonte réelle étaient égales à la moitié de la remonte réelle de cette année.

M. Dennis Streifel: Oui.

M. Carmen Provenzano: Donc, la remonte de cette année a été deux fois celle de 1964.

M. Dennis Streifel: C'est cela.

M. Carmen Provenzano: Et, malgré cela, il y a eu toutes ces conséquences négatives pour les pêcheurs?

Est-ce que 1964 a été une année typique ou une mauvaise année?

Une voix: Une mauvaise année.

Une voix: Une très mauvaise année.

M. Carmen Provenzano: Quelle a été la réaction à l'époque? Je suis sûr que cela a dû avoir des conséquences négatives. Y a-t-il eu des difficultés et comment y a-t-on réagi?

M. Dennis Streifel: L'une des différences est qu'il n'y avait pas le plan Mifflin en 1964. Nous n'avions pas de permis par secteur, où nous n'aurions pu pêcher que dans certains secteurs. En 1964, nous n'avions pas de régime de gestion d'un stock affaibli, où nous aurions géré des stocks abondants en fonction des besoins d'une pêche affaiblie. Cette année, il y a eu une pêche artificielle—des stocks supplémentaires provenant des élevages—pour protéger certains stocks sauvages affaiblis.

John, intervenez si vous pensez que je me trompe.

M. John Sutcliffe: Non, allez-y.

M. Dennis Streifel: Le régime de gestion est différent, l'activité économique est différente, et...

M. Carmen Provenzano: S'il y a eu plus de pêcheurs en 1999 qu'en 1964...

Une voix: C'est le contraire.

M. Carmen Provenzano: Il y a donc moins de pêcheurs maintenant mais la remonte a été double de celle de 1964.

Le président: Je vais accepter une brève intervention de John puis une autre de M. Probert. Un autre comité va arriver dans cette salle à 11 heures et nous avons quelques questions internes à régler avant cela.

Nous allons passer aux deux John.

Le chef John Henderson: On s'éloigne de la raison pour laquelle nous sommes ici. Vous nous demandez pourquoi nous sommes ici.

M. Streifel a parfaitement raison: les Premières nations sont ici depuis des temps immémoriaux et nous n'avons pas l'intention de changer notre mode de vie. Comment pouvons-nous donc continuer à pêcher? C'est pour ça que nous sommes ici et c'est ça que ce monsieur devrait essayer de comprendre.

• 1055

Au MPO, dans les années 60, il y avait des problèmes avec la pêche au flétan. Pour les résoudre, on a donné des permis de pêche au saumon. Cela a provoqué la disparition du saumon. Il y a longtemps que ça a commencé. Ça ne date pas d'hier. Je connais tous les détails. Je sais tout ce qu'il y a à savoir sur l'octroi des permis et sur les ententes. Maintenant, ces mêmes personnes qui ont obtenu des permis de pêche au saumon recommencent à pêcher le flétan. On a l'impression que c'étaient juste des bouts de papier que l'on s'est échangés. Quand j'ai commencé à pêcher, mon bateau était le seul à pêcher dans mon secteur.

Je suis pêcheur et je représente toutes ces organisations parce que je pense qu'il est important d'aborder le problème en faisant preuve de respect à l'égard de ces gens. C'est pour ça que je suis ici mais je peux vous dire, comme c'est la deuxième année que je viens et que je vous entends dire les mêmes choses, poser les mêmes types de questions, que nous n'arrivons à rien. L'an dernier, je suis sorti de cette salle en me posant les mêmes questions qu'aujourd'hui. Un an plus tard, je n'ai toujours pas de réponses.

Il faut passer à l'action en Colombie-Britannique. C'est ce que j'entends dire autour de cette table. Si c'est de l'action que vous voulez, vous allez en avoir. Vous allez avoir des grandes sociétés, vous allez avoir les bandes et les tribus autochtones qui font de l'exploitation forestière, et vous allez avoir la pêche. Je suis ici pour essayer de résoudre ces problèmes afin que nous ne soyons pas obligés de faire ça. Mais nous allons avoir des problèmes dans tout le pays si nous ne commençons pas à les aborder de front et à y trouver des solutions.

Le président: Je pense que nous avons compris votre point de vue.

Monsieur Probert.

M. Bruce Probert: Je vais essayer d'être bref.

Pour répondre à votre question sur la remonte de 3,5 millions, monsieur, c'est l'une des raisons pour lesquelles je suis sorti du processus du CCF, le Conseil consultatif du Fraser. Lorsque le MPO gérait les stocks, autrefois, il partait d'un chiffre établi, par exemple 100 000, et il estimait qu'il pourrait y avoir peut-être un million de poissons qui remonteraient dans un cycle de quatre ans, si c'était un cycle de quatre ans. Maintenant, il a entrepris un programme ambitieux de reconstruction.

Pour ce qui est du frai, les gens ne semblent pas comprendre que, tout comme une acre de terre ne peut faire vivre qu'un certain nombre de personnes, un système fluvial ne peut faire vivre qu'un certain nombre de poissons. J'essaie de faire comprendre ça au MPO mais j'ai oublié le nom qu'ils utilisent. Quoi qu'il en soit, pour une quantité donnée, il y aura une remonte d'un certain niveau dans le cycle de quatre ans. Pour faire une analogie, c'est comme si le MPO avait décidé qu'au lieu de prendre deux aspirines si vous avez mal à la tête, vous en prendrez quatre et vous vous sentirez mieux. De même, alors que 100 000 semblaient être suffisants auparavant, il en veut maintenant un demi-million.

Il y a un problème avec ça. Rivers Inlet en est le parfait exemple. Il y avait un million de poissons dans le secteur pendant le dernier cycle de pêche, et nous n'avons pas pêché depuis. Avant cela, 500 000 auraient été suffisants. Dans d'autres systèmes côtiers, on a essayé de doubler la remonte dans un cycle. À mon avis, cela surcharge les zones de frai. Il n'y a pas assez d'éléments nutritifs dans le système pour faire vivre tous ces poissons et c'est pourquoi les stocks s'effondrent.

J'ai soulevé le problème devant des biologistes du MPO et ils m'ont dit: «Comment pouvons-nous savoir quel est le nombre maximum qui convient à un secteur de frai tant que nous n'aurons pas calculé la remonte après avoir doublé le nombre cette année?» C'est absolument invraisemblable, et c'est pourquoi il faut voir au-delà de la crise. C'est pour cela aussi que je tiens le MPO responsable d'une bonne partie de nos problèmes. Ce n'est pas seulement une question d'eau chaude. Je regrette, mais c'est l'excuse du MPO pour s'en sortir.

J'ai une dernière chose à dire.

Le président: Très rapidement.

M. Bruce Probert: Je serai très bref.

Un comité permanent est venu dans l'Ouest il y six ou sept ans, juste après le lancement de la SPA. Pas un rapport n'a été produit, rien n'a été fait, et voici où nous en sommes six ou sept ans plus tard. S'il vous plaît, veillez à nous communiquer les résultats de vos travaux.

• 1100

Le président: Merci, monsieur Probert et vos collègues.

J'ai discuté avec plusieurs membres du comité et je crois pouvoir dire que nous sommes tous sensibles, suite à vos remarques et à vos informations, au fait qu'il existe une crise urgente à résoudre, pour toutes sortes de raisons que je n'aborderai pas ici.

Le comité, par mon intermédiaire, prendra contact avec le bureau du ministre dès demain pour savoir ce qui se fait exactement à ce sujet. Je crois pouvoir vous dire, avec l'accord des membres du comité, que nous allons trouver le temps, même si cela promet d'être bien difficile, pendant la semaine du 15 novembre, de tenir au moins une autre audience, que ce soit avec des représentants du ministre ou avec quelqu'un d'autre, et que nous allons essayer d'envoyer une lettre au ministre le 18 ou le 19 novembre sur cette question. Avez-vous un problème avec ça?

Je peux vous garantir que nous allons trouver le temps nécessaire. Pour le moment, je ne sais pas comment nous ferons mais nous le ferons. Je ne sais pas si nous pourrons organiser une rencontre avec des représentants du ministre mais nous trouverons de toute façon le temps d'organiser une autre réunion et d'écrire au ministre pour souligner l'urgence de vos préoccupations. C'est tout ce que je peux vous promettre pour le moment. Des membres du comité ont-ils des réserves à ce sujet?

Merci beaucoup. J'aurais aimé avoir plus de temps mais ce n'est pas le cas. Merci.

Les membres du comité ont maintenant plusieurs décisions à prendre.

Tout d'abord, le greffier nous a remis un programme de voyage sur la côte Est. Ce n'est pour l'instant qu'une proposition que nous pourrons modifier. Vous voyez sur cette feuille le programme des séances.

M. Sarkis Assadourian: Qu'y a-t-il le 21 novembre? On a indiqué une mauvaise date.

Le président: C'est pour novembre. Avez-vous des questions? Si nous sommes à Halifax et qu'il y a moins de témoins que prévu, nous aurons plus de temps. C'est pour novembre. Le greffier a fait une erreur, il a un mois de retard.

Une voix: Il a oublié un mois complet.

Une voix: Il a reculé sa montre d'un mois au lieu d'une heure.

Le président: Voilà donc le programme envisagé. Mike, de mon bureau, Alan et le greffier s'occuperont des listes de témoins. Si quelqu'un veut proposer des témoins, il doit le faire immédiatement. Alan et Mike prépareront une lettre d'une page que nous enverrons aux témoins pour leur expliquer la procédure.

Vous avez une question, Rick? Monsieur Limoges.

M. Rick Limoges (Windsor—St. Clair, Lib.): Cela concerne la motion.

Le président: J'y arrive dans une seconde. Y a-t-il d'autres questions au sujet du voyage du comité? Nous allons devoir décider qui s'en occupe mais nous ferons cela plus tard.

Vous avez aussi reçu une motion, avec le préavis exigé de 48 heures, de Peter Stoffer au sujet de la période de questions. Voulez-vous en parler un instant, Peter?

M. Peter Stoffer: Bien sûr.

C'est la même chose que l'autre fois. Lorsque les témoins ont terminé leur exposé, il y a l'opposition officielle, le Parti réformiste, qui aurait 10 minutes pour poser des questions, puis ce serait le Bloc pendant 10 minutes, puis les Libéraux pendant 10 minutes, le NPD pendant cinq, les Progressistes Conservateurs pendant cinq, et on reprendrait le même ordre, mais avec des tours de cinq minutes seulement.

Le président: Monsieur Limoges, d'abord.

M. Rick Limoges: Merci, monsieur le président.

Après un calcul rapide, cela veut dire que le quart du temps du premier tour serait consacré à plus de la moitié des membres du comité, ce qui ne reflète certainement pas la composition du comité ni le fait que nous ayons un gouvernement majoritaire. Au deuxième tour, ce serait encore pire car nous n'aurions que cinq minutes sur 25, soit un cinquième du temps.

• 1105

Il me semble que c'est complètement déraisonnable. Si la moitié des membres présents du comité venaient de notre parti, la troisième personne à lever la main devrait attendre plus d'une heure pour avoir l'espoir de poser une question. Franchement, c'est absurde.

Le président: J'en conclus que vous êtes contre.

Monsieur Assadourian.

M. Sarkis Assadourian: On dit que les témoins auraient 10 minutes pour leur déclaration liminaire. Nous venons d'avoir six témoins. Si chacun avait pris 10 minutes, cela aurait pris une heure sur une réunion de deux heures.

M. Peter Stoffer: Dans ce cas, comme la dernière fois, le président déciderait évidemment que deux ou trois seulement pourraient faire une déclaration. Si 50 personnes se présentaient, vous ne leur donneriez pas 10 minutes à chacune. C'est toujours le président qui peut décider.

Le président: Je me permets de vous interrompre, Peter. Nous ne parlons pas des témoins mais de la période des questions.

Monsieur Assadourian puis M. Bélair.

M. Sarkis Assadourian: Veuillez m'excuser, monsieur le président, mais c'est ce que je vois au début: les témoins auront 10 minutes. Si vous voulez modifier ça, je veux un total combiné d'une dizaine de minutes, pas 10 minutes à chacun. Il faut le préciser.

Le président: D'accord.

M. Sarkis Assadourian: Total. Est-ce qu'on peut avoir le mot «total»?

Le président: C'est sous-entendu, je pense.

M. Sarkis Assadourian: Dans ce cas, vous pouvez mettre «total». Les témoins auront au total 10 minutes pour leur déclaration liminaire.

Ai-je raison?

Le président: C'est ce qu'on nous dit.

M. Sarkis Assadourian: Vous pouvez donc ajouter le mot «total»?

M. Peter Stoffer: D'accord.

Le président: Monsieur Bélair.

Une voix: On peut voter.

M. Réginald Bélair (Timmins—Baie-James, Lib.): Pour simplifier, monsieur le président, Rick vient juste de dire qu'il y aurait 45 minutes de questions de l'opposition et 20 minutes du gouvernement, alors que nous sommes la majorité. En fait, ça devrait être le contraire.

Le président: Monsieur Bernier.

[Français]

M. Yvan Bernier: Monsieur le président, je ne voulais pas susciter la controverse. Disons, à l'intention de mes collègues que je n'ai pas la chance de voir souvent au comité, que l'objectif de la motion de Peter est de permettre à tous les partis ou à leurs porte-parole de se faire entendre.

On pourrait peut-être disputer le temps imparti à chacun. Cependant, comme j'accepte qu'on accorde plus de temps au Parti réformiste et qu'on ramène celui du Bloc québécois à sept minutes, ce n'est pas cela qui va me causer un problème. Mais pensons au prochain document auquel nous aurons à travailler tout à l'heure. L'esprit reflété dans la motion de Peter est le même que celui qui sous-tend la proposition que le président va faire lui-même, soit que chacun des partis dispose d'un temps égal quand nous sommes en voyage. À ce moment-là, oui, vous vous retrouveriez avec seulement 20 p. 100 du temps.

L'objectif n'est pas de bâillonner le gouvernement. C'est de permettre à chacun des partis de se faire entendre. Ensuite, après le premier tour, comme le président le fait d'ailleurs toujours, on alterne entre un porte-parole du gouvernement et un représentant de l'opposition. Ainsi, tout le monde peut parler.

L'objectif premier est de permettre à chacun des partis de se faire entendre assez rapidement. Par la suite, le mouvement se poursuit. Je pense que la motion de Peter respecte cet esprit.

[Traduction]

Le président: Monsieur Pratt puis Claude. David.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Merci, monsieur le président.

Comme je ne fais pas partie du comité, j'hésite à vous donner des conseils mais le Comité de la défense a eu exactement le même débat lors de la dernière session et je pense que nous avons trouvé une solution tout à fait raisonnable et équitable pour le gouvernement et pour l'opposition. Vous devriez peut-être voir comment nous avons décidé de répartir le temps.

Brièvement, nous avons réduit la période initiale de 10 minutes à sept minutes, pour éviter les longues déclarations, avec de longs préambules, de façon à permettre aux membres du comité de commencer rapidement à poser leurs questions. Ensuite, après le premier tour, on alterne entre le gouvernement et l'opposition.

Pendant la dernière session, le système a fort bien marché et les réunions avançaient de manière très satisfaisante. En outre, les membres du comité, surtout du gouvernement, avaient tous la chance de poser leurs questions.

Le président: Monsieur Drouin.

• 1110

[Français]

M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): À la suite de ce que M. Bernier a dit, je veux vous faire remarquer que la proposition qui nous est soumise ne correspond pas à ce qu'il semble comprendre. Elle dit qu'après le premier tour, on continue de la même façon au deuxième tour.

Si la proposition est qu'après le premier tour, on alterne d'un côté puis de l'autre, ça va. Mais cette proposition-là n'est pas équitable parce que nous nous trouvons à passer au cinquième rang, comme MM. Limoges et Bélair l'ont mentionné.

[Traduction]

Le président: Nous allons devoir passer au vote. Je tiens à préciser, monsieur Bernier, qu'il n'est encore jamais arrivé, en tout cas depuis le lancement de ce nouveau comité, que l'opposition n'ait pas eu... je pense que vous avez eu hier 30 p. 100 du temps.

(La motion est rejetée)

Le président: La motion est rejetée. La procédure actuelle est maintenue. La séance est levée.

[Français]

M. Yvan Bernier: Est-ce qu'on pourrait...

[Traduction]

Le président: Une remarque de M. Bernier.

[Français]

M. Yvan Bernier: Comme je pense que nous étions près d'en arriver à une entente, pourrait-on formuler une autre proposition, monsieur le président, qui serait conforme à ce que les gens ont compris? Si on amendait la fin de la proposition de M. Stoffer pour que par la suite, ce soit la règle de l'alternance...

Je veux en parler tout de suite pendant que les gens s'entendent tous bien à ce comité.

[Traduction]

Le président: Je ne veux pas vous interrompre, monsieur Bernier, mais vous pourrez toujours proposer une motion avec un préavis de 48 heures. Ce n'est pas un problème.

M. Yvan Bernier: Oui, on en discutera...

[Français]

C'est pourquoi je le fais maintenant, si on veut avoir la chance...

Des voix: Oh, oh!

[Traduction]

Le président: À l'ordre.

[Français]

M. Yvan Bernier: Si on veut avoir la possibilité de régler cette question-là au retour, je voudrais amender la proposition de M. Stoffer de manière à ce que la rotation se fasse d'un côté puis de l'autre.

L'objectif serait de respecter ce qu'on fait d'habitude. J'aimerais que la proposition contienne ce qui s'y trouve déjà mais qu'on en amende la fin, c'est-à-dire qu'on permette aux gens d'alterner après le premier tour. C'est une proposition.

Par ailleurs, vous me parlez encore des avis de motion de 48 heures; je pensais qu'on avait modifié cette règle l'autre jour. Si ce n'est pas le cas, je propose à nouveau que les avis de motion soient de 24 heures.

[Traduction]

Le président: Si vous avez le consentement unanime, vous pouvez proposer une motion.

[Français]

M. Yvan Bernier: Mais j'avais demandé l'autre jour qu'on corrige.

[Traduction]

Le président: Envoyez-la par écrit.

[Français]

M. Yvan Bernier: Bon, je vous avise que vous allez la recevoir.

L'autre chose que j'avais abordée l'autre jour, mais qu'on n'a pas eu le temps de préparer, concerne les règles qui ont été adoptées l'autre jour et qui m'ont fait tomber en bas de ma chaise. Le comité a accepté que les témoins puissent déposer leurs documents dans la langue de leur choix et que ceux-ci soient distribués.

J'aimerais qu'on retire cette règle. Si nous, les francophones, permettons qu'on distribue des documents uniquement en anglais, ce sera le cas échéant et à la pièce. Je ne voudrais surtout pas donner l'impression que le comité accepte de travailler dans une seule langue. Si les gens ne me croient pas, j'aimerais leur lancer un défi suivant. À une seule des séances, monsieur le président, recevez des témoins et suspendez tous les documents. Vous allez voir ce qui va se passer. Ou plutôt, distribuez-les seulement en français. J'aimerais voir comment mes collègues se débrouilleraient à ce moment-là. Je voudrais que vous vous mettiez dans la peau des francophones.

Moi, je n'ai pas vraiment de problème. Je suis presque bilingue maintenant et j'ai toujours l'aide des interprètes, mais il y a d'autres personnes qui vont me suivre au Comité permanent des pêches et qui sont unilingues francophones, comme la plupart ici sont unilingues anglophones. Donnons-nous une chance. On peut donner notre consentement le cas échéant, mais cela ne doit pas constituer une règle de loi qui nous permette de travailler avec des documents unilingues.

Donc, j'aimerais que cette motion soit retirée et que les documents ne puissent être distribués s'ils sont dans une seule langue. Le greffier peut les avoir et nous les donner par la suite, mais on doit fonctionner selon le principe que tous sont égaux.

[Traduction]

Le président: Monsieur Bernier, nous essayons de veiller à ce que les documents déposés devant le comité soient dans les deux langues. Nous essayons d'être aussi justes que possible. Si la motion concernant la procédure originelle doit être modifiée, le comité pourra s'en charger s'il le souhaite. Nous avons cependant demandé à ce que tous les documents soient déposés dans les deux langues officielles. C'est notre politique même si—comme cela est arrivé aujourd'hui—nous recevons certains témoins après un très court préavis. Je ne pense pas que celui-ci était traduit, n'est-ce pas? Nous allons cependant faire tout notre possible pour veiller à ce que les documents soient traduits.

• 1115

Le même principe vaut dans l'autre sens. Quand nous ferons une tournée de la Gaspésie, je m'attends à ce que certains documents nous soient adressés en français seulement et je préférerais quand même que vous les obteniez car, comme je ne suis pas très bon en français, vous pourriez les lire et poser les questions voulues mieux que je ne le pourrais le faire.

Nous faisons tout notre possible pour préserver le bilinguisme.

[Français]

M. Yvan Bernier: À ce moment-là, qu'il ne soit pas distribué. Je ne voudrais pas que la règle soit qu'on a le droit de distribuer de tels documents aux députés. Je voudrais que les députés lésés dans leurs droits linguistiques en donnent unanimement la permission au président. Il y a des gens qui vont m'accompagner à ce comité et pour qui ce sera un handicap parce qu'ils ne peuvent pas fonctionner en anglais.

Personnellement, je n'ai jamais eu de mal à fonctionner avec vous, mais lorsque nous irons rencontrer les gens... Monsieur le président, dans les premières années, j'ai même présidé une réunion en anglais en Nouvelle-Écosse, moi qui suis un bloquiste. Il faut le faire! Donnons-nous une chance; il faut que les règlements à la base soient clairs et nets. Par la suite, on fonctionnera à la pièce. Si on ne peut pas réviser ou renverser cette règle, je vais devoir m'adresser au Président de la Chambre. Je ne peux accepter que ce soit écrit dans nos règlements. Je ne peux pas.

[Traduction]

Le président: Vous pouvez certainement proposer une motion pour modifier cette procédure. C'est votre droit.

La séance est levée.