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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 30 novembre 1999

• 1808

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je vais ouvrir la séance et souhaiter la bienvenue à tout le monde ce soir.

Comme vous le savez, le comité des finances se déplace à travers le pays afin d'entendre les points de vue des Canadiens d'une côte à l'autre. Je dois dire que, cette année, les interventions ont été jusqu'à présent de très grande qualité. Évidemment, chaque fois que les arguments développés en faveur d'un point de vue particulier sont très convaincants, nous sommes obligés de procéder à des arbitrages aux fins des recommandations que nous allons formuler au ministre des Finances, et je suis sûr qu'il en ira de même ce soir.

Je signale aux membres que nous aurons le plaisir d'entendre des représentants de plusieurs groupes: le Regroupement des organisations nationales bénévoles, l'Institut Nord-Sud, Action Canada pour la population et le développement, le Conseil canadien pour la coopération internationale et la Fondation pour les échanges éducatifs entre le Canada et les États-Unis d'Amérique.

Comme vous le savez, vous disposez d'environ cinq à six minutes pour votre déclaration liminaire. Nous aurons ensuite une période de questions. Nous allons commencer avec M. Al Hatton, directeur général du Regroupement des organisations nationales bénévoles.

Bienvenue.

M. Al Hatton (directeur général, Regroupement des organisations nationales bénévoles): Merci. J'aimerais commencer par traiter très rapidement des cinq questions que vous avez posées dans votre première note, pour aborder ensuite quelques autres thèmes.

• 1810

En ce qui concerne le premier sujet, soit le processus d'élaboration du budget et l'idée émise, je crois, par votre comité d'établir des objectifs à long terme pour la dette, le secteur bénévole préférerait que la priorité soit donnée aux dépenses sociales plutôt qu'à la réduction de la dette, encore qu'il faille certainement éponger cette dernière. Donc, si pour vous le premier impératif est de réduire la dette, nous disons non, il faut privilégier le réinvestissement dans la collectivité.

La deuxième question que vous posez concerne les allégements d'impôt ou la réforme fiscale. En tant que membre de la Table ronde sur le secteur bénévole, nous demandons depuis cinq ans des stimulants fiscaux pour les donateurs à revenu modeste et moyen. Nous apprécions ce que le ministère des Finances et le gouvernement libéral ont fait pour les grosses contributions, mais les petites ne bénéficient pas nécessairement des mêmes avantages.

Pour ce qui est des allégements d'impôt et de la réforme fiscale, nous résistons à la pression actuellement exercée en faveur de réductions d'impôt, pression qui vient principalement du secteur privé, si cela doit être aux dépens des dépenses de santé et sociales.

En ce qui concerne l'infrastructure sociale, soit le troisième thème que vous esquivez, je suis ravi que vous l'abordiez, car cela fait quatre ou cinq ans que je comparais ici et il n'était toujours question que de ramener tout à zéro, et de se montrer humble et patient. Il est agréable de voir que l'infrastructure sociale représente maintenant l'un de vos grands sujets de préoccupations, et nous le faisons nôtre également.

Nous admettons que dans les deux derniers budgets—celui d'il y a deux ans, axé sur l'éducation, et le dernier, centré sur la santé—vous avez pris des mesures en faveur de l'infrastructure sociale. Mais celles-ci se limitent à peu près à l'infrastructure traditionnelle, aux hôpitaux et universités. Nous pensons qu'il reste toujours une grande lacune au niveau du soutien local, provincial et national aux organisations de bien-être social et de services sociaux. Nous pensons que la priorité doit être donnée à ces dernières.

Cela est l'un des problèmes que pose le processus de l'union sociale. En effet, quantité de groupements communautaires et d'organisations nationales et locales en ont été exclues. Nous apprécions donc que les deux paliers de gouvernement aient maintenant un cadre général. Mais le défi aujourd'hui est d'y englober la collectivité et d'avancer.

La quatrième question que vous posez concerne la nouvelle économie. À ce sujet, je signale que le secteur bénévole représente un énorme moteur de création d'emplois et d'activité qui donne du travail à 1,3 million de Canadiens. On ne le sait pas assez et nous préconisons pour cette raison une meilleure diffusion de tout ce que fait le secteur bénévole, non seulement sa contribution sociale et sa contribution à la formulation des politiques et à la concertation, mais aussi sa contribution économique.

Vous avez abordé enfin le sujet de la productivité. À notre point de vue, il est bien beau de parler d'exode des cerveaux et il y a certes lieu de déterminer s'il existe bien, mais songez à ceci: dans le secteur bénévole, il y a sept bénévoles pour chaque employé rémunéré. Si vous investissez dans la capacité des organisations bénévoles, vous engendrez une production cette fois supérieure. On semble toujours négliger cela lorsqu'on parle de productivité.

J'ai donc passé en revue rapidement les thèmes que vous avez esquissés.

Combien de temps me reste-t-il?

Le président: Suffisamment. Je vous arrêterai lorsqu'il sera écoulé.

M. Al Hatton: Je pense que nous nous situons dans un contexte très nouveau. Lorsque nous comparaissions au cours des trois ou quatre dernières années, on nous disait en gros, à nous le secteur bénévole: « Soyez patient, nous devons descendre à zéro. Vous êtes des gens merveilleux, mais nous n'avons pas d'argent à vous donner. » Eh bien, nous revoici. Nous ne perdons pas patience, mais le fait est qu'il est réellement temps de commencer à réinvestir dans la capacité du secteur bénévole. Nous avons suivi de très près le processus de l'union sociale. Nous voulons en faire partie, mais jusqu'à présent il n'y a pas vraiment de place pour nous et nous allons continuer à insister.

Mais parallèlement, nous essayons de nous organiser nous-mêmes. J'ai remis au greffier des exemplaires d'un rapport conjoint, rédigé par le secteur bénévole de concert avec le gouvernement fédéral et 19 de ses ministères. Nous espérons beaucoup que, suite à ce travail, qui portait sur trois grands enjeux—la relation entre le secteur bénévole et le gouvernement fédéral, l'édification de capacité et le cadre réglementaire—qui sera soumis très prochainement au cabinet et, espérons-nous, sera avalisé, des ressources seront dégagées.

Nous proposons quatre grands domaines d'investissement.

Premièrement, tout comme le secteur privé demandait au cours des quatre ou cinq dernières années la création d'un cadre propice aux affaires, nous pensons qu'il faudrait offrir des ressources au secteur bénévole et aux organisations et groupements communautaires afin qu'ils puissent réellement faire leur travail et renforcer ainsi le tissu social de la société canadienne.

• 1815

Le deuxième grand thème est celui de l'investissement dans l'enfance, et nous souscrivons totalement aux efforts du gouvernement en ce sens. Vous avez déjà reçu ici l'Alliance nationale pour les enfants et plusieurs autres groupes. Nous-mêmes, un regroupement national de 130 organisations caritatives, appuyons ces initiatives. Vous les connaissez. Je ne vais pas les énumérer, mais elles correspondent tout à fait à ce qui nous paraît être un investissement essentiel dans le développement à long terme du Canada.

Troisièmement, si le dernier budget a bien dégagé des ressources pour la recherche et l'information sanitaire, il reste toujours beaucoup à faire au niveau de la base pour investir dans des organisations offrant des soins à domicile et d'autres qui travaillent pour que cette grande infrastructure de la santé soit plus proche des gens.

Le dernier domaine que j'aimerais évoquer consiste, encore une fois, à encourager la philanthropie chez les Canadiens, ce qui implique davantage d'incitations fiscales.

Voilà à peu près tout ce que j'avais à dire. Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Hatton.

Nous allons maintenant entendre l'Institut Nord-Sud, représenté par son président, M. Roy Culpeper, et M. John Serieux, chargé de recherche.

Soyez les bienvenus.

M. Roy Culpeper (président, Institut Nord-Sud): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je vous remercie d'avoir invité l'Institut Nord-Sud à comparaître devant le comité dans le cadre de ses consultations prébudgétaires.

Je suis accompagné aujourd'hui de mon collègue, M. John Serieux, qui est notre expert en matière de dette du tiers-monde. J'ai l'intention de lui demander de répondre à toutes les questions difficiles sur la dette, si vous en posez.

Nous allons concentrer notre propos sur les cinq grands thèmes, soit la nouvelle économie. Il faudrait même l'appeler la nouvelle économie mondiale, qui entraîne quantité de répercussions sur le développement international et sur les 40 p. 100 de l'humanité qui vivent dans les pays les plus pauvres du monde.

Les pays en développement et les économies de marché émergentes éprouvent énormément de mal à suivre le rythme de la nouvelle économie mondiale. Tout indique que les pays les plus pauvres, particulièrement ceux de l'Afrique subsaharienne, voient l'écart se creuser toujours davantage. Il semble bien également que dans tous les pays, riches ou pauvres, la mondialisation profite à certaines catégories beaucoup plus qu'à d'autres. Autrement dit, le fossé entre les pays riches et les pays pauvres se creuse, mais l'écart grandit également entre les riches et les pauvres à l'intérieur des pays.

Notre réaction face à ces tendances n'est pas d'enrayer le cours de la mondialisation—même si cela était possible. Il s'agit plutôt d'adapter le marché, les institutions et les règles mondiales afin qu'ils bénéficient davantage aux pays et population pauvres, ou à tout le moins qu'ils cessent de favoriser les riches.

En fin de compte, ce sont les gouvernements des pays en développement qui sont responsables de leur destin, mais les pays plus favorisés comme le Canada peuvent faire beaucoup pour améliorer leurs chances. Nous proposons deux types d'initiatives: premièrement, relancer nos programmes d'aide extérieure grâce à de nouvelles ressources et de nouveaux engagements; et deuxièmement, continuer à jouer un rôle de leadership sur le plan de la dette et des finances internationales et des problèmes de régulation économique. Voyons successivement ces éléments.

En ce qui concerne l'aide extérieure, les recherches récentes démontrent qu'une aide correctement ciblée et mise en oeuvre peut effectivement aider à arracher les pays bénéficiaires de la pauvreté. Mais comme les membres du comité le savent, le budget d'aide canadien a été massivement amputé au cours des dix dernières années. En gros, nous sommes passés d'un programme d'aide dépassant 3 milliards de dollars au début des années 1990 à 2 milliards aujourd'hui, soit une réduction de plus d'un tiers.

Cette baisse a été largement plus ample que les coupures effectuées dans toutes les autres dépenses de programmes. En valeur absolue, le Canada alloue aujourd'hui une aide étrangère équivalente à celle de la Suède, un pays dont la population est le tiers de la nôtre, et environ les deux-tiers de l'aide des Pays-Bas, qui n'a que la moitié de notre population. Relativement à notre capacité de payer, mesurée en pourcentage du PIB, nous sommes considérablement moins généreux que ces deux pays, et moins généreux aussi que la Norvège, le Danemark et la France. Le ratio de notre APD au PIB est tombé de 0,48 p. 100 à la fin des années 1980 à un creux prévisionnel de 0,26 p. 100 cette année, soit largement en dessous de l'objectif de 0,7 p. 100 professé par le gouvernement.

Maintenant que nous avons gagné la bataille du déficit, il est temps de reconstruire notre programme d'aide. Nous saluons l'annonce récente dans le discours du Trône et dans les allocutions plus récentes prononcées par le premier ministre lors de son voyage en Afrique que le gouvernement envisage effectivement une majoration sensible du budget de l'aide. Nous espérons que les augmentations seront à la fois notables—c'est-à-dire, au moins 8 à 10 p. 100 par an—et soutenues sur plusieurs années.

• 1820

Nous saluons également la nomination d'un nouveau ministre de la Coopération internationale et d'un nouveau président de l'ACDI. Ces deux nominations augurent bien d'un redémarrage du programme d'aide, dont nous espérons qu'il replacera le Canada parmi les premiers pays donateurs du monde.

Je signale en passant, monsieur le président, que le Fonds monétaire international, dans son évaluation récente de la politique économique canadienne, a encouragé le gouvernement à accroître ses dépenses d'aide et à se rapprocher de l'objectif, fixé de longue date, de 0,7 p. 100 du PIB.

Même bien ciblée et mise en oeuvre, une aide étrangère accrue ne suffira pas par elle-même à placer les pays en développement et leurs peuples sur un terrain de jeu plus égal avec les pays avancés. Il importe tout autant, voire encore plus, de démonter certains des plus gros obstacles au développement et à la participation équitable des pays en développement à l'économie mondiale. C'est là mon second thème.

L'un de ces obstacles est l'endettement des pays les plus pauvres. Au sommet du G-8 de cette année, à Cologne, et plus récemment, lors des réunions annuelles du FMI à Washington, d'importants progrès ont été réalisés. Le Canada a été à l'avant-garde de ces pourparlers. Pourtant, un certain nombre de problèmes restent encore en suspens, notamment les modalités du partage du fardeau financier entre les pays créanciers riches. D'autres mesures devront être prises pour que les pays en développement puissent bénéficier de l'allégement de la dette. Nous pensons que des allégements de plus grande ampleur encore sont nécessaires, dans des délais plus rapides et pour un nombre de pays plus grand.

Cela nous ramène à la majoration du budget d'aide et j'aimerais insister à cet égard sur un aspect. Bien que les allégements de dette soient comptabilisés comme une contribution à l'aide étrangère, nous estimons inacceptable qu'une portion importante du budget d'aide majoré prenne cette forme, soit la radiation de dettes.

Enfin, nous sommes convaincus qu'il faut admettre les pays en développement comme participants égaux et à part entière dans les conseils de prises de décision économique du monde. On a beaucoup parlé l'an dernier de l'impératif d'une « nouvelle architecture financière ». Pendant trop longtemps, estimons-nous, les ministres des finances et les gouverneurs des banques centrales du G-7 ont dominé la discussion. Si l'on veut que la réforme du système financier jouisse de la moindre légitimité, il est essentiel d'y englober davantage les pays les plus pauvres du monde.

C'est pourquoi nous avons salué la création récente de ce que l'on appelle le G-20, qui rassemble les pays industriels du G-7, la Russie et certains pays en développement. Nous avons été particulièrement encouragés de voir que M. Martin, notre ministre des Finances, a été nommé président de ce groupe, puisqu'il a fait preuve d'un grand esprit d'initiative lors de la crise financière de ces dernières années. Nous attendons beaucoup de sa présidence de ce nouveau forum, le G-20. L'Institut Nord-Sud est prêt à jouer un rôle de soutien.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup.

Nous allons maintenant entendre Action Canada pour la population et le développement, représenté par sa directrice générale, Katherine McDonald, et Ann Burnett, coordinatrice des affaires parlementaires.

Soyez les bienvenues.

Mme Ann Burnett (coordinatrice des affaires parlementaires, Action Canada pour la population et le développement): Merci.

Monsieur le président et membres du comité, merci beaucoup de votre invitation à comparaître devant vous aujourd'hui. Nous le faisons avec un véritable sentiment d'optimisme et de confiance.

Nous avons accueilli avec grand soulagement l'affirmation récente du premier ministre, lorsqu'il était au Sénégal, que les crédits de l'APD allaient être augmentés dans le prochain budget, tout en reconnaissant que cela n'allait pas lui apporter beaucoup de voix d'électeurs. Mais si tous les Canadiens étaient informés des souffrances terribles que connaissent plus d'un milliard d'êtres humains, nous sommes assurées qu'ils voudraient accorder un soutien sans réserve.

Nous allons nous écarter du mémoire que nous vous avons fait parvenir et vous demander de porter votre attention sur un enjeu particulier de l'aide au développement. Écoutez ce qu'a déclaré récemment le président de la Banque mondiale, James Wolfensohn:

    Comment est-il possible que dans un monde sur le point d'aborder un nouveau millénaire, au milieu d'une croissance économique et de percées technologiques sans précédent, nous puissions laisser un nombre alarmant de jeunes femmes mourir en couche et en cours de grossesse?

La mortalité maternelle représente l'un des fossés les plus odieux et les plus inacceptables entre pays développés et en développement, avec 98 p. 100 des décès survenant dans les seconds. Chaque minute, une femme meurt d'une cause liée à la grossesse. Cela fait quatre avions gros porteurs par jour.

• 1825

Les conséquences de cet état de choses sont particulièrement tragiques pour les jeunes enfants. La mauvaise santé de la mère est la cause de près de la moitié de la mortalité infantile. Près de 3,2 millions de nouveau-nés meurent chaque année au cours des premières semaines, principalement du fait de soins inadéquats et inappropriés en cours de grossesse.

Lors de la conférence des Nations unies sur la population et le développement de 1994, le Canada a pris un engagement. Katherine va vous en parler.

Mme Katherine McDonald (directrice générale, Action Canada pour la population et le développement): Merci, monsieur le président.

Lorsque nous parlons d'engagement, du rang du Canada dans la communauté internationale, et des engagements que le Canada prend sur la scène internationale, il est très facile de les balayer d'un revers de main, car il est toujours facile de faire des promesses et beaucoup plus difficile de les suivre.

Mais contrairement à de nombreuses conférences internationales adoptant des accords par consensus, la Conférence internationale sur la population et le développement fixait des objectifs financiers en matière de financement, ainsi que des objectifs de réduction de la mortalité infantile et maternelle et de l'accès à des services de santé sexuelle et reproductive de haute qualité. Elle a également fait ressortir le lien entre la condition féminine, la participation des femmes à la prise de décision politique et économique, l'écart entre filles et garçons et l'amélioration de la situation des fillettes et la fourniture de soins de santé sexuelle et reproductive.

Avant la conférence du Caire, l'aide étrangère dans ce domaine était essentiellement restreinte au planning familial, mais les gouvernements ont reconnu que cela ne suffisait pas pour réduire le taux élevé et le nombre croissant des femmes qui meurent en cours de grossesse et d'accouchement, ni pour mieux assurer l'égalité des hommes et des femmes.

Les pays participants ont donc calculé le prix. Ils ont dit qu'ils allaient accroître les services et que cela coûterait davantage. Cela allait coûter 17 milliards de dollars US par an jusqu'en l'an 2000. Sur ces 17 milliards de dollars, 5,7 milliards seraient apportés par les pays donateurs—un tiers du montant total. Sur ce tiers, la part du Canada, toujours sur la base du PIB, serait de 200 millions de dollars canadiens par an, à compter de 2000.

Le problème est que nous sommes allés à la conférence du Caire en 1994. Nous sommes allés à la conférence des Nations unies qui faisait le point de cette action cette année. Et nous n'avons toujours parcouru qu'un quart du chemin. C'est un engagement que nous avions pris d'aider les femmes, les enfants et les familles des pays en développement—une très petite partie de l'enveloppe générale de l'aide au développement, mais primordiale pour les femmes.

Je vous demande donc aujourd'hui de songer à quoi ressemblerait un monde où les objectifs de la conférence du Caire seraient remplis, où les femmes pourraient décider quand elles vont se marier, si elles vont se marier, quand elles auront des relations sexuelles et avec qui. Nous touchons là au consentement au mariage. Nous touchons là au choix des femmes. Nous touchons là au mariage des enfants. Nous touchons là aux relations sexuelles et c'est de cela qu'il s'agit lorsque nous parlons de santé sexuelle. Lorsque nous parlons de santé reproductive, nous parlons de la capacité des femmes de décider quand elles veulent avoir des enfants, ce qui nous ramène à la problématique du planning familial.

Si nous vivions dans un monde où les objectifs du Caire étaient remplis, nous aurions des femmes et des hommes prenant des décisions sur leur sexualité et leur reproduction sans coercition, sans violence et sans discrimination.

À la conférence de Beijing tenue un an après celle du Caire, ces notions ont été pleinement intégrées dans le programme d'action adopté. Les résultats de cette conférence seront évalués ce mois de juin. Les groupements de femmes se mobilisent dans tout le pays afin d'influencer la position du Canada à cette conférence. Il serait merveilleux que le gouvernement saisisse l'occasion du prochain budget pour faire ce qui s'impose, pour tenir la promesse faite il y a cinq ans d'adopter un plan d'exécution des engagements du Caire.

• 1830

Vous savez, je suis très fière du Canada lorsque j'assiste aux conférences internationales, particulièrement dans le système des Nations unies, où nous argumentons et négocions et envoyons des délégués merveilleusement dévoués travailler sur des textes progressistes, fondés sur les droits de la personne et cherchant à faire bouger les choses à l'échelle internationale. Et qu'il s'agisse de mines terrestres, de la Cour pénale internationale ou des droits sexuels ou reproductifs des femmes et des filles du monde, nous faisons un excellent travail. Mais notre crédibilité se dissipe lorsque les autres pays constatent que l'argent ne suit pas.

Le Comité des finances est l'une des institutions de notre démocratie, l'un des lieux où les gens ordinaires et les groupes ordinaires peuvent s'exprimer, et il peut rédiger un rapport qui fera une différence et rendre les Canadiens fiers de notre action sur la scène internationale. Je sais, comme Ann l'a dit, que le premier ministre a promis d'accroître le budget de l'aide. Je pense que votre comité joue un rôle très important dans ce processus et que s'il se saisissait de cet aspect particulier, de ce petit élément du programme d'aide d'ensemble, pour en faire un exemple, cela aurait un profond retentissement sur l'ACDI et sur le public canadien.

Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup.

Nous allons maintenant passer à Mme Betty Plewes, présidente et directrice générale du Conseil canadien pour la coopération internationale. Bienvenue.

Mme Betty Plewes (présidente et directrice générale, Conseil canadien pour la coopération internationale): Merci beaucoup.

Nous sommes ravis d'être ici ce soir et nous partageons nombre des points de vue déjà exprimés par les intervenants précédents.

Notre conseil est lui-même un regroupement de plus d'une centaine d'organisations oeuvrant dans le domaine de la coopération internationale et, au cours de l'année écoulée, nous avons lancé une campagne appelée En Commun, dont le but est de faire de la lutte contre la pauvreté dans le monde un objectif prioritaire de la politique canadienne.

[Français]

Votre comité a établi cinq thèmes de consultation. Nous aimerions traiter du quatrième thème, la nouvelle économie, et examiner les enjeux que représentera pour le Canada la citoyenneté mondiale au cours du XXIe siècle.

Lorsque nous réfléchissons à la nouvelle économie, la première chose qui nous vient à l'esprit est sa visée mondiale. La mondialisation offre d'immenses possibilités de créer des emplois, de produire des revenus et de stimuler la croissance économique. Elle peut améliorer sensiblement la qualité de vie des populations du Canada et du monde.

Mais, comme l'indique le Rapport sur le développement humain des Nations Unies, les nouvelles règles de la mondialisation et ceux qui les rédigent s'intéressent à l'intégration des marchés mondiaux, en négligeant les besoins des populations que les marchés ne peuvent combler. Le processus concentre le pouvoir et tient à l'écart les pauvres pays et populations.

[Traduction]

De fait, l'inégalité croissante dans le monde représente l'un des plus grands périls pour la sécurité humaine et Roy vous a donné les statistiques: 1,3 milliard de personnes vivent avec moins d'un dollar par jour; le fossé entre pays riches et pauvres va croissant.

En ce qui concerne la politique étrangère canadienne, l'aide est l'un des meilleurs outils que nous ayons pour remplir nos obligations internationales en matière de lutte contre la pauvreté mondiale. J'aimerais esquisser quatre recommandations clés pour le budget du millénaire, qui nous mettraient sur la route d'un programme d'aide nouveau et progressiste. Les voici: privilégier la lutte contre la pauvreté, rétablir les crédits au programme d'aide canadien, annuler la dette du tiers-monde et lancer un programme élargi d'engagement du public.

• 1835

S'agissant de privilégier la pauvreté, nous pensons que dans les cinq prochaines années, au moins 60 p. 100 du budget de l'ACDI devraient être consacrés à des programmes contribuant directement aux conditions de vie et aux droits des pauvres vivant dans les pays pauvres. Les 40 p. 100 restants devraient être orientés vers des activités contribuant indirectement à la réduction de la pauvreté.

Pour respecter ces priorités, trois domaines d'action sont nécessaires: axer les programmes sur la satisfaction durable des besoins fondamentaux; améliorer le ciblage de l'aide vers les pauvres des pays pauvres; et ce plus particulièrement en Afrique subsaharienne.

Les crédits d'aide à l'Afrique subsaharienne ont été réduits de façon disproportionnée au cours des neuf dernières années. Je me trouvais à Durban pour la conférence des ONG du Commonwealth qui a précédé la réunion des chefs de gouvernement à Durban cette année. Pendant mon séjour, j'ai lu un article dans un journal disant que, en raison de l'épidémie de SIDA en Afrique du Sud, l'espérance de vie dans ce pays avait chuté de dix ans au cours des quatre dernières années. Elle est passée de 66 ans à 56 ans, en l'espace de quatre ans. Au Zimbabwe, le voisin du Nord, elle est tombée de 20 ans en quatre ans. Nous tendons à devenir un peu imperméables à ces statistiques effrayantes, mais l'hécatombe en Afrique et les besoins de l'Afrique sont énormes.

Le programme d'aide canadien a été très durement amputé au cours des dix dernières années, et nous avons salué l'annonce dans le discours du Trône et dans les allocutions du premier ministre pendant son voyage en Afrique. Mais si nous voulons remplir nos obligations internationales, nous avons besoin d'un plan de ressources à long terme. Nous aimerions que dans le prochain budget le Canada se fixe l'objectif de 0,35 p. 100, à remplir d'ici 2005-2006. Cela ne représente en fait que la moitié de notre objectif internationalement convenu de 0,7 p. 100, mais cela nous amènerait à engager 300 millions de dollars de plus par an au cours des cinq ou six prochaines années, rien que pour arriver à la moitié de l'objectif dont nous avons convenu.

Nous pensons qu'il faut annuler la dette du tiers-monde, et Roy en a parlé de façon assez détaillée. J'ajouterais simplement que les ressources consacrées à l'annulation de la dette doivent venir en sus de la hausse de l'enveloppe de l'aide publique au développement. Bien qu'il n'y ait pas eu d'engagement écrit entre les pays du G-7 lorsqu'ils ont décidé cette réduction de la dette, il était certainement entendu que cela viendrait en sus de l'aide.

Enfin, pour ce qui est de la participation du public, nous savons tous et constatons par le biais de nos familles et de nos organisations qu'il y a beaucoup plus d'interaction internationale de la part du secteur public, des ONG et des gouvernements. Nous sommes interconnectés à l'échelle internationale de différentes façons. Nous pensons que pour amener les Canadiens à mieux comprendre les problèmes du monde et les solutions qui s'imposent, l'ACDI doit faire davantage sur le plan de la communication.

Nous proposons donc que le Canada se fixe pour objectif de consacrer 2,5 p. 100 du budget de l'ACDI à la communication d'ici 2005-2006. À l'heure actuelle, les crédits pour la communication et l'éducation au développement de l'ACDI représentent environ 1 p. 100 de ses ressources.

[Français]

Dans un discours prononcé à Winnipeg au début de l'année, le premier ministre Jean Chrétien a souligné que nous étions choyés au Canada. Il a poursuivi en citant l'ONU, qui a confirmé chaque année, pendant cinq années consécutives, que notre qualité de vie ici était la meilleure au monde.

Mais à ces avantages correspondent des responsabilités, notamment celle d'agir en citoyens du monde. Ces responsabilités augmentent à mesure que notre monde devient de plus en plus interconnecté et interdépendant.

• 1840

[Traduction]

Dans le même discours, le premier ministre a estimé également que les pauvres du monde méritent plus que de simples paroles, ils méritent des actes. Nous sommes tout à fait d'accord. Nous pensons qu'il est aujourd'hui approprié que le Canada élabore un plan à long terme de réinvestissement dans l'aide étrangère et la réforme de l'aide étrangère. Le Canada s'acquitterait ainsi de ses responsabilités de citoyen du monde et contribuerait de manière notable à l'éradication de la pauvreté dans le monde.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Plewes.

Nous allons maintenant entendre la Fondation pour les échanges éducatifs entre le Canada et les États-Unis d'Amérique, représentée par M. Victor Konrad, directeur général, et M. David Walker, président de West-Can Consultants.

M. David Walker (Fondation pour les échanges éducatifs entre le Canada et les États-Unis d'Amérique): Merci beaucoup, monsieur le président. Étant peu accoutumé à ce format, je vais néanmoins tenter de me débrouiller.

Au nom de notre conseil d'administration, je tiens à vous remercier de votre invitation à comparaître. La Fondation Fulbright est fière des efforts qu'elle déploie dans le domaine de l'éducation internationale et pour aider le pays à développer sa stratégie de savoir international. Le mémoire vous a été distribué. Je vais demander à M. Victor Konrad de vous le résumer et je participerai ensuite à la période des questions.

M. Victor Konrad (directeur général, Fondation pour les échanges éducatifs entre le Canada et les États-Unis d'Amérique): Merci beaucoup, David.

Monsieur le président, je vais traiter de l'acquisition par les Canadiens du savoir et de la compétitivité par le biais d'échanges éducatifs internationaux.

La Commission Fulbright Canada-États-Unis constitue le lien officiel au niveau de l'enseignement supérieur entre le Canada et les États-Unis d'Amérique. Nous envoyons nos meilleurs étudiants de deuxième cycle et de doctorat aux États-Unis pour une année de recherche et d'études avancées, afin qu'ils reviennent au Canada avec une meilleure connaissance des relations entre les deux pays. De même, des Américains viennent au Canada pour se familiariser avec notre optique concernant des enjeux allant des échanges commerciaux à l'identité culturelle et de la santé à la viabilité écologique.

Afin de pouvoir participer plus efficacement à la collectivité mondiale émergente et retirer durablement les avantages du commerce international, le Canada doit produire davantage de diplômés et de professionnels capables de se débrouiller dans un environnement interculturel et international.

Nous sommes fiers que les deux gouvernements aient choisi la récente réunion de notre conseil d'administration à Washington, DC, pour signer la reconduction de l'accord de financement de notre commission d'échanges éducatifs. À nos yeux, c'est là une marque de confiance dans le travail et les réalisations du programme Fulbright Canada-États-Unis et une reconnaissance du fait que ces échanges sont cruciaux pour promouvoir la compréhension mutuelle entre les dirigeants futurs de nos pays.

En tant que membre fondateur de la Coalition pour l'éducation internationale, la Commission Fulbright Canada-États-Unis appuie tous les éléments de la stratégie proposée par cette dernière, notamment un programme de bourses vedettes d'études à l'étranger, des subventions à des étudiants étrangers pour étudier au Canada, le rétablissement de programmes de bourses intégrales essentiels comme les bourses Fulbright Canada-États-Unis, les bourses du Commonwealth, les Bourses de la Francophonie et les bourses du gouvernement du Canada, l'investissement dans la recherche et les transferts de technologie internationaux, la majoration de l'aide aux programmes d'études canadiennes à l'étranger et le renforcement des activités actuelles de marketing de l'éducation canadienne à l'étranger.

C'est avec les États-Unis que le Canada possède les plus importantes relations internationales. L'intensité de cette relation est étonnante, avec plus d'un milliard de dollars d'échanges commerciaux chaque jour et des millions de passages de frontière chaque année. L'élément « échanges éducatifs » est minuscule et déséquilibré, avec moins de 30 000 participants, surtout des Canadiens suivant des programmes d'études supérieures non disponibles chez nous.

Jusqu'à la mise sur pied du programme d'échanges Fulbright Canada-États-Unis en 1991-1992, rien n'a été fait pour répondre aux besoins d'une compréhension réciproque et mutuelle. Grâce à une combinaison de soutiens gouvernementaux, privés et institutionnels, un partenariat tripartite a émergé qui finance 60 bourses par an, la moitié allant à des Américains et la moitié à des Canadiens.

La Commission Fulbright Canada-États-Unis est l'un des partenaires du groupe de programmes d'échanges Fulbright de l'hémisphère occidental. Tous les gouvernements de la région encouragent la coopération entre les commissions et l'on voit émerger de nouveaux programmes d'échanges dans des domaines tels que la gestion environnementale.

À l'heure où le Canada se prépare à accueillir et guider une série de conférences et d'initiatives hémisphériques, Fulbright garantit l'accès, la reconnaissance et l'impact. Nos boursiers excellent. Des dirigeants autochtones sont issus des échanges Fulbright pour participants des Premières nations. Parmi les nouveaux professeurs adjoints de l'Osgoode Hall Law School, quatre sur cinq sont des anciens boursiers Fulbright. Le principal expert du contentieux commercial relatif au bois d'oeuvre est un ancien de Fulbright. Certains des plus grands cerveaux canadiens, comme Charles Taylor en philosophie et Stephen Clarkson en relations internationales, occupent actuellement des chaires Fulbright dans des universités américaines. Nos boursiers Fulbright figurent parmi les leaders de la recherche sur le réchauffement climatique et autres questions brûlantes qui occupent les meilleurs esprits au Canada et aux États-Unis.

• 1845

Nos partenariats donnent des bons résultats, mais la demande de leaders et d'experts pour l'avenir est forte. L'investissement du Canada dans ce programme tourné vers l'avenir est tout simplement trop faible. Le Canada contribue 350 000 dollars US par an, comparé à l'Allemagne et au Japon qui investissent 6 millions de dollars US et 4 millions de dollars US respectivement. Même le Mexique investit presque 2 millions de dollars US dans ses échanges Fulbright avec les États-Unis. Nos principaux partenaires commerciaux de 150 pays comprennent la valeur du programme Fulbright et d'autres échanges internationaux visant à renforcer la compréhension mutuelle, la compétitivité, le leadership et l'excellence dans l'enseignement et la recherche.

Ces programmes permettent d'endiguer l'exode des cerveaux, les étudiants boursiers s'engageant à rentrer dans leur pays et à y disséminer leur expérience internationale. Les programmes de la coalition et d'autres qui promeuvent les échanges internationaux exigent qu'on y investisse sans plus tarder, avant que le Canada prenne encore davantage de retard sur le plan de sa compétitivité et de sa responsabilité civique.

Pourquoi sommes-nous venus? Avec nos partenaires de la coalition, nous visons à promouvoir l'éducation internationale. Monsieur le président et membres du comité, nous vous demandons de nous aider à promouvoir notre programme localement et à recruter les meilleurs candidats et à recommander des partenaires de financement. Nous vous demandons d'user de votre rapport pour promouvoir l'éducation internationale. Nous demandons au ministre des finances d'user de son discours du budget pour promouvoir l'éducation internationale et faire connaître les avantages qui en résultent sur le plan de la compétitivité canadienne.

Enfin, nous vous exhortons à accroître les dépenses fédérales pour l'éducation internationale, afin de les porter des 30 millions de dollars actuels à 100 millions de dollars, dont 2 millions de dollars par an seraient consacrés aux échanges Fulbright.

Merci beaucoup.

Le président: Merci, monsieur Konrad et monsieur Walker.

Nous allons maintenant passer à la période des questions. Les tours seront de sept minutes.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Merci, monsieur le président et merci à tous d'être venus aujourd'hui et de vos exposés.

Je suis toujours contraint de travailler plus fort que tout le monde ici, car une fois que vous avez tous fini, je dois déjà être prêt à poser mes questions, et je ne le suis pas toujours parce que je prends des notes.

J'aimerais commencer avec le Regroupement des organisations nationales bénévoles. Vous avez fait état d'un fonds d'édification de la capacité du secteur bénévole. Dites-nous en plus. De quoi s'agit-il?

M. Al Hatton: Les dirigeants du secteur bénévole travaillent depuis plusieurs mois déjà avec le gouvernement fédéral. Nous avons identifié plusieurs domaines, dont l'un est la connaissance, c'est-à-dire l'acquisition de connaissances concernant le secteur volontaire. Statistique Canada fait toutes sortes de recherches sur l'économie et divers secteurs, mais aucune en particulier sur le secteur bénévole. Nous ne savons même pas réellement combien il existe d'organisations dans le secteur bénévole canadien. Voilà donc un point.

Nous sommes évidemment défavorisés par cette absence de renseignements généraux sur les organisations qui existent et leurs activités. Or, il y a à peu près 1,3 million de personnes qui travaillent au Canada dans le secteur bénévole. Nous ne savons pas quels sont leurs taux de rémunération. Nul n'en sait rien.

Il y a aussi le problème de l'épuisement, car avec toutes les coupures imposées aux niveaux fédéral et provincial, bon nombre des problèmes sociaux se retrouvent à la charge des salariés et bénévoles des organisations caritatives locales. Mais aucune analyse de l'impact de ces coupures n'a été effectuée.

Il y a aussi un problème de capacité. Lorsqu'il est question de coupures, la première réaction des gens est qu'il y aura moins de services disponibles, ou bien que quelqu'un dans la collectivité prendra le relais, ou bien que les gens vont s'en tirer seuls. Le fait est que, pour faire en sorte que les bénévoles soient bien utilisés, il faut toute une infrastructure.

Nous formulons donc une série de recommandations dans un rapport que je vous ai remis, concernant les échanges de personnel entre gouvernements, le genre de choses que fait la Commission Fulbright, et qui est à encourager. Il y a toute une série de mesures qui vont renforcer la capacité des organisations, pour qu'elles restent indépendantes tout en étant en partenariat avec le gouvernement et le secteur privé.

M. Ken Epp: J'ai une autre question pour vous.

Vous avez dit que vous aimeriez voir des incitations fiscales accrues pour les donateurs modestes. Quelles seraient les modalités? Qu'aimeriez-vous que le ministre des Finances annonce dans son budget de février à cet égard?

M. Al Hatton: Nous avons formulé une série de suggestions, mais je ne les ai pas sous les yeux. Je peux facilement vous les faire parvenir.

Au cours des trois dernières années, nous avons régulièrement demandé une majoration des taux de base, qui sont aujourd'hui... Pour une contribution de 200 $, je pense que c'est 17 p. 100, et on passe à 29 p. 100 au-delà. Nous préconisons de relever ces niveaux. Nous avons un document là-dessus, et je pense que d'autres groupes ont recommandé la même chose. Je peux facilement vous faire parvenir les détails ultérieurement. Je n'ai pas les chiffres sous les yeux. C'est un mécanisme très simple. Ce n'est pas du tout bureaucratique, il suffit de majorer les niveaux actuels.

• 1850

M. Ken Epp: Pourtant, la Loi de l'impôt sur le revenu autorise tout un chacun à déduire 100 $, qu'il les ait donnés ou non, sans reçus. Je pense parfois que ceux qui ne parviennent même pas à accumuler pour 100 $ de reçus sont tellement pingres qu'ils n'ont probablement rien donné et ne devraient bénéficier d'aucune déduction du tout.

Je ne sais pas si vous êtes en mesure de me répondre là-dessus, et je ne sais pas si j'ai envie que ce que je viens de dire soit rendu public, monsieur le président.

M. Al Hatton: Je préfère ne pas aller à reculons, je préfère avancer.

M. Ken Epp: Oui. J'ai bien envie de proposer au ministre des Finances de faire entrer un peu davantage dans les coffres en supprimant cette déduction automatique sans pièce justificative, mais c'est un peu hors sujet.

Je vais passer à l'Institut Nord-Sud. Vous n'arrêtez pas de dire qu'il faut arrêter de favoriser les riches, et je crois que vous appliquez cela non seulement aux personnes, mais également aux pays, comme si nos accords internationaux et nos régimes de financement donnaient un avantage aux pays riches et pénalisaient les pays pauvres. Or, à ma connaissance, nous donnons pas mal plus aux pays pauvres qu'aux pays riches sous forme d'aide étrangère, ou est-ce que je me trompe? Je ne saisis pas exactement ce que vous entendez par là.

M. Roy Culpeper: À ma connaissance, nous ne donnons pas d'aide étrangère aux pays riches.

M. Ken Epp: J'espère que non.

M. Roy Culpeper: Ce serait inimaginable.

Je parlais de la façon dont le marché mondial tend à favoriser ceux qui ont accès à la technologie et à l'instruction, et ils tendent à ne pas être les habitants des pays pauvres. Prenez un pays comme le Bangladesh, qui a moins de lignes téléphoniques que la ville de Montréal, alors que nous ne cessons de vanter la façon dont l'Internet va transformer le commerce et l'économie mondiale. Et c'est peut-être bien vrai, mais dans la pratique les pays pauvres n'ont pas l'infrastructure ni l'éducation pour se brancher sur l'Internet ou mettre à profit les possibilités ouvertes par le marché mondial. Voilà ce que je voulais dire.

Prenez l'Organisation mondiale du commerce. Tout le monde sait qu'il y aura une conférence à Seattle cette semaine. Il est intéressant de signaler qu'une vingtaine de pays d'Afrique subsaharienne qui sont membres de l'OMC n'ont pas de représentant à Genève. Comment pourraient-ils livrer concurrence sur un pied d'égalité avec des pays comme le Canada ou les États-Unis, avec leur foule de bureaucrates et de juristes retors adossés sur des tonnes de recherches et d'analyses et de recommandations pour leurs ministres? Voilà le genre de monde dont je parle.

M. Ken Epp: Le Conseil canadien pour la coopération internationale et vous-même, et je pense un autre témoin encore, avez parlé d'éliminer la pauvreté dans le monde, un objectif certes très louable mais qui me paraît dépasser largement la capacité du budget canadien, même si nous y consacrions la totalité de nos revenus. Nous sommes un pays de 30 millions d'habitants, et c'est un peu comme allumer une bougie dans une caverne sombre; elle va peut-être éclairer un tout petit peu, mais avez-vous un plan ou des idées sur la façon d'accomplir cela?

J'aime bien l'idée. J'aimerais bien que personne ne soit pauvre. Mais comment réaliser cela sur le plan pratique? Vous tous autour de cette table aujourd'hui, d'une façon ou d'une autre, excepté peut-être ces deux messieurs au bout qui ont parlé des échanges éducatifs entre le Canada et les États-Unis, et qui sont peut-être un peu en dehors de ce circuit... Mais tous les autres, que feriez-vous?

Le président: Qui veut commencer? Allez-y, monsieur Culpeper.

M. Roy Culpeper: Je vais commencer, mais je suis sûr que tout le monde autour de la table a un avis à donner.

• 1855

L'éducation est effectivement un élément important de la solution, mais c'est vraiment l'éducation au niveau le plus élémentaire, et particulièrement l'éducation des filles, qui est extrêmement importante dans les pays en développement.

Mais permettez-moi de remonter un peu en arrière. Il est vain de croire que l'aide étrangère pourra conquérir la pauvreté. Je pense que l'aide étrangère est une pièce importante du puzzle mais, en fin de compte, comme je l'ai dit dans mon exposé, c'est aux pays en développement, à leurs populations et à leurs gouvernements, de prendre l'initiative et de trouver les solutions.

Notre rôle à nous, au Canada, en tant que petit donateur parmi une foule d'autres donateurs, dont beaucoup ont beaucoup plus de ressources que nous, est que nous pouvons cibler notre aide vers les pays qui combattent la pauvreté, tant de par leurs institutions que par leurs politiques, et encourager d'autres donateurs et pays en développement à faire de même.

Enfin—et c'est l'autre volet—l'aide ne représente qu'une partie du tableau. Il est très important de reconnaître les obstacles qui empêchent les pays en développement de tirer parti des marchés mondiaux. Par exemple, nous ne laissons toujours pas entrer sur notre marché beaucoup d'exportations des pays en développement. Nous achetons pour environ 1 milliard de dollars d'importations aux pays en développement, alors que nous distribuons pour 2 milliards de dollars d'aide. Allez-vous y retrouver. Il faut lever ce genre de barrière, pour aider les pays en développement et leurs industries à prospérer et se développer.

Je devrais peut-être demander à mon collègue John Serieux s'il a quelque chose à ajouter.

M. John Serieux (chargé de recherche, Institut Nord-Sud): Pour ce qui est de l'élimination de la pauvreté, je suis d'accord avec mon collègue pour dire que l'aide étrangère en soi n'y suffira pas. Nul ne prétend que c'est la solution. Mais elle est utile à plusieurs égards très importants.

En ce qui concerne l'endettement, par exemple, nos études ont montré qu'une lourde charge de dette est l'un des plus gros obstacles à la croissance d'un pays et donc à sa capacité à réduire la pauvreté. La réduction du fardeau de la dette donne au pays la possibilité d'utiliser ses ressources pour stimuler sa croissance et donc, à long terme, réduire la pauvreté, et à court terme lutter contre elle en dépensant davantage pour la santé, l'éducation et d'autres moyens directs de combattre la pauvreté.

M. Ken Epp: Je veux entendre ce que les autres ont à dire, mais j'ai d'abord une petite question supplémentaire pour vous deux. Comment pouvez-vous savoir que les pays qui touchent l'aide ou dont on va radier tout ou partie de la dette n'ont pas utilisé simplement cet argent pour acheter du matériel de guerre? Est-il possible de s'en assurer?

M. Roy Culpeper: La façon dont les donateurs envisagent l'aide de nos jours, c'est dans le contexte des pays qui ont des politiques propices au développement et à la lutte contre la pauvreté. On accorde beaucoup d'attention à des éléments tels que la gouvernance. Les pays comme le Soudan, ou la Birmanie, sont peu susceptibles de recevoir beaucoup d'aide ces jours-ci, simplement parce qu'on a conscience que dans ce genre de régime et de circonstances, les pauvres sont peu susceptibles de retirer grand-chose.

On se rend donc compte que les conditions doivent être favorables, au lieu d'imposer quantité de conditions et de modalités bureaucratiques, c'est-à-dire que l'on a conscience que les pays où les conditions sont favorables sont ceux où la pauvreté diminuera probablement le plus.

Le président: Madame McDonald.

Mme Katherine McDonald: Cette discussion est très intéressante. Je pense que ce que le Canada peut faire—je veux dire, même si nous parvenions à l'objectif fixé, rêvé, par Lester Pearson dans les années 1970, de consacrer 0,7 p. 100 de notre PIB à l'aide étrangère, même alors nous serions un petit acteur sur la scène internationale.

Mais le prestige que nous avons sur le plan d'aspects comme la gouvernance, les droits de la personne—le traité sur les mines terrestres est un parfait exemple de la capacité du Canada de réunir toutes sortes de partenaires autour d'une table et de parvenir à des accords. Nous ne manions pas le bâton, nous sommes respectés sur la scène internationale, lorsqu'il s'agit de négocier des accords et de trouver des compromis. Mais il y a aussi le travail de l'ACDI, son partenariat avec les ONG et tous les membres de notre regroupement qui consacrent beaucoup de temps à réfléchir aux éléments de bons programmes de développement.

• 1900

Donc, je pense que si nous tablions sur la petite influence que nous possédons déjà, le crédit dont nous jouissons au niveau international, et l'appliquions aussi à notre financement, nous disposerions alors d'un excellent levier pour obtenir la mise en place de bons programmes de développement dans les pays qui doivent et peuvent relever les défis auxquels ils sont confrontés.

Le président: Merci.

Madame Plewes, souhaitez-vous participer?

Mme Betty Plewes: Eh bien, je pense que l'élimination de la pauvreté dans le monde est une question de volonté politique et de leadership politique. Nous savons que, globalement, le problème n'est pas un manque de technologies ni un manque de moyens. Nous savons que le problème n'est pas un manque de ressources à l'échelle mondiale, c'est un problème de répartition des ressources mondiales.

Si vous regardez comment nous avons résolu les problèmes sociaux au cours des 200 ou 300 dernières années, tels que l'esclavage, tout commence par un groupe de personnes qui veulent changer les choses. Et c'est possible et je pense que la contribution du Canada a été non négligeable. La contribution canadienne à la radiation de la dette—son leadership a été très important à cet égard. Le leadership du Canada au sein du G-20 sera très important. Nous sommes un acteur important. C'est une question d'énergie, de volonté politique et de vision, et cela requiert également un programme d'aide efficace, la radiation de la dette, faire notre part en contribuant nos ressources, mais je pense que c'est très possible.

Il est vrai que c'est un objectif à long terme et idéaliste, mais c'est possible. Nous savons que c'est possible.

M. Ken Epp: Eh bien, je vous admire tous. Je suis avec vous. Au lieu de maudire l'obscurité, allumons peut-être cette petite bougie pour voir ce qui va se passer.

Je vous remercie, monsieur le président.

Le président: Madame Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Je voudrais remercier les témoins de leur exposé et de la qualité de leurs interventions. En répondant aux questions de mon collègue, ils ont répondu aux questions que je m'étais proposé de leur poser.

Je tiens à leur dire que je suis d'accord sur leur recommandation visant à augmenter les fonds accordés à l'aide aux pays en voie de développement. Je sais que c'est une utopie à l'heure actuelle que de dire qu'en augmentant ces fonds, on va arriver à éliminer la pauvreté. Personne ne peut vraiment sérieusement penser cela. Par contre, en augmentant ces fonds, on peut faire d'autres interventions qui nous permettront de faire de petits pas et d'aider grandement ces pays en voie de développement.

Bien qu'on parle beaucoup de l'Afrique, il y a ici, en Amérique, un des pays les plus pauvres au monde: Haïti. Je devais accompagner la ministre à Haïti, mais c'est une de mes collègues qui y est allée. Elle m'a rapporté des choses affreuses, impossibles à imaginer. D'un autre côté, elle me disait qu'il y avait une lueur d'espoir grâce aux projets qu'y a mis en oeuvre l'ACDI et qui donnent actuellement des résultats. Ce sont de petits pas, mais on obtient des résultats. Je pense entre autres aux extraordinaires projets « femmes et développement ».

Le Canada et d'autres pays ont investi à Haïti de l'argent et encore de l'argent, mais on ne semble pas voir la fin, bien que de petites choses émergent dans certains coins d'Haïti.

Il est très important qu'on prévoie des fonds supplémentaires à ce chapitre dans le prochain budget. En tout cas, je m'engage à intervenir pour que cela soit fait et que le premier ministre tienne sa promesse.

• 1905

Merci. C'est tout.

[Traduction]

Le président: Merci.

Madame Redman.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président. J'ai plusieurs questions.

Je tiens à vous remercier tous d'être venus et de nous avoir fait part de votre point de vue.

Ma première question s'adresse à Mme McDonald et à Mme Burnett. Vous avez parlé de l'engagement du Canada au Caire, du fait que nous allouons aujourd'hui 50 millions de dollars par an, alors que nous avions promis 200 millions de dollars. Pouvez-vous me dire comment ces 50 millions sont actuellement dépensés?

Mme Katherine McDonald: Tout passe par l'ACDI. Les fonds sont distribués de plusieurs façons. Une partie va au Fonds de la population des Nations unies. Je crois que c'est 10 millions de dollars. Ensuite, 4,5 millions de dollars vont aux organisations internationales, dont la Fédération internationale pour la planification familiale qui travaille, je crois, dans 150 pays. C'est là le genre de transfert forfaitaire à des organisations qui se spécialisent dans ce domaine et exécutent les travaux. Le reste est dépensé pour des projets soumis à l'ACDI et parmi lesquels elle choisit selon ses mécanismes propres.

C'est d'ailleurs l'un des problèmes que nous voyons. Nous aimerions beaucoup qu'une stratégie soit élaborée par l'ACDI, un plan cadre, en quelque sorte, pour les problèmes de santé sexuelle et reproductive. Il y en a un en cours d'élaboration pour l'éducation, un autre pour l'égalité des sexes et un autre pour l'environnement, etc. Nous aimerions beaucoup que cela se fasse. En fait, l'ACDI a esquissé une stratégie qu'elle allait publier à des fins de concertation publique, mais a choisi de ne pas le faire.

Je pense que si nous avions un plan, nous aurions alors une vision à long terme de l'emploi qui devrait être fait de cet argent. Mais à l'heure actuelle, la distribution se fait un peu au hasard. C'est aléatoire. Ce n'est pas tant une question de bonne planification que de chance, à l'heure actuelle.

Mme Karen Redman: Le Canada est l'un de plusieurs pays qui ont convenu de financer cela. Savons-nous dans quelle mesure ces autres pays tiennent leurs engagements?

Mme Katherine McDonald: Oui. Un rapport a été rédigé en vue de l'examen quinquennal des résultats de la conférence du Caire. Il a été publié en janvier dernier. Je peux vous en faire parvenir un exemplaire.

Le Canada se retrouve à peu près dans le milieu des principaux pays donateurs de l'OCDE, et nous avons réalisé environ 25 p. 100 de notre objectif. La Norvège, la Suède, le Danemark et les Pays-Bas ont rempli ou dépassé leurs objectifs. Il y a des variations également entre les autres pays. En moyenne, les pays ont rempli leurs objectifs à 35 ou 40 p. 100. Donc, nul ne s'en tire très bien, hormis les quatre qui ont dépassé leurs engagements. Nous nous situons en deçà de la moyenne des autres et certainement en dessous de la médiane.

Mme Karen Redman: Donc, selon la nouvelle formule des bulletins scolaires, nous nous développons avec difficulté.

Mme Katherine McDonald: Dans ce bulletin, nous obtenons un C moins. On y a effectivement attribué des notes alphabétiques. Si je devais noter moi-même, je ne serais pas aussi généreuse.

Mme Karen Redman: Madame Plewes, vous demandez que l'ACDI consacre d'ici 2005-2006 2,5 p. 100 de son budget à la communication et à une stratégie d'ouverture au public. Pouvez-vous me préciser un peu comment vous voyez cette stratégie?

• 1910

Mme Betty Plewes: Une partie devrait être dépensée dans les écoles. Il est très important que les jeunes enfants et les élèves du secondaire aient conscience de la nature globale de notre monde d'aujourd'hui. Ce serait donc là un élément important.

Nous-mêmes avons travaillé à quelque chose que nous appelons « délibération publique » dans trois localités du pays, qui est une façon de susciter un débat dans les collectivités locales sur les problèmes globaux. Le sujet sur lequel nous travaillions était l'impact de la mondialisation sur les collectivités locales. Nous en avons tenu un au Cap-Breton avec environ 200 personnes. Ce n'était pas un sujet académique. L'impact de la mondialisation au Cap-Breton est flagrant.

Toute une série d'autres institutions, tels que les syndicats, la Canadian Co-operative Association et les associations professionnelles comme celles des infirmières et infirmiers et l'Association canadienne de santé publique font un travail de sensibilisation au sein de leurs propres réseaux. Il existe toute une série de programmes dans les écoles et les grandes organisations qui possèdent des réseaux. Il y a ensuite beaucoup de petites organisations plus petites qui font un travail de sensibilisation locale, avec projection de films, visites de délégués venant d'autres régions du monde et d'échanges, par exemple entre agriculteurs canadiens et nicaraguayens, toute une diversité de façons dont les gens peuvent en apprendre plus sur le monde.

En fait, je consacrerais davantage de fonds à la sensibilisation du public qu'aux communications de l'ACDI, mais je suis peut-être partiale.

Mme Karen Redman: Si je puis poursuivre, monsieur Culpeper, vous avez parlé de l'annulation de la dette du tiers-monde, et vous n'êtes pas le seul à avoir abordé le sujet. Chez moi, comme un peu partout au Canada, les organisations religieuses se sont en quelque sorte emparées de la bannière du Jubilé 2000. Pourriez-vous nous en parler et nous dire dans quelle mesure cela correspond à votre philosophie. Je crois que vous formulez quelques réserves sur les modalités de radiation de la dette du tiers-monde. Connaissez-vous suffisamment la campagne Jubilé 2000 pour me dire si elle colle ou non avec votre point de vue.

M. Roy Culpeper: Tout à fait. Je ne vois pas de quelles réserves vous parlez. Nous travaillons en collaboration très étroite avec les ONG, qui jouent un rôle de promotion. Nous-mêmes, nous consacrons surtout à la recherche. John, mon collègue, est notre expert de l'endettement.

Je pense que Jubilé 2000 a été l'une des campagnes les plus réussies des ONG ces derniers temps. Sans leurs efforts, je suis sûr que nous n'aurions pas réalisé ces dernières années les progrès que nous avons vus.

L'action des ONG est limitée à la promotion et aux pressions. Nous-mêmes cherchons à nous concentrer sur le suivi.

D'ailleurs, la prochaine phase de notre projet de recherche sur l'endettement consistera à examiner une série de pays pauvres lourdement endettés, tant en Afrique qu'ailleurs, pour faire une étude de cas d'une demi-douzaine de pays pour discerner la relation entre la réduction ou radiation de dette d'une part et la réduction de la pauvreté d'autre part, c'est-à-dire la façon de passer de A à B. Je pense qu'il est très important de comprendre de quelle façon la réduction de la dette se répercute sur la réduction de la pauvreté.

Les possibilités et difficultés diffèrent d'un pays à l'autre. certains pays peuvent avoir d'assez bons systèmes éducatifs et sanitaires, et d'autres non. Certains peuvent être relativement bien gouvernés, d'autres non. Certains peuvent posséder des richesses naturelles et d'autres non. Il importe donc réellement de bien voir quelles sont les possibilités et contraintes et comment elles s'agencent dans chaque pays. Ce sera notre contribution à l'exécution du plan de réduction de la dette.

John, aviez-vous quelque chose à ajouter là-dessus?

M. John Serieux: Simplement pour dire que la campagne a porté le problème de la dette à l'attention de ceux qui peuvent apporter le remède. Notre rôle à ce stade est de réunir des données à l'appui de cet effort, comme Roy l'a expliqué, afin de le rendre plus efficace et faire en sorte qu'il remplisse bien les objectifs visés.

Mme Karen Redman: Ce sont peut-être là les réserves dont je parlais. Vous ne voulez pas radier la dette du tiers-monde et voir les trois familles les plus riches du pays s'enrichir davantage. Vous voulez assurer que les avantages aillent à la population, améliorent le mode de vie, rendent la vie meilleure, rendent l'éducation accessible.

• 1915

M. Roy Culpeper: Absolument.

Mme Karen Redman: C'est là le genre de conditions qui doivent être réunies avant d'effacer la dette.

Le président: Merci, madame Redman. Avez-vous une autre question?

Mme Karen Redman: J'ai une question rapide pour M. Konrad.

Elle ne porte pas exactement sur le sujet de votre intervention, mais j'ai deux universités dans ma ville, et elles sont venues me voir il y a quelques semaines. L'un des problèmes qu'elles m'ont signalés est le vieillissement du corps enseignant, pas seulement au Canada, mais ailleurs dans le monde. À votre sens, est-ce là un problème dont nous devons nous inquiéter et que pouvons-nous faire pour y remédier?

M. Victor Konrad: C'est certainement un plus gros problème ici au Canada car la taille de notre population est beaucoup plus petite. On prévoit le même type de problème que dans les années 1960, où nous n'avions pas assez de professeurs d'université. Le problème alors était causé par le baby boom, ou le surcroît de jeunes, ou peu importe le nom que vous donnez au phénomène. Le départ à la retraite de tous ces enseignants créera un déficit assez important dans nos établissements éducatifs.

Les universités s'en inquiètent déjà beaucoup. On commence à en débattre, mais les médias ne s'en sont pas encore suffisamment fait l'écho, et le problème reste encore méconnu. Nous allons devoir engager des enseignants aux États-Unis de nouveau, comme par le passé. Je pense que l'une des façons de se préparer à cela est d'intensifier les échanges internationaux, envoyer davantage de nos diplômés à l'étranger pour nouer des liens, et si nous allons devoir embaucher à l'étranger, nous pourrons peut-être trouver des personnes qui connaissent mieux le pays.

Mme Karen Redman: Merci.

Le président: Merci, madame Redman.

Monsieur Gallaway.

M. Roger Gallaway (Sarnia—Lambton, Lib.): M'autorisez-vous une question?

Le président: Oui.

M. Roger Gallaway: Oh, merci.

Tout d'abord, vu que personne ne l'a fait, je veux souhaiter la bienvenue à nos invités à cette séance du soir.

J'aimerais poser une question à M. Konrad sur le programme Fulbright. Le fait que 81 p. 100 des exportations canadiennes vont aux États-Unis nous en dit beaucoup sur l'importance relative de ce pays pour le Canada. Je ne sais pas si vous avez ces chiffres, mais quelle proportion des boursiers Fulbright canadiens étudient-ils aux États-Unis, comparé aux autres pays?

M. Victor Konrad: Il faut d'abord que je vous explique comment fonctionne le programme Fulbright. Il est très similaire au programme des bourses Rhodes, en ce sens qu'il a un point focal. Dans notre cas, le point focal est aux États-Unis. Dans le cas du programme Rhodes, c'est l'Université Oxford au Royaume-Uni.

Des boursiers du monde entier vont aux États-Unis, et des américains vont dans quelque 150 pays du monde. La participation canadienne au programme Fulbright est limitée par le montant de notre investissement. Autrement dit, nous avons 60 boursiers par an, dont la moitié sont des Américains venant étudier au Canada et la moitié des Canadiens partant aux États-Unis. L'Allemagne a un programme d'environ 400 à 500 boursiers chaque année participant aux échanges. L'Espagne et le Japon en ont beaucoup plus que nous. Le Canada se situe dans le tiers inférieur des programmes d'échange.

Cela est partiellement dû au fait que notre programme Fulbright n'a été mis sur pied qu'après la signature de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis. Disons qu'il s'agit là d'une reconnaissance de notre différence d'avec les États-Unis jusqu'à ce stade. C'est à ce moment-là que le programme Fulbright a été mis en place.

Nous avons donc un rattrapage à faire, mais nous ne rattrapons pas aussi rapidement que la demande l'exige. Il y a une demande énorme.

M. Roger Gallaway: Comment êtes-vous financés et par quel biais les fonds vous parviennent-ils? Est-ce par le biais d'un conseil subventionnaire?

M. Victor Konrad: Non. Nous avons des fonds de différentes sources. Nous touchons 350 000 $ US versés par le gouvernement canadien, avec une contrepartie équivalente du gouvernement américain, et nous utilisons ces fonds pour financer une vingtaine de bourses, et couvrir nos frais de fonctionnement et d'élaboration de programmes. Le secteur privé et un certain nombre d'institutions, au moyen de mécanismes de partage des frais, financent les deux tiers restants de nos bourses. C'est donc un partenariat tripartite: secteur privé, universités et collèges, et gouvernement.

• 1920

Le président: Avez-vous quelque chose à ajouter, monsieur Walker?

M. David Walker: J'aimerais dire à M. Gallaway que l'une des grandes missions du conseil est de lever des fonds. Certains de ses membres se sont montrés très actifs à cet égard. Nous n'existons que depuis dix ans, mais plusieurs membres s'activent chaque année. Nous pensons avoir engagé une certaine dynamique, et les deux ambassadeurs, qui sont membres de notre conseil, passent beaucoup de temps à promouvoir le programme dans leur pays respectif, afin de trouver des sociétés et des institutions intéressées au Canada et aux États-Unis. Nous progressons.

M. Roger Gallaway: D'accord, je vous remercie.

Monsieur le président, il vous intéressera peut-être de savoir que M. Hatton est originaire de Sarnia. C'est très important.

M. Al Hatton: Tout comme M. Galloway, au cas où vous l'ignoriez.

Le président: Je n'inscrirais pas cela dans votre CV.

M. Roger Gallaway: Monsieur Hatton, vous avez parlé du fait que la Loi de l'impôt sur le revenu a été modifiée il y a quelques années pour favoriser les dons importants aux organisations caritatives. Je sais que le sujet a été soulevé ici par le passé, mais on nous disait chaque fois qu'il était trop tôt pour en juger les résultats. Le moment est-il venu de déterminer les effets de ces changements sur les organisations caritatives?

M. Al Hatton: Ils ont été très positifs. Certaines des oeuvres ont commencé à recenser ces dons. Les fondations communautaires le font, de même que Centraide, et aussi certaines grandes organisations dans le domaine de la santé et les musées, et les résultats sont positifs.

Je n'ai pas les chiffres en tête. Nous nous sommes engagés auprès du ministère des Finances à le faire chaque année et à indiquer les résultats au bout de cinq ans. Mais les chiffres sont notables et, dans certains cas, ces dons importants sont devenus la principale source de financement des oeuvres, sous forme de dotations et de legs. C'est donc un domaine croissant, c'est sûr.

M. Roger Gallaway: Madame Burnett et madame McDonald, qui sont vos membres?

Mme Katherine McDonald: Nous sommes une organisation toute nouvelle. Notre incorporation remonte à 13 mois. Nous avons deux paliers de membres, un très petit nombre de membres cotisants et un nombre beaucoup plus important avec lesquels nous communiquons au moyen d'un serveur de liste. Au dernier comptage, nous avions entre 150 et 160 abonnés à notre serveur de liste. La plupart de nos communications passent par notre site Web, qui n'est pas aussi accessible que nous l'aimerions. Nous avons d'énormes espoirs pour l'avenir.

M. Roger Gallaway: Ce que je voulais savoir, c'est si vos membres sont des particuliers ou bien...

Mme Katherine McDonald: Oui, des particuliers. Notre structure est hautement inhabituelle—oh, peut-être pas si inhabituelle que cela—en ce sens que nous cherchons à limiter les coûts au maximum. Le programme d'action du Caire couvre toutes sortes de problèmes liés à l'environnement, au développement, aux migrations, en sus des droits sexuels et reproductifs. À notre conseil siègent des experts de tous ces domaines, et nous avons également des liens étroits avec la Fédération du planning familial canadienne. Celle-ci possède un siège à notre conseil.

M. Roger Gallaway: J'ai une autre question pour vous. Mme Plewes a invoqué la concertation avec le public ou la tenue de séances d'éducation après la conférence du Caire—et je crois qu'il y a eu une conférence ultérieure à Beijing—il se trouve que nous avons des contribuables dans ce pays qui sont violemment opposés aux droits sexuels et reproductifs et à l'éducation et au financement en la matière. Que répondez-vous à ces gens?

Mme Katherine McDonald: Eh bien, c'est difficile. Il faut d'abord considérer les statistiques: 78 p. 100 des Canadiens sont ce que nous appelons pro-choix; 77 p. 100 des catholiques sont pro-choix. La réalité est qu'il existe une très petite minorité vociférante, qui est très bien organisée, très bien financée et capable d'orchestrer des campagnes épistolaires, etc. Mais nous avons effectué les sondages et nous savons que le Canadien ordinaire, le catholique ordinaire, le prêtre ordinaire sur le terrain, n'est pas opposé à la fourniture de services de santé sexuelle et reproductive, chez nous ou ailleurs.

• 1925

Il ne faut pas perdre de vue que nous jouissons de tous ces droits au Canada—des droits durement acquis—et encore une fois, il y a une petite minorité organisée qui ne parvient pas à ses fins au Canada et qui veut donc refuser ces droits aux femmes des autres pays. J'ai énormément de mal avec cela. Certes, chacun a droit à ses opinions, mais non pas de les imposer aux autres. Parce qu'on impose ses opinions aux autres, des femmes meurent en couche—600 000 chaque année. Je ne peux pas l'oublier.

M. Roger Gallaway: Ma dernière question s'adresse à M. Culpeper.

Vous avez dit que le Canada est au huitième rang, et je pense que vous avez utilisé l'expression « en termes de générosité » au sein de l'OCDE. Vous pourriez peut-être me rafraîchir la mémoire. Au huitième rang de quoi? Combien de pays membres compte l'OCDE? Et vous pourriez peut-être me dire quel est le montant supérieur, sur une base per capita ou quel que soit votre mode de calcul, au sein de l'OCDE.

M. Roy Culpeper: Le classement est fait selon le ratio de l'APD au PIB. Il traduit la générosité en fonction de la capacité de payer—cette dernière étant le PIB. Donc, en haut du classement, on trouve la Suède, les Pays-Bas, la Norvège et le Danemark, ceux qui viennent toujours en tête dans ces domaines. Ils tendent à se situer au niveau de 0,7 p. 100 ou au-dessus. Certains atteignent même le chiffre de 1 p. 100. Les Pays-Bas se sont très souvent situés autour ou au-dessus du niveau de 1 p. 100 du PIB. C'est pourquoi, même avec seulement la moitié de notre population, son aide en valeur absolue est supérieure à la nôtre.

Nous sommes donc au huitième rang sur les 20 pays du Comité d'aide au développement.

Oh, d'après Betty, nous sommes tombés au onzième rang. Mon chiffre était un peu dépassé.

M. Roger Gallaway: Merci.

Le président: Merci, monsieur Gallaway.

Aviez-vous une autre question?

M. Ken Epp: Non, juste une petite déclaration. Vous savez, pendant que je réfléchis, mon cerveau tourne. Cela vous surprend peut-être, à cette heure de la soirée.

Le président: Cela arrive souvent, précisons-le.

M. Ken Epp: Nous avons eu d'autres interventions, pas dans ce groupe, sur l'éducation, le financement de l'éducation et les besoins des étudiants canadiens, et une idée vient de me venir dont j'aimerais vous parler. Certains d'entre vous voudront peut-être y réagir.

Il m'apparaît que lorsque nous avons cet échange d'étudiants entre le Canada et les États-Unis, nous pourrions peut-être offrir aux diplômés canadiens, après leurs études, la possibilité de gagner de l'argent pour rembourser leurs emprunts d'études en partant enseigner dans un pays du tiers-monde pendant un, deux ou trois ans, pour les aider là-bas, et ce serait la contribution du Canada non seulement lorsqu'il s'agit d'aider ces pays à dispenser l'éducation, mais aider également nos étudiants qui ont parfois du mal à trouver un emploi et sont pris avec des dettes après leurs études. Avez-vous une réaction à cela?

Le président: Quelqu'un veut-il répondre?

Mme Katherine McDonald: En fait, il existe un programme financé par l'ACDI et le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international qui encourage les ONG, avec des partenaires des pays en développement, à organiser des internats. Il y a donc des organisations cadres qui assurent la coordination. Je crois que la Société canadienne pour la santé internationale en est une.

Nous connaissons une interne, une jeune femme canadienne née et élevée au Mexique, mais qui est maintenant citoyenne canadienne, qui est allée travailler outre-mer pendant plusieurs mois avant de revenir travailler au Canada. Je pense que ce transfert d'expérience et de connaissance, surtout lorsqu'on travaille avec des jeunes, est incroyablement précieux, car cela leur permet de voyager et ils ont impressionnables. Cela vise donc des jeunes de moins de 30 ans.

M. Ken Epp: Vous appelez cela jeune et impressionnable?

• 1930

Mme Katherine McDonald: Eh bien, oui... mais c'est un excellent programme.

Le président: Madame Plewes.

Mme Betty Plewes: Bien que ce soit là une expérience très importante pour de nombreux jeunes Canadiens, et beaucoup d'entre nous qui travaillons dans le domaine international sommes passés par là, le principal problème dans les écoles primaires et secondaires de maints pays pauvres n'est pas une pénurie d'enseignants. Ils n'ont pas d'argent pour payer leurs enseignants, construire des écoles, fournir des manuels et élaborer des programmes. C'est pourquoi, en sus de sensibiliser les Canadiens à ces problèmes essentiels, nous disons qu'il faut un programme d'aide axé sur la fourniture de services fondamentaux aux populations.

Le président: Merci.

Si je puis me permettre un commentaire, nous organisons cette table ronde chaque année justement pour nous rappeler nos responsabilités et obligations internationales. Je dois dire que ces problèmes, que ce soit dans les réunions que les députés organisent ou lorsque nous sillonnons le pays, ne sont pas souvent évoqués.

Vous avez soulevé des questions très importantes. Je pense qu'en tant que pays industrialisé et aisé, nous avons l'obligation d'assumer nos responsabilités, particulièrement maintenant que nous avons un excédent budgétaire. Il ne fait pas de doute dans mon esprit que nous devons faire plus qu'à l'heure actuelle.

Cela dit, et je me trompe peut-être, il ne semble guère y avoir d'appétit chez le public pour une action dans ce domaine. Cela ne signifie pas que le comité ne s'y intéresse pas, tout au contraire. Je pense que nous devons effectivement pousser un peu dans ce sens. Mais pourquoi pensez-vous qu'il en est ainsi? Comment se fait-il que, partout où nous allons, pratiquement personne n'aborde ce sujet? C'est justement l'une des raisons pour lesquelles nous avons cette table ronde—afin qu'au moins quelqu'un aborde toute cette problématique.

M. Roy Culpeper: Pourrais-je répondre en premier? Je pense que Betty a mis le doigt sur l'ingrédient clé, à savoir le leadership politique et la volonté politique. Je pense que les députés comme vous avez un rôle à jouer pour mettre cette problématique sur le tapis et ouvrir un débat avec les Canadiens, au lieu de simplement attendre que l'initiative vienne d'en bas.

Si vous regardez les pays qui sont engagés, comme les pays scandinaves et les Pays-Bas, il y a beaucoup plus d'activisme de la part des députés, des ministres, etc. lorsqu'il s'agit de susciter l'engagement du public.

Pour parler franchement, j'ai été très déçu lorsque le premier ministre a déclaré en Afrique que ceci ne rapportait pas de votes. En fait, si vous fouillez un peu—et encore une fois les sondages le prouvent—les Canadiens sont très favorables à l'aide et au développement. Simplement, du moins au cours des dix dernières années, nous avons battu en retraite par rapport à nos responsabilités et prétendu que cela est une très faible priorité. Nous récoltons donc aujourd'hui ce que nous avons semé.

Le président: Monsieur Walker.

M. David Walker: À ce sujet, je pense que cela marche dans les deux sens. Ceux qui travaillent dans le développement international ont besoin de l'appui explicite des hommes politiques afin de sensibiliser davantage le public. Plus il y aura de rapports comme le vôtre qui contribueront à ce débat, et plus les choses seront faciles.

Lorsque nous parlons avec les dirigeants des sociétés canadiennes, ils se plaignent du faible nombre de Canadiens qui ont une expérience internationale. Lorsque des possibilités se présentent, ils hésitent à travailler dans des sociétés internationales, par manque de connaissances linguistiques, d'expérience personnelle ou d'expérience éducative. Plus nous aurons de Canadiens mobiles, et plus il nous sera facile de dominer certains marchés commerciaux—d'ouvrir des bureaux et travailler avec confiance.

Tout cela ne viendra pas tant que les gens ne verront pas de nouveau une présence du gouvernement fédéral dans ce domaine. Lorsque nous avons cet appui, le travail des gens autour de cette table s'en trouve d'autant facilité.

Le président: Monsieur Hatton.

M. Al Hatton: Je suis d'accord avec ces deux intervenants. Regardez ce qui se passe avec l'OMC. Il règne une inquiétude énorme concernant son impact. Il y a davantage de représentants d'ONG à Seattle que de chefs de gouvernement. Pensez-y. Comment cela se fait-il?

• 1935

Je sais que nos membres, qu'il s'agisse de la Société du cancer, le YMCA, Grands Frères ou Grandes Soeurs, s'internationalisent aussi, mais ils le font sans passer par le gouvernement parce qu'ils sont trop frustrés par des mécanismes qui ne les aident pas. Ils finissent donc par se débrouiller seuls. Ils ont des échanges. Ils étudient constamment l'impact des changements mondiaux sur les collectivités locales et leurs membres. Il y a énormément de choses en train. Franchement, je pense que le processus politique accuse du retard.

Lorsque vous vous adressez à la population, qui a des doléances locales, elle exprime celles-ci parce qu'elle pense que peut-être le processus politique ou le gouvernement peuvent faire quelque chose—peut-être. Mais les politiques ne se montrent guère disposées à oeuvrer à l'échelle mondiale, ils se trouvent donc frustrés sur tous les plans.

Le président: Mais, monsieur Hatton, ce n'est pas nécessairement quelque chose de négatif. Je pense...

M. Al Hatton: Non. Mais vous impliquez que le public ne s'intéresse pas. Ce n'est pas une question d'intérêt, simplement les gens voient ce qu'ils ont sous les yeux, et c'est de cela qu'ils parlent d'abord. Ensuite seulement on parle d'autre chose.

Le président: Non, je ne pense pas que ce soit une évaluation juste de ce que j'ai dit. J'ai dit que dans les conversations que nous avons à travers le pays, dans le dialogue national que nous tenons, le sujet ne revient pas souvent. C'est précisément la raison pour laquelle nous avons cette table ronde, afin d'accroître la visibilité de cette question. C'est une petite chose que nous pouvons faire.

Mais lorsque vous dites que les gens prennent les choses en main eux-mêmes, en dehors des mécanismes gouvernementaux, je ne trouve pas que cela soit une mauvaise chose, bien au contraire.

Je pense que la technologie me donnera raison à long terme. Les individus vont prendre leurs décisions sans même consulter le gouvernement. C'est cela la voie de l'avenir. À Seattle, vous voyez tous ces mouvements qui travaillent en dehors des paramètres gouvernementaux. Je pense qu'il y a là une leçon à tirer et que les hommes politiques vont apprendre très rapidement. Cela ne me paraît pas quelque chose de si négatif.

Quelqu'un d'autre souhaite-t-il intervenir?

Mme Betty Plewes: Je pense qu'il faut recadrer le débat. On ne peut plus engager le public dans un débat sur la question de savoir si le Canada devrait consacrer 0,7 p. 100 du PIB à l'aide. C'est un vieux problème, un vieux débat. Nous devrions tirer un trait là-dessus et poser plutôt la question de savoir comment nous voulons vivre dans ce monde. Les gens s'intéressent à l'environnement, à l'équité commerciale, aux droits de la personne et aux droits des femmes. Ces sujets suscitent un engagement énorme. Je pense que nous—les ONG, les politiciens—devons commencer à recentrer cette discussion sur la façon dont le Canada veut vivre au 21e siècle.

Sur un plan un peu plus concret, la raison pour laquelle il y a une discussion si vigoureuse dans les pays scandinaves est que l'on y investit énormément dans les programmes scolaires traitant des enjeux mondiaux. Cela est payant et se traduit par une bien meilleure qualité du débat public sur ces questions.

Le président: Merci.

Je vous remercie tous, au nom du comité. Cette table ronde est toujours très intéressante. Je trouve qu'elle porte le débat à un niveau différent. Soyez assurés que les points de vue exprimés ici ce soir seront reflétés dans le rapport de notre comité au ministre des Finances.

La séance est levée.