[Enregistrement électronique]
Le mardi 5 novembre 1996
[Traduction]
Le vice-président (M. McKinnon): Mesdames et messieurs, bonjour. Ce matin, notre distingué président est à Toronto, ou ailleurs, et on m'a demandé de présider la séance d'aujourd'hui. J'attendais ce moment depuis deux ans, soit depuis mon élection à la vice-présidence, afin de pouvoir contrôler qui dit quoi et quand.
Alors monsieur Easter, vous pouvez retourner à la queue.
M. Hermanson (Kindersley - Lloydminster): C'était fort ennuyant lorsque vous étiez à l'arrière-ban.
M. Easter (Malpèque): N'oubliez pas vos amis.
Le vice-président (M. McKinnon): Certainement pas.
Nous examinons aujourd'hui le projet de loi C-60, Loi sur l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Nous entendrons un premier témoin, en la personne de M. Patrick McGuinness, représentant du Conseil canadien des pêches.
Monsieur, nous vous souhaitons la bienvenue. Nous disposons au maximum d'une heure; je vous invite donc à faire votre exposé après quoi nous vous poserons des questions.
Monsieur McGuinness, je vous cède la parole.
M. Patrick McGuinness (vice-président, Conseil canadien des pêches): Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité.
J'ai déposé mon mémoire, mais j'en ai des exemplaires supplémentaires si quelqu'un en veut.
[Français]
Je vous prie de nous excuser de l'absence, faute de temps, d'une version française de notre mémoire.
[Traduction]
J'ai pensé vous fournir d'abord quelques données générales sur l'industrie de la pêche.
Dans l'ensemble, notre industrie a une portée internationale. Nous exportons 80 p. 100 de notre production vers 70 pays du monde. Nous sommes au cinquième rang des exportateurs mondiaux. Nous étions au premier rang. Si nous sommes passés au cinquième rang, c'est surtout à cause du déclin du poisson de fond dans la région de l'Atlantique, mais aussi à cause de la diminution du nombre de saumons dans le Pacifique.
Autre élément important à noter, le Canada se classe au dixième rang des marchés d'importation. Nombre des produits et des espèces que nous importons ne sont pas disponibles sur le marché canadien. De fait, on constate aujourd'hui, plus particulièrement dans la région de l'Atlantique, que beaucoup de nos industries de transformation importent des produits primaires de poisson de fond pour les transformer ici au Canada, puis les distribuent ensuite sur les marchés canadiens et les marchés d'exportation du monde entier. De même, dans le secteur de la mise en conserve du saumon du Pacifique, on importe de l'Alaska des quantités considérables de saumon cru surgelé.
Je tiens également à vous rappeler, au départ, que notre industrie a été la première au monde à mettre en oeuvre un programme obligatoire d'inspection des aliments inspiré du modèle appelé Système de l'analyse des risques - point critique pour leur maîtrise (HACCP).
Bref, ce que je tenais d'abord à vous dire, c'est que notre industrie est à la fois une industrie d'exportation et d'importation. Tout comme l'agence d'inspection de Pêches et Océans, elle jouit d'une réputation mondiale à l'égard de la mise en oeuvre des programmes de gestion de l'innocuité des aliments fondée sur les risques.
En ce qui concerne le projet de loi C-60, j'aimerais vous faire part de nos grandes préoccupations et faire quelques observations.
Mon premier point porte sur le préambule. Nous croyons que le préambule comporte de graves lacunes. Les objectifs qui y sont formulés ne font aucunement référence à ce qui devrait être l'un des principaux buts du projet de loi et de l'agence, à savoir la prestation d'un service d'inspection des aliments qui soit rentable. Il n'en est pas question dans les objectifs. Nous trouvons cela assez étrange, surtout quand on pense que le désir de créer cette agence d'inspection unique des aliments découle du discours du budget de mars 1996 du ministre des Finances, M. Martin, dans lequel il disait que la création de l'agence permettrait de réaliser des économies importantes.
Cet objectif, soit l'établissement d'un service d'inspection des aliments rentable, devrait être clairement établi dans le préambule et, à notre avis, ce concept devrait se refléter dans les dispositions subséquentes du projet de loi.
La principale peur, la principale préoccupation de l'industrie de la pêche concernant la création de cette agence unique, c'est que celle-ci constituera un mécanisme, un véhicule permettant simplement de reporter sur notre industrie, par le biais du recouvrement des coûts, la charge d'un système d'inspection des aliments considéré comme plutôt dépassé et coûteux.
Nous estimons que le recouvrement des coûts a un rôle légitime à jouer dans l'évolution de la politique gouvernementale lorsque les forces du marché sont en jeu, lorsque les clients ont le choix d'acheter ou de ne pas acheter le service, ou lorsqu'ils disposent de services de rechange. Dans le domaine de l'inspection des aliments, ce n'est pas le cas. Les forces du marché n'interviennent pas. Notre industrie et celle de l'agriculture sont réglementées par des lois, et nous devons recourir au service d'inspection si nous voulons continuer de faire des affaires.
Nous estimons donc que le projet de loi devrait prévoir un mécanisme de poids et contrepoids, mis en oeuvre par une tierce partie, laquelle aurait deux fonctions: évaluer la rentabilité de l'agence et approuver les structures tarifaires et les mesures relatives au recouvrement des coûts adoptées par l'agence.
À maints égards, l'inspection des aliments doit être restructurée, mais la tarification ne doit pas reposer sur d'autres épaules. Notre industrie, comme nous l'avons montré, doit être concurrentielle à l'échelle internationale tout comme doivent l'être les infrastructures et les services gouvernementaux.
J'aimerais maintenant attirer votre attention sur le paragraphe 10(2) portant sur le comité consultatif. Cette disposition est inadéquate et antidémocratique. Ce qu'elle prévoit en gros, c'est que le comité consultatif conseille le ministre uniquement sur les questions que celui-ci lui soumet. Nous croyons que le comité consultatif devrait être autorisé à examiner les questions qui, de l'avis de la majorité de ses membres, doivent l'être. Essentiellement, nous proposons que le paragraphe 10(2) soit reformulé afin que le comité consultatif joue davantage le rôle d'un conseil d'administration.
Ensuite, nous attirons votre attention sur le paragraphe 11(4), portant sur le rôle du ministre de la Santé. Nous appuyons en tous points l'objectif visé par ce paragraphe, en ce sens que le ministre de la Santé a la responsabilité d'établir les normes d'hygiène et de s'assurer que le système canadien d'inspection des aliments est sûr. Or, nous tenons à préciser qu'au cours des dernières années, les discussions entre le service d'inspection du ministère des Pêches et des Océans, de Santé Canada et d'Agriculture Canada afin de déterminer le rôle de Santé Canada en matière d'inspection ont marqué des progrès considérables.
Nous avons conclu un accord, par l'entremise de protocoles d'entente ou autres, prévoyant que le rôle de l'inspecteur de Santé Canada consiste à vérifier le rendement des inspecteurs, qu'il s'agisse d'un inspecteur de Pêches et Océans ou d'Agriculture Canada. Grâce à cette structure officielle, nous avons été en mesure de mettre un terme au dédoublement des activités d'inspection de deux agences gouvernementales dans la même usine.
Donc, ce sur quoi nous attirons votre attention quant au paragraphe 11(4), c'est que nous espérons que le libellé soit suffisamment précis afin que l'on ne recommence pas à mener des inspections en double.
Nous recommandons, comme c'est le cas actuellement, que la nouvelle agence d'inspection signe un protocole d'entente avec Santé Canada afin de préciser clairement la façon dont le Ministère assumera ses responsabilités en vertu du paragraphe 11(4). Nous croyons que le Ministère devrait vérifier l'agence d'inspection, comme il le fait maintenant, et non pas retourner dans les usines pour refaire le travail.
En ce qui concerne l'article 12, nous sommes tout à fait d'accord pour que l'agence soit un employeur distinct. À l'aube du XXIe siècle, l'agence devra faire preuve de ce genre de souplesse.
Nous appuyons fermement l'article 16 qui porte sur le choix des fournisseurs de services. À notre avis, le secteur privé trouvera ici une bonne occasion de travailler en étroite collaboration avec l'agence. Nous estimons qu'il y a d'excellentes possibilités quant à l'accréditation de laboratoires du secteur privé qui seraient chargés de mener une bonne partie des travaux d'inspection.
Je vous signale qu'au Royaume-Uni, d'après ce que nous savons, l'agence d'inspection a effectivement conclu des contrats avec le secteur privé afin qu'il se charge de réaliser certains travaux d'inspection dans les usines.
Il est donc important de conserver l'article 16. Il s'inscrit dans le mécanisme de poids et contrepoids que l'agence devra utiliser.
Pour ce qui est du paragraphe 24(2), nous recommandons une légère modification de son libellé. Au lieu de l'expression «ne peut excéder les coûts», on devrait lire «ne peut excéder les coûts raisonnables». Comme nous l'avons mentionné tout à l'heure, les forces du marché ne s'exercent pas ici. Là encore, en utilisant l'expression «coûts raisonnables» et non «coûts», on respecterait notre désir de voir un mécanisme de poids et contrepoids intégré au projet de loi.
Le problème qui se pose ici, en premier lieu, c'est que l'agence d'inspection réagit parfois trop fortement à un problème, c'est-à-dire que le service d'inspection qui est offert et les activités qui sont entreprises répondent davantage à un besoin politique qu'à une nécessité sur le plan d'une évaluation scientifique fondée sur les risques.
L'autre point, lié à notre préférence pour l'expression «coûts raisonnables», concerne tout ce débat entre l'intérêt public et l'intérêt privé. L'inspection des aliments vise l'un et l'autre à la fois. Dans une certaine mesure, l'inspection des aliments protège l'intérêt public de tous les Canadiens en ce qu'elle assure la salubrité de leurs aliments; mais il ne fait aucun doute qu'une industrie ou une société en particulier en tire profit. Ce que nous disons, c'est qu'en incluant la notion de coûts raisonnables dans cette disposition, nous pourrions espérer que les coûts raisonnables attribués aux industries ou aux entreprises particulières viseraient la partie du service qui est à l'avantage de l'entreprise ou de l'industrie.
La disposition suivante sur laquelle nous attirons votre attention est formulée au paragraphe 26(11) qui porte sur les consultations. À notre avis, cette disposition nécessite davantage...
M. Easter: Il n'y a pas de paragraphe 26(11).
M. McGuinness: C'est vrai. Je crois qu'il s'agit du paragraphe 26(1). Merci bien.
En ce qui concerne le paragraphe 26(1), qui porte sur les consultations, nous estimons qu'il faut une structure plus officielle de fixation des prix. En gros, lorsque l'agence propose un prix, nous croyons que ce prix devrait faire l'objet d'une publication préalable dans partie I de la Gazette du Canada. À notre avis, le comité consultatif ou, comme nous le proposons, le conseil d'administration devrait être mandaté pour examiner les prix proposés. En outre, nous croyons que le vérificateur général du Canada devrait les examiner pour voir s'ils sont équitables pour le public et pour le secteur privé, tout comme il devrait examiner la rentabilité de la proposition de prix.
Le vice-président (M. McKinnon): À quel moment recommandez-vous que cela soit fait?
M. McGuinness: Eh bien, de façon générale, de la même façon que cela se fait pour une autre agence qui propose des prix. S'il s'agit d'un prix imposé pour une industrie en particulier, de toute évidence, l'agence elle-même devrait s'entretenir avec les associations qui représentent l'industrie, ses membres dirigeants et ainsi de suite. Mais une fois que ces discussions auront eu lieu et qu'on se sera entendu sur une proposition, à ce moment-là, la première chose à faire devrait être de la publier dans la partie I de la Gazette du Canada, parce que peu importe que l'association représente bien l'industrie, peu importe la qualité des conseils qu'elle obtient de ses membres dirigeants, lorsqu'une industrie comme la nôtre regroupe un millier d'usines individuelles, on trouve un millier de personnes qui estiment devoir être consultées sur les coûts qu'elles devront absorber.
Il faut répondre à cette demande. On ne peut pas le faire par écrit, on ne peut pas le faire physiquement, si bien que la partie I de la Gazette du Canada est probablement le seul outil dont nous disposions pour le faire, et ce, dès le début.
En ce qui concerne la partie I de la Gazette du Canada, je crois que le Canada a des obligations à l'échelle internationale. D'après ce que je crois comprendre, dans nos ententes relatives à l'Organisation du commerce mondial et à l'ALENA, le Canada a précisé que la partie I de la Gazette du Canada constituait le mécanisme officiel, si vous voulez, des consultations avec un tiers pays concernant tous les frais sur le point d'être imposés à l'égard de biens importés. Je pense donc que vous êtes tenus par la loi de faire référence à la partie I de la Gazette du Canada dans le document.
Quant à l'article 32 qui porte sur la vérification annuelle, le comité devrait vraiment s'y intéresser, parce qu'à notre avis, c'est peut-être l'endroit convenable pour traiter du mécanisme de poids et de contrepoids touchant le recouvrement des coûts, mécanisme que nous jugeons important. Je suis certain que tous les témoins qu'entendra le comité diront que cela est l'aspect le plus inquiétant de ce projet de loi.
Nous estimons que le vérificateur général devrait non seulement effectuer une vérification normale sur les problèmes dont il est question à l'article 32, mais nous recommandons d'ajouter deux nouveaux paragraphes, dont un prévoyant que le vérificateur général devrait en outre être tenu de fournir un rapport annuel sur la rentabilité des services offerts par l'agence.
Le deuxième paragraphe que nous estimons nécessaire porte sur la fixation des prix, à savoir que le vérificateur général devrait faire rapport sur trois aspects de ces prix: premièrement, le coût du service qui est offert, autrement dit le coût que doit engager l'agence pour offrir le service et pour lequel elle fixe un prix, ou demande l'augmentation des prix; deuxièmement, la répartition de ces coûts en pourcentage, c'est-à-dire quel pourcentage s'applique à l'intérêt public, et quel pourcentage vise l'intérêt privé, celui qui profite aux entreprises bénéficiaires de ces services pour la vente de leurs produits au Canada ou sur les marchés internationaux; troisièmement, nous croyons qu'il est particulièrement important que le vérificateur général fasse également rapport sur les coûts comparatifs du service dans d'autres pays.
Si l'on dispose de ce genre d'évaluations professionnelles concernant la tarification, évaluations faites par une tierce partie, je pense que le débat ne sera pas aussi acrimonieux que ceux auxquels on assiste souvent lorsque le gouvernement essaie d'imposer ou d'augmenter des prix.
Les deux dernières dispositions sur lesquelles nous attirons votre attention touchent davantage le système d'inspection du poisson. Premièrement, l'article 55. De façon générale, cette disposition vient abroger la possibilité d'avoir un mécanisme d'appel comme celui prévu dans la Loi sur l'inspection du poisson. Tout ce que nous disons, c'est que notre industrie s'oppose à l'article 55 si l'agence elle-même ne crée pas son propre processus d'appel.
Je dois avouer que nous avons passé le projet de loi en revue et n'avons pas trouvé de disposition permettant à l'agence elle-même d'élaborer ou d'officialiser un processus d'appel. Mais ce processus existe effectivement dans la Loi sur l'inspection du poisson. Nous croyons qu'il est absolument essentiel. Nous avons passé les trois dernières années à l'améliorer, et c'est une façon de réunir les efforts de l'industrie et du service d'inspection. S'il n'y a pas de système d'appel efficace, s'il n'y a pas de système d'appel auquel se fient le service d'inspection et l'industrie, cela va miner l'esprit de collaboration qui doit sous-tendre les efforts de tout le monde.
L'autre article est l'article 56 où l'on propose de donner aux inspecteurs du poisson des pouvoirs supplémentaires de saisie. Actuellement, les inspecteurs peuvent saisir le poisson et les contenants. L'article 56 laisse entendre qu'ils devraient également avoir la possibilité de saisir d'autres choses. Tout ce que nous disons, c'est que la loi doit renfermer un libellé qui vienne restreindre l'expression «d'autres choses» afin d'éviter que les inspecteurs n'adoptent des mesures punitives trop sévères. Comme vous pouvez le constater, nombre de nos entreprises sont des entreprises intégrées possédant des navires de pêche en haute mer, des usines et ainsi de suite. Élargir la portée de l'article 56 pour inclure «d'autres choses» sans limitation aucune, met en danger des actifs considérables, qui vont bien au-delà du poisson ou des fruits de mer dont il peut être question dans un problème d'inspection.
Autre point dont je veux saisir le comité au sujet de l'industrie de la pêche, c'est que nous sommes une industrie axée sur les ressources. Les décisions concernant la gestion des pêches touchent l'activité de nos usines, ainsi que la charge de travail des inspecteurs du poisson. L'attribution d'une ressource, la raison d'une pêche particulière, soit l'ouverture et sa fin, influent sur la qualité intrinsèque du poisson et sur des problèmes comme la décomposition.
Dans l'environnement actuel, où l'inspection des poissons relève de Pêches et Océans, le système d'inspection du poisson se trouve dans la boucle des consultations de gestion menées par Pêches et Océans, ainsi que des décisions qui sont prises. Avec la nouvelle agence, du fait que les inspecteurs du poisson ne relèveront plus de Pêches et Océans mais bien d'une agence indépendante qui fera rapport au ministre de l'Agriculture, les consultations et les décisions ne feront plus partie de cette boucle.
De toute évidence, le projet de loi ne touchera en rien l'industrie de l'agriculture. Celle-ci se trouve toujours en rapport avec une seule organisation. Elle a toujours affaire à une agence d'inspection qui fait rapport au ministre de l'Agriculture. Mais en ce qui concerne les pêches, cela nous paraît être un changement pour nous. C'est effectivement un changement pour nous. Nous croyons que le fait de créer cette nouvelle agence, de soustraire l'inspection du poisson au ministère des Pêches, de ne plus l'inclure dans les discussions concernant la gestion et les politiques des pêches, entraîne la nécessité de maintenir, comme nous le recommandons, un lien direct entre l'agence et Pêches et Océans.
Ici au Canada, dans l'industrie de la pêche et avec le Ministère, nous tentons d'adopter une approche intégrée, généralisée à l'égard de la politique et de la gestion des pêches. À ce titre, le ministère et le ministre des Pêches et des Océans ont besoin de l'apport du marché, de l'industrie et des inspecteurs afin de prendre les bonnes décisions permettant d'optimiser l'exploitation des ressources halieutiques canadiennes.
En résumé, deux problèmes importants se posent. Il nous faut un mécanisme de poids et de contrepoids pour le recouvrement des coûts et la fixation des prix. Nous avons présenté certaines suggestions, plus particulièrement en ce qui concerne l'article 32 et le vérificateur général. L'autre grande question est que nous sommes préoccupés de ce que nos inspecteurs du poisson ne seront plus dans le coup des décisions de gestion. Nous aimerions que l'agence soit structurée de façon que l'on puisse, si vous voulez, boucler la boucle, afin que nos inspecteurs, les représentants de l'industrie et ceux du ministère des Pêches et des Océans puissent contribuer à une prise de décisions adéquate concernant la gestion des pêches au Canada.
Je vous remercie beaucoup de votre patience.
Le vice-président (M. McKinnon): Merci beaucoup.
Je commence d'abord par M. Landry qui peut poser ses questions.
[Français]
M. Landry (Lotbinière): Je remercie les témoins qui ont comparu ce matin. J'ai plusieurs questions à leur intention.
Êtes-vous en mesure de me fournir les pourcentages relatifs à l'industrie de l'exportation et de l'importation?
J'ai cru comprendre que vous n'étiez pas à l'aise avec le paragraphe 10(2). Pourriez-vous m'expliquer plus en détail comment ce paragraphe 10(2) pourrait être amélioré afin de mieux servir vos intérêts?
Ce sont mes deux questions pour l'instant.
M. McGuinness: Merci beaucoup de ces questions.
Notre industrie exporte actuellement 94 p. 100 de sa production ici au Canada. Ce pourcentage est plus ou moins semblable pour chaque province. Au Québec, le pourcentage est presque le même, soit 84 p. 100.
[Traduction]
Pour ce qui est des autres provinces, la Colombie-Britannique se situe probablement autour de60 p. 100, et Terre-Neuve, probablement autour de 90 p. 100.
Quant aux importations, nous estimons que nos importations annuelles de poisson et de fruits de mer se situent aux alentours de 1,3 milliard de dollars, et je dirais qu'actuellement, la survie de l'industrie de la transformation dans la province de Québec est presque entièrement tributaire des importations. L'industrie a fait un travail fantastique en matière de poisson de fond en important de la morue et du poisson de fond de diverses régions du monde, des produits qu'on a importés dans la région de Gaspé pour les faire sécher et les saler. À l'aide de la méthode conçue là-bas, on a pu obtenir un prix important pour ces produits dans des pays comme l'Italie, la Grèce, ainsi de suite.
Comme je l'ai dit, ce qui est important, c'est que même si nous sommes un pays exportateur, beaucoup de nos intervenants et une large part de nos industriels sont aussi des importateurs; en ce sens, ce que nous voulons faire, c'est d'offrir au marché canadien - et au marché américain - une gamme complète de produits du poisson et de fruits de mer. Et comme vous pouvez le constater, vous avez une quantité limitée d'espèces dans vos propres eaux, si je puis dire.
En ce qui concerne le paragraphe 10(2), nous croyons que le gouvernement, le ministre et le président de l'agence devraient être un peu plus présents au cours du XXIe siècle. Ils ne devraient vraiment pas craindre de voir leurs activités et leur façon de les exercer examinées par un conseil d'administration. Si on crée, en fait, une agence privée, si ces gens doivent se targuer d'adopter une nouvelle approche à l'égard de l'inspection des aliments, et s'ils veulent se montrer plus réceptifs aux attentes du secteur privé, pourquoi ne pas intégrer dans le secteur privé une structure qui s'est avérée très avantageuse au cours des années? Voilà pourquoi nous réclamons la création d'un conseil d'administration qui examinera non seulement les questions que le ministre veut qu'il examine, mais qui étudiera aussi les activités et le rendement de certains cadres supérieurs quant à leurs capacités d'offrir des aliments salubres au Canada, de gérer et d'exploiter une organisation efficace, et de relever les défis en matière de ressources humaines que cette agence va devoir affronter, au Canada d'abord, puis à l'échelle internationale, à savoir l'appui qu'elle devra fournir aux activités internationales de l'industrie.
Nous recommandons donc que le paragraphe 10(2) soit structuré en fonction de la mise sur pied d'un conseil d'administration. Nous estimons que c'est là une lacune grave du projet de loi.
Merci beaucoup.
Le vice-président (M. McKinnon): Vous disposez encore d'une minute si vous voulez l'utiliser.
[Français]
M. Landry: On se propose actuellement de regrouper tous les inspecteurs des aliments et de remettre ce service fusionné au gouvernement. Je suis d'accord avec vous quant à la mise sur pied d'une structure comme un conseil privé grâce auquel on pourrait, à mon avis, réaliser des économies. Je sais très bien, ayant vu certains ministères ou autres instances qui ont confié des services à l'entreprise privée et ainsi économisé énormément, qu'il en coûtait beaucoup plus cher auparavant, lorsque leur administration était confiée au gouvernement. Je crois que votre structure d'un conseil privé serait la meilleure solution. Je vous avoue que j'ai beaucoup de difficultés à vivre avec le paragraphe 10(2) tel que rédigé.
Ce n'était qu'un commentaire que je soumettais. Si vous avez d'autres points de vue, je suis prêt à les entendre.
[Traduction]
Le vice-président (M. McKinnon): Monsieur McGuinness, pourriez-vous donner une réponse très brève, si ça ne vous dérange pas, après quoi nous passerons à M. Easter.
[Français]
M. McGuinness: Merci beaucoup de ces commentaires. Nous sommes d'accord sur votre suggestion et votre position. Merci beaucoup, monsieur.
[Traduction]
Le vice-président (M. McKinnon): M. Hermanson, suivi de M. Easter.
M. Hermanson: Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur McGuinness. Votre exposé était fort intéressant. Votre recherche est très bonne et je suis content des observations que vous avez faites.
Je suis d'accord avec vous à propos de tout ce que vous avez dit ce matin. À mon avis, vos commentaires concernant le conseil consultatif sont très pertinents. Je pense que vous avez visé en plein dans le mille quand vous avez dit que le gouvernement semble hésiter à faire confiance à l'industrie et au conseil, qu'il s'agisse d'un conseil consultatif ou d'un organisme semblable qu'il créerait pour surveiller et appuyer les mesures prises par l'industrie.
J'aimerais parler des trois responsabilités que vous avez proposé d'attribuer au vérificateur général dans vos remarques sur l'article 32. Vous avez dit que le vérificateur général devrait faire rapport sur la rentabilité et sur le coût du service. Vous avez dit ensuite qu'il devrait faire rapport sur la répartition des activités effectuées dans l'intérêt public et l'intérêt privé, et qu'il devrait également donner une analyse comparative des coûts du service dans d'autres pays. Je pense que ce sont là encore d'excellentes recommandations. J'aimerais savoir ce que vous pensez du pourcentage de répartition qu'il devrait y avoir entre les activités réalisées dans l'intérêt public et l'intérêt privé. Quels devraient être les objectifs de l'agence d'inspection à cet égard?
Si vous le pouvez, j'aimerais également que vous fassiez des commentaires sur l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire qui semble avoir besoin de lignes directrices comme celles-là aussi. C'est un cas parallèle à celui d'une agence unique d'inspection des aliments. C'est une agence qui a été créée par le gouvernement, mais qui semble beaucoup trop importante et qui semble également transférer des coûts énormes à l'industrie plutôt que d'essayer de les réduire.
Enfin, pour ce qui est du budget qui est proposé pour cette agence unique d'inspection des aliments, dites-nous si à votre avis ces coûts se comparent aux services qui sont offerts dans d'autres pays?
M. McGuinness: Je vous remercie beaucoup de vos trois excellentes questions. Malheureusement, je n'ai que des réponses élémentaires à au moins deux d'entre elles.
En ce qui concerne l'agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, malheureusement, je ne l'ai pas examinée, pas plus que notre industrie. Je m'en excuse, mais je n'ai aucun commentaire à faire là-dessus.
M. Hermanson: Je dirai simplement que cette agence mérite que vous vous y intéressiez en regard de celle dont il est ici question.
M. McGuinness: Merci beaucoup.
En ce qui concerne l'intérêt public et l'intérêt privé, c'est une question qui mijote, qui se développe et tout le monde a son opinion. L'industrie n'en est pas venue à extraire l'essentiel de ces opinions. Il y a certainement des personnes intelligentes au ministère des Pêches et à celui de l'Agriculture qui se sont penchées sur la question. Je ne pense pas qu'on va régler le problème simplement en demandant à l'industrie ou aux agences d'inspection d'en discuter.
Pour ce qui est de toute la question de l'intérêt public et de l'intérêt privé, je crois effectivement que l'on pourrait créer un forum sur la politique gouvernementale, une sorte de groupe de réflexion auquel on pourrait demander aux universitaires de participer, si vous voulez, pour y jouer un rôle. Le gros problème pour l'industrie au cours des trois dernières années, je crois, c'est ce mouvement vers le recouvrement des coûts. En fait, j'ai vu des statistiques disant qu'un projet de loi sur le recouvrement des coûts avait permis au gouvernement de percevoir des sommes équivalentes à celles qu'il retire de la TPS. C'est beaucoup, c'est un chiffre caché, dont on ne parle pas habituellement.
M. Hoeppner (Lisgar - Marquette): C'est ce que ça donne l'harmonisation.
M. McGuinness: C'est juste.
Mais il ne fait aucun doute qu'à l'égard de certains de ces problèmes, c'est donnant-donnant. C'est le cas lorsque les forces du marché interviennent. Mais dans des industries comme celles de la pêche et de l'agriculture, où les forces du marché n'interviennent pas et qui sont régies par des lois, on se dit qu'il faut aborder cette question de l'intérêt du secteur privé et du secteur public. Moi, ce que je suggère, c'est que l'on commence à voir cette question comme un problème de politique gouvernementale, un problème auquel les milieux universitaires pourraient s'intéresser et sur lequel ils pourraient faire leurs commentaires. Autrement dit, nous avons presque besoin de l'intervention d'une tierce partie pour trouver une solution à ce que l'on commence à percevoir comme une lutte entre l'industrie et le gouvernement.
Bien sûr, l'aspect de l'intérêt public en matière d'inspection des aliments est assez considérable. Tous les Canadiens estiment payer pas mal d'argent pour que l'industrie, tant au Canada qu'à l'étranger, soit soumise à des vérifications afin de s'assurer que les aliments qu'ils mangent soient salubres.
Donc, à notre avis, l'aspect intérêt public s'avère assez important dans le coût de l'inspection des aliments. Quant à savoir si le pourcentage se situe entre 10 ou 20 p. 100, nous estimons devoir engager des discussions vigoureuses, un débat rigoureux pour essayer de marquer des progrès à cet égard.
En ce qui concerne le budget de l'agence, notre plus grande préoccupation, comme je l'ai dit, c'est le recouvrement des coûts. Et le gros problème que nous éprouvons dans l'industrie de la pêche, c'est que, comme je l'ai précisé tout à l'heure, nous avons adopté un système d'analyse des risques HACCP selon lequel les inspecteurs du poisson vérifient nos usines, qui ont instauré un système obligatoire de sécurité et d'hygiène; en effet, les vérificateurs s'assurent que nous avons en place des points critiques de contrôle, que nous les surveillons, et que nous prenons les mesures correctives - de fait, que nos usines sont contrôlées et qu'elles assument au premier titre la responsabilité de produire des aliments salubres. Grâce à l'implantation de ce système, notre agence d'inspection du poisson a pu réduire son budget de 23 p. 100 depuis la mise en place du programme - soit une réduction de 23 p. 100 des coûts de l'inspection du poisson.
Si l'on regarde du côté de l'agriculture, les dépenses ont été réduites de 10 p. 100. Vous pouvez donc comprendre que l'on sente une force irrésistible se diriger sur nous. Nous craignons qu'une partie de la réduction des coûts qui doit se produire du côté de l'agriculture soit transférée aux pêches par le biais du recouvrement des coûts, nous craignons également devoir supporter une part inéquitable du fardeau des retards que connaît le domaine de l'agriculture en matière de recouvrement des coûts. C'est également pour cela que nous estimons avoir besoin de ces poids et contrepoids, de ce vérificateur qui est une tierce partie, lequel verra à l'équité du système, de sorte que si cela se produit, nous puissions nous adresser à un arbitre et lui dire que notre agence d'inspection du poisson a déjà réduit son budget de 23 p. 100.
Nous procédons déjà au recouvrement des coûts pour l'inspection du poisson. Nous ne voulons pas que notre fardeau s'alourdisse.
Bien sûr, nous croyons que le budget va diminuer au cours des années. Nous devrons surveiller ce qui se passe aux États-Unis et en Europe pour établir des comparaisons, et il est difficile de dire où ils en sont dans ce domaine. Nous sommes probablement conformes à ce qui se fait en Europe, mais là aussi on va vouloir restructurer les coûts de l'inspection des aliments, je pense. Les États-Unis adoptent déjà le système HACCP dans le domaine de l'agriculture, comme nous le faisons pour le poisson. Ils sont aussi en train de mettre en place, pour 1997, un programme obligatoire de HACCP pour le poisson.
Donc, le portrait global va changer, les cibles vont changer, et ce que nous disons, c'est que le vérificateur général devrait avoir la responsabilité de suivre ce mouvement de près. Nous croyons que le coût de l'inspection des aliments à l'échelle mondiale va diminuer au fur et à mesure que les gens se rendront compte que la responsabilité véritable de l'innocuité des aliments incombe aux entreprises de transformation de produits alimentaires, non pas nécessairement à l'inspecteur des aliments qui joue un rôle de policier. Ce système ne fonctionne pas. Nous savons qu'il ne fonctionne pas pour les pêches, et nous avons adopté un nouveau système.
Le vice-président (M. McKinnon): Monsieur Easter.
M. Easter: Merci, monsieur le président.
J'ai apprécié moi aussi votre exposé, sauf en ce qui concerne le paragraphe 10(2) au sujet duquel mon collègue Elwin semble être d'accord. Je ne suis absolument pas d'accord avec vous à propos de ce que vous avez dit concernant le conseil d'administration. Je pense qu'il faut se faire une idée quant à savoir si nous voulons des agences qui relèvent du secteur public ou du secteur privé. Je ne crois pas qu'on puisse mélanger les deux. Le Parti réformiste, et pas mal de gens également, estiment qu'il faut éviter que le gouvernement intervienne là où il n'a pas d'affaire. Je crois que les organismes contrôlés par le gouvernement sont notre dernier obstacle contre les forces du marché, et contre ce que les gens qui disposent d'une influence économique, voire politique, peuvent nous faire.
Comparez l'agence que nous examinons aujourd'hui à une agence du secteur public. Vous êtes vérifiés par le vérificateur général. Le ministre doit faire rapport au Parlement et toutes les parties se présentant devant des comités parlementaires peuvent poser des questions sur les activités de cette agence. Même si on suppose qu'il en est ainsi, on ne peut pas obtenir le même genre d'analyse et de critique constructives par l'entremise d'un conseil d'administration. Qu'est-ce qu'on sait de ce qui se passe chez Cargill Grain, McCain ou Irving? Très peu, en fait.
M. Hermanson: Et le Comité consultatif sur la commission du blé, lui?
M. Easter: La Commission canadienne du blé est vérifiée, et comme vous le savez, Elwin, les membres du Comité consultatif de la Commission du blé sont élus.
De toute façon, à ce sujet-là, je ne suis pas d'accord avec vous.
Pour ce qui est des éléments que vous avez soulevés au sujet de l'article 32, concernant le vérificateur général, je pencherais davantage pour un rapport annuel sur la rentabilité. Je pense que c'est là une bonne approche, parce que même beaucoup d'entre nous qui sommes présents ici aujourd'hui nous inquiétons au sujet du recouvrement des coûts et de ce que cela va amener, en fin de compte.
Les personnes qui sont en faveur du recouvrement des coûts vont parler de l'utilisateur-payeur, mais il y a une autre expression que j'aime bien utiliser de temps en temps, c'est celle du bénéficiaire-payeur. Je constate que dans mon industrie, à tout le moins - l'industrie de l'agriculture - l'on pourrait demander à l'agriculteur, tout comme au pêcheur et à l'entreprise de transformation du poisson, de payer pour un service que, oui, ce secteur particulier de l'industrie utilise, mais qui profite en réalité aux consommateurs. Qu'en pensez-vous?
Je me demande si vous pourriez donner quelques détails supplémentaires sur la façon dont le vérificateur général pourrait prendre des décisions concernant la rentabilité. Qu'en pensez-vous?
Le vice-président (M. McKinnon): Monsieur Easter, comme vous avez utilisé la moitié de votre temps pour poser votre question, nous allons permettre...
M. Easter: Bon, j'aimerais poser trois autres questions, monsieur le président.
Le vice-président (M. McKinnon): Oui.
Allez-y, monsieur.
M. McGuinness: Je vous remercie beaucoup de m'avoir posé cette question-là.
L'approche du bénéficiaire-payeur est une bonne façon de décrire ce que l'on entend par intérêt public et intérêt privé.
Pour ce qui est de la rentabilité, ce que le vérificateur général pourrait faire, c'est de voir non seulement comment le service est assuré dans d'autres pays et ce qu'il en coûte pour y offrir ce service, mais de voir également ce qui se fait au Canada. Il pourrait chercher à établir un point de référence ou une cible, il pourrait voir s'il y a dédoublement des services, si, dans certains secteurs, les activités des laboratoires ont été consolidées et si les gens ont profité des possibilités d'accréditer les laboratoires du secteur privé et ainsi de suite.
De toute évidence, la rentabilité va être une nouvelle question à examiner; mais le vérificateur pourrait également comparer les activités de l'agence aux bonnes pratiques commerciales en général, si de fait, l'agence devient une entreprise, et il pourrait essayer de tirer certaines conclusions en utilisant comme point de référence le coût des services offerts dans d'autres pays.
Tout compte fait, nous, du secteur de la transformation du poisson, voulons nous assurer que notre compétitivité à l'échelle internationale n'est pas indûment minée par les coûts de nos services d'inspection, lesquels sont plus élevés que ceux de nos concurrents à l'étranger. Si nous pouvons être rassurés à cet égard, c'est là notre premier critère.
Si nous pouvons faire la preuve de l'excellence de cette agence gouvernementale et de fait, offrir un meilleur service à un coût moindre que nos concurrents, nous respecterons alors les objectifs du Canada, parce que tout compte fait, nous sommes un pays exportateur. Cela devrait être l'un des objectifs de l'agence.
En ce qui concerne le paragraphe 10(2), comme je l'ai dit, nous proposons l'établissement d'un conseil d'administration, mais je crois que notre demande minimale vise à ce que si l'on établit plutôt un comité consultatif, ce comité ait à tout le moins la possibilité de dire que si une majorité de membres veulent examiner une question, son président puisse accepter et reconnaître que c'est là une question qui est pertinente et que le comité devrait examiner. D'après le libellé du projet de loi, le conseil consultatif n'a pas ce choix.
Alors oui, nous aimerions un conseil d'administration, mais même en gardant les choses à l'interne, comme vous dites, en tant qu'agence responsable, dotée d'un comité consultatif redevable au ministre, nous croyons que le libellé actuel est conforme à cette notion et qu'il pourrait nous convenir, mais nous estimons aussi qu'il a besoin d'être amélioré.
Le vice-président (M. McKinnon): C'est noté, monsieur, en ce qui concerne cet aspect.
M. Easter: Qu'en est-il du processus d'appel prévu par la Loi sur l'inspection du poisson...?
M. McGuinness: Ah, oui.
M. Easter: Je devrai voir ce qu'il en est.
Pouvez-vous nous donner un exemple de situations qui pourraient faire l'objet du processus d'appel et nous dire à quel rythme vous y avez eu recours?
Pour être honnête avec vous, je ne connais pas très bien ce processus. C'est intéressant, et s'il fonctionne bien en vertu de la Loi sur l'inspection du poisson, peut-être pourrions-nous songer à l'adopter ici. Mais donnez-nous quelques exemples de cas où il est utilisé.
M. McGuinness: Votre question est intéressante. En gros, comme je l'ai dit, nous avons un programme obligatoire de gestion de la qualité suivant lequel chaque usine est dotée de son propre système de gestion de la salubrité des aliments. On procède à des analyses des dangers pour repérer ceux qui existent dans l'usine, puis on établit un point critique; on s'assure que ce point critique est surveillé et qu'il est conforme aux règlements concernant l'inspection des aliments, et s'il y a un écart quelconque, il faut en faire rapport et prendre les mesures correctives nécessaires. Ensuite, les inspecteurs s'amènent et vérifient si l'entreprise gère bien son programme, ils font des observations, et ainsi de suite.
En fin de compte, l'usine elle-même est évaluée quant au contrôle qu'elle exerce. S'agit-il d'une usine A ou d'une usine excellente, d'une bonne usine, d'une usine satisfaisante ou d'une usine médiocre? Si vous gérez une usine excellente, c'est profitable pour vous, parce qu'alors, vous ne devrez faire signer qu'un certificat d'exportation sur dix par un inspecteur du poisson et des aliments; si votre usine n'est que satisfaisante, tous les certificats devront être signés.
Donc, l'important, c'est qu'il peut y avoir des écarts ou des désaccords quant à la façon dont les dirigeants de l'entreprise estiment qu'elle fonctionne, quant aux rapports qui sont prévus, et quant à la façon dont les inspecteurs l'évaluent; tout cela, bien sûr, a des répercussions économiques directes.
Et puis s'il y a désaccord, nous avons un système d'appel suivant lequel l'entreprise peut écrire au directeur régional de l'inspection et dire qu'elle n'est pas d'accord quant à l'évaluation de ses activités pour telle ou telle raison. Ensuite, l'appel est entendu.
Nous avons également inclus ceci au processus: lorsqu'on interjette appel, une décision est prise et on prépare une brève description du problème ainsi qu'un rapport sommaire de la décision. Grâce à un système de liaison, ces données sont transmises aux inspecteurs du poisson de tout le Canada et à l'industrie, et c'est à nous, si vous voulez, de régler ce problème et d'essayer de... que la décision ait été prise à Moncton, au Nouveau-Brunswick, qu'il s'agisse d'un cas particulier, elle a également des répercussions sur le système à Corner Brook, à Terre-Neuve.
Donc, ce que nous essayons de faire grâce à ce système d'appel, c'est de manifester une certaine transparence, mais aussi, et cela est très important, de nous assurer que dans tout le Canada, l'inspection du poisson et l'évaluation des usines, l'évaluation des écarts et la façon de les combler, tout cela relève d'une approche uniforme. Parce que l'un des véritables problèmes que nous éprouvons dans le domaine de la pêche, c'est que les usines de poisson de Terre-Neuve estiment que leurs inspecteurs sont plus sévères que ceux du poisson du Nouveau-Brunswick ou de la Colombie-Britannique, que tout le monde est de connivence et quoi encore.
Grâce à ce système d'appel, à cette transparence, du fait également que les inspecteurs du poisson ont en main des résultats qui sont également transmis sur une base confidentielle à l'industrie de la pêche, on vise d'abord à effacer ce mythe des rivalités entre les régions, et ensuite, parallèlement, cela nous tient informés de ce qui se passe et nous permet constamment d'améliorer notre système. Autrement dit, la décision finale était-elle la bonne décision ou non?
Le vice-président (M. McKinnon): Je vous remercie, monsieur.
Monsieur Hoeppner, vous êtes le prochain sur la liste.
M. Hoeppner: Merci, monsieur le président.
Ça été un plaisir d'entendre votre exposé, monsieur. Je suis d'accord avec vous sur beaucoup de points.
J'ai été vraiment étonné de vous entendre dire que nous importons pour 1,3 milliard de dollars de produits bruts. Est-ce que ces produits nous arrivent surgelés? Comment sont-ils importés?
M. McGuinness: Les importations totales s'élèvent à 1,3 milliard de dollars, ce qui inclut les produits à valeur ajoutée et toute la gamme des poissons et des fruits de mer que l'on retrouve dans les magasins au Canada. Une bonne partie de ce poisson importé, pas mal en fait, consiste en du poisson de fond surgelé, étêté et vidé, qui sera transformé dans la région de l'Atlantique ou du Pacifique car certaines de nos propres espèces connaissent un déclin.
Le total se chiffre donc à 1,3 milliard de dollars. Ce montant inclut, par exemple, les bâtonnets de poisson et les portions de poisson - toute la gamme des poissons et des fruits de mer.
M. Hoeppner: Vous n'avez pas de ventilation entre les produits bruts et les produits transformés.
M. McGuinness: Oui, j'en ai une, mais pas ici. Je peux vous la faire parvenir plus tard.
M. Hoeppner: Lorsque ces produits non transformés arrivent au Canada, j'imagine qu'ils ont été inspectés - ou devez-vous les inspecter à nouveau?
M. McGuinness: S'il s'agit d'un produit brut, si vous voulez, ou d'un produit surgelé qui est acheminé dans une usine pour y être transformé, et que cette usine a un programme obligatoire de gestion de la qualité, le produit n'a pas besoin d'être inspecté par Pêches et Océans. Le programme obligatoire prévoit notamment qu'une fois le produit amené à l'usine, il est identifié dans le système et on établit un point critique à cette étape. Il doit donc être inspecté par l'usine.
De sorte que notre système, cette vérification soit maintenant la responsabilité de l'usine, car cela fait partie de son programme obligatoire de gestion de la qualité. Si le produit est simplement importé par un importateur sans lien direct avec une usine, il est alors assujetti à une vérification aléatoire. Le ministère des Pêches et des Océans doit être avisé de l'importation - des frais de 50 $ sont prévus à cet effet - , puis on indique à l'importateur s'il doit conserver le produit aux fins d'inspection par Pêches et Océans ou s'il a l'autorisation de l'intégrer à sa chaîne de distribution.
M. Hoeppner: Je pense toujours au gros scandale du thon avarié, et à la façon dont cela a pu se produire. C'est ce qui m'a intéressé lorsque vous avez dit que l'on importait des produits entiers pour fins de transformation. Je suis sûr qu'il vous faut prendre toutes sortes de précautions pour ne pas avoir de produits avariés.
M. McGuinness: Bien sûr.
M. Hoeppner: Aussi, savez-vous à combien s'élèvent vos coûts d'inspection véritables comparativement aux frais d'exploitation? J'imagine que vous ne payez pas tous ces frais d'inspection, mais que vous allez le faire tôt ou tard.
M. McGuinness: En ce qui concerne les inspections effectuées par Pêches et Océans, je crois que le budget actuel se situe à 25 millions de dollars. Je crois que l'élément recouvrement des coûts se situe aux environs de 6 millions de dollars de plus. Donc, l'inspection du poisson au Canada coûte environ 31 millions de dollars, somme de laquelle nous payons, je crois, 6 millions de dollars.
M. Hoeppner: Donc, vous allez devoir en absorber encore une bonne partie si vous payez tous les frais d'utilisation.
M. McGuinness: Alors maintenant, vous comprenez notre inquiétude.
M. Hoeppner: Pouvez-vous assumer ces frais, je me demande, et demeurer concurrentiels?
M. McGuinness: Le problème, c'est que nous sommes passés du premier au cinquième rang des pays exportateurs. Nous sommes une industrie - les rapports financiers l'indiquent - marginalement rentable, voire peut-être pas du tout. L'industrie ne dispose pas actuellement de 25 millions de dollars de plus.
Mais comme nous sommes une industrie internationale, dans une large mesure, nos prix sont dictés par les marchés internationaux. Si l'inspection du poisson coûte 10 cents de plus, le marché ne va pas payer ces 10 cents. La seule façon de rester en vie et d'absorber cette augmentation, c'est de mettre en place une technologie nouvelle, de remplacer la main-d'oeuvre par des capitaux, ou d'autres choses comme cela.
Alors, oui, cela a un impact. Il faut toujours s'adapter, mais au fond, il faut essayer de survivre et de voir comment on peut absorber les 10 cents supplémentaires et obligatoires quand on n'a pas de marge bénéficiaire de 10 cents.
M. Hoeppner: Je me pose des questions au sujet de l'importation de produits bruts. Y a-t-il un rapport entre l'épuisement de nos stocks de poisson de fond et le fait que vous soyez obligés d'alimenter vos usines de transformation avec des produits importés? Est-ce qu'à votre avis, les choses vont changer si nos stocks de poisson de fond se renouvellent?
M. McGuinness: Certainement, plus particulièrement en ce qui concerne le poisson de fond et le saumon du Pacifique. Par suite du déclin des ressources halieutiques que nous avons connu, nos entreprises - qui ont toujours été des entreprises internationales, mais principalement des exportateurs internationaux - deviennent véritablement des entreprises internationales, en ce sens qu'elles importent des blocs surgelés de poisson de fond pour les transformer ensuite au Canada.
Mais au moment où nos stocks de poisson de fond recommenceront à augmenter, nous sommes convaincus que les choses vont se calmer. Il ne fait aucun doute qu'il est préférable d'acheter le poisson le plus près possible de la source de récolte pour des raisons intrinsèques de qualité et pour des raisons de salubrité alimentaire. La tendance va en ce sens.
Le problème qui s'est posé sur le marché, c'est que nous avons perdu une bonne quantité de notre morue, mais on trouve actuellement sur le marché de très bons substituts comme la goberge de l'Alaska et diverses formes de merluche, qui se vendent beaucoup moins cher. Nous approvisionnons maintenant les marchés mondiaux de ce produit. Quant à savoir si nous serons en mesure d'acheter des produits de la morue aux pêcheurs canadiens à un prix aussi bas, cela reste à voir. Donc la réduction dans ce genre d'approvisionnement ou d'importation ne sera pas aussi grande que...
Le vice-président (M. McKinnon): Monsieur Hoeppner.
M. Hoeppner: Est-ce que vous êtes également assujettis aux lignes directrices ou aux normes provinciales?
M. McGuinness: Non. C'est la grande différence entre notre industrie et celle de l'agriculture. Dans l'industrie de la pêche, en général, les entreprises se vouent à l'exportation. Soit que vous exportiez à l'extérieur de la province ou à l'extérieur du pays. À ce moment-là, vous tombez sous la responsabilité du gouvernement fédéral. Donc le rôle du gouvernement provincial dans l'industrie de la pêche et des fruits de mer, en ce qui touche les usines de transformation, l'inspection des aliments et ce genre de choses, est minime.
Le vice-président (M. McKinnon): Monsieur McGuinness, permettez-moi de vous dire qu'à mon avis, vous avez soulevé suffisamment de questions pour nous obliger peut-être à entendre de nouveau les responsables du Ministère et leur faire part de certaines préoccupations que vous avez mentionnées. Je vais en faire la suggestion aux membres du comité aujourd'hui.
Deuxièmement, je pense que vous avez soulevé des préoccupations très intéressantes en ce qui concerne l'intérêt public par opposition à l'intérêt privé. La prochaine fois que vous viendrez, j'aimerais entendre votre définition de l'intérêt public, mais nous manquons de temps aujourd'hui. Si vous voulez réfléchir à cette question et nous faire parvenir votre définition, peut-être même vos critères d'évaluation, cela nous ferait plaisir.
Je vous remercie beaucoup. Nous sommes tous d'accord que vous nous avez fait part d'une position très bien documentée et qui nous est profitable.
Nous allons prendre une pause d'une minute.
Le vice-président (M. McKinnon): Nous reprenons nos délibérations.
Au nom du comité, je suis heureux d'accueillir la directrice générale de l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture, Mme Sharon Ford.
Madame, nous devons quitter la salle à 11 heures, mais nous allons essayer d'entendre toutes les questions et d'abord, votre exposé.
Je demande à tout le monde d'être bref et concis dans ses questions, particulièrement M. Easter, qui est le membre de notre groupe qui pose les questions les plus longues.
Des voix: Oh, oh!
Le vice-président (M. McKinnon): Madame, je vous cède la parole.
Mme Sharon Ford (directrice générale, Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture): Merci, monsieur le président. Je vais essayer d'être brève.
Je vous remercie de m'avoir invitée ici ce matin. Je suis heureuse de pouvoir vous adresser la parole au nom de l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture au moment où vous étudiez le projet de loi C-60.
Malheureusement, je n'ai pas d'exemplaires de mes notes d'allocution ce matin, mais j'en ferai parvenir dans les deux langues officielles au greffier au cours des prochains jours et il pourra vous les distribuer.
Permettez-moi d'abord de vous donner un bref aperçu de l'industrie canadienne de l'aquaculture. Cette industrie a été largement commercialisée au Canada il y a moins de vingt ans et elle est maintenant présente dans toutes les provinces du Canada, de même qu'au Yukon. Parmi les espèces cultivées, mentionnons le saumon, la truite, l'omble, le tilapia, les huîtres, les moules, les palourdes et les pétoncles, et d'autres espèces nouvelles qui font l'objet de recherches.
Le secteur de l'aquaculture réunit des associations régionales de producteurs avec des associations nationales dans des secteurs de services comme la production d'engrais, les services vétérinaires et la recherche. L'AICA est la fédération nationale qui regroupe toutes ces organisations.
L'aquaculture offre de nombreux avantages aux Canadiens, le plus important étant la création d'emplois. En moins de 20 ans, plus de 5 200 personnes ont trouvé un emploi dans ce secteur dans tout le Canada, et 90 p. 100 de ces emplois sont offerts dans des régions rurales. Il s'agit d'emplois à temps plein, qui offrent du travail à longueur d'année, qui sont bien rémunérés et dont un grand nombre sont occupés par des jeunes, et ce, dans un secteur en pleine expansion.
La production du secteur se situe aux alentours de 300 millions de dollars et elle est appuyée par un secteur de services de valeur à peu près égale. Il s'agit d'un bien de production dont la valeur au Nouveau-Brunswick dépasse celle de la culture des pommes de terre, et en Colombie-Britannique, le secteur constitue le plus grand marché d'exportation agroalimentaire. C'est également un secteur durable, qui accroît la productivité de nos ressources aquatiques en fabriquant plus d'aliments dans un espace plus restreint que ce que nous avons pu faire jusqu'à maintenant.
Le secteur représente actuellement 17 p. 100 de la valeur au débarquement des fruits de mer au Canada; son activité se déploie sur moins de 1 p. 100 de nos côtes à l'exception de l'Arctique, et elle fait appel à moins de 1 p. 100 des dépenses de Pêches et Océans. Notre secteur contribue à l'activité des collectivités rurales. Il permet d'offrir des produits aux usines de poisson traditionnelles pour prolonger leur saison de transformation. Il constitue la masse critique nécessaire pour assurer la survie des petites collectivités, tout en offrant des possibilités d'affaires et une source d'approvisionnement en poisson pour les collectivités autochtones.
L'AICA appuie la création de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Le mandat de cette agence inclut non seulement la salubrité et l'inspection des aliments, mais également les programmes zoosanitaires et phytosanitaires.
Nous appuyons la création de l'agence pour les raisons suivantes. Nous croyons qu'elle permettra d'améliorer la sécurité alimentaire grâce à la mise en oeuvre du système HACCP au Canada, de la production des engrais jusqu'à la distribution aux consommateurs. Elle permettra une synergie dans les services grâce au partage de l'expertise dans le domaine de la sécurité alimentaire pour tous les groupements de production spécialisée. L'agence assurera également la prestation de services efficaces en matière d'inspection des aliments ainsi que d'inspection zoosanitaire et phytosanitaire.
Cependant, l'Alliance s'inquiète de voir que le projet de loi exclut deux services essentiels à la sécurité alimentaire et à l'hygiène animale dans notre entreprise. Le premier se rapporte aux programmes de surveillance des mollusques à des fins de sécurité alimentaire, et le deuxième, aux services d'inspection et de mise en quarantaine ainsi que de santé du poisson. Je vais d'abord vous décrire le programme de surveillance des mollusques.
Outre l'inspection des usines alimentaires, la salubrité des mollusques exige que le produit provienne d'eaux libres de biotoxines, de bactéries et d'autres contaminants. Le gouvernement fédéral dispose de deux mesures législatives pertinentes à cet égard. En vertu de la Loi sur l'inspection du poisson, il est illégal de transformer des mollusques qui n'ont pas été récoltés dans des eaux approuvées par le ministre. En vertu de la Loi sur les pêches, il existe un règlement sur la gestion des poissons contaminés qui prévoit les mécanismes nécessaires pour désigner ce que sont des eaux approuvées pour la sécurité des mollusques.
Le document de politique prévu par ce règlement s'intitule Programme canadien de contrôle de la salubrité des mollusques; il renferme des protocoles permettant d'effectuer des relevés hydrologiques et de classer les eaux d'élevage des mollusques, pour des fins tant hygiéniques que bactériennes ou pour y déceler des biotoxines. Le ministère des Pêches et des Océans est mandaté pour désigner les secteurs et interdire la pêche dans des secteurs fermés ou non approuvés, de façon permanente ou temporaire.
Le Programme canadien de contrôle de la salubrité des mollusques est actuellement administré par la Direction générale de l'inspection de Pêches et Océans et par Environnement Canada. Ce dernier est chargé d'effectuer les relevés bactériens et de classer les secteurs selon la qualité de l'eau en se fondant uniquement sur les niveaux de bactéries. Les secteurs touchés par ce programme doivent être vérifiés chaque année, ou aux trois ans au maximum, selon le niveau de risque.
Il s'agit d'un programme important pour l'industrie de l'aquaculture parce que si les secteurs ne sont pas classés et s'ils manquent leur année de relevé, ils sont automatiquement fermés pour la pêche aux mollusques. Pour être rouverts, ils doivent subir des tests pendant trois ans. Pour les industries de l'aquaculture, cela est très important parce que nos sites se situent dans un endroit bien précis. On ne peut pas décider tout simplement de changer de place.
Il est important de souligner que ces services précis de classification de la qualité de l'eau offerts par le ministère de l'Environnement n'ont rien à voir avec le mandat relatif à la protection de l'environnement. Bien que les fermetures puissent être causées par la pollution de l'environnement, c'est-à-dire par les eaux usées, le programme de la qualité de l'eau lui-même est étroitement lié à la protection de la sécurité alimentaire.
L'autre volet du programme de salubrité est le programme de surveillance des biotoxines mis en oeuvre par la Direction générale de l'inspection de Pêches et Océans. Les fermetures de secteurs attribuables à des niveaux élevés de biotoxines sont temporaires, et les secteurs sont rouverts lorsque les niveaux de biotoxines atteignent un niveau acceptable.
L'AICA croit comprendre que le programme de surveillance des biotoxines sera confié à l'agence d'inspection des aliments, de même que les autres services d'inspection du poisson de Pêches et Océans, et que la classification de la qualité de l'eau demeurera la responsabilité d'Environnement Canada. Nous craignons que cette division constante des services entraîne de l'inefficacité à long terme dans la prestation des services, au détriment de la production de l'industrie dans certains secteurs et de sa croissance dans tout le pays.
Déjà en 1996, la survie de certaines usines d'aquaculture a été menacée par le retrait de ces services, retrait découlant des compressions budgétaires imposées par le gouvernement. Le ministère a dû se battre pour trouver des façons d'économiser ou de travailler de concert avec l'industrie afin de concevoir des solutions de rechange réalistes. Bien qu'on ait trouvé des solutions à la onzième heure, il faudrait assurer à l'industrie qu'à l'avenir, ces services essentiels de sécurité alimentaire seront disponibles et qu'ils seront offerts de façon efficace, et à un prix qu'elle peut payer.
Industrie Canada et le Conseil du Trésor ont tenu récemment un atelier industrie-gouvernement sur les répercussions des règlements en matière d'aquaculture. On a fait ressortir les avantages, pour l'industrie, d'amalgamer les services de qualité de l'eau et de surveillance des biotoxines et de les confier à la nouvelle agence. Ils sont les suivants: meilleure coordination du programme de sécurité alimentaire, coûts de conformité moindres pour l'industrie, diminution des frais d'administration et de prestation des services pour le gouvernement et recouvrement éventuel des coûts réclamés à l'industrie.
L'avantage de confier ces activités à l'Agence canadienne d'inspection des aliments est que l'agence se verra chargée de l'ensemble des questions prioritaires relatives à la salubrité des aliments, ainsi que de la sécurité alimentaire et des programmes HACCP. Cela nous ramène à la notion de programmes HACCP, par laquelle on reconnaît que la sécurité alimentaire ne commence pas simplement dans l'usine de transformation, mais dans la production des engrais, sur la plage, ou dans l'eau.
Autre avantage: des liens plus étroits avec les autres questions relatives à la sécurité alimentaire, et des liens plus étroits avec une agence dont les principes d'exploitation visent à aider les entreprises à profiter des possibilités de production tout en préservant la sécurité des produits.
Pour ces raisons, nous estimons que les programmes de surveillance des mollusques - les deux programmes - devraient faire partie du mandat de la nouvelle agence.
Deuxième point qui nous préoccupe, les services d'inspection et de mise en quarantaine du poisson ont été omis. Dans le budget fédéral, on dit que tous les services d'inspection et de mise en quarantaine du poisson, ainsi que tous les services concernant l'hygiène des usines et la santé des animaux seront transférés à la nouvelle agence. Tel que cela se présente, tous les règlements concernant la santé des animaux et l'hygiène des usines, l'inspection et la mise en quarantaine seront inclus dans le mandat, sauf ceux touchant le poisson. Et la dernière fois qu'on a vérifié, les poissons étaient toujours des animaux.
Il faut noter cependant que la Loi sur la santé des animaux, qui sera appliquée par la nouvelle agence, ne définit pas le terme «animal» et, en tant que telle, par définition, inclut effectivement les poissons. Cependant, en vertu de la Loi sur les pêches, on a élaboré en 1977, un règlement distinct sur la protection de la santé des poissons pour rassurer ceux qui craignaient que les poissons relâchés des frayères ne risquent de propager des maladies chez les poissons sauvages.
Le règlement a été adopté au moment où l'industrie de l'aquaculture prenait naissance et par conséquent, contrairement à la Loi sur la santé des animaux, le règlement ne reflète pas les besoins des entreprises de pisciculture. À cette époque, la majorité des poissons provenaient de frayères publiques et servaient à la mise en valeur des stocks.
Le fait de confier ces services à l'agence permettra de nous assurer que la pisciculture est réglementée par une agence qui possède de l'expérience dans le domaine du contrôle des maladies agricoles et qu'elle a également une expérience quotidienne dans la gestion de problèmes semblables touchant d'autres secteurs de production agricole.
Cela facilitera également l'inclusion des animaux aquatiques dans les ententes futures sur les règlements internationaux concernant la santé des animaux qui seront négociées par la nouvelle agence. Le secteur de l'aquaculture aura en outre accès à un centre d'expertise dans le domaine de la gestion des risques, du contrôle et de l'assurance de la qualité et dans certaines techniques précises de diagnostic des maladies.
L'agence établira des fonctions réglementaires et scientifiques distinctes pour la gestion des maladies du poisson, la science constituant toujours une ressource dans l'élaboration des programmes de contrôle. Elle permettra également de rehausser l'intérêt pour les problèmes relatifs au poisson, au sein de l'agence et au coeur de ses programmes d'inspection alimentaire.
En outre, le fait de confier divers services à l'agence augmentera considérablement les ressources affectées au contrôle des maladies en cas d'urgence. Cela augmentera également la coordination fédérale-provinciale dans l'application des programmes de santé du poisson, car les communications sur les problèmes d'inspection liés au système canadien d'inspection des aliments seront très soutenues.
Cela facilitera également l'uniformité des programmes de contrôle des maladies dans toutes les industries de production animale et végétale. Enfin, cela facilitera l'uniformisation, à l'échelle nationale, dans la mise en oeuvre des programmes de contrôle des maladies animales, car nous aurons accès aux bureaux, laboratoires et points d'entrée reliés à la santé des animaux.
En résumé, ce que nous recommandons au comité permanent, c'est qu'il amende le projet de loi, plus particulièrement l'article 11, pour intégrer au mandat de l'agence tout le Programme canadien de contrôle de la salubrité des mollusques, y compris les relevés de biotoxines et la classification de la qualité de l'eau, ainsi que tous les règlements concernant la santé des poissons. Cela fera en sorte que les aquaculteurs puissent avoir les services et les outils nécessaires pour satisfaire aux mêmes normes élevées de sécurité que celles qu'on impose à la fabrication d'autres produits alimentaires.
Transférer les responsabilités permettra également au gouvernement de respecter son engagement à l'égard de la sécurité alimentaire et d'offrir des services améliorés et plus efficaces qu'avant à un coût moindre, tant pour le gouvernement que pour l'industrie.
Ce changement peut être effectué facilement à ce stade-ci et offrira des avantages constants pour le Canada et ses pisciculteurs.
Merci.
Le vice-président (M. McKinnon): Je vous remercie beaucoup.
D'abord M. Landry et ses questions.
[Français]
M. Landry: Merci, madame Ford, d'avoir comparu. Vous avez parlé de vos préoccupations concernant le programme de surveillance des mollusques et dit qu'il était régi par deux lois fédérales. J'avais cru comprendre qu'il s'agissait d'une loi provinciale et d'une loi fédérale, mais je vous ai bien entendu parler de deux lois fédérales.
J'aimerais que vous m'expliquiez un peu plus ces deux lois, puisqu'il me semble y avoir conflit ou dédoublement.
[Traduction]
Mme Ford: Si toutes ces questions semblent compliquées, je dois dire que ça m'a pris un peu de temps pour les démêler lorsque je suis arrivée à l'Alliance.
Je parlais précisément de deux mesures législatives fédérales. La première est la Loi sur l'inspection du poisson qui renferme une disposition rendant illégale toute transformation de mollusques qui n'ont pas été récoltés dans des eaux approuvées. La deuxième loi vient ensuite définir ce que l'on entend par des secteurs fermés; il s'agit de la Loi sur les pêches. Je crois que la raison pour laquelle on retrouve cette définition dans la Loi sur les pêches, c'est que cette mesure législative accorde au gouvernement le droit d'interdire la pêche dans certains secteurs. C'est en gros l'objectif de la Loi sur les pêches où l'on précise que dans certaines conditions, des secteurs seront fermés à la pêche. Donc, le règlement approprié est celui concernant la gestion du poisson contaminé.
Le document de politique intitulé Programme canadien de salubrité des mollusques décrit, quant à lui, pourquoi des secteurs peuvent être fermés et comment on effectue les tests pour déterminer si on peut y récolter des mollusques en toute sécurité. Le gouvernement provincial n'intervient, comme il le fait pour toutes les autres inspections alimentaires, que lorsqu'un produit est distribué à l'intérieur de la province.
[Français]
M. Landry: Il y a quelques années, des personnes sont décédées après avoir mangé des moules. Quelle loi s'appliquait à ce moment-là?
[Traduction]
Mme Ford: Il faut chercher la cause de la faille dans le système d'inspection alimentaire. C'est là une des raisons pour lesquelles nous aimerions voir confier toute l'administration à cet égard à la nouvelle agence.
Il faut déterminer si la faille s'est produite dans une procédure appliquée par l'usine de transformation ou si les moules ont été récoltées dans un secteur où elles n'auraient pas dû l'être. Ou bien, dans le cas des moules il y a quelques années, si certains relevés qui auraient dû être effectués ne l'ont pas été.
Pour vérifier la quantité de bactéries, toutes les eaux au Canada doivent être classées dans deux catégories, soit les secteurs ouverts ou fermés; mais pour les biotoxines - et je ne suis pas une spécialiste dans la prestation de services relatifs aux pêches - je pense que l'on adopte une approche basée sur les risques. On effectue des tests dans certains secteurs où l'on estime qu'il est possible ou probable que les biotoxines augmentent, mais actuellement, on ne fait pas de tests courants dans tous les secteurs pour y déceler des biotoxines.
Donc, cela pourrait être pour l'une ou l'autre de ces trois raisons, je suppose. Nous aimerions que toutes ces considérations soient réunies et qu'on en confie la gestion à une agence unique.
Le vice-président (M. McKinnon): Avez-vous d'autres questions, monsieur Landry?
[Français]
M. Landry: Vous avez parlé de l'article 11. Pourriez-vous nous dire brièvement quels éléments et quel libellé vous souhaiteriez y inclure?
[Traduction]
Mme Ford: J'aimerais que l'agence soit responsable de l'administration et de l'application du Programme canadien de salubrité des mollusques et du Règlement sur la protection de la santé des poissons. Idéalement, à long terme, nous aimerions que ce règlement découle de la Loi sur la santé des animaux parce que cela éliminerait les dédoublements entre les deux lois. Mais pour les fins de cette agence, c'est ce que nous aimerions.
[Français]
M. Landry: Merci, madame Ford.
[Traduction]
Le vice-président (M. McKinnon): Monsieur Hoeppner.
M. Hoeppner: Madame Ford, je vous souhaite la bienvenue.
Quand on parle d'aquaculture, c'est bien de pisciculture dont on parle?
Mme Ford: Oui.
M. Hoeppner: Pouvez-vous me dire quel pourcentage de cette pisciculture se fait en eau douce et quel pourcentage se fait en eau salée, et quelle est la différence?
Mme Ford: Environ 80 à 85 p. 100 de la pisciculture se fait en eau salée; le reste se fait en eau douce, on y cultive de la truite ainsi que de nouvelles espèces comme le tilapia et l'omble, que l'on retrouve de plus en plus. Si vous voulez, je peux vous donner une ventilation détaillée.
M. Hoeppner: J'aimerais poser une autre question à ce sujet. Vous parlez de la contamination de l'eau. Est-ce que vous parlez de la contamination de l'eau salée dans la majorité des cas, ou de l'eau douce?
Mme Ford: La question de la qualité de l'eau concerne les mollusques. Au Canada, les mollusques sont produits seulement dans les océans, donc il s'agit strictement d'une question d'eau de mer.
M. Hoeppner: Donc d'eau salée?
Mme Ford: Oui.
M. Hoeppner: Donc si je comprends bien, si on trouve de l'eau contaminée, cela veut dire que quelqu'un n'a pas fait son travail. C'est soit Environnement Canada, soit Pêches et Océans. Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour inciter ces gens-là à faire leur travail?
Mme Ford: Voilà un problème important pour notre association, en réalité, soit la contamination des eaux d'élevage par les eaux usées et la propagation de cette contamination. Nous espérons que l'un des avantages de confier les programmes de surveillance des mollusques à cette agence serait que, dans le cadre du système canadien d'inspection des aliments présentement appliqué, les mesures fédérales-provinciales visant à harmoniser les règlements fédéraux et provinciaux deviendraient prioritaires. Actuellement, il y a peut-être dix-sept questions pour lesquelles le fédéral et les provinces pourraient jouer un rôle commun. Nous aimerions que leurs représentants s'attaquent au problème de la contamination par les eaux usées parce que cela a effectivement des répercussions sur la sécurité alimentaire et sur notre capacité de produire des aliments au Canada.
M. Hoeppner: Je me demande comment il est possible d'avoir une industrie de la pêche ou un secteur de l'aquaculture en eau salée qui fonctionnent bien s'il ne peut y avoir harmonisation ou entente entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Il me semble que c'est ici que le problème se pose. Il y a conflit parce que le développement est de compétence provinciale, probablement, et que les provinces aimeraient en faire le plus possible, mais cela contamine aussi les eaux.
J'aimerais poser une autre question liée à cet enjeu. Si les eaux usées ont des répercussions néfastes sur l'aquaculture et l'industrie du poisson d'eau salée, ne touchent-elles pas également le poisson de fond?
Mme Ford: En ce qui concerne le premier point que vous avez soulevé, même si la contamination par les eaux usées est une préoccupation pour l'industrie, je tiens à souligner qu'au Canada nous sommes très chanceux d'avoir des milles et des milles de côtes qui sont..
M. Hoeppner: Non habitées.
Mme Ford: Les eaux usées y sont contrôlées, ou encore, il s'y trouve peu de population. Même si c'est un problème dans certains des meilleurs secteurs d'élevage, nous avons des milles et des milles de côtes.
Il faut effectuer des relevés sur les côtes peu importe que l'on y ait retrouvé ou non de la contamination dans le passé. C'est un programme courant. Pour qu'ils restent ouverts, les secteurs doivent être soumis à un relevé au moins une fois tous les trois ans. Cela aussi, c'est important.
Je m'excuse, votre dernier point, c'était...?
M. Hoeppner: Que les eaux usées ont probablement des répercussions sur le poisson de fond.
Mme Ford: Ah oui. Les mollusques sont en quelque sorte uniques en ce sens qu'ils filtrent l'eau et qu'ils absorbent la contamination, ce que le poisson de fond, le saumon et d'autres espèces ne font pas. Donc le danger n'est pas le même. En outre, le poisson peut être au large des côtes. Même si en général, la contamination n'affecte que la peau du poisson, et que le problème se retrouve probablement dans des secteurs très contaminés, cela peut être un problème pour l'aileron aussi. En général, ce n'est pas le cas.
M. Hoeppner: Quand le programme de recouvrement des coûts sera en vigueur, si Environnement Canada et Pêches et Océans ne font pas leur travail et que vous êtes obligés d'absorber les coûts liés à l'approbation de vos eaux par les organismes gouvernementaux, vous allez devoir absorber un coût énorme. Êtes-vous prêts à le faire?
Mme Ford: Oui, c'est un coût pour nous. Et nous allons travailler activement... nous avons déjà des programmes d'intendance communautaires pour prévenir l'augmentation de la pollution par les eaux usées. C'est une préoccupation. C'est un coût qui s'ajoute. Nous aimerions bien que le problème soit réglé.
M. Hoeppner: Merci beaucoup.
Le vice-président (M. McKinnon): Monsieur Easter.
M. Easter: Je tiens simplement à signaler à M. Hoeppner que ce n'est pas seulement au ministère de l'Environnement et au ministère des Pêches et des Océans qu'il y a un problème. On ne peut pas les blâmer de tout. Par exemple, à l'Île-du-Prince-Édouard, le programme des infrastructures a été vraiment avantageux, en ce sens qu'il a permis de nettoyer certains ports. Il y a donc d'autres choses à faire. Maintenant, nous avons certains ports où l'on peut s'adonner à la pisciculture, ce qui ne pouvait pas se faire avant parce que nous avions besoin d'autres programmes pour nettoyer ces eaux.
Madame Ford, je vous souhaite la bienvenue. À mon point de vue, l'industrie de l'aquaculture est probablement l'une des industries canadiennes qui a le plus de potentiel, sinon le plus. Si vous regardez ce qui se fait au Chili actuellement et dans d'autres pays du monde... Le Canada a des quantités énormes d'eaux intérieures et d'eaux littorales où cette industrie peut prendre de l'expansion. Et le projet de loi que nous étudions nous permet certainement d'avancer, mais depuis longtemps, je suis préoccupé par la question de l'organisme auquel on a confié la responsabilité de l'aquaculture. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. À mon avis, l'aquaculture n'a pas sa place au ministère des Pêches et Océans parce que, en réalité, l'industrie de l'aquaculture, c'est la pisciculture. Le règlement concernant les pêches et les océans vise l'habitat dans les mers et le poisson sauvage, alors que la pisciculture est en réalité concentrée sur la culture, un peu comme la production de volaille.
Des voix: Oh, oh!
M. Easter: On se préoccupe d'engrais, de dossiers, de nutrition, de santé, etc.
Je me demande si ce qui vous préoccupe dans la loi et dans ce projet de loi, c'est ce que l'on n'a pas prévu en ce qui a trait au transfert de certains services, aux lois touchant la quarantaine et la santé du poisson, à la surveillance des mollusques, etc. Pourrait-on régler le problème en retirant la responsabilité de l'aquaculture à Pêches et Océans pour la confier au ministère de l'Agriculture. Que pensez-vous de tout ce scénario? Je ne veux pas que le ministère des Pêches et des Océans vous en veuille, mais...
Mme Ford: Vous me mettez sur la sellette.
Effectivement, nous considérons que l'aquaculture, c'est la pisciculture, et nous y voyons des liens étroits avec les services offerts par Agriculture Canada aux collectivités agricoles. Nous reconnaissons également qu'il y a quelques années, les autorités ont décidé que parce que nous cultivions du poisson, nous étions plus liés aux pêches qu'à l'agriculture, ce qui explique pourquoi notre mandat relève de Pêches et Océans actuellement.
Mais nous sommes inquiets. Le Ministère a beaucoup de difficulté à tenir les engagements énoncés dans la Stratégie fédérale de développement de l'aquaculture annoncée il y a un an.
Nous ne sommes pas tellement préoccupés par les questions de compétence mais bien plutôt par les mesures et les services dont nous avons besoin. Cela fait en sorte de rendre la question difficile. Oui, si l'on veut que notre industrie exploite son plein potentiel, nous avons effectivement besoin d'avoir accès aux mêmes services et aux mêmes outils de gestion que les agriculteurs ont la chance d'avoir et qu'ils tiennent pour acquis depuis un certain nombre d'années. Comment on y arrivera exactement... nous laissons au gouvernement le soin de décider. Mais oui, il nous faut avoir accès à ces services.
M. Easter: Parfois, l'herbe est plus verte chez le voisin, vous savez. Il y a certains agriculteurs comme moi qui ne sont pas du tout satisfaits d'Agriculture Canada ni de ses services.
Une voix: Quels services?
M. Hoeppner: Je me demande qui?
M. Easter: Certainement pas moi, Jake.
Maintenant, en ce qui concerne les coûts, ceux qu'Environnement Canada doit engager tous les trois ans pour effectuer les tests, c'est lui qui les assume. Le projet de loi n'en fait nullement mention, mais peut-être devrait-il en être autrement. Nous pouvons examiner la question. Mais qui va absorber ces coûts? Qui les absorbe actuellement? Y a-t-il un programme de recouvrement des coûts pour l'industrie de l'agriculture dans ce domaine? Est-ce que ces coûts sont assumés par Pêches et Océans, ou tout simplement, comment sont-ils recouvrés?
Ma dernière question est la suivante: y a-t-il dédoublement des services actuellement? En ce qui concerne les tests effectués dans les eaux, il y a en gros trois secteurs. Est-ce possible, par exemple, qu'à partir d'un port donné, Environnement Canada fasse une vérification des toxines, Pêches et Océans mène une vérification dans ses secteurs de responsabilité et disons un ministère provincial des Pêches fasse une vérification quelconque? Est-il possible que trois navires quittent le port en même temps et que l'on vous facture les trois services?
Mme Ford: Je vais commencer par la dernière question. Oui, cette situation s'est déjà produite. C'est ce qui nous préoccupe parce que les services sont séparés entre deux ministères, dotés chacun de leur propre budget, de fait, mais qui appliquent des programmes rigoureux de recouvrement des coûts. Comme je l'ai dit tout à l'heure, les services ont été menacés. En général, on nous a dit que dans certains secteurs, comme il n'y avait pas d'argent prévu dans le budget, le gouvernement n'offrirait pas les services essentiels, et que nous devrions...
C'est une question difficile. Il ne s'agit pas de recouvrement des coûts en tant que tel parce que les ministères ne disposent pas des pouvoirs législatifs leur permettant de recouvrer les coûts. Mais l'industrie doit absorber les coûts de certains services à la dernière minute afin de pouvoir poursuivre son exploitation.
À notre avis, le fait de ramener ces services et de les confier à une seule autorité évitera la situation qui s'est produite l'été dernier à l'Île-du-Prince-Édouard où trois navires ont quitté le même port, chacun après avoir procédé à un échantillonnage de la qualité de l'eau, chacun s'occupant de la sécurité des mollusques. À notre avis, ce genre de dédoublement est inutile et n'est pas seulement néfaste pour les budgets du gouvernement, mais pour l'industrie quand vient le temps de recouvrer des coûts.
Le vice-président (M. McKinnon): Les tests sont nécessaires, mais la façon dont on les fait ne l'est pas.
Mme Ford: Oui, c'est exact. Nous ne voudrions pas que les tests cessent. Nous estimons que c'est une partie extrêmement importante de la sécurité alimentaire.
Le vice-président (M. McKinnon): Je n'ai qu'une autre personne sur ma liste, et c'estM. Calder.
Je vais revenir à vous, monsieur Hoeppner, après M. Calder.
M. Calder (Wellington - Grey - Dufferin - Simcoe): Merci beaucoup, monsieur le président.
Madame Ford, j'ai eu la chance cette année d'aller au Nouveau-Brunswick et d'examiner le secteur de l'aquaculture parce que cela m'intéressait beaucoup. Je ne le connaissais pas bien de sorte que j'ai voulu en apprendre davantage. En ce qui concerne ce que M. Easter a dit, moi qui suis producteur de volaille, je sais ce que c'est que d'avoir beaucoup d'animaux dans un petit espace et je connais les problèmes de maladies et ainsi de suite.
Dans les piscicultures que j'ai visitées, j'ai constaté qu'on utilisait le rayon ultraviolet pour purifier l'eau... Elle est oxygénée, etc. Les poissons vivent dans un milieu absolument stérile. J'ai vu des réservoirs de 40 ou 80 pieds contenir de 500 000 à un million de poissons. Et c'est là, probablement, comme vous dites, qu'il y a des problèmes du fait que l'inspection alimentaire est confiée à un ministère, et l'inspection de l'eau à un autre.
Est-ce qu'il y a un problème lorsque vous sortez le poisson de ce milieu contrôlé et que vous le confiez à nouveau à Dame nature? Manifestement, ces poissons n'ont été confrontés à aucune maladie ou à rien d'autre de ce genre? Est-ce que pour votre industrie, c'est un problème?
Mme Ford: Ça peut être un problème en ce sens que les poissons sauvages sont une source de maladie pour les poissons produits par la pisciculture. D'après notre expérience, qui est semblable à celle de l'agriculture, de bonnes pratiques de gestion agricole peuvent minimiser les pertes dues à la maladie. Nous recourons effectivement à des choses comme la vaccination contre les maladies qui sont connues comme endémiques dans les eaux avoisinantes.
Donc, la vaccination contre les maladies très inquiétantes s'est avérée fort efficace, et nous cherchons toujours à trouver d'autres vaccins.
M. Calder: C'est probablement là une de vos plus grandes préoccupations, alors, le fait que l'inspection alimentaire et l'inspection de l'eau soient effectuées par deux ministères différents. Dans votre situation, vous voudriez que les deux ne soient confiées qu'à un ministère où les gens communiqueraient entre eux tout le temps. Cela permettrait probablement de régler le problème.
Mme Ford: Exactement.
M. Calder: Très bien.
Je vois que votre industrie a un avenir très reluisant. En l'an 2020, nous allons devoir nourrir8 milliards de personnes. Dans mon industrie, notre indice de conversion est de 1,8 ou 1,9 pour 1, alors que le vôtre est 1,2 pour 1. M. Easter, avec son bétail, serait très heureux d'avoir un tel indice de conversion.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Le vice-président (M. McKinnon): Monsieur Hoeppner.
M. Hoeppner: Merci, monsieur le président.
Madame Ford, je suis allé à l'Île-du-Prince-Édouard une fois, et j'ai vu la taille de vos installations. Ne croyez-vous pas que l'on pourrait réduire considérablement nos frais relatifs au recouvrement des coûts en éliminant trois de ces postes de député pour en avoir un au lieu de quatre?
Des voix: Oh, oh!
Le vice-président (M. McKinnon): Rien d'autre, monsieur Hoeppner?
M. Hoeppner: Non, c'est à peu près tout ce que j'ai à dire.
Le vice-président (M. McKinnon): Eh bien, vous en êtes maintenant rendu au recouvrement politique, monsieur Easter.
Madame Ford, vous avez parlé tout à l'heure de solutions de la onzième heure. Je me demandais quelles étaient ces solutions. S'agissait-il de la qualité de l'eau? De l'évaluation des bactéries?
Mme Ford: Ça s'est passé sur la côte ouest de l'île de Vancouver cette année. Pêches et Océans et Environnement Canada se sont adressés séparément à l'industrie pour demander que l'on adopte des mesures de recouvrement des coûts à l'égard de leurs programmes visant la qualité de l'eau. Ce n'était pas exactement du recouvrement des coûts, car, comme je l'ai dit, ils n'avaient pas véritablement le mandat ou le mécanisme nécessaire pour effectuer le recouvrement des coûts. Tout ce qu'on nous a dit, c'est que si l'on ne payait pas pour ces services, on ne les aurait pas, et qu'on ne pourrait pas vendre nos mollusques.
Ça, c'est ce qui s'est passé sur la côte ouest. Le problème s'est posé avec les deux ministères en même temps. L'industrie a été forcée de conclure des ententes avec chaque ministère. Cela a pris beaucoup de notre temps et beaucoup du leur. Nous avons dû trouver deux solutions différentes pour régler fondamentalement le même problème de sécurité alimentaire.
Le vice-président (M. McKinnon): Comme M. Hoeppner et moi sommes ici les plus proches de la côte ouest, on nous fait part du problème des eaux usées dans les municipalités côtières, de l'absence de traitement des eaux usées, dans certaines collectivités là-bas. Comme les villes prennent de l'expansion sur la côte ouest, plus particulièrement dans le lower mainland, est-ce que cela a eu un impact sur la viabilité du secteur de l'aquaculture?
Mme Ford: Le problème n'est pas tellement préoccupant dans le lower mainland, où on ne fait pas de production depuis un certain temps maintenant, mais sur l'île de Vancouver où on trouvait des secteurs d'eau propre avant et des secteurs ouverts. Maintenant, les projets domiciliaires de plus en plus envahissants le long de la côte et le fait que les gens transforment leur chalet en résidence habitable à longueur d'année ont créé des problèmes de pollution attribuables aux eaux usées dans certaines régions. Ça devient préoccupant. Certaines de nos entreprises vont peut-être devoir s'installer ailleurs à un moment donné si nous ne trouvons pas de solution à ce problème.
Le vice-président (M. McKinnon): Le problème repose surtout sur la collecte des eaux usées, n'est-ce pas, dans ces collectivités très peu peuplées mais géographiquement étendues de l'île de Vancouver.
Mme Ford: Ces collectivités ne sont plus tellement isolées. Les choses changent rapidement. Mais oui, nous croyons qu'il y a des solutions à ce problème. Il faut susciter la volonté de le régler. Comme je l'ai dit tout à l'heure, des membres de notre industrie participent activement à des programmes d'intendance pour tenter de régler le problème de la pollution des eaux usées dans certaines régions clés.
Le vice-président (M. McKinnon): Très bien.
Monsieur Easter.
M. Easter: En ce qui a trait aux services essentiels au secteur de l'aquaculture, à votre avis, comment pourrait-on régler le problème? À l'Île-du-Prince-Édouard, en ce qui concerne Pêches et Océans, je connais des cas où l'industrie a accepté volontairement de payer certains des coûts - non pas de se soumettre au recouvrement des coûts, mais de payer certains frais afin de préserver certains services. Il y a deux ans, je pense qu'à cause des restrictions au ministère des Pêches et des Océans, 261 piscicultures n'ont pu faire renouveler leur permis; elles n'ont donc pas pu être exploitées. C'était ridicule. On a réalisé une économie d'environ 70 000 $ pour le personnel qui aurait pu être affecté à ce travail et les pertes potentielles pour la production de l'industrie ont été de 1,8 million de dollars. Le problème a été réglé cette année, mais nous avons perdu une année de production. Tout ce qu'il suffisait de faire, c'était d'aller effectuer les relevés sur les sites. Mais en ce qui concerne la santé des poissons, comme vous le dites, si on n'examine pas la qualité de l'eau et qu'on risque de perdre trois années de production, alors là on a un véritable problème.
Est-ce que vous avez des suggestions...? Les contrôleurs du trafic aérien, par exemple, on ne leur permet pas de faire la grève. C'est ce genre de choses-là. Comment pouvons-nous nous assurer que des organismes gouvernementaux assurent des services essentiels?
Mme Ford: Je vais vous donner simplement le point de vue du secteur de l'aquaculture. Je crois que l'agence principale responsable de l'aquaculture doit avoir un mandat économique clair. Autrement dit, son mandat doit dépasser les seuls aspects de la conservation et de la protection du poisson. Elle doit convenir qu'elle a la responsabilité d'appuyer les entreprises et de leur fournir les services dont elles ont besoin pour leur exploitation. Il s'agit d'un engagement à l'égard du développement économique ou d'une activité économique. À notre avis, Agriculture Canada dispose de ce mandat en vertu des lois sur l'agriculture. Nous croyons que les choses sont moins claires avec Pêches et Océans.
Mais comment rendre les ministères responsables? Voilà une question bien fondée, je crois. Nous allons présenter un exposé sur la Loi sur les pêches. Cela nous permettra d'aborder cette question, dans une certaine mesure, lorsque le comité siégera pour étudier cette loi.
Le vice-président (M. McKinnon): Comme il n'y a plus d'autres questions, j'aimerais vous remercier, madame Ford, de votre exposé et votre évaluation raffinée de la coopération possible entre le gouvernement et l'industrie. Je pense que vous avez très bien résumé cet aspect dans vos observations de clôture. Merci beaucoup.
La séance est levée.