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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 11 mai 2000

• 0906

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la réunion ouverte et je souhaite la bienvenue à tout le monde.

Comme vous le savez, nous étudions aujourd'hui le projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 février 2000.

Nous avons le plaisir d'avoir avec nous les témoins suivants: M. Dale Orr, économiste; M. John Staple, directeur des Services économiques à la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants; et M. Ryan Dunford, coordonnateur des relations gouvernementales à l'Alliance canadienne des associations étudiantes.

La plupart d'entre vous ont déjà comparu devant le comité. Vous avez de cinq à dix minutes pour faire vos observations préliminaires, après quoi nous passerons aux questions.

Nous allons commencer par M. Orr. Soyez le bienvenu.

M. Dale Orr (économiste, Wharton Econometrics Forecasting Associates (WEFA) Canada Inc.): Je vous remercie de m'avoir invité.

Je tiens d'abord à féliciter le comité de son excellent rapport de décembre dernier et de l'impact constructif qu'il a eu sur le budget fédéral de février.

J'ai rédigé deux documents dans lesquels j'évalue et je commente le budget 2000. Je vous les ai distribués et je vous ferai ce matin un ou deux commentaires sur les principales recommandations et conclusions qu'ils renferment.

Le premier s'intitule «The New Fiscal Framework for Canada» et vous devriez l'avoir devant vous, quelques conclusions, recommandations et tableaux y compris. Le deuxième document a pour titre «Will the Tax Reduction Plan of Budget 2000 Reduce Our Personal Income Tax Burden?».

Le but du premier document, «The New Fiscal Framework for Canada», est d'évaluer les options financières qui s'offrent au Canada à moyen terme. Voici certaines des principales conclusions et recommandations qu'il contient.

J'ai trouvé que le budget était assez bon. Dans l'ensemble, je lui ai donné un C+. J'ai aussi aimé le rapport du Comité des finances, mais...

Le président: Quelle note avez-vous attribuée au rapport du Comité des finances? J'espère que vous avez été plus généreux.

Des voix: Ah, ah!

M. Dale Orr: Mais, l'année dernière, j'ai dit au Comité parlementaire des finances que la règle 50-50 n'était pas opérationnelle ni judicieuse et, maintenant, elle est désuète.

Je tiens à faire observer aussi qu'en vertu des arrangements relatifs au budget ces dernières années, les dépenses ont toujours dépassé les plans budgétaires. Il y a eu trop de dépenses imprévues. Au cas où vous ne le sauriez pas, il y a un beau petit tableau au début qui montre que l'excédent de dépenses a été de 3 milliards de dollars dans le budget de 1997, de 7 milliards de dollars dans le budget de 1998 et ainsi de suite. Les dépenses ont constamment été supérieures aux plans budgétaires. Certaines des dépenses engagées en fin d'année étaient peu judicieuses, d'autres ont été consacrées à des postes qui n'étaient pas prioritaires tandis que d'autres encore n'avaient tout simplement pas leur raison d'être. Il est donc très important d'essayer de mettre un peu d'ordre là-dedans.

Il y a aussi le fait que lorsque de nouvelles priorités, différentes de celles des années précédentes, ont surgi au cours des trois dernières années, le gouvernement a été beaucoup trop enclin à y donner suite en augmentant simplement les dépenses totales au lieu d'examiner les postes non prioritaires et de réduire les dépenses qui y étaient associées pour essayer de satisfaire aux nouvelles priorités.

• 0910

Je l'ai déjà dit. J'ai entendu de nombreux ministres faire des allocutions à de nombreuses occasions. Ils parlent toujours des nouvelles priorités. On n'entend presque jamais un ministre parler des programmes à faible priorité. Quand on dépense plus de 100 milliards de dollars par année, il faut qu'il y ait quelque part des programmes à faible priorité.

J'ai aussi fait valoir que des compressions budgétaires seraient un objectif valable, sinon absolument et techniquement, du moins en principe, pour essayer d'empêcher les dépenses de programmes d'augmenter de manière à dépenser à peu près la même somme en dollars constants par habitant année après année. Il conviendrait de se fixer un tel objectif, pas parce que les besoins relatifs aux dépenses de programmes n'augmentent pas, mais parce qu'à ce stade-ci de notre histoire économique et financière, il est important aussi de montrer du respect pour le contribuable ainsi que pour nos enfants, qui auront à supporter le poids de notre dette.

J'ai un autre tableau, à la page 2 du deuxième document, qui montre l'augmentation considérable des dépenses de programmes. Le gouvernement s'en est tenu aux programmes prioritaires de 1993 à 1997, lorsqu'il essayait d'atteindre son objectif sur le plan du déficit, ce qu'il a réussi à faire, mais dès qu'un budget équilibré a été en vue, il a ouvert les vannes et les dépenses ont de nouveau grimpé. Cette augmentation a été trop radicale étant donné le taux élevé de nos impôts—nous faisons des progrès, mais il demeure trop élevé—et le niveau très élevé de notre dette. Nous faisons des progrès dans ce cas également, mais le fardeau de notre dette demeure beaucoup trop lourd.

J'ai fait remarquer dans ce document qu'étant donné les prévisions économiques, un programme de dépenses de 58 milliards de dollars serait chose très faisable. En fait, si les dépenses par habitant demeuraient constantes en chiffres réels, on pourrait facilement passer de 58 milliards à 90 milliards de dollars pour les réductions d'impôt étant donné les prévisions économiques actuelles. Et si on redoublait d'efforts pour financer les nouvelles priorités à partir du budget existant, on pourrait avoir au cours des cinq prochaines années des réductions d'impôt se situant autour de 120 milliards de dollars au lieu de 58 milliards de dollars.

Je vais vous faire un ou deux commentaires au sujet du deuxième document qui paraît un peu technique à cause de son titre «Will the Tax Reduction Plan of Budget 2000 Reduce Our Personal Income Tax Burden?». Vous trouverez la réponse à cette question à la page 2, dans le tableau. Oui, une diminution d'impôt de 58 milliards de dollars sur une période de cinq ans allégerait le fardeau fiscal. Sur cette somme de 58 milliards de dollars, l'impôt sur le revenu des particuliers représente 40 milliards de dollars. Je veux surtout parler ici de l'impôt sur le revenu des particuliers.

Si nous comparons notre impôt sur le revenu des particuliers fédéral et provincial au PIB, comme vous le savez, nous arrivons à un peu plus de 14 p. 100, soit le pourcentage le plus élevé des pays développés. Bien sûr, c'est pourquoi le gouvernement a tout à fait raison de recommander de fortes réductions de l'impôt sur le revenu des particuliers au cours des cinq prochaines années. Lorsque cette recommandation aura été mise en oeuvre, le fardeau fiscal passera d'un peu plus de 14 p. 100 à un peu plus de 13 p. 100.

L'impôt sur le revenu des particuliers américains, nos principaux concurrents, s'élève à 12,5 p. 100, ce qui est pas mal plus bas que notre pourcentage de 14,3 p. 100. S'il n'y a aucune réduction d'impôt au cours des cinq prochaines années, leur fardeau fiscal passera d'environ 12,5 p. 100 à 12 p. 100. En fait, après les élections, à l'arrivée au pouvoir d'un nouveau parti, il va y avoir des réductions assez marquées de l'impôt sur le revenu des particuliers; c'est une question de degré.

• 0915

Donc, après la mise en oeuvre de ce plan qui prévoit des réductions de 40 milliards de dollars de l'impôt sur le revenu des particuliers, l'impôt au Canada demeurera beaucoup plus élevé, comme fardeau fiscal, qu'aux États-Unis. C'est un bon pas dans la bonne direction, mais c'est pourquoi bien des gens et moi-même sommes très heureux de voir que M. Martin et le gouvernement ont dit que la réduction serait d'au moins 58 milliards de dollars et qu'ils feraient de leur mieux pour que ce montant soit plus élevé encore.

À mon avis, même avec un contrôle raisonnable des dépenses, on pourrait facilement aller jusqu'à 80 milliards de dollars, et espérons que nous pourrons faire mieux encore.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Orr.

Nous allons maintenant entendre le témoignage de M. John Staple.

M. John Staple (directeur, Services économiques, Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants): Merci.

J'aimerais vous faire quelques commentaires sur le processus budgétaire et le budget 2000. Nous avons été heureux ces dernières années de pouvoir présenter des mémoires assez détaillés au Comité des finances. Nous aimons l'habitude que le gouvernement a prise d'écouter ce que la population canadienne a à dire. Cela exige beaucoup de travail de votre part, j'en suis persuadé, mais en vaut la peine puisqu'il vous est possible ensuite de faire valoir les vues du public auprès du gouvernement.

Nous sommes assez satisfaits puisque notre objectif premier dans le budget de cette année était la promotion des questions qui intéressent les enfants. D'une part, l'aspect sécurité du revenu nous a donné satisfaction, mais, d'autre part, la question de la mise en oeuvre et de l'élaboration des programmes n'a pas été réglée. Nous reconnaissons que le partage provincial-fédéral des pouvoirs comporte des difficultés et nous sommes prêts à continuer à travailler fort en vue du budget 2001.

Je suis ici ce matin pour vous parler précisément de la date d'entrée en vigueur des modifications qui seront apportées au programme d'assurance-emploi. Nos membres de toutes les régions du pays se sont dits très préoccupés par le nombre de cas en souffrance d'enseignants de notre organisation qui se sont vu refuser des prestations en vertu de l'ancienne règle des 700 heures, mais qui y auraient droit selon la nouvelle règle des 600 heures. Nous avions espéré qu'il y aurait une certaine souplesse quant à la date d'entrée en vigueur vu les préoccupations de nos membres qui se sont vu refuser des prestations, mais, à la lecture du projet de loi, cette souplesse ne me semble pas apparente.

En deux mots, selon nous, la date d'entrée en vigueur des modifications au programme d'assurance-emploi qui assureraient l'admissibilité à nos membres selon la règle des 600 heures devrait être rétroactivement fixée au 1er janvier 1997. Sinon, la règle des 600 heures devrait à tout le moins s'appliquer à ceux à qui on a refusé des prestations et dont la demande a fait l'objet d'une décision qui a été portée en appel.

Je suis essentiellement ici ce matin pour parler de cette question. La lettre que notre présidente, Marilies Rettig, a envoyée à l'honorable Jane Stewart à ce sujet et dont vous avez une copie, je pense, est assez claire. Elle porte sur la date du début des prestations qui ont été annoncées dans le cadre de ce programme. Nous avons déjà écrit à la ministre Stewart et à d'autres représentants du gouvernement pour les féliciter de cette mesure qui se faisait attendre depuis longtemps, selon nous.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Staple.

Monsieur Dunford, soyez le bienvenu.

M. Ryan Dunford (coordonnateur des relations gouvernementales, Alliance canadienne des associations étudiantes): Merci.

Je comparais au nom de M. Mark Kissel, le directeur national actuel de l'ACAE. Il a été retenu à Toronto et m'a demandé de vous transmettre ses excuses. J'espère que je serai à la hauteur de la tâche ce matin.

Laissez-moi d'abord vous dire que j'ai moi aussi bien aimé le rapport que le Comité permanent des finances a publié en décembre dernier. Nous l'avons trouvé très utile et nous sommes heureux d'avoir pu y contribuer, même modestement. Nous vous remercions infiniment de nous en avoir donné l'occasion.

• 0920

Je m'occupe de leadership étudiant depuis trois ans, ce qui est une éternité, soit dit en passant, dans ce domaine.

M. John Staple: Vous devriez essayer d'être député.

Des voix: Ah, ah!

M. Ryan Dunford: Très juste!

En toute sincérité je peux dire que jamais des modifications budgétaires n'ont été aussi bien accueillies, je pense, que celles proposées relativement au financement par le gouvernement des prêts aux étudiants. Je n'ai encore rencontré aucun étudiant qui déplore le fait que les banques ne s'occupent plus du programme de prêts aux étudiants. Tout le monde trouve que c'est une mesure très positive.

La capitalisation gouvernementale aidera à régler bien des problèmes que nous avons éprouvés par le passé avec les banques. Nous trouvions très difficile la diffusion des données sur les prêts aux étudiants avec les banques. Les étudiants ont parlé de problèmes de services, de communication et de taux d'intérêt élevés. Un taux de base plus un taux fixe de 2,5 p. 100 ou un taux flottant de 5 p. 100 est un taux d'intérêt qui m'apparaît excessif.

De la façon dont nous voyons les choses, maintenant que le gouvernement va s'occuper de ce programme, ce ne sera plus à une banque privée de gérer un programme social. Nous avons déjà eu l'occasion, par l'entremise de DRHC, de rencontrer des bureaux de services à qui l'administration des prêts aux étudiants pourrait être confiée. Jamais des groupes d'intervenants n'ont eu leur mot à dire sur l'élaboration du programme de prêts aux étudiants et nous sommes certainement heureux de pouvoir le faire.

Je me montrerais négligent si je ne disais pas que certaines petites améliorations doivent être apportées au programme de prêts aux étudiants, mais j'ai l'impression que cela déborde le cadre des travaux du comité—que ce sont surtout les modifications proposées dans la partie 3 du projet de loi C-32 qui vous intéressent.

Je terminerai donc en disant bravo. Ce sont là de bonnes nouvelles pour les étudiants et ils en sont très heureux. Il reste à régler les détails avec le ministère du Développement des ressources humaines et Katalin et son service pour essayer d'améliorer la politique ainsi que le programme social sur lequel les étudiants comptent vraiment, et de plus en plus d'ailleurs en ce début de siècle.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Dunford.

Nous allons maintenant donner dix minutes à chacun, en commençant par M. Marceau.

[Français]

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Je vais attendre quelques instants pour que vous puissiez ajuster vos écouteurs. Bien entendu, lorsque des trucs comme ça arrivent, on voudrait bien avoir le

[Traduction]

traducteur universel de Star Trek,

[Français]

mais malheureusement il n'existe pas encore.

[Traduction]

Des voix: Ah, ah!

[Français]

M. Richard Marceau: Je vous remercie d'abord d'être venus nous rencontrer ce matin et de nous avoir fait ces intéressantes présentations.

Monsieur Orr, vous avez donné la note C+ au budget, ce qui, à mon avis, est une note généreuse. En plus de la baisse de l'impôt sur le revenu que vous préconisez, pourriez-vous nous donner en quatre ou cinq points les initiatives que Dale Orr, ministre des Finances, nous présenterait demain matin?

[Traduction]

M. Dale Orr: J'aurais quatre choses à répondre à cela.

Premièrement, il faudrait accélérer les réductions que le budget prévoyait. En accélérant le processus, on pourrait porter à environ 70 milliards de dollars les économies d'impôt évaluées à 58 milliards de dollars. Les choses n'iront pas assez vite.

Deuxièmement, le gouvernement aurait dû augmenter le montant du RER.

Et j'aurais aimé qu'il y ait une plus grande réduction de l'impôt sur le revenu des sociétés, surtout pour que le secteur des services jouisse du même traitement fiscal que les autres secteurs de l'économie.

[Français]

M. Richard Marceau: Un des problèmes que j'entrevois personnellement face au budget et à toutes les données qui l'ont précédé, c'est que le ministre des Finances a annoncé des surplus de l'ordre d'environ 95 milliards de dollars sur cinq ans, alors que de nombreux économistes—je ne connais pas votre position—parlent plutôt de surplus de 137 à 140 milliards de dollars.

• 0925

Dans cette optique, ne croyez-vous pas que les réductions de taxes devraient être plus rapides? Le ministre des Finances ne cacherait-il pas une partie des surplus, un peu comme le fait l'écureuil, afin qu'il puisse dire le lendemain du dépôt du budget: «Regardez, on a encore réussi à réduire les taxes et à faire mieux que prévu»? Joue-t-il à ce qu'on appelle en anglais the expectation game, de sorte que si les surplus sont supérieurs à 95 milliards de dollars, il nous dira de regarder comme il est beau, bon et fin? Est-ce le jeu auquel se prête le gouvernement?

[Traduction]

M. Dale Orr: Je vous remercie beaucoup de cette question.

J'ai écrit un document post-budgétaire. Je l'ai ici. Il s'intitule «Is Mr. Martin Hiding Money Again?» En un mot, non. Il s'est protégé en disant que les mesures fiscales s'élèveraient à «au moins» 58 milliards de dollars. S'il avait dit «J'aurais bien aimé qu'elles soient de 59 milliards de dollars, mais c'est ce que nous pouvons faire de mieux.», alors j'aurais dit qu'il fait des cachettes.

Au moment du budget, lorsque des économistes comme moi... Comme vous le savez, je fais partie de ceux qui ont dit qu'il y aurait des surplus d'environ 95 milliards de dollars et, d'ailleurs, les prévisions pour l'économie canadienne n'ont pas cessé de se raffermir depuis.

Dans ce document, je dis qu'en raison des prévisions plus fortes pour l'économie, ce chiffre de 95 milliards de dollars est passé à environ 115 milliards de dollars. C'est à peu près ce à quoi les surplus s'élèveront. Certaines personnes vous diront peut-être que les chiffres sont légèrement plus élevés aujourd'hui parce que les prévisions ont continué à s'améliorer. Ce sont donc là les chiffres.

D'après moi, les réductions pourraient être supérieures à 58 milliards de dollars. Même en continuant à dépenser la même somme par habitant en dollars constants, on pourrait se rendre jusqu'à 90 milliards de dollars. Cela correspondrait à une réduction de la dette d'environ 4 milliards de dollars par année, au fonds de prévoyance, plus 1 milliard de dollars par prudence économique.

[Français]

M. Richard Marceau: Comme on a pu le constater lors de la dernière rencontre des premiers ministres provinciaux, les provinces semblent éprouver de façon générale ce qu'il convient d'appeler le déséquilibre fiscal, je crois. Elles font face à des besoins grandissants, entre autres en matière de santé, et elles ont de la difficulté à atteindre l'équilibre budgétaire ou à générer de petits surplus. Il est un peu frustrant pour les provinces de s'apercevoir que le gouvernement fédéral jouit de si grands surplus. Si les surplus prévus sont de 95, 115, 137 ou 140 milliards de dollars, ne croyez-vous pas qu'on devrait se donner un petit coussin et faire en sorte qu'au lieu d'avoir des baisses d'impôts ou de taxes, ou des prélèvements de toutes sortes de seulement 58 milliards de dollars, on accroisse cette somme pour s'assurer que le gouvernement fédéral n'utilise pas les surplus énormes dont il dispose pour s'immiscer à nouveau dans des domaines de compétence provinciale et imposer une nouvelle norme nationale, en utilisant cet argent comme une sorte de carotte pour inciter les provinces à laisser tomber leurs prérogatives constitutionnelles?

[Traduction]

M. Dale Orr: J'aurais une ou deux choses à dire à ce sujet.

En ce qui concerne les soins de santé, les gouvernements fédéral et provinciaux n'arrêtent pas de se disputer. Le gouvernement de l'Ontario se plaint depuis des mois—il a de la difficulté à offrir des soins de santé, parce qu'il ne reçoit pas assez d'argent du gouvernement fédéral—et quand on regarde son budget, on s'aperçoit qu'il a de l'argent. Il y a un manque de crédibilité de la part de certains gouvernements provinciaux, dans ce cas-ci l'Ontario. On est loin de ne pas avoir assez d'argent pour les soins de santé en Ontario.

• 0930

J'aurais une autre remarque à faire au sujet des provinces. Le gouvernement fédéral devrait se fixer comme objectif de maintenir à un niveau à peu près constant les augmentations par habitant en chiffres absolus tout en prélevant certaines sommes dans les programmes à faible priorité pour compenser cette augmentation de 3 p. 100 chaque année de manière à avoir 5 ou 6 milliards de plus à consacrer aux dépenses totales. Il y a un autre point qu'il ne faut pas oublier non plus. Après tout, lorsqu'on fait des sondages auprès des Canadiens et qu'on leur demande ce qui est vraiment important pour eux, la santé revient constamment, suivie par l'éducation, et ce sont là des responsabilités qui relèvent en grande partie des provinces. Pourquoi alors le gouvernement fédéral devrait-il être un élément de plus en plus important de l'économie? C'est une autre raison pour laquelle une augmentation de 3 p. 100 par année serait à peu près juste.

À mon avis, le gouvernement fédéral ne devrait pas être un élément de plus en plus important de l'économie à moyen terme, parce que les priorités en matière de dépenses relèvent essentiellement de la compétence des provinces, sans oublier, comme je l'ai dit, que la réduction des impôts et de la dette est très importante.

Il y a une chose intéressante à signaler à ce sujet. J'ai assisté à la présentation de plusieurs documents la semaine dernière sur l'éducation et de nombreuses analyses ont porté sur les avantages de l'éducation pour le public. Ces avantages se répercutent très manifestement d'une province à l'autre. Un grand nombre de médecins qui ont fait leurs études en Saskatchewan finissent par travailler en Alberta et ainsi de suite. En fait, comme nous le savons et ce dont on parle beaucoup, c'est que certains d'entre eux finissent par travailler au Texas. Mais il y a une chose dont on parle moins et c'est du nombre de diplômés dont les études sont financées par une province, mais qui finissent par travailler dans une autre.

Le gouvernement fédéral devrait-il jouer un plus grand rôle dans le secteur de l'éducation? D'un point de vue économique, il y a de bonnes raisons de croire que l'éducation universitaire, surtout la formation de médecins et d'autres professionnels très mobiles, comporte des avantages plus grands pour le Canada en général; on ne peut pas vraiment les retenir dans une province. Le gouvernement fédéral devrait donc avoir des pouvoirs plus grands et dépenser plus. Les éducateurs au niveau universitaire soutiennent que nous sommes l'un des pays très peu nombreux qui n'ont pas un ministère fédéral de l'Éducation. Un grand nombre de bons arguments économiques militent en faveur d'une présence, d'une compétence et de dépenses plus grandes pour le gouvernement fédéral en ce qui concerne ce type d'éducation professionnelle au Canada.

Ce n'est pas la réponse à laquelle vous vous attendiez, mais vous avez les questions et j'ai les réponses.

Des voix: Ah, ah!

[Français]

M. Richard Marceau: Non, les choses se passent normalement autrement. Vous comprendrez qu'il m'est difficile d'être d'accord avec vous. Malheureusement, le temps nous manque,

[Traduction]

le temps passe vie.

Le président: Soit dit en passant, les gens de Richmond Hill sont d'accord avec vous.

[Français]

M. Richard Marceau: Je le sais. C'est pour ça qu'ils vous élisent. Dans Charlesbourg, ils m'élisent, moi.

[Traduction]

Des voix: Ah, ah!

[Français]

M. Richard Marceau: Merci.

[Traduction]

Le président: Monsieur Szabo, avez-vous une question?

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Oui. Il y a trois points que je veux soulever et j'aurais peut-être une toute petite question.

Dale, pensez-vous qu'on puisse mettre trop d'argent dans un REER?

M. Dale Orr: Qu'une personne pourrait mettre trop d'argent dans un REER?

M. Paul Szabo: Oui.

M. Dale Orr: Oui.

M. Paul Szabo: Je suis d'accord.

M. Dale Orr: Cela n'a rien à voir avec la comptabilité.

M. Paul Szabo: Non. Ce n'est peut-être pas la meilleure stratégie dans certains cas.

M. Dale Orr: Exactement; il y a un montant optimal à mettre de côté pour la retraite.

M. Paul Szabo: Nous allons aborder cette question pour le prochain budget, parce qu'elle est très importante. Il y a un mythe qui veut que plus on en a, mieux c'est quand on pense aux différences individuelles, au roulement dans un REER, à la pleine imposition, etc.

Vous avez aussi comparé les taux d'imposition du revenu au Canada et aux États-Unis. Je suis heureux que vous ayez soulevé cette question parce qu'elle est extrêmement importante et loin d'être claire. J'ai énuméré très brièvement certaines des différences. On peut regarder les déclarations de revenu ou les taux d'imposition et se dire que l'impôt payé est plus élevé, mais il y a de toute évidence de nombreuses autres considérations monétaires et non monétaires qui entrent en jeu, comme les frais d'utilisation, les avantages non imposables, l'impôt sur les biens transmis par décès, l'imposition des gains en capital au moment de la vente de sa résidence principale, les coûts de l'assurance-maladie, les différences entre les taux d'imposition du revenu d'un État à l'autre et la déductibilité des intérêts hypothécaires, sans compter d'autres questions non monétaires comme la qualité de vie, des maisons et des rues sûres, la sécurité sociale, la pauvreté et j'en passe.

• 0935

Je pense que vous admettrez avec moi qu'une analyse globale constituerait une tâche énorme quand on considère la variation des taux d'imposition d'un État à l'autre aux États-Unis. Pouvez-vous nous donner une idée de l'étendue de l'analyse à laquelle vous vous êtes livré pour en arriver à la conclusion que, malgré tout le reste, en fait, l'impôt est plus élevé, sans bonne raison apparente?

M. Dale Orr: La réponse à cette question est oui. Premièrement, le tableau que vous avez devant vous résulte d'un examen du point de vue de l'économie américaine et de l'économie canadienne. Vous pouvez voir dans la note en bas de page que le taux américain inclut tout l'impôt sur le revenu des particuliers, c'est-à-dire au niveau fédéral, de l'État, du pays et de la ville. C'est un tableau de l'impôt sur le revenu des particuliers. Il s'agit d'une moyenne aux États-Unis et comme vous le savez et l'avez dit vous-même, cette moyenne aux États-Unis varie pas mal selon l'État et la ville où on vit, tout comme elle varie au Canada selon la province de résidence. Mais, dans l'ensemble, ces chiffres représentent le fardeau fiscal, l'impôt sur le revenu des particuliers par comparaison au PIB, pour le Canada et les États-Unis.

Cependant, l'OCDE a fait une étude sur l'impôt total, dans laquelle tous les facteurs ont été pris en compte. Cette étude montre—et je crois que les derniers chiffres remontent à 1998—que le Canada se situe dans la moyenne à l'OCDE. Dans l'ensemble, si on tient compte de tous les autres facteurs que vous avez mentionnés, nous nous situons à peu près dans la moyenne à l'OCDE, mais nos taux sont beaucoup plus élevés qu'aux États-Unis.

M. Paul Szabo: Avez-vous comparé le travail indépendant aux activités des corporations? Cela pourrait-il modifier le rapport entre l'impôt sur le revenu des particuliers et le PIB?

M. Dale Orr: Entre le Canada et les États-Unis?

M. Paul Szabo: N'importe où.

M. Dale Orr: Pas le travail indépendant. Je sais que nous avons un nombre relativement plus élevé de petites entreprises que les États-Unis.

M. Paul Szabo: Seriez-vous d'accord pour dire que si plus de gens exploitant des entreprises qui ne sont pas constituées en société, c'est-à-dire des entreprises individuelles, les incorporaient, les chiffres changeraient?

M. Dale Orr: Oui, ils changeraient probablement.

M. Paul Szabo: Oui et pourtant le régime fiscal n'aurait pas changé.

M. Dale Orr: C'est exact.

M. Paul Szabo: Donc, l'utilisation de l'impôt sur le revenu des particuliers comme pourcentage du PIB pour montrer le fardeau fiscal ne donnerait probablement pas une idée exacte du fardeau fiscal de l'impôt sur le revenu des particuliers.

M. Dale Orr: Non. Il s'agit de l'impôt sur le revenu des particuliers tandis que l'autre tableau du document—et je serais heureux de vous le fournir au complet—donne une idée de l'impôt total.

M. Paul Szabo: Oui. J'ai soulevé la question parce que tout n'est pas aussi simple que ça en a l'air, n'est-ce pas?

M. Dale Orr: Oh, il n'y a rien de simple et il est très important de comprendre que nous sommes loin de nous comparer pour ce qui est de l'impôt sur le revenu des particuliers, mais c'est un peu moins pire en ce qui concerne toutes les autres formes d'impôt que vous avez mentionnées. C'est pourquoi, lorsque nous regardons le fardeau total, nous sommes encore loin de nous comparer aux États-Unis.

M. Paul Szabo: Exact.

J'ai une dernière question, monsieur le président, si vous me le permettez.

Ce n'est pas parce que vous en avez parlé; c'est parce que bien des gens en parlent et que cela a un poids énorme. Vous avez dit que ce sont nos enfants qui auront à supporter le fardeau de notre dette. C'est une phrase bien simple, mais on peut facilement en déduire que nos enfants n'en ont pas profité, qu'ils devront financer le coût de la dette, qu'il ne nous aura servi à rien d'accumuler une telle dette. Cela revient à dire que cette dette n'aura comporté que des inconvénients.

Cette année, j'ai versé ma contribution de membre pour la trentième année à l'Institut Canadien des Comptables Agréés et jamais je n'ai rencontré une entreprise—une entreprise prospère en plein essor—qui n'avait pas de dette à long terme. Toutes les entreprises ont une dette à long terme pour de bonnes raisons, comme vous le savez tous. C'est ce qu'on appelle le levier d'exploitation. C'est comme si l'exploitant d'une entreprise qui a un dollar en avait dix. C'est une question de possibilités.

• 0940

Cette phrase est négative et, pourtant, la réalité est la suivante: supposons que nous prenions notre dette nationale de 573 milliards de dollars et que nous calculions l'intérêt composé pour savoir quelles ont été les sommes relatives en chiffres absolus chacune des années où nous avons enregistré un déficit et demandons-nous ce que nous aurions changé pour ne pas avoir à accumuler cette dette et quelles auraient été les conséquences si nous avions agi ainsi. D'après moi, il y a des chances que les conséquences d'une croissance économique moins marquée, d'un chômage plus élevé, de coûts plus élevés pour les soins de santé, attribuables à un revenu moyen moins élevé pour les Canadiens, à des problèmes sociaux, à des problèmes de justice pénale, au décrochage des jeunes—les conséquences sociales que nous aurions eu à subir si nous n'avions pas maintenu une qualité de vie raisonnable et stable au cours de cette période, si nous n'avions pas pris les mesures nécessaires pour protéger le système de valeurs canadien et le mode de vie canadien—auraient probablement été une dette aussi élevée sinon plus élevée pour la simple raison que les dépenses absolument nécessaires qu'il aurait fallu engager pour la justice pénale, les programmes sociaux, la santé, l'éducation et tous les autres problèmes qui se seraient posés auraient fait que nous nous serions retrouvés avec une dette plus élevée que celle que nous avons aujourd'hui.

Pourquoi les gens posent-ils donc toujours la même question: «Nos enfants doivent supporter le fardeau de la dette. Les intérêts sont de 40 milliards de dollars par année. N'est-ce pas révoltant?» Les conséquences auraient peut-être été pires si nous n'avions pas engagé une telle dette, alors pourquoi dire cela? Pourquoi ne pas défendre le caractère raisonnable de la dette?

Bien sûr, il faut se demander si cette dette est à notre portée. Avons-nous été raisonnables et réalistes? Pouvons-nous rembourser cette dette? Le ratio entre la dette et le PIB est-il raisonnable? Ce sont là les questions qu'il faut se poser. Sommes-nous irresponsables en assumant une telle dette? La question n'a rien à voir avec le budget de cette année, ni avec les frais d'intérêt. Ne faut-il pas l'envisager dans le contexte des actifs dont le Canada a su se doter jusqu'à maintenant?

M. Dale Orr: Je suis en désaccord avec vous sur à peu près tous ces points, monsieur Szabo, et j'espère que la plupart des gens le sont aussi. Je suis d'accord pour dire que le fardeau de la dette devrait se mesurer en fonction du ratio de la dette et du PIB. Il s'agit de la dette par comparaison à notre capacité de l'assumer. Mais cette dette est beaucoup trop élevée peu importe la façon dont on la calcule. Bien des gens sont venus vous dire qu'elle est assurément trop élevée aujourd'hui. Elle devrait être inférieure à 40 p. 100. Un chiffre de 30 p. 100 est-il à peu près exact? Nous n'en savons rien.

J'aurais une ou deux choses à répondre. Cette dette a été accumulée entre 1984 et 1994, en dix ans. En 1984, nous n'avions pas de problème de dette. Notre dette ne s'élevait alors qu'à 200 milliards de dollars et représentait environ 40 p. 100 du PIB. Elle a donc été accumulée au cours de cette décennie et je dirais que c'est une mauvaise dette.

Les choses auraient été bien différentes si nous avions accumulé cette dette en investissant pour nos enfants. Nous n'avons pas accumulé cette dette en faisant des investissements massifs pour nous doter du meilleur système d'éducation au monde, ni dans la R-D pour avoir beaucoup plus d'inventions et d'innovations qu'avant. Nous n'avons pas accumulé cette dette en investissant dans l'infrastructure afin que nos routes et tout le reste soient bien meilleurs qu'aux États-Unis.

Nous avons accumulé cette dette en offrant entre autres des prestations d'assurance-emploi qui étaient beaucoup trop généreuses et qui ont été mal utilisées—malheureusement nous n'avons redressé la situation qu'en 1994 et 1995—et d'autres programmes que nous ne pouvions pas nous permettre.

Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il n'est pas nécessairement mauvais d'avoir des dettes. Tout dépend. Si cette dette avait pris la forme d'investissements profitables à nos enfants, tout aurait été différent, mais cela n'a pas été le cas.

Les frais de la dette s'élèvent maintenant à 40 milliards de dollars. Certaines personnes ont fait bien des petites choses très intéressantes. C'est beaucoup d'argent, 40 milliards de dollars. La famille canadienne typique dépense plus pour financer la dette que pour toutes sortes d'autres choses auxquelles elle tient énormément.

J'ai écrit en septembre un petit article dans lequel je fais valoir que ce n'est pas parce que nous avons un meilleur système de soins de santé que les Américains que nous payons au Canada plus d'impôt sur le revenu des particuliers qu'aux États-Unis. Ce n'est pas la raison. Les dépenses publiques du gouvernement du Canada et des gouvernements provinciaux à l'égard des soins de santé au Canada représentent environ 6 p. 100 de notre PIB. Aux États-Unis, les dépenses publiques relatives aux soins de santé représentent environ 6 p. 100 du PIB et 6 p. 100 du PIB américain permet probablement d'acheter des soins de santé meilleurs que 6 p. 100 de notre PIB. Ce n'est donc pas la raison pour laquelle nos impôts sont élevés.

• 0945

Les impôts ne sont pas plus élevées au Canada qu'aux États-Unis parce que nous avons un meilleur système d'éducation. Je l'ai déjà dit. Les résidents de certains États—Californie, Washington, Illinois, Wisconsin, Caroline du Nord, Indiana, pour n'en nommer que quelques-uns—ont accès à d'excellentes universités de première classe. Les étudiants y reçoivent une éducation de première classe moyennant des frais de scolarité qui sont raisonnables d'après les normes canadiennes.

Nous payons beaucoup plus d'impôt que les Américains à cause de notre fardeau fiscal. C'est là que va l'argent. Nous payons beaucoup plus pour la dette et c'est là que se situe la grosse différence.

M. Paul Szabo: Je pense que nous sommes tous d'accord pour ne pas être d'accord. Il faudra examiner la question de savoir s'il s'agit d'une bonne ou d'une mauvaise dette.

Le premier ministre a dit à un moment donné que le fait de vivre et de travailler dans le meilleur pays au monde a un prix, et cela mérite réflexion.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Szabo, pour vos commentaires et vos questions.

Madame Redman.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

Si vous me permettez de commenter les propos de M. Szabo, je vous dirais qu'il est parfois utile de se demander s'il est possible d'établir les coûts de l'absence d'investissements dans quelque chose, ou des efforts pour éviter ces coûts. Les remarques de M. Szabo portaient en partie sur le fait que nous n'investissons pas dans des prisons plus grosses que nous aurions pu le faire si nous avions choisi de ne pas dépenser cet argent ou de le dépenser différemment.

Ma question s'adresse à vous, monsieur Dunford. Il y a deux universités dans ma ville, et elles sont directement touchées par la question de l'endettement étudiant. L'été dernier, j'ai entendu une foule de réactions quand les journaux ont publié une manchette selon laquelle nous songions à renégocier le rôle que les banques pourraient jouer dans le domaine des prêts aux étudiants. Vous avez dit dans votre présentation que les banques privées ne devraient pas se mêler de programmes sociaux, ou quelque chose du genre.

Si les banques se retirent du programme de prêts aux étudiants, les coûts risquent d'augmenter. En fait, c'est la raison pour laquelle le gouvernement—dans sa grande sagesse—avait choisi cette orientation au départ. Donc, ce que j'aimerais savoir, c'est si l'efficacité ne devrait pas être considérée comme un but légitime dans l'exécution des programmes sociaux.

M. Ryan Dunford: Votre question est très intéressante. Évidemment, comme étudiants, nous aimerions qu'il y ait autant d'argent que possible dans le programme de prêts aux étudiants, parce que cela permet à plus d'étudiants d'avoir plus de ressources pour aller à l'université. Mais, à mon avis, nous ne devons pas sacrifier la qualité du programme, et l'accessibilité à ce programme, aux impératifs d'efficacité. Il est certain que les banques peuvent probablement administrer le programme plus efficacement que le gouvernement, mais à quel prix? Bien franchement, les étudiants sont très mécontents de la participation des banques au programme de prêts aux étudiants ces cinq dernières années, et je ne pense pas que cela en ait valu la peine.

Comme vous l'avez dit, le gouvernement—dans sa grande sagesse—a confié l'administration du programme aux banques en 1995. Et maintenant, nous sommes de retour là où nous devons être, à notre avis. C'est un programme social, dont la responsabilité devrait incomber au gouvernement, pas à l'entreprise privée. Nous pensons que c'est plus important que les questions d'efficacité.

Mme Karen Redman: Pouvez-vous nous donner plus de détails sur les aspects de la participation des banques qui ont particulièrement mécontenté les étudiants?

M. Ryan Dunford: La qualité du service posait assez souvent un problème. Les taux d'intérêt aussi, ce qui n'est pas nécessairement la faute des banques, mais quoi qu'il en soit, ce sont les banques qui percevaient ces intérêts. La communication avec les étudiants au sujet des questions de remboursement était assez souvent problématique également. Dans bien des cas, les étudiants n'entendaient pas parler de la banque à la fin de leurs études, mais six mois plus tard, ils devaient consolider leur dette et commencer à rembourser leur prêt. Certains d'entre eux n'avaient eu absolument aucun contact avec la banque et se rendaient compte que leur prêt était considéré sans raison comme non remboursé. Il y a eu beaucoup de cas de ce genre.

Il est certain que les étudiants sont responsables du remboursement de leurs prêts, et nous ne voulons pas laisser entendre qu'ils devraient être relevés de cette responsabilité. Mais nous sommes convaincus que le programme pourrait être mieux administré et qu'il serait tout à fait possible d'avoir quelque chose qui servirait mieux les étudiants.

Mme Karen Redman: Merci.

• 0950

Le président: Merci, madame Redman.

Monsieur Pillitteri.

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur Orr, je suis content que vous ayez éclairci la question des bonnes dettes et des mauvaises dettes, et que vous ayez précisé que la dette accumulée entre 1984 et 1994 s'élevait à plus de 300 millions de dollars. Ce n'est donc pas la faute des députés de ce côté-ci de la table.

M. Paul Szabo: C'est la dette de Brian Mulroney.

M. Gary Pillitteri: Oui, c'est la dette de Brian Mulroney, qui était une mauvaise dette.

Le président: Mais nous devons quand même la rembourser, non?

Des voix: Ah, ah!

M. Gary Pillitteri: Oui.

Votre dernière observation portait sur le fait que nous devions rembourser une dette de 40 milliards de dollars. On me demande souvent dans quelle mesure les taux d'intérêt ont eu une influence à cet égard. Nous sommes chanceux que ce soit seulement 40 milliards, parce que les taux d'intérêt se situent autour de 7 p. 100, et même jusqu'à 8 p. 100 pour les emprunts à long terme. Mais je ne comprends absolument pas ce qui se passe aujourd'hui. Tous les économistes affirmaient que nous devions réduire notre endettement, et vous avez dit par ailleurs qu'un rapport dette-PIB de 72 à 75 p. 100 devrait être acceptable à long terme. Nous avions un ratio d'endettement de 72 à 75 p. 100, et nous l'avons abaissé aux alentours de 61 à 63 p. 100, mais il y a une chose que je ne comprends pas: la valeur du dollar canadien.

Même quand nous avions un rapport dette-PIB de 72 à 75 p. 100, le dollar canadien valait 69 ou 70c. Bien sûr, je comprends qu'il y a des tendances. À l'automne, ou plutôt juste avant Noël... Notre économie est en quelque sorte une succursale de l'économie américaine. Je comprends que les Américains prennent leurs bénéfices juste avant Noël, juste avant la fin de l'année financière.

Mais pourriez-vous m'expliquer pourquoi le dollar canadien était encore hier à 66,9c.? Qu'est-ce qui se passe? Qui contrôle cet élément? Nous avons mis de l'ordre dans nos affaires, et notre dollar devrait sûrement dépasser les 70c. à l'heure qu'il est. Pourtant, il continue de baisser, même si notre économie a atteint un de ses plus hauts sommets. Ou alors, est-ce que tout cela—le ratio d'endettement et tout le reste—n'a tout simplement aucun effet?

M. Dale Orr: Bon, laissez-moi essayer de vous expliquer la raison des fluctuations du dollar canadien. Ce n'est pas facile. Il est parfois très compliqué d'expliquer pourquoi notre dollar fluctue de jour en jour, ou même de semaine en semaine, mais c'est un peu plus facile sur de plus longues périodes.

Il y a au moins une demi-douzaine de facteurs importants qui déterminent la valeur de notre dollar.

Une des choses essentielles à comprendre, c'est que la valeur de notre dollar, qu'elle monte ou qu'elle baisse, est toujours relative. Quand on dit que le dollar vaut 67., c'est par rapport à la devise américaine. Mais il pourrait aussi être évalué par rapport à la livre, à l'euro ou à n'importe quelle autre monnaie. Donc, c'est une valeur relative. C'est une question de concurrence.

Le fait que le rapport dette-PIB soit élevé au Canada a un effet négatif sur notre dollar, tout le reste étant égal par ailleurs. Il y a par exemple le rapport dette-PIB dans les autres pays. Autrement dit, si notre rapport dette-PIB était de 70 p. 100 et que celui des Américains et des Britanniques était de 80 p. 100, les marchés financiers internationaux ne feraient pas de dumping avec notre dollar. Nous ne ferions pas si mauvaise figure. Si nous baissions à 40 ou 50 p. 100, mais que les Américains et les Britanniques avaient un taux nettement plus bas, nous serions encore légèrement vulnérables. Donc, en effet, le rapport dette-PIB est un des éléments dont les marchés financiers internationaux tiennent compte, mais c'est par comparaison avec les autres pays.

• 0955

L'écart entre les taux d'intérêt au Canada et aux États-Unis est un autre facteur très important pour déterminer la vigueur de notre dollar. Nous avons maintenu un écart négatif par rapport aux États-Unis à peu près tout le temps depuis 1996, ce qui fait que notre dollar est plus bas qu'il le serait autrement. Je sais que le gouverneur est venu vous rencontrer et que ces questions ne sont pas nouvelles pour vous. Je les replace seulement dans le contexte de ce que vous avez dit au sujet de la dette. La dette est importante, mais il ne faut pas oublier ces autres éléments.

Les produits de base jouent également un rôle. Le Canada en est un exportateur net. Alors, quand les prix des produits de base montent, les marchés financiers internationaux sont plus optimistes quant à l'avenir de l'économie canadienne et ils font grimper la valeur du dollar canadien.

Donc, oui, le rapport dette-PIB est important, mais c'est surtout relativement aux autres pays. Et c'est seulement un des facteurs, avec l'écart entre nos taux d'intérêt et ceux des États-Unis, en particulier, qui déterminent la valeur de notre dollar, en plus des prévisions globales sur la croissance de l'économie canadienne.

M. Gary Pillitteri: Monsieur Orr, je comprends tout cela, mais vous n'avez pas tout à fait répondu à ma question. Quand nous avions un rapport dette-PIB de 71 à 75 p. 100, notre dollar était à 70c. Aujourd'hui, notre rapport dette-PIB a baissé, mais notre dollar aussi.

Est-ce que c'est parce que nous tenons compte seulement d'un aspect, à savoir la situation aux États-Unis, et que nous mettons les autres facteurs de côté? Le rapport dette-PIB de tous les autres pays que vous avez mentionnés—l'Europe, l'Angleterre—n'a pas baissé autant que celui du Canada. En Italie, en France, en Angleterre et en Allemagne, il n'a pas diminué aussi vite qu'au Canada. Pourtant, leur devise baisse aussi. Je ne vois qu'une seule devise au monde, celle des États-Unis, qui tient le coup et qui maintient à toutes fins utiles le reste du monde en esclavage.

Donc, en réalité, une des choses que nous avons réalisées n'est pas aussi relative que nous avons l'air de le croire, pour faire remonter la valeur de notre monnaie. La spéculation monétaire et les hypothèses sur ce que nous allons faire sont beaucoup plus importantes par rapport à un seul pays—les États-Unis—que tout ce que nous pouvons faire chez nous.

M. Dale Orr: J'aimerais faire quelques observations.

D'abord, vous avez raison de dire que, quand notre rapport dette-PIB était de 70 p. 100, notre dollar était plus fort qu'aujourd'hui. Mais à ce moment-là, il y avait un écart positif entre nos taux d'intérêt et ceux des États-Unis, comme cela a généralement été le cas au cours de notre histoire. Or, cet écart est maintenant négatif.

Vous avez également raison de dire que nous avons amélioré notre rapport dette-PIB, même comparativement à certains autres pays. Mais il y a deux autres facteurs très importants qui influent sur notre dollar et qui sont moins avantageux qu'il y a sept ou huit ans: l'écart dans les taux d'intérêt et les prix des produits de base. C'est ce qui explique la situation. Notre rapport dette-PIB est effectivement meilleur qu'avant, mais il y a d'autres facteurs qui entrent en ligne de compte, et ils ont empiré.

Par ailleurs, il est vrai que nous avons abaissé sensiblement notre rapport dette-PIB, plus que certains autres pays, mais voyez où il se trouve encore aujourd'hui. Il est toujours plus élevé que partout ailleurs, sauf en Italie. Même si nous avons ramené ce ratio de 71 p. 100 à environ 60 p. 100, l'Italie est le seul autre pays industrialisé au monde où il est pire qu'ici.

L'autre élément, c'est que depuis un an, le dollar canadien est en fait la devise la plus forte de tout le monde industrialisé, à l'exception du yen. Nous avons gagné 5 p. 100 par rapport au dollar américain depuis un an, et environ 20 p. 100 par rapport à l'euro. Donc, en dépit du fait que les prix des produits de base ont joué contre nous en 1997, en 1998 et au début de 1999, et malgré l'écart négatif en ce qui concerne les taux d'intérêt, le dollar canadien s'est plutôt bien comporté depuis un an, en partie parce que nous avons amélioré notre rapport dette-PIB.

• 1000

M. Gary Pillitteri: Monsieur le président, je voulais simplement faire valoir mon point de vue en tant qu'homme d'affaires et savoir dans quelle mesure je vais devoir m'endetter encore plus jusqu'à la fin de mes jours. Je ne suis pas tout à fait d'accord avec M. Szabo quand il dit que parfois, quand on est en affaires, c'est une bonne chose de rester endetté toute sa vie.

Le président: Vous ne pensez pas que le dollar est à la baisse parce que le comité compte cinq membres d'origine italienne, ou quelque chose du genre, n'est-ce pas?

M. Dale Orr: Grands dieux, non!

Des voix: Ah, ah!

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Excellente réponse!

Le président: Eh bien, vive l'Italie! Quand on se compare, on se console.

Monsieur Cullen, suivi de M. Forseth.

[Français]

Monsieur Marceau, c'est tout? Merci.

[Traduction]

M. Roy Cullen: Merci, monsieur le président.

Merci, monsieur Orr, monsieur Staple et monsieur Dunford.

J'ai quelques questions et quelques commentaires pour M. Orr au sujet de sa présentation, mais j'aimerais que M. Dunford et M. Staple participent eux aussi à la discussion.

Monsieur Dunford, quand notre gouvernement a prolongé le congé parental jusqu'à un an, il a aussi abaissé le nombre des heures requises, comme vous l'avez souligné, de 700 à 600. Vous proposez de rendre cette mesure rétroactive à 1997 pour les enseignants qui n'y ont pas eu droit. Je comprends que ce soit intéressant pour vous, mais je me demande...

Le gouvernement modifie constamment ses politiques. Il a apporté de nombreux changements à l'assurance-emploi. Si nous suivions votre recommandation, est-ce que nous ne devrions pas également appliquer rétroactivement tous les changements que nous apporterions aux règles de l'assurance-emploi et inclure tous ceux qui n'étaient pas inclus jusque-là parce que les règles ne s'appliquaient pas? Je crains que ce soit un précédent très dangereux. Qu'est-ce que vous en dites?

M. John Staple: Oui, je comprends, et je reconnais qu'il peut être difficile d'appliquer rétroactivement une mesure législative de cette nature. Mais de notre point de vue... et nous voulons parler de l'ensemble des travailleurs. Il ne s'agit pas seulement des enseignants, même si notre organisation en regroupe 250 000, dont 60 à 65 p. 100 sont des femmes, et si ce nombre augmente rapidement. Donc, vous comprendrez facilement pourquoi c'est un sujet de préoccupation pour notre organisation.

Les circonstances ne sont pas les mêmes que pour la plupart des autres modifications qui ont été apportées à la loi, surtout parce que cela a entraîné un changement fondamental dans le régime d'assurance-emploi, qui n'est plus fondé sur les semaines d'emploi, mais sur les heures d'emploi. Il était clair dès le départ que le nouveau système fondé sur le nombre d'heures présentait certaines lacunes et ne répondait pas parfaitement au régime de travail de certains Canadiens, en particulier de ceux qui occupent un emploi à temps partiel. Comme d'autres organisations, nous avons travaillé de concert avec DRHC et le ministère des Finances dès les premières étapes de la mise en oeuvre du nouveau programme d'assurance-emploi pour faire modifier la loi de manière à tenir compte de ces régimes de travail quelque peu marginaux.

La question des travailleurs à temps partiel n'a jamais été réglée de façon satisfaisante—je pense que tout le monde le reconnaît—surtout en ce qui concerne la possibilité, pour ces travailleurs, d'obtenir les avantages spéciaux liés aux congés parentaux, aux congés d'adoption, aux congés de paternité et aux congés de maladie en vertu des nouvelles règles. Donc, c'est différent de ce point de vue-là, en ce sens qu'il s'agit d'une nouvelle série de règles qui n'ont jamais vraiment tenu compte, de façon raisonnable, de la situation bien particulière des travailleurs à temps partiel.

Par ailleurs, notre proposition ne s'applique pas à l'ensemble de la législation, mais seulement à cette série de règles. Je comprends le problème, mais d'un autre côté, je me dis que c'est peut-être difficile d'appliquer ces règles rétroactivement, mais que c'est encore plus difficile pour nos membres et pour ceux des autres groupes qui représentent les travailleurs, quand deux femmes qui ont travaillé 605 heures, par exemple, ont un bébé l'une le 30 décembre, et l'autre le lendemain ou le surlendemain. La deuxième a droit à ces avantages, mais pas la première. La situation est encore plus compliquée et plus injuste pour nous que pour vous.

Donc, je reconnais que c'est difficile, mais il s'agit de circonstances particulières, et cela s'appliquerait seulement aux nouvelles règles découlant de la loi. À notre avis, il serait approprié de remonter au 1er janvier 1997, ou à tout le moins de prendre en considération les appels interjetés par des travailleurs qui n'ont pas eu droit à ces avantages même s'ils avaient travaillé 600 heures.

• 1005

M. Roy Cullen: Merci.

Monsieur Staple, dans votre déclaration préliminaire, vous avez limité vos commentaires aux aspects du programme de prêts aux étudiants qui se rattachent au projet de loi C-32.

M. John Staple: Je pense que vous faites erreur. Je suis M. Staple; M. Dunford, c'est lui.

M. Roy Cullen: Oh, excusez-moi! Monsieur Dunford, oui.

Avec la permission de la présidence, je me demande si nous pourrions élargir la discussion un peu et déborder le cadre du projet de loi C-32. Je sais que notre président est généralement très magnanime.

Le président: Entre autres choses.

M. Roy Cullen: Oui, entre autres choses.

Monsieur Dunford, vous avez mentionné certains problèmes au sujet du programme. Je voudrais vous exposer mon point de vue à moi sur un de ces problèmes. Nous n'aurons pas le temps de nous pencher sur tous les aspects de la question, mais j'aimerais que nous parlions du pourcentage des prêts non remboursés, surtout dans le cas des institutions privées. C'est pour cela que le programme nous est revenu.

Vous pouvez bien avoir votre liste d'épicerie et nous faire toutes sortes de commentaires savants, mais j'aimerais savoir ce que vous pensez du pourcentage des prêts non remboursés et de ce que nous pouvons faire pour régler ce problème au niveau national.

M. Ryan Dunford: En fait, d'après les données publiées par DRHC quand tout cela s'est produit, ce pourcentage est à la baisse. Les perceptions du public à cet égard sont dans une large mesure injustifiées. Je jauge habituellement l'opinion publique à ce que mon beau-père pense de certains aspects des prêts aux étudiants; alors, je lui ai demandé: «À ton avis, quel est le pourcentage des étudiants qui ne remboursent pas leur prêt?» Il pensait que c'était de l'ordre de 25 à 30 p. 100, mais c'est beaucoup plus bas.

Une voix: C'est 27 p. 100.

M. Ryan Dunford: Le pourcentage des prêts non remboursés n'est pas de 27 p. 100.

Une voix: Vous parlez de tous les prêts aux étudiants, ou seulement du niveau postsecondaire?

M. Ryan Dunford: Des prêts aux étudiants.

Mme Katalin Deczky (directrice, Programme canadien de prêts aux étudiants, Développement des ressources humaines Canada): Pourrais-je apporter une précision?

Le président: Veuillez vous asseoir et vous identifier pour le compte rendu.

Mme Katalin Deczky: Merci de me permettre de clarifier cette question.

Les pourcentages de non-remboursement sont calculés de telle façon que quiconque a manqué trois paiements consécutifs est considéré comme étant en défaut de paiement. Ce calcul ne tient pas compte du fait que nous pouvons parfois récupérer par la suite la totalité ou une partie du montant en souffrance. Donc, de ce point de vue-là, il est vrai que le pourcentage se situe autour de 27 p. 100 et qu'il est légèrement à la baisse; nous espérons bien sûr que cette tendance à la baisse va se maintenir.

Mais il est également vrai qu'après les procédures de recouvrement, qui entraînent évidemment des dépenses beaucoup plus élevées qu'un remboursement normal, nous récupérons une bonne partie de ces 27 p. 100 de prêts en souffrance.

Le président: C'est-à-dire?

Mme Katalin Deczky: Nous en sommes à environ 90 p. 100; ce sont des prêts qui finissent par être remboursés sur une très longue période, parfois de 15 à 20 ans.

Le président: Vous voulez parler de 90 p. 100 de 27 p. 100?

Mme Katalin Deczky: Oui.

Le président: Ce qui fait donc 3 p. 100. C'est très peu.

Mme Katalin Deczky: Mais ces procédures de recouvrement coûtent très cher. Cela inclut les compensations fiscales et les autres mesures qui ne font pas partie des activités normales de recouvrement.

Le président: Donc, quand on regarde la situation d'ensemble, M. Dunford a raison de dire que le pourcentage a baissé.

Mme Katalin Deczky: Oui, en effet. La tendance est à la baisse, et nous espérons que toutes les mesures, en particulier... Nous attribuons cette baisse à l'introduction des exemptions d'intérêt sur de longues périodes, dans le budget de 1998. Nous commençons tout juste à en voir les effets. Cette mesure accorde un congé d'intérêts aux emprunteurs qui se lancent sur le marché du travail et qui ne trouvent pas immédiatement un emploi, ou qui ont un revenu plus faible que prévu. Nous assumons les intérêts, et cela leur permet de ne pas être considérés en défaut de paiement, même s'ils n'ont pas besoin de payer. En général, quand leur situation économique s'améliore, ils sont en mesure de reprendre leurs paiements plus tard.

M. Roy Cullen: Merci.

Le président: Vous pouvez rester si vous voulez.

M. Roy Cullen: Je voudrais donner à M. Dunford la possibilité de nous parler très succinctement de certains des sujets de mécontentement des étudiants. Et, si nous avons le temps, j'aimerais ensuite passer à M. Orr.

M. Ryan Dunford: Des sujets de mécontentement à quel propos exactement?

M. Roy Cullen: Vous avez dit au début de votre exposé que la conception et la mise en oeuvre du programme posaient certains problèmes, et je voulais simplement vous donner la chance de nous donner un aperçu général de ces problèmes.

• 1010

M. Ryan Dunford: D'accord. Eh bien, je dirais que les taux d'intérêt posent toujours un problème pour les étudiants. Les exemptions d'intérêts les ont certainement aidés à rembourser leurs prêts. Mais nous avons constaté que beaucoup d'étudiants détestaient s'endetter. Quand ils voient par exemple des taux correspondant au taux de base plus 2,5 p. 100, ou au taux de base plus 5 p. 100, ils laissent tomber. C'est certainement prohibitif, à notre avis, pour beaucoup d'étudiants qui veulent faire des études postsecondaires.

Nos autres sujets de mécontentement se rattachent aux communications. Les communications avec DRHC sont excellentes, mais les rapports entre les étudiants et les banques au sujet du remboursement des prêts sont parfois déficients, et le processus est souvent très confus et très complexe.

Comme l'a mentionné Katalin, quand un étudiant ne paie pas pendant trois mois, la banque considère qu'il est en défaut. Les chiffres à cet égard pourraient être considérablement réduits si les banques indiquaient clairement aux étudiants quelles sont leurs obligations au sujet de leurs prêts, par exemple. Je pense que nous constaterions une baisse substantielle du pourcentage des prêts non remboursés, ce qui fait que le programme serait évidemment beaucoup moins coûteux à administrer pour le gouvernement puisqu'il n'aurait pas à payer d'agences de recouvrement pour récupérer cet argent.

M. Roy Cullen: Merci.

Est-ce qu'il me reste du temps pour poser une question très courte à M. Orr?

Le président: Oui, certainement.

M. Roy Cullen: Merci.

Monsieur Orr, j'aimerais que nous parlions un peu de ce que vous pensez de la façon de dépenser du gouvernement. Il est probable que nous ne serons pas d'accord sur certains points, mais ce n'est pas grave. D'après les chiffres que j'ai ici, les deux tiers environ des dépenses que notre gouvernement a engagées depuis que son budget est équilibré sont allées aux secteurs prioritaires de la santé, de l'éducation postsecondaire, des sciences, de la technologie et de l'innovation. J'ajouterais quelques autres programmes: le TCSPS, la Fondation canadienne pour l'innovation, l'aide aux agriculteurs et aux sans-abri, la GRC et l'infrastructure. Il me semble qu'ils sont eux aussi relativement prioritaires.

De plus, quand on regarde les dépenses directes que le gouvernement fédéral consacre à ses programmes, on constate qu'elles ont baissé de 4 milliards de dollars, en valeur nominale seulement, depuis 1993-1994. Et, quand on tient compte de la démographie et de l'inflation, cette diminution est d'environ 20 milliards, du moins en valeur nominale, depuis que nous avons rétabli le TCSPS.

Nous pourrons peut-être y revenir, mais quand le ministre des Finances a préparé ce document, cette mise à jour sur la situation économique et financière, il a demandé l'aide de huit des plus grands économistes du Canada. Faisiez-vous partie de ce groupe, monsieur Orr?

M. Dale Orr: Oui.

M. Roy Cullen: C'est bien ce que je pensais. Dans ce document—j'ai assisté à la dernière réunion, comme vous le savez—les surplus bruts sur cinq ans étaient établis à 95,5 milliards de dollars, et les surplus nets à 67 milliards, compte tenu de la réserve pour éventualités, de la marge de prudence, et tout le reste. Je sais qu'il y a eu beaucoup de discussions quant à savoir s'il y avait eu un consensus ou une entente, mais de façon générale, huit des économistes les plus réputés au Canada—dont vous-même—ont accepté ces chiffres.

Le ministre des Finances a dit que les allégements fiscaux de 58 milliards de dollars étaient un minimum et que, si l'économie continuait d'aller aussi bien, nous pourrions probablement faire plus. Mais j'ai un peu de mal à rationaliser le genre de chiffres auxquels vous songez. Si j'ai bien compris, vous avez dit que ces allégements de 58 milliards pourraient monter à plus de 90 milliards. Je me demande comment vous conciliez cela avec l'autre notion, à savoir que huit des plus grands économistes du Canada, dont vous, ont parlé d'un... Et ces économistes, comme vous le savez, étaient d'accord pour dire qu'il fallait maintenir une marge de prudence et une réserve pour éventualités. Donc, comment pouvez-vous proposer de faire passer les allégements fiscaux de 58 à 90 milliards alors que nous ne prévoyons qu'un surplus de 67 milliards de dollars?

M. Dale Orr: J'ai l'impression que vous me posez deux questions en une.

Vous dites premièrement que nous n'avons pas trop dépensé et que les dépenses que nous avons faites visaient toutes des objectifs fort louables. La première chose que je dois vous dire, c'est que je suis bien content de ne pas être à votre place et de ne pas avoir à prendre toutes sortes de décisions difficiles, parce qu'il est certain que les gens sont très reconnaissants de chaque dollar dépensé par le gouvernement fédéral. Mais il faut faire des choix difficiles. Tout ce que je veux vous dire, c'est que quand on regarde notre situation fiscale, quand on se compare aux Américains et qu'on constate les effets des impôts trop élevés, on se dit qu'il faut absolument faire mieux que ce que prévoit le dernier budget. C'est une priorité. Nous ne pouvons pas nous asseoir sur nos lauriers.

Pour ce qui est de la dette, nous avons encore le rapport dette-PIB le plus élevé, sauf pour ce qui est de l'Italie. Si les taux d'intérêt remontent, nous allons avoir de graves problèmes. Et même s'ils ne remontent pas, nous allons quand même léguer ce fardeau à nos enfants. Et nous allons quand même dépenser 40 milliards de dollars par année, une somme que la grande majorité des Canadiens aimeraient certainement mieux voir consacrée à autre chose.

• 1015

Je ne suis pas vraiment ici pour vous dire que vos dépenses ne sont pas appréciées ou pas importantes. Je suis ici pour insister sur l'importance de la réduction de la dette, et aussi des impôts.

En ce qui concerne le programme d'innovation dont vous avez parlé, il y a des gens qui disent que ce n'est qu'une vache à lait pour Pratt & Whitney. C'est peut-être un peu exagéré, mais ce n'est pas un des hauts faits d'armes du gouvernement. Et que dire du scandale qu'on a surnommé le «Shovelgate», au sujet des dépenses de DRHC? Il est très difficile, à mon avis, d'affirmer que chaque dollar dépensé par le gouvernement fédéral depuis cinq ans l'a été de façon parfaitement efficace et efficiente.

Le président: Mais c'est le lot de bien des organisations.

M. Dale Orr: Oui, bien sûr. Vous avez raison, mais quand on a des actions dans une entreprise et qu'on n'aime pas la façon dont elle dépense son argent, on vend ses actions et on en achète d'autres ailleurs. Nous n'avons pas ce choix-là quand il est question du gouvernement. De la même façon, quand on n'aime pas la façon dont on est traité en tant que consommateur, on va voir la concurrence. Mais, dans le cas du gouvernement, nous n'avons pas le choix. C'est donc légèrement différent.

Votre deuxième observation sur la mise à jour de la situation économique est très importante, et la réponse est très simple. Cet exercice était fondé sur des prévisions économiques établies en septembre, et qui reflétaient les vues des économistes. Mais les prévisions relatives à l'économie canadienne se sont améliorées sensiblement depuis. Dans ce document, dans lequel je demande si M. Martin cache encore de l'argent, je me pose justement cette question-là et j'explique très clairement les effets des prévisions économiques plus optimistes que nous avons vues en mars—puisque ce document a été préparé en mars—par rapport à celles de septembre dernier.

C'est ce qui explique comment nous sommes passés d'un surplus de 95 milliards de dollars, en fonction des prévisions économiques du mois de septembre, à environ 115 milliards aujourd'hui. C'est cumulatif sur une période de cinq ans. Voilà ce que c'est.

M. Roy Cullen: C'est quand même tout un changement, et je sais que les Canadiens qui suivent ce débat... L'Alliance a établi ses plans budgétaires en fonction de surplus de cet ordre-là, et les Canadiens qui voient ces chiffres se demandent probablement comment ils peuvent changer autant en si peu de temps.

Puis-je faire quelques commentaires, très brièvement? Premièrement, vous savez sûrement qu'avec la façon dont la dette a été restructurée—échéances plus longues, plus grande partie de la dette à taux fixes—les dépenses sont beaucoup moins sensibles qu'avant aux fluctuations des taux d'intérêt. Vous avez certainement analysé la question sous cet angle-là. Je voulais simplement le souligner.

Pensez-vous que nous ayons un problème d'épargne au Canada? Est-ce que les Canadiens économisent suffisamment?

M. Dale Orr: Avant de vous répondre, je voudrais faire un commentaire sur ce changement de 95 à 115 milliards de dollars, accumulés sur cinq ans.

Il ne faut pas oublier que nous avons un PIB d'environ 900 milliards par année et que le surplus est le dernier maillon de la chaîne. C'est ce qui reste à la toute fin. Donc, quand on tient compte du fait que c'est sur une période de cinq ans et que c'est le résidu d'une économie qui génère un PIB de 900 milliards à 1 billion de dollars par année, cela replace les chiffres en perspective.

Quant à la question de l'épargne, c'est une observation très judicieuse. Comme vous le savez, le taux d'épargne était d'environ 10 p. 100 au Canada pendant les années 80 et au début des années 90. Il se situe maintenant autour de 1 p. 100, et on prévoit qu'il oscillera entre 1 et 2 p. 100 pendant quelques années encore. Est-ce que c'est un problème? C'est une excellente question.

Je ne sais pas exactement jusqu'à quel point c'est un problème, sauf que ce n'est pas aussi inquiétant que les chiffres le laissent croire, et ce pour diverses raisons. Ça l'est suffisamment toutefois pour qu'il soit souhaitable, à mon avis, de faire passer le montant des cotisations aux REER de 13 500 $ à 15 000 $ ou 16 000 $, par exemple—pas à l'infini, pour répondre à M. Szabo, mais il serait approprié de hausser ce montant de quelques milliers de dollars.

• 1020

Une des raisons pour lesquelles ce n'est pas vraiment un problème sérieux, c'est le traitement des gains en capital et la richesse que cela représente. Mais, pour le moment, je me contenterai de dire que c'est une question très importante. Quand on regarde les données, on se dit qu'il faut vraiment être certain de bien comprendre ce qui se passe. J'ai fait assez d'analyses pour dire que ce n'est pas aussi inquiétant que vous pourriez le croire, mais c'est quand même un problème.

C'est le reflet exact du tableau que vous avez déjà vu, que je vous ai déjà apporté, au sujet du revenu personnel disponible par famille. Il a baissé entre 1989 et 1997, et il commence tout juste à remonter. Avec un peu de chance, nous allons nous retrouver l'an prochain au même point qu'en 1989 sur le plan du revenu personnel disponible, ce qui ne laisse pas beaucoup d'argent à économiser. Donc, c'est une partie de la réponse.

Les réductions de l'impôt sur le revenu des particuliers, les gains importants dans l'emploi et la baisse du taux de chômage vont aider à rétablir la situation.

Le président: Comme vous le savez probablement, notre comité a toujours eu—du moins ces trois dernières années—un net préjugé en faveur de la croissance. Nous avons fait de la productivité une de nos priorités.

Je conviens que nous devons aller plus vite pour ce qui est de l'imposition des entreprises. Je pense la même chose au sujet de l'impôt sur le revenu des particuliers et je suis d'avis que nous devons cibler les contribuables à revenu moyen ou élevé. C'est un des éléments du débat, et j'espère que le ministre des Finances se penchera sur ces questions primordiales dans son prochain budget.

Cela dit, dans le rapport Porter—le dernier, dans lequel il passe en revue les dix années écoulées depuis son premier rapport—l'auteur parle longuement du rôle des entreprises et affirme qu'en fait, les entreprises canadiennes pourraient en faire beaucoup plus pour créer de la richesse dans le pays. Je sais bien que nous sommes ici au Comité des finances du gouvernement du Canada et que nous avons beaucoup parlé aujourd'hui du rôle du gouvernement, mais quand on regarde les investissements—ou l'absence d'investissements—des entreprises dans le but d'augmenter la productivité, d'améliorer l'équipement, et ainsi de suite, il est très clair que ce n'est pas extraordinaire.

Au gouvernement, nous avons certains leviers, qu'il s'agisse de la fiscalité, de l'investissement dans les ressources humaines ou de la R-D, mais en définitive, c'est dans les entreprises que la productivité doit augmenter. C'est un défi que les milieux d'affaires canadiens vont devoir relever. On ne peut pas agrandir l'assiette économique simplement avec les leviers dont le gouvernement dispose. Nous devons aussi faire en sorte que nos entreprises se classent parmi les meilleures au monde sur le plan de la productivité, parce que c'est ce qui compte en définitive. Nous aurons beau discuter jusqu'à ce que mort s'ensuive, nous ne pourrons pas élargir l'assiette économique si nous n'augmentons pas notre productivité. C'est aussi simple que ça.

Qu'est-ce que vous en dites?

M. Dale Orr: Eh bien, je suppose que je devrais commencer par une affirmation que vous avez déjà entendue bien des fois: la productivité est la seule voie vers une croissance économique soutenue. Il est tout à fait approprié que votre comité examine ce qu'il est possible de faire pour favoriser la croissance économique parce que c'est ce qui procure les plus gros dividendes sur le plan budgétaire. Vous pourrez alors essayer de contenter tout le monde, ce qui vous facilitera la vie. Donc, en effet, la productivité est primordiale.

J'aimerais ajouter deux ou trois petites choses. Premièrement, vous dites que les entreprises ne se débrouillent pas très bien au Canada et qu'elles vont devoir faire mieux pour que nous puissions vraiment atteindre nos objectifs en matière de productivité. Je suis entièrement d'accord avec vous sur ce point, même s'il semble que le problème, dans une certaine mesure, vient du fait que nous sommes en retard sur les Américains. Il y a eu énormément d'investissements dans la machinerie et l'équipement au cours de la dernière année, et il est possible qu'en termes de compétitivité, en raison de l'économie de l'information et de tout le reste, nous soyons en bien meilleure posture vis-à-vis des Américains dans deux ou trois ans que nous le sommes aujourd'hui. C'est possible.

• 1025

J'ajouterais que les entreprises ont pris beaucoup d'initiatives intéressantes ces dernières années. J'ai mentionné les investissements privés et l'amélioration du climat dans ce domaine. Le ministre des Finances et le gouverneur de la Banque du Canada ont dit—et je suis d'accord avec eux—que les perspectives économiques sont aujourd'hui meilleures que jamais. C'est vrai.

Mais quand il s'agit de tenir tête aux Américains... Ils sont dans une situation exceptionnelle. Même si nous avons fait beaucoup de choses comme il le fallait, que nous réussissons mieux et que—croyez-le ou non—les prévisions sont plutôt bonnes en ce qui nous concerne, il est probable que nous ne pourrons pas égaler les Américains en termes de productivité avant quelques années. Même si nous avons eu une bonne année en 1999, nous avons perdu du terrain par rapport aux Américains. Ce sera la même chose encore cette année, et fort probablement pendant quelques années encore.

C'est difficile à comprendre pour les Canadiens. Nous avons fait tellement de bonnes choses, et les gens ont fait tellement de sacrifices; nous sommes en meilleure posture qu'avant, et pourtant nous perdons encore du terrain par rapport aux Américains. C'est parce qu'ils établissent des records en ce qui concerne le PIB, les investissements et tout le reste. Il sont très difficiles à rattraper. Donc, il ne faut pas trop nous réjouir puisque nous avons encore un écart à combler par rapport aux Américains.

Il faut souligner aussi que, même si les entreprises doivent faire leur large part et si tout dépend de leur gestion, par exemple, nous devons aussi, sur le plan des politiques, essayer d'adapter et d'adopter les meilleures pratiques dans nos usines et dans nos bureaux. Nous devons améliorer nettement la situation à cet égard-là. Nous pouvons effectivement améliorer certaines politiques gouvernementales, mais il faut aussi—et surtout—que les entreprises canadiennes améliorent leurs méthodes de gestion.

Comme vous le savez, le traitement fiscal que nous accordons à la R-D est le plus généreux qui soit. Mais nous aurons beau doubler ou tripler la quantité de R-D qui se fait au Canada, il n'en résultera toujours qu'une toute petite fraction de toutes les nouvelles inventions et de toutes les meilleures pratiques qui voient le jour dans le monde entier et qui sont à la disposition des entreprises canadiennes.

La véritable clé de la productivité, c'est que les gestionnaires canadiens adoptent toutes ces nouvelles idées, ces inventions et ces innovations qui sont créées ailleurs dans le monde et qu'ils les implantent dans leurs usines ou leurs bureaux le plus vite possible, parce que le plupart des inventions et des idées nouvelles voient le jour à l'extérieur du Canada. C'est sur ce processus d'adoption et d'adaptation que nous devons vraiment insister. C'est très important pour améliorer notre productivité.

Le président: Mais, certains points que vous avez soulevés révèlent simplement un plus grand esprit d'initiative. C'est là une chose sur laquelle on ne peut pas légiférer. On ne peut tout simplement pas imaginer d'adopter un projet de loi visant à donner au Canada un plus grand esprit d'initiative. Cela relève...

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Mais bien sûr que si! Je peux vous donner une longue liste de tout ce qu'on peut faire pour encourager l'esprit d'initiative.

Le président: Nous pouvons prendre toutes sortes de mesures, mais on a l'esprit d'initiative ou on ne l'a pas. C'est aussi simple que cela. On peut se pencher sur la question de l'imposition, mais si les gestionnaires n'adoptent pas des pratiques exemplaires, il n'y a pas grand-chose qu'un gouvernement puisse faire. Nous pouvons libéraliser les marchés. Nous pouvons alléger la réglementation. Nous pouvons faire toutes sortes de choses pour donner une plus grande efficience au marché, mais au bout du compte, on ne peut pas changer les gens.

En dehors de l'imposition et de tout le reste, le dynamisme de l'économie américaine repose en grande partie sur l'attitude. Les Américains sont plus dynamiques que nous. C'est la réalité. Reste à savoir si nous voulons avoir plus l'esprit d'entreprise et devenir plus Américains... Incidemment, je ne sens très à l'aise dans ma peau de Nord-Américain. Cependant, je ne suis pas certain que nous ayons les mêmes traits de caractère que les Américains.

Ce que je veux dire, c'est que nous ferons de notre mieux en tant que gouvernement et je pense que nous nous dirigeons vers la bonne direction, mais en dernière analyse, il faut que les gens adoptent une attitude plus motivée.

M. Dale Orr: Je partage votre point de vue, monsieur le président, et je pense que le gouvernement peut encourager l'esprit d'entreprise en libéralisant les marchés et en réduisant les impôts, comme vous l'avez dit. Nous avançons dans la bonne direction, mais si nous n'avons pas autant l'esprit d'initiative que les Américains, c'est sans aucun doute parce que nous avons toujours eu une économie beaucoup plus réglementée et des impôts plus élevés que nos voisins du Sud.

• 1030

Nous progressons dans la bonne direction, mais notre économie est encore plus réglementée et taxée et le restera dans un avenir prévisible. C'est un facteur. Vous avez tout à fait raison de dire que c'est une question compliquée qui repose sur les individus et les gestionnaires, mais le contexte réglementaire et la lourde imposition qui sont propres au Canada depuis si longtemps sont également des facteurs.

Le président: C'est vrai en partie, je vous l'accorde. Cependant, je ne pense pas que le problème soit là. Il y a une limite à ce qu'on peut reprocher à la réglementation et je crois que les entreprises peuvent faire beaucoup plus pour améliorer leur rentabilité et leur productivité.

L'argument est valable jusqu'à un certain point. Comme vous le savez, je suis en faveur des réductions d'impôt, de la libéralisation des marchés et de ce genre de choses, mais je remarque aussi que les entreprises doivent vraiment se reprendre en main.

Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth: Merci beaucoup.

Pour poursuivre dans cette direction, je suis tout à fait d'accord avec ce qui a été dit, mais dans le cas de la productivité, vous pourriez peut-être nous présenter un des leviers proposés par le gouvernement et dont vous avez parlé: les taux de déduction pour amortissement à l'achat de nouvelle technologie et notre situation à cet effet sur le plan international.

Nous traînons derrière les États-Unis, en particulier dans ce domaine-là, si bien que nos taux devraient être meilleurs qu'aux États-Unis. Pourtant, j'ai bien peur qu'ils soient plus élevés que là-bas. Pouvez-vous nous donner quelques commentaires à ce sujet avant que je pose une autre question à M. Dunford?

Mes commentaires s'adressent à M. Orr et se rapportent à la discussion que nous avons eue sur la productivité. Nous avons vu que nous traînons toujours de l'arrière par rapport aux États-Unis. Je pose ces deux questions afin d'obtenir une comparaison du taux de déduction pour amortissement canadien par rapport à celui qui se pratique aux États-Unis.

M. Dale Orr: Quelle est exactement votre question?

M. Paul Forseth: Où en sommes-nous par rapport aux États-Unis?

M. Dale Orr: Sur la question de la déduction pour amortissement?

M. Paul Forseth: Oui. Un des leviers dont dispose le gouvernement pour encourager l'esprit d'initiative consiste à modifier ces taux afin d'aider les grosses sociétés dans leurs décisions d'acheter de la nouvelle technologie. Comment le Canada se compare-t-il aux États-Unis qui semblent se lancer à fond dans les nouvelles technologies?

M. Dale Orr: La comparaison nous est défavorable et Jack Mintz en parle très bien dans son rapport. Voilà le constat qu'on peut faire et c'est certainement très important, mais je ne peux pas en dire plus.

M. Paul Forseth: Très bien.

Monsieur Dunford, vous avez dit qu'un des problèmes que rencontrent les banques au chapitre des prêts aux étudiants est tout simplement la difficulté à bien communiquer avec leurs clients, à leur expliquer leurs obligations et à conserver une relation continue, car les étudiants constituent souvent une clientèle de passage. Je me demande dans quelle mesure une bureaucratie fédérale pourra faire mieux qu'un établissement du secteur privé pour rester en contact et communiquer avec un groupe d'étudiants qui représente un segment mobile de la population.

M. Ryan Dunford: Le gouvernement a très bien fait les choses en décidant de ne pas créer une infrastructure chargée d'administrer les prêts et de collecter les remboursements. C'est un centre de traitement à façon qui en sera chargé. L'administration des prêts ne devrait pas poser de problème si le centre de traitement est sensible à la communication et au fait que les étudiants appartiennent à un groupe plutôt migrant et mobile. Je pense qu'il y a de bonnes chances de voir la situation s'améliorer.

M. Paul Forseth: Très bien. On dit que certaines difficultés découlent du fait que les étudiants utilisent parfois leurs emprunts à d'autres choses que pour payer leurs frais d'études, par exemple pour acheter un ordinateur, une voiture ou pour louer un appartement plus cher dont le loyer dépasse ce qui paraît normalement raisonnable. Il faut donc peut-être adopter un règlement qui imposerait aux étudiants d'utiliser d'abord leurs emprunts pour payer leurs études. Qu'en pensez-vous?

Lorsqu'on analyse certaines faillites d'étudiants qui ont des dettes de 25 000 $ ou de 30 000 $, et que l'on cherche à savoir comment ils ont utilisé leur argent, on découvre en effet qu'ils l'ont utilisé pour acheter un ordinateur ou une voiture ou pour financer leurs dépenses personnelles, mais qu'il n'a absolument pas servi à payer les frais d'université.

• 1035

Que pensez-vous de la proposition visant à modifier la réglementation afin d'exiger que les prêts servent d'abord à payer les frais d'université? Avez-vous entendu parler de cette proposition?

M. Ryan Dunford: Oui. Si j'ai bien compris, l'université obtient immédiatement sa part pour les frais de cours et d'inscription, puis les étudiants obtiennent une allocation mensuelle pour leurs dépenses personnelles et autres coûts. Je ne connais pas de cas où un étudiant aurait acheté une voiture plutôt que d'utiliser son emprunt pour payer ses frais d'université. Si c'était le cas, je crois qu'on lui demanderait de rembourser immédiatement.

M. Paul Forseth: Vous vous souvenez qu'autrefois le programme était tel qu'il était avantageux pour un étudiant d'emprunter le maximum, qu'il ait besoin de l'argent ou non, et tout simplement de l'investir ailleurs puis de rembourser l'emprunt. C'était une magnifique combine.

M. Ryan Dunford: Ce n'est plus possible maintenant. Avec les vérifications de crédit qui se font actuellement, c'est tout à fait impossible pour les étudiants d'abuser du système. Par ailleurs, la Loi sur la faillite et l'insolvabilité interdit à un étudiant de déclarer faillite pendant dix ans pour se libérer de son emprunt. Des mesures relativement strictes sont donc déjà en place pour éliminer bon nombre de ces problèmes. Je n'approuve pas nécessairement toutes ces mesures, mais elles existent.

M. Paul Forseth: Que pensez-vous de la proposition d'inclure le remboursement des prêts étudiants dans la déclaration d'impôt sur le revenu et de l'adapter directement à la capacité de payer des emprunteurs, afin d'éviter qu'ils ne disparaissent dans la nature?

M. Ryan Dunford: L'ACAE est tout à fait en faveur d'un régime de remboursement lié au revenu, dans la mesure où on n'en perd pas le contrôle. Si la capacité de payer d'un étudiant est très faible pendant dix ans et que la dette s'accumule à un rythme énorme, l'emprunteur ne pourra jamais rembourser. Par conséquent, il faut faire la part des choses entre la capacité de l'étudiant à rembourser et l'intervention du gouvernement pour éliminer une partie des dettes que les étudiants ne peuvent pas rembourser.

À l'ACAE, nous avons bien entendu étudié la possibilité de tout rassembler dans le régime fiscal et nous pensons que ce serait peut-être une bonne idée.

M. Paul Forseth: Très bien.

Je crois que c'est M. Pillitteri qui a lancé la discussion sur la valeur du dollar. Je souhaiterais entendre le point de vue de M. Orr à ce sujet. Essentiellement, la valeur du dollar correspond à l'évaluation de l'économie canadienne et de sa performance sur le marché international. C'est l'évaluation finale de notre performance, tant sur le plan fiscal que sur le plan monétaire, dans le contexte global du commerce et de l'économie.

La dette, la bombe de la dette, comme on l'appelle, est une sorte de missile dont nous devons examiner le mécanisme. La rampe de lancement de la dette a été mise en place au cours des années Trudeau dont le gouvernement a été incapable de prévoir, malgré tous les avertissements, les hausses prochaines des taux d'intérêt. Il est vrai que la dette a échappé à tout contrôle lorsque les conservateurs étaient au pouvoir, mais le terrain avait été préparé avant. Les conservateurs n'avaient tout simplement pas les moyens de faire face à la situation.

Évidemment, je ne fais pas tellement confiance aux conservateurs ni aux libéraux pour gérer l'économie.

Le président: Mais vous faites confiance à l'Alliance, n'est-ce pas?

M. Paul Forseth: Oui.

M. Paul Szabo: Puisque le Parti réformiste n'existait pas, vous étiez vous aussi un conservateur.

Des voix: Ah, ah!

M. Paul Forseth: Oui.

M. Richard Marceau: À l'époque, je ne votais pas.

Des voix: Ah, ah!

M. Paul Forseth: Il ne faut pas oublier le fameux budget fatal. Je pense que c'était M. Turner qui était ministre des Finances à l'époque de ce budget que les économistes considèrent comme le début de la catastrophe. À l'époque, aucune critique ne fut prise en compte.

J'aimerais entendre votre point de vue sur la solution que nous proposons à certains des problèmes que vous avez soulevés aujourd'hui. Nous devons examiner les chiffres et nous sommes en mesure d'affirmer qu'il est possible de ramener les trois taux d'imposition du revenu des particuliers à un taux unique de 17 p. 100, de porter l'exemption de base à 10 000 $ et de conserver toutes les autres déductions. D'après vous, cette option est-elle économiquement réalisable et à l'abri de toute critique affirmant qu'elle entraînerait un problème sur le plan des recettes fiscales?

• 1040

M. Dale Orr: Vous avez soulevé trois points différents; permettez-moi d'y répondre dans l'ordre.

Vous avez dit que la valeur du dollar canadien représente le jugement final que portent les autres marchés sur l'économie canadienne. Je suis plutôt d'accord avec vous, à une exception près, qui concerne le choix de la Banque du Canada de maintenir un écart entre le taux d'intérêt pratiqué au Canada par rapport à celui des États-Unis. C'est un des trois ou quatre facteurs importants qui décident de la valeur du dollar. Ce sont là des petits détails, mais par ailleurs, vous avez raison. Il est clair que le jugement est sévère puisque notre dollar valait 89c. en 1990, qu'il est tombé à 63c. en 1998 et qu'il vaut maintenant 67c.

M. Paul Forseth: Un simple commentaire pour vous dire que nous avons toujours mis en doute la véritable indépendance de la Banque du Canada. Lorsque je regarde le visage du ministre de Finances quand on lui pose certaines questions, je m'aperçois qu'il sourit quand on lui parle de certains rapports confidentiels. Mais, je vous laisse continuer.

M. Dale Orr: Voilà pour la première question.

Pour ce qui est de la dette, c'est vrai qu'elle se chiffrait à environ 200 milliards de dollars en 1984 et qu'elle a atteint près de 600 milliards de dollars vers le milieu des années 90. On peut dire qu'il y avait deux phénomènes vraiment importants. Les taux d'intérêt sont montés extrêmement haut, plus haut que prévu vers le milieu des années 80. Ils ont crevé le plafond. Ensuite, au début des années 90 -91, avec la récession, les recettes du gouvernement se sont avérées plus faibles que prévu. Et certaines de ces dépenses sensibles à la récession ont contribué à accroître encore plus le déficit.

On peut donc dire rétrospectivement que nous aurions été dans une bien meilleure situation aujourd'hui si le gouvernement avait pris, après 1984, des mesures de réduction des dépenses gouvernementales aussi sévères que celles qu'a finalement imposées Paul Martin en 1995. Il n'y a aucun doute là-dessus.

Pour ce qui est du taux fixe, il présente quatre avantages très importants. Il contribue certainement à réduire les taux marginaux élevés d'imposition et à maintenir ces taux à un niveau qui encourage la productivité et l'esprit d'entreprise et permet de bénéficier des retombées de la croissance économique. Cela se produit lorsqu'on réduit les taux marginaux d'imposition. Cela contribue également à réduire l'exode des cerveaux et un taux fixe est très efficace pour cela. Par définition, le taux fixe élimine la dérive fiscale. C'est déjà fait, mais c'est également un résultat de cette mesure.

Cette proposition est en fait plus généreuse pour les particuliers à faible revenu que le train de mesures récemment adoptées, parce qu'elle porte à 10 000 $ le revenu que vous pouvez gagner avant d'être imposé. Elle permet de mieux partager les retombées de la croissance économique avec les salariés à faible revenu.

Pouvons-nous nous le permettre? Certainement. Nous avons examiné la plupart des éléments de cette proposition. Les divers éléments que nous avons examinés et qui représentent la plupart des mesures atteignent environ 90 milliards de dollars. Je suis certain que l'on peut se permettre ce type de mesures, même si l'on dépense à un rythme de 3 p. 100 par an et même si l'on met de côté 4 milliards de dollars pour la réduction de la dette. Et si l'on réduit un peu les dépenses et qu'on utilise un peu plus de la base existante de priorités déclinantes et faibles pour financer les nouvelles priorités, plutôt que de les cumuler d'année en année, on peut même envisager des réductions d'impôt de plus de 80 milliards ou 90 milliards de dollars par an.

M. Paul Forseth: Je sais que l'incidence que peut avoir l'impôt sur le revenu des particuliers sur la famille est une des préoccupations de mes collègues de l'autre côté. Je sais que M. Szabo s'intéresse aux questions de la famille et qu'il a publié des documents sur le sujet.

J'aimerais avoir votre point de vue sur un élément de notre proposition qui consiste à éliminer la discrimination actuelle dont souffrent les familles à revenu unique par rapport aux familles à deux revenus. Actuellement, les familles comptant un seul soutien qui disposent d'un revenu annuel de 45 000 $, d'après les notes que j'ai sous les yeux, payent 136,5 p. 100 de plus en impôt fédéral qu'une famille de quatre personnes à deux revenus disposant du même montant d'argent. L'adoption d'un impôt à taux unique—différent de l'impôt à taux fixe, car ce dernier fait appel à beaucoup d'autres éléments—le taux unique de 17 p. 100 que nous proposons permettrait de régler ce problème et de rétablir l'équité. Beaucoup de nos critiques du NPD brandissent toujours la notion de l'équité fiscale.

• 1045

Est-ce vrai? Est-ce possible? Est-ce applicable?

M. Dale Orr: Oui. Oui. Oui.

M. Paul Forseth: Alors pourquoi ne pas l'adopter?

M. Dale Orr: Il y a divers moyens de rendre notre régime fiscal plus favorable aux familles. C'est là une façon de procéder. D'autres propositions ont été présentées, mais celle-ci permet une application réelle.

M. Paul Forseth: Je vais jusqu'à dire qu'une grande partie de la justification de notre situation économique et de nos taux et l'ensemble de la philosophie économique du gouvernement actuel repose sur la comparaison avec le G-7, ou avec la communauté internationale en général. Il me semble que c'est injuste, en raison de la nature de notre économie.

Notre économie est si liée à celle des États-Unis avec qui nous avons la plupart de nos échanges commerciaux, surtout depuis la signature de l'ALENA et des autres accords, que les autres explications ne sont pas vraiment importantes. Ce qui compte vraiment, c'est la comparaison avec les États-Unis. C'est notre point de repère, parce que notre économie est liée à la leur. Est-ce que vous avez un commentaire à formuler au sujet de ce raisonnement?

M. Dale Orr: Avec plaisir, parce que j'ai déjà affirmé que la comparaison internationale la plus importante de notre pays doit se faire avec les États-Unis. Cependant, je ne pense pas comme vous que les comparaisons avec la Grande-Bretagne, l'Allemagne, la France, etc. ne sont pas importantes. Cependant, 85 p. 100 de nos exportations sont destinées aux États-Unis et environ 80 p. 100 de nos importations proviennent des États-Unis. Par ailleurs, nos marchés financiers sont liés, de sorte que nos comparaisons les plus importantes sont de loin avec les Américains.

Les Canadiens se rendent compte immédiatement et protestent lorsque nos taux d'imposition ne sont pas comparables à ceux des États-Unis et lorsque le gouvernement du Canada n'offre pas des services comparables à ceux qu'obtiennent les Américains. C'est donc de loin la comparaison la plus importante. Je suis d'accord avec cette formulation. Les chiffres de 80 p. 100, les exportations et les importations, donnent une indication par rapport aux autres pays.

La comparaison avec les autres pays est utile. Quand il s'agit de trouver l'inspiration sur ce que nous devrions faire, nous trouvons beaucoup de bonnes idées aux États-Unis puisque nous avons les mêmes goûts et les mêmes aspirations que les Américains, mais il est également important de regarder ce que font les autres pays. La Finlande est un bon exemple. Ce pays a produit Nokia. C'est un petit pays, mais nous avons beaucoup à apprendre de la Scandinavie qui propose des choses vraiment intéressantes dans le domaine de la technologie de l'information et des communications sans fil.

Par conséquent, nous devons nous tourner vers l'extérieur pour chercher l'inspiration. Je pense que nous ne devrions pas nous limiter aux États-Unis et nous intéresser en particulier à d'autres petits pays comme les pays scandinaves actuellement.

Cependant, c'est la comparaison avec les Américains qui est de loin la plus importante lorsque nous voulons savoir où nous en sommes sur le plan fiscal et dans le domaine de la concurrence.

Le président: Merci monsieur Forseth.

Monsieur Orr, quand il s'agit du niveau de vie, question dont on parle souvent, ne pensez-vous pas qu'il faut mentionner la parité des pouvoirs d'achat, la PPA? On dit toujours que le dollar ne vaut que 68c., mais, pour ce qui est du pouvoir d'achat, nous sommes autour de 79 ou 80c., n'est-ce pas?

M. Dale Orr: Je pense que c'est même un peu plus et que le niveau correspond à quelque chose comme 86c.

Le président: Ce qui est beaucoup mieux que 68c. quand on tient compte du niveau de vie.

M. Dale Orr: Tout à fait. C'est une précision très importante. Quand on compare notre niveau de vie, notre PIB par rapport au PIB américain, il est également très important d'utiliser ce que l'on appelle la parité des pouvoirs d'achat. Notre dollar vaut à peu près 86c. si l'on tient compte de la parité des pouvoirs d'achat et c'est ce chiffre qu'on devrait utiliser dans les comparaisons du niveau de vie, plutôt que le taux de change.

• 1050

En effet, le taux de change reflète uniquement les produits librement échangés entre le Canada et les États-Unis. Il ne tient pas compte de tous les avantages que les Canadiens obtiennent de leurs gouvernements, ni des services personnels. Par exemple, une visite chez le coiffeur ou chez le dentiste coûte beaucoup moins cher au Canada qu'aux États-Unis.

Le président: C'est un facteur important du débat.

M. Dale Orr: En effet. Cela nous donne un niveau de vie, un PIB par habitant tel que mesuré par la PPA, de 75 p. 100 ou 77 p. 100 par rapport aux Américains. Nous avons un niveau de vie de 20 p. 100 à 25 p. 100 inférieur à celui des Américains, selon les mesures de la PPA.

Le président: Bien.

Madame Redman.

Mme Karen Redman: Merci monsieur le président. J'ai simplement deux questions pour M. Orr.

Lorsque vous avez répondu à la question de M. Forseth, vous avez dit qu'il y avait quatre arguments en faveur d'un taux d'imposition unique. Vous avez oublié de préciser ce qu'un tel scénario réservait à la classe moyenne.

M. Dale Orr: Elle aurait moins d'impôt à payer.

Une voix: Tout le monde aurait moins d'impôt à payer.

Mme Karen Redman: Tout le monde paierait moins d'impôt, mais cela exigerait un investissement de 90 milliards de dollars, ou une diminution des recettes fiscales.

M. Dale Orr: Le coût de cette proposition pour le gouvernement—la partie que nous avons examinée, qui couvre toutes les recettes provenant de l'impôt sur le revenu des particuliers—s'élève à 90 milliards de dollars accumulés sur cinq ans, par comparaison au chiffre de 58 milliards de dollars avancé par le gouvernement. Il s'agit de 90 milliards de dollars. Aussi, il n'est pas surprenant qu'en vertu de cette proposition, pratiquement tout le monde paierait moins d'impôt.

La classe moyenne, si l'on prend les chiffres de 1999, ou même ceux de la nouvelle proposition, continue d'être la plus imposée. Les contribuables de la classe moyenne continuent à payer 25 p. 100 ou 26 p. 100. Et certains d'entre eux, ceux dont un revenu est de 60 000 $, sont imposés à 29 p. 100. En vertu de cette proposition, ils ne paieraient que 17 p. 100. Ils ne paieraient rien sur la première tranche de 10 000 $ et seulement 17 p. 100 sur le reste.

Mme Karen Redman: Le passage de la proposition actuelle de 58 milliards de dollars à celle de 90 milliards de dollars entraînerait, elle aussi, une augmentation des avantages, n'est-ce pas? Ce serait tout simplement un plus grand investissement en faveur de la réduction des impôts.

M. Dale Orr: Pour la réduction des impôts, exactement.

Mme Karen Redman: Par conséquent, il y a en fait deux éléments. Ce n'est pas seulement un impôt unique; c'est également une diminution plus grande des recettes provenant de l'impôt.

M. Dale Orr: Oui. Quand on réduit les impôts de 90 milliards de dollars plutôt que de 58 milliards de dollars, on élimine 32 milliards de dollars qui auraient été consacrés sinon aux dépenses de programmes ou à la réduction de la dette. En gros, c'est juste, à la différence près que le gouvernement récupère une partie de cet argent consacré à la réduction d'impôt.

Je ne sais pas si je vous en ai parlé, mais il est très important de comprendre que les 58 milliards de dollars que le gouvernement cite dans sa proposition représentent les économies que réaliseront les contribuables. La facture n'est pas de 58 milliards de dollars pour le gouvernement. En fait, nous avons calculé qu'elle s'élèverait à environ 45 milliards de dollars. Cela s'explique par le fait que si les contribuables bénéficient d'une réduction d'impôt, ils dépensent l'argent qu'ils ont en plus et cet argent vient augmenter le revenu d'autres personnes qui dépensent une plus grande partie de leur revenu personnel. La TPS s'applique à tous ces échanges, ainsi que les cotisations d'assurance-chômage et, bien entendu, si les gens dépensent plus en frais d'essence, le gouvernement fédéral en récolte les fruits grâce à la TPS; s'ils dépensent leur argent supplémentaire en s'achetant des cigarettes, le gouvernement fédéral en sort également gagnant; et s'ils s'achètent une bouteille de vin, le gouvernement fédéral en prélève également les taxes.

Le président: Vous pensez donc que les réductions d'impôt vont inciter les gens à rouler plus?

Des voix: Ah, ah!

M. Dale Orr: Peut-être. Mais il est clair que si l'on décide de réduire les impôts de 90 milliards de dollars plutôt que de 58 milliards, il faudra bien trouver l'argent quelque part. En revanche, la réduction de l'impôt aura des retombées économiques.

Mme Karen Redman: Vous avez parlé aussi du rapport Mintz. J'ai beaucoup apprécié les recommandations de ce rapport, mais une des critiques qui lui ont été adressées portait sur le fait qu'il devait être sans incidence sur les recettes. Je me demande ce que vous en pensez.

M. Dale Orr: C'est le mandat qu'avait reçu le comité, pour la raison qu'il fallait, je crois, qu'il se penche entièrement sur la réforme plutôt que sur les questions économiques cycliques. Cependant, le moment le plus favorable pour appliquer une réforme du régime fiscal, c'est une situation économique favorable, car on peut alors offrir des avantages à un groupe sans nuire à un autre. C'est pourquoi j'espère et je suis convaincu que les recommandations du rapport Mintz seront appliquées, pas de façon neutre, mais en conférant une partie des économies d'impôt aux entreprises.

• 1055

Le président: Nous devons malheureusement libérer la salle.

Je tiens à vous remercier, monsieur Orr, monsieur Dunford et monsieur Staple, pour votre participation. Il est toujours utile pour les membres du comité de clarifier certains points importants concernant le fonctionnement du comité. Au nom des membres de notre comité, merci encore.

La séance est levée.