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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 6 octobre 1998

• 0741

[Traduction]

Le vice-président (M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.)): La séance est ouverte. Bonjour à tous.

Aujourd'hui, nous poursuivons les audiences sur l'avenir des institutions financières, pour entendre les commentaires des Canadiens sur les fusions, en particulier les fusions des banques, et surtout, pour connaître la perception que se font les Canadiens de l'avenir des institutions financières, en conférant évidemment au Canada un avantage concurrentiel dans le monde.

Nous consultons les Canadiens d'un océan à l'autre. Nous entreprenons aujourd'hui la deuxième journée de notre tournée dans l'est du Canada. Nous nous rendrons cet après-midi dans la région de Halifax-Dartmouth. Mon collègue et président du Comité des finances, M. Bevilacqua, fait la même chose dans l'Ouest, à Calgary, à Vancouver, en Saskatchewan et au Manitoba.

Nous espérons rendre compte au ministre des audiences sur les consultations prébudgétaires qui ont eu lieu hier, ainsi que des recommandations sur le rapport du Groupe de travail MacKay, comme on l'appelle désormais, d'ici la mi-décembre au plus tard, afin de fournir à M. Martin l'information qu'il a demandée.

Nous attendons un autre témoin. Normalement, nous écoutons les témoins à la table ronde. Nous leur donnons environ 10 minutes pour faire un exposé, qui est suivi d'une période de questions.

J'aimerais commencer par présenter les témoins. Je vous remercie de vous être déplacés pour venir exprimer les opinions de vos sociétés et associations, et surtout celles des Terre-Neuviens, qui à mon avis vont profiter de vos exposés.

M. John Thompson représente l'Association des courtiers d'assurance de Terre-Neuve. Il est accompagné de MM. Jeff Wedgewood et Brian Flemming. M. Sam Walters représente la Banque Royale de Terre-Neuve et Labrador.

Qui aimerait commencer?

Monsieur Walters, aimeriez-vous commencer? Nous procéderons par ordre alphabétique inverse.

M. Sam Walters (vice-président, Banque Royale de Terre-Neuve et Labrador): Merci beaucoup.

Je vous souhaite la bienvenue à St. John's, capitale de la province de Terre-Neuve et Labrador, qui comme vous le savez sans doute, célébrera l'année prochaine le 50e anniversaire de son union à ce grand pays qu'est le Canada.

La Banque Royale du Canada est présente dans cette province depuis 1895. Comme vous voyez, c'était bien avant que Terre-Neuve fasse partie du Canada. Je pense qu'il s'agissait à l'époque de sa première ou de sa deuxième succursale à l'extérieur du Canada, succursale qui a ouvert ses portes ici en 1895.

Depuis, nous entretenons d'excellentes relations avec la population de cette province, des relations qui durent depuis 104 ans. Lorsque nous avons célébré notre 100e anniversaire, nous avions un slogan qui affirmait notre fierté d'avoir contribué au patrimoine canadien. Je sais que notre partenaire dans la fusion proposée, soit la Banque de Montréal, a aussi tenu des célébrations semblables, ayant été fondée à peu près en même temps que nous, peut-être même un peu plus tôt.

• 0745

Notre institution a aussi participé de près aux célébrations de Cabot 500, dont on a parlé partout au Canada et dans le monde entier, en tant que commanditaire principal en collaboration avec la ville de St. John's, et nous participerons étroitement aux Jeux d'hiver du Canada à Corner Brook en février 1999. Il s'agira des premiers Jeux d'hiver du Canada que la province accueillera.

Ayant situé le contexte, j'aimerais maintenant vous parler de trois questions liées à la fusion du point de vue de Terre-Neuve et Labrador: le réseau des succursales; les répercussions sur les employés; et le marché de la petite entreprise.

Notre président, John Cleghorn, a déjà témoigné devant ce comité, comme l'a fait auparavant le président de la Banque de Montréal, Matthew Barrett, et il a traité de questions ayant une portée nationale et internationale. Je n'ai pas l'intention d'aborder ces questions aujourd'hui.

En ce qui concerne le réseau, il n'y a que quatre collectivités à l'extérieur de St. John's qui comptent à la fois une succursale de la Banque Royale et une succursale de la Banque de Montréal, soit Gander, Grand Falls—Windsor, Corner Brook et Stephenville. À St. John's, nos succursales desservent toute la ville, et à mon avis toutes resteront ouvertes si la fusion va de l'avant.

Je devrais ajouter en ce qui concerne les quatre collectivités que j'ai mentionnées, soit Gander, Grand Falls—Windsor, Corner Brook et Stephenville, que lorsque nous avons rencontré les maires de ces collectivités, ces derniers n'ont exprimé aucune crainte à l'égard de la fusion en tant qu'étape normale de l'évolution de notre pays et de leurs collectivités, et certains ont même exprimé leur appui.

Si on revient à St. John's, dans le cas des deux succursales principales, qui sont situées rue Water, pas très loin d'ici, les deux ont un mur mitoyen. L'édifice que nous occupons est utilisé à pleine capacité, et même s'il reste des locaux dans celui de la Banque de Montréal, nous ne pourrions pas loger tout le personnel dans cet édifice après la fusion.

Vous avez peut-être appris, en lisant le Maclean's et d'autres revues, ou à la suite du témoignage de John Cleghorn, en février, que notre proposition dans ce cas particulier consisterait à réunir les installations en pratiquant une ouverture dans le mur mitoyen.

Je devrais aussi ajouter en ce qui concerne le réseau de la Banque Royale et de la Banque de Montréal dans cette province, qui compte en tout quelque 47 succursales, que notre taille serait inférieure à celle de l'un de nos principaux concurrents, à savoir la Banque de Nouvelle-Écosse, à Terre-Neuve et au Labrador. Je devrais aussi mentionner que ce réseau de 47 succursales nous permettrait d'offrir à nos clients d'affaires une meilleure couverture provinciale pour les dépôts et les autres services bancaires.

Bref, j'estime que la fusion aura très peu de répercussions sur notre réseau dans cette province. Elle devrait se traduire par d'importants avantages pour nos clients, tout en nous permettant de fournir à nos clients de Terre-Neuve et Labrador des services améliorés.

Pour ce qui est de l'emploi, la fusion ne devrait avoir que très peu de répercussions. Cela est attribuable à la configuration du réseau, que je viens de mentionner, et aussi au fait que le personnel des deux banques est très efficace.

Je peux vous citer le cas de Stephenville, où, comme je l'ai mentionné, on compte à la fois une succursale de la Banque de Montréal et une succursale de la Banque Royale. Si le projet de fusion est approuvé, nous ne conserverons qu'un seul établissement physique à Stephenville. Supposons que nous ayons, à titre d'exemple, trois agents de services bancaires aux particuliers à la Banque Royale et deux autres à la Banque de Montréal. Lorsque nous fusionnerons les deux établissements, tous ces agents emmèneront avec eux leur clientèle. Par conséquent, après la fusion, nous aurons quand même besoin de ces cinq agents de services bancaires aux particuliers, peu importe l'immeuble dans lequel nous choisirons de nous établir.

De même, s'il y a trois employés qui à la Banque de Montréal comptent les dépôts en argent effectués par les clients d'affaires, etc., et qu'il y en a deux qui font le même travail à la Banque Royale, nous aurons besoin de ces cinq employés après la fusion, parce que la quantité d'argent à compter à Stephenville restera la même.

Je ne prétends pas que ces chiffres soient exacts, je ne les utilise qu'à titre d'exemple. Ça illustre bien le genre de situation que nous vivons dans les diverses collectivités de cette province, et je pense que c'est assez comparable à ce qu'on peut observer dans les autres collectivités rurales du reste du Canada.

• 0750

Enfin, j'aimerais parler de nos petits clients d'affaires dans cette province. À la Banque Royale, et je pense que les représentants de la Banque de Montréal pourraient dire la même chose, et en fait, toutes les banques de cette province pourraient dire la même chose—la petite entreprise est la pierre d'assise du milieu des affaires dans cette province. On compte très peu de sociétés du secteur public. En tout, malgré quelques émissions initiales d'actions qui ont été faites récemment, on en compte probablement moins de 12, peut-être même que c'est plutôt de l'ordre de six ou sept entreprises importantes du secteur public.

La petite entreprise a donc sans doute un rôle encore plus important à jouer ici que dans le reste du Canada où, comme vous le savez, on la qualifie souvent de «moteur de l'économie».

Nous estimons que nous avons un bilan très solide dans cette province en ce qui concerne l'aide à la petite entreprise. Nous sommes établis ici, comme je l'ai dit plus tôt, depuis 100 ans, et nous soutenons les industries traditionnelles du secteur primaire, qu'il s'agisse de la pêche, de l'agriculture, de la foresterie ou des mines.

Nous estimons en outre qu'il est essentiel que nous soutenions efficacement ce secteur, non seulement parce qu'il nous donne l'occasion de collaborer avec les petites entreprises, mais aussi parce que cela nous permet d'établir des relations avec bon nombre des propriétaires d'entreprise qui font également affaire avec nous à titre personnel.

La Banque Royale jouit d'une excellente réputation dans ce secteur, et elle soutient activement la nouvelle économie, appelée l'économie du savoir. Le premier ministre était ici il y a environ une semaine pour participer à SoftWorld, et il a défini la stratégie de développement de cet important secteur.

La Banque Royale soutient activement le développement de ce secteur à l'échelle nationale et locale. Nous participons à différentes organisations communautaires axées sur les affaires, comme le Board of Trade, SoftWorld, que je viens de mentionner, ou différents comités.

Personnellement, je préside Opérations en ligne, qui est une initiative financée par le gouvernement fédéral par l'entremise de la province. Elle a été lancée par un conseil du secteur privé en vue de favoriser l'expansion des économies du savoir dans la province.

Il est donc extrêmement important pour nous de bien servir le secteur de la petite entreprise. Je pense que le bilan des deux banques à l'échelle provinciale et nationale illustre bien le soutien que nous apportons à la petite entreprise. Nous ne sommes pas loin des chiffres proposés par le groupe de travail de Tony Ianno au cours de sa tournée pancanadienne.

En terminant, je tiens à vous remercier de m'avoir donné l'occasion de vous parler des efforts que nous avons déployés dans cette collectivité pour soutenir la croissance et la prospérité de la province et pour devenir des joueurs de premier plan dans ce grand pays qu'est le Canada.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup, monsieur Walters.

Je donne maintenant la parole, je présume, à M. Thompson, ou est-ce que vous allez présenter tous les trois un mémoire?

M. John Thompson (président, Association des courtiers d'assurance de Terre-Neuve): Essentiellement, je serai le seul à faire l'exposé; et nous répondrons tous les trois aux questions.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je vous en prie.

M. John Thompson: Merci beaucoup, monsieur le président.

Je représente l'Association des courtiers d'assurance de Terre-Neuve qui regroupe environ 500 courtiers indépendants d'assurance contre les risques divers et d'assurance des biens dans cette province.

Dernièrement, les membres de ce comité ont eu l'occasion d'entendre le témoignage de notre groupe national d'intervention, à savoir l'Association des courtiers d'assurance du Canada. Nous ne répéterons pas les préoccupations soulevées par l'Association, mais nous aimerions vous faire connaître nos opinions sur les recommandations relatives aux banques et à l'assurance formulées par le Groupe de travail MacKay.

Les répercussions de ces recommandations sur notre capacité de soutenir la concurrence sur un pied d'égalité préoccupent beaucoup notre association. Le Groupe de travail MacKay propose de donner aux banques davantage de pouvoirs ainsi que des privilèges spéciaux aux dépens de la petite entreprise et de la juste concurrence. Selon les études mêmes du groupe de travail, il n'est pas garanti que les consommateurs en profiteront.

• 0755

Comme l'Association l'a indiqué, le groupe de travail propose un cadre qui va réduire la concurrence au lieu de l'accroître. Ce faisant, le groupe de travail a complètement fait fi de l'incidence que cette recommandation aura sur le marché de l'emploi.

Le groupe de travail ne fait que mentionner en passant que certains emplois pourraient être supprimés. Cet énoncé est particulièrement déconcertant et peut-être mal indiqué compte tenu des obstacles que nous devons surmonter dans cette province pour conserver nos emplois et en créer de nouveaux.

Dans notre province, les courtiers indépendants font partie intégrante de leurs collectivités respectives, depuis des décennies, et ils ont répondu aux besoins d'assurance de dommages des Terre-Neuviens depuis le début du siècle. De nombreuses maisons de courtage sont restées dans la même famille génération après génération. Nos 500 membres se trouvent dans une centaine de localités de Terre-Neuve et du Labrador, y compris la plupart des localités rurales.

Le courtier d'assurance typique soutient sa collectivité en faisant des dons et en jouant un rôle communautaire important. Les courtiers indépendants contribuent également au bien-être économique de leur collectivité en créant des possibilités d'emploi. Il faut signaler qu'environ 85 p. 100 des biens et services dont les courtiers ont besoin sont achetés localement.

En proposant de conférer aux banques un avantage injuste par rapport à leurs concurrents, le groupe de travail compromet des centaines d'emplois dans la province. De plus, des millions de dollars en avantages économiques régionaux et recettes fiscales seront perdus.

En quoi cela va-t-il contribuer à préserver des emplois et à en créer de nouveaux dans la province? En quoi cela va-t-il aider la petite entreprise locale? Le groupe de travail ne répond pas à ces questions.

En fait, à notre grande surprise, le groupe de travail n'a tenu aucun compte du rôle du courtier indépendant. Nous ne comprenons pas pourquoi. Ces emplois ne comptent-ils pas?

Le rapport du groupe de travail ne tient pas compte non plus du fait que les Canadiens ont l'une des industries de l'assurance de dommages les plus solides, les plus rentables et les plus concurrentielles au monde.

Le problème n'est donc pas l'absence de concurrence dans le secteur de l'assurance des dommages. C'est plutôt le manque de concurrence dans le secteur bancaire, qui est fortement concentré et dominateur. Ce devrait être le point de départ de nouvelles discussions.

Il faut veiller à ce que la concurrence intense qui caractérise le secteur de l'assurance de dommages se reflète dans le secteur bancaire canadien. N'allons pas appuyer une politique qui favorise les banques par rapport à d'autres groupes.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci beaucoup à vous deux.

Je voudrais maintenant passer à M. Forseth. Nous aurons un tour de dix minutes chacun.

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Merci.

J'ai une question pour les représentants du secteur de l'assurance: Les banques sont-elles venues discuter directement avec vous de leur désir d'empiéter sur ce que vous considérez comme votre domaine? Y a-t-il eu des discussions directes entre votre association nationale, par exemple, et les banques?

D'après ce que les médias en ont dit, les avis sont partagés d'un côté et de l'autre. Je vous demande si vous avez eu des discussions et des négociations avec les banques au sujet de leur intention de marcher sur vos plates-bandes?

M. Jeff Wedgewood (secrétaire, Insurance Brokers Association of Newfoundland): Pour ce qui est de Terre-Neuve, je ne suis au courant d'aucune discussion qui aurait eu lieu directement entre disons, la Banque Royale ou la Banque de Montréal et notre association ou un courtier indépendant.

Sur la scène nationale, nous savons qu'il y a eu des tentatives de partenariat par le passé. La Banque Toronto-Dominion a essayé de s'associer avec la compagnie d'assurances Lombard pour fournir des produits d'assurance de dommages à ses clients.

M. Paul Forseth: Quand vous parlez d'assurance de dommages, de quoi parlez-vous...?

M. Jeff Wedgewood: Il s'agit de l'assurance de biens et de risques divers par opposition à l'assurance-vie.

M. Paul Forseth: Merci.

M. Jeff Wedgewood: Par conséquent, au niveau local, non, nous n'avons pas eu connaissance de discussions de ce genre.

• 0800

M. Paul Forseth: Je vais vous demander à tous deux, vous et M. Walters, de répondre à cette question concernant l'entrée des banques sur le marché des services d'assurance générale. Le problème qui m'a été signalé est celui de la formation, de l'agrément, de la discipline et du contrôle.

Nous avons un secteur de l'assurance très bien établi qui existe depuis longtemps. C'est un secteur assez stable, mais très concurrentiel. Même les compagnies d'assurances qui font des affaires dans le monde entier et qui ont recours à des courtiers plutôt qu'à des agents sont assez inquiètes de ce que les nouvelles règles du jeu représentent pour elles au Canada en raison du risque économique et de l'incertitude. Les planificateurs économiques n'aiment pas l'incertitude économique.

On ne cesse de dire qu'il faut «des règles du jeu équitables». Nombreux sont ceux qui se disent prêts à se lancer dans la partie si les règles du jeu sont véritablement équitables. Je me demande donc si l'arrivée des banques dans votre secteur vous inquiète, surtout en ce qui concerne la formation, l'agrément, la discipline et le contrôle de même que le maintien des normes pour assurer des règles du jeu équitables.

On m'a parlé d'un exemple, aux États-Unis, je crois, où l'on avait promis que les règles du jeu seraient équitables. Le directeur de la succursale locale a obtenu l'agrément nécessaire et devait suivre une formation, mais finalement, une bonne partie du travail administratif a été confiée à d'autres, même à des employés à temps partiel, alors que cela devait être fait par le directeur. Deux ou trois ans plus tard on avait laissé tomber tous les plans et les scénarios établis au départ et il n'y avait aucun mécanisme indépendant pour s'assurer qu'ils soient suivis.

Même si nous avons ici une situation idéale, les meilleurs plans qui soient et des règles bien définies, je me demande si, d'ici deux ans peut-être, tout cela ne risque pas d'être complètement abandonné.

Je vous ai posé toutes mes questions. Je voudrais que les assureurs y répondent et peut-être aussi M. Walters.

M. Jeff Wedgewood: À Terre-Neuve, l'Insurance Brokers Association parraine et administre un certain nombre de programmes d'agrément. Nous avons plus précisément un programme appelé Fundamentals of Insurance qu'il faut suivre pour obtenir un permis de courtier d'assurance de dommages dans la province.

Nous avons également un programme d'accréditation, le Canadian Accredited Insurance Broker ou CAIB, qui comprend plusieurs modules. C'est un programme très intense qui forme de véritables professionnels de l'assurance. Nous sommes très fiers de nos diplômés.

Une fois que nos membres ont obtenu le titre de CAIB, nous leur offrons un diplôme de Chartered Canadian Insurance Broker ou CCIB, qui se trouve un rang au-dessus du programme CAIB et qui situe nos membres à l'échelon le plus élevé de la profession.

Ce sont des programmes très stricts qui exigent beaucoup d'étude. Il faut posséder de l'expérience dans le domaine pour pouvoir réussir les examens. Une fois que les membres de nos associations ont obtenu ces certificats, nous estimons qu'ils sont vraiment en mesure de fournir les meilleurs conseils aux Terre-Neuviens qui achètent de l'assurance.

• 0805

Comme je l'ai dit, le programme de formation de base en assurance est obligatoire pour obtenir l'autorisation d'exercer la profession à Terre-Neuve et au Labrador.

L'un des problèmes est dû sans doute au fait que l'assurance tombe sous le coup de la réglementation provinciale plutôt que fédérale et que les exigences changent d'une province à l'autre pour l'obtention du permis. Terre-Neuve est l'une des provinces où les exigences sont les plus strictes pour les courtiers d'assurance de dommages.

Nous nous demandons par conséquent qui, dans les banques, va conseiller les Canadiens en matière d'assurance et quel sera le niveau de formation de ces employés? Si vous parlez à l'un de nos membres, vous avez de bonnes chances de vous adresser à quelqu'un qui possède au moins le titre CAIB. À Terre-Neuve, nous avons la plus forte concentration de CCIB du pays, par habitant.

C'est donc une chose dont nous sommes fiers. Nos membres ont reçu une solide formation et ils sont parfaitement en mesure de fournir les meilleurs conseils possible.

M. Paul Forseth: Pourriez-vous également nous parler du titre de CLU ou Certified Life Underwriter?

M. Jeff Wedgewood: Je ne peux pas le faire personnellement, car il s'agit d'un groupe distinct de celui que nous représentons aujourd'hui.

M. Brian Flemming (trésorier, Insurance Brokers Association of Newfoundland): Je pourrais peut-être ajouter quelques mots.

Je précise que je suis relativement nouveau dans ce secteur. Je travaille pour mon courtier actuel depuis cinq ans environ. Avant je travaillais pour KPMG. Je suis comptable agréé.

Comme vous le savez sans doute, il s'agit d'un milieu assez technique. Avant d'entrer dans le secteur de l'assurance, je faisais de la vérification comptable. Puis j'ai décidé de travailler pour mon employeur actuel, qui est courtier.

J'ai été très étonné, je dois le dire, par le niveau de connaissance technique nécessaire pour vendre un produit d'assurance de dommages. L'assurance résidentielle et automobile de base est un produit très complexe de nos jours. Les gens ne connaissent peut-être pas parfaitement leurs produits d'assurance, mais grâce à notre programme de formation professionnelle, nous essayons d'informer le public le mieux possible.

Comme courtiers indépendants, nous cherchons, bien entendu, à réaliser un certain chiffre d'affaires et à être rentables. Nous le faisons en veillant à conserver notre clientèle et à attirer de nouveaux clients. Pour cela, nous misons sur notre professionnalisme de même que sur les prix.

En entrant dans ce secteur, j'ai constaté que le roulement des employés était moins rapide que chez les comptables agréés où la durée moyenne d'emploi était de deux ou trois ans.

Chez mon courtier actuel où je m'occupe du personnel et des questions financières, les employés comptent en moyenne 11 ans d'ancienneté. Chez nous comme chez la plupart des membres de l'Association des courtiers, nous faisons beaucoup pour convaincre nos employés de poursuivre leur formation. Un peu plus de 80 p. 100 de notre personnel possèdent un titre professionnel du secteur de l'assurance.

Si vous prenez les titres professionnels et le fait qu'un bon nombre d'employés comptent 10 ans d'ancienneté et plus, cela témoigne de l'engagement des courtiers et de leurs employés à répondre aux besoins du public.

M. Paul Forseth: Très bien. Vous parlez seulement du secteur de l'assurance-dommages et non pas de celui de l'assurance-vie. Je crois que les banques veulent vendre tous ces produits.

M. Brian Flemming: Malheureusement, l'Insurance Brokers Association of Newfoundland ne représente pas les vendeurs d'assurance-vie. Nous nous spécialisons dans l'assurance-dommages et commerciale.

• 0810

M. Paul Forseth: Je crois que M. Walters désire ajouter quelque chose.

M. Sam Walters: Comme vous le savez, nous ne sommes pas autorisés pour le moment à distribuer des produits d'assurance autres que l'assurance-vie dans nos succursales. Je veux dire par là que, si nous accordons un prêt hypothécaire à quelqu'un qui veut une assurance-vie, nous pouvons vendre cette assurance. Normalement, nous le faisons par l'entremise d'une compagnie d'assurance-vie comme Sun Life ou Canada Life.

Pour ce qui est de la formation et des normes, je crois pouvoir dire sans hésiter que nos employés et nos organisations ont prouvé leur désir d'atteindre le plus haut niveau de compétence qui soit pour traiter avec la clientèle car sinon, nous ne tiendrons pas très longtemps.

Nous n'avons pas d'employés formés dans les divers secteurs de l'assurance, comme on l'a mentionné, mais je suis très fier de dire que nous avons dispensé une formation à nos employés pour la vente de fonds communs de placement afin qu'ils répondent aux normes et réussissent les examens. Une bonne partie de notre personnel a suivi le cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada. Ce n'était pas le cas par le passé, mais depuis trois ou quatre ans, un grand nombre de nos employés ont suivi cette formation. Il y en a également beaucoup qui ont suivi le cours de planification financière. Nous comptons également des comptables agréés et de nombreux diplômés de l'Université Memorial qui ont un diplôme de premier cycle ou un MBA.

Je sais que si nous devions commencer à vendre les produits d'assurance dont il a été question, nous serions déjà bien établis sur ce plan, car nous vendons de l'assurance par l'entremise de compagnies comme Voyageur, de même que nos produits de crédit et d'assurance-vie et autres.

Nos employés ont reçu une formation pour vendre ces produits, aussi limités soient-ils. Il ne s'agit pas d'une gamme aussi vaste que certains ici l'on prétendu.

Je peux dire, sans équivoque, que si nous nous lançons dans ces secteurs, nous nous attendrons à devoir respecter des normes pour pouvoir vendre ces produits aux consommateurs canadiens.

J'ajouterais que le roulement du personnel a posé un problème aux banques, mais qu'il y a dans les localités rurales et les petites villes de nombreux employés de banque qui font affaire avec les Canadiens et qui les aident. Un grand nombre de ces personnes, nos banquiers personnels tels que nous les appelons, comptent de longues années au service de leurs clients et de leurs collectivités.

M. Paul Forseth: Je vais attendre le deuxième tour.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Forseth.

C'est maintenant le tour de M. Szabo.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci.

Merci messieurs. C'est certainement l'un des sujets les plus intéressants que nous ayons étudiés, car cette question a tendance à polariser certains groupes tandis que d'autres se retrouvent à peu près au milieu. Il y a là toutes sortes de situations très intéressantes, c'est le moins qu'on puisse dire.

L'un des principaux éléments du rapport du groupe de travail MacKay se trouve dans le résumé, qui écarte la possibilité de maintenir le statu quo. C'est une chose que chacun peut interpréter à sa façon. Je sais que les banques disent qu'elles doivent donner suite à leur projet de fusion étant donné que le statu quo n'est pas une solution. Cependant, si vous lisez le texte très attentivement, il mentionne l'ensemble du secteur des services financiers, un secteur très dynamique où il se passe beaucoup de choses. On ne pourrait sans doute accuser aucun des éléments de ce secteur d'avoir contribué au statu quo au cours des 10 dernières années ou même maintenant.

Ce n'est sans doute qu'un ballon d'essai, mais les deux camps veulent en faire du capital politique.

• 0815

Sam, je voudrais vous demander ce que vous pensez des répercussions des deux projets de fusion sur le secteur de l'assurance. Vous avez entendu les arguments de ce secteur ce matin et vous en avez sans doute entendu d'autres. Je sais que les banques sont très bien préparées à ce genre de questions.

À votre avis, pensez-vous que, si nos banques à Charte se lancent dans le secteur de l'assurance par l'entremise du réseau de succursales, cela aura des répercussions sur les courtiers d'assurance et surtout sur les emplois de ce secteur?

M. Sam Walters: C'est une question à laquelle il est difficile de répondre et je ne pense pas pouvoir vous donner de réponse définitive sans l'examiner au préalable, ce que je n'ai pas fait. Je dirais seulement que l'évolution du secteur des services financiers a montré qu'un grand nombre d'entreprises que bien des gens croyaient vouées à l'échec ont trouvé le moyen de s'ajuster et de s'adapter et de tirer leur épingle du jeu.

Il suffit de prendre les sociétés de financement du Canada qui, à une certaine époque, répondaient pratiquement à tous les besoins des Canadiens en ce qui concerne les prêts à la consommation. Les banques sont entrées sur le marché, mais ces sociétés existent encore dans la plupart de nos villes. Elles ont peut-être changé de propriétaire et certaines d'entre elles appartiennent maintenant à des institutions financières étrangères, mais je crois personnellement que nos deux industries ont leur place sur ce marché. Certains produits bancaires pourront bien se vendre tandis que les banques pourront même décider de ne pas se lancer dans la vente d'autres produits. Il y a de la place pour nos deux types de compétences.

Il ne faudrait pas oublier les 700 à 800 personnes qui travaillent dans cette province pour la Banque de Montréal et la Banque Royale. Bon nombre d'entre elles travaillent en milieu rural. Étant donné que les progrès technologiques le permettent, il importe qu'elles puissent servir leurs clients.

À mon avis, je pense que les deux groupes peuvent prospérer sur le marché. Il me semble qu'il appartient aux consommateurs canadiens de décider lequel des deux offre les meilleurs services. Ce choix devrait leur appartenir.

M. Paul Szabo: Je trouve intéressant que vous parliez de «meilleurs produits». On semble présumer que les banques ont les compétences et le savoir-faire voulus pour offrir tous les types de services, ce qui contredit cependant les allégations du secteur de l'assurance. Cela m'amène à penser qu'en l'absence de cadre réglementaire ou de restrictions, si je dirigeais une banque dont les succursales obtenaient tout d'un coup le droit de vendre de l'assurance-automobile ainsi que de l'assurance de biens et risques divers, je me presserais sans doute de recruter les meilleurs agents d'assurance sur le marché. J'éliminerais tous mes concurrents puisque je pourrais me permettre d'engager les meilleurs courtiers en assurance, c'est-à-dire ceux dont les réseaux sont les plus étendus et ceux qui possèdent le plus de contacts. Je leur offrirais le salaire et les avantages sociaux voulus et j'acculerais mes concurrents à la faillite. Ce serait possible et vous le savez, n'est-ce pas? Je pourrais le faire de façon tout à fait légale.

Qu'en pensez-vous? C'est une bonne stratégie, n'est-ce pas?

M. Sam Walters: Je me contenterai de dire que nous vivons dans un pays libre et que les gens peuvent choisir l'employeur pour lequel ils veulent travailler. Je demeure convaincu que bon nombre des organismes qui existent déjà trouveront une façon de survivre. Bon nombre de courtiers en assurance indépendants ont l'appui des personnes les mieux connues de leur milieu. Leurs clients peuvent apprécier les services qu'ils sont en mesure de leur offrir tout comme ils apprécient les services de la Banque Royale ou de la Banque de Montréal. Je pense que la même chose vaut pour tous les courtiers indépendants, parce qu'ils...

M. Paul Szabo: Je pense que les autres témoins aimeraient aussi intervenir.

M. Sam Walters: ...sont très bien connus dans leur milieu, comme nous l'avons déjà dit.

M. Brian Flemming: Très rapidement, monsieur le président...

Le vice-président (M. Nick Discepola): Ne vous pressez pas, nous avons tout le temps voulu.

M. Brian Flemming: D'accord.

Comme je l'ai dit plus tôt, la raison d'être du courtier indépendant est de servir ses clients. C'est d'ailleurs ce que nous faisons.

Prenons l'exemple de ma propre maison de courtage. Nous offrons sept ou huit produits types et un certain nombre de produits personnalisés.

• 0820

Si vous vous adressez à l'un de nos agents, il vous posera des questions sur votre dossier de conducteur, votre maison, sur son emplacement, sur la distance que vous devez parcourir pour vous rendre au travail et sur toutes sortes d'aspects qui ont une incidence sur le produit d'assurance qu'il vous faut. Afin de nous gagner votre clientèle, nous vous offrirons le meilleur produit sur le marché qui réponde à vos besoins.

Voici comment je pense que les banques vendront de l'assurance. Elles vendront leurs propres produits et feront en sorte d'uniformiser les produits.

Je ne pense pas que le fait de limiter les choix du consommateur soit dans son intérêt. Notre perspective est tout à fait autre. Nous offrons à nos clients les meilleurs services qui existent sur le marché. Nous n'essayons pas de leur vendre nos produits à nous.

Si nous ne pouvons pas offrir à nos clients d'aussi bons services que d'autres courtiers, nous les perdrons et nous devrions les perdre.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Si vous me permettez d'intervenir.

Cela ne vous donne-t-il pas un grand avantage sur vos concurrents? Comme vous l'avez dit, les banques vont produire de très belles brochures et donner des noms accrocheurs à leurs produits qui, comme nous le savons tous, répondront aux besoins de leurs clients actuels. Vous pouvez cependant leur offrir un service personnalisé, ce qui m'apparaît comme un grand avantage.

M. Brian Flemming: Peut-être n'aurons-nous cependant pas la chance d'offrir nos produits aux clients dans l'avenir. Si le client contracte un prêt auprès d'une banque—et nous ne pensions pas aborder aujourd'hui la question de la vente liée—, et qu'on lui donne au même moment des brochures sur l'assurance hypothécaire, l'assurance-maison ou l'assurance-automobile, nous n'aurons peut-être même pas la possibilité de lui présenter nos produits.

Cette façon de procéder plaira peut-être à certains consommateurs, mais pas à d'autres. Je pense que nous perdrons cependant ainsi une bonne partie de nos clients qui n'auront plus à chercher par eux-mêmes quels sont les services qui sont offerts sur le marché.

Je ne pense pas que le fait que nous offrions des services personnalisés nous donne un avantage concurrentiel par rapport aux banques. Si le client s'adresse d'abord aux banques, ce sont elles qui auront un grand avantage concurrentiel par rapport à nous.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Paul.

M. Paul Szabo: J'aimerais aborder la question du point de vue inverse... Le rapport du groupe de travail MacKay traite longuement de l'intérêt public, et cet intérêt est lié en partie à la réduction des coûts dans le secteur des services financiers. Il s'agit d'obtenir le meilleur prix possible dans une industrie compétitive. Cela fait vraiment ressortir l'importance de la compétitivité.

Je ne voudrais pas être mesquin, mais l'industrie du courtage elle-même est un intermédiaire entre le fournisseur de produits d'assurance et le client... Le courtier peut chercher à promouvoir les produits de l'assureur qui offre la meilleure commission. Une bonne part des clients qui souhaitent acheter de l'assurance-automobile et de l'assurance de dommages ont simplement besoin d'un produit type. Prenons le cas de l'assurance-locataire. Dans ce cas, c'est le propriétaire qui précise tous les détails. Il y a aussi l'assurance-automobile type pour les voitures louées. J'ai loué une voiture et le marchand a précisé que mon assurance-responsabilité devait être d'un million de dollars et que la franchise serait de 500 $.

Certains consommateurs veulent simplement des produits types, mais ils doivent toujours s'adresser à vous, ce qui comporte certains frais.

Certaines sociétés d'assurances offrent maintenant directement leurs produits aux clients. C'est une autre tendance au sein du secteur des courtiers d'assurance.

• 0825

Ce que j'aimerais essentiellement savoir de vous est ceci: Ne pensez-vous pas que les banques ont les compétences et le personnel qu'il faut pour offrir des produits qui seraient vendus au volume, ce qui éliminerait la nécessité d'un intermédiaire?

Il s'agit peut-être ici simplement d'une question de perception. Je comprends que certaines réclamations d'assurance sont peut-être assez complexes, mais je suppose que les banques estiment que le système de distribution n'est pas très efficace et qu'il est coûteux pour le consommateur. Elles pensent sans doute pouvoir offrir à meilleur prix au consommateur un produit qui répondra à ses besoins de base.

M. John Thompson: Je vous remercie de la question.

Pour ce qui est des dépenses, la CIBC Assurance, créée en 1992, se situe maintenant, comme vous le savez sans doute, au 21e rang parmi les sociétés d'assurances. La CIBC n'a donc pas mis beaucoup de temps à se tailler une place intéressante sur le marché depuis l'adoption de règles plus souples en 1992.

Or, la CIBC se situe tout à fait dans la moyenne pour ce qui est du pourcentage des frais généraux. Elle se situe tout à fait dans la moyenne des sociétés de courtage et des assureurs directs. La CIBC ne jouit donc pas d'un avantage pour ce qui est des coûts.

En fait, parce que ses frais généraux sont trop élevés, la CIBC fait maintenant appel à une société américaine pour faire la promotion de ses produits par téléphone. Elle n'a cependant pas abaissé ses primes.

Pour ce qui est de la possibilité que les consommateurs s'adressent directement aux assureurs, je pense que certains consommateurs du moins souhaitent qu'il existe différents canaux de distribution. Les courtiers en assurance continuent de vendre 70 p. 100 des produits d'assurance qu'achètent les Canadiens. Les Canadiens choisissent donc de s'adresser à eux.

Si l'on permet aux banques de vendre de l'assurance au détail, comment une entreprise comme la mienne pourrait-elle concurrencer la CIBC en ce qui touche la promotion de ses produits? La CIBC peut annoncer ses produits à la télévision toute la journée, ce que ne peut pas faire une entreprise de la taille de la mienne. La CIBC a des moyens peut réduire à néant ses concurrents, ce qu'une entreprise comme la mienne ne peut pas faire.

Tout tourne autour du service au public. Nous estimons offrir un très bon service au public. Nous connaissons notre domaine. Nous pouvons communiquer avec de nombreux assureurs pour trouver le produit qui convient le mieux à notre client.

Cela revient à ce que disait Brian plus tôt. Les banques offriront un produit type. Nous offrons plusieurs types de produits.

Nous ne pensons pas que l'argument des économies d'échelle tienne. La CIBC, qui cherche à fonctionner de cette façon, n'a pas pu démontrer aux Canadiens qu'elle y était parvenue.

M. Sam Walters: Je ne suis pas vraiment en mesure de me prononcer sur ce que fait l'un de nos concurrents.

Pour ce qui est des produits d'assurance, j'aimerais signaler que nous n'avons pas vraiment établi la liste des produits qui peuvent être vendus aux termes de la Loi sur les banques. Les banques se sont cependant lancées sur le marché en 1995, mais 70 p. 100 des Canadiens continuent d'acheter leurs assurances par l'intermédiaire d'un courtier.

Cela revient à ce que je disais au sujet des liens qui se sont établis entre les clients et les courtiers d'assurance. Je pense que ces liens seront encore plus importants dans l'avenir.

Comme ils le font lorsqu'ils achètent bon nombre de produits, qu'il s'agisse d'une automobile, d'une hypothèque ou d'un produit d'assurance, les consommateurs verront ce qui s'offre sur le marché. Ils s'adresseront à une entreprise qui est compétitive. À mon avis, c'est la tendance qui se dessine.

• 0830

Comme on y a aussi fait allusion, il faudra tenir compte des nouvelles méthodes de commercialisation des produits d'assurance, comme Internet notamment, auxquelles on aura de plus en plus recours à mesure qu'elles se répandront dans notre société.

M. Paul Szabo: Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, Paul.

J'aimerais revenir à une question qui a aussi été abordée par certains témoins entendus à Ottawa, c'est-à-dire que même si on permettait aux banques de vendre au détail de l'assurance de biens et risques divers, leur part du marché ne dépasserait pas 20 p. 100. Vous ne contestez pas ce chiffre. Vous avez dit que 70 p. 100 du marché vous appartenait toujours.

Je considère comme un grand avantage pour vous le fait que vous puissiez personnaliser les produits que vous offrez à vos clients et que vous puissiez vraiment conseiller ceux-ci dans leur choix. En effet, la personne à laquelle on s'adresse à une banque pour discuter de ses besoins d'assurance risque d'être un spécialiste de tout et de rien qui ne pourra vraiment vous conseiller que sur des produits que la succursale ou la banque en question offre. À mon sens, vous disposez d'un très grand avantage sur les banques.

L'Association canadienne des courtiers en assurance a dit ne pas s'opposer à ce que les banques vendent de l'assurance puisqu'elles le font déjà maintenant, mais qu'elle n'aimait pas l'idée que les banques vendent de l'assurance au détail par l'intermédiaire de leurs succursales.

J'aimerais que vous m'expliquiez où se situe la différence. Si j'ai obtenu une hypothèque auprès d'une banque, par exemple, je crois que le contrat hypothécaire m'oblige à divulguer à la banque qui assure ma maison. Pour obtenir un prêt, il faut souvent donner à la banque des renseignements concernant ses assurances et ses REÉR. La banque dispose de toute façon déjà de ces renseignements. Votre industrie s'oppose cependant à ce que la banque se serve de ces renseignements pour vendre de l'assurance au détail.

Pourriez-vous m'expliquer quelles sont vos réserves à ce sujet?

M. John Thompson: Je crois que si vous êtes un de nos clients et que votre créancier hypothécaire est la CIBC, nous devons transmettre à la banque preuve du fait que nous assurons votre maison. Si la banque vous a également consenti un prêt-auto, nous lui transmettons aussi l'information voulue concernant votre assurance-automobile. La banque possède donc dans ses dossiers tous les renseignements voulus concernant vos polices d'assurance et notamment la couverture offerte et le prix qui vous a été demandé. Lorsque la CIBC pourra offrir des produits d'assurance par l'intermédiaire de ses succursales, il lui suffira de se reporter à ce dossier pour connaître tous vos besoins en assurance.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Mais les banques disposent déjà de ces renseignements.

M. John Thompson: C'est vrai, mais elles ne peuvent pas vendre de l'assurance à partir de leurs succursales. Elles ne peuvent pas se servir de ces renseignements. Elles pourront cependant le faire si l'on autorise leurs succursales à vendre de l'assurance au détail.

Comment s'assurer que les banques ne tirent pas parti de l'information dont elles disposent?

Le vice-président (M. Nick Discepola): Qu'est-ce qui les empêche de l'utiliser maintenant.

M. John Thompson: Elles ne peuvent pas vendre des produits d'assurance à partir de leurs succursales.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Mais elles peuvent transmettre ces renseignements à...

M. John Thompson: Non, elles ne peuvent pas transmettre ces renseignements à la CIBC Assurance, du moins pas à ma connaissance.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Et cela ne se produit jamais.

M. John Thompson: C'est ce qui nous inquiète.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Très bien.

Monsieur Nystrom, vous avez la parole.

M. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. Je souhaite la bienvenue à nos deux groupes de témoins.

J'aimerais poser quelques questions à M. Walters. Je ne suis qu'un petit gars de la Saskatchewan. Je veux mieux comprendre Terre-Neuve.

Je crois comprendre que vous comptez 47 succursales dans la province. Cela inclut-il le Labrador?

M. Sam Walters: Oui.

M. Lorne Nystrom: Combien de succursales y a-t-il au Labrador?

M. Sam Walters: La Banque Royale compte deux succursales à Happy Walley—Goose Bay et la Banque de Montréal compte une succursale à Wabush ainsi qu'un comptoir à Nain, une nouvelle formule offerte en collaboration avec la Société canadienne des postes.

M. Lorne Nystrom: Combien de succursales la Banque de Montréal compte-t-elle au total à Terre-Neuve et au Labrador. Est-ce 47?

M. Sam Walters: C'est 47 au total.

M. Lorne Nystrom: Au total? D'accord.

• 0835

Si la fusion a lieu, en quoi cela va-t-il améliorer l'accès aux services bancaires pour les habitants de Terre-Neuve et du Labrador, surtout ceux qui habitent dans des collectivités éloignées? Il y a dans cette région du pays bon nombre de hameaux isolés, de petites municipalités etc., ce qui n'est pas sans rappeler les régions rurales des Prairies. Que va y gagner le commun des mortels à Terre-Neuve?

M. Sam Walters: Pour le moment, nous avons des réseaux dans toute la province. Je le répète, ce n'est pas nous mais la Banque de la Nouvelle-Écosse qui est la plus importante à Terre-Neuve et au Labrador, puisqu'elle compte environ 65 succursales dans toute la province, sauf erreur.

La fusion nous permettra de disposer d'un réseau plus vaste. Par exemple, pour certains services que mon concurrent—pour le moment la Banque de Montréal—offre à Clarenville, disons, une localité non desservie par la Banque Royale, cela aura une incidence plus grande sur les entreprises-clientes. Vous savez, si quelqu'un détient un compte courant et fait affaire avec nous, nous serons alors en mesure de lui offrir des services à moindre frais, du moins nous l'espérons, du fait qu'il sera possible d'offrir des services d'une succursale à l'autre au lieu de devoir passer par plusieurs succursales.

Cela nous permettra, ensemble, d'assurer une plus grande présence dans la région et nous espérons pouvoir améliorer la qualité des services que nous offrons aux habitants de Terre-Neuve et du Labrador. Et c'est principalement par le biais du réseau.

Pour ce qui est des régions rurales, là encore, il y a un système dont j'ai parlé et que la Banque de Montréal a mis à l'essai à Nain, de concert avec la Société canadienne des postes, pour essayer de desservir cette collectivité éloignée du nord du Labrador. Nous avons envisagé diverses possibilités ensemble. Cela nous permettra, je pense, de faire certaines de ces choses.

Avec le progrès technologique que nous connaissons aujourd'hui, c'est un domaine qui offre des possibilités très intéressantes pour les régions rurales.

Là encore, je vous rappelle la visite qu'a effectuée le premier ministre chez SoftWorld. Il a communiqué avec certaines personnes du nord du Canada, à Inuvik, et il a pu voir ce qui s'y faisait. Ces personnes étaient à la recherche de possibilités commerciales sur Internet, entre autres choses.

Si nous allons de l'avant, cela va donc aider considérablement les collectivités rurales, à mon avis. Grâce à cette fusion, selon moi, il n'y aura pas du jour au lendemain une succursale bancaire dans toutes les petites collectivités de Terre-Neuve et du Labrador, mais je pense que cela nous offre de nouvelles possibilités, grâce à la technologie, pour offrir aux Canadiens où qu'ils habitent un service de meilleure qualité.

M. Lorne Nystrom: Vous l'avez peut-être déjà dit plus tôt—je me suis absenté pendant un instant—mais pour ce qui est des 47 succursales, avez-vous donné l'assurance aux habitants de la province qu'elles resteront ouvertes? Je sais que M. Cleghorn a parlé des services offerts par une succursale, et pas nécessairement de la succursale proprement dite. Resteront-elles toutes ouvertes?

Par le passé, lorsqu'il y avait fusion entre les institutions de services financiers, on assistait souvent à la fermeture de succursales. M. Doug Peters, ancien ministre libéral responsable des services financiers et économiste en chef à la Banque Toronto-Dominion, sauf erreur, a déclaré que les fusions, si elles sont autorisées, entraîneront la mise à pied de 30 000 ou 40 000 employés.

Pouvez-vous donner l'assurance aux habitants de Terre-Neuve et du Labrador qu'aucune de ces succursales ne disparaîtra à cause de la fusion.

M. Sam Walters: Je crois pouvoir tranquilliser les habitants de Terre-Neuve et du Labrador à ce sujet. J'ai indiqué les quatre localités de la province où il y a des dédoublements, à savoir Gander, Grand Falls—Windsor, qui ne constitue qu'une seule collectivité, Stephenville et Corner Brook.

M. Lorne Nystrom: Et sans doute que, ici, dans la ville, il y aura des quartiers où certaines succursales sont assez proches les unes des autres.

M. Sam Walters: En effet.

Toutefois, c'est assez surprenant. En début février, lors de son séjour ici, j'ai promené John Cleghorn dans toute la ville. Nous nous sommes rendus dans les divers endroits. Je vous incite également, si vous en avez le temps avant de quitter St. John's, à faire le tour de la région et vous constaterez que les succursales de la Banque de Montréal et de la Banque Royale sont très éparpillées dans toute la ville. À mon avis, il n'y aura aucune fermeture de succursales dans la ville. Nous avons les deux succursales principales, que nous aimerions également voir fusionnées, comme je l'ai déjà dit, ou regroupées puisque les deux immeubles ont un mur commun. Nous sommes de ce côté-ci du mur et ils sont de l'autre.

C'est pourquoi je n'entrevois aucune fermeture de succursales à St. John's. Par contre, dans les quatre collectivités que je viens de mentionner, il est fort probable que nous partagions le même immeuble.

• 0840

Dans les collectivités en question, je pense que cela aura très peu d'incidences, voire aucune, sur l'emploi, si ce n'est peut-être—pour prendre encore une fois l'exemple de Stephenville—qu'il ne sera pas nécessaire d'avoir deux directeurs de succursale. Toutefois, nous aurons besoin de tout le reste du personnel, et nous offrirons sous un même toit diverses transactions, ce qui exigera des employés à divers postes ainsi que du personnel de soutien.

Il y a donc les quatre localités dont nous avons parlé où les deux banques seront regroupées. Même à Corner Brook, je signale en passant, la Banque de Montréal a une très grande succursale qui est très occupée et nous en avons une qui déborde également de monde. Il est donc fort possible que même dans cette localité nous ayons besoin des deux succursales fonctionnant selon un système combiné, une offrant des services aux particuliers et l'autre, aux entreprises, éventuellement.

M. Lorne Nystrom: Et dans les autres localités où vous avez dit que vous partagiez le même immeuble—autrement dit, il y aura une seule succursale au lieu de deux dans le même immeuble.

M. Sam Walters: Oui, selon toute vraisemblance. C'est tout à fait compatible avec ce que vous a dit M. Cleghorn. Toutefois, dans les localités en question, cela aura très peu de répercussions sur les emplois.

J'ajoute que, comme je l'ai déjà dit en passant, j'ai parlé aux maires de ces quatre collectivités et ils sont tous d'accord.

M. Lorne Nystrom: Vous passerez donc sans doute, pour ce qui est des immeubles proprement dits, de 47 à 44, en en conservant deux à Corner Brook pour des fins différentes.

M. Sam Walters: Plus ou moins, oui.

Je signale que dans certains cas où les succursales seront regroupées, il faudra agrandir les immeubles et prendre d'autres mesures. Il nous faudra donc apporter des améliorations.

M. Lorne Nystrom: Pour en revenir aux répercussions que cela aura au niveau personnel, pour un simple particulier à Terre-Neuve, qu'il s'agisse du professeur de Corner Brook, du pêcheur de l'un des villages éloignés, ou autre, vous avez parlé des frais de service. Quelle garantie pouvez-vous offrir que ces derniers diminueront? Pourquoi cette initiative entraînera-t-elle une réduction des frais?

M. Sam Walters: Eh bien...

M. Lorne Nystrom: Je ne suis pas convaincu que M. Cleghorn lui-même ait fait cette promesse.

Le vice-président (M. Nick Discepola): M. Cleghorn a-t-il dit que les frais de service diminueront si les deux banques fusionnent? Je ne l'ai jamais entendu.

M. Lorne Nystrom: Moi non plus. C'est justement l'objet de mon intervention.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je pensais vous avoir entendu dire que les banques s'étaient engagées à réduire les frais de service si on les autorisait à fusionner.

M. Lorne Nystrom: Non, non. Je pensais que M. Walters avait dit qu'il y aurait une diminution des frais de service, chose que n'a pas promise M. Cleghorn.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Je comprends. Vous faites dire à M. Walters ce qu'il n'a pas dit.

Allez-y.

M. Sam Walters: Une précision s'impose: ce que j'ai dit, c'est que si nous avons des entreprises clientes, et disons que leur siège social se trouve ici à St. John's et qu'elles aient une succursale à Clarenville, à l'heure actuelle si elles font affaire avec la Banque Royale, elles ne peuvent pas déposer d'argent à la succursale de la Banque Royale de Clarenville parce qu'il n'y en a pas. Par conséquent, si cette possibilité leur est donnée, il leur sera peut-être possible de réduire les frais car elles pourront faire affaire avec une seule institution au lieu de devoir passer de l'une à l'autre, comme c'est le cas actuellement.

Pour le moment, par exemple, la Banque de la Nouvelle-Écosse dispose d'un réseau très vaste, de sorte qu'elle a un avantage concurrentiel très net dans la province pour cette raison précise. Toutefois, en ce qui a trait aux frais de service, je ne prétends pas être le porte-parole de M. Cleghorn à ce sujet. J'ai dit dès le départ que je parlais de la situation à Terre-Neuve et au Labrador.

Ce qui importe, dans toute cette question, c'est de savoir ce que l'avenir nous réserve. La technologie sera déterminante pour nos activités et les services qui seront offerts aux Canadiens. C'est déjà le cas avec la gamme d'options offertes grâce à la technologie. Je pense que ce sera le moteur de notre expansion future.

M. Lorne Nystrom: Alors pourquoi aller de l'avant avec ce projet? Les simples consommateurs n'ont pas grand-chose à y gagner. Bien des gens ont déclaré que si les banques veulent fusionner, c'est surtout pour devenir de plus gros joueurs sur la scène internationale ou à l'échelle mondiale, mais là encore, qu'est-ce qui vous prouve que cette fusion va vous aider au niveau mondial? N'est-ce pas entièrement par rapport à la taille du marché au niveau national que vous souhaitez qu'il existe deux institutions plus importantes dans le pays, ce qui vous donnera plus de pouvoir, à l'échelle nationale, par rapport aux autres banques et compagnies d'assurances, coopératives de crédit ou caisses populaires?

M. Sam Walters: Si cette initiative doit aller de l'avant, à mon avis—encore une fois, je parle de la situation à Terre-Neuve et au Labrador tandis que M. Cleghorn a parlé de la scène nationale et internationale—c'est parce qu'un nombre croissant de concurrents étrangers entrent sur le marché. Personnellement, j'ai été sollicité à au moins six reprises au cours des six derniers mois, par des responsables de la banque MBNA.

M. Lorne Nystrom: Ce que je veux savoir, je suppose c'est en quoi la taille de l'institution est une garantie de qualité. Lorsqu'on grossit de 50 livres, devient-on pour autant un homme meilleur?

M. Sam Walters: Non.

M. Lorne Nystrom: En quoi l'importance de l'institution est-elle synonyme d'une amélioration de la qualité? Parfois, lorsqu'on est tout petit on est plus agile et mieux en mesure d'être concurrentiel sur le marché.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): À moins d'être un lutteur sumo.

M. Lorne Nystrom: Ah oui! Vous avez beaucoup de chemin à faire.

M. Sam Walters: Non, je ne pense pas avoir gagné en qualité depuis que j'ai pris 50 livres, mais j'ai peut-être gagné en sagesse.

• 0845

Ce qui importe à l'heure actuelle, c'est que nous soyons en mesure de soutenir la concurrence de ceux qui viendront de l'extérieur rivaliser sur notre marché, et c'est déjà le cas. Je peux vous donner l'assurance que j'ai reçu des clients, à St. John's et à Stephenville, qui avaient reçu des appels de la Banque Wells Fargo. Je connais la plupart de nos clients et, je le répète, j'ai personnellement été sollicité par la Banque MBNA à au moins six reprises ainsi que par Capital One.

Il y a énormément de concurrence sur le marché, qu'il s'agisse des compagnies d'assurances, des investisseurs, des planificateurs financiers, ou autres. Ensemble, dans la province, nous pourrons réaliser des économies et mener certaines activités qui nous permettront de continuer d'offrir des produits canadiens basés au Canada, à partir du Canada, susceptibles de soutenir la concurrence des produits offerts aux Canadiens grâce à divers moyens électroniques. Cela va continuer d'exister.

M. Lorne Nystrom: Toutefois, vous continuerez d'être une petite institution dans le contexte international. Vous continuerez d'occuper le 18e, 19e ou 20e rang au monde. Cela va-t-il faire une telle différence?

M. Sam Walters: Nous serons dans la course en tant que banque canadienne et je suppose que nous le serons sur le marché national. C'est pourquoi j'estime que cette fusion sera avantageuse pour les consommateurs de Terre-Neuve et du Labrador au même titre que pour ceux du reste du pays.

M. Lorne Nystrom: Ce qui m'amène à ma dernière question, monsieur le président.

Ce qui préoccupe bien des gens, c'est l'idée que si la banque devient aussi importante et détient un actif d'un demi-billion de dollars, fera-t-elle partie de ces institutions dont on dit qu'elles sont «trop importantes pour faire faillite»? Que se passera-t-il si la banque connaît un fiasco? Il n'y a aucune garantie de permanence pour quoi que ce soit dans le monde, et si la banque fait faillite, que se passera-t-il? Cela entraînera-t-il la perte de tout notre secteur des services financiers? Nous sommes témoins de toutes sortes de problèmes dans d'autres régions du monde.

J'ai posé ces questions à M. MacKay et il a dit qu'il y avait deux options. D'une part, une opération massive de renflouement financée par les contribuables canadiens, et d'autre part, ouvrir les portes et permettre à une banque étrangère comme la Citibank ou une autre de reprendre la mégabanque, soit la Banque Royale et de Montréal, ou encore la TD et CIBC.

Si votre banque devient trop importante pour faire faillite, et que les gens savent que le gouvernement devra intervenir car s'il ne le fait pas, nous assisterons à une véritable catastrophe financière, cela ne vous met-il pas dans une situation très injuste par rapport à vos concurrents sur le marché? Ils savent que le gouvernement sera obligé de faire en sorte de vous éviter la faillite. Mais que deviennent la Banque de Nouvelle-Écosse, ou les coopératives de crédit ou la Banque Nationale ou les compagnies d'assurances? Elles sont beaucoup moins importantes.

C'est un peu comme monter sur un ring avec Mike Tyson. Vous risquez d'avoir de sérieux problèmes si vous êtes assez rapide à lui mordre l'oreille. Cela ne vous accorde-t-il pas un avantage très injuste par rapport à la concurrence, et cela ne met-il pas les contribuables dans une situation très désavantageuse?

C'est ce que me disent bien des gens lors de mes déplacements dans le pays. C'est une inquiétude tout à fait justifiée qu'ont les Canadiens, et pas seulement dans le secteur des assurances.

M. Sam Walters: Pour ma part, je ne pense pas que ce sera le cas car les deux banques ont des antécédents extraordinaires au Canada. Elles sont en affaires depuis plus de 100 ans, 140 ans pour être précis, et nous avons toujours fait la preuve de notre sérieux du point de vue financier. Il y a eu très peu de faillites de banque au Canada. Ce n'est pas parce que nous fusionnons pour créer une seule entité qui nous permettra d'être plus concurrentiels sur le marché intérieur que nous allons renoncer aux principes qui ont toujours été les nôtres.

Les deux banques ont d'excellents bilans en matière d'octroi de crédit et je ne vois pas pourquoi les choses devraient changer par la suite.

M. Lorne Nystrom: Je ne le pense pas non plus, mais...

M. Sam Walters: Comme vous l'avez dit, nous continuerons d'être moins importants que la Citibank et d'autres, ils sont déjà sur le marché. Ce sont d'énormes institutions. Que se passerait-il si la Citibank faisait faillite aux États-Unis? Cela poserait un problème au gouvernement américain, ou un risque de problèmes. Toutefois, cela ne s'est jamais produit par le passé et les faits sont là pour le prouver.

M. Lorne Nystrom:

[Note de la rédaction: Inaudible]... le fonds de couverture aux États-Unis tout dernièrement.

M. Sam Walters: Oui, également. Il y aura toujours des problèmes et des enjeux dans l'industrie, car c'est un secteur qui présente des risques, mais les banques canadiennes ont prouvé qu'elles étaient très sérieuses. Nous avons fait un bon travail et il continuera d'en être ainsi, je pense.

Comme vous le savez, nous sommes surveillés et contrôlés, ce qui est normal, par le BSFI, et ces mécanismes et règlements resteront en vigueur. Je ne crois pas qu'il y ait de gros risques, par conséquent.

M. Lorne Nystrom: Je suis bien d'accord avec vous; je ne pense pas non plus que vous risquez la faillite. Mais que se passera-t-il si la banque fait faillite dans cette situation? Cela ne mettra-t-il pas le contribuable dans une situation très désavantagée par rapport aux autres institutions financières?

Je m'interroge sur les conséquences d'un fiasco de la banque. Quelle incidence cela aura-t-il sur les autres institutions de services financiers dans le pays? Lorsqu'on atteint une certaine taille, cela peut être très dangereux. À preuve ce qui se passe actuellement dans le monde pour certaines des grandes banques d'Asie et d'autres régions du monde.

M. Sam Walters: C'est vrai.

• 0850

M. Lorne Nystrom: Vous serez si important par rapport aux coopératives de crédit, à la Banque Nationale, à la Banque de la Nouvelle-Écosse ou aux compagnies d'assurances, qu'il nous sera impossible de vous laisser tomber en faillite. Dans ces conditions, cela met le couteau sous la gorge des contribuables.

Comprenez-moi, il nous faut des réponses pour nos électeurs. Je n'essaie pas de vous faire la vie dure.

M. Sam Walters: Mais non.

M. Lorne Nystrom: C'est ce que nous entendons dire continuellement au cours de nos déplacements dans le pays. En Saskatchewan, je ne suis pas un défenseur du Parti libéral, mais l'un des députés libéraux de l'Assemblée législative provinciale vient de faire un sondage dans sa circonscription, qui se trouve dans une région rurale de la province. Si ma mémoire est bonne, 80 p. 100 des électeurs étaient contre la fusion. Voilà certaines questions que les gens nous posent.

Il y a toutes sortes de surprises. Pendant de nombreuses années, nous avons pris modèle sur le Japon. On part du principe que certaines choses ne seront jamais vouées à l'échec, qu'elles réussiront toujours—ou le Parti libéral existera à tout jamais, ce genre de choses. Il arrive que le vent tourne et nous devons savoir quels sont les impondérables.

Une voix: Voyez ce qu'il est advenu des conservateurs.

M. Sam Walters: Tout ce que je peux dire, c'est que si nous continuons d'appliquer dans le pays un bon régime de réglementation, comme nous l'avons fait... En général, comme cela a été le cas pour les crises de l'Asie et du Japon, ce sont les systèmes des pays qui sont en difficulté. C'est vrai, certaines banques et d'autres institutions ont des problèmes, mais lorsqu'il se produit un énorme fiasco, c'est en général le pays qui a les problèmes. Si nous continuons d'appliquer dans notre pays comme nous l'avons toujours fait un système de contrôle et de réglementation et si nous continuons de bien surveiller nos institutions financières, je pense que les choses se passeront à l'avenir comme elles se passent depuis un peu plus de 100 ans, et que notre secteur des services financiers sera très prospère.

M. Lorne Nystrom: J'aimerais poser ma dernière question. Désolé, monsieur le président, je sais que je l'ai déjà dit.

Supposons que le projet soit couronné de succès et que tout se passe pour le mieux. Cela ne vous procure-t-il pas néanmoins un avantage injuste vis-à-vis de vos concurrents? Les gens sauront que votre institution est si importante que si un événement survient, les contribuables n'auront pas d'autre choix que de vous aider, en renflouant l'institution. Il n'en va pas nécessairement ainsi lorsque c'est une petite banque qui fait faillite.

En conséquence, si M. Wedgewood, à titre de simple consommateur, hésite entre une énorme banque et une petite institution financière et que le pays traverse des moments difficiles sur le plan économique, il sait que votre banque ne risque pas de faire faillite tandis que la petite elle risque d'être dans le pétrin, comme cela s'est déjà passé à une ou deux reprises dans notre pays. Cela ne vous procure-t-il pas un avantage concurrentiel injuste par rapport à vos concurrents sur le marché intérieur? Ce que je veux dire, c'est que M. Wedgewood aura peut-être plus confiance en votre institution qu'en la Banque de Nouvelle-Écosse ou la Banque nationale.

M. Sam Walters: Je ne le pense pas. Je le répète, nos concurrents sont non seulement des institutions canadiennes mais aussi, de plus en plus, des institutions financières américaines. Je ne pense pas que nous jouirons d'un avantage concurrentiel injuste par rapport à elles.

À mon avis, si notre pays continue d'obtenir de bons résultats dans le secteur des banques des assurances et des services financiers, tout ira bien à l'avenir.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Nystrom.

Monsieur Walters, seriez-vous du même avis si vous parliez en votre nom personnel, en tant que simple Canadien?

M. Sam Walters: Sans aucun doute.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Vous brossez un tableau très prometteur pour Terre-Neuve. Pardonnez-moi de ne pas partager votre optimisme.

Combien la Banque de Montréal a-t-elle de succursales à l'heure actuelle?

M. Sam Walters: La Banque Royale en a 20 et la Banque de Montréal, 27.

Le vice-président (M. Nick Discepola): À elles deux, par conséquent, elles en ont 47 et vous dites qu'il n'y en aura peut-être plus que 44.

M. Sam Walters: Oui, nous risquons de nous retrouver avec 44 succursales.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Dans votre allocution liminaire, vous avez dit qu'il n'y aurait pas de suppression d'emplois, pas de fermeture de succursales. Si on ne considère que la fusion entre vos deux banques, c'est-à-dire entre la Banque de Montréal et la Banque Royale, il est possible que les répercussions soient moindres, mais en notre qualité de législateurs, nous devons également tenir compte des autres demandes qui nous sont présentées.

Si je me mets à la place des Terre-Neuviens, comment peut-on dire que le fait d'avoir le choix entre seulement trois institutions vaut mieux que d'avoir le choix entre cinq institutions? En quoi le fait d'avoir accès à seulement 44 points de service vaut-il mieux que d'en avoir 47, comme c'est votre cas?

Vous nous brossez un tableau très optimiste et je ne suis pas du tout du même avis que vous. Vous avez cité l'exemple d'immeubles communs où vous allez vous contenter d'abattre le mur mitoyen. Mais que deviendront les régions rurales où vous exploitez actuellement deux succursales? Il va sans aucun doute falloir en fermer une, un jour ou l'autre. C'est inévitable.

Vous avez cité l'exemple de trois directeurs de comptes ou directeurs du personnel dans une succursale et deux dans l'autre, et d'un seul coup nous allons nous retrouver avec cinq gestionnaires. De toute évidence, vous n'allez pas vous retrouver avec deux directeurs de banque, car il vous suffira d'un seul. Dans une province où le taux de chômage atteint près de 18 ou 19 p. 100, je ne vois pas pourquoi les fusions, et encore moins le fait d'autoriser les banques à vendre également des assurances générales et à ajouter un certain nombre d'employés aux listes de chômage à Terre-Neuve, seront avantageux pour les Terre-Neuviens.

• 0855

M. Barrett déclare que si nous n'autorisons pas la fusion des banques, il lui faudra de toute façon procéder à des coupures et à des compressions d'effectifs, et auparavant il nous disait que si les fusions n'allaient pas de l'avant, il n'y aurait aucun emploi supprimé. Nous entendons donc des sons de cloche différents et contradictoires.

Pardonnez-moi d'être sarcastique, monsieur, mais en tant que représentant d'une circonscription rurale du Québec, si vous me dites que le seul espoir offert à mes collectivités rurales, c'est de se doter d'un ordinateur de 1 500 ou 2 000 $ et de payer 30 ou 40 $ par mois d'abonnement à un fournisseur de services Internet pour avoir accès éventuellement aux services bancaires... Monsieur, dans ces collectivités, les gens n'ont même pas de téléphone à clavier ni même de service d'urgence 911. Je ne peux pas aller leur dire: Voilà ce que nous offrons, voilà ce que les banques vous offrent, en matière de services supplémentaires.

Pour ma part, je vois les choses très différemment. J'entrevois la suppression d'un grand nombre d'emplois. Je ne vais pas essayer de citer des chiffres, comme certains l'ont fait, en parlant de 20 000 ou 30 000, mais inévitablement certaines succursales seront fermées et un grand nombre de gens perdront leur emploi. C'est ce qui me préoccupe essentiellement par rapport au niveau des services également.

Si vous me dites que Terre-Neuve sera à l'abri de ce genre de chose, eh bien cela me paraît encourageant, car cette province a de toute évidence le plus à perdre compte tenu de son taux de chômage élevé.

M. Sam Walters: Dans cette province, je le répète, près de 700 ou 800 personnes travaillent pour notre institution. Il est essentiel que nous puissions être concurrentiels afin de protéger ces emplois contre la concurrence qui nous vient d'un peu partout. Nous n'avons pas peur de cette concurrence. Nous voulons être en mesure de soutenir la concurrence sur le marché national et d'offrir à nos clients des services offerts par des institutions canadiennes ici même, dans nos collectivités canadiennes, où qu'elles se trouvent, que ce soit à St. John's ou dans les régions rurales de la province.

Pour ce qui est des trois succursales dont j'ai parlé qui seront regroupées, je pense que c'est normal et que cela aura une incidence minime. J'ai dit, et vous l'avez dit également, que nous risquions de nous retrouver avec trois directeurs de succursale, ce qui ne sera pas nécessaire dans ces collectivités. Je suis convaincu que nous trouverons à ces personnes un autre poste dans notre réseau. Il y a déjà beaucoup de roulement parmi nos employés. Les Canadiens sont très mobiles à l'heure actuelle. Ils vont et viennent d'un secteur à l'autre. Je n'ai donc aucune crainte à ce sujet.

J'ai confiance en l'avenir de Terre-Neuve. J'entrevois Terre-Neuve et le Labrador comme une région pleine de promesses dans l'avenir de notre pays. J'entrevois la possibilité pour nous, un jour ou l'autre... Je peux vous dire une chose: je viens d'ouvrir un nouveau bureau de la Banque Royale à Paradise, et j'ai fait allusion au fait que la Banque de Montréal assurait un service à Nain, collectivité où il n'y avait aucune succursale bancaire dans le passé.

Plus l'économie de la province deviendra forte, plus notre entreprise pourra prendre de l'expansion. J'espère que tous les autres intervenants pourront aussi profiter de cette croissance.

J'ai confiance en l'avenir. Notre organisation offre un service à cette ville de Terre-Neuve et du Labrador depuis de nombreuses années; je pense que nous pourrons continuer à le faire et pourrons rivaliser avec tous les intervenants qui apparaîtront sur le marché, soit sous forme concrète sur le terrain, soit sous forme virtuelle par le commerce électronique, qui ne cesse de s'étendre.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci.

Madame Redman.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président. Je remercie également tous les témoins d'être venus ce matin.

• 0900

J'aimerais parler de l'assurance multirisque. Vous avez bien montré que la plupart des gens ont de bons rapports avec leur courtier, comme c'est le cas avec leur directeur de banque. C'est quelque chose de bien. Quel changement prévoyez-vous pour votre secteur d'activité dans les cinq ou dix prochaines années, vu les progrès de la technologie et la pénétration des entreprises américaines? Quelqu'un a parlé de la CIBC et du fait qu'il y a un centre téléphonique aux États-Unis qui gruge le marché canadien mais qui n'a pas de présence matérielle ici.

Hormis l'avantage que les banques peuvent ou non avoir, grâce aux renseignements dont elles disposent sur leurs clients, de quoi aura l'air le secteur de l'assurance multirisque dans les cinq ou dix ans si les banques sont tenues à l'écart?

M. John Thompson: J'espère que nous profiterons de tous les progrès de la technologie, mais quand j'examine le rapport du Groupe de travail MacKay, je trouve qu'il n'a pas fouillé suffisamment la question. Si on va de l'avant maintenant, on fera courir des risques à la population avec Internet. Il n'existe rien pour contrôler ces transactions.

Dans cinq ou dix ans, je serais très heureux si nos clients allaient sur Internet, récupéraient leur dossier personnel et apportaient eux-mêmes leurs changements. Nous avons actuellement un site sur Internet, mais il n'est pas interactif. Les gens peuvent se renseigner sur nos produits, nos services et notre compagnie, mais ce n'est pas interactif. Nous n'avons pas suffisamment confiance, pas plus que les citoyens d'ailleurs, pour aller sur Internet et modifier nos comptes. Il y a des gens qui le font, mais moi je n'ai pas suffisamment confiance.

C'est pourquoi je pense que cette technologie présente des risques pour la population et je ne pense pas que le Groupe de travail MacKay s'est assez penché sur la question.

Donc, en ce qui concerne la technologie, les courtiers font d'immenses progrès. Tous les courtiers qui appartiennent à notre organisation ont beaucoup investi dans la technologie et, avec le temps, nous serons, je l'espère, tout aussi à l'avant-garde que les autres courtiers du pays.

M. Jeff Wedgewood: J'aimerais ajouter quelque chose.

Les courtiers adoptent très vite différentes méthodes de commerce électronique. Beaucoup d'entre nous sont en train de créer des sites Web que les clients peuvent consulter; ils apprennent ce qu'il y a de nouveau ou reçoivent des avis puis communiquent avec nous par courrier électronique ou autrement. L'assurance multirisque est très particulière. Elle dépend davantage de la gestion du risque et des facteurs de risque et de l'effet qu'ils peuvent avoir sur les particuliers ou les petites entreprises. C'est le genre d'analyse qui se fait en personne.

Je ne peux parler que de ma situation à moi, mes transactions personnelles bancaires ou celles de mon entreprise, et je ne me suis pas toujours senti compris. Mon travail à moi est de m'assurer que le client comprend bien ses risques; moi aussi je dois bien les comprendre pour pouvoir lui donner de bons conseils et lui proposer une solution.

Merci.

Mme Karen Redman: D'autres témoins disent s'inquiéter du fait que les banques risquent d'écrémer le marché de l'assurance peu coûteuse à administrer et de laisser aux courtiers indépendants comme vous le marché plus coûteux ou complexe et qui finira par être plus cher pour le consommateur puisque les prix vont monter.

Y avez-vous songé?

M. John Thompson: C'est ce que nous redoutons le plus aujourd'hui. Nous craignons qu'elles s'approprient le marché de l'assurance-habitation et de l'assurance-automobile.

À ce propos, j'ajouterai que ces dernières années les banques ont eu la chance de toucher un rendement sur leur investissement qui varie entre 16 et 18 p. 100. Le secteur de l'assurance n'a pas réalisé de bénéfices techniques depuis 1978 et, ces dernières années, le rendement du capital investi a été d'environ 8 p. 100.

• 0905

Je ne vois donc pas la logique qui pousserait les banques à se lancer dans un secteur où le rendement est approximativement moitié moindre que le leur.

Pour répondre à votre question, à savoir continuerons-nous d'exister pour offrir un produit coûteux si les banques ont la chance de s'approprier le marché de l'assurance-habitation et de l'assurance-automobile, ce qui représente le pain quotidien des courtiers? Je ne pense pas. Le BAC affirme que notre secteur pourrait perdre entre 20 000 et 30 000 employés à l'échelle nationale. À Terre-Neuve, cela pourrait faire disparaître 500 emplois; nous n'avons pas les moyens de perdre 500 emplois.

Mme Karen Redman: Avec votre permission, monsieur le président, je voudrais poser une question à M. Walters.

Nous avons entendu les banques étrangères à Ottawa. Le Groupe de travail MacKay recommande de voir les établissements bancaires et les compagnies d'assurances avec créativité, de leur permettre de se réinventer et d'adopter un cadre réglementaire qui protégera le consommateur mais leur permettra de prendre de l'expansion.

Une des choses qui m'a frappée lorsque nous avons entendu les banques étrangères, c'est que beaucoup d'entre elles n'occupent qu'un seul créneau et sont en fait ce que l'on appelle des entreprises mono produit.

Vous qui êtes un banquier et qui représentez les établissements financiers canadiens, pouvez-vous me dire si cela va servir l'intérêt du consommateur? Est-ce au contraire un sujet d'inquiétude?

M. Sam Walters: N'ayant pas assisté à ces audiences, tout ce que je peux dire à propos des entreprises mono produit, comme vous et d'autres les appelez... dans mon intervention, j'ai parlé de la concurrence à laquelle nous faisons face. Pour avoir un secteur des services financiers canadien vigoureux, il faut pouvoir offrir aux consommateurs un produit à un prix capable de soutenir la concurrence, d'où qu'elle vienne.

C'est pourquoi nous estimons, moi le premier, que cette fusion est avantageuse pour la population canadienne. Elle permettra à une entreprise canadienne d'affronter les entreprises mono produit, ce qui est sans doute la forme que prendra la concurrence. Elle se présentera sans doute sous cette forme.

Nous voudrions que notre entreprise soit en mesure d'affronter n'importe quel concurrent et d'offrir un bon rapport qualité-prix aux Canadiens. Si nous n'y parvenons pas, ils iront ailleurs.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Walters, est-il possible que le secteur bancaire n'ait pas cherché à remplir ces créneaux, délibérément ou non?

Je vais vous donner un exemple que vous-même avez cité, celui de Wells Fargo. Pendant les années où j'ai siégé au Comité de l'industrie, nous n'avons cessé d'implorer les banques pour qu'elles nous donnent des chiffres, notamment sur le nombre de prêts inférieurs à 50 000 $ consentis aux PME. Pour commencer, les banques n'étaient pas en mesure de nous donner ces chiffres ou la moindre information, je crois, à l'époque, concernant les prêts inférieurs à 1 million de dollars. Chose plus importante encore, nous leur avons demandé de nous donner des renseignements sur quelque chose que réclamaient les milieux d'affaires. Les gens que je représentais venaient à mon bureau et me citaient une multitude de cas où ils disaient être prêts à payer 1 ou 2 p. 100 de plus pour obtenir du financement.

C'est ce qu'a fait Wells Fargo. Ils prennent 1 p. 100, 2 p. 100, voire 3 p. 100 de plus et en moyenne, leurs prêts sont pour moins de 50 000 $, tandis qu'avant les banques refusaient d'occuper ce créneau. Vous dites maintenant que ce sont vos concurrents. C'est peut-être parce que les banques ne sont pas en mesure d'accorder ces micro-prêts ou parce qu'elles ne veulent pas le faire. Pourquoi nous dites-vous maintenant que ce sont vos concurrents et pourquoi leur reprochez-vous d'être venus desservir ces créneaux que vous ne vouliez pas occuper vous-mêmes?

M. Sam Walters: Je suis banquier dans la région du Canada atlantique depuis déjà 36 ans et j'ai accordé des prêts aux petites entreprises la majorité du temps. Je peux vous dire sans risque d'en rougir que nous avons prêté de l'argent aux petites entreprises et que nous avons accordé de nombreux prêts de moins de 50 000 $. C'est particulièrement vrai dans cette province. Je peux vous dire que nous offrons entre autres des lignes de crédit électroniques afin de mieux servir les petites entreprises.

• 0910

Je ne suis pas venu me plaindre du fait que Wells Fargo soit venu au Canada, pas du tout. À mon avis, si le besoin existe et que Wells Fargo peut le combler, bravo. Les Canadiens devraient avoir accès aux produits dont ils ont besoin. Je dis toutefois que notre organisation, en sa qualité d'entreprise implantée au Canada, doit avoir les moyens d'affronter directement la concurrence, peu importe son origine.

Le vice-président (M. Nick Discepola): N'êtes-vous pas en mesure de le faire depuis 20 ou 30 ans?

Je suis désolé, je suis censé présider la séance.

M. Pillitteri voudrait poser une question complémentaire, si vous le voulez bien, Scott.

M. Scott Brison: D'accord, monsieur le président. C'est que, vous savez, vous êtes censé présider la réunion seulement.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Oui, je m'en excuse. Ce n'est pas facile de rester neutre et de ne pas intervenir dans le débat.

Mme Karen Redman: Monsieur le président, j'aurais une dernière question.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Désolé, je croyais que vous aviez terminé.

Si vous le voulez bien, je vais me remettre à présider et j'éviterai de me mêler au débat.

Madame Redman.

Mme Karen Redman: Au risque de nous éloigner de ce que disait M. Pillitteri, j'aimerais rappeler que le rapport du Groupe de travail MacKay ne portait pas sur les fusions. Les fusions ne sont qu'un des volets d'une réforme très large du secteur financier. Quand il est question de fusions bancaires, la conclusion c'est qu'il faudrait envisager d'autoriser les fusions que justifient des raisons d'ordre commercial.

J'aimerais revenir à la question des emplois parce que les banquiers nous ont dit que les banques canadiennes ont choisi de ne pas occuper les créneaux des cartes bancaires et des services de paie parce que d'autres institutions financières, dont certaines sont américaines, offrent ces services à bien meilleur prix. Elles ont cessé d'offrir ces services pour des raisons d'ordre commercial.

Ainsi, quand on examine les raisons qui pourraient justifier les fusions de banques, il me semble qu'il doit y avoir des économies d'échelle à réaliser et qu'en l'absence de fusions bancaires, les progrès technologiques et l'évolution du secteur financier entraîneront vraisemblablement des changements dans la nature des emplois, sinon dans le nombre total d'emplois, à un horizon de trois, cinq ou dix ans.

Peut-on imposer aux banques qui projettent de fusionner le fardeau qu'implique le maintien de ces emplois? Après tout, il me semble que si l'on va de A à B à C, il est normal qu'il y ait des pertes d'emplois et qu'il faut l'admettre sans détour.

M. Sam Walters: Là encore, je sais que John Cleghorn a déjà parlé en détail de cette question particulière. Il ne fait aucun doute que le Canada et le monde entier vivent une révolution technologique, et le changement est donc devenu une réalité quotidienne. À l'avenir, je pense que les institutions, les compagnies et les Canadiens vont devoir faire face à tout nouveau changement. Je suis convaincu qu'il y aura donc des questions dont il faudra tenir compte à l'avenir.

Certains engagements ont été pris avec beaucoup de sincérité et je crois fermement qu'ils seront respectés. Dans les collectivités où nous sommes la seule banque à avoir une succursale, nous mettons sur un chevalet une grande affiche qui précise l'engagement de John Cleghorn, avec sa signature—et je pense que les succursales de la Banque de Montréal ont fait la même chose dans ces collectivités. L'engagement c'est que la banque va continuer à soutenir ces collectivités.

Mme Karen Redman: Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, madame Redman.

Je donne maintenant la parole à M. Brison, s'il vous plaît.

M. Scott Brison: Merci, monsieur le président.

Malheureusement, j'entends certaines personnes parler du «groupe de travail sur les fusions bancaires» ou de la question des «fusions bancaires», et ce n'est pas vraiment exact. Il s'agit d'une question globale, et j'estime que MacKay l'a examinée de façon globale.

Vous disiez tout à l'heure que les bénéfices des compagnies d'assurance générale ne sont pas forcément ce qu'ils étaient, mais que ces secteurs demeurent quand même très rentables. J'ai sous les yeux une liste des actifs et des revenus nets des institutions financières sous réglementation fédérale.

En 1997, les banques à charte avaient 69 p. 100 des actifs et 55 p. 100 des bénéfices. Les sociétés de fiducie avaient 2 p. 100 des actifs et 2,5 p. 100 des bénéfices. Il y a des données pour les compagnies de prêt, les coopératives de crédit, etc. Mais les compagnies d'assurance générale représentaient 2,96 p. 100 des actifs et 12,94 p. 100 des bénéfices.

• 0915

Il s'agit donc d'un secteur très lucratif, et je comprends très bien pourquoi les banques s'y intéressent. Si les banques écrémaient, comme vous dites, les produits peu coûteux, vous prétendez que vous ne seriez pas en mesure de vendre les produits plus coûteux. Mais qui le ferait? Qui offrira ces produits?

M. John Thompson: À l'heure actuelle, il y a des courtiers internationaux—de très grandes multinationales—qui sont en affaires au Canada. Ils auraient peut-être un bureau.

Un changement centraliserait le secteur, vous savez. Dans les collectivités où il n'y a pas de banques à Terre-Neuve, il y a très probablement un courtier d'assurance.

M. Scott Brison: Bien sûr.

M. John Thompson: Dans les collectivités de Terre-Neuve où il y a une banque, il y a très probablement trois ou quatre courtiers d'assurance. Cependant, si les banques sont autorisées à vendre les produits d'assurance au détail, tout sera centralisé.

M. Scott Brison: Est-ce que ces grandes sociétés internationales ne pourraient pas écrémer les produits moins coûteux?

M. John Thompson: Non. Elles s'occupent surtout de grandes affaires commerciales et les petits courtiers indépendants s'occupent des transactions moins importantes.

M. Scott Brison: Donc est-ce qu'elles vendent déjà les produits plus complexes?

M. John Thompson: En gros, oui.

M. Scott Brison: Mais est-ce que cela ne va pas à l'encontre de l'argument selon lequel...? J'aurais pensé que les compagnies d'assurances locales, qui connaissent mieux les clients, vendraient les produits plus complexes, et qu'elles rafleraient ainsi ce qu'il y a de mieux.

M. John Thompson: Comme Sam l'a dit tout à l'heure, il s'agit d'un marché où il y a entre six et 12 compagnies cotées en bourse. Il est donc très différent de celui du sud de l'Ontario ou du Lower Mainland de la Colombie-Britannique. Nous faisons affaire surtout avec des clients ordinaires qui achètent des assurances pour la maison et la voiture.

M. Scott Brison: Par exemple, quel pourcentage de vos membres vendraient des fonds mutuels, croyez-vous?

M. John Thompson: Très peu.

M. Scott Brison: Mais quand même quelques-uns.

M. John Thompson: À vrai dire, je ne connais aucun de nos membres qui en vend actuellement.

M. Scott Brison: Ah vraiment? Parce que la compagnie qui me vend de l'assurance pour ma voiture et ma maison vend aussi certains produits financiers.

Les arguments que l'on entend de ceux qui s'opposent à la vente d'assurance par les banques sont semblables à ceux que j'ai entendus il y a quelques années des courtiers en valeurs mobilières qui ne voulaient pas que les banques puissent vendre des fonds mutuels. J'avoue que j'avais des hésitations à l'époque et je me sentais un peu mal à l'aise vis-à-vis des banques qui voulaient s'aventurer dans les valeurs mobilières. Ceux d'entre nous qui étaient inquiets regardaient tous du côté de Midland Walwyn comme exemple d'une grande maison de courtage canadienne grande et indépendante.

En fin de compte, Midland Walwyn est maintenant la propriété de Merrill Lynch, et les emplois du siège social sont à New York plutôt qu'à Toronto, mais le ciel ne nous est pas tombé sur la tête. Les courtiers en valeurs mobilières qui travaillent pour les compagnies qui appartiennent aux banques gagnent toujours beaucoup d'argent. Mais je pense que les banques ont fait un assez bon travail du côté des fonds mutuels, et ce sont des produits complexes. TD, par exemple, a fait un travail vraiment extraordinaire dans cette industrie.

Dans beaucoup de banques—et corrigez-moi si j'ai tort—les employés sont de plus en plus familiers avec une vaste gamme de produits. Pensez-vous que certains de ces fonds mutuels et de ces instruments et produits financiers assez complexes sont moins compliqués que l'assurance?

M. John Thompson: Étant moi-même courtier d'assurance, je ne sais pas si je peux me permettre de faire des remarques sur les produits d'investissement. Cependant, l'industrie des fonds mutuels commence à peine à atteindre le point de saturation avec des produits de ce genre. Nous commençons à assister à une stabilisation des ventes mensuelles pour la première fois dans l'histoire de ce produit.

Alors que vous dites que les banques ont fait un excellent travail, c'est en fait l'industrie qui a fait un excellent travail. Les Canadiens qui achètent des produits de REÉR ou qui font des investissements dans les REÉR ont choisi les fonds mutuels plutôt que d'acheter des actions individuelles.

Bien que j'aimerais pouvoir donner à Sam tout le crédit qui lui revient, je ne peux pas, parce que c'est un produit que tous les Canadiens ont appuyé. Donc, je ne peux pas le comparer aux produits d'assurance.

• 0920

M. Scott Brison: Bien sûr.

Le déclin des quatre piliers a vraiment commencé en 1988 et en 1992. Les deux fois, si je ne m'abuse, les courtiers d'assurance ont présenté l'argument que, bon, nous reconnaissons que c'est une situation en pleine évolution, et que le secteur des services financiers évolue, mais nous avons besoin de plus de temps.

Je voudrais dire aujourd'hui que personnellement, je crois que le jour viendra où les banques vendront de l'assurance générale. Je crois également que le jour viendra où il y aura beaucoup de nouvelles banques—et une des recommandations du Groupe de travail MacKay concerne les banques de 10 millions de dollars; vous savez, une banque peut être mise sur avec 10 millions de dollars de capital—et finalement les compagnies d'assurances et les particuliers auront pleinement accès au système de paiements par le biais de ces nouvelles banques. Donc, la dynamique sera complètement différente.

Si on donnait à votre secteur l'occasion de participer au système de paiements par le biais de nouvelles banques, par exemple, de compagnies d'assurances ou de divers nouveaux véhicules au fur et à mesure de la libéralisation de la réglementation, et qu'on vous donnait l'occasion de participer à toutes sortes de nouveaux instruments financiers, combien de temps vous faudrait-il pour considérer qu'il est tout à fait acceptable que les banques puissent vendre de l'assurance propriété et automobile?

M. John Thompson: La première chose qui me vient à l'esprit, c'est que je ne pense pas que le consommateur ait demandé au gouvernement de permettre aux banques de vendre de l'assurance au détail. Je pense que le secteur bancaire a fait des représentations auprès du gouvernement, lui a demandé de créer un groupe de travail, et c'est exactement ce que nous venons de voir avec le rapport du Groupe de travail MacKay. C'était un document très favorable aux banques.

Oui, je suis d'accord pour dire que les banques vendront de l'assurance, mais je crois que ce comité, ainsi que d'autres, a le mandat de s'assurer que les règles du jeu soient équitables. Sera-t-il juste pour les Canadiens de permettre aux banques de vendre de l'assurance? Vous connaissez notre position évidemment.

M. Scott Brison: Ce que je veux savoir en fait, c'est quelles limites on peut établir, quels avantages on peut accorder, par exemple, aux nouvelles banques, ou quels avantages on peut vous donner à vous maintenant pour vous permettre de rivaliser avec les banques sur leur terrain au cours des prochaines années, avant que les règles du jeu soient un peu plus équitables et qu'on puisse laisser entrer les banques?

J'essaye d'obtenir vos commentaires et vos réactions à ce sujet, des données plus quantitatives, parce que cela va arriver. Je crois vraiment que cela va se produire. Je veux simplement m'assurer que vous soyez protégés et que vous ayez des occasions de vous diversifier dès maintenant.

M. Jeff Wedgewood: Les règles du jeu ne seront jamais équitables tant que les courtiers d'assurance n'auront pas accès aux mêmes informations sur leurs clients que les banques—pour ma part, je m'y oppose étant donné les effets sur la vie privée—et tant que nous ne posséderons pas des milliards de dollars d'actifs.

M. Scott Brison: À l'heure actuelle, aux États-Unis, si je ne me trompe pas, les banques vendent de l'assurance générale et il existe toujours un secteur de l'assurance générale, n'est-ce pas?

M. John Thompson: Au Canada, il y a cinq grandes banques. Aux États-Unis, il y a des dizaines de milliers de banques.

M. Scott Brison: D'accord, donc c'est là la question. Vous voulez avoir plus de concurrents dans le secteur bancaire canadien.

M. John Thompson: Je ne crois pas avoir dit cela, mais en général, je crois que le secteur est tout à fait différent. Je pense qu'il faut examiner le secteur canadien dans son ensemble. Les systèmes bancaires européen et américain sont totalement différents du nôtre.

Le secteur bancaire canadien est parmi les plus stables au monde et parmi les plus enviés du monde. Et on peut en dire autant du secteur de l'assurance générale. Il y a 230 sociétés d'assurances et 60 000 courtiers au pays. Beaucoup d'autres entreprises vendent de l'assurance générale directement. Nous bénéficions d'un éventail de canaux de distribution, d'une faible concentration du marché (la plus faible concentration dans le secteur des services financiers), d'économies d'échelle et de diversification qui sont neutres, d'une entrée facile sur notre marché, et de produits innovateurs, par exemple l'assurance qui couvre les refoulements d'égout et l'assurance valeur à neuf.

Notre secteur fait des progrès, de la même façon que le secteur bancaire. Tant qu'on ne me démontrera pas pourquoi ces deux secteurs devraient fusionner, je ne trouverai pas de raisons d'y être favorable.

M. Scott Brison: Bien sûr.

Je suppose qu'on pourrait l'envisager de différentes façons. Vous faites confiance au marché libre, et vous êtes évidemment des gens d'affaires. Si vraiment nous faisons confiance au marché libre, si nous acceptons que le gouvernement doit assurer un accès aux leviers en assurant l'éducation, les soins de santé, etc., alors c'est à nous de trouver des arguments contre l'entrée des banques. Ce n'est pas nécessairement aux banques qu'il appartient d'en prouver le bien-fondé, parce que si vous faites confiance aux forces du marché, les banques ne se lanceront pas dans un secteur d'activités qui ne leur rapportera pas d'argent.

• 0925

Alors lorsque les gouvernements ou les législateurs essayent de gérer un marché, nous savons tous quelles en sont les conséquences, par exemple l'octroi de subventions pour les pêches, qui a eu comme résultat l'épuisement des stocks de morue sous prétexte de créer des emplois... Il y a plusieurs questions en jeu. C'est très compliqué.

Vous dites que le CIBC Insurance est au milieu du groupe?

M. John Thompson: Je n'ai pas les chiffres devant moi, mais il n'y a aucun avantage perçu dans leur élément coût relié à leur statut de banque. Un autre aspect qui n'est pas inclus dans leurs données sur les coûts est l'utilisation du système informatique de la banque. Vous savez, je suis certain que vous pourriez ajouter 4 p. 100 ou 5 p. 100 à leurs coûts, parce que ceux-ci ne tiennent pas compte de l'informatique.

M. Scott Brison: Mais il n'y a eu aucun gain d'efficacité, alors pourquoi vous inquiéter?

M. John Thompson: Mais nous revenons aux règles du jeu équitables chaque fois.

M. Scott Brison: Oui, mais ces gars-là ne sont pas aussi efficaces que vous.

M. John Thompson: Du point de vue du coût, c'est très bien, mais depuis 1995, des 230 assureurs présents sur ce marché, la CIBC s'est classée parmi les dix premiers pendant trois ans. Il y a des compagnies d'assurances présentes au pays depuis plus d'un siècle et qui sont maintenant plus petites que la CIBC.

M. Jeff Wedgewood: Nous ne nous opposons pas à ce que les banques vendent de l'assurance. La CIBC en vend, comme nous le savons tous, mais dans des conditions qui sont maintenant équitables pour tous les intervenants. Et nous appuyons ce genre de choses. Cependant, nous nous opposons à ce que les banques puissent vendre de l'assurance directement dans leurs succursales tout en se servant de leurs énormes banques de données.

M. John Thompson: Et si on permettait aux banques de vendre à partir de leurs succursales, leurs coûts diminueraient énormément puisqu'elles se serviraient alors de leurs installations qui existent déjà.

M. Scott Brison: Et si c'était le cas, le prix de leurs produits ne diminuerait-il pas?

M. John Thompson: À court terme, mais qu'arrivera-t-il alors à l'actuel réseau national de vente? Ce réseau actuel, c'est-à-dire 6 000 courtiers plus leur personnel de soutien, disparaîtra.

M. Scott Brison: Oui, mais lorsque les prix auront chuté, puisque la distance n'est plus un facteur déterminant au niveau du coût des télécommunications, à long terme la concurrence ne viendra-t-elle pas de ces gens qui achètent leurs assurances ou tout autre service financier, soit par ordinateur ou par téléphone? À long terme, la véritable concurrence ne viendra-t-elle pas de là? Il ne s'agit plus de briques et de mortier, n'est-ce pas?

M. John Thompson: Eh bien, ce sera une question d'emploi. Voilà quel sera l'argument. Il va s'agir de savoir si oui ou non nos législateurs veulent que l'industrie bancaire se serve de leur réseau et de son personnel actuel pour vendre de l'assurance multirisque au prix de 30 000 emplois pour notre pays.

M. Scott Brison: Vous posez l'hypothèse que les banques n'embaucheraient pas de personnel supplémentaire pour vendre ces assurances.

Je pose ces questions pour ma propre gouverne, parce que je crois vraiment que le gouvernement ne réussit pas vraiment bien lorsqu'il s'agit de créer de l'emploi, qu'à vrai dire son dossier dans ce domaine est minable et que lorsqu'il s'agit de protéger soit des industries, soit des emplois, le gouvernement a gravement failli à la tâche dans bien des cas. J'essaie tout simplement de mieux comprendre vos arguments.

M. Jeff Wedgewood: En plus des pertes d'emploi, il s'agit de comprendre qu'il y va du choix qui sera offert aux consommateurs canadiens. Au fur et à mesure que les banques prendront en main le secteur de l'assurance multirisque, elles pourront imposer leur prix pour ce produit puisqu'il n'y aura plus personne pour leur faire concurrence sur le marché libre.

M. Scott Brison: Mais qu'en est-il de toutes ces autres compagnies qui font affaire par téléphone, qui vendent de l'assurance-automobile, de l'assurance-habitation ou de l'assurance multirisque? Ne font-elles pas aussi partie de la concurrence?

• 0930

M. Jeff Wedgewood: Comme le président l'a souligné tout à l'heure, qu'en est-il de ces gens qui n'ont pas accès aux ordinateurs ou aux télécopieurs?

M. Scott Brison: Et au téléphone?

M. Jeff Wedgewood: Eh bien, il y a encore beaucoup de Canadiens qui n'ont pas de service téléphonique.

M. Scott Brison: Bon. Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Brison. Ça va? Plus de questions?

M. Scott Brison: Absolument. Merci.

Une voix: Il est toujours okay.

M. Scott Brison: I'm okay, you're okay; ce n'était pas le titre d'un livre ça?

Le vice-président (M. Nick Discepola): Monsieur Pillitteri.

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci, monsieur le président.

Comme député et comme Canadien, j'aime beaucoup le système bancaire canadien. Vraiment, vous nous servez bien.

Les parlementaires canadiens avaient une vision il y a longtemps quand, ils ont émis six franchises, c'est-à-dire six banques. Aujourd'hui comme dans le groupe de travail MacKay, on veut ouvrir les choses à la concurrence. On a dit qu'aux États-Unis où il y a des milliers de banques, plus de 5 000, ils veulent procéder à des fusions.

Je me pose la question: pourquoi créer toutes ces banques et puis, 10 ans plus tard, après le régime de l'acheteur averti, essayer de les fusionner?

Laissez-moi m'expliquer autrement. Au sud de la frontière, les banques ont plus de restrictions qu'ici au Canada. À part la location d'autos et l'assurance, elles font pratiquement tout ce qu'elles veulent ici au Canada.

C'est peut-être une coïncidence, monsieur le président, mais je ne vois pas de représentants du crédit-bail automobile. Peut-être ont-ils eu peur de venir ici parce que les banques ont la haute main quand il s'agit d'obtenir leur argent, et que les prêts ne pouvaient donc pas être approuvés. Mais ce n'est qu'une coïncidence.

Je fais des commentaires, bien sûr, mais je veux poser une question. Je pense tout haut ici.

On est en train de renflouer une grande banque en ce moment aux États-Unis. J'ai lu un article à ce sujet l'autre jour. Même si c'était une banque nationale—je crois que c'était la Banque d'Italie, qui ressemble à la Banque du Canada—qui avait quelques centaines de millions de dollars, qui faisait de la spéculation, ils ont quand même été pris. Je me demande, si nos banques canadiennes devenaient si grosses, étant concurrentielles, qu'elles pouvaient s'offrir le luxe de risquer quelques centaines de millions de dollars ici et là en tant que valeur refuge... mais je réfléchis tout haut.

Vous parlez de la concurrence. Vous dites que la concurrence nous vient des États-Unis.

Je veux corriger mon collègue, le président, au sujet de Wells Fargo en ce qui concerne les taux de 1 p. 100, 2 p. 100 ou 3 p. 100. Je m'excuse; le taux se situe entre 660 et 800 points, c'est-à-dire qu'il est 6 p. 100 et 8 p. 100 plus élevé que nos pratiques normales en matière de prêts ici au Canada.

Pourquoi un Canadien voudrait-il emprunter de l'argent à Wells Fargo—les taux sont 6 p. 100 et 8 p. 100 plus élevés que ceux de nos banques et signer un contrat avec l'État de la Californie, parce qu'ils n'ont pas de succursales ici au Canada, à moins que ces services et ces prêts ne soient pas disponibles au Canada?

Je parle de Wells Fargo, Capital One, Capital Fund, etc., les institutions financières qui faisaient payer entre 15 p. 100 et 28 p. 100 il y a des années.

• 0935

Est-ce que les banques ici au Canada sont-elles si à l'aise—pour ne pas dire irresponsables—qu'elles ont cessé de fournir ces prêts et de servir ce marché?

Je dis que j'aime bien mon institution bancaire, mais pourquoi les laisser entrer, parce qu'ils font payer entre 6 p. 100 et 8 p. 100 de plus élevé que le taux bancaire? Pourquoi n'avez-vous pas fourni ce service?

L'autre jour j'ai pris trois cartes de crédit, et je me suis demandé pourquoi je devais payer un taux 16,5 p. 100? On m'a répondu: Et si vous les aviez pour 9,75 p. 100 au Canada? Fallait-il que quelqu'un de l'extérieur—Wells Fargo et d'autres compagnies—viennent au Canada pour que nos banques commencent à me fournir le même produit à 9,5 p. 100 jusqu'à 10 p. 100?

Pourriez-vous trouver du sens à mes idées folles de ce matin?

M. Sam Walters: Je ne dirais pas du tout qu'elles sont folles.

Au sujet du marché, je dirais simplement que les produits utilisés par les commerces et les consommateurs sont liés dans bien des cas à la commodité. Souvent c'est très commode d'avoir des cartes en plastique. On les utilise toutes, moi y compris. Et il y a des prix variables associés à ces cartes. Les gens utilisent encore les cartes des magasins à rayons, et les taux sont très élevés.

Je crois que la même chose vaudrait pour nos concurrents qui nous appellent des États-Unis. Il y a des concurrents étrangers, et non pas simplement ceux que vous avez mentionnés mais d'autres qui cherchent à obtenir des dépôts et des choses de ce genre. Ils savent drôlement comment choisir les clients avec lesquels ils veulent communiquer. Les gens avec qui j'ai discuté de la question m'ont dit qu'ils avaient choisi de pas faire affaire avec eux, mais je sais qu'ils communiquent avec les Canadiens alors qu'ils ne le faisaient pas il y a 12 ou six mois. Je crois que c'est un signe de ce qui se produira.

Les banques canadiennes doivent répondre aux besoins de leurs clients. Je crois que la carte de crédit à droit annuel peu élevé a peut-être vu le jour au Canada avant même l'arrivée de la MBNA et de Bank One. Je crois que c'est quelque chose que les banques canadiennes ont lancé. Il existe donc toute une gamme de cartes de crédit sur le marché, et encore une fois, elles visent à répondre aux besoins de nos consommateurs et de nos clients.

Dans le secteur bancaire canadien, je crois que la Banque Royale, que je représente et où je travaille, a bien su répondre aux besoins changeants sur le marché en offrant une gamme de produits différents, toute une série de cartes. La Banque Royale offre à elle seule toute une série de cartes à ses clients en fonction de leurs besoins—certaines permettent d'accumuler des points pour des billets d'avion, certaines sont des cartes Visa à droits d'adhésion très faibles, d'autres des cartes Visa ordinaires et il y a même la carte Visa classique II. Donc il existe toutes sortes de cartes de crédit.

Cela démontre clairement que le secteur des services financiers est devenu complexe et que les besoins des consommateurs canadiens ont évolué de façon parallèle. Ils sont futés, et étudient ce qu'on leur offre pour choisir ce qui leur convient.

Il s'agit d'un service qui dépanne les consommateurs et je crois que les banques canadiennes ont su bien répondre aux besoins des consommateurs. Cependant, nous n'avons jamais eu autant de concurrence des États-Unis qu'actuellement; nous nous attendons à ce que cette concurrence devienne de plus en plus vive. Nous voulons donc être en mesure d'offrir d'excellents services aux Canadiens, comme nous le faisons depuis plus d'une centaine d'années.

M. Gary Pillitteri: Pour poursuivre dans la même veine, Wells Fargo, Capital One et Capital Fund ont comparu devant le groupe de travail et le Comité des finances; ces sociétés ont dit qu'elles ne désiraient aucunement venir recevoir des dépôts au Canada. Elles ne veulent pas faire partie du groupe d'assurance-dépôts.

• 0940

Elles ne veulent pas livrer concurrence aux banques; elles ne veulent que choisir ce qui est le plus intéressant. C'est normal, car je crois que si vous aviez la même occasion vous choisiriez vous aussi ce qui vous intéresse le plus.

Les banques des annexes n'ont aucun intérêt particulier même si plus tard il se peut qu'une mesure législative soit adoptée pour qu'elles soient autorisées à ouvrir des succursales. Pour l'instant elles ne désirent aucunement accepter des dépôts au Canada. Cela a été indiqué très clairement. Je ne vois donc pas l'utilité d'avoir des fusions et de devenir plus gros simplement parce qu'on s'inquiète de la concurrence qui provient des États-Unis parce que cette concurrence n'existe en fait que chez les marchés à créneau.

Pour être honnête, je n'aime pas vraiment l'arrivée de cette concurrence ici au Canada parce que vous avez offert de bons services, des services garantis et assurés.

Je ne voudrais tout de même pas qu'on adopte au Canada, comme c'est le cas aux États-Unis, le principe de l'acheteur averti. Si nous parlons de concurrence... Je me rends parfois aux États-Unis et il m'arrive d'aller dans une banque. Si je veux obtenir un rouleau de pièces de 25c., on me demande si j'ai un compte dans cette banque. Si je réponds par la négative, on ne me donnera même pas de monnaie.

Est-ce cela que je voudrais retrouver au Canada? Non. C'est pourquoi j'hésite à appuyer les changements, non pas parce que je crains que vous n'offriez pas de meilleurs services s'il y a fusion, mais simplement parce que je crains que vous n'offriez aux autres intervenants l'occasion d'offrir leurs services au Canada. C'est ce que je crains.

M. Sam Walters: Je désire simplement vous signaler que d'autres intervenants sont arrivés. Ils sont ici et d'autres les suivront. Si nous nous laissons faire et que nous ne sommes pas en mesure de leur livrer concurrence—et la technologie est un aspect très très important—si nous cédons tous ces créneaux dont vous parlez, si nous cédons notre service de cartes de crédit, d'hypothèques, de fonds mutuels, toutes ces choses, nous allons céder des choses très importantes sans pour autant être en mesure de rivaliser avec ces nouveaux intervenants.

Nous voulons pouvoir livrer concurrence. Nous voulons être en mesure d'offrir aux Canadiens les services dont nous avons parlé. Nous sommes très fiers d'offrir ces services de qualité aux Canadiens dans cette province et dans toutes les autres régions du Canada. Nous voulons faire toutes ces choses, mais nous voulons pouvoir être en mesure de pleinement livrer concurrence.

M. Gary Pillitteri: J'aimerais faire un dernier commentaire, monsieur le président.

Monsieur, j'ai peur de dire que les banques canadiennes sont déjà beaucoup plus avancées au point de vue technologique que les banques américaines. Ce n'est pas une raison pour vouloir procéder à des fusions. Je n'arrive pas à justifier les fusions en me servant de l'argument de la technologie.

J'ai entendu les propos de M. Cleghorn, de M. Barrett, de M. Godsoe et de M. Flood. Ils ont tous comparu devant le comité du groupe de travail. Ils reconnaissent tous qu'au point de vue technologique, au Canada, on est beaucoup plus avancé qu'aux États-Unis. Vous ne nous ferez pas dire que les fusions sont utiles parce que vous serez mieux en mesure d'apporter des améliorations technologiques, parce que cela a déjà été fait sans qu'il y ait de fusion.

En fait, si vous allez aux États-Unis, dans la région centrale ou dans le sud, il faudrait une semaine avant qu'un chèque soit approuvé, alors qu'au Canada, si vous déposez un chèque à Terre-Neuve le matin, l'après-midi il a déjà été accepté en Colombie-Britannique.

M. Sam Walters: C'est exact.

M. Gary Pillitteri: C'est au Canada qu'on retrouve les banques qui se servent des technologies les plus avancées. Donc, la technologie n'est pas une excuse.

Pour ce qui est de la prise de risques, M. Godsoe a dit qu'il n'y a pas de contrat ou de projet au Canada ou à l'étranger que nous sommes trop petits pour accepter. Il n'y a pas grand-chose que nous ne soyons pas en mesure d'assurer, et cela vaut même pour la plus petite banque, la Banque Nationale. Je pourrais vous faire part d'autres des commentaires qu'ils ont faits.

• 0945

Il ne faut donc pas dire qu'en devenant plus gros, grâce à la fusion, on sera plus concurrentiels. Nous ne savons pas vraiment pourquoi on veut ces fusions. J'ai demandé à M. Baillie quel était son plan d'entreprise? Je l'ai vu. Je ne sais pas si mes collègues l'ont vu.

Merci. Je voulais simplement faire ce commentaire.

Le vice-président (M. Nick Discepola): C'était simplement un commentaire, pas une question?

M. Gary Pillitteri: Simplement un commentaire—à moins que les témoins ne veuillent ajouter quelque chose.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Est-ce qu'on veut faire des commentaires sur cette observation?

M. Sam Walters: J'aimerais simplement dire pour conclure que, encore une fois, vous avez eu le privilège d'entendre tous ces intervenants, et ce n'est pas mon cas. Mais je crois que la technologie est un facteur très important dans l'avenir du secteur financier.

Je suis d'accord avec tout ce que vous avez dit, que nous avons un système absolument extraordinaire. Nous espérons que cette fusion nous permettra de conserver ce système au Canada et de nous adapter aux nouvelles technologies qui changent très rapidement. C'est en fait l'objectif que nous aimerions atteindre—être en mesure de rester au Canada et d'offrir aux Canadiens les très bons services dont vous avez déjà parlé.

Merci.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Les dernières questions seront posées par M. Paul Forseth.

M. Paul Forseth: Merci.

Monsieur Walters, quel nom a été proposé pour la nouvelle banque?

M. Sam Walters: Aucune décision n'a encore été prise à ce sujet.

M. Paul Forseth: Vous n'avez pas d'idées.

M. Sam Walters: Non.

Le vice-président (M. Nick Discepola): «La Banque réformiste du Canada», peut-être.

M. Paul Forseth: La Banque réformiste du Canada, oui.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Ou la banque «réformée» du Canada?

M. Paul Forseth: Ah, ah.

Bon nombre des discussions qui ont eu lieu aux quatre coins du Canada ont porté sur les pertes d'emplois et certains secteurs ont dit des fusions proposées que c'était une façon d'éliminer des emplois; il s'agit de réduire les effectifs, ce qui semble être la tendance dans le monde.

À certains égards, toute notre discussion sur les pertes d'emplois pourrait être une discussion motivée par l'inquiétude. La ville locale et les commerçants locaux se demandent si l'atelier du bridier et l'écurie de louage de la place pourront survivre, et si l'atelier local qui fabrique des roues pour les bogheis pourra survivre. Ils s'inquiètent des pertes d'emplois.

Mais comme disait le poète et compositeur anglais, «Les temps changent».

Le vice-président (M. Nick Discepola): A-t-il survécu?

M. Paul Forseth: Cela nous ramène donc à la très bonne question de M. Pillitteri: Où est le vrai plan d'affaires? Donnez-nous une idée de ce vers quoi nous nous dirigeons. Nous envisageons l'élimination éventuelle de toute la monnaie métallique et de toute la monnaie-papier dans un proche avenir. Cette monnaie n'aurait plus de valeur ni d'utilité. Le système de banque à succursales, tel que nous le connaissons, pourrait véritablement disparaître, ainsi que des produits d'assurance fournis par un courtier. Au fond, ce genre de choix pourrait disparaître.

Par exemple, un jour on décide de s'acheter une voiture, et lorsqu'on achète une voiture on sait que la voiture comporte une assurance tous risques qui fait partie de l'achat. Tous les produits que vous vendez font partie des articles vendus, ils sont compris dans le prix. On n'a pas de choix. C'est un des arguments de vente du produit. Cette assurance est valide pour la durée de vie du produit.

Donc il n'y a pas de courtier, il n'y a pas d'agent. Les succursales de la banque seront peut-être peu nombreuses. Il se peut que la monnaie dans sa forme actuelle n'existe plus, ainsi que le système de chèques. La nature même de tout ce secteur est en évolution.

Quel est le vrai plan d'affaires? Où allons-nous? Coupons-nous les cheveux en quatre alors que ces choses sont essentiellement appelées à disparaître sous peu?

M. John Thompson: Eh bien, vous brossez un tableau plutôt sombre, vous savez. Il serait peut-être bon de ne pas avoir de succursales bancaires si personne ne peut y déposer de l'argent. Sam et d'autres autour de cette table ont mentionné le fait que la petite entreprise est le moteur économique du pays. Si nous ne mettons pas en place les contrôles nécessaires à sa protection, nous devrions fermer boutique tout de suite.

• 0950

Je crois que nous sommes tous d'accord pour dire que le système bancaire du Canada est enviable. Les banques ont fait un travail formidable en ce qui concerne leur produit. L'industrie de l'assurance et les courtiers ont fait un travail formidable en ce qui concerne le leur. Alors pourquoi éliminer ces barrières pour permettre aux banques de devenir encore plus grosses si cela nuit aux Canadiens, si cela réduit les choix et entraîne des pertes d'emplois?

En fait, c'est une réponse assez simple à toute cette équation.

M. Sam Walters: Je suppose qu'il est toujours difficile de prédire l'avenir de façon précise, mais le Canada a évolué au cours des années et nous nous sommes adaptés au changement.

Je vous parle à titre de Canadien qui est tout à fait confiant que nous continuerons à vous adapter et à progresser. Je vous parle aussi à titre de banquier qui s'attend pleinement à ce que les pièces de monnaie et les billets de banque restent en circulation pour un certain temps. Malgré tous les progrès technologiques, la monnaie est toujours en forte demande.

À mon avis, le système de succursales bancaires demeurera en place parce que les Canadiens, ou du moins certains parmi eux, voudront faire affaire en personne, que ce soit avec leur courtier d'assurance ou avec la banque. Bien d'autres préféreront recourir aux outils technologiques pour accéder au service. Il est évident que notre organisation tient à leur offrir les options qu'ils veulent.

Je crois que la petite entreprise, encore une fois, a fait preuve d'une grande polyvalence dans sa façon de relever les défis. Certaines entreprises ont changé. L'époque des voitures tirées par des chevaux est révolue. Il reste très peu de forgerons au sein de cette communauté.

Quand j'étais un petit gars à Lunenburg en Nouvelle-Écosse, il y avait un forgeron à côté de chez nous. On y allait, on le regardait ferrer les boeufs. C'est devenu une chose plutôt rare maintenant, mais il y a d'autres petites entreprises dans la communauté où j'ai grandi. L'atelier du forgeron a été modifié et maintenant on y fabrique des pièces métalliques pour les chalutiers, entre autres choses. C'est un exemple de la capacité d'adaptation qui a été un grand atout pour le Canada.

On parle d'Internet et des fibres optiques comme si c'était des menaces pour la population rurale du Canada. Je vous dis qu'ici à Terre-Neuve—et j'estime que notre premier ministre serait d'accord aussi—les fibres nous ont rapprochés et nous ont permis d'accéder au marché canadien. Elles nous ont permis de montrer aux Canadiens et au monde que nous avons en effet de bonnes choses ici à Terre-Neuve. Il y a des gens doués et une foule de possibilités.

Par ailleurs, j'estime qu'il nous faut simplement reconnaître ces possibilités. Les acteurs de l'industrie et de la compagnie dont je vous parle ici aujourd'hui, c'est-à-dire dans le secteur des banques, tiennent à utiliser ces possibilités afin de concurrencer, de s'implanter et de s'adapter aux forces à venir, et afin de continuer à être présents et à bien servir les Canadiens services financiers.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Merci, monsieur Walters.

Je suppose qu'il reste toujours un problème, à savoir que si je possède un cheval ou un boeuf et que je veux les faire ferrer, où puis-je m'adresser aujourd'hui? Les chevaux et les boeufs sont toujours avec nous, il faut s'en rendre compte.

M. Sam Walters: Je ne sais pas où il faudrait aller à St. John's, mais dans ma ville natale de Lunenburg, l'atelier du forgeron Walter est toujours ouvert.

M. John Thompson: Vous pouvez vous présenter au bureau de votre courtier d'assurance.

Des voix: Ah, ah.

Le vice-président (M. Nick Discepola): Eh bien, messieurs, comme vous voyez, le débat ne fait que commencer. Au nom de mes collègues, j'aimerais vous remercier d'avoir participé à ce débat et d'avoir souligné le point de vue de Terre-Neuve.

J'estime que, en tant que législateurs, nous devrions avoir comme objet de faire ce qui est bon pour la population aux quatre coins du Canada, peu importe le secteur ou l'industrie. Dans cette perspective, nous essayons de prendre la bonne décision au moment opportun, et je crois que nous nous sommes engagés envers vous à cet effet.

Nous vous remercions encore une fois de votre précieuse contribution.

Chers collègues, la séance est levée jusqu'à demain matin. Nous nous réunirons à Dartmouth.