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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 7 novembre 1996

.0937

[Traduction]

La présidente: La séance est ouverte.

Hier, vous le savez, nous n'avons pas pu enregistrer les exposés de M. Ménard et deMme Meredith, mais Jamie a pris des notes très détaillées, qui seront retranscrites, imprimées et mises à la disposition des membres.

Aujourd'hui, tout est revenu à la normale, puisque les délibérations sont enregistrées.

M. Gallaway est là pour faire un exposé, et il a été demandé à M. Bryden s'il pouvait reporter son intervention jusqu'à aujourd'hui.

Monsieur Bryden, avez-vous assez de temps pour attendre que M. Gallaway ait fait son exposé?

M. John Bryden (député d'Hamilton - Wentworth): S'il n'est pas trop long, je vais attendre. Ce qu'il a à dire m'intéresse de toute manière, mais je vais me boucher les oreilles.

La présidente: Vous êtes vraiment intéressé.

Allons-y, monsieur Gallaway, éblouissez-nous.

M. Roger Gallaway (député de Sarnia - Lambton): Merci, madame la présidente, de m'avoir invité à témoigner dans le cadre de votre étude sur les mesures d'initiative parlementaire qui font l'objet d'un vote.

Je crois que, si nous améliorons la procédure qui régit les mesures d'initiative parlementaire, l'institution parlementaire acquerra une nouvelle pertinence aux yeux des électeurs. Les électeurs ne tiennent pas toujours les députés en très haute estime, mais mon propos n'est pas de disserter sur les causes de cet état de choses.

Je dirais que, si les députés n'ont pas une cote de respect très élevée dans les sondages d'opinion, c'est notamment parce que la plupart d'entre nous travaillent dans une relative obscurité. Il est assez rare qu'un député occupe l'avant-scène pour avoir accompli quelque chose de constructif comme «législateur».

La présidente: Ou devienne l'enfant chéri des compagnies de câblodistribution...

M. Gallaway: Lorsque cela se produit, par exemple lorsqu'une mesure d'initiative parlementaire franchit un obstacle de taille à la Chambre ou devant un comité, on s'aperçoit soudain que les députés, même pris individuellement, peuvent accomplir quelque chose à Ottawa. Cette perception, dans ces cas rares, ne profite pas uniquement au parrain du projet de loi ou à l'auteur de la motion, mais aussi à l'institution qu'est le Parlement.

Les Canadiens élisent des députés fédéraux non seulement pour qu'ils transmettent leurs vues à Ottawa, mais aussi dans l'espoir qu'ils auront une certaine influence sur le cours des choses pendant leur mandat. L'une des façons de faire bouger les choses, c'est de proposer des mesures législatives.

Pour la plupart d'entre nous qui ne faisons pas partie du Cabinet, les mesures d'initiative parlementaire sont le seul moyen de répondre à cette attente.

J'ai eu la chance, récemment, de faire adopter un projet de loi par la Chambre, et je puis vous assurer que ce n'est pas une sinécure que de légiférer depuis l'arrière-ban. La plupart d'entre nous le savent. Lorsqu'un député veut faire adopter un projet de loi, les embûches et les obstacles en matière de procédure ne manquent pas. Il ne manque pas non plus d'obstacles politiques.

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Voilà pourquoi je suis ici aujourd'hui, pour exhorter les membres du comité à lever un de ces obstacles, un seul, en faisant en sorte que tous les projets de loi des députés puissent faire l'objet d'un vote. Votre comité conserverait le pouvoir de statuer sur la recevabilité de chaque projet de loi. Je ne vois pas pourquoi tous les projets de loi, une fois reçue votre approbation, ne devraient pas être présentés automatiquement à la Chambre et soumis au vote.

Agir autrement, c'est simplement perdre du temps et gaspiller les ressources limitées qui sont mises à la disposition des députés pour rédiger et préparer les projets de loi. Je tiens à insister sur l'élément temps. Il est tellement inconcevable qu'on puisse en ce moment choisir si un projet de loi fera ou non l'objet d'un vote, qu'il est tout simplement injuste d'empêcher qu'un projet de loi ne soit soumis au vote.

Je me rends compte que modifier le Règlement en ce sens vous obligerait à apporter d'autres modifications pour faire face à l'augmentation de la durée des délibérations nécessaires pour mettre aux voix toutes les mesures d'initiative parlementaire. Peut-être y aurait-il lieu de ramener de 30 à 20 le nombre de mesures inscrites à l'ordre de priorité. Je laisse aux spécialistes de la procédure le soin d'y réfléchir et de trouver une solution.

Je voudrais vous dire un mot d'une proposition que le greffier de la Chambre, M. Marleau, a faite lorsqu'il a comparu devant vous, le 29 octobre. Si j'ai bien compris, le projet de loi d'initiative parlementaire pourrait être remplacé par une motion portant qu'un comité rédige le projet de loi et en fasse rapport à la Chambre. Je signale que cette procédure est déjà prévue à l'alinéa 88(4)b) du Règlement. Je l'ai même invoquée pour présenter la motion M-271, concernant la création d'un office de défense des consommateurs à l'intention des clients des banques. Ce n'est rien de nouveau. Cette disposition est l'outil législatif idéal pour défendre le principe mis de l'avant dans la motion M-271, mais je ne voudrais pas que les députés perdent la possibilité de présenter des projets de loi directement à la Chambre.

Entre autres choses, lorsqu'on recourt à des motions, celles-ci peuvent être interprétées de telle façon par les comités ou d'autres instances qu'elles deviennent plutôt des énoncés d'intention ou de principe, alors que, dans un projet de loi, on peut proposer un libellé extrêmement précis.

En ce qui concerne l'étude des projets de loi d'initiative parlementaire à l'étape du comité, après la deuxième lecture, il serait bon d'y procéder sans tarder.

Certes, comme on le répète sans cesse à la Chambre, les comités sont les maîtres de leurs propres délibérations. On nous dit que, pour l'essentiel, ils sont libres d'élaborer leur procédure et leur programme. Mais nous savons également qu'il existe des moyens d'obliger les comités à faire diligence dans l'examen des mesures d'initiative ministérielle.

Je recommande que chaque comité se dote d'un mécanisme du même genre aux fins de l'étude des mesures d'initiative parlementaire. Cela pourrait se faire au début de chaque session, parfois deux fois par année. Cette procédure ou cette politique obligerait le comité à examiner rapidement non seulement les affaires d'initiative gouvernementale, mais aussi les mesures d'initiative parlementaire.

À ce propos, j'ai déposé il y a quelque temps au Comité de la justice une motion qui a été adoptée. Elle oblige ce comité à revoir tous les mois les mesures d'initiative parlementaire qui lui ont été renvoyées et sont en attente.

Si une mesure est renvoyée au comité, à la première séance du mois, lorsque la Chambre siège, le comité l'inscrit à son ordre du jour. Nous permettons à l'auteur de se présenter au comité et d'expliquer directement aux députés en cinq minutes pourquoi il faudrait étudier sa mesure immédiatement.

À son tour, le comité répond au parrain du projet de loi. Cela rappelle à tous les membres du comité que nous avons des mesures d'initiative parlementaire en attente, même si nous ne nous en occupons pas nécessairement. Cela nous force à faire place à ces mesures dans le programme de travail du comité.

Je siège au Comité de la justice depuis environ deux ans. Au cours de la première session, un certain nombre de projets de loi d'initiative parlementaire sont restés en plan. Ils nous avaient été renvoyés et étaient en attente. La plupart des membres du comité, mis à part ceux qui faisaient partie du comité directeur, ne savaient même pas que ces projets de loi leur avaient été renvoyés. Il n'y avait pas non plus de rappel quotidien ou mensuel de l'existence de ces mesures.

Ce n'est pas juste. C'est même absolument condamnable, et non seulement sur le plan politique, car certaines de ces mesures devraient être considérées comme apolitiques... Les comités permanents sont maîtres de leur procédure. Si on procédait de cette manière, ils seraient obligés d'étudier ces mesures d'initiative parlementaire. Agir autrement, cela reviendrait à dire, et cela s'est dit, que les mesures d'initiative parlementaire viennent au second plan, voire au troisième plan, après les mesures d'initiative ministérielle.

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C'est tout ce que j'avais à dire. Je vous remercie de m'avoir accueilli. Je me ferai un plaisir de répondre aux questions, s'il y en a.

La présidente: Monsieur Gallaway, je profite de ce que j'ai les faits bien présents à l'esprit pour vous poser quelques questions rapides. Val Meredith était parmi nous hier. Elle a les mêmes préoccupations que vous: lorsque des mesures sont renvoyées à un comité, il arrive qu'on les perde carrément de vue. Nous ne savons même plus qu'elles sont là. Elle a proposé que nous imposions un délai de six mois, puisque, une fois un projet de loi adopté à la Chambre, ce n'est plus le projet d'un député, mais celui de la Chambre...

M. Gallaway: C'est juste.

La présidente: ... et on devrait selon elle lui accorder autant d'importance qu'à un projet de loi du gouvernement. Elle est raisonnable, car elle fait remarquer que des projets de loi urgents du gouvernement peuvent avoir priorité. Cependant, une fois les six mois écoulés, elle estime que le comité devrait faire rapport à la Chambre pour dire pourquoi le projet de loi n'a pas été étudié.

Votre idée de rappeler aux députés les projets de loi en attente en revenant sur le programme chaque mois semble un bon moyen d'appliquer sa proposition et de faire avancer les choses. Quels autres moyens pourrions-nous prendre, selon vous, pour que tous les comités agissent de la même manière? Les choses se passent ainsi au Comité de la justice en ce moment, mais, que je sache, aucun autre comité ne fait la même chose.

M. Gallaway: Ce qu'il faut probablement, au fond, c'est que les députés soient conscients qu'ils peuvent procéder de cette manière. L'idée d'un délai maximum de six mois n'est pas mauvaise, mais six mois, au Parlement, cela peut faire la différence entre faire étudier son projet de loi ou se résigner à ce qu'il reste en plan, comme cela s'est produit récemment à cause de la prorogation de la session.

Je ne m'oppose pas à l'imposition du délai de six mois, mais je préfère l'idée d'une revue mensuelle des mesures au programme. Si les députés savent qu'un projet de loi est en attente, que le comité en est saisi ou devrait l'être, et s'ils se doutent qu'une prorogation risque de venir, ils voudront peut-être étudier le projet de loi.

Il y a un autre aspect au problème, d'après mon expérience au Comité de la justice. Au cours de la première session, nous n'avons pas étudié les mesures d'initiative parlementaire, même si un grand nombre nous ont été renvoyées. Nous nous sommes fait dire souvent que ce n'était pas la peine de les étudier parce que le gouvernement allait proposer sous peu une loi sur la même question.

Je comprends que les comités doivent donner la priorité aux mesures ministérielles, mais je ne pense pas que les mesures d'initiative parlementaire devraient être laissées de côté simplement parce qu'un bureaucrate ou un ministre prétend que la question va être réglée au moyen d'un projet de loi du gouvernement. C'est une manière élégante de faire dérailler des mesures d'initiative parlementaire, de leur refuser la priorité.

Selon moi, chaque comité peut s'occuper de toutes ces questions s'il souhaite le faire. C'est là le problème. Certains comités ont beaucoup de temps, mais ils ne veulent pas étudier les mesures d'initiative parlementaire.

La présidente: Vous avez abordé autre chose, et mon travail de présidente de ce comité est en cause - nous sommes impartiaux. Notre comité est composé de représentants des trois grands partis. Nos recommandations vont se heurter contre un mur si nous ne trouvons pas le moyen de les rendre plus attrayantes. À moins que nous ne rendions attrayant pour les pouvoirs en place quelque élément de chaque projet de loi pouvant faire l'objet d'un vote, je crains que notre proposition, que nos recommandations ne soient pas acceptées.

L'une des choses que nous avons envisagées... M. Marleau a avancé des idées très intéressantes. En ce moment, nous avons 1,5 million de dollars par an pour rédiger tous ces projets de loi. Il s'agit parfois de propositions un peu bancales, et je dois dire que certaines sont plus bancales que d'autres. Si nous pouvions créer une troisième catégorie, en quelque sorte... Je sais que le recours aux motions est une idée parmi d'autres. Un jour, nous pouvons penser que telle ou telle idée est géniale, nous adoptons la motion, et c'est très bien. Mais un projet de loi, c'est beaucoup plus précis. Il s'agit d'un texte législatif.

S'il existait une voie moyenne, permettant de rédiger un projet de loi, un texte qui n'est pas peaufiné, mais dont les grands paramètres sont arrêtés - je crois que M. Marleau a présenté les choses de cette manière - et s'il s'agit d'un vrai projet de loi... Il aura un effet sur la législation; le libellé sera établi avec précision, mais à la première présentation devant notre comité et à la première heure à la Chambre, il ne sera pas rédigé de façon aussi impeccable qu'à la fin du processus.

Je ne suis pas d'accord pour dire que la proposition devrait nécessairement être renvoyée au comité pour la rédaction d'un libellé précis. Il appartient selon moi au député qui parraine un projet de loi de le présenter dans la forme qu'il souhaite.

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Si l'idée est acceptée à la Chambre à l'étape de la première lecture, sans garantie - je peux voter en faveur à la deuxième lecture, mais voter contre lorsque je prends connaissance du texte définitif, parce que la traduction ne me plaît pas, peu importe la raison... Si nous pouvions au moins faire valoir aux pouvoirs en place qu'ils pourront réaliser des économies de 500 000 $ par année, nous aurons de bien meilleures chances de faire accepter notre recommandation. Je me sers là de tactiques politiques, mais à un niveau plus individuel.

À titre de juriste ayant des idées très particulières sur la rédaction de textes comme un projet de loi, je me demande s'il n'y aurait pas un moyen de trouver une recommandation de compromis disant que les motions demeurent ce qu'elles sont? La rédaction d'un texte préliminaire ou d'une ébauche de projet de loi ne prend pas tout le temps des légistes. Le texte est assez bien conçu, mais on y consacre moitié moins de temps. Une fois que le projet de loi est accepté par la Chambre, le député peut pleinement faire appel aux services législatifs pour peaufiner le texte selon ses voeux avant les autres étapes. Cela serait-il un compromis acceptable?

M. Gallaway: Je ne crois pas...

La présidente: Roger, vous venez de tout faire rater.

M. Gallaway: ... parce que, si j'ai bien compris la raison d'être de cette proposition, celle-ci est motivée entièrement ou partiellement par le fait que le fonctionnement des services des mesures d'initiative parlementaire coûte 1,5 million de dollars par année.

Il me semble que 1,5 millions de dollars, au Parlement...

La présidente: Ce n'est pas énorme.

M. Gallaway: Si votre objectif de départ est qu'il faut réduire du tiers les coûts de ce service et si vous soutenez en même temps le principe voulant que les mesures d'initiative parlementaire sont importantes ou devraient revêtir une plus grande importance, que vous trouvez-vous à faire? Je ne prétends pas qu'il faille injecter plus d'argent dans le service des mesures d'initiative parlementaire, mais je ne pense pas que ce soit contribuer à faire reconnaître les fonctions du député, quelle que soit son allégeance politique, que de dire qu'il faut réduire les coûts de ce service.

Sur la colline du Parlement, 500 000 $ ne sont rien lorsqu'il s'agit de la fonction législative, de la dignité et de l'importance du rôle de député. Il y a vraiment quelque chose qui cloche, si le facteur de motivation ici est de réduire certaines dépenses...

La présidente: Ne vous méprenez pas. Le but du comité n'est pas de réaliser des économies. Les politiques ne sont jamais ici pour économiser de l'argent. J'étais à la recherche d'un point de ralliement - j'essaie d'amener Jack à réagir; il est bien tranquille - pour rendre la proposition plus attrayante, pour que tous ces grands sages très augustes dont la réaction est de se caresser la barbe en disant: Jeune dame, vous avez là une idée... Nous cherchons un moyen de présenter la proposition sous un meilleur jour.

En fait, je me fie à votre opinion. Si vous croyez que cela ne doit pas faire partie de la proposition visant à faire en sorte que tous les projets de loi puissent faire l'objet d'un vote, j'accepte cette opinion. C'est pourquoi je vous pose la question. Je ne me range ni d'un côté ni de l'autre. Je proposais simplement une manière de dorer la pilule, de faire en sorte que, devant cette proposition, les autorités aient également l'impression d'y trouver leur compte.

Merci, Roger. Vous avez répondu à cette question.

M. Gallaway: Merci.

Y a-t-il d'autres questions?

[Français]

M. Langlois (Bellechasse): Merci beaucoup, madame la présidente. Monsieur Gallaway, votre exposé a été clair comme de l'eau de tuf, comme disait mon grand-père. En anglais, on devrait dire a crystal-clear presentation.

J'ai assisté aux efforts répétés que vous avez faits au Comité de la justice et des questions juridiques pour que le comité traite les projets de loi avec une certaine célérité, bien que sans précipitation, et j'ai constaté les résultats que vous avez obtenus. Le Comité de la justice n'est peut-être pas le plus empressé à prendre la voie des réformes et je vous félicite du succès que vous avez obtenu.

Je pense que cela peut nous servir d'indication sur les lignes directrices qu'on pourrait adopter ici, dans les règles de la Chambre qui concernent tous les comités, afin que ceux-ci étudient d'abord les projets de loi émanant des députés. Par la suite, ils feraient rapport à la Chambre qui, ultimement, a à se prononcer.

Je le mentionnais hier à un des collègues: il est extrêmement dommage de voir un projet de loi qui a été adopté en deuxième lecture... Peu importe qu'on l'ait approuvé ou non, lorsqu'un projet de loi a reçu l'assentiment de la Chambre et qu'il est envoyé à un comité, si quelques personnes refusent de le prendre en considération ou même refusent de faire rapport à la Chambre après l'avoir pris en considération parce qu'elles ont décidé de ne pas le retenir, elles devraient au moins en informer la Chambre.

Avant tout, cela m'apparaît comme une question de principe. Ce projet de loi appartient à la Chambre et la Chambre doit être ultimement celle qui, dans son ensemble, va se prononcer sur le projet de loi.

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Deuxièmement, je crois déceler dans votre présentation et dans ce que M. Ménard disait hier que pour avoir un projet de loi qui se tienne d'un point de vue juridique, on ne peut pas se contenter de déclarations d'intention.

Il n'aurait pas été possible de faire adopter votre projet de loi sur le negative billing en le fondant sur une proposition générale. Vous auriez alors eu un obstacle de plus à franchir. Vous avez dû probablement - nous en avons parlé hier ainsi que deux témoins - , au cours de la gestation du projet de loi, examiner les tenants et aboutissants de la finalité que vous recherchiez, c'est-à-dire empêcher les câblodistributeurs de faire du negative billing. Vous avez dû probablement faire un cheminement et voir avec les conseillers législatifs quels étaient les obstacles à écarter pour garder votre fil directeur.

Je ne suis pas sûr que vous auriez obtenu le même résultat en disant simplement que vous cherchiez à éviter le negative billing de la part des compagnies de câblodistribution. Sur ce point, je vous comprends bien et les témoins amenés par trois partis politiques différents disent exactement la même chose.

De plus, si vous désirez vous exprimer là-dessus, je vais vous poser une question grâce à l'esprit de tolérance de notre président.

J'étais opposé, en tant que député, à votre projet de loi sur le negative billing, mais maintenant qu'il a été adopté et qu'il est rendu au Sénat, comme je l'ai dit hier, ce projet de loi est devenu le projet de loi de toute la Chambre et les tentatives faites par des tiers, manifestement payés par une agence gouvernementale pour faire du lobbying auprès du Sénat, sont inacceptables et devraient retenir l'attention du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre.

J'aimerais connaître votre point de vue là-dessus. Comment vous sentez-vous après avoir eu à passer à travers tout le processus, après avoir préparé et peaufiné le projet de loi pour le rendre le plus acceptable possible, après avoir fait votre lobbying politique auprès de vos collègues et réussi à le rendre votable par le Comité, après l'avoir fait passer en deuxième lecture et fait étudier en comité, après qu'il ait subi la troisième lecture, après que le rapport ait été rédigé et ainsi de suite, quand vous voyez l'état où il en est? Comme parlementaire, j'aimerais avoir le sentiment de quelqu'un qui est dans le feu de l'action pour essayer de comprendre.

[Traduction]

M. Gallaway: Je vais commenter votre premier point, c'est-à-dire vos réflexions sur le rapport des projets de loi à la Chambre. Je dois avouer, non sans un certain embarras, à propos du projet de loi de Mme Jennings sur les droits des grands-parents et celui de M. Nunziata au sujet de l'article 745, qui ont été étudiés tous les deux par le Comité de la justice, que c'est moi qui, dans les deux cas, ai proposé qu'ils n'en soient pas fait rapport à la Chambre.

Je ne suis pas expert en procédure, mais le greffier a recommandé... La première fois que nous avons étudié le projet de loi de Mme Jenning, étant donné que tous les éléments de la mesure sans exception ont été rejetés, la seule issue, sur le plan de la procédure, était de proposer de ne pas faire rapport à la Chambre. S'il a raison, ce que je dois présumer, il y aurait lieu de modifier les règles pour que, même si un projet de loi est rejeté sur toute la ligne, il faille faire rapport à la Chambre et l'informer que le projet a été rejeté.

Un député chevronné m'a dit que le greffier avait tort. J'ignore qui a raison, mais ces gens sont là pour nous conseiller, et c'est le conseil qui a été donné au comité.

Il se trouve que c'est moi qui ai fait la proposition la première fois. La deuxième fois, c'est moi qui l'ai faite parce que j'étais le seul membre du comité qui avait été là la première fois. À ce sujet-là...

[Français]

M. Langlois: Monsieur Gallaway, si vous me le permettez, je vais vous interrompre pour deux raisons. Premièrement, le greffier nous dit qu'il est possible qu'un membre du comité fasse réinsérer tous les articles à l'étape du rapport même s'il ont été défaits en comité. Cela va exactement dans le sens de ce que vous dites. Deuxièmement, je devrai lire plus tard la fin de votre réponse, une fois transcrite, car j'ai, moi aussi, un projet de loi à aller déposer maintenant. Je vous lirai donc dans la transcription de la réunion d'aujourd'hui.

[Traduction]

M. Gallaway: D'accord.

Deuxièmement...

La présidente: Je voudrais répondre à la question même si M. Langlois est parti.

M. Gallaway: D'accord.

La deuxième partie de la question de M. Langlois portait sur les ingérences de l'extérieur, lorsqu'un projet de loi est étudié à la Chambre ou au Sénat. Bien entendu, nous avons affaire à des lobbyistes, et nous ne pourrons jamais rien y faire.

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Dans ce cas particulier, il fait allusion à l'apparente intervention d'un commissaire du CRTC lorsque le projet de loi était à l'étude au Sénat. Autrement dit, si je puis préciser, il s'agissait du vice-président du CRTC... Il a été appelé par un sénateur, qu'il a rencontré pour le conseiller sur un projet de loi à l'étude au Sénat.

Ma position est que les bureaucrates, ceux qui sont au service du gouvernement à des postes administratifs, ne peuvent pas donner des conseils en privé aux députés ou aux sénateurs.

M. Bryden: Excusez-moi. Je vais devoir vous quitter pour aller assurer le quorum. De toute évidence, ils ont du mal à l'obtenir. Je reviens tout de suite.

La présidente: D'accord.

M. Gallaway: Je ne vois pas comment on peut empêcher cela. Le problème, dans ce cas-ci, c'est que la personne en question a été nommée par décret du conseil, ce qui est fréquent par ici - ce n'est pas une critique - et la question est de savoir auprès de qui on peut se plaindre. Il s'agit d'une personne nommée par le Conseil privé, et on ne va pas se plaindre auprès du greffier du Conseil privé. Dans ce cas, la ministre dit que ce n'est pas de son ressort, mais l'organisme, c'est-à-dire le CRTC, ne répond pas, ne fait pas rapport à la Chambre.

Selon moi, un commissaire qui fait partie d'un organisme quasi judiciaire a commis une grave erreur. Il ne sait pas ce qu'il fait.

La présidente: Merci, Roger.

Monsieur Frazer.

M. Frazer (Saanich - Les Îles-du-Golfe): Merci, madame la présidente.

Je voudrais aborder quatre points, mais je ne crois pas qu'il faudra beaucoup de temps.

La présidente: Lorsque M. Bryden reviendra, je voudrais que nous lui consacrions au moins 20 minutes. Si vous pouviez vous en tenir à dix minutes, ce serait impeccable.

M. Frazer: Je vous promets de ne pas être long.

Tout d'abord, je tiens à vous féliciter de la décision prise par votre comité de revoir chaque mois les projets de loi d'initiative parlementaire. C'est une excellente idée. Ce que j'ai trouvé étonnant, c'est que les membres du comité ne soient pas informés, lorsqu'un projet de loi leur était renvoyé.

Si les députés suivaient le cheminement de toutes les mesures législatives, nous saurions que tel ou tel projet de loi a été renvoyé au comité. Il me semble que ce ne serait pas trop demander au greffier que d'informer chaque membre que le comité a été saisi de telle ou telle mesure. N'êtes-vous pas d'accord?

M. Gallaway: Absolument. Excellente idée.

M. Frazer: Vous avez dit qu'on évoquait la possibilité de projets de loi proposés par le gouvernement pour éviter d'étudier ceux des députés. Je me demande... Si on a une vague idée d'une mesure ministérielle imminente... Ne pensez-vous pas qu'il conviendrait de dire: « Si vous avez un projet de loi qui sera bientôt présenté, quel en est le numéro et quand sera-t-il présenté? » Est-ce que cette réaction ne serait pas raisonnable? Je suis conscient, bien entendu, que le gouvernement possède un grand pouvoir, mais est-ce que ce serait excessif de lui demander quelle est la mesure envisagée et quand elle verra le jour?

M. Gallaway: La question me paraît raisonnable, mais, de toute manière, à en juger par ma propre expérience, il arrive souvent que le gouvernement n'ait pas de projet de loi tout prêt. Il en a peut- être un quelque part, mais personne ne le voit jamais. C'est souvent un prétexte pour ne pas étudier le projet de loi d'un député.

M. Frazer: Exact.

M. Gallaway: J'estime que, en principe - et je ne vois pas comment on peut en faire une règle concrète - , le fait que le gouvernement envisage de proposer un projet de loi ou en ait même un de rédigé ne devrait pas empêcher l'étude des mesures d'initiative parlementaire.

M. Frazer: Pourtant, c'est l'un de nos 13 critères.

M. Gallaway: Effectivement.

La présidente: Nous pouvons les modifier, monsieur Frazer. Le comité a l'autorité voulue pour modifier ces critères.

M. Frazer: Exactement. Je me demande s'il conviendrait d'imposer des délais, en disant par exemple au gouvernement que, puisqu'il a un projet de loi en préparation, une mesure qui va dans le même sens, il a quatre mois pour présenter sa proposition? Est- ce que ce serait raisonnable?

M. Gallaway: Oui.

M. Frazer: Dernier point. Vous avez dit dans votre exposé, à propos de la priorité accordée aux projets de loi du gouvernement dans les comités, «je recommande que tous les comités se dotent d'un mécanisme semblable pour étudier les projets de loi d'initiative parlementaire».

Pouvez-vous préciser comment nous pourrions nous y prendre?

M. Gallaway: Je voulais dire que chaque comité peut adopter le même mécanisme que le Comité de la justice. Selon moi - et je suis comme tout le monde, puisque nous avons tous été élus à peu près à la même date - , l'objectif des comités est d'étudier tout d'abord les mesures d'initiative ministérielle qui lui sont renvoyées, et ensuite les mesures d'initiative parlementaire.

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J'ignore d'où cela peut venir, s'il s'agit d'une tradition du Parlement, dans les comités, ou s'il existe une règle écrite quelque part qui est le fondement de cette manière de procéder. Nous avons entendu, au cours de cette législature et de législatures précédentes, des ministres épouser des thèses voulant que les comités soient maîtres de leur destinée et, en tout cas, de leur procédure. Si les députés, à titre personnel - j'ai déjà parlé de la question - , quel que soit leur parti, sont le moindrement convaincus, premièrement, de la dignité des fonctions de député et, deuxièmement, de l'importance des mesures d'initiative parlementaire, il convient que, à titre de membres de comités, nous établissions une règle ou un mécanisme pour faire en sorte que, lorsqu'une mesure d'initiative parlementaire est renvoyée à un comité, tous les membres soient mis au courant et qu'ils aient le moyen de l'étudier rapidement.

Nous savons tous qu'il ne faut pas nécessairement s'en occuper le jour même du renvoi, ni même dans le mois suivant le renvoi, car le comité peut être occupé à autre chose pendant ce temps-là, mais, si nous nous dotons des moyens nécessaires pour au moins donner suite le plus tôt possible, nous disons à ceux qui ont beaucoup travaillé pour faire parvenir leur projet de loi à cette étape que nous reconnaissons la valeur de leur travail. On peut ne pas être d'accord sur le projet de loi, mais on est tout de même convaincu de la valeur de leur initiative et du rôle de député. En outre, chaque député en cause sera considéré comme un législateur et non comme un quidam qui a concocté une idée quelconque.

M. Frazer: Hier, Mme Meredith a lancé l'idée que les projets soient étudiés dans leur ordre de renvoi au comité. Elle a néanmoins concédé que, si le gouvernement avait un projet de loi prioritaire qui, pour des raisons évidentes, devait passer avant les autres, elle l'accepterait. Mais elle estime au fond que les projets de loi devraient être étudiés dans l'ordre où ils sont renvoyés au comité.

Souscrivez-vous à cette proposition?

M. Gallaway: Je ne crois pas. Selon moi, on ne peut pas ainsi contraindre le comité au point où il faut absolument examiner les mesures dans un ordre séquentiel particulier.

M. Frazer: J'en reviens donc à ma question. Comment s'y prendre pour donner un ordre de priorité aux projets de loi d'initiative parlementaire?

M. Gallaway: Il appartient au comité de décider.

Nous sommes aux prises avec toutes sortes de situations. Notre comité se réunit cinq fois par semaine, parfois plus. Il a une séance en ce moment même.

Si nous avons un projet de loi que nous pouvons expédier en deux jours, nous allons l'inscrire au programme et l'étudier. Un autre peut demander six semaines. Une fois l'étude amorcée, il faut jongler avec le temps du comité et les comparutions de témoins.

Dire que le comité doit étudier les projets de loi dans l'ordre d'arrivée...

Il peut arriver qu'un témoin ne puisse pas se présenter. Est- ce que cela doit interrompre le travail du comité? Non, il est impossible de procéder de cette manière.

M. Frazer: Je serais porté à être d'accord.

Au fond, cela dépend dans une grande partie du comité. Notre comité a beaucoup de chance parce qu'il a une excellente présidente et que notre greffier ne commet jamais la moindre erreur.

M. Gallaway: Je les connais tous les deux, et je suis tout à fait d'accord avec vous.

M. Frazer: Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci, monsieur Frazer. Je suis convaincue qu'il y a au moins une personne qui n'est pas d'accord avec vous.

Merci, Roger. Comme toujours, c'est très instructif.

M. Gallaway: Merci. Au revoir.

La présidente: Nous sommes heureux que vous soyez venu témoigner.

Monsieur Bryden, c'est votre tour.

Comme M. Langlois l'a dit, il lira votre exposé - il est très méticuleux - , il interviendra probablement de nouveau avant la fin de la séance.

M. Bryden: Je dirai d'entrée de jeu que je suis d'accord avec M. Gallaway en ce qui concerne l'importance de vos délibérations sur les mesures d'initiative parlementaire, et essentiellement pour les mêmes raisons que lui.

Mettons dès le départ que je suis profondément convaincu de la valeur de la démocratie fondée sur les partis. Selon moi, le régime démocratique fondé sur les partis est beaucoup plus efficace - au moins beaucoup plus honnête - que le processus parlementaire qui existe aux États-Unis, où les membres du Congrès ont beaucoup plus de latitude. La discipline de parti permet aux députés de résister au lobbying très intense qui se pratique souvent aux États-Unis.

Cela dit, la crédibilité des députés a souffert, ces vingt dernières années, à cause de la discipline rigoureuse qui a été imposée, surtout par des premiers ministres égocentriques. Je rangeraisMM. Mulroney et Trudeau dans cette catégorie. C'est donc une entreprise importante que de rétablir le crédit des mesures d'initiative parlementaire.

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Je suis tout à fait contre l'idée de faire en sorte que tous les projets de loi d'initiative parlementaire puissent faire l'objet d'un vote. Ce qui se passerait, selon moi, c'est que le système serait submergé par les projets de loi des députés, et il serait difficile de suffire à la tâche. Le pire se mêlerait au meilleur. Cela compromettrait la réputation de ce type d'initiative. Il y aurait perte de crédibilité pour les bonnes mesures qui sont adoptées, qui doivent se distinguer des propositions qui ne sont pas mûrement réfléchies.

Le premier tri des projets de loi d'initiative parlementaire se ferait en fonction du critère des nouvelles dépenses que les mesures peuvent entraîner. Je crois que, dans un régime démocratique fondé sur les partis, il faut donner au gouvernement le droit de présenter les mesures législatives qui entraînent de nouvelles dépenses.

C'est pourquoi on adopte chaque année une motion budgétaire. Les Canadiens, par l'entremise de leur Parlement, donnent au gouvernement le pouvoir de dépenser dont il a besoin pour appliquer de nouvelles lois. La première étape, donc, pour savoir si un projet de loi doit faire l'objet d'un vote ou non, est de vérifier s'il entraîne de nouvelles dépenses.

Cela peut vous sembler dresser une contrainte importante quant aux types de projet de loi que les simples députés peuvent présenter. Je vous répondrai que cela laisse d'énormes possibilités aux simples députés pour présenter des mesures législatives de très grande importance qui, on peut l'espérer, franchiront toutes les étapes. Je ne pense pas qu'il suffise que le projet de loi soit proposé à la Chambre, débattu puis renvoyé à un comité ou ailleurs. Si nous voulons que le rôle de législateur des simples députés soit pris davantage au sérieux, nous devons leur donner l'occasion d'élaborer des mesures législatives qui franchissent toutes les étapes à la Chambre, sont proclamées et deviennent enfin des lois.

Le domaine où, selon moi, les simples députés peuvent être actifs et faire une contribution d'importance sans empiéter sur les prérogatives du gouvernement, soit l'initiative de nouvelles lois fondées sur son pouvoir de dépenser, est celui des modifications aux lois existantes ou, dans quelques cas très rares, des projets de loi qui n'entraînent aucune dépense nouvelle.

L'une des grandes lacunes que j'ai remarquées au cours des trois années où j'ai observé ce qui se passait à la Chambre, c'est que le gouvernement - sans doute très préoccupé par les nouvelles lois à faire adopter - et la bureaucratie hésitent à prendre le temps de perfectionner les lois existantes, même s'ils savent que diverses lois concernant l'impôt sur le revenu, l'immigration, la justice ou d'autres domaines posent des problèmes. Il est très rare que le gouvernement apporte ce genre de modification, même si nous savons que quelque chose ne va pas. Il faut attendre que le gouvernement propose des projets de loi qui regroupent toute une série de modifications.

Les simples députés ont la possibilité d'examiner toutes les lois existantes et d'y proposer des modifications qui, selon moi, peuvent constituer une très importante contribution.

Pour résumer, je suis un fervent partisan de la discipline de parti et de la démocratie fondée sur les partis. À mon avis, le système canadien est excellent et a fait ses preuves, par opposition au système américain, dans lequel l'individu a beaucoup de liberté.

Cela dit, je ne pense pas que les mesures d'initiative parlementaire doivent concurrencer directement celles du gouvernement, car celui-ci exerce son droit de proposer de nouvelles lois en fonction du pouvoir de dépenser qui lui est accordé chaque année.

Si je ne tiens pas à ce que tous les projets de loi d'initiative parlementaire fassent l'objet d'un vote, c'est simplement parce que cela banaliserait ce type de mesure. Toutes sortes de projets seraient adoptés, certains méritoires et d'autres pas. Le nombre des projets serait si élevé qu'on aurait du mal à suffire à la tâche. La crédibilité des mesures d'initiative parlementaire serait moindre si toutes étaient soumises à un vote.

Je propose que nous établissions des critères pour décider quels projets de loi feront l'objet d'un vote. La condition première, à mon avis, est que le projet de loi ne devrait exiger aucune dépense nouvelle de la part du gouvernement. Autrement dit, il n'y aurait absolument aucune nouvelle dépense. Cela limiterait les mesures des députés essentiellement, mais non exclusivement, aux modifications de lois existantes.

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Cela pourrait être un champ d'action très important, car il existe dans les lois des problèmes que les députés de tous les partis relèvent à l'occasion. Le plus souvent, le programme législatif du gouvernement ne prévoit rien pour régler ces problèmes ponctuels. À l'occasion, le gouvernement propose un projet de loi d'ensemble qui apporte un certain nombre de modifications. Mais les simples députés pourraient faire oeuvre très utile en présentant des projets de loi qui modificatifs.

Voilà où réside l'intérêt des mesures d'initiative parlementaire. Pour qu'elles soient efficaces, il faut qu'elles aboutissent et deviennent des lois. Il ne suffit pas qu'elles franchissent les étapes de la deuxième, puis de la troisième lecture à la Chambre. Il faut qu'elles parviennent jusqu'au bout pour être prises au sérieux. Elles doivent être proclamées.

Je vous dirai que, lorsque des députés tentent de proposer des lois entièrement nouvelles, ils n'ont ni la compétence ni le personnel de soutien nécessaire pour produire une proposition susceptible d'aboutir, dans l'ensemble, ou en tout cas pour les lois importantes. Mais les modifications sont possibles.

Le premier critère, donc, pour savoir si une mesure doit faire l'objet d'un vote, est celui des nouvelles dépenses. Si un député voulait proposer une loi qui va au-delà de la simple modification mais ne suppose aucune dépense, je dirai au comité qu'il est possible de transformer la proposition en motion.

Il existerait deux filières. Le projet pourrait être présenté à votre comité, sans doute sous la forme que le député juge nécessaire pour le convaincre. Le comité déciderait si le projet fera l'objet d'un vote - s'il ne prévoit aucune dépense nouvelle - ou s'il sera transformé en motion.

Les motions sont une partie importante des mesures d'initiative parlementaire. Permettez-moi de vous présenter une illustration de ce qui s'est passé à la Chambre la semaine dernière.

La Chambre a été saisie de deux motions. L'une était une motion bloquiste sur l'abolition du Sénat, et le Parti réformiste a proposé un amendement. Il était proposé en somme que le Sénat soit réformé.

Une autre motion a été présentée par un député libéral. Elle proposait des taxes spéciales, des allégements fiscaux pour ceux qui dispensent des soins.

Dans les deux cas, ces motions ont reflété les tendances de l'opinion mieux que n'importe quel référendum n'aurait pu le faire.

Dans le premier cas, la motion sur l'abolition du Sénat, vous vous souviendrez que, au moment du vote, l'amendement réformiste a recueilli un appui plus solide que la motion initiale visant à abolir cette institution.

Le cas des dispensateurs de soins a été encore plus frappant. Même si le gouvernement a diffusé une fiche d'information énumérant tous les allégements déjà offerts à ces personnes, la vaste majorité des députés, y compris des ministres et des secrétaires parlementaires, a appuyé la motion, ce qui a fait comprendre avec une grande netteté au gouvernement ce que la population pense de cette question.

Je vais me servir de cette information dans mon bulletin, parce que c'est une manière de dire aux électeurs que, même si je n'ai été l'auteur d'aucune de ces motions, elles ont envoyé un message clair au gouvernement.

Je le répète, si on transforme un projet de loi qui ne fait pas l'objet d'un vote en une motion, on en a pour son argent. C'est une manière de faire très constructive.

La seule autre chose dont je veux parler est le tirage au sort. L'un des problèmes, en ce moment, est que si un député a une excellente idée de projet de loi ou de motion, il n'est pas certain que le projet ou la motion soit choisi au moment du tirage.

Je n'ai rien contre le tirage au sort, car cela assure un certain contrôle, mais s'il s'agit d'un projet de loi particulièrement intéressant, je crois qu'il devrait y avoir un mécanisme qui permet au député de faire étudier sa proposition, malgré le tirage au sort.

Je proposerais que le député obtienne l'appui de 60 députés de tous les partis. Par là, je veux dire les partis reconnus à la Chambre des communes et non les très petits groupes comme les néo- démocrates et les conservateurs en ce moment. Cela nous laisse le Parti réformiste, le Bloc québécois et le Parti libéral. J'estime que le député devrait obtenir des appuis proportionnels à la représentation de chacun de ces partis. Proposons aux fins de discussion une soixantaine de députés. Ce mécanisme permettrait au député de faire étudier son projet de loi par la Chambre en contournant l'obstacle d'un tirage au hasard strict.

.1020

J'ai terminé mon exposé, madame la présidente.

La présidente: Merci, monsieur Bryden. Merci d'avoir eu la patience d'attendre hier et aujourd'hui.

M. Bryden: La question est importante. Il vaut la peine d'attendre.

La présidente: Je voudrais des précisions sur votre dernière proposition. Je laisserai ensuite les députés poser des questions.

Vous dites que le tirage au sort est acceptable pour les mesures courantes, mais vous souhaitez un mécanisme pour le contourner...

M. Bryden: Exactement.

La présidente: ... pour que, avec un appui proportionnel, le député puisse se présenter au Président de la Chambre, dire qu'il y a 40 libéraux, 20 bloquistes et 20 réformistes qui appuient le projet de loi et demander à présenter son projet de loi.

M. Bryden: Exactement. Si nous acceptons le principe voulant que les mesures d'initiative parlementaire relèvent des députés, ceux-ci pourraient eux-mêmes décider si le projet de loi mérite d'aller de l'avant.

Par ailleurs, il faut toujours prévoir que certaines mesures proposées par des députés ne seront pas très bien préparées, ne jouiront pas d'un soutien particulier ou n'intéresseront qu'un nombre très limité de députés. Il s'agit simplement d'un mécanisme pour contourner le tirage au sort.

La présidente: Très bien. Merci.

[Français]

M. Langlois: Je trouve l'idée de M. Bryden intéressante. En tout cas, elle mérite d'être examinée par nous. C'est la première fois qu'on soulève cette hypothèse. C'est la première fois que je l'entends. Mais ce n'est pas parce que c'est la première fois qu'elle n'est pas bonne.

Si je comprends bien, c'est un mécanisme par lequel un projet de loi pourrait être votable dans le cas où il recueillerait un appui plus significatif des formations politiques reconnues à la Chambre.

M. Ménard proposait hier une autre solution: si un nombre suffisant d'électeurs appuyaient un projet de loi, celui-ci serait reconnu votable. Je pense que ces éléments sont fort importants.

Tout comme vous, je préfère personnellement les systèmes politiques du type Congrès américain, mais je ne veux pas importer tel quel le système américain car ce n'est pas dans celui-là que nous fonctionnons. Nous ne sommes pas dans un monde souhaité, mais dans un monde réel.

Je partage votre avis. Lorsque nous avons adopté la motion de M. Szabo, nous voulions sûrement donner une indication au gouvernement. Cela provenait sûrement, du moins dans mon cas, des représentations que nous avaient faites des électeurs dans nos bureaux de circonscription ou de choses que nous avions entendues.

Évidemment, le gouvernement a une autre préoccupation qui est l'équilibre des dépenses budgétaires, qui n'est pas en tête de la liste de nos priorités. Nous avions cependant à exprimer un point de vue dont le gouvernement devait tenir compte. Tout de suite après l'adoption de la motion, vous avez probablement vu le ministre, M. Martin, sortir son porte-monnaie pour signifier qu'il se demandait où il allait trouver l'argent pour y donner suite. Je suis convaincu que le ministre était d'accord sur le principe qui sous-tendait la motion.

L'autre vote qui, soit dit en passant, est passé assez inaperçu dans la presse, dans les journaux en général, est celui sur le Sénat. Si l'on recompte les votes, monsieur Bryden, et si les autres membres du Bloc québécois avaient appuyé la motion de M. Benoit, de la circonscription de Végréville, laquelle l'avait été par de nombreux députés libéraux, par les réformistes et par le bloquiste que je suis, la motion aurait été adoptée et la Chambre aurait dû demander l'abolition du Sénat dans sa forme actuelle. Donc, le message qui ressort du débat de la Chambre est qu'il faut revoir cette institution.

Seulement, certains votes isolés ont influencé le résultat du vote. Il y a eu 68 p. 100 des votes pour la réforme de l'institution, 40 p. 100 environ pour son abolition, etc. La motion a été finalement battue.

Mais je pense qu'il ressort un message de l'opération: une volonté s'est exprimée par rapport à l'institution du Sénat chez les député de la Chambre. Je crois qu'il y a eu là une indication qu'une étape majeure avait été franchie. Même si le résultat n'a pas abouti à une résolution, ce qu'on aurait pu souhaiter, une étape majeure a été franchie par rapport au fonctionnement des institutions canadiennes.

Donc, il y a un désir chez les députés, chez nous tous ici qui ne sommes pas ministres ou liés au pouvoir exécutif, de pouvoir influencer le cours des événements.

Cependant, c'est un peu comme si on voulait faire tourner le Titanic dans le fleuve Saint-Laurent en face de Montréal; cela ferait des vagues. Alors, il faut aller lentement dans le processus parlementaire parce qu'on ne voit pas toujours ce qu'il peut advenir d'une simple motion ou d'un projet de loi.

.1025

Cela étant dit, je vais vous poser la question à laquelle ont répondu vos trois collègues précédents. Lorsqu'on présente un projet de loi, préférez-vous qu'il soit dans une forme définitive et assister aux diverses étapes de la confection du projet de loi, en éliminant les obstacles qui peuvent survenir au fur et à mesure, ou préférez-vous que la Chambre vote sur le principe qui sous-tend ce projet de loi, sur ses lignes directrices, quitte à ce que sa rédaction, en termes définitifs, en termes juridiques, soit reportée à plus tard?

[Traduction]

M. Bryden: J'estime qu'il faut laisser le choix au député qui essaie de faire avancer l'étude de son projet de loi. À la première étape, le projet de loi proposé est soumis à ce comité-ci, qui peut décider s'il fera ou non l'objet d'un vote.

Supposons que le député soit assez sûr que son projet de loi n'entraînera pas une nouvelle dépense. J'ajoute qu'il peut être très important de définir ce qu'on entend par «nouvelle dépense» pour que les gouvernements, par la suite, ne fassent pas délibérément obstacle au projet de loi d'initiative parlementaire.

Selon moi, il incombe au député de faire valoir son projet de loi. Il peut le présenter comme une simple proposition en précisant quelles en sont les conséquences. Il peut opter pour cette formule s'il ne veut pas travailler trop fort sur son projet de loi. Il peut aussi présenter un projet de loi dont le texte a été parfaitement rédigé.

Mettons que nous fassions ce que je propose et que la majorité des projets de loi qui devraient aboutir selon nous visent à modifier des lois existantes, simplement parce qu'ils ne doivent pas entraîner de nouvelles dépenses. Je ne pense pas que, pour la plupart d'entre eux, ce sera un travail très lourd que de présenter le projet de loi, dès la première étape, sous forme de texte de loi achevé. S'il s'agit d'une modification, le projet de loi peut ne représenter que deux ou trois pages de texte.

La présidente: Puis-je intervenir? Il ne nous reste qu'environ deux minutes avant qu'un autre comité ne tienne une réunion dans cette même salle.

Si nous le voulons, nous pouvons inviter M. Bryden, qui fait pour ainsi dire partie de l'équipe, maintenant, à revenir à la prochaine séance. Nous pourrions entendre son témoignage avant la séance réservée aux seuls membres du comité.

Cependant, si vous avez une courte question à poser, monsieur Frazer, je vous en prie, allez-y.

M. Frazer: Non. Une simple observation, si on me permet. Il s'agit de votre idée pour contourner l'étape du tirage au sort. Il suffirait de montrer au Président qu'il existe un soutien suffisant pour pouvoir sauter cette étape. C'est une excellente idée, sauf que, il me semble, cela va faire augmenter considérablement les démarches dont nous ferons l'objet de la part de nos collègues qui veulent avoir notre soutien pour leurs projets de loi. Ces démarches sont déjà assez considérables. C'est là un des inconvénients de cette proposition, mais c'est une idée nouvelle, et il vaut la peine de l'étudier très sérieusement.

La présidente: Merci, monsieur Bryden.

Je vais demander à Jamie, avant notre prochaine réunion, dans deux semaines, d'esquisser le préambule du rapport, en faisant l'historique des mesures d'initiative parlementaire et des modifications apportées depuis 20 ans. Je vais lui demander de résumer les usages actuels pour que nous les ayons clairement à l'esprit: avant d'apporter des modifications, il faut connaître la situation telle qu'elle est.

Il faudrait résumer les propositions que nous avons entendues et celles qui nous ont été soumises par écrit en les classant en trois catégories: celles qui portent sur le tirage au sort, celles qui concernent la désignation des mesures faisant l'objet d'un vote et celles qui se rapportent au renvoi aux comités. J'espère que nous pourrons avoir ce résumé avant que nous ne nous entretenions avec les juristes, etc.

Avant de nous réunir de nouveau, je crois que nous allons commencer à songer aux propositions qui peuvent faire l'objet d'un consensus et que nous voudrions recommander au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Ce sera aussi l'occasion de demander dans quelle mesure il est possible de concrétiser certaines de ces propositions.

Si cela convient à tous les membres du comité - je voudrais travailler à partir de propositions écrites - nous procéderons de cette manière.

À notre prochaine réunion, nous pourrions donner à Mme Jennings une autre occasion de comparaître pendant les dix premières minutes. S'il y a quelqu'un qui pense à des questions à poser à M. Bryden, nous le réinviterons. Nous aurons ensuite avec les juristes une séance qui durera bien deux bonnes heures et demie.

M. Bryden: Madame la présidente, je vais rédiger un résumé de mes observations à votre intention. Cela pourrait également être utile pour le greffier.

La présidente: Je ne prévois qu'une ou deux séances de plus. Nous devrions alors être prêts à faire rapport au Comité de la procédure avant l'expiration de notre délai. Nous serons dans les temps.

M. Langlois: Ce n'est jamais fini avant que ce ne soit vraiment fini.

La présidente: C'est vrai. Quelque chose de dramatique pourrait se produire.

Je vous remercie beaucoup.

M. Frazer: Quand aura lieu la prochaine réunion?

La présidente: La Chambre ne siège pas la semaine prochaine. La semaine d'après, je serai à l'étranger. Ce sera donc dans la deuxième semaine suivant la rentrée. Le mercredi, peut-être. Le greffier vérifiera avec vous tous. Il faut trouver un moment qui conviendra à tous.

M. Loney peut fort bien se joindre à nous, mais nous nous passerons de lui si nous le pouvons, puisque nous avons déjà beaucoup fait.

La séance est levée.

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