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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 9 mai 1996

.0914

[Traduction]

Le président: Je déclare la séance ouverte. Bonjour à tous.

Ce matin, dans le cadre de nos audiences sur la pêche au saumon du Pacifique et le Plan de relance du ministre, je voudrais souhaiter la bienvenue à M. Don Cruickshank qui a rédigé deux rapports approfondis sur la pêche sur la côte du Pacifique, et à M. Peter Pearse, qui a également écrit un rapport sur cette question.

Messieurs, voici comment nous aimerions procéder: Faites-nous chacun un bref exposé de votre réaction au plan de relance et ensuite nous passerons aux questions.

La semaine dernière, nous avons rencontré les membres de divers groupes qui nous ont donné leurs points de vue sur le plan et évidemment, la question comporte plusieurs facettes.

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Ce qui nous intéresse particulièrement, c'est la pêche comme telle et ceux qui la pratiquent. Comme politiques, nous nous préoccupons du sort des individus et des localités ainsi que de l'avenir de la ressource. Sans elle évidemment, personne ne peut travailler dans ce secteur.

Monsieur Cruickshank, voulez-vous commencer? Ensuite nous entendrons l'exposé deM. Pearse et nous passerons aux questions.

M. Don Cruickshank (témoigne à titre personnel): Merci, monsieur le président.

Mesdames et messieurs les membres du comité, je m'excuse de mon retard, mais d'après mon horloge biologique, il est six heures et non neuf heures et je suis donc un peu rouspéteur ou raisonneur ce matin... Je ne suis même pas poli envers mon épouse à cette heure-là du matin.

Je tiens à souligner que je suis ici parce qu'on m'y a invité. Avoir eu le choix, je serais actuellement en train de jouer au golf. Toutefois, j'ai pensé que ce comité serait peut-être le seul moyen, la seule organisation ou le seul groupe, à pouvoir donner des conseils objectifs au ministre. J'estime que des conseils sur son plan ne seraient pas un luxe. Je pense que son personnel l'a mal conseillé, notamment en ce qui sur son plan ne seraient pas un luxe. Je pense que son personnel l'a mal conseillé, notamment en ce qui concerne la rationalisation de la flotte et la réduction de celle-ci puisque dans le programme présenté au ministre, on n'a pas du tout tenu compte des critères de base d'une telle réduction.

Pendant une vingtaine d'années, je me suis beaucoup occupé de cette question en collaboration avec le ministère des Pêches et des Océans et au moins deux aspects revenaient sans cesse dans le contexte d'une réduction de la flotte: d'abord, la flotte recherchée. Nous savons ce que nous avons maintenant, mais quel est l'objectif pour l'avenir? Le plan à l'étude actuellement ne fait aucune mention de la taille de la flotte recherchée. Deuxièmement, il n'y est pas non plus question de la composition de cette flotte. Il s'agit de la flotte qui pêche le saumon de la Colombie-Britannique. Nous ne savons toujours pas combien il y aura de bateaux de pêche à la senne, à la traîne et aux filets maillants après cet exercice.

Dans un troisième temps, il faut songer à la répartition géographique de cette flotte. Qu'arrivera-t-il aux localités côtières si nous retirons un trop grand nombre de bateaux d'une seule et même localité?

Il est possible de contrôler le rachat des licences, c'est donc un aspect à maintenir dans le plan, mais l'accumulation des permis de zone ne peut être contrôlée. Près d'où j'habite, il y a une petite localité de pêche dotée d'une flotte résidente de 16 bateaux de pêche au saumon à la senne. Déjà, 12 de ces bateaux ont été mis en vente. Est-ce que le même phénomène se reproduira dans d'autres petites localités? Allons-nous les éliminer complètement? Je pense que c'est le genre de choses qu'il faut contrôler et réglementer par le biais du processus de réduction de la flotte.

Je pense que si nous voulons formuler des recommandations sur la façon de perfectionner le plan ou de remédier aux erreurs, il nous faut d'abord examiner ce qui a donné lieu aux recommandations faites au ministre. Ses planificateurs et économistes ont parlé de surcapitalisation de la flotte. Ils ont parlé de surcapacité. Personne n'a déterminé quelle devrait être la bonne capacité. À mon avis, les chiffres utilisés sont faussés. Lorsqu'ils parlent de surcapitalisation, ils en arrivent à cette constatation en se fondant sur un questionnaire que l'on a envoyé aux pêcheurs qui y ont peut-être répondu dans une proportion de 10 p. 100. On extrapole à partir de ce taux de réponses pour en arriver à dire que la flotte est capitalisée à 1,2 milliard de dollars.

Les pêcheurs qui répondent au questionnaire du ministère des Pêches et des Océans se disent que ce n'est que la première étape d'un programme de rachat et évidemment ils gonflent les chiffres. À mon avis, il faut tenir compte de deux valeurs dans le calcul de la capitalisation. Vous pouvez soit tenir compte de la juste valeur marchande de la flotte, des permis et des engins ou vous pouvez vous fonder sur la valeur amortie, mais non pas sur la valeur que ces petits hommes d'affaires assignent à leurs entreprises s'ils vendaient à la pièce. Si l'on veut calculer la surcapitalisation, il faut le faire selon une méthode comptable acceptée.

En ce qui concerne la surcapacité, de quelle capacité s'agit-il? Un économiste reconnu a déclaré il y a quelques années que nous pourrions prendre tout le saumon de la côte du Pacifique avec cinq bateaux senneurs. Est-ce ce que nous voulons? Voulons-nous la plus petite flotte possible pour prendre la ressource ou voulons-nous autant de bateaux et de pêcheurs que la ressource peut soutenir? Voilà la question à laquelle il faut répondre avant d'entreprendre un programme de réduction de la flotte. Visons-nous une flotte de cinq bateaux pour prendre ce poisson? Si c'est le cas, pourquoi avoir des bateaux? Pourquoi ne pas tout simplement placer des pièges?

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Il nous faut déterminer, sur le plan philosophique et politique, quel genre de flotte nous aurons. Voulons-nous nous doter d'une flotte que la ressource prévue pourra raisonnablement soutenir?

Il faut fignoler ce programme. Il faut reporter la date limite pour le choix des zones au-delà du 24 mai afin de donner aux pêcheurs le temps de vraiment participer au processus. Les pêcheurs devraient avoir la possibilité de se retirer de la pêche de 1996 sans qu'il ne leur en coûte trop cher. Nous devons examiner sérieusement la disposition sur le cumul des permis de zone et trouver autre chose.

Je ne suis pas venu ici pour prononcer un discours devant un groupe de politiciens. Ce serait comme envoyer du charbon à Newcastle. On m'a invité afin que je puisse répondre aux questions qui ressortent des deux rapports que j'ai rédigés - le rapport du Comité sur la rationalisation de la flotte que j'ai rédigé à la demande de l'honorable Roméo LeBlanc en 1982 et mon rapport de 1991 préparé à la demande d'un regroupement d'organisations de pêcheurs.

Si en répondant à vos questions ou autrement, je peux contribuer à résoudre ou à désamorcer la situation actuellement explosive sur la côte Ouest, si je peux vous être d'une aide quelconque, je suis certainement disposé à le faire, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Pearse.

M. Peter Pearse (témoignage à titre personnel): Merci, monsieur le président. Je tiens à vous remercier, vous et vos collègues, de me donner cette occasion de vous faire part de mes préoccupations quant à la direction que prend notre politique en matière des pêches sur la côte Ouest.

Je sais qu'un grand nombre de personnes de l'industrie de la pêche vous ont fait des exposés. Je tiens à vous faire remarquer que je ne travaille pas directement moi-même dans l'industrie de la pêche. Je suis un observateur tout à fait extérieur et très intéressé.

Mes remarques se situent dans le contexte - et je tiens à le souligner - de la crise à laquelle est confrontée la pêche de la côte Ouest. Cette crise se prépare depuis un certain temps, depuis au moins 15 ans et même plus. Au fil des ans, on a exhorté, encore et encore, le gouvernement fédéral, à s'attaquer au problème à l'origine de la crise actuelle. Toutefois, le gouvernement, au cours de ces15 années, n'a à peu près rien fait. L'effort du gouvernement fédéral pour restructurer la pêche sur la côte Ouest ces 15 dernières années n'a pas été accompagné du même genre d'effort sur la côte du Pacifique.

La crise actuelle est d'origine économique. C'est une crise de surcapacité. La crise ne provient pas d'une diminution continue des stocks, bien que ce soit là aussi un problème. La crise actuelle découle de la capacité, sans cesse croissante, de la flotte et des coûts afférents, ce qui influe sur la rentabilité de l'industrie.

Au cours de la dernière année, la crise s'est précipitée en raison d'une série d'événements: la croissance continue et la surcapacité de la flotte, quelques années de faibles prises et de prix déprimés pour le poisson. Voilà ce qui a donné lieu à la crise actuelle.

Les tendances actuelles de cette industrie ne peuvent tout simplement pas être maintenues. Il nous faut faire quelque chose. Je suis persuadé que les membres de ce comité sont suffisamment au courant de la situation pour qu'il soit inutile que je leur fasse part des derniers événements, mais il est important de ne pas oublier ce qui s'est passé.

Conscient de la crise imminente et dans la foulée du rapport de l'ambassadeur Fraser d'il y a quelques années, M. Tobin, alors ministre, annonçait qu'il allait faire quelque chose afin de rationaliser la flotte et qu'il allait constituer une table ronde composée de membres de l'industrie afin de le conseiller. Ce groupe a travaillé ferme pendant longtemps, a formulé quelques recommandations et le ministre actuel a maintenant annoncé un plan qu'il prétend fondé sur les recommandations de la table ronde.

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En fait, le plan Mifflin inclut certaines des principales recommandations du groupe de la table ronde. On y prône la réduction de la flotte, un des principaux points des recommandations. On y préconise une intervention avant la saison de pêche de 1996, ce que le groupe avait également recommandé. Il y est question du rachat des permis de pêche en vertu d'une formule volontaire, fondée sur un financement considérable par le gouvernement fédéral. La question de la répartition a été renvoyée à un arbitre indépendant. C'était également ce que préconisaient les membres de la table ronde. Il y est également question de plus...

M. Wells (South Shore): Voulez-vous répéter le cinquième point, s'il vous plaît.

M. Pearse: Le problème de la répartition; il s'agit de la répartition des prises entre les secteurs de la flotte que l'on a renvoyée à un conseiller indépendant.

On y prévoit également une plus grande participation de l'industrie dans la gestion de la flotte. On y prévoit aussi l'engagement de passer d'un régime de recettes provenant des droits de permis de pêche à des recettes provenant des droits de débarquement.

Le plan Mifflin inclut également quelques idées qui n'ont pas su faire l'unanimité à la table ronde mais qui avaient été préconisées par un ou plusieurs groupes sectoriels dont les rapports étaient annexés au rapport de la table ronde. Il s'agit des permis par type d'engin et des permis de zone et de cumuls de zones, probablement un des aspects les plus controversés, auquel d'ailleurs j'aimerais revenir dans un instant.

Troisièmement, le plan Mifflin n'inclut pas certains aspects préconisés par les membres de la table ronde, y compris des mesures d'incitation fiscale afin de faciliter les rachats, l'idée des garanties de prêts afin de faciliter l'accumulation des permis et une aide financière aux travailleurs déplacés.

Chaque groupe du secteur des pêches, comme vous le constatez, j'en suis persuadé, peut trouver matière à objection dans ce plan. Je pense toutefois que nous risquons à cause des inquiétudes suscitées par des aspects particuliers de perdre de vue l'ensemble sur lequel, je pense, nous sommes tous d'accord. C'est peut-être imprudent de le dire, mais incontestablement, les milieux de pêche reconnaissent majoritairement qu'il est urgent de réduire considérablement la flotte de pêche au saumon sur la côte Ouest.

À mon avis, nous devons faire en sorte que ce plan réussisse. Je tiens à souligner que d'une façon générale, on est d'accord avec un grand nombre des éléments fondamentaux de ce plan. On est d'accord, dans l'ensemble, sur la nécessité de réduire considérablement la flotte, sur une intervention avant la saison actuelle, sur le rachat, un rachat volontaire, sur le financement par le gouvernement fédéral du rachat, sur les solutions proposées au problème de la répartition, sur une plus grande participation de l'industrie et sur les droits de débarquement. Il y a accord substantiel mais non unanime sur des aspects tels que les permis pour un seul engin de pêche, sur les permis de zone et le cumul des permis.

Monsieur le président, je pense qu'il est utile de cerner les sujets de préoccupation, car nous en arrivons au moment où il faudra trancher par des décisions politiques, qu'il ne sera pas facile de prendre, les aspects du plan qui demeurent en litige.

Il y a trois genres d'objections au plan. Il y a d'abord l'opposition à certains aspects du plan. Je pense que les dispositions les plus controversées portent sur les permis de zone, l'accumulation des permis et les coûts que cela entraînera pour les propriétaires de bateaux.

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Dans un deuxième temps, on reproche au plan de ne pas traiter de certains aspects. Rien n'y est prévu pour les travailleurs déplacés. On s'inquiète que c'est là le reflet d'un manque d'intérêt pour ce genre de problèmes sociaux sur la côte du Pacifique. On fait des comparaisons de tous genres avec la façon dont ce genre de problème a été traité sur la côte de l'Atlantique. Ces préoccupations et objections ne disparaîtront pas tant que le plan ne comportera pas de dispositions à l'intention des travailleurs déplacés.

Il n'est pas non plus question dans le plan de mesures incitatives pour appuyer le rachat comme le préconisait le groupe de la table ronde, y compris les exemptions fiscales et les garanties de prêts dont j'ai parlé il y a un instant. Le plan ne prévoit pas non plus d'appui pour les localités. Il n'y aucune protection pour empêcher la concentration du contrôle de la flotte, grande préoccupation pour l'industrie de la pêche.

Troisièmement, l'échéancier et le programme des événements que prévoit ce plan suscitent des objections. En effet, c'est comme une douche froide. Tout arrive en même temps. Nous allons devoir forcer les propriétaires de navires à faire des choix difficiles quant à la zone de permis le long de la côte. Ils perdront certains privilèges, notamment la liberté de pêcher le long de toute la côte. Ils devront décider quels engins choisir dans certains cas. Ils devront décider s'ils veulent accepter un plan de rachat. Et tout cela très rapidement.

Qui plus est, nous allons assister à une escalade du prix des permis puisque ce plan encourage les propriétaires à se procurer des permis supplémentaires, les uns des autres, afin de pouvoir garder la possibilité de pêcher tout le long de la côte. Il s'exercera donc des pressions à la hausse sur le prix des permis. De plus, le gouvernement fédéral offre 80 millions de dollars pour l'achat de permis ce qui va encore, inévitablement, pousser le prix des permis encore à la hausse. Il sera donc d'autant plus difficile pour les propriétaires de bateaux d'accumuler les permis sans compter que cette mesure risque de diminuer la valeur des sommes disponibles pour racheter les permis.

Tous ces événements forceront les pêcheurs à prendre des décisions dans la plus grande incertitude - incertitude au sujet de la répartition, question qui ne sera pas réglée à temps, incertitude en ce qui concerne la remontée du poisson et les incertitudes habituelles quant au prix, etc.

Je pense que cette dernière préoccupation est très grave et j'aimerais donc vous faire quelques suggestions quant à ce qui devrait être fait différemment de ce qui est actuellement proposé.

Tout d'abord, je suis fermement convaincu, placé comme je le suis comme observateur extérieur, qu'il faut aller de l'avant avec la rationalisation de la flotte. Nous ne devons pas laisser cette occasion nous échapper. Nous devons nous attaquer à ce problème. Plus nous attendrons, plus cela sera coûteux et difficile. L'occasion s'offre maintenant. Au sein de l'industrie, on est généralement d'accord sur la nécessité de s'attaquer au problème et sur l'urgence de le faire. Nous devons saisir cette occasion.

Si nous perdons cette occasion, je prévois de graves difficultés dans l'industrie de la pêche. Ce sera difficile quoi qu'il en soit, mais alors cela deviendrait particulièrement difficile. Il sera très difficile pour le ministère des Pêches et Océans de protéger et de conserver les stocks de poisson devant une telle surcapacité. Il est impossible de gérer la pêche vu sa taille actuelle.

Bien qu'on entende de nombreuses critiques sur des aspects particuliers du plan et sur ses lacunes, je pense qu'il y a moyen d'améliorer le plan, mais nous ne devons pas perdre de vue le fait qu'il est essentiel que nous entreprenions une réduction quelconque de la flotte.

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Je voulais aussi vous faire remarquer que le plus grand obstacle à la mise en oeuvre de ce plan, c'est l'accueil mitigé que lui ont réservé les pêcheurs eux-mêmes. Je suis sûr que je ne vous apprends rien en vous disant que les avis sont très partagés au sujet du plan. Il fallait d'ailleurs s'y attendre. En effet, les enjeux sont élevés pour les pêcheurs ainsi que les divers intéressés. Depuis longtemps, les relations dans ce milieu sont conflictuelles. Il ne faut pas se surprendre qu'il n'y ait même pas de consensus au sujet des critiques à formuler à l'égard du plan.

À mon avis, le grand défi pour le gouvernement ne consiste pas à concevoir un plan parfait ni même à modifier ce plan-ci pour l'améliorer, mais plutôt à y apporter les changements voulus pour qu'il suscite un appui plus généralisé. Le gouvernement ne peut pas aller de l'avant avec ce plan s'il suscite un tollé parmi les intéressés. Il doit pouvoir compter sur un plus fort appui.

J'estime - et j'espère qu'à cet égard le comité pourra user de son influence - , que le gouvernement doit très soigneusement tenir compte de toutes les préoccupations qui lui seront soumises par les organismes représentant les pêcheurs et les collectivités côtières visées. Je vous incite à examiner leurs suggestions quant à la façon d'améliorer ce plan et d'apaiser les craintes qu'il suscite, de dissiper l'incertitude quant à sa mise en oeuvre et de faciliter l'adaptation des pêcheurs, tout cela dans le but de susciter un appui plus généralisé pour le plan.

À mon avis, certains aspects du plan ne peuvent être améliorés. Permettez-moi cependant de dire avant d'aller plus loin que vous ne devez pas tenir compte de mes conseils à moins que vous ne pensiez que ce que je vous suggère est susceptible de générer un appui plus généralisé pour le plan. Je crois que tel devrait être le résultat de mes suggestions, mais je n'ai pas effectué de sondage parmi les pêcheurs pour le confirmer. Libre à vous de demander l'avis d'autres témoins sur ces questions.

Le plan doit prévoir, à mon avis, des mesures d'aide à l'adaptation à l'intention des équipages déplacés. J'insiste sur le fait que ces mesures doivent viser non pas les propriétaires de navires, mais les équipages. En effet, ce sont les équipages qui seront involontairement déplacés par ce programme.

Et ils n'y sont pour rien. Comme ce plan est une initiative fédérale, c'est au gouvernement fédéral d'en assumer les conséquences. Il n'est que juste et raisonnable d'aider ceux pour qui ce plan fédéral aura une incidence négative.

J'ajouterai que sans ces mesures d'aide à l'adaptation des travailleurs déplacés, ces comparaisons injustes entre la côte Est et la côte Ouest ne cesseront jamais. Cette aide à l'adaptation pourrait prendre la forme de programmes de recyclage ou de programmes de formation dans d'autres secteurs liés aux pêches comme l'assainissement des cours d'eau et les nouvelles méthodes d'exploitation des ressources halieutiques.

Ma deuxième suggestion est la suivante. Je suis fermement convaincu qu'on devrait supprimer la date limite fixée à la fin juin pour l'affectation de ces fonds de 80 millions de dollars. Cette grande ruée afin de dépenser ces 80 millions de dollars ne fait qu'augmenter les incertitudes et les inquiétudes qui pèsent sur le milieu des pêches et risque d'aboutir à un gaspillage de fonds. À mon avis, cette hâte à dépenser cet argent fait en sorte qu'il est très difficile pour les pêcheurs d'acquérir des permis afin de conserver leurs droits existants et cela risque de compromettre les efforts déployés pour réduire la flotte avec l'argent des contribuables.

À mon avis, la meilleure chose à faire à cet égard serait de permettre au comité consultatif sur le rachat des permis de fixer un prix maximal pour les permis qu'il est prêt à racheter d'ici la fin juin et d'acheter le plus de permis possible compte tenu des sommes que cela permettra de dégager. Il ne faudrait cependant pas dépenser toute cette somme ni même s'engager à le faire. Qu'on prenne l'argent qui reste et qu'on le place dans un fonds en fiducie dans lequel on pourra puiser dans l'avenir pour poursuivre la réduction et la rationalisation de la flotte.

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Je propose également que l'industrie de la pêche participe à parts égales dans la création de ce fonds grâce aux redevances perçues sur les débarquements. Même s'il n'y a pas unanimité au sein de l'industrie sur cette proposition, l'idée d'affecter les redevances de débarquement à cette fin est bien accueillie de façon générale. L'industrie estime d'ailleurs qu'il s'agit de sommes qu'on lui a soutirées à cette fin - je parle de la majeure partie des 80 millions de dollars.

Troisièmement, je propose qu'on offre à tous les détenteurs de permis un troisième choix. Au lieu de les forcer à prendre à la hâte autant de décisions au sujet de leur avenir malgré toute l'incertitude qui règne, je propose qu'on offre à tous les détenteurs de permis le droit de conserver leurs permis pour la saison de pêche actuelle sans cependant avoir le droit de l'utiliser. Ils n'auraient donc pas à payer leurs frais de permis s'ils ne s'adonnaient pas à la pêche, mais ils ne perdraient pas leurs permis s'ils devaient le faire. De cette façon, on offrirait un troisième choix aux pêcheurs, et je ne vois pas comment cela pourrait compromettre le programme de rationalisation de la flotte. J'ignore combien de pêcheurs choisiraient cette option, mais je pense que cela en rassurerait certains.

Ma quatrième suggestion est de procéder à plus de changements structurels à long terme. Je crois qu'il ne faut pas présenter ce programme de rationalisation comme un effort irrévocable, comme on l'a fait pour les autres programmes de rachat, mais plutôt comme un programme continu en vue de ramener la flotte à des proportions plus raisonnables compte tenu des ressources halieutiques dont nous disposons. Le processus va être long et je préférerais qu'on confie sa mise en oeuvre à l'industrie elle-même.

À long terme, j'aimerais que comme l'a recommandé la table ronde, une bonne part des responsabilités en ce qui concerne la gestion de la flotte soit confiée à un conseil composé de représentants de l'industrie. J'aimerais qu'on donne suite à cette idée à laquelle le ministre a fait allusion lorsqu'il a annoncé ce plan. Le plus tôt l'industrie participera à l'effort de rationalisation de la flotte, le mieux cela vaudra.

Par ailleurs, une stratégie à long terme relative aux collectivités côtières m'apparaît l'autre changement structurel qui s'impose d'urgence. J'insiste sur le fait que le ministère des Pêches et des Océans et que le gouvernement fédéral ne sont pas les seuls en cause. Beaucoup d'organismes sont visés dont le ministère des Affaires indiennes et du Développement du Nord, le ministère du Développement des ressources humaines, le ministère des Pêches et Océans ainsi que le gouvernement de la Colombie-Britannique.

Il ne fait aucun doute que la rationalisation et la réduction de la flotte auront des conséquences pour les collectivités côtières. C'est inévitable. Or, rien n'est actuellement prévu pour permettre d'atténuer l'impact de ces mesures. Il convient de se donner une stratégie afin d'aider les collectivités côtières à s'adapter aux changements qui découleront de la rationalisation de la flotte.

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J'insiste cependant sur le fait que cette stratégie a un lien direct avec la politique d'octroi des permis du ministère des Pêches et Océans. Elle a trait à certaines idées qui circulent actuellement au sein du ministère et à l'extérieur de celui-ci au sujet de la façon de gérer le saumon. De façon générale, on estime de plus en plus que nous devons réduire la flotte et passer progressivement à un régime de gestion locale du saumon.

Je ne m'étendrai pas plus longtemps sur cette question très controversée puisque je n'ai pas d'idées précises à vous présenter aujourd'hui à ce sujet, mais je crois qu'il ne fait aucun doute que dans 50 ans nous ne poursuivrons plus en haute mer le saumon. Nous devons nous diriger dans la voie qu'ont déjà adoptés plusieurs pays et qui consiste à gérer le saumon.

Bien que les problèmes des collectivités côtières soient bien réels, j'insiste sur le fait qu'ils ne doivent pas nous empêcher d'aller de l'avant avec la réduction de la flotte.

Je vous remercie.

Le président: Nous vous remercions tous deux.

Le premier tour de questions sera de dix minutes. Monsieur Bernier, vous pouvez commencer.

[Français]

M. Bernier (Gaspé): Je remercie les témoins d'être ici ce matin. Je dois avouer mon ignorance de la gestion de la pêche au saumon dans la région de Vancouver. Je n'ai pas encore eu la chance d'y aller. J'ai bien l'intention d'aller voir ça de mes yeux à un moment donné.

Pour vous prouver que j'ai bien l'intention de travailler d'une façon non partisane à ce comité, je n'utiliserai pas tout mon temps ce matin. Je vais offrir beaucoup de temps aux réformistes, qui viennent principalement de l'Ouest. Je sais aussi que du côté des libéraux, il y a au moins deux députés qui viennent de la région de la côte ouest. Je serai heureux qu'ils aient plus de temps ce matin.

Je ne suis pas sûr d'avoir tout compris et je ne suis pas sûr que les deux messieurs aient dit la même chose. Ce que je connais du saumon, c'est qu'il a un cycle de vie assez rapide. On parle d'une période de quatre ans. J'ai eu des discussions avec les pêcheurs, la semaine dernière, et avec les écologistes. La semaine dernière, on a eu une belle coalition. Je n'ai pas trouvé de divergences entre ces gens-là. Il y avait une présence autochtone, ainsi que des gros pêcheurs, des petits pêcheurs, des représentants de communautés et des écologistes. Ils disaient tous qu'il fallait quatre ans pour restabiliser cette chose-là. Ils ne comprennent pas l'empressement du ministre à faire son plan de rationalisation.

Je pense que le premier à ne pas prôner cela a été M. Cruickshank. J'aimerais qu'il me donne plus d'explications.

L'autre monsieur semble dire que c'est une voie inévitable. Peut-être n'ai-je pas tout à fait compris ce matin, mais j'aimerais que vous me précisiez votre pensée là-dessus en une phrase ou deux. Par la suite, je laisserai mes collègues de cette province poser plus de questions pour que je puisse me faire une idée de la situation.

[Traduction]

M. Cruickshank: Je vous remercie, monsieur Bernier. Nous serons heureux de vous accueillir sur la côte ouest que vous trouverez, j'en suis convaincu, aussi belle ou presque aussi belle que la Gaspésie.

Vous avez essentiellement raison de faire remarquer que le cycle du saumon est de quatre ans. Il est effectivement permis de se demander pourquoi on s'empresse maintenant de rationaliser la flotte. Nous avons mis 100 ans à nous retrouver dans ce pétrin, alors pourquoi faut-il absolument s'en sortir d'ici la fin juin?

Comme M. Pearse l'a dit, presque tous s'entendent pour dire qu'il faut réduire quelque peu la flotte et qu'il faut la rationaliser.

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Il s'agit donc simplement de s'entendre sur la façon de rationaliser ou de réduire la flotte et sur l'échéancier à respecter. J'espère qu'on aura déjà réduit un peu la flotte avant la saison de pêche de 1996, mais j'aimerais que ce processus soit continu et que ceux qui exploitent la ressource y investissent des fonds.

Il ne faudrait pas oublier que ces ressources n'appartiennent pas aux quelques personnes à qui on a accordé des permis pour les exploiter. Cette ressource appartient à tous les Canadiens. Même si je suis à la retraite, j'estime que cette ressource m'appartient autant qu'aux pêcheurs de cette côte. À titre de député de Gaspé, une part de cette ressource vous appartient également et voilà pourquoi vous avez votre mot à dire quant à la façon dont elle devrait être gérée. La même chose vaut pour les collectivités côtières.

Je ne pense pas qu'il convienne de se lancer dans un programme sans d'abord savoir quel sera son impact. Il ne faudrait pas constater dans deux ou dix ans qu'on a commis une colossale erreur comme on l'a déjà fait par l'intermédiaire du MPO. On n'a qu'à voir quelles ont été les conséquences d'une mauvaise planification du ministère des Pêches et des Océans dans d'autres provinces. Il ne faudrait pas que cela se répète en Colombie-Britannique simplement parce que nous pensons qu'il y a urgence.

Nous n'avons pas à nous inquiéter pour le saumon pourvu qu'il n'y ait pas surpêche. Il s'agit de fixer des limites aux débarquements et d'oeuvrer à réduire la flotte jusqu'à ce qu'on parvienne à une certaine rationalisation. La rationalisation ne suppose pas nécessairement pour moi de réduire le nombre de pêcheurs et d'éliminer des emplois. Il s'agit d'en arriver à un équilibre entre la taille de la flotte et la ressource exploitée. Voilà ce que j'entends par rationalisation.

Pour atteindre notre objectif, il faudra réduire la taille de la flotte et améliorer la ressource. Le coût de ces mesures doit être assumé par tous les intervenants.

Je vous remercie.

[Français]

M. Bernier: Si je comprends bien vos propos, monsieur Cruickshank, vous êtes aussi en faveur d'une rationalisation, mais d'une rationalisation qui se fasse graduellement, de pair avec le développement durable ou une exploitation durable de cette ressource. Je veux m'assurer d'avoir bien compris que les deux témoins recommandent une rationalisation, bien qu'ils nous conseillent de prendre un peu plus de temps pour la faire.

Vous dites qu'à titre de Canadien originaire de Gaspé, je dois me sentir propriétaire d'une partie de la ressource des rivières. Je dois vous dire que je préfère être à l'écoute des gens qui vivent eux-mêmes le problème. J'ai toujours pensé qu'à un problème local existait une solution locale. Quand j'entends parler du problème et que je vois qu'un ministre à Ottawa, au centre du pays, veut dicter à ces gens leur conduite, j'ai la chair de poule. Je suis disposé à leur laisser le saumon parce que ce sont eux qui vivent avec le problème, mais puisque je suis député de ce Parlement, je veux m'assurer que l'on choisisse la bonne solution pour eux. C'est pourquoi je veux être sûr de bien comprendre les deux écoles et m'assurer que vous êtes tous deux en faveur d'une rationalisation. Il me faut toutefois comprendre exactement de quelle façon on va faire.

[Traduction]

M. Cruickshank: Vous avez raison de souligner, monsieur Bernier, que nous sommes tous deux en faveur de la rationalisation et de la réduction de la flotte.

M. Pearse et moi ne sommes cependant pas tout à fait d'accord sur l'importance de cette réduction. Nous abordons le problème de deux angles tout à fait différents. M. Pearse est un universitaire et moi pas. M. Pearse vit à Vancouver et moi dans une collectivité côtière qui subira le contrecoup de la réduction. Il n'est donc pas surprenant que nous ayons deux points de vue différents. Voilà pourquoi je dis qu'il faut être prudents.

La réduction de la flotte est nécessaire. Aucune personne sensée ne le contestera en Colombie-Britannique. La flotte est vraiment trop importante pour l'instant. Je doute cependant qu'on soit en mesure au ministère des Pêches ou ailleurs de dire exactement quelle devrait être la taille de cette flotte puisqu'on ne s'est jamais penché sur cette question. À mon avis on a agi de façon irresponsable en disant qu'il faut réduire la flotte de moitié d'ici la fin juin d'autant plus qu'on ne sait pas quel sera l'impact de cette mesure sur les collectivités côtières.

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Lorsque j'ai dit que la ressource vous appartenait comme elle m'appartient, je ne voulais pas dire que la décision quant à la réduction de la flotte vous incombait. Il ne faut pas oublier que la facture sociale, voire la facture économique, sera lourde pour tous les Canadiens si nous nous y prenons mal. Nous devrions être consultés à titre de propriétaires de la ressource. Il convient certainement que les collectivités côtières le soient. Or, elles ont été exclues du processus.

M. Pearse: Permettez-moi d'ajouter ceci, monsieur le président. Je crois que le point de vue de Don Cruickshank et le mien au sujet de ce qu'il convient de faire sont beaucoup plus rapprochés qu'il ne le pense. Nous sommes tous les deux d'accord non seulement sur la nécessité de réduire la flotte, mais aussi sur le fait qu'il ne convient pas de procéder à la hâte et de racheter les permis de pêche d'ici la fin juin.

Nous sommes bien d'accord là-dessus, n'est-ce pas?

M. Cruickshank: Oui, je crois que nous sommes d'accord sur cet aspect-là du processus, mais je pense que nous divergeons d'avis au sujet du cumul des permis.

Le rachat des permis ne pose pas de problème. On peut ralentir ce processus et l'adapter à nos besoins. C'est l'autre volet du programme de réduction de la flotte qui fait problème puisqu'il repose sur le cannibalisme. Voilà le volet qu'il faut éliminer. Nous ne savons absolument pas comment le cumul des permis par zone va contribuer à la réduction de la flotte.

M. Pearse: Pourrais-je ajouter quelque chose?

Les conditions économiques dans le secteur de la pêche expliquent l'urgence qu'il y a à procéder à la réduction de la flotte. Ces dernières années, la pêche commerciale connaît des hauts et des bas sur la côte ouest et l'an dernier a été une très mauvaise année. De nombreux pêcheurs ont connu de graves difficultés en raison de la diminution des prises et de la chute des prix.

On s'attend à connaître une aussi mauvaise saison cette année, et à moins qu'on ne fasse quelque chose, de nombreux pêcheurs et en fait la plupart des propriétaires de navires perdront beaucoup d'argent. Ce secteur de pêche qui présente de grandes possibilités sera ruiné. Le problème est urgent. Je vous remercie.

Le président: Je vous remercie.

J'aimerais une précision. Vous êtes tous deux d'accord pour reconnaître qu'il faut rationaliser la flotte, mais vous ne vous entendez pas sur l'importance de cette réduction. Vous convenez aussi que la ressource n'est pas en péril. La situation n'est pas la même qu'à Terre-Neuve où il a fallu recourir à des mesures extrêmes pour protéger les stocks. M. Cruickshank a dit que bien que cette saison sera une mauvaise saison de pêche, la ressource n'est pas en péril. Vous ai-je bien compris?

M. Cruickshank: Oui, la ressource n'est pas en péril. Elle ne sera jamais en péril pourvu que nous limitions les prises.

Le président: M. Cruickshank ne pense pas que la réduction de la flotte va signifier la mort de toutes ces collectivités. On peut procéder à la réduction de la flotte de façon à en atténuer l'impact pour les collectivités côtières. M. Pearse croit qu'il faut cependant oeuvrer à la relance de ces collectivités une fois que les équipages se retrouveront sans travail.

Faut-il comprendre que vous recommandez une réduction beaucoup plus importante queM. Cruickshank?

M. Pearse: Je n'aime pas beaucoup qu'on insiste sur les divergences d'avis entreDon Cruickshank et moi. Comme il l'a dit, nous ne pouvons pas être d'accord sur tout, mais nous le sommes sur l'essentiel. Je ne pense pas que le comité doit se préoccuper de nos petites divergences d'avis bien qu'il ait effectivement insisté sur des points importants relatifs au cumul des permis. Nous sommes en fait d'accord sur l'essentiel.

Je m'excuse, j'ai oublié l'autre point que je voulais faire valoir en réponse à votre question.

Le président: Vous vouliez parler de l'état de la ressource.

.1000

M. Pearse: En effet.

Don Cruickshank a tout à fait raison. Fort heureusement le saumon est un poisson qui a beaucoup de résistance. Si on laisse les saumons se reproduire en nombres suffisants, les stocks se renouvelleront d'eux-mêmes. Il est également vrai que le principal problème qui se pose sur la côte du Pacifique n'est pas le même que sur la côte Atlantique. Sur la côte Atlantique, le problème est dû à l'effondrement des stocks. Les stocks mettront des années à se reconstituer. La situation n'est pas la même pour ce qui est de la principale ressource de la côte du Pacifique, soit le saumon. En fait, au cours des dernières décennies, alors qu'il y avait surpêche et épuisement des stocks de la morue du Nord, nos prises de saumon augmentaient.

Il est vrai que les prises ont été très mauvaises au cours de la dernière année. Chacun sait que les prises de saumon varient beaucoup. Certains grands changements océanographiques à long terme influent sur l'abondance du saumon. Il est aussi vrai que la conservation et la gestion du saumon posent de graves problèmes. Si la situation en général des stocks de saumon est bonne, de nombreux problèmes se posent pour ce qui est des stocks moins importants ainsi que pour certaines espèces de saumon comme le saumon quinnat dont vous entendrez beaucoup parler.

J'insiste cependant sur le fait qu'il n'y a pas épuisement des stocks dans notre région comme c'est le cas dans l'Atlantique.

Le président: John.

M. Cummins (Delta): J'aimerais remercier nos deux témoins de ce matin. Je ne suis pas surpris d'être du même avis que M. Cruickshank à bien des égards, et je suis enchanté de pouvoir dire la même chose pour ce qui est de M. Pearse. Je crois qu'il nous a fait un résumé assez exact des difficultés que présente ce plan.

J'ai constaté quelques omissions, et si je ne les signale pas toutes, je crois que mon collègueM. Scott le fera. Je crois cependant que vous avez mis le doigt sur le problème.

J'aimerais revenir à une observation que vous avez faite à l'égard d'un des cinq points dont vous avez fait mention au début de votre déclaration. Vous avez dit que le plan était comme une douche froide. Tout arrive en même temps. Vous avez ensuite souligné, monsieur Pearse, qu'il était urgent de s'attaquer au problème. Vous avez attribué la situation aux mauvaises conditions économiques de l'an dernier.

Nous convenons tous qu'il faut faire quelque chose. Il s'agit de savoir si ce qu'il convient de faire c'est de mettre en oeuvre ce plan d'ici la fin juin ou si l'on ne devrait pas procéder au rachat des permis comme le suggère M. Cruickshank? Procédons au rachat des permis, mais mettons en veilleuse ce plan pendant un an jusqu'à ce qu'on ait pu vraiment étudier les préoccupations non seulement de l'industrie de la pêche mais de l'ensemble des collectivités visées de la Colombie-Britannique.

Pour l'instant, le plan suscite un véritable tollé. Si l'on va de l'avant avec ce plan, il sera très difficile d'atteindre les objectifs visés. Il serait peut-être plus utile de reporter à plus tard la mise en oeuvre de certains aspects de ce plan et de permettre à l'industrie de faire connaître son point de vue.

La question qui se pose est donc de savoir s'il faut mettre en oeuvre ce plan à toute vapeur? Ne pourrait-on pas procéder par étapes et reporter la mise en oeuvre d'une grande partie de ce plan jusqu'à l'an prochain. On pourrait cependant continuer de racheter les permis et ne pas percevoir de frais de permis auprès des pêcheurs qui ne s'adonneront pas à la pêche cette année.

Le président: M. Bernier doit partir. Il aimerait dire quelque chose avant de nous quitter.

[Français]

M. Bernier: Je dois malheureusement vous quitter. Je dois aller régler deux autres dossiers ce matin. Je lirai les Procès-verbaux pour bien suivre vos délibérations. Je veux m'assurer que mon départ ne soit pas perçu comme un manque d'intérêt. Je vous laisse aux bons soins des gens de la Colombie-Britannique. Merci.

.1005

[Traduction]

M. Cummins: Avant que M. Bernier ne parte, j'aimerais souligner sa contribution très positive à l'examen des problèmes que nous connaissons en Colombie-Britannique. Il comprend vraiment très bien ces problèmes. Venant d'une collectivité côtière du Québec, il apporte un point de vue très positif à ces discussions. En Colombie-Britannique, nous avons apprécié sa contribution au débat depuis deux ou trois ans.

M. Pearse: Monsieur Cummins, je crois comme vous qu'il n'y a peut-être pas lieu de procéder avec autant de hâte. Je crois en fait que cela ne fait qu'aggraver l'incertitude et l'anxiété que ressentent les intéressés. Nous devrions faire tout ce que nous pouvons pour atténuer cette inquiétude.

C'est cette inquiétude qui m'a incité à proposer qu'on cesse de vouloir dépenser tout l'argent prévu pour la mise en oeuvre du programme d'ici la fin juin et qu'on permette aux pêcheurs de conserver leurs permis pendant un an sans devoir payer de frais de renouvellement.

Je ne vois cependant pas d'inconvénients à ce qu'on rachète maintenant les permis pourvu qu'on ne procède pas à la hâte, ce qui aurait pour effet de faire augmenter les prix des permis et ce qui contraindrait les propriétaires de navires à faire concurrence au gouvernement pour conserver leurs droits de pêche sur toute la côte.

Quant aux dispositions du plan portant sur l'octroi des permis, il conviendrait sans doute de procéder à la mise en oeuvre de ces deux parties du plan de réduction de la flotte l'une après l'autre plutôt qu'en même temps. Autrement dit, on pourrait appliquer de nouvelles dispositions touchant l'octroi des permis cette année et procéder au rachat des permis l'an prochain ou vice versa.

Si j'ai bien compris, il est presque trop tard pour renverser la décision qui a été prise quant à l'octroi des permis. Je me trompe peut-être à ce sujet, mais je crois comprendre qu'on a fait des offres officielles à tous les détenteurs de permis de pêche au saumon sur la côte du Pacifique et que comme il s'agit de documents juridiques qui lient les deux parties, des poursuites seraient intentées contre le gouvernement si celui-ci ne respectait pas ses engagements. En outre, à l'issue de l'annonce de ce plan, des pêcheurs ont acheté plusieurs permis afin de pouvoir pêcher dans plusieurs zones de pêche. Si l'on ne donnait pas suite à ce plan, je suppose que le ministre serait passible de poursuites.

Il serait maintenant très difficile de retourner en arrière. Ce que je propose donc, c'est d'aller de l'avant avec cette partie du plan, mais d'échelonner sur une plus longue période le rachat des permis.

M. Cummins: Peut-être avez-vous quelque chose à ajouter à ce sujet, monsieur Cruickshank. Vous dites que des problèmes vont peut-être se poser si l'on ne va pas de l'avant avec ce projet, mais je crois qu'on s'expose à des problèmes plus graves en procédant à la hâte. Un problème se pose, cela ne fait aucun doute, mais je crois qu'il y a plus de risques à procéder à la hâte qu'à retarder le projet.

M. Cruickshank: Comment pouviez-vous savoir, monsieur Cummins, que j'aimerais répliquer à cela.

Il est évident qu'il y a des problèmes. Chaque fois qu'on se lance dans la mise en oeuvre d'un programme sans y avoir suffisamment réfléchi, on fait face à des problèmes. Je ne vois pas à quoi d'autre on peut s'attendre.

Certaines personnes ont acheté des permis pour pouvoir les cumuler. Nous le savons. C'est ce qui se fait à l'heure actuelle. Si on adopte l'approche tout à fait opposée à celle que proposeM. Pearse, c'est-à-dire qu'on procède au rachat des permis, cela entraînera deux résultats.

On réglera d'abord le problème du cumul des permis. On pourrait offrir aux propriétaires de plusieurs permis le choix de décider du permis qu'ils veulent conserver. Il faut cependant aussi se demander ce qui a incité le vendeur à vendre son permis car dans ces transactions il y a toujours un vendeur et un acheteur.

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La personne qui l'a vendu l'a fait parce qu'elle n'avait pas d'argent pour aller rivaliser avec les compagnies de transformation ou les pêcheurs plus riches pour acheter un permis. Elle ne peut pas en acheter un; elle ne peut pas gagner sa vie avec un permis si l'on instaure des permis de zone; alors elle vend. Si l'on n'instaure pas les permis de zone, bon nombre de ces personnes voudront continuer à pêcher. À ce moment-là, on pourra leur revendre les permis au même prix qu'elles les ont achetés.

Par conséquent, quand on parle de litige, il ne faut jamais oublier que le permis n'est pas un produit; c'est un privilège qui est accordé chaque année à la discrétion du ministre. Quand nous parlons de ce genre de programme qui permet aux gens de l'envisager comme un document pouvant faire l'objet d'une négociation et d'une spéculation lucrative, alors il risque d'y avoir des litiges. Mais c'est le ministère qui en est la cause.

Allons-nous faire monter le prix des permis en retardant le rachat? Je ne le pense pas, car si le rachat était bien géré, vous n'achèteriez pas, mais vous prendriez des options sur chaque permis qui serait offert au comité de rachat. Vous déclencheriez l'achat de tous les permis au même moment afin de ne pas faire augmenter vos propres prix.

À bien des égards, quand on regarde l'ensemble du processus, on constate que la démarche est complètement inverse. Nous commençons par la réduction de la flotte. Ensuite, nous allons déterminer la part de chaque groupe d'usager.

Je ne parle pas des senneurs, des pêcheurs aux filets maillants ni des chalutiers; je parle de la pêche autochtone, commerciale et récréative. Nous allons le faire après avoir conçu la flotte, sans connaître la quantité de poisson qu'ils vont pêcher. En dernier lieu, le ministre dit qu'il va améliorer le processus de consultation.

Nous aurions dû établir ce processus de consultation pour lui dire ce qu'il faut faire. On aurait dû établir les quantités pour que les pêcheurs sachent à quoi s'attendre et conçoivent la flotte en conséquence.

Le président: Il s'agit d'établir la taille de la flotte après coup.

En ce qui concerne votre question relative à la conception du permis comme permission du ministre ou comme propriété, a-t-elle jamais été réglée? Maintenez-vous votre position? Les tribunaux ont-ils jamais établi si un permis est une permission de pêcher ou une propriété qui peut être achetée ou vendue?

M. Cruickshank: Je pense qu'il existe un précédent du SCC établissant que cela relève de la discrétion du ministre.

Le président: Anna.

Mme Terrana (Vancouver-Est): Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, je souhaite la bienvenue à M. Cruickshank, qui est devenu la personnalité du mois. Je suis heureuse de m'adresser à M. Cruickshank parce que j'ai entendu son nom deux fois au cours des deux dernières années.

Je pense que vous avez tous les deux exprimé les préoccupations que nous avons entendues la semaine dernière de la part de la délégation qui est venue. Comme on vous l'a dit, cette délégation était composée de différentes personnes représentant différents intérêts. Je les ai aussi entendues lors de la réunion communautaire à laquelle j'ai participé vendredi dernier avec des fonctionnaires dans ma circonscription de Vancouver-Est.

J'ai quelques questions à vous poser. Premièrement, nous avons entendu maintes fois la semaine dernière que le poisson est primordial. C'est le sentiment et l'opinion de toutes les personnes concernées. Nous savons que nous devons sauver l'industrie.

Monsieur Cruickshank, l'argent qui a été offert pour le rachat suffit-il? Êtes-vous d'accord sur la proposition de suspendre les permis pendant un an ou deux, comme je l'ai entendu de la part de pêcheurs qui sont prêts à le faire? Êtes-vous d'accord sur le paiement de redevances sur les prises? J'aimerais que vous répondiez d'abord à ces questions, après quoi j'en poserai quelques-unes àM. Pearse.

M. Cruickshank: La première question est de savoir si les 80 millions de dollars suffisent. Je pense que oui. Si c'était tout ce que nous avons l'intention de faire, je dirais non, cela ne suffit pas. Il est temps que les pêcheurs assument une part de la responsabilité de la prolifération qui a eu lieu, mais pas toute la responsabilité, car une grande partie du problème découle de la mauvaise gestion.

Vous avez aussi posé la question des redevances. Je préconise cette solution depuis 1982 au moins, et peut-être avant cela. En 1982, je suis même allé jusqu'à concevoir un système et à travailler avec le ministère des Pêches et des Océans à l'élaboration d'un modèle économique informatisé pour illustrer l'incidence sur la flotte de l'imposition de redevance à divers niveaux. J'appuie sans réserve l'idée selon laquelle l'industrie commerciale doit faire sa part en payant des redevances.

.1015

Compte tenu de ces deux facteurs, j'estime que les 80 millions de dollars suffisent, si nous nous servons de cet argent pour supprimer maintenant une partie de la flotte, la mettre en réserve s'il y a lieu. J'aimerais savoir quelle sera l'incidence des 80 millions de dollars avant le début de la saison 1996. Toutefois, si nous ne dépensions que la moitié de cette somme cette année, cela ne serait pas grave. Je puis vous assurer que nous dépenserons le reste et le compléterons avec les redevances.

Il faudrait imposer les redevances maintenant, c'est-à-dire cette année. Je ne comprends absolument pas pourquoi le ministère n'a pas décidé de percevoir de redevances. C'est une idée universellement acceptée dans l'industrie. Le dernier bastion de résistance contre les redevances était le syndicat des pêcheurs, et mon rapport de 1991, où j'ai recommandé une fois de plus la perception de redevance, a été accepté sans amendement à leur congrès annuel. Ainsi donc, les pêcheurs ont accepté l'idée des redevances comme faisant partie de la solution. Ils ont dit qu'ils n'aimaient pas les redevances, mais s'ils savaient qu'elles étaient inéluctables, on finirait par les leur imposer; alors ils préféraient avoir un système conçu sur la côte ouest plutôt qu'un système imposé par Ottawa.

Quant à votre deuxième question, portant sur la suspension des permis pendant un an, je n'y vois aucun inconvénient. Si nous pouvions convaincre un nombre suffisant de pêcheurs de ne pas pêcher le saumon cette année, ce serait merveilleux. Cela réglerait le problème.

À cet égard, il suffirait peut-être de payer des frais symboliques pour les formalités administratives. En présentant le tarif des permis, j'ai dit qu'il faudrait payer environ 50$ au minimum pour s'occuper de la paperasserie, puis une taxe de débarquement représentant la valeur de la ressource. Ainsi donc, si les pêcheurs payent 50$ pour maintenir la validité du permis et s'ils ne pêchent pas cette année, ce sera la meilleure solution. Quand il y aura plus d'argent à gagner, ils reprendront leurs activités.

Cependant, nous entamons une mauvaise année. J'hésite un peu à révéler publiquement le nombre d'années que j'ai passées dans cette industrie, mais ma calvitie n'est pas prématurée. J'ai déjà vu beaucoup de mauvaises années, et j'ai vu les pêcheurs survivre. Je me souviens qu'à l'époque où je dirigeais la commission d'enquête, un jeune homme m'a parlé «du bon vieux temps». Je l'ai interrompu et j'ai dit que 1960 était la pire année que j'ai connue dans ma vie et que je ne voulais plus entendre parler du bon vieux temps. Le bon temps c'est maintenant. Les possibilités de gain dans l'industrie de la pêche sont énormes.

Ces possibilités ne vont pas se réaliser en 1996. Ce n'est pas grave. Les gens qui gèrent bien leurs entreprises et leurs activités de pêche y survivront. Ceux qui ne le font ne survivront peut-être pas de toute façon. Tout le monde doit avoir le droit de faire faillite.

Le président: M. McWhinney aimerait poser quelques questions avant de partir. Voulez-vous partager votre temps de parole avec lui?

Mme Terrana: Je n'ai que quelques questions à l'intention de M. Pearse.

Le président: Très bien, allez-y.

Mme Terrana: Je serai brève.

On a avancé l'idée des permis de zone, que les gens n'aiment pas. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

Deuxièmement, vous avez mentionné la date limite du 30 juin. Qu'en est-il de celle du 24 mai, concernant les permis de zone? Cela aura un impact énorme.

En dernier lieu, je voudrais que vous nous parliez du problème écologique, car on dit que la ressource est assujettie à un cycle de quatre ans, mais les choses ont changé. Nous assistons au réchauffement de la planète. El Niño est là. Nous avons toutes sortes de problèmes de vidange. Nous devons les régler de façon différente, je le sais, mais il s'agit là d'autres problèmes qui émergent.

M. Pearse: Tout d'abord, en ce qui concerne les préoccupations relatives aux permis de zone, ma réponse comporte deux volets. D'abord, les permis de zone en tant que tels. Ensuite, après l'adoption des permis de zone, les problèmes du cumul.

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En fait, c'est le cumul qui suscite le plus de préoccupation. De toute évidence, les permis de zone font l'objet d'une certaine opposition, mais celle-ci est loin d'être aussi vigoureuse que l'opposition au cumul. Je ne sais pas ce que je peux ajouter à cela.

Pour ce qui est de la date limite, si vous voulez tout faire cette année, vous devrez choisir vos zones d'ici le 24 mai, je pense, parce que la saison de pêche est entamée. En fait, il est question de savoir si nous allons le faire cette année ou non, et si nous le faisons cette année, ce délai doit être respecté.

En ce qui concerne votre dernière question, je pense qu'elle est très importante. L'une des difficultés du plan Mifflin sur la côte ouest réside dans le fait que sa raison d'être n'a pas été bien expliquée à la population de la Colombie-Britannique. Les intervenants du secteur de la pêche comprennent que notre flotte est trop grande, mais le reste de la population de la Colombie-Britannique, qui tient beaucoup au saumon, soit dit en passant, ne voit pas le rapport entre ce phénomène et le poisson. Les personnes qui ne travaillent pas dans le secteur de la pêche se demandent constamment quelles en seront les répercussions sur le poisson.

Le ministre dit toujours que sa première responsabilité est la conservation. Ensuite, nous parlons du plan de rationalisation, mais le rapport n'est pas vraiment bien expliqué. Quant à mes observations antérieures sur la nécessité d'obtenir de l'appui pour une mesure comme celle-ci, je pense qu'il faut l'expliquer. Je dirais même qu'il s'agit là du plus grand obstacle à l'obtention de l'appui.

La population de la Colombie-Britannique, beaucoup plus que les intervenants du secteur de la pêche, veut que le poisson soit bien géré, et elle est convaincue qu'il n'est pas bien géré en ce moment. Elle veut que le gouvernement soit sévère et insiste pour que l'on accorde aux stocks l'attention qu'ils méritent.

Bien entendu, le rapport avec la conservation est que la plus grande menace qui plane sur nos stocks de poisson est la flotte commerciale qui est trop grande. Je m'empresse de dire que certains stocks de poisson font également l'objet d'une surpêche de la part de pêcheurs sportifs, mais dans la perspective globale des choses, le problème réside surtout dans le fait que nous prenions trop de poissons dans bien des cas. Il devient très difficile de gérer la ressource en protégeant les petits stocks qui se mêlent aux gros stocks, et ainsi de suite.

Je suis associé à l'un des principaux groupes écologistes canadiens, mais je dois dire que je suis déçu par certains groupes environnementaux qui critiquent et contestent la réduction des flottes, non pas par souci de protéger l'environnement ou les stocks, mais en raison d'une certaine conception de la distribution, de la structure de l'industrie de la pêche ou des répercussions sur les collectivités locales. Tous ceux qui sont préoccupés par la protection des stocks de poisson doivent appuyer la réduction de cette flotte excessive.

Évidemment, il existe d'autres problèmes relatifs à la gestion du saumon. La destruction de l'habitat est un problème important. En Colombie-Britannique, où les activités d'exploitation des forêts et des minerais et de construction routière sont importantes, surtout dans des endroits comme le détroit de Georgia, il y une érosion constante de l'habitat, que nous devons au moins réduire si nous ne pouvons y remédier. En fait, les possibilités d'expansion de l'habitat du poisson en Colombie-Britannique sont énormes, et nous devrions y travailler, du moins à mon avis.

Évidemment, il y a d'autres problèmes concernant notamment les Américains et la pêche hauturière. Il y a toutes sortes de problèmes ici, mais parmi tous les autres problèmes, celui dont nous parlons ici ce matin est très important. Il faut le régler peu importe le succès avec lequel nous abordons les autres problèmes.

Merci.

Le président: Quand vous dites qu'il faut réduire la flotte, voulez-vous dire que cette réduction doit toucher tout le monde ou qu'elle doit s'appliquer uniquement aux senneurs ou aux chalutiers? Comment envisagez-vous la réduction de la flotte? Quelle partie de la flotte voulez-vous que l'on réduise? Voulez-vous que l'on réduise toute la flotte?

.1025

M. Pearse: Actuellement, la flotte et la capacité de pêche supplémentaire sont si grandes que toute réduction serait utile.

Quant au rachat, il pourrait y avoir un petit désaccord entre M. Cruickshank et moi-même. À mon avis, le rachat doit intervenir en premier - et j'insiste sur le fait qu'il doit être le premier volet d'un programme continu de réduction de la flotte - et qu'il doit viser uniquement à assurer la plus grande rentabilité possible. Autrement dit, achetez les permis au plus faible coût possible afin d'éliminer la plus grande capacité de flotte possible pour les 80 millions de dollars.

Le président: Monsieur McWhinney.

M. McWhinney (Vancouver Quadra): Merci, monsieur le président.

Je dois partir jouer le même rôle que M. Pearse et M. Cruickshank. Cela semble anormal, mais je vais à un autre comité parlementaire comme témoin expert invité, et non pas comme député; il faut donc que je parte. Ce n'est pas par manque de courtoisie à votre égard.

Merci beaucoup d'être venus nous présenter un aperçu synoptique du problème. À mon avis, c'est ce genre de témoignage que nous attendons de nos témoins experts.

Ma question portera uniquement sur vos observations relatives à la stratégie à long terme. Tous les deux, de façon un peu différente, vous avez parlé de la participation des collectivités, et de la quasi auto-gestion de l'industrie, que ce soit en collaboration avec les gouvernements - fédéral et provinciaux - ou par l'industrie même, c'est-à-dire l'auto-réglementation. Ce sont des idées très à la mode dans le secteur public aujourd'hui, où l'on parle de copartenariat et de retrait du gouvernement.

D'après mes propres recherches, je constate que le gouvernement français participe activement aux activités de son industrie du saumon sur la côte de la Bretagne. Je voudrais que vous nous parliez de vos discussions concernant les collectivités côtières comme concept géographique. Existe-t-il des liens avec le plan de John Fraser? Je pense qu'il a parlé d'un conseil de 15 membres au sein de l'industrie. Son objectif premier était scientifique. Il s'agissait d'obtenir des preuves directes composées de données scientifiques que l'on communiquerait directement à ce conseil, qui devait les examiner et agir en conséquence. Allez-vous au-delà? Cela susciterait-il des préoccupations? Chacun de vous peut-il répondre à ma question?

M. Pearse: Tout d'abord, les recommandations de l'ambassadeur Fraser portaient sur la création d'un conseil de conservation qui était censé effectuer en quelque sorte une vérification crédible de l'état des stocks sur la côte du Pacifique. Autrement dit, ce conseil agirait comme le vérificateur général agit à l'égard des finances publiques. Mais dans le cas qui nous intéresse, le conseil procéderait à une évaluation indépendante de l'état des stocks, non seulement de saumons, mais de toutes les espèces de poisson sur la côte du Pacifique.

En passant, quand M. Tobin était ministre, il s'est engagé à accepter toutes les recommandations du rapport Fraser. C'est la seule recommandation qui n'a pas été appliquée. Je dois dire qu'à mon avis, il faut l'appliquer. On a exercé des pressions dans ce sens.

En ce qui concerne la question plus vaste des partenariats et ainsi de suite, je crois fermement que nous avons maintenant une bonne occasion d'amener l'industrie de la pêche à gérer ses propres affaires. Nous avons conçu un système qui fait de notre industrie l'une des plus lourdement réglementées qu'on puisse imaginer. Tous les aspects d'un navire de pêche, du matériel utilisé, du temps et des activités sont très étroitement réglementés par le ministère d'exécution, c'est-à-dire par Pêches et Océans Canada.

Le ministère des Pêches et des Océans essaie maintenant de réglementer tous les aspects d'une industrie qui, en fait, travaille contre le gouvernement. Il crée un climat de rivalité où tout le monde aspire au même stock de poissons, où chacun essaie d'en attraper le plus possible, et évidemment, le ministère essaie de les retenir. Il s'ingère dans le développement technique, ce qui crée évidemment des relations conflictuelles avec l'industrie.

.1030

Je pense que nous en sommes arrivés à un point où le ministère des Pêches et des Océans essaie d'en faire beaucoup trop. Il ne peut pas continuer ainsi. Il est au centre d'un perpétuel conflit et il ne fonctionne pas très bien.

Par conséquent, la solution consiste à faire ce que font d'autres pays comme le nôtre, comme vous l'avez mentionné, où l'on donne à l'industrie la possibilité de gérer certaines de ses affaires. Il faudrait pour cela effectuer certains changements institutionnels, mais assurément, dans les pêches du Pacifique, et particulièrement dans la pêche au saumon, il existe de bonnes possibilités de confier certaines responsabilités à l'industrie, qui va les assumer financièrement. Cela fonctionnera de façon beaucoup plus harmonieuse qu'en ce moment.

M. McWhinney: À votre avis, les décisions macro-économiques, Comme celle de réduire la taille de la flotte, ou celle relative au pourcentage de réduction, incomberaient-elles à un tel organisme d'auto-réglementation de l'industrie?

M. Pearse: Oui, je le pense. Il y a eu un certain nombre de propositions, provenant notamment du gouvernement et de l'extérieur du gouvernement, sur la façon de réorganiser l'administration des pêches. Dans bien des cas, il s'agissait de confier des responsabilités de ce genre à l'industrie.

M. McWhinney: Merci.

Monsieur Cruickshank?

M. Cruickshank: Vous débattez de l'idée d'un processus de consultation, monsieur McWhinney.

Il faut tenir compte d'un facteur avant de décider si le conseil de conservation préconisé parM. Fraser est une bonne solution ou si nous devons aller au-delà de ce conseil. Je suis sûr que si certains hauts responsables du MPO étaient ici maintenant, ils diraient: «La dernière chose dont nous ayons besoin serait une intervention accrue des pêcheurs dans cette maudite affaire. Ils grugent déjà tout notre temps dans des réunions.»

Nous pouvons aller au Conseil régional du Pacifique. J'y ai travaillé pendant un certain temps. En principe, c'est le principal organisme consultatif du ministre. Nous avons le Conseil de l'industrie de la pêche commerciale. Il existe un groupe pour pratiquement chaque pêcherie. Cependant, si l'on veut établir un processus de consultation, il est essentiel que le MPO commence à écouter. Il ne s'agit pas simplement d'assister aux réunions et de permettre aux pêcheurs de venir dire ce qu'ils pensent. Il faut prendre des dispositions pour qu'ils soient entendus.

Nous sommes ici aujourd'hui parce qu'on ne les a pas écoutés. À bien des égards, la table ronde était menée uniquement par le MPO, et ses résultats étaient prévisibles, car c'était les résultats voulus par les gestionnaires du MPO. Cela se produit fréquemment.

M. McWhinney: Il s'agissait d'aller au-delà de la consultation, à la prise de décision. C'est la partie que j'ai trouvée la plus intéressante, de même que les suggestions. Le conseil de l'industrie qui, en principe, regrouperait les représentants des pêcheurs et peut-être des gouvernements, disposerait du pouvoir décisionnel même sur les questions macro-économiques. Voilà le problème.

M. Cruickshank: À mon avis ce n'est pas son rôle.

M. McWhinney: Non?

M. Cruickshank: Non. Pour que tout fonctionne normalement, si la politique doit venir de la population et être présentée au gouvernement par l'entremise de nos élus, et si les fonctionnaires doivent mettre en oeuvre cette politique, alors ils doivent avoir la responsabilité et le droit de gérer. Cela doit rester dans l'industrie de la pêche avec le ministère des Pêches et des Océans.

M. McWhinney: Merci beaucoup.

Le président: Merci. Mike.

M. Scott (Skeena): Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, je tiens à vous remercier d'être venus ici aujourd'hui. Certains d'entre nous semblent circuler dans les mêmes cercles ces derniers temps à cause de la crise sur la côte ouest.

Un peu plus tôt ce matin, on a dit qu'il s'agissait d'un problème local. C'est une expression qui me fait toujours sursauter quand nous parlons de la pêche en Colombie-Britannique. Il me semble que lorsqu'on ne refait pas l'autoroute 401 entre Ottawa et Toronto, cela devient un problème national, mais quand nous parlons d'une ressource qui est si importante non seulement pour la Colombie-Britannique, mais pour tous les Canadiens, elle est reléguée au rang de question locale intéressant la Colombie-Britannique. J'espère certainement que les personnes ici présentes n'adopteront pas cette attitude.

Comme certains l'ont souligné, la pêche au saumon en Colombie-Britannique contribue positivement, ou a contribué par le passé, au PIB. Ce secteur emploie beaucoup de gens dans la province et risque de coûter très cher aux contribuables canadiens si l'on ne s'occupe pas judicieusement du déplacement des travailleurs, de la perte des revenus et ainsi de suite.

.1035

Il y a une question dont nous n'avons pas discuté ici. On ne l'a abordée que très brièvement ce matin. Il s'agit de la réallocation de la ressource.

Je signale aux membres du comité qui ne le savent peut-être pas qu'auparavant, la ressource était essentiellement répartie... et cela ne se faisant pas en fonction d'une règle stricte, mais c'est ainsi que la ressource était exploitée. La pêche alimentaire autochtone représentait traditionnellement de 3,5 à 4 p. 100 des prises totales. Vous pouvez contester les chiffres, je présume, et ils fluctuent, mais ce sont là les chiffres sur lesquels la plupart des gens s'entendent. Les pêcheurs sportifs prenaient de 3,5 à 4 p. 100 du total. Les pêcheurs commerciaux prenaient le reste, c'est-à-dire de 92 à 93 p. 100 de la ressource. Je parle de l'ensemble des prises, et évidemment, il y a une marge d'échappement.

Il me semble - ce n'est pas une impression personnelle, c'est un fait absolu - que nous avons maintenant non pas trois groupes, mais cinq qui aspirent à la ressource. Au cours des 15 dernières années, depuis le rapport de M. Cruickshank, nous avons la pêche alimentaire autochtone, la pêche sportive et la pêche commerciale; mais nous avons aussi une pêche sportive commerciale, qui est nouvelle en Colombie-Britannique, et nous avons une pêche autochtone commerciale, un nouveau concept lancé en 1992. Et je vous fais grâce des allocations qui sont prévues par les traités et que l'on commence à revendiquer.

Il me semble que lorsque l'on demande à l'industrie de réduire sa capacité de 50 p. 100, pendant que le ministre et d'autres, y compris les témoins ici présents, déclarent que la flotte est trop grande, la capacité de la flotte est beaucoup trop grande, elle est surcapitalisée, que la capacité de prendre des poissons est excessive, alors que d'autre part, le gouvernement met en oeuvre des politiques comme la stratégie des pêches autochtones, et plus précisément, quand nous voyons l'entente de principe avec les Nisga'a, qui va allouer 25 p. 100 des poissons de la rivière Nass au peuple Nisga'a - en tant que citoyen de la Colombie-Britannique, je deviens très cynique. Je me demande si l'accélération de ce plan de réduction de la flotte n'est pas un moyen de s'occuper du poisson que l'on veut soustraire aux pêcheurs commerciaux pour le redistribuer.

Je sais bien - et il en a été question ici ce matin - que ceux qui détiennent actuellement des permis n'ont pas de droit de propriété comme tel, ni de par la tradition, ni de par la pratique, mais nous assistons actuellement à une évolution de l'allocation générale telle que nous la connaissions depuis 50 ou 60 ans en Colombie-Britannique.

Je voudrais citer à ce propos ce qu'a dit M. Fraser à une conférence à laquelle il a participé il y a quelques semaines. Je crois que vous étiez là, monsieur Pearse. Je suis même sûr que vous y étiez, puisque je vous ai parlé. M. Fraser a dit qu'on ne pouvait pas parler du plan de pêche ni de ce qui se passe en Colombie-Britannique sans préciser dès le départ que la ressource fait l'objet d'une réallocation de la part du gouvernement fédéral.

Je voudrais simplement savoir ce que vous pensez de cela. Je comprends que nous examinons actuellement le plan Mifflin et les modifications qu'il est proposé d'y apporter, ou les changements que vous proposez d'y apporter, mais je ne vois pas comment les deux questions peuvent être dissociées. Je voudrais certainement savoir ce que vous en pensez.

M. Pearse: Merci, monsieur Scott. Vous abordez là une question très délicate et très importante quand vous parlez de réallocation.

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La question de l'allocation de la récolte est toujours la plus controversée dans les affaires de la pêche. Nous devrions faire tous les efforts possibles pour trouver des moyens de surmonter ce problème afin de pouvoir nous occuper des autres questions relatives à la gestion de la pêche. À mon avis, l'entente à laquelle sont arrivés tous les intervenants du secteur de la pêche, y compris le ministre, pour que la question soit soumise à un arbitre indépendant et que nous puissions ensuite nous attaquer aux autres problèmes difficiles qui se posent relativement à la gestion de la pêche est une des plus importantes réalisations des derniers mois.

Quant aux conséquences du plan Mifflin sur l'allocation, je ne peux malheureusement pas vous dire grand-chose à ce sujet, car il n'y a rien dans le plan en tant que tel qui modifierait l'allocation existante. Le plan pourrait toutefois avoir des conséquences pour l'allocation selon l'utilisation qui serait faite des fonds prévus pour le rachat de permis. Si la composition de la flotte, c'est-à-dire l'équilibre entre les groupes sectoriels, s'en trouvait modifiée, cela pourrait se répercuter sur l'allocation.

L'autre élément qu'il convient de souligner c'est bien sûr que le plan prévoit que la question sera soumise à un arbitre indépendant, et elle est donc exclue des négociations.

M. Cummins: Le plan prévoit que l'allocation sectorielle sera déterminée par le ministère, par un arbitre indépendant, mais il n'y est pas question du problème relatif à l'allocation que mon collègue a soulevé.

M. Pearse: Il n'y est pas question de la pêche sportive ou autochtone, non. J'arrivais justement à cette question.

Pour ce qui est de toute cette question des droits des Autochtones, il s'agit selon moi d'une question juridique, mis à part la participation des Autochtones à la pêche commerciale au même titre que les autres pêcheurs commerciaux, qui ne fait pas vraiment problème. La question de savoir comment il faut interpréter les droits de pêche des Autochtones, le droit des Autochtones de pêcher, relève à mon avis du domaine juridique. La question doit être réglée, sinon nous nous retrouverons dans la situation difficile d'avoir à administrer quelque chose qui est mal défini, où les droits restent flous.

En ce qui a trait à l'accord Nisga'a - et quand je dis cela, je ne tiens pas compte de l'importance du droit reconnu par cet accord - , il me semble qu'il a l'avantage de définir de façon précise la quantité de poisson que les Nisga'a pourront prendre dans la rivière Nass. En outre, les Nisga'a s'engagent aux termes de cet accord à reconnaître le ministre canadien des Pêches comme l'autorité finale en matière de gestion des stocks de la rivière. Ce sont là deux avantages importants que présente l'accord.

Pour ce qui est de l'accroissement des prises qui seraient accordées aux Autochtones, je n'ai pas vraiment d'opinion à ce sujet. Il me semble qu'il faut simplement négocier aussi durement que nous le pouvons. Je ne sais toutefois pas si c'est bien ce qu'ont fait nos négociateurs.

M. Scott: Malgré tout le respect que je vous dois, monsieur Pearse, la Cour suprême du Canada a en fait rendu une décision il y a deux semaines dans les affaires Nikal et Lewis, et trois autres causes concernant la pêche sont en appel à l'heure actuelle. La Cour suprême du Canada a statué que le gouvernement fédéral ait l'autorité finale en ce qui concerne la gestion de la pêche. Pourquoi donc faudrait-il renoncer à 25 p. 100 des prises dans la rivière Nass pour obtenir des Nisga'a qu'ils reconnaissent justement ce que la Cour suprême du Canada a déjà reconnu? Je n'arrive pas à m'expliquer cela.

Je ne veux pas m'engager dans un débat avec vous, mais je ne pouvais pas laisser passer cette affirmation sans la contester. Si vous dites que l'allocation à laquelle les Autochtones ont droit est une question qui relève exclusivement du domaine juridique, je vous dirais dans ce cas-là - et je le répète, je ne veux pas m'engager dans un débat avec vous sur cette question, car je sais bien ce n'est pas votre spécialité, mais je demande simplement votre avis - la jurisprudence qui existe déjà, de par les affaires Delgamuukw, Lewis, Nikal et Calder, est très claire. Les Autochtones du Canada ont le droit de pêcher pour répondre à leurs besoins alimentaires et cérémoniaux. Jamais aucun tribunal canadien n'a reconnu, à ma connaissance - les causes que je viens de citer sont certainement les plus importantes à cet égard - , le droit des Autochtones de pêcher à des fins commerciales.

À mon avis, ce que le gouvernement fédéral est en train de faire vise, non pas à répondre à une obligation qui lui est imposée par la loi, mais à poursuivre des objectifs politiques. Voilà ce qui se passe en Colombie-Britannique à l'heure actuelle. Cela s'est fait sans aucun débat public, sans aucune discussion publique. Nous savons, d'après des sondages scientifiques, que la population de la Colombie-Britannique s'oppose à l'idée d'inclure les droits de pêche dans les traités avec les Autochtones. Cependant, les pourparlers à cet effet se poursuivent et il s'agit d'une réallocation de la ressource au détriment de ceux qui en ont toujours eu le bénéfice.

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Il me semble que le plan Mifflin ne peut pas être dissocié de cela. C'est un fait, les pourparlers se poursuivent au moment même où nous nous parlons.

Comme vous pouvez vous en rendre compte, c'est un sujet auquel je suis loin d'être indifférent, car j'estime que le gouvernement a le devoir de traiter avec la population de manière équitable, de traiter avec elle en toute franchise et de ne rien lui cacher. Nous parlons ici d'un plan de pêche et de la restructuration du secteur, mais jamais il n'est même question de cet autre élément.

Il y a deux autres groupes autochtones qui ont des revendications traditionnelles en ce qui concerne la rivière Nass. Rien ne nous permet de supposer qu'ils accepteront moins que ce que les Nisga'a ont obtenu, ou de ce qu'il est proposé de leur accorder, dans l'accord définitif qu'ils négocieront. Auquel cas, plus de 50 p. 100 du poisson de la rivière Nass serait à tout jamais exclu des négociations.

La rivière Nass, pour le cas où certains membres du comité ne le sauraient pas, est l'une des plus fertiles en poisson de la Colombie-Britannique. Ce n'est pas le fleuve Fraser ni la rivière Skeena, mais elle vient sans doute au quatrième ou au cinquième rang. Mon collègue pourrait sans doute vous donner des détails. C'est une rivière où les stocks sont très importants.

L'accord dont nous parlons est le premier à être signé mais nous n'avons même pas encore commencé à parler de ce qui se produira dans le cas de la rivière Skeena ou du fleuve Fraser, mais rien ne nous permet de croire qu'Ernie Crey...

Le président: Quelqu'un veut-il tenter de répondre à cette question?

M. Cruickshank: Je voudrais certainement tenter d'y répondre.

Je crois que vous n'êtes pas le seul à faire preuve de cynisme à cet égard, monsieur Scott. Le cynisme est très répandu sur la côte de la Colombie-Britannique, et il est nourri par le MPO. Comme vous l'avez dit, nous sommes allés bien au-delà du droit reconnu par la loi de pêcher à des fins alimentaires, sociales et cérémoniales. La politique que nous poursuivons est celle qui, à mon avis, a été élaborée par le personnel du MPO.

Quelqu'un a dit que la question allait être soumise à un arbitre indépendant. Indépendant, mon oeil! Les gens savent qui est Art May et savent qu'il n'est pas indépendant du MPO; il y a déjà été sous-ministre. On veut nous passer un sapin, et les gens de la côte ouest le savent. Les pêcheurs commerciaux ne s'attendent pas à un traitement équitable de la part de cet arbitre indépendant.

Je parle peut-être avec beaucoup moins de ménagement que ce à quoi vous êtes habitués, mais je n'atténuerai pas mes propos pour plaire à qui que ce soit. Cette façon de faire est fondamentalement et complètement injuste. À l'origine de cela, il y a une décision, non pas de nos dirigeants politiques, mais du MPO. À mon avis, c'est une décision qui a été prise par le personnel du ministre qui entend faire avaler cela à la population de la Colombie-Britannique tout comme il entend nous faire avaler le plan Mifflin.

Si je dis qu'il faut ralentir le progrès du plan Mifflin et qu'il faut en éliminer la disposition qui permet à ceux qui détiennent un permis de le conserver alors qu'ils ne s'en servent pas, c'est pour que nous ayons le temps d'examiner complètement toutes ces autres ramifications, car elles font partie de l'ensemble. Elles ne peuvent pas être examinées séparément. Cependant, nous sommes ici aujourd'hui pour parler du plan Mifflin, alors j'aimerais que nous en parlions de manière à ce que ces autres facteurs puissent être pris en considération.

Le président: Il ne nous reste pas beaucoup de temps. Monsieur Wells, vous voulez prendre la parole?

M. Wells: Oui. Merci, monsieur le président.

M. Cummins: Monsieur Pearse pourrait-il répondre à la question?

La question est vraiment très simple. Le plan Mifflin vise à réduire la flotte de moitié, mais le secteur est aux prises avec une récolte réduite de moitié en raison des traités et des dispositions de la SPA. Si donc la flotte est réduite de moitié et que la quantité de prises est aussi réduite de moitié, la flotte n'aura fait qu'alourdir son fardeau de dette sans que cela ne lui serve à rien. Je voudrais savoir ce que M. Pearse en pense.

Le président: Il avait l'air tellement soulagé quand j'ai voulu donner la parole à M. Wells.

Voulez-vous essayer de répondre à cette question, monsieur Pearse?

M. Pearse: J'y répondrai brièvement.

Tout d'abord, je tiens à être bien compris. Ce que j'ai dit visait surtout à répondre à votre question au sujet des revendications autochtones. Il est très important que nous en arrivions à des règlements avec les Autochtones de la Colombie-Britannique. Il est urgent et terriblement important que nous négociions ces ententes. C'est ce que veulent la plupart des gens de la Colombie-Britannique à mon avis. Je dirais même que la pêche commerciale pourrait être compromise si nous n'en arrivions pas à des ententes avec les Autochtones.

Vous le savez sans doute déjà, mais dans l'État de Washington, les tribus autochtones ont négocié un règlement qui leur accorde 28 p. 100 de la récolte. Le secteur s'y est opposé et a contesté l'accord en justice. Le tribunal a alors accordé 50 p. 100 des prises aux Autochtones, parce qu'il ne voyait aucune raison de ne pas les répartir également. La même chose pourrait se produire ici.

.1050

M. Cummins: Non, cet argument est faussé à la base. La situation ici est exactement le contraire. Ici, c'est le gouvernement qui est prêt à leur donner 50 p. 100, et je vous parie tout ce que vous voudrez que les tribunaux diront qu'il n'existe aucune obligation en ce sens. Voilà ce que les tribunaux ont dit en Colombie-Britannique, et ce, jusqu'à la cour d'appel - aucune allocation de pêche obligatoire, aucune pêche commerciale autochtone distincte. C'est exactement le contraire ici. Dans l'État de Washington, la décision Boldt était fondée sur un traité et sur une obligation découlant d'un traité. La situation n'est pas la même en Colombie-Britannique.

M. Pearse: N'étant pas spécialiste en la matière, il vaut mieux que je ne mette pas cette affirmation en doute.

Je tiens toutefois à ajouter que, si, comme vous le savez, le plan Mifflin pourrait avoir pour effet de modifier l'allocation, je dirais alors qu'il faudrait tout mettre en oeuvre pour empêcher que cela ne se produise. C'est un résultat qui serait effectivement inacceptable. Si le secteur de la pêche était d'avis que le plan aurait cette conséquence, je suis sûr que l'opposition au plan serait totale. Je croyais qu'on nous avait donné l'assurance que le plan n'aurait pas cet effet et que nous pouvions donc réduire la flotte sans avoir à craindre que cette réduction se répercuterait négativement sur leur proportion de la récolte.

M. Wells: Je veux m'éloigner un peu du sujet de la SPA, mais je demanderais au greffier de bien vouloir obtenir pour le comité la décision de la Cour suprême du Canada dont M. Scott a parlé. Si cette décision a été rendue il y a deux semaines, le comité devrait en avoir une copie. Je lui demanderais également de nous obtenir les décisions de la Cour suprême relativement aux trois autres cas dès qu'elles auront été rendues afin que nous en soyons informés sans tarder. Nous ne devrions pas avoir à attendre deux semaines pour être informés des décisions comme celles-là. Nous devrions les obtenir immédiatement, et je crois que vous serez d'accord avec moi là-dessus, monsieur Scott. Il s'agit d'une question dont le comité a déjà longuement discuté.

M. Cruickshank, votre franc-parler n'est pas du tout exceptionnel à notre comité. Nous traitons régulièrement avec des pêcheurs et des associations de pêcheurs, alors le franc-parler est plutôt la règle que l'exception. Nous comprenons qu'il en soit ainsi.

Je veux tout d'abord vous poser des questions au sujet des équipages déplacés, et je veux revenir au problème qui a été soulevé par au moins un d'entre vous. Tout d'abord, pouvez-vous me dire combien de personnes feraient partie de ces équipages qui seraient déplacés par le plan Mifflin? Quelqu'un a-t-il fait le calcul?

M. Cruickshank: Il est impossible de faire le calcul. Nous ne savons pas combien de bateaux seront retirés, nous ne savons pas quel sera le nombre de bateaux autorisés et nous ne savons pas de quel type ils seront. Si vous me dites combien de bateaux seront autorisés à pêcher, combien d'entre eux seront des senneurs, combien des bateaux de pêche au filet maillant et combien des bateaux de pêche à la cuillère, nous pourrions alors vous indiquer le nombre de personnes qui feraient partie de ces équipages déplacés. Mais le plan est...

M. Wells: Quel est l'effectif total des équipages à l'heure actuelle en Colombie-Britannique?

M. Pearse: Le ministère a fait des estimations, mais comme l'a indiqué Don, il est difficile d'évaluer le nombre de personnes visées. Je crois que, d'après les estimations du ministère, elles seraient entre 2 500 et 3 500.

M. Wells: Il s'agit donc du nombre de personnes qui seraient déplacées?

M. Pearse: Oui.

M. Wells: Vous semblez proposer - et il me semblait que c'était une bonne proposition - une forme d'aide à l'adaptation, autrement dit, des fonds pris sur le budget des ressources humaines pour aider ces gens. Songez-vous à des programmes de recyclage ou à des projets écologiques? Je sais que vous avez parlé d'habitats, de remise en état des cours d'eau et d'activités de ce genre. Pourriez-vous nous en dire un peu plus long sur ce qu'il faudrait inclure là-dedans à votre avis?

M. Pearse: Je n'ai pas été très précis, mais il me semble qu'il s'agirait d'offrir des programmes de recyclage à ces gens afin de les aider à quitter le secteur de la pêche. Il pourrait s'agir d'une formation qui les aiderait à travailler dans d'autres domaines liés à la pêche, peut-être dans l'habitat du saumon ou la remise en état des cours d'eau ou dans des domaines connexes.

M. Wells: Il s'agirait, je suppose, de fonds qui viendraient s'ajouter aux 80 millions de dollars.

M. Pearse: Oui, j'ai proposé que des fonds supplémentaires soient prévus à cette fin. J'estime toutefois qu'il s'agit là d'une activité tellement importante que, s'il est impossible de trouver des fonds supplémentaires, une partie des 80 millions de dollars pourrait être utilisée à cette fin.

M. Wells: Pour ce qui est de permettre aux pêcheurs de mettre leurs permis en réserve pendant un an moyennant des frais d'administration de 50$ - et c'est là quelque chose sur lequel vous semblez être tous les deux d'accord - , cela me paraît à première vue être une bonne idée. Ma seule crainte a priori serait que cela pourrait dissuader certaines personnes de vendre leur permis, et ce, au détriment de l'effort de rationalisation et de réduction. La possibilité de mettre les permis en réserve pourrait-elle avoir des inconvénients et nuire au plan dans l'ensemble?

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M. Pearse: Il est presque certain que cela dissuaderait certains des détenteurs de permis de vendre leur permis puisqu'ils pourraient attendre avant de prendre une telle décision. Le processus de rachat s'en trouverait donc ralenti, mais la capacité de pêche active se trouverait quand même réduite dans l'intervalle. Dans la mesure où ceux qui décideraient de mettre leurs permis en réserve - leurs bateaux resteraient amarrés - , il me semble que le fait de reporter cette décision n'affaiblirait pas le programme de rationalisation.

M. Wells: Ainsi, bien que cela puisse présenter un inconvénient, vous croyez, dans l'ensemble, que ce sera la meilleure chose à faire pour les pêcheurs eux-mêmes? Cela leur donnerait un peu plus de temps pour décider de leur avenir, car ils seront obligés de prendre une décision aux conséquences énormes.

Êtes-vous d'accord avec moi là-dessus, monsieur Cruickshank? Manifestement, dans votre exposé, vous...

M. Cruickshank: Pas entièrement, car je ne crois pas que ce sont les droits que les pêcheurs ont à acquitter pour obtenir leur permis qui est le facteur déterminant dans la vente des bateaux ou des permis de pêche à l'heure actuelle. C'est de la petite bière, tout cela.

Pour continuer à gagner leur vie comme pêcheurs, ils devront investir de 70 000 à 80 000$ s'ils ont un petit bateau. S'il s'agit toutefois d'un des senneurs indépendants qui font la pêche au saumon, le montant à débourser se situera entre 400 000$ et 500 000$.

Comparativement à des montants comme ceux-là, les droits à acquitter pour obtenir un permis ne sont vraiment rien. Je ne pense pas que ce soit là le facteur... Ce n'est pas ce qui réduira le nombre de bateaux qui pourront être proposés dans le cadre du programme de rachat. Ceux qui veulent prendre leur retraite proposeront leurs bateaux et quitteront le secteur, mais ils ne devraient pas avoir à le faire parce qu'on leur met un fusil à la tempe, car ils ne pourront plus gagner leur vie une fois que le nouveau système entrera en vigueur.

M. Wells: Monsieur Pearse, vous avez parlé de l'importance d'en avoir pour notre argent. Vous avez parlé du type de rachat. Quelle est la valeur moyenne des permis? Je sais qu'elle varie selon le type de pêche. Pouvez-vous me dire quelle est la fourchette des valeurs et sur quel type de pêche il faudrait concentrer pour que le programme de rachat soit le plus efficace possible?

Nous avons connu les mêmes problèmes sur la côte est. La situation chez nous était presque identique sauf que...

M. Pearse: Vous entendrez plus tard aujourd'hui des gens qui en savent beaucoup plus que moi sur le marché des licences de bateau, mais il semble qu'elles peuvent être réparties en deux catégories. La première est celle des petits bateaux, des bateaux de pêche au filet maillant et des bateaux de pêche à la cuillère. Pour ces bateaux-là, la valeur de la licence varie généralement entre 50 000$ et 75 000$. L'autre catégorie est celle des gros bateaux, c'est-à-dire des senneurs. Pour ces bateaux-là, la licence coûte beaucoup plus cher, allant chercher dans les centaines de milliers de dollars. Elle coûterait sans doute entre 200 000$ et 400 000$.

Soit dit en passant, il est difficile d'attribuer une valeur bien précise aux licences, parce que le prix est calculé, dans le cas des senneurs, en fonction du nombre de tonnes autorisées par la licence. Dans le cas des petits bateaux, le prix est calculé en fonction de la longueur du bateau. Ainsi, pour les petits bateaux, le prix est de tant le pied, tandis que, pour les gros bateaux, il est de tant la tonne. Les montants en cause, si ces licences étaient mises en veilleuse, comme dit Don, seraient considérables.

M. Wells: Je crois que M. Verran avait une question, alors je partagerai mon temps de parole avec lui s'il nous reste encore une ou deux minutes.

Le président: Monsieur Verran.

M. Verran (South West Nova): Merci, Derek.

J'ai une observation à faire, monsieur le président. Je croyais que je serais le dernier à prendre la parole après Derek Wells, député de la circonscription de South Shore, en Nouvelle-Écosse. Je tiens à vous dire comme je suis heureux, comme d'autres membres du comité, j'en suis sûr, que ces témoins aient pu venir nous rencontrer aujourd'hui. Je sais que, lors d'audiences antérieures que nous avons tenues sur la pêche au saumon sur la côte ouest, nous avions entendu tellement de gens nous parler particulièrement de M. Cruickshank. Il y avait de nombreuses années qu'on demandait qu'il ait un rôle à jouer, et les demandes en ce sens remontent jusqu'à l'époque de Roméo LeBlanc.

Vous avez dit qu'il ne fallait pas aller trop vite, qu'il faudrait bien examiner l'échéancier. Je tiens à vous dire que les échéances et les contraintes de temps auxquelles vous êtes soumis dans les collectivités côtières de la Colombie-Britannique - il s'agit ici, non pas d'une question, mais d'une affirmation - n'ont certainement rien de nouveau.

Il nous est arrivé en Nouvelle-Écosse - je représente la partie sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, et Derek est mon voisin immédiat - de lire dans le journal le lundi matin que le MPO nous informait de ce que telle ou telle disposition était entrée en vigueur à compter de minuit la veille. Nous n'avions pourtant reçu aucun préavis. Alors, cette façon de faire n'a certainement rien de nouveau pour nous.

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Je me demande si vous voudriez bien faire un peu l'historique de votre rôle dans le secteur des pêches pour les membres du comité et ceux qui sont ici présents. Êtes-vous fonctionnaire au ministère des Pêches? Avez-vous déjà travaillé au ministère des Pêches? Il serait intéressant de savoir. Je voudrais simplement savoir où vous avez commencé à vous intéresser activement au secteur des pêches.

M. Cruickshank: Je travaillais autrefois comme transformateur, mais pas exclusivement; j'ai commencé comme commissaire d'agent de pêche. J'ai surtout travaillé comme transformateur pendant ma vie active.

Je me suis retrouvé propriétaire d'une compagnie appelée Seafood Products. J'avais des usines de transformation à Vancouver et à Port Hardy. Comparativement à d'autres compagnies dont vous entendrez les représentants aujourd'hui, la nôtre était assez petite, n'ayant que de 350 à 400 employés.

Chose certaine, je n'ai jamais été bureaucrate. Je n'ai jamais été employé du gouvernement. En 1982, à la demande de Roméo Leblanc, j'ai laissé ma compagnie entre les mains de mes employés et collègues, pour présider ce comité de rationalisation de la flotte et c'est alors que j'ai emménagé dans les bureaux de la région du Pacifique.

Je m'attribue donc tout le mérite du rapport que tout le monde appelle le rapport Cruickshank. En réponse au député de Vancouver-Est, chacun de nous est destiné à avoir ses 15 minutes d'infamie; pour moi, c'était ce rapport.

Nous étions cinq. Quand nous sommes revenus à Ottawa pour discuter du rapport, notre expérience combinée était telle que j'étais le seul à ne pas avoir droit au tarif pour aînés. Je crois que, ensemble, les membres du comité avaient 240 années d'expérience de travail.

Dans le cadre de mes fonctions auprès du comité, j'ai effectivement travaillé pendant huit ou neuf mois à partir d'un bureau du MPO parce que je savais que je n'aurais pas pu le faire à partir de mon bureau à moi. Si j'étais resté là, j'aurais continué à être un marchand de poisson, à répondre au téléphone et à gérer l'entreprise. C'est ainsi que j'ai décidé de travailler à partir d'un des bureaux du ministère.

M. Verran: Merci.

Je veux simplement vous dire en conclusion avant de céder de nouveau la parole à mon collègue, messieurs Pearse et Cruickshank, que je suis très impressionné par vos connaissances ainsi que par vos idées et vos recommandations qui semblent tout à fait objectives. Le message que vous nous apportez aujourd'hui n'a certainement rien de nouveau pour ceux qui sont ici autour de la table. On pourrait croire qu'il vient de représentants de la côte est, pas nécessairement de Terre-Neuve, mais en tout cas de la Nouvelle-Écosse.

Nous avons déjà vécu cela. Nous comprenons quels sont vos problèmes. Nous apporterons certainement une attention particulière au processus de mise en veilleuse et aux autres éléments dont vous nous avez parlé. Nous en tiendrons compte dans nos délibérations.

Cela dit, je tiens à vous remercier de nouveau pour cet exposé des plus intéressants.

Le président: M. Culbert voudrait intervenir brièvement pour conclure.

M. Culbert (Carleton - Charlotte): Merci beaucoup, monsieur le président.

Tout comme mes collègues, je tiens à vous remercier beaucoup d'être venus nous rencontrer ce matin. J'ai trois courtes questions à vous poser. Vous avez déjà répondu à l'une d'elles, mais vous voudrez peut-être y revenir brièvement.

La semaine dernière, nous avons entendu à Ottawa le même nombre de représentants du secteur que nous avons ici aujourd'hui, et on nous a certainement fortement encouragés à accepter un gel des licences pour cette année, sans conséquence aucune. J'ai entendu votre point de vue là-dessus, et je crois que vous êtes du même avis.

J'ai été très intéressé par la proposition de M. Pearse qui voulait permettre à un conseil de gestion du secteur de s'occuper, dans les limites de certains critères, de la rationalisation de la flotte en fonction de la disponibilité de la ressource. Je me demande à qui ou à quel organisme vous songez en particulier qui aurait peut-être les compétences voulues pour s'occuper de cela et qui permettrait d'assurer la représentation de toutes les composantes du secteur.

Par ailleurs, je me demande si l'un ou l'autre d'entre vous est au courant d'études socio-économiques qui auraient été faites dans les localités côtières relativement aux solutions de rechange aux activités de pêche actuelles? Cherche-t-on d'autres moyens de combler les vides qui seraient créés par la réduction de ces activités?

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M. Pearse: En réponse à votre dernière question, diverses études ont été faites au fil des ans dans les localités de pêche côtières, et je crois que le ministère des Pêches et des Océans a aussi fait des enquêtes, sinon des études, sur les circonstances des collectivités côtières et sur leur dépendance à l'égard de la pêche. Je ne peux pas vous donner de réponse plus précise, mais je suis sûr qu'il existe de la documentation sur le sujet.

En ce qui concerne le gel des permis pour un an, je suis heureux que d'autres l'aient mentionné devant le comité, parce que, même si, au bout du compte, ce n'est pas une option qui sera retenue par beaucoup de monde, elle offrira une plus grande marge de manoeuvre aux pêcheurs qui, à cette période d'incertitude temporaire, sont forcés de faire des choix très difficiles.

Pour ce qui est du conseil de l'industrie de la pêche, il y a effectivement des exemples - non pas ici, mais dans d'autres pays de pêche - où l'industrie de la pêche assume beaucoup de responsabilités en matière de gestion. C'est le cas en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Islande, et ailleurs probablement, où des organismes permettent à l'industrie de s'auto-réglementer dans une large mesure.

Je ne connais pas d'organismes au Canada qui participent à la gestion de façon aussi active. Nous avons depuis longtemps une structure de consultation variée, comme le mentionnaitM. Cruickshank. Ce n'est cependant pas la même chose.

À certains égards, je suis d'accord avec Don sur le fait que le ministère des Pêches et des Océans est presque paralysé par ces mécanismes de consultation thérapeutique excessive. À mon avis, nous en avons déjà suffisamment. Ce que nous voulons faire, c'est amener l'industrie, non pas seulement à prendre du poisson, mais également à gérer le poisson et gérer les affaires de la flotte de pêche.

Le président: La pêche est essentiellement effectuée par de grandes sociétés. Il n'y a pas le même genre de pêche côtière que sur la côte est ou la côte ouest. C'est beaucoup plus facile pour l'industrie de réglementer sa propre activité parce que le nombre d'intervenants est considérablement moindre. Et, d'autre part, sa capacité est telle qu'elle doit agir pour sa propre survie.

Pour notre pêche - où il y a beaucoup de petits bateaux, où les diverses saisons sont nombreuses, où les intervenants et les types de pêche sont multiples - c'est le contraire. Je ne vois pas comment vous pouvez comparer le Canada à l'Islande, par exemple. Vous pensez que c'est juste?

M. Pearse: De telles comparaisons sont quand même utiles. Elles font ressortir les failles de notre administration. Nous avons une bureaucratie extrêmement coûteuse au ministère des Pêches et des Océans, et, par ailleurs, notre pêche n'est pas tellement différente. En ce qui me concerne, la comparaison montre bien l'inefficacité de notre système de gestion ici.

Je m'empresse d'ajouter qu'il y a évidemment des différences importantes entre les deux pays et que nous ne devons pas pousser la comparaison trop loin.

M. Culbert: Merci, monsieur Pearse. J'aimerais quand même entendre M. Cruickshank au sujet de ces trois questions, peut-être pour faire contrepoids. Pas nécessairement.

M. Cruickshank: Vous avez raison. Nous approuvons le gel des permis. Je n'y vois pas d'inconvénients.

Pour ce qui est du processus de consultation, je ne voudrais pas qu'il porte encore une fois sur des théories économiques. Nous en avons soupé des théories économiques. Il est temps que nous proposions des approches terre à terre, pragmatiques. Nous avons suffisamment d'expérience, sur la côte ouest, pour établir un bon processus de consultation, à condition évidemment que nous soyons prêts à écouter les participants.

Vous allez entendre des gens très éloquents un peu plus tard aujourd'hui, des experts dans ce domaine, des gens qui passent la moitié de leur temps à des réunions. S'ils ne peuvent pas concevoir un bon processus, nous n'avons pas grand-chose à attendre de la Nouvelle-Zélande ou de l'Islande. Le ministère des Pêches et des Océans ne doit pas faire partie de l'équation, parce que s'il est à la tête du processus, ce n'est plus une consultation. Tout ce qu'il veut, c'est que les gens soient d'accord avec lui.

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La troisième question avait trait à des études socio-économiques dans les localités de la côte en vue de combler cette lacune. Le ministère des Pêches et des Océans a fait très peu de choses pour désigner les emplacements de la flotte. Et ses études partielles ne sont pas à jour. Pour beaucoup de permis, le ministère des Pêches et des Océans ne sait pas exactement qui pêche. C'est essentiellement dû aux ententes de location. Par exemple, le ministère ne sait pas qui pêche le hareng rogué.

Il y a environ 1 300 filets maillants et 250 senneurs. Parce que les permis ne sont pas utilisés par les détenteurs eux-mêmes, le ministère n'est pas en mesure de dire dans quelle localité côtière les permis se trouvent. C'est le cas pour beaucoup de flottilles. De bonnes études sont donc nécessaires. Elles auraient dû être entreprises bien avant qu'intervienne ce processus consistant à enlever les flottilles aux localités.

Quel en sera l'impact? Je sais quelle forme il prendra dans ma ville. Je sais également quelle sera la situation dans d'autres villes. Je sais comment il pourrait se manifester dans certaines régions de la Nouvelle-Écosse, parce que je connais la côte sud. Je peux imaginer ce qui se passerait à Shelburne si cette ville était soumise à la même chose que Alert Bay ou Port Hardy: les agents des pêches seraient pendus.

M. Verran: Le député également.

M. Cruickshank: Oui. Je pense qu'entre autres choses le ministère sous-estime la situation à laquelle il fera face cet été. L'été sera long et chaud en Colombie-Britannique.

Le président: Merci beaucoup. Le temps est écoulé. Je conviens avec vous que la situation est explosive.

Au bulletin de nouvelles ce matin, la Société Radio-Canada avait un reportage concernant la pêche sur la côte du Pacifique. Je crois comprendre que des mesures importantes visant la pêche de la Colombie-Britannique seront annoncées aujourd'hui. Je ne sais pas au juste de quoi il s'agit, mais quelque chose d'important se prépare.

En tout cas, vous avez raison. La situation est très explosive. Vous avez été très utiles au comité en vue des suggestions que celui-ci devra faire au ministère et au ministre. Merci beaucoup.

M. Cruickshank: Merci de nous avoir donné l'occasion de comparaître.

M. Pearse: Merci de nous avoir entendus.

Le président: Je demanderais maintenant à messieurs Taylor, Murray et Hunter de s'approcher.

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Si vous voulez bien vous présenter et indiquer l'organisme auquel vous appartenez. Nous avons un autre groupe auquel nous voudrions accorder au moins une demi-heure. Nous n'allons donc pas faire de pause.

M. Mike Hunter (président, Fisheries Council of British Columbia): Je suis président du Fisheries Council of British Columbia, lequel représente la plupart des grandes sociétés de transformation en Colombie-Britannique. Les membres du groupe m'ont demandé de faire les présentations. Je vais ensuite céder la parole à M. Rombough, qui sera le premier intervenant du groupe.

Je suis accompagné aujourd'hui de Greg Taylor, le chef de la délégation de pêcheurs qui est venue ici aujourd'hui pour vous faire part de vues positives sur ce qui est maintenant connu comme le plan Mifflin. J'ai également à mes côtés Les Rombough, un pêcheur indépendant représentant la localité côtière de Campbell River.

Je tiens à vous dire au départ, au nom de tous ceux qui ont suivi ces audiences au cours des deux derniers jours, que nous sommes quelque peu déçus du fait que vous ayez accordé beaucoup de temps aux opposants à ce plan et que vous ne nous ayez réservé qu'une heure à peu près pour parler de ses aspects positifs pour l'avenir de notre industrie. Je signale pour le compte rendu que ce n'est pas très équilibré. Vous ne devriez pas vous laisser convaincre par ceux qui parlent le plus fort, mais plutôt accorder un temps égal aux gens qui selon nous forment la majorité et appuient le ministre dans sa démarche.

Je tenais donc à faire cette mise au point. Maintenant, je vais céder la parole à Les.

M. Les Rombough (président, Campbell River Gillnet Committee): Je vous remercie de nous avoir invités à comparaître devant vous aujourd'hui. C'est un grand honneur que de pouvoir vous faire part de nos vues au sujet du plan.

Je suis exploitant d'un petit bateau de pêche dans une localité côtière de la Colombie-Britannique. Je suis de Campbell River.

Je précise au départ qu'en tant que pêcheur commercial je me retrouve sans le sou. Nous avons eu une saison de pêche désastreuse l'année dernière et nous faisons face à la même situation cette année.

Au cours de la discussion, nous avons entendu l'expression «douche d'eau froide» à quelques reprises. Je suis sûr que vous serez d'accord avec moi pour dire que le fait pour quelqu'un de se réveiller un bon matin avec une perte nette de revenu pour l'année est une douche d'eau froide, un choc qui réveille. Et ce n'est qu'être très réaliste que de s'attendre à la même chose cette année. Mes difficultés en tant qu'exploitant d'un petit bateau d'une localité côtière sont très réelles et c'est la même chose pour tous les pêcheurs de la côte.

J'ai travaillé à ce plan, conscient du problème auquel fait face l'industrie, essentiellement à compter du début. Nous avons fait beaucoup d'efforts dans cette région pour comprendre la situation et trouver une solution en vue de maintenir la viabilité économique de l'industrie. C'est ainsi que j'ai été appelé à participer à la table ronde du Pacifique. Je veux que vous compreniez bien que si j'ai travaillé à la préparation de ce plan et que je préconise maintenant sa mise en oeuvre, je n'entends pas par là créer une situation qui empire encore davantage ma situation ou celle des gens de ma localité ou de mes collègues pêcheurs. Nous avons travaillé très fort et nous croyons que les propositions actuelles aideront vraiment cette pêche.

Je félicite M. Pearse pour son exposé. Même s'il affirme qu'il ne fait plus partie de la pêche de la côte ouest et voit les choses de l'extérieur, il se montre très perspicace. Je le félicite de son excellente compréhension de la situation de notre pêche.

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En tant que participant à la table ronde du Pacifique, avec le groupe, j'ai été appelé à faire des recommandations qui devaient être au centre de ce plan de rationalisation. Ce groupe chargé d'examiner les politiques était composé de 70 personnes venant de tous les milieux de la côte de la Colombie-Britannique. Tous les secteurs de pêche étaient représentés. Le Native Brotherhood était là. Le groupe des transformateurs également. Les localités côtières étaient représentées. En tout, il y avait 70 personnes. Beaucoup d'idées ont été présentées en vue de revitaliser l'industrie.

Il est devenu évident très tôt qu'il ne pourrait y avoir de consensus entre tous les groupes présents à cette table ronde. Les idées présentées étaient très différentes, les groupes étaient très différents et il ne semblait pas y avoir possibilité de compromis.

Des sous-groupes de chaque groupe se sont réunis à part pendant des mois. Le processus a été long. Ces sous-groupes ont fait rapport aux gens qu'ils représentaient pour avoir leur réaction. Des mois et des mois se sont écoulés. Nous avons fait de nombreux efforts pour rassembler les sous-groupes et en arriver à une idée qui rallierait tout le monde.

M. Tobin avait clairement indiqué au départ, lorsqu'il avait amorcé le processus - etM. Mifflin l'avait confirmé par la suite - que si le groupe ne pouvait en arriver à un consensus, le gouvernement prendrait les mesures nécessaires pour obtenir le résultat que tout le monde souhaitait, c'est-à-dire la réduction de la flotte.

Au bout du compte, nous n'avons pu en arriver à un consensus. Nous avons simplement présenté nos recommandations. Le gouvernement, de son côté, a mis de l'avant le plan Mifflin, comme il est appelé maintenant. Ce plan représentait un compromis pour tout le monde, l'industrie et le ministère des Pêches et des Océans; il devait pouvoir répondre aux besoins de tous. Notre plan n'a pas été accepté intégralement. Seulement certains de ses éléments ont été retenus. De fait, personne n'a vu son plan accepté globalement.

Nous avons donc un plan devant nous. Nous sommes convaincus qu'il faut aller de l'avant avec ce plan. C'est le meilleur que nous ayons pu trouver, avec notre groupe fort représentatif. C'est le résultat que nous avons obtenu.

Certains ont dit souhaiter que la mise en oeuvre du plan soit retardée. Nous estimons que c'est malheureusement impossible. La ressource ne nous permet pas de le faire. Nous sommes maintenant acculés au mur. Nous avons été trop loin. La situation est telle que cette année nous ne pourrons pêcher que sur la moitié nord de la côte. Les stocks du fleuve Fraser sont exclus cette année. Il n'y a plus d'excédents à pêcher.

Si le système demeurait inchangé et que tout le monde allait pêcher dans la partie nord de la côte, le ministère des Pêches et des Océans serait dépassé. Et dans le cadre de sa nouvelle politique d'évitement des risques, le ministère a indiqué que s'il n'est pas en mesure de gérer une pêche, il n'y en aura pas.

Ce n'est donc pas une solution que de ne rien faire maintenant, parce que, en réalité, la moitié de la flotte ne peut pas pêcher cette année. Il n'y a pas suffisamment de place et il n'y a pas suffisamment de poisson.

En tant qu'exploitants indépendants, sachant que la flotte doit être réduite de moitié, nous avons deux choix. Nous avons quand même une chose à respecter dans un cas comme dans l'autre. Chacun de nous doit racheter, d'une façon ou d'une autre, le permis d'un autre pêcheur en vue de réduire la flotte de moitié.

Au départ, on nous a dit qu'il n'y aurait pas d'argent du gouvernement pour nous permettre de le faire et que nous devrions nous débrouiller nous-mêmes. Nous avions le choix entre un système de rachat financé par l'industrie, dans le cadre duquel nous nous imposions des droits suffisamment élevés pour racheter graduellement la moitié de la flotte, et un système d'octroi de permis par secteur, de façon à encourager l'accumulation des permis et forcer les pêcheurs à acheter un autre permis pour pêcher le long de toute la côte.

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Nous avons examiné très attentivement les deux possibilités et en sommes venus à la conclusion que le coût était le même pour nous. Il y en avait une qui était plus rapide que l'autre, mais quelle était la plus intéressante? En tant que groupe - il n'y a pas eu de consensus complet, il y a eu une petite majorité en faveur - , nous avons estimé préférable le système d'octroi de permis par secteur. Il nous permettait d'atteindre notre but immédiatement, soit de réduire la pression sur les stocks. Nous permettions au ministère des Pêches et des Océans de gérer la ressource de façon à assurer la viabilité économique des pêcheurs de la région. La pression était moins grande sur les stocks, mais la pêche pouvait continuer à un niveau raisonnable.

La décision a été en faveur d'un système d'octroi de permis par secteur et d'accumulation de permis, mais l'alternative, la possibilité d'un système de rachat financé par l'industrie, a néanmoins été examinée sérieusement. Nous en sommes cependant venus à la conclusion qu'elle exigeait plus de temps, qu'elle ne réduisait pas la pression sur les stocks et qu'elle n'apportait pas le soulagement immédiat que nous recherchions.

Je pense que le groupe a eu raison de choisir le système d'octroi de permis par secteur et d'accumulation de permis. Nous avons été très surpris de recevoir 80 millions de dollars en tant que contribution au rachat. Nous ne nous y attendions pas. Il y avait évidemment eu des demandes. Des groupes l'avaient proposée dans le cadre de leur plan. Ce montant a été incorporé au plan. Ce n'était pas 200 millions, mais 80 millions de dollars.

Lorsqu'on a annoncé le rachat et le système d'octroi de permis par secteur, on a constaté un intérêt immédiat pour l'accumulation des permis, permettant de pêcher ailleurs sur la côte. L'intérêt pour ces permis a surpris. Il y a eu une sorte de ruée, ce qui a fait grimper les prix. Certains estiment que c'était une mauvaise idée, mais en réalité rien n'aurait pu être plus réjouissant.

Les prix ont monté à un niveau tel que les gens ont commencé à envisager sérieusement de vendre leurs permis. Il faut comprendre qu'il y a bien des gens dans l'industrie qui ne voulaient pas partir. L'année dernière, même si c'était une question de vie ou de mort, il était impossible de se retirer de l'industrie. Il n'y avait pas d'option. Il était impossible de vendre. Si on vendait, c'était à un prix tout à fait déraisonnable. C'était pratiquement impensable. La situation était donc stagnante. Les gens étaient soumis à un stress et une pression économique énormes.

Par suite de l'annonce du système d'octroi de permis par secteur et de la légère augmentation des prix des permis, l'intérêt a commencé à se manifester. Le niveau du prix de rachat s'est accru pour les gens désirant se retirer de l'industrie. Ces gens peuvent maintenant le faire avec une certaine dignité. C'était un aspect extrêmement important du plan au départ. Les gens devaient avoir quelque chose de concret en quittant l'industrie.

Lorsque M. Mifflin est venu à Vancouver jeudi dernier afin de rencontrer les représentants de l'industrie à la suite des nombreuses réactions négatives sur la côte - c'est incroyable, vous pouvez en voir dans tous les journaux - il a voulu obtenir l'assurance qu'il était dans la bonne voie et recevoir des recommandations sur les solutions possibles s'il y avait des problèmes.

Le plan comportait un certain nombre de lacunes, même si nous estimions qu'il n'y avait pas de formule de rechange au système d'octroi des permis par secteur et d'accumulation des permis. Entre autres, les considérations sociales n'étaient pas suffisamment prises en compte. C'était une lacune importante de ce système.

Nous avons donc fermement recommandé au ministre qu'il examine attentivement la situation des pêcheurs vraiment forcés de se retirer de l'industrie.

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En tant que propriétaire de bateau, j'ai des choix. Je peux vendre mon permis, faire de l'argent, me lancer dans une autre entreprise, ou encore acheter un autre permis. Actuellement, c'est un investissement parfaitement sain, parce que le permis permettra de pêcher dans un secteur où il y aura moins de bateaux. J'ai des choix, en ce qui me concerne.

Une personne qui ne possède pas de bateau, qui travaille sur un autre bateau, n'a pas, elle, le choix. Si son bateau est racheté et retiré de la flotte, son emploi est terminé. Avec le recul, nous nous sommes aperçus que c'était un grave problème et qu'il devait être examiné attentivement. Il était important que le gouvernement indique clairement quelles pouvaient être les perspectives réelles de ces gens au niveau du rajustement du revenu, du recyclage, etc.

Nous en sommes également venus à la conclusion que les 80 millions de dollars ne pouvaient être dépensés d'ici le 30 juin, et je suis d'accord avec ce que M. Pearse a dit à ce sujet. Rien n'oblige à dépenser cet argent d'ici le 30 juin. Le Conseil du Trésor a posé certaines conditions, mais le gouvernement devrait prendre conscience de l'importance de cet argent pour l'industrie et réaliser qu'il y a un certain nombre de besoins.

Il y a d'abord et avant tout la gestion de l'habitat et la mise en valeur du saumon. La principale raison pour laquelle la ressource diminue, c'est que la civilisation empiète sur les endroits où les poissons déposent leurs oeufs, sur les frayères. C'est une évolution naturelle, mais elle cause des dommages énormes ainsi que des problèmes pour les stocks de saumon. Nous pensons que des dépenses importantes s'imposeront à ce niveau avec le temps et que même si les 80 millions de dollars ne sont pas dépensés tout de suite au titre du rachat ils doivent être gardés en Colombie-Britannique et utilisés de façon à aider autrement l'industrie. Ils ne doivent pas être repris s'ils ne servent pas uniquement au rachat.

Nous sommes venus à Ottawa pour appuyer le plan de M. Mifflin parce que nous estimons que quelque chose doit être fait. Ce plan représente le résultat de nos efforts. Nous n'avons pas d'autre choix que de le mettre en oeuvre pour la saison 1996. Nous appuyons fermement le ministre à cet égard.

Ce plan reçoit beaucoup d'appui sur la côte, même si, comme vous avez pu le constater, les gens qui sont en faveur ne manifestent pas, ne protestent pas nécessairement. Nous ne faisons pas les manchettes parce que nous représentons quelque chose de positif. Nous achetons des permis, nous continuons de faire notre métier de pêcheur. Je peux vous assurer qu'il y a parmi ce qu'il est convenu d'appeler la majorité silencieuse un fort pourcentage de gens de la côte de la Colombie-Britannique.

Ce plan est donc bien accueilli, mais il y a une question importante qui doit être précisée pour que les pêcheurs soient suffisamment rassurés pour continuer, pour investir dans leur avenir, et c'est la question de l'accès garanti à la ressource. L'accès garanti à la ressource signifie des allocations garanties; tout tourne autour des allocations actuellement.

Nous ne savons pas où nous en sommes pour ce qui est de la répartition entre Autochtones et pêcheurs sportifs par secteur; nous ne savons pas non plus quelle est la situation concernant la répartition entre engins et entre secteurs.

Nous avons reçu l'assurance du ministre, de fait, des deux ministres Tobin et Mifflin, qu'ils examinent la situation attentivement et que la question sera résolue avec la nomination de M. May et de M. Kelleher. En attendant, les pêcheurs de la flotte ne savent pas à quoi s'en tenir et sont craintifs. Le calendrier inquiète beaucoup de gens.

Je suis donc d'accord avec la recommandation de M. Pearse portant que les gens qui ne se sentent pas suffisamment confiants cette année, pour ce qui est de l'engin ou du secteur, aient un délai supplémentaire d'un an pour se décider; de cette façon, ils pourraient voir exactement quelle est la répartition et déterminer leur statut futur. Une telle mesure n'aurait pas d'impact sur la pêche cette année. La moitié des bateaux ne pourront pas pêcher de toute façon. Je pense que vous devriez sérieusement envisager une telle possibilité.

Il y a un autre aspect de la question de la répartition que j'aimerais voir traiter, monsieur le président, et, avec votre permission, je demanderais à l'un de mes collègues de prendre deux ou trois minutes pour en parler. Il s'agit de la répartition du saumon quinnat sur la côte ouest. Le sujet est très important, et mon collègue le connaît beaucoup mieux que moi.

Le président: Je vous en prie.

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M. Rombough: Voici Mike Griswold, un pêcheur à la traîne de la Gulf Trollers' Association.

Le président: Je vous souhaite la bienvenue, Mike.

Monsieur Rombough, vous êtes un pêcheur au filet maillant, n'est-ce pas?

M. Rombough: Oui.

M. Mike Griswold (Gulf Trollers' Association): Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole.

J'insiste sur le fait que la préoccupation la plus importante de l'industrie dans le cadre de cette démarche est sans contredit la sécurité de l'accès à la ressource.

Ce qui m'amène à prendre la parole, c'est le fait que j'ai participé à la table ronde du Pacifique. J'ai été engagé pendant un certain temps dans le processus de consultation. J'occupe un poste au sein du groupe Fraser à la Pacific Salmon Commission. Je connais donc très bien la ressource, en particulier le saumon quinnat sur la côte ouest de l'île de Vancouver.

En tant que pêcheurs, en tant qu'usagers industriels de la ressource, nous devons avoir l'assurance que les avantages découlant du plan Mifflin seront réinvestis dans l'industrie. Nos décisions dépendent uniquement de la question de la viabilité actuellement.

En particulier, la situation du saumon quinnat sur la côte ouest de l'île de Vancouver est une situation de crise. Selon le ministère, les biologistes et les meilleures compétences du ministère des Pêches et des Océans, il semble qu'il ne puisse pas y avoir de récolte du saumon quinnat sur la côte ouest de l'île de Vancouver. C'est ce que la flotte commerciale s'est fait dire. Les Autochtones de la côte ouest de l'île de Vancouver, pour leur part, ont annoncé au monde qu'ils n'avaient pas l'intention de procéder à une récolte.

Nous trouvons inquiétant actuellement qu'on projette d'ouvrir ces stocks à la pêche sportive. Malheureusement, les pêcheurs commerciaux prendraient la chose très mal. Ils en concluraient que point n'est besoin de conserver ces stocks et que les avantages d'une réduction de la flotte iront à un groupe d'utilisateurs différent. C'est ainsi que la tâche de M. May s'en trouve alourdie.

Le Canada est intervenu dans une affaire entendue par les tribunaux américains afin de réclamer la fermeture de la pêche en Alaska, et pour montrer que nous sommes sérieux il est question que nous fermions notre propre pêche commerciale. Nous nous ridiculisons et nous perdons toute crédibilité devant le tribunal si nous permettons que ces stocks soient exploités.

Encore une fois, je tiens à le répéter, les pêcheurs commerciaux demandent que le gouvernement leur démontre que c'est en toute bonne foi que ce plan a été conçu pour être avantageux. Nous comptons sur le gouvernement pour prendre les mesures appropriées et pour annoncer le plan de gestion qui s'impose en ce qui concerne le saumon quinnat de la côte ouest. Ainsi, il apaiserait bien des craintes qu'éprouvent les pêcheurs commerciaux, dont un plus grand nombre adhéreraient à ce plan. Merci beaucoup.

M. Rombough: Merci, monsieur le président. Cela met un terme à mon rapport.

Le président: Monsieur Hunter.

M. Hunter: Je vous remercie, monsieur le président, vous et les membres du comité, de m'avoir invité à vous parler de cette question.

Permettez-moi de rappeler les premiers principes et les objectifs qui étaient visés quand le ministre Tobin a décidé qu'il y aurait une table ronde et quand il a fixé les règles selon lesquelles tous nous peinons et travaillons d'arrache-pied depuis 12 mois. Dire qu'il n'y a pas eu de consultations sur cette question est à coup sûr une insulte à l'endroit de ceux qui ont passé bien des heures - et moi moins que d'autres - à essayer de formuler des conseils à l'intention du gouvernement du Canada sur la façon d'aborder les problèmes que M. Pearse a eu raison de décrire, ce matin, comme étant critiques.

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Il avait été établi que tout plan devait atteindre un double objectif de conservation et de durabilité économique. Réfléchissons un instant aux réalités économiques des pêches. L'organisme que je représente, le Conseil des pêches de la Colombie-Britannique, regroupe des compagnies de transformation dont l'intervention ajoute environ 100 p. 100 à la valeur du poisson débarqué à quai par les pêcheurs.

N'oublions jamais que la transformation du poisson au Canada fait partie intégrante du secteur de la pêche et constitue une partie des avantages économiques que nous tirons de nos ressources maritimes. Je suis fier de représenter ce secteur en Colombie-Britannique. Pour quantité de raisons, ce secteur connaît bien des difficultés actuellement, et je vais vous en épargner la description. Je me bornerai à dire que le saumon, bon an mal an, représente environ 60 p. 100 des revenus du secteur de la pêche commerciale en Colombie-Britannique, dont le chiffre d'affaires représente 1 milliard de dollars par année.

Le gros de cette production est exporté vers les États-Unis, le Japon et l'Europe. Nos activités débouchent donc sur un apport net de dollars au Canada. Dans le monde du saumon, la situation est difficile cependant, ne serait-ce qu'à cause de l'explosion de la production qui s'est produite à l'échelle mondiale. Que le Chili, la Norvège, l'Écosse et le Canada produisent du poisson d'élevage, cela a des conséquences pour les marchés et les prix. Pour une entreprise de transformation, la réalité économique est tout à fait semblable à celle que M. Rombough, qui est un petit exploitant, vient de décrire.

La réduction de la flotte a un gros impact sur nous, transformateurs, détenteurs de permis, car pour conserver notre compétitivité à l'échelle mondiale, nos produits étant en concurrence avec ceux du Chili et de la Norvège, mais également avec certaines sources de protéines comme le poulet et le porc, nous devons maintenir nos coûts au plus bas niveau possible.

L'état actuel de la flotte entraîne des coûts que nous ne pouvons pas absorber, de sorte que d'un point de vue strictement économique, de notre point de vue, la réduction de la flotte est un élément crucial pour l'avenir, non pas seulement pour les transformateurs, mais aussi pour tout le reste de l'industrie. En l'absence d'un secteur de transformation sain, les pêcheurs ne pourront pas compter sur les services que nous leur fournissons: les marchés pour la vente de leurs produits. Les compagnies que je représente ne pourront plus se permettre d'engager des dépenses d'immobilisations et de main-d'oeuvre comme elles le font depuis 120 ans.

Monsieur le président, s'agissant de la conservation, je pense en parler en connaissance de cause également. Je travaille dans le secteur depuis près d'un quart de siècle, soit pour le compte du gouvernement du Canada, soit comme entrepreneur indépendant. J'ai eu à faire face à bien des problèmes, y compris l'opposition entre le Canada et les États-Unis et le traité concernant le saumon du Pacifique. Bien malgré moi, il semble que j'en fasse une carrière.

Si je m'attache exclusivement au fleuve Fraser et à la conservation du saumon rouge, qui nous vaut un de nos grands différends avec les États-Unis, je constate que le nombre de bateaux de pêche dans cette région rend la tâche des gestionnaires du ministère des Pêches et des Océans presque impossible.

Dieu seul sait comment on a pu évaluer ces dernières années la prise de certaines espèces comme celles qui sont pêchées à la ligne traînante au large de la côte ouest des îles de la Reine-Charlotte. Il faut être reconnaissant à M. Tobin et aux fonctionnaires du ministère qui ont décidé de mettre un terme à cette situation inacceptable. Le conseil d'examen public du fleuve Fraser a fait une recommandation très ferme à cet égard, et nous l'appuyons.

Il arrive que le conseil du fleuve Fraser, où siègent des représentants des États-Unis et du Canada, prenne des décisions le vendredi après-midi pour la configuration de la pêche de la semaine suivante. Il procède presque à l'aveuglette, et cela est attribuable en partie, mais pas entièrement, aux inconnus dans le secteur canadien. Si le dimanche soir on décide d'ouvrir le détroit de Johnstone à la pêche, on ne sait pas combien de bateaux vont accourir. On ne sait pas s'il y en aura 400 ou 1 400.

Nous pensons que le plan Mifflin répond directement à ce problème. Désormais, nous connaîtrons exactement le nombre de bateaux qui pêcheront, et cela constituera une amélioration sur le plan de la gestion. Ceux qui la semaine dernière vous ont dit que le plan Mifflin ne faisait rien pour la conservation vous ont induits en erreur. Comment prétendre que l'on ne s'occupe pas de la conservation si l'on crée des conditions qui permettent de faciliter la gestion? Dire le contraire est illogique selon moi. C'est absurde.

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Je m'attarde à un seul point particulier pour prouver ce que je veux établir: la conservation. Nous pensons que ce plan est crucial pour l'avenir de notre pêche. Inutile de dire que sans des mesures raisonnables de conservation et sans les outils de gestion nécessaires, notre ressource va s'épuiser.

J'ajoute que nous devons veiller à cela sans oublier que le ministère des Pêches et des Océans a été réduit. Les fonctionnaires sont désormais moins nombreux pour faire le travail nécessaire. Il faut donc veiller à leur rendre la tâche plus facile.

Monsieur le président, il a souvent été question ce matin de précipitation. Don Cruickshank lui-même a parlé d'une étude qu'il a faite en 1982. Le problème a été étudié sous toutes ses coutures, et encore davantage depuis que le processus de la table ronde a été mis en branle, il y a un an.

Permettez-moi d'emprunter une expression chère à mon bon ami, Bob Wright, qui représente avec beaucoup de verve la pêche sportive, du moins la composante commerciale de cette activité en Colombie-Britannique. Il dit volontiers: tout ce qui traîne se salit. Cela s'applique à notre situation. Il faut sans plus tarder procéder à la réduction de la flotte afin de redonner à cette industrie le potentiel de contribution économique qu'elle a pu offrir par le passé.

Nous reconnaissons que nous avons quelque chose à faire dans cette démarche, mais nous reconnaissons également les difficultés que comporte le plan. Il est impossible d'éviter toute difficulté quand on réunit 70 personnes dans le but de parvenir à un consensus, mais, après avoir écouté M. Pearse ce matin, je me dis que les choses sont entre bonnes mains.

On retrouve dans le plan le gros des conclusions du rapport de la table ronde. On y trouve l'essentiel des opinions qui, sans faire le consensus, étaient généralement partagées. Il contient d'autres éléments qui ne proviennent pas des discussions de la table ronde.

Que changerions-nous? Notre conseil au ministre va dans le même sens que ce que vous avez entendu ce matin à propos de mise en veilleuse des permis. Nous pensons que cela est raisonnable. Ainsi, les gens disposeront d'une année pour prendre des décisions qui vont changer tout le cours de leur vie, ce pourquoi il faudrait qu'ils puissent compter sur des renseignements fiables.

Le manque à gagner pour le ministère des Pêches et des Océans serait de 2 millions de dollars si 2 000 bateaux décidaient de mettre leur permis en veilleuse. Nous pensons que c'est une bien petite somme, à laquelle le Conseil du Trésor devrait renoncer volontiers afin que ce plan soit accepté plus facilement par ceux qui ont des hésitations.

Nous pensons également que le fonds de rachat de 80 millions de dollars ne sera pas entièrement dépensé, et ce, pour diverses raisons, mais nous n'arrivons pas à comprendre pourquoi il existe des règles administratives suivant lesquelles l'argent disparaîtra dès le 30 juin. Nous pensons que la totalité de cette somme devrait être dépensée en Colombie-Britannique, et si elle ne sert pas entièrement au programme de rachat, nous souhaiterions qu'on s'en serve pour offrir une aide transitoire pour l'adaptation des ressources humaines.

Je ne vais pas entrer dans les détails. Ce matin, d'autres l'ont fait à ma place. Je me bornerai à dire que nous appuyons cette idée. Nous pensons qu'il est tout à fait déplorable que cette question n'ait pas été abordée au moment où le ministre a annoncé son plan. Il en résulte des problèmes inutiles.

Deuxièmement, nous pensons que ce fonds de 80 millions de dollars devrait servir en partie à ce que nous appelons la «régénération du poisson de la Colombie-Britannique». Ainsi, on s'occuperait de l'habitat dont M. Rombough a parlé et on pourrait le faire sur le modèle de la régénération des forêts de la Colombie-Britannique, qui est axée également sur l'habitat.

Je voudrais également aborder la question de la concentration des entreprises, car cela a été attaqué par ceux qui s'opposent à ce plan. En fait, il s'agit d'une attaque dirigée contre les gens que je représente.

Je tiens tout d'abord à souligner que nous pensons que les entreprises que je représente sont importantes, et pour que toute l'industrie de la pêche et les localités côtières soient prospères il est essentiel que le secteur de la transformation soit compétitif et solide sur le plan international. Les transformateurs doivent pouvoir compter sur un approvisionnement sûr si nous voulons que nos investissements à terre soient maintenus et continuent d'employer un grand nombre de travailleurs syndiqués et non syndiqués à des salaires raisonnables.

Un certain nombre de compagnies que je représente ont elles-mêmes des permis de pêche pour des raisons tout à fait valables, mais, à mon avis, ce n'est pas le nombre de permis que possèdent les transformateurs qui constituent la pierre d'achoppement. D'après les chiffres que le ministère a fournis à la table ronde, il y aurait environ 170 permis de pêche à la seine qui seraient détenus par des compagnies de transformation ou en coentreprise par de telles compagnies et des pêcheurs indépendants. Cela représente 170 bateaux, et l'on sait que la flotte de bateaux de pêche à la seine compte 549 bateaux. Comme vous le savez, les compagnies de transformation ne possèdent à peu près pas de petits bateaux, de bateaux faisant la pêche au filet maillant ou à la traîne. Il y aurait donc deux ou trois bateaux qui seraient détenus par des «sociétés».

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Nous n'arrivons pas à comprendre comment l'on peut parler dès lors de concentration d'entreprises, sur le plan juridique, aux termes de la Loi sur la concurrence au Canada. Notez que bien des pêcheurs, des compagnies de pêcheurs, cumulent divers permis grâce à leur structure d'entreprise ou à l'entreprise qu'ils exploitent personnellement. Pourquoi alors y aurait-il des raisons juridiques ou morales de traiter les compagnies qui transforment le poisson différemment de celles qui ne le font pas?

Les compagnies que je représente ont dit à M. Mifflin jeudi dernier à Vancouver qu'elles n'avaient pas l'intention d'acheter des permis, qu'elles n'en avaient certainement pas acheté, par suite de l'annonce du plan. Elles n'ont donc pas l'intention de le faire, et je ne fais que vous répéter ce qu'elles ont déjà affirmé au ministre il y a moins d'une semaine.

Monsieur le président, je vais terminer en vous parlant des localités côtières, car j'en habite une. C'est une grosse localité. Qu'il s'agisse de Vancouver, d'Ucluelet, de Prince Rupert, d'Alert Bay, tous ces endroits sont devenus prospères grâce à des entreprises qui réalisent des bénéfices et qui peuvent verser des impôts. Nous pensons que ce plan va permettre d'améliorer la situation de l'industrie, en la rendant plus rentable. Les localités côtières, c'est indéniable, vont changer, mais ce changement ne sera pas nécessairement négatif, comme on a voulu le laisser présager jusqu'à présent.

Ucluelet est une localité côtière dont on a beaucoup parlé dans ce contexte. La pêche commerciale à Ucluelet, à côté de laquelle une pêche sportive importante prospère, est dominée non pas par le saumon, mais par la crevette, le merlu et le poisson de fond. Quatre-vingt-dix p. 100 des emplois à Ucluelet découlent d'espèces non salmonidées. Dans ces conditions, le plan Mifflin n'a rien à voir.

Nous pourrons vous faire part en temps utile d'autres idées qui permettraient que ces principales espèces contribuent davantage à l'essor de la ville.

Monsieur le président, j'ai sans doute parlé trop longtemps. Sachez que mon organisation appuie le plan et les arguments présentés par M. Rombough ce matin. Je voudrais donner la parole maintenant à M. Taylor.

M. Greg Taylor (membre du Comité du bassin hydrographique de la Skeena): Merci, monsieur le président.

D'entrée de jeu, je tiens à appuyer ce que Mike a dit. Je dirige la délégation de la côte ouest, et nous appuyons le plan. Je suis accompagné de Larry Wick, un senneur, membre de l'Association des propriétaires de bateaux de pêche; de Mike Griswold, qui vous a déjà adressé la parole, un pêcheur à la traîne, membre de l'Association des pêcheurs à la traîne du golfe; de John Murray, pêcheur au filet maillant et président de l'Association des pêcheurs au filet maillant du Pacifique; deClaude MacDonald, pêcheur au filet maillant et membre du syndicat; de Lenny Carr, pêcheur au filet maillant indépendant; et de Les Rombough, du Comité des pêcheurs au filet maillant de la rivière Campbell.

Je suis moi-même un transformateur et je vis à Prince Rupert, une des localités côtières. Il y a un autre membre de notre organisation qui n'a pas pu venir parce qu'il est en Alaska, où il s'occupe d'un projet conjoint portant sur la mise en valeur de l'océan dans le but que ses ressources soient intégrées à la planification de la côte nord. Il s'agit de Bruce Hill, président de la Société de protection de la truite arc-en-ciel de la Colombie-Britannique. Il s'agit de l'une des plus anciennes organisations environnementales de la Colombie-Britannique qui s'intéressent au saumon et à la truite arc-en-ciel. Son organisation et lui-même appuient inconditionnellement le programme de relance de la flotte.

Merci de nous avoir invités. Nous sommes un peu déçus du moment que vous avez choisi pour le faire, étant donné que les opposants au plan ont déjà été entendus la semaine dernière, et il semble qu'ils le seront de nouveau aujourd'hui. Cela dit, les membres de la délégation m'ont demandé de parler de conservation dans le cadre de ce plan. À bien des égards, cet aspect s'est perdu dans le tollé qui a entouré le plan de relance de la flotte. L'objectif central de ce plan est la conservation des ressources. La conservation est l'élément essentiel qui a donné naissance au plan.

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Notre délégation et les nombreux pêcheurs qu'elle représente ont depuis toujours deux objectifs: la durabilité écologique et la viabilité économique. Nous comprenons et nous savons que ces deux éléments vont de pair et que cela sera encore plus vrai à l'avenir au fur et à mesure que nous réévaluerons nos stratégies de gestion, dont je parlerai dans un instant.

Bien des gens ont dit que le plan de relance de la flotte ne portait pas sur la conservation, ne portait pas sur la capacité de pêche. Ils avaient grand tort. Ils vous induisaient en erreur. Je le répète, la conservation est le fondement même de ce plan.

Contrairement à ce que M. Pearse a dit, une grande partie de nos stocks sont menacés. La situation est grave sur la côte ouest pour ce qui est du saumon. Il est vrai que dans le fleuve Fraser et sur la côte nord les stocks de saumon sont abondants. Toutefois, les ressources en saumon de la Colombie-Britannique comportent littéralement des milliers d'espèces indépendantes, différentes sur le plan génétique, et dont certaines sont beaucoup plus faibles que d'autres.

Votre comité aura bientôt l'occasion de voir un rapport publié par l'American Fisheries Society, qui étudie précisément cette question. Tout comme moi, cet organisme fait état d'excellents stocks de poisson sur la côte ouest, mais explique en même temps qu'un grand nombre de stocks, plus faibles, sont menacés d'extinction biologique ou économique. Ce sont ces stocks affaiblis que ce plan voudrait protéger et, éventuellement, reconstituer. Sans ce plan, cela ne sera tout simplement pas possible.

Ce plan aborde les besoins en matière de conservation de cinq façons différentes. Pour commencer, la gestion anti-risques, c'est-à-dire une gestion axée sur un ensemble de mesures de précaution. Les en a parlé tout à l'heure. Autrement dit, si on n'est pas certain de la taille de la remontée, si on n'est pas certain de la composition des stocks, si une pêche présente des risques ou des incertitudes, on ne pêche pas, ou encore on pêche dans des proportions très réduites.

Deuxièmement, une réduction des pêches d'interception. Jusqu'à présent, et cela continue, on pêche dans une sorte d'entonnoir. Le poisson entre dans la zone des îles de la Reine-Charlotte et descend le long de la côte ouest. On le pêche à divers endroits tout au long de la côte.

Cette pratique provoque une surpêche de beaucoup d'espèces qui ne sont pas des espèces cibles, mais en même temps, comme Mike l'a expliqué, cela rend les gestionnaires très nerveux, car ils ont beaucoup de mal à déterminer ce qui revient vers les rivières. Avec toutes ces pêches d'interception, la gestion devient très difficile.

Un des éléments clés du plan est donc de déplacer ces opérations de pêche pour les rapprocher des terminaux, pour les rapprocher d'un endroit où il est plus facile de déterminer avec précision la taille des remontées, et par conséquent plus facile de protéger une remontée de saumon et de s'assurer qu'elle parvient bien jusqu'au gravier.

On va tenter de pêcher les stocks de façon plus sélective. Cela nous ramène à la nécessité d'avoir plus de terminaux pour déterminer où se trouve le poisson et quel est l'état des stocks. Pour ce faire, la pêche va être très circonscrite dans le temps. Au lieu d'étaler la pêche sur plusieurs semaines, ou même plusieurs mois dans certains cas, il s'agira littéralement de quelques jours ou de quelques semaines.

Pour vous donner un exemple, c'est une démarche que nous avons adoptée sur la rivière Skeena. Par le passé, la pêche commençait à la mi-juin pour se terminer le 1er septembre. Aujourd'hui, la pêche primaire s'étend sur une période de trois semaines, et nous nous assurons qu'en pêchant nous protégeons les stocks sauvages, autres que les stocks cibles.

Enfin, comme d'autres l'ont déjà dit, nous sommes en train de créer une pêche qui est plus facile à gérer, plus restreinte, plus discrète, plus facile à contrôler. Autrement dit, ce que nous essayons d'élaborer pour l'avenir, c'est un système qui permettra aux gestionnaires d'utiliser un scalpel au lieu d'y aller à la hache, comme c'est le cas actuellement.

Un dernier élément clé de ce plan porte sur la conservation et les permis de secteur. C'est un élément fondamental. Avec des permis de secteur, les pêcheurs doivent rester dans un secteur donné. Ils sont donc responsables des décisions qu'ils prennent dans ce secteur. Ils peuvent profiter à la fois des avantages et des problèmes provoqués par leurs méthodes de pêche. Ils sont plus enclins à s'intéresser à leur secteur, à s'intéresser à ce qui se passe en amont, à l'habitat et à la préservation de l'habitat. Ils peuvent ainsi participer à des projets d'amélioration.

Un système de permis de secteur est donc un élément fondamental, et lorsque j'entends des gens dire que nous n'en avons pas besoin, cela me décourage beaucoup. Nos problèmes tiennent en partie au fait que nous n'avons pas ce système pour l'instant.

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Ces cinq éléments de conservation qui figurent dans le programme sont absolument fondamentaux. Mais que signifie cela pour l'avenir du MPO? Le MPO considère que c'est un changement fondamental de son mandat. La conservation devient la priorité absolue; c'est une position qui va modifier considérablement la gestion des pêches sur la côte ouest. Les choses vont changer à tout jamais. Grâce à ce programme, les pêches sur la côte ouest vont faire l'objet de mesures de conservation et de gestion uniques au monde.

Le problème, c'est que nous changeons l'orientation de nos pêches, notre stratégie et nos pratiques. Notre flotte a perdu le contact avec cette nouvelle stratégie de gestion. Les origines de cette flotte remontent à la fin des années 1800 et au début des années 1900. À l'époque, cette flotte devait pêcher le saumon sur une base industrielle. En effet, le saumon était considéré comme un produit industriel à exploiter et à transformer en usine.

Aujourd'hui, la société considère le saumon d'une façon différente. Beaucoup de gens s'intéressent beaucoup plus au saumon, qu'il s'agisse des pêcheurs commerciaux, des pêcheurs sportifs ou des Autochtones. On voit le saumon d'une façon très différente.

Nous devons donc modifier cette flotte également. Elle n'est plus du tout adaptée. Sous sa forme actuelle, elle ne survivra pas au nouveau régime de gestion. C'est la raison pour laquelle le programme de relance est un élément clé, et c'est la raison pour laquelle il importe d'agir maintenant.

Nous ne pouvons pas attendre 1997 ou 1998. Ce serait beaucoup trop tard. Ce nouveau régime de gestion dont nous avons besoin si nous croyons véritablement en la conservation de nos stocks doit commencer cette année. Voilà pourquoi ces changements doivent être apportés cette année. Voilà pourquoi nous devons prendre des mesures immédiatement. Faute de relancer notre flotte, nous ne parviendrons pas à nos objectifs en matière de conservation.

À ce sujet, j'ai observé que les gens qui s'opposent au plan n'ont pas lu ce qui s'est passé sur la côte est. Les arguments qu'on entend aujourd'hui au sujet de la côte ouest sont justement ceux qu'on entendait pendant les années quatre-vingt au sujet de la côte est, à l'époque où les gens refusaient de voir que les stocks de morue diminuaient. On invoquait des arguments comme les emplois à court terme et la survie des communautés côtières. Ce sont les arguments qui l'ont emporté, au détriment du poisson.

À mon avis, nous ne pouvons pas nous permettre cela sur la côte ouest. Nous devons accorder la priorité au poisson, nous devons prendre dès maintenant ces décisions difficiles.

En conclusion, et en prévision des questions que vous allez nous poser, nous prions instamment le ministre d'annoncer ce programme le plus vite possible pour affermir la flotte et nous permettre de nous mettre au travail et de sauver les stocks de saumon sur la côte ouest.

Le président: Je vous remercie tous infiniment. J'aimerais commencer par Mme Terrana, qui, je crois, va être obligée de partir.

Mme Terrana: Vous n'y voyez pas d'inconvénient? Je dois prendre la parole à la Chambre. Merci.

Bienvenue à Ottawa.

Je ne sais pas, mais en écoutant cette délégation, en écoutant M. Pearse, M. Cruickshank et vous-même, j'ai l'impression que les gens sont d'accord.

Vous semblez être d'accord sur beaucoup de points. Par exemple, la conservation. Nous savons tous que c'est l'élément le plus important.

La prolongation des délais, ou bien l'argent en fiducie - c'est bien ce que j'ai entendu? - laissent les permis en suspens, et les pêcheurs semblent vouloir cela. Il y a l'étude sur l'impact environnemental, social et socio-économique d'un programme de relance qui tiendrait compte des problèmes des gens qui perdent leur emploi. Cela comprendrait la reconstitution des stocks dans les cours d'eau. Et les gens réclament la reconstitution des stocks dans les cours d'eau. Il y a également la question de la répartition. C'est une chose que j'ai entendue ce matin qui me semble valide.

J'ai plusieurs questions à vous poser. Nous semblons être tous d'accord sur ces aspects-là, mais, par contre, la question des permis semble prêter à controverse. J'aimerais savoir quelles sont les autres solutions. Est-ce qu'on pourrait prolonger la date limite du 24 mai, et peut-être laisser aux gens plus de temps pour s'habituer aux permis de secteur? Sinon, y a-t-il une autre solution? Voilà pour une question.

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J'aimerais savoir également si 80 millions de dollars suffiront pour acheter les bateaux et les permis.

J'ai deux autres questions, dont une qui porte sur les prises. Nous réduisons la flotte, mais nous ne réduisons pas les prises.

Ma dernière question porte sur le commerce des permis et la possibilité de les vendre très cher à d'autres pêcheurs. Est-ce que c'est juste? Est-ce que c'est normal? Et sinon, pourquoi?

Merci, monsieur le président.

M. Rombough: Je vais m'attaquer à une ou deux de ces questions.

La question des permis de secteur, comme nous l'avons dit... Cette année sur la côte, cela été un véritable désastre. Les stocks qui vont remonter le fleuve Fraser cette année ne justifieront pas une pêche.

Si on conserve le système de permis actuel, un système qui permet à tous les bateaux de pêcher le long de la côte tout entière, n'importe où, tout le monde va aller à Prince Rupert. En effet, on ne prévoit pas de voir du poisson dans les rivières de Smith Inlet, un autre secteur où on pêche le sockeye en juillet. Il y a aussi Barkley Sound, où la situation n'a pas l'air très brillante non plus.

Les maquereaux qui mangent les jeunes alevins lorsqu'ils sortent des cours d'eau nous posent aussi des problèmes. Les problèmes d'origine naturelle sont nombreux. Il y a également l'exploitation forestière à Rivers Inlet.

En fin de compte, cette année, sur cette côte, il n'y aura pratiquement pas de sockeye à pêcher. Si la situation ne change pas, nous irons tous à Prince Rupert. Je parle de 2 500 bateaux de pêche au filet maillant, à la seine, à la traîne, tout le monde. C'est le seul poisson que nous ayons.

Cette situation est intolérable. Cela exercerait une telle pression sur les stocks de la Skeena et de la Nass qu'ils se retrouveraient exactement dans la même position que les stocks du Fraser. Nous risquerions fort de ne plus avoir de poisson, plus d'industrie de la pêche, plus d'emplois.

Ce sont des préoccupations considérables. Cette année, on me demande de pêcher sur un tiers de la côte. Cela m'inquiète beaucoup, mais je ne vois pas d'autres possibilités. Je n'en vois vraiment pas.

Est-ce que 80 millions de dollars suffiront pour les rachats? Supposons qu'on ait décidé de verser 200 millions de dollars dans ce fonds; nous aurions pu racheter la moitié de la flotte et la réduire de 50 p. 100 du jour au lendemain. Les bateaux restants auraient tous pu pêcher le long de la côte. C'est une possibilité que nous avons considérée très sérieusement, mais nous n'avons pas200 millions de dollars. Avec ce scénario, d'autre part, les choses avancent très, très lentement. Et une fois de plus, cette année, en 1996, nous aurions trop de bateaux dans le bassin de la Skeena pour pouvoir justifier une pêche commerciale. Autrement dit, personne ne gagnerait d'argent cette année.

À quoi servira le système de permis de secteur? Il aura pour résultat que la moitié des exploitants de bateaux vont pouvoir gagner leur vie cette année.

C'est un choix très difficile. Je sais que cette année je ne vais pas gagner d'argent. Je ne choisirai pas ce secteur, car ce n'est pas mon secteur. Je vais prendre mon mal en patience, en espérant que je pourrai gagner ma vie au cours des années suivantes dans les secteurs où je prends normalement du poisson. La plupart des gens vont choisir un secteur qu'ils connaissent particulièrement bien, un secteur où ils risquent de faire plus de bénéfices. Ce sera leur premier choix. C'est difficile de s'habituer à l'idée que je n'ai qu'un tiers de la côte, mais je ne vois pas d'autres solutions.

Vous dites que la flotte va diminuer, mais pas les prises. Les prises vont diminuer aussi, comme Greg l'a très bien expliqué, et ce, dans les zones où cela est vraiment nécessaire. En diminuant le nombre des bateaux qui pêcheront dans une zone donnée, qui pêcheront un stock donné, les gestionnaires, en partenariat avec l'industrie, vont pouvoir élaborer des plans de pêche qui permettront d'exploiter les principaux stocks.

Nous pouvons faire preuve d'esprit d'innovation. C'est ce qu'on nous demande de faire. Nous pouvons imaginer des engins différents si nous avons un problème avec la truite arc-en-ciel ou le saumon coho.

De nouvelles possibilités vont s'ouvrir dans ces secteurs parce que nous saurons exactement combien il y a de bateaux. Nous pouvons donc concevoir un régime de pêche qui ne nuira pas aux stocks en difficulté et exploiter les stocks qui ne sont pas en difficulté. En allouant différents types d'engins, on assignera aux gens des prises maximums, par exemple dans le Fraser. Une fois les questions de conservation réglées, par exemple à combien doivent s'élever les prises, bingo! voilà le chiffre.

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Ensuite, il va falloir déterminer combien de poissons sont réservés aux Autochtones. Combien pour les pêcheurs sportifs? Ce qui reste, c'est le total des prises admissibles pour la flotte commerciale. Cela se divise en un certain pourcentage pour la flotte de senneurs, un autre pour celle des bateaux de pêche au filet maillant, et enfin pour les bateaux de pêche à la traîne.

Nous allons sortir et essayer de prendre ces stocks. Dès qu'un type d'engin aura pris son total admissible, ce sera terminé. Il pourrait suffire d'un jour ou de trois jours par semaine pendant quatre semaines, mais il n'est certainement pas question de pêcher en permanence.

Ce serait donc une erreur de penser que la flotte va rester inchangée; c'est tout simplement impossible. Nous diminuons le nombre de bateaux de 50 p. 100. Cela va faire un très gros trou. Tout le monde ne pourra pas pêcher dans tous les secteurs.

Par conséquent, le poisson pêché devra être déduit du total des prises admissibles. Nous n'essayons pas de réduire ce total. Nous avons besoin de gagner notre vie; c'est comme cela que nous gagnons notre vie. Toutefois, nous voulons pouvoir protéger les stocks qui ont besoin de se reconstituer.

Je suis désolé, mais je n'ai pas eu le temps de noter votre quatrième question.

Mme Terrana: Ma dernière question portait sur la vente des permis et les prix élevés qu'on exige pour ces permis, comme vous le savez.

M. Rombough: Oui. Cela coûte très cher, et c'est un problème. Beaucoup de gens n'ont tout simplement pas les moyens d'acheter un deuxième permis, mais ils aimeraient beaucoup pouvoir le faire.

Par exemple, je connais des Autochtones dans ma région qui se heurtent à un grave problème du fait qu'ils n'ont pas la même capacité d'emprunt que les autres. Ils vivent dans des réserves, et ne peuvent pas hypothéquer leur maison ou leur terre. Pour eux, c'est un obstacle considérable. Il va falloir régler ce problème. À mon avis, cela ne relève ni du MPO, ni du MDRH, mais plutôt de la NFA. Il va falloir que ces gens-là aient la possibilité d'acheter ce deuxième permis.

Pour l'instant, cela constitue une somme considérable, mais dans ma région tous les pêcheurs sérieux ont déjà acheté un deuxième permis. Pour les autres représentants des pêcheurs au filet maillant, c'est la même chose. Environ 400 permis ont déjà changé de main; cela a été beaucoup plus actif que nous ne le pensions. Cela représente de 50 000$ à 70 000$, parfois même 80 000$.

C'est beaucoup d'argent, mais l'industrie du saumon vient de traverser les 10 meilleures années de son existence. Nous avons gagné de l'argent. Les gens ne se trouvaient donc pas dans une mauvaise situation. Maintenant, cette période est terminée; les choses vont mal, et c'est beaucoup d'argent. Beaucoup de gens en ont les moyens, mais certains ne sont pas dans ce cas.

Avec le temps - je ne parle pas du 30 juin - mais avec le temps nous envisageons de créer un fonds, ou une banque, contrôlé par l'industrie. Peut-être même pourrait-on commencer avec ce qui restera après les rachats, ou encore récolter des redevances entre nous pour pouvoir prêter de l'argent aux jeunes qui essaient de pénétrer dans le secteur, ou encore aux patrons de senneurs qui veulent acheter un bateau de pêche au filet maillant, par exemple.

Pour l'instant, il est impossible d'emprunter. C'est très difficile d'emprunter de l'argent pour ce genre de chose. C'est un problème. Nous allons nous y attaquer, et j'aimerais que nous ayons un fonds qui serait disponible en permanence. Cela nous permettrait de traverser cette période de relance, qui risque de durer très longtemps, car nous ne pensons pas vraiment que ce rachat de80 millions de dollars va suffire. Nous continuerons donc. Nous devrons prendre des dispositions entre nous pour permettre aux gens d'emprunter, de rembourser, après quoi quelqu'un d'autre pourra emprunter, etc.

C'est donc ce que nous espérons. C'est une somme considérable, et certains ont beaucoup de mal à la rassembler. Toutefois, je ne pense pas qu'il y ait d'autres solutions.

Le président: Merci.

En ce qui concerne le sockeye du Fraser, on nous a dit que ce n'était pas la faute du ministère ou des pêcheurs, mais plutôt la faute du courant El Niño et du maquereau.

M. Rombough: C'est un grave problème.

Le président: Oui, mais pour un an seulement, et non pas à perpétuité.

M. Rombough: En fait, cela va et cela vient; cela dépend du courant El Niño et des autres courants. Nous n'avons aucun contrôle sur cela; nous sommes à la merci de la nature.

M. Cummins: J'ai une correction à apporter. Le problème auquel nous nous heurtons cette année a été provoqué par le MPO à cause des erreurs de gestion commises en 1992. M. Pearse a d'ailleurs rédigé un rapport et une évaluation à ce sujet. C'est l'année où la SRPA a été mise en place; la gestion a été un véritable désastre. Quoi qu'il en soit, j'aimerais revenir sur cette question.

Je tiens à remercier Les pour son exposé, que j'ai trouvé particulièrement bien pensé et bien organisé. Comme je le répète depuis le début, ce qui me préoccupe, et ce dont M. Pearse a parlé, c'est qu'on semble tenter de tout faire à la fois, et je me demande dans quelle mesure c'est nécessaire.

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Vous avez dit que cette année il n'y aurait pas de poisson dans le Fraser, ou du moins pas de poisson exploitable. Je pense que personne ne contestera cela; c'est une évidence. Toutefois, la flotte de petites embarcations a trois secteurs qu'elle peut choisir, alors que les senneurs en ont deux. Depuis l'année dernière, tous les gens que je connais sont en difficulté.

Reste donc à savoir ce que vous allez faire cette année. Même ceux - et qui sont nombreux, je le sais - qui choisiraient en priorité le secteur sud... pour tous les petits bateaux, ils auraient plutôt tendance à choisir le fleuve Fraser. Même dans la zone centrale, la plupart des stocks viennent en réalité du Fraser. Autrement dit, voilà deux secteurs qui dépendent fortement des stocks du Fraser. À part cela, il ne reste que le secteur nord.

Si ce plan est retenu, les gens qui sont désespérés - et je crois que c'est le cas de tout le monde - vont se croire obligés de choisir la zone nord pour gagner l'argent liquide dont ils ont besoin. Ils n'ont pas les moyens de prendre leur mal en patience et d'attendre un an. Dans ces conditions, pourquoi une telle précipitation?

À mon avis, en mettant ce programme en place dès cette année, on ne règle pas cette préoccupation. Même en l'absence d'un système de permis de secteur, les gens vont se précipiter vers le nord.

Cette précipitation pose un autre problème, bien sûr, car elle va provoquer une concurrence pour les permis, une concurrence entre le programme de rachat et ceux qui veulent acheter un permis supplémentaire. Si on retardait le programme d'un an pour tenir compte de ces préoccupations légitimes, y compris les encouragements fiscaux pour les gens qui veulent vendre... Il faut bien comprendre que si on vend un permis 75 000$, environ 35 000$ à 40 000$ retournent immédiatement au gouvernement par l'entremise du percepteur. Dans ces conditions, à quoi cela sert-il?

Par contre, si on retardait ce programme d'un an, si on continuait à autoriser les rachats, et si on essayait d'aider les gens qui acceptent de laisser leur bateau amarré pendant un an, de les aider à payer les droits d'amarrage et à rembourser les traites sur les bateaux, cela permettrait d'instaurer le nouveau régime progressivement et cela donnerait probablement de meilleurs résultats que ce système, n'est-ce pas?

M. Rombough: C'est un excellent argument, une possibilité dont on a longuement parlé. Pour quelqu'un comme moi qui essaie de choisir un secteur pour le seul permis que je possède, c'est certainement...

À mon avis, nous nous rendons tous compte que c'est inéluctable. Nous sommes coincés. Si on veut être réaliste, les pêcheurs ont trois choix. Ils peuvent vendre parce qu'ils sont en difficulté et n'ont pas d'autres solutions, ils peuvent acheter un deuxième permis, ou encore ils peuvent choisir un secteur en acceptant la nécessité d'avoir un deuxième emploi, parce que cela ne suffira pas.

Nous avons réfléchi à ce qui se produirait quand les gens choisiraient le secteur nord cette année. Comme on a décidé de rendre ce choix définitif, et cela à dessein, les gens vont devoir y réfléchir à deux fois cette année et peser le pour et le contre, la nécessité de gagner un peu d'argent, la possibilité de remonter la Skeena, mais tout en sachant que plus il y aura de bateaux, moins ils gagneront d'argent. Il va falloir qu'ils réfléchissent à la possibilité de trouver un autre emploi. Parfois, ce n'est pas possible, et s'ils sont désespérés, comme vous le dites, ils vont être forcés de le faire en espérant que quelque chose leur permettra à un moment donné d'acheter un deuxième permis pour pouvoir retourner sur leur fleuve Fraser ou dans la zone du détroit de Johnstone.

Beaucoup de gens vont refuser de prendre des risques. La côte sud permet de gagner beaucoup d'argent; c'est là que l'argent... On peut gagner beaucoup d'argent aussi sur la côte nord, mais comme vous le savez, depuis quelques années, ce sont les stocks du fleuve Fraser qui ont été les plus rentables. Dans ma région, par exemple, les gens ne voudront pas prendre ce risque et abandonner cette possibilité. Ils vont choisir d'attendre, et ils le savent déjà. Nous allons choisir le secteur central, ou le Fraser, prendre quelques saumons kéta à l'automne, et peut-être même nous en tirer pas trop mal grâce à eux. Nous aurons peut-être un coup de chance avec le sockeye; on verra peut-être une petite coulée dans le détroit de Barkley. Cela dit, je vous avouerai qu'à mon avis nous n'obtiendrons pas les résultats voulus en retardant tout cela.

Selon moi, nous aurons des résultats avec le rachat, et nous aurons également des résultats avec le nouveau système de permis, et, le 30 juin, cela sera chose faite. C'est pratiquement déjà terminé. Le système ne sera pas parfait, il faudra aller plus loin, mais cette étape-là sera accomplie.

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Nous pensons que le prix des permis va se stabiliser. C'est déjà fait dans une certaine mesure. Il y a eu une grosse poussée, les prix sont passés de 1 000$ à 1 600$ le pied, mais aujourd'hui ils se sont stabilisés. Tout le monde attend le rachat pour voir si cette solution-là sera plus profitable. Pour l'instant les choses sont bloquées.

J'espère vraiment que le rachat va imposer une limite raisonnable, quelque chose qui offre aux gens des possibilités décentes tout en respectant certaines limites. Autrement dit, il ne s'agit pas d'une poule aux oeufs d'or, mais de quelque chose de réaliste. Nous pourrons alors utiliser cet argent à meilleur escient.

M. Cummins: Vous nous dites que certains sont dans une situation si désespérée qu'à votre avis ils vont décider de prendre leur mal en patience pendant un an et d'attendre au lieu de sauter sur l'occasion.

M. Rombough: J'en suis certain; c'est d'ailleurs mon cas.

M. Cummins: Mike, vous pouvez répondre?

M. Hunter: Au sujet des raisons de cette précipitation? Je vais vous ramener à 1969, à l'époque de Jack Davis, qui a traversé une période très comparable à celle que traversent aujourd'huiBrian Tobin et Fred Mifflin: les protestations à droite et à gauche de gens mécontents et scandalisés. En dépit de toutes ces protestations, pour la première fois il a décidé de limiter le nombre de permis de pêche au saumon, et le système fut mis en place progressivement. Il y avait des permis A et des permis B, et les permis B devaient disparaître au bout de 10 ans. Ils sont toujours là.

Vous pouvez me demander: pourquoi tant de hâte? et me dire: reportons les choses d'un an. Qui sait? Il y aura peut-être des élections. Il y aura peut-être un nouveau ministre. La volonté politique n'y sera plus, et nous aurons encore les mêmes problèmes dans le secteur de la pêche au saumon. On ne les aura pas réglés. Je ne suis pas prêt à vous faire confiance, à vous les politiciens, pour garder votre volonté de faire dans un an ce que vous dites être prêts à faire aujourd'hui. Vous ne m'avez pas prouvé dans le passé que vous allez vraiment le faire en ce qui concerne la pêche au saumon et la limitation des permis. Nous en avons la preuve.

M. Cummins: Si vous parlez de réduire les pressions sur les stocks dans le Nord, ce dont a parlé Les ici ce matin, en agissant maintenant, allez-vous réduire les pressions et diminuer la taille de la flotte qui visera les stocks de la rivière Skeena et ceux de la côte nord notamment cet été?

M. Taylor: Je vais parler de cette question, si vous me le permettez. Je fais partie du comité directeur de ce qu'on appelle le Comité du bassin hydrographique de la Skeena, composé de personnes qui pratiquent la pêche sportive ou commerciale ainsi que de pêcheurs autochtones, qui travaillent avec les responsables de la gestion de la rivière Skeena. Je peux vous assurer que ce plan est absolument essentiel à la gestion de la rivière Skeena cette année. Sans ce plan, nous aurons de graves difficultés. Même s'il ne réduit pas la flotte de 50 p. 100, s'il la réduit seulement d'un tiers - ce qui est probable, sinon certain - il en résultera une différence énorme.

Le plan de pêche de la côte nord est actuellement fondé sur... stipule qu'il y aura 700 bateaux dans la zone de pêche 4 en juillet et 300 bateaux en août. Nous savons que ce sera un chiffre un peu plus élevé. Mais si leur nombre passait à 2 000, ce qui arriverait si ce plan n'était pas en vigueur, nous verrions la pêche passer de 19 jours, d'après les prévisions actuelles, à environ neuf jours.

M. Cummins: Vous voulez dire, je pense, qu'il en serait ainsi si le gouvernement ne mettait pas en oeuvre une sorte de programme conjoint, ce qu'on a suggéré. Il faudra de toute manière apporter une sorte d'aide à ceux qui choisissent les zones de pêche de la côte sud.

M. Taylor: Je ne suis pas d'accord. Si les pêcheurs ont la possibilité d'aller pêcher dans le Nord alors qu'il n'y a pas de programme de permis de secteur, ils iront dans le Nord, et toute la flotte se retrouvera là-bas. Les en a parlé. Il sera alors absolument impossible de gérer la pêche sur la côte nord.

Un autre aspect très important des permis de secteur, et la raison pour laquelle il faut instituer ce mécanisme cette année, dans le cadre de ce plan, réside dans le fait qu'il offre un choix aux pêcheurs. Ils peuvent soit se retirer dans la dignité, grâce au programme de rachat, soit - et c'est un élément important pour plusieurs des pêcheurs du Nord - pêcher dans leur secteur de pêche traditionnel, ce qu'ils ont toujours fait. L'essentiel, c'est qu'il y aura beaucoup moins de concurrence là-bas, de sorte que leurs revenus s'en trouveront considérablement augmentés. Le troisième aspect, c'est que les gens pourront faire des choix et investir dans leur avenir.

L'élément qui nous inquiète vraiment, c'est le fait que la seule autre possibilité semble être ce concept de redevance de rachat. Ce concept de redevance serait tout simplement dévastateur pour les pêcheurs du Nord, ces pêcheurs marginaux. On leur imposerait cette taxe de 10 000$ qui absorberait tous les profits qu'ils pourraient faire. C'est une mesure involontaire, et ils seraient donc obligés de payer cette taxe. Je peux vous dire qu'au sein de la flotte cette taxe serait aussi populaire que la TPS.

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Je pense donc que les permis de secteur sont absolument essentiels, même sans tenir compte des motifs liés à la conservation, dont j'ai parlé tantôt. Sur le plan pratique et pour atteindre nos objectifs, il est absolument essentiel d'instaurer cette mesure cette année.

M. Cummins: Larry Wick est à l'arrière de la salle, et c'est un senneur.

Je me demande si vous voudriez commenter cette idée d'aller de l'avant, Larry.

M. Larry Wick (témoignage à titre personnel): Merci, John.

Je pense qu'il est essentiel de mettre cette mesure en oeuvre maintenant. Nous en avons besoin pour assurer la viabilité de la flotte et nous en avons besoin pour protéger la ressource. Nous en avons besoin pour la gérer. Il est impossible de mettre fin au programme maintenant. Il a besoin d'un réglage, c'est certain, pour y inclure notamment le recyclage des équipages, mais la flotte est en pleins préparatifs, les pêcheurs organisent leur prochaine saison de pêche. Il est impossible de la retarder maintenant.

M. Cummins: Le fait que la flotte de pêche à la seine sera réduite, ou peut-être même interdite, dans ce secteur de la côte sud cette année influencera-t-il les pêcheurs dans une grande mesure, ou pensez-vous qu'ils sont prêts à ne pas pêcher pendant une saison afin de pouvoir plus tard profiter de la pêche le long de la côte sud?

M. Wick: Les gens font des plans présentement. Plusieurs d'entre eux ont acheté des permis ou négocié des allocations de pêche. Ils veulent des programmes de cette sorte. Nous entendons discuter de thon et d'autres programmes de cette nature, mais je pense que la flotte de pêche à la seine est prête. Alors, allons-y.

Le président: Monsieur Wells.

M. Wells: Merci, monsieur le président.

Je commencerai par vous remercier de vos exposés et exprimer mon accord avec M. Hunter, qui a dit qu'il est peut-être malheureux que nous manquions de temps. C'est certainement différent de ce que nous entendons depuis deux ou trois semaines. Il y a eu beaucoup d'opposition. Les députés réformistes de la Colombie-Britannique nous ont donné l'impression que c'était absolument inacceptable sur la côte ouest. Le premier ministre de la province nous a écrit que c'était inacceptable.

Je me demande seulement quelle est la raison de toute cette opposition de la part du premier ministre et des députés réformistes qui représentent vos circonscriptions. Il doit y avoir quelque chose qui cloche si toutes ces personnes s'y opposent.

M. Hunter: Je pourrais peut-être essayer de répondre d'abord à cette question. Les a dit tantôt, je pense, que lorsqu'on est en faveur de quelque chose et qu'on essaie de créer un consensus et de recueillir des conseils intelligents, on ne se lance pas en campagne, louant des autocars et faisant des pancartes, et tout le tralala.

Franchement, je pense que ceux qui ont organisé la Rainbow Coalition, le groupe qui est venu la semaine dernière... représentaient de drôles d'alliances dans ce secteur, d'après mon expérience. Ces gens ont des opinions très arrêtées, mais nous aussi. Ils ont plus l'habitude que nous de ce genre de choses, et je suppose que nous sommes un peu en retard. C'est une opinion que je tenais à vous donner.

En ce qui concerne M. Clark, vous êtes politicien, et je ne le suis pas. Vous savez qu'il est en train de faire campagne. Je pense que vous devriez en tenir compte en interprétant ce qu'il a dit.

Le président: Je ne pense pas que ce soit seulement M. Clark.

M. Hunter: Vous pouvez inclure tous les dirigeants de cette région.

M. Wells: Je ne suis pas certain de la position du chef de l'opposition. Je crois qu'il s'y oppose également, mais je n'ai pas reçu de lettre de lui. J'ai seulement reçu une lettre du premier ministre provincial.

J'aimerais entendre les commentaires des autres, peut-être... à moins que vous ne soyez tout à fait d'accord avec Mike.

M. Rombough: Je tiens à vous répondre, monsieur Wells.

J'habite à Campbell River. On voit tous les jours dans les journaux des opinions négatives. Nous lisons dans le journal que deux opposants, qui sont deux de mes amis - ou peut-être des connaissances, puisque nous nous trouvons dans des camps opposés en ce moment - ont parlé de la possibilité de demander au conseil municipal de Campbell River d'écrire au ministre pour dénoncer ce plan et lui demander de l'annuler parce qu'il leur apparaît absolument inacceptable. Le conseil les a écoutés et a fait exactement ce qu'ils demandaient. Que pouvait-il faire d'autre? Étant donné qu'on en a tellement parlé dans les journaux...

Nous en avons entendu parler et nous avons demandé si nous pouvions aller nous représenter nous-mêmes devant le conseil municipal et le maire. Nous leur avons donné notre rapport, le même que nous venons de vous remettre, et ils en sont tous restés bouche bée. Personne ne leur avait parlé de cela. Ils sont restés assis à écouter ce que nous avions à dire, et notamment que je représente100 propriétaires de bateaux de pêche aux filets maillants dans ce secteur et que nous nous occupions de cette question depuis six mois.

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Ils venaient d'écrire une lettre à M. Mifflin pour dénoncer le plan. Nous leur avons dit: merci beaucoup, mais nous avons travaillé très dur à cette question. Ils se sont rendu compte qu'ils avaient agi à la hâte. Ils ont dit que lorsque les représentants de la United Fishermen and Allied Workers' Union (UFAWU) étaient venus à leur réunion du conseil, ils avaient pensé qu'ils représentaient tous les pêcheurs commerciaux.

Lorsque vous verrez certains des communiqués de presse... et bien c'était tout un cirque, mais ils adorent cela. Lorsque les caméras sont pointées sur quelqu'un qui saute de joie pendant une conférence de presse et que c'est la personne qu'on croit représenter la flotte de pêche de la Colombie-Britannique, tandis que nous passions toute la matinée en réunion avec le ministre, à discuter de ces détails... Ils ne nous parlent pas. Nous ne faisons pas la manchette.

Je pense que les membres de la presse ont vraiment été... Je ne veux pas utiliser le terme «irresponsable», mais ce sont des journalistes. C'est ce qu'ils semblent aimer. Il en est ainsi.

Quoi qu'il en soit, nous nous sommes représentés nous-mêmes au conseil municipal de Campbell River, qui a immédiatement écrit à M. Mifflin pour lui dire qu'il regrettait, mais qu'il avait agi sans connaître tous les faits. Tous ceux à qui nous avons présenté des instances depuis une semaine... Nous nous sommes enfin dit que nous devions agir, parce que vous n'entendiez qu'une opinion, et que nous devions agir, sinon ces gens pourraient réussir à faire annuler ce plan.

Toutes les personnes à qui nous avons présenté notre point de vue ont réagi exactement de la même manière: elles ont demandé qui nous étions. Nous représentons la majorité silencieuse.

M. Wells: On nous a critiqués la semaine dernière parce que nous ne voulions pas approuver une résolution à ce comité. Certains d'entre nous pensaient que nous devions connaître tous les faits avant d'approuver une résolution. Vous avez certainement renforcé notre position, c'est-à-dire le fait que nous ne devrions pas appuyer de résolutions sans connaître tous les faits.

On a dit tantôt, Mike - et je m'adresse à vous d'abord parce que vous faites partie de la table ronde - que cette table ronde était une imposture, que les décisions avaient déjà été prises par le ministère des Pêches et des Océans et qu'on s'en servait comme méthode pour arriver aux conclusions auxquelles le ministère des Pêches et des Océans voulait arriver de toute manière. Vous avez participé aux consultations. Pensez-vous que c'est une imposture?

M. Hunter: Non, je ne le pense pas, Derek. Comme je l'ai dit tantôt, il y a longtemps que j'ai des rapports avec le ministère des Pêches et des Océans, et j'ai été des deux côtés de la clôture. Je dois dire que les conditions établies pour la table ronde étaient celles qu'avait fixées le ministre de l'époque. Si la liberté d'action de la table ronde était limitée, c'était parce qu'elle avait été créée pour examiner des questions dans les conditions stipulées clairement par M. Tobin.

À part cela, on a réfléchi beaucoup et on a consacré beaucoup d'efforts à la création d'un mécanisme permettant d'obtenir l'avis de gens raisonnablement représentatifs, dans une salle où l'on pouvait travailler, plutôt que de louer la place General Motors à Vancouver pour une réunion de tous les intervenants, c'est-à-dire un endroit où l'on ne peut pas vraiment arriver à travailler.

Je dois dire que ce n'était pas parfait. Il y a des gens qui auraient aimé participer et n'ont pas pu le faire. Mais en fin de compte je ne pense pas que quelqu'un qui a participé pourrait honnêtement dire qu'on n'a pas vraiment débattu des questions en jeu. Ils n'ont peut-être pas fait triompher leurs arguments, mais je ne dirais pas que c'était une imposture. Je pense que c'était aussi ouvert que possible. Il y a des gens qui ont été invités, mais qui n'ont pas participé.

Je ne suis pas d'accord avec l'idée selon laquelle les collectivités côtières n'étaient pas représentées, car il y avait des gens là. Nous venions presque toutes de collectivités côtières. C'est ce que je pense.

M. Wells: Très bien, je ne veux pas aborder la Stratégie relative aux pêches autochtones, mais on a laissé entendre que la principale cause des problèmes dans le secteur de la pêche en Colombie-Britannique depuis 1992 est la Stratégie relative aux pêches autochtones, la SRPA. J'ai entendu d'autres personnes dire que d'autres questions avaient joué un rôle dans tout cela.

Je sais qu'il y a eu des problèmes avec la Stratégie relative aux pêches autochtones au début, et je crois que nous le reconnaissons tous, mais pourriez-vous commenter brièvement la stratégie? Est-elle à l'origine des problèmes que vous connaissez à l'heure actuelle dans le secteur de la pêche en Colombie-Britannique?

M. Hunter: Non, mais il ne fait aucun doute que le cycle du saumon rouge de 1992 a été affecté. Son abondance et la quantité de poisson qui s'est retrouvée dans des frayères ont été affectées par une nouvelle pêche générée par la Stratégie relative aux pêches autochtones, dont il est très clair qu'on n'avait plus le contrôle.

Derek, je crains qu'on n'aille de l'avant et que le ministère ne fasse l'examen du programme de la Stratégie relative aux pêches autochtones, notamment des projets de ventes pilotes. Il n'y a aucun conseil de l'extérieur. Les gens qui gèrent le programme font l'examen. Je pense que c'est une mauvaise chose, car il y a eu des problèmes, et il faut démêler tout cela.

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M. Wells: En ce qui concerne la Stratégie relative aux pêches autochtones, la SRPA, je pense que M. Scott serait d'accord pour dire qu'au cours des prochains mois il nous faudra peut-être réexaminer cette stratégie selon les décisions que prendra la Cour suprême du Canada. Je pense que cela serait important, et c'est pourquoi j'ai voulu aborder cette question, monsieur le président.

M. Scott: Pour faire suite à ce qu'a dit M. Wells, je pense que le ministère se prépare à signer des ententes SRPA pour la saison, et j'espère que nous n'attendrons pas des mois. J'espère que les décisions de la Cour suprême vont influencer ce que le gouvernement va faire.

Pour être certain que les gens qui sont ici aujourd'hui comprennent bien une résolution adoptée par le comité la semaine dernière, celle-ci comportait quatre éléments.

La résolution demandait au comité de recommander au ministre qu'il s'engage de nouveau à mettre en place un programme de mise en valeur des salmonidés, ce qu'il a fait ou qu'il est en train de faire, de sorte que nous sommes heureux que le ministre ait tout au moins entendu cela. Je suis certain que c'est grâce à un lobbying important de la part des gens de la Colombie-Britannique.

La seconde recommandation demandait d'annuler les droits de permis de 1996 pour les gens qui voulaient ne pas participer cette année. Je ne pense pas que cela soit un problème pour qui que ce soit ici.

La troisième recommandation était une analyse de l'impact socio-économique pour les collectivités côtières de la Colombie-Britannique, afin de déterminer quel sera l'impact de tout cela.

Une quatrième recommandation était... et c'est une question que j'ai soulevée précédemment ce matin. Je pense - et j'aimerais que ces messieurs nous fassent part de leurs commentaires à ce sujet - que nous perdons notre temps à parler du plan Mifflin et d'autres plans pendant que le gouvernement est en train de réaffecter la ressource pour l'enlever à la pêche commerciale, à la pêche sportive, pour la donner aux traités autochtones. Or, il se peut en fin de compte que ce soit ce que nous déciderons de faire en tant que société, mais il aurait mieux valu être honnête et le dire tout haut, en discuter ouvertement, mais cela n'a pas été le cas.

Je dirais donc à ces messieurs ici et à n'importe qui d'autre que je suis personnellement profondément convaincu que nous pouvons parler de ce plan et que nous pouvons parler de toutes sortes d'autres choses merveilleuses, mais jusqu'à ce que ces règles concernant l'allocation soient en place, jusqu'à ce que la sécurité d'accès soit garantie - et si cet accès est refusé, il n'y aura pas de mécanisme d'indemnisation - tout le reste est alors discutable. Si on continue de faire des traités en Colombie-Britannique dans la même veine que celui des Nisga'as, alors on peut dire adieu à la flotte de pêche commerciale en Colombie-Britannique.

Or, je défie n'importe laquelle de ces personnes ici de dire que ce n'est pas le cas.

M. Hunter: Mike, vous avez tout à fait raison sur ce dernier point, concernant les allocations. On est en train de s'en apercevoir très rapidement. Mike Griswold y a fait allusion lors de son témoignage; il s'agit de la question de l'allocation du saumon quinnat.

On demande aux pêcheurs commerciaux de ne pas pêcher le saumon quinnat. C'est en fait ce qu'on leur dit, mais effectivement ils disent au gouvernement qu'ils ne veulent pas pêcher le saumon quinnat. Ils ont des problèmes en 1996 sur la côte ouest de l'île de Vancouver. L'industrie de la pêche sportive commerciale fait énormément de lobbying pour avoir accès aux mêmes stocks de saumon quinnat qu'on nous demande de conserver.

Si le gouvernement accède à leur demande, alors le message qu'il m'enverra, ainsi qu'à d'autres, au sujet de l'allocation sera très clair, c'est-à-dire que cela ne veut vraiment rien dire. Si la réponse est, comme j'espère qu'elle le sera, que tout le monde doit porter le fardeau de la conservation, alors je pense que tout le monde comprendra que la question de l'allocation peut être réglée et sera réglée en toute bonne foi.

Franchement, j'ai du respect pour Art May, beaucoup plus que Don Cruickshank en a pour lui. Art May ne va pas résoudre le problème de l'allocation aux autochtones. Ron Irwin peut le faire s'il le veut aujourd'hui. Cela ne devrait pas poser de problème, pour autant que je suis concerné.

M. Rombough: Je suis tout à fait d'accord avec vous, et je veux que vous compreniez très clairement que l'un des problèmes dans toute cette situation qui nous terrifie ici, c'est quelle est notre position concernant cette allocation en ce qui a trait aux traités autochtones? Écoutez, nous avons peut-être tout perdu.

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On nous met dans une situation tout à fait intolérable. On nous demande de faire un choix, de dépenser 70 000$ pour acheter un nouveau permis, de laisser tomber l'industrie ou...? Écoutez, ce sont d'horribles choix lorsqu'on n'a absolument aucune idée de ce que sera notre allocation. C'est terrifiant.

M. Scott: Ne serait-il pas logique alors, avant de demander aux gens de décider s'ils vont rester dans l'industrie et acheter d'autres permis afin qu'ils puissent être concurrentiels...

M. Rombough: Que cela se fasse.

M. Scott: ... d'une façon qui soit soutenable sur le plan financier...

M. Rombough: Absolument.

M. Scott: Je comprends ce que dit Greg pour ce qui est d'aller de l'avant avec le plan cette année pour aider à la conservation. J'ai compris ce qu'il a dit. Mais il y a également le revers de la médaille, c'est-à-dire qu'on demande aux gens de prendre des décisions au sujet d'investissements majeurs, dans certains cas d'acheter jusqu'à cinq permis de plus, si j'ai bien compris, afin qu'ils puissent continuer dans ce secteur en Colombie-Britannique - et on ne leur dit pas combien de poissons ils seront autorisés à prendre!

M. Rombough: Je sais; c'est intolérable. Tout à fait intolérable. Vous devez comprendre que les pêcheurs commerciaux en sont tout à fait bouleversés. Cela ne fait aucun doute. C'est notre toute première préoccupation.

Si 50 p. 100 de la ressource est allouée aux Autochtones aux termes des revendications territoriales et des traités, et que nous venons tout juste de réduire une flotte de 50 p. 100, alors on nous a drôlement trompés! Il y aura certainement des protestations: nous allons monter dans les autobus avec les autres gars.

Cela étant dit, cependant, nous avons établi, avec le gouvernement, des niveaux d'engagement à cet égard qui n'ont jamais été atteints auparavant, des engagements par écrit, plus particulièrement avec M. Tobin. M. Mifflin a un peu de retard à cet égard. Nous avons très fermement fait allusion à lui au cours des derniers jours. Nous voulons quelque chose maintenant de M. Mifflin. Il ne veut pas nous donner de chiffre. Nous comprenons cela. Nous voulons cependant qu'on nous assure un accès garanti à cette ressource. Nous voulons voir quelque chose de mieux que ce que nous avons, et ce, avant le 24 mai. Nous le lui avons dit très clairement. C'est notre priorité, et c'est la seule chose dans tout le processus qui a fait consensus dans ce secteur: la question de l'allocation. Vous avez tout à fait raison; la situation est intolérable. Mais nous allons de l'avant.

M. Scott: N'êtes-vous pas d'accord avec moi que si cette question était réglée, si le ministre garantissait à la flottille de pêche commerciale l'accès à la ressource et, tout au moins sur le plan philosophique - si vous ne voulez pas nécessairement donner de chiffres - , s'il disait qu'on procéderait en fonction de ce qui se fait depuis très longtemps, ou quelque chose de cette nature, et qu'une indemnisation raisonnable serait versée si cela n'était pas respecté, alors tout le reste du plan serait beaucoup plus facile à faire accepter en Colombie-Britannique?

M. Rombough: Absolument. Il n'en fait aucun doute. C'est notre plus gros problème. C'est pourquoi nous avons pris le temps de vous expliquer pourquoi il s'agit d'un bon plan, pourquoi c'est une bonne idée, mais que nous ne pouvons appuyer ce plan si nous n'obtenons pas une allocation à long terme raisonnable dans tout cela. Nous avons donc tous des réserves à cet égard.

M. Scott: Une autre petite question. J'aimerais que chacun d'entre vous - tous les trois, s'il vous plaît - réponde de la façon la plus concise possible.

Pour la gouverne des membres du comité et des gens de la Colombie-Britannique - je sais qu'il y a d'autres membres du Parti libéral ici qui viennent aussi de la Colombie-Britannique - ne diriez-vous pas qu'en fin de compte, le problème réel auquel nous devons faire face en Colombie-Britannique, ce n'est pas le plan Mifflin mais plutôt d'abord en fait la question de l'allocation. Oui, nous devons parler de la restructuration de la flottille de pêche commerciale, mais n'êtes-vous pas d'accord pour dire que c'est ça le vrai problème, et ce, depuis 1992, lorsque la stratégie sur les pêches autochtones a été introduite?

M. Rombough: Je dois tout de même répéter que le principal problème à l'heure actuelle est la préservation de la ressource, car sans la ressource, nous n'avons pas d'emploi; il faut conserver la ressource. Ce qui se passe dans le cas de la Stratégie relative aux pêches autochtones et ce qui se passe sur le fleuve Fraser représentent une bonne partie de notre problème de conservation et une bonne partie de nos préoccupations en ce qui a trait à la ressource. Il faut régler ce problème. C'est la priorité de tout le monde. Nous avons demandé à M. Mifflin de faire une déclaration.

M. Taylor: Nous avons fait plusieurs représentations auprès de M. Mifflin au sujet de l'allocation. Il s'est engagé verbalement à nous faire parvenir une lettre sous peu concernant nos préoccupations en ce qui a trait aux allocations. C'est grâce à cette lettre, que l'on nous promet, que nous appuyons le plan de renouvellement de la flottille. Cependant, j'aimerais dire que nous ne pouvons pas attendre 10 ou 20 ans que l'on règle toutes les revendications territoriales autochtones pour mettre en place le programme de renouvellement de la flottille. La pêche et le poisson auront disparu depuis longtemps.

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C'est pourquoi nous devons aller de l'avant dès maintenant. C'est pourquoi dans tous nos entretiens avec M. Mifflin et son personnel, nous avons dit que cela devait aller dans les deuxsens: nous aurons confiance en votre programme, nous travaillerons avec vous, mais de votre côté, vous devez nous promettre une allocation et l'accès à la ressource pour l'avenir. Il l'a fait verbalement, et il a promis qu'il nous enverrait une lettre sous peu. Nous attendons de recevoir cette lettre.

L'autre question que j'aimerais aborder est celle du saumon quinnat, où nous avons un problème d'allocation, comme Mike l'a dit. Les gens pour lesquels je parle ont confiance enM. Mifflin et pensent qu'il est sincère lorsqu'il dit que la conservation est la priorité. Eh bien, le Comité d'examen de l'évaluation des stocks du Pacifique, un organisme consultatif scientifique de haut niveau auprès du ministère des Pêches et des Océans, dit qu'il n'y a pas d'excédent de saumon quinnat qui peut être pêché cette année. Par conséquent, si le ministère des Pêches et des Océans permettait la pêche de ces saumons quinnats cette année, sans tenir compte des conseils scientifiques qu'il a reçus, il perdrait notre confiance. Cela ébranlerait en quelque sorte notre confiance enM. Mifflin et ses engagements concernant l'allocation.

M. Scott: C'est une pêche de n'importe quel type de poisson.

M. Taylor: Une pêche dirigée, quelle qu'en soit la nature.

M. Hunter: Vous avez raison; ces questions sont extrêmement importantes des points de vue économique et social pour la Colombie-Britannique. En fait, on devrait déjà avoir réglé cette question de la planification de la relance. On devrait maintenant passer aux actes. Penchons-nous maintenant sur les autres enjeux.

Comme je l'ai dit, nous en parlons depuis 20 ans. Refuser d'agir maintenant équivaut à faire l'autruche. Je pourrais vous parler de la Stratégie relative aux pêches autochtones toute la journée, mais cela...

Le président: Monsieur Byrne.

M. Byrne (Humber - St. Barbe - Baie Verte): Je voulais seulement dire que si le Titanic aurait pu faire marche arrière aussi facilement que cela devant l'iceberg, il n'y aurait pas eu de naufrage. Voilà deux mois que les députés réformistes nous disent que ce plan est horrible. Vous venez de gâcher la période de questions d'aujourd'hui, parce que je ne crois pas que M. Mifflin aura à répondre...

M. Scott: [Inaudible - Éditeur]

M. Byrne: C'est moi qui ai la parole.

La semaine dernière, notre comité a entendu le témoignage du réseau des collectivités côtières, dont les représentants n'ont pas soulevé la question de l'affectation. À ce moment-là, il était plus important d'assurer la cohésion de la coalition pour faire échouer le plan. C'était probablement là l'intention. Il est intéressant de noter que l'affectation de quotas de pêche aux Autochtones revêt maintenant une telle importance pour le Parti réformiste.

J'aimerais savoir... Avec mes questions, je poursuis sans doute dans la même veine que l'autre comité. D'abord, aux fins du compte rendu - je n'étais pas ici au début de la réunion - , combien de personnes et de groupes de différents secteurs représentez-vous?

M. Hunter: Les entreprises que je représente emploient environ 9 000 personnes pendant la saison haute, dans les usines de transformation, et possèdent et exploitent des navires où travaillent probablement environ 500 autres personnes.

M. Byrne: Dans l'ensemble, vous appuyez le programme.

M. Hunter: Oui, monsieur.

M. Taylor: Je m'en remets aux collègues que je représente. Lorsque nous avons fait le compte des gens que nous représentons dans les différentes organisations, de ceux qui ont exprimé leur appui en faisant le cumul de permis et de ceux qui ont déjà présenté une demande de permis au MPO, nous avons constaté qu'ils étaient des centaines. Les dizaines de millions de dollars qui ont été consacrés à l'acquisition de permis, à l'échange de permis et à divers préparatifs montrent bien que les gens s'emploient à appuyer le ministère dans son programme de relance.

Ces gens représentent la majorité silencieuse, ceux qui ne font pas les manchettes, mais qui se préparent simplement à la pêche, qui veulent que leur vie continue, qui veulent continuer à travailler. C'est un groupe important de gens qui veut passer à autre chose. Qu'on en finisse. Que le ministre annonce son plan et qu'il le mette en application afin qu'on puisse enfin pêcher.

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M. Rombough: Comme l'a dit Greg, nous avons, avec le groupe, examiné... Moi, je pêche au filet maillant dans la région de la rivière Campbell et, en septembre, nous avons dressé un plan que nous avons présenté à la table ronde en guise de recommandation pour la relance de la flotte. Notre plan a été rejeté. Certains aspects ont été approuvés, mais le plan dans son ensemble a été rejeté.

Nous avons tenu une réunion d'une centaine de pêcheurs au filet maillant de la région de la rivière Campbell; ce groupe comprenait aussi des gens d'autres groupes et d'autres régions. Nous nous sommes réunis pour dresser ce plan qui a fait l'objet d'un consensus avant d'être présenté.

John Murray, qui a ici présent, est président de l'Association des pêcheurs au filet maillant du Pacifique. Je crois qu'il représente une centaine de pêcheurs. Mike Grisold représente l'Association des pêcheurs à la cuiller du Golfe, qui regroupe aussi une centaine de gens. J'ignore si Larry Wick est officiellement associé aux propriétaires de navire, mais il représente un nombre significatif de senneurs.

M. Byrne: J'invoque le Règlement. Mes collègues s'opposent à ce que nous ayons des conversations avec les témoins; ils préféreraient que nous posions des questions, et je suis d'accord. Nous devrions nous en tenir à des questions; nous ne devrions pas harceler les témoins ou converser avec eux.

Êtes-vous d'accord, monsieur le président?

Le président: Je ne vous suis pas, monsieur Byrne.

M. Byrne: Les députés d'en face prétendent que je ne pose pas de questions, que je me lance dans des discussions avec les témoins alors que nous sommes en période de questions.

Le président: Je n'ai pas entendu de remarque en ce sens. Je suis désolé, j'ai peut-être manqué quelque chose...

M. Byrne: Corrigez-moi si je me trompe.

M. Cummins: Je ne sais pas de quoi il parle.

M. Byrne: Cela n'a probablement pas passé dans le micro. Je m'excuse.

M. Scott: Ça va, Gerry.

M. Culbert: Dès que ce débat sera terminé, monsieur le président, je poserai deux ou trois courtes questions.

Messieurs, je vous remercie de votre présence et de votre exposé très informatif; j'en ai malheureusement manqué une partie car j'avais un autre engagement.

Je crois que vous avez dit que vous estimez qu'on a bien consulté votre secteur et que la plupart des gens qui souhaitaient participer au débat ont pu le faire. Je voudrais donner suite à cette remarque.

Un des témoins précédents a parlé des effets ressentis non pas par les propriétaires de navire, mais plutôt par les équipages et par les collectivités. Dans la région de la rivière Campbell, a-t-on mené des études socio-économiques sur les pêches et les effets du déclin des pêches?

M. Rombough: Pour autant que je sache, aucune étude n'a encore été menée à ce sujet qui constitue pourtant la principale préoccupation de la région de la rivière Campbell. C'est la position du conseil municipal ou du maire de Campbell River. Ces gens sont leurs électeurs; il faut s'occuper d'eux.

Ils se sont fait avoir, et ils ont notre appui total. Et pour comble, le bureau du ministère du Développement des ressources humaines de Campbell River vient juste de fermer ses portes.

Cela nous préoccupe beaucoup et nous demandons de toute urgence à M. Mifflin qu'il nous donne des garanties et des éclaircissements sur ce qui attend ces personnes, sur ce qu'on leur offrira, si les possibilités de financement existent par l'entremise de DRHC ou d'autres. Il faut qu'on leur indique clairement quelles sont les possibilités qui s'offrent à eux.

Mais non, je ne crois pas qu'on ait mené une étude des effets socio-économiques sur Campbell River.

M. Taylor: Je crois que la seule étude socio-économique sur ce genre de questions entreprise sur la côte a été menée à Prince Rupert, il y a deux ans, si je ne m'abuse. On y fait remarquer que bon nombre des membres du secteur des pêches croient qu'ils sont au centre de l'univers.

Lorsqu'on a une vision globale de notre collectivité et des conséquences économiques des pêches pour notre collectivité, on constate que le secteur des pêches apporte une contribution importante à la collectivité, mais que cette contribution n'est certainement pas la plus importante. La collectivité ne sera pas dévastée par ce plan et par le déplacement de travailleurs.

Il faut certainement se pencher sur ce problème, mais il faut examiner la vie des collectivités de façon plus globale, tenir compte des différents éléments qui composent la collectivité, de ce qui lui donne sa vitalité... Le rapport souligne qu'il faut adopter un point de vue beaucoup plus large et ne pas se contenter d'examiner l'apport du secteur de la pêche commerciale.

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Tout le monde parle de travailleurs qui seront déplacés, mais il faut adopter une vision à plus long terme. Pensons à ceux qui resteront. Eux, ils auront beaucoup plus de succès financier. Ils pourront contribuer de façon beaucoup plus concrète à la collectivité. Ils réussiront mieux et paieront davantage en taxes et impôt. Une fois qu'on aura mené à bien le programme de relance, la flotille qui restera sera beaucoup plus prospère et dépendra moins des subventions du gouvernement et des autres. Grâce à ces programmes, les collectivités côtières seront en bien meilleure posture, et non pas dévastées.

Le président: M. Hunter fera la dernière intervention.

M. Hunter: Je voudrais dire que je ne veux pas que ma province connaisse le même sort que Terre-Neuve, où la politique de pêche a été axée sur les préoccupations des localités côtières, sinon dictée par elles. Que les 5 000 tonnes de poisson qui restent demeurent à l'usine.

On devrait maintenant savoir que là n'est pas la solution. Nous ne voulons pas que cela nous arrive. Nous sommes très préoccupés par ce qui s'est passé à Terre-Neuve et par les conséquences que ces décisions ont eues pour ses habitants. On peut éviter de refaire la même erreur en faisant preuve d'audace et en prenant soin du poisson. Les collectivités côtières s'en ressentiront toujours, ne serait-ce qu'en raison de choses comme celles auxquelles Les a fait allusion, à savoir qu'on pêche de plus en plus près des rivières.

Cela semble difficile. Mais il ne fait aucun doute qu'on ne peut éviter les souffrances qu'entraîneront la mise au rancart du capital et de la main-d'oeuvre dans un secteur aussi important que celui de la pêche au saumon de la Colombie-Britannique. La solution, c'est de faire participer pleinement Développement des ressources humaines Canada. Il est fort malheureux qu'on ne l'ait pas fait au départ.

Merci.

Le président: Merci beaucoup d'être venus présenter votre témoignage.

Comme à l'habitude, le comité doit faire preuve d'une sagesse biblique pour tenter de déterminer quel camp est le plus honnête. Il nous incombera ensuite de formuler des recommandations à l'intention du ministre en fonction des témoignages que nous aurons entendus. Merci à tous d'être venus.

Nous avons encore deux témoins, MM. Newton et Sutcliffe. Nous ne pouvons vous accorder qu'une demi-heure. Veuillez prendre place, je vous prie, et faire vos remarques liminaires. Veuillez d'abord vous présenter en nous disant qui vous êtes et qui vous représentez.

M. John Sutcliffe (United Fishermen and Allied Workers Union): Merci.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je m'appelleJohn Sutcliffe. Je représente l'Alliance du saumon du Pacifique, un ensemble de groupes qui s'opposent au programme de relance de la flotte. Je travaille aussi pour la United Fishermen and Allied Workers Union à titre d'organisateur pour les petits navires. Je détiens moi-même un permis de pêche, mais je n'ai pas pêché le saumon depuis plusieurs années parce que je ne peux le faire pendant que j'occupe ce poste-ci. J'ai pêché le saumon à la cuiller pendant 25 ans et siégé à de nombreux comités du secteur.

J'aimerais répondre à bien des choses qui ont été dites, mais je m'en tiendrai à ce que ceux que je représente m'ont demandé de dire. Je suis certain qu'il ne fait aucun doute pour les membres du comité qu'il ne doit pas y avoir de réduction de la flotte. Personne ne préconise cette mesure. La table ronde a donné lieu à une chose formidable, une entente presque unanime sur d'importantes réductions de la flotte. C'est probablement la première fois de notre histoire que nous en venons à une entente de ce genre. En outre, et c'est très frappant, l'industrie s'est aussi engagée à veiller au recouvrement des coûts.

J'estime toutefois qu'on a raté une belle occasion. Je ne sais si on peut, par le biais du plan de réduction de la flotte, revenir à l'intention originale qui était de protéger la ressource, compte tenu de la crise qui sévit actuellement à la suite de ce que moi et d'autres considèrent comme étant une réaction malavisée à la réduction de la flotte.

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Le problème, ce n'est pas de réduire la flotte, mais plutôt de déterminer comment on le fera. La semaine dernière, vous avez entendu un nombre important de témoins représentant différentes organisations. Comme l'a fait remarquer Mike Hunter, cela a donné lieu à de drôles d'alliances. Mais on vous a parlé des graves conséquences qu'aura ce plan.

Ce plan est extrême à bien des égards. C'est évident pour la majorité des membres de notre secteur. Aucune étude sur les effets de ce programme n'a été menée; or, ceux qui seront directement touchés par ce programme ont des attentes bien réelles, tout aussi réelles que les préoccupations qui ont été exprimées au sujet de la ressource. À mon avis, ces préoccupations appellent des études plus détaillées et une certaine prudence; nous sommes sur le point de nous engager dans un processus irréversible de réduction de la flotte, de modification des privilèges de pêche, etc.

J'aimerais aborder avec vous non pas ces conséquences, mais un aspect assez important qui, à mon sens, n'a pas reçu l'attention qu'il mérite: le plan ne peut nous permettre ni ne nous permettra de réaliser ce pourquoi il a été conçu. Il ne contient que de vagues allusions à la conservation et ne traite pas non plus de la capacité de pêche.

Je n'entrerai pas dans les détails, mais j'aimerais vous expliquer brièvement pourquoi. Par le passé, les politiques de permis imparfaites ont mené à une réduction du nombre de navires, mais aussi à une augmentation de la capitalisation et de la capacité de pêche. Peter Pearse, particulièrement, et d'autres ont déjà signalé ce problème. À mon avis, nous sommes sur le point d'amorcer une nouvelle période de surcapitalisation et de surcapacité de la flotte... et probablement de surcapacité dans l'ensemble, avec toutes les conséquences que cela entraînera pour la ressource.

L'octroi de permis par région et le cumul de permis sont des éléments clés de ce programme. On propose d'adopter ces mesures pour mieux gérer la flotte et conserver la ressource, mais la façon dont les régions sont divisées... Les témoins précédents nous ont décrit avec beaucoup d'éloquence les pressions qui découlent de la création de régions où la pêche ne peut être soutenue du fait qu'on ne se demande pas si les détenteurs de permis auront la possibilité de pêcher dans ces régions ou même s'il pourrait y avoir des activités de pêche durables. Tout ce qu'on veut, c'est réduire la flotte. On ne cherche pas à gérer la flotte, mais plutôt à la réduire, tout simplement. Si vous connaissez la côte et les activités de pêche, vous savez pourquoi les pêcheurs ne pourront survivre s'ils comptent sur les possibilités de pêche réduites que prévoit ce plan et pourquoi ils seront forcés de détenir de nombreux permis ou même d'abandonner la pêche.

Dans le rapport qu'il a présenté en réponse à la crise des pêches en 1994, John Fraser a clairement signalé l'existence d'un problème de capacité en disant que le désastre se produirait à minuit et qu'il était alors minuit moins cinq. Il faisait allusion à un genre particulier de pêche, la pêche à la seine, qui représente actuellement 520 navires sur les 4 400 navires de la flotte de pêche au saumon.

Ce plan ne traite pas de la question de la capacité. Il prévoit un plancher, sauf pour les rachats de permis. Je crois savoir - et les fonctionnaires du MPO qui sont ici présents pourraient peut-être confirmer ces données - que le rachat de permis ne permettra pas une importante réduction de la flotte et que, de toute façon, on ne peut réduire la flotte de plus de 50 p. 100 en raison de la configuration des régions.

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Comme on vous l'a sans doute déjà dit, la surcapacité pour cette flotte est de beaucoup plus de 50 p. 100. Même avec des réductions maximales, il y aurait encore trop de pêcheurs. La différence, c'est que les filets qui seront mis à l'eau seraient tirés par des milliers de chevaux vapeur, par des navires équipés de propulseurs d'étrave et de rampes inclinables et constituant la flotte de pêche la plus efficiente de la côte ouest. Il n'y aurait plus de place pour les vieux navires.

Le plan ne traite nullement de la surcapacité, et compte tenu des conséquences de cette surcapacité pour la ressource, il est fort probable que les prédictions de John Fraser se concrétiseront.

Ce qui est curieux, c'est que, pour la flotte de petits navires, où il n'y a pas de problème de capacité - parfois il y en a, parfois il n'y en a pas - dans deux ou quatre ans, les petits navires de pêche à la traîne et de pêche au filet maillant auront du mal à prendre les quantités de poisson qui leur sont allouées. Il n'y a pas de problème de capacité pour les petits navires. Cette flotte pourrait être mieux gérée, mais elle n'a pas de problème de capacité.

Il est donc étrange que, d'ici à 1997, le plan prévoie une réduction de plus de 50 p. 100 pour cette flotte. Cette flotte est constituée de propriétaires exploitants indépendants qui habitent dans les localités de la côte. C'est aussi au sein de cette flotte qu'on retrouve la plupart des propriétaires exploitants autochtones.

Il n'y a aucune limite quant à la réduction de cette flotte. Les possibilités de pêche y ont déjà été réduites - on n'en est plus qu'à un sixième de ce qu'elles étaient auparavant - pour ceux qui pêchent à la fois à la cuiller et au filet maillant. Il est vrai que certains pêcheurs de cette flotte profitent d'autres possibilités, mais dans l'ensemble, les possibilités de pêche ont été abaissées à un sixième et les possibilités de cumul de permis entraîneront une diminution de la flotte qui ira bien au-delà de50 p. 100 d'ici à 1997. Cela soulève dans mon esprit de graves questions sur les objectifs de ce plan.

Certains ont fait valoir qu'on pourra transférer les privilèges de pêche des secteurs de pêche à la cuiller et au filet maillant au secteur plus important des senneurs, où la réduction se limitera à50 p. 100. Mais cela ne règle pas la question de la capacité.

De toute façon, ce n'est pas une mesure importante. Le transfert ne constitue pas une solution. D'ici à 1997, compte tenu du taux moyen de survie - ainsi, en 1993, on a connu le plus important échappement de saumon sockeye du fleuve Fraser depuis 1909 - , il y aura des remontes semblables à celle de l'année où la flotte de petits navires a eu du mal à prendre son allocation complète.

En 1997, compte tenu des prévisions les plus modérées sur la réduction de la flotte grâce au cumul de permis, on aura de la chance si l'on compte 1 200 pêcheurs au filet maillant plutôt que 2 500. Il en va de même pour la flotte de pêche à la cuiller. Ces pêcheurs ne pourront pêcher leur part. Que se passe-t-il donc?

Si les pêcheurs ne peuvent prendre leur part, je suppose qu'on pourra procéder à des réallocations. Mais cela soulève de graves questions sur l'objectif du plan. Si le plan ne sert qu'à apaiser les craintes du public, qui croit qu'il y a trop de navires pour la quantité de poisson qu'il y a, en réduisant de moitié le nombre des navires et en prétendant contribuer ainsi à régler les problèmes de conservation de la ressource de la côte ouest, les problèmes sont loin d'être réglés.

M. Pearse a indiqué plus tôt que le plan n'établit pas de liens clairs entre la réduction de la flotte et la conservation de la ressource. À mon avis, le plan n'établit aucun lien de ce genre. À mon avis, de plus en plus, les habitants de la côte ouest - surtout ceux qui connaissent bien les pêches - estiment qu'il n'y a pas de tels liens.

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Avec ce plan, on répond aux préoccupations de certains. Dans une certaine mesure, on répond aux préoccupations du MPO en matière de gestion de la flotte, mais on pourrait le faire autrement.

J'ai participé à la table ronde et au comité sur la pêche à la cuiller. Lorsque nous avons discuté de la réduction de la flotte et de la façon dont cela pourrait se réaliser en fonction des besoins de la communauté des pêcheurs et des préoccupations concernant la ressource, telles que les prises accessoires, etc., et la pêche sélective, les représentants du MPO à ce comité - j'ignore ce qu'en pensent les autres - ont clairement indiqué que ces questions ne feraient l'objet d'aucune discussion tant qu'on ne s'entendrait pas pour réduire la flotte de moitié, et que la seule solution, c'était le cumul de permis et l'octroi de permis par région. Ils ont dit que, ensuite seulement, on se pencherait sur la limitation de l'effort de pêche.

Ce qui est curieux, c'est que la limitation de l'effort de pêche est probablement la façon la plus efficace de diminuer la capacité de pêche. En fait, il y a des mesures très simples qu'on peut prendre dans tous les secteurs pour réduire d'au moins 50 p. 100 la capacité de pêche.

Le président: Nous n'avons plus que 15 minutes. Vous pouvez poursuivre vos remarques liminaires ou terminer maintenant pour que nous passions aux questions.

M. Sutcliffe: Très bien. Je préfère répondre à des questions, alors je m'arrête ici.

Le président: D'accord. Monsieur Scott.

M. Scott: Mes questions feront suite à celles que j'ai posées aux autres témoins ce matin. J'en reviens à la question de l'allocation, à la question de savoir comment on peut prendre une décision sur les permis alors qu'on ignore si on aura accès à la ressource. J'aimerais aussi savoir ce que vous pensez de l'instabilité qui a été créée par la Stratégie relative aux pêches autochtones et l'objectif du gouvernement... ou du moins son intention d'inclure dans les traités des droits de pêche au saumon.

M. Sutcliffe: Il ne fait aucun doute que ces questions sont cruciales pour les pêcheurs ainsi que du point de vue de la politique gouvernementale. Les pêcheurs font face à une grande incertitude, comme l'a très bien décrit le témoin précédent, mais cela ne justifie pas la restructuration envisagée. Plutôt, cela devrait nous inciter à prendre du recul et à examiner plus attentivement certaines de ces questions.

Les décisions qui sont prises aujourd'hui, en cette période d'incertitude et d'insécurité pour les pêcheurs, sont problématiques, particulièrement lorsqu'il y a des conséquences irréversibles pour la participation de ces gens à la pêche.

M. Scott: Avez-vous adopté une position au sujet de l'allocation, ou est-ce une question que vous ne...? Je crois que vous dites que nous devons nous pencher sur cette question, mais qu'en pensez-vous plus précisément? Que pensez-vous de la Stratégie relative aux pêches autochtones et de l'entente de principe qui est intervenue avec les Nisga'a, entente qui établit un précédent quant à la façon dont on peut céder des droits sur les poissons dans un règlement de revendications territoriales?

M. Sutcliffe: Vous savez peut-être que nous avons adopté des positions assez détaillées à ce sujet. Je n'ai pas été le porte-parole de mon association sur ces questions, mais nous nous opposons à l'usage du poisson comme monnaie d'échange car cela signifie que c'est tout le secteur de la pêche, tout le pays qui paient le prix de ces règlements, et c'est injuste.

C'est une réponse très générale, mais je ne suis pas en mesure d'entrer dans le détail. Il ne fait aucun doute que la question de l'allocation, qu'elle soit intra ou intersectorielle, devra être réglée avant que les pêcheurs ne prennent les engagements qu'on leur demande dans ce plan.

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J'aimerais ajouter une chose au sujet de la conservation: tout à coup, on se précipite, parce qu'on prétend qu'on connaît un problème cette année. Ce plan donne aux pêcheurs la possibilité de pêcher dans le nord cette année et d'accroître ainsi les pressions qui s'exercent sur la Skeena et qui sont bien supérieures à celles qui existent actuellement, contrairement à ce qu'a prétendu un témoin précédent. Les pêcheurs peuvent aller pêcher dans le nord cette année et cumuler leurs permis pour le sud l'an prochain. Il y aura davantage de navires sur la Skeena cette année qu'il n'en aurait eus si la situation était restée inchangée, particulièrement si on n'avait pas réclamé le paiement des frais de permis. Les pêches du sud seraient restées dans le sud et ceux qui auraient acheté un deuxième navire l'aurait laissé dans le sud.

Ce plan force les pêcheurs qui ont acheté un deuxième ou un troisième navire à se positionner dans cette nouvelle pêche. Ils se voient forcés d'utiliser ce deuxième ou troisième navire pour pêcher dans le nord. Seulement alors pourront-ils cumuler leurs permis pour le sud l'an prochain.

Cela me semble assez avantageux pour les pêcheurs, mais cela soulève de graves questions sur les objectifs de conservation de ce plan.

Le président: Monsieur Culbert.

M. Culbert: Bonjour, John. Je suis heureux de vous accueillir.

Premièrement, j'aimerais parler des effets sur les équipages et les travailleurs des collectivités de la limitation de l'effort de pêche et de la conservation. Manifestement, à titre de représentant de la UFAWU, vous sympathisez certainement avec certaines de ces personnes. J'aimerais connaître votre position à ce sujet.

Deuxièmement, je crois que vous avez dit que le processus de consultation de l'industrie avait été satisfaisant. Pourriez-vous nous en dire plus long? Cela pourrait être utile lorsqu'il faudra mener des consultations sur d'autres questions liées à la pêche.

M. Sutcliffe: Au sujet de votre première question, il ne fait aucun doute que nous estimons que ceux qui seront déplacés à cause de l'adoption de ce plan - et il y en aura, quelle que soit la méthode d'application du plan - devraient se voir offrir des programmes de recyclage ainsi que la possibilité de pêcher dans d'autres régions. Il faut absolument protéger ces pêcheurs. Malheureusement, le plan n'en parle pas. Peut-être pourrait-on dire que c'est sous-entendu.

Je crois qu'il y a d'immenses possibilités. DRHC a lancé des projets de création d'emplois cet hiver et je sais qu'au début, les pêcheurs étaient méfiants, mais qu'à la fin, le programme, qui portait surtout sur l'habitat, mais qui comportait aussi une importante composante de formation, a été couronné de succès. Je pense que les gens de DRHC pourraient vous le confirmer. C'est un programme qui a connu un succès extraordinaire, autant dans l'esprit des participants que sur le plan des résultats obtenus.

À mon avis, le processus de consultation était mauvais. Je me rappelle de la deuxième question qu'on a posée. C'est moi qui ai posé la deuxième question à la première réunion de la table ronde. J'ai dit que ce serait peut-être valable d'être payé par les pêcheurs; 876 détenteurs de permis me paient pour travailler pour eux. J'ai entendu tout l'été des gens qui se disaient fort inquiets au sujet de la composition de cette table ronde. Les gens avaient l'impression que beaucoup, sinon la plupart des participants avaient des intérêts en jeu. C'était des gens qui étaient détenteurs de plusieurs licences.

J'ai donc pensé que ce pourrait être une bonne idée, simplement pour légitimer ce processus dès le départ, que les gens mettent carte sur table et qu'ils affichent ouvertement leurs permis. Cela ne veut pas dire que les détenteurs de plusieurs permis ne pouvaient pas participer, mais cela permettait simplement d'atténuer les craintes des gens qui avaient l'impression de ne pas être représentés de façon équilibrée dans ce processus.

Les participants ont refusé de le faire. La grande majorité de gens, pour une raison ou pour une autre, n'ont pas accepté cette proposition. Je pense que le processus continue d'achopper sur ce problème, parce que les gens estiment qu'il n'y a pas de représentation adéquate des divers intérêts - détenteurs de plusieurs permis, détenteurs d'un seul permis, par région, etc. - mais enfin, ce n'était pas mauvais. Nous aurions pu faire pire et le processus peut assurément être amélioré.

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Il faut pousser plus avant le processus; à mon avis, c'est absolument nécessaire pour s'attaquer à certaines lacunes extraordinairement graves de ce plan, à la fois du point de vue de la conservation et du point de vue de la surcapacité et de la surcapitalisation.

M. Culbert: Merci, monsieur le président.

Le président: Y a-t-il d'autres questions?

Comme il n'y a pas d'autres questions, je vous remercie beaucoup d'être venu. Nous avons déjà entendu énoncer votre position dans le passé, mais nous aimerions vous entendre de nouveau.

Je tiens aussi à remercier M. Cruickshank, qui est encore avec nous. À l'avenir, nous devrons compter beaucoup sur lui et sur M. Pearse, à titre d'observateurs indépendants.

Je tiens à vous rappeler que M. Fraser viendra peut-être, mais je ne sais pas trop quand. Peut-être la semaine du 27 mai.

Membres du comité, nous commencerons l'étude du budget des dépenses mardi. Le ministre témoignera à 15 h 30 mardi après-midi. Il profitera probablement de l'occasion pour répondre à des questions sur le plan Mifflin.

Monsieur Wells.

M. Wells: Au sujet des droits d'inspection des usines, dont nous avons discuté la semaine dernière, nous avons demandé que l'on nous fournisse des renseignements. Nous avons une période de trente jours.

J'ai vérifié aujourd'hui auprès du ministère. Les renseignements ne sont pas disponibles et nous ne les aurons probablement pas avant la fin de cette période de trente jours. Ce n'est pas acceptable, mais c'est ce qu'on m'a dit ce matin.

Je voulais que nous demandions au ministre de prolonger ce délai de trente jours jusqu'à ce qu'on puisse nous fournir la documentation que le comité a demandée au MPO - laquelle ne nous a pas été remise dans le délai de trente jours - afin qu'on ait l'occasion de l'examiner et de faire des recommandations avant la mise en vigueur de ce droit. Ce n'est pas acceptable que cette documentation ne nous ait pas été remise pendant la période de consultation de trente jours.

Le président: Je vais en faire la demande.

M. Wells: Merci.

Le président: Y a-t-il d'autres questions?

La séance est levée.

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