propose que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Monsieur le Président, évidemment, cela me fait extrêmement plaisir aujourd'hui de présenter le projet de loi . Avant d'en expliquer toute la portée, je me permets de lire la modification que ce projet de loi souhaite apporter au préambule de la loi. On peut bien sûr retrouver cette modification dans la présentation du projet de loi :
que les Québécois forment une nation et que, de ce fait, ils doivent avoir en main tous les outils nécessaires à la définition de leur identité et à la protection de leurs valeurs communes, notamment en ce qui a trait à la protection du français, à la séparation de l’Église et de l’État et à l’égalité des sexes;
C'est ce préambule qui, à notre avis, doit servir d'interprétation à l'amendement qui suit:
L’article 3 de la même loi est modifié par adjonction, après le paragraphe (2), de ce qui suit:
(3) La politique du gouvernement fédéral en matière de multiculturalisme ne s’applique pas sur le territoire du Québec.
Voilà donc la proposition faite en cette Chambre par le Bloc québécois. Comme je l'ai mentionné à quelques reprises, ce projet de loi s'inscrit dans une série de propositions faites par le Bloc québécois. Lors de la journée de l'opposition qui nous était attribuée, mardi dernier, nous invitions le gouvernement à passer de la parole aux actes au sujet de la reconnaissance de la nation québécois. De plus, ma collègue de a déposé le projet de loi , qui vise à faire du français la langue de travail des travailleurs et des travailleuses au sein des entreprises relevant du fédéral.
D'autres projets de loi sont actuellement en élaboration au sein de notre caucus afin de mettre de la chair autour de l'os de la reconnaissance de la nation québécoise, comme le disait le député de . Plus spécifiquement, ce projet de loi dont nous débattons présentement vise à obliger le gouvernement fédéral à exempter le Québec de la Loi sur le multiculturalisme canadien.
Comme je le mentionnais, ce projet de loi suggère de passer de la parole aux actes puisque tous reconnaissent maintenant, du moins de façon théorique, le caractère national du Québec. Maintenant qu'on a reconnu la nation québécoise, on devrait aussi poser des gestes concrets en ce sens. Le projet de loi s'inscrit dans ce courant en permettant au Québec d'appliquer sur son territoire, au sein de sa propre nation, son propre modèle d'intégration des nouveaux arrivants et d'ainsi se soustraire à celui de la nation canadienne qu'est le multiculturalisme canadien, lequel est d'ailleurs à l'image du multiculturalisme britannique.
Je rappellerai que la nation québécoise est une réalité reconnue au Québec depuis déjà longtemps, aussi bien par les fédéralistes que par les souverainistes québécois. C'est une réalité qui fait consensus. On n'a pas eu à en attendre la reconnaissance par cette Chambre des communes pour que ce soit une réalité sentie, vécue et constatée par les Québécois et les Québécoises. Je rappelle que le 30 octobre 2003, l'Assemblée nationale du Québec adoptait à l'unanimité la motion suivante:
Que l'Assemblée nationale réaffirme que le peuple québécois forme une nation.
J'attire l'attention de mes collègues sur le fait que la motion ne dit pas que les Québécois forment une nation si le Canada reste ce qu'il est. Ainsi, nous ne sommes pas assujettis aux formes constitutionnelles que décidera de se donner la nation canadienne. Cette motion ne dit pas non plus que le Québec est une nation s'il opte pour la souveraineté. Cette motion dit que le peuple québécois forme une nation, un point c'est tout.
Au sens de la motion qui a été adoptée par cette Chambre, la même attitude devrait guider les parlementaires en cette Chambre. Ce n'est pas pour rien que l'Assemblée nationale du Québec spécifiait, dans la motion que j'ai lue tout à l'heure, qu'elle réaffirmait l'existence de la nation québécoise. Car depuis bien longtemps, du moins depuis une quarantaine si ce n'est une cinquantaine d'années, les premiers ministres du Québec, peu importe leur couleur politique, ont réaffirmé cette réalité de l'existence de la nation québécoise.
Je vais tout de même me permettre de citer Jean Lesage, qui disait en novembre 1963:
Le Québec ne défend pas le principe de l’autonomie des provinces seulement parce qu’il s’agit d’un principe, mais bien plus parce que l’autonomie est pour lui la condition concrète non pas de sa survivance qui est désormais assurée, mais de son affirmation comme peuple [et comme nation].
C'était en 1963.
Je pourrais parler évidemment de Daniel Johnson père qui a lui aussi, à plusieurs reprises, indiqué que les Québécois et les Québécoises formaient une nation. Selon lui, si elle n'était pas capable de trouver sa place de façon égale face à la nation canadienne, elle avait le choix d'opter pour l'indépendance nationale.
René Lévesque, en juin 1980, disait ceci: « [...] le Canada est composé de deux nations égales entre elles; le Québec constitue le foyer et le point d'appui d'une de ces nations et, possédant tous les attributs d'une communauté nationale distincte, il jouit d'un droit inaliénable à l'autodétermination. [...] [Le droit à l'autodétermination] est le droit le plus fondamental que possède la collectivité québécoise. » Cela, c'était en juin 1980.
Je pourrais évidemment parler de Jacques Parizeau et de Robert Bourassa. Je veux simplement m'arrêter sur une dernière citation d'octobre 1999 de Lucien Bouchard, qui a siégé en cette Chambre, comme vous le savez. Il disait: « Le peuple québécois adhère à la conception démocratique d'une nation francophone par la langue, plurielle dans sa culture et largement ouverte à l'immigration internationale [...] ». Donc, on a ici une preuve indéniable de l'existence non seulement de la nation québécoise, mais du fait qu'il s'agit d'un consensus au Québec depuis extrêmement longtemps.
Comme le mentionnait la dernière citation de Lucien Bouchard, alors qu'il était aux commandes du Québec, c'est une nation qui est ouverte à l'immigration internationale, mais qui, en même temps, n'est pas ouverte au mode d'intégration proposé par la nation canadienne qu'est le multiculturalisme. Un élément revient chez tous ceux qui dénoncent le multiculturalisme canadien et qui prônent le modèle québécois, car il y a un modèle québécois.
Il ne s'agit pas d'innover en proposant ce projet de loi pour ce qui est du Québec. Ce modèle est déjà en place. Il tente de s'imposer, malgré la confusion que crée l'existence de l'autre modèle d'intégration qu'est le multiculturalisme. Le gouvernement du Québec a d'ailleurs annoncé, encore la semaine dernière, des investissements en ce sens auprès des immigrants et des immigrantes. C'est un modèle que nous qualifions d'interculturalisme. Ce modèle d'intégration des nouveaux arrivants demande à tous et à toutes, ceux qui sont déjà au Québec, comme ceux qui y arrivent, de respecter les valeurs communes qui sont celles de l'ensemble de la société québécoise. Ces valeurs sont, par exemple, la laïcité des institutions publiques, l'égalité entre les hommes et les femmes. Évidemment, ce modèle d'intégration demande aussi à l'ensemble de ses citoyens et de ses citoyennes d'avoir une connaissance du français comme langue commune dans l'espace public.
Cela est extrêmement important parce que si on est incapable d'avoir cette langue commune pour communiquer dans l'espace public, on est incapable de débattre démocratiquement, on est incapable de tenir les débats qui permettent à une société d'avancer. Cela devient la cacophonie. Tout cela est fait dans le respect de la minorité nationale québécoise de langue anglaise dont les institutions sont protégées depuis extrêmement longtemps.
On va me dire, évidemment, qu'il y a deux langues officielles au Canada. C'est justement le problème. Au Québec, il n'y a qu'une langue officielle: le français. Dans les faits, on sait très bien qu'il n'y a véritablement qu'une langue dans l'espace public canadien et cela demeure la langue anglaise. C'est cette confusion au Québec qui vient affaiblir la francisation des immigrants.
En contrepartie de cette obligation faite à tous de respecter les valeurs communes et d'apprendre, au moins de façon minimale, la langue commune — le français — pour pouvoir délibérer dans l'espace public, on reconnaît qu'il existe un pluralisme culturel. Ce pluralisme culturel, c'est l'apport de l'ensemble des personnes qui viennent de partout au Québec pour enrichir notre culture commune. Ce modèle québécois est d'ailleurs repris dans d'autres pays et devient ainsi une source d'inspiration.
L'idée du multiculturalisme canadien est tout le contraire. Il rejette toute notion de valeurs et de culture communes. En fait, la notion de multiculturalisme promeut une société en multitude de solitudes, chaque nouvel arrivant, chaque immigrant conservant sa langue, sa culture, ses coutumes et étant protégé par un chapeau qui est la Charte canadienne des droits et libertés. Je rappelle qu'au Québec, nous avons une Charte québécoise des droits de la personne.
Enfin, au lieu de promouvoir, comme le modèle québécois, une culture, une langue et un certain nombre de valeurs communes dans l'espace public, il favorise la coexistence de multiples cultures. Cette notion de multiculturalisme a toujours été rejetée par le Québec. J'y reviendrai.
Pour faire la démonstration que le multiculturalisme est effectivement ce que je viens de vous mentionner, je me permettrai de citer ce que l'on retrouve dans un document de Citoyenneté et Immigration Canada intitulé « Le Canada et les nouveaux arrivants ». Il s'agit d'un document général de référence à l'usage des nouveaux arrivants qui est disponible sur le site Web du ministère. À la page 31, on peut lire:
Le Canada est peuplé de gens qui sont arrivés de toutes les régions du monde. Par sa Loi sur le multiculturalisme canadien, le gouvernement encourage les Canadiens à être fiers de leur langue, de leur religion et de leur héritage, et à conserver leurs coutumes et leurs traditions, à condition qu’ils n’enfreignent pas les lois canadiennes.
Cette citation de Citoyenneté et Immigration Canada est la plus belle illustration de ce qu'est le multiculturalisme et de ce qui est rejeté au Québec.
J'aimerais aussi dire qu'il y a un certain malaise au sein de la nation canadienne concernant le multiculturalisme. J'attire votre attention sur une lettre aux lecteurs de Carol Dunn dans le National Post de ce matin, à la page A17, qui disait qu'on demande souvent d'où vient son fils de 16 ans, qui va à une école secondaire de Toronto. Il a appris à dire qu'il vient d'Écosse et d'Angleterre parce que chaque fois qu'il disait qu'il était Canadien, quelqu'un lui rétorquait qu'une telle chose n'existe pas. J'attire votre attention sur cette lettre qui est une illustration du problème qui se pose même pour la nation canadienne dans le choix de son modèle d'intégration des nouveaux arrivants.
Comme je l'ai mentionné, dans le cas du Québec, ce modèle de multiculturalisme est rejeté, d'autant plus que ce modèle banalise la place du Québec au sein du Canada et qu'il nie l'existence de la nation québécoise puisque nous serions tous l'addition d'ethnies — l'ethnie canadienne française ou québécoise d'origine française, selon les définitions que peuvent donner les gens ou les fédéralistes à cette notion, étant une ethnie parmi les autres. Les fédéralistes, comme les souverainistes au Québec, ont depuis longtemps rejeté le multiculturalisme pour modèle d'intégration.
Déjà, en 1971, Robert Bourassa, premier ministre libéral et fédéraliste, écrivait à Pierre Elliott Trudeau que « cette notion [du multiculturalisme] paraît difficilement compatible avec la réalité québécoise ».
Au contraire, au Québec, le modèle d'interculturalisme brise le sentiment d'isolement des immigrants et des immigrantes. Les notions de multiculturalisme tendent plutôt à isoler les nouveaux arrivants dans leur culture et leurs coutumes. Ces deux modèles se confrontent ainsi sur un même territoire. Et bien que la souveraineté soit la seule façon de clarifier cette confusion, il me semble qu'avec le projet , on reconnaîtrait, tout en reconnaissant concrètement la nation québécoise sur le plan de son intégration, sa capacité à régir ses propres lois quant à l'application d'un modèle d'intégration pour les nouveaux arrivants.
En effet, cette confusion quant à l'affrontement entre le multiculturalisme canadien et l'interculturalisme québécois envoie un message très difficile à comprendre pour les immigrants. Je n'aurai malheureusement pas le temps de citer un extrait du mémoire déposé par le Conseil des relations interculturelles du Québec à la Commission Bouchard-Taylor, qui démontre très clairement que ces deux modèles d'intégration créent une confusion chez les nouveaux arrivants et rend très difficilement compréhensible pour eux le message de la nation québécoise.
Le multiculturalisme canadien fait la promotion des deux langues officielles du Canada, le français et l'anglais, tandis que l'interculturalisme québécois valorise le français comme langue commune publique et de communication. Le Québec s'est déjà doté des outils pour protéger et promouvoir le français sur son territoire. Bien que rien ne soit encore parfait et qu'il reste beaucoup de travail à faire, l'application de l'interculturalisme au Québec a permis au français d'avancer et celle du multiculturalisme est constamment un obstacle qui le fait reculer. Le français est et doit rester la langue commune de la nation québécoise en tout respect envers les Autochtones et la minorité linguistique anglophone qui en font partie.
Bien que seule la pleine souveraineté du Québec puisse promouvoir et protéger la langue française, le projet de loi permettra de réduire la portée du multiculturalisme sur le territoire québécois et les effets pervers dont j'ai parlé qui mènent à l'anglicisation de plusieurs nouveaux arrivants au Québec.
Si nous reconnaissons la nation québécoise, et je conclus là-dessus, il faut passer de la parole aux actes et avoir des mesures concrètes. Le projet de loi que je dépose aujourd'hui et que je souhaite voir adopter par cette Chambre représente une étape supplémentaire dans cette direction.
:
Monsieur le Président, nous sommes ici aujourd'hui pour débattre du projet de loi déposé par le député de . Ce projet de loi vise, entre autres choses, à exclure le Québec de la Loi sur le multiculturalisme canadien.
Les préoccupations du Québec dans le domaine de l'immigration et de l'intégration des nouveaux arrivants sont partagées par l'ensemble du Canada.
Les données du recensement de 2006, publiées tout récemment par Statistique Canada, indiquent qu'il y a maintenant plus de 215 origines ethniques différentes au pays, et 11 d'entre elles ont franchi le cap du million de personnes.
Le portrait ethnoculturel du Canada n'a jamais été aussi diversifié. Il est clair que de nouveaux défis surgiront, et nous devons être en mesure de les relever ensemble. L'immigration joue et continuera de jouer un rôle déterminant dans l'évolution du Canada d'aujourd'hui et de demain. Les politiques canadiennes en matière de multiculturalisme doivent constamment s'adapter à l'évolution des réalités sociales.
Le Canada est reconnu partout dans le monde pour ses principes de multiculturalisme et de droits de la personne. Notre approche permet de bâtir une société inclusive qui valorise les différences et favorise le sentiment d'appartenance.
Néanmoins, selon le député de , le modèle canadien de multiculturalisme crée de la confusion chez les nouveaux arrivants et est en parfaite contradiction avec le modèle québécois basé sur l'interculturalisme.
Pourtant, au regard des deux systèmes en place, ce sont les similarités qui sautent aux yeux, beaucoup plus que les différences.
Les principales fonctions du ministère québécois de l'Immigration et des Communautés culturelles sont de soutenir les communautés culturelles en favorisant leur pleine participation à la société québécoise, d'encourager l'ouverture de la société au pluralisme et de faciliter le rapprochement interculturel entre les Québécois.
Ces fonctions, vous en conviendrez, s'intègrent tout à fait aux priorités du Programme du multiculturalisme de notre gouvernement, qui vise à appuyer l'intégration économique, sociale et culturelle des nouveaux Canadiens et des communautés ethnoculturelles, à faciliter la mise en œuvre de programmes s'adressant aux jeunes à risque des communautés ethnoculturelles et à promouvoir la compréhension interculturelle ainsi que les valeurs canadiennes.
Le Programme d'appui aux relations civiques et interculturelles — le PARCI — du gouvernement du Québec souhaite « développer chez les personnes immigrantes et les membres des communautés culturelles la connaissance et la compréhension de la société québécoise: son histoire, ses valeurs et ses institutions démocratiques ».
Avouez que cet objectif est très proche de celui mis en avant par notre Programme du multiculturalisme qui vise, quant à lui, à « promouvoir la compréhension interculturelle et les valeurs canadiennes que sont la démocratie, la liberté, les droits de la personne et la primauté du droit ».
Le caractère irréconciliable des deux modèles, tel qu'avancé par mon collègue du Bloc québécois, a d'ailleurs été contredit dans le document de consultation préparé par la Commission Bouchard-Taylor qui dit: « Avec le temps, on peut dire qu'ils ont évolué de façon convergente; leur différence est donc atténuée. »
On remarquera que cette convergence de vues se reflète également dans la priorité accordée à la lutte contre le racisme qui est prônée par les deux programmes.
Le PARCI parle de « prévenir et de combattre les préjugés, la discrimination, l'intolérance, le racisme et l'exclusion », alors que le Programme du multiculturalisme veut faciliter la « participation des communautés et du grand public à un dialogue éclairé et à l'adoption de mesures soutenues pour lutter contre le racisme ».
Les mots diffèrent, mais le message est le même: un Canada fier et respectueux de sa diversité culturelle.
À la lumière de ces grandes ressemblances, on ne sera donc pas étonné de constater que plusieurs initiatives et projets financés par le gouvernement du Canada, par l'entremise du Programme du multiculturalisme, obtiennent l'appui du gouvernement du Québec.
La Semaine d'actions contre le racisme, avec le soutien des deux paliers de gouvernement, est une des activités les plus importantes de lutte contre le racisme et de rapprochement interculturel au Québec.
On peut également penser à l'exposition itinérante « Québec interculturelle depuis 400 ans déjà » qui souligne l'apport des Canadiens de diverses origines à l'essor et à l'épanouissement de la ville de Québec.
Dans la même optique, des projets nés au Québec et appuyés par les gouvernements du Québec et du Canada sont devenus des modèles suivis ailleurs au pays. C'est le cas du projet Equitas, Centre international d’éducation aux droits humains, qui sensibilise les jeunes aux droits humains et aux relations interculturelles lors de camps de jour. Cette initiative, qui a vu le jour à Montréal, est maintenant reprise à Vancouver, à Toronto, à Winnipeg, à Moncton, à Dieppe et à Fredericton.
Si nos priorités et nos objectifs étaient à ce point différents, de telles collaborations seraient-elles possibles? La réponse me semble évidente: bien sûr que non.
Quand 82 p. 100 des Canadiens s'entendent pour dire que la composition multiculturelle du Canada est l'une des meilleures choses de ce pays, on se doit de conclure que, sans prétendre à la perfection, le modèle canadien porte ses fruits. Ce succès se voit tout autant au Québec, où les trois quarts des nouveaux arrivants qui se sont installés dans la province entre 2001 et 2006 ont choisi le français comme langue principale.
À la lecture du récent rapport de l'Office québécois de la langue française, on constate également que, dans le domaine de la consommation de produits culturels, une progression marquée du français se fait sentir. En effet, le pourcentage d'allophones qui consomment des spectacles en français est passé de 27 p. 100 à 54,5 p. 100. De plus, la proportion de ceux qui lisent les journaux uniquement en français a atteint 51,8 p. 100.
Il m'apparaît donc clairement que les modèles de multiculturalisme et d'interculturalisme visent, au-delà des différences inhérentes au contexte particulier du Québec, une seule et même finalité: favoriser la pleine participation de tous les Canadiens à la société. Devant cet état de fait, il me semble évident que le Québec a tout à gagner en maintenant son inclusion. C'est d'une seule voix que le Canada veut souhaiter la bienvenue aux immigrants qui le choisissent comme terre d'accueil.
:
Monsieur le Président, je me lève aujourd'hui en cette Chambre pour participer à ce débat sur le projet de loi du Bloc québécois, auquel je m'oppose et auquel s'oppose également la porte-parole de l'opposition officielle en matière de multiculturalisme, la députée de .
J'ai beaucoup de respect pour le travail que font les députés bloquistes, dans le cadre de droits de la personne, mais je crois qu'il faut garder la politique canadienne sur le multiculturalisme comme politique qui protège les droits de la personne — particulièrement le droit à l'égalité et contre la discrimination — qui promeut et protège la diversité et en même temps la spécificité du Québec, et qui est enchâssée dans la Charte canadienne des droits et libertés.
Il nous faut apprécier l'impact transformateur que la Charte a eu, et le fait qu'elle nous a permis de passer d'une démocratie parlementaire à une démocratie constitutionnelle dans laquelle les particuliers et les groupes, mêmes ceux du Québec, ont accès à une panoplie de droits et de recours autrefois inaccessibles.
L'impact transformateur de la Charte ne se limite pas aux effets de la provision visant l'égalité devant la loi — « égalité de bénéfice et protection égale de la loi » —; mais la Charte vise le maintien du patrimoine culturel — article 27 — qui prescrit que:
Toute interprétation de la présente charte doit concorder avec l'objectif de promouvoir le maintien et la valorisation du patrimoine multiculturel des Canadiens.
Ces derniers incluent les Québécoises et les Québécois parmi eux.
Ce n'est pas seulement que ce principe n'est pas divisible, mais il est une partie intégrante d'une célébration de l'égalité et de la diversité comme composantes de la même charte générique. Cela m'amène à me poser la question suivante: comment se fait-il qu'au Québec on puisse à la fois — et je le fais moi-même comme Québécois — invoquer la Charte, comme il se doit, pour protéger entre autres des droits juridiques et égalitaires, mais, en même temps, déclarer que l'on va invalider la signification et l'application des principes et politiques de multiculturalisme dans la province de Québec? Cette Charge protège aussi effectivement les valeurs du Québec.
En vérité, cela m'amène à poser quelques questions sur la teneur de la proposition du Bloc. Pourquoi le Bloc s'objecterait-il à — et voudrait invalider — l'application d'une politique visant à « promouvoir la participation entière et équitable des individus et des collectivités de toutes origines à l'évolution [...] et à les aider à éliminer tout obstacle à une telle participation à faire en sorte que la loi s'applique également et procure à tous la même protection, tout en faisant cas des particularités de chacun »? Cela ne fait-il pas partie des valeurs québécoises?
Pourquoi le Bloc voudrait-il invalider l'application d'une politique ayant pour objet de « promouvoir la compréhension entre individus et collectivités d'origines différentes et la créativité qui résulte des échanges entre eux »? Cela ne fait-il pas partie des valeurs québécoises?
Pourquoi le Bloc voudrait-il invalider l'application au Québec d'une politique, en fait, d'un principe fondamental, celui de « reconnaître l'existence de collectivités dont les membres partagent la même origine et leur contribution à l'histoire du pays, et de favoriser leur développement »? Cela ne fait-il pas partie des valeurs québécoises?
Pourquoi le Bloc voudrait-il invalider au Québec l'application d'une politique qui vise « l'affirmation du statut des langues officielles et [à] l'élargissement de leur usage »? Le Bloc veut-il vraiment éliminer l'application au Québec d'une loi visant à « maintenir et à valoriser » les langues officielles, dont le français.
En un mot, le projet de loi du Bloc québécois ne tient pas compte du fait que le multiculturalisme est une partie intégrante de la Charte, en général, et qu'il est aussi une partie intégrante de la promotion et de la protection du principe d'égalité, en particulier, et aussi un principe fondamental des valeurs québécoises, et qui est une caractéristique fondamentale de la société québécoise.
En 1993, alors que le Bloc formait l'opposition officielle, les députés bloquistes ne se sont pas opposés aux modifications de la Loi sur le multiculturalisme canadien, alors que la loi était modifiée pour reconnaître l'adhésion éventuelle du territoire du Nunavut. Pourquoi le Bloc a-t-il voté pour agrandir l'application de cette loi au Nunavut, alors qu'aujourd'hui, il ne veut pas que la loi s'applique au Québec?
Il me semble que la véritable raison pour laquelle le Bloc s'oppose à la politique du multiculturalisme, qui amène aussi le droit à l'égalité, est qu'il s'oppose au fédéralisme. Le Bloc n'appuiera donc pas le concept d'une nation québécoise au sein du Canada comme moi, je l'appuie, mais seulement le concept d'une nation québécoise à l'extérieur du Canada.
Pour conclure, l'égalité, le multiculturalisme, la diversité, l'unicité et la spécificité d'une société distincte québécoise sont autant de concepts qui peuvent coexister en harmonie. Il faut comprendre la raison pour laquelle le Bloc a proposé ce projet de loi aujourd'hui. Bien que la Chambre ait adopté une motion disant que les Québécois forment une nation, le Bloc n'aime pas les mots qui suivent cette phrase, soit les quatre mots suivants: « au sein du Canada ».