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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 26 mai 1998

• 0904

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je voudrais ouvrir la séance et souhaiter la bienvenue à tout le monde ici ce matin. Comme vous le savez, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le comité va commencer aujourd'hui l'étude des recommandations du Rapport du Comité technique de la fiscalité des entreprises.

• 0905

Nous avons le plaisir de recevoir ce matin Jack Mintz, président de ce comité, Wilfrid Lefebvre, qui en est membre, et John Sargent, qui en est le directeur exécutif. Nous allons, bien entendu, commencer par une introduction, que présentera peut-être M. Mintz, puis nous aurons une période de questions.

Bienvenue, monsieur Mintz.

M. Jack Mintz (président, Comité technique de la fiscalité des entreprises): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis très content d'avoir été invité à cette discussion sur le Rapport du Comité technique de la fiscalité des entreprises. Je suis accompagné d'un de mes collègues du comité, M. Wilfrid Lefebvre. Nous nous partagerons l'exposé.

C'est un long rapport qui porte sur un secteur très complexe de la fiscalité. Vous constaterez peut-être qu'un exposé de 20 ou 30 minutes suivi d'une période de questions d'une heure et demie ne suffit pas pour traiter de tous les sujets abordés dans le rapport. Je dois dire tout de suite que, si le Comité des finances souhaite que nous revenions plus tard pour répondre à d'autres questions, nous serons heureux de le faire.

Dans notre exposé d'aujourd'hui, nous souhaitons nous concentrer sur les principales déficiences de la structure de la fiscalité des entreprises et parler, de façon générale, des recommandations du comité. J'espère que vous avez le document que nous avons préparé à votre intention et qui existe en version anglaise et en version française.

Je vais maintenant donner la parole à mon collègue, qui parlera un peu plus longuement de la toile de fond des travaux de notre comité.

[Français]

M. Wilfrid Lefebvre (membre du Comité technique de la fiscalité des entreprises): Voici la toile de fond. Le comité a été mis sur pied en 1996. Notre mandat était d'examiner les impôts et les taxes portant sur les investissements et l'exploitation des entreprises. Nous avons donc examiné les impôts sur le revenu des sociétés, les taxes sur le capital, les taxes sur la masse salariale et les impôts sur le revenu des individus provenant des entreprises, essentiellement les revenus de dividendes ou les gains en capital.

Les objectifs fixés au comité étaient de promouvoir la création d'emplois et la croissance économique dans une économie ouverte, de faciliter l'observation par les contribuables et l'administration par Revenu Canada, et de renforcer l'équité du régime fiscal en veillant à ce que toutes les entreprises participent au financement de la prestation des services gouvernementaux.

Évidemment, certaines limites étaient imposées au comité. J'en mentionne quelques-unes. Premièrement, les recommandations devaient arriver à un résultat neutre sur le plan des recettes fiscales; c'est-à-dire que les entrées fiscales devaient demeurer essentiellement les mêmes, provenant du secteur des entreprises. Évidemment, il fallait tenir compte de la dimension fédérale-provinciale, car les provinces jouent un rôle extrêmement important dans la taxation. Nous n'avons pas été appelés à étudier le Régime de pensions du Canada ou le Régime des rentes du Québec, non plus que le régime de la TPS ou de la TVQ, qui faisaient l'objet d'autres études. Nous n'avons pas non plus été appelés à nous prononcer sur l'équilibre qui doit exister entre les impôts des individus, les impôts personnels, et les impôts sur les sociétés. Finalement, le comité n'était pas une commission publique, de sorte qu'aucune audience publique n'a eu lieu. Ce débat public devait suivre le dépôt du rapport, et c'est ce qui se fait à l'heure actuelle.

Certaines des constatations que nous avons faites et certains des facteurs qui ont eu une influence marquante sur nos recommandations sont les suivants.

Premièrement, les sociétés paient des impôts et des taxes importants au gouvernement. À la page 4 des documents qui ont été déposés, on constate que les entreprises paient 85 milliards de dollars d'impôt, ce qui représente 30 p. 100 du total des impôts prélevés. Ce sont les données de 1995.

Les taxes sur les bénéfices, c'est-à-dire les impôts sur les sociétés et les retenues d'impôt, ne représentent que 25 p. 100 du total des sommes perçues auprès des entreprises. Ces taxes et impôts, ultimement, sont supportés par les individus, c'est-à-dire les employés, les consommateurs, les fournisseurs et les propriétaires des entreprises, ce qui, évidemment, soulève toute la question suivante. Pourquoi imposer les sociétés? Quelles sont les justifications pour imposer les sociétés?

Pour le secteur des services, les données quant au nombre de travailleurs par industrie sont à la page 6 du texte. Ce secteur comprend le transport, les communications et les services publics. Tout le secteur qui est à droite, à côté du transport, emploie près des deux tiers des travailleurs. De plus, c'est dans le secteur des services que la presque totalité des gains d'emplois ont été effectués au cours de la période de 1986 à 1995. Ces secteurs de l'activité économique jouent donc un rôle essentiel dans le cadre d'une économie basée sur le savoir.

• 0910

Ces secteurs de services ne sont plus, sur une base relative, à l'abri de la concurrence internationale. Les secteurs des services, particulièrement l'industrie du transport, le commerce en gros et les entreprises de services font face à une concurrence sérieuse des concurrents internationaux, ce qui a d'importantes répercussions sur la création d'emplois dans ces secteurs.

Dernière constatation: le Canada n'est plus seulement un importateur de capital étranger. Bien que l'investissement direct étranger au Canada demeure important, représentant 20 p. 100 des investissements domestiques, notre économie est telle que les exportations de capital sont presque aussi importantes que les importations.

[Traduction]

M. Jack Mintz: Permettez-moi de continuer en vous disant ce que nous avons élaboré à partir de cette discussion et de cette analyse de la situation de l'économie canadienne.

Nous étions particulièrement préoccupés par les déficiences de la structure actuelle de la fiscalité des entreprises. Elles peuvent empêcher le Canada de créer des emplois et de fournir de meilleurs revenus aux Canadiens au moment d'entrer dans le XXIe siècle. Je tiens à souligner en particulier trois déficiences qui sont mentionnées à la page 9 du document, mais je ferai référence à certaines pages qui suivent celle-ci à propos des graphiques qui y figurent.

La toute première déficience est le fait que les taux d'imposition des entreprises sont peu concurrentiels au Canada. Ces taux sont nettement plus élevés que les normes internationales, comme vous pouvez le voir au graphique de la page 10. Le taux général fédéral-provincial du Canada est de 43 p. 100, soit, en moyenne, quatre points de plus que les taux combinés du gouvernement fédéral et des États aux États-Unis et beaucoup plus que dans de nombreux autres pays, comme le Royaume-Uni où ce chiffre est actuellement de 30 p. 100, le Mexique, où il est de 34 p. 100, et, même si ce pays ne figure pas dans le graphique, la Suède où il est de 28 p. 100.

Quand un pays a, comme le nôtre, des taux d'imposition élevés sur le revenu des entreprises, cela ne nuit pas seulement à la création d'emplois, mais également aux recettes gouvernementales. Les entreprises transfèrent leurs revenus et leurs coûts comme les frais d'intérêt des pays où ils sont fortement imposés vers ceux où l'impôt est plus faible. Nous constatons que les sociétés multinationales canadiennes et étrangères ont fortement augmenté leurs frais d'intérêt pendant la période 1986-1994, ce qui est partiellement dû au fait que le Canada, qui imposait moins lourdement les entreprises que de nombreux autres pays comme les États-Unis au début des années 80, a maintenant des taux d'imposition supérieurs à de nombreux autres pays.

La deuxième déficience clé que nous avons constatée dans la structure de la fiscalité des entreprises est le fait que celles-ci ne sont pas traitées de façon neutre. Le fisc traite également inéquitablement les entreprises en imposant beaucoup plus lourdement certaines activités que d'autres. L'impôt sur le revenu, les impôts sur le capital et les taxes de vente sur l'équipement et les intrants sont prélevés sur les services, la construction et la foresterie à des taux beaucoup plus élevés que sur d'autres industries. Les taxes et les contributions sur la masse salariale, compte non tenu des prestations reçues des programmes publics qu'elles financent, ont tendance à frapper beaucoup plus lourdement les services. En combinant tous ces impacts, on constate, à la page 11 du document, que les services, tout particulièrement le transport, les communications, les services publics et le commerce de gros, paient plus d'impôts en proportion de leurs coûts que d'autres industries. Le coût économique et le coût d'observation des impôts non neutres sont très importants et réduisent la production économique canadienne d'environ 25 milliards de dollars, soit 2,5 p. 100 du PIB.

En rendant la fiscalité plus neutre afin que les entreprises choisissent des activités économiquement justifiées plutôt que celles qui réduisent leurs impôts, nous pouvons améliorer les perspectives en matière de création d'emplois et de croissance économique. En outre, non seulement nous avons des impôts qui ne sont pas neutres et qui sont particulièrement défavorables aux industries de service, mais nous les imposons également plus lourdement que d'autres pays, en particulier les États-Unis—comme vous pouvez le voir à la page 13. Ces taux effectifs d'imposition élevés rendent les investissements dans ces industries moins profitables au Canada que dans d'autres pays, ce qui nuit à notre capacité de créer des emplois au Canada dans l'ensemble de l'économie, et non pas seulement dans ces secteurs.

La troisième déficience clé de la structure de la fiscalité des entreprises au Canada concerne le fait qu'on accorde trop d'importance aux impôts inefficaces non liés aux bénéfices. Relativement à la valeur de l'activité économique, les entreprises sont aujourd'hui plus fortement imposées qu'en 1950. La raison principale en est l'augmentation des impôts non liés aux bénéfices tels que les impôts sur le revenu ou les charges sociales et les taxes foncières, en particulier aux niveaux provincial et local.

• 0915

Vous pouvez le voir à la page 14 du document, le graphique de gauche indique la charge fiscale totale des entreprises par rapport à la valeur de leur contribution économique à l'économie du Canada. Vous pouvez constater que le montant total des impôts des entreprises est passé de 14 p. 100 de la valeur de leur activité économique en 1950 à près de 18 p. 100 aujourd'hui. Cette augmentation est en grande partie due à l'augmentation des impôts non liés aux bénéfices, c'est-à-dire ceux que j'ai mentionnés—les impôts sur le capital et les charges sociales ainsi que les taxes foncières.

Vous pouvez également constater que les impôts provinciaux et locaux des entreprises ont considérablement augmenté par rapport à l'activité de celles-ci. En 1950, leur montant correspondait à environ 5 p. 100 de la valeur de l'activité économique, alors qu'il est maintenant proche de 11 p. 100. Il y a donc eu une très forte augmentation des impôts des entreprises aux niveaux provincial et local.

Les impôts non liés aux bénéfices posent des problèmes aux entreprises lorsqu'elles éprouvent des difficultés financières—facteur important vu le caractère cyclique de l'économie du Canada. Chose plus importante encore, ces impôts peuvent être très peu rentables s'ils n'ont qu'un faible rapport avec le coût de l'utilisation des services publics qu'ils sont souvent censés financer.

À partir de ces trois déficiences clés, notre comité a présenté ce que nous appellerions les axes fondamentaux de nos recommandations. Ils sont énoncés aux pages 15 et 16 du document.

Pour remédier à ces importantes déficiences de la structure fiscale canadienne et pour encourager la création d'emplois et la croissance économique, nous faisons un certain nombre de recommandations visant à créer une structure fiscale plus neutre, assortie de taux d'imposition concurrentiels à l'échelle internationale. S'il fallait identifier les deux principes sur lesquels reposent nos recommandations, il s'agit de la neutralité et d'essayer d'améliorer notre régime du point de vue international afin que nous puissions attirer des emplois et créer de la croissance économique au Canada. C'est le résultat que donneraient des taux d'imposition concurrentiels à l'échelle internationale. Voilà les deux principes clés de nos recommandations.

Nos recommandations permettront d'avoir une structure fiscale bien meilleure pour les entreprises, puisqu'elles encourageront celles-ci à gagner un revenu au Canada sans occasionner de pertes de recettes pour les pouvoirs publics.

Ces quatre axes fondamentaux peuvent être résumés comme suit.

Premièrement, nous rendrions la structure de la fiscalité des entreprises plus neutre en élargissant l'assiette fiscale et en réduisant les taux d'imposition, ce qui rendra cette structure plus efficace et plus équitable.

Nous le ferions en réduisant le taux général fédéral- provincial d'imposition des entreprises de 43 p. 100 à 33 p. 100 en moyenne pour toutes les grandes entreprises. C'est-à-dire que nous recommandons un taux fédéral de 20 p. 100, l'élimination de la surtaxe sur le revenu des entreprises et une réduction d'un point du taux provincial moyen. Les petites entreprises bénéficieraient également d'une réduction pouvant atteindre jusqu'à trois points selon leur nombre d'employés par rapport au taux d'imposition combiné fédéral-provincial actuel.

En même temps que ces changements, diverses mesures seraient prises pour élargir l'assiette de l'impôt sur le revenu des entreprises afin de rendre le régime fiscal plus neutre. Elles sont énumérées à la page 17, et nous y reviendrons plus tard. Grâce à elles, la mesure du revenu effectuée aux fins de l'impôt refléterait mieux le revenu économique réel de la société. Ces mesures permettraient également de mieux protéger l'assiette fiscale du Canada contre les pressions internationales qui entraînent l'érosion de notre assiette fiscale, sans pour autant nuire à la compétitivité des entreprises canadiennes sur les marchés internationaux.

Le deuxième axe fondamental de notre proposition consisterait à faire en sorte que les impôts et taxes fédéraux non liés aux bénéfices se conforment davantage aux principes de l'utilisateur- payeur. Les prélèvements imposés aux entreprises correspondraient plus étroitement aux coûts qu'elles imposent à la société pour l'utilisation des ressources ou des services publics. Nous recommandons que le montant des primes d'assurance-emploi soit établi en fonction du nombre d'employés mis à pied par une entreprise qui se sert de ce régime. Nous recommandons également que la taxe fédérale d'accise sur l'essence soit intégrée dans des écotaxes appropriées ayant une assiette plus large.

Troisièmement, nous recommandons également un certain nombre de mesures qui amélioreraient l'observation du régime fiscal et incluraient l'harmonisation des dispositions législatives, une meilleure rédaction de la loi et des notes techniques et l'utilisation par Revenu Canada de pratiques de type commercial pour le recouvrement des impôts exigibles et le règlement des conflits.

• 0920

Quatrièmement, nous recommandons des mesures qui réduiraient les interactions négatives entre les politiques fiscales fédérales et provinciales concernant les entreprises, ce qui se ferait avant tout en améliorant l'harmonisation du régime fiscal applicable aux sociétés ou au capital en uniformisant l'assiette fiscale dans l'ensemble du pays.

Deuxièmement, nous recommanderions que le gouvernement fédéral et les provinces fournissent une aide à l'industrie sous forme de crédits d'impôt et que l'assiette fiscale de l'impôt sur les sociétés reste neutre en ce qui concerne la détermination du montant d'impôt provincial à payer sur les bénéfices des sociétés. Ceci contribuerait fortement à simplifier le régime pour les entreprises.

Troisièmement, nous rendrions les impôts sur le capital non déductibles pour que le gouvernement ne soit pas incité à y avoir recours. Les impôts sur le capital ne serviraient plus à remplacer l'impôt sur les bénéfices des sociétés, qui n'est pas déductible, le fardeau représenté par ces impôts étant transféré vers le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux.

Nos propositions ne modifient pas les recettes fiscales du gouvernement fédéral et des provinces. Elles constituent un ensemble très équilibré qui n'a pas de répercussion importante sur une industrie ou une région en particulier, une fois qu'on additionne en quelque sorte tous les chiffres.

Notre comité craignait que, si le montant total des recettes fiscales ne changeait pas, ces propositions n'aient des retombées quelque peu fâcheuses sur certaines industries, en particulier l'industrie manufacturière et le secteur minier. Nous avons donc dit que le gouvernement devrait réexaminer le niveau d'imposition des entreprises.

Notre comité est d'avis que son rapport encouragera la création d'emplois et la croissance économique. Nos propositions d'amélioration du régime fiscal des entreprises sont conformes aux importantes politiques économiques adoptées au cours des dernières années.

Nous avons essayé de mieux gouverner en améliorant les programmes de dépenses du gouvernement fédéral. Maintenant, il est temps d'améliorer également la structure des recettes.

En outre, nous encourageons l'acquisition de compétences dans notre économie axée sur la connaissance, mais il est important que des emplois soient créés au Canada pour que nos travailleurs qualifiés trouvent du travail ici plutôt qu'ailleurs. Nos recommandations relatives au régime fiscal des entreprises constituent une partie importante d'un programme global d'amélioration de la création d'emplois et de la croissance des revenus au Canada.

[Français]

M. Wilfrid Lefebvre: L'effet des recommandations sur les recettes fédérales et provinciales est illustré à la page 17 des documents qui vous ont été remis. C'est le dernier document. La réduction des taux d'imposition des bénéfices des sociétés représenterait, au niveau fédéral, un coût de 2,5 milliards de dollars. Parlons de certaines des mesures pour élargir la base de l'assiette fiscale quant aux bénéfices d'exploitation à l'étranger.

Essentiellement, le point de départ de la discussion au sein du comité a été le fameux double dipping, quand les dépenses d'intérêt pouvaient être déductibles au Canada. La recommandation est que les frais d'intérêts des sociétés résidentes sur les emprunts contractés pour investir dans des sociétés étrangères affiliées soient maintenant non déductibles et que ces frais d'intérêts soient ajoutés au coût des actions, ou qu'ils soient déductibles mais seulement dans la mesure où des surplus imposables seraient reçus, ce qui représente une estimation de 400 millions de dollars au niveau fédéral.

On recommande la non-déductibilité des impôts sur le capital, puisque les impôts sur le capital représentent essentiellement une forme d'impôt pour les sociétés plutôt qu'une forme d'impôt sur la masse salariale pour financer les avantages sociaux. Cela représenterait un apport de 375 millions de dollars.

On recommande également un resserrement des règles dans le domaine de la recherche et du développement. Actuellement, le régime canadien est celui qui est le plus bénéfique au monde en ce qui a trait aux avantages fiscaux pour la recherche et le développement. Les recommandations feraient en sorte que ce régime serait maintenu. On serait encore le pays ayant les taux de crédit les plus favorables, mais il y aurait un resserrement de certaines des mesures. Cela représentait 200 millions de dollars.

Finalement, on propose un impôt sur les distributions de sociétés. Comme vous le savez, on a un principe d'intégration qui fait en sorte que les gens qui reçoivent des dividendes ont un crédit d'impôt. Le principe qui sous-tend le crédit d'impôt est que la corporation qui verse les dividendes a déjà payé des impôts. Or, dans bien des cas, ce n'est pas la situation. La proposition est de faire en sorte qu'il y ait un impôt qui soit supporté, premièrement, par les corporations, que, lorsque les gens reçoivent les dividendes, ils obtiennent leur crédit et que ces impôts soient crédités à l'encontre des impôts payés par la corporation. L'ensemble de ces mesures aurait un résultat neutre sur le plan des recettes et des dépenses fiscales.

[Traduction]

M. Jack Mintz: Notre exposé est maintenant terminé.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Mintz, monsieur Lefebvre et monsieur Sargent.

Nous allons maintenant passer à la période de questions, en commençant par M. Solberg.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président, et merci au Comité technique pour son rapport et pour sa comparution devant nous aujourd'hui.

• 0925

Ma première question porte sur les impôts non liés aux bénéfices, les charges sociales et les choses de ce genre. Je me demande dans quelle mesure ces sortes d'impôt empêchent l'économie de sortir d'une récession.

Je pense même maintenant à la Colombie-Britannique, où l'économie a chuté fortement. Mais puisqu'il y a ces impôts qui ne sont pas liés aux bénéfices, c'est un domaine où une société, quelle que soit sa rentabilité, continue de payer ces impôts élevés. Dans quelle mesure cela complique-t-il le redressement non seulement de ces sociétés, mais également de l'économie en général?

M. Jack Mintz: Je pense qu'il est important de faire une distinction entre deux types d'impôts non liés aux bénéfices. Certains correspondent à un montant de base payé par une entreprise ou un contribuable quelconque pour utiliser des services publics. Les économistes disent souvent que des taxes ou impôts de ce genre sont relativement efficaces, car ils permettent mieux d'établir une correspondance entre les avantages qu'un contribuable retire de l'utilisation des ressources ou des services publics et le coût qu'entraîne leur utilisation.

Dans ce cas, que l'économie se trouve dans une phase bonne ou mauvaise du cycle, ce n'est pas un mauvais impôt. C'est exactement la même chose que quand une entreprise achète des crayons à un fournisseur. On ne s'attend pas à ce que celui-ci fasse payer un prix différent pour ses crayons en fonction de la phase du cycle dans laquelle on se trouve, sauf pour ce qui est des effets de la situation de l'offre et de la demande.

L'autre type d'impôts non liés aux bénéfices est celui qui est indépendant des avantages reçus—par exemple, les impôts sur le capital. Ceux-ci créent des problèmes pour les entreprises dans la phase descendante du cycle, parce qu'elle doit les payer, qu'elle ait ou non des recettes à ce moment-là, ce qui accroît encore ses difficultés financières.

C'est pour cette raison que nous avons recommandé d'adopter la non-déductibilité. Ce qui s'est passé est qu'au cours des dix dernières années, les impôts sur le capital ont fortement augmenté par rapport aux autres types d'impôts. Ils ont augmenté plus rapidement. C'est parce que les gouvernements sont incités à prélever de tels impôts.

Ils ne sont pas seulement déductibles du point de vue du gouvernement fédéral, mais, en vertu de la formule de répartition des bénéfices des sociétés, quand une province prélève un impôt sur le capital, elle sait qu'une partie importante de cet impôt sera reprise par d'autres provinces du fait que cet impôt sur le capital est déductible de l'impôt sur le revenu qu'elles reçoivent en vertu de cette règle de répartition.

Voilà pourquoi nous recommandons que cet impôt ne soit pas déductible. Nous avons dit qu'avec une partie de l'argent que les provinces recevront dans le cadre du partage des revenus, elles devraient, en fait, pouvoir réduire les impôts sur le capital en profitant des recettes, de l'assiette élargie et des augmentations des recettes qu'elles vont recevoir. Avec nos propositions, les provinces pourront, en fait, se permettre de réduire quelque peu leurs impôts sur le capital. Nous pensons donc que c'est une bonne initiative à long terme.

M. Monte Solberg: Vous avez parlé de l'assurance-emploi et vous avez dit qu'on devrait tenir compte des antécédents des entreprises. Avez-vous approfondi cette question? Avez-vous parlé de la nécessité de créer peut-être un compte à part pour l'assurance-emploi afin que cet argent ne soit pas versé dans les recettes générales ou quelque chose de ce genre? Bien entendu, quand c'est le cas, les taux restent à un niveau artificiellement élevé. Avez-vous examiné cela de façon plus ou moins détaillée?

M. Jack Mintz: Premièrement, permettez-moi de dire que le mandat de notre comité n'était pas d'évaluer le programme d'assurance-emploi pour ce qui est de l'ensemble de ces prestations. On nous a demandé d'examiner les cotisations versées par les employeurs, ce qui est un élément de la question.

Le point de vue adopté dans le rapport est que toute cotisation qui, en fin de compte, est supérieure aux prestations reçues constituerait, en fin de compte, d'une certaine façon, un impôt implicite. En d'autres termes, en vertu du principe de l'utilisateur-payeur, quand les prestations correspondent aux cotisations versées par les entreprises, cela ne constitue pas un impôt en tant que tel. C'est, en réalité, plutôt une contribution au paiement des prestations fournies par le programme.

Nous avons dit qu'à notre avis, le moment est maintenant idéal pour commencer à tenir compte des antécédents des entreprises, parce que le gouvernement abaisse actuellement les cotisations à l'assurance-emploi et la loi actuelle a pour objet de parvenir à un équilibrage des paiements. On peut introduire cela pendant qu'on accorde des réductions sélectives d'impôt, et la sélection serait basée sur les antécédents des entreprises en matière de mises à pied. Celles qui mettent à pied plus d'employés et créent plus de chômage se retrouveraient avec une réduction de taux inférieure à celle accordée aux entreprises qui créent moins de chômage.

• 0930

M. Monte Solberg: Mettons de côté un instant le fait que vos recommandations ne modifient pas le montant total des recettes; avez-vous essayé de calculer à combien se monteraient les dépenses fiscales annuelles totales du gouvernement si vos recommandations étaient mises en oeuvre et si les impôts sur les sociétés étaient abaissés comme vous pensez qu'ils devraient l'être?

M. Jack Mintz: Bien, nous avons là un ensemble équilibré qui n'inclut aucune réduction des versements réels d'impôt sur les bénéfices des entreprises, mais il y a une réduction du taux d'imposition.

M. Monte Solberg: Non, mais...

M. Jack Mintz: Je ne comprends peut-être pas votre question correctement.

M. Monte Solberg: Eh bien, vous avez dit qu'il fallait que nous examinions les niveaux globaux d'imposition, un point c'est tout. Je conviens qu'ils sont beaucoup trop élevés, ils tuent l'emploi, et ce genre de chose. Et vous avez parlé d'abaisser l'impôt sur les entreprises à 33 p. 100.

M. Jack Mintz: Le taux combiné fédéral-provincial.

M. Monte Solberg: C'est exact. Quelles répercussions cela a-t- il sur l'ensemble des rentrées fiscales?

M. Jack Mintz: Oh, bon, nous estimons que le gouvernement fédéral et les provinces subiraient une perte de revenu d'environ 3 milliards de dollars, compte tenu d'une certaine expansion de l'assiette du fait que le Canada réduirait son taux d'imposition des sociétés à un niveau inférieur ou égal à celui de nos concurrents internationaux.

M. Monte Solberg: Et, de toute évidence, si nous faisions cela, cela nous rendrait réellement plus compétitifs. Ce que je veux dire est que ce n'est pas un énorme sacrifice à faire pour rendre le régime beaucoup plus concurrentiel.

M. Jack Mintz: Eh bien, notre mandat n'était pas d'évaluer la situation financière du gouvernement fédéral et de l'équilibrer. Mais, permettez-moi de dire que les propositions d'élargissement de l'assiette sont également importantes, parce que cela revient à notre thème de l'absence d'effet sur le montant total des recettes et sur l'importance de ce fait.

M. Monte Solberg: Oui.

M. Jack Mintz: Je ne voudrais pas qu'on néglige la question qui est en jeu dans ces propositions.

M. Monte Solberg: Non, je le comprends bien. Vous avez très bien expliqué pourquoi c'est important.

J'ai une dernière question, et si vous me le permettez, je voudrais autoriser mon collègue à en poser une ou deux.

Le moment est sans doute mal venu pour vous le demander, mais beaucoup de gens diraient que les sociétés ne devraient pas du tout payer d'impôts, parce que tous ces impôts sont finalement répercutés sur les consommateurs ou les travailleurs sous forme de réduction des salaires ou des dividendes et de choses de ce genre. Que répondez-vous à cela? Pourquoi doivent-elles payer un impôt quelconque?

M. Jack Mintz: Ce point de vue a parfois été exprimé, mais comme nous l'avons soigneusement expliqué dans le deuxième chapitre du rapport, il y a trois raisons très importantes pour lesquelles nous imposons les entreprises au Canada.

L'une d'entre elles est que l'imposition du revenu des entreprises va de pair avec le régime d'imposition du revenu des particuliers et, comme nous ne pouvons pas imposer les gains en capital accumulés—c'est-à-dire le changement de la valeur marchande des actifs d'une période à la suivante—les particuliers pourraient éviter de payer des impôts sur le revenu en laissant ce revenu entre les mains de la société. Disons que l'intérêt serait versé au compte d'une société plutôt qu'à une personne individuelle, et celle-ci pourrait éviter de payer un impôt sur le revenu pour cet intérêt.

C'est une raison pour laquelle nous imposons les sociétés. C'est cohérent. C'est un peu comme une retenue d'impôt sur le revenu aux fins de l'impôt sur le revenu personnel. C'est la raison pour laquelle nous avons l'intégration de l'impôt sur les bénéfices des entreprises et de l'impôt sur le revenu personnel, cela reflète la règle de retenue de l'impôt sur les bénéfices des entreprises.

Deuxièmement, nous imposons les entreprises au Canada, comme dans beaucoup d'autres pays où des intérêts étrangers sont solidement implantés, parce que les impôts sur les bénéfices des entreprises sont crédités au regard des impôts exigés par les gouvernements étrangers et, si on les élimine, on perd quelque chose alors qu'en fait, on transfère simplement un revenu du trésor canadien au trésor américain. Cette situation tend à justifier qu'on n'élimine pas l'impôt sur les bénéfices des entreprises, mais qu'on essaie de le fixer à des taux conformes à ceux des autres pays.

Et, troisièmement, nous avons invoqué le fait que les sociétés bénéficient de nombreux avantages et programmes publics. Nous n'exigeons pas toujours des droits d'utilisation, mais nous avons plusieurs impôts ou taxes qui correspondent à l'utilisation de ces programmes, comme les taxes sur l'essence, les taxes foncières, etc. Mais lorsque les droits prélevés ne sont pas appropriés, le montant de taxes ou d'impôts à payer peut être insuffisant, et il faut alors utiliser aussi d'autres impôts pour faire en sorte que les sociétés paient un certain montant en impôts en contrepartie de ces avantages ou prestations.

• 0935

M. Monte Solberg: Merci beaucoup.

Le président: Monsieur Ritz.

M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Réf.): Merci, monsieur le président.

Merci, messieurs, pour votre exposé de ce matin.

Pour continuer sur le sujet dont parlait mon collègue, vous parlez d'une perte nette de 3 milliards de dollars de recettes fiscales à tous les niveaux.

M. Jack Mintz: Mais seulement avec la réduction du taux.

M. Gerry Ritz: C'est exact.

M. Jack Mintz: Pas en ce qui concerne l'ensemble des mesures.

M. Gerry Ritz: D'accord.

M. Jack Mintz: Il n'y a aucune perte.

M. Gerry Ritz: D'accord, parce qu'à la page 12, vous parlez d'une perte de production de 2 p. 100 par année, de 20 milliards de dollars.

M. Jack Mintz: C'est si le système n'est pas neutre.

M. Gerry Ritz: En effet. D'accord.

Nous avons également une économie parallèle qui, d'après certains, représente un volume d'activité de 30 milliards de dollars. En tenez-vous également compte?

M. Jack Mintz: Non.

M. Gerry Ritz: Non. Quand vous parlez ainsi des recettes, avec un système plus neutre, plus équitable, etc., il n'y là aucun chiffre qui inclut l'économie parallèle?

M. Jack Mintz: Un des documents qui vont être publiés présentera une enquête sur les estimations relatives à l'économie parallèle. Ces estimations varient considérablement d'une étude à l'autre et vont de 3 ou 4 p. 100 à 20 p. 100 du PIB, je crois.

Essayer d'estimer l'étendue de l'économie parallèle pose un certain nombre de problèmes méthodologiques, et je ne veux certainement pas les passer en revue maintenant, mais nous n'avons pas examiné l'impact que pourraient avoir les réductions de taux en intégrant l'économie parallèle à l'économie officielle. Les estimations ne sont pas prises en compte dans nos chiffres.

M. Gerry Ritz: D'accord. Il y aura donc également un effet positif à cet égard, il devrait y en avoir un.

M. Jack Mintz: C'est possible, mais nous n'en connaissons pas l'ampleur potentielle.

M. Gerry Ritz: D'accord. C'est très bien.

J'ai une autre question brève. Combien de temps pensez-vous qu'il peut falloir pour corriger ces disparités? En combien de temps pouvons-nous passer à ce système équitable d'imposition du revenu dont vous parlez?

M. Jack Mintz: Eh bien, certaines choses pourraient se faire relativement vite, et d'autres prendraient un peu de temps à élaborer.

Comme nous avons essayé de l'exposer très clairement dans notre discussion, nous avons fondamentalement dit au ministre des Finances que s'il voulait aller de l'avant, il faudrait qu'il amène les provinces à collaborer avec lui au lieu de s'opposer à lui. Avec nos propositions, si on élargit, disons, l'assiette fiscale, si les provinces ne modifient pas leur taux d'imposition, elles obtiendront, en fait, des recettes plus importantes, et on se retrouvera, en fin de compte, avec une imposition plus lourde des entreprises. Nous sommes donc fermement convaincus qu'il faut que le gouvernement fédéral collabore avec les provinces, ce qui prendra un certain temps, parce qu'il y a des discussions et des débats.

Il est également très important de prendre le temps de consulter la population canadienne au sujet de ce rapport. Les gens devraient avoir la possibilité d'en discuter et de voir ce que nous voulons en faire. Et, bien entendu, cela prendra aussi un certain temps.

M. Gerry Ritz: Bon, c'est tout à fait le moment de le faire.

Quand vous parlez d'une collaboration avec les provinces, considérez-vous cette nouvelle agence nationale de perception du gouvernement fédéral comme une aide ou un obstacle?

M. Jack Mintz: Oh, je pense que toute chose qui suscitera de meilleures discussions entre le gouvernement fédéral et les provinces peut être un développement positif. Si les provinces ont l'impression qu'elles peuvent être sûres que cette nouvelle agence leur donnera de nouvelles possibilités de collaborer avec le gouvernement fédéral, ce serait une chose très positive.

M. Gerry Ritz: D'accord. Merci.

Le président: Monsieur Loubier.

M. Wilfrid Lefebvre: Je pourrais peut-être ajouter juste un commentaire à votre question.

Plusieurs de nos recommandations nécessiteront de longues périodes de transition, parce que des concessions ont déjà été mises en oeuvre, par exemple dans le secteur des ressources. Certaines de ces recommandations nécessiteront, de toute évidence, une période de transition assez longue, et d'autres, non.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Messieurs Mintz, Lefebvre et Sargent, vous voyez ici l'essentiel de la Loi de l'impôt fédérale depuis 1917. En 1948, l'essentiel de la Loi de l'impôt sur le revenu n'était pas très volumineux. De 1970 à 1972, la loi ressemblait à ceci. De 1980 à 1983 se sont ajoutées d'autres dispositions fiscales et voici ce qu'on a ajouté au niveau de la fiscalité récemment, en 1987 et en 1998.

En lisant votre rapport, je me suis posé une question. Pour mieux l'analyser, j'ai fait sortir l'essentiel de la Loi de l'impôt depuis 1917 et je me suis aperçu que les recommandations de votre rapport ne réduiraient pas véritablement la complexité de la fiscalité, ni du point de vue des entreprises ni de celui des particuliers.

• 0940

De toute façon, votre mandat ne consistait pas à examiner le côté des particuliers. Votre mandat principal était cependant de réduire la complexité de la fiscalité et de faire en sorte que l'observation en soit facilitée.

Je vous pose la question parce que je me la suis posée. En quoi votre volumineux rapport va-t-il réduire le volumineux volume de la Loi de l'impôt sur le revenu en ce qui concerne les entreprises? C'est ma première question et j'en aurai d'autres.

M. Wilfrid Lefebvre: Vous avez parfaitement raison de dire que depuis 1917, nos lois fiscales ont pris beaucoup d'ampleur. L'ampleur de la loi fiscale vient notamment du fait que les transactions commerciales sont devenues de plus en plus complexes. Le monde est devenu de plus en plus complexe, et l'approche des tribunaux a toujours été de vouloir des lois fiscales qui soient relativement certaines quant aux résultats, d'où la nécessité d'avoir ce genre de loi.

On pourrait rendre la loi fiscale fort simple. Par exemple, à l'article 80, on a le régime de la remise de dettes, qui a été modifié à plusieurs reprises, comme vous l'avez constaté, et qui couvre maintenant à peu près 16 pages. On pourrait rendre cela tout à fait simple en disant que maintenant, toute remise de dette est acompte revenu et est absente. Ce serait très simple. Mais cela enlèverait tous les bénéfices qui sont rattachés à la complexité du système, qui fait que toutes les remises de dettes ne sont pas acomptes revenus. Cela dépend des circonstances et des situations. On essaie de tout couvrir.

M. Yvan Loubier: Monsieur Lefebvre, votre premier mandat était la simplification. Trouvez-vous normal que quelque 80 p. 100 des dispositions fiscales, à l'heure actuelle, touchent les entreprises alors que ces entreprises sont à peine responsables de 20 ou 25 p. 100 des rentrées fiscales globales du gouvernement fédéral? Il y a une disproportion entre la complexité des mesures qui s'appliquent à elles et les rentrées fiscales dont elles sont responsables. Les fiscalistes qui ont à travailler tous les jours avec la loi fiscale fédérale trouvent que cela n'a plus de bon sens et que c'est loin d'être simplifié. Au contraire, à tous les ans, on fait du top loading sur les anciennes lois, en particulier sur ce qui est ressorti du rapport Carter et de la réforme du début des années 1980. On ne fait pas véritablement de ménage là-dedans, et ce n'est pas normal.

M. Wilfrid Lefebvre: Plusieurs des recommandations qu'on formule vont dans le sens d'une simplification dans la mesure où on dit qu'on veut un élargissement de l'assiette fiscale. On veut un régime plus neutre, de sorte que toutes les entreprises seraient imposées de la même façon. Donc, il n'y a pas de préférence vis-à-vis de l'une ou de l'autre. La réduction des taux devrait amener une simplification du régime.

M. Yvan Loubier: Encore là, monsieur Lefebvre, je regardais votre proposition principale, celle qui traite de l'élargissement. Vous parlez d'élargissement en rapport avec les impôts provinciaux. L'essentiel de ce que vous proposez comme réforme, à part une idée intéressante que je vais souligner tout à l'heure, c'est que les provinces se plient aux propositions fédérales de façon à ce que l'assiette fiscale supportée par les entreprises soit réduite.

Vous ne demandez pas au gouvernement fédéral de faire un très gros ménage, sauf au niveau des taux d'amortissement, ce que je trouve fort intéressant comme idée. On avait d'ailleurs soulevé, il y a deux ans, le fait qu'il y avait un écart considérable entre les taux d'amortissement comptable et l'amortissement réel, économique. Mais à part cela, l'essentiel, c'est aux provinces que vous demandez de le faire. Vous leur demandez d'élargir leur base fiscale, mais de réduire leur impôt sur les profits. L'impôt fédéral comme tel, ses dispositions... En tout cas, c'est ma déception par rapport à votre rapport.

J'ai eu de bonnes surprises, entre autres pour le taux d'amortissement, mais au niveau du ménage à faire dans la fiscalité fédérale, je trouve que l'effort n'a pas été fait. Après un an et demi, je m'attendais à quelque chose de plus substantiel.

[Traduction]

M. Jack Mintz: Je voudrais dire deux choses à propos de ce que vous avez dit, qui me paraît très important.

Avant tout, je pense qu'il ne faut pas oublier que, dans l'économie industrialisée d'aujourd'hui, avec l'internationalisation actuelle des activités des entreprises, les relations d'affaires sont beaucoup plus complexes qu'elles ne l'étaient il y a de nombreuses années. En fait, je suis allé dans des pays moins développés, comme le Guyana, où la loi sur l'impôt est très simple. Elle ressemble à notre loi de 1948 ou quelque chose comme ça, parce que les relations d'affaires dans ce pays ne sont pas aussi complexes que celles que nous avons actuellement.

• 0945

Il y a deux façons possibles d'essayer de simplifier la Loi sur l'impôt. Une façon de procéder est de modifier la politique. J'ai fait des publications au sujet des impôts à taux uniforme et des impôts sur les excédents de trésorerie presque tout au long de ma carrière, et ils peuvent être plus simples à certains égards, mais ils restent assez complexes à cause de la façon dont fonctionnent les entreprises.

Il n'y aura jamais plus une loi ressemblant à celle de 1917. C'est tout simplement impossible dans le monde d'aujourd'hui. On pourrait toutefois prendre certaines mesures politiques pour simplifier les choses. Certaines de nos recommandations entraîneraient une certaine simplification, comme M. Lefebvre l'a souligné. Même certaines de nos recommandations sur l'amortissement contribueraient à cette simplification. Mais je ne pense pas que nous devrions trop insister sur le fait que nous pouvons, comme par enchantement, je ne sais comment, nous retrouver, en fin de compte, avec le régime d'imposition des entreprises le plus simple et avec une loi peu volumineuse. C'est impossible. En fait, on parlait de l'extrême simplicité de la TPS, mais en réalité, les choses ne sont pas si simples quand il s'agit des transactions commerciales. Elles sont assez complexes, et le régime est relativement simple; c'est comme le régime des excédents de trésorerie. Il ne faut pas perdre de vue cette réalité.

L'autre partie de ce que nous essayons de faire est, bien entendu, la question de savoir si nous devrions reformuler la loi pour la rendre plus simple—pas changer la politique, simplement reformuler la loi. Il y a des pays qui se sont récemment engagés sur cette voie. Ce que nous avons constaté dans ces pays c'est qu'ils ont d'énormes problèmes pour reformuler la loi, parce que, ce faisant, on est inévitablement confronté à des questions politiques, et on crée beaucoup d'incertitude pour les entreprises. Nous avons donc dit dans certaines de nos recommandations qu'on pourrait peut-être reformuler certaines parties de la loi de façon plus simple, mais nous n'avons pas recommandé une reformulation globale de la loi.

[Français]

M. Wilfrid Lefebvre: J'aimerais faire un dernier commentaire sur le coût et ceux qui vont supporter les mesures. L'élargissement de l'assiette, tel qu'indiqué à la page 17, par le refus de la déduction de l'intérêt pour les bénéfices d'exploitation à l'étranger, est une mesure, à mon sens, très importante, qui est très critiquée par ceux qui investissent à l'étranger. C'est 400 millions de dollars au niveau fédéral. Pour ce qui est de l'impôt sur les distributions des sociétés, la correction du problème d'intégration représente 350 millions de dollars au niveau fédéral. Il y a aussi la recherche et le développement, et les déductions pour amortissement, tel que vous l'avez mentionné. Donc, l'effort touche l'ensemble du système fiscal.

M. Yvan Loubier: S'agissant d'efforts, monsieur Lefebvre et monsieur Mintz, j'ai bien noté, au départ, que vous proposiez qu'on élimine la déductibilité des impôts sur le capital. Étiez-vous conscients, lorsque vous avez proposé cette mesure, qu'en regard des données provinciales, qu'on ne retrouve pas dans votre rapport—cela aussi serait une critique à faire—il y a 43 ou 45 p. 100 de tous les impôts sur le capital payés au Canada qui le sont au Québec à cause de la structure fiscale particulière, même si, de façon générale, il y a 25 p. 100 des impôts qui sont payés par le Québec?

En proposant l'élimination de la déductibilité de l'impôt sur le capital, vous frappez de plein fouet le Québec, beaucoup plus que les autres provinces. M. Landry a déjà réagi d'ailleurs dès le mois d'avril à cette proposition en disant qu'il était arbitraire d'avoir choisi d'éliminer la déductibilité de l'impôt sur le capital pour élargir l'assiette fiscale. Qu'avez-vous à dire là-dessus?

M. Wilfrid Lefebvre: Vous avez raison de dire que le Québec est celui qui perçoit le plus en pourcentage de taxes sur le capital. Il y a peut-être une raison à cela. C'est peut-être le fait que c'était déductible au niveau fédéral. C'est donc vrai, à ce compte-là, que cette mesure va affecter les entreprises du Québec.

Par ailleurs, il y a d'autres mesures qui affectent beaucoup d'autres entreprises ailleurs au Canada. Il y a un ensemble de mesures qu'on propose comme, par exemple la réduction des taux, qui vont bénéficier grandement aux entreprises du Québec, particulièrement dans le secteur de...

[Note de la rédaction: Inaudible]...

M. Yvan Loubier: À cet égard, même lorsque vous parlez d'une réduction du taux de taxe sur les profits, si vous aviez eu des données provinciales et aviez fait des propositions sur cette base-là, le portrait aurait peut-être été un peu différent. De façon générale, vous dites que le taux d'impôt sur les profits est d'à peu près 13 p. 100 au Canada. Au Québec, il est de 9 p. 100. Il est plus faible.

M. Wilfrid Lefebvre: Exactement.

M. Yvan Loubier: L'impôt sur les profits est plus faible. Par contre, l'impôt sur le capital est plus élevé.

M. Wilfrid Lefebvre: La taxe sur le capital compense.

• 0950

M. Yvan Loubier: C'est cela. Donc, si vous proposez une réduction du taux sur les profits alors qu'au Québec, on est déjà concurrentiels avec un taux de 9 p. 100—d'ailleurs, on a un taux plus concurrentiel que bien des régions d'Amérique du Nord—et que vous abolissez la déductibilité de l'impôt sur le capital, vous ne tenez pas compte des réalités et des structures fiscales des provinces, en particulier du Québec.

M. Wilfrid Lefebvre: Dans notre raisonnement, on a tenu compte de la nature d'une taxe sur le capital. On est arrivés à la conclusion que c'était un substitut à un impôt corporatif. Donc, il venait s'ajouter à l'impôt corporatif et devait être traité de la même façon.

Le Québec, comme vous l'avez dit, lors du dernier budget de M. Landry, a réduit la taxe sur le capital et a augmenté l'impôt sur les entreprises, ce qui va en plein dans le sens du rapport. C'était la justification pour soutenir qu'il fallait rendre non déductibles ces choses-là.

Si on parle des mines et du pétrole, et du crédit de taxes dans l'Atlantique, à chaque fois, il y a une région du pays qui est affectée. Cependant, dans l'ensemble, aucune des régions n'est affectée de façon négative si on considère l'ensemble des propositions.

M. Yvan Loubier: J'ai regardé votre proposition sur les pertes fiscales et j'ai du mal à vous suivre dans votre raisonnement, parce que vous faites beaucoup d'hypothèses. Où voulez-vous en venir au juste avec le traitement des pertes fiscales?

Vous dites aussi dans votre rapport, à la section 4.16, en parlant de la réforme de 1987, qu'on a imposé des restrictions «en limitant davantage les transferts de pertes entre contribuables et en adoptant des règles spéciales en matière de financement après impôt, de crédit-bail et d'abris fiscaux.»

Dites-vous que les transferts de pertes fiscales sont encore possibles au Canada? Vous dites ici qu'on a limité davantage les transferts de pertes. Est-il encore possible de faire des transferts de pertes fiscales?

M. Wilfrid Lefebvre: À l'intérieur d'un groupe lié, oui. Si vous avez des sociétés qui sont toutes contrôlées par une même entité, il peut y avoir des transferts de pertes fiscales entre les entreprises. Ce sont des transactions relativement complexes.

M. Yvan Loubier: Mais il faut qu'il s'agisse d'entreprises qui ont la même maison-mère.

M. Wilfrid Lefebvre: C'est cela. Je peux avoir une compagnie à gains et une compagnie à pertes, et je peux les fusionner ou faire en sorte que l'une emprunte de l'autre.

M. Yvan Loubier: C'est cela, mais la loi de 1987 ne permet plus à une entreprise de vendre des pertes fiscales à une autre entreprise qui ne lui est pas liée.

M. Wilfrid Lefebvre: C'est cela. C'est prohibé. Actuellement, même dans une situation de contrôle, quand on a un groupe de sociétés, il peut être très difficile, à l'occasion, de transférer des pertes ou de faire en sorte que l'entité puisse bénéficier des pertes.

Nous proposons un système de transferts. Le gouvernement devrait examiner la possibilité que, par choix, une entité qui est contrôlée puisse être transférée si elle a droit aux pertes. Mais cela suppose une entente au niveau fédéral-provincial, parce que certaines provinces pourraient y perdre. Cela suppose également une discussion, à savoir à quel moment on peut considérer qu'une entité est contrôlée par une autre, rendant possible le transfert de pertes. Est-ce à 50 p. 100, 70 p. 100 ou 90 p. 100? C'est la discussion qui doit avoir lieu. On ne fait pas de recommandation précise, sauf qu'on dit qu'un système devrait être mis sur pied.

M. Yvan Loubier: Vous dites, à la section 4.13, qu'il existe encore de généreux taux d'amortissement pour les navires construits au Canada et à l'étranger. Comme je suis un amateur de bateaux ces temps-ci, j'aimerais que vous me disiez quelle est la nature de ce taux d'amortissement généreux. Vous me dites qu'il existe. Je trouve que cette proposition de l'éliminer va dans le sens de ce que nous défendons depuis des années. J'aimerais que vous me parliez de ce taux d'amortissement généreux pour la construction de navires. On en reparlera. On pourra en reparler jeudi.

M. Wilfrid Lefebvre: Sous réserve, si c'est possible.

M. Yvan Loubier: C'est la section 4.13.

M. Wilfrid Lefebvre: J'en suis conscient.

M. Yvan Loubier: On dit:

    - les généreux taux d'amortissement de navires construits au Canada et ailleurs devraient être réexaminés.

M. Wilfrid Lefebvre: Je dois vous avouer que je ne m'occupe pas beaucoup de la fiscalité des bateaux.

• 0955

[Traduction]

M. Jack Mintz: Le taux de déduction pour amortissement des navires construits au Canada est relativement élevé. Je ne me souviens pas maintenant du chiffre exact, mais il est assez important. Donc, quand nous avons dit qu'il devrait être réexaminé, nous voulions dire qu'il fallait le réduire.

[Français]

M. Yvan Loubier: Serait-il possible d'obtenir quelques notes complémentaires sur le traitement qu'on fait de l'amortissement pour les bateaux? C'est un sujet qui m'intéresse beaucoup.

M. Wilfrid Lefebvre: Cela me fera plaisir.

M. Yvan Loubier: Je vous remercie.

[Traduction]

Le président: Monsieur Riis.

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je tiens à dire que vous avez fait un excellent travail, votre équipe et vous. La lecture de votre rapport est fascinante. Nous avons beaucoup de travail à faire.

Je veux vous raconter quelque chose qui m'est arrivé hier soir et qui nous ramène à une question précédente. Quelqu'un a cabossé le côté de ma voiture en reculant, j'ai donc dû demander un devis à trois carrossiers. Tous les trois m'ont demandé si je payais en espèces ou si je facturais la réparation à quelqu'un. Je comprends cela; je suppose que c'est tout à fait courant chez les carrossiers.

Je suis allé également acheter des bâtons de golf dans un magasin qui a bonne réputation, et, là aussi, on m'a demandé si j'aillais payer en espèces. Si c'était le cas, on me donnerait un meilleur prix. Je ne citerai jamais le nom de ce magasin, parce que nous y sommes probablement tous allés. Il me semblait que, quand des magasins qui ont une bonne réputation... Et les gens savaient que j'étais député, j'ai donc trouvé qu'ils prenaient des risques.

Une voix: Votre réputation vous précédait.

M. Nelson Riis: Oui, je suppose, de toute évidence.

C'est assez amusant, mais je pense que cela révèle réellement ce que les gens pensent de nos impôts. Je pense qu'ils cessent tout simplement de faire confiance au système ou de l'observer de quelque façon que ce soit à moins qu'ils ne soient absolument forcés de le faire. Je n'arrive pas à comprendre comment ces gens- là doivent tenir leurs livres, etc. Je pourrais m'étendre longuement sur tout cela.

Je suis réellement content d'apprendre que vous examinez l'économie parallèle et les conséquences que cela pourrait avoir, en particulier parce qu'elle reflète ce que les gens pensent de la fiscalité. Je me rends compte que c'est un effort pour essayer de rationaliser cela.

Je voulais simplement vous faire part de cela, parce que je pense que l'économie parallèle est plutôt plus importante que l'estimation que vous avez citée.

La question des écotaxes conformes au principe de l'utilisateur-payeur m'a paru être une partie intéressante de votre rapport. Pourriez-vous nous donner plus de détails au sujet du genre d'impôts dont il serait question—est-ce qu'on abaisserait les taxes sur les carburants pour se conformer davantage au principe de l'utilisateur-payeur? Je voudrais plus particulièrement attirer votre attention sur la question de l'impôt sur le carbone auquel on fait souvent référence.

M. Jack Mintz: Avant tout, pour ce qui est de nos recommandations sur l'écotaxe, je pense que nous devons faire un pas en arrière et nous demander pourquoi nous imposons plus lourdement l'essence que, disons, le dentifrice ou un autre produit.

De façon générale, en dehors du fait que les gouvernements voulaient s'assurer des recettes, ils ont initialement imposé une taxe d'accise fédérale sur l'essence pour créer davantage d'autosuffisance sur les marchés pétroliers mondiaux, afin que nous importions moins de pétrole. C'était pendant les années 70, quand le prix du pétrole a beaucoup augmenté. On impose également des taxes sur l'essence pour financer le réseau routier.

Je pense que le problème est que l'imposition d'une taxe sur l'essence au niveau provincial est très sensée comme sorte de redevance pour financer les autoroutes et les routes, parce que les gens qui les empruntent davantage paieront, en fin de compte, davantage de taxes sur l'essence en fonction de leur utilisation du réseau routier, mais la taxe fédérale d'accise est moins justifiée. L'argument relatif à l'autosuffisance en matière de pétrole n'est plus non plus aussi justifié aujourd'hui.

Alors, pourquoi le faisons-nous? Bien qu'il n'existe aucune politique officielle du gouvernement en la matière, je pense que beaucoup de gens considèrent que la taxe sur l'essence est une façon d'essayer de régler les problèmes environnementaux. Notre comité a donc pris un certain recul et dit que si la taxe fédérale d'accise sur l'essence doit réellement être une écotaxe, est-ce la taxe appropriée pour cela, ou y en a-t-il une autre qui conviendrait mieux pour que, sans modifier le montant total des recettes, on abaisse le taux en élargissant l'assiette, ce qui donnerait, en fait, une écotaxe restructurée?

Si nous nous sommes engagés sur cette voie, c'est parce que nous avions de vives préoccupations au sujet de l'industrie des transports au Canada, qui a certainement été frappée très durement par le fait qu'elle est imposée plus lourdement qu'aux États-Unis.

• 1000

En fait, j'ai parlé à certains groupes qui m'ont contacté. L'industrie du charbon, par exemple, était très préoccupée par les taxes sur les transports. Elle considérait que c'était réellement son principal problème fiscal parce qu'elle expédiait du charbon dans le reste du Canada en passant par les États-Unis. À notre avis, c'est un important facteur de distorsion parce que nous perdons une partie du marché du transport de ce charbon par chemin de fer.

Nous en sommes donc venus à penser qu'il serait bon de restructurer la taxe fédérale d'accise sur l'essence et d'élargir l'assiette des écotaxes. On le ferait en réduisant la taxe sur l'essence et soit en taxant d'autres sources d'énergie, comme l'électricité ou le charbon utilisé pour l'électricité ou le chauffage, soit en imposant une taxe sur les toxines. Il y aurait un travail considérable à faire si on étendait la taxe fédérale d'accise dans ce secteur.

Je dois dire qu'en ce qui concerne une taxe sur le carbone, si notre proposition a un effet, ce serait de moins mettre l'accent sur le carbone parce que les taxes sur l'essence concernent réellement deux questions environnementales. L'une est la pollution urbaine, que nous connaissons très bien. Étant originaire de Toronto, je peux vous parler de ce problème. Il y a donc la question de la pollution urbaine. L'autre, bien entendu, est celle du réchauffement planétaire. En passant à une écotaxe d'application générale qui ne modifierait pas le montant total des recettes et en réduisant la taxe sur le pétrole, nous intervenons, en fait, un peu moins sur ces problèmes environnementaux, mais nous réglons d'autres problèmes environnementaux créés par d'autres sources. Ce serait donc la proposition fondamentale que nous avons faite.

M. Nelson Riis: Pour ce qui est de réduire les taux d'imposition des entreprises et d'augmenter ceux qui n'ont pas d'incidence sur les recettes, existe-t-il une analyse quantitative qui indiquerait si cela aurait pour résultat de créer des emplois?

M. Jack Mintz: Oui, il y a deux types d'analyses qu'il me paraît important de prendre en considération.

La première analyse a été réalisée par notre comité sur l'endettement des sociétés canadiennes, en particulier les multinationales. Nous avons constaté que, au cours des dix dernières années, quand le taux d'imposition des bénéfices des sociétés est devenu plus élevé au Canada qu'aux États-Unis et dans bien d'autres pays, l'endettement des multinationales canadiennes a augmenté de plus de 5 p. 100 de leurs actifs. Cela veut dire que nous avons plus de déductions des intérêts au Canada.

Les sociétés étrangères, qui sont surtout des sociétés américaines actives au Canada, ont également augmenté leur endettement au Canada au cours de cette période. C'est en partie dû au fait que le taux canadien est maintenant plus élevé que le taux américain plutôt que plus bas, comme c'était le cas avant 1986, mais c'est également parce que les États-Unis ont imposé des règles plus strictes pour la déductibilité des intérêts aux États-Unis, si bien que beaucoup de dépenses d'intérêt ont été transférées à l'extérieur des États-Unis. Aux États-Unis, plusieurs rapports du Trésor l'ont confirmé.

Bien entendu, nous étions un des pays qui bénéficiaient de ces déductions d'intérêt. Nous pensons donc qu'en réduisant le taux d'imposition des bénéfices des sociétés, nous préviendrions en partie l'érosion de l'assiette fiscale résultant du niveau élevé des taux d'imposition des bénéfices des sociétés.

L'autre facteur est l'adoption d'un régime plus neutre en combinant des taux plus bas et un élargissement des assiettes fiscales. Diverses études ont montré, par le passé, qu'un régime plus neutre suffit à générer des gains économiques parce que les gens investissent alors dans des projets qui sont économiquement justifiés ou prennent leurs décisions en fonction de ce qui serait bon pour les travailleurs et les propriétaires de capital au lieu de chercher à réduire leurs impôts.

M. Nelson Riis: Y a-t-il des preuves quantitatives?

M. Jack Mintz: Oui, plusieurs sortes d'études ont été faites. Nous avons fait réaliser des études pour notre comité sur l'impact de la fiscalité sur les décisions en matière d'investissement, en particulier en ce qui concerne les sociétés multinationales. Ces études révèlent que les impôts ont d'importantes répercussions sur les décisions en matière d'investissement, ce qui serait conforme à de nombreuses publications économiques actuelles, selon lesquelles les impôts ont une grande importance et ont des répercussions sur les décisions en matière d'investissement.

Il y a, par ailleurs, les études générales d'équilibre. Ces études sont réalisées par des économistes. Bien entendu, le terme «économiste» peut être considéré comme un mot grossier. Quoi qu'il en soit, elles ont été faites par des économistes. Ils ont examiné ce qui se passerait quand différentes décisions prises par des entreprises sont traitées d'une façon qui n'est pas neutre.

• 1005

La dernière étude qui a été réalisée juste avant la réforme fiscale de la fin des années 80 a révélé qu'en éliminant les éléments qui nuisent à la neutralité du régime d'imposition des entreprises et du capital, on pouvait exercer une influence sur la production économique de l'ensemble de l'économie en rendant le fonctionnement des entreprises plus efficace au Canada. Ces études ont révélé que cet effet correspondrait à environ 15 p. 100 des recettes issues de l'impôt sur les entreprises. Donc, si on collectait actuellement 25 milliards de dollars d'impôt sur les entreprises, cela aurait un impact annuel d'environ 5 milliards de dollars sur l'économie.

M. Nelson Riis: Pouvez-vous parler un petit peu des reports d'impôt? Ma question est la suivante. Il y a quelques années, un certain nombre de témoins se sont présentés devant le Comité des finances pour parler des reports d'impôt. Dans l'ensemble, ils disaient que ces impôts reportés devaient théoriquement être acquittés à un moment donné, mais qu'en réalité, ils l'étaient rarement. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

M. Jack Mintz: Eh bien, c'est vrai. Les reports d'impôt sont simplement une technique comptable qui consiste à utiliser, aux fins de l'impôt, des taux d'amortissement différents de ceux qu'on utilise pour mesurer les profits comptables. C'est, fondamentalement, un calcul basé sur l'idée de permettre à une entreprise d'obtenir une déduction aux fins de l'impôt plus rapidement qu'autrement. Donc, quand le capital est amorti aux fins de la comptabilité, le taux d'amortissement ultérieur est supérieur à ce qui est, en fait, déduit aux fins de l'impôt. Il y a donc un élément de passif supplémentaire, et c'est le report d'impôt à payer qui est inclus.

Nos propositions, qui réduiraient le taux de déduction pour amortissement pour certains actifs, réduiront, en fait, les reports d'impôt à payer. Elles auront également l'avantage d'augmenter, en fait, les bénéfices déclarés par les sociétés, ce qui, en fait, est très important pour leurs actionnaires. Le fait est que plusieurs études ont révélé que cela peut améliorer l'idée que les gens se font d'une société, parce que, d'un seul coup, les revenus déclarés augmentent.

M. Nelson Riis: Pour ce qui est de la déduction pour amortissement, quelle différence y a-t-il entre le Canada et les États-Unis? Il me semble que le rapport dit que notre situation est, en fait, meilleure qu'aux États-Unis.

M. Jack Mintz: En ce qui concerne la déduction pour amortissement?

M. Nelson Riis: Oui.

M. Jack Mintz: En moyenne. Il y a des différences. Pour certains actifs, les États-Unis sont peut-être plus généreux que le Canada, et pour d'autres, c'est le contraire. En moyenne, nous sommes certainement au même niveau que les États-Unis, surtout pour l'équipement. Je pense que c'est la raison pour laquelle nous n'avons pas recommandé beaucoup de réductions des déductions pour amortissement. Nous avons seulement proposé d'en réduire quelques- unes qui nous paraissaient être bien supérieures au taux de dépréciation économique actuel. En général, nos taux sont à peu près semblables à ceux des États-Unis et ils sont à peu près conformes à la dépréciation économique, même si nous avons dit que le gouvernement devrait entreprendre un examen du régime de déduction pour amortissement afin de voir si la dépréciation est peut-être trop faible actuellement pour certains actifs aux fins de l'impôt.

M. Wilfrid Lefebvre: Je pense que, dans l'ensemble, le système américain est plus complexe pour ce qui est du calcul du coût en capital. Notre système est assez simple, ce qui est donc à notre avantage.

M. Nelson Riis: Peut-être une dernière question, monsieur le président?

Le président: Oui, monsieur Riis.

M. Nelson Riis: De nombreux changements ont été apportés au régime de l'assurance-emploi, et vous recommandez une autre modification assez importante. Monsieur Mintz, pourriez-vous donner un exemple d'un secteur où ces changements auraient peut-être les effets les plus notables?

M. Jack Mintz: En fait, des études intéressantes réalisées par Statistique Canada sur des entreprises qui ont été examinées individuellement révèlent qu'il y a une grande diversité en ce qui concerne l'assurance-emploi. Ce que nous disons est qu'en tenant compte des antécédents des entreprises, ce qui se fait depuis près de 75 ans aux États-Unis, chacune aurait, en quelque sorte, un compte dans lequel on verserait ses cotisations d'assurance-emploi. Ensuite, quand elle mettrait des employés à pied, les prestations d'assurance-emploi seraient imputées à cette entreprise en fonction de la part des primes d'assurance-emploi concernant ses employés.

Pour ce qui est des industries qui seraient touchées, il y a des moyennes qui sont calculées, mais il y a beaucoup de variations à l'intérieur d'une même industrie, et c'est la raison pour laquelle nous recommandons qu'on procède entreprise par entreprise et non pas industrie par industrie. Nos chiffres montrent que l'industrie qui, disons, bénéficie en moyenne le plus des programmes d'assurance-emploi est l'industrie forestière, où les coûts d'utilisation du régime d'assurance-emploi en ce qui concerne le coût des mises à pied est beaucoup plus élevé que les cotisations que les entreprises forestières versent en moyenne. Toutefois, je tiens à dire que la situation varie beaucoup et que, même dans cette industrie, certaines entreprises se trouvent dans une situation inverse. Le montant des cotisations d'assurance- emploi qu'elles versent est, en fait, supérieur aux coûts qu'elles imposent au régime d'assurance-emploi, aux coûts entraînés par les mises à pied.

• 1010

Nous pensons donc qu'en tenant compte des antécédents des entreprises en matière d'assurance-emploi, on pourrait réaliser des gains très importants, parce que le système serait plus efficace. On y parviendrait en taxant réellement les mises à pied faites par les entreprises et, ce faisant, on réduira les taux de rotation du personnel et le taux de chômage au Canada. De nombreuses études économiques ont montré que l'assurance-emploi et l'absence d'un système prenant en compte les antécédents des entreprises contribuent fortement au niveau des taux de chômage au Canada.

Le président: Je voudrais m'appuyer sur la question de M. Riis pour vous demander comment empêcher les sociétés de changer de nom chaque année. Une même société pourrait s'appeler ABC 1998, ABC 1999. Comment tenir compte des antécédents d'une entreprise qui procède ainsi? Cela se produit apparemment très souvent aux États- Unis.

M. Jack Mintz: Le problème est de savoir comment on conçoit le système. Les États-Unis ont bien sûr acquis une certaine expérience à cet égard, et il faut alors, en quelque sorte, décider quel doit être le taux initial d'imposition d'une entreprise. Si on commence en haut de l'échelle—disons qu'elle paie initialement un taux maximum—elle ne pourra alors bénéficier que de réductions de ces taux. Si elle essaie de se transformer en une nouvelle société, elle se retrouvera à nouveau tout en haut de l'échelle.

Si on commence tout en bas, on peut se trouver dans la situation qui s'est produite aux États-Unis, où des sociétés engagent temporairement des employés et où ce qui se passe est qu'une société qui, disons, payait des primes d'assurance-chômage très élevées aux États-Unis à cause de ses antécédents décide alors de renvoyer tous ses employés. Il y a une société spécialisée qui engage tous ces travailleurs et les loue à l'entreprise. Si elle paie initialement un taux très faible pour les charges sociales ou l'assurance-chômage, elle est fortement encouragée à agir ainsi.

Donc, en concevant le système, on déciderait probablement de commencer à un niveau moyen, même si c'est quelque chose qu'il faudrait étudier.

Le président: Merci.

Monsieur Brison.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Je voudrais vous féliciter pour votre exposé raisonné et la diligence dont vous avez fait preuve en nous fournissant ces renseignements.

Quand vous dites que ces changements n'auraient pas d'incidence sur les recettes, partez-vous de certaines hypothèses concernant l'offre ou cherchez-vous à ne pas modifier les recettes?

M. Jack Mintz: Il y a une hypothèse relative aux effets concernant le comportement. Pour ce qui est des réductions, nous avons fait réaliser à notre intention par l'Institute for Policy Analysis certains travaux qui nous ont donné une idée des répercussions d'un abaissement des taux sur l'élargissement de l'assiette fiscale.

Pour ce qui est des mesures d'élargissement de l'assiette fiscale, nous avons tenu compte du fait que, si on élargit l'assiette fiscale, il y aura une certaine érosion du montant des recettes qu'on obtient, parce que l'observation sera moindre ou que les entreprises ajusteront leurs activités de telle façon qu'en fin de compte, elles paieront moins d'impôt. Nous avons donc pris ces choses-là en considération.

M. Scott Brison: Vous avez donc, par exemple, considéré que, peut-être, en créant un code fiscal plus simple et plus équitable et en donnant du travail à un plus grand nombre de Canadiens, vous augmenteriez peut-être les recettes de l'impôt sur le revenu des particuliers? Cela n'a pas été pris en considération?

M. Jack Mintz: Non, les gains résultant d'une meilleure efficacité et toute répercussion éventuelle sur l'économie parallèle n'ont pas été inclus. Donc, si on prenait cela en considération, en fait, les recettes des gouvernements pourraient augmenter.

M. Scott Brison: Vous avez dit qu'il y avait des estimations quantitatives de certaines de ces répercussions sur l'augmentation du nombre d'emplois. Je sais que c'est une question extrêmement difficile, mais avez-vous une idée approximative des répercussions des changements sur l'augmentation du nombre d'emplois au Canada, quelque chose de plus quantitatif, est-ce qu'il y a des indications fiables à cet égard?

M. Jack Mintz: Il y a deux estimations que nous avons discutées dans notre rapport. La première concernait le fait de tenir compte des antécédents d'une entreprise pour l'assurance- emploi. Nous avons recommandé de ne pas le faire totalement, mais seulement partiellement, à raison d'environ 25 p. 100. Nous avons dit qu'avec nos recommandations, le taux de chômage pourrait être réduit de 0,5 p. 100. Cette estimation me paraît être plutôt inférieure à la réalité, étant donné que si on appliquait totalement le système consistant à prendre en considération les antécédents des entreprises, on pourrait réduire les taux de chômage de presque 2 p. 100. C'est une estimation que nous fournissons.

• 1015

L'autre estimation concerne l'effet d'un système fiscal plus neutre, avec des taux inférieurs, sur l'imposition des bénéfices des entreprises et du capital au Canada. Dans cette recommandation, nous avons dit que nous réduirions environ un tiers des facteurs qui vont à l'encontre de cette neutralité. Nous améliorerions ainsi le PIB d'environ 1 à 2 milliards de dollars—disons que le chiffre serait plus près de 2 milliards de dollars. Nous n'avons pas essayé de convertir cela en nombre d'emplois, mais vous pourriez établir une estimation en vous basant là-dessus. Disons que les emplois sont... Bon, ce serait difficile à faire. Je ne peux pas le faire comme cela maintenant.

M. Scott Brison: Vous dites qu'il y a de bonnes raisons de penser que certaines de ces mesures permettraient une amélioration comprise entre 1/2 p. 100 et, peut-être 2 p. 100?

M. Jack Mintz: La prise en considération des antécédents des entreprises réduirait les taux de chômage d'un demi pour cent. Je ne sais pas exactement ce qu'il en est de l'effet de l'adoption d'un régime d'imposition des bénéfices des entreprises plus neutre sur les taux de chômage. Il pourrait être de quelque chose comme 0,1 p. 100 ou je ne sais quoi, mais je n'en suis pas sûr.

M. Scott Brison: D'accord.

Avec la mondialisation de l'économie, la mobilité du capital et la libération des échanges, etc., il devient de plus en plus difficile, en particulier avec le commerce électronique, d'essayer d'imposer les sociétés—surtout pour maintenir les différences entre un État souverain et son régime d'imposition et un autre État souverain.

Dans quelle mesure avez-vous examiné le modèle américain d'imposition des entreprises? Jusqu'à quel point ceci nous rapprocherait-il du modèle américain? Il va devenir presque impossible de préserver des différences importantes entre les modes d'imposition des entreprises.

M. Jack Mintz: Avant tout, je me rappelle que mon collègue de l'Université de Toronto, Richard Bird, disait souvent que le rapport Carter, quand il a été publié, visait la lune et qu'ensuite, la réforme fiscale a échoué quelque part aux États- Unis.

Au sujet de notre rapport, je dirai que nous nous sommes retrouvés relativement rapidement aux États-Unis, mais je ne dirais pas que nous essayons de faire en sorte que notre régime soit exactement le même que celui des États-Unis, parce que celui-ci présente certains défauts que je ne pense pas qu'on voudrait nécessairement inclure.

Par exemple, étant donné que notre méthodologie était semblable à celle d'une étude réalisée aux États-Unis, une de nos études sur les coûts d'observation des grandes entreprises a révélé qu'ils étaient beaucoup plus élevés aux États-Unis qu'au Canada à cause du régime d'imposition des bénéfices des entreprises de ce pays. C'est dû à certains éléments du régime américain, comme la façon dont fonctionne l'imposition du revenu dans les États. L'harmonisation est bien inférieure à ce qui existe au Canada.

En outre, comme M. Lefebvre l'a mentionné, les déductions pour amortissement sont traitées de façon beaucoup plus complexe aux États-Unis qu'au Canada. Nous avons des façons beaucoup plus simples de le faire.

Dans notre discussion du revenu international, nous avons examiné comment les États-Unis imposent le revenu d'origine étrangère des sociétés américaines; les revenus rapatriés y sont imposés comme les dividendes et les frais d'intérêt qui sont ramenés aux États-Unis, et on accorde un crédit pour impôt étranger.

C'est un système très complexe. En fait, il représente environ 40 p. 100 des frais d'observation des entreprises aux États-Unis et il apporte très peu de recettes au gouvernement américain. Il y a une étude qui a été publiée qui montre qu'en fait, les recettes provenant des revenus d'origine étrangère sont négatives à cause de certaines modalités du régime américain.

Nous avons décidé de ne pas essayer de reproduire le régime américain d'imposition des revenus d'origine étrangère. D'autre part, nous étions tout à fait conscient du fait qu'on fonctionne dans le monde international. Nous devons essayer de protéger notre assiette fiscale au Canada. En même temps, nous devons encourager la création d'emplois et la croissance économique au Canada.

Je pense que nos recommandations concernant l'abaissement des taux pour qu'ils soient inférieurs à ceux des États-Unis concordent avec l'idée d'essayer de protéger notre assiette fiscale ainsi que la création d'emplois. Imposer, par exemple, des règles plus strictes sur les prix de transfert ou le revenu international des entreprises contribuerait également à protéger l'assiette fiscale au Canada. Nous n'avons pas considéré cela comme une façon d'essayer d'imposer le revenu d'origine étrangère ou d'obtenir des recettes grâce à l'imposition du revenu d'origine étrangère; nous avons considéré cela comme un moyen d'essayer de mieux protéger l'assiette fiscale au Canada. Je dirai que notre rapport a beaucoup réfléchi à ces questions internationales et qu'elles étaient très importantes pour nous.

• 1020

M. Scott Brison: En résumé, vous dites donc que les impôts sont censés fournir des recettes et que leur effet devrait être plutôt neutre. Cela diffère fortement du code de l'impôt sur le revenu des particuliers du code fiscal canadien, non seulement pour ce qui est de l'impôt sur les entreprises mais aussi de l'impôt sur le revenu des particuliers, parce qu'au Canada, nous utilisons la politique fiscale comme un moyen de redistribution. C'est une sorte de politique fiscale Pavlovienne: elle encourage certains comportements, en décourage d'autres, etc.

Pensez-vous que nous devrions avoir un code fiscal plus uniforme conçu exclusivement pour collecter des recettes et que nous devrions alors avoir des investissements sociaux, par exemple, quand ils sont nécessaires pour la société ainsi que, peut-être, des droits d'utilisation ou des redevances pour certains comportements qui ne sont peut-être pas, par exemple, bons pour l'environnement afin, en pratique, d'internaliser ces externalités? Est-ce, en résumé, ce que vous dites?

M. Jack Mintz: Avant tout, notre comité n'était pas chargé d'examiner l'impôt sur le revenu des particuliers, je ne pense donc pas que ce que nous recommandons à propos de l'imposition des entreprises s'applique nécessairement directement à l'impôt sur le revenu des particuliers. Si le gouvernement souhaite nous demander de reprendre nos travaux pour examiner l'impôt sur le revenu des particuliers, nous pourrions probablement le faire également. Mais je pense que ce que nous avons dit est la chose suivante.

Avant tout, en ce qui concerne l'impôt sur le revenu des particuliers, nous avons reconnu que, si le gouvernement voulait essayer de redistribuer le revenu, c'est cet instrument-là qu'il serait important d'utiliser, et non pas le régime fiscal des entreprises. Ce dernier n'est pas un bon instrument pour essayer de redistribuer le revenu entre les particuliers. C'est parce que si on impose une entreprise, cela peut avoir des conséquences sur tous les gens, qu'ils aient un revenu faible ou élevé; cela dépend de qui possède les actions, de qui travaille pour la société ou de qui lui achète des services ou des produits. On ne peut pas réellement utiliser la fiscalité des entreprises pour essayer de redistribuer le revenu dans la société. C'est réellement l'impôt sur le revenu des particuliers qui peut servir à cela.

Nous n'avons pas essayé de dire quel devrait être, à notre avis, le rôle de l'impôt sur le revenu des particuliers. C'est un autre forum ou un autre groupe qui devrait le faire.

M. Scott Brison: Je suis sûr que vous avez cependant une opinion à ce sujet.

M. Jack Mintz: En effet. Mais pour ce qui est de la fiscalité des entreprises, oui, il est très raisonnable de réduire les taux et d'élargir l'assiette fiscale. La neutralité est bonne pour plusieurs raisons. Elle est bonne pour ce qui est de rendre le régime fiscal plus efficace et de faire en sorte que l'économie fonctionne de façon plus efficace. Elle est bonne parce qu'en réduisant les taux, on fait en sorte qu'il paraît plus intéressant d'investir des revenus au Canada et de transférer certains de ces coûts hors du Canada; ainsi, les gouvernements ont davantage de recettes et il y a une érosion plus faible de l'assiette fiscale.

En abaissant les taux et en élargissant l'assiette fiscale, en rendant l'impôt sur les bénéfices des entreprises plus neutre, on peut, en fait, mieux réduire les interactions négatives entre les politiques fédérales et provinciales, parce que si le gouvernement fédéral et les provinces veulent aider des industries déterminées—et ils veulent toujours le faire—nous pensons qu'ils devraient le faire en utilisant des crédits d'impôt au lieu de toucher l'assiette fiscale, parce que celle-ci pourrait être utilisée pour décider comment on veut répartir le revenu dans l'ensemble des provinces, et la neutralité serait compatible avec cela.

M. Wilfrid Lefebvre: L'idée maîtresse de votre rapport était que la neutralité devrait être la règle et que tout écart à la neutralité devrait être une exception; il faudrait donc donner toutes les raisons justifiant l'existence d'une préférence fiscale. Il y en a deux qui me viennent immédiatement à l'esprit. Il y a un taux plus faible pour les petites entreprises, il n'est pas neutre et nous pensons qu'il peut être justifié. Il en va de même pour la R-D. Pourquoi devrait-on accorder des crédits d'impôt généreux pour cela? C'est parce qu'on peut les justifier. Mais, à moins qu'on ne puisse donner de bonnes raisons justifiant l'existence d'une préférence fiscale, c'est la neutralité qui devrait être la règle.

M. Scott Brison: Je serais heureux de voir ce que nous faisons en fait ou ce que le gouvernement fait avec ce rapport. Il est très intéressant. J'attendrai également avec intérêt la publication du Rapport Mintz sur l'impôt sur le revenu des particuliers.

Le président: Merci, monsieur Brison.

Monsieur Valeri.

M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie, monsieur Mintz, pour le travail que vous avez réalisé. Vous avez certainement donné des conseils utiles et soulevé des questions importantes. Il est certain que le message qui sous-tend également tout ce travail est qu'il faut faire en sorte qu'il y ait une coopération entre le gouvernement fédéral et les provinces afin d'apporter les changements que vous recommandez.

• 1025

Vous avez également dit au début de votre exposé que ces changements augmenteraient, en fait, la croissance économique et la création d'emplois. C'est la raison principale pour laquelle nous faisons ces changements. Il a également été dit que ces deux résultats se produiraient peut-être, en fait, après une période d'ajustement et qu'il y aurait des coûts de transition sectoriels ou régionaux importants.

Pouvez-vous nous parler un peu de cela et nous dire si ces changements entraîneraient provisoirement certains problèmes et si on pourrait, en fait, connaître un taux de chômage plus élevé?

M. Jack Mintz: En fait, c'est le contraire qui va se produire, et il y a deux raisons à cela.

Avant tout, nous présentons un certain nombre de recommandations sur les effets intervenant pendant la période de transition. Par exemple, nos recommandations concernant la réduction des amortissements dans le secteur des ressources et dans l'industrie manufacturière seraient appliquées par étapes. Elles seraient mises en oeuvre progressivement, et les taux d'imposition des bénéfices des entreprises seraient réduits en même temps. Ainsi, les recettes du gouvernement resteraient équilibrées.

Or, quand on fait cela, on sait très bien, d'après tout ce qui a été publié au sujet de la fiscalité, qu'en fait, si ces mesures ont un effet, c'est celui de favoriser les investissements, il n'y a aucun coût qui résulte de la transition; la raison pour laquelle il en est ainsi est que les entreprises continueront de pouvoir effectuer leurs amortissements en vertu des anciennes règles qui sont, disons, relativement généreuses, mais alors, le revenu qui sera imposé, ce qui se fera ultérieurement, sera assujetti à un taux plus faible. Donc, nombre des mesures de réforme fiscale qui ont été prises à la fin des années 80 ont, en fait, encouragé fortement les investissements. Il n'y a eu aucun coût associé à la transition, et celle que nous recommandons dans notre rapport n'entraînerait, en fait, aucun coût particulier.

M. Tony Valeri: Mon autre question concerne les petites entreprises. Nous sommes tous d'accord au sujet de l'importance des petites entreprises dans notre pays, et je sais que la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a dit qu'elle trouvait quelque peu préoccupant que l'exemption à vie pour gains en capital soit remplacée par les RER. Pouvez-vous donner au Comité une idée de votre réflexion à ce sujet et nous dire pourquoi, en fait, c'est une solution plus sensée?

M. Jack Mintz: Un document de travail qui va être publié très prochainement pour compléter notre rapport examine ce qui va se passer en ce qui concerne la croissance de l'emploi dans les petites entreprises, et certains de ces chiffres figurent dans le chapitre cinq du rapport. Il y avait deux choses qui nous préoccupaient.

Nous avons remarqué que la déduction accordée aux petites entreprises aide celles-ci à financer leur capital: en ayant un taux plus faible, elles peuvent avoir plus d'encaisse et, donc, utiliser leurs bénéfices non répartis pour financer leurs investissements. Mais ce qui nous a frappés dans le travail que nous avons fait était le fait que, quand on examine, en fait, les données concernant ce qui est arrivé au secteur des petites entreprises, on constate qu'au cours de la dernière décennie, il y a un nombre énorme de petites entreprises qui ont été créées dans notre pays, et cela tient en partie à de nombreuses raisons. C'est en partie dû à l'impartition, en partie au fait qu'il y a des gens qui veulent travailler pour leur propre compte plutôt que pour une grande société, et en partie à des raisons fiscales, parce que les gens veulent bénéficier du traitement plus favorable accordé aux petites entreprises.

Mais, ce que nous avons remarqué est qu'une fois qu'une petite entreprise est créée, sa croissance est très limitée. Le nombre d'emplois augmente très peu. En fait, environ 12 p. 100 seulement des entreprises fondées en 1985 ont créé un nombre important d'emplois. Disons qu'elles ont commencé avec un nombre d'employés compris entre zéro et cinq et que seulement 12 p. 100 d'entre elles ont ensuite dépassé ce chiffre. En fait, beaucoup d'entre elles sont restées de la même taille, ou un certain nombre d'entre elles ont cessé leurs activités. En fait, pour la plupart d'entre elles, c'est réellement ce qui s'est passé. Et cela est dû en partie au fait qu'il y a des gens, comme moi, qui ont une petite entreprise pour gagner un revenu en tant que consultants, mais qui n'ont réellement aucune intention de l'agrandir.

Nous trouvions donc très préoccupant qu'il n'y ait pas assez d'entreprises de taille moyenne au Canada. C'est pour cette raison que nous avons recommandé de restructurer la déduction accordée aux petites entreprises afin que les entreprises qui ont vraiment des employés puissent bénéficier de taux plus généreux. C'était une partie de nos séries de propositions: encourager une croissance plus importante dans le secteur des petites entreprises.

Dans l'ensemble, nos propositions concernant les petites entreprises n'avaient aucune incidence sur les recettes fiscales, parce que nous ne voulions pas dire qu'il fallait augmenter les impôts des petites entreprises pour compenser les réductions des impôts des grandes entreprises. Nous avons donc essayé de ne pas changer la répartition des recettes fiscales entre les deux secteurs.

Il y a différentes choses qui pourraient avoir une incidence sur les petites entreprises. La plus importante était l'exemption à vie pour les gains en capital; nous avons dit à ce sujet que des études ont montré que cette exemption n'a pas, de façon générale, incité les entreprises à investir davantage et à prendre plus de risques. Cela est dû en partie au fait qu'on impose une certaine limite au montant de l'exemption. Une fois qu'on l'a entièrement utilisée, elle ne joue plus aucun rôle pour les décisions marginales ou progressives. Et, deuxièmement, elle était également accordée aux gens qui avaient déjà accumulé des gains en capital à la suite de décisions antérieures et qui en profitaient abusivement.

• 1030

Nous avons dit qu'à notre avis, il est amplement justifié d'accorder un traitement spécial aux propriétaires de petites entreprises et aux agriculteurs pour les aider à accumuler un capital pour leur retraite, parce que le système des RER est basé sur l'idée qu'on accorde à quelqu'un une déduction en fonction de son revenu gagné, et que ce revenu gagné n'inclut ni les gains en capital, ni les dividendes, ni d'autres formes de revenu du capital. Il y a donc une discrimination contre les propriétaires de petites entreprises et les agriculteurs, parce qu'une partie importante de leurs revenus est de cette nature.

Nous avons donc proposé de transformer l'exemption à vie pour gains en capital en un système amélioré de RER pour les propriétaires de petites entreprises et les agriculteurs et d'autoriser un transfert exonéré d'impôt d'une petite entreprise aux enfants de son propriétaire. Nous pensons que ce serait plus équitable pour les propriétaires de petites entreprises, les agriculteurs et les autres entreprises, et que nous aurions ainsi un meilleur système.

Je dois signaler que l'exemption pour gains en capital ne concerne plus seulement les petites entreprises. Elle concerne maintenant les grandes entreprises. Il y a aujourd'hui beaucoup de grandes sociétés qui sont restructurées; elles sont rachetées en partie par les cadres, ou il y a une autre sorte de configuration avec une société de portefeuille privée—constituée, par exemple, par les cadres—qui vend des services à une grande société, et chacun des cadres possède une action d'une société privée appartenant à des intérêts canadiens et aura droit à l'exemption de 500 000 $ sur les gains en capital.

La grande entreprise ne change pas, mais il y a une augmentation du montant de l'exemption à vie pour gains en capital des petites entreprises parce que les grandes entreprises peuvent maintenant également en bénéficier. Notre proposition éliminera fondamentalement l'érosion potentielle de l'assiette fiscale qui, à notre avis, est causée par l'exemption à vie pour gains en capital accordée aux petites entreprises. C'est donc une question que, je pense, le gouvernement devra étudier avec soin.

M. Tony Valeri: J'ai une dernière question, même si je suis sûr que mes collègues ont également plusieurs questions à poser. Je veux être sûr d'avoir bien compris ce que vous avez dit à propos de la chose suivante. Je pense que vous avez dit, notamment, que les mesures qui ne sont pas neutres ont encore un rôle à jouer en matière de fiscalité, mais que ce qui compte est la façon dont on procède à cet égard. Pouvez-vous expliquer cela un peu plus afin que nous comprenions clairement ce que vous voulez dire?

M. Jack Mintz: Je pense que M. Lefebvre a soulevé un point très important. L'uniformité est une idée raisonnable dans le sens où on veut que les gens soient traités équitablement. Pour ce qui est des entreprises, elles devraient toutes payer des montants d'impôt identiques par rapport à une mesure comme le revenu qu'elles gagnent en tant qu'entreprises. Il est sensé d'avoir cette sorte d'uniformité dans la façon dont on traite les entreprises parce qu'ainsi, la fiscalité n'empêcherait pas le marché de contribuer comme il peut le faire à la croissance économique ou à la création d'emplois.

Dans certains cas—et c'est à ce sujet-là que nous l'avons dit—les marchés ont du mal à fournir certains types d'activités, par exemple, parce que les prix ne sont pas adaptés. Un exemple de cette situation est celui de la R-D. Si une entreprise fait de la R-D et crée une nouvelle idée, même si elle est protégée dans une certaine mesure par un brevet, d'autres entreprises en profiteront sans avoir à assumer le coût de ces activités de R-D. On ne fait pas assez de R-D, ce qui est donc un argument pour qu'on traite peut-être de façon plus généreuse la R-D. Le même argument s'applique aux petites entreprises. Elles ont du mal à obtenir des capitaux; une déduction pour les petites entreprises pourrait servir à compenser le problème qu'elles ont à cet égard.

Nous avons dit qu'il faudrait penser en premier lieu aux subventions accordées par les gouvernements pour régler certains des cas où le traitement n'est pas uniforme. La raison en est que les subventions sont accordées pour une période déterminée et que les gouvernements les contrôlent plus attentivement. Leur utilisation est également examinée de plus près par le Parlement quand il se penche sur les dépenses du gouvernement, si bien qu'elles constituent en général une meilleure façon de régler certains de ces problèmes.

• 1035

D'autre part, nous savons également que les subventions peuvent donner lieu à beaucoup de formalités bureaucratiques parce que les gouvernements les contrôlent beaucoup plus. Dans certains cas, on peut vouloir disposer d'un système plus souple, et c'est alors que les stimulants fiscaux constituent une meilleure façon de remédier à ces manques d'uniformité.

Je voudrais revenir au premier cas de base, c'est-à-dire au fait que tout manque d'uniformité qu'on voudrait accepter dans le régime d'imposition doit d'abord être justifié par un argument économique. Il ne faut pas accorder des mesures de ce type simplement parce que quelqu'un dit qu'il a besoin d'un stimulant fiscal. Il faudrait qu'une telle décision repose sur un solide argument économique, et pas sur celui qu'invoquerait un secteur en disant qu'il contribue de façon importante à la création d'emplois dans le reste de l'économie, parce que tous les secteurs le disent—ils affirment que même s'ils emploient seulement 500 000 travailleurs, par exemple, ils créent 4 millions d'emplois dans l'économie. Si on additionne les chiffres avancés par tous les secteurs, on a l'impression qu'il y a un milliard de personnes dans notre pays. Il ne faut pas oublier que si on accorde un avantage à quelqu'un, il faudra imposer plus lourdement quelqu'un d'autre, et cela entraîne un coût pour le reste de la société.

Il faut donc d'abord qu'il y ait une justification économique, et il faut ensuite décider quelle est la meilleure façon de procéder—en utilisant la fiscalité ou des subventions. Nous conseillons au gouvernement d'examiner soigneusement cette question avant d'utiliser la fiscalité. Il n'est pas bon de polluer le régime fiscal avec toute une quantité d'amortissements et d'allégements fiscaux, parce que cela rend tout le système plus complexe. Il vaut mieux essayer de préserver sa simplicité et de le rendre plus efficace.

M. Tony Valeri: Le message fondamental est donc de préserver la simplicité du système, et, si c'est économiquement justifié, d'examiner la situation et d'utiliser peut-être des subventions. Et d'éviter la pollution.

M. Jack Mintz: C'est exact.

Le président: Merci, monsieur Valeri.

Madame Redman.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je voudrais vous poser deux questions. Il y a une dizaine d'années, le gouvernement Mulroney a réalisé une importante réforme de l'impôt sur le revenu en employant des termes comme «élargissement de l'assiette fiscale» et «abaissement des taux», que j'entends utiliser aujourd'hui. J'aimerais simplement que vous nous disiez pourquoi vous examinez à nouveau cela. Les réformes antérieures ne sont-elles pas allées assez loin? Je sais qu'elles ont porté sur l'imposition des particuliers aussi bien que sur celle des entreprises.

M. Jack Mintz: Il y a deux réponses à cela. Premièrement, je pense qu'à notre avis, il y a certains domaines où les réformes ne sont pas allées assez loin et qui peuvent nécessiter de nouvelles mesures. L'économie a tellement changé au cours des 20 dernières années. La croissance du secteur des services et l'importance de la compétitivité internationale pour ce secteur, l'importance de l'économie fondée sur le savoir et la contribution du secteur des services à cette économie fondée sur le savoir, l'érosion potentielle de l'assiette fiscale découlant du taux très élevé de l'impôt sur les bénéfices des sociétés—toutes ces choses-là donnent à penser qu'il faut réellement réduire notre taux d'imposition des bénéfices des sociétés. Nous avons constaté qu'il y a certaines façons d'élargir l'assiette fiscale qui seraient tout à fait appropriées dans un contexte international pour rendre le système plus neutre, tout en éliminant les impôts discriminatoires qui frappent les services. C'est dans ce secteur que nous allons créer des emplois à l'avenir dans notre pays.

Mme Karen Redman: Deuxièmement, le gouvernement propose de créer une agence nationale de perception. D'après Revenu Canada, l'existence d'un seul organisme pour administrer les recettes permettrait d'économiser environ 193 millions de dollars grâce à la réduction des coûts d'observation. Qu'en pensez-vous? Avez-vous examiné cette agence dont on propose la création?

M. Jack Mintz: Nous n'avons pas examiné cette agence. Étant donné les discussions en cours, nous avons décidé que ce n'était pas un domaine à propos duquel nous pouvons faire une contribution importante. Pour en revenir au rapport, ce que nous voulons souligner en ce qui concerne les gains découlant de l'existence de l'Agence canadienne des douanes et du revenu est le fait que, si on améliore l'harmonisation des impôts au Canada, si on permet aux entreprises et aux particuliers de répondre plus facilement aux exigences du système et si on améliore l'administration de celui- ci, il est clair que ce sera à l'avantage de tout le monde dans l'économie.

• 1040

Étant donné ce que nous disons dans le chapitre de notre rapport qui porte sur l'observation et dans lequel nous expliquons combien il est important de renforcer l'harmonisation et d'alléger les coûts d'observation des entreprises, s'il s'avère que l'ACDR correspond à ce point de vue, je pense que nous applaudirions son existence.

M. Wilfrid Lefebvre: Il en va de même pour les questions de répartition entre les provinces. Si les provinces s'entendaient pour prendre certaines dispositions, les problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui pour ce qui est de la répartition des recettes entre l'Ontario, le Québec et l'Alberta, seraient beaucoup plus simples. Dans toutes ces questions, une meilleure harmonisation permettrait à beaucoup de gens d'éviter beaucoup de dépenses et d'efforts inutiles.

Mme Karen Redman: Merci.

Le président: Merci.

Monsieur Szabo.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'ai rempli une page entière de questions. Je voulais voir si je pouvais synthétiser toutes mes idées à propos de ce système.

Il y a une publicité à propos de la vidange d'huile. Elle dit qu'il ne faut pas ajouter de l'huile propre ni garder le vieux filtre, parce qu'il y a de la mauvaise huile dans le moteur. La ressemblance avec ce qui se passe ici est plutôt frappante. Nous conservons manifestement le même régime d'imposition des bénéfices des sociétés, mais nous proposons d'y apporter des modifications pour atteindre certains objectifs.

Il y a la question de l'équité—on accorde un gros crédit au secteur manufacturier et à celui de la transformation, mais ce n'est peut-être plus là que nous voulons investir maintenant. Peut- être le moment est-il venu dÂappliquer les mêmes règles à tout le monde.

L'autre chose dont je vous entends parler me rappelle ce qui se fait dans le système de soins de santé. On y pratique une pondération de l'intensité d'utilisation des ressources pour déterminer qui utilise quelles ressources du système afin que les coûts reflètent, en fait, plus équitablement l'utilisation des services fournis. L'imposition des sociétés et les taux qu'on leur applique en tant que tels—vous avez mentionné très clairement qu'il faut tenir compte de tous les impôts, qu'ils soient ou non liés aux bénéfices.

Donc, quand j'examine cela et que je vois ces tableaux qui invitent à comparer les taux d'imposition des entreprises et qui montrent de combien les nôtres sont inférieurs à d'autres—je voudrais, ce sera ma première question, vous demander votre avis à ce sujet. Peut-on simplement comparer les taux d'imposition sur les bénéfices des sociétés et évaluer professionnellement l'équité du traitement accordé par un gouvernement et un autre ou par un pays et un autre sans prendre en considération les éléments qui ne concernent pas les impôts, les coûts ou les avantages?

M. Jack Mintz: Premièrement, dans le rapport, nous parlons de formules d'imposition différentes de celles que nous utilisons actuellement. La plus intéressante à laquelle nous avons réfléchi était l'impôt sur les excédents de trésorerie, que certains pourraient appeler un impôt uniforme. Il correspond à certaines propositions récentes présentées aux États-Unis, par exemple, selon lesquelles on pourrait imposer les recettes provenant de la vente des produits et des services des entreprises et autoriser une déduction pour les frais de salaire et les dépenses d'immobilisations, mais pas pour les frais d'intérêt. Avec ce système, il n'y aurait pas d'amortissement et pas d'imposition des gains en capital.

Fondamentalement, c'est ce que nous faisons avec la TPS. C'est, en fait, la même assiette fiscale.

Étant donné la façon dont le monde fonctionne aujourd'hui, en se basant sur le revenu, il serait bien difficile d'essayer de faire quelque chose de façon tout à fait isolée quand on entreprend une réforme aussi radicale que celle-ci. Nous avons donc examiné cela très attentivement. Je pense que notre comité trouve certaines des simplifications qu'on peut obtenir avec l'impôt sur les excédents de trésorerie assez intéressantes, mais la réalisation d'une réforme globale consistant à éliminer un impôt pour le remplacer par un autre nous préoccupait quelque peu.

Vous avez raison, nous n'avons pas fait sauter tout le système. Nous n'avons pas dit qu'il fallait le remplacer complètement par un nouvel impôt. Ce serait un débat intéressant. Il a lieu actuellement aux États-Unis, mais, jusqu'à présent, rien ne se passe. Je pense que cela tient en partie au fait qu'une réforme fiscale se fait souvent de façon progressive. On essaie d'arriver petit à petit à un meilleur système. Il est très difficile de modifier radicalement la fiscalité, parce que les gens finissent par calculer combien d'impôt ils paient en plus ou en moins et, en fin de compte, c'est cela qui les intéresse.

• 1045

En ce qui concerne le taux d'imposition des bénéfices des sociétés, je ne veux pas vous donner l'impression que c'est le seul facteur important pour les décisions concernant les investissements au Canada. Toutefois, ce taux a une forte incidence sur la question de l'érosion de l'assiette fiscale, parce que c'est en fonction de lui qu'on choisit où emprunter de l'argent dans le monde, et non pas en fonction des autres dispositions de l'impôt sur les bénéfices des entreprises ni des prestations offertes par les programmes gouvernementaux. Ces choses-là n'ont aucune importance pour le chois de l'endroit où une société peut vouloir emprunter. Ce qui compte, c'est le taux d'imposition des bénéfices des sociétés et la valeur fiscale des déductions pour intérêt dont on peut bénéficier au Canada.

Une société qui est en haut de l'échelle pour ce qui est des taux d'imposition de ses bénéfices préférerait emprunter au Canada plutôt qu'au Royaume-Uni ou dans un autre pays, par exemple. Nous disons que nous devrions nous placer plus bas sur cette échelle afin que personne ne puisse abuser du Canada en ce qui concerne les déductions d'intérêt, les prix de transfert et les autres choses qui entraînent une érosion de l'assiette fiscale.

Pour ce qui est de décisions en matière d'investissement, il y a de nombreux facteurs à prendre en considération, et non pas seulement le taux de l'impôt sur les bénéfices des sociétés. Il faut également examiner l'assiette fiscale—des choses comme les déductions concernant l'amortissement ou le stock—et toutes sortes d'autres choses qui auront une influence sur le montant d'impôt que paiera une société. Ensuite, il faut examiner les autres impôts que paient les sociétés et qui ont une incidence particulière sur les décisions en matière d'investissement, comme les impôts sur le capital et les taxes de vente sur les biens d'équipement. Et si on examine les décisions des entreprises en matière de production, ce sont les charges sociales et d'autres choses qui sont importantes. Ensuite, il y a d'autres facteurs qui ont une incidence sur les investissements, comme les dépenses des gouvernements et le climat général concernant les investissements dans un pays.

Ce que nous disons est qu'adopter un système plus uniforme avec un taux d'imposition des bénéfices des sociétés plus bas ne lutte pas simplement contre l'érosion de l'assiette fiscale, mais améliore également la capacité des entreprises canadiennes à faire face à la concurrence internationale, parce que nous aurons un système plus uniforme.

M. Paul Szabo: Le tableau à la page 17, «Effets des recommandations sur les recettes fédérales et provinciales»—c'est là qu'on trouve l'analyse de la mesure dans laquelle le travail que vous avez effectué se traduit ou non par une modification du montant des recettes fiscales. Une de vos principales idées est la simplification et l'harmonisation et toutes ces bonnes choses. Cela n'influe pas seulement sur les recettes fiscales, mais également sur les dépenses des entreprises et du gouvernement, mais je n'ai pas vu cela ici. J'aimerais donc que vous commentiez cela.

Je vais vous dire ce qui m'a déçu. Nous pourrions vous dire à quel point vous êtes tous merveilleux, mais peut-être devrions-nous vous adresser certaines critiques parce que cela pourra, espérons- le, encourager une poursuite du dialogue à ce sujet.

Les gens du Canada ont l'impression que les sociétés ne paient pas autant qu'elles le devraient. Vous dites qu'elles utilisent simplement un système de transfert. Quoi qu'il en soit, cela se répercute sur le prix des produits et des services, si bien que ce sur quoi les impôts sont prélevés importe peu. Cela dépend du nombre de changements qu'on peut faire. Et ce que nous n'avons pas pris en considération est le fait que les sociétés, surtout les grandes sociétés, sont toujours en avance sur la Loi de l'impôt sur le revenu, qui, de par sa nature même, ne fait que réagir.

J'espérais voir quelque chose ici au sujet de questions essentielles comme les dépenses fiscales, ces drôles de petites choses dans notre régime fiscal qui pourraient faire perdre tout intérêt à cela. Nous avions un exemption personnelle pour les gains en capital de 100 000 $. Elle a disparu très rapidement. Nous avons fait une erreur fondamentale à cet égard; c'était qu'il n'y avait pas de droits acquis pour les gains futurs, elle était prévue pour les gains de détention. On n'a jamais exigé qu'elle soit consacrée aux investissements de capitaux à risque dans les petites entreprises ou quelque chose de ce genre. Elle aurait pu servir à acheter un condominium en Floride ou quelque chose comme ça, ou des oeuvres d'art. C'étaient des décisions stupides, mais vous n'avez rien dit au sujet des décisions stupides des anciens gouvernements. Ils ont accordé des avantages importants à certaines personnes, qui ont ensuite été supprimés.

Je pensais que votre comité, en se penchant sur ce qui concerne les entreprises, allait répondre aux questions que les Canadiens se posent à propos de l'équité du partage du fardeau fiscal réel entre les sociétés et les particuliers et définir comment nous allions, le cas échéant, changer le maudit filtre à huile, afin que, quand nous aborderons la réforme de l'impôt sur le revenu des particuliers, le modèle applicable aux sociétés nous dise ce que nous devrions réellement examiner pour effectuer une réforme fiscale globale au Canada.

• 1050

Il est temps de le faire. Je pense qu'il est temps de le faire, et je ne pense pas que ce que je vois ici fasse plus que simplement retoucher ceci et cela et faire en sorte que les gens de ma profession, les comptables agréés, aient un peu plus de travail. Vu certaines de ces choses, nous devrons expliquer un peu plus à nos clients pourquoi vous avez opposé un groupe à un autre, une région à une autre.

J'ai coché le secteur manufacturier et celui de la transformation. J'ai chatouillé un peu les petites entreprises. J'ai porté un petit coup aux grandes entreprises, mais cela ne leur fait rien parce qu'elles sont tellement grandes et qu'elles peuvent modifier leur coefficient d'endettement pour gérer leur bilan en fonction de l'impôt. C'est comme cela qu'elles conservent toujours leur avance sur vous: si vous changez les règles, je changerai de méthode. Je peux augmenter mon coefficient d'endettement. Je peux augmenter ou diminuer la distribution des bénéfices. Je peux créer des filiales, je peux m'installer outremer. Je peux faire toutes sortes de choses, et vous n'arriverez pas à me rattraper, parce qu'il faudra des années pour que les parlementaires fassent des changements.

Je pensais et j'espérais—et je ne sais pas si cela figure ici ou s'il est encore possible de l'avoir... il est fondamental de demander qu'on change ce maudit filtre à l'huile. Il faut réellement envisager sérieusement une réforme de l'impôt des sociétés, ce qui fera au moins un peu comprendre qu'il est nécessaire de modifier les impôts sur le revenu des particuliers si, en fait, ce que vous voulez dire est que peu importe ce qu'on fait payer aux sociétés puisque ce sont les particuliers qui comptent vraiment.

Il y a là une dynamique importante, et je suppose que nous avons besoin de vos sages conseils pour ce qui est de la façon de passer à l'autre partie de cela, qui consiste à convaincre la population canadienne qu'il est équitable de partager le fardeau fiscal.

M. Jack Mintz: Mon collègue voudra peut-être ajouter quelques commentaires au sujet des coûts d'observation, mais permettez-moi d'intervenir à propos de ce que vous avez dit, qui est important.

Au début du chapitre 4 de notre rapport, qui porte sur l'impôt sur les bénéfices des sociétés, nous parlons de ce qui se passerait si nous adoptions un système réellement neutre, non pas celui-ci, mais un qui aurait un taux encore plus faible—18 p. 100 de taux fédéral, 12 p. 100 de taux provincial et 30 p. 100 de taux total.

Voyons ce que les gens pensent; c'est réellement ce sur quoi porte le débat, et les gens peuvent vouloir en débattre. Si vous voulez aller jusqu'au bout, vous pouvez rapprocher toutes les déductions pour amortissement de l'amortissement économique. Vous élimineriez tous les crédits d'impôt, y compris pour la R-D. Vous passeriez à la déductibilité des redevances, ce qui permet de régler le problème de la différence qu'il y a entre le taux d'imposition sur les bénéfices des sociétés gazières ou minières et celui de toutes les autres, parce que nous aurons la déduction relative aux ressources qui s'y substituera.

Nous parlons de ce qui se passerait si nous adoptions un système réellement neutre. Quand notre comité a évalué la situation, nous avons constaté que certaines régions et certaines industries seraient beaucoup plus durement touchées que d'autres. Un système complètement neutre aurait de nombreux avantages, mais nous sommes revenus en arrière et nous avons dit que nous nous inquiétions un peu au sujet de la R-D, parce qu'il peut parfois être justifié d'accorder un crédit pour cela et des choses de ce genre.

Dans un sens, nous sommes revenus en arrière, mais nous avons inclus cela dans le chapitre. Nous voulions que les gens voient quelles idées notre comité avait eu en tête quand nous avons eu ce débat et proposé cette structure. Nous avons pris une structure qui, nous l'espérions, conviendrait à la fois à l'industrie et aux provinces et nous avons dit que ce serait une bonne façon de procéder.

Je dirais que c'est une réduction assez impressionnante des taux d'imposition des bénéfices des sociétés. C'est une réduction très impressionnante des taux d'imposition des bénéfices des sociétés.

Nous pensons que ce serait une excellente chose, et nos propositions nous permettraient de gagner trois, quatre ou cinq points de plus si nous allions encore plus loin. Mais cela aurait alors des répercussions plus fortes sur toutes les régions et les industries du Canada.

Comme vous pouvez le voir, il y avait des secteurs qui s'opposaient à cela et d'autres qui étaient d'accord.

L'autre question concerne le montant total des impôts payés par les entreprises par rapport à ce que paient les particuliers. Nous n'étions pas chargés d'évaluer cela. On ne nous avait pas chargés de le faire. Mais nous avons noté que si les gens n'aiment pas l'idée d'augmenter les impôts dans certains secteurs à cause de notre reconfiguration de l'impôt sur les bénéfices des sociétés qui ne modifie pas le montant total des recettes fiscales, peut-être pourrait-on examiner attentivement la part relative de l'impôt sur le revenu des particuliers et de l'impôt sur les bénéfices des sociétés.

• 1055

Notre comité se souciait beaucoup de la création d'emplois et de la croissance économique. À notre avis, cet ensemble de mesures est bon pour la création d'emplois et la croissance économique. Il serait encore meilleur si on voulait envisager de réduire les impôts des entreprises. En même temps, avec le taux plus faible, on pourrait même élargir encore plus l'assiette fiscale, et non pas la réduire, contrairement à ce que pensent certaines entreprises qui aimeraient que le gouvernement s'abstienne de toucher à certains de leurs trucs favoris.

À notre avis, si le gouvernement veut dépenser de l'argent pour cela, il pourrait avoir de bonnes raisons de le faire. Je pense que, peut-être, avec l'excédent budgétaire actuel et le débat sur l'excédent budgétaire, on peut examiner ce qu'on veut faire pour l'impôt sur le revenu des particuliers par rapport à l'impôt sur les entreprises.

M. Wilfrid Lefebvre: Je ferai deux commentaires très brefs.

Je pense que ce rapport essaie de recommander ce qu'il est possible de faire, et non pas l'impossible. Nous avons mis l'accent sur la création d'emplois. Nous pensons que les recommandations sur l'élargissement de l'assiette fiscale contribueraient dans une large mesure à assurer une saine concurrence sur le marché tout en protégeant l'assiette fiscale canadienne.

C'est ce sur quoi porte l'ensemble du rapport. La recommandation qui concerne, par exemple, l'impossibilité de déduire les intérêts des investissements étrangers est très importante dans les conditions actuelles.

Le président: Madame Torsney.

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Merci. Veuillez m'excuser si cette question a déjà été posée. J'ai dû m'occuper de certaines affaires de la Chambre.

Une des choses que vous mentionnez dans votre rapport et que vous avez mentionnée ici à propos de la question des pays où les sociétés choisissent d'emprunter, est que cela aurait également des répercussions dans les provinces qui ont un taux d'imposition élevé. Y a-t-il une répartition différente de l'endettement entre les provinces?

M. Jack Mintz: Non, cela concernait le Canada et d'autres pays, mais le taux réel auquel on déduit les frais d'intérêt, ce qui inclurait le taux provincial, dépendra de l'implantation de vos activités au Canada. À l'heure actuelle, nous répartissons les revenus des sociétés en fonction de la distribution de leurs frais de masse salariale et de leurs ventes dans l'ensemble du pays.

Si une société est implantée seulement en Ontario et n'a aucune autre activité dans le reste du pays, il s'agira seulement du taux d'imposition des bénéfices des sociétés de l'Ontario, qui est de 15,5 p. 100 et s'ajoute au taux de 29 p. 100. En fait, on arrive à près de 45 p. 100 au Canada, ce qui, soit dit en passant, est relativement élevé. C'est encore pire que les 43 p. 100 dont nous parlons. C'est une sorte de taux moyen pour l'ensemble du Canada.

Mme Paddy Torsney: Vous mentionnez dans votre rapport qu'il y a des avantages pour les provinces qui recevraient des recettes supplémentaires et que vous recommandations ne seront pas appliquées si les gouvernements provinciaux ne les entérinent pas. Est-ce que les gouvernements provinciaux... Vous dites:

    Les objectifs énoncés dans le rapport ne sauraient être atteints sans une coopération poussée entre les gouvernements fédéral et provinciaux dans l'adoption des recommandations.

Comment les gouvernements provinciaux ont-ils réagi jusqu'à présent?

M. Jack Mintz: Eh bien, je ne sais pas exactement comment les provinces réagissent, parce que je n'ai eu connaissance d'aucune prise de position officielle. Je dois dire que, pendant que le comité réalisait ses travaux, j'ai eu des réunions bilatérales avec chacune des provinces. Toutes les provinces sont venues à l'Université de Toronto. Nous avons eu une réunion avec toutes les provinces et nous leur avons expliqué combien il était important de réduire les taux d'imposition des bénéfices des sociétés.

Quand j'ai discuté avec quelques représentants des provinces, ils m'ont parfois dit que certains aspects du rapport leur paraissaient très intéressants. Ils y trouvaient certaines choses intéressantes, mais je ne connais réellement pas la réaction globale pour le moment et, en fait, je ne la connaîtrai peut-être jamais.

Mme Paddy Torsney: En ce qui concerne la réduction des interactions négatives entre les politiques fiscales des deux paliers de gouvernement, vous dites que cela réduirait les interactions entre eux—c'était intéressant—et faciliterait la libre circulation des biens, des services, du capital et des travailleurs.

Certaines de ces recommandations serviraient alors à supprimer certaines des barrières commerciales interprovinciales.

M. Jack Mintz: Bon, ce ne seraient pas des barrières commerciales. Ce que nous appelons communément des barrières commerciales concerne la réglementation et peut-être certaines dépenses, mais il s'agirait de barrières commerciales concernant le régime fiscal. Oui, je pense qu'il y a plusieurs barrières. L'une d'entre elles est le fait que certaines provinces peuvent avoir un régime particulier qui a une incidence sur la circulation des capitaux et des travailleurs dans notre pays.

Une chose qui nous préoccupait particulièrement est que si les provinces ne s'entendent pas sur une assiette fiscale commune pour l'impôt sur le bénéfice des sociétés ni sur une formule commune pour la répartition des recettes dans l'ensemble du pays, le système pourrait devenir très complexe. En soi, cela constituerait une barrière importante à la liberté de circulation. Voilà pourquoi nous avons recommandé une plus grande harmonisation et la préservation de la sorte d'harmonisation que nous avons au Canada. Cette harmonisation a permis à notre fédération de connaître une grande réussite, surtout en ce qui concerne l'impôt sur les bénéfices des sociétés. Notre situation est bien meilleure que celle qu'on peut observer en Suisse et aux États-Unis, par exemple.

• 1100

Mme Paddy Torsney: Dans votre résumé, à la page 16 du mémoire, vous dites que vos propositions n'entraîneraient ni hausse, ni diminution du montant des impôts et taxes payés par les entreprises aux niveaux fédéral et provincial dans un système parvenu à maturité, passé la période de transition. Cela veut-il dire qu'il pourrait y avoir une diminution ou une augmentation pendant la transition?

M. Jack Mintz: Nos calculs de recettes, comme ceux que vous trouvez à la page 17, sont basés sur l'idée que le système est parvenu à maturité et que tout est en place.

Nous ne faisions pas un budget pour le gouvernement fédéral en indiquant des chiffres pour chaque année et en expliquant comment on devait procéder pour l'application progressive de chaque recommandation. Nous pourrions les appliquer peu à peu, au fil du temps, avec l'idée que le gouvernement fédéral pourrait effectuer des compensations à tout moment. Cela dépend de la façon dont on gère la transition.

Mme Paddy Torsney: Vous n'avez donc pas fait de propositions dans ce sens.

M. Jack Mintz: Nous avons dit que, pour les périodes de transition, les réductions et certaines des déductions devraient être étalées dans le temps, et nous avons dit que les réductions du taux d'imposition des bénéfices des sociétés devraient être étalées dans le temps. Étant donné que les premières mesures augmenteraient les impôts et que les dernières les diminueraient, on peut faire cela de façon à équilibrer approximativement les choses.

Mme Paddy Torsney: D'accord, merci.

Le président: Merci.

Monsieur Iftody.

M. David Iftody (Provencher, Lib.): Merci. J'ai deux questions, une qui est peut-être théorique et l'autre qui est une question de fond. Il s'agit à nouveau de la taxe sur l'essence.

Je viens du Manitoba. J'ai discuté à plusieurs reprises de toute cette question avec les gens de la province, et il y a probablement des gens qui sont intervenus à plusieurs reprises auprès de vous au sujet des routes et des problèmes et des choses comme cela.

Dans certaines parties de votre analyse, vous abordez brièvement l'objectif politique de la taxe sur l'essence en ce qui concerne les routes. Ce que je pense à ce sujet est que le gouvernement fédéral n'a aucun rôle à jouer à propos des routes provinciales, et en particulier des petites routes municipales, où la plupart des dégâts se produisent actuellement. Étant donné les changements que connaissent, dans l'ouest du Canada, les économies agricoles, etc... pour être franc, c'est le chaos.

Quand le gouvernement fédéral collecte cette taxe, n'est-ce pas pour la réserver pour les routes plutôt que pour en verser le montant dans un fonds consolidé? Cela nous entraîne dans une discussion entièrement différente. Ne pourrait-on pas dire que le rôle du gouvernement fédéral est le commerce interprovincial est que, si nous prélevons cette surtaxe sur l'essence, peut-être devrait-elle être versée exclusivement dans un fonds spécial pour un programme routier national? C'est la première question.

Je me rappelle que vous avez parlé des questions environnementales, mais il y a un besoin immédiat, étant donné certaines choses qui se passent depuis trois ans au sujet des dépenses en capital consacrées aux camions dans notre pays. Cela concerne notamment la productivité... et j'aborderai cet autre aspect.

Tous les paliers de gouvernement devront assumer des coûts importants à cet égard, et j'essaie de déterminer où le gouvernement fédéral pourrait intervenir. Il est peu vraisemblable que nous abandonnions ces domaines d'imposition, mais peut-être serait-il important d'avoir une politique de portée plus vaste pour un programme routier national.

Cela m'amène à ma deuxième question, sur le changement technologique et les déductions pour amortissement.

Ces dix dernières années, dans certaines méthodologies et structures, nous avons constaté un énorme changement dans le type d'investissements que nous faisons. Ces trois dernières années, nous avons constaté des investissements probablement sans précédent pour l'amélioration de la productivité, et nous espérons qu'ils porteront fruit d'ici trois ou quatre ans. Les Américains sont légèrement en avance sur nous.

En ce qui concerne nos politiques fiscales, le gouvernement a- t-il réfléchi à long terme à la façon de traiter ces déductions pour amortissement? Pour qu'une société soit productive, elle doit dépenser un demi-million de dollars pour les nouvelles technologies et, 18 mois plus tard, selon la nature de ses activités... Certains de nos amis des banques sont ici. Deux des banques ne cessent de me dire qu'elles doivent dépenser 600 millions de dollars par an pour les frais de technologie et que, 24 mois plus tard, elles doivent recommencer.

• 1105

Étant donné que cela va augmenter considérablement dans l'ensemble du pays au cours des 10 ou 15 prochaines années, pensez- vous qu'avec ses propres politiques, le gouvernement fédéral est en mesure de régler le problème que posent les déductions de ce genre? Devrait-il s'en mêler? Devrait-il s'en mêler davantage? Devrait-il moins le faire à cause de la rapidité du roulement? Qui devrait assumer le coût du changement de productivité?

Voilà en quoi consistent essentiellement mes deux questions.

M. Jack Mintz: Pour ce qui est de la taxe sur l'essence, vous avez soulevé la question de l'utilisation de la taxe sur l'essence comme source de recettes pour contribuer au financement du réseau routier. Vous pouvez la considérer comme un droit d'utilisation imparfait, en vertu duquel les gens qui se déplacent plus sur les routes paieront, en fin de compte, une taxe plus élevée.

Ce n'est pas la même chose qu'un péage. On peut ajuster un péage. Par exemple, les camions occasionnent beaucoup de frais quand ils utilisent nos routes. Quand on examine la taxe sur l'essence, on peut constater que nous ne payons peut-être pas une taxe sur l'essence suffisante. Avec un péage, on pourrait faire payer une taxe d'un montant différent pour les camions et les automobiles qui utilisent les routes.

Je pense que c'est la question clé, et le gouvernement devra la régler. Dans nos propres travaux, nous avons considéré les responsabilités fédérales-provinciales pour le réseau routier comme une chose acquise. Les provinces sont aujourd'hui responsables des dépenses routières, et il n'y a pas de programme fédéral national de transport routier, contrairement à ce qui se passait il y a de nombreuses années, quand il y avait une subvention conditionnelle pour les routes.

Si, en fin de compte, on crée une nouvelle dépense fédérale pour les routes, disons dans le cadre d'un réseau de transport, on pourrait alors commencer à considérer que la taxe fédérale d'accise sur l'essence refléterait le rôle que pourrait jouer le gouvernement fédéral en prélevant des droits d'utilisation auprès des usagers du réseau.

Ce que nous disions est que le gouvernement fédéral ne s'occupe pas actuellement des routes, et qu'on peut donc considérer la taxe fédérale d'accise comme, fondamentalement, un droit à acquitter pour l'utilisation des routes. Ce sont réellement les taxes provinciales sur l'essence... c'est elles qui jouent ce rôle.

Pour ce qui est du changement technologique, oui, nous conviendrions avec vous que les investissements ont beaucoup changé. Il y a le problème de l'obsolescence. Nous en discutons de façon détaillée dans le chapitre 4 de notre rapport. Nous disons que, comme nous ne savons pas, en fait, quels ont été les changements de certains taux d'amortissement économique pour divers actifs, il est nécessaire d'examiner attentivement le système de déduction pour amortissement.

Nous avons commencé à nous pencher sur cette question dans le cadre de nos travaux, mais il faudrait y consacrer beaucoup plus de temps et d'efforts que nous ne pouvions le faire. Nous avons donc recommandé au gouvernement d'examiner les déductions pour amortissement et de voir si, dans certains domaines, elles sont peut-être inappropriées ou trop élevées par rapport aux taux de dépréciation économique réels actuels.

Je dois également mentionner qu'un des commentaires que nous faisons dans notre rapport au sujet de la technologie est qu'aujourd'hui, la politique gouvernementale doit non seulement prendre en considération la création technologique, comme dans la R-D, mais également faire en sorte que nos entreprises utilisent cette technologie au Canada. Les encouragements que nous accordons à la R-D, par exemple, ne sont pas très utiles pour nous si vous faites simplement de la R-D au Canada mais que vous en transférez ensuite les résultats aux États-Unis. Cela crée des emplois aux États-Unis pour le marché mondial en améliorant la productivité.

Il est très important de trouver un juste milieu: il faut prendre des mesures pour encourager la R-D au Canada, tout en essayant d'en appliquer davantage les résultats au Canada. À notre avis, en abaissant les taux effectifs d'imposition des bénéfices des sociétés, surtout dans les secteurs des services, comme nous l'avons suggéré, nous parviendrons, en fait mieux, à ce juste milieu. Voilà pourquoi nous avons fait ces recommandations.

Le président: Merci, monsieur Iftody.

C'est la dernière question, monsieur Riis.

M. Nelson Riis: J'ai deux questions brèves.

Le président: D'accord, allez-y.

• 1110

M. Nelson Riis: Monsieur Mintz, vous faites des commentaires intéressants au sujet des petites entreprises et du fait que 12 p. 100 seulement des nouvelles petites entreprises ont vraiment créé des emplois.

M. Jack Mintz: C'était entre 1985 et 1992.

M. Nelson Riis: Oui. J'ai l'impression que la même chose se passe encore aujourd'hui. Je suppose que c'est le cas.

Pour ce qui est d'abaisser le taux d'imposition, pensez-vous que cela encouragerait les gens à agrandir les entreprises qui n'ont pas été agrandies pendant ces périodes?

M. Jack Mintz: Nous n'avons pas abaissé le taux d'imposition des bénéfices des sociétés en tant que tel. Nous avons dit qu'il fallait restructurer la déduction accordée aux petites entreprises. Nous avons recommandé qu'il y ait un taux fédéral de 20 p. 100. Les petites entreprises pourraient avoir un taux fédéral de 14 p. 100. Je ne parlerai pas des taux provinciaux.

Les petites entreprises peuvent bénéficier d'une réduction supplémentaire de trois points si elles engagent des gens. Nous leur accorderions un crédit de 20 p. 100 de leurs primes d'assurance-emploi sur le montant d'impôt qu'elles paient, pour une réduction maximale totale de trois points de leurs impôts sur les bénéfices des sociétés. Ce serait une façon de restructurer la déduction accordée aux petites entreprises afin de donner un avantage à celles qui augmentent réellement leurs effectifs.

M. Nelson Riis: J'avais oublié qu'il était question de cela dans le rapport. Vous avez raison. Vous avez réellement abordé cette question.

Vous semblez être quelqu'un de très gai pour un spécialiste des impôts...

Des voix: Oh, oh.

Une voix: Je peux garantir qu'il est bien ainsi.

M. Jack Mintz: D'accord, qu'est-ce que vous nous réservez maintenant?

Des voix: Oh, oh.

M. Nelson Riis: Vous êtes, de toute évidence, vous-même et les membres de votre équipe, enthousiastes au sujet du travail que vous avez fait. Je pense que nous partageons nous-mêmes tous cet enthousiasme.

Toutefois, par ailleurs, simplement pour refroidir un peu les esprits, les représentants élus que nous sommes ont actuellement du mal à financer les soins de santé, l'éducation, la formation et Dieu seul sait quoi d'autre. On a l'impression que, ces temps-ci, on manque d'argent pour faire des choses importantes et nécessaires. On a également l'impression que tout le monde paie trop d'impôt. Je pense que vous auriez du mal à trouver une seule personne qui n'en est pas intimement convaincue et qui, donc, fait toutes sortes de choses qui, je suppose, sont à la limite de la fraude fiscale. C'est simplement l'impression que les gens ont ces temps-ci.

Vous proposez une réduction de 25 p. 100 de l'impôt sur les sociétés. Vous élargiriez l'assiette fiscale, mais c'est cela qui ferait les manchettes. Nous n'en arriverons pas là tout de suite, je suppose. Ne soyez pas déçu si nous n'agissons pas rapidement, mais je vois déjà les manchettes: «La priorité du ministre des Finances: réduire de 25 p. 100 l'impôt sur les sociétés.» Je ne peux pas imaginer que cela se fasse dans un avenir proche.

Le président: Monsieur Riis, je pensais que vous énonciez la politique du NPD à ce sujet.

M. Nelson Riis: Non, ce n'est pas notre politique. Je pensais simplement que je devais le mentionner, parce qu'il me semble que nous commençons... C'était juste une observation.

M. Jack Mintz: Permettez-moi de répondre à cela de deux façons.

Avant tout, nous pensons que notre rapport est important pour la création d'emplois et la croissance économique. Si vous examinez ce que d'autres pays font... Regardez la Suède. Elle a un taux d'imposition des bénéfices des sociétés de 28 p. 100. Elle a des dépenses privées de R-D deux fois plus élevées que celles du Canada par rapport au PIB, et elle n'a pas de stimulants fiscaux pour la R-D. Il se passe là quelque chose que nous ne comprenons pas tout à fait.

Regardez les États-Unis. Ils ont réduit les impôts sur les bénéfices des sociétés et élargi l'assiette fiscale en 1986. Ils ont, en fait, augmenté le niveau des impôts sur les entreprises, ce qui a eu certaines répercussions négatives, mais, vu l'efficacité propre à la neutralité, cela a eu d'importantes répercussions sur ce qui se passe maintenant aux États-Unis.

Je pense que nous devons examiner ce que nous allons faire aujourd'hui avec notre régime d'imposition des entreprises. Je pense que nous devons l'examiner très attentivement pour voir ce que nous pouvons faire pour améliorer aujourd'hui la croissance économique et la création d'emplois. Je peux vous dire qu'en ayant un taux plus élevé que le reste du monde et en faisant toutes ces autres choses, nous nous retirons l'herbe sous le pied. Nous compromettons nos chances de réussite.

En passant à une assiette fiscale plus uniforme—et c'est ce qui s'est passé dans un nombre infini de pays ces dernières années. Ils ont eu des retombées énormes en matière de création d'emplois et de croissance économique.

Je suis d'accord avec vous pour dire que le grand public verra seulement la réduction du taux et négligera tout ce qu'on fait pour élargir l'assiette fiscale, et même si notre proposition ne réduit pas, à proprement parler, le montant des impôts sur les sociétés... C'est, en réalité, une réorganisation, une restructuration des impôts sur les sociétés. J'en conviens, la plupart des gens auront une impression différente, mais...

• 1115

M. Nelson Riis: Pour compléter ce que vous dites, on nous a posé diverses questions à propos des preuves que les réductions d'impôt entraînent la création d'emplois, ce qui, je suppose, est une des principales choses qui nous intéressent. Si nous en avions des preuves manifestes—je sais que vous dites que c'est le cas et qu'il y a des études quantitatives. Je me rappelle, par exemple, que récemment, le premier ministre de la Colombie-Britannique, M. Clark, a dit qu'il était prêt à réduire les impôts des sociétés, mais qu'il voulait que les dirigeants de celles-ci s'engagent à créer des emplois. Je ne pense pas qu'ils soient prêts à le faire—ils ne semblaient pas être prêts à respecter cet engagement. Ils ont dit qu'ils feraient de leur mieux, ou qu'ils feraient de sérieux efforts, je ne sais quoi. Je pense que certains ont l'impression que cela ne va peut-être pas marcher et que beaucoup de gens vont simplement se faire beaucoup plus d'argent et qu'il n'y aura pas de création d'emplois.

Je suppose que je veux dire que s'il y avait des études réellement bonnes qui pourraient nous aider à ce sujet en faisant très clairement ressortir le lien de cause à effet, cela nous faciliterait certainement beaucoup la tâche de faire accepter cette idée.

M. Jack Mintz: Pour revenir en arrière, je signalerai une étude réalisée par Jason Cummins, qui examine les investissements américains au Canada. Il montre que, quand on modifie le niveau d'imposition au Canada par rapport à celui des États-Unis, cela a des effets tout à fait impressionnants sur les emplois et les investissements dans de nombreuses entreprises. Il y a également une étude au sujet des investissements des sociétés multinationales canadiennes à l'étranger. Là encore, c'est la même chose. Elle a été faite par Jason Cummins et Rosanne Altshuler, mais ses conclusions sont les mêmes.

Il y a également une étude de Ken McKenzie et Aileen Thompson qui, je crois, a déjà été publiée; elle montre qu'au fil du temps, les effets relatifs sur les investissements au Canada par rapport aux États-Unis ont eu des répercussions sur les investissements et la création d'emplois, qui en seraient la conséquence.

Cela prouve donc que nous avons fait... Notre comité était convaincu que cela a certainement un effet.

Pour revenir à la réduction des impôts, nous n'avons pas recommandé une réduction des impôts. Nous avons recommandé un rééquilibrage, une restructuration du régime fiscal des entreprises. D'après ces trois études, je pense qu'on pourrait constater que la sorte d'approche que nous proposons présente un grand intérêt et qu'on pourrait peut-être même consacrer une partie de l'excédent budgétaire—sans que ce soit nécessairement une grosse somme; ce pourrait être une petite somme—à certaines réductions des impôts sur les entreprises. Je pense que cela présente un certain intérêt et que ce serait bon pour l'économie canadienne.

Prenons l'exemple de la Grande-Bretagne; le dernier gouvernement avait initialement un taux d'impôt sur les bénéfices des entreprises de 33 p. 100, c'est-à-dire de dix points de moins que nous, et, après deux budgets, il l'a réduit de trois points. Il a aussi élargi l'assiette fiscale. Il a imposé plus lourdement les sociétés de services publics et il a fait toutes sortes d'autres choses, mais il a certainement un système qui est plus neutre que le nôtre et qui convient mieux à l'industrie des services, si bien qu'il peut attirer des entreprises étrangères en Grande-Bretagne. En conséquence, ce pays a eu une très bonne croissance économique.

Je pense que les preuves sont là. Elles ont été rassemblées par de nombreuses personnes, et je pense que notre comité a été tout à fait convaincu par cela.

M. Nelson Riis: ...

[Note de la rédaction: Inaudible]... par un gouvernement travailliste.

M. Jack Mintz: Oh oui, c'est exact. C'était un gouvernement travailliste. Je l'oubliais.

Le président: Merci, monsieur Riis.

Monsieur Solberg.

M. Monte Solberg: Il n'y a aucun politicien dans cette salle qui dirait que le chômage n'est pas un des plus gros problèmes de notre pays et une de ses principales priorités. Vous avez montré comment il fallait s'y attaquer en tenant compte des antécédents des entreprises, dans une certaine mesure, ce qui donnerait une réduction de 1/2 p. 100 du chômage, qui pourrait aller jusqu'à 2 p. 100 si ce système était entièrement appliqué... Qu'est-ce qui empêche de mettre ce système en oeuvre maintenant? Est-ce simplement une absence de volonté politique?

M. Jack Mintz: Je ne vais pas faire de commentaires au sujet de l'économie politique. Je ne pense pas que ce soit le rôle d'un économiste, qui n'est généralement pas quelqu'un qui participe à ce genre d'évaluation. Vous pourriez demander cela à un politologue.

Ce système a deux inconvénients—et il ne faut pas le vanter exagérément. Avant tout, il est plus complexe que le système actuel, parce qu'on demande aux entreprises de tenir un registre. Nous avons évalué cela et nous avons constaté que les gains qu'en retirerait l'économie dépasseraient largement le coût entraîné par la complexité de ce système. C'est une chose.

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L'autre chose est le problème dû au fait que certaines sociétés sont confrontées à davantage de facteurs saisonniers que d'autres pour ce qui est de ce qui se passe dans l'économie mondiale. Sans y être pour rien, elles ont tendance à avoir un plus grand roulement de personnel, ce qui est la raison pour laquelle nous avons recommandé de ne tenir que partiellement compte des antécédents des entreprises. Nous reconnaissons qu'on ne peut pas reprocher entièrement à certaines industries qui ont un fonctionnement cyclique la façon dont elles mettent leurs employés à pied ou, disons, leur en attribuer l'entière responsabilité.

Je pense que ce qui nous a réellement frappés au sujet de cette analyse du travail qui a été fait est que, comme il y a une telle variation d'une entreprise à l'autre, même pour une industrie saisonnière comme la foresterie, on peut réaliser des gains très importants même si on n'adopte ce système qu'à concurrence de 25 p. 100.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Mintz.

Nous allons étudier votre rapport dans le cadre de la consultation prébudgétaire, et nous allons tenir compte du fait que vous croyez que c'est un ensemble de mesures équilibré. Je pense que, selon vous, ces mesures créeraient en fait de nouvelles possibilités de croissance économique et de création d'emplois. En fait, si on abaissait les taux d'imposition pour les rapprocher des normes internationales, cela encouragerait davantage les entreprises à investir et à créer des emplois. En même temps, vous avez l'impression que cela va maintenir et protéger l'assiette fiscale.

Une des choses qui est également importante dans votre résumé est le fait que ce rapport, selon vous, nécessite de plus en plus de consultations, bien entendu, ce qui permettra de mettre en place un meilleur régime fiscal pour les entreprises, dont profiteront les Canadiennes et les Canadiens.

Je veux également vous dire que, pendant la consultation prébudgétaire, nous entendrons des particuliers ainsi que des porte-parole, par exemple, de l'industrie manufacturière, des producteurs de pétrole et de l'industrie des pâtes et papier, qui ont critiqué votre rapport, pour nous faire une idée équilibrée des questions en jeu.

Je voudrais simplement vous dire que nous allons examiner très sérieusement votre rapport dans le cadre de notre consultation prébudgétaire. En fait, nous vous inviterons peut-être à comparaître à nouveau, si les membres du Comité pensent que c'est nécessaire.

Donc, au nom du Comité, nous voudrions vous exprimer notre gratitude la plus sincère pour votre travail ainsi que pour votre contribution aux audiences de consultation prébudgétaire. Merci.

La séance est levée.