Passer au contenu
;

FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 115 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 11 juin 2024

[Énregistrement électronique]

(1105)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Bienvenue à la 115e réunion du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes.
    Avant de commencer, je demande à tous les membres et à tous les participants présents dans la salle de consulter les cartes sur la table qui expliquent comment éviter des effets Larsen.
    Veuillez noter les mesures préventives suivantes en place pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris des interprètes. Veuillez n'utiliser que les écouteurs noirs approuvés. Les anciens écouteurs gris ne doivent plus être utilisés. Nous devons veiller à toujours garder les écouteurs loin des microphones. Quand vous n'utilisez pas vos écouteurs, posez-les face vers le bas sur l'autocollant placé sur la table à cette fin.
    Je demande à tous les membres d'attendre que je les nomme avant de parler. Je demande aux membres qui se trouvent dans la salle de lever la main s'ils souhaitent prendre la parole. Je demande aux membres sur Zoom d'utiliser la fonction « Lever la main ». Je gérerai le temps de parole avec la greffière, et je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
    Je ferai quelques observations à l'intention des témoins. Avant de prendre la parole, attendez que je vous nomme. Si vous participez par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour l'activer et veuillez vous mettre en sourdine quand vous n'avez pas la parole. Les micros des participants qui se trouvent dans la salle seront contrôlés par l’agent des délibérations et de la vérification. Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Des services d'interprétation sont proposés. Vous avez le choix pour vos écouteurs entre le parquet, l'anglais ou le français. Si vous n'entendez plus l'interprétation, veuillez attirer aussitôt mon attention.
    Nous avons plusieurs témoins très intéressants, dans la salle et en ligne, et en raison de leur nombre, je vais me montrer assez stricte sur le temps de parole, afin de respecter le temps de chacun ici présent aujourd'hui. Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 4 juin 2023, le Comité commence son étude en réponse à l'appel aux commentaires sur les recommandations provisoires sur le cancer du sein du Groupe d'étude canadien sur les soins de santé préventifs.
    La réunion d'aujourd'hui durera deux heures avec notre groupe de témoins, afin d'optimiser le temps consacré à ce sujet très important.
    Je vais maintenant souhaiter la bienvenue aux témoins et les présenter. Nous accueillons, à titre personnel, Shira Farber, par vidéoconférence; la Dre Jean M. Seely, professeure de radiologie, Faculté de médecine, Université d'Ottawa, par vidéoconférence; et la Dre Moira Rushton, médecin oncologue. Nous accueillons également Helena Sonea, directrice, Défense de l'intérêt public; David Raynaud, gestionnaire principal, par vidéoconférence; et Ciana Van Dusen, gestionnaire de la défense de l'intérêt public, Prévention et détection précoce, de la Société canadienne du cancer. Nous accueillons aussi la Dre Pamela Hebbard, chef, Oncologie chirurgicale, par vidéoconférence; et la Dre Donna Turner, chef, Oncologie populationnelle, par vidéoconférence également, toutes deux de CancerCare Manitoba. Enfin, nous accueillons la Dre Shiela Appavoo, présidente de la Coalition for Responsible Healthcare Guidelines.
    Si vous comparaissez devant le Comité à titre personnel, vous disposez de cinq minutes pour présenter vos observations préliminaires. Si vous représentez une organisation, vous disposez de cinq minutes que vous partagerez avec vos collègues.
    Je cède maintenant la parole à Mme Farber, qui commencera. Vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie.
    Je m'appelle Shira Farber. Je suis ici aujourd'hui pour raconter ma propre histoire, mais je représente une communauté de femmes atteintes du cancer du sein qui, dans tout le Canada, donnent de leur temps et de leur énergie limités pour améliorer les lignes directrices en matière de dépistage du cancer du sein.
    Aujourd'hui, marque un anniversaire important pour moi. Il y a trois ans ce même jour, je me trouvais au centre d'oncologie Princess Margaret à Toronto où l'on me faisait une biopsie pour confirmer mon diagnostic de cancer. Je me souviens avoir eu la sensation viscérale en entendant les mots « cancer du sein » que tout irait bien parce que je pensais que le cancer avait été détecté à un stade précoce. Cependant, les tests diagnostiques ont révélé trois grosses tumeurs dans mon sein droit et un cancer du sein de stade 3 — ce que ma chirurgienne oncologue a qualifié de cancer détecté pas trop tard, mais qu'elle aurait souhaité avoir découvert plus tôt.
    Ce que j'ai appris et ce à quoi le groupe d'étude ne prête pas assez attention dans ces lignes directrices, c'est que le stade compte du point de vue de la qualité de vie et pour ce qui est de réduire certains des effets secondaires des traitements plus agressifs.
    La chimiothérapie que j'ai suivie était un traitement à dose dense qui me rendait tellement malade que je ne pouvais pas travailler et que je passais la plupart de mes journées au lit. Je ne pouvais pas prendre soin de moi-même et encore moins de mes enfants ou de ma mère. J'avais la bouche pleine d'aphtes. J'ai perdu tous mes cheveux, et mes articulations en ont pris un sérieux coup. J'ai développé une anémie ferriprive et de la tachycardie, et je suis tombée très malade et ai été hospitalisée pour une péricardite constrictive aiguë. J'ai failli avoir d'urgence une opération à cœur ouvert.
    Je ne pouvais pas parcourir de courtes distances sans être essoufflée, et j'ai dû utiliser un fauteuil roulant. Comme on m'a retiré 40 ganglions lymphatiques, je souffre maintenant d'un lymphoedème permanent. La mobilité de mon bras est très limitée. Je me sens facilement épuisée. Je fais ce que je peux avec la physiothérapie, mais je vis avec des douleurs chroniques. Le protocole de traitement pour un cancer à un stade plus avancé a également limité mes options pour ce qui est de la reconstruction et m'a valu plusieurs interventions chirurgicales. Mon image corporelle a été détruite et ma santé mentale, très éprouvée. Je souffre de stress post-traumatique et j'ai peur d'une récidive.
    Les lignes directrices du groupe d'étude renvoient souvent à une décision commune entre patientes et médecins. Quand j'ai eu 40 ans, je me souviens avoir demandé à mon ancien médecin de famille, qui était un merveilleux médecin, si j'avais besoin de faire une mammographie. Il m'a expliqué que, d'après les nouvelles lignes directrices canadiennes en matière de dépistage du cancer du sein, ce n'était pas nécessaire pour les femmes à risque moyen. Je me souviens avoir reposé la question quand j'ai eu 45 ans et avoir obtenu une réponse similaire.
    Je ne savais pas que des facteurs de risque tels que la densité mammaire, qui ne peut être découverte que lors d'une première mammographie, faisaient de moi quelqu'un à plus haut risque. Je ne savais pas que la plupart des femmes atteintes d'un cancer du sein n'ont pas d'antécédent familial. Je n'ai pas insisté ou défendu mes droits parce que je faisais implicitement confiance à mon médecin et redoutais la douleur que j'associais à tort aux mammographies. Je croyais que ces lignes directrices, si elles étaient les recommandations du Canada et celles de mon médecin, étaient la référence absolue et que je ne risquais rien.
    La voix des femmes n'est tout simplement pas suffisamment prise en compte dans les lignes directrices du Groupe d'étude canadien sur les soins de santé préventifs. Il y a un décalage important entre ce qu'il recommande et ce qui se passe réellement dans le cabinet des médecins de famille. Le groupe d'étude ne tient pas compte du déséquilibre de pouvoir entre les médecins et les patients. Je parle sans arrêt avec des femmes diagnostiquées à un stade plus avancé. Certaines expliquent avoir dû réclamer un dépistage et se l'être vu refuser parce que les médecins estiment être mieux placés pour savoir ou ne sont pas au courant des dernières recherches et des dernières données. Certaines femmes ont peur de trop insister et de passer pour des patientes difficiles, au risque de perdre le privilège d'avoir un médecin de famille.
    Le groupe d'étude mentionne aussi parmi les effets nocifs du dépistage l'angoisse liée au fait d'être rappelée. Je donnerais tout au monde pour ressentir l'angoisse passagère d'un rappel plutôt que les douleurs physiques que j'éprouve et la peur que j'ai de laisser mes enfants sans mère ou mon époux sans conjointe.
    Les femmes sont résilientes. Nous pouvons gérer l'angoisse avec les bons outils. Au cours de l'année écoulée, le groupe d'étude a, pendant qu'il analysait les données, fait de nombreuses déclarations publiques à la presse sur les médias sociaux et parlé de ce qu'il appelle les « préjudices du dépistage ». Je n'ai aucune confiance dans un processus où les membres, qui prétendent être objectifs, déclarent et maintiennent publiquement leur parti pris.
    Quand j'ai reçu mon diagnostic de cancer, j'ai fait la même chose qu'avec des membres de ma famille ou des amis dans des situations semblables. J'ai fait des recherches sur mes médecins. J'ai trouvé un hôpital doté d'un service d'oncologie en qui j'avais confiance et j'ai parlé avec d'autres personnes qui avaient vécu ce type d'expérience. Est‑ce que ce n'est pas ce à quoi a droit toute Canadienne? Pourquoi les médecins de famille et les Canadiens suivent-ils les directives de non-spécialistes du dépistage? Pourquoi n'écoutons-nous pas les experts en dépistage et les chirurgiens oncologues qui sont en première ligne face à cette maladie? Pourquoi ne tirons-nous pas les leçons des expériences vécues par les patientes? Pourquoi ne nous écoute-t‑on pas?
    Le Canada peut opérer ce changement dès maintenant. Nous avons une occasion de donner aux femmes des lignes directrices modernes, reposant sur des données probantes, qui pourraient en protéger certaines contre des cancers à des stades avancés. Nous ne pouvons pas réparer les torts causés, mais nous pouvons éviter des souffrances inutiles et des décès à l'avenir.
    Je vous remercie.
(1110)
    Je vous remercie de votre témoignage.
    La parole est maintenant à la Dre Ify McKerlie.
    Je rappelle à toute personne ayant la parole et à tous les témoins, surtout ceux qui sont en ligne, de parler un peu plus lentement pour que les interprètes puissent bien faire leur travail.
    Docteure Ify McKerlie, vous avez la parole. Vous disposez de cinq minutes.
    Bonjour. Je vous remercie.
    Je remercie les membres du Comité permanent de la condition féminine de cette occasion unique de parler des lignes directrices canadiennes actuelles en matière de dépistage du cancer du sein.
    Je suis la Dre Ify McKerlie. Je suis radiologue généraliste spécialisée dans l'imagerie mammaire depuis plus de 20 ans. Je copréside le groupe sur l'engagement des patientes de la Société canadienne de l'imagerie mammaire. Il est devenu de plus en plus évident au fil de mes années de carrière que les patientes atteintes d'un cancer du sein sont de plus en plus jeunes. De plus, des études canadiennes récentes montrent que l'incidence du cancer du sein augmente.
    Chaque jour, je pose des diagnostics et réalise des biopsies sur ces patientes et, à ce titre, je suis souvent le premier point de contact et celle qui annonce de mauvaises nouvelles. Le cancer du sein a tendance à se développer plus rapidement et à être plus agressif chez les jeunes femmes.
    Le groupe d'étude a publié dernièrement ses recommandations en matière de dépistage du cancer du sein. Il faut souligner que les membres du groupe d'étude ne sont pas spécialisés dans le domaine médical — le dépistage du cancer du sein — à propos duquel ils ont formulé des lignes directrices. Ils mettent à tort l'accent sur les dommages potentiels d'un dépistage précoce plutôt que sur le fait qu'il peut sauver des vies.
    Le cancer du sein est une maladie lourde de conséquences. Le choc brutal d'un diagnostic tardif est nettement plus grave que le préjudice que pourrait causer un examen d'imagerie supplémentaire. L'étude périmée des années 1980, que le groupe d'étude continue d'utiliser pour formuler ses lignes directrices, porte sur une population composée à 98 % de femmes blanches.
    Quarante ans plus tard, toutefois, le Canada est un pays beaucoup plus divers sur le plan racial. Dans le recensement canadien de 2021, plus de 9,5 millions de Canadiens sont considérés comme appartenant à une minorité visible, soit 26,5 % de la population totale.
    Aux États-Unis, on a remarqué que, chez les femmes noires, hispaniques et asiatiques, le cancer du sein se déclare plus tôt, soit à 40 ans, que chez les Blanches. Il ressort d'une analyse canadienne récente que les femmes blanches sont le seul groupe où le pic d'incidence intervient après 50 ans. Le groupe d'étude était au courant de cet article récent de Statistique Canada qui n'est pas encore publié, mais il n'a pas abaissé l'âge de dépistage.
    Dans les lignes directrices récemment publiées, le groupe d'étude souligne que le risque de cancer du sein au cours de la vie dans ces populations est inférieur au risque dans les populations blanches. Il ajoute que les populations non blanches du groupe d'âge des 40 à 49 ans reçoivent plus de diagnostics de cancer du sein, qu'elles présentent une proportion plus élevée de sous-types agressifs de cancer, qu'elles sont moins susceptibles d'avoir des cancers sensibles aux hormones et qu'elles sont moins susceptibles d'avoir un cancer de stade 1.
    Les perspectives pour les femmes noires sont encore plus sombres, puisque leur taux de mortalité est supérieur de 42 % à celui des femmes blanches, qu'elles souffrent de cancers plus agressifs et que leurs résultats sont plus mauvais au même stade. Le groupe d'étude fait observer ceci à propos du groupe d'âge des 40 à 49 ans:
Des données montrent une variabilité de l'incidence, de la mortalité, du sous-type et du stade au moment du diagnostic (p. ex. une mortalité plus élevée chez les femmes noires [...]).
    Bien qu'il énumère tous les désavantages auxquelles les femmes noires sont exposées, il insiste sur le choix éclairé des patientes, ce qui nécessiterait une discussion éclairée avec un médecin de famille. Le groupe d'étude préconise une approche unique, ce qui va à l'encontre de la variabilité observée des valeurs et des préférences. Si une femme choisit de se faire dépister, il recommande quand même de le faire tous les deux ou trois ans.
    Quand les lignes directrices américaines ont été annoncées, le groupe d'étude américain a déclaré que « des données scientifiques nouvelles et plus inclusives » l'avaient conduit à préconiser un dépistage à 40 ans. Au Canada, qu'en est‑il de l'utilisation de données scientifiques nouvelles et inclusives? Qui dit connaissances dit responsabilité. Donc, être au courant de ce qui précède — savoir que la mortalité est plus élevée chez les femmes noires âgées de 40 à 49 ans — et ne pas agir en conséquence est tout simplement contraire à l'éthique et discriminatoire.
    Le groupe d'étude fait également preuve de discrimination à l'égard des femmes qui ont des seins denses en ne recommandant pas de dépistage supplémentaire. La densité mammaire est plus élevée chez les femmes asiatiques, noires et hispaniques.
    Nous sommes en 2024. Nous devons inclure le groupe d'âge des 40 à 49 ans dans la population faisant l'objet d'un dépistage, étant donné, notamment, l'incidence chez les femmes racisées et la mortalité plus élevée chez les femmes noires, ainsi que le risque élevé pour les femmes aux seins denses. Des vies en dépendent.
    Faute de bonne gouvernance et de structure de responsabilité pour le groupe d'étude et, en fait, pour toute organisation, c'est le chaos. Les femmes dans la quarantaine ne sont pas des pertes acceptables.
    Je vous remercie.
(1115)
    Je vous remercie, docteure McKerlie.
    La parole est maintenant à la Dre Jean Seely.
    Vous disposez de cinq minutes.
    Mesdames et monsieur les membres du Comité permanent de la condition féminine, je vous remercie de me donner l'occasion de commenter les lignes directrices provisoires du groupe d'étude en matière de dépistage du cancer du sein. En tant que spécialiste de l'imagerie mammaire, je diagnostique des femmes tout au long de leur parcours face au cancer. Je détecte le cancer du sein lors du dépistage ou je le diagnostique après qu'une femme présente une masse palpable. Je réalise des biopsies mammaires et je localise les cancers du sein pour les chirurgiens. J'interprète l'imagerie des femmes chez qui l'on a diagnostiqué un cancer du sein à un stade avancé ou une récidive du cancer. Je parle avec des femmes à tous les stades du cancer du sein.
    Les cancers détectés par dépistage avant l'apparition de symptômes ont un diagnostic très différent de celui d'un cancer détecté à cause de symptômes aux stades 2 ou 3, ou d'un cancer déjà métastatique au stade 4. Le groupe d'étude estime à tort que la nocivité d'un examen d'imagerie supplémentaire est comparable au diagnostic tardif d'un cancer du sein à un stade avancé. Mes patientes affirment que la gravité du préjudice lié à un retard de diagnostic dépasse largement le stress associé à un examen d'imagerie supplémentaire.
    Les lignes directrices provisoires en matière de dépistage du cancer du sein récemment publiées par le groupe d'étude suscitent de vives inquiétudes dans la communauté médicale et, en tant qu'experte faisant partie du groupe chargé de l'examen des données probantes, j'ai trouvé ses recommandations très décevantes. Ces lignes directrices ne tiennent pas compte de données probantes récentes et solides qui incitent à commencer le dépistage à 40 ans, ce qui est une norme à présent adoptée par le groupe d'étude américain et par de nombreux autres pays dans le monde.
    Les recommandations du groupe d'étude reposent sur des études vieilles de 40 à 60 ans qui utilisent des technologies obsolètes, comme la mammographie sur film avec écran. En s'appuyant sur des données dépassées, il néglige les progrès monumentaux dans le traitement du cancer du sein, notamment dans le cas du cancer à récepteurs hormonaux positifs, les options chirurgicales moins invasives, comme la lumpectomie, la biopsie des ganglions sentinelles, et tous les agents immunologiques et chimiothérapeutiques modernes qui révolutionnent complètement la prise en charge du cancer du sein.
    Par son approche, le groupe d'étude diminue l'importance des études par observation récentes portant sur des millions de femmes qui comparent le dépistage à l'absence de dépistage en utilisant un diagnostic et un traitement actualisés. Il s'agit notamment d'une vaste étude canadienne portant sur plus de 2,7 millions de femmes ayant fait des dépistages sur 20 ans et montrant une réduction de 44 % de la mortalité par cancer du sein chez les femmes qui ont commencé le dépistage dans la quarantaine. Des études similaires menées en Suède révèlent un avantage encore plus important, avec une réduction de la mortalité de 50 à 60 %.
    Recevoir un diagnostic de cancer du sein est dévastateur, mais les dommages sont en grande partie évitables lorsqu'il est détecté à un stade précoce. Les taux de survie sont très différents d'un stade à l'autre. Le taux de survie à cinq ans est proche de 100 % pour le stade 1 détecté par dépistage, contre seulement 22 % pour le stade 4, où la maladie s'est propagée et devient incurable. En outre, les traitements sont beaucoup moins intensifs et moins coûteux lorsqu'ils sont administrés à un stade précoce. Le traitement au stade 1 coûte en moyenne 36 000 $ canadiens, alors qu'au stade 4, il peut dépasser un demi-million de dollars par patiente diagnostiquée. Ces statistiques montrent l'importance cruciale du dépistage précoce, auquel les lignes directrices provisoires du groupe d'étude n'accordent pas la priorité nécessaire.
    Le groupe d'étude ignore les données qui montrent que les femmes de race et d'ethnicité autres que blanches sont plus susceptibles de recevoir un diagnostic de cancer du sein dans la quarantaine. Cette approche unique consistant à recommander le dépistage à partir de 50 ans seulement est discriminatoire à l'égard de ces femmes et contribue à leur taux deux fois plus élevé de cancer du sein avancé à cause d'un diagnostic tardif et du manque d'accès aux programmes de mammographie de dépistage.
    Le groupe d'étude reconnaît aussi que les femmes aux seins denses sont deux fois plus susceptibles de développer un cancer du sein que les autres, mais il ne reconnaît pas que la mammographie est moins sensible chez ces femmes. En fait, elle passe de 90 % chez les femmes aux seins non denses à 60 % chez celles qui ont les seins les plus denses. Le groupe d'étude ne tient pas compte des essais randomisés de très haute qualité qui montrent que l'ajout du dépistage par imagerie à résonance magnétique, ou IRM, réduit les cancers d'intervalle, c'est-à-dire ceux qui sont découverts par des symptômes après une mammographie normale, de 80 % avec l'IRM et de 50 % avec une échographie mammaire supplémentaire. La médecine factuelle montre que ces cancers d'intervalle sont des substituts acceptables pour la mortalité attribuable au cancer du sein, ce dont la démonstration peut demander de 10 à 20 ans ou plus. Le groupe d'étude ne reconnaît pas l'importance d'un dépistage supplémentaire chez ces femmes et, une fois de plus, ne suit pas les normes internationales.
    Nous devons exiger que nos politiques de santé tiennent compte des toutes dernières données scientifiques et de pratiques médicales exemplaires. La communauté médicale doit à toutes les Canadiennes de préconiser des lignes directrices qui non seulement reposent sur la science, mais qui tiennent aussi compte des progrès des technologies médicales et des traitements modernes.
(1120)
    Demandons ensemble la révision immédiate des lignes directrices du groupe d'étude afin qu'elles tiennent vraiment compte de ce qui est mieux pour la santé des femmes aujourd'hui.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, docteure Seely.
    Docteure Rushton, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Mesdames et monsieur les membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invitée à vous parler aujourd'hui du dépistage du cancer du sein.
    En tant que médecin oncologue et que femme de 41 ans, soucieuse à la fois du bien-être de mes patientes et de la santé de ma génération, je suis profondément déçue par le rapport préliminaire du Groupe d'étude canadien sur les soins de santé préventifs publié le mois dernier.
    Le rapport surestime nettement les inconvénients du dépistage tout en ignorant les avantages d'une détection précoce. Car ce qui est absent du discours public actuel, ce sont les avantages d'une détection précoce du cancer du sein du point de vue du traitement. Nous entendons souvent parler des inconvénients du dépistage, mais peu des différences entre le traitement d'un cancer cliniquement évident et celui d'un cancer détecté par le dépistage.
    Le traitement du cancer du sein est complexe et coûteux. En dehors de la chirurgie et de la radiothérapie, je propose aux patientes des traitements médicaux visant à réduire le risque de récidive ou de décès dû au cancer. Le groupe d'étude mentionne le recours ou non à la chimiothérapie, mais nos traitements vont aujourd'hui bien au‑delà, avec notamment l'immunothérapie, les thérapies ciblées, les conjugués anticorps-médicaments, les bloqueurs du cycle cellulaire et jusqu'à 10 ans de traitement bloqueur d'hormones pour les patientes atteintes d'un cancer du sein hormono-sensible de stade 3.
    Le dépistage précoce d'un cancer du sein, lorsqu'il devient cliniquement détectable, réduit la nécessité d'un traitement médical lourd et diminue le risque de récidive à distance et de décès. Une tumeur plus grosse avec atteinte des ganglions lymphatiques, devenue cliniquement évidente pour une patiente, signifie une maladie à plus haut risque et, par conséquent, plus de traitements pour obtenir des résultats similaires, ce qui entraîne des coûts plus élevés pour les patientes et pour notre société.
    Pour les patientes, les coûts comprennent l'arrêt du travail, la perte des cheveux, des troubles cognitifs, une fatigue chronique, une dysfonction sexuelle, une infertilité, une ménopause précoce, des lésions nerveuses, des complications cardiaques et des problèmes de santé mentale, sans parler de la peur constante d'une récidive.
    La toxicité financière du traitement du cancer du sein est réelle et nous la supportons tous dans le système de santé public. Comme cela vient d'être mentionné, nous savons que les coûts augmentent considérablement d'un stade à l'autre, le cancer de stade 0 détecté par dépistage ne coûtant qu'environ 14 000 $, alors qu'en Ontario aujourd'hui, la prise en charge d'un cancer de stade 3, en fonction des traitements que nous utilisons et qui sont financés par l'État, coûte près de 400 000 $.
    Cette année, nous avons pris ces chiffres et nous les avons soumis à une analyse coût-efficacité en utilisant la même modélisation OncoSim que celle approuvée par le Partenariat canadien contre le cancer. Nous avons constaté que non seulement le dépistage est rentable, mais qu'il permet de réaliser des économies, car le traitement du cancer du sein au stade 4 est très coûteux.
    Le dépistage permet généralement un diagnostic précoce des cancers du sein. En Ontario, faute de programme de dépistage organisé, seulement 35,7 % des femmes âgées de 40 à 49 ans reçoivent un diagnostic de cancer de stade 1, alors que près de 87 % de celles qui participent au programme de dépistage du cancer du sein de l'Ontario de 50 à 74 ans recevront un diagnostic de cancer de stade 1 ou de stade 0.
    L'outil de communication fourni par le groupe d'étude pour éclairer les discussions entre les patientes et leurs prestataires de soins de santé primaires sur les risques et les avantages d'un dépistage à un plus jeune âge, ne dit pas qu'une détection précoce dans le cadre d'un programme de dépistage permet de détecter plus tôt un cancer.
    Les lignes directrices actualisées soulèvent de nombreuses questions. Il y a des différences importantes entre les groupes d'étude canadien et américain en ce qui concerne les avantages estimés du dépistage dans la population. Le groupe d'étude américain prévoit plus de décès évités et de vies sauvées que le groupe d'étude canadien en ramenant l'âge du dépistage à 40 ans, mais même avec l'estimation canadienne prudente, en abaissant l'âge du dépistage de 50 à 40 ans, on éviterait 2 600 décès supplémentaires en 10 années de dépistage des femmes âgées de 40 à 49 ans.
    Le groupe d'étude estime que cet avantage ne justifie pas les inconvénients de tests supplémentaires et les préjudices causés par quelques cas surdiagnostiqués. Sur ce point, je ne suis pas d'accord, tout comme les études qui nous apprennent que les femmes sont prêtes à accepter jusqu'à six cas de surdiagnostic pour sauver une vie.
    Le groupe d'étude ignore également les avantages à long terme de la détection précoce en se concentrant uniquement sur une période de 10 ans, tant dans le rapport que dans les outils de discussion, pour évaluer les avantages du dépistage. En réalité, pour le type de cancer du sein le plus courant, qui est sensible aux hormones, même si vous avez un cancer du sein de stade 2 ou 3 qui peut récidiver d'une manière ou d'une autre, il est probable que, même s'il réapparaît au cours de ces 10 années, vous serez toujours en vie dans 10 ans. Vous serez simplement au stade 4 de la maladie et vous devrez suivre des traitements chroniques.
    Comme mes patientes vous le diront, vivre avec le cancer n'est pas la même chose qu'y survivre, mais les outils fournis à nos médecins de famille ne font pas la différence entre les deux.
    Tant que nous ne saurons pas comment empêcher le développement des cancers du sein, la détection précoce est la seule façon de réduire la morbidité et la mortalité, ainsi que le coût pour notre système de santé. Le groupe d'étude minimise nettement les avantages de la détection précoce et ne fournit pas de données de modélisation transparentes sur la possibilité de détecter plus tôt des cancers avec un programme de dépistage organisé. Sans cette partie essentielle de la conversation, nous ne présentons aux femmes que la moitié du tableau.
(1125)
    J'espère que mon témoignage aujourd'hui permettra d'entamer une conversation plus générale sur les effets néfastes du traitement du cancer du sein et sur les risques d'un diagnostic tardif.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, docteure Rushton.
    Je donne maintenant la parole à la Société canadienne du cancer.
    Votre organisation dispose de cinq minutes.

[Français]

    Bonjour. Je m'appelle Ciana Van Dusen et je suis gestionnaire en prévention et détection précoce. Aujourd'hui, je suis accompagnée virtuellement de M. David Raynaud, qui est gestionnaire principal pour le Québec. Nous faisons partie de l'équipe de défense de l'intérêt public de la Société canadienne du cancer, soit la SCC.
    La SCC est la voix des Canadiens et des Canadiennes qui se soucient du cancer. Dans le cadre de notre engagement à améliorer et à sauver des vies, nous sommes heureux de fournir des recommandations sur le dépistage du cancer du sein.
    Le cancer est la principale cause de mortalité au Canada. On prévoit que deux personnes sur cinq recevront un diagnostic de cancer au cours de leur vie et qu'environ une personne sur quatre mourra de la maladie.
    Au Canada, on estime qu'une femme sur huit reçoit un diagnostic de cancer du sein au cours de sa vie. Le cancer du sein est le type de cancer le plus souvent diagnostiqué chez les femmes au Canada, et, même s'il y a moins de cas chez les femmes de moins de 50 ans, il demeure la principale cause de décès par cancer chez les femmes âgées de 30 à 49 ans. Bien que les données montrent que les taux d'incidence du cancer du sein chez les femmes dans la quarantaine ont augmenté au cours des 35 dernières années, l'incidence globale du cancer du sein et les taux de mortalité au Canada ont tendance à baisser, notamment grâce à la détection précoce, aux traitements et aux soins, qui continueront de s'améliorer.
    Pourtant, les données internationales indiquent qu'un plus grand nombre de femmes noires, asiatiques et hispaniques atteintes du cancer du sein reçoivent un diagnostic avant l'âge de 50 ans. De plus, elles reçoivent plus souvent un diagnostic alors que la maladie est à un stade avancé, comparativement aux autres femmes. Cela signifie que le fait de commencer à l'âge de 50 ans le dépistage du cancer du sein constitue une occasion manquée d'effectuer une détection précoce chez les femmes de ces communautés.
    Les données ont montré les avantages de commencer le dépistage régulier et systématique du cancer du sein à partir de l'âge de 40 ans. Un dépistage en temps opportun est essentiel pour déceler le cancer du sein tôt, lorsque les traitements ont plus de chances d'être efficaces.
    Nous continuerons d'entendre des personnes qui sont atteintes d'un cancer du sein et qui ne sont pas prises en compte par les lignes directrices actuelles, parce que ces dernières ne reflètent pas leur expérience vécue.
    De plus, dans le cadre d'un sondage national, la plupart des répondants ont dit appuyer le fait d'élargir l'accès au dépistage systématique du cancer du sein en fixant à 40 ans l'âge de début du dépistage.
    Notre organisation appuie le dépistage systématique du cancer du sein pour les femmes qui présentent un risque moyen et qui sont âgées de 40 à 49 ans. Nous devrons également nous assurer qu'il existe des directives claires pour les personnes qui présentent un risque plus élevé ou très élevé de développer un cancer du sein, comme les personnes qui ont certaines mutations génétiques, des antécédents familiaux ou les seins denses.
    Je passe la parole à M. Raynaud.
(1130)
    Merci aux membres du Comité également.
    Actuellement, un nombre croissant de provinces canadiennes ont commencé à élargir l'accès à des services de dépistage du cancer du sein, ou en ont fait l'annonce, afin que ceux-ci soient accessibles à partir de l'âge de 40 ans. Ainsi, pendant que les provinces et les territoires examinent les nouvelles lignes directrices nationales en la matière, la SCC demande aux administrations qui ne l'ont pas encore fait d'inclure dans leur programme organisé de dépistage du cancer du sein les femmes de 40 à 49 ans présentant un risque moyen de cancer du sein. Ce changement reflète également les nouvelles données probantes qui ont été publiées entre la dernière mise à jour des lignes directrices en 2018 et celles qui ont été présentées il y a quelques semaines.
    Les données sur la participation au programme de dépistage du cancer du sein au Canada vont bientôt être mises à jour par le Partenariat canadien contre le cancer. Nos données les plus récentes datent d'avant la pandémie, et à ce moment les programmes de dépistage du cancer du sein n'atteignaient pas l'objectif national de 70 % de taux de participation. Il est donc important d'augmenter la capacité à répondre aux besoins des Canadiens et des Canadiennes, tout en adaptant nos services pour tenir compte des besoins des populations mal servies.
    De plus, la SCC recommande que le gouvernement fédéral investisse davantage dans la recherche afin d'élargir les connaissances sur le dépistage et les risques associés au cancer. Il est aussi important de combler les lacunes dans les données afin d'avoir une meilleure compréhension de l'impact du cancer du sein au Canada. La Stratégie pancanadienne de données sur le cancer et la Charte pancanadienne des données sur la santé présentent d'intéressantes possibilités pour améliorer les données au pays.
    En outre, les gouvernements doivent investir dans la prévention, la détection précoce et les traitements, de même que pour réduire les effets de la pénurie de main-d'œuvre. Ces investissements comprennent de nouveaux investissements dans les ressources humaines, dans l'intégration de nouvelles technologies, dans des infrastructures numériques et dans la modernisation des trajectoires de soins pour répondre aux besoins actuels et futurs des Canadiennes et des Canadiens.
    Finalement, j'aimerais vous remercier d'avoir pris le temps d'écouter nos recommandations. Nous sommes impatients de continuer à travailler tous ensemble pour mieux soutenir les personnes touchées par le cancer, car, pour agir contre le cancer, ça prend une société.

[Traduction]

    Parfait. Je vous remercie, monsieur Raynaud.
    Je donne maintenant la parole à CancerCare Manitoba.
    Votre organisation dispose de cinq minutes.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je remercie également le Comité de me donner l'occasion de parler des lignes directrices provisoires préparées par le Groupe d'étude canadien sur les soins de santé préventifs, également appelé groupe d'étude sur le dépistage du cancer du sein.
    Il s'agit d'un sujet important, et nous tous ici présents voulons réduire l'impact du cancer du sein sur les Canadiennes. Il est important de se rappeler que nous sommes unis dans cet objectif, même si les opinions et les perspectives diffèrent.
    Je suis la docteure Donna Turner et je suis chef de l'Oncologie populationnelle à CancerCare Manitoba. Je suis accompagnée aujourd'hui par la Dre Pamela Hebbard, qui est chirurgienne oncologue et chef de l'Oncologie chirurgicale à CancerCare Manitoba.
     Le cancer du sein est un sujet complexe et nous constatons à son sujet qu'il y a souvent une certaine confusion quant à ce qui constitue ou pas un dépistage. Le dépistage est un examen proposé à toutes les femmes qui ne présentent pas de symptômes et qui ont un risque moyen de cancer du sein. Un bilan diagnostic est nécessaire pour les femmes qui découvrent une grosseur dans leur sein ou qui présentent des symptômes anormaux. Par ailleurs, un dépistage adapté ou individualisé est plus utile pour les femmes qui présentent un risque supérieur à la moyenne, en raison d'antécédents familiaux ou d'une prédisposition génétique.
    Quoi qu'il en soit, notre message à toutes les femmes est le suivant: si vous ressentez quelque chose qui vous semble anormal, consultez immédiatement votre fournisseur de soins de santé.
    Dans notre province, CancerCare Manitoba s'attache à offrir des programmes qui reposent sur des données probantes, tout en soutenant les Manitobains tout au long de la maladie. Par exemple, après avoir pris connaissance des données probantes sur le dépistage, nous encourageons le dépistage là où les données sont les plus solides, y compris pour les femmes âgées de 50 à 74 ans. Je souligne que, comme d'autres provinces canadiennes, nous n'avons pas atteint le taux cible de 70 % chez les femmes les plus susceptibles de tirer parti du dépistage, c'est-à-dire celles qui appartiennent à ces groupes d'âge.
    Ensuite, nous travaillons avec les communautés et les Manitobains que notre système de santé risque de négliger, notamment les personnes racisées, de diverses identités de genre et/ou qui vivent dans des collectivités géographiquement éloignées, afin de réduire les inégalités dans l'accès au dépistage du cancer du sein et d'améliorer les résultats en matière de santé.
    Enfin, nous agissons avec nos partenaires du secteur des soins de santé pour aider au mieux toutes les femmes à prendre des décisions éclairées au sujet de leur santé. D'après des données récentes, cela concerne, entre autres, les femmes âgées de 40 à 49 ans qui pourraient vouloir étudier leurs options en matière de mammographie en en comprenant mieux les avantages et les inconvénients.
    Je cède maintenant la parole à ma collègue, la Dre Pamela Hebbard.
(1135)
    Je vous remercie, madame la présidente, de cette occasion de m'exprimer devant le Comité aujourd'hui.
    Comme la Dre Turner l'a mentionné, je suis chef de l'Oncologie chirurgicale, et je consacre ma pratique clinique au traitement du cancer du sein et des cancers gastro-intestinaux.
    En ce qui concerne le cancer du sein en particulier, les études scientifiques sont très nombreuses et variées. Il est important que nous ne prenions pas de décisions en matière de politique de santé en nous fondant sur des préjugés personnels ou même sur un désir bien intentionné de changer les choses. Les experts doivent être impartiaux. Ils ne doivent pas avoir d'intérêt personnel en jeu. Les statistiques sur lesquelles s'appuient ces recommandations sont complexes et il faut des experts pour interpréter correctement les données.
    On croit à tort que la mammographie permet de prévenir le cancer ou de réduire considérablement le traitement nécessaire. C'est en fait l'exception plutôt que la règle. Le cancer du sein n'est pas une maladie unique. Nous adaptons les traitements du cancer du sein en fonction des profils protéiques, ce qui est le principal déterminant de leur traitement. En fonction du sous-type de cancer, certains cancers de cinq millimètres seront traités par chimiothérapie et d'autres de cinq centimètres ne le seront pas.
    À l'ère moderne du dépistage du cancer du sein, le dépistage a un impact important sur le nombre de femmes qui reçoivent un diagnostic de cancer de stade 1 par rapport à un cancer de stade 2, les programmes de dépistage ne concernant guère les cancers de stade 3 et 4. Le traitement des cancers du sein de stade 1 et 2 est, dans une large mesure, le même.
    Je pense que les inconvénients du dépistage sont réels. Nous savons que les jeunes femmes sont plus susceptibles d'avoir un dépistage anormal, ce qui entraîne de multiples examens de suivi et des biopsies. Les femmes déclarent souvent que ce processus est très stressant. Chez certaines femmes, le stress est tel qu'elles ne se soumettent plus jamais au dépistage et se privent ainsi de futurs avantages.
    Toutefois, pour ce qui est du système de santé, l'augmentation du nombre de mammographies représente un gros problème en matière de ressources financières et humaines, mais l'augmentation du nombre de tests de suivi et de biopsies en représente un plus gros encore et risque de créer de nouveaux retards très importants dans le diagnostic et le traitement des personnes réellement atteintes d'un cancer.
    Qu'est‑ce qui aurait le plus d'incidence sur le cancer du sein au Canada? Nous devons augmenter le dépistage dans les groupes d'âge actuels, inclure les femmes qui vivent dans des collectivités éloignées et celles qui sont défavorisées sur le plan social et qui appartiennent à des groupes minoritaires. Dans ma pratique, je vois des femmes qui meurent jeunes d'un cancer colorectal, et des personnes atteintes d'un cancer du col de l'utérus et de nombreuses autres maladies. Je constate personnellement que le manque d'accès à des soins primaires est à l'origine d'un plus grand nombre de décès chez les jeunes femmes et les jeunes hommes à cause de la crise des soins de santé.
    En outre, nous disposons de trop peu d'études sur la prévention du cancer du sein et il faut vraiment redoubler d'efforts à cet égard.
    En conclusion, je remercie le Comité et toutes les personnes ici présentes qui tiennent à améliorer la situation en ce qui concerne cette maladie, même si nous divergeons sur les solutions.
    Mon dernier commentaire est que je suis une mère de 47 ans, chirurgienne spécialisée dans le cancer du sein, leader dans le domaine des soins de santé et que je n'ai pas personnellement passé de mammographie parce que je crois, en fait, dans le travail du groupe d'étude canadien.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, docteure Hebbard.
    Nous passons, pour finir, à la Dre Shiela Appavoo.
    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Mesdames et monsieur les membres du Comité permanent de la condition féminine, je vous remercie de mener aussi rapidement cette étude importante. J'ai parlé hier au Comité permanent de la santé. Par conséquent, toute ressemblance entre mes observations d'aujourd'hui et celles d'hier est tout à fait fortuite.
    Je suis la Dre Shiela Appovoo. Je suis radiologue généraliste et je m'intéresse à l'imagerie mammaire. J'ai fondé le groupe d'engagement des patientes de la Société canadienne de l'imagerie mammaire, groupe que je copréside avec la Dre McKerlie. J'ai également fondé la Coalition for Responsible Healthcare Guidelines, que je préside.
    Je vous fais part aujourd'hui de mes vives inquiétudes au sujet de la récente ligne directrice provisoire publiée par le Groupe d'étude canadien sur les soins de santé préventifs sur le dépistage du cancer du sein qui déconseille le dépistage de femmes âgées de 40 à 49 ans. Cette ligne directrice tranche nettement avec celle du groupe d'étude américain, de la Société canadienne du cancer et de la majorité des provinces canadiennes, qui reconnaissent tous qu'il est nécessaire d'abaisser l'âge du dépistage à 40 ans. L'Association des infirmières et infirmiers praticiens du Canada n'approuve plus depuis peu la ligne directrice semblable publiée par le groupe d'étude en 2018.
    La décision de ne pas dépister les femmes de 40 à 49 ans repose sur un parti pris. La nouvelle du 30 mai selon laquelle le groupe d'étude refusait de nouveau de recommander le dépistage pour les femmes de 40 à 49 ans n'a pas surpris ceux d'entre nous qui ont suivi le processus d'élaboration des lignes directrices. La décision était courue d'avance. La direction du groupe d'étude a déclaré dans les médias au début du mois de mai 2023, aussitôt après la publication des lignes directrices provisoires du groupe d'étude américain, qu'il n'était pas nécessaire de modifier les lignes directrices canadiennes. Cette déclaration est antérieure à l'examen des données probantes. Eh bien, cette prophétie s'est réalisée presque un an après jour pour jour.
    Comment le groupe d'étude arrive-t‑il à des conclusions aussi différentes de celles du reste du monde moderne? Sans le contexte fourni par les conseils exhaustifs d'experts expérimentés, il amplifie les préjudices, tels que le surdiagnostic, les biopsies bénignes et les rappels pour des examens d'imagerie supplémentaires, et il minimise les avantages de la détection précoce. Dans ses calculs, il n'inclut pas les avantages importants du dépistage en ce qui concerne la morbidité, comme la réduction des taux de mastectomie, de chimiothérapie ou de lymphoedème, forme permanente, invalidante et déformante de gonflement du bras causé par une ablation des ganglions lymphatiques nécessaire pour les cancers à un stade plus avancé.
    L'accent mis par le groupe d'étude sur les inconvénients du dépistage, en particulier l'angoisse liée au rappel, est paternaliste. Le paternalisme qui consiste à prendre des décisions pour les femmes par crainte d'une éventuelle angoisse causée par un rappel est inquiétant. Cela revient à leur dire de ne pas s'en faire au sujet du cancer du sein.
    Si ces lignes directrices du groupe d'étude sont adoptées, les conséquences seront désastreuses. Beaucoup de jeunes femmes risquent de le payer de leur vie. La plupart des provinces et des territoires le comprennent et autorisent l'accès direct au dépistage pour les femmes âgées de 40 à 49 ans. Toutefois, la recommandation d'un prestataire de soins de santé primaires reste le meilleur moyen de déterminer si une femme se soumettra bien à un dépistage. Tant que le groupe d'étude dira aux médecins que les femmes dans la quarantaine n'ont pas besoin de dépistage, nombre d'entre elles n'y auront pas accès.
    En continuant à faire la même recommandation en matière de dépistage du cancer du sein que le groupe d'étude fait depuis 2011, le Canada, avec sa ligne directrice nationale, prend de plus en plus de retard sur les provinces et sur d'autres pays et se retrouve de plus en plus décalé par rapport aux recommandations des experts. Malheureusement, ces problèmes de ligne directrice ne se limitent pas au dépistage du cancer du sein et se retrouvent dans de nombreuses autres lignes directrices, y compris celles qui ont une incidence directe sur la santé des femmes.
    Je vous demande un peu de patience, car je m'écarte du sujet du cancer du sein pour nous replacer en contexte, ce qui est important. Les lignes directrices du groupe d'étude sur la grossesse et la dépression post-partum, le dépistage du cancer du poumon et du cancer du col de l'utérus sont tout aussi lamentables. Or, tous ces problèmes touchent les femmes.
    La ligne directrice sur le cancer du col de l'utérus n'a pas encore été mise à jour depuis 2013, malgré plusieurs études de référence qui auraient dû entraîner une révision. Elle ne recommande pas le dépistage du papillomavirus, bien que celui‑ci ait été recommandé au niveau national et instauré dans des pays comme le Royaume-Uni, l'Australie, la Norvège et les Pays-Bas depuis 2017. Alors que l'Australie est en passe de devenir le premier pays à éliminer le cancer du col de l'utérus grâce à la vaccination et au dépistage du papillomavirus, au Canada, des femmes sont atteintes d'un cancer du col de l'utérus invasif — inévitablement — depuis près de 10 ans à cause de la faiblesse du leadership du groupe d'étude.
    Nous ne devons pas laisser ces lignes directrices en l'état. Il nous faut une ligne directrice en matière de dépistage du cancer du sein qui s'appuie sur les dernières données et pas sur le paternalisme, une ligne directrice qui sert vraiment les intérêts des Canadiens. Avec tout le respect que je lui dois, au vu de son bilan, nous devons supprimer et reconstituer le Groupe d'étude canadien sur les soins de santé préventifs afin de protéger les Canadiens à l'avenir.
    Je vous remercie de l'attention que vous portez à cette question essentielle.
(1140)
    Je remercie tous les témoins de leurs observations préliminaires.
    Nous allons maintenant passer à nos séries de questions posées par les membres du Comité.
    Je commencerai par Mme Roberts, du Parti conservateur. Vous disposez de six minutes.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui. Il s'agit d'un sujet important, surtout pour les femmes.
    J'ai une question pour la Dre Shiela Appavoo.
    Pouvez-vous m'expliquer, si quelqu'un a été adopté et ne connaît pas ses antécédents familiaux, quel est le meilleur examen en matière de prévention du cancer du sein?
    Le dépistage est considéré comme une prévention secondaire. Plutôt que prévenir le cancer, il évite des diagnostics de cancer à un stade avancé. En général, nous estimons que les personnes qui ne connaissent pas leurs antécédents familiaux, parce qu'elles ont été adoptées ou qu'elles ne sont plus en contact avec leur famille, présentent un risque moyen. Là encore, nous recommandons de commencer les dépistages annuels à 40 ans et d'en faire jusqu'au moment où elles sont dans les 10 dernières années de l'espérance de vie,
    Voici mon autre question... et c'est arrivé à quelqu'un que je connais. S'il y a des antécédents familiaux de cancer du sein et que le cancer du sein est détecté dans un sein, en Ontario, on enlève ce sein, mais pas l'autre parce que ce serait considéré comme de la chirurgie esthétique. Cependant, dans le cas de cette personne, deux ans après l'ablation de son sein, elle a reçu un diagnostic de cancer du sein de stade 3 dans l'autre sein. Pourquoi ne lui a‑t‑on pas retiré les deux seins?
(1145)
    Je ne connais pas les pratiques en Ontario. Je ne suis pas non plus chirurgienne du sein et je n'interviens pas dans les traitements. Je pose les diagnostics. Je peux toutefois céder la parole à une de mes collègues qui est plus spécialisée dans ce domaine.
    Docteure Rushton, pouvez-vous répondre à la question?
    Oui. Je ne suis pas chirurgienne, mais je rencontre beaucoup de patientes qui ont un cancer du sein de stade précoce.
    Les lignes directrices actuelles sur la surveillance après un diagnostic de cancer préconisent une mammographie des deux seins. Un diagnostic de cancer d'un seul côté augmente le risque de cancer du sein contralatéral. Nous recommandons par conséquent une mammographie annuelle, jusqu'à la fin de leurs jours, aux survivantes du cancer du sein.
    De manière générale, après un traitement, les patientes ont leur première mammographie… Du moins ici, à Ottawa, la norme de référence est de faire une mammographie six mois après la fin de la radiothérapie.
    Comme la Dre Appavoo, j'estime qu'il est très difficile de se prononcer sur un cas particulier. Certaines lignes directrices ont évolué au fil des ans. Nous recourons beaucoup plus à l'imagerie par résonance magnétique pour le diagnostic, surtout si les patientes présentent un facteur de risque comme des seins denses, pour ne rater aucune lésion contralatérale, même les plus petites.
    Cela dit, selon la norme de soins en vigueur, on ne pratique pas automatiquement une mastectomie contralatérale prophylactique parce qu'il n'existe pas de preuve d'amélioration des chances de survie. L'accent est mis davantage sur le dépistage annuel pour toutes les survivantes du cancer du sein. C'est d'ailleurs un autre aspect problématique de nos programmes de dépistage parce que, dans la plupart des provinces, les survivantes du cancer du sein sont exclues. Elles n'ont pas le choix de retourner voir leur médecin de première ligne tous les ans pour passer une mammographie de dépistage.
    Dans le cas de la femme dont j'ai parlé, la mère et deux des trois sœurs ont eu un cancer du sein. Les médecins des sœurs ont recommandé que les petites-filles, puisque la grand-mère avait eu un cancer du sein… Leur médecin de famille a refusé l'accès au dépistage parce qu'elles avaient moins de 40 ans.
    Considérant l'historique de diagnostics multiples qui remonte à plus de 100 ans, pourquoi ne pas permettre à ces femmes d'avoir une mammographie?
    Au Canada, les médecins de famille font quatre ans d'études de médecine et deux ans de formation en résidence dans leur spécialité. Ils ont des possibilités très limitées de recevoir une formation en oncologie, et le cancer du sein ne fait pas exception. À l'Université d'Ottawa, les étudiants en médecine suivent à peine une semaine de cours en oncologie, et les stages de formation ne sont pas obligatoires dans ce domaine.
    Le vrai gros problème, c'est que les lignes directrices du groupe d'étude seront à peu près tout ce que les médecins de famille auront le temps d'étudier et d'assimiler. Si un grand organisme national ne recommande pas le dépistage systématique, les médecins de famille n'en feront pas parce qu'ils n'ont pas le temps et parce que personne n'a pris la peine de leur donner une formation à ce sujet ou de le mettre au programme durant leurs années d'études en médecine.
    La famille dont vous parlez aurait dû être dirigée… Si ce n'est déjà fait, cette famille devrait être dirigée vers les services de génétique médicale afin de subir un dépistage génétique. Les membres de cette famille devraient faire partie d'un programme de dépistage chez les femmes présentant un risque élevé.
    Êtes-vous d'accord que nous avons remis la responsabilité des soins entre les mains des patients? Je suis d'accord avec vous. Soyons réalistes. Il y a une pénurie de médecins de famille et un manque d'expérience. Cependant, ne pensez-vous pas que sauver des vies est plus important que de sauter des étapes?
    Absolument.
    À mon avis, ce débat sur le dépistage et les contrôles de santé nous donne une excellente occasion d'envisager une réforme plus en profondeur des soins de santé au Canada. Nous pouvons réfléchir aux méthodes éprouvées pour sauver des vies et voir comment cette étape pourrait se faire ailleurs que dans les bureaux des médecins de famille, parce qu'ils sont épuisés. Nous ne pouvons pas continuer de leur en mettre de plus en plus sur les épaules en leur présentant le rapport détaillé des risques et des avantages.
    Pour ce qui est des organismes gouvernementaux, j'aimerais vraiment que le gouvernement, les autorités de santé publique et les fournisseurs de soins de santé dans les provinces offrent des programmes de dépistage auxquels les patientes pourraient s'inscrire elles-mêmes, comme celui qui va entrer en vigueur en Ontario l'automne prochain. Avec ce genre de programme, la décision revient aux femmes et le suivi des résultats se fait avec le médecin de famille.
    Beaucoup trop de gens sont laissés pour compte parce que l'accès aux soins médicaux passe automatiquement par les médecins de famille au Canada. La réalité, même ici, à Ottawa, c'est qu'environ 30 % de gens n'ont pas de médecin de famille.
    Merci beaucoup.
    Je vais maintenant donner la parole à Mme Sidhu.
    Vous disposez de six minutes pour poser vos questions au nom du Parti libéral. Nous vous écoutons.
(1150)
    Merci, madame la présidente.
    Merci aux témoins d'être des nôtres.
    Ma première question s'adresse à la porte-parole de la Société canadienne du cancer, mais les autres témoins pourront aussi y répondre. Pouvez-vous nous parler des différences entre les provinces et les territoires relativement à leur approche de la sensibilisation des femmes au dépistage et au traitement du cancer du sein?
    Nous savons que les recommandations sont ce qu'elles sont, c'est‑à‑dire des lignes directrices. Il appartient aux provinces de prendre des décisions éclairées pour leur population, et c'est ce qu'elles font partout au Canada.
    Depuis quelques mois, des provinces ont décidé d'élargir l'accès par la voie de l'autoaiguillage ou du dépistage systématique. Ce n'est pas la même chose, c'est important de le souligner. Même si l'autoaiguillage, ou l'accès sans recommandation, est offert, cela suppose quand même que les femmes sachent qu'elles ont accès à un test de dépistage, qu'elles y ont droit, qu'elles peuvent le demander et l'obtenir, et aussi qu'elles aient une certaine éducation et une certaine résilience. En revanche, le dépistage systématique se fait sur invitation, une approche beaucoup plus simple et plus claire.
    Il existe des différences pour ce qui est de l'accès au dépistage du cancer du sein, mais c'est clair que les deux modèles nous font avancer dans la bonne direction. Est‑ce que votre question comportait un second volet pour ce qui est des différences? Je ne suis pas certaine.
    Merci. Est‑ce que quelqu'un d'autre aurait quelque chose à ajouter?
    Allez‑y.
    Je peux vous confirmer que les lignes directrices encadrant les pratiques sont assez disparates d'un endroit à l'autre au pays. Dans certaines provinces, depuis le début du programme, l'accès sans recommandation est offert aux femmes dans la quarantaine. C'est le cas en Colombie‑Britannique, en Nouvelle‑Écosse et à l'Île‑du‑Prince‑Édouard. Ce modèle a aussi été adopté par d'autres provinces. À ce jour, c'est offert dans l'ensemble des provinces et des territoires, exception faite du Nunavut, qui n'a pas de programme de dépistage, et du Québec, qui étudie les données probantes sur le dépistage dans la quarantaine. Le Manitoba est la seule province qui n'a pas de politique d'accès sans recommandation pour les femmes dans la quarantaine. En Alberta, il est offert à partir de 45 ans. Dans les autres provinces, le dépistage commence à 40 ans.
    Nous avons étudié ces disparités. Les résultats de cette vaste étude menée en collaboration avec Statistique Canada montrent que les femmes dans la quarantaine qui ont été diagnostiquées par dépistage dans les provinces qui offrent cette possibilité présentent un taux beaucoup plus élevé de cancer du sein à un stade précoce. Dans les provinces qui n'offrent pas le dépistage aux femmes dans la quarantaine, les cancers plus avancés — de stade 2, 3 ou 4 — sont beaucoup plus fréquents. L'approche peut aussi varier pour ce qui concerne le facteur de la densité.
    L'adoption de nouvelles lignes directrices est l'occasion d'uniformiser l'approche, et c'est une de nos grandes déceptions concernant les lignes directrices provisoires.
    Merci.
    Merci, docteure Seely.
    Dans le même ordre d'idées…
    Madame Sidhu, je crois que la Dre Turner voudrait ajouter quelque chose.
    Oui, effectivement. Merci, madame la présidente.
    Je veux simplement souligner que dans certaines provinces, dont le Manitoba, beaucoup d'efforts sont déployés pour faire connaître le programme de dépistage auprès de diverses communautés de personnes racisées et autochtones. C'est particulièrement important dans une province comme le Manitoba.
    C'est également important de mentionner que le Canada a beaucoup de retard à rattraper au chapitre de la collecte de données ventilées selon la race et l'origine ethnique, ou même l'identité de genre. On peut vraiment faire mieux dans ce domaine.
    Au Manitoba, le programme de dépistage du cancer du sein demande aux femmes d'indiquer leur race, leur origine ethnique et leur identité autochtone. Cette pratique a été adoptée de concert avec les communautés du Manitoba et en partenariat avec elles et les autorités de la santé. C'est une mesure très importante pour recueillir davantage d'information et mieux intervenir auprès des femmes appartenant à des groupes potentiellement privés d'équité.
    Merci, docteure Turner.
    Vous avez soulevé un excellent point en parlant de la collecte de données sur les populations racisées et autochtones. Est‑ce que toutes les provinces recueillent ces données? Que pouvez-vous nous dire au sujet de la collecte de données sur les femmes racisées en particulier? La Société du cancer peut répondre à la question, ou quiconque le souhaite.
    Je peux peut-être y répondre puisque j'ai participé à une vaste étude en collaboration avec Statistique Canada.
    Malheureusement, aucune donnée sur la race et l'origine ethnique n'est recueillie et mise en corrélation avec les méthodes de dépistage du cancer du sein. Nous avons dû procéder à des ajustements du registre très tortueux pour établir une corrélation avec les données du recensement et être en mesure de fournir des données sur la race et l'origine ethnique. C'est une lacune très importante. Il faut absolument recueillir ce genre de données si nous voulons comprendre les répercussions du dépistage pour les femmes de différentes races et origines ethniques.
    Nos données indiquent que les femmes non blanches, qui sont de différentes races et origines ethniques — y compris les femmes autochtones et de toutes les origines ethniques au Canada —, présentent un taux plus élevé de cancer du sein à un stade avancé.
    C'est un constat qui doit inciter les provinces et les territoires à élargir la collecte de données pour que nous puissions mieux comprendre la situation et démontrer les répercussions du dépistage et du diagnostic.
(1155)
    Madame Sidhu, je vois que plusieurs autres personnes souhaitent intervenir dans la discussion, mais votre temps est écoulé.
    Les personnes qui ont levé la main auront peut-être l'occasion d'ajouter des compléments d'information en répondant à d'autres questions.
    Je cède maintenant la parole à Mme Andréanne Larouche.

[Français]

    C'est six minutes pour le Bloc québécois.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci aux témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
    Le cancer du sein dévaste des femmes et des familles au complet. Nous connaissons tous et toutes des femmes qui en sont décédées ou qui en subissent encore les conséquences. C'est mon cas. Je remercie donc les témoins de collaborer à cette étude, en mémoire de toutes celles qui sont décédées et en solidarité avec celles qui espèrent continuer de vivre.
    Je vais m'adresser tout d'abord à Mme Van Dusen et à M. Raynaud, de la Société canadienne du cancer.
    Ce que j'entends aujourd'hui, c'est qu'il y a de plus en plus d'études démontrant l'importance de la prévention. J'aimerais entendre votre point de vue sur les lignes directrices qui serviraient de guide en ce qui concerne le dépistage chez les personnes à partir de 40 ans.
    Le Québec n'a peut-être pas encore de lignes directrices à cet égard. Par contre, l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux travaille à revoir les règles québécoises en la matière. Quelque chose est donc en train de se passer de ce côté.
    Il y a aussi des exemples à l'échelle internationale. Personne ne voudrait revenir en arrière en ce qui concerne les lignes directrices pour les personnes à partir de 40 ans.

[Traduction]

    Nous avons de plus en plus de preuves, de rapports, de données et de méthodes dans divers domaines qui montrent les bénéfices du dépistage précoce sur le plan de l'expérience vécue des personnes qui ont reçu un diagnostic de cancer, mais également pour notre système, parce que le traitement est plus efficace et moins cher au début de la maladie.
    Ce qui se fait aux États‑Unis, où les lignes directrices viennent de changer, peut nous guider. Des données ventilées en fonction de la race ont été recueillies à l'échelle internationale. Jusqu'ici, nous n'avions jamais vu ces données ou n'y avions pas accès, et nous savons que la population du Canada est très diversifiée et qu'il faut répondre à tous les besoins.
    J'ajouterai pour terminer que des femmes de 50 à 74 ans ne bénéficient pas des programmes de dépistage même si elles y ont accès. Dans notre réflexion sur l'élargissement de l'accès, il sera important de voir à ce que ces femmes ne soient pas encore plus délaissées et de prévoir des ressources pour garantir aux femmes l'accès auquel elles ont droit. Un accès élargi exigera des ressources en matière de soins de santé, mais aussi des ressources humaines, technologiques et financières pour assurer que nous offrons les services que nous sommes censés offrir.

[Français]

    Monsieur Raynaud, avez-vous quelque chose à ajouter?
    On parle de prévention et de détection précoce, qui sont deux choses différentes. Comme nous le mentionnions dans notre déclaration d'ouverture, on peut aussi agir en amont du cancer en essayant de favoriser de saines habitudes de vie, par exemple. Cela dit, la détection précoce est assurément un élément clé non seulement pour augmenter les taux de survie, mais aussi pour diminuer l'impact des traitements et les effets secondaires. On l'a vu dans certaines histoires qui ont été racontées. Avoir une meilleure détection précoce permet de limiter le poids des traitements sur les patients ainsi que les effets secondaires. C'est aussi une façon de réduire les coûts pour le système de santé, parce qu'il pourrait y avoir des traitements plus légers.
    C'était ce que j'avais à ajouter en complément à la réponse de ma collègue.
(1200)
    Vous l'avez bien dit. D'ailleurs, le témoignage poignant de Mme Farber, que nous avons entendu en premier, allait dans ce sens.
    Monsieur Raynaud et madame Van Dusen, j'aimerais poursuivre mes questions pour vous.
    On parle de lignes directrices sur le dépistage à partir de l'âge de 40 ans. Le fédéral a beau établir ces lignes directrices, au bout du compte, ça ne servira à rien s'il ne fournit pas sa part d'investissements par la suite. Je parle ici de transferts. Il n'a pas investi suffisamment dans le système de santé au cours des dernières années et nous en voyons maintenant les conséquences concrètes. Il a laissé les systèmes s'appauvrir au Québec et dans les provinces. Il a fait des coupes dans les transferts en santé au fil des ans. Il n'a pas répondu aux attentes du Québec et des provinces à cet égard.
    Comme vous l'avez dit, une norme, c'est une chose, mais il faut ensuite que le Québec et les provinces, qui sont les maîtres d'œuvre de leur système, aient les moyens. Je parle ici de moyens financiers, de ressources technologiques et de ressources humaines.
    Il est important de réinvestir dans le système de santé pour éviter qu'il soit victime d'une ère d'austérité et pour avoir les moyens financiers d'effectuer les suivis et les traitements adéquats.

[Traduction]

    Avez-vous levé la main?
    Je peux essayer de répondre. Des recherches récentes qui, je crois, ont été réalisées par la Dre Seely et ses collègues, montrent que le dépistage annuel pour les femmes de 40 à 74 ans et que le coût des traitements modernes, qui est très élevé… Le Canada pourrait économiser 460 millions de dollars environ en coûts de traitement. Investir dans le dépistage est très payant pour le gouvernement. Il doit franchir ce pas et investir en amont. Je suis convaincue qu'il en récoltera les bénéfices dans les années à venir.

[Français]

    Il ne me reste que quelques secondes, alors je vous remercie.

[Traduction]

    Merci. Malheureusement, vous n'avez plus de temps. En fait, il vous reste trois secondes.

[Français]

    En résumé, non seulement on aurait besoin de plus d'argent, mais la prévention permettrait aussi d'en économiser et d'investir davantage dans les traitements pour les victimes.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à Mme Gazan, du Nouveau Parti démocratique.
    Vous avez également six minutes. La parole est à vous.
    Merci beaucoup. Je veux remercier les témoins. Vos témoignages sont tout simplement remarquables. Si je puis me le permettre, je vous demanderais des réponses brèves parce que j'ai tout un programme.
    Dans tout ce qui a été dit, j'ai été particulièrement outrée d'entendre que les décideurs ne doivent pas avoir d'intérêt personnel en jeu. Je ne suis pas du tout d'accord.
    Ma première question s'adresse à Mme Farber. En vous fondant sur votre expérience, pouvez-vous formuler une recommandation clé à notre comité concernant l'amélioration du système de santé? Si vous aviez une seule recommandation clé à donner, quelle serait-elle?
    En matière de dépistage, qui est au cœur de la discussion que nous avons aujourd'hui concernant les lignes directrices, je suis fermement convaincue que les femmes canadiennes doivent pouvoir demander elles-mêmes de bénéficier d'un programme de dépistage dès 40 ans. Je pense aussi que ce doit être possible pour les femmes de plus de 74 ans. Beaucoup de femmes qui ont plus de 75 ans sont en bonne santé et aimeraient avoir accès à un dépistage précoce du cancer du sein.
    Aussi, les femmes qui ont des seins denses devraient le savoir. Je pense que c'est un important facteur de risque. Je ne savais pas que j'avais des seins denses avant de recevoir les résultats de la pathologie. Comment aurais‑je pu savoir que cette densité me mettait à risque puisque je n'avais jamais eu de mammographie avant de recevoir un diagnostic de cancer?
    Selon moi, c'est ce qui va aider les femmes à prendre leur santé en main et à avoir ce genre de discussion avec leur médecin de famille, si elles ont la chance d'en avoir un parce que, comme nous le savons, beaucoup de Canadiens n'ont pas de médecin de famille actuellement.
    Merci beaucoup.
    Ma prochaine question est pour la Dre McKerlie.
    Étonnamment, mais pas tant… Connaissez-vous la composition actuelle du groupe d'étude? Je vous demanderais de répondre par oui ou par non, s'il vous plaît.
    Oui.
    Combien de membres du groupe d'étude sont noirs, autochtones ou de couleur?
(1205)
    Je ne connais pas l'origine ethnique de chaque membre, mais je dirais que ce nombre est très faible.
    D'accord. Et combien sont des femmes?
    Je vais devoir le vérifier.
    Je pose la question parce que je pense que l'inclusion part d'une intention, et qu'il arrive qu'on néglige certaines considérations essentielles pour éviter que des personnes soient exclues des discussions. C'est quelque chose qui me préoccupe.
    Docteure Appavoo, vous avez parlé du paternalisme et de la tendance à dire de ne pas s'en faire. Pouvez-vous nous en parler davantage? Quelle serait votre recommandation clé pour nous aider à nous défaire de ce paternalisme qui semble coûter la vie à des femmes et à des personnes de diverses identités de genre?
    Merci de poser cette question.
    Je crois que le paternalisme se manifeste de différentes façons. Une des plus évidentes est l'idée que les rappels causent un préjudice et qu'il faut mettre en balance ce préjudice et le risque d'un diagnostic évitable de cancer de stade avancé, pour lequel les traitements sont plus agressifs et qui peut mener au décès.
    Un rappel, c'est une invitation à subir de nouveaux tests après une mammographie. Pour moi, c'est comme passer un contrôle de sécurité à l'aéroport. Notre bagage de cabine est passé aux rayons X et, parfois, quelque chose de louche est découvert. Dans ces cas, on nous appelle et on vérifie le contenu du bagage. La plupart du temps, il ne contient rien de dangereux et on nous laisse repartir.
    C'est très comparable au processus de mammographie. Un rappel ne cause pas de préjudice. C'est désagréable, et je ne veux pas minimiser l'anxiété qu'il peut générer et le choc causé par la nouvelle d'avoir à subir d'autres tests, mais c'est temporaire. Les gens sont inquiets parce qu'ils ne veulent pas mourir du cancer, et c'est justement pour leur éviter ce résultat qu'il y a des rappels. Nous essayons le plus possible d'éviter les décès par cancer. Les gens s'inquiètent quand nous les rappelons, mais cela fait partie du processus. Il faut travailler très fort pour ne pas mourir du cancer.
    Quelle serait votre recommandation clé?
    Ma recommandation clé serait de reconnaître l'anxiété, mais de ne pas en faire une variable dans une équation qui met en balance cette anxiété et les bénéfices potentiels de ne pas subir de traitement à un stade avancé de la maladie ou d'en mourir. Il faut reconnaître l'anxiété, avertir les gens à ce sujet, mais il ne faut pas la mettre dans une équation.
    D'accord. Merci.
    Voulez-vous ajouter autre chose?
    Oui. Je réfléchissais à la question en me demandant quelles étaient les spécialités des membres du groupe d'étude et ce que cela signifie concernant l'intérêt personnel et les partis pris des spécialistes du cancer du sein dont vous avez parlé. Je réfléchis à la question depuis toujours et je demande vraiment de quel parti pris on parle au juste.
    Nous, les radiologistes, avons la réputation d'être des personnes très occupées et de toujours dire non. C'est probablement vrai pour la plupart des établissements. Concernant cette implication personnelle, nous voulons le mieux pour nos patients, et jamais nous ne poserions un geste dans l'unique… Je pense pouvoir parler au nom de la plupart des radiologistes. Je ne suis pas certaine de savoir de quel parti pris on parle. S'agit‑il d'un parti pris d'ordre financier? C'est une chose de s'asseoir et de rédiger des lignes directrices en pensant à une personne sur un nombre x, mais c'en est une autre de traiter des personnes en chair et en os plutôt que des chiffres sur une feuille. C'est différent.
    Merci beaucoup. Je suis très préoccupée par l'insuffisance des données sur certains groupes de la population et l'incidence qu'elle peut avoir pour ces groupes parce que nous ne faisons pas les recherches nécessaires.
    Je vais me tourner vers la Dre Seely. C'est assez troublant de savoir que le Nunavut est le seul territoire qui ne fait pas de dépistage du cancer du sein. Nous savons que sur le plan de l'accès aux services essentiels au Nunavut… Il y a une pénurie de logements. Trop souvent, nous préférons fermer les yeux sur la situation des gens du Nunavut.
    Madame Gazan, votre temps est largement écoulé.
    Désolée. Je ne regarde jamais vers la présidence.
    Elle évite de me regarder.
    J'ai été un peu généreuse, mais nous devons avancer. Nous pourrons peut-être revenir à la question que Mme Gazan a commencé à poser plus loin dans le débat.
    Je vais lancer le deuxième tour de questions avec Mme Vien, du Parti conservateur.

[Français]

    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Que d'intelligence aujourd'hui! Nous entendons souvent des propos d'une grande intelligence de la part des témoins devant ce comité, mais aujourd'hui vous êtes tous vraiment très inspirants. Je vous remercie de votre présence et de vos témoignages.
    Je vais tenter de parler lentement pour que les interprètes puissent bien vous transmettre ma pensée.
    D'entrée de jeu, je dois vous dire que j'ai une expérience personnelle que je ne raconterai pas ici, mais dont mes collègues sont au courant. J'ai aussi, parmi mes proches, des femmes qui, dès la trentaine, ont dû subir l'ablation des deux seins. Je confirme que vous dites vrai lorsque vous soutenez que de plus en plus de jeunes femmes sont aux prises avec le problème du cancer du sein. Mme Roberts soulevait tantôt le cas de figure où on diagnostique un cancer dans un sein, mais que l'autre est sain. Parfois, la personne pourrait décider malgré tout de faire enlever le deuxième sein aussi. On voit à quel point ces situations sont extrêmement difficiles.
    J'ai été surprise par quelque chose que j'ai entendu ce matin et que j'avais vu dans mes lectures, et c'est le fait qu'on parle de préjudices causés par le dépistage précoce. Je suis tombée des nues. Personnellement, j'ai commencé à subir des mammographies quand j'étais jeune femme, il y a quand même quelques années de cela. Comment se fait-il qu'on parle de préjudices dans le dépistage? Expliquez-moi ça. Je ne comprends pas comment on peut arriver à cette conclusion.
    Docteure Appavoo, quels sont les désavantages ou les préjudices liés au dépistage précoce? Je ne peux pas croire que les désavantages ou les préjudices se limitent au simple fait de recevoir des appels téléphoniques pour nous dire d'aller passer ou repasser des tests. En ce qui me concerne, j'étais bien contente qu'on me rappelle et qu'on insiste.
    Quels sont donc ces préjudices que le groupe d'étude prend en considération?
(1210)

[Traduction]

    Merci de poser cette question.
    Rien n'est parfait, et il y a effectivement quelques inconvénients associés au dépistage.
    Un de ces inconvénients est le fait que de 7 à 10 % des femmes sont rappelées pour un réexamen après une mammographie. Après un second test, environ 95 % des femmes peuvent pousser un soupir de soulagement et rentrer chez elles en sachant qu'elles ont reçu un peu plus de soins et d'attention. C'est réglé, jusqu'au prochain test de dépistage. Pour la plupart, tout va bien.
    Je ne veux vraiment pas minimiser l'inquiétude que cela peut provoquer. La santé mentale compte aussi, je ne le nie pas. Toutefois, comparativement aux effets d'un diagnostic tardif, c'est assez négligeable. C'est mon avis personnel.
    Je dirais qu'il y a un préjudice plus grave associé à ce qu'on appelle le surdiagnostic, et c'est le risque qu'un cancer soit découvert. L'ours a été réveillé. La chasse au cancer a été lancée et on en a trouvé un, mais ce cancer aurait pu se tapir dans l'ombre jusqu'à ce que d'autres causes entraînent un décès et sans que la personne ait à subir de traitement. Or, le traitement lui-même est désagréable, c'est le moins qu'on puisse dire.
    La bonne nouvelle, c'est que la probabilité est très faible pour les jeunes femmes. Elle se situe autour de 1 %, ou moins de 1 %. La raison en est que la chance de survivre à un cancer dépend essentiellement de son agressivité et du risque qu'il s'étende. Il faut aussi considérer le temps qu'il reste à vivre à une personne.
    À une extrémité du spectre, une mammographie pratiquée chez une femme de 85 ans qui a des troubles cardiaques est une forme de surdiagnostic. C'est différent si une femme de 40 ans ne va pas…

[Français]

    Je vais devoir vous interrompre, car il me reste peu de temps de parole et je voudrais ajouter un petit mot. Je vous offre toutes mes excuses.
    Vous avez dit tout à l'heure qu'on devrait démanteler le groupe de travail et en nommer un autre. Quelles sont les principales caractéristiques ou les principales raisons qui vous mènent à ce constat? Selon vous, qui devrait siéger à ce comité?

[Traduction]

    Pour ce qui concerne le nouveau groupe de travail, je dirais tout d'abord que ce n'est pas de mon ressort. Je crois que ce serait un projet en soi. Toutefois, nous avons des recommandations.
    Il faudra voir à ce que le nouveau groupe rende des comptes. Nous devons créer un nouveau groupe de travail qui rendra des comptes, qui aura des obligations de transparence et qui sera constitué de spécialistes. L'idée des partis pris et de l'inutilité d'avoir des spécialistes dans un tel groupe découle d'un raisonnement fallacieux. C'est une attaque personnelle et un appel à la motivation, ce qui — je suis certaine que la plupart des personnes présentes ici ont débattu de cette question — n'est vraiment pas un argument valable. Tout le monde a des partis pris. Nous avons tous un parti pris ou un autre, et il faut faire avec.
    On ne peut pas évincer les spécialistes sous prétexte d'éliminer les partis pris.

[Français]

    Merci, madame Vien.
    Ai-je déjà écoulé tout mon temps de parole?
    Oui, vos cinq minutes sont écoulées. Je suis désolée.

[Traduction]

    La prochaine intervenante sera Mme Lambropoulos, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui. Vous êtes tous formidables.
    Docteure McKerlie, docteure Rushton et docteure Appavoo, je voudrais vous exprimer un merci tout spécial parce que c'est moi qui ai suggéré de vous convoquer. C'est Jennie Dale, de l'organisme Seins denses Canada, qui m'a donné vos noms.
    En reconnaissance de son travail et de celui de toutes les femmes qui oeuvrent à améliorer les perspectives pour les femmes qui ont des seins denses, j'aimerais vous demander si le groupe d'étude aurait dû tenir compte de certaines données probantes recueillies au cours des 10 dernières années dans son rapport.
    On peut lire dans le rapport que pour les femmes présentant un risque modérément accru en raison d'une densité mammaire élevée, il n'existe pas suffisamment de données probantes justifiant des tests de dépistage supplémentaires. Ce n'est pas ce que nous avons entendu aujourd'hui. Je serais ravie si quelqu'un pouvait nous en dire davantage et nous donner un peu plus de détails à ce sujet. C'est ma première question.
    Allez‑y.
(1215)
    Avant toute chose, je précise que les lignes directrices en tiennent compte. Beaucoup de recherches menées aux États‑Unis ont montré que la densité mammaire augmente de quatre à six fois le risque de cancer du sein.
    Si on ajoute l'IRM aux tests de dépistage supplémentaires, je crois qu'on détecte au moins 80 % plus de cancers que la mammographie. Et si on ajoute l'échographie, 50 % plus de cancers sont dépistés. Ces chiffres montrent de manière assez claire que le dépistage supplémentaire pourrait aider à augmenter le nombre de diagnostics de cancer et que les lignes directrices devraient en tenir compte.
    Je m'arrête ici.
    Allez‑y, docteure Rushton.
    En discutant avec des collègues, nous en sommes venus à la conclusion que beaucoup de ces études ne se concentrent pas sur le bon objectif. Trop souvent, elles sont centrées sur le très ardu objectif de la survie plutôt que sur celui de la migration des stades que nous obtenons grâce au dépistage précoce.
    Je ne suis pas d'accord avec ce qu'a déclaré la chirurgienne en chef du Manitoba concernant la similarité entre les traitements aux stades 1 et 2 du cancer du sein. C'était peut-être vrai avant, mais ce ne l'est plus. D'année en année, nous faisons des progrès en matière de thérapie systémique contre le cancer du sein. Même dans le cas du redouté cancer du sein triple négatif, les tumeurs sous-centimétriques sans envahissement ganglionnaire sont traitées par la chimiothérapie, et les tumeurs de plus de deux centimètres ou qui touchent un ganglion sont traitées par immunothérapie et une chimiothérapie plus agressive. Si elle peut être utilisée au stade précoce de la maladie, la thérapie systémique contribue vraiment à la désescalade thérapeutique mais, au stade 3, l'escalade générale peut être vraiment importante.
    Il faut tenir compte du stade et, à mon avis, il faut aussi tenir compte des objectifs. Le problème avec l'examen des données probantes et le manque d'expertise, c'est que personne ne peut mettre les choses en contexte et expliquer comment le cancer du sein est traité actuellement.
    Madame Lambropoulos, la docteure Hebbard aimerait ajouter quelque chose.
    Je suis désolée, mais j'ai une autre question.
    En regardant la composition du groupe d'étude, j'ai vu que plusieurs femmes y siègent. Je crois qu'il y a presque une parité hommes-femmes. Par contre, seulement deux membres sont asiatiques, un homme et une femme. Tous les autres sont blancs.
    Pensez-vous que cela a pu influencer la teneur des recommandations?
    Je peux répondre à la question.
    Si je me souviens bien, il n'y avait pas de femmes de couleur au sein du groupe de travail qui s'est penché sur le cancer du sein. Je ne pense pas que cela a eu une incidence sur les discussions. Le groupe n'a pas formulé de recommandations racistes malgré l'absence de personnes de couleur. En revanche, c'est un signe assez évident du peu de cas qui est fait de l'équité raciale.
    Cette insensibilité transparaît aussi dans l'utilisation de la grille « Classement des recommandations, analyse, élaboration et évaluation », ou GRADE, qui fait primer les anciens essais cliniques randomisés sur les études observationnelles. Dans 98 % des cas, ces essais ont été réalisés entre les années 1960 et les années 1980 et les sujets étaient des femmes blanches. Ces données probantes trônent au sommet du classement, et toutes les autres, qui ont peut-être été recueillies auprès d'une plus grande diversité de sujets, ont été jugées moins importantes. C'est une forme de racisme systémique.
    L'absence de femmes de couleur au sein du groupe d'étude est possiblement symptomatique de la même maladie.
    Merci beaucoup.
    Je n'ai pas beaucoup de temps, mais puis‑je vous demander de transmettre au Comité toutes les statistiques que vous avez sur la densité mammaire, ainsi que toute information factuelle que nous pourrons inclure dans notre rapport?
    Quelle est la date limite pour nous transmettre ces renseignements?
(1220)
    L'échéance est demain. Si vous pouvez nous envoyer les statistiques sur la densité mammaire dont vous avez parlé, docteure McKerlie, et tout autre renseignement que vous avez en main d'ici à la fin de la journée, cela nous serait très utile pour transmettre de l'information pertinente au groupe d'étude.
    C'est le but de cette étude. Elle va nous permettre de soumettre de l'information que le groupe pourra étudier. Je vous prie donc de nous transmettre ce que vous avez.
    Merci, madame Lambropoulos.
    Madame Larouche, c'est à vous, pour deux minutes et demie.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Avant de poser ma question, j'aimerais vérifier une chose. Vous semblez tous avoir beaucoup étudié la question. Pouvez-vous m'indiquer, à main levée, si certains d'entre vous ont été consultés par le groupe de travail?
    Madame Sonea, avez-vous été consultée?

[Traduction]

    Madame Larouche, je crois que Dre Seely, qui est en ligne, a aussi demandé à intervenir. Je voulais vous en informer.

[Français]

    C'est parfait, merci.
    J'aimerais savoir, dans le cas des personnes qui ont été consultées par le groupe de travail, ce qu'elles ont eu l'occasion de lui dire. Je leur demanderais de m'en faire un résumé, puisque j'ai peu de temps.
    Nous pourrions commencer par Mme Sonea et entendre par la suite Mme Seely, qui se joint à nous par vidéoconférence.

[Traduction]

    Merci beaucoup de poser cette question.
    Nous avons été consultés au cours du processus. Nous trouvions primordial que le processus parte du vécu des patientes, de nous assurer que l'expérience des patientes soit au premier plan dans le processus de réflexion en vue de l'élaboration des lignes directrices. Nous tenions aussi à ce que l'approche soit globale.
    Je faisais partie de l'équipe de conseillers experts qui a participé à l'examen des données probantes. Le groupe d'étude a rejeté nos avis à de multiples reprises. Pour agir à titre de conseiller expert, il fallait signer une entente de non-divulgation des avis donnés. C'est la raison pour laquelle je m'en suis abstenue.
    Je peux vous confirmer qu'à de nombreuses reprises, c'était clair pour nous que le groupe chargé de l'examen des données probantes ne comprenait pas ce qu'est le dépistage ou les études dont nous parlions. Inutile de dire que ces interventions n'étaient pas appréciées et que ces données n'ont pas été dûment prises en considération.

[Français]

    Excusez-moi, je suis un peu sous le choc. Vous avez été consultée et vous avez fait des recommandations, mais on n'en a pas tenu compte et on vous a fait signer une entente de non-divulgation.
    Pouvez-vous m'expliquer, en deux ou trois secondes, à quoi c'est dû?
    Pourtant, c'est un enjeu public. Ce n'est pas croyable.

[Traduction]

    Merci, madame Larouche.
    Madame Gazan, vous avez deux minutes et demie.
    Merci beaucoup.
    Comme ma collègue Andréanne Larouche, je suis complètement sous le choc d'apprendre cela. C'est comme le syndrome de la femme hystérique. Nous savons à quel point le système de santé a toujours été gangrené par le sexisme, et c'est pourquoi je pose la question.
    Je ne pense pas du tout que les spécialistes ne doivent pas être représentés, mais quand d'autres personnes prennent des décisions concernant mon corps, en tant que femme, j'aimerais que d'autres femmes participent au processus, et surtout des femmes qui partagent mes antécédents et mon origine ethnique.
    Cela étant dit, j'aurais une question très simple à laquelle vous pourrez répondre par oui ou non, docteure Seely, et j'aurai une autre question pour vous ensuite. Pensez-vous qu'il est de la plus haute importance que le Nunavut adopte sans délai un programme de dépistage du cancer du sein? Oui ou non?
    Oui.
    D'accord. Ce serait votre recommandation.
    Oui. En fait, j'interprète les mammographies et j'ai travaillé à l'instauration de ce programme au Nunavut. Nous continuons d'y travailler.
    D'accord. Merci.
    Vous avez également parlé des données, et plus précisément de leur insuffisance pour ce qui concerne les personnes noires, autochtones ou de couleur. Recommanderiez-vous au fédéral d'investir massivement pour intensifier la recherche sur le cancer du sein et ses répercussions pour les personnes noires, autochtones et de couleur?
(1225)
    Absolument. Il faut de toute urgence recueillir ces données et les ajouter à celles qui sont utilisées pour la surveillance du cancer du sein et d'autres cancers au Canada pour savoir qui a un cancer du sein et le stade de ce cancer.
    Il me reste seulement 25 secondes.
    Docteure Appavoo, vous avez fait allusion à une liste de recommandations pour le groupe d'étude. Vous serait‑il possible de soumettre cette liste au Comité?
    Oui, je vais la transmettre.
    Pensez-vous que les décisions prises par l'actuel groupe d'étude sont entachées de sexisme?
    Bien franchement, je pense que ce sont de mauvaises lignes directrices sur l'égalité de l'accès. Pour quiconque connaît la maladie, les lignes directrices sur le cancer de la prostate sont tout aussi déplorables. Je ne pense pas que c'est une question de sexe. Je dirais plutôt que c'est une question d'incompétence.
    Merci, madame Gazan.
    Madame Ferreri, c'est à vous. Vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci infiniment aux témoins de contribuer à cette étude d'une très grande importance.
    Je remercie également mes collègues qui nous ont fait part d'un pan de leur vie personnelle. Il ne manque certainement pas de personnes dont la vie a été bousculée par le cancer du sein.
    Un de nos objectifs est de recueillir de l'information sur le dépistage à un plus jeune âge, et plus précisément à 40 ans. Je vais commencer avec Mme Farber, qui nous a raconté son expérience personnelle après son diagnostic.
    Vous avez demandé une mammographie à 40 ans, mais on vous en a dissuadée. Pour quelle raison?
    À ce sujet, je tiens à ce qu'il soit bien clair que je n'ai pas fait des pieds et des mains pour obtenir une mammographie et que mon médecin ne me l'a pas refusée. Je le vois tous les ans. Nous abordons différents sujets, comme le test Pap. Soit dit en passant, je n'ai jamais été interrogée sur mes préférences et mes valeurs, ou sur ma volonté de passer le test Pap. Je trouve que c'est intéressant.
    Nous avons seulement discuté des choses à faire. Je devais avoir des analyses de sang, un vaccin contre le tétanos. Quand je lui ai demandé si une mammographie était nécessaire parce que j'avais 40 ans, mon médecin m'a répondu que non parce que les lignes directrices canadiennes n'en recommandent pas avant 50 ans. J'en ai demandé une plus tard, autour de 45 ans, et la réponse a été la même. La discussion était très informelle, comme à peu près toutes les conversations entre les patients et le médecin dans un cabinet très achalandé.
    L'autre chose qui m'a été dite, c'est que comme je n'avais aucuns antécédents familiaux, le risque était très faible. J'ai appris depuis que ce n'est pas vrai. Nous savons que la majorité des cancers du sein dépistés touchent des femmes qui n'ont pas d'antécédents familiaux.
    Je trouve intéressant de voir que vous justifiez, en quelque sorte, le fait que vous n'avez pas vraiment insisté. C'est une attitude courante avec nos médecins, mais c'est quand même étrange. C'est notre corps. Nous vivons avec ce corps tous les jours, mais nous devons nous battre pour nous faire entendre. C'est quelque chose que je constate pour beaucoup de gens.
    Docteure McKerlie, vous avez indiqué que les lignes directrices proposées se fondent sur une étude des années 1980 qui comporte des failles. Quelles sont ces failles?
    Merci de cette question.
    Il y a eu plusieurs volets, dont un essai contrôlé aléatoire, qui est censé satisfaire à la norme de référence. La répartition aléatoire n'a pas été faite dans les règles de l'art, comme il été démontré dans différentes publications. La répartition non aléatoire a entraîné d'autres lacunes.
    Même si l'étude avait été égale et parfaite, le fait est que l'échantillon était composé à 98 % de femmes blanches — ce que le Dr Narod a admis à sa dernière comparution à la Chambre des communes —, ce qui ne reflète pas du tout la population canadienne actuellement, comme nous le savons.
    Merci.
    Je crois que ce qui est vraiment navrant, c'est que l'accès à la mammographie dans plusieurs provinces exige une recommandation du médecin de famille. En Ontario, 1 personne sur 4 n'a pas de médecin de famille. En tout, 6,5 millions de Canadiens n'ont pas de médecin de famille. Sur le site Web de l'Ontario, on donne un numéro à appeler pour les personnes qui n'ont pas de médecin, comme s'il allait en apparaître un par magie. C'est à se tordre de rire.
    C'est un problème majeur. Je sais que l'accès sans recommandation est offert dans certaines provinces qui ont maintenant changé les règles, mais si la liste d'attente est trop longue et qu'il y a un arriéré, à quoi bon?
    Je lance une question à la volée et ceux qui veulent y répondre pourront le faire, mais je crois qu'elle s'adresse plus particulièrement à la Dre Rushton. Si l'âge est abaissé à 40 ans, ou même si on le laisse à 50 ans… C'est difficile d'avoir un rendez-vous à 50 ans parce qu'il manque de médecins et de places. Si je fais le calcul, même si on abaisse l'âge à 40 ans, l'accès est loin d'être garanti.
    Quelqu'un peut répondre?
(1230)
    Madame Ferreri, si vous me le permettez…
    Je pourrais peut-être répondre.
    … je vois trois personnes sur l'écran derrière vous qui veulent intervenir. Je ne pense pas que vous voyez l'écran là où vous êtes.
    Non, en effet.
    Je peux volontiers faire quelques remarques à ce sujet. C'est une excellente question, qui touche certains enjeux au Manitoba.
    En Ontario, nous planifions l'élargissement du programme de dépistage afin d'y inclure les femmes dans la quarantaine, et nous allons octroyer les ressources nécessaires. Les données de la Colombie‑Britannique et de la Nouvelle‑Écosse nous ont appris que le premier dépistage entraîne le nombre le plus élevé de rappels en raison de résultats anormaux. Les taux baissent ensuite, peu importe que les femmes soient dans la quarantaine, la cinquantaine ou la soixantaine. Ils ne sont pas plus élevés pour les femmes dans la quarantaine.
    Il faut octroyer des ressources, et c'est ce que l'Ontario va faire en formant plus de technologistes, en augmentant le nombre de mammographes et en élargissant l'accès aux tests de diagnostic. Ce sera bénéfique.
    Merci de ces remarques.
    Je sais que nous voulons recueillir le plus d'informations possible, mais les cinq minutes sont terminées, malheureusement. Si vous souhaitez nous transmettre des compléments d'information en réponse à la question, ce sera fort utile pour les analystes.
    Je donne maintenant la parole à Mme Vandenbeld.
    Vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup. Je dois dire que ce groupe de témoins est probablement un de ceux qui ont le plus d'impact dans ce comité, et je suis très heureuse que nous ayons pu vous offrir une tribune qui vous permettra de faire entendre vos voix dans un processus d'où vous étiez manifestement absentes.
     Madame Farber, je voulais simplement vous dire qu'à mon avis, une bonne partie des personnes ici présentes, ou qui visionnent cette rencontre à distance, partagent entièrement votre avis. Ce que vous décrivez correspond probablement au vécu de la majorité des femmes. Merci énormément pour ce témoignage. Je compatis de tout cœur à ce que vous avez dû traverser.
     Je commencerai par interroger la Dre Seely, parce que vous avez dit que le groupe d'étude se reportait à des technologies obsolètes et à de vieux rapports qui remontent parfois à plusieurs décennies, et qu'il écartait les données de récents essais d'observation couvrant, si je me rappelle bien, 2,6 millions de femmes. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur la méthodologie et les rapports, sur les données et les informations effectivement prises en compte par le groupe d'étude, et sur la façon dont cela a pu contribuer à fausser les conclusions du groupe d'étude.
    Une des recommandations que moi-même et deux autres conseillers experts avons formulées à l'équipe chargée d'examiner les données probantes, c'était qu'elle ferait vraiment une erreur en se basant sur les anciens essais randomisés pour examiner les nouvelles données probantes. C'est parce que la méthodologie appelée GRADE, à laquelle la Dre Appavoo faisait référence, caractérise automatiquement ces essais comme étant des données probantes de qualité optimale. Peu importe si vous ajoutez 90 autres études à ces essais randomisés, le système les déclasse automatiquement.
     Ce que nous avons montré dans notre examen des données probantes, c'est que l'étude des essais d'observation révèle un bénéfice de 50 % dans la réduction de la mortalité. C'est un énorme bénéfice. Cependant, si on considère uniquement les essais contrôlés randomisés, la réduction est de seulement 20 %. Cette méthodologie, sur laquelle le groupe d'étude a insisté, a dévalorisé tous ces essais de très grande envergure couvrant des traitements plus modernes. C'est un des aspects dont ils n'ont pas tenu compte, selon nous.
    Vous avez aussi brièvement indiqué qu'on vous demandait de signer un accord de non-divulgation, et que vous avez refusé de le faire. Pouvez-vous expliciter? Cela ne semble pas très transparent.
    Le groupe d'étude avait lancé un appel à experts comme consultants et conseillers, mais l'une des conditions était de signer un formulaire qui vous interdisait totalement de divulguer en quoi consistait et sur quoi portait le processus. De plus, ces experts n'avaient pas droit de vote au groupe d'étude. J'ai décidé que je n'étais pas disposée à prendre ce risque, mais j'ai pu travailler avec l'équipe chargée d'examiner les données probantes et voir vraiment ce sur quoi le groupe d'étude insistait dans cet examen des données probantes.
     J'ai pu constater leur ingérence, vraiment, et leurs consignes, qui ont réellement empêché l'équipe d'accomplir le travail qui lui avait été confié, c'est‑à‑dire examiner les récentes données probantes, les données provenant des États-Unis. L'équipe n'a pu examiner que les études remontant à 2016 ou plus anciennes. Ce protocole n'a pas été adopté par le groupe d'étude, et je pense que c'est une des raisons pour lesquelles nous avons ces recommandations.
(1235)
    En fait, les experts n'étaient pas encouragés à y participer. C'est assez alarmant.
     Je voudrais m'adresser rapidement à Mme Van Dusen, car…
    Madame Vandenbeld, je vous signale que la Dre Turner avait également levé la main. J'ignore si vous le saviez.
    Oui, je veux essayer d'interroger le maximum de témoins.
    Naturellement.
    Je voulais interroger rapidement Mme Van Dusen au sujet des données internationales. Vous avez dit que certaines données internationales n'ont pas été considérées. Pouvez-vous expliquer?
    Nous avons toute une liste de données, provenant du Canada comme de l'étranger, sur lesquelles nous avons basé nos recommandations. Il me fera plaisir de vous la communiquer.
    Vous pourriez le faire par écrit?
    D'accord.
    Je crois que la Dre Turner voulait intervenir.
    Oui. Très brièvement, je voulais souligner que j'encourage vraiment les gens à aller consulter le site Web du groupe d'étude. Il a recueilli de l'information sur les commentaires des gens, y compris sur ce qu'il leur a répondu. Comme vous le savez, ce sont là des lignes directrices provisoires, actuellement ouvertes à la discussion.
     Quand vous regardez, vous constaterez que le groupe d'étude a fait preuve d'une grande transparence quant aux études qu'il a incluses et exclues, et qu'il a élargi son regard. Je pense en fait que c'est une des raisons pour lesquelles on discute davantage aujourd'hui de l'opportunité du dépistage pour le groupe des 40 à 49 ans; c'était pour permettre aux gens d'avoir ce débat. Je voulais simplement encourager cela.
    Il me reste très peu de temps, et je voulais interroger la Dre Appavoo parce que vous…
    Madame Vandenbeld, je suis désolée de vous dire que j'ai essayé de vous obtenir 30 secondes de plus, mais en vain.
    Grâce à l'efficacité de tout le monde ici présent, nous avons le temps de faire un quatrième tour complet, alors nous allons commencer.
     Madame Roberts, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Je vais poser une question simple à tout le monde: à l'instar du groupe d'étude, considérez-vous comme un risque le fait d'avoir des antécédents familiaux de mutation des gènes BRCA1 et BRCA2 ou d'avoir des seins denses? Si possible, répondez par oui ou par non.
    Oui.
    Je pense que tout le monde ici est d'accord avec cela. Tout le monde.
    La Dre Turner a levé la main.
    Elle n'est pas d'accord?
    Je ne sais pas.
    Non, je suis d'accord. Je tiens simplement à préciser que le risque est accru. Ce ne sont pas des risques moyens, ce que la ligne directrice…
    D'accord, c'est un risque accru.
     Si c'est le cas, devrait‑il y avoir d'après vous des tests génétiques obligatoires, oui ou non? J'aimerais que tout le monde réponde par oui ou par non.
    Non.
    Non, je pense qu'il faut procéder à une évaluation des risques. C'est très important, mais pas nécessairement avec un test génétique.
    Je viens de faire quelques recherches auprès de la Société canadienne du cancer. Le cancer du sein est la deuxième cause de décès par cancer chez les femmes. Il représente 25 % des nouveaux cas de cancer chez les femmes. En 2024, on estime que 5 500 Canadiennes en mourront; autrement dit, chaque jour 15 femmes mourront du cancer du sein.
     Je pense que toutes les femmes — nous toutes — sont de cet avis: pour abaisser le taux de mortalité, nous devrions inciter le groupe d'étude à fixer à 40 ans l'âge du dépistage. Est‑ce que tout le monde est d'accord?
     Des voix: Oui.
    Si je peux intervenir rapidement, le test génétique ne permet malheureusement de repérer que 50 % des femmes à risque élevé, et la majorité des femmes ne présentent aucun facteur de risque leur indiquant qu'elles sont à risque élevé. Elles ne seraient pas porteuses de la mutation génétique, mais auraient quand même un cancer du sein.
     Ce que nous recommandons, c'est l'évaluation du risque à partir de 25 à 30 ans comme moyen d'indiquer aux femmes à quel moment elles devraient commencer le dépistage. C'est d'après moi une chose essentielle que nous devrions recommander, et cette ligne directrice n'en a pas tenu compte.
     Merci.
    Diriez-vous qu'il faut mettre à jour le groupe d'étude en lui fournissant des données plus pertinentes? Pour être honnête avec vous, en tant que femme, ces chiffres me terrifient. Je préférerais savoir rapidement comment prévenir le cancer, ou comment le détecter aux stades précoces, pour vivre assez longtemps pour voir grandir mes petits-enfants.
     Tout le monde peut répondre.
(1240)
    Si je peux commencer, je pense que nous devons nous pencher… Tout le monde ici veut stopper la mortalité due au cancer du sein, alors comment procéder? Le dépistage joue un rôle très important, tout comme l'évolution des traitements. Je pense que certaines populations devraient avoir un meilleur accès aux tests génétiques et aux services de prévention.
     La prévention comme telle du cancer du sein a été, et de loin, insuffisamment étudiée et mal étudiée, mais les recommandations du groupe d'étude ne constituent en elles-mêmes qu'un outil très limité. Les points de vue divergent énormément sur l'opportunité de ramener l'âge du dépistage de 50 à 40 ans, et je ne m'y attarderai pas par souci de concision, mais je pense qu'il est toujours important de savoir qu'en réalité, plus de 90 % des femmes atteintes d'un cancer du sein au Canada seront guéries. C'est…
    D'accord. Désolée de vous interrompre, mais le temps est limité.
     Faut‑il payer pour les tests génétiques?
    Oui, il y a des frais.
    Pouvez-vous me dire quels sont ces frais?
     Oui; si vous voulez passer un test génétique privé... Si c'est le gouvernement qui paie, alors chaque gouvernement a un montant différent; non pas les frais imposés aux patientes, mais le montant que cela coûte au gouvernement. Dans ma pratique, je conseille aux patientes qui ne sont pas admissibles aux tests financés par la province [difficultés techniques] de les payer elles-mêmes. Dans les deux groupes vers lesquels j'aiguille généralement mes patientes, c'était 299 dollars américains aux dernières nouvelles, et c'est à peu près le prix courant d'un test génétique pour quelqu'un qui paie de sa poche en s'adressant à un laboratoire de qualité médicale.
    Si j'étais dans une situation où il y a des antécédents familiaux, je tenterais de trouver l'argent quelque part pour aider la patiente à passer ce test génétique, si on pouvait éviter…
    Si vous me permettez d'intervenir, parce que je pense qu'il s'agit d'un point intéressant sur l'opportunité de passer un test génétique. Le problème, c'est que les tests génétiques donnent toujours les meilleurs résultats si un membre de votre famille ayant eu le cancer est le premier à passer le test génétique. En fait, dans l'ensemble du Canada, et ce serait là une tout autre discussion pour nous, il y a des divergences dans la facilité ou la difficulté d'accès à ce test, et les lignes directrices provinciales ne s'accordent pas.
     Quand une personne qui n'a pas eu de cancer opte pour un test génétique, la situation est nuancée, car si le test révèle la présence d'un gène, c'est utile. Toutefois, si le résultat est négatif, le test ne nous dit pas si votre famille est porteuse d'un gène dont vous n'avez pas hérité et il ne nous dit pas que vous présentez alors un risque relativement faible ou un risque populationnel, ou s'il y a autre chose dans votre famille — tout l'amalgame de petits gènes qu'on ne peut pas mesurer, les choix de mode de vie, notre environnement — qui influence votre risque, et vous présentez quand même un risque élevé de cancer du sein.
     Il est difficile de tester les personnes qui n'ont pas eu de cancer, et c'est là où nos collègues de la génétique médicale ont un rôle très important à jouer, alors c'est probablement... Je vais m'arrêter là, parce que c'est un dossier un peu différent.
    Merci, docteure Hebbard.
     Merci, madame Roberts.
     Monsieur Serré, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Merci à tout le monde. Je souscris à ce qui a été dit plus tôt. Depuis maintenant sept ans que je siège au comité de la condition féminine, c'est probablement le groupe de témoins le plus éclairant que nous avons rencontré — sans vouloir minimiser la qualité des témoins ayant comparu par le passé — et je tiens à vous remercier de votre travail et de votre détermination.
     Je suis également choqué de ce que nous entendons aujourd'hui.
     Docteure Appavoo, nous avons parlé des lignes directrices américaines et de certaines récentes données probantes qui ont été écartées par le groupe d'étude canadien. J'aimerais aborder cet aspect, mais d'abord, vous avez brièvement parlé de ce que devrait être la composition du groupe d'étude.
     Pouvez-vous nous éclairer sur votre recommandation concernant la composition du groupe d'étude? Il semble y avoir là quelques problèmes.
    Actuellement, le groupe d'étude est délibérément composé de personnes qui ne sont pas des experts en contenu. Ce sont des experts dans leur propre domaine, mais ils ne sont pas experts dans le sujet qu'ils traitent. S'ils ont été choisis, encore une fois, c'est par souci d'avoir des membres qui ne sont pas parties prenantes, qui n'ont pas de biais ou de conflit d'intérêts, mais d'après moi c'est jeter le bébé avec l'eau du bain parce qu'alors, en plus d'éliminer le biais ou à tout le moins le biais de spécialiste... En fait, on n'élimine pas le biais parce qu'ils sont biaisés. Tout le monde a un biais.
     À mon avis — et je pense que c'est probablement ce que la plupart des Canadiens croient déjà —, il faudrait laisser la formulation des lignes directrices aux mains d'experts dans les domaines concernés, des experts qui seraient étroitement épaulés par des méthodologistes collaborant avec eux à l'élaboration de bonnes lignes directrices pour la population canadienne, au lieu d'appliquer ce principe consistant à écarter les experts.
     J'évoque toujours comme analogie l'idée de laisser des écoliers noter leurs propres devoirs en laissant le professeur à la porte. Les écoliers se donnent de bonnes notes, et tout semble bien aller, mais ils ne savent pas ce qu'ils ignorent. Malheureusement, ils ont besoin d'être mieux encadrés par des personnes qui comprennent le contexte et les nuances. On ne peut pas utiliser un outil émoussé comme GRADE, qui ne vous permet d'inclure par exemple que des données non diversifiées — c'est un outil très émoussé —, et s'attendre à bien comprendre les nuances.
(1245)
    Merci.
     Docteure Appavoo, vous avez mentionné les études sur le cancer du col de l'utérus et d'autres sujets.
     Je m'adresse aux Dres Rushton et McKerlie: nous avons vu d'autres rapports indiquant que dans le cas de la santé des femmes, les études figurent généralement en bas de liste, qu'il s'agisse d'études du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, d'études universitaires ou d'études gouvernementales. Le groupe manitobain ici présent semble d'accord avec les recommandations du groupe d'étude, mais en général les données semblent soit absentes, soit ignorées.
     Que recommandez-vous au gouvernement fédéral, au comité, pour vraiment...? Je sais qu'il faut consacrer plus d'argent aux études sur la santé des femmes, mais quelles recommandations...? Quel semble être le problème ici entre le groupe d'étude et le manque d'études, ou même dans l'inobservation des lignes directrices américaines?
    Monsieur Serré, il y a également deux personnes en ligne, si vous souhaitez vous adresser à elles.
    Je serai brève.
     Il y a une grande lacune que j'aimerais souligner à haute voix, et je peux vous envoyer plus d'informations à ce sujet, ce sont les facteurs de désutilité qu'on applique pour évaluer le gain de qualité de vie résultant d'une détection précoce. J'examinais récemment cet enjeu du point de vue de la désutilité... Quand on traite une personne atteinte d'un cancer, en économie de la santé on applique un certain pourcentage à la qualité de vie connue pendant la période de traitement.
     Dans le cas du cancer du sein, et probablement de nombreux autres cancers — je ne les traite pas, je me suis donc contentée d'étudier le cancer du sein —, les désutilités pendant la période de traitement sont très finies et limitées et ne portent que sur une très courte période, qui ne reflète pas vraiment l'expérience de la patiente. Je pense que si l'on doit mener des travaux, on devra s'intéresser aux désutilités de la qualité de vie réelle et aux effets à long terme de nos traitements sur la qualité de vie, qui s'étendent dans certains cas jusqu'à une décennie après le diagnostic.
    Madame Farber, je vous demanderais de répondre rapidement, en 30 secondes.
    Je voudrais juste aborder brièvement cette idée voulant que le groupe d'étude est supposément objectif parce que ses membres ne sont pas parties prenantes. Avec tout le respect que je lui dois, pendant tout ce temps le groupe d'étude a donné des conférences sur les médias sociaux, a été interviewé par la presse et a publié des articles sur les mythes des avantages et des inconvénients du dépistage. Au moins, les spécialistes sont des spécialistes du domaine. Comme patiente, c'est eux que j'aimerais voir prendre les décisions concernant les lignes directrices, et non des personnes qui font avancer leur carrière et leur parcours universitaire en s'appuyant sur une supposée démythification du dépistage.
    Merci beaucoup.
     Nous entendrons maintenant Mme Larouche.
     Vous avez cinq minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Comme il s'agit probablement de mon dernier tour de parole, j'aimerais remercier l'ensemble des témoins de leur présence. C'était à la fois instructif et perturbant, disons-le ainsi, de voir un peu ce qui se passe en ce moment.
    J'aimerais m'adresser à Mme Van Dusen et à M. Raynaud, de la Société canadienne du cancer.
    J'ai retrouvé un article, datant du début du mois de mai, paru à la suite de la sortie publique faite par la Société canadienne du cancer pour demander d'abaisser à 40 ans l'âge à partir duquel on commence à faire le dépistage du cancer du sein. C'est quand même majeur. La Société canadienne du cancer a senti le besoin de faire une sortie médiatique parce que, visiblement, elle n'avait pas été consultée par le groupe de travail. C'est ce que je demandais tantôt aux témoins de m'indiquer en levant leur main. Vous faites donc partie de ceux qui n'ont pas été consultés, puisque vous avez dû faire une sortie médiatique pour faire valoir votre demande. L'article rapporte la réponse qui a été donnée à votre demande: « Le Groupe d'étude canadien respecte la Société canadienne du cancer et son important travail [...] Nous sommes impatients de discuter des projets de recommandations sur le dépistage du cancer du sein issus de notre examen complet des données probantes plus tard ce printemps. »
    J'imagine que vous n'avez pas encore eu de nouvelles et que vous attendez toujours de discuter avec le Groupe d'étude canadien sur les soins de santé préventifs.
    À quoi vous attendez-vous, depuis que cet article a rapporté que le groupe de travail avait répondu vouloir discuter avec vous?
(1250)

[Traduction]

    C'est une question importante, à laquelle il est un peu difficile de répondre. Nous voulons continuer à collaborer avec le groupe d'étude pendant qu'il est en mesure de formuler les lignes directrices auxquelles il travaille actuellement. À nos yeux, des améliorations ont effectivement été apportées depuis la dernière version, et nous sommes au moins heureuses de voir qu'on reconnaît aux femmes qui désirent un dépistage le droit d'y avoir accès.
     Nous pensons simplement que cela ne va pas assez loin, car encore une fois c'est toujours aux femmes qu'incombe le fardeau de savoir qu'elles ont accès au dépistage et de le demander, dans un contexte où... Nous avons reconnu qu'une bonne partie de la population canadienne n'a pas accès à des professionnels de la santé. Nous avons également appris aujourd'hui que, si le dépistage n'est pas la norme, alors on se dit qu'il n'est peut-être pas nécessaire, ce qui mine l'idée que nous avons besoin de soins. Nous continuerons à travailler avec le groupe d'étude dans toute la mesure du possible. Nous avons relayé les appels lancés par d'autres organisations réclamant une plus grande transparence, mais de toute évidence on s'inquiète de la manière dont tout cela s'est manifesté.
     Madame Sonea, vous avez peut-être quelque chose à ajouter.
    Très brièvement, j'ajouterai que nous espérons également que la consultation publique actuellement menée dans la foulée de ces lignes directrices sera rendue publique.

[Français]

    J'aimerais ajouter une chose très rapidement.
    Notre organisme est la voix des personnes touchées par le cancer, alors il est important pour nous que l'expérience de ces personnes soit prise en compte et qu'elle soit reflétée dans ces études. C'est aussi à la base de notre travail.

[Traduction]

    Il vous reste deux minutes, madame Larouche.

[Français]

    Ah, d'accord. Je pensais que mon temps de parole était de deux minutes et demie, madame la présidente. C'est parfait, merci.
    Tantôt, à la suite de ma question, certaines personnes ont levé la main pour m'indiquer avoir été consultées par le groupe de travail. Madame Van Dusen et monsieur Raynaud, excusez-moi, je n'avais pas vu votre hochement de tête tout à l'heure. Vous avez donc été consultés. Je vous remercie de la clarification. J'avais vu la main levée de Mme Sonea, de même que celle de Mme Seely, qui est parmi nous par vidéoconférence, et nous avons écouté leurs réponses.
    Vous avez donc parlé de vos attentes.
    Monsieur Raynaud et madame Van Dusen, dans l'article, il est aussi mentionné que ce sont des lignes directrices. On donne aux femmes de 40 à 50 ans la possibilité ou le droit de demander un dépistage. Précédemment, en réponse à une question, on a dit qu'il n'était pas question d'ingérence ou d'interdiction. Finalement, on ne vient pas imposer quelque chose, mais on veut simplement l'offrir. On cherche ainsi à éviter le combat que des femmes pourraient devoir mener pour avoir droit à ce test. Il est important de le clarifier. C'était dans l'article, d'ailleurs.
    Avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je vous vois hocher la tête, madame Van Dusen.
     Est-ce qu'il y avait une question dans votre intervention?
    J'aimerais entendre votre opinion sur le fait que, en ayant des lignes directrices pour les femmes de 40 à 50 ans, on ne vient pas imposer quelque chose, mais bien offrir le choix aux femmes.

[Traduction]

    Les recommandations sont là, mais si elles empêchent d'autres provinces de prendre cette décision, je pense que c'est problématique. Je trouve également problématique que des médecins basent individuellement leur mode de pratique sur cette recommandation. Si vous avez la chance d'avoir un médecin et qu'il vous dit que vous n'avez pas besoin de subir un dépistage parce que c'est ce que disent les recommandations, alors vous n'avez pas de chance ou vous êtes obligée de chercher ailleurs quelqu'un qui vous soutiendra dans votre sentiment que vous devriez peut-être subir un dépistage plus précoce.
    Merci beaucoup.
     Madame Gazan, vous avez les cinq dernières minutes.
    Merci.
     Merci à tous les témoins présents aujourd'hui.
     Je trouve choquant que des personnes chargées de prendre des décisions de vie ou de mort ne soient pas des experts en la matière.
     Il y a toute cette notion de biais. J'ai passé près d'une vingtaine d'années dans le monde de la recherche. Il n'y a pas de recherche sans biais, et il faut identifier ce biais. L'argument utilisé est non pertinent. C'est horrible.
     J'ai également trouvé horrible, docteur McKerlie, que le groupe se fonde sur des recherches qui remontent aux années 1980 et qui portent à 98 % sur des femmes caucasiennes. Si on veut parler de biais, alors voilà un biais flagrant.
     Recommanderiez-vous au gouvernement fédéral d'investir fortement dans la recherche génétique afin d'identifier les facteurs génétiques cachés chez les Noirs, les Autochtones et les personnes de couleur?
    Je serais entièrement d'accord. À l'heure actuelle, de nombreuses recherches américaines montrent que la génétique est responsable d'une grande partie du problème dans la population racialisée, en particulier chez les personnes de race noire. On incite les femmes racialisées et les femmes noires à participer à ces essais cliniques. Je souscris totalement à la nécessité d'investir dans ce domaine, en particulier au Canada.
(1255)
    Merci beaucoup.
     Ma question s'adresse à vous, docteure Appavoo.
     Vous avez dit que les membres actuels du groupe d'étude ne sont pas des experts. Pouvez-vous expliciter? J'aimerais comprendre à quel niveau ils ne sont pas des experts. Qui fait partie de ce groupe d'étude? Je ne me désignerais jamais comme membre de ce groupe d'étude, par exemple.
    Encore une fois, je tiens à reconnaître leur mérite. Ce sont des experts dans leur domaine, mais leurs domaines ne sont pas ceux visés par les lignes directrices. Par exemple, la formulation de la ligne directrice de 2018 sur le dépistage du cancer du sein était présidée par un néphrologue, un spécialiste des reins. Cette fois‑ci, la formulation a été présidée par un médecin de famille.
     Ce sont des experts dans leur domaine et en méthodologie de formulation des lignes directrices, mais je pense que la méthodologie doit jouer un rôle d'accompagnement. Nous avons besoin de méthodologistes qui nous aident à élaborer les lignes directrices, mais qui ne les élaborent pas intégralement sans l'apport d'experts et sans comprendre, par exemple, les nuances du comportement des maladies, les nuances du traitement, etc.
    Je pose cette question parce que nous sommes tous des experts dans un domaine. Je suis une experte en éducation des adultes. Je ne remets certainement pas en question leurs qualifications au niveau individuel.
     Ce que je remets en question, en revanche, ce sont leurs qualifications comme experts chargés de prendre des décisions sur des sujets qui ne relèvent pas de leur champ d'expertise. Diriez-vous que leur champ d'expertise déborde l'expertise reliée au cancer, en particulier au cancer du sein? Je vous demande de répondre par oui ou par non.
    Oui, il y a ce qu'on appelle l'intrusion épistémique, le phénomène qui opère par exemple lorsqu'un docteur en géologie, disons — et cela s'est produit pendant la pandémie —, se prononce sur les vaccins. Il ne s'agit pas de ça ici. Ce sont des experts en médecine, mais ils n'ont pas d'expertise dans les domaines sur lesquels ils prennent des décisions d'incidence nationale. Essentiellement, ils pratiquent une médecine spécialisée qui déborde leur domaine.
    Il vous reste une minute, madame Gazan.
    D'accord, merci.
     Oui, c'est très inquiétant.
     Ma dernière question s'adresse au Dre Seely.
     Vous avez fait des recherches sur la génétique. Pourquoi n'ont-elles pas été acceptées? Je ne comprends toujours pas. Elles couvraient plus de deux millions de femmes. Quel argument a‑t‑on évoqué pour les écarter? Je trouve cela choquant.
    Là aussi, c'est une question de méthodologie. Le recours à des essais randomisés prime toujours sur une étude aussi vaste qu'une recherche portant sur 2,7 millions de femmes.
     C'est choquant, j'en conviens totalement. Ces études récentes ont examiné des diagnostics et des traitements plus modernes faisant appel à des technologies plus récentes. Je pense que cette situation est imputable à un manque d'expertise et à un manque de connaissance sur ce qu'est le dépistage et son rôle dans les programmes canadiens. Les programmes canadiens sont extrêmement bien gérés. Nous surveillons les taux de rappels anormaux et les taux de biopsies positives.
     Tout cela a été fait et démontré dans cette superbe étude, mais à défaut d'experts qui en comprenaient l'impact, elle a été dévalorisée en faveur d'essais randomisés datant de 60 ans.
    Merci.
     Je tiens à remercier tous nos témoins. Ceci conclut notre réunion sur le projet de recommandations sur le cancer du sein. Au nom du Comité, je tiens à vous remercier pour votre témoignage et pour votre contribution à nos travaux.
     Je rappelle à tous les membres que mardi prochain, le 18 juin, nous étudierons le projet de lettre qui sera préparé sur ce sujet à la lumière des témoignages d'aujourd'hui. C'est mardi prochain. À notre prochaine réunion, jeudi, nous reviendrons sur notre rapport « robe rouge ».
     Merci encore à tout le monde.
     Tout le monde est‑il d'accord pour lever la séance?
     Des députés: D'accord.
    La présidente: La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU