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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 6 mars 1997

.0924

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

Nous entamons l'étude du budget des dépenses pour 1997-1998. Le temps file si vite.

Je souhaite la bienvenue à la nouvelle sous-ministre des Transports qui nous aidera dans notre étude.

Pourriez-vous, Madame, nous présenter les personnes qui vous accompagnent aujourd'hui.

.0925

Mme Margaret Bloodworth (sous-ministre, ministère des Transports): Je vous remercie, monsieur le président. M'accompagnent aujourd'hui MM. Paul Gauvin, sous-ministre adjoint principal, Ron Jackson, sous-ministre adjoint, Sécurité et Sûreté et Louis Ranger,

[Français]

sous-ministre adjoint, Politiques.

[Traduction]

Malheureusement, le ministre, M. Anderson, ne peut pas être ici aujourd'hui. Il m'a chargée de remercier le Comité pour le temps et les efforts qu'il a consacrés ces dernières années à l'étude de diverses questions du domaine des transports.

Je ferai une déclaration préliminaire qui sera brève étant donné qu'on vous a remis un document dans lequel vous trouverez tous les détails qui pourraient vous intéresser. Pour utiliser au mieux le temps dont nous disposons, je ne m'étendrai donc pas sur ce document que vous pourrez consulter à loisir. Il résume le budget des dépenses.

[Français]

Les progrès de Transports Canada l'an dernier sont visibles dans tous les modes de transport. Nous allons passer en revue certains des points saillants.

[Traduction]

Parlons d'abord des transports aériens. Comme vous le savez, le ministère a transféré l'an dernier le système de navigation aérienne à NAV CANADA en contrepartie de 1,5 milliard de dollars, une contribution non répétitive importante à la réduction de la dette nationale.

L'accord «Ciels ouverts» continue d'être avantageux pour les voyageurs aériens canadiens. Il a donné lieu jusqu'ici à la création d'environ 85 nouvelles liaisons transfrontalières régulières, dont plus de 50 sont assurées par des transporteurs canadiens.

Le Canada a conclu de nouveaux accords bilatéraux de services aériens avec les Philippines et la Malaisie ainsi qu'avec quatre pays d'Amérique centrale, soit le Costa Rica, le Salvador, le Guatemala et le Nicaragua. Nous avons aussi actualisé les accords auxquels nous participons avec l'Allemagne, le Brésil, la Corée et plusieurs autres pays.

Le ministère poursuit la mise en oeuvre de la politique nationale des aéroports et se départit des aéroports qu'il possède et exploite maintenant. Nous avons terminé les négociations en vue du transfert de 29 aéroports à des autorités locales en 1995-1996 et comptons mener à bien 45 autres cessions d'aéroports en 1996- 1997.

Nous avons aussi récemment annoncé la signature d'un accord de principe en vue de modifier les baux fonciers concédés aux autorités aéroportuaires locales de Calgary, d'Edmonton et de Vancouver pour que celles-ci se rapprochent davantage du modèle proposé dans la politique nationale des aéroports.

Du côté maritime, l'exploitation des principaux ports canadiens repose de plus en plus sur les pratiques commerciales courantes. On est en voie actuellement de créer des administrations portuaires canadiennes dans 15 ports importants pour le commerce international. Ces administrations ne deviendront cependant une réalité qu'après l'adoption de la Loi maritime du Canada.

Au total, 53 lettres d'intention ont été signées avec des groupes prêts à exploiter de petits ports répartis dans tout le pays. En décembre 1995, le ministère possédait 549 ports et il ne lui en reste maintenant que 261. Parmi ceux-ci on compte 46 ports éloignés dont il ne se départira jamais.

En juillet, le ministre, M. Anderson, a signé une lettre d'intention avec un groupe représentant les principaux expéditeurs et transporteurs de la voie maritime du Saint-Laurent. La lettre d'intention prévoit la création d'une société sans but lucratif à laquelle sera confiée l'exploitation de la voie maritime. En août, le Canada et les États-Unis ont chargé un nouveau groupe de travail conjoint d'étudier les moyens à prendre pour que nos deux pays collaborent davantage à l'administration de la voie maritime.

Pour ce qui est des transports ferroviaires, la Loi sur les transports au Canada est entrée en vigueur le 1er juillet 1996. Cette loi simplifie la réglementation ferroviaire, favorise la création de lignes ferroviaires secondaires et réduit les tracasseries administratives.

[Français]

Entre-temps, afin d'assurer le maintien des services de passagers en région éloignée, le ministre a signé des ententes de financement en 1996 avec

[Traduction]

les sociétés ferroviaires Quebec North Shore and Labrador Railway, Algoma Central et Ontario Northland.

En 1996, le ministère a également conclu avec les Technologies PMG un contrat d'une durée de cinq ans prévoyant le transfert à cette entreprise de l'exploitation du centre d'essai pour véhicules automobiles située à Blainville au Québec.

Comme vous le savez, bon nombre de ces changements ont nécessité l'adoption de mesures législatives. La Loi maritime du Canada projetée a été présentée à la Chambre l'an dernier, et je suis sûre que l'étape de la deuxième lecture à la Chambre qui, nous l'espérons, ne saurait tarder, fera ressortir le travail accompli par le Comité sur ce projet de loi.

Le gouvernement a aussi proposé des modifications à la Loi sur la sécurité ferroviaire ainsi qu'à la Loi sur la marine marchande du Canada. Les modifications proposées à la seconde de ces lois constituent la première série seulement de modifications qu'on compte lui apporter. Dans les deux ou trois prochaines années, nous entendons complètement refondre la Loi sur la marine marchande du Canada, ce qui est une entreprise de taille, et nous espérons le faire en deux temps, soit en 1997-1998 et puis en 1998-1999.

Parmi les autres mesures législatives proposées par le gouvernement, notons la Loi sur le transport des marchandises par eau ainsi que des modifications à la Loi sur le Bureau canadien d'enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports.

.0930

Tous ces changements ont eu une incidence sur les finances du ministère. Les subventions qu'il verse ont diminué et, comme vous le savez, les subventions découlant de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest et la Loi sur les taux de transport des marchandises dans les provinces maritimes ont été supprimées. Nous avons également réduit considérablement les subventions versées au titre des services de traversier ainsi que les subventions destinées à VIA Rail. Les paiements versés à Marine Atlantique seront ramenés à 50 millions de dollars en 1998-1999 et la subvention annuelle versée à VIA Rail, qui était de 311 millions de dollars en 1994-1995 passera à 170 millions de dollars en 1998- 1999. Au total, 700 millions de dollars par année en subventions ont été supprimés.

Ce n'est cependant pas qu'aux autres que nous demandons d'accroître leur efficacité. Le ministère réduit également ses dépenses ainsi que ses frais généraux. À la fin de l'année, nous aurons atteint l'objectif que nous nous fixions il y a cinq ans de réduire nos dépenses administratives de50 millions de dollars et d'éliminer 1 000 équivalents temps plein. Nous cherchons à recouvrer une plus grande part du coût de certains services que nous fournissons pour alléger le fardeau des contribuables.

[Français]

À Transports Canada, nous sommes passés d'un organisme centralisé à un ministère axé davantage sur les régions. Cela contribuera à faire en sorte que nous soyons plus attentifs aux besoins de nos clients sur le terrain tout en devenant plus efficients.

[Traduction]

Comme l'indique le rapport sur les plans et les priorités, le budget des dépenses de Transports Canada pour l'exercice financier 1996-1997 se chiffre à 1,7 milliard de dollars. Le budget sera ramené à 1,25 milliard de dollars en 1998-1999. Le ministère réduira ses dépenses de 676 millions de dollars de plus d'ici 1999- 2000.

Permettez-moi de terminer en disant quelques mots au sujet de la sécurité. Contrairement à l'ancienne partie III du budget principal, qui donnait la vedette aux chiffres, le rapport sur les plans et les priorités vise à vous renseigner sur les objectifs du ministère et sur les moyens qu'il compte prendre pour y parvenir. Son objectif ultime étant d'assurer la sécurité des transports, il convient que je vous dise maintenant quelques mots à ce sujet.

Le nombre d'accidents mortels et d'accidents tout court à survenir dans le domaine maritime est demeuré stable depuis dix ans. En 1995, le nombre d'accidents dans le secteur de l'expédition maritime a atteint son plus bas niveau depuis dix ans. La sécurité dans les transports aériens au Canada est meilleure que jamais, ce que confirme la diminution depuis trois ans du nombre d'accidents par 100 000 heures de vol. Par ailleurs, de 1984 à 1992, les collisions et les déraillements sur les lignes ferroviaires principales ont été de 20 p. 100 et de 28 p. 100 respectivement moins nombreuses au Canada qu'aux États-Unis. Les accidents survenus aux passages à niveau ont diminué de 43 p. 100 entre 1985 et 1995. Ce chiffre revêt une importance particulière étant donné que ce sont aux passages à niveau que se produisent la grande majorité des accidents ferroviaires mortels. Quant au taux d'accidents mortels par véhicule immatriculé, le Canada vient au cinquième rang au monde. Les décès mortels par 100 000 conducteurs détenant un permis ont diminué de 40 p. 100 au cours de la décennie qui s'est terminée en 1994. De concert avec les provinces, qui jouent un rôle important dans ce domaine, nous visons à faire en sorte que ces pourcentages diminuent encore.

[Français]

La fiche est bonne et vous pouvez être assurés que Transports Canada continuera à recourir à tous les moyens à sa disposition pour maintenir les normes de sécurité élevées que les Canadiens sont en droit d'attendre du réseau des transports.

[Traduction]

Depuis plusieurs années, Transports Canada s'efforce de moderniser le réseau des transports au Canada, mais il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine. Mes collègues et moi-même nous réjouissons à l'idée de collaborer avec vous au cours de l'année en vue de progresser vers l'atteinte de cet objectif.

En guise de conclusion, j'attire votre attention sur la dernière page du document qui vous a été remis et qui porte sur le nouveau système d'information destiné au Parlement. Comme ces nouveaux rapports visent à accroître la compréhension et l'utilité des données transmises au Comité, nous vous saurions gré de nous faire part de tout commentaire que vous auriez à ce sujet afin que nous sachions si nous nous dirigeons dans la bonne voie. Toute suggestion en vue de rendre ces rapports plus utiles sera la bienvenue.

Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.

Le président: Je vous remercie, madame Bloodworth.

J'ouvre maintenant la période des questions. La parole sera d'abord à l'Opposition officielle et ensuite au parti réformiste.

[Français]

M. Rocheleau (Trois-Rivières): Premièrement, je m'excuse de mon retard. J'ai été appelé en dépannage à la dernière minute.

C'est un dossier qui m'intéresse et me préoccupe, étant député de Trois-Rivières et étant né sur le bord du fleuve Saint-Laurent.

.0935

Par exemple, je suis très préoccupé par la politique de tarification de la Garde côtière. Comme vous maintenez sans doute des liens au niveau de la culture organisationnelle, j'aimerais que vous me disiez ce qu'il en est de l'étude d'impact qui n'a pas été faite à l'époque et qui a été exigée par l'Opposition officielle et par les milieux directement intéressés et blessés par l'événement, c'est-à-dire les utilisateurs du fleuve Saint-Laurent. J'aimerais savoir où en est rendue l'étude d'impact qui a été commandée par le gouvernement là-dessus et qui n'est pas encore sortie, que je sache.

M. Louis Ranger (sous-ministre adjoint, Politiques, ministère des Transports): Une étude a été menée conjointement par le ministère des Pêches et des Océans et le ministère des Transports. Beaucoup de ressources ont été affectées à cette étude et beaucoup de gens ont été consultés. C'est une étude assez impressionnante qui relève les bons et les moins bons côtés de l'ensemble des mesures qui sont prises. L'effet cumulatif est un facteur important à considérer.

Je pense qu'il est clair depuis le début de cette étude qu'étant donné qu'on demandait la participation de beaucoup de gens, elle serait rendue publique. Je pense qu'on a encore l'intention de la rendre publique.

Certaines chose en sont ressorties et il sera donc important, lorsque l'étude sortira, d'indiquer dans quelle mesure on pourra faire face aux problèmes qui ont été identifiés.

M. Rocheleau: Il y avait trois volets à la tarification, soit les aides à la navigation, le déglaçage et le dragage, le gros morceau étant le déglaçage avec les brise-glaces. Est-ce que le gouvernement va ralentir son processus et reporter la tarification? Va-t-il quand même l'imposer?

M. Ranger: Je peux vous dire que toutes les options sont actuellement examinées. Aucune décision n'a encore été prise. Les ministères concernés sont en train de voir l'ensemble des mesures qui étaient envisagées et les examinent à la lumière des résultats de cette étude.

M. Rocheleau: On peut espérer que le gouvernement va avoir à l'esprit les remarques et les représentations faites par les utilisateurs - pas seulement par les députés de l'Opposition - qui parlent de la compétitivité qui va disparaître des ports du Saint-Laurent. On ne rit pas. Ce sont des milliers d'emplois qui sont en jeu, et ce sera probablement à l'avantage de l'Est avec Halifax ou des ports de la côte est américaine. J'espère qu'on est conscient de cela et qu'on n'imposera pas cette nouvelle tarification sans avoir eu les résultats.

Deuxièmement, après de multiples représentations du milieu, Trois-Rivières a été classé APC. Il y en a qui s'inquiètent de la composition du conseil d'administration, en ce sens que les principaux intéressés ne seraient pas présents. Les principaux utilisateurs du port ne seraient pas présents au conseil d'administration. Je suis resté pantois lorsque j'ai vu la formation du conseil cette semaine. Pourquoi les principaux intéressés ne sont-ils pas présents au conseil d'administration de l'APC? Est-ce pour éviter les conflits d'intérêts?

M. Ranger: Je ne peux vous divulguer la nature des amendements qui s'en viennent, et les renseignements que je pourrais vous donner étaient déjà contenus dans les derniers documents que vous avez vus. Comme vous le savez, il y a entre sept et douze membres selon les ports. Certains usagers seront représentés. Toutefois, il y avait le souci de s'assurer que les usagers ne seraient pas en conflit d'intérêts en siégeant au conseil d'administration. Donc, ils vont certainement être représentés. Le gouvernement ne reviendra pas sur cette question.

M. Rocheleau: Directement ou par personne interposée?

M. Ranger: C'est là toute la question, à savoir comment on peut éviter qu'il y ait conflit d'intérêts tout en s'assurant que les usagers sont représentés.

M. Rocheleau: On m'a parlé de modèles européens, entre autres du port de Rouen, en France, où on aurait trouvé une méthode de rotation qui ferait en sorte que les bonnes personnes soient à la bonne place. Cependant, avec la rotation, ces gens-là sont menacés de graves poursuites s'ils mettent leurs intérêts personnels et privés devant l'intérêt collectif du développement du port en question. N'y a-t-il pas des modèles dont on pourrait s'inspirer au lieu d'inventer la roue?

[Traduction]

Mme Bloodworth: Il s'agit là d'une question difficile. Il faut trouver une façon de représenter les utilisateurs des services et éviter, par ailleurs, de nommer pour siéger au conseil d'administration des gens qui auraient à se retirer constamment des discussions en raison d'un conflit d'intérêt. Nous nous sommes débattus avec ce problème auquel je crois que nous avons trouvé une solution comme vous pourrez le constater lorsque vous verrez les modifications. J'admets que c'est cependant un épineux problème.

.0940

[Français]

M. Rocheleau: Vous ne serez peut-être pas en mesure de répondre, mais une représentation m'a été faite par les gens de mon milieu au sujet de la nouvelle politique. Au Québec, les quais et les havres du fleuve Saint-Laurent et de la rivière des Outaouais seront touchés. Dans ma région, sur la rivière Saint-Maurice, il y a beaucoup de quais qui étaient gérés par Transports Canada et il semble y avoir là un vide. On a porté cela à mon attention récemment. Je ne sais pas si vous êtes en mesure de me répondre. C'est un peu pointu, mais je suis en démarche pour obtenir de l'information. J'ai communiqué avec M. Chartrand de Transport 2000. Il doit me rappeler, mais si vous aviez la réponse, cela m'aiderait. C'est tout le développement de la rivière Saint-Maurice, entre autres sur le plan touristique, qui est en cause. On ne sait plus à quel endroit s'adresser, si j'ai bien compris.

[Traduction]

Mme Bloodworth: Je ne peux pas répondre à cette question précise, si ce n'est pour dire que nous nous retirons actuellement de la gestion des ports. Nous continuerons cependant à exploiter certains ports éloignés. Comme il faut prévoir une période de transition, nous avons créé un fonds de cession des ports pour nous assurer de la bonne santé financière des ports qui seront cédés à des intérêts privés. Je m'attends à ce que les négociations soient ardues pour tous les ports.

[Français]

M. Rocheleau: Il y aura des fonds même si ces quais ne sont pas prévus dans la nouvelle politique maritime? Il y a là un vide.

[Traduction]

Mme Bloodworth: Les fonds seront réservés aux ports ou aux havres appartenant à Transports Canada qui seront cédés à des administrations locales dans certains cas et à des municipalités, dans d'autres.

Le président: M. Gilmour.

M. Gilmour (Comox - Alberni): Je vous remercie, monsieur le président.

Le ministre ne comparaît pas devant le Comité. Quand compte-t- il le faire?

Le président: Permettez-moi de répondre à cette question. Le ministre s'est engagé à comparaître devant le Comité à la fin de la première série d'audiences. Nous voulons tirer parti des nouveaux rapports qui nous sont fournis pour élargir le cadre des audiences sur le budget des dépenses. Voilà donc pourquoi il a été proposé que le ministre comparaisse devant le Comité à la fin du processus.

M. Gilmour: Je vous remercie, monsieur le président. Je ne voudrais pas que le ministre rate l'occasion de comparaître devant le Comité.

Le président: Je vous assure qu'il se réjouit à l'idée de discuter de toutes ces questions avec vous, monsieur Gilmour.

M. Gilmour: Les phares me tiennent beaucoup à coeur. Je sais que ce n'est pas le ministère des Transports, mais le ministère des Pêches et des Océans qui s'est vu confier la tâche de les automatiser. À mon sens, il s'agit cependant bien d'une question touchant les transports étant donné que, comme vous l'avez fait remarquer, l'objectif ultime de votre ministère est d'assurer la sécurité des transports. Les nombreux bateaux de pêche et hydravions à flotteurs sur la côte Ouest comptent sur les phares pour leur sécurité.

C'est vraiment dommage que le ministre ne soit pas ici aujourd'hui. Comme on vous l'a sûrement raconté, le ministre a eu un accident de voile, et c'est un gardien de phare vigilant qui lui a sauvé la vie. Il ne serait pas ministre aujourd'hui si ce n'était de ce gardien de phare. Il s'est engagé à tout faire pour conserver les phares. Sa mémoire n'est pas très longue, semble-t-il.

Quelles pressions comptez-vous exercer sur le MPO pour l'amener à doter en personnel les phares? Il s'agit d'un budget de 1,6 à 1,8 million de dollars par année, une véritable goutte d'eau compte tenu de la taille du budget. En fait, cela ne représente que le coût de trois jours de subventions versées à VIA Rail. Or, les gens de la côte Ouest tiennent vraiment à ce qu'un gardien de phare puisse répondre au besoin à leur message radio.

Les phares automatisés ne fonctionnent pas. Un grand nombre d'entre eux sont tombés en panne lors d'une tempête survenue l'hiver dernier. Au moment même où l'on a le plus besoin d'eux, les phares automatisés ne fonctionnent pas.

Que comptez-vous faire pour amener le MPO à revenir sur la décision d'automatiser les phares?

Mme Bloodworth: Comme vous l'avez fait remarquer au début de votre intervention, les phares ne relèvent pas du ministère des Transports. Je suivrai la règle que je me suis fixée, soit de ne pas me prononcer sur les questions qui ne sont pas de mon ressort. Je comprends votre préoccupation et d'autres semblent la partager, mais il ne s'agit pas d'une question qui relève de Transports Canada, mais du MPO.

M. Gilmour: Vous avez dit que l'objectif ultime de votre ministère est d'assurer la sécurité des transports. Dans ce cas, comment le ministère ne peut-il pas intervenir dans ce dossier? La sécurité des pêches sur la côte Ouest est en cause. À mon avis, la sécurité des bateaux de pêche et des hydravions à flotteurs est compromise. Je vous recommande d'y réfléchir et je vous incite à discuter avec le MPO de la possibilité de revenir sur la décision d'automatiser les phares.

.0945

Je vais maintenant passer à autre chose. Qu'en est-il de la police portuaire? Je songe ici en particulier au cas de Vancouver. Je me préoccupe du sort des membres de la police portuaire. Vont- ils désormais simplement relever de Vancouver ou vont-ils être remplacés par la police de Vancouver? Je crains que nous perdions des compétences. Qu'a-t-on prévu pendant la période de transition?

Mme Bloodworth: Cela varie. Je vais demander à M. Jackson de vous donner plus de précisions s'il peut le faire, mais la solution qui sera adoptée dépendra de chaque port. Chaque port a sa propre façon d'assurer la transition.

Pour ce qui est de Vancouver, nous attendons le dépôt du rapport de la province. Ce rapport devait paraître cette semaine, si je ne m'abuse, mais je ne l'ai pas encore vu. Je ne pense pas qu'il ait déjà été rendu public. Nous en tiendrons évidemment compte quand viendra le moment de prendre une décision au sujet de la police portuaire de Vancouver.

Nous ne contestons pas la nécessité de services policiers dans les ports. Nous comptons certainement faire en sorte d'affecter les ressources voulues aux services policiers portuaires, mais il n'est pas absolument nécessaire que ces services soient offerts par une force policière distincte. Nous nous préoccupons également du sort des personnes visées. Je sais que les membres de la police portuaire se joindront aux forces policières provinciales au Québec. Ailleurs, bon nombre d'entre eux ont décidé de prendre leur retraite.

Pour ce qui est de Vancouver, nous attendons le dépôt du rapport dont je viens de parler.

M. R.A.S. Jackson (sous-ministre adjoint, Sécurité et Sûreté, Transports Canada): Je n'ai rien d'autre à ajouter.

M. Gilmour: Ce rapport peut-il être déposé devant le Comité?

Mme Bloodworth: Comme il s'agit d'un rapport de la province de la Colombie-Britannique, il sera rendu public. Dès qu'il le sera, nous veillerons à ce que le Comité en ait un exemplaire.

M. Gilmour: Je vous remercie.

Le ministère compte-il privatiser VIA Rail?

Mme Bloodworth: Non, le ministère ne compte pas privatiser VIA Rail. Les subventions versées à la société ferroviaire ont cependant été considérablement réduites. Il faudra que VIA Rail examine ses services parce que 170 millions de dollars, c'est une somme considérable. Nous ne comptons cependant pas privatiser pour l'instant VIA Rail.

M. Gilmour: Vous devriez peut-être y songer. J'ai trouvé très décourageant le fait que VIA Rail s'en prenne à la société ferroviaire Rocky Mountaineer après l'achat par cette société d'un tronçon privatisé. VIA Rail a ensuite voulu lui faire concurrence. Le ministre a pris la bonne décision et a empêché VIA Rail de le faire.

La manoeuvre montre bien quelles sont les visées de VIA Rail. Elle n'a pas à s'en prendre au secteur privé. J'aimerais bien que la société soit privatisée et Rocky Mountaineer est un bon exemple de ce que cela peut donner.

Revenons à la sécurité routière. Ma dernière question intéresse le ministre de la Justice puisqu'elle porte sur l'ivresse au volant. Toutes les six heures, un conducteur en état d'ivresse cause une mort au Canada. Que fait Transports Canada pour lutter contre ce problème? Relève-t-il strictement du ministre de la Justice?

Mme Bloodworth: Au niveau fédéral, l'ivresse au volant constitue une infraction pénale et relève effectivement du ministre de la Justice. Les provinces sanctionnent cependant aussi de diverses façons ce comportement. La compétence est partagée pour ce qui est de la réglementation des véhicules automobiles. Le ministère édicte un code national de sécurité ainsi que des normes de sécurité des véhicules, mais ce n'est que par des campagnes de sensibilisation que nous luttons contre ce problème.

Le président: Monsieur Comuzzi.

M. Comuzzi (Thunder Bay - Nipigon): Je vous remercie, monsieur le président.

S'agit-il bien de la première fois que vous comparaissez devant le Comité, madame Bloodworth?

Mme Bloodworth: En effet.

M. Comuzzi: Dans ce cas, bienvenue au Comité des transports.

Mme Bloodworth: Je vous remercie.

M. Comuzzi: J'ai deux questions à vous poser. La première porte sur la voie maritime du Saint-Laurent. Un sous-comité de la Chambre des représentants doit se réunir la semaine prochaine en vue d'étudier les façons de financer la mise en valeur de la voie maritime du Saint-Laurent. Je sais que vous avez été invitée à participer à cette réunion à Washington. Comptez-vous le faire?

Mme Bloodworth: Je ne compte pas y participer. J'ignore si nous y enverrons un représentant.

M. Ranger: Oui.

M. Comuzzi: Qui donc?

M. Ranger: L'ambassade enverra certainement quelqu'un.

M. Comuzzi: Transports Canada sera-t-il représenté?

M. Ranger: Nous réfléchirons certainement à la possibilité d'envoyer un représentant.

M. Comuzzi: Je regrette...?

M. Ranger: Oui, nous y réfléchirons.

M. Comuzzi: Je crois qu'il s'agit d'une réunion très importante.

M. Ranger: Je sais que le ministère a été représenté à la plupart des autres réunions. Je ne peux simplement pas vous confirmer si quelqu'un doit bien participer à cette réunion-là.

.0950

M. Comuzzi: Monsieur Ranger, pourriez-vous vous renseigner à ce sujet pour moi? Pourriez-vous me faire savoir ce qui sera décidé?

M. Ranger: Volontiers.

M. Comuzzi: Très bien. En fait, ce n'est pas ce qui me préoccupe le plus.

Ce qui me préoccupe le plus... J'essaie d'obtenir une rencontre avec le ministre, M. Anderson, depuis octobre dernier. Je crois qu'il sait pourquoi je veux le voir et c'est ce qui explique qu'il m'évite. Je vous demande donc votre aide, madame Bloodworth.

Cette question se rapporte au remaniement des circonscriptions. La région que je représente dans le nord-ouest de l'Ontario vient en deuxième place en Ontario et en cinquième place au Canada, si je ne m'abuse, pour ce qui est de l'étendue. Cela pose de graves difficultés.

Je ne fais pas ici allusion spécifiquement à VIA Rail. Je veux vous parler du transport ferroviaire des passagers en général. Les trains de VIA Trail traversent actuellement trois fois la semaine une région très éloignée et s'arrêtent à Armstrong, Longlac et Nakina qui comptent respectivement environ 500, 1 100 et 400 habitants. Ces trains contournent une vaste région dans le nord de l'Ontario qui compte environ 290 000 habitants.

Il y a deux ou trois semaines, j'ai fait le tour de cette nouvelle circonscription et le voyage n'a pas été facile. Trois aéroports la desservent: l'aéroport de Nakina, un aéroport pour vols non commerciaux, c'est-à-dire pour touristes, l'aéroport de Geraldton et l'aéroport de Marathon. Le principal transporteur de la région, la société aérienne Bearskin, est en voie de cesser ses activités à Geraldton et Marathon. Marathon est une ville dont l'économie, qui repose sur l'extraction de l'or et la production de pâte à papier, se porte bien.

Si cette région est privée de services aériens réguliers et si elle ne peut compter que sur le transport par route... Je sais que certains se plaignent de l'état des routes et notamment de certains tronçons de la route 11 en particulier qui sont très dangereux. Les ressources sont acheminées par camion et, par conséquent, les véhicules passagers... Cela étant dit, il est très important - et je crois que c'est d'ailleurs la responsabilité de Transports Canada - d'examiner les services de transport offerts dans certaines régions éloignées du pays.

Des automotrices font déjà la navette trois fois la semaine, si je ne m'abuse, entre Sudbury et White River.

La raison pour laquelle je souhaite rencontrer le ministre, c'est pour lui exposer le problème auquel sont confrontés les gens de cette région en ce qui touche les services de transport. Je ne parle pas ici du superflu. Il s'agit de pouvoir se rendre du point A au point B en ligne droite.

J'ai déjà abordé la question avec des représentants de la province de l'Ontario qui m'ont assuré que la province est prête à discuter de solutions au problème avec le gouvernement fédéral, si je pouvais seulement trouver quelqu'un qui soit prêt à participer à ces discussions.

Entamerez-vous ces discussions si la question relève de votre compétence?

Voilà ma question, monsieur le président.

Mme Bloodworth: Je ne m'y oppose pas puisqu'il est certainement du ressort de mon ministère de discuter de la politique générale en matière de transports, mais permettez-moi de faire deux observations à cet égard.

Premièrement, la politique actuelle dans le domaine des transports aériens est de favoriser la création de nouveaux services, ce qui signifie nécessairement que d'autres disparaîtront. Chaque fois qu'un service disparaît, cela crée évidemment de l'incertitude, mais en raison de la politique actuelle, il est beaucoup plus facile qu'il y a vingt ans à un exploitant qui voudrait desservir ces villes de le faire. La politique est conçue à cette fin.

.0955

Quant au transport routier, nous avons collaboré avec les provinces à la conception d'un réseau national de routes. Il y a toujours des routes qui ne font pas partie de ce réseau. Je crois que ce Comité s'est longuement penché sur cette question. On s'entend généralement pour dire que l'état de nos routes laisse à désirer. Comme la réfection des routes nécessite des investissements importants, il n'est pas facile de résoudre le problème. Je ne peux pas vraiment répondre à cette question aujourd'hui. Je sais que nous devons nous pencher sur le problème.

M. Comuzzi: Permettez-moi de dire quelques mots. Je suis sûr que vous examinez la politique sur les routes, mais je crois qu'il incombe au gouvernement fédéral et à Transports Canada d'offrir des moyens de transport de rechange pendant que nous cherchons une solution au problème. Les gens oublient que la richesse de l'Ontario repose sur les ressources naturelles qui se trouvent dans la région même dont je viens de parler. Les habitants de cette région méritent de meilleurs services que ceux qu'on leur offre.

Je ne défends pas ici une ligne de partie. Je m'efforce d'être aussi objectif que possible; cette région ne dispose tout simplement pas de véritables moyens de transport. Ce n'est pas la seule région éloignée du pays, et il nous incombe d'offrir des services dans ces régions.

Quant à l'accessibilité aux services aériens... Je comprends la politique aéroportuaire, mais il n'en demeure pas moins qu'un nouvel exploitant ne viendra pas se substituer à un entrepreneur privé qui décide de quitter des endroits comme Geraldton ou Marathon. Autrefois, NorOntair desservait cette région, une société aérienne subventionnée par le gouvernement, ce à quoi je m'opposais. Le départ de NorOntair et de Bearskin a cependant laissé un vide et je doute que quelqu'un vienne le combler. En fait, c'est presque sûr que personne ne le fera.

Les aéroports dont je parle n'ont jamais constitué un fardeau pour le gouvernement fédéral puisqu'ils sont depuis toujours des aéroports municipaux. Ils ne se sont jamais vus accorder les millions de dollars que vous avez dû avancer pour vous départir des aéroports. L'exploitation de ces aéroports a toujours été assurée par les municipalités.

Bref, je crois que les gens de cette région sont lésés. J'aimerais que vous vous engagiez à étudier la situation des transports dans la circonscription que je représente parce que la situation actuelle n'est pas satisfaisante.

Mme Bloodworth: Je connais certainement la région dont vous parlez. Elle englobe effectivement de nombreuses localités éloignées. Comme je suis originaire de Winnipeg, j'ai traversé le nord-ouest de l'Ontario à plusieurs reprises. Je comprends donc bien le problème que vous décrivez.

M. Comuzzi: Et la région de Dryden-Kenora que vous avez traversée n'est pas trop mal lotie.

Mme Bloodworth: Je suis allée plus au nord que cela.

Je suis certainement prête à voir ce que nous pouvons faire pour venir en aide aux habitants de cette région. Je ne connais pas la situation exacte des aéroports dont vous avez parlé. Je me renseignerai certainement là-dessus ainsi que sur les services de VIA Rail.

Je vous signale cependant que les subventions versées à VIA Rail ont été réduites.

M. Comuzzi: Je le sais. Voilà pourquoi j'ai bien précisé, madame Bloodworth, que je ne parlais pas de VIA Rail. Je parle du transport ferroviaire des passagers de cette région par automotrice ou par chemin de fer secondaire qui pourrait être exploité en collaboration avec le gouvernement de l'Ontario... Je suis sûr que le gouvernement de l'Ontario souhaite s'attaquer au problème, et je signale simplement le fait que le concours du gouvernement fédéral est nécessaire.

La première chose à faire, c'est d'entamer des discussions avec le gouvernement provincial sur cette région. Voilà pourquoi je cherche à rencontrer le ministre depuis octobre.

Mme Bloodworth: M. Ranger sait peut-être ce qu'il en est. Nous étudierons certainement la question.

M. Comuzzi: Je vous remercie.

Le président: Monsieur Keyes.

M. Keyes (Hamilton-Ouest): Comme c'est la première fois que vous comparaissez devant le Comité des transports, madame Bloodworth, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue ainsi qu'à vos collaborateurs. Au moment de l'étude du budget des dépenses, nous revoyons des visages familiers. Vos fonctionnaires sont d'ailleurs toujours prêts à venir nous prêter main forte au besoin.

Depuis que M. Anderson a remplacé, il y a six mois, l'honorable Doug Young comme ministre des Transports, des dizaines de députés lui ont fait part de leurs préoccupations en ce qui touche les transports, et il leur a offert à tous la même collaboration. D'ordinaire, les députés transmettent au ministre un dossier l'informant du but de l'entretien demandé. La discussion est ainsi fructueuse et permet souvent de trouver une solution rapide aux problèmes soulevés. Je crois donc que le ministre mérite des félicitations.

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Le fait que les accidents ont diminué et que les services offerts sont plus efficaces reflète le fait que les normes de sécurité demeurent une priorité. Nous nous engageons dans une ère de commercialisation et de privatisation. À votre avis, quel rôle jouera le ministère des Transports dans la formulation de la politique en matière de transports? Étant donné les changements survenus au ministère, constatez-vous une évolution dans la façon dont la politique des transports est mise en oeuvre ou dans la façon dont elle est formulée? Pensez-vous que le ministère va jouer un rôle accru dans le domaine de l'élaboration des politiques ou pensez-vous que ce sera l'inverse?

Mme Bloodworth: Je ne pense pas que son rôle dans l'élaboration des politiques changera beaucoup. S'il est vrai que les politiques en matière de transports ont changé, elles demeurent nécessaires.

La nouveauté, c'est que le ministère n'est plus avant tout un ministère axé sur les opérations. Il y a quelques années à peine, la grande majorité des employés de Transports Canada jouait un rôle opérationnel au sein notamment de la Garde côtière, des aéroports ou du système de navigation aérienne. Lorsqu'un ministère est surtout axé sur les opérations, il est inévitable que sa haute direction consacre une grande part de son temps, de ses efforts et de son attention à régler les problèmes de nature opérationnelle.

Comme l'élaboration des politiques et l'établissement de normes de sécurité sont maintenant les principales attributions du ministère, il en découle que sa haute direction s'y consacre surtout.

Je crois que le ministère continuera de jouer un rôle important dans l'élaboration des politiques pour l'avenir prévisible. Il a beaucoup évolué au cours des dernières années, mais il faudra nécessairement que les politiques actuelles soient remaniées si les circonstances changent, ce qui est inévitable. Le ministère sera alors appelé à intervenir.

Étant donné que l'élaboration des politiques est du ressort de Louis, peut-être a-t-il une observation à faire.

M. Ranger: Je vous remercie. Beaucoup de nouvelles initiatives ont été mises en oeuvre ces dernières années dans le domaine des transports, dont une nouvelle politique aérienne internationale, «Ciels ouverts» dont nous nous félicitons. Comme vous vous en souviendrez, nous avons imposé des limites aux Américains au cours des deux ou trois premières années de mise en oeuvre de la politique. Je suis ravi de son succès, mais il faudra surveiller les choses de près une fois levées les limites fixées.

La Loi maritime du Canada permettra d'adopter de nouvelles approches et d'instituer un nouveau régime de reddition des comptes. Nous évaluerons les progrès à cet égard.

La Loi sur les transports au Canada, pour sa part, a complètement changé la situation en ce qui touche l'abandon des lignes secondaires. Nous suivons aussi de près l'évolution de ce dossier.

Je considère l'élaboration des politiques comme un processus évolutif. On lance une nouvelle idée, on suit le cours des événements et on rectifie le tir au besoin.

M. Keyes: J'essaie de comprendre si nous sommes passés d'un système fondé sur les opérations à un système de réglementation ou de régie dans le domaine des transports. Si le gouvernement a décidé de délaisser le secteur des opérations pour se concentrer sur l'élaboration des politiques, étant donné son objectif de commercialiser ou de privatiser certains secteurs d'activités, peut-il vraiment s'attendre à ce que les administrations privées créées pour exploiter les aéroports et les ports tiennent vraiment compte de son avis?

Mme Bloodworth: Je suis convaincue qu'elles tiendront largement compte de son avis d'autant plus que le gouvernement continuera pour l'avenir prévisible à détenir des actifs importants dans les aéroports et les ports. Ceux qui seront cédés au secteur privé sont d'importance locale et non pas nationale. Le gouvernement continuera de détenir les actifs du réseau national des aéroports ou du réseau national des ports - l'Administration portuaire canadienne - de sorte qu'il faudra continuer de s'y intéresser sur le plan de l'élaboration des politiques.

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Nos décisions revêtiront de l'importance pour le secteur privé aussi... Parlons pour un instant des chemins de fer qui appartiennent au secteur privé depuis une centaine d'années. Je ne doute pas que CP Rail se sente visée par les politiques de Transports Canada. C'est une évidence.

Le président: Je ne voyais pas de raison de s'inquiéter à ce sujet.

Mme Bloodworth: La société a prêté attention à l'occasion à nos politiques.

Le gouvernement délaisse le secteur des opérations, ce qui vaut peut-être mieux.

M. Keyes: Nous en sommes convaincus.

Mme Bloodworth: Je ne m'avance pas trop en disant cela.

Dans le domaine des opérations, il faut savoir prendre des décisions rapides. Certaines sont bonnes, d'autres, mauvaises. Les gouvernements ne sont pas les mieux placés pour prendre des décisions rapides touchant les acquisitions ou le transfert des actifs. Cela ne signifie pas pour autant que nous n'exerçons pas une influence réelle dans le secteur; cela signifie simplement que cette influence s'exercera là où nous pouvons le mieux améliorer le réseau de transports.

M. Keyes: Je vous remercie de vos remarques.

Le président: J'aimerais aborder deux ou trois questions dont nous allons reparler plusieurs fois au cours des six prochaines semaines.

Je constate avec intérêt qu'il y a des différences entre le processus budgétaire provincial et le processus budgétaire fédéral. Dans le milieu de la gestion publique, l'adage veut que chaque dollar dépensé signifie une politique de plus. Je suis à Ottawa depuis peu, mais j'en suis venu à la conclusion que l'examen du budget des dépenses est assez superficiel. Le processus n'est pas aussi fructueux qu'il devrait l'être. Je suis personnellement d'avis que les députés pourraient participer plus activement au processus.

Dans le cours de notre étude du budget des dépenses, je voudrais que nous fassions une distinction nette entre l'étude des activités du ministère et l'examen de la politique publique. Je crois que c'est au ministre que nous devrions adresser nos questions en matière de politique. Ce n'est pas à vous de défendre la politique du gouvernement.

M. Keyes a cependant soulevé une question intéressante puisque le ministère doit accroître son rôle en matière de réglementation. Je suppose qu'il vous incombe d'évaluer l'ensemble du système de transports et d'en cerner et pallier les lacunes. Il existe donc une certaine interaction entre le rôle confié au ministre, qui est de gérer les politiques, et le rôle dévolu au ministère, qui est de cerner les problèmes et d'y trouver des solutions.

J'aimerais attirer votre attention sur quelques questions dont j'aimerais que nous discutions plus à fond dans les semaines qui viennent. La première a trait aux priorités du ministère. Ce document ne dit presque pas mot du plus important mode de transport des gens et des marchandises au pays. Il existe quatre modes de transport, et non pas trois. Vous semblez considérer que le transport ferroviaire est le principal mode de transport terrestre. Vous insistez sur la sécurité, laquelle revêt certes une grande importance dans le secteur des transports terrestres, et notamment dans le domaine du camionnage et de la circulation automobile. Il faut de toute évidence trouver une façon d'améliorer le quatrième mode de transport, le réseau routier national. Vous avez semblé en convenir, madame Bloodworth, mais le ministère n'est pas loquace à ce sujet. Pourquoi pas?

Mme Bloodworth: Le ministère a certainement un rôle à jouer dans le domaine routier, mais ce rôle est plus limité que dans le domaine ferroviaire ou que dans les domaines aérien et maritime. Je parle de la situation telle qu'elle est aujourd'hui et non pas telle qu'elle devrait l'être ou telle qu'elle le sera dans l'avenir. Je vous énonce simplement les faits.

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Nous exerçons notre rôle dans le domaine routier en versant des fonds aux provinces pour la construction et l'entretien des routes. Certains accords dans ce domaine n'expirent qu'en l'an 2000. Le gouvernement fédéral a toujours contribué à la construction et à l'entretien des routes, mais cette contribution a surtout pris la forme de paiements en espèces aux provinces qui décident de leur affectation. Je simplifie ici un peu les choses, mais je crois que je décris ainsi assez exactement notre rôle.

Le ministère joue donc un rôle dans le domaine routier. Cela étant dit, les routes sont un domaine de compétence provinciale... j'hésite à parler de «compétence», car, je viens de le dire, le gouvernement fédéral dépense de l'argent dans ce domaine. Il n'en demeure pas moins que la gestion des routes relève des provinces. Les provinces ont parfois reçu de l'aide du gouvernement fédéral dans ce domaine, mais ce sont elles qui ont construit la plupart des routes et qui en assurent l'entretien.

Le gouvernement fédéral s'intéresse aussi aux véhicules qui empruntent les routes. L'application du code de la route ainsi que la réglementation directe de la circulation routière sont cependant des domaines qui appartiennent surtout aux provinces. Certaines exceptions s'appliquent pour ce qui est des normes touchant les nouveaux véhicules. Le ministère a certainement joué un rôle dans l'élaboration du code national de sécurité et nous avons collaboré avec les principaux groupes comme le CCATM à établir les normes.

Le document qui vous a été remis reflète donc simplement la réalité. Le ministère joue un rôle dans le domaine routier, mais pas un rôle aussi important que dans les domaines ferroviaire, aérien et maritime.

Le président: Où le ministère énonce-t-il ses politiques? Est- ce dans les documents que vous nous avez apportés? Où le ministère énonce-t-il ses activités pour l'année qui s'annonce ainsi que les problèmes sur lesquels il compte se pencher?

Mme Bloodworth: Il est certainement question des politiques du ministère dans les documents que nous produisons, mais permettez- moi de revenir à ce que vous disiez, à savoir qu'il appartient au ministre d'élaborer les politiques.

Les politiques dont il est question dans ces documents ont été approuvées par le ministre et, la plupart du temps, par le cabinet. Elles prennent souvent la forme d'une loi. Il y a une répartition très claire des attributions en matière d'élaboration des politiques. Il nous appartient évidemment d'appuyer le ministre dans l'exécution de ses fonctions et de lui présenter des recommandations, mais en bout de ligne, c'est le ministre qui choisit d'y donner suite ou non. Nous ne refusons pas d'élaborer les politiques, mais celles qui sont exposées dans les documents du ministère ont déjà été approuvées par les élus comme il se doit.

Je ne sais pas si je réponds complètement à votre question, mais nos documents ne renferment que des politiques approuvées qu'on nous demande de mettre en oeuvre. Si le ministre nous demande de lui formuler des recommandations ou de concevoir une politique, nous le ferons, mais nous ne préparons des énoncés de politique qu'à sa demande expresse. Il ne conviendrait pas que nous prenions l'initiative dans ce domaine. Cela reviendrait pour nous à faire du lobbying à l'extérieur du ministère, ce qui ne serait pas indiqué.

Le président: À titre d'ancien fonctionnaire provincial, je suis d'accord avec vous là-dessus. Il existe cependant une zone grise qui se situe pour le ministère entre choisir ses propres priorités et mettre de l'avant son propre point de vue, et cerner les lacunes dans des domaines de son ressort.

Mme Bloodworth: Cela ne fait aucun doute, monsieur le président. Il existe bien une zone grise. Comme vous l'avez fait remarquer, les fonctionnaires ne sont pas là pour défendre les politiques, mais pour les expliquer. C'est la théorie, mais elle ne colle pas toujours à la réalité. J'attache beaucoup d'importance à la théorie. En fait, il ne s'agit pas simplement de théorie, mais d'un principe démocratique important. Il n'en demeure pas moins qu'il existe effectivement une zone grise.

En collaboration avec les provinces, le ministère a établi un réseau national de routes. Il s'est agit en partie pour le ministère de proposer une approche dans ce domaine. On simplifie inévitablement les choses lorsqu'on répond à des questions. J'admets qu'il y a une zone grise.

Le président: Voici ma dernière question au sujet des routes. Le Comité a déposé un rapport et il a demandé au ministère d'y répondre. Quand pouvons-vous escompter recevoir cette réponse? Peut-être cela ne dépend-il pas de vous? Quel est le processus?

Mme Bloodworth: Le processus est le même dans le cas de tous les rapports. Nous attachons évidemment beaucoup d'importance aux rapports du Comité. Chaque fois que le Comité nous soumet un rapport, le Bureau du conseil privé nous demande d'y répondre et nous consultons à cet égard les ministères visés. Le ministre doit ensuite obtenir l'approbation du cabinet. Le processus n'en est encore qu'à ses premières étapes puisque le rapport est relativement récent.

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Cela étant dit, la partie du rapport qui porte sur les secteurs public et privé... Le ministre des Finances a déjà reconnu l'importance de ces partenariats. Bien qu'il ne s'agisse pas d'une réponse officielle, voilà un premier élément de réponse.

Le président: Je serais tenté d'ajouter quelque chose à ce sujet, mais je n'en ferai rien pour l'instant.

Comme je suis président du Comité, des députés me font continuellement part de leurs préoccupations. Je me suis constitué un petit dossier. Certaines questions n'intéressent qu'un député alors que d'autres peuvent en intéresser plusieurs. On s'entend généralement pour dire que les choses ont beaucoup évolué dans le domaine des transports. Le ministère s'est vraiment transformé en très peu de temps, et son personnel a accompli un travail admirable en essayant de définir quelle sera sa nouvelle orientation. Le cadre réglementaire doit nécessairement évoluer étant donné la création de toutes ces nouvelles entités privées, qu'il s'agisse d'aéroports, de ports, de chemins de fer ou de services de navigation aérienne. Le rôle du ministère évolue en fait constamment. Qu'en est-il des relations entre les divers modes de transport?

Lorsqu'on discute des transports avec les gens du milieu, il est surtout question de savoir comment acheminer les marchandises d'un point à l'autre plutôt que des liens entre les divers modes de transport comme c'était le cas par le passé. On parlait en effet davantage autrefois de la complémentarité des modes de transport aérien, ferroviaire, routier ou maritime. Il en a cependant été beaucoup question à Vancouver lorsqu'on nous a parlé de la relation entre la politique «Ciels ouverts» et l'industrie des croisières. Est-ce au secteur privé de démêler tout cela et au ministère de réagir ensuite aux propositions qu'il lui fera, ou sait-on un peu dans quelle direction le système s'oriente?

Convient-il de s'interroger à ce sujet? Faudra-t-il modifier le régime réglementaire pour tenir compte du fait que tous ces intervenants innovent à tout crin, du moins c'est ce que nous espérons? Cela pose-t-il des problèmes?

Mme Bloodworth: Il convient effectivement de s'interroger sur cette question. Je crains cependant que je n'aie pas de réponse très claire à vous donner. La question a bien été soulevée. Je me souviens qu'en janvier M. Anderson a coparrainé avec M. Judd Buchanan de la Commission canadienne du tourisme un sommet du tourisme à Vancouver auquel ont participé de nombreux chefs d'entreprises de l'industrie touristique et de l'industrie des transports. La question du lien entre les divers modes de transport a alors été abordée ainsi que la nécessité de rendre ces liens plus efficaces. La discussion là-dessus a été assez générale.

Il reste encore sans doute beaucoup à faire dans certains domaines et je ne prétends pas que nous ayons les réponses à toutes les questions. Puisqu'on s'est surtout employé au cours des dernières années à transformer les divers modes de transport, peut- être s'intéressera-t-on davantage aux liens entre ceux-ci dans les années à venir.

Je ne peux vraiment pas être plus précise pour l'instant.

Louis, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Ranger: J'oeuvre dans le domaine des transports depuis déjà un long moment et le concept de l'intermodalité a toujours existé, mais je crois qu'il est plus pertinent que jamais. Tout repose sur l'intégration des systèmes.

Dans le domaine du transport des passagers, le recoupement se situe très souvent entre les modes de transport de régie fédérale et les modes de transport de régie municipale. On peut se rendre assez rapidement à Vancouver, mais s'il faut mettre des heures pour se rendre au centre-ville, c'est qu'il y a un problème. Pour les passagers, le recoupement est le plus souvent entre le réseau de transport national et le réseau de transport local.

La situation diffère quelque peu pour ce qui est du transport des marchandises. Dans ce cas-ci, il y a très souvent recoupement entre deux modes de transport, le mode de transport ferroviaire et le mode de transport maritime, et ce recoupement est le plus souvent entre le réseau national et le réseau international. C'est de plus en plus fréquent. Nous devons nécessairement nous pencher sur ces recoupements si nous voulons vraiment améliorer l'efficacité du système des transports.

Cette question nous intéresse donc au plus haut point.

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Le président: Nous aimerions recevoir plus d'information sur cette question à mesure que les problèmes se posent. Je ne voudrais pas vous faire dire ce que vous ne voulez pas dire, mais je crois qu'on entend modifier le cadre réglementaire pour permettre aux différents secteurs du domaine des transports ou à certaines parties d'entre eux d'évoluer de manière à devenir de plus en plus compétitifs. Il est peut-être difficile de prédire comment les choses vont évoluer, mais on peut bien s'imaginer que l'intégration des modes de transport ne se fera pas sans heurts compte tenu de la concurrence qu'ils se livrent à l'heure actuelle. L'industrie du camionnage concurrence certainement l'industrie ferroviaire en ce moment.

Voilà qui m'amène à vous parler des symboles. Si j'oeuvre dans le domaine des transports, c'est en raison de l'article 27.2 de la Loi sur les chemins de fer ou s'agit-il plutôt de la Loi sur les transports au Canada. Cet article est reproduit sur les murs de mon bureau et il est gravé dans mon esprit. Vous savez sûrement à quel article je fais allusion. C'est l'article qui limite l'accès à l'agence lorsqu'il y a des différends. A-t-on exprimé des préoccupations à ce sujet? Est-il trop tôt pour savoir si les craintes suscitées par l'article 27.2 se sont matérialisées?

Mme Bloodworth: Je crois que vous faites allusion à l'ancien article 23. J'ai appris à bien connaître l'ancienne loi. Vous parlez du recours des expéditeurs. Est-ce bien ce dont il s'agit?

Je crois qu'il est trop tôt pour se prononcer. Les groupes représentant les expéditeurs ont abordé la question avec moi, mais aucun d'entre eux n'a réclamé de changement. Tous s'entendent pour reconnaître que les audiences tenues par le Comité l'année dernière ont abouti à un compromis. Certains continuent peut-être de penser qu'on a fait fausse route, mais six ou huit mois à peine se sont écoulés depuis l'adoption de la loi. Je crois qu'il faut attendre de deux à trois ans pour évaluer l'incidence de ce changement. Pour l'instant, il est encore trop tôt pour le faire.

Le président: Je dois admettre que certains ont été loin de considérer qu'il s'agissait d'un compromis. Nous suivrons ce dossier de près.

Je vais maintenant peut-être aborder une question d'intérêt plus local dans le domaine de la politique aérienne, «local» devant s'entendre ici de Winnipeg, quoique le même problème se posera sans doute dans le reste du pays. Martin Cauchon et moi avons d'ailleurs discuté à cet égard du cas de Mirabel. Je fais allusion ici à toute la question du fret aérien. Si je comprends bien, on a pris un certain retard dans ce domaine en ce qui concerne les accords bilatéraux. La loi qui régit les accords sur le transport du fret aérien est assez vieille.

M. Ranger peut peut-être me renseigner sur cette question. Si une entreprise d'affrètement ne transporte que des marchandises d'un pays à l'autre - d'un tiers pays au Canada, par exemple - cela pose peu de difficultés. Mais si une entreprise souhaite, comme c'est de plus en plus le cas, exploiter un service de transport de fret aérien et prendre quatre conteneurs ici et cinq là pour constituer un chargement comme le ferait un camion, cela risque de poser des difficultés parce que jusqu'ici le fret aérien a été transporté dans la soute des avions de passagers.

Ce genre d'activité continue-t-il de poser des difficultés? Sera-t-il nécessaire de modifier la loi ou d'adopter une nouvelle loi dans ce domaine?

M. Ranger: Vous avez très bien décrit le problème. Dans le cas des services réguliers, ce genre d'activité est régie par les accords de services aériens bilatéraux.

Dans la plupart des cas, le transport des colis s'effectue dans la soute des avions. Quand un affréteur achemine un chargement de marchandises du point A au point B, il n'y a pas de problème. Si une entreprise veut cependant affréter un avion pour transporter des colis provenant de différents clients, on a jusqu'ici considéré que cela revenait à faire concurrence aux transporteurs réguliers qui chargent ces colis dans leur soute.

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Nous revoyons actuellement toute cette question en raison notamment de la demande qui nous a été soumise par Winport. Nous entamons des consultations sur la question. On nous a d'ailleurs demandé de les mener le plus rapidement possible.

Le président: Je vous remercie. Nous souhaiterons peut-être discuter de cette question plus en détail avec les représentants de Winport lorsque nous les aurons invités à comparaître devant le Comité.

M. Keyes: Monsieur le président, je m'intéresse aussi aux conclusions de cette étude parce que l'aéroport de Hamilton ne peut évidemment pas faire concurrence à l'aéroport de Toronto pour le transport de passagers, mais il le fait avec assez de succès pour le transport des marchandises. L'aéroport prend de plus en plus d'importance parce qu'il assure le transport de colis provenant de UPS, FedEx et Purolator. Je veux donc en savoir davantage sur le sujet.

Le président: Je crois que nous entendrons beaucoup parler de cette question qui intéresse non seulement les aéroports de Hamilton, de Calgary et évidemment de Mirabel, mais plusieurs autres.

Il s'agit de transporter des marchandises d'un point à l'autre. Quel que soit le mode de transport choisi, il faut tenir compte de différentes contraintes comme celles des délais et des inventaires. C'est une question d'une grande importance. Nous ne voudrions pas nous retrouver avec une nouvelle industrie compétitive et découvrir encore une fois que notre régime réglementaire désuet constitue une entrave à son développement.

Je trouve tout cela fort encourageant. Certains peuvent penser que la disparition de la LTGO a durement frappé l'Ouest canadien. Je suis parmi ceux qui pensent que c'est exactement le contraire. L'élimination de cette subvention et de la réglementation qui l'accompagnait a été bénéfique pour la région. Il ne faudrait pas maintenant que d'autres mesures réglementaires nous empêchent de tirer parti des occasions qui se présentent. Voilà donc un domaine qui nous intéresse beaucoup.

Vous avez mentionné une autre question sur laquelle nous souhaiterons peut-être tenir une audience dès jeudi. Il s'agit de la sécurité et dans ce cas-ci également, les gouvernements fédéral et provinciaux se partagent la responsabilité. Il semblerait qu'on ne tienne pas vraiment compte des problèmes propres à certains exploitants et qu'on agit peut-être... J'étais sur le point de dire qu'on manquait de professionnalisme et de respect à leur endroit. C'est qu'il y a incohérence dans la mesure où le gouvernement fédéral soutient qu'il doit traiter toutes les provinces et tous les intervenants de la même façon et que les provinces allèguent, pour leur part, qu'elles ne peuvent intervenir dans le domaine sans le concours du gouvernement fédéral qui n'est d'ailleurs pas le seul intervenant du domaine. La position du gouvernement fédéral est qu'il ne peut intervenir sans le concours des dix provinces. Il en découle qu'une ou plusieurs petites entreprises d'une petite région du pays sont laissées pour compte.

J'ai eu personnellement connaissance d'un cas de ce genre l'an dernier. J'ai été choqué de voir que notre gouvernement et notre ministère faisaient si peu de cas de préoccupations légitimes. Je veux que nous examinions très attentivement la semaine prochaine les mécanismes prévus pour permettre aux gens de communiquer au gouvernement leurs préoccupations. Dans ce cas-ci, il s'agissait de la sécurité dans le domaine du camionnage.

Je m'attends à ce que plus nous avancions dans l'examen de la réglementation, plus nous soyons confrontés aux difficultés qui se posent. Il s'agit de savoir ce qu'il advient des petites préoccupations qui sont exprimées.

Nous admettons que l'exploitation n'est pas notre fort. Il y a d'abord la question de la taille. On ne peut pas laisser Vancouver faire quelque chose qui pourrait avoir une incidence sur ce qui arrive à Montréal ou à Halifax, et on décide donc de se retirer du domaine. Nous semblons cependant toujours intervenir dans d'autres domaines. Je veux que nous parlions assez longuement jeudi prochain de la question de la sécurité dans le domaine du camionnage.

M. Keyes: Pendant que vous reprenez votre souffle, monsieur le président, peut-être pourrais-je poser une question.

Le président: Certainement. Lorsque l'Opposition sera représentée, je lui permettrai aussi de poser ses questions.

M. Keyes: Oui. Il est malheureux qu'aucun député de l'Opposition ne soit ici.

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Vous m'avez fait réfléchir à quelque chose lorsque vous avez mentionné l'industrie des croisières. Je me trouvais à Québec à l'arrivé du Westerdam, l'un des gros navires de croisière de la société Holland America. Quel navire impressionnant! Les milliers de passagers à bord sont descendus à Québec pour visiter la ville et y dépenser de l'argent comme ils l'ont fait dans d'autres ports situés entre New York et Québec. Holland America affirme avec fierté ne faire que trois escales de deux jours dans le monde, et l'une est à Québec. C'est vraiment à notre avantage.

Les représentants de Holland America ont abordé avec plusieurs d'entre nous la question des jeux d'argent. Lorsqu'un navire de croisière entre dans nos eaux et longe la péninsule de Gaspésie jusqu'à Québec, ses casinos doivent fermer leurs portes. Or ces casinos rapportent beaucoup d'argent à Holland America, tellement d'argent en fait que cela pourrait l'amener, ainsi que d'autres à se demander s'il ne vaudrait pas mieux cesser d'entrer dans nos eaux pour amener leurs passagers visiter nos sites touristiques.

D'autres sociétés de croisière ont dit vouloir emprunter la même route pour venir au Canada, ce qui rapporterait à des villes comme Québec beaucoup d'argent et stimulerait le tourisme dans l'ensemble du Canada. Il a même été question que quatorze navires de croisière passent pendant l'été à Québec.

Je comprends bien que c'est la réglementation provinciale qui détermine si un navire mouillé à quai dans une municipalité donnée peut ouvrir son casino. Je sais également qu'il faudrait modifier le code criminel si nous voulons changer quoi que ce soit à cet égard, et c'est pourquoi j'ai soulevé la question auprès du ministre de la Justice, M. Allan Rock.

La question est simple... Dès qu'il mouille à l'un de nos ports, un navire ayant à bord un casino doit le fermer. On comprend la raison d'être de ce règlement. On veut d'une part que les gens descendent du navire et, d'autre part, on ne veut pas réduire les revenus d'une municipalité où pourrait se trouver un casino. On veut dans ce cas inciter les passagers du navire à aller au casino municipal. Une fois que tous les passagers du navire remontent à bord, pourquoi ne permettrions-nous pas à ce navire de rouvrir son casino? Une fois que le navire est reparti, les passagers à son bord ne vont pas revenir à la nage jouer dans nos casinos.

Lorsque je lui ai parlé de la question, M. Allan Rock m'a dit qu'elle relevait du ministère des Transports. Je lui ai répondu que je ne pensais pas que ce soit le cas et qu'il fallait modifier la loi. Il semblerait que Transports Canada ait aussi quelque chose à voir avec cette question. Qu'en est-il? Qu'entend-on faire à ce sujet? Va-t-on complètement s'en remettre au ministre de la Justice et attendre que son ministère présente éventuellement un document de discussion?

Mme Bloodworth: Je ne sais pas du tout ce qu'il en est. J'ai pensé que c'était peut-être parce que j'occupe mon poste depuis peu, mais je vois que mes collègues ne sont pas plus renseignés que moi.

Des voix: Oh, oh!

Mme Bloodworth: Nous nous renseignerons donc à votre intention.

M. Keyes: Je vous en serais reconnaissant parce que...

Mme Bloodworth: Nous ignorions qu'il s'agissait d'une question touchant les transports, mais...

M. Keyes: Je suppose que c'est une question touchant les transports parce que cela concerne un navire se trouvant dans la voie maritime, mais il faudrait aussi modifier le code criminel pour régler le problème.

Je ne comprends pas vraiment pourquoi le fait d'apporter une modification aussi simple au code criminel serait si compliqué. Cela réglerait le problème auquel fait face non seulement Holland America sur le fleuve Saint-Laurent à hauteur de Québec, mais également d'autres exploitants de navires de croisière qui empruntent le passage intérieur le long de la côte Ouest de la Colombie-Britannique. C'est vrai qu'il existe des casinos à Vancouver. On peut effectivement demander aux navires de croisière de fermer leur casino dès qu'ils descendent leur passerelle de débarquement. Je ne vois pas la complication. Une fois que la passerelle est remontée, pourquoi faudrait-il que le casino soit fermé? Quelle différence cela fera-t-il? Je simplifie peut-être trop les choses, mais j'aimerais bien qu'on m'explique quel est le problème.

Le président: Je crois, monsieur Keyes, que vous soulevez une question importante à plusieurs égards. Il en a d'ailleurs été beaucoup question lors des audiences sur la Loi maritime du Canada que nous avons tenues dans tout le pays. Il s'agit pourtant d'une question qui peut sembler simple à première vue et peut-être même lorsqu'on y regarde de plus près.

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Ce que M. Keyes vient de proposer semblerait... Il suffirait peut-être que quelques personnes raisonnables discutent du problème pour y trouver une solution. Un peu comme pour la sécurité dans le domaine du camionnage, on ne sait pas trop où se situe la responsabilité. Chacun se renvoie la balle. Personne ne prend les choses en main et personne ne rencontre les intéressés. De cette façon, le problème ne se règle jamais.

Si la question relève clairement du ministère de la Justice comme c'est peut-être le cas, il faudrait bien le savoir. Quelqu'un doit prendre le dossier en charge.

Mme Bloodworth: Nous veillerons à nous renseigner, monsieur le président, et à communiquer le résultat de nos recherches à M. Keyes.

M. Keyes: En effet, quelqu'un doit prendre le dossier en charge. Lorsqu'un comité comme le nôtre tient des audiences à l'extérieur d'Ottawa et qu'on soulève devant lui à plusieurs reprises ce genre de question, quelqu'un en prend-il note? Quelqu'un avise-t-il le ministère du problème qui a été signalé et propose-t-on des façons d'y remédier même si ce problème ne se rapporte peut-être pas au sujet même d'étude de ce comité?

Mme Bloodworth: Tous les ministères, dont le nôtre, suivent les activités de leur comité permanent respectif. Il existe cependant toujours le risque que personne ne prête attention à une question qui ne relève pas du mandat du ministère.

Je confesse cependant mon ignorance sur cette question, mais je m'engage à me renseigner afin de savoir de qui elle relève au niveau fédéral.

Le président: Étant donné l'étendue des sujets dont il est saisi, le Comité lui-même ne peut pas prétendre tout savoir.

Puis-je attirer votre attention sur la page 19 du document que vous nous avez remis? On y traite de deux questions intéressantes. Il y a d'abord le constat que le nombre de décès, attribuables aux accidents de la route par 100 000 conducteurs détenant un permis de conduire a diminué au Canada de 40 p. 100 dans la décennie qui s'est terminée en 1994. C'est un résultat très impressionnant. À quoi l'attribuez-vous?

Mme Bloodworth: M. Jackson pourra vous donner des détails, mais je crois que pendant cette période, tant les gouvernements fédéral que provinciaux ont mené de grandes campagnes de sensibilisation sur les méfaits de l'ivresse au volant et sur les avantages des ceintures de sécurité. Toutes les mesures qui ont été prises - et je parle ici à titre de citoyenne - ont eu un impact. Permettez-moi de donner la parole au spécialiste de la question qui pourra vous donner plus de détails.

M. Jackson: Monsieur le président, je crois qu'on peut attribuer à trois ou quatre facteurs l'énorme déclin dans le nombre de décès. Sans doute le plus important de ces facteurs est le port de la ceinture de sécurité. Il y a dix ans, probablement moins de 50 p. 100 des automobilistes canadiens portaient leur ceinture de sécurité alors que c'est maintenant le cas de 92 p. 100 d'entre eux. Voilà un facteur qui améliore de beaucoup la sécurité sur les routes.

Les dispositifs de sécurité installés à bord des véhicules automobiles constituent le deuxième facteur auquel il faut attribuer cette amélioration. Les véhicules automobiles d'aujourd'hui présentent beaucoup moins de risques pour la sécurité que ceux d'il y a dix ou quinze ans, et ce notamment en raison des améliorations technologiques qui leur ont été apportées ainsi que des normes qui s'appliquent aux caractéristiques des pneus et à la fiabilité des pièces automobiles.

M. Keyes: Les feux de position à allumage permanent.

M. Jackson: On a apporté tout un ensemble d'améliorations aux véhicules qui en accroissent la sécurité comme les feux de position à allumage permanent ainsi que les feux arrière installés dans la lunette arrière.

Le troisième facteur est sans doute celui qu'a mentionné la sous-ministre, c'est-à-dire tous les programmes de sensibilisation portant sur les comportements à risque comme la conduite en état d'ivresse, des comportements qui sont maintenant tout à fait inacceptables et qui ne l'étaient pas autrefois. L'utilisation des sièges pour enfants est maintenant aussi répandue. L'effet combiné de ces facteurs explique cette amélioration.

M. Keyes: L'amélioration des routes pourrait-il constituer un quatrième facteur?

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M. Jackson: J'allais justement dire, M. Keyes, que les routes sont probablement meilleures qu'elles ne l'étaient autrefois bien que je ne sois pas sûr...

M. Keyes: Le contrôle de la sécurité sur les routes... Comment s'appelle la route qui va de la 401 à Peterborough?

M. Jackson: La 115.

M. Keyes: La 115 était autrefois une route à chaussée unique ayant de part et d'autre des stations de service et des cafés. C'est maintenant une route à double chaussée. J'imagine que le nombre d'accidents de tout genre, et pas seulement les accidents mortels, ont considérablement diminué sur ce tronçon seulement.

Le président: Si l'on tient compte de la sécurité dans la conception des routes... Un des arguments qui milite d'ailleurs pour l'établissement d'un réseau national de routes, c'est qu'on croit qu'on réduirait ainsi encore davantage les morts sur les routes et qu'on augmenterait la sécurité.

Le débat est intéressant. J'ai entendu Michael Walker de l'Institut Fraser donner une communication dans laquelle il insistait sur le fait que toutes les améliorations apportées aux voitures comme les ceintures de sécurité et les cages de simulation de collision, n'avaient fait que donner un faux sentiment de sécurité aux conducteurs et que si l'on voulait vraiment que les attitudes changent, il faudrait demander aux gens de conduire des voitures avec des pare-chocs en plastique et un volant avec un gros pieu au milieu. D'après lui, le nombre de décès augmente. Je crois que nous pouvons tous être très fiers de cet impressionnant résultat.

M. Jackson: J'ajoute, monsieur le président, que cette statistique vaut pour 1994. La situation s'est encore améliorée en 1995 et 1996. Nous nous dirigeons donc dans la bonne voie.

Le président: La presse a fait grand cas aux États-Unis de deux ou trois accidents effroyables dans lesquels des enfants ont péri à bord de voitures équipées de coussins pneumatiques de sécurité. Vous a-t-on fait part de préoccupations à cet égard?

M. Jackson: Oui, monsieur le président. La situation est quelque peu différente au Canada parce que le port de la ceinture de sécurité est beaucoup plus répandu ici qu'aux États-Unis. Cela étant dit, en raison de la façon dont les coussins pneumatiques sont conçus, certaines personnes sont plus vulnérables que d'autres parce que la distance entre eux et le coussin n'est pas suffisamment grande.

Comme vous le savez, à la demande du ministre, l'industrie s'est engagée volontairement à désactiver les coussins pneumatiques de sécurité sur les modèles de l'an prochain. Cela atténuera un peu les risques qu'ils présentent. On continue cependant de craindre pour la sécurité des personnes de petite stature parce que la distance qui les sépare du coussin pneumatique de sécurité n'est pas suffisante, d'où la campagne en vue d'inciter les parents à asseoir leurs enfants sur la banquette arrière.

Le président: Je vous remercie, monsieur Jackson. C'est une question dont on nous parle beaucoup. Je n'étais pas au courant de l'accord que vous avez mentionné. J'ai deux jeunes enfants, et pendant un moment, tout cela m'a beaucoup inquiété.

Mme Bloodworth: Il importe cependant de ne pas oublier que les coussins pneumatiques de sécurité sauvent des vies. Il faut cependant régler le problème qu'ils posent pour les personnes de petite stature. Dans le cas des enfants, il suffit de les asseoir sur la banquette arrière. Lorsqu'ils grandissent, ce n'est pas toujours l'endroit qu'ils préfèrent, mais c'est là qu'ils sont le plus en sécurité. Il importe cependant de ne pas oublier que les coussins pneumatiques de sécurité sauvent des vies de façon générale.

Le président: Et on peut peut-être leur attribuer un rôle dans la diminution du nombre d'accidents de la route mortels.

Permettez-moi de vous remercier de nous avoir consacré du temps aujourd'hui. Je me réjouis à l'idée de travailler avec les fonctionnaires de votre ministère.

J'ai une dernière précision à demander sur le même ensemble de questions. J'ai demandé aux députés de me faire des propositions quant aux questions se rapportant au budget des dépenses dont ils aimeraient discuter de façon plus structurée. J'aimerais que le rapport que je compte présenter à la Chambre avec l'appui du Comité analyse le document exposant les plans et les priorités du ministère. Il contiendra sans doute quelques recommandations précises en matière de politique, car nous voulons être aussi utile que possible au ministère.

On nous a demandé d'étudier les préoccupations exprimées au sujet de l'abandon de certains services aériens ou de leur transfert de Mirabel à Dorval. J'aimerais savoir quel est votre avis là-dessus. Comme les tribunaux sont, me dit-on, saisis de cette affaire, il vaudrait peut-être mieux que le Comité attende qu'ils aient rendu leur décision avant de se pencher sur la question.

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Je comptais consacrer une matinée à l'étude de cette question parce que je crois que nous devons tenir compte des préoccupations exprimées par tous les députés et pas seulement par les députés ministériels.

Pensez-vous que le moment est opportun pour étudier ce dossier? Vous n'êtes peut-être cependant pas en mesure de répondre à cette question.

Mme Bloodworth: Comme vous le savez, cette affaire ne met pas en cause le gouvernement fédéral. C'est évidemment au Comité de décider comment il veut procéder, mais je sais que les comités parlementaires ainsi que le Parlement lui-même ont toujours fait preuve de grande prudence lorsqu'une affaire était devant les tribunaux de crainte de compromettre l'indépendance du pouvoir judiciaire. Je vous conseille d'agir avec la même prudence en l'occurrence.

Le président: Je vous remercie beaucoup. Nous ne vous avons pas trop malmenée au moins?

Mme Bloodworth: Pas du tout, monsieur le président.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

La séance est levée.

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