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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 4 juin 1996

.1531

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

Le Comité des finances poursuit son étude de la notion de bien canadien imposable aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu et de la convention fiscale entre le Canada et les États-Unis. Nous sommes très heureux que le vérificateur général, qui est accompagné par MM. Minto et Elkin, ait accepté de revenir témoigner avec si peu de préavis pour continuer à nous fournir des explications sur cette question très complexe.

La première à poser des questions cet après-midi sera Mme Whelan.

Mme Whelan (Essex - Windsor): Merci, monsieur le président.

Je voudrais tout d'abord cet après-midi me reporter à un communiqué de presse deM. Williams. Je voudrais savoir si le vérificateur général a vu ce communiqué publié le 8 mai par suite du rapport. On y parle d'ententes secrètes avec de hauts fonctionnaires du gouvernement et d'arrangements conclus pour des motifs politiques.

M. L. Denis Desautels (vérificateur général du Canada): Je ne me rappelle pas avoir vu ce communiqué.

Le président: Vous pourriez peut-être faire faire des photocopies de ce communiqué pour le distribuer à tout le monde et passer à d'autres questions pour l'instant.

Mme Whelan: Certainement.

Le deuxième sujet sur lequel je voulais poser des questions a trait au processus de décision dont nous avons discuté ce matin. Je voudrais poser une question hypothétique. Si la même transaction avait eu lieu et qu'on ait rendu ou non une décision fiscale anticipée, comment Revenu Canada évaluerait-il les impôts à payer?

M. Shahid Minto (vérificateur général adjoint, Bureau du vérificateur général du Canada): Il est très difficile de répondre à de telles questions hypothétiques, mais si toutes les circonstances étaient les mêmes, j'ai l'impression que Revenu Canada ne ferait pas grand-chose de différent de ce qu'il fait maintenant.

Mme Whelan: Il n'y aurait donc pas de controverse à l'heure actuelle.

M. Minto: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.

M. Barry Elkin (directeur principal, Opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Si le problème s'était posé par suite d'une vérification, ce que Revenu Canada aurait sans doute fait... on aurait probablement examiné la transaction de transfert pour déterminer si les actions étaient effectivement considérées comme un bien canadien imposable. Revenu Canada aurait examiné la transaction. Quant à savoir quelles auraient été les conclusions du ministère au moment de la vérification, ou bien ces conclusions auraient été les mêmes...

Il est très difficile de dire quelles auraient été les conclusions au moment de la vérification.

Mme Whelan: Mais le ministère aurait procédé de la même façon, n'est-ce pas?

M. Elkin: Pour la vérification?

Mme Whelan: Il aurait demandé un avis juridique au besoin...

M. Elkin: Il pouvait demander un avis juridique...

Mme Whelan: ...du même ministère?

M. Elkin: Oui, mais je pense que Revenu Canada réserve aussi des fonds dans son budget pour demander des avis juridiques de l'extérieur si le ministère de la Justice ne peut pas l'aider. De toute façon, il aurait certainement demandé l'avis d'avocats.

Mme Whelan: Mais en temps normal, s'il y avait une vérification, le ministère procéderait exactement de la même façon que lorsqu'il rend une décision anticipée.

M. Elkin: Je ne suis pas en mesure de le confirmer. Il me semble que Revenu Canada ferait sans doute exactement la même chose. Comme vous l'avez dit, tout cela est très hypothétique, et il est difficile de savoir ce que Revenu Canada aurait fait dans un tel cas en examinant cette transaction, et je...

Mme Whelan: Je voulais parler de situations de ce genre en général. Si j'avais une fiducie familiale qui transférait des fonds à l'extérieur du Canada, j'aurais l'impression que Revenu Canada devrait procéder de la même façon.

M. Minto: Cela dépend de la façon dont Revenu Canada serait mis au courant de la transaction.

Mme Whelan: Revenu Canada établirait le montant de la cotisation à un moment donné.

M. Minto: Une possibilité serait que Revenu Canada constate la situation pendant une vérification; une autre possibilité serait que le dossier passe entre les mains des vérificateurs de l'évitement fiscal; et une dernière possibilité serait que le groupe des enquêtes spéciales s'en occupe. Cela dépendrait donc de ce que les vérificateurs trouveraient, comment ils envisageraient la situation et à qui ils enverraient le dossier. S'ils l'envoyaient aux enquêtes spéciales, ce serait une chose, et s'ils l'envoyaient aux vérificateurs de l'évitement fiscal, ce serait autre chose.

M. Elkin: Cela dépendrait aussi du moment où le vérificateur est intervenu. Si la transaction en question a eu lieu en 1991, il faut trois ou quatre ans avant que l'on entame le processus de vérification. Par exemple, si le contribuable avait effectivement fait un renvoi vers le haut, comme l'a dit M. Beith, les vérificateurs feraient probablement une révision quelconque pour se débarrasser du renvoi vers le haut et traiter la transaction comme un évitement fiscal.

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Les vérificateurs se penchent d'habitude sur des transactions qui ont été effectuées trois ou quatre ans plus tôt. Si l'on suppose que le contribuable a un exercice financier se terminant en décembre, il présenterait sa déclaration dans les six mois suivants, et il se serait écoulé pas mal de temps avant que les vérificateurs s'en occupent.

Les choses se stabilisent pendant une telle période. Les vérificateurs se préoccupent toujours de transactions subséquentes, ce qui était manifestement le cas pour cette décision particulière.

Mme Whelan: D'après ce que vous me dites, cependant, on utiliserait essentiellement la même procédure pour établir le montant de la cotisation.

M. Elkin: Non, pas du tout.

Mme Whelan: Qu'est-ce qui serait différent, d'après vous?

M. Elkin: Je pense qu'on se serait rendu compte de la transaction. D'après les témoignages que vous avez entendus, en cas de renvoi vers le haut, par exemple, Revenu Canada peut se servir de la renonciation. S'il y avait effectivement eu un renvoi vers le haut plus tard, j'imagine que Revenu Canada aurait établi une nouvelle cotisation, du moins d'après le témoignage de ses fonctionnaires.

Mme Whelan: Je ne vous suis pas. Vous pourriez peut-être expliquer ce que vous entendez par un renvoi vers le haut.

M. Elkin: Voici la situation. Si le bien n'est pas considéré comme un bien canadien imposable pour le non-résident, le bien sera transféré de nouveau au Canada à une juste valeur marchande. Ce bien avait d'abord été transféré à l'extérieur du Canada au coût reconnu aux fins de l'impôt, ce qui est sensiblement inférieur à sa juste valeur marchande. C'est pour cela qu'aucun impôt n'a été versé. Ensuite, le bien pourrait être retransféré au Canada à sa juste valeur marchande. Et si cette transaction avait effectivement eu lieu... il s'agit maintenant d'une situation purement hypothétique...

Mme Whelan: Mais je parlais de la même transaction. Vous avez changé la description de la transaction.

M. Elkin: Non, je vous dis que vous avez quelques années de recul quand vous vérifiez une transaction. C'est la nature des vérifications.

Mme Whelan: Vous supposez qu'il y aurait eu une vérification et que leur dossier aurait été renvoyé aux vérificateurs. Sinon, la cotisation aurait été établie de la même façon.

M. Elkin: Non, si le dossier avait été renvoyé... Je ne vois pas ce que vous voulez dire. Si le contribuable avait établi lui-même le montant de sa cotisation...

Mme Whelan: Justement.

M. Elkin: ...peu importe la façon dont il aurait présenté sa déclaration, Revenu Canada l'aurait acceptée.

Mme Whelan: Vous ne faites que supposer que la déclaration aurait été vérifiée et analysée différemment.

M. Elkin: Si c'est l'impression que j'ai donnée, je m'en excuse. Je pensais que vous aviez dit: «S'ils avaient vérifié» la transaction. J'avais supposé qu'il s'agissait d'évaluer une vérification... je me suis peut-être...

Mme Whelan: Nous pourrions peut-être revenir à mon autre question. Je voudrais savoir quand le Bureau du vérificateur général a constaté la situation.

M. Minto: En 1993, nous préparions un chapitre sur les décisions fiscales et sur la façon de procéder de Revenu Canada. Pendant notre vérification, nous avions examiné un certain nombre de décisions anticipées pour comprendre le processus et essayer de voir ce qui arrive dans de tels cas.

L'échantillon de décisions que nous avions choisi comprenait ces transactions. Nous avons donc examiné ces transactions et constaté certaines choses inusitées à propos de cette transaction-ci, notamment la renonciation et l'engagement et l'importance du montant en cause. C'est à ce moment-là que nous avons dit qu'il fallait examiner cela de plus près. C'est à ce moment-là que nous avons constaté la situation.

Mme Whelan: Donc, de 1993 à 1996, le Bureau du vérificateur général était au courant de la situation, mais il l'a enfin signalée au public en 1996?

M. Minto: On l'a rapportée au ministère au début de 1995.

Mme Whelan: Il a fallu deux ans pour le faire?

M. Minto: En novembre 1993, nous avons présenté notre chapitre sur les décisions anticipées. Ensuite, nous avons commencé à travailler là-dessus. Nos pourparlers avec le ministère ont débuté à la fin de 1994, je crois. Au début de 1995, nous avons signalé la situation au ministère. En juillet, il avait une ébauche de notre rapport sur ces événements. Depuis lors, nous en discutons, et nous vous en parlons maintenant.

Mme Whelan: Ainsi donc, personne n'a remédié à la situation pendant plus d'un an...

M. Minto: Excusez-moi...

Mme Whelan: ...pourtant, dans vos observations, vous dites qu'il y a de graves préoccupations relativement à l'application de la Loi de l'impôt sur le revenu. Vous signalez de «graves préoccupations», et l'on attend plus d'un an avant de les examiner?

M. Minto: Vous dites que nous n'avons rien fait pendant un an, mais ce n'est pas ce qui s'est passé. Pendant un an, nous avons eu des pourparlers très sérieux et approfondis avec tous les niveaux de gestion. La procédure normale, et je suis sûr que vous voudrez qu'on en parle, consiste à obtenir le feu vert, à reconnaître le fait et à obtenir tous les conseils possibles. C'est ce que nous avons fait dans ce cas-ci.

Mme Whelan: Quand avez-vous entendu parler pour la première fois de la transaction de 1985?

M. Minto: Exactement au même moment.

Mme Whelan: Vous en avez entendu parler en 1993?

M. Minto: Quand nous avons découvert cette décision, nous avons trouvé des renvois aux autres transactions, et c'est à ce moment-là que nous avons monté le dossier.

M. Elkin: J'aimerais dire qu'à mon avis il est important...

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M. Fewchuk (Selkirk - Red River): Comment avez-vous pu rendre une décision en 1993 sans information? Répondez à cette question.

M. Minto: Excusez-moi, mais je ne comprends pas votre question.

Mme Whelan: Allez-y, monsieur Elkin.

M. Elkin: J'aimerais apporter des éclaircissements. Nous avions l'intention de le rapporter plus tôt, mais malheureusement, j'ai subi une opération à coeur ouvert le 29 août. Sans entrer dans les détails, c'était un cas d'urgence. Par conséquent, le processus a été retardé. Cela était la première occasion pour nous de le rapporter.

M. Minto: C'est en novembre dernier que nous étions d'abord censés le rapporter, et ce sont là les informations que connaissait le ministère.

Mme Whelan: Sauf votre respect - au fait, je suis désolée que vous ayez été malade, monsieur Elkin - le Bureau du vérificateur général continue de fonctionner, je présume, quand quelqu'un tombe malade.

M. Minto: Quoi qu'il en soit, le délai n'est pas anormal, car les personnes qui auraient pu régler le problème en auraient été informées. Ils s'en occupaient.

Mme Whelan: Je veux simplement comprendre. Vous avez donc signalé immédiatement le problème à Revenu Canada? C'est tout ce que je veux savoir.

M. Minto: Absolument.

Mme Whelan: Le ministère savait donc en 1993, immédiatement après son premier rapport...

M. Minto: Non. Je présume que nous avons commencé à lui en parler en détail vers la fin de 1994.

Mme Whelan: Très bien. Maintenant, vous avez devant vous un exemplaire du communiqué de presse de M. Williams.

Vous pourriez peut-être me dire, monsieur Desautels, si vous remarquez que dans le communiqué il est question des pourparlers qui ont eu lieu en coulisses avec de hauts fonctionnaires du gouvernement, ainsi que des ententes conclues pour des raisons politiques. Pensez-vous qu'il s'agisse là d'une représentation exacte de vos conclusions?

M. Desautels: La représentation de nos conclusions figure dans notre rapport. Si vous le lisez attentivement, je pense que vous constaterez que nous ne mentionnons pas certains des détails que vous trouvez ici. Par conséquent, je maintiens exactement le contenu de notre rapport. J'estime que c'est M. Williams qui doit répondre aux questions relatives à ce communiqué de presse.

Mme Whelan: En tant que vérificateur général, quand quelqu'un publie un communiqué de presse fondé sur votre rapport, avez-vous l'obligation de le rectifier s'il n'est pas exact ou s'il déforme votre rapport?

M. Desautels: Je ne suis pas responsable de l'usage que tout le monde fait de notre rapport. Nous n'en finirions jamais.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Je pense que c'était une bonne réponse, monsieur Desautels.

Mme Whelan: Je pensais que vous seriez préoccupé si, dans un communiqué de presse, on remettait en question l'intégrité personnelle et professionnelle de hauts fonctionnaires. Je vous demande aujourd'hui si, oui ou non, vous croyez à l'exactitude du communiqué de presse deM. Williams.

M. Desautels: Je ne veux pas commenter le communiqué de presse de M. Williams, mais j'ai dit à des occasions antérieures - et je pense que M. Minto l'a indiqué au comité lors d'une réunion précédente - que nous n'avons pas remis en question l'intégrité des hauts fonctionnaires de Revenu Canada, et nous n'avons aucune raison de présumer qu'il y a eu de la mauvaise foi dans ces transactions.

Mme Whelan: Très bien.

M. Desautels: Nous l'avons dit assez clairement plus d'une fois.

Mme Whelan: Je voulais simplement m'assurer que M. Williams le savait.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, madame Whelan. Monsieur Campbell.

M. Campbell (St. Paul's): Merci, monsieur le président.

Nous avons discuté de la confidentialité pendant l'une de vos comparutions précédentes, monsieur Desautels. Si j'ai bien compris, vous appuyez le principe selon lequel les contribuables ont droit à la confidentialité dans leurs transactions avec Revenu Canada. N'est-ce pas?

M. Desautels: Oui.

M. Campbell: Je crains que dans votre rapport, en donnant autant de détails sur la transaction dont nous parlons, vous n'ayez violé ce droit. On pourrait considérer cela comme une violation de ce droit, car à mon avis, à partir des informations données, on peut tirer des conclusions, ce que certains ont effectivement fait. À tort ou à raison, les gens sont en train de faire toutes sortes de suppositions.

Êtes-vous préoccupés par la quantité de détails que vous avez donnés dans le rapport afin de soulever la question de politique qui vous préoccupe? Craignez-vous d'avoir violé ce droit à la confidentialité, mais indirectement et en toute bonne foi?

.1545

M. Desautels: Dans ce cas-ci, nous avons dû nous fier à notre jugement en ce qui concerne la quantité de détails à fournir pour présenter judicieusement l'affaire aux parlementaires. Ce faisant, nous étions très conscients des exigences de la Loi de l'impôt sur le revenu et, en particulier, de l'article 241, et nous avons même recouru constamment à nos conseillers juridiques pour nous assurer que nous n'enfreignions pas les exigences de la Loi de l'impôt sur le revenu relatives à la confidentialité. Nous étions donc tout à fait conscients de ces exigences, et nous pensons avoir établi un juste équilibre entre la quantité de détails que nous avons fournis et le respect de la confidentialité.

M. Campbell: Ainsi donc, vous estimez que vous êtes assez préoccupés par la confidentialité, et que vous vous êtes efforcés de communiquer votre message relatif au processus sans donner au public des indications sur l'identité possible des personnes concernées?

M. Desautels: Assurément.

M. Campbell: Et vous pensez que votre rapport reflète bien cette préoccupation?

M. Desautels: Évidemment, nous ne l'avons pas fait à la légère. Nous avons exercé notre jugement le mieux possible en tenant compte de l'avis de nos conseillers juridiques.

M. Campbell: Sur quoi portaient les avis juridiques que vous avez reçus...?

M. Desautels: Sur la question de savoir si la façon dont nous avons rapporté les faits respectait les exigences de la Loi de l'impôt sur le revenu en matière de confidentialité.

M. Campbell: Quel était l'avis de vos conseillers juridiques... que vous respectiez ces exigences?

M. Desautels: Évidemment.

M. Campbell: Avez-vous donc été surpris ou préoccupés par les hypothèses des médias et de l'opposition - la politique étant ce qu'elle est - relatives à l'identité des contribuables concernés, compte tenu de l'attention avec laquelle vous vous êtes efforcés de protéger la confidentialité? Avez-vous été surpris par le résultat?

M. Desautels: J'ai été un peu surpris...

M. Campbell: Ou bouleversé?

M. Desautels: ...et j'aurais préféré que le débat soit concentré sur les autres questions que nous avons soulevées, et non pas sur l'identité des contribuables concernés.

M. Campbell: Très bien.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Campbell. Monsieur St. Denis.

M. St. Denis (Algoma): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie, messieurs, d'être revenus. J'aimerais commencer en parlant de la nature du terme «ambiguïté» en ce qui concerne ce problème précis. Je pense que vous avez dit vous-mêmes qu'il est approprié pour décrire peut-être le dilemme - et je ne voudrais pas vous faire dire ce que vous n'avez pas dit - auquel les fonctionnaires ont été confrontés en essayant de régler ce problème.

À votre avis, l'ambiguïté devait-elle finir par se révéler avec le temps? Quelques cas étaient-ils nécessaires pour révéler le fait qu'il y avait une ambiguïté? Et si vous n'aviez pas fait la vérification du processus de décision pour découvrir ce phénomène, cette ambiguïté aurait-elle pu demeurer indéfiniment? Pouvez-vous me parler un peu de la nature de cette ambiguïté et me dire pourquoi on l'a révélée à ce moment-ci? Pourquoi les premiers rédacteurs ne s'en sont-ils pas rendu compte?

M. Minto: Au moment où l'on rédige les lois, il est souvent difficile, sinon impossible, de saisir toutes les nuances et toutes les choses qui pourraient se produire. L'une des choses que le témoignage a révélées ici, c'est que M. Dodge, M. Gravelle et tous les autres ont parlé de l'ambiguïté.

Ce contribuable demandait une décision à cause de l'ambiguïté. Je pense que d'autres contribuables ont demandé des éclaircissements sur la même question. Je présume qu'à un moment donné la situation est peut-être devenue intenable, et que quelqu'un a décidé qu'il fallait y remédier.

Mais une fois de plus, nous ne faisons que conjecturer. Je pense que toutes les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu concourent vers le même objectif. Une disposition datant de 1984...

M. Elkin: De 1982.

M. Minto: ...en effet, de 1982 - il s'agit de l'alinéa 97(2)c), qui donne une légère indication, surtout en cas de partenariat, d'une autre possibilité. C'est la disposition que le ministère a invoquée pour cette transaction.

De plus, en ce qui concerne la nature de l'ambiguïté, il y a l'opinion technique émise l'année dernière, par exemple. Il a fallu toute une année au ministère pour répondre à la demande du contribuable à cet effet. Ce n'était donc pas une question simple. Il a fallu toute une année pour y répondre.

C'est tout ce que je peux ajouter.

.1550

M. St. Denis: Mais je présume que l'ambiguïté fait partie du problème quand on rédige une loi dans laquelle on tente de régler divers types de situations fiscales. Si j'ai bien compris l'ambiguïté, elle se rapporte, si l'on était capable de se concentrer sur une étape particulière, à la déclaration selon laquelle les actions privées - qui sont devenues publiques - conserveraient encore un statut de BCI comme actions publiques détenues par la fiducie.

M. Elkin: Il y a essentiellement trois dispositions qui entrent en jeu.

M. St. Denis: Trois dispositions ambiguës?

M. Elkin: Trois dispositions de la loi qui ont des effets réciproques. Chacune d'elles contribue peut-être à l'ambiguïté. Il est difficile de l'isoler.

L'une de ces dispositions est l'alinéa 97(2)c), qui semble être celle sur laquelle on s'est fondé pour déterminer qu'un Canadien peut détenir un bien canadien imposable. L'autre disposition est le sous-alinéa 85(1)i), une disposition de transfert libre d'impôt stipulant que ces actions publiques sont maintenant des biens canadiens imposables. La question suivante est de savoir si un résident canadien peut posséder des biens canadiens imposables. Par conséquent, entre ces deux dispositions, on se retrouve, pour simplifier, devant la question du bien canadien imposable.

Il y a aussi la question de la distribution par une fiducie à un non-résident, parce que cela n'était pas le cas d'un Canadien qui déménageait avec l'actif; il s'agissait, si l'on regarde la question sous cet angle, d'un père qui restait au Canada, son fils étant aux États-Unis et le père voulant envoyer à son fils une grande quantité d'actions d'une société ouverte. Il se posait donc la question de savoir si le père, en envoyant ces actions à son fils, avait déclenché un événement taxable au Canada. Eh bien, le père ne déclenche pas un événement taxable au Canada si ces actions sont considérées comme étant un bien canadien imposable. On en arrive donc à cette conclusion en vertu du paragraphe 107(5)...

M. St. Denis: Une fois de plus, vous m'excuserez si je ne suis pas fiscaliste, mais y a-t-il vraiment trois ambiguïtés plus petites qui se combinent pour créer une ambiguïté plus complexe et plus grande?

M. Elkin: À mon avis, l'une des questions principales est la suivante: est-ce qu'un résident canadien peut posséder un bien canadien imposable dans sa forme la plus simple?

M. St. Denis: S'agit-il là de la plus importante des ambiguïtés?

M. Elkin: Oui. D'après ce que j'ai vu, tous les témoignages que j'ai entendus et tous les documents que j'ai eu le privilège de lire, il semble que ce problème a surgi quand l'alinéa 97(2)c) a été adopté en 1982. La difficulté que nous avons eue réside dans le fait que le problème que cet alinéa était censé régler, d'après le témoignage de M. Dodge, avait déjà été réglé dans la loi, à l'alinéa 115(1)b), je pense.

Par conséquent, quand nous avons examiné l'alinéa 97(2)c), nous avons mis toutes ces choses ensemble et nous nous sommes demandé ce que cela signifiait. Avant l'adoption de l'alinéa 97(2)c), nous savions qu'il n'y avait apparemment pas de problème. Subitement, après avoir adopté l'alinéa 97(2)c) en 1982... nous semblons maintenant avoir un problème.

M. St. Denis: Nous recommanderiez-vous, au moment où nous étudions ce problème...? Évidemment, nous avons besoin de comprendre les petites ambiguïtés qui créent la grande question.

M. Elkin: Je pense que la meilleure façon de vous répondre est de dire que quand je prends du recul pour examiner la loi il y a beaucoup d'autres personnes qui en font autant. S'il existait une situation dans laquelle un Canadien ne pourrait pas posséder un bien canadien imposable, il me semble que toutes les règles se tiendraient. Tous les autres objectifs en matière de politique qui ont été fixés en ce qui concerne la distribution d'actions, relativement à la règle de réalisation présumée en 21 ans, semblent se tenir.

M. St. Denis: L'essentiel d'une solution pourrait donc résider dans ce domaine.

À titre hypothétique, si l'on avait décidé, dans les cas qui nous intéressent, qu'un Canadien ne peut pas détenir un bien canadien imposable, laissant de côté tous les précédents et tout ce qui s'était passé auparavant, il y aurait eu réalisation présumée, et nous aurions de l'argent...

M. Elkin: Si le contribuable avait décidé de continuer la transaction, il y aurait eu réalisation présumée, et le contribuable aurait payé l'impôt. Je pense que cela serait très peu probable.

.1555

Il existe une autre démarche qui correspond aux objectifs établis en matière de politique. Ce que vous essayez de faire, c'est d'amener une fiducie à distribuer l'actif à un bénéficiaire humain. Tel semble être l'objectif de la règle de réalisation présumée en 21 ans.

Ainsi donc, dans ce cas précis, si la fiducie avait pu distribuer les actions à une personne, et si cette personne avait quitté le pays, il s'agirait incontestablement d'un bien canadien imposable pour cette personne. Il me semble que nous ne serions pas ici - si tel était le cas. Je présume que l'on peut toujours organiser une transaction comme je le dis, en termes simples avec beaucoup de complexité, mais je ne pense certainement pas que nous serions ici. Nous aurions réalisé l'objectif en matière de politique qui sous-tendait la règle de réalisation présumée en 21 ans, en vertu de laquelle vous vouliez soit taxer une fiducie de 21 ans, soit amener la fiducie à distribuer l'actif aux bénéficiaires. Par conséquent, tout semble se tenir sans que l'on se retrouve dans une situation où un résident peut posséder un bien canadien taxable. Je peux en parler indéfiniment.

L'autre problème, c'est que d'une manière générale, dans une transaction d'évitement, on a une situation inhabituelle où l'on adopte une interprétation littérale de la règle A et de la règle B, puis l'on se retourne et l'on obtient une soupe à l'oignon. Vous obtenez un résultat différent de celui que vous attendiez. C'est ce qui s'est passé ultimement dans l'interaction entre le sous-alinéa 85(1)i) et le paragraphe 107(5).

Vous obtenez donc un résultat différent de celui que vous attendiez. Je présume que c'est ce qui s'est produit.

M. St. Denis: Pourrait-on dire que tout n'est pas clair et que les fonctionnaires concernés sont confrontés aux mêmes questions complexes que nous?

M. Elkin: Sans aucun doute, rien n'est simple dans le domaine fiscal.

M. St. Denis: Merci, monsieur le président.

Le président: Je suis d'accord avec M. Elkin.

[Français]

Merci, monsieur St. Denis.

[Traduction]

Monsieur Williams.

M. Williams (St-Albert): Merci, monsieur le président. Avec votre permission, j'ai pris la liberté de photocopier quelques pages de la Loi de l'impôt sur le revenu, l'ensemble des amendements de forme au 13 juillet 1990, d'après l'ancien système de numérotation dont le vérificateur général a fait état dans son rapport. Certaines des dispositions ont été renumérotées depuis lors.

J'ai aussi photocopié quelques pages de la convention fiscale Canada-États-Unis, que j'ai également distribuées.

Je voudrais faire un pas en arrière et examiner assez étroitement les dispositions qui nous intéressent pour que nous puissions aller au-delà des généralités et commencer à comprendre la complexité, l'ambiguïté et la préoccupation que le vérificateur général a exprimée dans son chapitre.

Le président: Je serais la dernière personne à critiquer cette démarche, monsieur Williams.

M. Williams: Merci, monsieur le président. Excusez-moi si le texte n'est pas distribué dans les deux langues officielles, mais après la réunion de ce matin, où le niveau de bruit était assez élevé, j'ai pensé que c'était peut-être une meilleure façon de procéder.

Monsieur Desautels, si vous le désirez, vous pouvez certainement demander à M. Minto etM. Elkin de répondre à certaines questions.

Examinons la partie I de la Loi de l'impôt sur le revenu et la section A, que j'ai distribuée. Elle comporte les articles 1, 2 et 3. L'article 1 vise les résidents canadiens. Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que, d'une manière générale, l'article 2, qui renvoie à la section C de la Loi de l'impôt sur le revenu, concerne l'imposition des résidents canadiens?

M. Elkin: Oui. L'article 2 concerne la perception.

M. Williams: L'article 3, qui porte le sous-titre «Impôt payable par les non-résidents»... Comme vous pouvez le voir, à l'alinéa 2(3)c), on dit: «a disposé d'un bien canadien imposable».

.1600

Ai-je raison de comprendre qu'un bien canadien imposable, comme on le dit ici dans la section générale A, est imposable pour les non-résidents, et que les taxes prévues à la section C visent les résidents?

M. Elkin: Oui, sans aucun doute. On dit qui doit payer de l'impôt sur les biens canadiens imposables. De toute évidence, comme vous le signalez, on dit qu'un non-résident doit payer l'impôt sur les biens canadiens imposables.

M. Williams: Je vous remercie.

Passons à l'article 48, intitulé «Disposition de biens présumée lorsque le contribuable a cessé de résider au Canada». Si je peux donner un aperçu, vous pouvez peut-être apporter des éclaircissements et me confirmer qu'il porte sur deux types de biens - biens dont on présume qu'il en a été disposé immédiatement avant qu'une personne ne quitte le pays et d'autres biens canadiens imposables, etc., d'après la définition de l'alinéa (1)a), qui stipule que l'on n'est pas censé avoir disposé d'un bien canadien imposable immédiatement avant qu'une personne ne quitte le pays.

M. Elkin: Vous avez raison. Aux fins du procès-verbal, l'article 48 a été adopté en 1991. Il est maintenant abrogé, mais on l'a essentiellement remplacé par le paragraphe 128(1), je pense. Mais cela n'a aucune incidence sur ce que vous dites. Vous avez absolument raison.

M. Williams: Passons maintenant à l'alinéa 48(1)c), qui stipule que:

M. Elkin: Oui, c'est exact, et cela se rattache à la question de la garantie et de l'impôt difficile à percevoir.

M. Williams: C'est assez définitif, à votre avis, parce qu'on parle d'une personne «autre qu'une fiducie». La loi dit assez clairement qu'une fiducie est absolument et complètement exclue de cette disposition.

M. Elkin: C'est exact.

M. Williams: Passons à l'alinéa 85(1)i); l'article 85 concerne le roulement des biens, la conversion des biens d'une forme à une autre dans les limites permises par la Loi de l'impôt sur le revenu sans déclencher des gains en capital. Est-ce l'intention générale de l'article 85?

M. Elkin: Oui, l'article 85 est une disposition de transfert libre d'impôt.

M. Williams: Ce qui signifie que l'on ne dispose pas du bien; vous le convertissez simplement en une forme différente.

M. Elkin: En effet, et l'on en reporte le coût.

M. Williams: Et le coût d'acquisition original du bien demeure le même.

M. Elkin: Oui, en termes généraux.

M. Williams: Très bien. Si nous regardons l'alinéa 85(1)i), il stipule:

Pouvez-vous expliquer la signification de cet alinéa?

M. Elkin: S'agissant des Canadiens, quand on échange des biens en capital... Je suis sûr que pour quiconque autour de cette table qui a jamais rempli une déclaration d'impôt et obtenu un gain en capital, le terme «bien canadien imposable» n'a aucune pertinence. Quand un Canadien échange cet étui à lunettes contre ce stylo, en fin de compte, lorsqu'on vend le stylo, il y a une taxe. Le terme n'a donc pas d'importance.

À mon avis, cette disposition a été conçue - et je crois que cet avis a été partagé par d'autres témoins qui ont comparu devant ce comité ou devant le Comité des comptes publics - pour s'assurer qu'un non-résident ne peut pas éviter l'impôt. C'est exactement la même disposition dont M. Dodge parlait à l'alinéa 97(2)c). Vous ne voulez pas créer une situation permettant à un particulier de s'en aller avec des biens canadiens imposables. Vous aviez raison, c'était applicable. Par la suite, ce particulier a fait quelque chose pour éviter de payer l'impôt. Il a converti le bien en quelque chose qui n'était pas un bien canadien imposable.

Cette disposition empêche ce genre de chose et recoupe l'alinéa 115(1)b), dans lequel on comble toutes les lacunes. Toutefois, à mon avis, il faut utiliser cette disposition en se rappelant qu'elle visait à empêcher un non-résident d'éviter l'impôt canadien.

.1605

M. Williams: Ainsi donc, pour récapituler en utilisant mes propres mots, il existe deux types de biens quand une personne quitte le pays - des biens dont on présume qu'il en a été disposé avant son départ et des biens qu'elle peut conserver sans assumer un fardeau fiscal. Le sous-alinéa 85(1)i), d'après vous, vise les biens qu'un non-résident détient sans payer d'impôt. S'il devait convertir ces biens en quelque chose qu'il aurait dû déclarer en partant - mais il est déjà parti - afin de payer l'impôt par la suite - nous avons maintenant permis un autre report fiscal ultérieur, maintenant qu'il a converti les biens après son départ.

M. Elkin: Vous voulez éviter cette conversion consécutive au départ. Cela a été confirmé dans le témoignage que M. Dodge a présenté à ce comité - j'ai les bleus, mais rien d'autre - quand il a déclaré:

Si les non-résidents étaient imposés uniquement en fonction de leurs gains sur les biens canadiens imposables, il est assez facile d'imaginer comment un non-résident pourrait éviter l'impôt canadien. La personne possédant une action d'une société privée pourrait profiter des dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu relatives au transfert libre d'impôt pour faire en sorte que cette action devienne publique. Étant donné qu'une action publique n'est pas un bien canadien imposable, le non-résident pourrait ainsi éviter de payer tout impôt canadien.

Au point 5 de son texte, M. Dodge parle justement de ce genre de situation. Les règles d'imposition concernant... cela n'a absolument rien à voir; personne n'a encore pu nous le démontrer.

M. Williams: Passons, si vous le voulez bien, au paragraphe 97(2), «Choix par des associés». Je crois que c'est la situation utilisée par M. Dodge pour justifier sa décision. Comme nous pouvons le voir, il s'agit uniquement de sociétés. Ce paragraphe dit:

M. Elkin: C'est exact.

M. Williams: La définition de «société canadienne» est donnée à l'article 102 et se lit comme suit:

M. Elkin: C'est exact.

M. Williams: Est-ce le paragraphe cité par M. Dodge pour justifier sa décision? C'est ce que je suppose, car il parle de tous les associés d'une société canadienne, et il faut donc qu'ils résident au Canada.

M. Elkin: Non seulement c'est l'interprétation de M. Dodge, mais je crois que lorsqueM. MacGregor, du ministère de la Justice, est venu témoigner - j'ai son témoignage - il a dit:

Selon la définition de l'article 102, pour qu'une société soit canadienne il faut que tous ses membres résident au Canada. Donc, cette participation qui est réputée être un BCI est reprise par un résident canadien.

Nous comprenons et nous acceptons la validité de l'argument de M. MacGregor. Cependant, nous ne le considérons pas comme totalement convaincant, compte tenu de la présence dans la loi d'autres dispositions encore plus claires qui selon nous incitent à conclure le contraire.

.1610

Pour commencer, il faudrait noter qu'avant l'addition en 1982 de l'alinéa 97(2)c) il était incontestable que seuls les non-résidents pouvaient détenir des BCI. Nous ne pensons pas que l'addition de l'alinéa 97(2)c) avait pour objectif d'inverser ce principe fondamental.

Pourquoi cet alinéa 97(2)c) a été ajouté alors que l'alinéa 115(1)b) prévoyait déjà ce cas d'espèce, nous n'en savons rien. Certains fiscalistes ont été jusqu'à me dire qu'ils considéraient que c'était une malencontreuse erreur des rédacteurs. Je ne sais vraiment pas.

M. Williams: M. Dodge ou M. Gravelle, je ne me souviens plus - je crois que c'étaitM. Dodge - a dit qu'aucune société de personnes canadienne n'était impliquée dans cette transaction particulière. C'est ce qu'il a dit au Comité des comptes publics. L'article 97 ne vise que les sociétés de personnes. Je cite votre rapport au sujet des commentaires de Revenu Canada:

Il s'agit ici de sociétés de personnes. Les sociétés de personnes n'ont rien à voir avec la transaction en question. C'est ce qu'a admis M. Dodge ou M. Gravelle. Selon Revenu Canada, le contexte dans lequel se trouve une disposition particulière influe de manière importante sur son interprétation. Est-ce en partie la raison pour laquelle vous agitez votre drapeau?

M. Elkin: Je crois que nous agitons notre drapeau parce que la conséquence de ce genre d'interprétation nous intéresse toujours beaucoup. Si vous prétendez que la loi permet aux résidents de détenir des biens canadiens imposables, cela n'est possible que depuis 1982. Donc, depuis, des fiducies considérées comme des bien canadiens imposables peuvent être montées, et elles ne paient pas d'impôt, n'ont pas à fournir de garantie et peuvent être transférées à un non-résident.

Dans ce cas particulier, il y a eu transfert à une fiducie non résidente située aux États-Unis. Qu'est-ce qui empêche qu'elle soit transférée à une fiducie non résidente située aux Bermudes, au Liechtenstein ou dans n'importe quel autre paradis fiscal? J'ai du mal à voir comment on pourrait l'empêcher.

M. Williams: Passons à la section D et à l'alinéa 115(1)b), qu'encore une fois je cite:

Ai-je raison de dire que les mots entre parenthèses, «appelé dans la présente loi «bien canadien imposable»...? En gros, c'est le terme appliqué à toute une série de biens énumérés aux sous-alinéas 115(1)b)(i) à (ix), et plutôt que de les répéter chaque fois ils ont simplement donné un terme à cette série de biens.

M. Elkin: Oui. L'article 115 énumère les types de biens pour lesquels les non-résidents sont imposés. Vous avez raison: l'article 115 en dresse la liste. Il dit que ce sont des biens canadiens imposables, que ce sont les biens pour lesquels les non-résidents sont imposés. Il parle en particulier de la disposition de biens en immobilisations.

M. Williams: Il donne la définition des biens canadiens imposables relevant de la section D, qui concerne les revenus imposables gagnés au Canada par des non-résidents, se référant à l'alinéa général 2(3)b).

M. Elkin: Oui.

M. Williams: Je vais passer maintenant à la convention fiscale Canada-États-Unis de 1980, qui entre aussi en jeu dans le cas qui nous intéresse. Il y a dans cette convention deux règles de dix ans - dix ans avant le départ et dix ans après le départ. Comme il s'agit de dix ans dans les deux cas, ne les confondons pas.

Ai-je raison de penser que cette convention a préséance sur la Loi de l'impôt sur le revenu?

.1615

M. Elkin: Tout à fait.

M. Williams: Par conséquent, en cas de conflit entre la loi et la convention, c'est la convention qui l'emporte.

M. Elkin: Tout à fait.

M. Williams: Les sous-alinéas 3b)(i), (ii) et (iii) précisent ce qu'on entend par bien immobilier dans le contexte de la convention.

M. Elkin: L'article 3 impose les gains rapportés par des biens immobiliers, oui.

M. Williams: Est-ce que cette transaction particulière relevait des sous-alinéas 3b)(i), (ii) et (iii)?

M. Elkin: Non, pas que je sache. Cette disposition ne joue pas. Cette disposition ne joue qu'en cas de disposition de biens. Supposons que la valeur intrinsèque de ces actions publiques se soit composée de crayons. Si au moment de la vente de ces actions de société ouverte la valeur intrinsèque était composée de biens immobiliers, cette disposition aurait joué à partir de ce moment particulier.

M. Williams: Mais, à votre avis, le sous-alinéa 3b)(ii), qui dit «une action du capital-actions d'une société dont la valeur des actions est dérivée principalement de biens immobiliers situés au Canada», ne s'applique pas à la transaction qui nous concerne.

M. Elkin: C'est ce que je crois. Cette question n'aurait même pas dû concerner Revenu Canada. Elle ne peut concerner éventuellement le ministère que s'il y a vente.

M. Williams: Comme il n'y a pas eu disposition, cet article n'a pas été invoqué.

M. Elkin: Exactement.

M. Williams: L'article 5 parle des dix ans avant et des dix après:

a) a résidé dans le premier État mentionné - c'est-à-dire le Canada -

pendant 120 mois pendant n'importe quelle période de 20 années consécutives précédant la disposition de ce bien

Que veut dire cet article?

M. Elkin: À partir des paragraphes 5a) et b) toutes les dispositions sont liées par un «et». Cet article essaie de dire en termes très généraux que si un non-résident touche des gains provenant de biens en immobilisation qui ne sont pas des biens immobiliers - c'est un autre type de biens en immobilisation, des actions de société ouverte, disons, où la valeur intrinsèque sont des stylos, peut-être, ou quelque chose d'autre - si le non-résident, dans ce cas disons que c'est un résident des États-Unis, n'a pas résidé au Canada pendant une période de 10 ans avant qu'il n'ait quitté le pays pour s'installer aux États-Unis, de toute évidence la condition A n'est pas remplie.

La condition B est celle qui nous donne une garantie de 10 ans dans le cas de la convention canado-américaine. Donc même si un Canadien a quitté le Canada avec des biens, des actions, non garantis par un bien immobilier - ils étaient garantis par des stylos - nous conservons notre droit d'imposition pendant 10 ans. Cette condition nous donne ce droit. M. Dodge en a aussi parlé dans son témoignage.

Il est dit ensuite que: «et si ce bien...était détenu par la personne au moment où elle a cessé de résider» au Canada... Donc, quand l'intéressé a quitté le Canada, il fallait qu'il soit le propriétaire de ce bien. Dans ce cas particulier, l'intéressé n'est pas parti avec un bien; il a transféré ce bien à quelqu'un d'autre qui se trouvait à l'extérieur du pays. En gros, ce qui est arrivé - d'après les documents que j'ai vus, d'après ce que le représentant du contribuable a dit à Revenu Canada - c'est que dès que ces actions ont quitté le Canada il a été possible de faire une demande d'exemption en vertu de cette disposition de la convention.

Dans sa lettre de politique, le ministère des Finances disait qu'il ne voyait aucune objection à ce qu'un résident détienne un bien canadien imposable, à condition que le Canada conserve son droit d'imposition. Il est évident que le Canada conservait son droit d'imposition, et je suppose que cela a été autorisé sur cette base. On a dit au contribuable: si tout s'était passé comme nous pensions que cela aurait dû se passer, vous auriez pu partir avec ces actions, et nous aurions conservé notre droit d'imposer ces actions. Vous avez changé des termes de cette transaction.

.1620

Permettez-moi d'user d'une analogie. Nous savons tous que lorsqu'on vend un bien à un parent - à un enfant, par exemple - son prix est fixé en fonction de sa juste valeur marchande. Quand on entre dans le royaume des engagements et des renonciations, quand on vend son bien à son fils au prix coûtant, Revenu Canada n'est pas tout à fait d'accord et dit qu'il aurait dû être vendu à sa juste valeur marchande. On répond alors au ministère: pas de problème, je m'engage à régler cet impôt si mon fils ne le fait pas. On entre dans le domaine d'ententes qui ne sont pas prévues par la loi.

J'estime que c'est une question de politique administrative importante qu'il faut régler. Je n'ai rien vu dans aucun des documents publiés sur les décisions anticipées ou sur les vérifications qui indique comment sera réglé le problème des engagements et des renonciations dans ce contexte. C'est une question de politique administrative importante.

M. Williams: Et tous les...

Le président: Monsieur Williams, pourrais-je vous demander une faveur, ainsi qu'à tous les autres membres du comité? J'aimerais faire quelque chose de terriblement politique.

M. Williams: Je vous en prie.

Le président: J'aimerais vous présenter trois personnes de notre auditoire qui sont de Willowdale. Le rabbin Gopin a amené avec lui deux étudiants, Ari Feldman et Hadassah Rais. Ces deux jeunes étudiants ont obtenu une bourse pour venir à Ottawa et ensuite passer une partie de l'été à travailler en Israël. Je suis très fier du spectacle que nous leur donnons aujourd'hui.

Merci beaucoup, monsieur Williams, mesdames et messieurs.

Des voix: Bravo!

Le président: Je m'excuse d'avoir interrompu cette histoire très passionnante.

M. Williams: Pas de problème, monsieur le président, et je vous remercie infiniment de m'avoir laissé tout mon temps. Je veux simplement finir en posant une dernière question.

Les problèmes dont vous parlez, monsieur Elkin... et je crois que vous avez dit ce matin avoir, vous, vérificateur, trouvé des dossiers vides, n'avoir trouvé pratiquement aucun document vous permettant vraiment de faire le tour de la question. Étant vérificateur, que pouviez-vous faire d'autre que d'attirer l'attention des comités auxquels vous êtes censé remettre vos rapports? Ai-je bien résumé la situation?

M. Elkin: Oui, nous n'avons pas trouvé la documentation nécessaire pour justifier un grand nombre des points contenus dans cette décision, comme nous l'avons signalé - et comme les comptes rendus doivent certainement le montrer.

M. Williams: Encore une fois, merci, monsieur le président. Je vous remercie de votre indulgence.

Le président: Merci, monsieur Williams. Je suis sûr que vous avez fait de ce livre, de la Loi canadienne de l'impôt sur le revenu, le livre du mois. Très bonne méthode. Je crois que tout le monde comprend mieux maintenant les articles à charge et les articles à décharge.

J'ai sur ma liste M. Dhaliwal, M. Shepherd et M. Campbell.

Monsieur Dhaliwal.

M. Dhaliwal (Vancouver-Sud): Merci beaucoup, monsieur le président.

Pour reprendre un des points de mon collègue au sujet de ce dossier et des renseignements contenus dans ce dossier, pourriez-vous me dire si vous avez trouvé une analyse de la décision - une analyse de l'impact au niveau de gains ou de pertes éventuels pour le Trésor canadien? Y avait-il une analyse de ce genre dans ce dossier?

M. Minto: Monsieur le président, nous avons précisément posé la question à la fois au ministère des Finances et au ministère du Revenu. Dans les deux cas la réponse a été qu'il n'y avait pas de documents dans les dossiers indiquant qu'une telle analyse avait été faite.

M. Dhaliwal: Compte tenu de l'importance de la somme concernée, avez-vous été surpris de constater que ni les Finances ni Revenu Canada n'ait calculé la perte immédiate ou future que cela pouvait représenter pour les contribuables canadiens?

M. Minto: Il y a deux aspects à cette question de documentation. Premièrement, quand un vérificateur se rend dans une société et voit des gens acheter des hélicoptères ou d'autres choses étranges de ce genre, vous vous attendez à voir des factures...

.1625

Le président: Pourriez-vous, je vous prie, ne pas utiliser l'analogie de l'hélicoptère?

Des voix: Oh, oh!

M. Minto: Monsieur le président, dans une autre vie j'ai été chargé de certaines responsabilités pour le ministère des Transports.

Disons que vous avez acheté des autocars pour une compagnie de transport. On s'attendrait à ce qu'une analyse des besoins...

Le président: Maintenant vous parlez de Terre-Neuve.

M. Minto: Prenons des trucs ou des crayons; est-ce moins dangereux? Oui, les crayons sont moins dangereux. Mon collègue s'en est déjà servi.

Vous trouveriez une analyse des besoins, vous trouveriez une analyse de marché, vous trouveriez une analyse de coûts et vous trouveriez une analyse coûts-avantages. Dans certaines entreprises, l'une est plus appropriée que l'autre. On ne s'attend pas à avoir toutes ces choses, mais on s'attend à ce que quelqu'un ait étudié la question, se soit demandé si c'est une initiative valable pour l'entreprise.

S'agissant de décisions anticipées, monsieur, c'est la même chose. Dire à des gens qu'ils n'ont pas à payer d'impôt ou leur donner un chèque, c'est la même chose. Compte tenu de l'importance de la somme, de la nature de la transaction - et nous sommes tous d'accord sur les ambiguïtés entourant cette transaction - et, par-dessus tout, compte tenu du fait que jusqu'à une certaine date tout le monde semblait être d'accord, puis tout à changé, oui, nous nous attendions à trouver ce genre de documents et nous avons été déçus de ne pas les trouver.

Deuxièmement, à partir du moment où il n'y a plus de contrôles, il faut demander qui a la responsabilité de cette transaction. Dans les deux cas, il n'y avait pas de documents.

M. Dhaliwal: Vous avez dit plus tôt que vous ne pouviez pas porter certains jugements soit parce que vous n'aviez pas tous les renseignements, soit parce que vous n'y aviez pas accès, soit parce qu'ils n'étaient pas disponibles. Croyez-vous que ces questions doivent être examinées plus avant, afin de voir s'il n'y a pas eu un manque de communication, un problème à Revenu Canada qui a fait qu'on a pu mal interpréter la lettre? Ce sont des choses qui se produisent à l'intérieur des grandes organisations. Il y a mauvaise communication à un certain moment.

La situation doit-elle être examinée plus à fond afin qu'on voie quand la décision a été prise? Le problème a peut-être été qu'on n'a pas procédé à un examen suffisant.

M. Minto: Je pense que c'est M. Campbell, un peu plus tôt, qui a dit quelque chose de très intéressant: pour comprendre l'avenir, il faut parfois revenir sur le passé. Lorsque vous établirez la loi dans l'avenir, vous devrez tenir compte de la façon dont elle a été interprétée par le passé.

Nous ne pouvons pas vous dire quel a été le fondement de la décision. La raison en est que les documents qui nous en donneraient l'explication ne sont tout simplement pas disponibles. Vous pouvez peut-être parvenir à en savoir plus de votre côté.

M. Dhaliwal: Je tiens à vous dire que j'ai téléphoné à quelques fiscalistes à Vancouver; ils font face fréquemment à ce genre de situations. Ce qu'ils m'ont dit, entre autres, c'est qu'on aurait pu obtenir le résultat souhaité d'une autre façon. Savez-vous que si cette interprétation n'avait pas été donnée à la partie en cause, celle-ci aurait pu prendre d'autres mesures pour arriver à ses fins? Pouvez-vous nous donner plus de détails à ce sujet? Vous n'êtes peut-être pas en mesure de le faire.

M. Elkin: Je peux vous dire que la partie en cause aurait pu établir sa résidence aux États-Unis avec ses biens. Je ne sais pas ce que vous voulez dire par «d'autres mesures». Que la transaction aurait pu se faire autrement et qu'il n'y aurait quand même pas eu d'impôts canadiens perçus?

M. Dhaliwal: C'est ce que je dis, oui.

M. Elkin: C'est une autre faiblesse du système dont je ne suis pas vraiment en mesure de parler. Si vous supposez qu'il y a une autre faiblesse, que d'autres transactions auraient pu avoir lieu, qu'une autre structure aurait pu être utilisée de façon à ce qu'il n'y ait pas d'impôts perçus, la réponse est: peut-être bien.

M. Dhaliwal: Merci beaucoup, monsieur le président. Je n'ai pas d'autres questions. J'ai sans doute été plus bref que ce à quoi vous vous attendiez.

Le président: Nous en sommes tous frappés et vous exprimons notre reconnaissance, monsieur Dhaliwal.

Monsieur Duhamel.

M. Duhamel (Saint-Boniface): Si vous le permettez, j'aimerais revoir brièvement avec vous la suite des événements, telle que je la comprends.

Cette transaction s'est produite en 1991. Elle a été découverte, sous une forme ou une autre, en 1993. De 1993 à 1995, le gouvernement en est devenu de plus en plus conscient à partir de diverses sources. Cependant, ce n'est que maintenant, en 1996, qu'elle fait l'objet d'un rapport officiel.

C'est bien ainsi que les choses se sont passées? Quelles ont été les principales étapes?

M. Minto: Oui.

.1630

M. Duhamel: Nous passons donc beaucoup de temps à essayer de comprendre ce qui s'est passé en 1991 de façon à pouvoir établir une meilleure façon de procéder, une meilleure politique en 1996? Ne serait-il pas plus avantageux de parler de ce que nous pouvons faire à l'avenir, plutôt...? Parce que la transaction remonte à 1991, il y a cinq ans. Il est peut-être important d'y revenir, mais la transaction a eu lieu sous un autre gouvernement, avec une surveillance, une administration différentes. Quelles recommandations précises nous faites-vous maintenant, de façon à ce que nous nous assurions que la même situation ne se reproduise pas? Avez-vous des suggestions précises à nous faire aujourd'hui?

M. Desautels: Nous avons déjà dit, je pense, que l'interprétation technique donnée en 1991 a d'une certaine façon clarifié l'ambiguïté qui nous inquiétait; du même coup, cependant, elle a créé de nouvelles possibilités en matière de planification fiscale. C'est la question que je voudrais voir régler personnellement. Je conviens avec M. Duhamel que c'est ce sur quoi l'accent devrait être mis, du moins à ce comité. Un certain nombre de choses pourraient être faites. Je ne veux pas présumer de l'intention des législateurs, mais ils pourraient, par exemple, préciser les règles de façon à indiquer clairement que les non-résidents peuvent détenir des biens canadiens imposables. Ce serait régler une partie du problème. Évidemment, il faudrait que vous décidiez que c'est bien ce que vous voulez.

M. Duhamel: Je comprends. Je veux simplement savoir ce que vous nous suggérez comme améliorations. À nous évidemment de décider si c'est approprié ou non. Je sais bien qu'il faut faire la distinction. Si vous avez d'autres suggestions, je vous en serais reconnaissant.

M. Desautels: Il s'agirait de voir si c'est possible. Vous pourriez ajouter une règle qui fasse en sorte que, lorsque la fiducie d'un résident canadien transfère des biens canadiens imposables à un bénéficiaire en franchise d'impôt, les biens en question demeurent des biens canadiens imposables une fois aux mains du bénéficiaire non résident. Ce serait une façon de régler une partie du problème que j'ai soulevé.

Troisièmement, vous pourriez ajouter une règle obligeant le dépôt d'une garantie pour toutes les actions de sociétés ouvertes qui quittent le pays avec un report d'impôt, si vous n'étiez pas prêts à prendre la mesure précédente, qui serait d'indiquer clairement que seuls les non-résidents peuvent posséder des biens canadiens imposables.

Ce sont là quelques exemples. Si nous en discutions plus avant, je suis sûr que mes collègues pourraient faire d'autres suggestions en vue de clarifier la situation.

[Français]

M. Tremblay (Rosemont): Si vous continuez dans cette voie, nous proposerons de vous nommer sous-ministre des Finances, puisque cela fait partie de son travail.

Le président: Je pense que c'est notre travail à nous tous.

[Traduction]

M. Duhamel: Puis-je continuer, monsieur le président?

Si je soumettais ces trois suggestions à des évaluateurs indépendants, des gens qui travaillent dans ce domaine, des experts, et que je leur demandais, au nom du comité, s'il s'agit de bonnes suggestions, de suggestions qui pourraient être utiles à la population canadienne, y aurait-il

[Français]

un partage d'opinions?

[Traduction]

Certains diraient-ils: oui, certains diraient-ils: peut-être, et certains diraient-ils: pas du tout, ces suggestions risquent de créer d'autres problèmes? Savez-vous quelles seraient leurs réactions?

M. Desautels: Je ne peux pas en être sûr, monsieur le président, et je ne veux pas donner l'impression de suggérer une ligne de conduite aux parlementaires.

Tout dépendrait de ceux à qui on s'adresserait. Il pourrait y avoir des fiscalistes qui voient des avantages au système actuel parce qu'il offre des possibilités intéressantes en matière de planification fiscale.

Je reviens au rapport de 1992 sur l'imposition des filiales étrangères de sociétés canadiennes. À l'époque, nous avons souligné des échappatoires possibles à ce niveau. Bon nombre de fiscalistes, en revanche, estimaient qu'il n'y avait pas de problème, que le système devait rester tel quel.

M. Duhamel: Par opposition à ce que vous proposiez.

M. Desautels: En effet. Depuis, divers gouvernements se sont penchés sur la question. De fait, ce gouvernement-ci a introduit dans le dernier budget des modifications à certaines règles. Il est à espérer qu'elles constituent une amélioration. Il se peut que certains fiscalistes n'aient pas été d'accord avec les modifications, mais, en définitive, il appartient aux décideurs du gouvernement de...

.1635

Le président: Le gouvernement a toujours été d'accord avec ce que vous proposiez, monsieur Desautels.

M. Duhamel: D'après ce que je comprends, donc, dans la situation qui nous occupe, où il y a eu une certaine décision prise à la suite d'avis reçus par deux ministères, vous vous intéressez à la façon dont on a procédé. Je ne sais pas si je pourrais tourner la phrase autrement.

Il pourrait y avoir d'autres personnes qui ne soient pas d'accord avec vous. Certains pourraient être d'accord avec vous, d'autres avec le gouvernement.

C'est juste?

M. Desautels: Je suppose que pour certaines personnes il n'y a pas de problème. Les avis ne sont sûrement pas unanimes. Je ne suis pas naïf au point de croire qu'ils le sont.

M. Duhamel: C'est la raison pour laquelle vous dites que c'est à nous de régler la question, et non pas au vérificateur général.

M. Shepherd (Durham): Pour ce qui est de la façon de voir la loi, il y a toujours des choses avec lesquelles les gens ne sont pas d'accord. Ils ne sont pas visés, ou ils estiment qu'il y a des zones grises.

Je me souviens de l'époque où je pratiquais le droit fiscal moi-même. Un fonctionnaire de Revenu Canada m'a déjà dit, relativement à la déductibilité des dépenses, que lorsque le ministère avait des doutes il la refusait. Je pense que cette déclaration montre bien quelle est la situation.

Cela soulève dans mon esprit la question de l'intention. Ce mot, pourtant, ne figure pas dans l'index de la Loi de l'impôt sur le revenu. C'est donc un concept qu'ont élaboré avec le temps ceux qui se servent de la loi dans leur travail.

C'est pourquoi j'aimerais vous poser quelques questions précises sur l'intention du législateur dans la Loi de l'impôt sur le revenu.

Par exemple, il est question de «biens canadiens imposables». Dans la loi, cette expression semble désigner les biens immeubles. Autrement dit, on ne quitte pas le pays avec une mine ou une forêt dans sa poche. Cela nous permet donc de percevoir des impôts. Cela signifie que même si la personne est en Australie, au Venezuela ou dans un paradis fiscal quelconque, il est possible pour nous de percevoir l'impôt.

Quelle est l'intention du législateur lorsqu'il parle de biens canadiens imposables?

M. Elkin: La réponse se trouve au paragraphe 115(1). Le titre de l'article se lit comme suit: «Revenu imposable des personnes ne résidant pas au Canada». Pour ce qui est du bien canadien imposable, il faut se reporter à l'alinéa b). On y précise que dans certaines circonstances le non-résident qui effectue certains types de transactions relatives à un bien en immobilisation doit acquitter l'impôt. Il s'agit donc d'un bien immobilier situé au Canada et utilisé par un non-résident dans l'exercice de son activité - autre que l'assurance. On y trouve toute une liste de choses. Il est certain que cela comprend les biens immobiliers. Cela comprend également d'autres biens, comme une participation dans une société de personnes.

M. Shepherd: L'intention générale recherchée n'est-elle pas de dire que le bien canadien imposable n'est pas liquide?

M. Elkin: Non.

M. Shepherd: Vous ne diriez pas...

M. Elkin: Bien, oui, le bien canadien imposable ne le serait pas, sauf que je ne sais pas ce que l'on ferait d'une action d'une société ouverte destinée à obtenir une certaine liquidité.

M. Shepherd: Autrement dit, les titres négociables ne cadrent pas tout à fait avec la définition de bien canadien imposable.

M. Elkin: Non, ils sont inclus.

M. Shepherd: Je sais qu'ils sont inclus, à cause d'une disposition que l'on trouve ici, mais selon l'esprit de la Loi de l'impôt sur le revenu, il est un peu incohérent de trouver les titres négociables sous la même catégorie que les mines et les forêts, et d'autres avoirs immeubles.

M. Elkin: C'est une question compliquée. Il se pourrait que les actions d'une société ouverte soient un bien en immobilisation pour moi et fassent partie de l'inventaire pour un courtier. Il s'agit donc de quelque chose de complexe. Mais en général, si quelqu'un comme vous et moi détient des actions de diverses sociétés ouvertes, celles-ci représentent pour nous un bien en immobilisation, parce qu'elles peuvent occasionner un gain en immobilisation plutôt qu'un gain sous forme de revenu.

.1640

M. Shepherd: Moi, je reviens toujours à ceux qui rédigent le texte de loi. Ce qui les guide, c'est toujours de pouvoir percevoir l'impôt. On a beau avoir un tas de lois, au bout du compte, ce qu'il faut, c'est de pouvoir percevoir l'impôt.

Pensez-vous que l'objet général de la loi est de percevoir l'impôt?

M. Elkin: Oui. Lorsqu'il s'agit de biens en immobilisation, comme les actions, on veut habituellement obtenir une garantie lorsque la personne les emporte. On ne peut pas s'en aller avec un bien immeuble. Celui-là, on le garde.

M. Shepherd: Peut-être pourriez-vous nous parler de cela, des biens de remplacement, et de choses comme les renonciations et les engagements. En règle générale, ces choses ont moins d'importance que le recours aux dispositions de la loi. Autrement dit, vous avez accepté une garantie de substitution, une promesse qu'un jour, s'il arrive quelque chose, nous allons payer nos impôts, par opposition au recours aux dispositions de la loi à ce moment-là.

M. Elkin: Une renonciation et un engagement, c'est une façon de régler la question. Les conditions sous lesquelles Revenu Canada les accepte est une question administrative majeure. D'après moi, nous sommes ici en terrain inconnu. De quelle façon voulons-nous nous en servir pour régler les litiges? S'en sert-on pour transformer la nature des transactions?

Idéalement, on veut que la loi s'applique. C'est une loi qui s'applique uniformément à tous. On examine le texte, et ils vont me donner à moi la même interprétation qu'ils donneraient à n'importe qui d'autre ici. Vous voudrez sûrement avoir une sorte de garantie exigible de quiconque déménage avec les actions. Bien sûr, négocier sur les renonciations et les engagements, c'est une façon de faire, mais...

M. Shepherd: Un bien de substitution n'est pas aussi utile qu'un bien véritable comme des titres négociables.

M. Elkin: Parlez-vous de la renonciation et de l'engagement qu'ils ont acceptés au lieu d'une garantie?

M. Shepherd: Oui.

M. Elkin: Oui. Tout d'abord, l'engagement était inexécutable. De plus, le contribuable aurait pu faire ce que l'engagement lui interdisait de faire sans avoir à contrevenir à son engagement. Par exemple, c'est quelque chose que l'on a déjà vu, mais parce qu'il ne s'agit pas d'un bien canadien imposable pour la fiducie du non-résident, le contribuable au moment de la disposition pourrait dire qu'il ne réclame pas l'exemption visée par la convention, ce qui est précisément ce que l'engagement était censé le forcer à faire, mais ce n'est tout simplement pas un bien canadien imposable pour lui.

M. Shepherd: L'intention de Revenu Canada est-elle de percevoir ou non l'impôt?

M. Elkin: L'intention de Revenu Canada est de percevoir le montant exact de l'impôt exigible selon la loi.

M. Shepherd: Estimez-vous que ces fonctionnaires ont agi dans le respect des intentions de la loi?

M. Elkin: La position que nous avons adoptée dans la note, c'est qu'à notre avis cette transaction contourne l'esprit de la loi.

M. Shepherd: Cela présente-t-il un avantage quelconque pour le Canada?

M. Elkin: Nous n'en voyons pas.

M. Shepherd: C'est même très désavantageux pour le Canada, n'est-ce pas?

M. Elkin: Oui.

M. Minto: Comme nous le disons dans la note, le Canada a renoncé à de futures créances fiscales considérables. L'assiette fiscale a été minée.

M. Shepherd: Quand je lis la décision, il me semble que quelqu'un a vraiment dû se démener pour trouver cet alinéa 97(2)c) pour la justifier. C'est une disposition curieuse, qui ne cadre avec rien d'autre. C'est ce qui a servi à justifier cette décision.

M. Minto: Lorsqu'on la lit, on s'aperçoit que c'est forcé, une entorse à la logique, de dire que cela s'applique aux circonstances.

Le président: Merci, monsieur Shepherd. Monsieur Campbell.

M. Campbell: Merci, monsieur le président.

Je vais vous avouer honnêtement que même si je m'attendais à ce que les choses s'éclaircissent, plus j'écoute les témoins, qui nous ont donné énormément d'informations, plus je m'y perds. C'était plus clair il y a une heure. Vos deux ou trois dernières réponses m'amènent à me demander si vous ne répondriez pas autre chose que ce que vous avez déjà dit.

.1645

Tout à l'heure, on vous a demandé si les fonctionnaires avaient mal compris les conseils qui leur avaient été donnés. Maintenant on vous demande si c'est forcé, et vous dites que c'est peut-être le cas.

Je crois vous avoir entendu dire plus tôt, lorsque l'on parlait d'ambiguïté - et on a passé pas mal de temps là-dessus - qu'il y a des ambiguïtés et que ce qui vous ennuie, c'est de ne pas pouvoir comprendre comment on est arrivé à une décision. Je ne vous ai jamais entendu dire que quelqu'un avait mal compris ce qu'il faisait ou qu'il lui était impossible d'arriver logiquement à cette conclusion ou qu'il y avait eu manque de bonne foi.

Or, je vous ai entendu dire toutes ces choses.

Je vous ai aussi entendu dire, à propos du témoignage que vous avez donné devant un autre comité, que les décisions comme celle-ci peuvent aller dans un sens ou dans l'autre, en fonction d'un grand nombre de facteurs et de détails techniques ainsi que des entités en cause.

De plus, vous avez dit - et vous l'avez répété ici aujourd'hui - qu'une décision comme celle-ci n'est pas évidente et que l'on peut défendre les deux points de vue, et c'est la raison pour laquelle les gens demandent une décision.

Eh bien, qu'est-ce que c'est? Cela ne peut pas être tout à la fois. L'aide que vous essayez de nous apporter aujourd'hui commence à ne plus nous aider. Pour ma part, je ne m'y retrouve plus dans ce que vous essayez de nous dire.

Pourriez-vous me répondre? J'aimerais avoir votre aide.

M. Minto: Commençons par établir le genre d'ambiguïté dont nous parlons, et ensuite on passera à autre chose. Mes collègues ont essayé d'expliquer qu'il y a différents niveaux d'ambiguïté ici.

Lorsque nous avons passé en revue la transaction, nous avons constaté qu'au sein de Revenu Canada beaucoup de gens adoptaient telle ou telle position fondée sur les éléments du dossier, sur toutes les dispositions de la loi et sur le risque d'évitement fiscal.

Nous avons alors dit: bon, si toutes ces dispositions portent sur des BCI appartenant à des non-résidents, comment êtes-vous arrivés à conclure qu'il s'agissait de BCI appartenant à des résidents? On nous a dit que la réponse se trouvait au paragraphe 97(2). Nous avons dit: bon, voyons l'analyse et le raisonnement sous-jacents aux Finances et au Revenu. Mais cela n'existait pas. Il n'y avait ni analyse ni raisonnement.

C'est pourquoi nous disons que oui, cela a peut-être créé une certaine ambiguïté, mais n'oublions pas le fait que de très nombreux éléments de la Loi de l'impôt sur le revenu penchent dans cette direction.

M. Shepherd vous a lu les passages, monsieur le député. En l'absence d'analyse qui dissipe cette ambiguïté pour aboutir à la décision, l'ambiguïté reste.

Mais il ne faut pas l'exagérer. Ce qui compte ici, c'est l'application de la Loi de l'impôt sur le revenu, et nous essayons de voir comment ils sont arrivés à cette conclusion.

Il y a donc ambiguïté, oui, mais elle n'est pas énorme, et lorsqu'on l'examine aujourd'hui, en l'absence d'explications, sans notes ni analyse, nous ignorons comment ils ont appliqué cette disposition.

C'est précisément la question dont a parlé M. Shepherd.

M. Campbell: Vous avez donc dit plus tôt, et M. Desautels a bien pris soin de le dire aussi, qu'il n'est pas question ici de mauvaise foi ou d'influence indue ou de méprise ou de légèreté dans l'accomplissement de leur tâche. Tout simplement, vous n'avez rien vu qui vous convainque qu'il existe une justification à une certaine décision.

M. Minto: Ce que nous avons dit, c'est que nous ne comprenons pas le fondement de la décision parce qu'il n'y a ni analyse ni documentation pour l'expliquer.

M. Campbell: Mais vous avez dit plus que cela.

M. Minto: Laissez-moi poursuivre. M. Desautels et nous tous avons clairement dit que ce que nous soulevons ici avec vous, ce n'est pas une question d'intégrité. Nous disons que nous ne savons pas comment ils ont pu se servir d'une seule disposition d'un côté de la balance, d'un seul grain de sable ici par rapport à une montagne d'arguments là-bas, pour arriver à une conclusion. C'est ce que nous vous disons.

En réponse à la question de savoir où nous sommes allés, peut-être le comité voudrait-il étudier la nécessité de cette disposition et son véritable objet. Mais la décision ne m'appartient pas.

M. Campbell: J'ai une autre question à poser, parce que la chose a été soulevée encore une fois cet après-midi, et aussi ce matin. On a laissé entendre que cette décision crée de nouvelles formules de planification fiscale. C'est l'euphémisme que je vais employer. M. Desautels l'a employé cet après-midi. Encore une fois, je suis mêlé. C'est peut-être parce que je connais trop peu la Loi de l'impôt sur le revenu.

.1650

Je patine. C'est peut-être parce que je ne connais pas assez bien la loi. J'aimerais que vous nous disiez ce qu'elles sont.

M. Minto: Je vais simplifier. Ce n'est pas ainsi que serait formulé un avis juridique ou une décision fiscale. Mais je vais essayer de vous l'expliquer.

Si quelqu'un détient des actions d'une société ouverte et s'il veut émigrer, il doit faire un choix, fournir une garantie - cela devient un BCI, et il part.

Par contre, depuis que cette décision a été rendue, si vous êtes propriétaire d'une société privée reprise par une entreprise plus importante dont les actions sont cotées en bourse au pays, il suffit d'échanger les actions de la société privée contre des actions de la société ouverte. Vous pouvez prendre ces actions de la société ouverte et quitter le pays avec elles sans avoir à déposer la moindre garantie.

Vous et moi nous pouvons avoir des actions dans cette compagnie. Lorsque vous partez, vous émigrez sans déposer de garantie. Moi, quand je pars, je dois le faire. Pourtant, ce sont des actions de la même compagnie.

Tel est l'effet de cette décision. Voilà le genre de formules de planification fiscale dont il est question.

M. Campbell: Et vous avez dit que c'est un point que le comité devrait examiner.

M. Minto: Mon collègue a expliqué tout à l'heure les formules de planification fiscale qui s'offrent à la fiducie.

M. Campbell: Mais ces choses-là n'existent pas dans le vide, monsieur Minto. On imagine que ceux qui émigrent ailleurs y pensent. Mais pourquoi y voyez-vous une formule de planification fiscale, puisque si l'on compare le taux de l'impôt aux États-Unis, ce qui est le cas en l'espèce, dans la plupart des cas il est tout aussi élevé, voire plus.

M. Minto: Et si l'on déménage aux Bahamas? Si l'on s'en va dans un paradis fiscal?

M. Campbell: Mais si vous allez dans un paradis fiscal, nous pouvons percevoir l'impôt.

M. Elkin: Non.

M. Minto: Non.

M. Elkin: Pas si la transaction a été effectuée de la même façon, non.

M. Campbell: Et aux États-Unis, ce qui est le cas ici, selon vous, est-ce que l'impôt ne serait pas aussi élevé, voire plus?

M. Minto: Comme M. Dodge l'a dit l'autre jour, cela dépend de l'État en question.

M. Campbell: En général, est-ce que ce n'est pas aussi élevé, voire plus? Le savez-vous?

M. Minto: Est-ce que je sais quoi?

M. Campbell: Si le taux d'imposition aux États-Unis dans ce cas-ci est aussi élevé, plus élevé ou plus bas.

M. Minto: Monsieur le président, pour répondre à cette question il faudrait que je divulgue dans quel État le contribuable s'est installé, et je ne suis pas certain que je veuille le faire.

M. Campbell: Savez-vous que dans certains États l'impôt serait plus élevé?

M. Minto: Oui.

M. Campbell: Savez-vous que dans bien des États l'impôt serait le même?

M. Minto: Sur ce point, monsieur, mon témoignage est le même que celui de M. Dodge. Il a dit que dans certains d'entre eux, c'est plus élevé, dans d'autres plus bas, et dans d'autres le même.

M. Campbell: Très bien. Donc on ne sait pas, et je suppose que sur ce point, vous suivrez l'avis juridique qu'on vous a donné de ne pas révéler de quel État il s'agit, car cela pourrait être un autre renseignement susceptible de révéler l'identité du contribuable.

M. Minto: J'aimerais que vous reconsidériez la question.

M. Campbell: Je comprends. Mais je dis cela tout simplement parce que, encore une fois, il y a des gens qui tirent malheureusement des conclusions non fondées, à partir de cet exemple. Nous en avons discuté aujourd'hui. L'une de ces conclusions est que certaines personnes ne paieront pas d'impôts ou réussiront à en payer moins. Ces personnes ne paieront aucun impôt à qui que ce soit.

M. Loubier (Saint-Hyacinthe - Bagot): Au Canada.

M. Campbell: À toute équité, les gens se préoccupent des impôts au Canada également. Nous existons dans le monde, monsieur Loubier, et nous tentons d'encourager l'investissement au Canada. Il y a deux côtés à cette médaille.

Donc, dans certains cas, il serait assez bizarre, n'est-ce pas, si, après avoir fait cette planification fiscale, quelqu'un finissait par payer des impôts plus élevés aux États-Unis, ou les mêmes impôts.

M. Minto: Si nous pouvons tout simplement dire, pour ce qui est du cas hypothétique dont vous parlez... Je ne sais pas si cette fiducie est restée aux États-Unis. Nous ne savons pas si cette fiducie a quitté les États-Unis, ou dans quel État elle est allée, ni où elle est allée. Nous ne connaissons pas les autres circonstances du contribuable.

M. Campbell: Et la question de l'impôt successoral.

M. Minto: Question de l'impôt successoral? Selon la décision qui a été publiée, le ministère a déterminé que le contribuable était un enfant. Donc, je pense que l'impôt successoral viendra beaucoup plus tard.

M. Campbell: Mais ce serait un impôt additionnel...

M. Minto: C'est exact.

M. Campbell: ...qui viendrait s'ajouter à un impôt équivalent, plus élevé ou moins élevé dans cet État en particulier.

M. Minto: Il s'agit certainement ici de déterminer comment nous allons percevoir l'impôt. Le fait est que Revenu Canada n'a pas de système de surveillance pour savoir ce que fait le contribuable, quand est-ce que ce dernier va vendre sa propriété, quand est-ce qu'il va quitter les États-Unis. Alors comment peut-on percevoir l'impôt?

M. Campbell: Monsieur le président...

M. Tremblay: [Inaudible - La rédaction]

M. Campbell: Monsieur le président, monsieur Tremblay veut peut-être poser une question. Je ne sais pas exactement ce qu'il est en train de dire.

Le président: M. Tremblay a contribué de façon incroyable à la solennité de notre discussion.

M. Campbell: Oui, il nous a beaucoup aidés. Je suis certain que M. Tremblay aimerait ajouter quelque chose.

.1655

Monsieur Tremblay, vous avez la parole. Je vous cède le reste de mon temps. Peut-être voudrait-il poser une question plutôt que de tout simplement jacasser.

Le président: Je crois que M. Elkin aimerait répondre.

M. Elkin: J'aimerais apporter quelques petits éclaircissements au sujet d'un contribuable qui va s'établir ailleurs. Je conviens qu'il est possible qu'une personne soit obligée de payer un taux d'imposition plus élevé. Il ne fait aucun doute qu'il est possible de trouver des régimes où le taux d'imposition est plus élevé.

M. Campbell: Il y en a aux États-Unis.

M. Elkin: Oui, et je dirais également qu'en ce qui a trait aux États-Unis, personne n'a vraiment examiné si le contribuable était avantagé. Les fiscalistes m'ont dit qu'il pouvait arriver effectivement que les contribuables étaient avantagés et que leurs actifs étaient transférés aux États-Unis à leur juste valeur marchande. Donc, avec la différence entre le coût et la juste valeur marchande, personne n'est imposé là-dessus.

Il y a donc deux côtés à la médaille, mais encore une fois, ce que vous dites est tout à fait valable. C'est peut-être le genre d'analyse qu'on s'attendrait à voir.

M. Campbell: Monsieur le président, je suis membre de ce comité depuis deux ans, et habituellement les députés qui assistent aux délibérations sont des membres à part entière du comité, ou membres suppléants ou des invités, et ils sont habituellement assez courtois à l'égard des autres membres du comité pour faire leurs commentaires à voix basse, ou faire part de leurs commentaires à leurs collègues à voix basse de sorte que ceux qui ont la parole puissent poser leurs questions et les autres entendre les réponses. Ce n'est pas ce qui s'est passé ici aujourd'hui.

Le président: Excusez-moi, monsieur Campbell.

M. Campbell: En ce qui concerne M. Tremblay, il ne faisait pas cela auparavant.

Le président: En tant que président, je dois compter sur la courtoisie et les bonnes manières de tous les membres du comité. Je ne peux malheureusement jouer le rôle d'un parent ou d'un policier; j'aimerais bien pouvoir le faire.

M. Campbell: Moi aussi.

Le président: Avez-vous quelque chose à ajouter? Puis-je revenir sur ce que M. Campbell a dit? C'est une question supplémentaire.

Supposons que la fiducie qui a été déclarée bien canadien imposable n'est pas transférée aux États-Unis mais dans un refuge fiscal - disons les Bermudes - quel est le pouvoir du Canada en matière de récupération fiscale?

M. Elkin: Pour le Canada?

Le président: Oui.

M. Elkin: Le Canada n'aurait aucun pouvoir à cet égard d'après la décision selon laquelle, si mon interprétation est bonne, Revenu Canada a déclaré qu'il rendrait des décisions de cette nature sans engagement ni renonciation. Essentiellement, on a une situation où la fiducie qui se trouve aux Bermudes ou dans un autre pays, n'est pas un bien canadien imposable. Peu importe que la fiducie se trouve aux États-Unis ou ailleurs. La question est la suivante: est-ce un bien canadien imposable pour la fiducie qui l'a reçu?

Le président: La décision était qu'il s'agissait d'un bien canadien imposable.

M. Elkin: Non, ce n'était pas la décision. La décision n'a rien dit sur la question. Je suis d'accord avec vous lorsque vous dites que même si la décision ne mentionnait pas cette question, elle portait en fait sur cette question, ce qui va clairement à l'encontre de la politique publiée de Revenu Canada selon laquelle ce dernier ne rend pas de décision sur des transactions terminées.

Le président: Je dois entrer un peu plus dans les détails. Si j'ai bien compris, toute la décision dont vous vous plaignez est fondée sur le fait que les actions de la société publique sont classées comme biens canadiens imposables.

M. Elkin: C'était accepté comme un fait dans la décision.

Le président: Très bien. Si on part du principe que ce sont des biens canadiens imposables, alors si les actions ont été transférées aux Bermudes plutôt qu'aux États-Unis, qui est un pays signataire du traité, ne s'agit-il pas alors de biens canadiens imposables?

M. Elkin: Non, la décision disait qu'ils étaient des biens canadiens imposables pour la fiducie canadienne, non pas pour la fiducie non résidente. Ils n'ont pas accepté cela. Lorsque l'engagement...

Le président: L'ont-ils rejeté?

M. Elkin: Je n'en ai aucune idée. Tout le monde était silencieux sur cette question.

Le président: Un instant. Vous dites que les hauts fonctionnaires de Revenu Canada, dans leur évaluation, ne rendraient pas la même décision sur la même question? Ils diraient que ce sont des biens canadiens imposables dans un cas mais pas dans un autre?

M. Elkin: Je peux vous dire, monsieur, que j'ai soulevé la question avec les spécialistes techniques de Revenu Canada. Je ne me rappelle pas exactement quand, mais c'était un mois ou deux avant le dépôt du rapport. Voici quelle a été leur réponse. Tout d'abord, ils ont répondu à cette nouvelle question que vous soulevez. Qu'est-ce que cela signifie? Si j'ai bien compris, c'est une question qui n'a pas été abordée au moment où la décision a été rendue.

Le président: Eh bien, je ne peux imaginer que nos représentants de Revenu Canada aient dit que ces actions dans une société publique étaient des biens canadiens imposables et qu'ils aient dit ensuite le contraire. Si d'après votre expérience vous constatez qu'ils faisaient ce genre de chose, alors j'aimerais que vous me donniez davantage de détails sur ce sujet.

M. Elkin: Ce qui s'est passé, monsieur, c'est que tout le monde a été prudent. Le contribuable voulait que dans la décision, la fiducie canadienne soit considérée comme des biens canadiens imposables. C'est parce qu'une fois qu'elle est considérée comme des BCI, la liquidation peut se faire en franchise fiscale en vertu du paragraphe 107(5). Donc, le contribuable a spécifié dans son engagement qu'il donnait son engagement à condition que dans la décision on considère qu'il s'agit d'un BCI.

.1700

Lorsque les représentants de Revenu Canada ont conseillé verbalement le contribuable, d'après les notes que j'ai de cette rencontre, ils ont dit qu'ils accepteront que les actions de la fiducie familiale, de la fiducie canadienne, soient considérées comme des BCI à condition qu'il fournisse une renonciation et un engagement. Mais techniquement, aucune décision n'a été rendue sur cette question; cela a été accepté comme un fait.

Le président: Si c'est un bien canadien imposable dans un cas, ce doit l'être dans l'autre. Je ne vois pas pourquoi la situation ne serait pas la même.

M. Elkin: Monsieur, le paragraphe 85(1)(i) dit que...

Le président: Alors qu'est-ce que ce bien canadien imposable?

M. Elkin: C'est le cas pour le contribuable qui a fait la conversion. La fiducie qui en était bénéficiaire n'a pas fait la conversion.

Si vous voulez aller plus loin, disons que j'ai fait la conversion. Je possède maintenant des actions dans une entreprise cotée en bourse et disons qu'elles sont des biens canadiens imposables. Je les mets sur le marché. Je veux m'en débarrasser. Tout le monde ici achète de ces actions. S'agit-il de BCI pour tout le monde autour de cette table? Je doute fort, monsieur, que vous oseriez proposer une loi en ce sens.

Le président: Eh bien, vous soulevez là un nouvel argument technique que j'ai beaucoup de mal à accepter à première vue.

M. Elkin: Je peux vous l'expliquer en détail.

Le président: J'aimerais bien que vous me fassiez un petit texte là-dessus parce que nous allons bientôt ajourner.

M. Elkin: Revenu Canada dispose de la correspondance que nous avons échangée à ce sujet.

M. Desautels: Nous pouvons vous donner un exposé sur cette question, monsieur.

Le président: C'est une bonne idée.

[Français]

M. Loubier: Mon collègue a demandé la parole.

Le président: Je le sais; je la lui accorderai.

[Traduction]

Je lui transmettrai les meilleurs voeux du comité. Je vais demander à M. Tremblay de ne pas parler pendant que vous parlez, monsieur Pomerleau. À tout le moins il a un bon sens de l'humour lui.

J'aimerais bien avoir quelque chose par écrit pour que nous puissions voir ce que c'est. Mais j'accepte mal qu'on admette cela pour une chose et pas pour une autre. De toute façon, merci.

M. Williams m'a donné avis plus tôt qu'il avait une motion. J'ai également reçu plus tôt un avis de motion de M. Loubier, ainsi que celui de M. Pomerleau.

[Français]

Vous voulez poser une question?

M. Pomerleau (Anjou - Rivière-des-Prairies): Je voudrais surtout présenter la motion et commencer à en parler.

Le président: J'aimerais d'abord donner la parole à M. Williams pour qu'il présente sa motion.

[Traduction]

M. Williams: Merci, monsieur le président.

Pour que cela soit mentionné clairement dans le procès-verbal, je propose que les divers articles de la Loi de l'impôt, dont le paragraphe 107(5), dont nous avons discuté cet après-midi et dont j'ai annexé copie à la brève note que je vous ai remise, soient ajoutés au procès-verbal comme si on les avait lus. Cela comprend aussi l'article 13, les articles 3, 4 et 5 de la Convention entre le Canada et les États-Unis en matière d'impôt sur le revenu et la fortune de 1980.

[Français]

M. Loubier: Pas de problème.

[Traduction]

Le président: Puis-je vous demander de ne pas citer les articles au complet, mais seulement les passages pertinents...

M. Williams: Les articles pertinents.

Le président: ... et les passages des articles qui concernent votre exposé...? Acceptez-vous cet amendement?

M. Williams: Oui.

La motion est adoptée

Le président: D'accord. Le comité accorde son consentement unanime. Merci, monsieur Williams.

[Français]

Monsieur Pomerleau.

M. Loubier: Avons-nous donné notre consentement?

M. Pomerleau: J'aimerais proposer une motion qui ressemble à celle qu'on a déjà présentée et ensuite la commenter, si vous m'accordez un peu de temps.

Je propose que le président du Comité permanent des finances soit mandaté pour entreprendre des démarches auprès du Comité permanent des comptes publics afin que ce dernier fasse une enquête plus approfondie, comme c'est son rôle, sur les cas particuliers de 1985 et 1991, tels que décrits par le vérificateur général et qui ont fait en sorte qu'un ou des résidents canadiens ont pu se prévaloir de la notion de biens canadiens imposables pour éviter le paiement de taxes sur les gains de capital sur un montant de deux milliards de dollar transféré aux États-Unis et que le Comité permanent des finances, tel que précisé dans le mandat que lui a confié le ministre des Finances,

[Traduction]

faire un examen et recommander des politiques concernant l'imposition des gains des non-résidents sur les biens canadiens et le traitement des immobilisations appartenant à des immigrants au Canada et à des émigrants du Canada.

.1705

[Français]

C'est la motion que je présente. Je désire parler brièvement de sa raison d'être.

Nous nous retrouvons présentement face à une décision anticipée dont on parle depuis déjà plusieurs jours. On a assez bien fait le tour de la question. Des irrégularités ressortent clairement de ce dossier.

D'abord, il n'existe aucun dossier appuyant la façon dont la prise de décision a été faite; compte tenu de la procédure habituelle, c'est tout à fait inusité. Le ministère du Revenu nous dit qu'il se repose sur des analyses du ministère de la Justice qui, à son tour, se repose sur des analyses du ministère des Finances.

Le président: Votre motion a-t-elle été appuyée?

M. Loubier: Oui, je l'ai appuyée.

Le président: D'accord. C'est maintenant matière à discussion.

M. Pomerleau: Oui.

Le président: Excusez-moi, mais j'ai l'impression que c'est la même motion que ce matin.

M. Loubier: Non, elle a été modifiée.

Le président: Est-elle bien différente?

M. Loubier: Nous avons retiré les mots «le président». Il y a eu une modification. Elle n'est pas pareille à celle de ce matin.

Le président: Puis-je demander à la greffière si, en substance, c'est la même motion?

M. Loubier: C'est selon les règles.

La greffière du comité: En substance, c'est la même motion.

[Traduction]

Le président: Selon notre greffière - et je ne peux qu'approuver la suggestion qu'elle me fait - c'est en substance la même motion qui a été votée ce matin et qui a été déposée par vous.

[Français]

M. Loubier: Non, ce n'est pas la même.

M. Pomerleau: Nonobstant ce fait, je demande la permission de la présenter à nouveau s'il y a consentement unanime.

[Traduction]

Le président: Y a-t-il consentement unanime pour qu'il la dépose de nouveau?

Des voix: Non.

M. Campbell: Nous avons discuté de cela ce matin.

[Français]

M. Pomerleau: J'en ai parlé ce matin et j'aurais aimé commenter sa raison d'être parce qu'on a fait un bout de chemin dans l'analyse de ces dossiers depuis ce matin. Nous nous retrouvons devant de plus en plus d'ambiguïtés et d'irrégularités; il faut aller au fond des choses.

M. Loubier: Ils ont trop de choses à cacher.

[Traduction]

Le président: Je ne veux pas couper la parole à qui que ce soit, mais je sais que notre séance ici doit se terminer à 17 heures et que nous avons un vote à 17 h 30.

Combien longtemps comptez-vous discuter de cela? On vous permettra peut-être de faire une déclaration.

[Français]

M. Loubier: Si on ne peut pas discuter de la motion, on se reprendra un jour sur le fond. J'aimerais vous demander que lors de la prochaine réunion, au lieu d'analyser le projet de loi C-36, nous convoquions à nouveau les hauts fonctionnaires du ministère du Revenu et du ministère des Finances, parce que nous avons beaucoup de questions à leur poser sur la façon de modifier la politique fiscale afin que des cas semblables à ceux de 1985 et 1991 ne se produisent plus. Accordez-nous au moins la possibilité d'entrer dans notre mandat!

[Traduction]

Le président: C'est une nouvelle motion.

[Français]

M. Loubier: Non, ce n'est pas une motion.

Le président: Une suggestion.

M. Loubier: Je parle de l'ordre du jour des travaux du comité.

M. Tremblay: Avec beaucoup de courtoisie.

M. Loubier: Oui, je l'ai fait.

[Traduction]

Le président: Seulement parce qu'on m'a demandé de répondre à une motion qui nous a été présentée, monsieur Pomerleau, et je ne vais pas couper la parole aux membres du comité...

[Français]

Je ne veux pas couper la parole aux députés qui aimeraient parler.

M. Loubier: Oui, mais vous avez tranché, monsieur le président. Vous avez dit que la motion était conforme à celle présentée ce matin et que nous ne pouvions pas la présenter à nouveau. Alors, c'est réglé dans notre tête. Nous la mettons de côté.

Le président: D'accord.

M. Loubier: Je vous pose une question relativement à l'ordre du jour du comité.

À la lumière de ce qui s'est dit ici et dans le cadre de notre mandat - dois-je vous vous rappeler le mandat que nous a donné par le ministre des Finances - , peut-on faire venir à nouveau les hauts fonctionnaires pour leur demander de nous rendre des comptes et de nous indiquer de quelle façon on pourra éviter qu'ils prennent des décisions aussi débiles que celles qu'ils ont prises en 1991? Est-ce qu'on peut avoir votre assurance à cet égard?

[Traduction]

Le président: Monsieur Campbell.

M. Campbell: Nous voulons tous agir. Nous sommes tous heureux que le ministre des Finances nous ait confié ce mandat. Je crois d'ailleurs que c'est M. Minto aujourd'hui qui, il y a quelques instants, a dit que nous avions parfaitement raison de penser que pour comprendre ce qui aura besoin d'être fait à l'avenir, il nous faut faire un retour en arrière et savoir comment la loi a été interprétée. J'y vois donc un lien direct, comme je l'ai dit ce matin.

Quant à la proposition visant à réserver une autre séance pour continuer d'interroger les fonctionnaires, je ne suis pas d'accord, monsieur le président. Nous avons prévu une séance demain pour commencer notre étude du projet de loi sur les mesures fiscales de 1995, que nous attendons depuis longtemps, et pour interroger les fonctionnaires.

.1710

Parmi les choses...

M. Loubier: [Inaudible - La rédaction]

M. Campbell: Pardonnez-moi, monsieur Loubier. J'aimerais terminer. On aura le temps. On a le temps d'en parler ici.

Monsieur Loubier s'est plaint plus tôt du fait que nous n'avons pas assez de pain sur la planche. Et maintenant, au moment où nous avons des tas de choses à faire, il veut s'en tenir à une seule, ce qui est un peu injuste à mon avis, sachant tout ce qui nous attend.

Nous allons entendre les fonctionnaires demain. C'est la séance qui a été prévue. Tout est organisé pour demain. Il nous tarde tous d'entendre les hauts fonctionnaires de nouveau. Le témoignage d'aujourd'hui a soulevé de nouvelles questions.

Je pense que nous devons aussi entendre des experts de l'extérieur. J'ai la certitude que les membres du comité vous proposeront, à vous monsieur le président, ou à la greffière, des noms de personnes qui pourraient parler de cette question. Nous aurons beaucoup de temps ce mois-ci pour étudier cette question et faire les autres travaux qui nous attendent.

[Français]

Le président: Monsieur Loubier.

M. Loubier: Monsieur le président, d'une part, vous êtes en train de me dire que les députés libéraux du Comité permanent des comptes publics refusent de se pencher sur le chapitre 1 du rapport du vérificateur général et sur les deux décisions rendues en 1985 et 1991 qui ont conduit à des transferts de deux milliards de dollars sans impôt.

D'autre part, si nous ne creusons pas davantage la question, jamais on ne reparlera des cas de 1985 et 1991, jamais on ne fera la lumière sur des scandales au sujet desquels plusieurs questions subsistent, auxquelles on n'a obtenu quelque réponse que ce soit des hauts fonctionnaires, et on va laisser passer ces choses-là. Des décisions prises en 1991 n'ont été publiées qu'en mars 1996. On a caché des choses à la population. Vous croyez que ça va s'arrêter là?

Êtes-vous en train de nous dire que notre Comité permanent des finances poursuivra son programme comme si on avait élucidé le cas soulevé par le vérificateur général et fait toute la lumière, alors que se sont produites des aberrations mentales comme celles qu'on soulève depuis un mois?

On va commencer à croire que vous nous cachez des choses et que vous essayez de protéger des gens, des intérêts, peut-être vos chums. Ça pue. Je vous dirais que ça sent terriblement le scandale. Pourquoi ne voulez-vous pas faire la lumière? Est-ce terminé? On ne parlera plus jamais du cas du chapitre 1 du vérificateur général?

M. Pomerleau: C'est terminé?

M. Loubier: Il y a un scandale, ce scandale se poursuit année après année et on n'y touche plus? C'est incroyable!

[Traduction]

M. Campbell: Monsieur le président, si l'on vient de donner à entendre, après ce que j'ai dit, que nous en avons terminé avec ceux-ci, je ne suis pas d'accord. Ce que j'ai dit c'est que pour prédire l'avenir et nous acquitter du mandat qui nous a été imparti et qui consiste à déterminer si nos lois sont suffisantes, il nous faut savoir ce qui s'est fait par le passé et comment la loi a été interprétée. Les témoins que nous avons entendus aujourd'hui nous ont fait comprendre beaucoup de choses. Ils nous ont été utiles, et ils ont très bien répondu à mon avis aux questions très précises que nous leur avons tous posées.

Pour faire des recommandations ici, il est essentiel de comprendre ce qui s'est fait les premières années. Je ne comprends pas pourquoi nos amis d'en face ne sont pas d'accord, comment l'on peut dire que ce qui s'est fait autrefois n'a aucun rapport avec ce que nous faisons aujourd'hui et les recommandations que nous allons faire pour l'avenir.

Le président: Monsieur Tremblay.

[Français]

M. Tremblay: M. Campbell disait que nous disposions de beaucoup de temps d'ici la fin du mois pour continuer à travailler sur cette question. Est-ce qu'on pourrait savoir quand?

Le président: À mon avis, aussi vite que possible.

M. Tremblay: Est-ce que M. Campbell peut me répondre?

[Traduction]

M. Campbell: Tout d'abord, monsieur le président, je ne sais pas combien il y a de députés de l'opposition ici aujourd'hui, mais je serais heureux de répondre à M. Tremblay parce que, pour la première fois, il a attendu que je finisse pour me poser une question et ne m'a pas interrompu. Je serais très heureux d'y répondre.

Il appartient au président et au comité directeur de déterminer le calendrier du comité. On a discuté ici - monsieur Tremblay n'y était pas ce jour-là - de ce que nous ferions au cours du mois de juin. Notre comité a reçu plusieurs mandats. Monsieur Tremblay n'est pas membre permanent du comité, alors je vais lui dire ce qu'il en est.

On nous a demandé d'étudier la Loi sur les mesures spéciales d'importation; nous allons commencer bientôt. Il y a d'autres lois que nous devons étudier ou que nous allons recevoir bientôt. Nous avons ce problème-ci, et il nous reste trois semaines avant que la Chambre ajourne pour l'été. Les personnes ici présentes - je ne sais pas si M. Tremblay veut être des nôtres - ont dit qu'elles seraient disponibles cet été pour poursuivre ce travail si nécessaire.

.1715

[Français]

M. Tremblay: Alors, si je comprends bien, bien que M. Campbell ait affirmé que nous avions plein de temps pour étudier ça d'ici la fin juin, il ne savait pas exactement quand ni de combien de temps nous disposions.

Une voix: Ils ne savent pas où ils s'en vont.

[Traduction]

M. Campbell: Si M. Tremblay a des témoins à proposer, qu'il vous fasse ses suggestions.

[Français]

Le président: Je proposerais que le comité directeur organise les prochaines réunions et convoque les témoins. Il pourrait le faire samedi, dimanche, lundi ou mardi...

M. Loubier: Il est parti pour parler en fou. Allons-nous convoquer une réunion du comité directeur et parler de choses sérieuses une fois pour toutes? Arrêtez de faire le clown aujourd'hui.

Le président: Excusez-moi.

M. Loubier: Comportez-vous comme un vrai président. Si vous n'êtes pas capable de vous acquitter de vos fonctions, donnez votre place à quelqu'un d'autre, c'est tout. C'est bien simple: si vous n'êtes pas capable de présider, sans faire preuve de cynisme ou d'irrespect pour les collègues et les représentants du vérificateur général, laissez votre place à quelqu'un d'autre. C'est le message que vous nous livrez depuis ce matin.

Nous, on veut bien travailler, mais on veut travailler sérieusement, et on veut travailler pour éclairer la population et non pour cacher des choses à la population.

Il est évident que vous voulez retirer la question du chapitre 1 du rapport du vérificateur général de l'ordre du jour du Comité permanent des comptes publics et nous bâillonner ainsi, parce que vous ne voulez pas que nous parlions à nouveau aux hauts fonctionnaires qui prennent des notes depuis le matin en vue de mettre en boîte les gens du vérificateur général.

Il va falloir que la population le sache. Dites-lui que vous n'êtes pas intéressés à creuser davantage de tels cas et par la suite à être responsables face à la population de la répartition et de la gestion des fonds publics. Ça c'est une autre affaire. Mais il va falloir qu'on se le dise quelque part.

Je suis bien prêt à aller à une réunion du comité directeur et à planifier des ordres du jour tout de suite. On va commencer à travailler et à convoquer tous les fonctionnaires du ministère du Revenu et des Finances pour qu'ils viennent nous éclairer, pour qu'ils nous fassent d'autres suggestions que celle de proposer des lois pour éviter de répéter les mêmes conneries au cours des prochaines années. À un moment donné, ça suffit! On ne va pas supporter de se faire éternellement niaiser comme ça.

Alors, si vous êtes prêt, convoquons une réunion du comité directeur dès demain matin, parlons de l'ordre du jour, mais ne comptez pas sur ma collaboration.

Le président: Pourquoi pas maintenant?

M. Loubier: Vous n'aurez pas la collaboration de l'Opposition officielle lors de l'étude article par article des projets de loi qui s'en viennent tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas la garantie que les deux cas soulevés par le vérificateur général seront analysés dans le cadre d'une vraie commission d'enquête publique, que seul le Comité permanent des comptes publics peut tenir. Cela vous convient-il?

Le président: Ça va tout droit...

M. Loubier: C'est sérieux.

Le président: Ça va tout droit à votre but.

Nous avions suggéré de tenir deux réunions, une hier et celle d'aujourd'hui. Nous avons déjà adopté l'ordre du jour de demain et vous voudriez le changer. Y a-t-il un autre jour où vous aimeriez continuer ces discussions?

M. Loubier: Peu m'importe la journée choisie. Ce que mes collègues de l'opposition et moi voulons, c'est que le Comité permanent des comptes publics fasse la lumière sur les cas de 1985 et 1991 et que soit modifiée la politique fiscale pour éviter que se produisent de telles niaiseries au cours des prochaines années et pour qu'on fasse payer tous les contribuables. C'est ce qu'on veut.

Le président: Vous avez changé d'avis parce que la semaine passée, vous proposiez que seul le Comité permanent des finances prenne ce dossier en main.

M. Loubier: Non. Cessez de dire n'importe quoi. La semaine passée, je disais que le Comité permanent des finances et le Comité permanent des comptes publics ne devaient pas travailler parallèlement sur les mêmes sujets. Je proposais que le Comité permanent des comptes publics se penche sur les cas de 1985 et 1991 dont fait état le rapport du vérificateur général, et que notre comité recommande au gouvernement des modifications à la politique fiscale afin que de tels cas ne se produisent plus.

C'est ce que je vous ai dit. Si mes propos ne sont pas assez clairs, je peux les écrire. Je ne voulais pas que les deux comités travaillent en parallèle sur les mêmes questions; je voulais séparer les deux cas particuliers de la politique économique.

Le président: La semaine dernière, vous me demandiez ce qui adviendrait de cette question et suggériez que ce comité en soit saisi.

M. Loubier: La semaine dernière, c'était dans le cadre de l'invitation du vérificateur général, qui hésitait entre sa comparution devant le Comité permanent des comptes publics et sa comparution ici. Cessez de dire n'importe quoi. J'ai demandé dix fois que le Comité permanent des comptes publics analyse les deux cas et que nous nous chargions de l'analyse de la politique fiscale.

.1720

Le président: Nous avons rejeté votre motion, mais nous continuerons toutefois notre travail d'une manière assidue et ouverte relativement aux questions du vérificateur général.

[Traduction]

Monsieur Fewchuk.

M. Fewchuk: Monsieur le président, j'aimerais faire une suggestion aux personnes ici présentes. Nous avons ici de grands experts du ministère. Si nous, des adultes, devons tolérer ce genre de sottises et d'absurdités du Bloc... C'est très gênant. Je propose que l'on donne congé aux fonctionnaires, et nous pourrons alors rester ici quelque temps s'ils veulent faire leur numéro...

[Français]

M. Loubier: Vous êtes irresponsables.

[Traduction]

M. Fewchuk: ...comme une bande de fous qui essaient de représenter la province de Québec.

Merci.

Le président: Merci, monsieur Fewchuk.

[Français]

Monsieur Loubier, resterez-vous pour la réunion du comité directeur?

M. Loubier: Non, j'ai une autre réunion à mon horaire.

Le président: Excusez-moi, mais vous avez reçu quelque chose du greffier concernant...

M. Loubier: Non, absolument pas.

Le président: D'accord. À quelle heure demain?

M. Loubier: À 9 h.

Le président: Le comité directeur pourrait peut-être se rencontrer dans mon bureau à12 heures, immédiatement après les caucus.

M. Loubier: Parfait.

M. Campbell: Je préférerais que la réunion ait lieu l'après-midi.

Le président: À mon bureau à 15 heures, après la période des questions orales.

Monsieur Duhamel.

M. Duhamel: Cet après-midi, on a entendu parler d'accusations, de scandales, de protéger des gens, de cacher des choses... Pour ma part, je ne suis pas prêt à accepter que de telles accusations soient portées sans preuves. Je désire obtenir, pas nécessairement aujourd'hui mais d'ici peu, un avis juridique sur la responsabilité des gens qui portent de telles accusations sans preuves. Nous n'avons pas besoin de venir ici et de subir les abus de qui que ce soit. Si on a des preuves, qu'on les mette sur la table. Si on n'en a pas, qu'on se la ferme.

Le président: M. Loubier a l'habitude d'agir ainsi; bien que j'y sois assez habitué, je partage votre honte.

M. Tremblay: Monsieur le président, vous avez beaucoup de décorum et savez très bien queM. Duhamel est un parlementaire de longue date qui connaît très bien les règles de fonctionnement des comités.

M. Duhamel: Me dites-vous alors qu'on peut faire des accusations sans preuves?

M. Pomerleau: On voudrait faire la lumière sur ces deux cas.

Le président: Pourrais-je suggérer qu'on poursuive cette question demain?

[Traduction]

Je remercie nos témoins, dont le temps est si précieux.

La séance est levée.

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